Liste des principales abréviations
BEAC : Banque des États de l'Afrique
Centrale
BP : Banque principale
CBC : Concours bancaires courants
CEMAC : Communauté Économique
et Monétaire d'Afrique Centrale
CFC : Crédit Foncier du Cameroun
COBAC : Commission Bancaire d'Afrique
Centrale
COOPEC : Coopératives d'Épargne
et de Crédit
CVECA : Caisses Villageoises d'Épargne
et de Crédit Autogérées
DSF : Déclarations Statistiques et
Fiscales
EF : Établissement Financier
EMF/IMF : Établissement de
Microfinance/ Institution de Microfinance
FCFA : Franc de la Coopération
Financière en Afrique Centrale.
FOGAPE : Fonds d'Aides et de Garantie aux
Petites et Moyennes Entreprises
FONADER : Fonds National de
Développement Rural
INS : Institut National de la Statistique
MINPMEESA :
|
Ministère de la Petite et Moyenne Entreprise et de
l'Économie Sociale et Artisanale
|
OHADA : Organisation pour l'Harmonisation en
Afrique du Droit des Affaires
PME / PMI : Petite et moyenne entreprise /
Petite et moyenne industrie
SA : Société anonyme
Sd : Sans date
SARL : Société à
responsabilité limitée
SFA : Société financière
africaine
SPSS 17.0 : Statistical package for the
Social Sciences version 17.0
TA : Théorie d'agence
TC : Théorie des conventions
TCI : Théorie des contrats
incomplets
TCS : Théorie du contrat social
TCT : Théorie des coûts de
transaction
TDP : Théorie des droits de
propriété
INTRODUCTION GÉNÉRALE
Mémoire DEA Sciences de Gestion Relations de
crédit et coût de l'endettement : le cas des PME
camerounaises
1
Mémoire DEA Sciences de Gestion Relations de
crédit et coût de l'endettement : le cas des PME
camerounaises
2
I-) Contexte et problématique
Au Cameroun, comme dans la plupart des pays africains, la
petite et moyenne entreprise (PME) est érigée en
élément fondamental de la stratégie de
développement économique et social (Wamba, 2001). Dans les
économies africaines, les PME représentent près de 50 %
des emplois et, selon les enquêtes menées par la Banque Mondiale,
40 % des petites entreprises et 30 % des moyennes entreprises
considèrent l'accès au financement comme un frein majeur au
développement de leurs activités (Soledad Peria, 2009).
Également pourvoyeuses d'emplois dans l'économie camerounaise,
elles sont appelées à y jouer, à l'ère du passage
de l'interventionnisme Étatique au libéralisme économique,
un rôle primordiale alors même qu'elles éprouvent
d'énormes difficultés à se financer (Joseph, 1998 ;
Ndong-Ntah, 2002). Selon Lachmann (1997, p. 287) « la réussite
du développement d'une entreprise ne dépend plus uniquement de
l'Homme, du produit, du marché, de la production, de la capacité
d'adaptation et de l'innovation, mais «également des capitaux, car
la recherche de financement est devenue progressivement un enjeu
stratégique du développement de l'entreprise» ».
Essomba-Ambassa et Um-Ngouem (2002) constatent ainsi que dans la
hiérarchie des problèmes des PME, les difficultés
financières figurent au premier plan. Celles-ci sont de deux ordres :
les premières ont trait à l'insuffisance de l'autofinancement et
les secondes sont relatives à la carence des apports en capital, en
d'autres termes à l'insuffisance des fonds propres qui devient un
obstacle fondamental à l'émergence de la PME et à sa
croissance (Edding, 2002). Ce problème se pose avec autant plus
d'acuité que Lefilleur (2008, p. 160) remarque « un paradoxe de
la faible demande de financement en capital dans les pays d'Afrique
Subsaharienne ». Paradoxe que l'auteur justifie par de fortes
exigences des bailleurs de fonds en termes de respect des normes
environnementales et sociales, l'étroitesse des marchés et
l'absence de marché des capitaux et la faiblesse des organes de
contrôle et des cadres légaux locaux. Tous ces arguments
témoignent de la forte dépendance des PME à l'égard
des sources de financement externes.
Malheureusement, dans un environnement encore dépourvu
de marché financier1, obtenir les fonds auprès des
banques pour financer les investissements n'est pas chose aisée.
1 Ceci correspond à l'absence de
marché financier ou l'existence d'un marché « non actif
» comme la DSX (Douala Stock Exchange) qui, depuis sa création par
l'État camerounais en décembre 1999, dispose d'un marché
des actions animé par les actions de trois entreprises seulement [la
Société des Eaux Minérales du Cameroun (SEMC), la
Société Agricole Forestière du Cameroun (SAFACAM) et la
Société Camerounaise de Palmerais (SOCAPALM)] et un marché
obligataire animé par les emprunts obligataires émis par
l'État du
Mémoire DEA Sciences de Gestion Relations de
crédit et coût de l'endettement : le cas des PME
camerounaises
3
En 2007, seulement 24 % des entreprises camerounaises ont eu
accès au crédit bancaire en payant des taux
d'intérêt et des garanties élevés (MINEFI, 2007). De
janvier 2009 à avril 2010, aucun crédit de long terme n'a
été octroyé par les banques au Cameroun (COBAC, 2010). Les
banques n'accorderaient pas toujours le crédit sollicité par les
entreprises et ce malgré un état de surliquidité
générale (Wanda, 2007 ; Avom et Eyeffa, 2007 ; Fouda, 2009) suite
à la restructuration du secteur bancaire camerounais initiée
à la fin des années 19802. Cette attitude frileuse des
banques est liée au type de relation entretenue avec les entreprises et
plus particulièrement les PME.
D'après COBAC (2010, p.7-8), pour la période
Janvier 2009 à Avril 2010 au Cameroun, « la majorité des
crédits ont été octroyés aux grandes entreprises
à des conditions assez favorables et (...) les établissements de
crédit exigent une prime de risque plus forte » aux PME. Ceci
serait lié au fait que « les banques ont inventé sous
diverses dénominations de nouveaux frais fixes qui pèsent sur le
coût du service bancaire » (p. 6). Aussi le taux moyen du
crédit aux PME (12,36%) est près du double de celui des grandes
entreprises (7,31%). Soledad Peria, (2009) soulignait déjà que
les taux d'intérêt sont en moyenne de l'ordre de 5 à 6
points de pourcentage supérieur en Afrique subsaharienne par rapport aux
autres pays en voie de développement et que les frais appliqués
aux prêts bancaires sont généralement deux fois plus
élevés. Ces constats seraient, pour beaucoup d'auteurs, une des
conséquences du comportement généralement
transactionnel3 des banques à l'égard des entreprises
justifiant aussi la surliquidité constatée (Tioumagneng,
2009).
Cameroun (emprunt dénommé ECMR 5,6), par la
Société Financière Africaine (emprunt
dénommé MOABI IFC 4,25) et celui de la Banque de
Développement des États de l'Afrique Centrale (BDEAC).
2 Cette reforme avait pour objectifs de restaurer
la liquidité des banques sinistrées par la crise bancaire et de
permettre un meilleur financement de l'économie (Tchakounté et
Bita, 2009). Si le premier objectif à été atteint, les
banques n'ont pas pour autant accordé plus de crédit à
l'économie (Joseph, 1998). Un bilan de cette restructuration
établie par Avom et Eyeffa (2007) souligne trois importants paradoxes :
la surliquidité bancaire et le rationnement du crédit, la
concentration bancaire et le développement de la microfinance,
l'internationalisation et l'absence d'innovation financière en
matière de services offerts par les banques camerounaises. Parlant de
surliquidité, Wanda (2007) relève comme facteurs : l'importance
du risque de crédit, la rigueur de la surveillance de la Commission
Bancaire d`Afrique Centrale, l'excès de tarification des services
offerts aux grandes entreprises, la non application, par les banques, de
l'arbitrage pour régler leurs litiges commerciaux. Fouda (2009) montrent
aussi que cette surliquidité relève de l'interaction entre
plusieurs facteurs tels que : l'incertitude liée à la forte
dégradation du climat des affaires, l'effet de mémoire des crises
bancaires antérieures et le renforcement de la frilosité des
banques, ainsi que les innovations financières engendrées par la
libéralisation financière.
3 Il faut souligner néanmoins qu'une
étude de Biboum et Bekolo (2008) montre que certaines banques adoptent
les deux comportements (transactionnel et relationnel) en fonction de la nature
de la clientèle (clientèle institutionnelle et clientèle
des particuliers).
Mémoire DEA Sciences de Gestion Relations de
crédit et coût de l'endettement : le cas des PME
camerounaises
4
Bien qu'il existe une forte interdépendance entre ces
deux acteurs de l'activité économique, la nature de leur relation
est souvent emprunte à beaucoup de difficultés et de conflits qui
tiennent leurs origines des objectifs divergents de chacune des parties. Les
banquiers affirment que les entrepreneurs affichent souvent des
incompétences en gestion (Wamba et Tchamanbe-Djiné, 2002) et
qu'ils ne transmettent pas toutes les informations pertinentes dans leurs
dossiers d'emprunt (Rivaut-Danset, 1995). De l'autre côté, les
entrepreneurs se plaignent d'être l'objet d'abus de pouvoir de la part
des institutions financières, qui seraient trop exigeantes envers eux,
n'accepteraient pas les spécificités de leurs entreprises
(Edding, 2002) et ne les percevraient uniquement comme un « risque »
finançable ou non (Gardès et Maque, 2009). Un tel climat
d'affaire, caractérisé par un rationnement «
exagéré » du crédit (Ndjanyou, 2001) suscite des
questionnements sur le comportement financier des PME plus
spécifiquement celui relatif à l'endettement bancaire :
- est-il possible de maintenir des relations
bancaires dans un tel contexte ?
- la difficulté d'accès au
crédit est-elle une conséquence des caractéristiques de
l'entreprise, des banques ou du secteur bancaire ?
- quelles stratégies mettent en place
les entreprises pour améliorer leurs conditions de crédit ?
- les PME optent-elles pour la construction
d'un financement de type transactionnel ou de type relationnel ? Pour un
régime de financement concentré ou diversifié ?
Face à ces questionnements, les théories de
l'intermédiation financière soulignent que l'existence des
banques se justifie non seulement par leurs capacités à
réduire les coûts de transaction4 (Diamond, 1984 ;
Bhattacharya et Thakor, 1993), mais aussi et surtout par leurs capacités
à éliminer progressivement les asymétries d'information
(Leland et Pyle, 1977). Ces asymétries, à l'origine des
problèmes de sélection adverse et d'aléa moral, sont le
principal facteur de détérioration des termes de l'échange
entre banques et entreprises aboutissant généralement à un
rationnement du crédit.
Le rationnement du crédit admet plusieurs
modalités allant de la « satisfaction » partielle de la
demande de crédit à l'exclusion bancaire (Jaffee et Russell, 1976
; Keeton, 1979 ; Stiglitz et Weiss, 1981). Ce phénomène se
justifie par des arguments aussi bien du côté de l'offre que de la
demande. En plus l'incertitude et de l'opacité informationnelle
(côté
4 Coase (1937) indique que ce sont les coûts de
transaction qui constituent la raison d'être des entreprises.
Mémoire DEA Sciences de Gestion Relations de
crédit et coût de l'endettement : le cas des PME
camerounaises
5
demande), des problèmes posés par l'architecture
organisationnelle5 (Berger et al., 2001 ; Nekhili et Bouslama, 2007)
et du risque d'illiquidité (Detragiache et al., 2000) de la (des)
banque(s) peuvent contribuer fortement à cette restriction. Pour y faire
face, l'établissement de contrats contingents (Townsend, 1979) par les
prêteurs ainsi qu'une régulation par la combinaison des taux et
des garanties à travers le « screening» (Bester, 1985)
permettrait de limiter les coûts indirects liés aux conflits
d'intérêt. Toutes ces propositions ne sont que du ressort des
prêteurs. Du coté des emprunteurs, les premiers modèles
mettent en relief l'émission des signaux (Spence, 1973) à travers
l'apport personnel en capital par le promoteur (Leland et Pyle, 1977), la
structure du capital et le niveau des dividendes comme des mécanismes
réducteurs des problèmes informationnels (Wamba et
Tchamanbe-Djiné, 2002).
Ces premiers modèles fondés sur les
théories du signal (Akerlof, 1960) comportent, en plus de la nature
incomplète des contrats, une limite commune soulignée par
Rivaud-Danset (1996). Celle-ci est liée au fait qu'ils sont basés
sous l'hypothèse forte que l'emprunteur ne puisse s'adresser à un
autre financeur. La théorie financière s'est donc très
rarement préoccupé d'examiner les réactions des
entreprises en privilégiant ainsi leur passivité se basant sans
doute sous l'hypothèse d'exogeneité de la structure
financière6. Cette hypothèse place la PME en situation
de faiblesse dans ses rapports avec les banques (Tioumagneng, 2009).
Des modèles récents s'intéressent plus
particulièrement à deux stratégies permettant à
l'entreprise de résoudre et/ou de contourner les difficultés
d'accès au crédit à savoir l'adoption d'une approche
relationnelle de financement avec la banque à travers la
monobancarisation et la multiplication de relations de crédit («
multibancarisation »). La plupart de ces modèles
privilégient, tout comme le présent travail, l'hypothèse
d'endogénéité de la structure financière de
l'entreprise. Cette dernière serait dans ce cas l'expression du
système de préférence rationnelle de son (ses)
dirigeant(s) dans un environnement marqué à la fois par des
divergences des intérêts des acteurs économiques
(dirigeant-propriétaire,
dirigeant/propriétaire-créanciers...) et par l'existence
d'asymétries d'information entre les
5 Ces problèmes proviennent de la distance
hiérarchique qui sépare le chargé de la clientèle
de la direction et des actionnaires dans les banques, mais aussi des
asymétries d'information, des intérêts divergents et du
comportement opportuniste des acteurs.
6 Cette hypothèse est à la base de la
théorie dite du rationnement du crédit (Cieply et
Paranque, (1997). L'exogénéité renvoie au fait que la
structure financière est le reflet de la stratégie de
maximisation des profits des prêteurs dans un contexte de non congruence
des préférences des cocontractants.
Mémoire DEA Sciences de Gestion Relations de
crédit et coût de l'endettement : le cas des PME
camerounaises
6
acteurs (Cieply et Paranque, 1997). Le lien entre les
régimes de financement identifiés et les conditions de
crédit est objet de controverses tant sur le plan théorique
qu'empirique.
En ce qui concerne le régime monobancaire de
financement, celui-ci est généralement appréhendé
sous un aspect plus relationnel (banque à l'engagement, banque de
proximité) que transactionnel (banque à l'acte). La
théorie de l'information financière suppose ainsi que ce
régime s'inscrit dans un cadre beaucoup plus relationnel que
transactionnel grâce à la relation de clientèle qui y
émergerait au fil du temps (Petersen et Rajan 1994). Dans cette
mouvance, l'existence de multiples interactions entre les acteurs d'où
doivent émerger, des informations de nature qualitative et à
caractère confidentiel sont, pour Berger (1999), les conditions
nécessaires pour parler de relation de clientèle bancaire. Dans
ce type de relation, « la banque cherche à s'assurer que son
client pourra la rembourser et l'emprunteur souhaite obtenir des assurances sur
les conditions d'accès au crédit dans le futur »
(Rivaud-Danset, 1996, p. 937). Cette inscription dans la durée de la
relation procurerait un avantage informationnel important à la
banque.
Le financement monobancaire serait un moyen d'assurer
l'emprunteur contre le rationnement de crédit (Roosa, 1951 ; Hodgman,
1963) grâce au développement d'un savoir bancaire de nature
subjective sur l'entreprise (Petersen et Rajan, 1994). Ainsi, en situation
d'asymétrie d'information ex ante, elle génère des
économies d'envergure dans la production des informations sur les
emprunteurs. Dans le cadre d'asymétries d'information ex-post, elle
permet, en même temps que la réputation dont
bénéficie l'entreprise (Diamond, 1989), un meilleur
contrôle et une amélioration de l'évaluation du risque
(Fama, 1985 ; Eber, 1999). A ce titre, Diamond (1989) et Von Thadden (1995)
soutiennent que l'effet réputation se traduit par une incitation de
l'entreprise à choisir les bons projets d'investissement permettant
à la banque de faire face au problème de risque moral. Tout
nouvel entrepreneur devrait accepter les prêts avec des garanties et des
taux d'intérêts élevés. Avec le temps, l'entreprise
« s'établie » avec son premier succès et
bénéfice d'une bonne réputation qui va permettre de
réduire l'utilisation des garanties coûteuses et faciliter
l'accès au crédit (Boot et Thakor, 1994).
S'il est ainsi admis la capacité de la relation de
clientèle exclusive à résoudre les problèmes de
risque moral lié au comportement de l'emprunteur, Sharpe (1990) et Rajan
(1992) montrent que celle-ci peut créer un risque moral lié au
comportement du préteur. Ce risque va se traduire par une « capture
informationnelle » permettant au préteur d'exercer un
Mémoire DEA Sciences de Gestion Relations de
crédit et coût de l'endettement : le cas des PME
camerounaises
7
pouvoir de monopole par l'application de taux
d'intérêt élevés (extraction d'une « rente
informationnelle »).Outre le hold-up, on note également le
problème posé par le refinancement systématique que Kornai
(1980)7 appelle « soft-budget constraint » ou
encore contrainte budgétaire atténuée.
Face à ces revers de la relation, une autre alternative
s'offre à l'entreprise emprunteuse à savoir la multiplication de
partenaires financiers ou « multibancarisation ».
« La multibancarisation ou
multilatéralisation8 traduit le fait pour une entreprise
d'entretenir des relations (de crédit ou non) avec plusieurs banques
à la fois » (Tioumagneng, 2009, p.73). Toutefois, bien que les
relations banque-entreprise ne se réduisent pas aux seules relations de
crédit, elles sont en grande partie structurées par les
conditions dans lesquelles les entreprises peuvent accéder au
crédit bancaire pour financer leur activité et leur
développement. La multibancarisation pourrait par conséquent
s'inscrire pleinement dans le cadre d'une relation de crédit. Plusieurs
facteurs peuvent expliquer l'adoption de ce régime de financement dont
la principale vocation est d'améliorer ex post les conditions
de crédit.
Les effets de l'adoption de relations multibanques sur les
conditions de financement de l'entreprise emprunteuse ne font également
pas objet d'unanimité autant sur le plan théorique
qu'empirique.
Les relations multiples pourraient être, pour certain
auteurs, une stratégie d'entreprises de qualité médiocres,
pour qui la dilution de l'information et l'assouplissement de la surveillance
du créancier sont favorables (Refait, 2003). Eber (1999) montrent
à ce sujet qu'elle peut induire chez les banques un comportement de
« passager clandestin » : chaque banque laisse le soin aux autres
d'évaluer le risque de l'emprunteur et se contente seulement de l'octroi
de crédits afin de ne pas supporter les coûts de monitoring. Ce
comportement est également reflété dans les arguments de
Diamond (1984) et Fama (1985). Ces auteurs
7 Cité par Guigou et Vilanova (2000).
8 Dans cette expression, la connotation banque
ne fait pas référence à une catégorie
juridique bien précise, mais doit être compris dans un sens
générique. Elle renferme les entreprises du secteur financier
formel qui effectuent des opérations de banque telles que
définies dans les articles 1 et 3 du Règlement COBAC R-2009 /
02 / portant fixation des catégories des établissements de
crédit, de leur forme juridique et des activités
autorisées. Seront considérés comme « banques
» les acteurs du système bancaire de la zone CEMAC: les banques et
les établissements financiers (appelés tous deux
établissements de crédit) ainsi que les établissements de
microfinance (COBAC, 2008, p. 18). Cette représentation rejoint celle de
Yosha (1995) qui parle de financement multilatéral («
multilateral financing ») ou multilatéralisation de la dette
que la littérature francophone traduit généralement par
« multibancarisation ». Entre dans cette même famille la notion
de (régime de) financement diversifié ou alors de diversification
de la dette.
Mémoire DEA Sciences de Gestion Relations de
crédit et coût de l'endettement : le cas des PME
camerounaises
8
Mémoire DEA Sciences de Gestion Relations de
crédit et coût de l'endettement : le cas des PME
camerounaises
montrent que pour une entreprise, être en relation avec
plus d'une banque est probablement coûteux du fait non seulement de
l'augmentation des coûts de transaction résultant d'une
répétition des opérations de monitoring et de screening,
mais également (Boot et Thakor, 1994 ; Bolton et Scharfstein, 1996) de
la renégociation des contrats de prêts. En réduisant de se
fait la valeur de l'information acquise par chaque banque et en accentuant la
concurrence entre elles, la multibancarité peut entrainer une «
malédiction du vainqueur » (Winner's curses) en rendant
les banques réticentes à octroyer le crédit.
Cependant, la multiplication des relations crédit
serait une solution au hold-up informationnel (Sharpe, 1990 ; Rajan, 1992 ;
Ongena et Smith, 2000), au rationnement et au risque d'illiquidité de la
(des) banque(s) (Detragiache et al., 2000). Cela permet à une entreprise
d'éviter de devoir liquider précocement un projet
d'investissement à valeur actuelle nette positive du fait que sa (ses)
banque(s) est (sont) incapable(s) de le financer en totalité.
Empiriquement, les travaux de Cole (1998), sur les PME au États-Unis
s'inscrivent, contrairement à ceux de Shikimi (2005) au Japon, en faveur
de la « malédiction du vainqueur ». Aussi, les études
de Foglia et Reedtz (1999) sur des données Italiennes font ressortir un
lien négatif entre le taux d'intérêt de l'emprunt et le
nombre de relations bancaires. Ce résultat remet en question les effets
de la duplication des coûts de monitoring telle que défini par
Diamond (1984).
Aucune conclusion ne parait à ce jour être
établie, les multiples prédictions théoriques et
études empiriques donnant des résultats extrêmement
contradictoires sur les enjeux de ces choix stratégiques (financement
exclusif et financement diversifié) pour l'entreprise emprunteuse.
Aussi, ces enseignements controversés de la littérature ne
semblent avoir fait, à notre connaissance, objet de recherche empirique
que partiellement sur le plan local. Dans une situation de crise du financement
bancaire, plusieurs auteurs se sont intéressés aux modes de
financement alternatifs (Brenner, Fouda et Toulouse, 1990 ; Bekolo-Ebé,
1997) et aux mesures de relance du financement bancaire (Ndjanyou, 2001 ;
Ndong-Ntah 2002). La plupart de ces mesures de relance proposées sont du
ressort des banques et/ou des mécanismes institutionnels et
privilégient par conséquent l'hypothèse
d'exogénéité de la structure financière de
l'entreprise. Ndjanyou (2001) propose à ce sujet une analyse du risque
adapté au contexte de la PME qui intègre un
réaménagement de l'analyse financière classique, la
proximité et la confiance. Ndong-Ntah (2002) propose par la suite la
création de sociétés de capital risque, la mise en place
de systèmes d'information modernes telles que les « agences
9
de rating », la relance des activités du FOGAPE
(Fonds d'Aides et de Garantie aux Petites et Moyennes Entreprises) qui avait
pour vocation, jusqu'à sa disparition vers les années 2002, de
garantir à concurrence de 80% les prêts consentis par les banques
aux PME.
Les études empiriques s'intéressant aux
différentes stratégies, plus particulièrement celles
concernant le régime de financement, qu'adoptent les entreprises
camerounaises pour obtenir les crédits auprès des banques sont
presque inexistantes. Les travaux recensés traitent de la relation de
crédit comme une relation exclusive en conférant à la
banque le monopole du pouvoir de négociation. Biboum et Bekolo (2008)
remarquent, d'une part, qu'en matière de recrutement, les banques au
Cameroun adoptent deux politiques : une politique de « banque debout
», où le banquier va vers les clients pour le recrutement de sa
clientèle9, et une politique de « banque assise »,
où il choisir d'attendre que le client vienne vers lui. Ces options
offrent à l'entreprise une possibilité de définir, avec
plus ou moins d'autonomie, sa stratégie d'endettement. D'autre part, ils
soulignent que la plupart des clients entretiennent des relations commerciales
avec plusieurs banques et/ou coopératives. Comportement qui serait, non
seulement, une conséquence du passé peu glorieux des banques qui,
du fait de la crise des années 80 et de la restructuration du secteur
bancaire, ont dû fermer les portes10, mais aussi une
réponse au comportement frileux des banques en matière d'offre de
crédit.
Dans un tel contexte, il serait intéressant de se poser
plusieurs questions dont l'une des plus importantes serait celle de savoir
quelle est l'influence des régimes de financement sur les
conditions de crédit des entreprises ? Autrement,
quelle est l'incidence des régimes monobancaire et
multibancaire de financement sur le coût de l'endettement des entreprises
?
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