
Université Mohammed V - Agdal
Faculté des Lettres et des Sciences
Humaines
Département de Géographie - Equipe de
Recherche sur la Région et la Régionalisation
Le phénomène d'acquisition des anciennes
demeures par les étrangers : Un processus de mise en tourisme de
la médina de Fès ?
Mémoire de fin d'études pour l'obtention
du Master recherche en
« Aménagement, Développement et
Gestion des Territoires -- ADEGEST »
Promotion: 2006-2008
Réalisé par
Widad-Jodie BAKHELLA
Sous la direction du professeur Mohamed
BERRIANE
Projet TEMPUS JEP_32022_2004 - Université Mohammed V -
Agdal, Université François Rabelais - Tours, Université
Ca Foscari - Venise, DAT et Enda Maghreb
Travail réalisé au sein du laboratoire de
la E3R Faculté des Lettres et des Sciences Humaines
2
Le phénomène d'acquisition des anciennes
demeures par les étrangers : Un processus de mise en tourisme de
la médina de Fès ?
4
Remerciements
Mes remerciements vont à toutes les personnes qui,
à un moment ou à un autre de cette recherche, ont facilité
ou enrichi mon travail, en particulier M. Berriane, mon directeur de recherche,
dont la disponibilité, le soutien et les conseils m'ont
été d'une aide précieuse. Mais aussi à tout le
corps professoral et administratif du Master ADEGEST-recherche.
Je voudrais également remercier vivement les
personnes-ressources dans les différentes administrations à
Fès et qui m'ont été d'une grande aide et assistance et
ont contribué à l'enrichissement de ce travail de recherche. Je
nome ici M. Dahbi, M. Ez.zaânta, M. Ouadghiri, M. Raftani, M.
Baâli, M. Hachmioui et Omar de la collectivité Lamtèyene,
ainsi que les moqadems et les caïds des différentes
collectivités de la médina notamment M. Ritou et M. Khadir pour
leur intérêt et leur aide précieuse.
Je voudrais nommer aussi les nouveaux habitants
étrangers en médina de Fès de m'avoir reçu et
aidé dans mes investigations de terrain. Merci à Cécile,
Michael, Favard Gaëtan, Helen Ranger, David Amster, Pauline et Moller.
Un grand merci, pour finir, à toutes les personnes
ayant contribué de près ou de loin à la réalisation
de cet humble travail.
Dédicace
5
Je dédie ce mémoire de Jtlaster
d'abord à mes parents, ma saur et mon frère .Aman qui m'a
particuCièrement soutenu tout au Cong de ce travaiC~
Je Ce dédie égaCement à tous
mes amis, spéciaCement à Youssef et Chakib, je ne sais pas
comment je m'en serais sortie sans votre aide, vous êtes adorabCes
!
6
Préface
Ce travail est le fruit d'un stage de recherche qui s'inscrit
dans le cadre d'un Master en Aménagement, Développement local et
Gestion des Territoires et qui conclut un parcours de deux ans
d'études.
Durant ce stage, nous avons dû faire face à
plusieurs contraintes et limites. La première est une contrainte
liée à la difficulté du terrain de l'étude, qui
correspond à l'ancienne médina de Fès, pour son
immensité, sa densité, l'enchevêtrement de ces ruelles et
ses impasses grouillantes qui en font un véritable labyrinthe. Ceci a
des fois freiné mon accès à certains quartiers.
La deuxième contrainte est celle de la durée du
stage et qui ne permet pas de cerner tous les aspects liés au sujet et
limite ainsi les résultats obtenus. D'autant plus qu'il a fallu une
période d'accommodation et de découverte des lieux qui nous
étaient totalement inconnus.
La troisième contrainte est liée à
l'absence des enquêtés, étrangers propriétaires de
logements en médina, durant la période qui a coïncidé
avec nos investigations de terrain. En effet, ceci nous a été
confirmé par différentes personnes-ressources qui ont
estimé le nombre d'étrangers présents sur place à
10% uniquement du nombre total. Et ce pour deux raisons, la première est
due au fait que la majorité des étrangers achètent des
maisons qu'ils laissent vides, et la deuxième est due au fait que la
période du stage a coïncidé avec celle des vacances
d'été.
En dépit de toutes ces contraintes, nous avons
essayé de surpasser ces limites et de fournir tous les efforts
nécessaires à la réussite de ce travail de recherche.
7
Sommaire
REMERCIEMENTS
DEDICACE PREFACE SOMMAIRE INTRODUCTION GENERALE
CHAPITRE I : LE CONTEXTE DE L'APPARITION DU PHENOMENE A
L'ECHELLE DES VILLES MAROCAINES ET SON ARRIVEE A FES
Introduction
I- Problèmes de définitions
II- Etat des lieux du phénomène des
acquisitions de vieilles maisons dans les médinas marocaines
III- Les raisons de l'attrait des Occidentaux pour les
centres anciens marocains
IV- La valorisation de l'espace médinal de Fès
: prémices de la mise en tourisme
Conclusion
CHAPITRE II : MISE EN TOURISME OU TOURISTIFICATION DE
LA MEDINA DE FES PAR LES ETRANGERS PROPRIETAIRES DE MAISONS
Introduction
I- Les maisons de la médina de Fès : Vers une
nouvelle forme de mise en tourisme
II- Les maisons étrangères dans la
médina de Fès : Des usages polymorphes
Conclusion
8
CHAPITRE III : LES NOUVEAUX « TOURISTES-RESIDENTS
» DANS LA MEDINA
Introduction
I- Les propriétés étrangères dans la
médina de Fès : D'une installation sporadique à un ancrage
du phénomène
II- Les étrangers en médina : Une
variété d'acteurs
Conclusion
CONCLUSION GENERALE BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES
TABLE DES ILLUSTRATIONS TABLE DES MATIERES
9
INTRODUTION GENERALE
"Il est courant aujourd'hui d'opposer tourisme et culture: le
premier est réputé mercantile, le second serait noble. Il y a
là incontestablement un paradoxe, car historiquement, à l'origine
même du tourisme, est la culture..."
-Catherine TRAUTMANN1-
Le tourisme a été toujours perçu comme un
phénomène social dont l'impact économique est
considérable. En effet, selon l'Organisation Mondiale du Tourisme (OMT),
il occupe la deuxième place parmi les industries du monde avec un taux
de 10% du marché de l'emploi mondial.
Au bout d'un demi-siècle (1950-2005), le nombre de
touristes est passé de 25 millions à 808 millions,
réalisant ainsi une croissance annuelle moyenne de 4,1%2 ; et
si les tendances actuelles se poursuivent, l'OMT prévoit 1 milliard de
touristes en 2010 et 1,6 milliard en 2020. L'industrie touristique va
connaître une véritable explosion, et va sans doute modifier notre
environnement et influer sur nos comportements3.
Avec 0,7% de part de marché dans le tourisme mondial,
l'industrie touristique marocaine, pour sa part, a connu une forte croissance
ces dernières années avec une progression annuelle moyenne de
l'ordre de 9% sur la période 1996-20044. En effet, dès
les années soixante, le Maroc fait du tourisme un secteur prioritaire de
ses choix économiques, et s'est engagé dans une vision à
long terme dans le but d'accueillir à l'horizon 2010 dix millions de
touristes.
1 Cahiers Espaces n°37, p 226. in D.
DESURVIRE, L'hébergement touristique au secours du patrimoine
monumental ancien, p : 17
2 « Faits saillants du tourisme : Édition 2006
», in :
www.world-tourism.org.
3 Selon un communiqué de presse des Sommets
mondiaux du Tourisme Chamonix-Mont-Blanc-Genève, 03 décembre
1999, in :
http://www.sommets-tourisme.org/f/presse/communiques99.htm.
4 Plan de Développement Régional
Touristique (PDRT) de Fès, p 3.
10
La stratégie de relance du secteur du tourisme
menée par l'État depuis 2000 dans le cadre de la vision 2010 est
essentiellement basée sur le produit balnéaire, ce qui accentue
davantage les déséquilibres spatiaux qui existent dans
l'aménagement du territoire marocain. En effet, comme le soulignait M.
BERRIANE : « L'une des particularités du tourisme marocain est la
concurrence serrée et continue entre le tourisme culturel d'un
côté et le tourisme balnéaire de l'autre » (BERRIANE,
2003, p.217)5.
Le plan de développement triennal (1965-1967)
inscrivait le tourisme parmi les priorités économiques du pays
(BERRIANE, 2003, p.218). Le choix de celui-ci en tant que secteur prioritaire
de la politique de développement n'est pas fortuit. En effet, outre ses
atouts géographiques et naturels, le Maroc possède un patrimoine
culturel d'une grande richesse (villes impériales, médinas
médiévales, gastronomie réputée, artisanat
renommé et population accueillante).
« L'héritage culturel est un produit d'appel
fortement recherché par le touriste 6 »,
avance M. KACIMI, ancien secrétaire général au
département du tourisme. Ceci pour souligner l'importance du tourisme
culturel qui représente, entre autres, une composante centrale de la
stratégie de développement touristique au Maroc à
l'horizon 2010. En effet, le tourisme culturel constitue semble-t-il une part
importante du tourisme national ; Celle-ci s'élève à
quelques 60% des touristes internationaux qui optent pour ce type de
tourisme.
Le tourisme culturel peut être défini comme
un déplacement dont la motivation principale est d'élargir
ses horizons, de rechercher des connaissances et des émotions au travers
de la découverte d'un patrimoine et de son territoire7.
Ainsi, ce qui élargit le champ de ce segment du tourisme, c'est
surtout la dimension du patrimoine qui renvoi aux composantes
matérielles et immatérielles de l'identité de toute
société humaine, élaborée, puis transmises et
réactualisées sur un territoire8. Le patrimoine
devient ainsi un instrument et un point d'appui à la politique de mise
en tourisme9 d'un lieu.
5M. BERRIANE, (2003), Rapport Final, Bilan sur le
tourisme marocain, in Rencontre internationale de Fès
(patrimoine et développement durable des centres historiques
urbains), vol.2, UNESCO, Rabat, pp. 217-233.
6 Propos avancés lors d'un séminaire
sur le thème : « Le tourisme et le patrimoine culturel »
organisé à Rabat conjointement par le British Council et Trade
Partners UK en Décembre 2002.
7 C. ORIGET DU CLUZEAU: Le tourisme culturel,
PUF, coll. « Que-Sais-Je ? », 2ème Ed, 2000, Paris,
p3.
8 Idem, p4.
9 Par mise en tourisme nous entendons, le processus
par lequel on construit un espace touristique. Nous allons revenir sur la
définition de ce concept plus en détail dans ce qui suit.
11
Certes, le tourisme tient un rôle essentiel dans la
dialectique d'assignation de signification à un lieu. Au niveau mondial,
beaucoup de villes ont adopté le discours du patrimoine dans leurs
stratégies de développement du secteur touristique, mais seules
certaines d'entres elles sont devenues des destinations
privilégiées du `tourisme culturel'10.
La composante culturelle au Maroc s'appuie essentiellement sur
le label des `villes impériales'. Le Maroc compte quatre villes
impériales dont celle de Fès considérée comme la
plus ancienne capitale du Maroc.
À Fès, le tourisme est une activité
cyclique et sans tendance claire en terme de croissance. Fès,
mémoire nationale chargée de culture et de spiritualité
est un pôle important pour le développement du tourisme culturel.
Celui-ci est surtout axé sur la médina11,
qualifiée de `Ressource phare'12 de la destination,
grâce à sa richesse patrimoniale considérable qui lui a
value d'être classée patrimoine universel par l'UNESCO en 1981.
Les villes marocaines, comme beaucoup de villes du monde
arabe, ont l'originalité de posséder une structure duale. Elles
sont composées d'une partie indigène (la médina) et d'une
partie européanisée (ville nouvelle développée
à partir de 1912 sous l'autorité du protectorat français).
Les médinas constituent la première forme d'urbanisme à
voir le jour au Maroc. Elles sont toujours assimilées au lieu de la
citadinité traditionnelle par rapport à celle du modèle
occidental, à l'espace d'une urbanité typique arabe et marocaine,
valorisée dans le contexte d'une globalisation des modes d'habiter et de
la mise en tourisme du Maroc13. Elles sont, de ce fait des morceaux
de mémoire uniques qui ont su conserver à travers l'histoire les
signes d'identité et les modes de vie traditionnels du peuple
marocain.
Aujourd'hui, les médinas sont perçues et
reconsidérées autrement, autant pour leur valeur architecturale
que pour leur configuration urbaine particulière. Elles
représentent de ce fait, l'un des centres d'intérêt
privilégiés des visites à motivation culturelle.
10 R. BORGUI, Aménagement touristique et
transformation de l'espace urbain: les risques du développement du
secteur à travers le cas comparé de Venise et Marrakech,
2007, p 1.
11 Médina signifie en langue arabe `la
ville'. Elle est devenue la ville arabe par opposition à la ville
européenne à l'époque coloniale au Maghreb.
12 Selon le Plan de Développement
Régional Touristique de la ville de Fès, lancé le 25
novembre 2005, p 7.
13A. -C. KURZAC-SOUALI, "Rumeurs et cohabitation en
médina de Marrakech : l'étranger où on ne l'attendait
pas", in revue Hérodote, N° 127, 4ème
trimestre 2007, p. 64-86.
12
Dans cette optique, la médina de Fès
connaît depuis quelques années une croissance rapide dans le
secteur du tourisme. En effet, d'après la délégation
régionale du ministère du tourisme, la ville de Fès a
accumulée en janvier 2008 un total de 7 466 arrivées et 46 501
nuitées, soit une augmentation de 5% en termes de nuitées en
comparaison avec le même mois de l'année 2007. Cette nouvelle
dynamique s'inscrit dans une mutation profonde de la demande et de l'offre qui
fait qu'un nouveau regard touristique est inventé pour les villes
patrimoniales et plus particulièrement leurs médinas.
Il semble qu'au Maroc depuis ces trois dernières
décennies, l'espace urbain ancien acquiert un autre statut au sein de la
ville marocaine contemporaine. Cette mise en valeur patrimoniale et touristique
de la médina s'opère particulièrement, et de plus en plus,
à travers l'achat des riads14 et anciennes demeures
par les étrangers. En effet, le phénomène s'est
amplifié considérablement durant ces dernières
années ne pouvant plus être qualifié d'une simple mode
passagère. Il s'agit désormais d'un phénomène qui
persiste et se diffuse de plus en plus pour toucher à des degrés
variables un bon nombre de médinas marocaines. Ce mouvement s'inscrit
à la fois comme une réaction de rejet et de fuite du tourisme de
masse et aussi comme une quête d'un voyage inédit. Les anciennes
demeures, généralement sans confort moderne, sont donc peu
à peu délaissées par les autochtones pour être
récupérés par des riches étrangers fascinés
par le cachet traditionnel de ces villes anciennes.
Les médinas au Maroc sont passées, dès le
protectorat, par un ensemble de faits ayant pour conséquence un
processus de dévalorisation à multiples facettes. D'abord, la
politique urbaine du protectorat sous l'égide du Général
Lyautey et qui préconisait la séparation de la population
européenne de celle des autochtones par la création de la ville
européenne, symbole de modernité par opposition à la
médina, et le glissement des principales fonctions des tissus
traditionnels vers la ville nouvelle. "Par cette séparation nette et
tranchée, le Résident Général a voulu, outre les
questions morales, économiques et de sécurité,
préserver l'aspect des villes indigènes, les monuments
historiques ou religieux, les vieilles murailles pittoresques, maintenir enfin
dans son cadre une civilisation intacte depuis des siècles
(...)"15.
14 Riad (ryad ou riyad) : jardin irrigué de
plaisance et de prestige ; grand jardin intérieur d'une demeure urbaine
(définition de P. PASCON, 1977), in : TROIN J.-F. (2002) (sous la
direction de), Maroc. Régions, Pays, Territoires
(Encadré 5, Le patrimoine des médinas), p 152.
15 Propos de l'architecte Henri PROST dans une
communication de 1931 sur les choix urbanistiques de la France au Maroc pendant
le protectorat. H. PROST, "Le développement de l'urbanisme dans le
protectorat du Maroc", dans L'urbanisme aux colonies et dans les pays
tropicaux. Communications et Rapports du Congrès International de
1931, Edition Delayance, 1932, p.60. (Cité par Anne-Claire
KURZAC-SOUALI, 2006, p. 19).
13
Ensuite, ce rôle du protectorat s'est renforcé
par le départ des élites en ville nouvelle mais aussi vers
d'autres villes notamment Rabat et Casablanca, voire même à
l'étranger. Après l'indépendance, les médinas se
sont transformées en des foyers de migration de substitution
réceptifs de migrants ruraux, c'est le cas de la ville de Fès
où 82% des migrants installés en 1982 sont venus directement de
la campagne à la ville (FEJJAL, 1995a, p.208)16. Et c'est
ainsi que les médinas sont dès lors habitées par une
population plus pauvre. De ce fait, habiter la médina n'était
plus valorisé mais, au contraire, avait une image négative
accentuée par la perte de sa valeur foncière et la
dégradation de son bâti.
Cependant, il paraît qu'au cours des dernières
années de la décennie passée cet espace, autrefois
marginalisé, bénéficie d'un regain d'intérêt
qui fait que la médina est devenue au centre de considérations
politiques, économiques, culturelles et touristiques. Pour la plupart,
classées au patrimoine mondial de l'UNESCO (Marrakech, Essaouira,
Tétouan et Fès), mises en valeur par le tourisme, les
médinas sont désormais sujettes de 'la ruée' des
étrangers vers les riads et maisons anciennes. Toutes ces
médinas marquées par un développement historique
différent mais qui ont toutes été, à un moment de
leur histoire, touchées par le départ de leurs élites et
l'installation de ruraux, sont devenues maintenant un foyer qui reçoit
une vague de touristes venant y séjourner, y investir et y prendre
résidence.
Il s'avère que le processus est particulièrement
important à Marrakech, où depuis déjà les
années 1960 les Occidentaux, notamment issus de la jet-set
internationale, décident d'acheter des anciennes demeures pour y
habiter. En revanche, c'est surtout vers la fin des années 1990 que ce
phénomène a pris de l'ampleur pour ne plus être l'apanage
de Marrakech mais aussi, et à des degrés différents,
d'autres médinas notamment celle d'Essaouira et de Fès.
Après avoir rappelé dans un bref aperçu
historique le contexte de ce phénomène en insistant sur le
changement du statut des médinas d'espaces délaissés et
marginalisés vers des espaces reconnus et convoités, il semble
que ce travail de recherche sur le processus de la mise en tourisme de la
médina de Fès sous l'effet de l'achat des demeures
traditionnelles par les étrangers est un thème riche et
susceptible de répondre à différents axes de recherche. En
effet, l'afflux des étrangers vers la médina de Fès pour,
de plus en plus y prendre résidence,
16 Cité par A-C. KURZAC-SOUALI, Les
médinas marocaines: une requalification sélective, Elites,
patrimoine et mondialisation au Maroc, Thèse de doctorat,
Université Paris IV, 2006, p. 24.
14
pourrait être considéré comme une nouvelle
forme de mobilité qui nous rappelle la mobilité Sud-Nord mais qui
prend cette fois-ci le sens inverse, pour concerner les différents pays
occidentaux à des degrés différents. Cette mobilité
résidentielle se traduit par une accession à la
propriété réalisée par des acheteurs solvables et
étrangers au pays. S'ajoutant à cela, la
spécificité de l'espace `médinal' en son rôle de
foyer de réception de polymigrants17 d'origine occidentale,
alors qu'il y a encore quelques années passées, à l'heure
du protectorat, cet espace typique leur été interdit. On pourrait
en effet qualifier cette installation étrangère dans la
médina d'une migration, puisqu'elle obéît à un
déplacement d'un pays (occidental) à un autre (ici, le Maroc)
pour s'y installer définitivement ou temporairement.
D'un autre angle de vue, cette nouvelle tendance
d'investissement étranger en médina pourrait être
assimilée à une nouvelle forme de tourisme, celui-ci qui n'est
à la base qu'une forme de mobilité humaine. Un tourisme dont les
acteurs principaux sont des étrangers de nationalités
différentes, et que l'on pourrait qualifier de tourisme de
résidence.
Il paraît que peu d'études scientifiques se
soient intéressées à l'étude de ce
phénomène dans la médina de Fès. Par ailleurs, la
littérature semble être plus ou moins abondante sur ce même
phénomène à Marrakech et d'une proportion inégale
à Essaouira. Cependant, ces études ont généralement
traité le sujet comme une forme de reconquête, de requalification,
de gentrification, de bradage mais jamais comme un processus de mise en
tourisme.
Cette perspective de recherche met la notion de mise en
tourisme au centre de notre réflexion. Ce terme désigne un
processus de développement touristique planifié, volontariste
d'un espace. Il s'oppose au terme de `touristification' qui tend à
désigner a contrario un processus de développement
touristique spontané (J.M DEWAILLY, p.31 in AMIROU et alii,
2005). Ce concept a vu le jour à la fin des années 80
grâce à des géographes notamment, Rémy KNAFOU,
Philippe DUHAMEL et Isabelle SACAREAU.
«Tous les lieux ne sont pas touristiques, mais tous
peuvent le devenir» (Claude RAFFESTIN, 1986). En effet, il n'existe pas de
territoire doté de vocation touristique. La mise en tourisme
17 Pour reprendre le terme utilisé par Justin
MCGUINNESS dans son article: "Errances vers un Orient imaginaire? Les
polymigrants de la médina de Fès", revue Ibla de
l'Institut des Belles-Lettres Arabes, n°198, 2006, pour qualifier les
étrangers s'installant dans la médina de Fès.
15
de l'espace obéit à un système d'acteurs.
Cette évolution des territoires est celle qu'on qualifie par le concept
de `touristification'.
Le champ théorique relatif aux approches de la mise en
tourisme est relativement large. L'approche de la mise en tourisme en
géographie permet de comprendre comment, pourquoi et dans quel contexte
un espace donné est choisi par un certain nombre d'acteurs pour y
construire un espace touristique18.
Nous proposons alors, par le biais du cas de la médina
de Fès, de baser notre travail de recherche sur cette approche
géographique, étant donné que la médina de
Fès constitue un espace touristique en mutation par un processus de plus
en plus important, même si encore à ses débuts par rapport
à d'autres villes telle que Marrakech ou Essaouira.
Ce concept s'adapte parfaitement au cas de la médina de
Fès puisqu'il nous permettra de définir l'espace relatif à
la médina en tant qu'espace touristique qui subit des transformations
initiées par des acteurs publics et des acteurs privés
étrangers, et renforcées par la forte fréquentation
touristique de ce même espace.
La médina de Fès, en effet, et
parallèlement à une croissance exponentielle du nombre des
touristes et visiteurs, se voit peu à peu transformée par un
processus volontariste guidé par la volonté des pouvoirs publics
et les acteurs privés étrangers. Ce sont ces dynamiques qui nous
interpellent et nous poussent à nous interroger sur ce processus de mise
en tourisme de la médina par l'achat d'anciennes demeures et riads
par des touristes étrangers.
Le choix qui est le nôtre d'étudier ce
phénomène, dans la médina de Fès en particulier,
s'explique tout d'abord par le fait que la ville de Fès nous est apparue
comme un espace de prédilection pour travailler sur le thème du
tourisme dans son lien à la culture et au patrimoine. D'autre part, la
médina de Fès anime une fascination particulière
auprès des touristes, car l'importance de la dimension de son patrimoine
civilisationel prédomine sur tous les autres aspects. Elle constitue, de
ce fait, un lieu emblématique pour analyser les dynamiques de ce
processus de mise en tourisme dans un espace urbain en mutation.
18 M.-A. CHOPLIN, 2007, La mise en tourisme de
Ouarzazate : Acteurs, discours et lieux, mémoire de master,
Université François-Rabelais de Tours, p12.
16
Ainsi, et à la lumière de toutes ces
données, nous sommes en droit de nous poser les questions suivantes :
Pourquoi les étrangers s'installent-ils dans la médina de
Fès ? Quelles sont les conditions permettant aux étrangers
d'acheter des riads et vieilles demeures dans l'ancienne médina
? Comment un tel phénomène a-t-il pu se produire dans la
médina ? Comment se présente le phénomène dans
l'espace `médinal' ? L'apparition du phénomène à
Fès a-t-il une relation avec le succès qu'il a eu dans d'autres
villes comme Marrakech ? Prend-t-il la même allure qu'à Marrakech
ou au contraire est-il particulier à Fès ?
Par là, notre questionnement central peut être
formulé comme suit : Dans quelle mesure ce phénomène
d'investissement des étrangers par l'achat des maisons anciennes peut-il
contribuer à la mise en tourisme de la médina de Fès ?
Postulats et hypothèses de
travail:
Dans le but d'entreprendre cette étude, quelques
hypothèses devront être formulées; celles-ci se rattachent
à notre perception des dynamiques de la mise en tourisme de la
médina de Fès. Il s'agit notamment de confirmer ou d'infirmer
que:
· Le phénomène d'achat par les
étrangers des riads et vieilles demeures participe à la
mise en tourisme de la médina de Fès;
· L'investissement étranger dans la médina
de Fès prend la même allure qu'à Marrakech ou Essaouira et
se développe par conséquent, selon les mêmes processus.
Pour répondre à nos questionnements, nous avons
structuré notre recherche selon trois axes qui correspondent à
trois chapitres. Ainsi, dans un premier temps, ce travail propose un
éclairage sur le phénomène d'acquisition des maisons
traditionnelles par les étrangers. Le premier chapitre se veut
être un état des lieux de la question. Il vise à
contextualiser le phénomène en se basant sur les cas des villes
de Marrakech et d'Essaouira, et à comprendre les effets
déclencheurs de cet afflux à travers les efforts de
patrimonialisation et de sauvegarde encouragés par les acteurs
étrangers et l'Etat, par le biais de la promotion touristique. Ceci nous
permettra de montrer par la suite comment le phénomène a atteint
la médina de Fès et dans quelles conditions, en s'attardant sur
les actions menées pour la
17
sauvegarde et la mise en patrimoine de celle-ci en tant que
base à la revalorisation de son image et sa mise en tourisme.
Puis, il s'agira dans un deuxième temps, de
décrire les dynamiques récentes en médina en cherchant
à expliciter la perception de la médina de Fès par les
étrangers ainsi que l'organisation de ce nouveau marché et
à temporaliser le phénomène pour en comprendre le
développement. Nous nous attarderons également sur la
manière avec laquelle ces étrangers investissent ou exploitent
leur habitation en médina. Ce chapitre nous permettra donc de
répondre en partie et d'une part à notre première
hypothèse qui posait le constat de la mise en tourisme de l'espace
`médinal' par cet afflux de plus en plus fort d'étrangers, et
d'autre part, et en partie, à notre deuxième hypothèse qui
supposait que le phénomène à Fès prenait la
même allure que dans les villes de Marrakech et d'Essaouira qui l'ont
précédé dans ce sens.
Dans un troisième temps, nous nous intéresserons
plus au profil de ces nouveaux habitants étrangers. Qui sont-ils ?
Comment vivent-ils dans la médina? Combien sont-ils ? Et comment
s'organisent-t-ils dans l'espace ? En effet, la médina de Fès
incorpore à son tissu des résidents étrangers nouveaux, de
profils différents et dont les choix de localisation obéissent
à des logiques sélectives.
La mise en tourisme constitue la clef de lecture à
l'étude de ce phénomène d'afflux étrangers vers la
médina de Fès. Elle nous permettra de comprendre comment,
pourquoi, par qui et dans quel contexte l'espace `médinal' de Fès
a été choisi par un certain nombre d'acteurs étrangers
pour y construire un espace touristique19.
Approche méthodologique :
Afin de répondre à notre objectif principal et
afin de vérifier les hypothèses que nous nous sommes
posées comme base de notre recherche, des données aussi bien
qualitatives que quantitatives seront indispensables à une étude
géographique sur un phénomène en mouvement dans un espace
spécifique.
19 M.-A. CHOPLIN, 2007, La mise en tourisme de
Ouarzazate : Acteurs, discours et lieux, mémoire de master,
Université François-Rabelais de Tours, p12.
18
Ainsi, en ce qui concerne les matériaux, la
méthodologie retenue dans le cadre de cette étude s'est
basée sur une analyse documentaire, une analyse sur le terrain et une
série de questionnaires pour compléter les sources
disponibles.
L'investigation bibliographique nous a permis d'avoir un
aperçu général sur l'état des lieux de la question.
Elle a été réalisée auprès des
différentes institutions concernées par cette
problématique, ainsi que dans les centres de documentation
universitaires ou professionnels.
Pour les enquêtes de terrain, nous avons opté
pour une démarche qualitative par observation directe à travers
une enquête de repérage qui a concerné les anciennes
demeures achetées par les étrangers. Cette observation a
été appuyée de prises de notes et de photographies, qui
ont servi par ailleurs, de trame à nos investigations de terrain.
Notre enquête s'est poursuite avec des questionnaires
qui ont été distribués auprès des différents
acteurs concernés par la question. Nous entendons par acteurs ici les
propriétaires étrangers de maisons dans la médina. Le
questionnaire est organisé en plusieurs volets et a été
rempli avec la personne interrogée dans son habitation dans la grande
majorité des cas. Le but à travers l'enquête auprès
des nouveaux habitants, parfois propriétaires de maison d'hôtes,
est d'analyser leurs profils, les modalités de leurs arrivées,
leurs motivations, les procédures d'acquisition de leurs logements en
médina et leurs perceptions de celle-ci. Le nombre de ces acteurs
étant limités, en raison de l'absence de la majorité
d'entre eux, le choix des personnes à enquêter se faisait en
fonction de leur présence sur place et des opportunités de
rencontre.
Certains entretiens semi-dirigés ont été
également nécessaires dans les premières visites du
terrain, auprès de personnes-ressources, qui nous ont permis de
comprendre le contexte dans lequel s'installaient ces étrangers.
Par ailleurs, nous avons effectué un relevé
cartographique presque systématique des maisons à
propriétaires étrangers dans la médina. Nous nous sommes
à cet effet, servis des informations recueillies à partir des
dossiers de la conservation foncière, auxquelles nous avons eu
accès auprès du cadastre de la ville de Fès, ainsi
qu'à des listes et dossiers des habitants étrangers qui nous ont
été communiqués par les différentes
collectivités de la médina de Fès.
D'autre part, nous avons aussi pris contact avec certaines
agences immobilières où nous avons pu avoir des
compléments d'informations sur les acquéreurs étrangers en
médina. Nous avons
19
aussi contacté « le représentant »,
des nouveaux habitants étrangers qui nous a, à son tour, fait
part d'une liste personnelle d'étrangers résidant dans la
médina, depuis 1997 et jusqu'à 2002.
Présentation du terrain d'étude
:
Nous avons choisi d'entreprendre notre travail de terrain
à Fès. La ville de Fès est située à la
limite du Saïs, plateau enserré entre les rides prérifaines
au Nord et le Moyen Atlas au Sud. La ville s'est localisée à la
croisée des routes qu'empruntaient les échanges du Maroc
pré-colonial20.
Sa médina comporte deux entités : Fès
Jdid (Fès la nouvelle), construite à la fin du
XIIIème siècle qui comprend la ville proprement dite
avec son quartier juif, le Mellah et le palais royal ; et Fès El Bali
(Fès l'ancienne) datant du IXème siècle. Cette
entité est établie sur les pentes d'une cuvette traversée
par l'oued Boukhrareb qui la découpe en deux parties, Adwat Al Andalous
à l'Est et Adwat Al Qarawiyine à l'Ouest. Elle constitue la plus
vaste et la plus passionnante médina du Maroc. C'est le coeur historique
de la ville, classée comme site d'héritage mondial par
l'UNESCO.
La commune urbaine de Fès est née lors du
découpage administratif de la province de Fès en mars 1992. En
2002, cette commune a été divisée en deux arrondissements
qui sont : Fès Médina et Jnan El Ouard21.
L'arrondissement de Fès Médina occupe la partie
Est de la ville de Fès. La médina de Fès est un labyrinthe
de 9 500 rues et d'un millier d'impasses grouillantes dans une médina
qui s'étend sur 350 ha et la densité de la population y est
estimée à 1200 personne/ha.
Notre terrain d'étude se limite à Fès el
Bali, qui constitue le coeur de la ville traditionnelle et où le
phénomène d'acquisition des anciennes demeures par les
étrangers commence à se développer de plus en plus.
20 J.-P. LABOIRIE, 1990, Atlas de la médina
de Fès, Presse Universitaire du Mirail, Toulouse, p 2.
21 Selon les dispositions du Dahir n°297-02-01 du
3 octobre 2002 relatif à la Charte communale.
20

21
CHAPITRE I :
Le contexte de l'apparition du phénomène
à
l'échelle des villes marocaines et son
arrivée
à Fès
22
Introduction
Les médinas constituent le coeur des villes anciennes
du Maroc. A côté des grandes médinas comme celles de
Fès, Marrakech, Meknès, Rabat, Salé, Tanger . .etc, il en
existe de plus petites telle que celle d'Asilah, Essaouira, Chaouen, Safi.
.etc. La médina est un espace à haute valeur symbolique,
identitaire et cultuelle qui a le plus souvent conservé une position
centrale au sein des agglomérations marocaines22.
Après avoir subit autrefois, un long processus de marginalisation et de
dégradation de son tissu urbain, la médina acquiert, depuis peu,
un nouveau statut au sein de la ville marocaine. En effet, elle fait l'objet
désormais d'une attention particulière soutenue par le souffle
des organismes internationaux. A partir de là elle
bénéficie d'une valeur patrimoniale manifeste. Ainsi,
l'inscription des médinas de Fès, Marrakech et Essaouira donne
une nouvelle dimension spatiale à ce patrimoine par son
universalité déclarée. Une reconnaissance qui traduit un
changement du regard porté sur la médina et qui se traduit par
une nouvelle pratique de cet espace envisagé désormais comme un
patrimoine-ressource par le nouveau sens qu'il lui est donné «
Dès qu'un espace est une valeur f...] il grandit »
(BACHELARD, 1957, p.153)23.
Bien plus qu'un patrimoine culturel, la place de la
médina évolue pour devenir un vrai support au produit touristique
marocain. La vogue des Occidentaux pour les anciennes demeures et riads
des centres historiques s'inscrit dans ce contexte. En effet, depuis la
fin des années 1990 surtout, la médina incorpore à son
tissu, des acteurs récents, ils sont des touristes mais aussi des
nouveaux résidents de nationalités et de cultures
différentes.
Cette première partie introductive est un état
des lieux du phénomène d'acquisition des anciennes demeures par
les étrangers. Il s'agit en effet, pour nous de contextualiser le cas de
Fès en faisant état du phénomène dans les
médinas qui en sont les plus concernées, et en expliquant les
fondements de l'attrait des Occidentaux pour les centres anciens, avant
d'arriver au cas de Fès, en cherchant à répondre en partie
à notre première hypothèse qui posait le constat d'une
mise en tourisme de sa médina.
22 La question relative à la
centralité des médinas a fait objet d'un article de Pierre
SIGNOLES, « La centralité des médinas maghrébines :
quel enjeu pour des politiques d'aménagement urbain ? », revue
Insanyat, n°13, janvier-avril 2001, pp.9-41.
23 Cité par A-C. KURZAC - SOUALI, 2006,
p.58.
23
I- PROBLEMES DE DEFINITIONS
1-Riad et Dar: Une nouvelle construction
sémantique
L'acquisition d'anciennes demeures en médina par les
étrangers est un phénomène récent mais qui a pris
au cours de ces dernières années une grande ampleur qui a
contribué à ce que la presse écrite qualifie de la
"ruée vers les riads". Cette diffusion importante s'est
accompagnée d'une banalisation de la signification du mot
"riad" et son détournement vers un sens plus large pour
qualifier toutes les maisons de la médina.
La maison traditionnelle au Maroc prend en
général deux formes urbaines fondamentales: le dar et le
riad. On qualifie de dar, la maison d'habitation classique
avec une simple cour intérieure entourée de piliers autour de
laquelle les pièces sont agencées en se faisant face (Cf. figure
2 et 4, Planche 1). Le riad lui, qualifie une forme de maison
spéciale avec un jardin (Cf. figure 1 et 3, Planche 1). La forme
fondamentale dispose généralement de pièces sur les
largeurs opposées du rectangle tandis que des murs élevés
délimitent les longueurs24.
Au Maroc, l'existence du riad remonterait au moins au
XIIème siècle. Sa morphologie rappelle celle de la
maison à patio, mais la richesse historique et culturelle de ce terme
rend difficile la détermination d'une définition exacte. Pour
J.GALLOTTI "le riad est un jardin clos de hautes murailles, rectangulaires,
avec à ses extrémités, deux corps de logis face à
face. Fait comme une Dar dont la cour serait étirée pour faire
place à la lumière aux arbres et aux fleurs et dont les deux
côtés seuls seraient restés, il n'est que l'expression du
besoin d'espace. Il semble une maison dilatée dans un soupir". Il
ajoute plus loin: "Je n'ai jamais entendu dire qu'il existait au Maroc de
ryad aussi ancien que les vieilles maisons de Fès Bali"25.
Cette définition exclue toutes les demeures qui ont plus de deux
corps de logis et/ou qui ne seraient pas étirées.
24 A. ESHER, S. PETERMAN et B. CLOS, Le bradage de
la médina de Marrakech? in: M. BERRIANE et A. KAGERMEIER, (2001),
Le Maroc à la veille du troisième millénaire
(Défis, chances et risques d'un développement durable),
publication de la FLSHR, Rabat, p: 220.
25 J. GALLOTTI, Le jardin et la maison arabe au
Maroc, Ed. Filbert Lévy, (1926), (Tome I), p: 12.
24
Cependant, pour A.TOURI "Le terme riyad couvre au Maroc
une réalité quelque peu complexe. La définition la plus
directe et la plus large est celle qui en fait un jardin clos de murailles qui
renferme des constructions destinées principalement à l'habitat
occasionnel d'agrément et placées généralement
à ses deux petits côtés. Cette définition prend
encore plus de poids lorsque la surface plantée est divisée en
parcelles, généralement d'égales dimensions, par des
allées surélevées et se coupant à angles droits. A
partir de là, le sens s'élargit pour s'appliquer même aux
maisons dont la seule présence d'un jardin -mais à condition que
celui-ci soit d'une assez grande superficie qui généralement
avoisine le tiers de la surface totale et que son organisation s'attache au
modèle décrit- justifie la dénomination de
riyad."(A.TOURI, 1987)26
Les maisons de la médina ont quelque chose d'unique.
Elles présentent toutes, un aspect commun étant dotées de
façades aveugles et sobres. La demeure riche côtoie ainsi la
demeure pauvre, et c'est à l'intérieur que se déploie la
richesse architecturale de ces demeures. "Il était de tradition de
ne jamais refaire les enduits des murs qui donnaient sur la rue"(REVAULT,
GOVIN, AMAHAN, 1985). A Fès, l'habitat traditionnel d'inspiration
Mérinide est plus dense et prend la forme de maisons plus hautes,
centrées sur des patios, rarement végétalisées,
plutôt minérales et richement décorées de zelliges.
Les demeures construites sur les jardins périphériques en
médina au XIXème siècle et au début du
XXème siècle (Batha et Ziat) possèdent, en
revanche, des jardins comme les riads de l'époque
saâdienne à Marrakech. (EL OUARZAZI, 1990).
Il semble, en revanche, qu'à Fès on ne dit pas
"Riad" pour désigner toute une demeure. Dans l'ouvrage "Palais et
Demeures de Fès", toutes les maisons sans distinction sont
nommées "Dar". (Dar Tazi et bien d'autres comprennent des
riads). Riad à Fès, d'après les auteurs
de ce même ouvrage, est défini comme "un jardin
intérieur clos". Les recherches que nous avons menées sur le
terrain nous ont permis de toucher de plus près, tous ces aspects.
La différence qui existe donc entre riad et
dar viendrait essentiellement du fait que le premier est
agrémenté d'un jardin intérieur qui fait défaut
dans le dar. Il est aussi utile de souligner que le riad est
le plus souvent richement décoré et relève d'un standing
généralement
26 Cité par: A. EL OUARZAZI, (1999), Les
riyads de Marrakech, étude d'un phénomène urbain,
mémoire de fin d'études de l'ENA, p. 52.
25
supérieur de celui d'une dar. Il
n'empêche que l'on peut avoir des riads d'un niveau très
modeste. Les riads sont le fruit d'un stade d'évolution du
tissu urbain qui se densifie du centre à la périphérie.
C'est, l'on peut dire, une étape intermédiaire d'une
évolution à tendance de densification du tissu urbain de la
médina, qui a laissé la place à des maisons à patio
de petite taille.
Au Maroc, et depuis quelques années, on assiste
à une vulgarisation du terme "riad", qui était
jusqu'à il y a peu, restreint et directement lié à son
contexte `médinal' et résidentiel. En effet, riad semble
faire désormais, la une de certains journaux, revues,
périodiques, livres mais aussi d'émissions
télévisées, brochures et publicités touristiques,
pour devenir le mot vendeur d'un rêve et d'un certain orientalisme et
exotisme. Commercialisé dans le contexte de l'affluence des
étrangers sur les maisons traditionnelles en médina, le mot
riad est devenu ainsi, à la mode et traduit un signe
extérieur de richesse
Dans l'imaginaire des touristes occidentaux, le riad
suscite l'idée d'un mode de vie à l'oriental qui rappelle
l'univers des Mille et une nuits. Il surprend/ intrigue/ excite la
curiosité/ stimule l'enchantement. (R. SAIGH BOUSTA, 2004b, p.159).
Pour compléter cette idée de glissement
sémantique, du côté des Marocains également, surtout
ceux qui n'habitent pas la médina, la maison traditionnelle, quelle soit
dar ou riad, est devenue un riad. Le terme
riad, enfin, tend de plus en plus à qualifier "la maison de
l'étranger".
26
Planche 1
La différence entre un riad et une
dar

www.carredazur.com.
W-J. B, juillet 2008
W-J. B, juillet 2008
Figure 1 : Exemple d'une cour
intérieure d'un riad. La photo a été prise
à « Riad Louna », une maison d'hôtes à
propriétaire belge.
Figure 3
Figure 2 : Exemple d'une cour
intérieure d'une dar dans le quartier de Tala'a Kbira.
Figure 4
Source, figure 3 et 4 : A. Esher, S. Petermann
et B. Clos, 2000, p.220.
27
2-A propos de la notion de gentrification
Depuis la fin des années 1990, les opérations
d'acquisition de logements, souvent dégradés en médina, se
fait de plus en plus par une population de catégorie
socio-professionnelle aisée. Ces gens vont, en fait, parier sur l'avenir
en investissant dans des bâtisses et en mettant de l'argent pour les
restaurer ou les rénover. Ce retournement de fortune s'apparente
à ce que les sociologues appellent "la gentrification".
Rappelons que la gentrification est un concept forgé
dans le champ de la sociologie et qu'il a été
développé dans le monde anglo-saxon. Il s'agit de
l'arrivée d'une population au niveau social élevé dans un
espace urbain populaire, au bâti dévalorisé, et de la
réhabilitation de ses logements, appropriés par les nouveaux
habitants.
Ce processus a commencé dans les années
1960-1970 dans les grandes villes anglaises et nord-américaines et le
concept le définissant a été utilisé pour la
première fois en 1963 par Ruth GLASS27. Dans son ouvrage, R.
GLASS s'était attaché à comprendre les raisons qui
poussaient une partie de la classe moyenne londonienne à s'installer
dans des quartiers jusqu'alors dégradés du centre ancien au lieu
d'emprunter l'itinéraire jugé normal, qui consistait à
habiter dans la banlieue bourgeoise. Cette notion a été, à
partir des années 1970, utilisée par les géographes, ainsi
C.HAMNET définit la gentrification comme "un phénomène
à la fois physique, économique, social et culturel. Elle implique
un changement social mais aussi un changement physique du stock de logements,
à l'échelle de quartiers, enfin un changement économique
sur les marchés foncier et immobilier28."
Par ailleurs, le Dictionnaire de la géographie et de
l'espace des sociétés29 définit la
gentrification comme "le processus d'installation de résidents d'un
niveau socio-économique plus élevé que celui des
populations initialement résidentes..."
27 Ruth GLASS, (1963), Introduction to London:
Aspects of change, London, Center for urban studies. Cité par A-C.
KURZAC-SOUALI, (2006).
28 C. HAMNET, (1995), Les changements
socio-économiques à Londres, Sociétés
contemporaines, n°23, pp.15-32, in: A-C. KURZAC-SOUALI , (2006).
29 Jacques LEVY, Michel LUSSAULT (dir.), (2003),
Dictionnaire de la géographie et de l'espace des
sociétés, Ed. Belin.
28
Le déroulement de ce processus a été
détaillé par Alexandre DJIRIKIAN30, il le
représente comme une suite logique d'événements qui
peuvent se ressembler dans un nombre important de quartiers centraux des villes
anciennes. En effet, à partir du moment où les quartiers sont
découverts, ils commencent à attirer les investisseurs, et c'est
à ce moment que les pouvoirs publics interviennent dans ce mouvement en
qualifiant ces quartiers d'historiques, traditionnels ou patrimoniaux tout en y
développant des équipements collectifs nécessaires
à leur valorisation. C'est à partir de ce moment que les prix de
l'immobilier flambent et le niveau de vie devient insupportable par les
habitants. Ce processus est simplifié dans le schéma ci-dessous,
élaboré par Alexandre DJIRIKIAN:
Le processus de gentrification

logements dégradés à potentiel
Mise en valeur du parc de logements
Hausse des prix de
l'immobilier
Caractéristiques du stock résidentiel
Dynamiques de la structure socioprofessionnelle
afflux de capitaux Privés et/ou publics
Départ des classes populaires
arrivée de classes moyennes
Source : Alexandre DJIRIKIAN, La
Gentrification Du MARAIS : quarante ans d'évolution de la population et
des logements, Université Paris I, maîtrise de
Géographie sous la direction de M. BERGER et Y. CHAUVRE, juin 2004.
Cité par : A. ARDALANE, 2007, p.125.
Il y a donc là des points de similitudes, malgré
la dissemblance des contextes, avec la représentation du concept de
gentrification, tel qu'il se présente dans le contexte médinal.
L'arrivée massive d'une population d'un niveau social
élevé au sein d'une population dont le niveau social frôle
des fois le seuil de la pauvreté, crée bien là un
différentiel concernant les
30 Alexandre DJIRIKIAN, La Gentrification du
Marais: Quarante ans d'évolution de la population et des logements,
Université Paris I, Maîtrise de Géographie, juin 2004,
cité par: Abdellah ARDALANE, Le tourisme dans la ville d'Essaouira,
Impact socio-économique et spatial sur la médina (2007).
29
niveaux de vie. Cette installation de nouveaux
propriétaires s'accompagne généralement
d'opérations de restauration et de rénovation. Les
investissements vont s'accélérer et le marché immobilier
va s'enflammer. La conséquence logique de ce mouvement est
l'augmentation des prix, ce qui pousse les propriétaires ou les
locataires à céder leurs logements et quitter la médina.
Il reste que chez nous, ce n'est pas un phénomène de classes
sociales appartenant à la même société mais bien de
nationalités différentes et surtout de cultures
différentes. (BERRIANE, 2003).
II- Etat des lieux du phénomène des
acquisitions de vieilles maisons dans les médinas marocaines
De plus en plus d'étrangers investissent dans les
médinas marocaines. Ceux-ci acquièrent de vieilles demeures pour
y séjourner en tant que résidence secondaire, y monter un
commerce ou s'y établir. Ainsi, plusieurs médinas, quelles soient
grandes ou petites, ont été touchées, à des
degrés différents, par ce flot.
Des médinas comme celle de Tanger, Asilah, Chaouen,
Tétouan, Rabat s'ouvrent de plus en plus à un public
international. Cependant, le développement d'une communauté
étrangère aussi importante reste l'apanage de villes comme
Marrakech, Essaouira ou encore Fès.
C'est ainsi que nous nous arrêterons, dans ce titre, sur
l'état des lieux de ce phénomène dans les deux villes de
Marrakech et Essaouira, car c'est par ces deux médinas que le
phénomène a commencé, avant de traiter le cas de la ville
de Fès.
1- Marrakech : le nouvel Eldorado
La médina de Marrakech est la plus grande médina
du Maroc en superficie et en hommes. Elle s'étend sur 700 ha dont 450 ha
bâtis, et sa population a atteint 250 000 habitants en 2004, selon le
Recensement Général de la Population et de l'Habitat.
La place de la médina dans l'ensemble du
périmètre urbain demeure prépondérante avec en
1981, 20% du total des espaces urbanisés31.
31 Chiffres extraits des études
préliminaires au Schéma Directeur de la ville de Marrakech,
cité par A-C. KURZAC SOUALI (2006, p.87).
30
L'espace intra-muros est éventré par de
nombreuses portes qui permettent la circulation routière en ses
périphéries, et est entouré de remparts discontinus qui
laissent la médina s'ouvrir vers l'extérieur.
A l'heure du protectorat, Hubert Lyautey, le premier
Résident Général français, a condamné
Marrakech à devenir la capitale du tourisme et a concentré ainsi
tous ses efforts exclusivement à cette fin. Ainsi, Marrakech devint, et
grâce à ses particularités, la destination la plus
prisée par les touristes. C'est ainsi que le seul nom de Marrakech
évoque toute une série d'images enracinées dans
l'imaginaire occidental.
Au cours des deux dernières décennies, et devant
une croissance continue du nombre des touristes, la médina de Marrakech
a été principalement transformée par les actions
conjointes des acteurs publics et d'acteurs privés
particulièrement étrangers.
En effet, outre les interventions des acteurs publics pour la
revalorisation du tissu traditionnel et de son environnement urbain, la
médina de Marrakech a été inscrite sur la Liste du
Patrimoine Mondial de l'UNESCO en 1985 et la place Jamaâ El Fna a
été proclamée Chef-d'oeuvre du patrimoine oral et
immatériel de l'humanité en 2001. Toutes les deux
bénéficient d'une double reconnaissance internationale au titre
de patrimoine matériel et immatériel. La médina se
transforme ainsi et peu à peu d'un espace à visiter et à
parcourir à un espace de séjour. On parle ici des riads
et anciennes maisons qui y sont achetés par des étrangers.
Le phénomène semble avoir commencé à Marrakech
effectivement, dès les années 1960 (BERRIANE, 2003). Les adeptes
de ce type de logement étaient, à l'époque, des hippies,
des artistes et de grands couturiers. Cependant, il y a des années
avant, que le peintre Jacques Majorelle avait découvert le charme de
l'Orient à Marrakech, la ville ocre. En 1917, il décide de s'y
établir en achetant un riad dans l'ancienne médina avant
d'être obligé de la quitter par la suite au début des
années 1920 à cause de la politique d'urbanisme liée au
protectorat qui interdisait l'installation des Européens dans le centre
historique.
Aujourd'hui, le cercle s'est élargit et le
phénomène s'est amplifié à partir de la
moitié des années 1990 pour concerner d'autres couches de la
société occidentale. Des intellectuels, des cadres
supérieurs, des touristes branchés...etc. tous se bousculent aux
portillons de ces demeures. Le développement d'une communauté
aussi dynamique qu'à Marrakech reste
31
inégalé au Maroc (ESHER, 2000). En effet, selon
les travaux de relevés menés par le géographe allemand A.
ESHER, à la fin de l'année 2000, 457 étrangers ont
acheté plus de 500 maisons dans la médina de Marrakech. Ces
nouveaux venus sont de nationalités différentes dont les
français représentent 60%. Leur présence est
attestée dans presque toute la médina comme l'illustre la Carte
2.
Carte 2. Répartition géographique
des propriétés étrangères dans la médina de
Marrakech

Source: ESCHER A., PETERMANN S., CLOS B.,
(2000), "Le bradage de la médina de Marrakech?"
In: Le Maroc à la veille du troisième
millénaire- Défis, chances et risques d'un développement
durable, Faculté des Lettres et des Sciences Humaines de Rabat,
Colloques et Séminaires, 93, Rabat, p.224.
32
Au départ, ce sont des étrangers qui ont
exprimé un enthousiasme pour l'acquisition de riads ou maisons
traditionnelles dans l'objectif de les rénover pour y habiter une partie
de l'année. Mais, ce mouvement, d'abord disparate et varié, a
vite intéressé ceux qui font de leur habitation en médina
une résidence principale mais aussi et surtout les investisseurs qui
donnent aux vieilles demeures une vocation touristique en les aménageant
comme maison d'hôtes. En effet, sur les quelques 400 riads
répertoriés à Marrakech, presque 120 ont
été transformés en maisons d'hôtes32. Sur
ce total, plus de 90% sont détenus par des Européens.
Ces étrangers ne s'installent pas aléatoirement,
le choix de la localisation est très sélectif, il obéit
à des critères bien précis liés, d'une part
à la proximité du noyau urbain et de la place Jamaâ El Fnaa
où sont présents les commerces et l'artisanat, et d'autres part,
à la facilité d'accès au quartier d'habitat, sa
sûreté et son bon état.
Aujourd'hui, Marrakech, qualifiée de "la capitale des
riads" par la presse marocaine, est devenue saturée, les prix y
sont exorbitants et hors de portée des jeunes investisseurs de classe
moyenne qui préfèrent investir dans d'autres médinas comme
celle d'Essaouira, à des prix encore plus ou moins accessibles.
2- Essaouira: Une médina en ébullition
Essaouira, l'ancienne Mogador, est une ville
côtière située au bord de l'Atlantique à 175 km
à l'ouest de Marrakech et à 170 km au nord d'Agadir. Sa
médina, au style maroco-portugais s'étend sur une trentaine
d'hectares et communique avec son environnement grâce aux six grandes
portes qui l'entourent et qui assurent son ouverture.
La médina d'Essaouira a vu le jour en 1760 lorsque le
sultan Mohammed Ben Abdellah décida de construire le plus grand port de
son royaume et confie à un architecte français, Théodore
Cornus, la réalisation du plan d'une nouvelle ville selon les principes
de l'architecture militaire européenne de l'époque. Depuis sa
fondation, elle est restée un port de commerce international de premier
plan reliant le Maroc et l'arrière-pays saharien à l'Europe et au
reste du monde.
32 Selon le recensement du ministère du
tourisme.
33
La médina d'Essaouira est petite de taille. Elle ne
représente qu'un dixième de la superficie de la ville et abrite
environ 25 000 habitants sur 70 000 habitants dans l'ensemble de la ville.
Depuis les années 1990, la ville d'Essaouira est
devenue pour le Maroc une destination touristique importante. Proche de
Marrakech et soutenue par une forte médiatisation qui véhicule
l'image d'une ville pittoresque à fort potentiel touristique, Essaouira
étend la gamme des produits touristiques du pays et permet d'en diffuser
les retombées à grande échelle.
Le tourisme à Essaouira est en grande partie
basé sur le volet culturel. Elle renferme un patrimoine architectural et
urbanistique particulier, témoignant d'un riche passé ouvert sur
toutes les civilisations humaines (Européenne, Arabo-musulmane et
Africaine) qui ont contribué chacune pour sa part à la
création de son centre historique. C'est ainsi que la médina
d'Essaouira a été inscrite sur la liste du patrimoine culturel de
l'Humanité par l'UNESCO, depuis décembre 2001.
Les maisons de la médina sont riches en figures
architectoniques qui offrent un exemple d'une ville fortifiée aux
allures européennes mais aux valeurs traditionnelles arabo-musulmanes.
La médina d'Essaouira ne possède pas de riads mais des
dars hautes avec un patio central souvent étroit. Pourtant,
à l'image de Marrakech avec ces grands riads, des
étrangers de différents horizons du monde ont élu domicile
dans la médina d'Essaouira ; peintres, musiciens et écrivains ont
depuis longtemps trouvé dans cette ville un lieu emblématique
pour la création et l'art comme elle a été un haut lieu du
monde hippie (Jimmy Hendrix) dans les années 1960. Cependant, cette
installation s'est démocratisée depuis la fin des années
1990, surtout, puisque des investisseurs étrangers de partout dans le
monde achètent les anciennes demeures de la médina pour y prendre
résidence ou bien pour y diriger une maison d'hôtes. En effet, le
dynamisme d'achat et de restauration de ces anciennes demeures enclenché
chez les propriétaires étrangers s'est beaucoup étendu
pour prendre, plus ou moins, la même allure qu'à Marrakech. Des
travaux de relevés d'évaluation de cette population ont
été menés à Essaouira par l'équipe de
Recherche sur la Région et la Régionalisation de
l'Université Mohammed V-Agdal et qui ont fait état de pas moins
de 200 maisons à propriétaire étranger dans la
médina (Cf. Carte 3).
34
Carte 3.

Source : relevé de terrain
réalisé par l'équipe de Recherche sur la Région et
la Régionalisation de l'Université Mohammed V-Agdal,
Décembre 2003.
35
Ces nouveaux habitants occupent pratiquement tous les
quartiers avec une préférence pour les maisons longeant les
murailles et donnant sur la mer. Ils sont, à l'instar de Marrakech, de
nationalités et de profils très différents.
Le développement de la médina d'Essaouira par la
mise en valeur de son tissu ancien, sa patrimonialisation et le
développement de sa dimension culturelle par le biais du tourisme ont
tous participé à la forte pratique de la médina en tant
qu'espace de séjour par des étrangers d'horizons
différents. Ainsi, à l'instar de Marrakech, le prix de
l'immobilier dans la médina a considérablement augmenté en
l'espace de quelques années, ce qui a considérablement
poussé le phénomène vers d'autres villes qui
étaient encore financièrement accessibles. La médina de
Fès a par conséquent pris la relève grâce à
son offre en riads et anciennes demeures à caractère
particulier. L'arrivée de ce phénomène à Fès
correspond ainsi, à un prolongement de son développement dans les
villes d'Essaouira et Marrakech. Cet élan n'est pas non plus à
dissocier des représentations et des discours médiatiques dont
elles font objet dans différents supports et différents pays et
qui ont beaucoup encouragé leur promotion auprès des
Occidentaux.
II- Les raisons de l'attrait des Occidentaux pour les
centres anciens marocains
La médina séduit de plus en plus d'Occidentaux.
L'attrait de ces étrangers pour les centres historiques anciens trouve
son explication dans différentes raisons. En effet, la grande
mobilité de ceux-ci vers le Maroc pour de plus en plus y prendre
résidence est facilitée, outre les prix alléchants du
foncier, par une bonne accessibilité soutenue par une forte promotion
des médinas et des investissements étrangers au Maroc, et
accompagnée d'un fort engouement médiatique pour les maisons
anciennes et les riads des médinas marocaines.
36
1- La promotion touristique : Un tourisme culturel
porté par les médinas
Depuis une vingtaine d'années, compte tenu de la
concurrence accrue en matière de tourisme mais aussi du caractère
périssable du produit touristique, les professionnels du tourisme
commencent à développer d'autres formules liées à
de nouveaux produits dont l'originalité et la nouveauté offrent
des atouts incontestablement compétitifs.
Les modèles de consommation sont modifiés. La
demande touristique évolue en fonction des changements socioculturels
profonds que connaissent les sociétés post-industrielles. Cela se
traduit par de nouveaux comportements des touristes qui deviennent entre
autres, plus intéressés par l'authenticité, la
découverte de l'autre, son mode de vie, sa culture et ses traditions. A
partir de là, le tourisme culturel devient attrayant pour davantage de
clients.
Les professionnels du tourisme marocain sont désormais,
conscients de l'importance du développement de cette forme du tourisme
compte tenu de la richesse du potentiel culturel du pays. Ceci s'est
concrétisé par un plan global baptisé Plan Mada'in
en tant que déclinaison de la vision 2010 à l'échelle
régionale et qui passe par l'élaboration de Programmes de
Développement Régionaux Touristiques (PDRT), dans le but de
repositionner le produit culturel marocain qui compte parmi les plus riches du
bassin méditerranéen. Ce tourisme s'appuie en grande partie sur
le produit "villes impériales" soutenu par la composante
"médina".
En effet, à la fin des années 1970, dans le
monde arabe an général, on assiste à une "recomposition du
discours sur la ville au travers du prisme du patrimoine" (A-C. KURZAC SOUALI),
2006, p. 60), accompagné par le rôle de l'UNESCO pour le soutien
et la sauvegarde du patrimoine à l'échelle mondiale. Ce
changement en faveur de la valorisation des centres historiques fait de ces
espaces des lieux de référence cognitifs affirmés et
reconnus. La médina, par conséquent, ne renvoie plus à une
image archaïque face à une modernité importée
"...le vieux centre constitue un pôle de fréquentation pour
effectuer des achats ou s'adresser à des services alors que les
activités de loisirs sont plutôt dirigées vers le
centre-ville moderne." (BERRIANE, 2003). Elle est identifiée,
désormais, à un espace représentatif de la culture
marocaine et des valeurs qui lui sont rattachées.
37
La promotion touristique des médinas participe
également à la valorisation de son image, à travers des
campagnes publicitaires qui mettent en avant leur authenticité, les
éléments fascinants qui les composent et la patrimonialisation de
certaines d'entres elles. La médina, hormis sa vocation liée aux
souks et au shoping, véhicule actuellement chez les touristes l'image
d'un espace imprégné de mythes et de dépaysement
singuliers.
Par ailleurs, Le discours politique, concrétisé
par la déclaration de sa majesté le roi Hassan II en Juillet 1980
met en avant l'authenticité du pays et fait de sa préservation
une obligation, il annonce: " Le Maroc doit demeurer le pays de
l'authenticité véritable, le vrai chemin qui mène à
la réalisation des ambitions de notre siècle de progrès et
de prospérité".
La revalorisation de la médina passe donc en grande
partie par son ouverture à un tourisme qui consomme les centres
historiques comme des lieux et des produits de valeur symbolique et culturelle.
La médina en tant que pilier du tourisme culturel est ainsi,
présente dans les campagnes publicitaires qui ciblent les
différents marchés touristiques. Ainsi, en 2003, une vaste
promotion sur le Maroc a été lancée en Europe et qui fait
du Maroc le pays des sens et où la médina fait figure du lieu
dépaysant par ses sons, ses couleurs, ses souks, ses produits et ses
parfums exotiques.
Ainsi, la promotion touristique de la médina comme
point d'appui au développement d'un tourisme culturel en sa
qualité de patrimoine-ressource, a permis une réorientation des
interventions des acteurs publics et privés vers les centres anciens en
leur accordant un nouveau statut au sein de la ville marocaine.
2-Promotion et support des investissements étrangers
au Maroc
a- L'engouement médiatique et l'afflux des
acheteurs étrangers
L'attrait que peut exercer la vie en médina sur les
étrangers est lié aux aspects de son originalité et les
représentations que celle-ci requiert dans l'imaginaire du touriste
occidental, fortement imprégné par les mythes de l'Orient, avec
ses charmes et ses secrets.
38
De ce fait, les médinas marocaines et surtout les
riads et maisons traditionnelles de villes comme Marrakech, Essaouira
et Fès ont bénéficié d'une grande
médiatisation internationale qui a contribué à la
diffusion à grande échelle du phénomène
d'acquisition de maisons en médina par des étrangers.
En effet, depuis la fin des années 1990, de nombreuses
émissions ont mis la lumière sur ces maisons de la médina.
A ce sujet, Capital, l'émission télévisée
diffusée sur la chaîne française M6 a donné une
grande impulsion au phénomène. Elle s'est
intéressée dans certains de ces épisodes aux riads
de Marrakech, puis d'Essaouira et quelques années plus tard
à ceux de Fès. « Les riads de Marrakech », tel
était le titre du premier épisode consacré à ce
thème, et où on y traite de l'achat d'une maison traditionnelle
dans la médina de Marrakech. Beaucoup d'épisodes ont après
suivi sur les riads d'Essaouira mais aussi ceux de Fès.
L'émission a eu un impact certain sur l'extension des ventes en
médina, à partir de 1998, grâce à des reportages
riches en informations et en témoignages, susceptibles
d'intéresser les différents touristes et investisseurs
potentiels. Les villes de Marrakech et d'Essaouira y sont
présentées comme une opportunité de faire fortune en
devenant propriétaire d'une maison traditionnelle au Maroc. Le
documentaire se base essentiellement sur des témoignages et des
histoires d'étrangers ayant déjà élus domicile en
médina ou ayant choisi d'en faire un business en reconvertissant leur
demeure en maison d'hôtes. Cette formule d'hébergement a en effet
connu un réel essor depuis l'intervention dans la même
émission du propriétaire de « La maison arabe », un
hôtel au style d'un riad à Marrakech. Les prix attrayants
annoncés dans l'émission ont entraîné un afflux
important pour ces maisons anciennes. D'autres épisodes de cette
même émission se sont plus tard intéressés à
Fès. Le documentaire la qualifie de « nouvel Eldorado de
l'immobilier pas cher », comme il ne manque pas de faire des comparaisons
en termes de prix et de l'état des bâtisses entre Fès et
Marrakech. Les caméras poursuivent les touristes étrangers dans
leur circuit de quête d'une demeure, visite de différents
riads, transactions, prix, négociations et démarches
d'achat. Tout y est vulgarisé et le discours est très
incitatif.
Par ailleurs, d'autres émissions
télévisées en France ont aussi exploité les
riads de Marrakech, notamment sur Voyage, la chaîne
satellite spécialisée dans l'industrie du voyage. Mais aussi sur
la chaîne française TF1 dont les journaux
télévisés, ont fait passer des reportages qui parlent
d'une retraite dorée au Maroc. 5 000 Français y habitent,
apparemment, parmi eux beaucoup de retraités qui sont partis pour
pouvoir mieux vivre, car leur retraite ne le leur
39
permettaient pas en France. D'autres reportages sur la
même chaîne évoquent désormais l'explosion du
marché de l'immobilier au Maroc et mettent la lumière sur le
salon de l'immobilier marocain dont la cinquième édition a eu
lieu à Paris du 8 au 11 mai 2008, et qui représente une base
forte qui renforce l'investissement étranger au Maroc. Par ailleurs, un
nouvel élan est donné par la diffusion du magazine «
Eco-décode », un magazine hebdomadaire qui traite d'un thème
mensuel, diffusé sur huit TV régionales de Suisse romande,
où l'on parle des riads du Maroc sous le titre : « Maroc :
nouvel eldorado ? Riad : le rêve devenu réalité ? »,
et où les riads y sont présentés comme des palais
mystérieux typiquement marocains, dépositaires d'une riche
culture, et où les Européens peuvent passer leurs vacances ou y
couler une douce retraite.
D'autre part, depuis 2003 des émissions
télévisées dans le monde anglo-saxon ont aussi
traité la possibilité de résider au Maroc, notamment sur
la chaîne CNN, à travers le documentaire Design 360, dans
lequel était décrite la vie dans les riads de Marrakech
et de Fès. Ou encore, en 2005, sur la chaîne BBC, à travers
l'émission Uncharted Territory, où les animateurs
conseillaient aux touristes britanniques d'acheter une maison ancienne à
Fès.
L'engouement médiatique c'est aussi des
émissions radio, dont notamment celle de Mounia Daoudi, « Dimanche
économie », sur la Radio Française Internationale (RFI) qui
diffuse sur ses antennes l'actualité internationale en français
et en 19 autres langues. En 2006, Mounia Daoudi se demande si le Maroc
était devenu le nouvel Eldorado des seniors français ?, une
émission de vingt minutes qui explique très bien les
différents aspects relatifs à l'achat d'immobilier au Maroc
notamment dans les médinas de Fès et de Marrakech.
La télévision a été un outil
exceptionnel de promotion des médinas, par l'impact direct qu'elle a eu
sur le nombre d'Européens ayant traversé le détroit de
Gibraltar pour poser leurs valises dans le royaume du Maroc. En effet, à
la question, comment avez-vous eu l'information sur les maisons en vente dans
la médina ? Un touriste français nous répond : «
L'idée m'est venue d'une part par les émissions qui sont
passées en France qui ont éveillé mon esprit
...».
D'autre part, la presse écrite et internet ont
contribué de leur côté à faire augmenter encore
davantage l'intérêt des touristes étrangers pour les
investissements immobiliers dans la médina. Des périodiques et
des revues (Le Revenu, Maroc Hebdo international, Le Parisien économie,
Medina, Maisons du Maroc, la revue de la compagnie aérienne allemande
Lufthansa ...) véhiculent des images qui jouent sur le caractère
prestigieux et luxurieux des
40
demeures de la médina. Porté par des images et
des textes enthousiastes, habiter la médina devient un art de vivre
à l'oriental. Le Magazine marocain Médina, a
consacré dans une de ses éditions un numéro spécial
aux maisons d'hôtes de Marrakech. Les revues d'architecture
également, se font des porte-parole des architectes et
propriétaires étrangers de demeures en médina et
participent, de ce fait, à la mise en scène de leur art et
savoir-faire architectural. Tel est le cas de la revue Architecture du
Maroc qui a également consacré un numéro
spécial aux vieilles demeures à vendre en médina et
particulièrement celles faisant fonction de Maisons d'hôtes.
L'invitation au voyage et à la
pénétration de l'espace `médinal' a été
largement portée par la télévision et les revues et
périodiques internationaux. Toutefois, le réseau internet est
fortement impliqué lorsqu'il s'agit de commercialiser la médina
et ses demeures auprès d'un public plus large. En effet, il est l'outil
incontestable des différents acteurs privés. Il regroupe en
grande partie les propriétaires de demeures notamment celles à
usage touristique, mais aussi des agences immobilières
spécialisées dans la vente des riads dans les
différentes médinas du Maroc, des entreprises de restauration,
des blogs de nouveaux propriétaires...etc. La mise en scène faite
sur les pages web à travers les vidéos, les sons et les images
finement choisies permet aux internautes l'immersion en amont dans l'ambiance
de l'espace urbain de la médina.
La promotion de la médina et de ses demeures
traditionnelles doit beaucoup à leur forte médiatisation. Les
supports étudiés dans ce qui précède ont beaucoup
joué dans la vente de la médina. Ils apportent à cet
espace patrimonial un nouveau regard qui s'insère dans les nouvelles
logiques de mondialisation des échanges renforcé par
l'arrivée à cet espace identitaire d'étrangers
nombreux.
b- Le rôle du transport aérien dans le
soutien à la valorisation des destinations touristiques
"...Comme Nous l'avons vivement recommandé dans le
Message Royal que nous avons adressé lors de vos troisièmes
Assises tenues à Agadir au début de l'année
dernière, le projet de réforme de la carte du ciel vient
d'être achevé. Ceci permettra non seulement la
libéralisation du secteur, mais aussi une réduction du coût
du transport, une plus grande
41
fluidité et une desserte appropriée et
directe entre les marchés émetteurs et les zones touristiques. De
cette façon, le transport aérien cessera d'être un handicap
dissuasif pour devenir un réel facteur persuasif de la politique de
promotion touristique". Extrait de la lettre royale
adressée le 12 février 2004 aux participants aux
4èmes Assises Nationales du Tourisme de Casablanca.
Dans le but d'accompagner la "Vision 2010" pour le tourisme et
afin de profiter des opportunités de développement offertes pour
le secteur du transport aérien au Maroc, le Ministère de
l'Equipement et du Transport a mis en oeuvre une politique de
libéralisation du secteur du transport aérien et d'ouverture
cadrée du ciel marocain.
La libéralisation, effectuée en 2004, et
l'entrée en vigueur de l'Open Sky en 2006 ont eu un impact positif sur
le tourisme au Maroc. En effet, en brisant le monopole public longtemps
exercé par la Royal Air Maroc (RAM) sur le trafic aérien, le
nombre de passagers a enregistré un essor remarquable, puisque il a
presque doublé, passant de 5,3 millions passagers en 2003 à 10,1
millions en 2007. Les touristes, parfois futurs résidents, et les
résidents ont ainsi l'occasion d'accentuer leur mobilité en
partance et à destination du Maroc.
« La libéralisation du transport aérien
constitue l'une des meilleurs façons de contribuer à la mise en
oeuvre d'une nouvelle politique touristique », comme mentionné
dans l'Accord Cadre de 2001. Les acteurs publics et privés sont
désormais conscients des synergies importantes qui existent entre le
tourisme et le transport.
Dans ce sens, les fréquences des vols internationaux,
de même que le nombre des passagers, ont augmenté sensiblement.
Ainsi, depuis 2004, le nombre de passagers a enregistré un taux de
croissance annuel moyen de 19% entre 2003 et 200733. Une
augmentation due majoritairement à l'introduction de nouvelles
compagnies aériennes régulières et low-cost. En 2004, il y
a eu l'entrée en vigueur de la compagnie aérienne low-cost «
Atlas Blue », filiale de la RAM, spécialisée dans la
desserte aérienne des destinations touristiques du Royaume, notamment
sur Marrakech, par des vols charters et réguliers point à point.
Il s'agit de Marrakech-Lille, à raison d'un à deux vols par
semaine, Marrakech-Nantes avec 3 vols par semaine, Marrakech-Marseille avec une
fréquence quotidienne durant la saison d'été, Paris-
33 Le Soir Echos, le 17 juin 2008.
42
Marrakech, à raison de 4 vols quotidiens, 3 vols par
semaine sur la ligne Milan-Marrakech et 2 vols par semaine sur les lignes
Marrakech-Madrid et Marrakech-Barcelone. A partir de 2006, la compagnie
aérienne irlandaise « Ryanair », a inauguré à
son tour, des liaisons régulières avec Marrakech, Fès mais
aussi Oujda. Cette compagnie à bas coût, assure la desserte de
Marrakech et de Fès à partir de Francfort, Londres et Marseilles
Provence, comme elle opère à compter de l'année 2007, 3
vols hebdomadaires à partir de l'aéroport Girona de Barcelone
à destination de Marrakech. Néanmoins, il paraît que
l'augmentation des taxes d'atterrissage à l'aéroport de
Fès s'est soldée par la suppression des vols directs
assurés par Ryanair depuis la Grande-Bretagne. De toute évidence,
cela profite à Marrakech et à Casablanca et Fès en a
très lourdement fait les frais. Par ailleurs, dès 2006
également, un nouveau transporteur britannique entre dans le ciel
marocain. Il s'agit d'Easy-Jet, c'est l'un des leaders européens du
low-cost. Easy-Jet se démarque par les vols quotidiens qu'elle assure
entre Londres Gatwick et Marrakech, à des prix très attractifs et
une offre bien ciblée via Internet.
De surplus, cette politique d'open sky a permis de drainer
d'autres compagnies aériennes. Leur nombre s'élève
à quelques 46 compagnies aériennes depuis la
libéralisation, dont notamment : Corsair, Air Horizons, TUI Airlines
Belgium, Virgin express, SN Brussels, Hapag Lloyd, LTU Airline, Air Berlin, Air
Europa, First Choice Airways et Neos. Ces compagnies effectuent des vols
à partir de France, Belgique, Allemagne, Espagne, Grande Bretagne et
Italie vers les principales destinations touristiques du pays, à savoir
Marrakech, Fès, Essaouira, Rabat, Agadir, Ouarzazate, Tanger, Oujda et
Nador.
L'accord euro-marocain sur l'open-sky prévoit
également la suppression des limitations de nationalité et de
capacité pour toutes les compagnies européennes et marocaines
pour les liaisons entre l'Europe et le Maroc. En vertu de cet accord, les
compagnies marocaines et européennes peuvent desservir plusieurs
destinations européennes à la fois par le biais des escales,
à condition que le point de départ soit l'Union Européenne
(UE) ou le Maroc. Les compagnies européennes pourront également
desservir, à partir du Maroc, tous les pays
subméditerranéens concernés par la politique de voisinage
de l'UE34.
34 Le Matin, le 7 mars 2006.
43
L'entrée sur le marché marocain de nouvelles
compagnies étrangères à bas prix, la multiplication des
lignes aériennes et l'augmentation de la desserte profitent beaucoup au
Maroc et aux touristes et futurs résidents étrangers. La demande
étrangère conditionne la stratégie de localisation des
différentes compagnies et confirme ainsi une valorisation
sélective de certains espaces en facilitant leur accès. Pour la
ville de Fès, et parallèlement à une faiblesse du nombre
des nuitées, des mesures ont été prises en vue
d'améliorer la dimension internationale de son aéroport et la
desserte sur la ville, parallèlement à une forte promotion de
celle-ci et de son patrimoine durant la période 2003-2004.
La vogue des Occidentaux pour les médinas marocaines
doit beaucoup à l'ouverture du Maroc sur la scène internationale
qui a été accélérée par la promotion du pays
et la médiatisation des images de son espace de vie traditionnel pour
développer son marché touristique, soutenue par l'ouverture du
ciel marocain et la multiplication des vols directs en provenance des pays
occidentaux et à destination des principales villes touristiques du
Maroc. L'élan pour les médinas confirme ainsi le choix de
certains d'envisager ces lieux comme des espaces touristiques à
consommer autrement que le temps d'un voyage.
III- La valorisation de l'espace médinal de
Fès : prémices de la mise en tourisme
La médina de Fès a
bénéficié outre ses potentialités touristiques et
sa forte image culturelle, d'un intérêt de sauvegarde et de
reconnaissance universelle par la mise en place d'une image de plus en plus
valorisante et la recomposition du discours sur son centre ancien par le prisme
du patrimoine. A cette démarche patrimoniale vient s'intercaler une mise
en valeur touristique. La médina de Fès illustre assez
parfaitement un passage de la prise en compte du patrimoine à la
touristification et la mise en tourisme de celui-ci.
44
1- Sauvegarde et patrimonialisation de la médina de
Fès : Une politique qui bat au rythme de la touristification
Fès est une ville historique, fondée en l'an
809, a une population de 150 461 habitants occupant 12 212 maisons dont 9369
maisons traditionnelles à caractère historique. La Médina
avec ses deux entités Fès El Bali et Fès Jdid est un lieu
d'activité (9600 unités) et en particulier de production
artisanale non polluante (1276 ateliers).
Fès a connu à la fin du 19ème
siècle, un rythme de dégradation continue marqué par trois
phases principales : abandon, surexploitation, mauvaise restauration et
occupation inadéquate des lieux, en parallèle avec une
dégradation avancée des infrastructures et des équipements
socio-éducatifs. Autant de facteurs qui ont favorisé le
surpeuplement de la médina qui atteignait au cours des années
1980 plus de 180 000 habitants. Cette surdensification a eu de graves
répercussions sur les conditions de vie de la population et sur la
qualité du cadre bâti. En effet, sur les 13 385 bâtisses de
la médina de Fès (dont 11 601 historiques),
l'ADER-Fès35 a relevé globalement, 34% de logements en
mauvais état, dont 31% à Fès El Bali et 67% à
Fès Jdid. (Cf. Carte 4)
C'est ainsi que la médina de Fès a fait,
à partir des années 1980, l'objet d'une attention de plus en plus
soutenue. Elle a bénéficié de la mise en place d'une image
valorisante de ses tissus anciens par le biais d'acteurs locaux et
internationaux. Ainsi, au comble de sa dégradation, la médina de
Fès reprend son dynamisme grâce à sa patrimonialisation.
Rappelons ici que la « patrimonialisation » correspond au processus
par lequel une communauté reconnaît, en tant que patrimoine, des
productions de sa culture héritées des générations
passées ou produites par les générations actuelles et
jugées dignes d'être transmises aux générations
futures36.
35 Agence pour la Dédensification et la
Réhabilitation de la Médina de Fès.
36 SKOUNTI, 2004, p.149, cité par A-C. KURZAC
SOUALI, 2006, p.42.

45
Carte 4. Répartition des maisons
menaçant ruine dans la médina de Fès.
Source: ADER-Fès, 2000.
46
En octobre - novembre 1976, dans l'idée de sauvegarder
la médina de Fès, une assemblée générale de
l'UNESCO à Nairobi déclare la médina de Fès «
Trésor Culturel de l'humanité ». « Mais, c'est une
campagne sans précédent, par sa nature, dans l'action de
l'UNESCO. C'est la première qui soit entreprise en faveur d'une ville
islamique. L'action à mener constitue, par son ampleur, l'exemple d'un
des défis majeurs que l'humanité doit relever pour
préserver et enrichir son héritage culturel, devant les
contraintes que nous impose un processus de modernisation et
l'industrialisation accélérées. Ce défi est
à la hauteur des capacités et de l'imagination de l'homme.
» Par ces termes le Directeur général de l'UNESCO a
annoncé en 1980 l'intérêt que porte cette organisation pour
la sauvegarde de la médina de Fès. C'est ainsi qu'en 1981, la
médina de Fès a été inscrite sur la liste du
patrimoine mondial.
Cependant, l'intérêt du gouvernement marocain
pour la sauvegarde de la médina de Fès et sa valorisation comme
ville vivante dépasse son inscription par l'UNESCO sur la liste du
patrimoine mondial. Elle remonte au premier Schéma Directeur d'Urbanisme
de Fès préparé en 1975 et qui a été
confirmée par la lettre Royale du 21 juillet 1980 concernant la
sauvegarde de la ville (Cf. Annexe 2). Les études du schéma
directeur se sont concrétisées par le lancement d'une campagne
internationale pour la sauvegarde de Fès en 1980 et la mise en place
d'un plan visant à améliorer les conditions de vie des habitants
tout en préservant leur héritage culturel.
Ainsi, de 1980 à 1985 la "Délégation
à la sauvegarde de la ville de Fès" utilisant un compte
d'affectation spécial a réalisé les études
nécessaires qui ont permis l'élaboration d'une stratégie
globale sur différents niveaux d'intervention.
De 1985 à 1989 des opérations
expérimentales ont été menées par la
Délégation à la Sauvegarde de la Ville de Fès
(D.S.V.F) aux niveaux: de l'habitat, des équipements, des
activités artisanales, des infrastructures,...etc. La réussite de
ces opérations expérimentales a permis de démontrer que la
sauvegarde est possible dans sa conception intégrée et
grâce à la mobilisation des potentialités locales.
En 1989, le gouvernement marocain crée l'Agence pour la
Dédensification et la Réhabilitation de la Médina de
Fès (ADER-Fès), une agence d'exécution qui n'est autre que
la continuité de
47
la Délégation à la Sauvegarde de la Ville
de Fès, et dont la mission est la réalisation des programmes de
sauvegarde de Fès dans le cadre des prérogatives
gouvernementales. Cet objectif place l'agence au coeur d'un processus qui,
au-delà de la simple restauration du bâti, vise à adapter
le centre historique à son évolution démographique,
économique et touristique.
La patrimonialisation de la médina a
entraîné un changement de son statut. Elle est devenue un «
bien collectif » caractérisé par une nouvelle dimension
spatiale liée à son universalité déclarée.
En effet, au-delà de l'aspect lié à la protection des
bâtiments et des sites inscrits, la patrimonialisation permet
d'appréhender la médina de Fès comme «
patrimoine-ressource ».
L'image qui se dessine, de nos jours, pour la médina
est celle d'un espace patrimonialisé entièrement offert à
la consommation ludique et affecté à séduire les
touristes. En effet, le rapport tourisme/patrimoine ou
patrimonialisation/touristification n'est plus à démontrer.
« La relation est maintenant tellement évidente que l'on
pourrait presque superposer la carte des hauts lieux touristiques mondiaux avec
celle des ensembles patrimoniaux prestigieux37». Ceci
rejoint l'hypothèse de O. LAZZAROTTI (2000) à propos du «
patrimoine et du tourisme : un couple de la mondialisation », selon
laquelle « le tourisme et le patrimoine procèdent d'un
même système de valeurs, dont la diffusion mondiale est conforme
à un seul et même mouvement de mise en ordre d'un monde
».
Ainsi, l'instrumentalisation institutionnelle du patrimoine en
médina dévoile aussi la priorité économique de
cette sauvegarde, par la mise en valeur touristique du bâti ancien.
L'évolution de la place de la médina de Fès dans le
produit touristique marocain est illustrative de cette patrimonialisation qui
se matérialise de plus en plus par l'engouement des touristes pour les
maisons traditionnelles du centre historique de la ville et l'assimilation de
ce patrimoine dans le produit du tourisme culturel.
2- Le tourisme culturel à Fès : Une richesse
indéniable
Les médinas des villes impériales marocaines
(Fès, Meknès, Marrakech et Rabat) ont joué un rôle
considérable dans le développement et la promotion du tourisme
culturel. En effet, le
37 Propos de Jean DAVALLON in : Maria GRAVARI-BARBAS
(dir.), (2005), Habiter le patrimoine. Enjeux-approches-vécu,
p.220.
48
Maroc devrait sa renommé de pays touristique en grande
partie à sa composante culturelle qui lui permet, comme le confirme M.
BERRIANE, d'occuper encore aujourd'hui une place de choix dans le marché
international surtout si on le compare à la Tunisie. (BERRIANE, 2003)
Toutefois, comme le souligne encore une fois M. BERRIANE,
l'une des particularités du tourisme marocain est la concurrence
serrée et continue entre le tourisme culturel d'un côté et
le tourisme balnéaire de l'autre (BERRIANE, 2003, p.217). En effet, la
stratégie de relance du secteur touristique menée par l'Etat pour
l'horizon 2010 est essentiellement basée sur le produit balnéaire
à travers le projet de création de six nouvelles stations
touristiques dispersées sur les différentes côtes du
pays.
Tableau 1. Nuitées
réalisées dans les destinations culturelles Fès et
Marrakech en comparaison avec Agadir
|
|
2004
|
2005
|
2006
|
|
2007
|
TMAA* 00/07
|
Marrakech
|
3
|
866 976
|
4 986 194
|
5 278 929
|
|
5 572 847
|
6,5%
|
Fès
|
|
559 833
|
630 834
|
628 811
|
|
678 647
|
-0.1%
|
Agadir
|
3
|
860 999
|
4 168 992
|
4 609 917
|
|
4 655 701
|
2,1%
|
Total Maroc
|
12
|
253 160
|
14 211 374
|
15 207 945
|
15
|
822 274
|
3,1%
|
*Taux moyen d'accroissement annuel 2000-2007.
Source : Ministère du
Tourisme, Rapport dévaluation du tourisme marocain 2000-2006.
Jusqu'en 2003 le nombre de nuitées
réalisées en faveur du tourisme culturel était
inférieur à celui des séjours balnéaires (Agadir
avec 3 174 383 nuitées contre 3 048 107 nuitées à
Marrakech). Cependant, et à partir de l'année 2004, les
nuitées à vocation culturelle ont pris largement le dessus (Cf.
Tabl.1). Ceci s'expliquerait en partie par le vieillissement du produit
balnéaire classique et le changement des habitudes de consommation chez
les touristes étrangers avec le développement de nouveaux besoins
qui préconisent la découverte de l'autre et de sa culture. Mais
aussi par l'intérêt nouveau porté sur quelques
médinas des villes impériales et leur classement comme patrimoine
universel ainsi que les diverses actions de sauvegarde et de
réhabilitation qui ont permis à leur tour de relancer le tourisme
culturel dans ces villes.
49
L'attrait touristique de la ville de Fès a
milité, dès les années 1960, en faveur d'un tourisme
itinérant répondant aux besoins d'un tourisme national et
international. En effet, le séjour des touristes à Fès est
limité, car il ne dépasse pas les deux nuitées/touriste
(Cf. Tabl.2). Les retombés sur la médina sont donc très
faibles.
Tableau 2. Evolution de la durée moyenne
de séjour à Fès durant la période 2003-2006
2003 2004 2005 2006
Total 2,1 2,1 2,2 2,1
Source : Statistiques du Ministère du
Tourisme.
Cependant, Fès est marquée par son patrimoine
culturel et historique connu tant à l'échelle nationale
qu'internationale. Avec sa charmante médina, son artisanat d'art et de
services, ses monuments, son art culinaire et son festival des musiques
sacrées du monde, elle suscite le tourisme culturel par lequel elle se
démarque. En effet, Fès possède un potentiel culturel
d'une richesse indéniable. La médina intra-muros est la mieux
conservée des villes médiévales des pays arabes. Elle
renferme plusieurs catégories de monuments et sites touristiques qui
sont parmi les lieux les plus visités par les touristes. Il s'agit de
monuments culturels (médersa, bibliothèque et musées), de
monuments religieux (mosquées et mausolées), de sites artistiques
(murailles, palais, demeures et fontaines) et de quartiers artisanaux.
Les flux des étrangers dans la médina de
Fès s'accompagnent outre le besoin de découverte de
l'atmosphère d'une ville ancienne, de visites culturelles et d'achats.
« On va plus en médina pour faire des achats que pour y
flâner » (BERRIANE, 1988, p.206)38.
Jusqu'au années 1990, trois circuits touristiques
étaient opérationnels dans la médina de Fès. Il ne
s'agit pas de circuits ayant été matérialisés de
manière "volontariste" par les pouvoirs publics, mais plutôt d'un
essai de matérialisation des itinéraires qui étaient
suivis par les touristes de manière "spontanée" en dehors de
toute action de promotion. Ce sont : le circuit de Fès Jdid, le circuit
de Boujloud et le circuit de Palais Jamaï. Ces circuits ont
néanmoins
38 Cité par A-C. KURZAC SOUALI, 2006, p.30.
50
engendré des goulots d'étranglement dans des
quartiers comme Tala'a Kbira et Tala'a Sghira qui constituent les principaux
artères de la médina où se concentre l'essentiel de
l'activité artisanale, commerciale et touristique.
Actuellement, l'ADER-Fès a développé six
nouveaux circuits touristiques thématiques d'une heure trente environ
chacun, pour visiter la médina, proposant ainsi de nouveaux
itinéraires qui permettent aux touristes et visiteurs de
découvrir d'autres facettes touristiques restées jusque là
mal exploitées, comme elle a renforcé l'accessibilité et
la visibilité du tissu ancien par la mise en place de panneaux de
signalisation trilingues (anglais, français et arabe) afin de desservir
ces parcours thématiques et par conséquent de permettre au
touriste de passer plus de temps dans l'espace intra-muros (Cf. Planche 2). Il
s'agit des circuits: murailles et fortifications, palais et jardins andalous,
monuments et souks, artisanat et la rive andalouse (Cf. Carte. 5).
Par ailleurs, une nouvelle formule touristique sera
bientôt mise en place dans la médina de Fès. Cette mission
financée par le Programme des Nations Unies pour le Développement
(PNUD) répond à une demande exprimée par « La
Fondation Esprit de Fès ». Ce nouveau projet s'inscrit dans le
cadre de l'Initiative Nationale pour le Développement Humain (INDH) et a
pour objectif de participer à la promotion du tourisme spirituel dans
l'espace intra-muros, et par conséquent, de permettre d'améliorer
les revenus des populations locales pour les encourager à ne pas vendre
leurs demeures en médina.
Cette nouvelle forme touristique, à ne pas confondre
avec « la maison d'hôtes », consiste à faire loger les
touristes en quête de découverte d'histoire et de lieux culturels
au sein d'une famille de la médina de Fès en mettant à
leur disposition une ou plusieurs chambres de leur demeure avec un confort
adapté. Elle a également pour ambition de contribuer aux efforts
actuellement déployés, aussi bien par les autorités de la
Wilaya que par le Conseil Régional du Tourisme (CRT) de la ville, pour
faire de Fès une destination touristique à part
entière.
Les familles qui accueilleraient les touristes dans leurs
logements ont été déjà sélectionnées.
Il s'agit de 26 familles dans différents quartiers de la médina.
Les travaux de restaurations et de mise à niveau de leurs habitations
seront financés à part entière par les autorités
locales, et les bénéfices de ce tourisme seront recueillis par
ces familles.
51
Le statut de la médina de Fès a de plus en plus
évolué d'un espace parcouru à un espace de séjour.
La multiplication des hôtels à bas prix en médina et
l'évolution de ce concept pour s'adapter au besoin de l'immersion du
touriste dans la culture autochtone, par l'apparition d'un nouveaux mode
d'hébergement en riads et l'afflux de plus en plus important
des étrangers pour l'acquisition de ces maisons traditionnelles jouent
tous en faveur du développement et de la mise en tourisme de la
médina de Fès.
Carte 5.
Les circuits touristiques dans la médina de
Fès

Artisanat
La Rive Andalouse
Monuments et Souks
· Beri kn rd
1[~.,vlcn.l hbi.r.-,
F'~uilo G
d
1 1 d 1 h%f g.
nrlde I,
wu.
B, Al .I.nyel
Murailles et Fortifications
Palais et Jardins Andalous
Fes Jdid-
Fnn IB
R F'_v dr Ane Inuû
. 1.br.., rxl
J. f~ dr I ilrl~.i,er
zaa
A
Lieux et sites touristiques
Tannerie
Palais et belles demeures
A Médersa
Mausolée
Mosquée
[71 Fondouk
Circuits touristiques
Circuit Palais et Jardins Andalous Circuit Murailles et
Fortifications
- Circuit Monuments et Souks Circuit La Rive Andalouse
- Circuit Fès Jdid Circuit Artisanat
I. f{,n.x.r.
52
Source. ADER-Fée
|
(c)Widad-Jodie BAKHELLA, Master ADEGEST, 2008.
|
|
|
|
Planche 2

Formes de sauvegarde et de mise en valeur touristique
de la médina de Fès
W-J. B, juillet 2008
W-J. B, juillet 2008
Figure 1 : Bab Boujloud, l'une des
principales portes d'accès à la Médina. Ses façades
ont été ornées de lampes de lumières pour renforcer
les couleurs des zelliges. Ils sont de couleur bleue sur la façade
extérieure, comme signe de bienvenu, et de couleur verte sur la
façade intérieure, comme signe de paix.
ADER-Fès.
Figure 3 : Des interventions urgentes dans la
médina pour éviter les risques d'effondrement.
53
Figure 2 : La place Seffarine au quartier
Qettanine en cours de travaux d'embellissement et de restauration.

W-J. B, juillet 2008
Figure 4 : photo qui montre les signaux
touristiques de parcours piétons sous forme de pictogramme
accrochés aux murs à l'entrée de la médina par Bab
Boujloud.
W-J. B, juillet 2008
Figure 6 : panneaux de signalisations
installés dans l'une des ruelles de la médina.
Figure 5 : Un signal explicatif fournissant
des informations sur un site figurant dans un des circuits touristiques. La
couleur joue le rôle d'un code caractérisant chaque parcours.
54
55
Conclusion
La fonction culturelle affirmée de la médina et
la patrimonialisation de son espace présentent une nouvelle façon
d'envisager ce centre ancien. En plus, l'afflux engagé par des acteurs
étrangers sur les demeures anciennes participe à
l'évolution de la fonctionnalité de l'espace `médinal'
d'un espace résidentiel à un espace touristique. Nous avons
à travers ce chapitre essayé de présenter un état
des lieux sommaire de cette forme touristique émergeante dont se
distinguent les centres anciens du Maroc, à travers les cas de Marrakech
et d'Essaouira. Cette contextualisation nous a permis de voir comment le
phénomène des acquisitions étrangères est apparu au
Maroc et les modalités de sa propagation, pour pouvoir par la suite en
comprendre l'arrivée à Fès.
A travers l'étude des médinas les plus
dynamiques, nous avons pu déterminer que les lieux pivots de la
touristification s'établissent et se diffusent par effet
d'entraînement selon les centres à haute valeur patrimoniale les
plus prisés et les plus accessibles.
Le bilan de ce chapitre nous permettra de nous pencher sur la
description du phénomène des acquisitions
étrangères qui, à l'instar des médinas de Marrakech
et d'Essaouira, se développe et prend de plus en plus d'ampleur dans la
médina de Fès.
Le deuxième chapitre mettra ainsi en évidence
l'évolution de ce phénomène dans la médina de
Fès .Comme nous nous attacherons à envisager la manière
dont le nouvel habitant étranger perçoit la médina, les
modalités d'organisation de ce nouveau marché et les
différents modes d'investissements. Ce deuxième chapitre devrait
nous permettre de savoir si ce qui se passe actuellement à Fès
est une mise en tourisme ou une touristification de la médina ?
56
Chapitre II :
Mise en tourisme ou touristification de la
médina de Fès par les
étrangers
propriétaires de maisons
57
Introduction
La mise en valeur de la médina de Fès en tant
qu'un espace rempli de sens et chargé de valeurs et l'affirmation de sa
vocation culturelle, ainsi que la patrimonialisation de son bâti ont
aidé à la construction d'une nouvelle manière de percevoir
la médina, en fonction des différents acteurs et enjeux
touristiques en place.
Le tourisme culturel en médina repose essentiellement
sur la mise en tourisme de cet espace urbain et de son patrimoine. En effet, le
produit touristique est une matérialisation des mythes et des images, et
le touriste, lui, est de plus en plus tenté par la recherche de
l'authenticité.
A travers ce chapitre, et après avoir
étudié le phénomène de la vogue des
étrangers vers les demeures traditionnelles dans les médinas
d'Essaouira et de Marrakech et en s'attardant sur le contexte lié
à la sauvegarde et à la patrimonialisation de la médina de
Fès, nous essaierons d'analyser ce phénomène dans la
médina de Fès en caractérisant la structuration du
marché immobilier et les différentes phases de son
évolution. Nous nous attacherons ensuite à indiquer les formes
que prennent les investissements étrangers compte tenu des usages faits
de ces demeures anciennes de la médina dans leur relation avec une
possible mise en tourisme ou touristification de cet espace
spécifique.
Ces deux termes sont à usage récent dans
l'étude géographique du tourisme et peuvent ainsi prêter
à confusion. Nous n'allons pas reprendre les définitions
citées en introduction générale de cette recherche.
Cependant, nous allons en clarifier le sens en se basant toujours sur les
recherches de J.-M. DEWAILLY. Selon lui, « la Touristification
pourrait concerner le processus, et l'état qui en résulte, de
développement relativement spontané, non planifié du
tourisme, s'appliquant à un espace, une société, une
économie ... Les acteurs en sont plus isolés, moins
institutionnels ». Alors que la Mise en tourisme « pourrait
désigner le processus, et l'état qui en résulte, d'un
développement plus planifié, plus volontariste,
contrôlé, sinon maîtrisé, s'appliquant aux
mêmes objets. Le rôle des décideurs et acteurs locaux, hors
des particuliers et entreprises privées, semble plus important dans
l'élaboration des processus et des décisions qui provoquent ou
accompagnent le développement du tourisme ». (J.M DEWAILLY,
p.30-31 in AMIROU et alii, 2005). Les deux termes sont en
effet, complémentaires et ne peuvent pas faire objet d'une opposition
irréductible. Ce que nous
58
essaierons de démontrer au fur et à mesure de
notre avancement dans ce chapitre en tentant d'expliquer si ce qui se passe
actuellement dans la médina de Fès est une mise en tourisme ou
bien une touristification.
59
I- Les maisons de la médina de Fès : Vers
une nouvelle forme de mise en tourisme
L'arrivée de nouveaux habitants étrangers dans
la médina de Fès est orientée par un ensemble d'images que
ceux-ci se font de la ville de Fès en général, et de sa
médina en particulier. Cet afflux s'est concrétisé de plus
en plus à travers le temps en prenant différentes formes
liées à quatre temps distincts de cette installation et
impliquant une restructuration du marché de l'immobilier qui tend
à répondre à cette forte demande. Cette installation en
médina se matérialise par des usages différents faisant
parfois évoluer l'espace résidentielle vers un espace de
pratiques touristiques.
1- L'image de Fès chez les étrangers
« [...] la ville des autres constitue des lieux de
l'ailleurs, c'est-à-dire des dispositifs spatiaux qui
emblématisent l'ailleurs, qui en constituent une
icône39 ».
Nombreux sont les étrangers en médina de
Fès qui y séjournent à temps partiel dans une
résidence secondaire ou y habitent dans une résidence principale
ou encore en y investissant dans l'aménagement de leur demeure en une
maison d'hôtes. Posséder un riad ou une maison
traditionnelle dans la médina de Fès est devenue, à
l'instar de ce qui s'est produit à Marrakech, un phénomène
de mode chez les Occidentaux.
Au-delà de sa renommée internationale
liée à sa labellisation en tant que patrimoine universel et
à sa forte image culturelle, la médina de Fès
évoque chez les étrangers qui s'y installent une série
d'images et de représentations. Les enquêtes
réalisées auprès des nouveaux habitants
révèlent que le choix de s'y installer répond aussi
à une recherche de dépaysement et d'une nouvelle façon de
vivre. Le gérant d'une des premières maisons d'hôtes
à propriétaire étranger dans l'ancienne médina
« Riad Mabrouka » exprime son envoûtement pour le style de vie
dans la médina de Fès: « c'est un des derniers exemples
au monde de ville organisée comme autrefois, sans voitures et avec
toutes les corporations artisanales ». Cet attrait pour
39 L. LUSSAULT, « Quelques images de la ville
arabe », Géographie et cultures, n°29, printemps
1999, pp.39-58. In : A-C. KURZAC SOUALI, 2006, p.170.
60
la médina préconisant un mode de vie ancien par
opposition à la vie en ville, a été le plus souvent
évoqué par ces nouveaux venus. Comme le soulignait une
enseignante de nationalité américaine: « The medina is
[...] unique in that it is so old, no cars, feels like a small town as opposed
to part of a large city ». La médina serait, comme le
résume bien dans ses mots, le directeur d'une agence immobilière
de nationalité française: « Une ville hors du temps
actuel, un art de vivre `à l'ancienne' autour des valeurs
traditionnelles ». Ainsi, l'idée que l'on retrouve souvent
chez les enquêtés est celle de retrouver dans cette médina
des éléments de l'espace de vie d'un temps plus ancien, où
les valeurs auraient été conservées avec acuité.
Une authenticité mais aussi des valeurs architecturales et urbaines
particulières. Le rythme de vie en médina, la proximité
des sites culturels, des commerces et des souks de fruits et de légumes
sont soulevés comme des éléments décisifs du choix
de l'installation en médina.
D'autres étrangers soulignent les contrastes importants
qui résident dans cet espace unique. La médina semble les
transporter dans un autre monde. Comme l'exprime une française assez
âgée : « Une vie grouillante de richesses individuelles,
de couleurs, d'odeurs, de formes. Un voyage tous les jours renouvelé,
l'exotisme à domicile [...] ». La médina de Fès
est aussi évoquée chez ces nouveaux habitants comme un lieu de
magie, de mythe, de spiritualité, de joie de vivre et de fascination
continue. Une autre étrangère de nationalité anglaise en
médina relie sa décision de venir au Maroc et de s'installer
à Fès à l'attrait exercé par le Festival de
Fès des musiques sacrées du monde : « I was enticed by
the Fes Festival of world sacred music and decided to stay ».
D'autre part, l'acceptation et l'amabilité des
habitants de la médina interpellent et attirent beaucoup
d'étrangers : « The warmth and generosity of its inhabitants
has been fantastic » souligne un jeune anglais gérant du
premier et seul café culturel dans la médina de Fès «
Café Clock ». Un autre américain assez âgé
souligne: « Fez is also one of the few places in the Islamic world
where foreigners can live comfortably and safely in the old quarter of the
city. I've lived in the medina for over nine years, and it has been a wonderful
experience. At no point have I felt threatened, and find the people here
friendly and hospitable, [...] ». En effet, les rapports humains et
de voisinage ont été le plus souvent, évoqués par
les nouveaux résidant en médina comme un aspect qui
caractérise la vie dans le tissu ancien, par cette chaleur humaine
perdue dans l'Occident.
61
Cependant, mis à part ces caractères d'ordre
émotionnel lié à cet art de vivre à l'ancienne et
aux images visuelles, sonores et olfactives de la médina, une composante
de choix s'impose, même si elle n'est pas souvent évoquée
par les enquêtés. Il s'agit du coût de la vie largement
faible au Maroc. Ce qui constitue pour ces étrangers une
opportunité d'acquérir une belle maison à un prix d'achat
raisonnable. « [...] it's one of the few cities in the world where
it's possible to own a magnificent traditional house for the price of a modest
car. », nous affirme un acheteur américain. En effet, les
étrangers peuvent acheter à moindre coût par rapport
à l'Europe ou ailleurs, une grande maison traditionnelle avec cour
intérieure à un prix qui ne vaut même pas celui d'un studio
dans leur pays d'origine, et bénéficier en outre, d'un pouvoir
d'achat accru qui les place dans un niveau de vie nettement supérieur
à celui qu'ils avaient dans leur pays. Comme nous le confirme une
résidente anglaise : « It's a hugely good investment. If I
convert that money to British or South Africa I can not buy an apartment with
this ». S'ajoutant à cela l'intégration
facilitée par la langue, et une proximité géographique,
surtout pour les pays européens, facilitée par un coût de
transport abordable.
Nous avons essayé de synthétiser ces
différentes perceptions et images de la médina de Fès chez
les nouveaux habitants étrangers dans un schéma qui
représente de façon sommaire les expressions rencontrées
dans les enquêtes de terrain auprès de ces nouveaux occupants (Cf.
Figure 1).
A partir de l'analyse de la représentation de la
médina de Fès chez ces nouveaux touristes étrangers y
résidant, il s'avère que ceux-ci soient venus y chercher une
nouvelle vie, simple et chaleureuse, lassés par la modernité et
l'individualisme des sociétés modernes. Cette image exotique de
la médina est certes déterminante dans la décision de s'y
installer, cependant, nombre d'autres conditions ont aussi permis à ces
nouveaux venus d'acquérir des maisons dans la médina de
Fès.
62
Figure 1. Schéma de synthèse des
exemples de l'image de la médina de Fès chez les nouveaux
résidents étrangers*

Forte image culturelle Coup de coeur Authenticité
Spiritualité
Patrimoine de l'humanité Art de vivre à l'ancienne
Pièce d'histoire Ambiance unique Exotisme à domicile
Médina intemporelle Paix
Amour des maisons anciennes
Beauté
Lieu mythique et magique
Usage extrême des sens Echos
Joie de vivre
Lieu vivant et coloré Voyage renouvelé Vestige de
l'empire arabo-andalous
Lieu de travail Prix abordable Coup de transport raisonnable
Pouvoir d'achat accru Proximité de l'étranger
Besoin en place récréative
Opportunités
Sens du lieu
Médina de Fès
Qualités humaines
Qualités urbaines
Style de vie fascinant Esprit de famille Intégration
facilitée par la langue
Affection pour la population
Chaleur
Générosité des habitants Traditions
Diversité culturelle Bon voisinage
Richesse individuelle Mélange de populations
Architecture
Aspect préservé Interdiction de la circulation en
engins motorisés Atmosphère
Proximité des souks Proximité des sites culturels
Corporations artisanales Propreté Sécurité
Source: enquêtes personnelles,
juin-juillet, 2008. (Les mots sont cités par ordre de
fréquence)
* voire question n°16 du questionnaire en annexe.
63
2- Quatre grandes phases dans l'évolution des
investissements étrangers en médina
Le mouvement d'acquisition des anciennes demeures par les
étrangers dans la médina de Fès a connu un
développement rapide sur moins de deux décennies. Cette
installation étrangère est passée par différentes
étapes allant du cas isolé à la «
sur-représentation » de ces nouveaux occupants. Ainsi, l'on
pourrait distinguer entre quatre grandes phases de la programmation de la
médina en tant qu'espace de séjour et que l'on pourrait
énumérer comme suit :
· La fin des années 1990 : des cas
isolés
C'est à la fin des années 1990 que le
phénomène d'acquisition des maisons traditionnelles dans les
médinas marocaines a pris une grande ampleur. C'est ainsi que
l'exploitation de la médina de Fès en tant qu'espace de
séjour et d'habitation par les étrangers pris forme dans la
même période. La première maison traditionnelle à
avoir été vendue à un étranger dans la
médina de Fès date de l'année 1997.
La maison a été acquise par un américain
au fin fond de la médina. Ce passionné de maisons traditionnelles
est considéré par les fassis comme par les autres
étrangers venus s'installer plus tard, comme un « pionnier ».
Il a été dans plusieurs pays arabes, comme il a vécu cinq
années au Caire, en Egypte, avant qu'il se décide à
s'installer définitivement dans la médina de Fès. Sa forte
passion pour l'achat et la restauration des anciennes demeures l'a
poussé une année après à en acheter une autre au
coeur de la médina. Il en fait une maison de vacances à louer,
par opposition à la logique de fonctionnement d'une maison
d'hôtes. Dans l'espace de neuf ans, cet américain avait
déjà acheté cinq maisons dans la médina en prenant
plaisir à les restaurer pour participer à la sauvegarde de cet
héritage unique. « Our hope is that, at least in the case of
the more important houses, Moroccans and foreigners with the means to restore
these houses correctly would do so, either to live in them, or as a holiday
home or investment property. About one-hundred houses have been restored in the
past eight years, half by foreigners and half by Moroccans. This is a much
healthier situation than in some other Moroccan cities, where most of the
restoration has been done by foreigners»40. Dit-il pour
40 « Nous espérons qu'au moins, dans le cas
des maisons les plus importantes, les Marocains et les étrangers, ayant
les moyens pour restaurer correctement ces demeures, le feront, que ce soit
pour y habiter, ou pour en faire une maison secondaire de vacances, ou bien
pour y investir. Presque cent maisons ont été restaurées
dans
64
exprimer la raison pour laquelle il achète les maisons
traditionnelles tout en mettant l'accent sur le fait qu'à Fès, le
phénomène est un peu différent, dans la mesure où
ce ne sont pas que les étrangers qui achètent et restaurent ces
vieilles demeures, mais que les Marocains, essentiellement des fassis
ayant quitté la médina auparavant, expriment aussi un
désir d'y retourner.
Deux années se sont écoulées depuis
l'acquisition de la première demeure par un étranger dans la
médina, c'est alors que les premiers français y posent bagages en
1999, attirés par la richesse de son potentiel touristique et par sa
forte image culturelle, pour y investir en maison d'hôtes. Ils
acquièrent ainsi un beau riad de 620 m2 à un
million de dirhams (hors travaux) dans le quartier de Tala'a Kbira et le
rénovent dans le strict respect des traditions locales. Ces
français sont également qualifiés de pionniers à
venir s'implanter dans la médina de Fès et à y pratiquer
le commerce de maison d'hôtes. Ils ont été, de ce fait,
référencés dans la plupart des guides touristiques.
· Début des années 2000 et jusqu'à
fin 2003 : phase de stagnation du mouvement d'achat
Durant la période allant de l'année 2000
à l'année 2003, les effets de la guerre en Irak en mars 2003,
s'ajoutant à ceux, encore plus sensibles des attentats du 11 septembre
2001 aux Etats-Unis, avaient provoqué une nette régression des
flux globaux des touristes étrangers surtout à destination des
pays arabes, notamment le Maroc qui avait enregistré en cette
période une baisse importante des arrivées touristiques notamment
en provenance des Etats-Unis d'Amérique. Ce contexte lié à
la conjoncture internationale marquée par une crise
générale du tourisme a impliqué bien évidemment par
conséquent une stagnation des ventes dans la médina.
les huit dernières années, la moitié
par des étrangers et l'autre moitié par des Marocains. Ceci est
une situation meilleure que dans d'autres villes marocaines, où la
plupart des restaurations ont été faites par des étrangers
».
· 65
Depuis l'année 2004 et jusqu'à fin 2006 : phase
d'extension des propriétés étrangères dans la
médina
Marrakech étant jugée saturée et
chère au début des années 2000, Fès prit sa place
et devient la destination qui monte auprès des touristes, l'objectif
étant de devenir propriétaire d'une maison traditionnelle en
médina. Ainsi, après les quelques rares installations
étrangères, une troisième période marque la phase
d'expansion des maisons étrangères dans la médina de
Fès.
En effet, à partir de l'année 2004, un grand
mouvement d'achat des maisons traditionnelles par les étrangers a pris
forme. Il se poursuit durant les années 2005 et 2006 en enregistrant une
augmentation qui atteint son pic vers la fin de l'année 2006 (Cf. figure
2). Cet engouement sans précédent des étrangers pour les
maisons anciennes s'est développé dans un contexte de vaste
promotion du Maroc lancée en Europe vers la fin de l'année 2003
mais aussi grâce à la politique de libéralisation du
transport aérien en 2004 et l'entrée en vigueur de l'open sky en
2006, ainsi que la mise en place de vols à bas coût à
destination de Fès et l'instauration d'une nouvelle politique d'aide
à l'investissement des étrangers au Maroc, valorisée par
une vaste campagne de communication sur les opportunités
d'investissement ciblée auprès des investisseurs
étrangers. Ainsi, depuis 2004, Fès attire de plus en plus
d'étrangers qui logent en médina comme propriétaires ou
locataires. L'achat de demeures en médina de Fès s'est ainsi
étendu aux classes moyennes et aux différents pays
occidentaux.
Figure 2.

1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008
Source : enquête personnelle
auprès des acquéreurs, des agences immobilières, de la
conservation foncière et des collectivités locales (juin-juillet
2008).
· Depuis l'année 2007 et jusqu'à nos
jours : de l'apogée au déclin
Le grand mouvement d'achat des maisons traditionnelles par
les étrangers, enregistré dans la période
précédente se poursuit en 2007 avec une tendance à se
stabiliser avant de s'estamper visiblement vers la fin de l'année 2007.
En effet, les agences immobilières spécialisées dans la
vente des riads et demeures en médina ont accusé une
chute considérable du nombre des transactions immobilières.
« Jusqu'à 2007 déjà, on vendait une à deux
maisons par semaine. Maintenant, en six mois nous n'avons réalisé
que deux ventes. Actuellement, on vit par la restauration, plus de
ventes.», nous déclare avec une grande déception le
propriétaire de la première agence immobilière et de
restauration du patrimoine à Fès prise par des étrangers.
En effet, la forte demande en matière d'habitat traditionnel par les
étrangers a provoqué une réévaluation
foncière des biens immobiliers dans la médina de Fès (Cf.
Tabl.3). Les prix ont ainsi doublé en une année depuis le
début 2007. Une inflation estimée à +100% parfois et
surtout conjuguée avec un non rapport du prix avec la valeur du bien.
« Les prix n'étaient plus significatifs parce qu'à
l'origine ils n'étaient pas réels [...] ». nous
déclare le président de l'association de sauvegarde du patrimoine
et l'authenticité de Fès. Les prix sont devenus comme à
Marrakech. De ce fait, les étrangers préfèrent acheter
à Marrakech, parce que c'est pour eux un investissement plus sûr,
surtout quand il s'agit de maisons d'hôtes. Le prix de l'immobilier
à Fès a augmenté en l'espace d'une année,
contrairement à Marrakech où ça a pris du temps. A
Fès, il parait déjà que neuf maisons d'hôtes
seraient en vente pour des raisons de non compétitivité du
projet, et que 20% d'entre elles ne marchent pas bien41. «
Fès n'est pas comme Marrakech, il n'y a pas une vraie activité
touristique, des lieux de loisirs et de détente pour accompagner la
volonté de faire de la ville une destination touristique »
souligne un touriste français récemment installé en
médina.
66
41 Affirmation qui nous a été faite
par le directeur de l'association de sauvegarde du patrimoine et de
l'authenticité de Fès.
67
Tableau 3. Exemples de
réévaluation foncière des demeures dans la médina
de Fès
Superficie de la demeure
|
Année de l'achat
|
Montant de l'achat en DH
|
Montant des travaux
|
60-80m2
|
1998
|
160 000
|
250 000
|
620m2
|
1999
|
1 000 000
|
2 000 000
|
300m2
|
2000
|
180 000
|
250 000
|
120m2
|
2002
|
400 000
|
300 000
|
180m2
|
2005
|
740 000
|
_
|
80m2
|
2006
|
280 000
|
300 000
|
60m2
|
2007
|
480 000
|
150 000
|
320m2
|
2008
|
2 777 500
|
_
|
|
Source : enquêtes
auprès des acquéreurs (juin-juillet 2008).
D'autres raisons semblent expliquer cette baisse des ventes
et qui relèvent cette fois de la non fiabilité des transactions
immobilières, liées à l'inexistence d'une culture
écrite du mandat de vente (système de samsars), ce qui
entraine un changement de prix au dernier moment par les vendeurs, mais aussi
à la non actualisation des prix de ventes sur les sites internet de
certaines agences immobilières à Fès, chose qui provoque
une forte déception chez les acheteurs potentiels. En outre, la
suppression des vols directs de Ryanair en provenance de Londres et à
destination de Fès a causé une chute importante de la
clientèle anglo-saxonne. « A friend of mine works as a real
estate agent in England. Before the cheap airlines ceased their flights to Fez,
he had sold in a month, 30 houses in the medina. Now, he doesn't sell anything,
and I think this is bad »42, nous declare une
touriste anglaise habitant en médina. Par ailleurs, les correspondances
à partir de Casablanca sur Marrakech sont très fréquentes,
alors qu'il faut attendre 2h voir plus pour se rendre à Fès.
L'année 2008, est qualifiée d'année de
crise concernant l'élan des étrangers pour les maisons
traditionnelles, pourtant les prix des maisons n'arrêtent pas de flamber,
et une bonne partie d'entre elles sont en revente sur le marché. Il
s'agit principalement de maisons non rénovées ayant
été acquises par des anglais, qui semblent être de grands
spéculateurs.
42 « Un ami à moi qui travaille comme agent
immobilier en Grande Bretagne, avait vendu en un mois, avant la suppression des
vols à bas coût vers Fès, trente maisons dans la
médina. Actuellement, il n'en vend plus et je pense que ce n'est pas une
bonne chose. »
68
Ces étrangers-acheteurs ont toutefois joué en
l'espace de quelques années le rôle de principaux acteurs dans la
valorisation du centre historique de Fès en participant par leur
restauration à la patrimonialisation et la mise en tourisme de la
médina.
3- Un marché immobilier particulier et complexe
L'acquisition de maisons anciennes dans la médina de
Fès par les étrangers s'inscrit dans un contexte de
mondialisation des échanges, des pratiques et des personnes,
appuyé par une volonté politique du gouvernement marocain
d'encourager les investissements étrangers et l'arrivée des
touristes. En effet, le Maroc a procédé par des réformes
à la simplification et à l'allègement des
procédures administratives en vue du développement et de la
promotion des investissements dans le pays, avec en tête, ceux relatifs
au secteur du tourisme.
La loi Cadre n°18-95 formant la charte de
l'investissement43 indique dans l'article 16 relatif à la
réglementation des changes : « Les personnes physiques ou
morales de nationalité étrangère, résidentes ou
non, ainsi que les personnes physiques marocaines établies à
l'étranger, qui réalisent au Maroc des investissements
financés en devises, bénéficient pour lesdits
investissements, sur le plan de la réglementation des changes, d'un
régime de convertibilité leur garantissant l'entière
liberté pour le transfert des bénéfices nets
d'impôts sans limitation de montant ni de durée; le transfert du
produit de cession ou de liquidation totale ou partielle de l'investissement, y
compris les plus-values ». D'autres avantages fiscaux accompagnent
cette loi parmi lesquels ceux qui permettent aux retraités
européens qui, en acquérant le statut de résidents
permanents, bénéficient d'un abaissement du taux d'imposition de
30% en moyenne44.
Afin de répondre à une demande de plus en plus
forte pour les demeures traditionnelles en médina, la susciter mais
aussi l'anticiper, le marché de l'immobilier à Fès s'est
fortement transformé. Les transactions immobilières se faisaient,
selon une longue tradition à l'aide d'un samsar qui est
l'équivalent plus ou moins d'un courtier, et un agent ayant une grande
connaissance du stock de logements disponibles dans un quartier jouant le
rôle
43 Promulguée par le Dahir n° 1-95-213 du
14 Joumada II 1416 (8 Novembre 1995).
44 A-C.KURZAC-SOUALI, 2006, p.158.
69
d'intermédiaire commercial et de négociateur
entre les vendeurs et les acheteurs d'immobiliers. Ainsi, l'achat ou la
location de demeures dans la médina de Fès passait depuis
longtemps par le recours à ses services, les agences immobilières
étant rares, voire même, absentes.
Cependant, et avec l'apparition des premiers acheteurs de
maisons dans la médina, on pouvait déjà remarquer des avis
et des annonces accrochées ou transcrites sur les murs ou les portes des
demeures (Cf. Planche 3). Pour répondre à la forte demande sur
les demeures traditionnelles qui s'est concrétisée par la suite
vers le début des années 2000, un bon nombre d'agences
immobilières a vu le jour. Elles sont localisées en médina
ou en ville nouvelle et sont spécialisées dans la vente des
demeures traditionnelles dans le centre ancien. Celles-ci sont de plus en plus
visibles en se promenant dans les ruelles de la médina de Fès.
Des agences nouvelles apparaissent, mais aussi des épiciers et des
artisans se transforment, vu les bénéfices à tirer d'un
tel engouement pour les maisons anciennes, en agents immobiliers. C'est
à peine qu'un étranger pose les pieds dans l'une des ruelles de
la médina de Fès, qu'il est immédiatement abordé
par une personne multilingue qui lui demande s'il veut acheter une ancienne
maison en médina. Chose que nous avons pu expérimenter en prenant
des photos lors de nos investigations de terrain.
Ces réseaux sont désormais animés par la
création d'agences immobilières qui se distinguent par leurs
prestations diverses. En effet, bien plus que de simples intermédiaires
immobiliers, celles-ci essaient de s'adapter à la forte demande en
développant des prestations de services différentes et
particulières. L'exemple peut être fourni par la première
agence immobilière et de restauration du patrimoine ouverte par des
étrangers à Fès. Cette agence a ouvert ses portes en 2005
en ville nouvelle et est dirigée par un historien d'art et un
décorateur d'intérieur expert en objets d'art français.
Elle dispose d'une offre potentielle de 116 riads et demeures
traditionnelles et en a vendu jusqu'à maintenant quelque 110. Bien plus
qu'une simple agence immobilière, cette agence propose à ses
clients, principalement des touristes étrangers, des prestations en
amont et en aval de leurs achats et qui vont des transactions, à
l'accompagnement, puis à la restauration et ramassage des gravats et la
décoration d'intérieur. Les matériaux étant
transportés à dos d'âne, les travaux de restauration
peuvent prendre jusqu'à deux ans. Ces nouveaux services
développés par les agences immobilières sont donc en
mesure d'encourager l'achat des demeures par les étrangers, grâce
à ces opérations « clefs en main » susceptibles
d'intéresser les étrangers pressés et moins aventuriers.
Ces agences
70
agissent souvent en partenariat avec des notaires et des
samsars locaux. Ainsi, le marché immobilier en médina
préconise une nouvelle façon d'envisager les maisons
traditionnelles comme des biens immobiliers attrayants. L'outil de navigation
Internet est massivement utilisé pour commercialiser ces demeures
auprès d'un grand public. Le samsar reste malgré cela
présent dans cette nouvelle organisation du marché de
l'immobilier vu son savoir faire en la matière. En effet, selon notre
enquête de terrain, tous les étrangers interrogés ont eu
recours à un samsar pour trouver une maison dans la
médina.
Les prix de vente des maisons traditionnelles à
Fès est facteur de plusieurs variables. Le prix d'un riad
à Fès ne se fixe pas au nombre de mètres
carrés mais au nombre d'héritiers. Avec l'argent de la vente il
faut qu'ils puissent tous avoir de quoi s'acheter un appartement en ville
nouvelle. Une maison traditionnelle de 80m2, selon un agent
immobilier, pourrait valoir 20 000 euros, voire 300 000 euros pour les plus
luxuriantes. D'autres variables conditionnent le prix de vente, à savoir
l'état de la maison, 10% des maisons de la médina de Fès
sont en ruine, les Marocains n'ont généralement pas les moyens
pour les restaurer, ce qui fait qu'elles se vendent pour rien, d'autres sont
d'une forte valeur architecturale et historique et les prix suivent.
L'emplacement et la vue jouent aussi un rôle déterminant du prix
de vente. L'accessibilité et la proximité des parkings et des
stations de bus et de taxis fait que le prix de vente des demeures soit
élevé dans certains quartiers par rapport à d'autres.
A Fès, rares sont les maisons rénovées
qui se vendent, c'est la grande différence entre Fès et Marrakech
où la proportion est inversée. Aujourd'hui, les plus beaux
riads et demeures traditionnelles ont été
déjà vendues à des étrangers, dont la plupart
désirent les convertir en maisons d'hôtes.
Il est à souligner que le rôle des
étrangers dans l'organisation du marché de l'immobilier à
Fès est prépondérant. Ils sont des acteurs à double
titre de la mise en tourisme de la médina, parce qu'ils y habitent mais
aussi par leur implication directe ou indirecte dans les nouvelles dynamiques
qui apparaissent en médina. Ils sont acheteurs, investisseurs et
revendeurs de maisons anciennes.
W-J. B, juillet 2008
71
Planche 3
La multiplication des annonces de vente de demeures et
des agents immobiliers en
médina

W-J. B, juillet 2008
W-J. B, juillet 2008
W-J. B, juillet 2008

72
W-J. B, juillet 2008
W-J. B, juillet 2008
W-J. B, juillet 2008
73
II- Les maisons étrangères dans la
médina de Fès : Des usages polymorphes
Les nouveaux habitants étrangers dans la médina
de Fès sont des moteurs de la mise en tourisme par le poids de leur
présence et de leurs investissements dans le tissu ancien. Les maisons
achetées par les étrangers obéissent à des modes
d'investissement polymorphes qui correspondent à des logiques diverses.
On peut en distinguer deux qui sont fondamentaux : les maisons d'habitation
privée et les maisons à usage commercial ou culturel.
1- Les maisons traditionnelles : des habitations à
usage privé
La plupart des maisons anciennes à propriétaire
étranger dans la médina de Fès sont utilisées pour
l'habitation personnelle. Cependant, il est intéressant de
différencier entre celles qui jouent le rôle de résidence
principale et celles qui sont des habitations secondaires ou de vacances. Les
étrangers que nous avons pu rencontrer lors de notre enquête sont
principalement ceux qui font de leur maison une habitation principale. Les
autres, bien évidemment, n'étaient pas sur place, ce qui explique
le nombre de maisons vides dans la médina.
L'investissement en résidence principale est
réalisé par des personnes étrangères qui
résident et travaillent au Maroc. Leur choix de s'installer au Maroc
été conditionné par une bonne offre de travail pour les
uns, ils sont des professeurs, des architectes, des guides, des gérants
de société...etc. ou encore des personnes ayant plusieurs
demeures dans la médina dont une est à usage personnel. Pour
d'autres, c'est une envie de refaire leur vie tout simplement. C'est des
personnes généralement assez jeunes (30 ans et plus) ou encore
des retraités qui ont un capital d'argent et qui ont
décidé de tout laisser tomber pour venir s'installer en
médina. Ils sont aussi des locataires mais à une proportion moins
importante, ils utilisent en général ce qui s'appelle une
location emphytéotique. Il s'agit d'un bail immobilier de très
longue durée, le plus souvent 99 ans45. La location est
généralement réalisée par des personnes n'ayant pas
les moyens nécessaires pour acquérir la maison.
45 Mais pouvant atteindre 999 ans dans certains
pays, qui confère au preneur un droit réel sur la chose
donnée à bail, à charge pour lui d'améliorer le
fonds en échange d'un loyer modique, L'emphytéote (le locataire)
est un quasi-propriétaire du bien qui lui est donné à
bail.
74
D'autre part, ces maisons sont souvent des maisons
d'habitation secondaire ou de vacances, (expliqué par l'absence des
étrangers au moment de l'enquête). Les étrangers
achètent de ce fait des maisons qu'ils laissent vides et qu'ils ne
viennent visiter qu'une ou deux fois par an. Ce type d'usage en
résidence secondaire est le plus souvent le fait de retraités ou
de personnes assez âgées (50 ans et plus), mais il peut aussi
concerner des jeunes acheteurs dont la profession permet une certaine
mobilité. Ou encore des personnes qui réalisent des
investissements anticipés et des placements d'argent pour le future.
Cette catégorie d'étrangers utilise le plus souvent leur maison
à des fins commerciales pendant la période de leur absence, en la
louant à d'autres touristes étrangers voulant s'imprégner
de l'ambiance `médinale'. (Cf. Planche 4)
Planche 4
Les maisons d'habitations à
propriétaires étrangers dans la médina de
Fès

Figure 1 : Travaux de restauration dans un
grand riad à propriétaire français dans le
quartier Douh. Les modes de construction et de décoration reprennent les
éléments traditionnels
de l'artisanat marocain. Figure 2 : Une grande
dar achetée par un étranger
dans le quartier Ziat comme résidence secondaire.
W-J. B, juillet 2008
W-J. B, juillet 2008
W-J. B, juillet 2008
75
Figure 3 : Travaux d'installation d'un
jacuzzi et d'une douche sur le toit d'un riad acheté par un
français pour usage privé dans le quartier Douh.
76
2- Les maisons traditionnelles : des habitations à
usage commercial et culturel
Il existe un autre type d'usage lié aux maisons
traditionnelles achetées par les étrangers dans la médina
de Fès. Celui-ci est relatif à la reconversion de ces demeures
à un but lucratif en les aménageant en maisons d'hôtes ou
encore en un café ou restaurant. Comme elles peuvent aussi servir de
local pour les institutions culturelles. Ceci permet ainsi à certains de
couvrir leurs dépenses d'achat et de restauration.
En effet, de plus en plus de demeures dans la médina
de Fès sont utilisées comme une nouvelle forme
d'hébergement touristique selon la formule de maison
d'hôtes46, un concept nouveau qui a vu le jour vers la fin des
années 1990, et qui vend le désir d'habiter la médina.
Mais, c'est un concept qui est, du point de vu symbolique, en contradiction
avec l'hospitalité traditionnelle suivant laquelle l'hôte est
quelqu'un qu'on reçoit selon des règles de convenances claires.
Cette hospitalité consistait à refuser de faire payer
l'invité (l'hôte). « Lorsqu'on reçoit, c'est son
horizon géographique et symbolique qui s'élargit. [...] les
hôtes reconduisent ces règles immémoriales qui se
transmettent encore comme des coutumes [...] de l'ordre de la bienséance
élémentaire47 ». Pour M. CHEBBAK,
universitaire, « En toute rigueur, une maison est un foyer, un lieu de
vie et d'intimité où logent des résidents permanents qui,
par moments et selon les circonstances, reçoivent gracieusement et sans
artifices de véritables hôtes à qui l'on offre le
gîte et le couvert parce qu'ils nous sont proches. [...]Aujourd'hui, ces
attitudes d'accueil, de chaleureuses retrouvailles et d'exquises
convivialités [...] sont cyniquement récupérées par
le marketing touristique48. »
Déjà à la fin du Protectorat,
l'hébergement des touristes dans la médina de Fès se
faisait dans des anciennes demeures sous forme de petits hôtels qui se
trouvent principalement à Tala'a Kbira et Tala'a Sghira. Aujourd'hui les
maisons d'hôtes offrent au touriste la possibilité de
séjourner en médina dans une ambiance sophistiquée et
parfaitement dépaysante.
46 Selon la loi n°61-00 portant statut des
établissements touristiques, article 2 : « La maison d'hôte
est un établissement édifié sous forme d'une ancienne
demeure, d'un riad, d'un palais, d'une kasbah ou d'une villa et
situé soit en médina, soit dans des itinéraires
touristiques ou dans des sites de haute valeur touristique », in : Droit
du tourisme, première édition, 2004, p135.
47 Revue Architecture de Maroc, 2004,
Dossier « Les maisons d'hôtes » n°17,
juin-juillet-août, Archimédia, Casablanca, p.9.
48 Idem, p.29.
77
Actuellement à Fès sur les 56 maisons
d'hôtes déclarées et autorisées, quelques 27 sont
tenues par des étrangers, dont 17 sont classées. Un chiffre qui
reste très modeste en comparaison avec Marrakech, où le nombre de
maisons d'hôtes étrangères est estimé à
quelques 11049. Mais la particularité de Fès,
réside dans le fait que cet investissement en maisons d'hôtes est
pour la plupart réalisé par des marocains, principalement des
fassis ayant manifesté le désir de retour en
médina.
Les maisons d'hôtes dans la médina de Fès
ont été recensées et cartographiées par
l'ADER-Fès en 2006 (Cf. Carte 6). Il faut également envisager la
présence à Fès de maisons d'hôtes non
déclarées qui opèrent secrètement dans le domaine
en proposant les mêmes services. Nous avons pu en recenser en Juin 2008,
à l'aide des autorités locales, quelques 13 maisons. Les
propriétaires les louent par le biais d'Internet ou directement de leur
pays par la remise des clefs en main au locataire, ou encore en confiant la
maison à un marocain qui, une fois les clients sur place, s'occupera de
la gestion du logement et de sa location.
Les propriétaires des maisons d'hôtes
déclarées se sont regroupés en une association des
propriétaires des maisons d'hôtes de Fès. Le statut de
l'association n'a pas encore été approuvé. Mais celle-ci
démarre bien puisqu'elle a des missions et des objectifs clairs et
précis. Elle est présidée par un marocain, le
propriétaire de « la maison Bleue », et le conseil
d'administration est constitué à moitié d'étrangers
et à moitié de Marocains. Ses principales missions sont, entre
autres, de représenter les maisons d'hôtes autorisées
à Fès (médina et ville nouvelle), de promouvoir leur
activité et défendre leurs droits ainsi que d'organiser le
marché en luttant contre les activités clandestines.
La multiplication des riads aménagés
en maisons d'hôtes joue par cette réutilisation, un rôle
déterminant dans la mise en tourisme de la médina par la mise en
valeur du patrimoine domestique.
Une autre forme d'usage touristique des maisons anciennes
dans la médina de Fès par les étrangers est celle d'une
dar transformée en un café et restaurant culturel. Dans
la médina de Fès, il en existe un seul et qui est connu de tous
les étrangers qui y habitent.
49 Antone ESHER, 2000, p.227.
Carte 6. La localisation des maisons
d'hôtes (marocaines et étrangères) à Fès en
2006

Source : ADER-Fès, 2006.
78
79
Ce café est tenu par un jeune homme anglais qui a tout
quitté à Londres pour réaliser son rêve d'ouvrir un
restaurant à Fès. Son idée vient du fait qu'il avait senti
le besoin dans la médina d'un espace de récréation. Ce
café a ouvert ses portes en 2007 dans une petite ruelle au quartier de
Tala'a kbira à 200m de Bab Boujloud, axe commercial très
fréquenté, et s'est rapidement intégré au tissu
économique de la médina. Outre, ses mets et boissons
inspirés généralement de la cuisine marocaine, le
café abrite une bibliothèque riche et variée comme il fait
aussi office de galerie d'expositions, de café-concert, de
séances de yoga, et autres activités diverses. Il est
volontairement décoré simplement en puisant dans les
spécificités de l'artisanat et des traditions locales.
D'autre part, certaines institutions culturelles peuvent
prendre pour local des riads et demeures anciennes, comme le cas de
l'Institut Français qui utilise le patrimoine domestique en
médina comme support des manifestations culturelles. L'annexe se trouve
au fond d'une ruelle au quartier Batha. La demeure est louée à
une famille de notables de la médina qui n'y vit plus, et l'Institut
Français en a fait un local pour les concerts et les colloques ainsi
qu'un lieu de résidence pour les jeunes chercheurs et les artistes. Il
existe aussi une demeure personnelle en copropriété
maroco-anglaise, qui sert également de galerie d'exposition d'art dans
le quartier historique Qarawiyine.
En somme, les maisons acquises par les étrangers dans
la médina de Fès prennent deux formes principales.
L'investissement se fait généralement pour un usage privé
dans une première phase de la mise en tourisme. Il est rattrapé
et renforcé ensuite par des choix d'investissement alimentés par
la recherche de gains. Ces investissements sont polymorphes, selon que le
propriétaire décide de convertir sa demeure en une maison
d'hôtes, occasionnellement pour couvrir ses dettes et ses dépenses
de restauration ou comme activité principale guidée par
l'éventualité d'un bénéfice important. La mise en
tourisme de la médina est d'autre part soutenue par l'exploitation de
ces demeures en des équipements touristiques dans le cas où est
programmée une utilisation de celles-ci en café ou en restaurant
ou en un local pour les manifestations culturelles ou encore pour la location
aux touristes, hors la formule d'hébergement en maison d'hôtes.
L'investissement peut aussi être effectué pour un placement
d'argent ou une revente ultérieure relative à une hausse
anticipée des prix de l'immobilier sur le marché. C'est la
spéculation foncière.
Planche 5
Les demeures étrangères à usage
commercial ou culturel dans la médina de Fès

W-J. B, juillet 2008
W-J. B, juillet 2008
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Figure 2 : Le café vu de
l'intérieur avec une décoration
typiquement marocaine.
Figure 4 : La cour d'une dar
transformée en un café - restaurant culturel.

W-J. B, juillet 2008
80
Figure 1 : Entrée de derb El Magana
abritant le café culturel, qui en tire le nom, à
propriétaire anglais.
Figure 3 : Une demeure étrangère
à louer dans l'ancienne médina.

W-J. B, juillet 2008
Figure 5 : Une demeure transformée en
maison d'hôtes par un étranger dans le quartier de Tala'a
Kbira.

W-J. B, juillet 2008
81
Figure 6 : Un riad en
copropriété maroco-française transformé en maison
d'hôtes dans le quartier Ziat. Le derb a été
entièrement refait et embelli.
82
Conclusion
L'installation des étrangers dans la médina de
Fès s'est développée peu à peu à travers le
temps, soutenue par une forte image liée au lieu, pour se transformer
d'une installation de quelques personnes pionnières à un
phénomène plus généralisé. Ceci a produit
des transformations sur les fonctionnalités du lieu, en le faisant
évoluer d'un espace à vocation résidentielle en un espace
pratiqué par des étrangers qui en font le plus souvent un espace
d'activité commerciale, appuyant de la sorte la mise en tourisme du
patrimoine en médina. La médina devient alors leur espace de vie,
de vacances ou de leur business.
Les aménagements et les politiques de valorisation, de
sauvegarde et de patrimonialisation du tissu urbain ancien relèvent
d'une planification stricte et volontariste. On pourrait donc parler de mise en
tourisme. Toutefois, le développement touristique en médina est
fortement livré à lui-même, c'est-à-dire, au bon
vouloir de particuliers et d'entreprises privées (résidences
secondaires, maisons d'hôtes, cafés, restaurants, agences
immobilières et de restauration...etc.), ce qui nous permet aussi de
parler d'une touristification. Sous l'effet du développement du tourisme
culturel en médina, suscitant des initiatives nombreuses,
dispersées et de formes différentes, cet espace se `touristifie'
peu à peu. Le temps aussi fait progressivement passer la médina
de Fès d'un processus à l'autre. Les extensions planifiées
pendant des années dans la médina tirent cet espace vers une mise
en tourisme.
Compte tenu du bilan de ce deuxième chapitre, le
troisième chapitre mettra en évidence le profil des
différents acteurs étrangers de la mise en tourisme et les modes
de fonctionnement de ces communautés étrangères dans leur
vie quotidienne et à travers les rapports qu'ils entretiennent avec les
Marocains. Nous allons mettre l'accent par la suite sur la répartition
spatiale des propriétés étrangères et les logiques
d'implantation de ces nouveaux venus.
Il s'agirait en fait de monter que l'arrivée d'une
population étrangère nouvelle et exogène participe
à la structuration et à la mise en tourisme de la médina
en fonction de ses points de fixation et de ses pratiques urbaines.
83
Chapitre III :
Les nouveaux « touristes-résidents »
dans la
médina
84
Introduction
L'étude des formes et des phases d'expansion du
nouveau marché lié à l'installation des étrangers
dans la médina de Fès, a montré à quel point dans
le cadre d'une volonté des acteurs publics pour la mise en valeur de la
ville de Fès, les acteurs étrangers ont été des
éléments déclencheurs de la mise en tourisme de la
médina. Une mise en tourisme qui s'inscrit plus globalement dans une
patrimonialisation élargie de ce même espace. Ce qui est entrain
d'installer dans la médina de Fès, un système touristique
tournant dans une sphère de développement, de modernisation et de
valeurs marchandes.
L'engouement récemment manifesté pour les
demeures traditionnelles de la médina de Fès est porté par
des étrangers de profils variés et dont les choix de localisation
répondent à des logiques sélectives. Loin d'être
globale, cette mise en tourisme concerne des quartiers spécifiques et
des axes privilégiés. Par ailleurs, l'arrivée de nouveaux
habitants dans les quartiers traditionnels, est accompagnée par le
départ de familles marocaines en quête d'un logement plus
fonctionnel en ville nouvelle, ce qui crée dans ces quartiers anciens,
de nouveaux systèmes sociaux.
A travers ce chapitre, nous distinguerons dans un premier
temps, les logiques d'installation de ces nouveaux habitants étrangers.
Nous nous arrêterons, ensuite sur le phénomène de
reconversion des maisons traditionnelles en des maisons d'hôtes. Un
phénomène qui joue un rôle considérable dans la mise
en tourisme du patrimoine domestique et sa réutilisation
fonctionnelle.
Dans un deuxième temps, nous nous intéresserons
aux profils variés de ces nouveaux venus que nous qualifions de «
touristes-résidents », et là, nous nous arrêterons sur
une question : Pourrait-on qualifier ces nouveaux résidents
étrangers de touristes ? La définition couramment admise du
« touriste » selon les normes internationales retenues par la
commission statistique de l'ONU, englobe « toute personne voyageant
hors de son domicile habituel pour au moins une nuit et au plus un an
». Au-delà d'une année hors de son domicile habituel,
le touriste est
85
qualifié de « résident ». Or, le
désir récemment manifesté par des étrangers de
séjourner en médina, et de plus en plus y habiter pourrait
être assimilé à une nouvelle forme de tourisme. Si l'on se
base sur les écrits de R. BARTHES, « Le résident est en
somme un touriste qui répète son désir de rester
» (Roland BARTHES, 1972, p.144)50. Le chercheur A.-C.
KURZAC SOUALI qualifie à son tour, cet enthousiasme des étrangers
pour l'installation en médina de tourisme de résidence tout en
appelant ces nouveaux venus, des touristes-habitant.
Nous essaierons finalement d'introduire certains aspects
liés à la vie quotidienne de ces étrangers dans leurs
rapports entre eux et avec la population locale.
50In:
http://www.cairn.info/article.php?ID_REVUE=ETHN&ID_NUMPUBLIE=ETHN_023&ID_ARTICLE=ETHN_023_05
15
86
I- Les propriétés
étrangères dans la médina de Fès : D'une
installation sporadique à un ancrage du phénomène
L'installation des « touristes-résidents »
dans la médina de Fès obéissait au début à
une sélection bien claire de quartiers et de maisons avant que le
phénomène ne prenne une grande ampleur, faisant tâche
d'huile dans le reste de la médina. Le type d'investissement joue aussi
en faveur du choix d'un quartier au détriment d'un autre, surtout quand
il s'agit de transformer sa demeure en un lieu de commerce
généralement sous forme de maison d'hôtes.
1- Répartition spatiale des
propriétés étrangères dans la médina de
Fès : Des logiques de localisation sélectives
D'après nos observations, jusqu'à la fin du
mois de juillet 2008, quelques 233 étrangers ont acheté
près de 251 maisons dans la médina de Fès. Le choix du
quartier d'installation par ces nouveaux habitants répond à des
exigences bien précises (Cf. Carte 7).
En effet, les étrangers jugent le quartier selon
différents critères. Le calme, la sécurité,
l'accessibilité, l'emplacement, le prix, le voisinage...etc. Autant de
logiques qui interviennent, à des degrés différents, dans
le choix du quartier chez les différents étrangers. Au
début du processus de la mise en tourisme engagé par ces nouveaux
venus, les installations étrangères étaient
limitées à certains quartiers. Le choix par les pionniers du
quartier d'installation était surtout lié aux qualités
architecturales de la maison. Ainsi, les toutes premières maisons
achetées se trouvent au coeur du centre historique dans le quartier
Qarawiyine. Depuis, et en raison de la forte demande, les achats se diffusent
peu à peu dans l'ensemble de la médina. En général,
les étrangers préfèrent s'installer dans les quartiers
calmes, et la sécurité passe avant tout autre critère. Les
quartiers jugés sûrs sont généralement ceux qui se
trouvent dans la partie ouest de l'oued Boukhrareb, appelée Adwat Al
Qarawiyine. Ils préconisent ainsi l'installation dans les quartiers
ouverts et aérés, dans lesquels ils se sentent le plus en
sécurité et où ils peuvent vivre calmement loin des foules
de Tala'a Kbira et Tala'a Sghira, notamment à Batha, Douh, Ziat,
Aïn Azliten et Lamtèyene.

87
Carte 7.
88
L'accessibilité, est également un facteur
important pour l'achat d'une demeure. Dans une médina aussi grande que
celle de Fès, les premières vagues d'étrangers se sont
installées près des grandes portes menant à la ville
nouvelle, des voies carrossables, des parkings et des stations de taxis (Batha
à l'entrée de la médina, Ziat, Douh, Zerbtana près
de Bab Boujloud, Aïn Azliten, longeant la muraille à l'ouest et du
côté de la percée de Bab R'cif). Ceci est le cas surtout
pour les étrangers voulant convertir leurs demeures en maisons
d'hôtes, afin de faciliter l'accès des touristes à ces
maisons.
Hormis le facteur d'accessibilité, d'autres raisons
interviennent dans le choix de la localisation, mais cette fois-ci en relation
avec la situation centrale du quartier. La vue panoramique a été
un critère de choix des premières maisons d'hôtes
étrangères ouvertes dans la médina, notamment du
côté d'Aïn Azliten donnant sur des espaces verts. Le
phénomène de reconversion des demeures anciennes en maisons
d'hôtes a commencé au quartier Batha, puis Ziat et Douh pour
ensuite toucher d'autres quartiers comme Tala'a, Fondouk Lihoudi et Zenjfor. En
effet, ces quartiers bien localisés abritent des maisons de type
néo-traditionnel, relativement encore en bon état et de grande
taille, idéales pour être aménagées en maisons
d'hôtes51.
Par ailleurs, d'autres étrangers résidant de
façon permanente dans la médina, préfèrent habiter
à proximité de leur lieu de travail ou à côté
des commerces, des souks de fruits et de légumes et des sites culturels.
Ce qui explique la concentration des propriétés
étrangères dans les deux axes parallèles de Tala'a Kbira
et Tala'a Sghira. Réputés également pour leurs belles
demeures de l'époque des Mérinides.
Un autre critère pas moins décisif que les
précédents, est celui du prix. En effet, face à la grande
demande étrangère en anciennes demeures de la médina et
avec l'élargissement de la gamme des acheteurs pour regagner les
étrangers de la classe moyenne, les prix de l'immobilier ont
incroyablement doublé, surtout dans les quartiers au fort succès,
qui obéissent aux différents critères de choix
mentionnés antérieurement. Ainsi, les zones jusque là
rejetées, pour des raisons d'inaccessibilité ou
d'insécurité, gagnent en importance. C'est
51Selon l'Arrêté ministériel
n° 1751.02 du 23 chaoual 1424(18 décembre 2003) fixant les normes
de classement des établissements touristiques : « La maison
d'hôtes classée «première catégorie » doit
disposer d'un minimum de (05) chambres et/ou suites et d'un maximum de trente
(30) chambres et/ou suites.
89
ainsi, que les étrangers ont commencé à
s'aventurer encore plus au fond de la médina, mais aussi, et au cours de
l'année 2008, dans les quartiers du côté Est de la
médina, appelé Adwat Al Andalous, notamment à Bab
Khokha, jugé extrêmement dangereux, et où les maisons sont
plutôt récentes. En effet, au lieu d'acquérir une maison
à Ziat à 100 Millions de Dirhams, les étrangers peuvent en
avoir une similaire dans d'autres quartiers moins accessibles mais à
moitié prix.
Le choix du quartier peut, par ailleurs, être
conditionné par la maison elle-même, suite à de longues
recherches décevantes ou par amour de son architecture. C'est
généralement les habitants de nationalité
américaine et anglaise qui sont les plus sensibles à ce dernier
aspect. Ils sont séduits par les maisons de statut Habous qui
n'ont jamais été restaurées et qui gardent de ce fait leur
authenticité, comme c'est le cas des maisons du quartier Chrablyine.
A Fès, les maisons acquises ou occupées par des
étrangers se trouvent pratiquement dans tous les quartiers. Elles se
concentrent, cependant, dans la partie ouest de la médina avec des
groupements dans les axes de Tala'a Kbira et Sghira, le quartier de Batha et
Ziat, Qarawiyine et Chrablyene. Les préférences de localisation
sont assez sélectives en fonction de la sécurité du
quartier, son accessibilité et son environnement. Avec
l'évolution des prix du marché de l'immobilier, le mouvement
d'achat s'est déplacé vers d'autres quartiers jusque là
moins attractifs. Il a ainsi touché des espaces géographiques
plus étendus en médina et une gamme de bien immobiliers plus
large (dar, riad, petites demeures réunies), selon l'usage qui
en sera fait.
2- Le phénomène de reconversion des
anciennes demeures en maisons d'hôtes par les étrangers : Un
support à la mise en tourisme de la médina
Afin de s'adapter à l'évolution de la demande
touristique en services de qualité personnalisés, et en dehors
des multiples formes d'hébergement touristique classiques, de nombreux
étrangers acquièrent des riads et demeures
traditionnelles pour de plus en plus, les convertir en maisons d'hôtes.
Les demeures anciennes de la médina de Fès acquièrent
ainsi rapidement une vocation touristique et rentrent en concurrence
désormais avec les fameux riads de Marrakech et d'Essaouira.
90
Le potentiel particulier de ce type d'hébergement
suscite une demande touristique importante, en ce qu'il permet au touriste une
immersion dans l'ambiance traditionnelle locale et un certain
dépaysement fortement recherché. Le patrimoine domestique
dûment chargé de valeur devient ainsi un vrai support au
développement de nouveaux produits touristiques.
La première maison d'hôtes
étrangère à Fès a ouvert ses portes en 2000 au
quartier de Tala'a Kbira, et ce n'est qu'en 2007, qu'un bon nombre de maisons
d'hôtes est apparut officiellement dans la médina. Cependant, en
l'absence d'un bon encadrement de cette activité récente,
beaucoup de personnes opèrent de façon clandestine et ne
déclarent pas leurs activités. La cartographie de la localisation
des maisons d'hôtes étrangères est
représentée dans -la Carte 7-, cité
précédemment. Elle traduit comme nous l'avons souligné
auparavant des priorités d'investissement dans des zones bien
précises.
L'engouement pour les maisons d'hôtes à
Fès reste très modeste en comparaison avec Marrakech, qui se veut
être le laboratoire de cette formule d'hébergement.
L'ambiguïté due au vide juridique au moment de la
prolifération des premières maisons d'hôtes a
créé une certaine anarchie qui a fait coulée beaucoup
d'ancre du côté de la presse nationale. Mais dans cette
désorganisation qui marque le cadre global où ont
évolué les maisons d'hôtes, la ville de Fès
paraît être un bon exemple. En effet, contrairement à
Marrakech, ce sont surtout les autochtones aisés qui reprennent en main
ce type de commerce tout en veillant au respect des spécificités
locales. Des associations de défense et de sauvegarde de patrimoine
existent et une démarche qualité est initiée à
grande échelle. Les autorités marocaines se sont toujours
refusées à accorder aux investisseurs étrangers les
mêmes facilités qu'à Marrakech par exemple. C'est ainsi que
le respect de la diversité culturelle de la médina a mieux
préservé son authenticité qu'ailleurs.
Les premiers textes régissant le statut des maisons
d'hôtes ont été initiés par le ministère du
Tourisme en 1997. Il s'agissait de créer une législation
inspirée du modèle européen et adaptée au Maroc.
Les textes européens concernent généralement d'anciens
bâtiments historiques tels que les maisons d'hôtes, les gîtes
d'étapes et les relais château en France ou encore les
Paradores52 en Espagne. Ces textes prévoyaient que ces
riads soient faciles d'accès,
52 Il s'agit d'un type d'hébergement qui
propose de séjourner dans des châteaux anciens, des palais et des
édifices historiques.
91
qu'ils fassent l'objet d'une réelle rénovation
pour une meilleure conservation du patrimoine et qu'ils répondent
à des normes d'hygiène aux standards
internationaux53.
L'administration de tutelle a laissé couler beaucoup
de temps avant qu'elles réagissent fin 2003 pour réglementer ce
type d'hébergement et instaurer ses normes de classement. Les premiers
rappels à l'ordre des pouvoirs publics en vue du contrôle du mode
de gestion des maisons d'hôtes, datent de 2002. L'arrêté du
ministre du Tourisme date du 18 décembre 2003 (B.O n°5192 du 4 mars
2004). Il est venu fixer les nouvelles normes dans ce secteur
d'activités et déterminer le cahier des charges pesant sur chaque
catégorie d'établissement touristique y compris les maisons
d'hôtes. Cet arrêté a donné lieu à la mise en
vigueur de la loi 61-00 portant sur les normes de classement, et qui distingue
entre deux catégories de maisons d'hôtes, la première et la
deuxième. La notion de maison d'hôte n'est plus utilisée
à tord et à travers. Il faut, en effet, que la maison
d'hôtes soit caractérisée « par son architecture
marocaine traditionnelle, sa décoration et son ameublement de style
typique marocain 54 ». Avec ces nouveaux statuts,
toutes les maisons d'hôtes qui sont recensées par le
ministère du Tourisme seront soumises aux mêmes taxes et
impôts que tout autre établissement hôtelier.
Par ailleurs, et suite au décret n° 2-02-186 du 5
mars 2002, publié au B.O. n° 4984 en date du 07-03-2002, le
classement des établissements touristiques, et donc des maisons
d'hôtes, a été délégué au Wali
de la région, après avis d'une commission consultative dite
« commission régionale de classement55 ». Le
Wali peut également modifier le classement de tout
établissement si les conditions d'exploitation le justifient. Les
demandes de classement doivent être adressées au
délégué du tourisme deux mois au moins avant la date de la
mise en exploitation de l'établissement, et un délai de deux ans
est donné aux maisons d'hôtes déjà existantes pour
se mettre à niveau.
L'application des classements supposés par la loi en
vigueur présente, toutefois, des limites dues aux
incompatibilités qui surgissent sur le terrain. Il s'agit
d'incohérences entre, d'une part, les exigences du classement et les
projets des patrons de maisons d'hôtes, et d'autre part,
53 Economie & Entreprises, juillet-août
2000, p 73.
54 Selon l'arrêté du ministre du
tourisme N° 1751.02 du 23 chaoual 1424(18 décembre 2003) fixant les
normes de classement des établissements touristiques, p 95.
55 Cette commission est présidée par
le délégué du tourisme, et est composée des chefs
de la division économique et sociale du service d'hygiène, du
représentant de la protection civile de la préfecture ou de la
province du lieu d'implantation, du directeur de l'école
hôtelière relevant du département du tourisme, des
présidents des associations régionales de l'industrie
hôtelière, d'agences de voyage et de restaurateurs.
92
entre les exigences de confort et de modernité que
supposent la loi et les attentes des touristes ayant choisi cette forme
d'hébergement. Ceci est dû en partie à la
réalité particulière de la médina et de ses
demeures, mais aussi au fait que les pouvoirs publics n'arrivent pas encore
à bien cerner ce nouveau mode d'hébergement.
En effet, la classification établie des normes
standards aux maisons d'hôtes incompatibles avec leur vocation
(A-C.KURZAC SOUALI, 2006, p233.). L'offre en services exigée pour le
classement d'une maison d'hôtes s'applique généralement aux
hôtels classiques. Elle est, par conséquent, difficilement
réalisable et surtout non souhaitée par les touristes, dans le
cas d'une maison d'hôtes. La loi suppose par exemple, que la maison
d'hôtes soit dotée d'un parking gardé jour et nuit ou de
lieux d'arrêts à proximité de la maison d'hôtes,
réservés spécialement pour les clients. Elle suppose
également que la maison d'hôtes dispose d'un minimum de 5 chambres
qui doivent avoir chacune une superficie minimale de 14m2. Ceci va
parfois à l'encontre de la spécificité des demeures
traditionnelles et des réalités de l'accès dans la
médina, généralement labyrinthique.
D'autre part, la maison d'hôtes doit également
répondre à des critères de confort et de services, qui
sont reproduits selon le modèle de fonctionnement d'un hôtel
classique. Nous citons en exemple, les critères relatifs aux sanitaires
dans les locaux communs (sèche mains électrique, boîtes
à rebuts et distributeurs de savon liquide), ou encore des cabines
téléphoniques insonorisées dans le hall de la
réception, d'une piscine (si l'infrastructure le permet), d'un mini-bar
dans le cas des maisons d'hôtes de deuxième catégorie. Ceci
est loin de répondre aux critères de l'authenticité
recherchée par les touristes. Il serait plus approprié
d'intégrer et d'adapter la notion du confort au cadre urbain original,
sans pour autant nuire à ce qui fait la particularité de cette
formule d'hébergement qui prend les pratiques et les modes de vie en
médina comme des supports d'activité en soi.
En outre, la classification des maisons d'hôtes ne
prend pas en compte le contexte local pour ce qui est des normes relatives au
personnel, et qui supposent que « Tout le personnel de
l'établissement doit être issu d'une école
hôtelière ou d'un centre de formation spécialisé ou
bien, justifier d'une formation ou d'un apprentissage adéquat »,
et que le directeur de la maison d'hôtes « doit être
de bonne moralité, titulaire d'un diplôme en tourisme ou avoir
bénéficié d'une formation en hôtellerie ou justifier
d'une expérience en matière de gestion d'unités
touristiques ». Ceci est loin de correspondre à la
réalité. En effet, les promoteurs des
93
maisons d'hôtes ont investis pour la plupart dans de
vieilles demeures qu'ils ont ensuite restaurées avant de s'improviser
eux-mêmes hôteliers. En plus, les critères de recrutement du
personnel ne correspondent pas au profil des personnes employées dans
les maisons d'hôtes dans la médina. La plupart du personnel requis
est non diplômés. Il s'agit, de personnes habitants la
médina, des voisins généralement, qui sont recrutés
sur la base de leur expérience ou de leur dynamisme.
Au cours de l'année 2007, l'ensemble des patrons des
maisons d'hôtes dans la médina de Fès avait tenu une
réunion avec le Wali de la ville afin de discuter de la
nouvelle réglementation régissant les normes auxquelles doivent
obéir les maisons d'hôtes. La plupart de ces patrons,
généralement étrangers, souhaitent convertir leur demeure
en une maison d'hôtes, s'acquitter de leurs taxes et impôts et
régulariser leur statut. Or, la nouvelle loi de classement semble ne pas
les aider. Le Wali avait donné son accord, suite à cette
réunion, pour qu'ils opèrent en attendant de leur trouver une
solution, mais depuis rien n'a changé. « Ils mettent les
bâtons dans les roues des investisseurs étrangers »,
nous affirme avec déception, un patron étranger d'une maison
d'hôtes en attente du classement de son hébergement. Les patrons
de maisons d'hôtes demandent des dérogations multiples qui
concernent dans la plupart des cas le nombre minimum des chambres devant
exister dans la maison d'hôtes, ou encore leur taille, l'introduction du
salon marocain, le respect de l'architecture et autres dispositifs
réglementés par la loi 61-00 citée
précédemment.
En tout état de cause, le phénomène
« Riad-maisons d'hôtes56 » constitue une bonne
solution pour Fès afin de remédier au déficit en
capacité d'hébergement dont elle souffre, surtout que la demande
touristique semble préférer de plus en plus, le logement dans des
structures pareilles plutôt que de s'adresser à un hôtel
cinq étoiles.
L'implantation de maisons d'hôtes dans les espaces
résidentiels les plus anciens, à forte valeur patrimoniale et
à proximité des espaces fréquentés par les
touristes, participe fortement dans la valorisation touristique de la
médina de Fès. Cette mise en tourisme est moins perceptible quand
il s'agit d'acquisition de maisons à titre privé. Il y a ici
comme l'affirme M. BERRIANE, un besoin mutuel entre le tourisme et le
patrimoine architectural (BERRIANE,
56 Pour reprendre la locution utilisée par le
chercheur Rachida SAÏGH BOUSTA, pour qualifier les anciennes demeures des
médinas, transformées en maisons d'hôtes.
94
2003). Le premier ayant besoin de diversification et
d'originalité et le deuxième en quête de reconnaissance, de
restauration et d'entretien.
II- Les étrangers en médina : Acteurs et
réseaux
Les étrangers venant s'installer en médina sont
de nationalités et de profils socioprofessionnels très
variés. Ainsi, leur pratique de la médina et de leur quartier
d'habitat en tant que nouvel espace de séjour diffère d'un
individu à un autre et d'une communauté étrangère
à une autre. Ce nouvel espace de vie est également pour ces
nouveaux « touristes-résidents », un espace de rencontres et
de cohabitation entre les différents étrangers mais aussi entre
ceux-ci et les autochtones.
1- Le profil des nouveaux touristes
Ils sont passés d'un seul étranger en 1997,
à 140 selon le Recensement Général de la Population et de
l'Habitat en 2004, pour devenir en l'espace de quatre ans quelques 233
étrangers dans la médina de Fès. Ces nouveaux touristes
résidant dans la médina sont de profils très
variés. En effet, ce qui nous a le plus marqué dans la
médina de Fès c'est le grand mélange des
nationalités différentes qui y existe actuellement (Cf. Carte
8).
Les français forment le groupe le plus important en
constituant 50% des étrangers. Ils sont suivis par les anglais avec 17%,
les américains avec un pourcentage de 9%, puis les espagnols et les
italiens avec environ 3% pour chaque groupe.
Par ailleurs, on trouve avec 2% et moins pour chaque
nationalité, les algériens, les irlandais, les australiens, les
allemands, les néerlandais, les canadiens, les britanniques, les suisses
et les norvégiens. D'autres nationalités sont
représentées par un seul habitant, telle une indienne, un
colombien, une vénézuélienne, un sud africain, un
néozélandais, une autrichienne, un irakien, et une famille
palestinienne (locataires). La médina est en effet devenue un vrai foyer
d'accueil des étrangers de partout dans le monde, s'inscrivant à
plein dans le processus de la

Carte 8.
96
mondialisation. Pour saisir l'importance de ce bouleversement
il faut rappeler qu'à la veille de l'Indépendance, il
était interdit pour un non marocain de s'installer dans la
médina.
Les Européens principalement représentés
par les français sont aussi majoritaires dans les autres médinas
de Marrakech et d'Essaouira, amplement touchées par ce
phénomène. Les touristes français représentent
depuis toujours la principale clientèle touristique à Fès,
atteignant en 2006, selon les statistiques du Ministère du Tourisme,
près de 25% du total. Ce sont, selon M.BERRIANE et H. SEBBAR (1999), des
vacanciers qui s'intéressent au « tourisme itinérant »
et programment souvent la visite de la ville impériale pendant leur
séjour au Maroc.
Il semblerait, cependant, que la population anglo-saxonne soit
de plus en plus importante. Comme nous l'affirme une touriste anglaise habitant
en médina, il semblerait qu'en Grande Bretagne comme aux Etats-Unis,
Fès est devenue une destination à la mode.
Ce qui est intéressant à souligner
également c'est la localisation de ces étrangers selon leur
nationalité. Les français, sont présents dans tous les
quartiers de la médina et sont les plus nombreux à investir en
maisons d'hôtes. Les anglais et les américains eux, se regroupent
essentiellement dans le coeur historique de la médina, à
côté des commerces et sites culturels principalement dans l'axe de
Tala'a Kbira et Tala'a Sghira et les quartiers qui les entourent.
Par ailleurs, les étrangers résidant en
médina sont pour la plupart jeunes. On y rencontre des habitants dans
les vingtaines, mais aussi et majoritairement des profils entre 30 et 50 ans
puis des retraités. On peut en effet, distinguer trois profils
différents de la manière suivante : les retraités venus
s'accorder une retraite paisible au soleil, les personnes entre les trente et
les cinquante ans, qui décident généralement de changer de
vie, et enfin ceux ayant reçu une bonne offre d'emploi à
Fès et qui décide de s'installer en médina.
Par ailleurs, ces nouveaux « touristes-habitants
»57, sont de profils socioprofessionnels importants. Ils sont
des gérants de sociétés ou de maisons d'hôtes, des
professeurs, des architectes, des ingénieurs, des médecins, des
guides...etc.
57 Pour reprendre l'expression utilisée par
le chercheur Anne-Claire KURZAC SOUALI, pour désigner les
étrangers qui s'installent dans les médinas marocaines.
97
2- Les communautés étrangères :
réseaux et cohabitation
Les quartiers d'installation des étrangers dans la
médina constituent des espaces urbains en mutation par un processus de
mise en tourisme mais aussi et surtout, pour ces nouveaux venus, des espaces
sociaux de vie et de cohabitation avec les marocains. Ses liens sociaux vont
des simples rapports de voisinage noués avec les autochtones, aux
réseaux relationnels créés avec les autres
étrangers habitant la médina.
Les relations entre les étrangers se tissent
principalement entre les résidents de la même nationalité,
ou du moins parlant la même langue. La solidité des rapports tient
à différentes affinités, parmi lesquelles, la
fréquence de la présence de l'étranger en médina.
En effet, certains étrangers y viennent passagèrement, par contre
d'autres y vivent de façon permanente. Certains en font leur lieu de
travail pendant que d'autres l'envisagent comme un espace de résidence
ou de villégiature. Les premiers étant le plus souvent sur les
lieux, ont le plus de chance d'établir des liens plus étroits
avec le reste de la communauté étrangère.
A Fès, et d'après nos observations, le
réseau le plus solidaire est celui de la population anglophone. Ceux-ci
semblent s'organiser autour d'un américain dans les cinquantaines,
directeur du centre d'enseignement d'anglais et de l'arabe, qui a acquis une
grande réputation auprès des différents étrangers,
mais aussi auprès des habitant de la ville en générale,
pour avoir été le premier étranger à acheter une
demeure traditionnelle en médina, pour en acquérir par la suite
quatre autres. Cet esthète américain, comme le qualifie Justin
MCGUINESS (J.MCGUINNESS, 2006, p.191), est devenu spécialiste de
l'acquisition et de la restauration des riads et demeures
traditionnelles. Il a créé à cet effet, un site Internet
très riche en informations utiles à tout nouveau étranger
(anglophone, puisque le site est en anglais), souhaitant s'installer dans la
médina de Fès58. En effet, à travers son site
Internet, il explique aux étrangers comment acheter et restaurer une
maison ou un riad à Fès dans le but de les encourager
mais aussi pour leur faire part de ses expériences afin de leur faire
éviter les erreurs que lui ou d'autres étrangers ont pu
commettre. Comme il cite différents contacts utiles d'ingénieurs,
d'architectes, d'agents immobiliers et différents autres
administrateurs, qui peuvent aider à une étape ou à une
autre de l'achat de la maison.
58
http://www.houseinfez.com.
98
Nos enquêtes de terrain nous ont, en effet permis de
vérifier la position centrale de cet américain dans les choix
à prendre par les nouveaux "touristes-résidents" d'origine
anglophone, en matière de consultation et de demande de conseils. Des
habitants anglais nous ont affirmé le rôle de celui-ci et
l'utilité de son site Internet comme source d'information.
D'autre part, et en sa qualité de "pionnier" en
médina, cet américain s'amusait à enregistrer, jusqu'en
2002, et avec précision, tous les autres étrangers venant
s'établir en médina et ce depuis son installation en 1997. Il est
même un interlocuteur privilégié auprès des
autorités locales et du Wali comme interface entre les
autorités et cette communauté étrangère. Il est
intéressant de souligner également, qu'en sa qualité de
directeur du centre linguistique, cet habitant américain loue une de ces
maisons en médina aux enseignants et aux étudiants
étrangers ou leur propose de vivre au sein d'une famille marocaine,
pendant une à deux années, avant que ceux-ci ne se
décident généralement à s'acheter eux-mêmes
une maison traditionnelle.
Le réseau de contact entre les étrangers se
développe généralement dans le sens d'une
communauté d'intérêts. Ces étrangers
"néo-Fassis" comme les qualifient Justin MCGUINNESS (Idem, 2006), se
partagent les informations relatives aux processus d'acquisition d'une demeure,
sa restauration, le coût des travaux,...etc. comme ils peuvent tisser des
relations d'amitié avec des samsars marocains qui les aident et
les accompagnent aussi pour la traduction ou toute autre démarche.
Le motif d'installation et la situation sociale du nouvel
habitant aident au rapprochement entre les différents groupes. Nous
avons noté ici, l'exemple des patrons de maisons d'hôtes qui se
réunissent et se rendent souvent visite et s'organisent en association.
D'autre part, les étrangers ayant noués des liens
d'amitiés peuvent s'inviter mutuellement. Dans ce sens, les anglophones
ont créé leur point de rencontre à eux en médina,
le café culturel dont le patron est un anglais. C'est pour eux un lieu
de rencontre idéal pour manger ensemble, prendre un pot, discuter ou
travailler au calme.
D'autres étrangers, par contre, semblent être
moins ouverts à la rencontre ou à la connaissance des autres
membres de la communauté étrangère, et n'entretiennent
ainsi aucune relation avec
99
eux. Ils sont généralement des habitants dont le
lieu de travail est en ville nouvelle et qui ne passent, ainsi, que peu de
temps en médina.
Habiter dans l'ancienne médina, c'est aussi
côtoyer de plus près les aspects de la vie quotidienne de
l'autochtone. Les nouveaux étrangers s'intéressent à tous
ce qui concerne leur ville adoptive. Une jeune anglaise mariée à
un marocain est constamment vêtue en habits traditionnels marocains et ne
parle aux marocains qu'en arabe. Un autre couple d'une française
mariée à un allemand, est devenu un couple vivant à la
marocaine dans la façon de s'habiller à la marocaine et de vivre
à la marocaine. C'est des manières parmi d'autres de se faire
accepter et de s'adapter à leur nouveau milieu de vie. La cohabitation
entre les étrangers et les marocains commence par les liens de
voisinage, ainsi les contacts entre le fassi et son nouveau voisin
étranger peuvent prendre forme à travers les incidents de tous
les jours. Ces relations sont souvent modestes, mais courtoises. Un voisin
demandera son avis à l'étranger sur les travaux qu'il est en
train de faire exécuter et lui montrera sa maison. Le
représentant des résidents lui proposera de devenir membre de
leur association du quartier...etc. (J.MCGUINESS, 2006, p.196). En plus, ces
étrangers font souvent travailler des marocains chez eux, surtout quand
il s'agit d'un lieu de commerce (Maison d'hôtes, café,...). Comme
le souligne M.BERRIANE, "de façon générale, les
premiers acquéreurs ont été accueillis à bras
ouverts par les habitants de ces quartiers anciens: ils apportent des devises,
du travail (gardiennage, travail ménager) et des consommateurs de biens
et de services, et contribuent à la relance des activités
artisanales" (BERRIANE, 2003).
Les relations de proximité et de voisinage entre ces
nouveaux habitants étrangers et la population locale n'ont pas encore
fait l'objet d'une recherche ou d'enquêtes approfondies. Elles ont,
néanmoins, été introduites dans les écrits de J.
MCGUINNESS qui explique, sur la base de plusieurs séries d'entretiens
réalisés auprès des nouveaux habitants étrangers,
quelques aspects liés à la nécessité pour ces
derniers, de se faire accepter dans leur nouvel environnement. Une
enquête plus fine sur « Le voisinage des Ryads-maisons d'hôtes
(RMH) dans la médina de Marrakech », a été
néanmoins encadrée par le chercheur R. SAIGH BOUSTA, afin de
cerner les transformations de la vie du quartier historique face à la
prolifération rapide des riads reconvertis en maisons
d'hôtes à Marrakech. Le chercheur A.-C. KURZAC SOUALI, s'est
également arrêtée sur les rumeurs et cohabitation en
médina de Marrakech face à l'installation d'étrangers,
sous le thème de « l'Autre où on ne l'attendait pas ».
Ces recherches
100
sont révélatrices d'une superficialité
relative concernant les contacts de la population marocaine avec les
étrangers en médina.
La mise en tourisme de la médina par ses acteurs
étrangers de plus en plus nombreux est perçue, d'une part, comme
valorisante, étant donné que les nouveaux venus participent
à l'amélioration de l'environnement local et offrent des
opportunités d'emplois pour les habitants du quartier. D'autre part,
l'arrivée d'étrangers est susceptible de générer
des craintes par les anciens habitants, surtout dans les quartiers les plus
investis, notamment par les maisons d'hôtes. La réaction des
habitants est, en effet, généralement basée sur un
sentiment de danger et de perte des repères identitaires et
traditionnels.
Il serait intéressant de consacrer un travail de
recherche ultérieur aux aspects liés à cette
problématique de pratique de la médina par les étrangers
et les questions de la cohabitation et des rapports entretenus entre les
marocains et ses nouveaux touristes-résidents en le renforçant
par des enquêtes et des entretiens.
101
Conclusion
L'insertion d'une nouvelle population étrangère
dans la médina de Fès et l'extension des types d'investissements
entrepris par ces touristes résidant dans l'espace traditionnel confirme
l'ancrage spatial d'un processus de mise en tourisme dans la médina. La
multiplication des achats de maisons pour en faire des résidences
secondaires et des maisons d'hôtes vient compléter ce
phénomène.
L'installation récente des étrangers dans la
médina s'opère selon des logiques de localisation relatives
à des critères d'accessibilité, de sécurité,
de bonne situation et de convenance du prix au pouvoir d'achat. En effet,
l'habitat traditionnel a été, en l'espace de quelques
années, très sensiblement réévalué sur le
marché immobilier. D'autre part, selon qu'il s'agisse d'une maison
privée ou d'une maison à usage commercial (maisons d'hôtes,
restaurant, café...), les choix d'installation suivent, en
préconisant les lieux à haute fréquentation touristiques
ou les lieux à vue panoramique.
Il existe en outre, un mélange très
intéressant de nationalités et de profils socioculturels dans la
médina. Ces habitants étrangers ont toutefois, tous pour point
commun la pratique et l'expérience d'un nouvel espace de vie qui leur
est étranger. Ils participent ainsi par leur présence à un
côtoiement plus resserré entre les deux communautés,
étrangère et marocaine habitant la médina. De nouveaux
rapports s'établissent ainsi, entre l'étranger et son nouvel
espace de vie, et entre les habitants locaux et ce nouveau venu.
102
CONCLUSION GENERALE
Ce travail de recherche est une interrogation menée
sur le processus de la mise en tourisme de la médina de Fès,
à travers le phénomène d'acquisition des demeures
traditionnelles par les étrangers. En effet, dans un contexte
d'ouverture du Maroc aux investissements étrangers, soutenu par une
volonté nationale pour le développement du secteur du tourisme au
pays, la médina en générale, et ses demeures anciennes en
particulier acquièrent un nouveau statut parmi les produits touristiques
proposés aux touristes. Ces derniers sont devenus, de plus en plus,
demandeurs d'authenticité et d'exotisme, qu'ils trouvent
désormais dans le centre historique marocain.
A travers ce travail de recherche, nous avons cherché
à mettre l'accent sur la mise en valeur patrimoniale et touristique de
la médina de Fès à travers l'achat des riads et
anciennes demeures par les étrangers. Nous avons à cet effet,
rappelé le contexte de l'apparition de ce phénomène dans
les villes de Marrakech et d'Essaouira, étant donné que c'est par
ces deux médinas qu'il a commencé. La médina de Fès
a ainsi suivie et est devenue de plus en plus vécue par des Occidentaux
qui décident d'y investir, d'y concevoir leur travail, d'y
séjourner en vacances dans une résidence secondaire ou d'y vivre
au quotidien.
Dans la ville ancienne de Fès, le développement
économique est basé essentiellement sur le tourisme qui repose
sur la valorisation du patrimoine. Ceci est illustré par le poids des
investissements occidentaux, appuyés par une souplesse des pouvoirs
locaux dans la gestion de ce dernier.
Tout au long de ce mémoire nous avons essayé
d'apporter des réponses aux questionnements et aux hypothèses que
nous nous étions posés au début de ce travail de
recherche. Nous avons ainsi pu connaître de près,
différents aspects liés aux acquisitions des demeures anciennes
dans la médina de Fès. La médina redevient, en fait, un
lieu à habiter et à vivre par des étrangers de
nationalités très variées et de profils
différents.
103
Nous avons cherché à appliquer le concept de la
mise en tourisme sur le cas de la médina de Fès qui, selon nos
recherches, est entrain d'être mise en tourisme par le bon vouloir de
pouvoirs publics et d'acteurs privés souvent étrangers. Les
politiques de sauvegarde et de valorisation largement menées dans la
médina sont soutenues par des acteurs locaux à travers des
planifications strictes, appuyées par des programmes et des actions
volontaristes pour le soutien au développement d'un tourisme culturel
à Fès, dans le but d'en faire une destination touristique
à part entière. Parallèlement à cela, la grande
mobilité des étrangers depuis la fin des années 1990,
investissant en médina en achetant des habitations anciennes, participe
à la restauration du patrimoine domestique et à la
touristification de la médina. Ils constituent des acteurs essentiels
dans la valorisation du centre ancien de Fès, en l'utilisant, plus
encore, comme un patrimoine-ressource. L'élan pour la médina
confirme ainsi le choix fait par ces nouveaux "touristes-résidents" de
considérer ce lieu comme un espace touristique qu'ils consomment
autrement que le temps d'un voyage ou d'un séjour.
Parmi ces nouveaux venus, nombreux sont ceux qui se sont
installés dans la médina de Fès, pour le
différentiel de revenus qui leur permet de vivre mieux à moindre
coût. Cependant, beaucoup y sont dans la quête d'une
authenticité perdue ailleurs et une nouvelle façon de vivre
à l'ancienne.
Dans une moindre mesure que dans la ville historique de
Marrakech, ou même celle d'Essaouira, si nous prenons en compte la taille
de la médina, mais généralement dans le même
contexte, pour les mêmes raisons, et d'après une même
organisation du marché de l'immobilier, les maisons anciennes de
Fès se font vendre à des étrangers, pour entre autres en
faire des lieux de commerce en maisons d'hôtes, en cafés, en
restaurants, ou en galerie d'exposition d'art. Ce qui soutien la mise en valeur
touristique du tissu urbain ancien. Cependant, à l'inverse de Marrakech
ou d'Essaouira où le phénomène a pris une grande ampleur,
les autorités locales à Fès semblent plus vigilantes quand
il s'agit d'accorder aux investisseurs étrangers des facilités
d'investissement. En effet, le respect de l'héritage culturel de la
médina chez les fassis et la volonté de mieux la
préserver sont très présents.
A l'issu de cette première recherche sur les
acquisitions des anciennes demeures par les étrangers dans la
médina de Fès, et pendant l'avancement de nos investigations, il
nous est apparu que ce thème est un vrai chantier à explorer. En
effet, nous avons, à travers ce mémoire essayé d'apporter
des éclaircissements sur ce phénomène récemment
apparut à Fès,
104
en établissant une sorte d'état des lieux de la
question. Nous nous sommes ainsi intéressés au contexte
lié à l'apparition de ces nouvelles dynamiques, les principaux
acteurs en présence, les modalités d'acquisition des demeures,
leur répartition dans l'espace 'médinal', ainsi que les
différents usages qui en sont fait. Toutefois, il serait en effet
intéressant de s'attarder sur les aspects relatifs aux pratiques de
cette nouvelle communauté étrangère et les relations de
celle-ci avec son nouvel espace de vie, en mettant l'accent sur les effets de
cette mise en tourisme sur l'espace et sur la vie sociale dans les quartiers
historiques de la médina, qui deviennent un espace de rencontre et de
sociabilité transformés avec l'insertion d'une population
étrangère par son identité, ses pratiques et ses
perceptions de l'espace et de la société. Il serait
également utile de s'interroger sur la perception de la population de la
médina de ce nouveau phénomène et ses relations avec ses
nouveaux voisins. Enfin, le devenir même du contenu social des anciennes
médinas serait digne d'intérêt avec une interrogation quand
à une nouvelle société en gestation.
105
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109
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110
Annexes
Annexe 1. QUESTIONNAIRE
DATE: N°:
QUARTIER:
Cette enquête sur le phénomène
d'acquisition des anciennes demeures de la médina de Fès par des
étrangers est réalisée dans le cadre d'un mémoire
de master en Aménagement, Développement local et Gestion des
Territoires à la faculté des lettres et des sciences humaine de
Rabat.
L'objectif de cette étude est de comprendre les raisons
et le processus par lequel ces nouveaux habitants occupent la médina.
Je vous remercie d'avance pour l'attention que vous porterez
à ce questionnaire et vous souhaite une bonne continuation dans vos
projets.
Widad-Jodie BAKHELLA.
IDENTITE DE L'ENQUETE:
1- Nationalité : .
2- Âge :
3- Sexe : Masculin Féminin
4- Situation familiale : Célibataire En couple Autres
5- Profession précise :
LE LOGEMENT :
6- Type d'hébergement : Résidence principale
Location
Résidence secondaire Maison d'hôtes
Résidence en copropriété Autres
(précisez)
7- 111
Vous vivez dans votre logement en médina : Toute
l'année
Partiellement (précisez le nombre de mois, la
période de l'année et le lieu de résidence principale)
8- Quelle est la date d'achat (ou de location) de votre logement
en médina ?
9- Possédez-vous d'autres maisons en médina ? Oui
Non Si oui, combien ?
10- Où viviez vous avant votre installation : Au Maroc ?
. À Fès ?
En médina ?
CHOIX DE LA LOCALISATION :
11- Pourquoi avez-vous choisi de vous installer au Maroc ?
12- Pourquoi avez-vous choisi de vous installer dans la
médina de Fès ?
13- Quels sont les critères qui vous ont
décidé pour ce quartier ? Pour cette maison?
14- Comment avez-vous eu l'information concernant les maisons en
vente dans la médina ?
15-
112
Quelles sont les démarches que vous avez entreprises et
les personnes que vous avez contactées pour trouver une maison dans la
médina ?
16- En quelques phrases / mots, évoquez ce que
représente, pour vous, la médina de Fès ?
17- Est-ce que votre investissement dans la médina de
Fès a une relation avec le succès que cela a eu dans d'autres
villes comme Marrakech, Essaouira ...?
18- Avez-vous d'autres projets à réaliser dans la
médina de Fès?
Lesquels ?
Facultatif:
Nom :
Adresse/Tel/Mail :
Montant d'achat/ du loyer de la demeure:
Superficie et âge du bâti :
Montant des restaurations :
Remarques :
113
Annexe 2. Déclaration de feu sa Majesté
le Roi Hassan II
Le rôle historique que la ville de Fès a
assumé pour consolider la civilisation marocaine et répandre les
lumières de la foi et de la science, la valeur inestimable de son
patrimoine artistique riche de tant de chefs-d'oeuvre que le génie
marocain a su produire, qu'il s'agisse de la conception architecturale et
urbanistique, de la décoration des mosquées et des
médersas ; des créations d'un merveilleux artisanat et de la
parfaite organisation des souks, objet de la fierté de la culture
arabo-islamique, nous fait une obligation de considérer que la
restauration et la sauvegarde de la ville de Fès font partie des
missions que nous devons accomplir avec l'aide et l'assistance
d'Allah.
Nos ancêtres se sont préoccupés de
l'édification et de la promotion de Fès. Dans le passé,
Fès avait atteint l'apogée de la civilisation et était
devenue un haut lieu de rencontre de rayonnement culturel et une source
féconde de la création artistique.
Si les années ont terni quelque peu sa
splendeur et si des signes de vieillissement se manifestent dans le corps de
ses édifices et de ses monuments, notre devoir aujourd'hui est de la
faire revivre et de la rénover afin qu'elle retrouve ses antiques
traditions. Nous devons oeuvrer pour que ses fissures soient
réparées et que sa vie reprenne son cours normal. Ainsi se
dresseront de nouveau dans Fès les piliers de la civilisation sur
lesquels une aube nouvelle de science et de sagesse répandra sa
lumière.
Notre tâche devient agréable quand nous
constatons que le monde entier s'associe à notre effort en reconnaissant
la cité de Fès comme un patrimoine universel. C'est ainsi que la
conférence générale de l'UNESCO, dans sa session de 1976
à Nairobi, a adopté une résolution faisant de la
sauvegarde de la ville de Fès un devoir qui incombe à toute
l'humanité.
Il s'ensuivit l'appel que le Directeur
général de L'UNESCO, Monsieur Amadou-Mahtar M'Bow a
adressé à la communauté internationale pour la
restauration et le renouveau de Fès.
A ce propos, nous rappelons à notre peuple et
à nos amis qu'en aidant à rendre à Fès sa place
dans le concert des civilisations, ils participeront à la renaissance de
la gloire éternelle de notre patrie et au développement de la
culture islamique sur cette terre d'honneur et de dignité.
Aussi devons-nous donner à notre gouvernement
des instructions pour qu'il considère le projet de Fès comme une
préoccupation prioritaire et pour qu'il accorde une attention
particulière dans le cadre de ses responsabilités relatives
:
- aux programmes d'équipement et de
l'habitat,
-
114
à la préservation du patrimoine
culturel,
- au développement de l'art, de la culture et de
la pensée,
- et à la diffusion des enseignements de
l'islam.
Le Maroc doit demeurer le pays de l'authenticité
véritable,
Le vrai chemin qui mène à la
réalisation des ambitions de notre siècle de progrès et de
prospérité.
Fait au Palais Royal de Rabat.
Le 8 Ramadan 1400 ( 21 Juillet 1980)
115
Annexe3. Appel de Mr. Amadou-Mahtar M'BOW Ex-Directeur
Général de
l'UNESCO
Pour la Sauvegarde de la ville de Fès
En fondant Fès, au deuxième
siècle de l'Hégire, dont nous célébrons cette
année le quatorzième centenaire, Moulay Idriss Al-Azhar voulait,
dans un esprit d'humanité, qu'elle soit la Cité de la Foi et du
Savoir. Et, ces vertus, Fès les a incarnées, au plus haut point,
tout au long de sa brillante histoire...
Symbole du génie créateur de l'Islam, de
sa haute faculté intégratrice, Fès est un
témoignage exemplaire de ce que des hommes, mus par la même foi et
le même idéal, et venus vers elle d'horizons divers, de Kairouan
ou de Cordoue, de l'Est, du Nord ou du Sud, ont pu réaliser en
commun.
Lieu de rencontres et d'échanges, elle a
trouvé, sur le plan urbanistique, une expression à la mesure du
dessein de ses illustres fondateurs et des fonctions économiques,
sociales et culturelles que son expansion et le génie de ses habitants
ont fait éclore. On pourrait difficilement trouver, dans l'agencement de
l'ensemble de mosquées, de sanctuaires, de palais, de maisons, de
caravansérails et de marchés qui la constituent, ordonnance mieux
équilibrée, plus subtile ingéniosité.
L'espace urbain lui-même y a été
organisé dès ses origines de manière à
intégrer la cité à son environnement,
Réalisant une parfaite symbiose entre son site
et ses fonctions, entre ses ambitions et ses moyens, Fès est ainsi
depuis mille ans, et à juste titre, l'une des cités les plus
prestigieuses du monde islamique.
L'Université Quaraouiyine, construite quelques
décennies après la fondation de la cité, et qui demeure,
avec sa mosquée, un foyer d'enseignement et de méditation, est
sans doute une des premières universités du monde à avoir
pu maintenir son activité pendant plus de dix siècles. Autour
d'elle et de tant d'autres mosquées se sont ajoutés les
sanctuaires, les célèbres médersas et les zaouias qui ont
généreusement accueilli des étudiants venus de toutes les
corporations de la ville et de lointaines contrées, pour vivre et
travailler ensemble auprès de maîtres illustres...
Ainsi, située au carrefour des grands
itinéraires intellectuels et religieux que les fameuses routes
commerciales font trop souvent oublier, Fès a constitué un des
noeuds d'un réseau intellectuel qui a profondément marqué
la trame des relations entre diverses régions du continent Africain, de
l'Orient Islamique et de l'Occident Européen ; Elle a été
un des principaux foyers d'étude, par où le savoir scientifique
et la réflexion fondamentale, épanouis sous l'impulsion de
l'Islam, allaient stimuler et
116
parfois même susciter un développement
sans précédent des connaissances au seuil du monde
moderne.
Mille ans d'histoire n'avaient ni affecté le
tissu urbain, ni entamé l'homogénéité
architecturale, ni même troublé l'activité intellectuelle
et artistique de la ville de Fès. Il n'en va plus de même
aujourd'hui. Les transformations rapides que connaissent toutes les parties du
monde, et en particulier les villes anciennes, ont eu des répercussions
directes sur la Cité...
Les changements sont devenus si importants au cours
des dernières décennies que Fès risque, sous la pression
de contraintes démographiques, sociales et économiques sans
équivalent dans son histoire, de perdre l'originalité profonde
qui en fait un des joyaux les plus purs de la culture islamique.
Des ensembles d'une grande valeur architecturale se
délabrent ; certaines infrastructures publiques, telles que le
système d'alimentation en eau et de drainage des eaux usées, ont
atteint un seuil de saturation dangereux. L'artisanat traditionnel, qui est une
des sources les plus fécondes de son art, est gravement menacé.
Les différents quartiers de la ville, entraînés comme par
un tourbillon auquel ils ne peuvent résister, perdent peu à peu
chacun sa fonction spécifique...
Pour sauver Fès, le gouvernement marocain
déploie depuis des années des efforts d'une grande
envergure...
La compagne internationale que la dix-neuvième
session de la Conférence générale de l'Unesco m'a
demandé d'entreprendre en vue de la sauvegarde, de la
réhabilitation et de la réanimation de Fès répond
aux mêmes préoccupations que celles qui ont conduit l'Unesco
à lancer les campagnes de la sauvegarde des monuments de Nubie en
Haute-Egypte et au Soudan, de Venise,...
Mais, c'est une campagne sans précédent,
par sa nature, dans l'action de l'Unesco. C'est la première qui soit
entreprise en faveur d'une ville islamique. L'action à mener constitue,
par son ampleur, l'exemple d'un des défis majeurs que l'humanité
doit relever pour préserver et enrichir son héritage culturel,
devant les contraintes que nous impose un processus de modernisation et
d'industrialisation accélérés. Ce défi est à
la hauteur des capacités et de l'imagination de l'homme.
Voilà pourquoi, du site de cette terre qui est
par excellence celle de l'homme et de sa quête de l'Absolu, je lance
aujourd'hui un appel solennel à la solidarité
internationale.
J'invite les gouvernements de tous les Etats membres
de l'Unesco, les organisations internationales, gouvernementales et non
gouvernementales, les institutions publiques et privées, les organismes
de financement, les peuples des différentes
117
nations, à participer par des contributions
volontaires de toute nature à la Campagne de sauvegarde, de
réhabilitation et de réanimation de la ville de
Fès...
J'invite tous les intellectuels, artistes et
écrivains, ulémas et juristes, historiens et sociologues, ainsi
que tous ceux qui ont pour mission d'informer, journalistes, chroniqueurs,
professionnels de la presse, de la radio, de la télévision, du
cinéma, à contribuer à sensibiliser le public de tous les
pays aux problèmes de Fès et à l'inciter à
contribuer à sa sauvegarde...
Je forme l'espoir que les contributions soient
à la mesure de la vaste tâche à entreprendre et qu'elles
permettent de conserver, pour toujours, l'un des environnements urbains les
plus harmonieux que l'homme ait créé, en même temps que de
préserver, pour le bonheur de ceux qui l'habitent et de ceux qui la
visiteront, son âme collective, qui, depuis plus de onze siècles,
porte le plus actuel des messages : celui de la solidarité et de la
fraternité de tous les hommes.
Amadou-Mahtar M'BOW.
Fès, le 23 Joumada 1400 (9 Avril
1980).
118
Annexe 4. Discours de Mr. Federico MAYOR Directeur
Général de l'UNESCO
Si le nom d'Abou Simbel résonne si
glorieusement à nos oreilles, c'est bien évidement à cause
de la beauté majestueuse de ces temples nubiens, mais peut-être
plus encore parce que ce site fut l'éclatante preuve que la mobilisation
de la communauté internationale et sa détermination pouvaient
conduire au plus grand sauvetage archéologique de l'histoire. Cet
exemple mondialement connu n'est pas la seule illustration de la volonté
de préserver les chefs-d'oeuvre de l'humanité ; il y a aussi
Borobudur, Sana'a, la vallée de Kathmandou, pour ne citer que
ceux-là. La sauvegarde de ces sites en péril est l'exemple
parfait de ce que peuvent accomplir la solidarité et la
fraternité humaines.
Compte tenu de la mission que lui confiait son Acte
constitutif, l'UNESCO était toute désignée pour promouvoir
la conservation et la protection du patrimoine universel. Depuis 1966,
vingt-six campagnes internationales de sauvegarde ont été
engagées. A vingt-six reprises, donc, mes prédécesseurs et
moi-même avons tenté de faire prendre conscience à
l'opinion publique que ce patrimoine était commun à tous, que ces
chefs-d'oeuvre étaient universels et que, bien au-delà de sa
spécificité culturelle ou de sa localisation géographique,
un site est avant tout le témoin et le symbole de la chaîne
ininterrompue de la créativité humaine.
Cette année, la Convention du patrimoine
mondial célèbre son vingtième anniversaire. En vingt ans,
cet instrument a permis l'inscription de 358 sites sur la liste du patrimoine
mondial, parmi lesquels on peut citer l'arrondissement historique de
Québec, les parcs des Montagnes rocheuses canadiennes ou encore la
grande muraille de Chine, Machu-Pichu, Teotihuacan et le Mont Saint-Michel.
J'ai tenu à marquer l'importance que j'y attache en créant cette
année au secrétariat de l'UNESCO un Centre du Patrimoine Mondial
dont la tâche est de promouvoir, dans une même approche, la
conservation du patrimoine culturel et celle du patrimoine naturel de
l'humanité. Les meilleurs experts dans les domaines de la conservation
et de la restauration seront donc mobilisés afin de suivre l'état
de conservation des sites déjà inscrits et, le cas
échéant, de proposer leur inscription sur la liste de patrimoine
mondial en péril - qui compte aujourd'hui neuf sites. Le centre doit
donner à la Convention un nouvel éclat en veillant tout
spécialement à informer le public et à le sensibiliser
à la protection du patrimoine.
Mais une campagne internationale de sauvegarde n'a pas
pour seul objectif de restaurer ou de préserver des monuments ; elle
vise aussi à rendre des sites à la vie, à faire en sorte
que le coeur des villes-mémoires battent à nouveau avec force. La
compagne de sauvegarde est génératrice d'un progrès qui
prend racine dans la fierté du patrimoine revalorisé. Elle
comporte indéniablement une dimension humaine, moins visible certes,
mais de loin la plus importante. Et quelle autre ville que Fès,
cité de la foi et de savoir, peut mieux illustrer cette dimension ? La
campagne de Fès était,
119
lors de son lancement en avril 1980, la
première campagne entreprise en faveur d'une ville islamique. L'action
à mener constitue, par son ampleur, l'exemple d'un des défis
majeurs que l'humanité doit relever pour préserver et enrichir
son héritage culturel devant les contraintes que lui impose la
modernité.
Sur cette terre du Maroc, au confluent de l'Afrique,
de l'Orient et de l'Europe, naissait il y a plus de douze siècles, la
médina de Fès. Avec elle naissait une communauté humaine
ouverte, tolérante, multi-confessionnelle, qui allait façonner
non seulement une composition urbaine associant harmonieusement nature et
culture, mais aussi un art de vivre où la solidarité et la
discrétion côtoient l'élégance. Mille ans ont
passé sur la ville sans briser son ordonnance secrète ni
altérer son rayonnement, sans ébranler les continuités
vitales entre sa population, son architecture et son site.
Mais il n'en va plus de même aujourd'hui. Les
aléas du temps ont terni la splendeur de ses édifices et
commencé à anémier ses facultés créatrices.
La ville est blessée, fragilisée. Pour cette médina,
unique en son genre dans le monde arabe, il s'agit d'assurer à la fois
la protection du système monumental et des richesses artistiques, la
revitalisation de la tradition artisanale et la mise en oeuvre d'une
stratégie de développement. Ici, l'environnement, la population,
les aménagements urbains sont autant de morceaux d'un puzzle qu'il faut
reconstituer avec précision. Le gouvernement marocain, à
l'échelon tant national que régional et local, s'est
engagé avec détermination dans cette entreprise de
réhabilitation en assurant la convergence d'actions menées par
des mécènes, des entreprises, des associations pour
redécouvrir l'urbanité exemplaire de Fès.
La campagne internationale de sauvegarde de Fès
trouve actuellement un second souffle grâce a l'énergie
conjuguée des autorités marocaines, de l'UNESCO, et du PNUD.
L'initiative de cette renaissance est venue de Sa Majesté le Roi du
Maroc, qui a choisi de financer sur ses fonds personnels la restauration de
l'édifice le plus complexe et en même temps le plus symbolique de
la Médina, la Médersa Mesbahiya. La Reine du Danemark s'est
engagée quand à elle, à prendre en charge la restauration
du musée de l'Astrolabe. La voie est ainsi ouverte pour que se
déploie à nouveau la solidarité de la communauté
internationale.
A travers cette exposition, l'UNESCO espère une
mobilisation active, tant financière que technique, de ses Etats
membres. Il va de soi que je serai heureux de la constitution d'un
comité canadien de soutien à la campagne pour la sauvegarde de
Fès. Ce comité réunirait des femmes et des hommes de tous
horizons, unis dans la conviction que ce patrimoine singulier appartient
à l'humanité toute entière et que sa sauvegarde fait
partie des devoirs collectifs que nous devons remplir pour assurer notre destin
commun.
Federico MAYOR.
Québec, 20 Septembre 1992.

DENOMINATION
CAT ADRESSES
CAP NB
D'EMP
PROPRIETAIRE
TEL&FAX
25 SEFRIOUI CHAKIR 'V :
74-10-12//74-12-06
FAX : 74-11-43
15 ALAMI GHIZLANE 'V : 63-73-24 //
33
FAX : 63-73-09
14 ABBADI MEHDI 'V :
74-18-43
FAX : 74-06-86
1 RIAD FES
riad.fes@iam.net.ma
www.riadfes.com
1er ~ 5 Derb Ben Slimane
Zerbttana FES
10 Suites
10 Ch 40 lits
2 PALAIS D'HOTES
fes@palais-hotes.com
1er ~ 9-14Derb Sournass Ziat
FES
3 Suites
12 Ch 30 lits
3 LA MAISON BLEUE
resa@maisonbleu.com
www.maisonbleu.com
1er ~ 2 PL de Istiqlal
Batha
FES
5 Suites
1 Ch 12 lits
'V : 74-18-73//39 FAX : 63-60-52
12 OMAR LEBBAR 'V :
63-41-67//74-15-74
FAX : 63-63-93
6 RIAD SHEHRAZADE
Sheheraz@iam.net.ma
www.sheheraz.com
1er ~ 23 Arset Bennis
Douh Batha FES
11 Suites
2 Ch 17 lits
21 BENGHAZI ABDELLHAI NAJIBA
4 EL HAYAR JALIL 'V :
62-15-61
FAX : 62-31-67
7 DAR ZIRYAB
Darziryab@wanadoo.net.ma
www.darziryab.com
1er ~ 2 Rue Badiss BP 2150
V.N FES
4 Suites 4 Ch
12 lits
'V : 74-07-00//74-10-81 FAX : 74-07-12
8 RIAD ANDALOUSS
Dar.andalouss@menara.ma
réservation@darandalous.com
www.riadandalous.com
1er ~ 14 Derb Bennani
Douh
Batha FES
8 Suites 4 Ch
13 lits
12 KADIRI
MOHAMMED
120
4 RIAD El KADI
lamaisonbleu@menara.ma
www.maisonbleu.com
5 DAR GHALIA
rarelghalia@hotmail.com
www.darelghalia.com
1er ~ 33Quartier DerbMitter
Talaa Kebira FES
1er ~ 15 Ross Rhi Prés du
Place R'Sif FES
8 Suites
5 Ch 26 lits
11 Suites
3 Ch 28 lits
14 ABBADI MEHDI
'V : 74-16-42
FAX : 74-16-45
Annexe 5. Liste des maisons d'hôtes
classées à Fès selon la Délégation
Régionale du Tourisme (Fès)

2 : 74-00-00//63-80-80 FAX : 63-82-82
8 CHAB
MOHAMMED
1er ® 13 Salaj
Batha
FES
9 RIAD MYRA
info@riadmyra.com
www.riadmyra.com
9 Suites
3 Ch 24 lits
10 RIAD DAMIA
riaddamiafes@riaddamiafes.co
1er ® 10 rue Sornas Ziat
Fès.
5 Farid Lahlou 2 : 035 63 43 76
GSM 062 18 97 77
m
10 Hassan Chahbi 2 : 035 63 61 12 / 035 63 59
65
Fax :035 63 59 37
1er ® 16 Derb Bennis Douh
30200 Fès medina
11 RIAD LA PERLE DE LA MEDINA
Perledelamedina@menara.ma
www.riadperlemedina.com
1er ® 9 Derb El Gabbass
Douh
Batha FES
12 ALLAL KHALIFI 2 : 74-00-20//63-66-07
FAX : 63-67-54
12 DAR EL YAKOUT
riadyacout@menara.ma
www.riadyacout.com
9 Suites
3 Ch 24 lits
13 RIAD AL BERTAL
Riadalbartal@menara.ma
www.riadalbartal.com
2 : 63-70-53 FAX : 63-70-53
6 LAROCHE CHRISTIAN
2 éme ® 21 Rue Sournass
Ziat FES
5 Suites 2 Ch
14 lits
14 RIAD MABROUKA
Ryadmabrouka@iam.net.ma
www.ryadmabrouka.com
10 MICHEL TREZZY 2 : 63-63-45//42
FAX : 63-63-10
2éme ® 25 Derb Mitter
Talaa Kibira FES
6 Suites 2 Ch 16 lits
15 ARABESQUE
Arabesque@iam.net.ma
www.arabesquehotel.com
7 BENAMOUR KHALID
2éme ® Zenjfour Derb Mitter
Bab Guissa FES
2 : 63-53-21 FAX : 63-45-90
5 Suites 2 Ch 9 lits
2éme ® 12 Derb Skalia
Douh Batha FES
6 BELKADI SAKINA 2 : 74-04-40
FAX : 74-04-41
4 Suites
2 Ch 12 lits
16 RIAD ZAMANE
Contact@riadzamane.com
www.riadzamane.com
17 RIAD NORMA
monique@riadnorma.com
www.riadnorma.com
2 : 63-47-81 FAX : 63-47-48
2éme ® Rue Sournass
Ziat FES
4 Suites
2 Ch 11 lits
6 DEVAUX
DOMINIQUE
18 RIAD EL PACHA
Riadpacha@menara.ma
www.riadpacha.com
2éme
.
® 7 Derb el miter Talaâ
kebira FES
2 : 63-66-06//63-89-00 FAX : 65-27-36
10 RACHID
BENAMOR
3 Suites 11 Ch 22 lits
19 RIAD AU VINGT JASMINE
7 Ch 14 Lits
2éme ® 11 Derb Zebtana
Batha
FES
2 : 74-11-89 FAX : 74-11-89
2 AICHA
BEMAKLOUF
if 20 i
20 RIAD GHITA
contact@riadghita.com
www.riadghita.com
2 : 74-09-01 FAX : 74-09-21
6 BENKHALED MOHAMMED
2éme ® 52 Bouâjara
Bab Jdid FES
4 Suites
3 Ch 14 lits
121
7 Suites 2 Ch 16 lits
5 Suites
5 Ch 20 lits

V : 74-05-84 FAX : 74-05-84
3 MARC // KHADIJA
CHASTAGNER
2éme ~ 16, Derb Bannani
Douh
Batha FES
21 RIAD FES BARAKA
riad-fes-baraka@wanadoo.fr
riad-fesbaraka@yahoo.fr
www.fes-baraka-riad.com
4 Suites 1 Ch
10 lits
22 DAR CORDOBA
darcordoba@darcordoba.com
www.darcordoba.com
V : 63-83-40 //71-94-71 FAX : 63-83-40
4 JUAN JOSE
ALAMO MOREMO
2éme ~ 15, Derb El Gabbass
Douh Batha FES
4 Suites
1 Ch
11 lits
23 RIAD DAR DMANA
riaddardmana@menara.ma
www.riaddardmana.com
5 BOUZIDI IDRISSI
KHALID
2éme ~ 20 rue Salaj
Douh Batha FES
V : 74-09-17 FAX : 63-85-71
3 Suites
5 Ch 16 lits
24 RIAD JAOUHARA
riadjaouhara@menara.ma
www.riadjaouhara.com
V : 74-03-03//74-08-08 FAX : 74-00-88
2éme ~ 11 rue de la Poste
Batha
FES
6 Suites
1 Ch 10 lits
7 HAROUCHI AZEDINE/ DEKKAK ABDEALI
25 RIAD IBN BATTOUTA
contact@riadibnbattouta.com
www.riadibnbattouta.com
2éme ~ 9 Derb Lalla Mina Av
Allal El Fassi Batha FES
5 Suites
2 Ch 16 lits
V : 63-71-90 // 91 FAX : 63-71-91
7 EL KAABE ANASS
OHNSTON BEATRICE
26 DAR ANBAR
info@daranebar.com
www.riadanebar.com
3 GUESSOS NADIA
ALAMI TALBI
2éme ~ 15 Derb El Mitr
Zenjefour
FES
3 Suites
6 Ch 13 lits
V : 63-57-85 FAX : 63-57-85
27 RIAD SARA
Riadsara@riad-sara.com
www.riad-sara.com
2 TAHRI DRISS V : 63-68-20
FAX : 63-68-25
2éme ~ 17 Derb El Gabass
Douh Batha FES
3 Suites
6 Ch
13 lits
2éme ~ 5/6 Rue El Hamia
Ziat FES
7 Suites
14 lits
28 RIAD LES OUDAYAS
contact@lesoudayas.com
www.lesoudayas.com
6 LOUDIYI FOUAD V : 63-63-03
FAX : 63-63-03
29 DAR VICTORIA
lesjouarhate@menara.ma
www.darvictoria.com
V 035 63 00 03
GSM / 078 20 42 83
2 Michel de Victore et
Kacem Bouasria
2éme ~ 31 Rue Makhfia quartier
Bourajoue
2 Suites
4 Ch
12 lits
30 RIAD CHRABLYENNE
Calipau.fes@menara.ma
www.dar.calipau.com
2 Bernard Viviane V :035 63 72
41
GSM :064 01 07 41
2éme ~ 1,Rue Rha
Chrableyenne
31 DAR SAFFARINE
info@darseffarine.com
www.darseffarine.com
6 Ch 12 lits
2éme ~ N° 14 Sbaa Laouiate
Fès médina
3 ALAA ABDELAMIR
SAID
V 07- 11-13-52-8 FAX 055 63 52 05
32 RIAD IBN KHALDOUN 2éme ~ 7 Moukhfia
derb Sefli 9 Ch 8 Salah Eddine Lazrak V 035 62 90
28
122
5 Ch
10 lits

123
Rcif Fès. 14 lits Fax 035 66 94 86
riadibnkhaldoun@menara.ma
www.riad-ibnkhaldoun.com
34 DAR ROUMANA
Info@darroumana.com
38 RIAD YAMANDA
fez.yamanda@gmail.com
39 RIAD DAR CHRIFA
riaddarchrifa@menara.ma
www.riaddarchrifa.com
2éme ~ 21 Derb el guabbas douh
Fès
5 Ch 4 FRANCOISE V 035 63 74
99
10 lits HUGUET
2éme ~ 30 Derb El Amer Zkak
Roumane FES
1 Suites
4 Ch 10 lits
6 JENNIFER SMITH V :
74-16-37
FAX : 74-16-37
2éme ~ 3 Derb Bechara Talaâ
Seghira FES
7 Ch 10 FREDERIC SOLA
12 Lits ISALELLE 074-18-
76-39
V : 63-66-99 FAX : 63-82-37
2éme ~ 104 Bouajjara
Bab
Jdid FES
5 Ch 4 LETIMONIER
5 Lits HUGUES
076-28-50-29
V : 63-50-45 FAX : 63-50-45
2éme ~ 2 Oued Souafine
Ziat
FES
7 Ch 16 lits
7 BERNARD PELAY
065-74-94-72
V : 63-86-86 FAX : 63-78-53
2éme ~ 1/3 Derb Daoud
Zerbtana
FES
9 Ch
9 lits
5 ARCHIDART SAIL V :
63-55-30
FAX : 3-55-30
2éme ~ 20 Arset Hammoumi
Ziat
FES
4 Suites 3 Ch 29 lits
3 MAJID
BENJELLOUN
061-69-04-78
V : 63-78-50 FAX : 63-78-51
2éme ~ 3 Derb Sekalia Douh
Batha FES
2éme ~ 21 Derb Guebass
Batha
FES
6 Suites
2 Ch 18 lits
5 Ch 6 PAULINE ET
10 lits JURGEN MOLLER
061-28-17-08
2 BRIGITT ET
CHARLLY
061-32-86-06 // 01984-86-92
2éme ~ 21 Derb
SerajTalaa
Sghira FES
3 Suites 3 Ch
7 lits
6 JEAN-PIERRE PARENT
V : 74-19-85 FAX : 74-19-85
33 RIAD LA CLE DE FES
reservation@riadcledefes.com
35 RIAD LAAROUSSA
contact@riad-laaroussa.com
www.riad-laaroussa.com
36 RIAD ATTARINE
contact@riadattrine.com
www.riadattarine.com
37 RIAD SOUAFINE
souafine@riadsouafine.com
www.riadsouafine.com
40 LUNE ET SOLEIL
luneetsoleil@menara.ma
www.luneetsoleil.com
41 RIAD DAR SKALLI
contact@riaddarskalli.com
www.riaddarskalli.com
42 RIAD LOUNA
Riadlouna@caramail.com
V : 63-45-23 FAX : 74-02-52
V : 63-42-57 FAX : 63-42-73
124
Table des illustrations
Liste des tableaux
TABLEAU 1. Nuitées
réalisées dans les destinations culturelles Fès et
Marrakech en comparaison avec Agadir 48
TABLEAU 2. Evolution de la durée
moyenne de séjour à Fès durant la période 2003-2006
49
TABLEAU 3. Exemples de
réévaluation foncière des demeures dans la médina
de Fès 67
Liste des figures
FIGURE 1. Schéma de synthèse
des exemples de l'image de la médina des Fès chez les nouveaux
résidents
étrangers 62
FIGURE 2. Evolution des investissements
étrangers dans la médina de Fès (1997-2008) 65
Liste des cartes
CARTE 1. Localisation de la zone d'étude 20
CARTE 2. Répartition géographique des
propriétés étrangères dans la médina de
Marrakech 31
CARTE 3. Répartition des propriétés
étrangères par nationalité dans la médina
d'Essaouira 34
CARTE 4. Répartition des maisons menaçant ruine
dans la médina de Fès. 45
CARTE 5. Les circuits touristiques dans la médina de
Fès 52
CARTE 6. La localisation des maisons d'hôtes (marocaines
et étrangères) à Fès en 2006 78
CARTE 7. Les propriétés étrangères
dans la médina de Fès en 2008 87
CARTE 8. Répartition des propriétés
étrangères par nationalité dans la médina de
Fès 95
Liste des planches photographiques
PLANCHE 1: La différence entre un
riad et une dar 26
PLANCHE 2: Formes de sauvegarde et de mise en
valeur touristique de la médina de Fès 53
PLANCHE 3: La multiplication des annonces de
vente de demeures et des agents immobiliers en médina 71
PLANCHE 4: Les maisons d'habitations à
propriétaires étrangers dans la médina de Fès 75
PLANCHE 5: Les demeures
étrangères à usage commercial ou culturel dans la
médina de Fès 80
125
Table des matières
REMERCIEMENTS 4
DEDICACE 5
PREFACE 6
SOMMAIRE 7
INTRODUTION GENERALE (Problématique,
questionnements,Postulats et hypothèses de
travail, Approche méthodologique, présentation
du terrain d'étude) 9
CHAPITRE I : LE CONTEXTE DE L'APPARITION DU PHENOMENE
A L'ECHELLE DES VILLES MAROCAINES ET SON ARRIVEE A FES
Introduction 22
I- Problèmes de définitions 23
1-Riad et Dar: Une nouvelle construction sémantique 23
2-A propos de la notion de gentrification 27
II- Etat des lieux du phénomène des
acquisitions de vieilles maisons dans les médinas
marocaines 29
1- Marrakech : le nouvel Eldorado 29
2- Essaouira: Une médina en ébullition 32
II- Les raisons de l'attrait des Occidentaux pour les
centres anciens marocains 35
1- La promotion touristique : Un tourisme culturel porté
par les médinas 36
2-Promotion et support des investissements étrangers au
Maroc 37
a- L'engouement médiatique et l'afflux des acheteurs
étrangers 37
b- Le rôle du transport aérien dans le soutien
à la valorisation des destinations
touristiques 40
III- La valorisation de l'espace médinal de
Fès : prémices de la mise en tourisme 43
1- Sauvegarde et patrimonialisation de la médina de
Fès : Une politique qui bat au rythme
de la touristification 44
2- Le tourisme culturel à Fès : Une richesse
indéniable 47
Conclusion 53
CHAPITRE II : MISE EN TOURISME OU TOURISTIFICATION DE
LA MEDINA DE FES PAR LES ETRANGERS PROPRIETAIRES DE MAISONS
Introduction 57
I- Les maisons de la médina de Fès : Vers
une nouvelle forme de mise en tourisme 59
1- L'image de Fès chez les étrangers 59
2- Quatre grandes phases dans l'évolution des
investissements étrangers en médina 63
3- Un marché immobilier particulier et complexe 68
126
II- Les maisons étrangères dans la
médina de Fès : Des usages polymorphes 73
1- Les maisons traditionnelles : des habitations à usage
privé 73
2- Les maisons traditionnelles : des habitations à usage
commercial et culturel 76
Conclusion 82
CHAPITRE III : LES NOUVEAUX « TOURISTES-RESIDENTS
» DANS LA
MEDINA
Introduction 84
I- Les propriétés étrangères
dans la médina de Fès : D'une installation sporadique à
un
ancrage du phénomène 86
1- Répartition spatiale des propriétés
étrangères dans la médina de Fès : Des logiques
de
localisation sélectives 86
2- Le phénomène de reconversion des anciennes
demeures en maisons d'hôtes par les
étrangers : Un support à la mise en tourisme de la
médina 89
II- Les étrangers en médina : Acteurs et
réseaux 94
1- Le profil des nouveaux touristes 94
2- Les communautés étrangères :
réseaux et cohabitation 97
Conclusion 101
CONCLUSION GENERALE 102
BIBLIOGRAPHIE 105
ANNEXES 110
TABLE DES ILLUSTRATIONS 115
TABLE DES MATIERES 125
|