FACULTE DE DROIT, D'ECONOMIE,
DE GESTION ET DE SOCIOLOGIE
UNIVERSITE D'ANTANANARIVO
DEPARTEMENT DE SOCIOLOGIE
MEMOIRE DE MAITRISE
CONTRIBUTION A L'ETUDE SOCIOLOGIQUE DE LA
PRATIQUE
DEMOCRATIQUE DANS LE CONTEXTE
MALGACHE
Cas du IIe arrondissement de la
commune urbaine
d'Antananarivo
Présenté par : Alain
Ranindrianoro
Membres du jury :
Président : ETIENNE Raherimalala Stefano,
maître de conférences Juge : RANAIVOARISON Guillaume,
maître de conférences Directeur du mémoire :
André Rasolo, maître de conférences
CONTRIBUTION A L'ETUDE SOCIOLOGIQUE DE LA PRATIQUE
DEMOCRATIQUE DANS LE CONTEXTE MALGACHE
|
REMERCIEMENTS
Un travail de recherche nécessite un investissement
important de la part du chercheur mais également de son entourage
académique, social et institutionnel.
A ce titre, je remercie en premier lieu mon encadreur, M.
André Rasolo, pour son conseil et son soutien.
Ensuite, je remercie tous ceux qui ont accepté avec
enthousiasme de répondre à mes questions et de me donner
accès à une documentation à laquelle je n'aurais pas pu
accéder sans leur aide.
Je remercie mes amis qui ont directement ou indirectement
participé à ce présent travail par leur présence et
leur disponibilité.
Enfin, merci à ma mère qui m'a supporté
pendant ces quatre années d'études.
SOMMAIRE
INTRODUCTION GENERALE
PREMIERE PARTIE : CADRAGE THEORIQUE : LA DEMOCRATIE EN
DEBATS CHAPITRE I : AUTOUR DE LA DEMOCRATIE
CHAPITRE II : THEORIES ET CONCEPTS
DEUXIEME PARTIE : RESULTATS ET ANALYSES
CHAPITRE III : LES MODALITES DE DEMOCRATISATION A MADAGASCAR
CHAPITRE IV : REFLEXIONS SUR LES PRATIQUES DEMOCRATIQUES CHAPITRE V : LA
PERCEPTION CITOYENNE
PARTIE III : ELARGISSEMENT DE L'HORIZON DE REFLEXION
CHAPITRE VI : ELARGISSEMENT DE LA REFLEXION
CHAPITRE VII : APPROCHE PERSPECTIVE
CONCLUSION GENERALE
ELEMENTS BIBLIOGRAPHIQUES
TABLE DES MATIERES
LISTE DES TABLEAUX
LISTE DES GRAPHIQUES
LISTE DES ABREVIATIONS
ANNEXES
RESUME
INTRODUCTION GENERALE
La démocratie est aujourd'hui au centre de la question
liée à l'exercice du pouvoir étatique. Non seulement elle
a donné matière à d'innombrables écrits mais elle
est aussi au centre des discussions des hommes et des citoyens. C'est
d'ailleurs un signe du climat politique de notre temps. Elle renferme plusieurs
significations en rapport avec le contexte dans lequel elle s'insère.
Mais ce qui est plus visible, c'est qu'elle désigne une certaine
caractéristique d'un régime et l'exercice du pouvoir
politique.
Actuellement, nous vivons dans une démocratie dans sa
forme libérale. La démocratie libérale a pris naissance
dans la rivalité entre deux idéologiques dominantes du
XXe siècle : le socialisme et le capitalisme. Après le
démantèlement de la force vitale du régime fasciste en
Europe, l'affrontement entre les deux blocs, capitaliste et communiste, au
cours de la Guerre Froide s'est soldé par la victoire du monde
capitaliste. Le triomphe est cristallisé par l'éclatement du
régime communiste et la chute du mur de Berlin.
On associe d'ordinaire la victoire du monde capitaliste au
succès de l'économie de marché et la valorisation de la
culture occidentale. A ce sujet, Godelier affirme que « l'humanité
venait d'entrer dans la phase définitive de l'expansion mondiale de
l'économie de marchande capitaliste et de l'implantation
généralisée de la démocratie libérale au
service exclusif bien entendu des droits de l'homme, valeurs qui avaient pris
la place dévolue aux siècles précédents au
christianisme, la seule vraie religion »1.
La démocratie devient une valeur partagée
véhiculée par la mondialisation. Elle se traduit par une nouvelle
configuration de l'espace étatique et l'espace de citoyenneté. Au
niveau de l'Etat, le concept de bonne gouvernance, l'Etat de droit et la
participation citoyenne envahissent le champ politique. Quant à la
citoyenneté, elle s'opère par l'élargissement des droits.
Progressivement, les catégories sociales dorénavant
privées de droit sont actuellement bénéficiaires de ces
droits.
Conçue comme rapport politique, la démocratie
fait l'objet de consensus et sa promotion figure dans l'agenda des organismes
internationaux. Elle désigne un état ultime visé des
programmes internationaux comme condition de leurs aides. Elle est un
instrument des conditions de l'aide des bailleurs de fonds.
1 Godelier (M), Au fondement des
sociétés humaines. Ce que nous apprend l'anthropologie,
coll. Bibliothèque idées, Albin Michel, 2007.
En ce qui concerne Madagascar, il convient de noter que le
pays n'échappe pas à ces transformations sociopolitiques du
XXe siècle. Cette modernité politique qui
coïncide avec la mondialisation contemporaine et la globalisation
économique a marqué un passage du régime socialiste au
régime libéral. Cette transformation politique est avant tout
l'oeuvre d'un mouvement populaire exprimant la soif de liberté et
d'ouverture politique qui a eu lieu sur la mythique place du 13 mai.
Les reformes structurelles engendrées par ce mouvement
ont changé la pratique de gouvernance et le mode d'intégration de
l'individu dans le domaine politique en donnant à chaque citoyen la
possibilité de participer à la décision concernant la vie
collective. Cette forme de participation se reflète par l'instauration
des institutions qui vont jouer le rôle intermédiaire entre les
citoyens et l'Etat. La pratique démocratique en privilégiant
l'acte de participation a été considérée comme le
moyen pour atteindre le développement dans le pays.
Dans le cadre de la dynamique de pauvreté et de
l'exercice du pouvoir, la pratique démocratique comme terrain d'un culte
de la participation a encore été soulevée surtout dans une
période où Madagascar se trouve en difficulté.
Choix thématique
Choisir la pratique démocratique comme sujet de
réflexion dans le contexte malgache est d'actualité dans la
mesure où la participation est actuellement liée aux enjeux de la
démocratie. Le besoin d'implication de la population s'est accru en
réponse à la défaillance du système
représentatif dans le processus de démocratisation et même
du développement en général. L'intérêt
croissant à l'implication de la population a engendré des
discussions au cours des ateliers et conférences-débats lorsqu'il
s'agit de question de développement ou de réussite d'un projet
quelconque. Dans le domaine des sciences sociales, la sociologie a
démontré que l'intégration de l'individu est indispensable
lorsqu'il s'agit de réussir une stratégie de développement
ou de politique quelconque.
De surcroît, il convient de souligner que le choix
thématique s'insère dans le cadre de notre cursus universitaire.
En effet, il est institué au sein du département de la sociologie
des laboratoires de réflexion pour lesquels les étudiants doivent
en opter un. En ce qui nous concerne, nous avons choisi le laboratoire qui
s'intitule dynamique sociale et politique. Dans ce cadre, la réflexion a
été orientée par l'influence de ce parcours universitaire.
Ainsi le sujet sera-t-il traité sous l'angle de la sociologie politique,
c'est-à-dire la pratique démocratique comme un lieu de pratique
politique, ensuite, les instruments qui fondent la participation citoyenne et
les degrés d'implication des citoyens dans la prise de
décision.
Problématique de recherche
En ce qui concerne la problématique de recherche, la
formulation s'inspire de l'observation suivante. La démocratie est
supposée être un pouvoir émanant du peuple,
c'està-dire que la véritable décision politique appartient
à l'ensemble de la population par l'intermédiaire du
mécanisme de représentation à travers les élections
ou par le biais de l'existence des organisations servant de contrepoids au
pouvoir. Une question se pose alors : « Dans quelles conditions les
éléments destinés à faire fonctionner une
démocratie sont-ils présents et peuvent-ils le faire en
considérant le cas malgache ?
Hypothèses de recherche
En ce qui concerne les hypothèses, nous attacherons
à vérifier les affirmations suivantes. En premier lieu, la
pratique démocratique qui met au premier plan la participation ne donne
pas aux citoyens le moyen d'être l'acteur du processus de décision
politique. Elle est une revendication pour les exclus du pouvoir engendrant
ainsi une crise de représentation. En deuxième lieu, le
problème qui handicape la pratique démocratique résulte de
la faible intégration de l'individu dans le processus de participation
décisionnel. Ceci est doublé de la crise de
légitimité car les citoyens sont naturellement conscients de la
patrimonialisation du pouvoir par les dirigeants.
Les objectifs de recherche
Au seuil de cette étude, deux objectifs
façonnent notre recherche. Au titre de l'objectif global, nous voulons
contribuer à la réflexion sur la pratique démocratique
axée sur l'étude de la pratique politique et de l'implication des
acteurs concernés dans le processus.
Comme objectif spécifique, il s'agit d'évaluer
le fonctionnement des différents acteurs dans l'exercice de la
démocratie. C'est aussi étudier les modes d'implication des
citoyens en vue de la pratique démocratique.
Les techniques de recherche
En ce qui concerne les techniques mobilisées dans le
présent travail, nous avons eu recours à la démarche
privilégiant à la fois l'approche qualitative et quantitative
pour le recueil des données.
La technique documentaire
Dans la perspective du présent travail, l'observation
documentaire a été mobilisée après l'observation
directe. Ainsi des thèses, des articles et des ouvrages en lien avec
notre sujet de réflexion ont été consultés. Des
centres de documentation ont été visités pour pouvoir
consolider la recherche en l'espèce. Citons, entre autres, l'IRD, le
CERS du département de sociologie, la bibliothèque municipale
sise à Analakely, le centre de documentation de
l'Académie Malagasy à Tsimbazaza. L'Internet
nous a été également une importante source de
documentation. Des sites qui publient des articles, des revues et des forums de
discussions ont été visités.
Observation directe
Cette première phase de l'enquête correspond
à notre propre intuition du phénomène auquel nous sommes
intéressés. Cette technique nous a permis d'organiser de
façon progressive des hypothèses et une première
délimitation provisoire du champ de recherche. Cette première
démarche est suivie d'une préenquête qui consiste à
élaborer l'ébauche des questionnaires à utiliser. Les
idées préconçues ont été abandonnées
à partir de là. Par la suite, les hypothèses ont
été réactualisées si la rédaction des
questionnaires définitifs a pu être effective.
Les techniques vivantes
En ce qui concerne les techniques vivantes utilisées, nous
savons eu recours d'abord à l'échantillonnage, ensuite aux
entretiens libres et enfin à l'utilisation des questionnaires.
Procédure d'échantiionnage
Comme il est pratique dans une recherche sociologique de
procéder à un échantillonnage, nous avons eu recours
à la combinaison de deux méthodes dans la détermination de
l'échantillon à savoir la méthode au choix hasard et la
méthode par quotas.
Dans la caractérisation de la procédure
d'échantillonnage, nous avons segmenté les interviewés en
deux catégories. La première catégorie de population
concerne les populations ordinaires que nous avons sélectionnées
en fonction des variables (âge, sexe, niveau d'étude,
catégorie socioprofessionnelle). Cette première catégorie
est composée de 65 individus.
La deuxième catégorie est constituée
d'acteurs politiques, de membres de la société civile,
d'enseignants à l'université et de journalistes. Cette
catégorisation a été utilisée dans le but de
rechercher des informations particulières que nous voulons entrevoir ou
vérifier. Au total, cette deuxième catégorie regroupe 15
individus.
Somme toute, 80 individus constituent la cible de
l'enquête. Le tableau suivant résume notre groupe
d'échantillonnage.
Tableau n° 01 : groupe
d'échantiionnage selon l'âge et le genre.
Groupe d'âge
Age
|
Masculin
|
Féminin
|
Total
|
[25 ; 30[
|
12
|
9
|
21
|
[30 ; 35[
|
5
|
4
|
9
|
[35 ; 40[
|
5
|
5
|
10
|
[40 ; 45[
|
6
|
1
|
7
|
[45 ; 50[
|
4
|
5
|
9
|
[50 ; 55[
|
3
|
1
|
4
|
[55 ; + [
|
4
|
1
|
5
|
Total
|
39
|
26
|
65
|
Source : enquête personnelle 2011.
Tableau n° 02 : groupe
d'échantiionnage selon le genre et niveau
d'étude
Niveau d'étude
Genre
|
Primaire
|
Secondaire
|
Lycée(ne)
|
Supérieur(e)
|
Masculin
|
2
|
4
|
10
|
23
|
Féminin
|
0
|
6
|
6
|
14
|
Total
|
2
|
10
|
16
|
37
|
Source : enquête personnelle 2011
Remarque : les deux tableaux ne tiennent pas compte du nombre
d'individus ayant fait l'objet d'entretien individuel durant le travail de
terrain.
Entretien libre
En ce qui concerne les techniques vivantes, nous avons d'abord
recouru à l'entretien libre. Cette technique a permis d'obtenir des
informations riches en signification. La technique d'entretien libre est
surtout utilisée au cours de la discussion avec les politiciens, les
enseignants à l'université et les membres de la
société civile. Les thèmes abordés sont les
obstacles à la mise en place de la démocratie dans le pays, le
multipartisme, les actions de la
société civile en période de
difficulté, l'élection, la problématique de l'Etat
à Madagascar, la place du pays dans le contexte de la mondialisation.
Cette technique a permis à l'enquêté de
répondre librement à chaque thème abordé à
sa manière. Toutefois, nous tenons à souligner qu'il est
difficile de traiter les réponses des enquêtés dont une
partie peut bien avoir échappé à notre attention. Le
volume d'informations obtenues pose un problème de classification dans
le traitement des données.
Questionnaire
La technique dite questionnaire a été
utilisée dans le cadre de la quantification des données. Nous
avons eu recours à la technique de questionnaire de type fermé,
à choix multiple et une échelle de valeur. Elle nous permet de
connaître la fréquence des réponses données par les
enquêtés, les dépendances des réponses en rapport
avec le contexte social dans lequel l'individu s'insère. Cette technique
a facilité notre tâche concernant le dépouillement des
données. Il convient quand même de signaler que la technique
présente des risques. Il y a des réponses qui ont
débordé le cadre de réflexion prévu.
Les méthodes d'approche
Toute recherche en sciences sociales nécessite une
démarche analytique appropriée faisant appel à de
différentes approches de l'analyse sociologique. Dans ce cadre, nous
exposerons une brève présentation des approches qui seront
mobilisées dans le présent travail.
- l'analyse fonctionnelle
Régulièrement utilisé en sciences
sociales, le fonctionnalisme repose sur le postulat sur la recherche d'une
fonction sociale. Le représentant typique de l'analyse fonctionnelle est
sans doute l'anthropologue Bronislaw Malinowski. Selon lui, chaque
élément constitutif de la réalité sociale, qu'il
soit symbolique, culturel et institutionnel, existe parce qu'il répond
à un besoin. Il repose sur le postulat que chaque élément
de la réalité culturelle joue une fonction indispensable de la
totalité organique. Par ailleurs, le mot fonction peut être une
analyse d'indépendance entre deux variables. En d'autres termes, au sens
mathématique du terme l'analyse fonctionnelle permet de connaître
la relation de corrélation entre deux variables.
A l'opposé de Malinowski, Merton a introduit une
nouvelle théorie fonctionnelle qu'on appelle le relativisme fonctionnel.
Le relativisme fonctionnel s'émerge comme étant une opposition au
fonctionnalisme absolu de Malinowski. En effet, Merton démontre qu'il
est abusif de considérer que chaque élément culturel
correspond à un besoin et qu'il joue des fonctions, car vouloir chercher
des explications de la nécessité à chaque
élément culturel est
aberrant2. Il convient de souligner que Merton a
introduit une autre notion pour assouplir le fonctionnalisme : celle de
dysfonction. Alors que « les fonctions sont, parmi les conséquences
observées, celles qui contribuent à l'adaptation ou à
l'ajustement d'un système donné », les dysfonctions sont
« celles qui gênent l'adaptation ou l'ajustement du système
»3.
Aborder la théorie fonctionnelle nous paraît
importante car elle permet de voir les rôles de chaque institution ou la
structure d'une société démocratique pour le bon
fonctionnement de la société. Par ailleurs, le dysfonctionnement
nous permet de savoir l'obstacle à l'exercice de la démocratie
dans la société malgache.
- l'évolutionnisme
Fondé sur la croyance du XVIIe et
XVIIIe siècle dans l'unité psychique du genre humain,
l'évolutionnisme repose sur les valeurs matérialistes et la
croyance à la raison humaine comme le seul maître de son destin.
Avec l'évolutionnisme, la société se déplace sur
une ligne évolutive linéaire qui constitue les stades de
progrès. Chez Comte, cette ligne énumère successivement le
stade théologique, métaphysique et positif. Chez Durkheim,
l'évolution s'explique par le passage de la société de
droit restitutif à la société au caractère de droit
répressif. La société n'est plus un présent de Dieu
mais un monde à construire dans lequel les hommes sont égaux en
droit avec pour chacun le droit à la parole et à la
liberté d'expression. Existe désormais l'idée que le
bonheur est à construire sur terre et que la souffrance de la vie n'est
pas nécessairement voulue par Dieu. L'humain se croit capable de
gérer la société par la dimension rationnelle par
l'intermédiaire de la science et par la dimension raisonnable
exprimée à travers la démocratie. Ainsi avec le principe
de la rationalité moderne, tout ce qui relève du traditionalisme
est à soumettre dans la rubrique d'obstacle au développement,
irrationnel. Dans la lecture malgache, cette pensée
évolutionniste a été imposée par la colonisation.
Au moment de l'indépendance, elle est véhiculée par toutes
les théories du développement reposant sur l'hypothèse
selon laquelle les sociétés industrielles sont
considérées comme le miroir de l'étape ultime du
développement à rattraper. Pour arriver à ce
développement, les pays développés ont amorcé des
reformes économiques souvent accompagnées des reformes
politiques.
- Le matérialisme historique
Le matérialisme historique repose sur la matrice
suivante : une société est divisée à
trois
niveaux. Le monde des idées ou la superstructure
idéologique composée par la façon de
penser, croyance
et religion, la vision du monde. Le monde des institutions juridiques
2 G. Rocher, L'organisation sociale, tome II
éd. HMH 1968.
3 Ibid. p. 172.
politiques à savoir l'Etat, le gouvernement,
l'école, le droit et la justice. Et enfin le monde économique,
c'est-à-dire les objets et instruments de production, les rapports de
production, les forces productives4. Ces trois niveaux constituent
la formation sociale d'une société donnée. L'importance du
matérialisme pour nous c'est leur relation. Il existe une relation
dialectique entre ces trois niveaux. Ils doivent être en harmonie. En
transposant ce schéma marxiste, nous essayons d'expliquer la
société malgache à partir de cette matrice marxiste.
Cependant, le matérialisme nous sert simplement de voir la
réalité à partir d'un regard objectif mais non comme Marx
une qui a une réflexion engagée.
Limite de la recherche
Quelques problèmes ont été
rencontrés tout au long de la recherche. Parmi lesquels, citons d'abord
la disponibilité et le temps surtout pour les politiciens. Ils ont de la
peine à s'accorder un temps libre pour discuter avec nous, ce qui a
causé des dépenses supplémentaires investies dans les
appels téléphoniques afin de fixer un rendez-vous. S'y ajoutent
les frais de déplacement. Ensuite, la difficulté réside
dans la réticence des enquêtés surtout lorsqu'il s'agit
d'un sujet politique. Les enquêtés ont toujours demandé
à être rassurés avant de répondre à la
question. Enfin, les politiciens éprouvent de la difficulté
à répondre à certaines questions durant les entretiens
individuels.
Plan de recherche
Au terme de cette partie introductive, il convient de signaler
que le mémoire suit le plan suivant. Dans la première partie du
devoir, nous attacherons notre étude à l'exposé de
différentes théories qui seront mobilisées dans le cadre
du présent mémoire. La deuxième partie sera
consacrée à la présentation de notre travail de terrain et
ainsi que les différentes analyses y afférentes. L'étude
se terminera par des pistes de réflexion en rapport avec le travail de
terrain effectué.
4 Brechon (P), Les grands courants de la
sociologie, éd. PUG. 2000.
PREMIERE PARTIE : CADRAGE THEORIQUE
LA DEMOCRATIE EN
DEBATS
Nous estimons que tout chercheur en sciences sociales doit
avoir un soubassement théorique qui constitue le fil conducteur de sa
recherche. À ce titre, nous empruntons les idées d'Henri Mendras
suivantes pour montrer la nécessité d'un cadre théorique
dans une recherche. « En effet, il n'y pas d'observation de la
réalité sans un minimum de théorie au départ. On ne
regarde pas ce qui se passe dans la société sans avoir quelques
idées préconçues que ce soient des idées ou des
hypothèses de bon sens, ou que ce soient des hypothèses issues
d'autres recherche sociologique »5.
Cependant, le sociologue qui regarde les faits ne vit pas en
dehors d'une culture. Il est parfois influencé par la
représentation de son appartenance sociale. C'est cette
représentation sociale qui va fournir une erreur à l'analyse du
chercheur. Ainsi, pour écarter tout préjugé, le sociologue
doit s'écarter de son objet d'étude s'il veut que son travail
soit objectif. Durkheim a insisté que le sociologue doit agir à
la manière des physiciens lorsqu'il regarde un fait. Selon le langage
célèbre de Durkheim, il y a lieu de traiter les faits comme des
choses. Cette première partie détaillera alors les
différentes approches mettant en exergue l'étude de la pratique
démocratique.
5 Mendras (H.), Eléments de sociologie,
Armand Colin, Paris, 1978-2001
CHAPITRE I : AUTOUR DE LA DEMOCRATIE
Dans le présent chapitre du travail que nous
réservons à l'approche sociologique de la démocratie, nous
tâcherons à exposer les différentes histoires qui ont
marquées l'avènement de la démocratie. La réflexion
sera suivie de l'apport des sociologues concernant le débat sur la
démocratie.
I.1. Les profondeurs historiques de la démocratie
I.1.1. La démocratie athénienne
La démocratie comme mot, concept, pratique a
été inventée à Athènes. Elle dérive
de la racine grecque « démos » qui signifie peuple et «
cratos » qui indique le pouvoir. Périclès a
été l'initiateur de la pratique démocratique de cette
époque. Ce qui caractérise ce gouvernement c'est avant tout
l'égalité politique. Ainsi, est démocratique un Etat
où la loi est la même pour tous (isonomia), égale aussi
à la participation aux affaires (isogria), au pouvoir (isocratia). Pour
les athéniens du Ve siècle, la liberté
politique est avant tout conçue par le respect de lois. C'est ainsi que
se fonde la démocratie. A ce sujet Touchard (J), a souligné que
pour la Grèce antique « la liberté est un statut à
double aspect : d'une part indépendance à l'égard de toute
contrainte personnelle ; d'autre part obéissance aux dispositions
générales »6.
L'idée de la citoyenneté a puisé sa
source dans l'organisation politique grecque. En effet la citoyenneté
est une fonction. L'idéal de l'époque Périclès est
celui d'un homme avant tout engagé dans les affaires de la cité
soit pour commander soit pour obéir « seuls nous regardons celui
qui se désintéresse des affaires de l'Etat, non pas comme un
citoyen de tout repos mais comme un être inutile »7.
Le mécanisme de fonctionnement de l'organisation
politique est la démocratie directe qui se réalise par
l'ecclésia, assemblée du peuple d'Athènes à
laquelle tous les citoyens pouvaient participer et prendre des initiatives
législatives et politiques. Les membres de l'ecclésia se
réunissent pour prendre part aux décisions importantes dans
l'agora. Les travaux de l'ecclésia sont préparés par la
boulé, un conseil qui fixe l'ordre du jour de l'assemblée du
peuple. Cette pratique de la démocratie se repose sur la décision
prise sous l'effet de consensus collectif et public. Les débats se
portent sur les actions à prendre. On peut dire que la vie
démocratique suppose toujours la construction de l'espace commun.
6 Touchard (J), Histoire des idées
politiques, PUF, 1963, p. 20.
7 Ibid. p 18.
I.1.2. L'apport des siècles
lumières
A partir de XVIIe siècle, plusieurs facteurs
ont changé la différente manière de voir la pratique de la
démocratie. La remise en cause de l'absolutisme royal et les
présupposés des droits naturels ont changé l'idée
du contrat social, la conception de la démocratie est devenue la figure
de l'Etat de droit. Cette modernité de l'organisation sociale a
posé la question sociale d'une manière contractuelle dans
l'exercice du pouvoir.
Deux pays peuvent être signalés ayant
développés l'idée du contrat social de l'époque
moderne. Hobbes (1588-1679) et John Locke (1632-1704), en Angleterre sont
considérés comme le représentant majeur de la
pensée politique moderne. En France jean jacques rousseau et Montesquieu
ont contribué leur part à l'étude sur la
démocratie.
Thomas Hobbes a posé son analyse sur le postulat de
l'état de nature. En effet pour Hobbes l'état de nature est un
état de guerre et d'anarchie. Les hommes sont égaux par nature ;
de l'égalité procède la défiance, et de la
défiance procède la guerre de chacun contre chacun. Pour
éradiquer cette anarchie Hobbes avait proposé un contrat social
où il s'agit de transférer le droit de chacun au souverain et que
ce dernier soit le garant de ces droits. Il convient de noter que le souci de
Hobbes est l'instauration de la paix et de la sécurité.
Contrairement à Aristote qui considère que l'homme est de nature
politique, Hobbes estime que la société politique est le fruit
d'un pacte volontaire, d'un calcul intéressé.
Selon Hobbes les hommes naissent égaux en droit. La
première figure de l'égalité est pour Hobbes
l'égalité civile mais non pas l'égalité politique.
À l'origine du contrat donc se trouve le souci de la paix «
finalement le motif et le but de celui qui renonce à son droit ou le
transfère ne sont que la sécurité de sa propre personne
dans sa vie et dans les moyens de la préserver »8. Par
ailleurs nous tenons à remarquer que l'idée de contrat social de
Hobbes n'est plus discutable lorsque l'omnipotence des gouvernants est
établie peu importe la forme de régime, monarchique ou
démocratique. Le pouvoir politique devient absolutisme et l'homme
renonce sa liberté au profit de sa paix. C'est l'assujettissement de
l'homme à la loi.
Locke a marqué aussi l'histoire de la pensée
politique moderne en matière de la réflexion sur la
démocratie. Il est considéré comme l'un des fondateurs du
libéralisme moderne. Il se démarque de Hobbes par la conception
libérale de l'Etat. Selon Locke, l'individu confie seulement à
l'Etat la protection de ses droits. Cet Etat est limité par la
séparation du pouvoir. L'Etat libéral a été
édifié pour garantir la liberté individuelle.
8 Touchard (J), ibid. 330.
I.1.3. La révolution de 1789
C'est sans doute la révolution française en
raison de son caractère radical a exercé une influence profonde
sur la réflexion de l'idée démocratique moderne. Le
mouvement de revendication au cours de cette révolution a
débouché sur le nouvel mécanisme du fonctionnement du
rapport de l'homme au pouvoir. La remise en cause du fondement de la vie
politique a débouché sur la création de nouveaux principes
sont institués dans la constitution surtout la loi, créant
l'égalité devant la loi, la sécularisation de la vie
politique qui se manifeste par le détachement de l'église de
l'Etat, l'universalisme du droit de l'homme comme objectif et horizon du
politique.
A partir de ces visualisations des repères historiques
ayant marqués la conception de la démocratie, nous pouvons en
tirer que la notion de démocratie renferme plusieurs acceptions selon
l'époque et les rapports sociaux qui se tissent entre les individus. Les
droits civiques du XVIIe siècle s'élargissent en droit
politique le XIXe siècle et s'étendent jusqu'aux
droits sociaux. Les idées que les hommes conçoivent la
démocratie est déterminée par leur condition de vie
matérielle, les rapports sociaux constitutifs de leur
réalité. Mais quelque soit l'époque, la démocratie
présente des invariants formels qui sont l'égalité et la
liberté. Les problèmes de l'égalité et de
liberté se renouvellent à chaque groupe social et dont la
pratique politique consiste à leur trouver des solutions. La
démocratie ne suppose pas des hommes libres elle définit l'espace
de liberté de chaque individu en tant que cette liberté soit
conforme à une certaine idée de démocratie.
I.2. Démocratie et sociologie
Le contexte de l'avènement de la démocratie
moderne en tant que conquête sociale a coïncidé avec la
naissance de la sociologie. La situation qui prévalait en Europe
à savoir la révolution industrielle, la remise en cause du
fondement du pouvoir politique a contribué à attirer l'attention
des sociologues sur le vivre ensemble de la modernité. La situation de
la crise d'ordre sociopolitique en Europe au cours de la révolution
française qui fait une rupture avec l'ancien régime en instaurant
un régime basant sur la rationalité humaine. Le changement des
rapports sociaux a provoqué la réaction des sociologues à
l'égard de la société en construction d'alors. La
modernité démocratique a opéré un changement sur
les liens sociaux, la tendance massive à l'individualisation des
rapports sociaux, la sécularisation du monde politique, l'atomisation de
la vie sociale. Devant la conséquence délétère de
la socialité démocratique, les sociologues ont réagi en
proposant des nouvelles formes d'organisation pour résoudre les effets
pervers du lien social démocratique. Après cette brève
présentation de la caractéristique
de la modernité, allons-nous voir l'apport des
différents sociologues concernant l'étude sur la
démocratie.
I.2.1. Alexis de Tocqueville
L'apport de Tocqueville à une approche proprement
sociologique de la démocratie est le plus important parmi les auteurs
qui ont participé à la naissance de la sociologie. Selon de
Tocqueville, la démocratie consiste en une égalisation de
condition. La démocratie est définie d'abord par
l'égalité politique. Tout le monde est soumis à la
même loi garantie par une institution formelle.
Ensuite, la démocratie ne se limite pas à un
système politique, elle se traduit aussi par un état social. La
figure de la démocratie est l'égalisation de condition qui prend
la forme d'une mobilité sociale, chaque couche sociale peut
accéder à un statut supérieur que celle du
précédent. Aux yeux de Tocqueville, la démocratie
représente une imaginaire qui prend la forme de l'égalité
de respect. Tous les individus se perçoivent comme égaux.
Tocqueville a aussi réservé une place sur
l'association comme forme de socialité dans une société
démocratique. Soucieux de l'individualisation des rapports sociaux il
prône l'institutionnalisation des sociétés civiles
permettant à l'individu de donner une vie au corps social. L'association
est une condition d'action dans une société libre mais aussi le
lieu de création des codes moraux. A ce propos il a dit « donner
une vie politique à chaque portion du territoire, afin de multiplier
à l'infini, pour les citoyens, les occasions d'agir ensemble, et de leur
faire sentir tous les jours qu'ils dépendent les uns des autres
»9
Enfin il convient de noter que de Tocqueville a insisté
sur le fait que le bon fonctionnement de la démocratie repose sur
l'ascendance du pouvoir c'est-à-dire de bas en haut mais non l'inverse.
Une décentralisation de la prise de décision apparaît chez
la pensée de Tocqueville.
Toutefois, Tocqueville a tracé les risques du
système démocratique, il y voit dans ce système l'annonce
d'un despotisme nouveau issu du culte de l'égalité. La
démocratie crée l'individualisme qui présente un effet
délétère sur le lien social. L'individualisme de
Tocqueville est la tendance de l'individu à s'isoler de la masse,
à s'écarter de la communauté de base telle la famille, le
refus de la norme du bien vivre social.
L'individualisme créé par l'égalisation
de condition favorise la désaffection de l'individu à
l'égard de la chose politique laissant ainsi le champ libre au
gouvernement de
9 Cité par Thériault (Y), « La
société civile est-elle démocratique », in
www.bibliothèque.uqac.ca.
1992. p. 12- 13.
dicter les règles du jeu collectif d'où le
despotisme. En outre, il avertit que la démocratie fonctionnant sur la
loi de la majorité risque de nier les intérêts des
minorités.
I.2.2. Raymond Aron
Aux principes de l'égalisation de conditions de
Tocqueville, Raymond Aron a insisté sur le sens proprement politique du
terme lorsqu'il dit que « effectivement, le principe premier de la
démocratie, c'est bien le respect des règles ou des lois puisque,
l'essence de la démocratie occidentale, c'est la légalité
dans la concurrence du pouvoir, dans l'exercice du pouvoir. Une
démocratie saine est celle où les citoyens ont le respect non
seulement de constitution qui fixe les modalités de la lutte politique,
mais de toutes les lois qui marquent le cadre dans le quel l'activité
des individus se déploie. »10 Pour Raymond Aron, le
principe de règle et de loi ne suffit pas. Il faut qu'il existe quelque
chose qui n'est pas écrit et qui n'est pas strictement lié
à la légalité. Il nomme le terme « le sens du
compromis » il dit ainsi « après tout accepter le compromis,
c'est reconnaître la légitimité partielle des arguments des
autres, c'est trouver une solution qui soit acceptable pour tous
».11 Cependant, Raymond Aron a tracé dans l'analyse du
pouvoir politique qu'on ne peut pas concevoir un régime qui ne soit pas
oligarchique à ce titre la démocratie en tant que pouvoir du
peuple est une illusion, dans son étude réservée au
régime constitutionnel pluraliste dans la démocratie et
totalitarisme il a posé la question suivante : « Est-il vrai que la
pratique parlementaire donne la réalité du pouvoir aux citoyens
comme le veut la doctrine ? » et un peu plus loin, il est radical de dire
que « on ne peut pas concevoir de régime qui en un sens ne soit
oligarchique »12.
I.2.3. La sociologie politique de Max Weber
Weber a été l'initiateur de la réflexion
de la politique moderne. Son oeuvre constitue encore aujourd'hui des cadres de
référence sur l'analyse de la vie politique. Il nous semble
important d'exposer les théories wébériennes concernant sa
réflexion son étude de la sociologie politique.
En effet, la sociologie politique wébérienne met
l'accent sur l'activité politique. L'activité politique consiste
à organiser des rapports sociaux sur un territoire donné, et il
ajoute qu'une organisation politique n'existe pas sans la présence d une
autorité légitime, cette autorité dispose les moyens
contraignants pour faire régner la domination de l'autorité
légitime. De cette conception découle la définition de
l'Etat comme un groupement politique
10 Aron (R), Démocratie et
totalitarisme, éd. Gallimard. 1965.
11 Ibid.
12 Ibid. p. 135.
qui dispose la violence légitime. La sociologie
politique wébérienne est une sociologie de domination. Toutefois,
il a souligné que la légitimité du groupement politique ne
se repose pas tout simplement sur l'exercice d'une contrainte physique,
l'obéissance des administrés doit se reposer sur leur soumission
consentie à un ordre qu'ils reconnaissent comme légitime. Weber a
distingué trois types idéaux de légitimité à
savoir le type de domination traditionnelle ou celui qui exerce le pouvoir est
fonction d'une coutume, ou de la tradition. Ensuite, le type de domination
charismatique qui se repose sur la légitimité consentie par
séduction ou providentiel. Enfin, la domination
légale-rationnelle fondée sur la valeur des règlements,
sur un ordre juridique. La pensée de weber sur la démocratie se
situe dans cette dernière forme de légitimité. Il est
sociologiquement inconcevable que le peuple puisse exercer vraiment le pouvoir.
L'Etat dans un monde moderne ne peut être dominé que par des
minorités et qu'elles le feraient au nom du peuple. La démocratie
moderne est dominée par la bureaucratie et les professionnelles de la
vie politique. La démocratie a signifié dans les faits la fin de
l'existence de l'individu à agir sur le réel au profit des
structures formelles issues de la rationalité politique.
I.2.4. Marx et la démocratie
bourgeoise
Marx est le plus agressif à la critique de la
démocratie moderne. Pour appréhender l'illusion de la
démocratie moderne, il part sur l'analyse du pouvoir politique. Selon
Marx le pouvoir politique de la classe dominante vient du contrôle des
moyens de productions. Face à ce constat, il stipule que
l'idéologie qui sous tend le pouvoir de la classe dominante n'est que la
fausse interprétation de la réalité sociale. De ce fait,
la démocratie n'est que la voile masquant l'intérêt de la
classe dominante. La démocratie crée un espace autonome, le
milieu politique et le milieu social. La démarche adoptée par
Marx a abouti sur la définition de l'Etat comme une arme
répressive au service des intérêts bourgeois. La vie
démocratique est pour Marx une illusion parce qu'elle réduit le
social à l'économie. L'oeuvre de Marx doit être lue comme
critique du capitalisme moderne qui aboutit à un régime de la
propriété privée et la forme ultime de l'aliénation
individuelle et collective13.
Par ailleurs, il faut rappeler que la réflexion
marxiste s'insère dans le cadre d'une lutte pour l'avènement d'un
type de société sans classe dans laquelle il n'y a plus
d'autonomie entre le monde social et politique, en d'autre terme la mise en
place d'une société communiste. Toute fois il convient de
reconnaitre que la pensée marxiste permet une lecture importante de
l'analyse du pouvoir actuel. Marx a laissé des théories qui
permettent d'appréhender le
13 Rocher (G), Introduction à la sociologie
générale. Le changement social, tome 3, éd. HMH,
1968.
fonctionnement de la société moderne surtout dans
un rapport social dominé par la logique marchande.
Au terme de ce premier chapitre dans lequel nous attacherons
notre étude sur l'histoire de la démocratie et la contribution de
la sociologie sur l'analyse de la socialité démocratique, nous
pouvons en tirer que la sociologie en tant que réflexion sur le devenir
de la société a réservé une critique à la
naissance du pouvoir démocratique moderne face aux effets qu'il
opère. En effet, chez Tocqueville, la démocratie présente
un effet pervers sur le lien social en créant l'individualisme et le
désintéressement de la population vis-à-vis de la chose
publique, chez Marx, la démocratie n'est que la forme tronquée de
la réalité sociale dans les rapports sociaux de production, elle
n'est qu'une fausse idéologie inaugurée par le pouvoir politique
dominant, chez Weber, le pouvoir démocratique moderne est aveuglé
par la domination légale rationnelle empêchant aux hommes d'agir
significativement sur le réel. Raymond Aron est plus radical en
dénonçant l'illusion d'un pouvoir du peuple dans un
système de représentation.
CHAPITRE II : THEORIES ET CONCEPTS
Le présent chapitre abordera les soubassements
conceptuels et théoriques de notre travail de réflexion.
L'étude débutera par un effort de mise au point de quelques
usages terminologiques. Le travail sera suivi par l'exposition des
théories qui constituent le fil conducteur de notre analyse et la
compréhension du phénomène en question.
II.1. Mise au point des usages
terminologiques
II.1.1. La démocratie
Il est difficile de donner une définition exacte de la
démocratie d'autant plus que l'acception autour de ce terme varie selon
l'époque et l'espace. Certes, nous avons coutume à définir
la démocratie à la référence du pouvoir du peuple.
A ce titre, on retient souvent la formule lapidaire gouvernement du peuple pour
le peuple et par le peuple. A partir de cette définition, nous pouvons
dire que la démocratie est conçue comme une forme de
gouvernement. C'est d'ailleurs l'idée défendue par Montesquieu
lorsqu'il a formulé que « lorsque dans la république, le
peuple en corps à la souveraine puissance, c'est la démocratie
»14.
Cependant, cette forme de gouvernement ne s'adapte plus
à l'évolution démographique de la société
moderne, Rousseau avait dit dans son livre le contrat social que «
à prendre le terme dans sa rigueur de l'acception, il n'y a jamais
existé de véritable démocratie, et il n'en existera
jamais. Il est contre l'ordre de nature que le grand nombre gouverne et que le
petit soit gouverné. On ne peut imaginer que le peuple reste
incessamment assemblé pour vaquer aux affaires publiques, et on le voit
aisément qu'il ne saurait établir pour cela des commissions, sans
que la forme de l'administration change »15.
Devant l'irréalisme de la démocratie directe
dans un monde moderne, Montesquieu a introduit le principe de séparation
des pouvoirs institutionnels. C'est à travers de cet équilibre du
pouvoir institutionnel que le peuple peut être le seul garant de la
liberté politique.
II.1.2. La démocratie
électorale
Actuellement la démocratie passe par un
mécanisme de procédure qu'est l'élection.
L'élection constitue la condition de l'existence d'une démocratie
dans un pays donné. De ce fait il n'est jamais envisageable d'appeler un
régime démocratique par le quel l'arrivée des dirigeants
au pouvoir ne se sont issue d'un acte électoral. La majorité du
pouvoir des élus
14 Montesquieu, De l'esprit des lois, livre
II. Ch. 11, in
www.wikipedia.org
15 Rousseau, (J.-J.). Du contrat social,
livre III. Chap. IV.
résulte de la consultation populaire qui permet à
la majorité de représenter la figure de l'intérêt
général.
Par ailleurs, l'élection ne signifie pas
démocratique qu'à conditions de satisfaire certains
critères. Dans le vocabulaire courant, l'élection est
démocratique lorsque les individus sont libres de choisir parmi les
prétendants du pouvoir. À partir de cette disposition, les
individus sont libres d'aller voter ou ils préfèrent s'abstenir.
La transparence du déroulement jusqu'à la proclamation de
l'élection est aussi exigée pour que l'acte électoral
puisse prendre un caractère démocratique.
II.2. La socialité démocratique
La démocratie telle que nous la vivons aujourd'hui est
obédience libérale, c'est pour cette raison que nous attacherons
à exposer les différentes formes de socialité
démocratique de la version libérale c'est-à-dire les
manières de vivre dans une société démocratique
renfermant la structure institutionnelle, les normes, et les valeurs de cette
société. Il convient de rappeler tout d'abord le cadre de
l'expression, d'agir de chaque individu dans une société
démocratique. En effet, théoriquement, l'acte de chaque individu
dans une société démocratique libérale est
délimité par une constitution qui constitue la pierre angulaire
de l'activité sociale. La constitution est le cadre normatif de la
société. De cette démarche la vie dans une
société libérale est contractuelle qui se résume en
Etat de droit, ou la liberté est la jouissance des droits définis
par la loi.
II.2.1. Peuple et citoyenneté
La multiplicité de la notion du peuple pose plusieurs
acceptions du terme. Dans le sens commun, peuple désigne la population
d'un pays. Le peuple est l'ensemble des populations qui présentent des
particularités des races, des comportements psychosociaux, les
être humains biologiquement différents. Par contre, la
citoyenneté est définie par un cadre normatif juridique. Le
peuple serait les sommes d'individus soumis aux mêmes lois, c'est la loi
qui confère son statut de citoyen c'est-à-dire il jouit des
droits constitutionnellement établis. En principe donc la
citoyenneté est un état politique dans lequel chaque individu,
collectivité a le droit de s'exprimer librement sur la conduite des
affaires publiques en fonction de ses libertés à partir d'une
certaine imaginaire démocratique. Le peuple de la démocratie est
cet individu abstrait qui se range sur un même pied
d'égalité défini par le cadre juridique distinct des
particularismes individuels.
En parlant de citoyenneté il convient de rappeler que
le contexte international a élargi actuellement le statut de
citoyenneté. A l'appui de ce propos nous pouvons avancer par
exemple la déclaration universelle des droits de
l'homme proclamé le 10 décembre 1948 ; le Pacte international
relatif aux droits civils et les droits politiques et culturels adoptés
le 16 décembre 1966, la Convention internationale sur
l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale
adoptée le 21 décembre 1965, et la convention sur
l'élimination de toutes les formes de discrimination à
l'égard des femmes adoptée le 18 décembre 1979.
II.2.2. La participation
La participation se définit comme prendre part à
quelque chose, repartit, partager, avoir sa part de. En politique la
participation désigne les différents moyens qui permettent aux
citoyens de prendre part aux décisions communautaires. La participation
dans le cadre d'une démocratie participative a été
prônée pour pallier les lacunes du principe de
représentation. La démocratie participative tend actuellement
à designer des procédures qui permettent d'augmenter
l'intégration de la population dans la vie politique et
d'accroître leur rôle dans la prise de décision.
La participation inclue différente procédure
d'administration, d'intégration, et de volonté. Ce ne sont pas
les hommes en tant qu'individu qui participent à une telle
activité, ils peuvent se réunir pour constituer une institution
ou une association participant à une activité sociale qu'ils
estiment nécessaires pour les collectivités ou de son groupe. La
réunification au sein d'une association est ainsi une force pour agir
à quelque chose, ou lutter contre toute intervention et de
dérive.
II.2.2. la bonne gouvernance
Le débat autour de la gouvernance est loin d'être
épuisé. La bonne gouvernance est indissociable des notions de
droit de l'homme et de démocratie. Pour les nations unies, une bonne
gouvernance vise la croissance et le développement humain durable. Ses
caractéristiques sont la transparence, l'obligation à rendre de
compte, la participation et la prise en compte des besoins de la population.
Selon la banque mondiale, la bonne gouvernance recouvre la capacité du
gouvernement à gérer efficacement ses ressources, à mettre
en oeuvre de politique pertinente, que le respect des citoyens et de l'Etat
pour les institutions, ainsi que l'existence d'un contrôle
démocratique sur les agents chargés de l'autorité. Si
telle est la définition des bailleurs, nous devons reconnaître que
la notion de gouvernance recouvre plusieurs acceptions. Dans le contexte de la
mondialisation, l'utilisation la plus récente de cette notion à
des origines assez différentes. Elle sera reprise des termes anglophones
« governance » à partir de 1980 pour designer un ensemble de
prescription en matière de gestion administrative et politique.
II.3. les instruments de la réalisation de la
démocratie
La démocratie ne se réalise pas tout seul, elle
est réalisée par des instruments spécifiques. Aujourd'hui,
les sociétés civiles et les partis politiques occupent le devant
de la scène politique dans la pratique démocratique. Ces deux
structures organisationnelles sont les représentants du peuple dans la
sphère de décision.
II.3.1. Les partis politiques
Les partis politiques ne sont pas les seules organisations
politiques au sein du système politique. Les partis politiques
cohabitent avec d'autres formes d'organisation politique, à la
différence des autres organisations politiques, les partis
s'étalent à tous les niveaux du territoire. Ils sont
présents au niveau national et local. Théoriquement, les partis
politiques ont pour vocation principale de conquérir et d'exercer le
pouvoir et dans des cas différents ils ont pour ambition de maintenir au
pouvoir le plus longtemps possible et de tirer les avantages du pouvoir.
Les partis politiques qui veulent atteindre le pouvoir doivent
construire un poids électoral massif supérieur à celui des
autres partis dans la concurrence du pouvoir. Ils doivent avoir le soutien
populaire, c'est pour cette raison, que les partis politiques sensibilisent la
population à adhérer à son groupement ou être
sympathisant du parti.
Un parti politique se constitue autour d'un programme de
projet de société qu'il impose aux sociétés
c'est-à-dire imposé sa conception politique comme conception
dominante. Les partis politiques structurent le champ politique et par leurs
activités, ils font de la politique une théorie
appliquée.
Par le jeu de compétition à l'accession au
pouvoir, l'alternance des partis à la direction de l'Etat permet d'avoir
une alternative de programme de société capable d'orienter une
nouvelle vision dans la gouvernance d'un Etat. D'autres rôles sont
assignés aux partis politiques, à savoir l'éducation
politique des citoyens, l'éducation idéologique. Les partis
opposés au système ont le droit d'apporter des jugements, des
critiques sur la conduite des affaires publiques.
Généralement, les partis peuvent être
classifiés selon le système, on peut avoir le monopartisme qui
existe encore dans des pays à coloration marxiste. Le bipartisme qui
exerce une influence importante dans la vie politique. On peut voir ce
système de parti dans les pays développés. Enfin, le
multipartisme, d'où l'existence de plusieurs partis influençant
la vie politique. Dans la majeure partie des cas, le multipartisme influence la
vie politique en
formant des alliances. C'est surtout dans les pays en voie de
développement qu'on rencontre ce système de partis.
Les partis politiques comme toute organisation ont sa propre
manière de fonctionnement qui se matérialise par des
modalités différentes à savoir le financement, la
cotisation des membres, les activités réalisées par les
partis politiques eux-mêmes.
II.3.2. Les sociétés civiles
L'histoire de la société civile remonte à
l'époque de l'antiquité. Le philosophe Aristote est le premier
à avoir utilisé le concept en désignant par la
société citoyenne, c'est-à-dire une assemblée sans
hiérarchie dominante composée de personnes partageant les
mêmes points de vue16.
L'idée de société civile s'est
forgée au cours du XVIIe siècle, elle a acquit son
statut moderne grâce à des philosophes du siècle des
lumières. Il y était question d'une société dans
laquelle les être humains vivent ensemble dans une communauté des
citoyens qui ont droit à la parole.
C'est sans doute l'observateur de la société
démocratique moderne à savoir Alexis de Tocqueville qui a
attribué le rôle de la société civile le lieu de
naissance et l'exercice des vertus citoyennes telles que la participation. Il a
réservé dans son oeuvre une grande partie sur l'analyse de
l'association, non seulement la société civile permet de lutter
contre les effets délétères de l'individualisme mais elle
socialise l'individu, le lieu de création des codes moraux, elle donne
aux citoyens les moyens d'agir ensemble. La société civile est
pour Tocqueville est une forme de socialité démocratique.
Par ailleurs la banalisation du concept de
société civile de ces dernières années de
l'ère démocratique rend difficile de définir la notion.
Notons tout simplement que la société civile s'élargit au
syndicalisme en prolongeant vers les ONG souvent à action humanitaire et
les groupements religieux.
Dans notre cas, nous attribuons un sens à la
société civile l'ensemble des groupements des citoyens
intermédiaire entre l'Etat et les citoyens ordinaires. Dans ce sens, la
société assume la fonction sociale de participation, la
socialisation, capable de mobiliser les citoyens pour la défense des
intérêts généraux. Dans le cadre d'une
société démocratique, elle assume le rôle de contre
poids des pouvoirs en place et théoriquement présenter une
solution alternative pour le devenir de la société.
16 Nina Cevtek et Friedel Daiber, « Qu'est-ce que
la société civile », Antananarivo, 2009 p. 6. Document
fourni par Friedrich Ebert Stiftung, avec la collaboration de la KMF/CNOE.
En ce qui concerne plus particulièrement Madagascar, le
développement des associations est lié à la
dégradation de la vie économique du pays. Des associations
religieuses multiplient des actions dans le domaine social et
économique17. En dehors de ces associations cultuelles, on
assiste aussi dans le pays au foisonnement des ONG oeuvrant dans divers champ
social18.
La fondation Friedrich a estimé qu'il existe
près de 3 000 ONG dans le pays. A cela s'ajoutent les nombreuses
organisations étrangères dont les rôles principaux se
concentrent à l'appui des groupements locaux et à vocation
humanitaire.
La confédération oecuménique
(FFKM)19 a donné une image plus investie dans le domaine
politique depuis les années 1980, elle a joué un rôle
crucial dans la création des dialogues politiques. Dans l'opinion
publique, ses interventions sont perçues comme reprenant le rôle
traditionnel « raiamandreny », celui qui apporte une médiation
dans un contexte de crise.
Dans le même ordre idée, la KMF/CNOE a vu le jour
le 12 mars 1989 sous le partenariat des organismes internationaux.
Actuellement, il développe son partenariat avec des
sociétés civiles locales. Elle oeuvre dans l'éducation
politique des citoyens, elle joue des rôles importants dans la mise en
place de la démocratie dans le pays surtout dans le cadre de la
supervision du déroulement de l'acte électoral, la suivi et
d'apporter des critiques concernant les affaires nationales.
Récemment, on a vu la création de la SEFAFI avec
la coopération de FES qui se montre plus critique à
l'égard de la situation qui prévaut dans le pays. La
création de la CNOSC qui a joué un rôle politique important
pour actualiser le dialogue politique dans le contexte malgache. Il serait
fastidieux de citer les sociétés civiles qui oeuvrent dans le
développement ou à l'éducation politique, disons tout
simplement qu'elles commencent à gagner de terrain pour la protection de
l'intérêt collectif.
17 C'est l'ordonnance 62-117 qui définit
l'association cultuelle à Madagascar.
18 C'est l'ordonnance 60-133 datant du 3 octobre 1960
qui définit le cadre juridique des ONG à Madagascar.
19 Le FFKM est une structure ecclésiale
regroupant quarte églises chrétiennes à savoir l'EEM,
l'ECAR, la FLM, et la FJKM.
DEUXIEME PARTIE
RESULTATS ET ANALYSES
L'effondrement du bloc soviétique suivi de la chute du
mur Berlin a complètement changé la nouvelle face du monde. On
assiste à l'hégémonie des valeurs occidentales
capitalistes dans tous les domaines, par l'extension de la
société de communication, le triomphe de l'économie de
marché, la domination de la démocratie libérale, l'essor
fulgurant des TIC. Une formation sociale nouvelle apparaît dominée
par le concept de démocratie libérale, Francis Fukuyama n'a pas
hésité à parler la fin de l'histoire lorsqu'il soutient
qu'aucune forme idéologique n'a la moindre de chance de s'imposer dans
le monde20.
Effectivement, le contexte sociopolitique engendré par
la guerre froide a modifié la configuration de la politique africaine.
Sous l'instigation des bailleurs de fonds, les années 80 et 90 ont
favorisé l'avènement de la démocratie libérale dans
le monde africain. Nous tenons à souligner que cette démocratie
est introduite dans les pays d'Afrique comme condition de l'aide des pays
occidentaux. De nouvelles transformations a vu le jour à savoir la mise
en place du programme d'ajustement structurel, l'engagement des pays vers la
démocratisation de l'organisation sociale. Cette transformation
s'accompagne par le nouvel rôle de l'Etat, en l'espèce le
rétrécissement de l'appareil étatique en cédant sa
place à des initiatives privées, il lui revient tout simplement
d'exécuter sa fonction régalienne c'est-à-dire d'assurer
les services publics comme l'éducation, la santé, la
création d'un environnement stable pour la floraison des entreprises
privées. L'entrée des pays africains dans la mondialisation se
renforce, la globalisation de l'économie devient une source
légitime de l'inégalité.
Du côté des vécus de la population, il
convient de préciser que l'universalisation des valeurs occidentales a
des effets délétères sur les rapports sociaux, à
l'appui de ce propos on peut donner par exemple la montée de
l'individualisme, la tendance généralisée à la
perte d'identité, l'exigence du monde travail à s'adapter aux TIC
devient une source d'exclusion sociale. L'atomisation et la
sécularisation du monde politique renforcent l'écart entre
dirigeant et dirigés.
Dans le cas de Madagascar, le pays n'a pas
échappé à cette transformation sociopolitique. C'est dans
ce cadre que nous attacherons cette deuxième partie de notre travail.
L'étude débutera par un effort de donner des esquisses à
l'environnement sociopolitique malgache en déduisant les points
essentiels pour notre réflexion, elle sera suivie par la
présentation de notre travail de terrain ainsi que les
interprétations et les analyses.
20 Fukuyama (F), La fin de l'histoire et le
dernier homme, Flammarion, nouveaux horizons, 1992.
CHAPITRE III : LES MODALITES DE DEMOCRATISATION A
MADAGASCAR
Au cours de ce chapitre que nous réservons à la
modalité de démocratisation à Madagascar, nous attacherons
l'étude au processus historique ayant marqué l'avènement
de la démocratie dans le pays, nous continuons l'étude par la
déduction des faits essentiels de ces contextes historiques.
III.1. Le contexte de la décolonisation
Au regard de l'histoire de la politique malgache, la
quête de la démocratie remonte déjà à l'aube
de l'indépendance. Les injustices, l'oppression dans tous les domaines,
l'inexistence de la liberté dans le contexte colonial ont
éveillés les malgaches à chercher la libération.
III.1.1.Une lutte pour la démocratie
Les mouvements de lutte menée par les formations
politiques secrètes et les intellectuels ont débouché sur
l'indépendance. La souveraineté nationale, la libération
du joug colonial, l'accession à l'indépendance étaient les
principales revendications. Des formations politiques ont émergé
portant la dénomination démocratique à savoir UPDN, le
MDRM, UDSM21.
Une fois l'indépendance obtenue, le régime qui
se met en place est proclamé un régime démocratique. Il
convient de rappeler que le premier parti politique arrivé au pouvoir
fut dénommé PSD descendant du PADESM. A cette époque de la
renaissance de l'indépendance, le pays a évolué vers un
régime démocratique structurel, le régime politique est
dominé par le présidentialisme où tout le pouvoir se
concentre aux mains de l'exécutif. Le champ politique est dominé
par le monopartisme. L'économie est ouvertement capitaliste
malgré le slogan social démocrate. La constitution pierre
angulaire de la démocratie est héritée de la
Quatrième République privée de son sens et de son contenu.
Le régime en place a maintenu la relation fidèle avec la France
cristallisée par les accords de coopération, la présence
des français dans l'administration du pays.
Par ailleurs, nous soulignons que le contexte de
l'indépendance dans le pays ne résulte pas de l'action des
leaders politiques nationales, mais aussi par le dynamisme du contexte
international d'alors.
En outre le contexte de la décolonisation a produit de
nombreux critiques jusqu'à aujourd'hui.
Il est souvent
évoqué le contenu politique de cette indépendance. Des
auteurs ont insisté que
l'indépendance des pays africains y
compris Madagascar n'est qu'une coquille vide. C'est une
21 Randriamamonjy (F), Histoire de Madagascar de
1895, 2002, Trano Printy Loterana Malagasy Antananarivo 2001.
indépendance purement formelle née par les
besoins de la conjoncture mondiale. L'oeuvre de Ziegler mérite
d'être rappelée ici lorsqu'il parle de « protonation »
pour designer l'ensemble des pays d'Afrique nouvellement indépendant.
Ainsi il a résumé en ces termes suivants « la
décolonisation ne marque guère qu'un moment anomique dans le
système de domination planétaire érigé par le
capital financier, les anciennes puissances tutélaires (France,
Angleterre, Belgique), affaiblies par la 2e Guerre Mondiale soumises
au diktat du capital hégémonique nord-américain, sont
obligées d'accorder une indépendance formelle aux bourgeoisies
compradores qu'elles ont mises en place au cours de 50 ans de domination
coloniale. [...], la protonation du grec (protos) « rudimentaire »
« primitif » est aujourd'hui la forme de société la
plus répandue en Afrique. [...], elle est une pure création de
l'impérialisme. La protonation est le produit d'une conjoncture
particulière du devenir de l'impérialisme »22
III.2. De l'ajustement structurel à l'ajustement
démocratique
Comme nous l'avons souligné, l'année 80 et 90
est une époque de remise en question du régime politique marxiste
phénomène cristallisé par la chute du mur de Berlin, et le
triomphe de l'universalisation des valeurs occidentales.
Les pays du tiers monde sous l'expérience marxiste sont
ravagés par une crise économique profonde. La condamnation de ces
échecs économiques, la corruption qui mine l'administration,
l'incohérence de la politique avec la réalité, l'absence
de liberté ont incité les populations locales à une
revendication des libertés, une gestion efficace de l'économie.
De leur coté, les occidentaux poussés par leurs calculs
stratégiques ont lancés les conditions d'aide économique
en faisant croire que l'instauration de la démocratie favorisera le
développement. Le FMI et la Banque mondiale sont devenus le
démiurge du développement. A ce propos, Osvaldo de Rivero
souligne que « au cours des 20 dernières années, en plus
d'une aristocratie mondiale, dont le pouvoir dépasse celui des Etats
nations, une bureaucratie internationale non élue par les peuples est
aussi apparue qui établie les règles du jeu économique
pour la majorité de la population mondiale. Aujourd'hui, le FMI, et la
banque mondiale ont acquis le pouvoir supranational de dicter et de superviser
les politiques économiques de n'importe quel pays pauvre et d'influer
pour le meilleur et pour le pire sur la vie quotidienne de n'importe quel
citoyen sans avoir à rendre de compte à qui que ce soit.
»23.
Si la condition d'aide est au départ économique,
la condition devient politique d'oül'injonction de la
démocratie comme exigence de l'aide. Les bailleurs ont fait croire que
le
22 Ziegler (J), Le pouvoir africain,
éd. Seuil, 1971 et 1979.
23 Rivero (O), Le mythe du développement,
coll. Enjeux et Planète groupe Cérès production,
2003.
développement n'existe pas sans la stabilité
politique, sans les structures des idéaux de la démocratie, le
respect des droits de l'homme. A ce sujet, nous pouvons évoquer
l'exemple du discours du François Mitterrand à la baule en 1990,
qui établit un lien entre démocratie et développement, le
consensus de Washington24 qui donne la priorité à la
libéralisation et l'application de la démocratie, la
conférence de vienne en 1993 qui met en corrélation droits de
l'homme et développement. Ainsi, le programme néolibéral,
libéralisation économique, la décentralisation, l'Etat de
droit, bonne gouvernance, ciblage des politiques sociales, adaptation de la
main d'oeuvre aux TIC est à l'ordre du jour de presque tous les
gouvernements qui veulent démocratiques.
III.2.1. Modalité de l'injonction de la
démocratie à Madagascar
A partir de la fin années 70, Madagascar s'est
engagé par la politique d'investissement à outrance qui s'est
soldé par un échec car elle se traduit par un endettement massif,
la dégradation du niveau de vie de la population générale,
l'ampleur du chômage, une nationalisation mal maîtrisée.
Pour renverser la détérioration de la vie, le pays a
négocié avec les bailleurs de fonds dans le cadre de la mise en
place du PAS. Les objectifs du programme étaient la réduction de
dépenses publiques impliquant la réduction des investissements
publics, la suppression des subventions des produits de PPN,
libéralisation du commerce extérieur et intérieur, la
libéralisation des prix. Le désengagement de l'Etat du secteur
productif en laissant sa place aux initiatives des entreprises privées.
Il revient à l'Etat d'exécuter sa fonction régalienne
à savoir l'éducation, la santé, les infrastructures de
bases. Toutefois, les mesures de redressement de l'économie n'ont pas
produit les résultats escomptés. La vie de la population devient
de plus en plus difficile qui se traduit par la détérioration des
services des bases en raison des restrictions budgétaire accentuant la
pauvreté.
En matière de gouvernance, les bailleurs de fonds ont
exigé la libéralisation de la vie politique, des pratiques de
gouvernances ont été instaurées étant
désormais admis que c'est la pratique malsaine qui a aggravé la
situation.
III.2.2. Le contexte politique nationale
Devant le problème de la pauvreté sans solution,
le mélange incompréhensible entre socialiste et capitaliste et
suite aux critiques de l'élection présidentielle de 1989 qui
ramène Ratsiraka au pouvoir, les foules ont descendu sur la rue. La
situation se prolonge par la marche vers la démocratie le 10 août
1991. Le pouvoir monopolistique de 16 ans de Ratsiraka a été
destitué.
24 Cette expression a été
employée pour la première fois par l'économiste John
Williamson.
Un gouvernement d'insurrectionnel fut crée par le
leader des forces vives de la nation le professeur Zafy Albert. Dans le
même temps, un gouvernement de transition fut institué
dirigé par Guy Willy Razanamasy.
Dans le contexte de la préparation des
conférences nationales en Afrique à l'instar du Bénin,
Madagascar a aussi tenu une conférence nationale du 23 mars au 2 Avril
1992 sous la direction du FFKM. Les grandes lignes de ce forum furent la mise
en place d'un Etat de droit, le pluralisme, respect des droits de l'homme, la
participation, organisation d'une élection libre et transparente, la
décentralisation, les séparations des pouvoirs conformes aux
idéaux démocratiques.
III.3. Un régime politique en crise
Depuis l'octroi de l'indépendance, la vie politique
malgache évolue avec un changement de régime à coup de
force, le pays n'a connu une véritable alternance politique au sens
démocratique du terme.
III.3.1. La crise politique en 1972
En 1972, le régime en place a connu sa première
contestation populaire. Le vide politique qui se matérialise par la
faiblesse de l'état de santé du président Tsiranana, Le
soulèvement des paysans du Sud sont les causes latentes de cette crise.
André Rasolo a souligné que « le caractère explosif
de 1972 est dû en grande partie à l'incohérence politique
et à l'impuissance du régime. Un régime qui confond
l'unité nationale avec un partage dit « équilibré
» des avantages liés au pouvoir entre les notables de
différentes régions. Un régime où l'administration
est à la fois incompétente et répressive.
»25 En outre le soulèvement des lycéens
et étudiants ont favorisé l'élargissement de la crise. La
pauvreté, la contestation de l'école antidémocratique,
combiné par la condamnation du néocolonianisme, et la politique
d'arrangement du pouvoir, ont contribué à la chute du
régime Tsiranana. Le chef d'Etat élu avec un score de 99,7 % est
chassé du pouvoir. Le pays au bord du gouffre oblige le leader du PSD
à transférer le pouvoir aux militaires sous la direction de
Ramanantsoa. La crise se calme avec l'arrivé de l'armée. Un
régime transitoire militaro civil est institué par le referendum
du 8 octobre 1972. La constitution fut adoptée 07 novembre 1972.
Le régime en place est marqué par la rupture de
coopération avec les français, c'est la sortie
de la zone
franc. La fermeture de la station américaine de la NASA à
Imerintsiatosika, le
lancement d'ouverture diplomatique « tous azimuts
» sur la base d'un engagement auprès des
25 Rasolo (A), « Autour de mai 1972. La question
du pouvoir », Cahiers des sciences sociales, EESDEGS,
Université de Madagascar n° 1, 1984.
non aligné26. L'abolition du système
représentatif. Le changement s'opère également par
l'expérience de la malgachisation, la restructuration de la vie à
base de fokonolona.
Tableau n°03 : Résultat du
referendum du 8 octobre 1972.
Nombre de bureaux de vote
|
11
|
408
|
Nombre d'inscrits
|
3
|
453
|
722
|
Nombre de votants
|
2
|
897
|
819
|
Suffrages exprimés
|
2
|
875
|
988
|
Voix obtenues
|
2
|
773 483 de oui (96 %) et 102 506 de non
|
Source : Cahiers des sciences sociales, 1984
Ramanantsoa qui n'est pas en mesure de dresser le pays
à cause de l'absence de programme politique, une crise de gouvernance,
un pouvoir menacé par l'instabilité militaire, quitte la
direction du pays en donnant le plein pouvoir au colonel Ratsimandrava le 5
février 1975. Après six jours de règne, il est
assassiné à Ambohijatovo. Dans la nuit qui s'ensuit l'assassinat
de Ratsimandrava, le général Gilles Andriamahazo a
constitué un gouvernement de 18 officiers pour continuer
l'activité de l'Etat qui remporte le capitaine de Frégate Didier
Ratsiraka au pouvoir. Le 8 novembre 1975 le président Ratsiraka au cours
d'un discours politique au stade de Mahamasina a déclaré
l'organisation d'un referendum prévu le 21 décembre 1975. La
question posée au peuple était, la mise en place d'une
société nouvelle ou règne la justice et
l'égalité de classe, l'acception de la révolution
socialiste malgache et la constitution qui va l'appliquer et pour la
réaliser, l'élection de Ratsiraka comme président de la
république. La république de Madagascar était donc
construite par la révolution socialiste, l'adoption de la nouvelle
constitution, et l'élection du président de Ratsiraka au
pouvoir27.
III.3.2. Le mouvement pour la démocratie en
1991
En 1991, une autre crise politique s'est reproduite dans le
pays. Le mouvement populaire dirigé par les forces vives de la nation,
la transformation politique initiée par les bailleurs de fonds sans
résultat palpable ont amené les populations à descendre
dans la rue. Le régime socialiste déjà vieux de 16 ans est
tombé par l'action du mouvement populaire.
L'inexistence de la liberté qui se traduit par la
domination de l'AREMA du champ politique, l'assemblée nationale est
constituée de 81 % de l'AREMA, contre 11 % AKFM, et 8 % pour les autres
formations, la restriction de la liberté individuelle, une option
politique
26 Ibid. p. 31.
27 Randriamamonjy (F), Histoire de Madagascar de
1895, 2002. Ed. Trano Printy Loterana Malagasy. 2001.
contradictoire à la fois socialiste et capitaliste, une
misère sans solution sont les éléments donateurs de cette
crise.
Les différentes idées véhiculées
au cours de la manifestation de 91 furent intégrées dans la
nouvelle constitution comme base de la reconstruction de la nouvelle
république démocratique naissante. La nouvelle constitution est
créée le 19 août 1992. Les résultats des
élections étaient de 72,3 % de oui et 27,7 % de non. Dans
l'intervalle, Zafy Albert a gagné l'élection
présidentielle après le second tour le 10 février 1993.
Les résultats de l'élection étaient au premier tour
menés par Zafy remportant 46% de voix contre 29 % de Ratsiraka. Au cours
de la deuxième tour le père de la démocratie a
évincé le père du socialisme 66,76% contre 33,24%. Le
nouveau président était inauguré à Mahamasina le 27
mars 1993.28 Le nouveau régime a fait sa rupture avec les
autres régimes en adoptant un régime de type parlementaire. Les
luttes incessantes entre exécutif et législatif ont amené
Zafy à modifier la constitution en 1995.
En septembre 1996, Zafy est empêché par
l'assemblée nationale. Le régime transitoire a organisé
une élection présidentielle. Zafy et Ratsiraka s'affrontent de
nouveau. Ratsiraka est revenu au pouvoir en ajustant son discours car c'est un
régime humaniste écologique qu'il propose à ses
concitoyens. En 15 mars 1998, Ratsiraka a fait voter une nouvelle constitution.
Le présidentialisme se renforce.
Tableau n° 04 : L'élection
présidentielle en 1996.
|
Ratsiraka
|
Zafy
|
|
Taux d'abstention
|
Bulletin blanc
|
Premier tour
|
36,6
|
%
|
23,4
|
%
|
41,6
|
%
|
4,2
|
%
|
Deuxième tour
|
50,7
|
%
|
49,3
|
%
|
50,3
|
%
|
4,2
|
%
|
Source: PROJET MADIO 1997.
III.3.3. La contestation électorale en
2002
Les controversés des résultats électoraux
en décembre 2001 ont abouti sur une nouvelle crise sociopolitique dans
le pays. C'était la première fois que le résultat de
l'élection n'est pas encore prononcé qu'un candidat annonce sa
victoire au premier tour.
L'argumentation du candidat était de faire une
confrontation entre les résultats détenus de la HCC et celles
détenus par les observateurs de l'élection. Pour la HCC,
Ravalomanana a obtenu 46,44 % et Ratsiraka 40,61 %. Pour le consortium des
observateurs Ravalomanana remportait l'élection 50,49 % contre le
candidat Ratsiraka 37,61 %. Pour le comité de soutien (Komity miaro ny
safidim-bahoaka) de Ravalomanana, ce dernier a obtenu 52,15 % et
28 Ibid.
Ratsiraka 35,67%. Le deuxième tour prévu par la
HCC n'a pas lieu. Après six mois de grève et de conflit
Ravalomanana s'autoproclame président de la république. Deux
investitures l'emportent à la présidence du pays. Le conflit
entre Ratsiraka et Ravalomanana ne s'est terminé qu'à Dakar le 18
mars 2002. Le chef d'Etat est réélu à premier tour en 2006
avec un score de 54,79 %. En 2007, le président a amendé une
nouvelle constitution visant à consolider son pouvoir qui est
approuvée par la population à 75,33 % malgré la faible
participation à 42,78 %, deux ans après celui-ci, est
écarté de son pouvoir par un mouvement populaire sur la place
mythique du 13 mai.
III.3.4. La crise politique de 2009
La vente de la terre à la compagnie Daewoo Logistics,
l'achat du Boeing Air Force One 737- 700, et la fermeture de la
station VIVA appartient à l'ancien maire de la CUA ont été
les éléments pour mobiliser la foule à descendre dans la
rue. Andry Nirina Rajoelina lance un appel au peuple tananarivien pour
descendre à Ambohijatovo, et revendique la démission de certains
ministres du gouvernement Charles Rabemananjara, et l'ouverture de la station
VIVA. La crise a évolué vers l'inauguration de la place de la
démocratie (ex jardin d'Ambohijatovo), il a lancé la
révolution orange en vue de mettre en place une véritable
démocratie à Madagascar le 17 janvier 2009. Le 26 janvier, le
mouvement se dégénère en pillages et de destruction des
entreprises du président au pouvoir, et certaines entreprises
privées (lundi noir du 26 janvier). Le samedi 7 février matin sur
la place du 13 mai, Monja Roindefo est nommé le premier ministre du
mouvement insurrectionnel. L'après-midi le nouveau premier a conduit la
foule à prendre le palais présidentiel Ambohitsorohitra.
L'échec de la médiation dirigé par le
FFKM à l'hôtel le Hintsy a débouché sur une nouvelle
transition dans le pays. Le 17 mars à l'Episcopat Antanimena
l'ordonnance n° 2009-001 par la quelle le president Ravalomanana a remis
les pleins pouvoirs à des directoires militaires. La nuit qui suit les
militaires ont transmis le pouvoir à Andry Nirina Rajoelina par
l'ordonnance n° 2009-002. L'ordonnance n° 2009-003 du 19 mars 2009 a
institué de la transition vers la IVe République.
Dans le cadre de la recherche de sortie de crise, les quatre
mouvances politiques malgaches ont signé successivement l'Accord de
Maputo I et II, l'Accord d'Addis-Abeba, dans le cadre de la mise en place d'une
transition inclusive et consensuelle. Notons qu'à l'issue des assises
nationales d'août 2009, Teny ifampiherana de mars 2010, des
Dinika santatra d'août 2010 et de la conférence nationale
de septembre 2010, il importe à souligner que le referendum
constitutionnel du 17 novembre 2010 s'est déroulé dans des
conditions controversées. La constitution est adoptée le 11
décembre 2010.
Pour la mise en place d'une institution
précédant la IVe République, sous la
médiation de la SADC ; les divers acteurs politiques malgaches ont
signé la feuille de route le 8 mars 2011 selon les critères d'une
transition consensuelle et inclusive. Toutefois, il importe de souligner que
nous sommes loin des résultats attendus. La transition
considérée comme consensuelle et inclusive vit actuellement d'une
crise gouvernementale. Le pays traverse actuellement sa troisième
année de transition, la déception l'emporte sur l'espoir, les
promesses pendant le mouvement à savoir la démocratie,
liberté d'expression, la diminution du coût de la vie, sont
très vîtes oubliées. On assiste à un gouvernement
ingouvernable qui se manifeste par le mélange des attributions des
ministres. Actuellement, le problème majeur de la transition est la
recherche d'une réconciliation internationale, la préparation
d'une élection digne de démocratie.
À partir de ces rappels historiques de la vie politique
malgache nous pouvons en tirer quelques tendances sur l'évolution de la
pratique démocratique dans le pays. C'est toujours l'action des
mouvements de foule qui est au centre du changement de régime politique
dans le pays. Les chefs d'Etat qui inaugurent un régime politique
démocratique sont tour à tour renversés sur la place
mythique du 13 mai. Parmi les présidents qui se succèdent au
pouvoir, d'aucun n'a quitté le pouvoir normalement au terme de son
mandat. Le premier considéré comme le père de
l'indépendance inaugurant un régime social démocrate est
tombé après trois mois de sa réélection. Le
président Ratsiraka qui inaugure un régime socialiste la vraie
démocratie au sens marxiste du terme a suivi le même chemin deux
ans après sa réélection. Le vrai père de la
démocratie à savoir le professeur Zafy Albert est tombé
dans le piège du parlementarisme. Ravalomanana a connu le même
sort après avoir réélu au premier tour de son mandat en
cédant sa place jusqu'à maintenant à l'ancien maire de la
CUA considéré encore jusqu'ici le porteur de la vraie
démocratie.
Le mot démocratie n'est jamais absent du langage
politique de chaque leader politique qui dirige le mouvement de foule. La
faction qui veut récupérer le pouvoir insiste sur ce qu'elle fera
pour le peuple, sur ce qu'on n'a pas fait mais qu'aurait dus faire, sur ce qui
est mal fait et donc à refaire, la faction se proclame comme le vrai
porteur de la démocratie. Elle demande à la population de la
porter au pouvoir.
Chaque chef d'Etat poussé par le peuple et arrive au
pouvoir s'empresse à tailler une constitution à leur mesure force
est de reconnaître que le processus vise à la monopolisation du
pouvoir et verrouille totalement la porte d'entrée pour les autres
qu'à coup de force. La constitution est ensuite confrontée au
referendum pour justifier la prise du pouvoir d'où le recours au
suffrage universel comme acte de légitimation. Dans cette lecture, Weber
n'est pas
absent lorsqu'il avait dit que la domination politique moderne se
repose par le recours sur la légitimation par un acte juridique.
Nous pouvons remarquer également une certaine tendance
dans le processus de la mise en place de la démocratie dans le pays tout
d'abord la création du gouvernement de la rue, la recherche de compromis
entre le contestataire et le pouvoir en place, ensuite la prise des
bâtiments ministériels, l'installation des ministres de
façon musclée.
Au terme de ce chapitre nous tenons à remarquer
quelques faits marquant la modalité de démocratisation à
Madagascar. D'abord le processus de démocratisation a
évolué avec le rythme de la politique interne, il est souvent
dirigé par une minorité de la classe politique accompagnée
par l'appui des foules. L'inexistence de la liberté, la dérive du
pouvoir à la dictature et la pauvreté sans solution sont toujours
au centre de la contestation populaire.
La transformation des paysages politiques de ces 20
dernières années a changé la vie politique malgache sur le
plan formel, les institutions qui se conforment aux idéaux de la
démocratie sont présentes, les séparations de pouvoir sont
maintenus, le multipartisme gagne du terrain, à partir de 1990, le pays
avait 150 partis politiques29, actuellement, on trouve plus de 333
partis politiques dans le pays30. Le foisonnement de la
société civile qui est opérationnelle dans divers
domaines. Il ne faut pas ignorer également le développement de la
presse privée qui commence à trouver de place à la
liberté d'expression qui se manifeste par une presse parfois critique
à l'égard du régime en place.
Ensuite, les enjeux économiques internationaux ont
été favorables au processus de démocratisation dans le
pays, la mise en place des structures conformes aux idéaux
démocratiques a été l'exigence des bailleurs de fonds
comme condition de leur aide économique. Les conditionnalités
démocratiques des années 90 deviennent une arme pour les
bailleurs de fonds, et le pays traversant une difficulté est
obligé d'accepter l'offre des bailleurs. La réalité
économique devient une imposition du réalisme politique.
29 La libéralisation des partis politiques dans
le pays est stipulée par l'ordonnance n° 090-001 du mars 1990.
30 Dernier chiffre donné par le
ministère de l'Intérieur.
CHAPITRE IV : REFLEXIONS SUR LA PRATIQUE
DEMOCRATIQUE
Le présent chapitre va aborder les différentes
pratiques de la démocratie dans le contexte malgache. Ainsi, nous
attacherons notre réflexion sur l'étude de l'instrument d'une
réalisation de la démocratie à savoir les
élections, et sur l'étude des acteurs de la démocratie.
IV.1. Les élections
L'élection est souvent considérée comme
l'indicateur de la présence de la démocratie dans un pays. Elle
est devenue un rite de tous les pays démocratiques en tant que
mécanisme de procédure des sélections des dirigeants qui
vont censés théoriquement représenter les peuples sur les
sphères de décision.
Dans le cas de Madagascar, l'élection au sens moderne
du terme est apparue dans le pays dans le contexte de la colonisation. Le pays
a connu sa première consultation populaire le 21 septembre 1945 pour
l'élection de la première constituante. L'électorat
était limité aux autochtones ayant un certain niveau
d'instruction. Pendant la période de la colonisation les
électorats sont définis par la loi 46-2151 de 5 octobre 1945. Les
élections législatives du 2 janvier 1956 ont appliqué le
suffrage presque universel selon la disposition de la loi 47-1606. Le suffrage
universel est appliqué pendant le referendum du 28 septembre 1958. La
première élection présidentielle était
effectuée par le suffrage universel indirect le 1 mai 1959, ce n'est que
le 25 février 1965 que l'élection présidentielle s'est
déroulée dans le cadre d'un suffrage universel
direct31.
En regardant sur les faits du processus électoral à
Madagascar, nous constatons que le rituel démocratique n'est pas encore
au rendez vous dans le pays.
IV.1.1. Election : pratique démocratique difficile
à maîtriser
Si l'élection manifeste le devoir des citoyens à
l'égard de la nation, force est de constater que les conditions requises
pour accomplir ce devoir ne sont pas encore remplies dans un pays qui se croit
démocratique. Formellement, une élection est démocratique
lorsqu'elle se déroule selon la disposition édictée par le
code électoral et la constitution.
En ce qui concerne Madagascar, le problème se rencontre
au niveau de la fiabilité de la liste électorale par le manque de
volonté du pouvoir en place d'effectuer un recensement
général de la population. La révision de la liste
électorale se déroule toujours dans une précipitation soit
le plus souvent trois mois avant la date de l'élection. Le
résultat de cette pratique c'est qu'une grande partie de
l'électorat est disparue, l'omission d'électeurs
31 Spacensky (A.), Madagascar, 50 ans de vie
politique de Ralaimongo à Tsiranana, nouvelles éditions
latines, 1970.
nouvellement recensés, l'absence du nom de
l'électorat dans la liste. Le recours fréquent à
l'ordonnance témoigne que le pays n'est pas encore à la hauteur
de la préparation de l'élection conforme à la règle
démocratique. Le dernier referendum du novembre 2010 est un exemple
convaincant concernant l'incompétence du pays à organiser une
élection, en effet, pendant ce dernier referendum il est accepté
d'utiliser la carte d'identité nationale pour pouvoir voter ce qui est
en contradiction de la règle édictée par le code
électoral. Le problème devient crucial malgré
l'introduction de la nouvelle technologie pour la confection des listes
électorales. Les hommes qui se chargent de traiter informatiquement la
liste électorale sont rémunérés à chaque nom
tapé, cette situation entraîne l'imperfection de la liste
électorale.
Ensuite, Madagascar souffre d'une maladie de
l'interventionnisme, les politiciens et les membres de la société
civile que nous avons interviewés ont tous insisté sur ce
problème. Les institutions qui se chargent de l'organisation des
élections sont sous les influences du pouvoir étatique à
savoir la HCC, le ministère de l'intérieur. La présence
des partis politiques pour la vérification des listes électorales
dans les institutions préparant les élections n'est pas toujours
le bienvenu alors que c'est un droit du parti de vérifier l'existence de
cette liste. Cette pratique remet en cause toute la crédibilité
des élections32.
Il convient de signaler également le problème de
financement et logistique des partis politiques. Actuellement, les candidats se
chargent de l'impression de leur propre bulletin et la livraison des bulletins
de vote dans le bureau de vote dans le territoire national. Cette situation
pose de problème car certains candidats n'ont pas la possibilité
de surmonter le coût du processus électoral. L'inexistence des
bulletins d'un candidat dans un bureau de vote peut avoir des incidences sur
les résultats des élections mais également sur le choix du
citoyen soit il ne vote pas parce que son candidat ne figure pas dans la
compétition soit il vote mais un vote blanc, ou il vote par
réflexe d'un simple droit. Le processus diminue l'égalité
des chances des autres candidats, de ce fait le parti au pouvoir part avec une
longueur d'avance plus le soutien de l'administration publique. La situation
arrange le candidat au pouvoir à cause de l'instrumentalisation des
ressources étatiques. A l'appui de ce propos par exemple
l'instrumentalisation du pouvoir en place de la chaîne nationale durant
la propagande électorale, ce problème est souvent soulevé
à chaque élection mais ne fait l'objet d'une discussion. La
grande majeure partie de la population ne connaît pas le fait qu'il est
son droit de vérifier la liste électorale.
Enfin, en ce qui concerne la campagne électorale, il
est pratique courante dans le pays de faire un pré campagne qui se
matérialise par la sponsorisation des activités sportives, la
32 Entretien individuel avec des politiciens.
visite d'un lieu suivi d'une oeuvre de charité. En
matière de campagne électorale, on assiste à un
marchandage d'un vote ou l'achat de conscience. Le processus est simple, si la
campagne électorale supposée le moment de l'exposition des
programmes politiques devient le moment de marchandisation d'un vote du citoyen
par la distribution gratuite des billets d'argent, la distribution des
T-shirts, l'exposition des projets qui se forge au hasard du discours de la
circonstance et le milieu visité. Andriamahefa fournit une explication
convaincante quant à la pratique de la propagande politique à
Madagascar à cet égard il a souligné que « les
pratiques de la propagande par contre, supposées être le terrain
de confrontation des programmes, l'exposé politique, viennent tout
remettre en cause. Durant cette période, il faut s'attendre à
tout, tout sauf au débat républicain : le parti devient un
conflit ethnique, la question d'argent peut prendre le dessus de la ligne
politique. Bref, le parti supposé être le milieu
d'éducation des membres n'a plus de raison d'être durant les
propagandes en devenant leur propre terrain de conflit et d'animosité.
Avec tous ces jeux antidémocratiques, le malgache lambda ne sait plus
s'il a choisi le parti ou élu l'individu (à cause de son argent
ou de son appartenance ethnique) [...], en moins d'un an il s'adjoint un
nouveau statut : d'élu démocratiquement, il devient le guide du
peuple. Une fois le processus engagé l'élu est propulsé en
demi dieu intouchable »33
Les irrégularités du fonctionnement de
l'élection demeurent une source de l'abstentionnisme des citoyens
à l'égard du processus de la démocratie. L'abstention
devient un indicateur qui illustre le discrédit du système
politique malgache. La population devient réticente à
l'égard de la chose publique.
IV.1.2. L'abstentionnisme
La participation se trouve au coeur de l'idéal de la
vie démocratique, c'est à travers l'élection l'instrument
par excellence de la démocratie que le peuple a son mot à dire
sur la décision du pays. C'est à travers l'élection que le
pouvoir des dirigeants puise sa source de légitimité. Cependant,
la baisse du taux de participation de la population pose le problème de
légitimité du pouvoir.
En ce qui concerne Madagascar, le phénomène de
l'abstention commence à gagner du terrain et ne cesse de s'amplifier. A
l'appui de ce propos, on constate une certaine tendance de la baisse de
participation électorale qui s'avoisine autour de 40 à 48 %, ce
qui revient à dire qu'une grande partie de l'électorat ne
participe pas aux opérations électorales.
Pour avoir une image de l'abstention dans le cas de Madagascar
il s'avère nécessaire de
rappeler quelque chiffre qui stipule
la baisse de participation de la population dans le
33 Andriamahefa in Revue de l'Océan
Indien, n° 315.
processus électoral. Nous nous referons ici à
quelques données d'études réalisées par Roubaud
François sur la sociologie électorale à Madagascar.
Lors de l'élection de 18 novembre 1945 le
deuxième tour de l'élection du 21 octobre 1945, l'abstention est
enregistrée à 42,52 %. Pendant l'élection
législative en novembre 1946, elle avait atteint 44,06 %. Ce n'est que
l'élection en 1992 que le taux de participation a atteint un taux
élevé avoisinant le 81 % force est de souligner que cette
élection est la consultation électorale déroulant dans la
régularité. Notons également qu'à l'élection
présidentielle en 1996 premier tour le taux d'abstention est de 41,6 %
et au deuxième il a augmenté de 50,3 %34. Le
schéma s'est reproduit pendant l'élection présidentielle
du décembre 2006 ou l'on assiste à la victoire de Ravalomanana
avec un taux d'abstention de 38,06 %. Le taux d'abstention est de 47,4 % lors
du dernier referendum constitutionnel du 17 novembre 2010. Nous tenons à
signaler que ce referendum s'est démarqué par les autres par
l'usage du bulletin unique.
Ces quelques données montrent qu'une tendance à
la désaffection de la vie politique est en train de s'opérer dans
le pays. Mais comment expliquer ce taux d'abstention ? Le taux d'abstention est
un indicateur de l'exclusion sociale plus précisément de
l'exclusion de la vie politique. Comme nous l'avons souligné
précédemment cette exclusion de la vie politique peut
résulter du système lui-même à cause du
problème de non inscription dans la liste électorale.
L'imperfection de la liste électorale produit l'exclusion du citoyen de
ses propres droits. La motivation de l'individu à participer à
une élection dépend de la fiabilité de la liste
électorale.
Toutefois, la participation à une élection
dépend également d'autre variable comme le niveau de
l'éducation de l'individu, l'enjeu de l'élection, par exemple
plus l'élection est importante plus les citoyens sont motivés
à aller voter. Elle dépend de l'intérêt du citoyen
de ce que rapporte l'élection pour lui. L'étude
réalisée par Roubaud François a montré que ce sont
les jeunes âgés de 18 à 24 ans qui sont les plus
abstentionnistes. Leurs observations pendant l'élection
présidentielle en 1996 dans l'agglomération d'Antananarivo ont
permis de constater qu'un tiers de ce groupe d'âge n'accomplit pas ses
devoirs électoraux. Les abstentionnistes sont de 28 % pour la tranche
d'âge de 25 à 29 ans.
Pour notre part nous avons interrogé les individus
concernant le dernier referendum constitutionnel du 17 novembre 2010. Ce
referendum a permis de savoir l'attitude des citoyens à l'égard
du vote mais également leurs attitudes dans sa première
expérience de l'utilisation du bulletin unique. Parmi les 65 individus
enquêtés, 35 % ont déclaré participer
34 Roubaud François, qui vote pour qui et
pourquoi ? Un essai de sociologie électorale à partir des
élections présidentielles dans l'agglomération
d'Antananarivo, 1992-1996. Novembre 1997.
au referendum tandis que 65 % n'ont pas participé. Pour
connaître la perception de la population quant à l'utilisation du
bulletin unique, nous avons recueilli que pour les individus ayant
participés à ce referendum, ils éprouvent de
difficulté du fait que c'est la première fois qu'on pratique
cette méthode de scrutin. Il est étonnant de constater que les
individus qui déclarent participer à ce référendum
n'ont pas encore lu le texte constitutionnel dans lequel ils sont censés
de choisir.
Pour les individus qui n'ont pas participé à ce
referendum, leurs raisons s'expliquent d'abord par le manque d'information et
de mobilisation concernant l'objectif de ce referendum. Ensuite, les personnes
interrogées ont insisté que c'est une pratique de modifier chaque
fois la constitution mais ça ne change rien. Elle est modifiée
dans l'intérêt des dirigeants mais non pas pour
l'intérêt de la population.
L'abstentionnisme évoque l'exclusion politique de la
population, il découle aussi une crise de représentativité
de la pratique démocratique actuelle. Pour connaître la
pensée de la population à l'égard de ses
représentants, nous avons posé la question suivante : vous sentez
vous représenter par vos élus nationaux/locaux ?
Graphique n° 01 : Représentation des
élus.
Source : Enquête personnelle 2011-2012.
A partir de ce graphe nous constatons 2 % seulement de notre
individu enquêté se déclare représenter par les
élus nationaux et locaux, 86 % ne se sentent pas
représentés par les élus. Ce pourcentage
révèle une attitude négative des hommes politiques qui
sont censés représenter la population dans la sphère
politique.
Cette crise de représentativité reflète la
déception des citoyens en raison de
l'inaccomplissement des promesses
tenus au moment de la propagande électorale. La
politique malsaine
qui occupe le devant de la scène politique, le développement qui
n'a pas
lieu jusqu'ici, le champ politique qui devient un simple lieu
de reproduction sociale des classes politiques, la tendance à la gestion
familiale du champ politique, le clientélisme politique, la mauvaise
gouvernance et les tripatouillages électoraux sont les facteurs de
compréhension du comportement des citoyens devant le
désintéressement face à ses représentants.
Tableau n° 05 : comportement des citoyens
à l'acte électoral.
Se sentir concerné par L'élection
Raison de
Participer à l'élection
|
Pas du tout concerné
|
Peu concerné
|
Assez concerné
|
Très concerné
|
Parce que c'est un droit
|
1,5 % (1)
|
4,6 % (3)
|
1,5 % (1)
|
49,2 % (32)
|
Prendre part dans la décision du pays
|
1,5 % (1)
|
0,0 %
|
1,5 % (1)
|
7,7 % (5)
|
Parce que je suis citoyen
|
0,0 %
|
0,0 %
|
0,0 %
|
3,1 % (2)
|
Parce que rien ne change
|
16,9 % (11)
|
0,0 %
|
0,0 %
|
0,0 %
|
Ca n'apporte rien si je vote Ou je ne vote pas
|
3,1 % (2)
|
0,0 %
|
0,0 %
|
0,0 %
|
Je n'ai jamais voté
|
6,2 % (4)
|
0,0 %
|
0,0 %
|
0,0 %
|
Pas de réponse
|
1,5 % (1)
|
1,5 % (1)
|
0,0 %
|
0,0 %
|
Total
|
30,8 % (20)
|
6,2 % (4)
|
3,1 % (2)
|
60 % (39)
|
Source : Enquête personnelle 2011-2012.
Devant le dysfonctionnement que traverse le système
politique malgache, les citoyens réduisent l'opération
électorale en un simple acte de vote. Le tableau montre que 49,2 % des
citoyens qui sentent concerner par les élections disent que
l'élection n'est qu'un simple acte de droit. Nous avons demandé
aux citoyens ce qu'est le sens de leur vote, les réponses se tournent
autour de question de droit. 7,7 % seulement de nos enquêtés qui
se sentent concerner par les élections affirment que l'élection
est le moment pour prendre part aux décisions dans le pays. 16,9 % ne
sentent pas concerner par les élections en raison de l'inexistence du
changement. Les citoyens qui se regroupent dans ce pourcentage attestent que
les gens qui arrivent au pouvoir ne font que réécrire l'histoire
à la manière de leurs prédécesseurs. Les
politiciens malgaches parlent tous du bien du peuple. Ils disent qu'une fois
arrivés au pouvoir ils transforment le monde cependant il n'en est rien.
Ils ne font que s'enrichir et maintenir à vie sur le pouvoir.
La crise de représentativité se confirme
lorsqu'il s'agit de demander aux citoyens sur la perception des dirigeants
politiques à Madagascar. Les classes politiques ont perdu leur
crédibilité aux yeux des citoyens. D'aucun ne déclare
favorable à la classe politique. Les citoyens ne font pas confiance
à leur classe politique. Les politiciens arrivent à
dépolitiser une grande majeure partie de la population. En posant la
question aux citoyens « que reprocher vous aux dirigeants politiques
actuels et passés ? ». Égoïste, menteur,
démagogue, corrompu, qui ne connaît pas la réalité
de la population, dictateur, magouille, impunis, pas d'éthique, sont les
mots utilisés par les citoyens pour qualifier leur classe politique. Les
personnes interrogées affirment à 86 % que la classe politique
dans le pays ne change pas. 14 % seulement disent que la classe politique
change. Elles font références le plus souvent au changement de la
tête du chef d'Etat.
Graphique n°02 : la perception sur le changement de
la classe politique.
Source : Enquête personnelle 2011.
Les citoyens ne font plus confiance à leur classe
politique, cette situation ne peut que discréditer et engendre un
scepticisme qui illustre la désaffection progressive des citoyens au
regard de la vie politique et de ses représentants. La population a
élu des hommes et des femmes qui vont les sanctionner et créer sa
propre aliénation. Cette situation s'illustre par le rapport du citoyen
à la loi. Théoriquement, les citoyens élisent les
députés qui sont leurs représentants au sein de
l'assemblée nationale. Ce sont les députés qui votent les
lois au nom de la volonté populaire, cependant dans la
réalité, ces lois ne s'adaptent pas aux réalités
quotidiennes de la population, ni d'application, à cela s'ajoute
l'inégalité dans l'application de la loi. Lors de notre
enquête presque la population a répété le
problème de la justice « rehefa tsy manam-bola eto dia migadra na
tsy meloka aza » (littéralement, « si vous n'avez pas
d'argent, vous êtes en prison même si vous êtes innocent
»).
Les hommes qui sont censés de représenter les
citoyens au sein de l'assemblée ne font que voter des lois à leur
mesure et ne sont pas en contradiction avec leurs intérêts
personnels. Le culte de l'impunité qui est en train de s'opérer
dans le contexte actuel est un exemple convaincant35. C'est pour
cette raison qu'on trouve une certaine tendance de la régression de la
conscience citoyenne élément indispensable à la
démocratie. Les citoyens voient leur avenir sans leurs
représentants.
Toutefois, nous apercevons un paradoxe du comportement de la
citoyenneté, la défiance que l'on peut constater est
contradictoire du comportement des citoyens. Ils reproduisent
systématiquement sa propre condition d'exclusion sociale ou de sa propre
aliénation politique. Ils reconduisent en permanence soit par
l'intermédiaire du mouvement de foule (moyen d'expression populaire) ou
par l'intermédiaire de l'élection (moyen de l'expression de la de
décision) les mêmes hommes politiques au pouvoir en sachant qu'ils
ne font rien d'autre que ce que les autres ont déjà fait. Dans ce
cas, la participation citoyenne apparaît un rituel d'exclusion sociale et
qui par ses choix participe à créer une classe
privilégiée, une oligarchie de pouvoir. L'élection et le
mouvement de foule ne sont que des faire-valoir qui légitiment sa propre
exclusion.
IV.2. Les acteurs de la démocratie
Comme nous l'avons noté la démocratie ne se
pratique pas d'elle-même, elle a besoin des acteurs pour être
réalisable. Actuellement, ce sont les partis politiques qui occupent la
première place dans la réalisation de la démocratie. Sur
le plan formel, les partis politiques constituent les faiseurs d'opinion dans
une société donnée. Ce sont eux qui cherchent les
alternatives face aux difficultés que traverse un pays. Les partis
politiques ont pour vocation première de conquérir et d'exercer
le pouvoir.
IV.2.1. Des partis politiques absents
Le blocage essentiel de la démocratie malgache
résulte en grande partie par l'absence des partis politiques. Ce que
nous voulons dire par absence, ce n'est pas pour dire qu'ils ne sont pas
là mais pour illustrer le dysfonctionnement des partis politiques
actuels. Actuellement, Madagascar compte plus de 333 partis politiques. Ce
chiffre cadre bien l'exercice d'une démocratie. Pourtant, le
fonctionnement des partis politiques dans le pays montre que la
démocratie est aujourd'hui l'idéologie qui permet au parti
politique ou plus justement le leader du parti de s'enrichir et de gagner les
avantages liés au pouvoir. Dans l'état actuel des choses,
créer un parti politique est un passage obligé pour
accéder au pouvoir. Faire de la
35 Notre entretien individuel.
politique n'est plus une conviction personnelle, ni une
démarcation idéologique, c'est tout simplement une
nécessité absolue pour s'enrichir et jouir de
l'impunité.
L'histoire des partis politiques dans le pays permet de voir
que le multipartisme n'arrive pas à résoudre le problème
de fond du pays. Les partis politiques ne jouent plus le rôle de
producteur d'idée, ou le lieu de réflexion. L'histoire du
mouvement de foule dans le pays est à cet égard un exemple
permettant de mesurer la faiblesse des partis politiques à donner des
alternatives de solution au problème du pays. En effet en 1972, les
partis politiques sont incapables à prendre le pouvoir en cédant
sa place à des militaires. En 1991, 2002, 2009, le pouvoir est conquis
par un homme jusque là méconnus du champ politique
considéré comme l'homme providentiel. Des petites formations
politiques se forment autour de l'homme providentiel donnant naissance un
gouvernement fragile. Ce processus explique l'instabilité
gouvernementale. Tous les chefs d'Etat qui arrivent au pouvoir n'arrivent pas
à gérer ses coalitions hétérogènes.
Le parti politique en question n'a pas de positionnement
idéologique, ni de projet de société, ni de
stratégie de gouvernance. Une fois au pouvoir, le parti devient
monopartisme, et tous les représentants de chaque territoire se
proclament appartient à ce même parti, car pour pouvoir prendre
part aux richesses, et gagner de l'immunité, il faut
impérativement se déclarer de ce même parti. L'exemple ne
manque pas, il suffit de voir les partis politiques représentants au
sein de l'assemblée nationale, en 1983, l'AREMA obtient 117
sièges sur 137 au sein de l'assemblée. Pendant l'époque de
Ravalomanana 90% des sièges appartiennent au parti politique TIM.
Actuellement, le schéma se reproduit où l'on voit de la
domination du parti TGV. Cette situation ne fait que stériliser les
débats politiques au sein de l'assemblée surtout cette
institution fonctionne à la loi de la majorité et le vote
à main levée. C'est toujours le parti du chef d'Etat qui a le
dernier mot à dire.
Les partis politiques sont hostiles aux intérêts
généraux de la nation. Ils réduisent les débats
d'idées à un simple instrument de leur stratégie
d'accession au pouvoir ou de maintenir au pouvoir et de gérer un
système source de satisfaction personnelle c'est-à-dire l'Etat.
Le débat politique, normalement en démocratie, devrait traiter
les problèmes de fond du pays, mais en fait nous assistons à la
simple négation des questions essentielles, l'assujettissement du
débat au fonctionnement du système. L'Etat se réduit
à un simple supermarché politique au sens Touraine du terme dans
lequel les partis politiques font la course au pouvoir afin de s'enrichir. La
répartition des rentes est actuellement les conditions essentielles de
la stabilité politique car elle pousse les élites politiques
à s'abstenir à la violence.
Les partis politiques se réduisent à des
machines de conquête de pouvoir dont l'Etat a besoin pour pouvoir
exister, des machines qui servent à recycler des personnels corrompus et
toujours intéressés, pour illustrer ce propos, on peut signaler
le comportement des hommes politiques qui quittent volontairement son parti
pour adhérer à un autre par opportunisme politique ou
préservation des intérêts personnels. La fonction d'un
parti politique est aujourd'hui de gérer un système source
d'insatisfaction et d'inégalité pour la majorité de la
population.
Le foisonnement des partis politiques d'aujourd'hui s'explique
par les intérêts portés au pouvoir et comme ressource des
intérêts personnels. Un autre problème du multipartisme
qu'on soulève toujours dans le pays c'est l'assise nationale des pays.
Une grande partie des partis ne disposent pas de couverture nationale, ils
n'arrivent pas à s'intégrer dans tous les territoires nationaux.
A cela s'ajoute l'inexistence d'un véritable parti politique
d'opposition. Le multipartisme est une caractéristique d'un
régime où la liberté d'association permet à plus de
deux partis de participer aux débats politiques et aux élections.
Le multipartisme est une condition qui permet aux citoyens de contrôler
les actions de l'Etat, pourtant, il n'existe pas de parti politique qui joue le
rôle intermédiaire entre le citoyen et l'Etat. Ce n'est que
pendant le moment de l'élection que les partis politiques pensent
à l'existence du peuple. Mais la période de l'élection va
être le moment qui renforce le divorce entre les peuples et ceux qui sont
censés les représenter. Une fois l'acte électoral accompli
la vie quotidienne reprend son cours normal. Les thèses élitistes
trouvent ici son importance en affirmant que la démocratie politique
n'est qu'une oligarchie déguisée36. Rien ne garantit
que les représentants élus exécutent nécessairement
la volonté du peuple.
Au cours de notre entretien individuel, toutes les personnes
interrogées se rangent du côté de l'institutionnalisation
du bipartisme ou au moins la limitation du nombre des partis politiques dans le
pays. Les idées véhiculées par ces personnes sont le
rassemblement des partis politiques ayant les mêmes visions ou
idéologies en des groupements forts et solides. La limitation des
nombres des partis politiques au moins autour de 100. A chaque moment fort de
l'histoire, les hommes politiques s'empressent à créer des partis
politiques mais lorsque la période électorale arrive les nombres
des partis qui se présentent aux élections ne dépassent
pas le nombre de 10.
Il appartient aussi au parti politique d'exercer le rôle
d'éducateur des citoyens, mais nous apercevons que ce rôle est
complètement oublié. Aucun parti politique d'aujourd'hui n'a pas
de projet d'éducation citoyenne. L'inaccomplissement de ce rôle se
réaffirme en posant la
36 C'est surtout Robert Michels qui a décrit la
tendance oligarchique au sein des démocraties dans son ouvrage la
sociologie du parti politique dans la démocratie moderne (1911).
question suivante aux citoyens. « Est ce qu'il existe
dans votre quartier des partis politiques qui donnent de cours
d'éducation civique ou au moins informer sur ce qu'est la
démocratie ? ». Les citoyens nous ont livré des
réponses négatives.
IV.2.2. Les problèmes de la société
civile
La société civile est le deuxième
intermédiaire entre l'Etat et les citoyens. Actuellement, les
sociétés civiles sont considérées comme des
associations regroupant les individus ayant les mêmes
intérêts. Après plusieurs années d'interdiction
d'association durant le régime socialisme, on assiste à
Madagascar à la multiplication de la société civile. Dans
la pratique démocratique, les sociétés civiles contribuent
à la défense des intérêts individuels et collectifs.
L'élargissement du domaine d'intervention de la société
civile permet de connaître qu'elle joue des rôles dans le processus
démocratique et surtout dans le développement du pays.
La société civile est toujours dynamique dans la
résolution de la crise politique dans le pays. Mais l'histoire du pays
montre la faiblesse de la société civile à trouver une
solution durable aux problèmes du pays. En 1972 la société
civile avait remis en cause le régime néocolonial, en 1991 c'est
le socialisme qui a été remise en question par un
libéralisme à la mode. En 2002, la société civile a
rectifié des principes certifiés fondamentaux non
respectés de la démocratie.
On reconnaît aussi la société civile par
son rôle de règlements conflits sociaux et surtout le conflit
politique. Sur ce point, il convient d'énumérer le rôle du
FFKM concernant les règlements de conflit politique dans le pays. Ce
groupement oecuménique a été plus actif dans les moments
difficiles de la vie politique malgache. Pour illustrer ce propos, nous disons
que c'est grâce à ce groupement oecuménique que le pays a
entré dans le processus de démocratisation dans les années
90 par l'organisation du forum national qui vise l'instauration des structures
conformes aux idéaux de la démocratie. Dans le contexte de la
crise actuelle, il a tenté de chercher un espace de dialogue sur les
acteurs de la crise. Mais cette fois ci, la médiation du FFKM ne
résoudra pas le problème politique du pays.
La place occupée par la société civile
nationale est plutôt faible dans le processus de développement du
pays. En effet, ce sont les organismes internationaux qui se montrent le plus
dynamique dans le développement du pays, à travers la
réalisation de projet dans plusieurs des cas qui ne s'adapte pas
à la réalité sociale malgache. Ces dernières
années, nous avons la tendance de demander des conseils à
l'expertise internationale qui ne connaît pas la réalité
malgache. On peut dire que la société civile malgache ne jouit
pas encore d'une confiance suffisante. Ce sont les organismes étrangers
qui se montrent le plus utiles
concernant la lutte contre la pauvreté dans le pays, ainsi
des ONG se forment pour bénéficier l'aide des bailleurs de
fonds.
La méconnaissance de la population est un autre
problème. Les actions menées par les sociétés
civiles sont invisibles et incompréhensibles devant la majeure partie de
la population. La population n'a pas de considération à
l'égard de la société civile. Pourtant,
théoriquement, une société civile est issue de cette
population qui oeuvre pour la défense de l'intérêt de cette
population contre toute intervention de l'Etat dans la vie privée. Aux
yeux de la population, on reconnaît la société civile par
le mouvement de revendication diverse dans le but est de défendre les
intérêts particuliers corporatistes.
Les enquêtés menées auprès de la
population nous ont permis de connaître que beaucoup de citoyens ne
travaillent pas avec la société civile à part les
associations locales. En outre, beaucoup de citoyens semblent ignorer la notion
de société civile et son rôle dans la prise de
décision. D'ailleurs rares sont les répondants qui ont
cité ces organisations comme cadre d'expression vis-à-vis des
décisions publiques.
Graphique n°03 : Etat de connaissance des rôles
de la société civile.
Source : Enquête personnelle 2011.
A partir de ce graphique, on remarque que 65 % des individus
enquêtés n'ont aucune idée de ce qu'est le rôle de la
société civile. 35 % seulement savent les rôles de la
société civile. ce pourcentage montre qu'une grande mobilisation
et éducation citoyenne est à déployer dans le contexte
malgache.
C'est le pouvoir étatique lui-même qui est une
source du déficit de la société civile malgache. Il
n'existe pas encore un Etat qui consulte les sociétés civiles
concernant le problème du pays dans la période d'accalmie. La
recherche de dialogue entre la société civile et l'Etat est
jusqu'ici un exercice difficile à maîtriser. L'insuffisance de
débats entre ces deux institutions explique la carence d'une
référence de vision nationale en matière de
développement socioéconomique et surtout de la
démocratie. On peut dire que la société civile malgache ne
jouit pas encore d'une confiance suffisante.
Pour terminer le chapitre il convient de rappeler que la
pratique démocratique dans le pays souffre de dysfonctionnement qui se
matérialise premièrement dans l'irrégularité de
l'organisation des élections. On attend communément de
l'élection qu'elle mette fin à la crise politique. Pourtant,
celle-ci en raison de l'irrégularité de fonctionnement est
devenue une source de nouvelle tension et d'exclusion sociale. L'exclusion
sociale se reflète par la non inscription sur la liste
électorale, par l'auto exclusion à cause du
désintéressement à la vie politique.
En second lieu, l'abstentionnisme qui signifie par une crise
de représentativité en raison de la baisse du taux de
participation électorale. La crise de représentativité se
renforce par le discrédit de la classe politique et les partis
politiques. Les hommes qui accèdent au pouvoir ne font que consolider sa
domination légale rationnelle qui se manifeste par le changement de
constitution et le renforcement de la bureaucratisation de l'Etat, le parti
politique de l'homme au pouvoir devient le parti dominant du champ
politique.
En dernier lieu, la société civile nationale ne
tient pas encore une place importante dans le processus de
démocratisation et du développement du pays en raison de la
confiance du pouvoir en place à des organismes étrangers. Le
manque de volonté de l'Etat à se dialoguer avec la
société civile témoigne que la recherche d'une vision
à référence nationale n'est pas encore à l'agenda
du pouvoir étatique.
CHAPITRE V : LA PERCEPTION CITOYENNE
Le présent chapitre va aborder la perception citoyenne
sur la vie démocratique malgache concernant le fonctionnement de cet
Etat qui se veut démocratique. Ainsi, le travail débutera par la
description de l'implication de la population dans la vie politique. Ensuite
sur la perception de l'application de la démocratie dans la
réalité quotidienne. Enfin, nous allons montrer que
l'inégalité sociale est un aspect de la problématique de
la démocratie malgache.
V.1. Implication de la population
Dans le précédent chapitre nous avons
montré que la démocratie traverse une crise de
représentation qui se traduit par le discrédit de la classe
politique, l'abstentionnisme etc. Pourtant, ce rejet du système
représentatif ne signifie pas une dépolitisation totale, la
population se sent impliquer dans la vie politique mais qui reste encore
l'apanage des minorités ayant un certain niveau d'éducation.
V.1.1. Comportement politique des citoyens
La diffusion du mot démocratie dans l'espace public
rend difficile de délimiter une définition exacte de la
démocratie de la part des citoyens. Les débats politiques
télévisés, la presse quotidienne, les différentes
sortes de revendication, le discours d'un politicien sur la
problématique du pays ici et là contribuent à exercer une
influence à la perception sur la notion de démocratie. Chacun a
sa manière de l'interpréter, de la juger, de la mesurer.
En ce qui nous concerne, le travail de terrain nous a permis
de constater que 38,5 % de l'individu enquêté attribuent un sens
au terme de la démocratie une liberté d'expression.
L'égalité de tous devant la loi, la bonne gouvernance sont des
concepts utilisés par les individus enquêtés pour
définir la démocratie.
Le niveau d'éducation exerce une influence sur la
capacité à donner un sens au terme de la démocratie.
Ainsi, pour les individus ayant acquis un niveau d'étude
supérieur, ils ont tendance à définir la démocratie
au sens formel du terme c'est-à-dire le pouvoir du peuple (30,8 %).
La participation symbolique à la vie politique du pays
se déroule parfois dans la sphère privée de chacun. A ce
titre, le comportement permet de connaître les intérêts sur
la vie politique. Il permet aussi de connaître ses réactions
à l'égard de ce qui se passe dans le pays.
Dans l'espace public on entend souvent la politique ça
ne rapporte pas de l'argent. Cette attitude du désintéressement
à la vie politique reste corrélé par le genre et le niveau
d'éducation. Dans notre cas, l'exclusion de la femme sur la scène
politique est toujours
vérifiée. En effet, 20 % seulement des femmes
enquêtées manifestent des intérêts pour la politique
tandis que 55,4 % des hommes éprouvent des intérêts sur la
vie politique. Le niveau d'étude de l'individu influence sur le
comportement à s'intéresser à la vie politique.
Tableau n° 06 : Intérêt pour
la vie politique.
Intérêt politique
|
Oui
|
Non
|
Total
|
Genre
|
|
|
|
|
55,4 % (36)
|
4,6 % (3)
|
60 % (39)
|
Masculin
|
|
|
|
Féminin
|
20 % (13)
|
20 % (13)
|
40 % (26)
|
Source : Enquête personnelle 2011.
Tableau n° 07 : Intérêt
politique et niveau d'étude.
Intérêt politique Niveau d'étude
|
Oui
|
|
Non
|
|
Total
|
Primaire
|
3,1
|
%
|
(2)
|
|
|
|
3,1
|
%
|
(2)
|
Secondaire
|
6,2
|
%
|
(4)
|
9,2
|
%
|
(6)
|
15,4
|
%
|
(10)
|
Lycéen(ne)
|
13,8
|
%
|
(9)
|
10,8
|
%
|
(7)
|
24,6
|
%
|
(16)
|
Supérieur(e)
|
52,3
|
%
|
(34)
|
4,6
|
%
|
(3)
|
56,9
|
%
|
(37)
|
Source : Enquête personnelle 2011.
D'après ce tableau, l'intérêt à la
vie politique varie en fonction du niveau d'étude. 52,3 % ayant acquis
un niveau d'étude supérieur manifestent un intérêt
politique. 13,8 % des lycéens manifestent un intérêt sur la
vie politique. 6,2 % des secondaires trouvent de l'intérêt
à la vie politique. Ce qui revient à dire que s'intéresser
à la vie politique reste encore l'apanage des individus ayant acquis un
certain niveau d'instruction.
Le contexte politique qui prévale actuellement dans le
pays est une variable qui explique le comportement de la population à
l'intérêt de la vie politique. Ce comportement est normal dans la
mesure où chacun commence à sentir l'impact de la crise sur la
vie quotidienne.
Tableau n° 08 : Le genre et la discussion
politique
Discussion politique Genre
|
Oui
|
|
Non
|
Total
|
Masculin
|
58,5%
|
(38)
|
1,5%
|
(1)
|
60%
|
(39)
|
Féminin
|
18,5%
|
(12)
|
21,5%
|
(14)
|
40%
|
(26)
|
Source : Enquête personnelle 2011.
Il dégage de ce tableau que ce sont les hommes qui
discutent le plus de politique avec une fréquence de 58,5 %. Seulement
18 % des femmes discutent de la vie politique. D'après ce tableau, 1,5 %
seulement des hommes individus enquêtés. La discussion politique
se déroule souvent entre ami (43,1 %), elle est de 16,9 % dans la
famille, et au travail 15,4 %, 23,1 % des individus enquêtés n'ont
pas répondu.
V. 1.2. Rapport du citoyen à la presse
Parmi les libertés démocratiques que les
malgaches cherchent à conquérir, la liberté de presse
parait être le plus important. Le foisonnement de la presse de ces
dernières années illustre qu'une grande amélioration est
opérable dans ce domaine par le développement de presse qui se
montre plus critique à l'égard du pouvoir en place. Cette
situation se manifeste également par le développement des
émissions télévisées, des émissions
radiophoniques, les chroniques politiques. La vulgarisation de la nouvelle
technologie de l'information et de la communication permet aux citoyens de
rentrer en contact direct à ces différentes émissions,
pour lancer des critiques, des propositions, de plaider concernant la vie
politique nationale. Le développement de la presse est un milieu ouvert
à l'espace public lui permettant de s'exprimer librement, de procurer
des informations.
Pour savoir le rapport du citoyen à la presse nous
avons demandé aux citoyens s'ils sont bien informés concernant la
vie politique malgache, de ce qu'ils pensent sur l'évolution de la
presse d'aujourd'hui.
Le résultat de terrain a permis de savoir que
l'accès à l'information par un individu passe en premier par la
presse quotidienne qui représente 33,8 % de l'individu interrogé.
Ensuite, par la presse télévisée qui obtient 24,6 % et
enfin la presse radiophonique avec 18,5 %. Les 23,1 % n'ont pas donné de
réponses.
Graphique n°04 : les sources de l'information de
l'individu.
Source : Enquête personnelle 2011.
L'accès à l'information ne se limite pas
à l'achat d'un journal, il se traduit aussi par le suivi d'un
débat politique télévisé. D'après nos
observations, 55,4 % des personnes interrogées suivent les débats
politiques télévisés. 26,2 % déclarent qu'ils ne
suivent pas les débats politiques télévisés. 4,6 %
ne suivent que rarement faute de temps et de l'occupation quotidienne. Aux yeux
des citoyens suivre un débat politique télévisé est
un moyen qui permet de connaître l'actualité nationale, une
scène où l'individu exprime librement. 58 % ont insisté
sur ce point. Certains disent qu'un débat politique est le signe de la
liberté d'expression et se définit comme un critère de
l'existence de la démocratie dans le pays, 23 % se rangent sur ce point.
Pour les autres c'est une revendication latente (un besoin de changement) parce
que la liberté d'expression n'est pas vraiment établie dans le
pays, 8 % des individus enquêtés signalent ce point. Pour le
reste, le développement des émissions politiques présente
des effets pervers car il dérive à guerre des ondes, un conflit
politique. Les analyses des journalistes sont souvent d'orientation
partisane.
Il convient de remarquer aussi que dans notre cas, ce sont les
hommes qui sont les plus actifs et attentifs à suivre un débat
politique. Il atteint une proportion de 44,6 % et les femmes ne sont que 10,2
%. Le tableau suivant résume le rapport entre genre et suivi d'un
débat politique.
Tableau n°09 : Rapport genre et suivi
d'un débat politique
Genre
Suivi d'un débat politique
|
Masculin
|
Féminin
|
Pas du tout
|
4,6 % (3)
|
21,5 % (14)
|
Rarement
|
3,1 % (2)
|
1,5 % (1)
|
Quelque fois
|
7,7 % (5)
|
6,2 % (4)
|
Souvent
|
44,6 % (29)
|
10,2 % (7)
|
Source : Enquête personnelle 2011.
Si les émissions politiques commencent à gagner
de terrain, il convient de préciser que la liberté d'expression
est loin de suffire aux yeux de la population. Nous observons que 55 % des
individus enquêtés disent que la liberté d'expression est
encore insuffisante. 18 % jugent que la liberté d'expression est
satisfaisante. Les autres sont indifférentes.
Graphique n°05 : Jugement sur la liberté
d'expression.
Source : Enquête personnelle 2011.
A partir de ces appréciations quantitatives nous
pouvons en tirer que ce sont les hommes de sexe masculin et les individus qui
ont un niveau d'étude supérieur manifestent des
intérêts à l'égard de la vie politique. Les femmes
s'auto excluent de la vie politique. Cependant nous tenons à souligner
que ce comportement de la femme en rapport avec la vie politique s'explique par
son statut social, de son rôle et de sa valeur, dans la
société malgache. Ce qui revient à dire que les femmes ne
sont pas intégrées dans la vie démocratique.
La graphique 04 dégage que 55 % des sujets
enquêtés jugent la liberté d'expression
insuffisante. 18
% seulement trouvent satisfaisante. 26% sont incapables de juger
concernant
la liberté d'expression. Dans la pensée des sujets
enquêtés, l'existence des débats médiatiques
signe la liberté d'expression, force est de souligner
que l'insuffisance de cet espace d'expression s'explique par l'inexistence de
lieu dans lequel les citoyens ordinaires peuvent avoir leur mot à dire.
L'entrée à ces chaînes médiatiques présente
des coûts élevés malgré le développement de
la discussion téléphonique. Les citoyens gardent encore le
sentiment selon lequel lorsqu'on parle dans le pays, on est poursuivi. Ils sont
convaincus que, exprimer, ou critiquer ne servira à rien car les
dirigeants ne vont pas en tenir compte.
V.1.3. Le problème de la presse
Si les citoyens perçoivent que la liberté
d'expression reste insuffisante, nous tenons à remarquer que la presse
qui en principe devrait l'institution d'expression est aussi en
difficulté. La place de la presse comme quatrième pouvoir est
loin d'être acquis. Pour expliquer cette situation il suffit de voir
l'acte d'intimidation attribué aux journalistes par l'envoi des lettres
de mise en demeure, la censure. Sur ce sujet, l'exemple de la crise politique
de 2009 montre que nous ne sommes pas encore à la hauteur de la
liberté d'expression. Dans cette période de transition l'histoire
est entrain de se répéter ou l'on assiste à des censures
des émissions de la radio pour cause de trouble à l'ordre
public.
Le manque de professionnalisme des médias leurs
empêchent de fonctionner correctement, une forte politisation de la
presse qui se traduit par des commentaires partisans. Les hommes politiques
créent leur propre chaîne de télévision, de station
radio ou journal pour véhiculer leurs idées politiques.
La chaîne nationale est désertée de
pluralisme de débat public et démocratique, elle devient la
propriété du chef de l'Etat, son moyen de propagande politique
d'autant plus que seule la chaîne nationale est autorisée à
diffuser des informations sur l'ensemble du territoire. Les journaux qui
paraissent à Antananarivo ne sont disponibles en province que le
lendemain. Chaque homme qui arrive au pouvoir instrumentalise le media national
pour consolider son emprise et pour immerger une grande population dans
l'ignorance de ce qui se passe dans la vie de la cité.
La différence de traitement entre les candidats dans
l'accès à la chaîne nationale pendant la campagne
électorale est toujours un sujet d'actualité. La discussion sur
le code de communication qui devrait réglementer la profession des
medias reste encore dans l'impasse37.
En réalité, les journalistes font figure
d'éléments influents de la société civile. Gramsci
met
l'accent sur cet aspect à travers son analyse des intellectuels
organiques qui est
37 La dernière loi sur la communication est
édictée par la loi n° 90-031 du 21 décembre 1990
portant sur la communication.
complémentaire de l'étude d'Althusser sur le
bloc historique. D'après ces deux points de vue, les journalistes, les
médias et la presse appartiennent à ces deux catégories.
Ils font partie intégrante de la société civile. Ils sont
investis de la fonction de susciter des débats sociaux à travers
leur pouvoir de dénonciation et les critiques qu'ils formulent. Mais,
à Madagascar, peu de journalistes savent jouer leur vrai rôle. Ils
ignorent même leur véritable statut parfois.
V.2. Participation effective de la population
Cette dernière section de la partie de notre devoir
s'attachera à mettre en relief l'opinion de la population concernant
leur degré et les modalités de participation dans la prise de
décision politique. L'étude vise à montrer les canaux par
lesquels les citoyens participent à la gouvernance démocratique.
Elle tente aussi de connaître les obstacles qui empêchent les
citoyens de participer effectivement dans le processus.
V.2.1. Le postulat d'une société
libre
La société d'aujourd'hui est
régulée par un ordre juridique, la loi est un instrument de
régulation de la vie politique et sociale. Elle relativise la vie
sociale. On reconnaît l'Etat de droit par le positionnement de l'individu
dans l'égalité de traitement sans distinction. Tout le monde est
au dessous de la loi. Un Etat de droit est aussi reconnu par
l'indépendance de la justice. Dans un Etat de droit, il revient à
l'Etat d'exercer son rôle définit par les droits étatiques.
La liberté de la citoyenneté est l'accès à des
droits ainsi définis. A ce titre il appartient à l'Etat de donner
une protection à la population, d'instaurer un développement pour
l'ensemble de la population. Aux yeux des citoyens l'Etat est loin d'accomplir
ses rôles et nous ne vivons pas dans une société libre.
Tableau n°10 : Perception sur la
société libre
Vivre dans une société libre
|
Effectif
|
Fréquence
|
Pas du tout
|
51
|
78,5 %
|
Pas tout à fait
|
5
|
7,7 %
|
Plutôt oui
|
9
|
13,8 %
|
Total
|
65
|
100 %
|
Source : Enquête personnelle 2011.
A partir de ce tableau, nous constatons que 78,5 % pensent que
nous ne vivons pas dans une société libre, 13,8 % trouvent que le
pays vit dans une société libre, et 7,7 % pas tout à fait.
En demandant aux citoyens les raisons de ces perceptions selon une proposition
de question à échelle de valeur, sur les 78,5 % qui disent qu'on
ne vit pas dans une société libre, ils mettent au premier plan
l'existence de l'oppression à 53,8 %. Ce pourcentage est suivi de
près par le
problème d'insécurité à 43,5 % et
de 36,5 % par l'inexistence du travail. La monopolisation de l'économie,
l'alternance en prison, sont des termes évoquées pour qualifier
que nous ne vivons pas dans une société libre. Ces chiffres
reflètent que l'Etat n'arrive pas à jouer son rôle d'agent
de protection et de développeur.
Pour les personnes enquêtées qui pensent qu'on vit
dans une société libre, elles ont défendu leurs points de
vue par la liberté de parole, la libre circulation.
V.2.2. Le dysfonctionnement de la démocratie
Pour apprécier la manière dont les citoyens
aperçoivent le dysfonctionnement de la démocratie, nous avons
opté à une question ouverte portant sur le problème de la
démocratie dans le pays. La répétition des réponses
de nos sujets a permis de dresser le tableau quantitatif suivant.
Tableau n°11 : Le dysfonctionnement de la
démocratie.
Dysfonctionnement de la démocratie
|
Effectif
|
Fréquence
|
L'analphabétisme
|
21
|
32,3 %
|
La peur de s'exprimer
|
4
|
6,2 %
|
La pauvreté de la population
|
6
|
9,2 %
|
On ne s'écoute pas
|
14
|
21,5 %
|
Ne s'adapte pas à notre culture
|
1
|
1,5 %
|
C'est une démocratie pour les politiciens
|
6
|
9,2 %
|
Problème de mentalité
|
2
|
3,1 %
|
Mauvaise gouvernance
|
2
|
3,1 %
|
C'est une idéologie d'oppression
|
2
|
3,1 %
|
Chacun à sa manière de la définir
|
1
|
1,5 %
|
L'absence d'espace pour s'exprimer
|
2
|
3,1 %
|
Pas de réponse
|
4
|
6,2 %
|
Total
|
65
|
100 %
|
Source : Enquête personnelle 2011.
A partir de ce tableau, nous apercevons que pour les personnes
interrogées l'analphabétisme est au premier plan du
problème de la pratique de démocratie dans le pays. 32 % ont
souligné sur ce point. Il est suivi de près par l'attitude des
dirigeants politiques qui n'écoutent pas les gouvernés avec un
pourcentage de 21,5%.
Les enquêtés ont insisté que la
démocratie est pour les politiciens (9,2 %). Le problème de
mentalité, la pauvreté de la population, la peur de s'exprimer,
la mauvaise gouvernance et l'absence d'espace pour exprimer sont des
indicateurs donnés par la population pour montrer le problème
à la mise en place de la démocratie dans le pays.
V.2.3. participation de la population dans le processus
de décision
La participation de la population à la prise de
décision au niveau local est plus facile en raison de la
proximité du pouvoir dans le contexte de la décentralisation.
Lorsque nous avons posé la question « sentez vous prendre
réellement part aux décisions dans votre société
» aux citoyens. Ils ont tendance à faire référence
à la participation locale et à l'acte du vote.
Graphique n°06 : Participation à la
décision au niveau de l'instance de base.
Source : Enquête personnelle
2011.
Il ressort de ce graphique que 66 % des sujets
enquêtés estiment participer aux processus de prise de
décision locale, 22 % estiment de ne pas participer dans le processus de
décision. 12 % déclarent à hésiter de participer
effectivement.
Graphique n°07 : Modalité de participation
dans le processus de décision au niveau local.
Source : Enquête personnelle 2011.
Ce graphique met l'accent sur la modalité de
participation de la population dans la prise de décision. Le graphe ne
tient plus compte de l'acte électoral qui signifie pour les individus
enquêtés le premier signe de la prise de décision. En
dehors de l'acte électoral donc, c'est surtout au niveau local que les
sujets sentent prendre part dans la décision. La participation est
définie avec l'assistance à des réunions locales qui prend
un pourcentage de 62 %. Cette forme participation est suivie par l'action de
donner des idées à travers les réunions avec une
fréquence de 23 %. La forme de participation qui consiste à
donner des idées à travers les représentants avec une
fréquence de 6 % témoigne que le contact entre gouvernant et
gouverné reste encore faible. Pourtant, cette faiblesse de
modalité de participation trouve son explication en demandant à
la population concernant son avis sur ceux qui devraient prendre la
décision. Le travail de terrain a permis de constater que 52 % des
enquêtés s'attendent encore que les décisions se prennent
au niveau central. 32 % estiment que les populations devraient prendre les
décisions dans le cadre de la démocratie et la
décentralisation. Les autres n'ont pas donné de réponses
claires.
Au terme de cette deuxième partie de notre
réflexion, nous disons que la pratique démocratique dans le pays
souffre d'une crise de représentativité. Les institutions qui
devraient la réaliser ne sont pas au rendez-vous. Les partis politiques
n'ont pas de crédibilité pour proposer une alternative au
problème du pays. Le champ politique est fortement individualisé'
où chaque personnel politique cherche à satisfaire ses
intérêts personnels.
Les sociétés civiles nationales ne gagnent pas
la confiance du pouvoir public, leurs actions sont invisibles et peu efficace
en cédant sa place à des sociétés civiles
internationales oeuvrant dans le développement du pays à travers
des projets qui ne s'adaptent pas avec la réalité malgache.
L'ignorance de la population des rôles de la société civile
dans le processus démocratique témoigne la faiblesse de la
société civile.
Malgré le développement de la liberté
d'expression qui s'exprime par le foisonnement de presse force est de
reconnaître que le quatrième pouvoir est loin d'être acquis.
Le manque de professionnalisme, l'acte d'intimidation qu'on attribue aux
médias, la politisation de la presse, et l'inexistence du code de
communication sont actuellement les problèmes de fond de la
démocratie malgache.
L'inaccomplissement du rôle de l'Etat permet à
l'individu de juger qu'il ne vit pas dans une société libre. La
réduction de l'Etat comme un simple instrument au service de la classe
politique ne fait que discréditer le système.
Le degré d'implication de la population dans la prise
de décision reste encore faible, aux yeux de la population
l'élection reste la seule modalité de participation dans la prise
de décision. Malgré l'instauration de la décentralisation,
les populations s'accordent toujours que la décision doit se prendre au
niveau central. Cette situation est due principalement à la
méconnaissance des citoyens de l'enjeu de la décentralisation
ainsi que leurs responsabilités dans ce processus.
L'analphabétisme généralisé, la
pauvreté, l'inexistence du sens de l'écoute et la gabegie sont
actuellement des dysfonctionnements de la démocratie dans le contexte
malgache.
PARTIE III :
ELARGISSEMENT DE L'HORIZON DE
REFLEXIONS
Cette dernière partie de l'étude s'attachera
à élargir notre réflexion pour avoir une vision de
perspective face à la problématique démocratique du pays.
Nous avons constaté que la pratique démocratique malgache souffre
d'une crise institutionnelle et une crise de représentativité.
Nous avons montré aussi que le système manque d'un activisme
politique, une culture discursive institutionnelle à cause de la
monopolisation du pouvoir et une réduction des débats à
des solutions éphémères et transitoires selon les
circonstances historiques. Les minorités dirigeantes ont profité
du dysfonctionnement structurel, ils ont utilisé le pouvoir pour
fructifier leurs affaires personnelles. Le contrôle des ressources par
une minorité d'Etat crée une inégalité source de
tension sociale et de misère profonde.
La démocratie malgache doit être aussi
appréhendée par le changement apporté par le contexte de
la mondialisation et de la globalisation. La démocratie qui s'impose
à nous est une version libérale qui par sa logique de
marché pilotée par la liberté d'entreprendre est une
source d'inégalité et d'exclusion sociale.
Pourtant proposer des perspectives concernant le
problème de la démocratie dans le contexte malgache est une
entreprise difficile qui nécessite un travail de longue haleine. Nous
devons tenir compte des facteurs culturels, sociaux, politiques, pour que le
système réponde à la totalité organique selon le
langage de Malinowski. Pour cette raison nous limiterons notre étude
à dégager quelques points saillants susceptibles d'ouvrir une
vision de perspective.
CHAPITRE VI : ELARGISSEMENT DE LA REFLEXION
La démocratie exige la participation de la population
dans le processus de décision collective. En effet, le culte de
participation se sera pas réductible au moment du vote électoral,
mais engage une grande part du temps de la population pour afin de rendre
effectif ses implications dans la pratique. Toutefois nous avons
expliqué que cette participation est handicapée par plusieurs
facteurs. Le présent chapitre va essayer de compléter les autres
problèmes que rencontre la pratique démocratique dans le contexte
malgache.
VI.1. A l'heure du bilan
VI.1.1. Une démocratie de
façade
La tentative de la mise en place de la démocratie
structurelle dans le pays n'a pas obtenu le résultat escompté. Si
on regarde la structure du pouvoir dans le pays, nous dirions que Madagascar
est un pays démocratique. La séparation du pouvoir est
installée, le multipartisme gagne du terrain, la société
civile se développe, la presse commence à s'épanouir, la
décentralisation est une préoccupation de chaque homme qui arrive
au pouvoir, l'élection n'est pas absente. Mais lorsqu'il s'agit de voir
le fonctionnement de l'une de ses institutions, nous sommes loin du
processus.
L'échec de tentative de démocratisation du pays
revient aux bailleurs de fonds car il ne s'agit pas d'une véritable
démocratie mais l'ouverture du pays dans l'économie de
marché et surtout le maintien de la dépendance du pays à
l'égard des bailleurs. La conditionnalité économique avait
imposé un réalisme politique. L'illusion est de faire croire que
l'engagement du pays vers la démocratisation peut mener vers le
développement. Il s'agit tout simplement d'une démocratie
formelle pour espérer avoir le salut économique des bailleurs.
L'idée de Touraine mérite d'être signalée sur ce
point ou le mot démocratie est souvent employé comme synonyme
d'économie de marché ou de civilisation occidentale amis il est
vide de sens38. Le système mondial prône le
développement de la démocratie alors que dans la pratique il
s'auto érige en frein à celle-ci. Les mesures prises de
développement et de démocratisation sont à visage unique
sans prises en compte du contexte historique et des aspirations des pays. Le
système mondial ne donne pas de place aux pauvres dans laquelle, ils
auront un mot à dire concernant les mesures de redressement mondial. Ce
système n'accepte pas un véritable débat
démocratique.
38 Touraine (A.), Qu'est ce que la
démocratie, éd. Fayard. 1994.
Le rétrécissement de l'Etat exigé par le
programme d'ajustement structurel n'a fait qu'aggraver la situation. L'Etat
n'arrive plus à exécuter normalement sa fonction
régalienne. La logique de la liberté d'entreprendre a
laissé le champ libre aux entreprises privées
étrangères et de l'enrichissement illicite des hommes au pouvoir
qui sont la base de l'inégalité sociale. Les programmes de
développement pour la nouvelle construction de la société
se soldent en échec du fait que ce sont des programmes qui ne s'adaptent
pas à la réalité malgache et ne répondent pas aux
besoins de la population malgache. La conditionnalité
démocratique du XXe siècle n'a fait qu'instaurer une
pauvreté durable et de renforcer l'emprise de l'occident sur le pays.
Actuellement, la dépendance s'accentue qui se reflète par la
dépendance à l'égard des idées en provenance de
l'Occident.
La tentative de la démocratisation dans le pays est
l'oeuvre du mouvement de foule. Ces mouvements de contestataire ont
exprimé un désir de changement, une recherche de la
démocratie. C'est par l'intermédiaire de l'action des foules que
le pays a changé de régime, l'alternance au pouvoir se fait
toujours de façon musclée. Pourtant, ce ne sont que des
mouvements qui ont légitimé l'exclusion sociale des
protestataires. La conséquence est facile à envisager, à
chaque action de foule du pays, la préoccupation première de
l'homme providentiel lorsqu'il arrive au pouvoir est d'élaborer un texte
à sa mesure et le renforcement de sa bureaucratisation afin de pouvoir
régner. Les problèmes de fond des hommes qui l'ont poussé
sur ce pouvoir ne sont jamais débattus et ne font l'objet d'une
discussion quelconque. Le débat démocratique se réduit
à la question doctrinale au lieu de s'attaquer à la recherche de
solutions viables aux problèmes de la vie quotidienne et la
manière dont on gère l'Etat pour mieux préserver et
pérenniser les intérêts. L'homme qui arrive au pouvoir
devient conservatisme et n'admet plus une autre mode de production comme
solution aux contradictions que sa domination produit selon Marx. Les hommes
mobilisés pour la réalisation de la démocratie
éprouvent de déception parce que la démocratie telle
qu'ils l'avaient inculquée et sublimée ne correspond pas à
l'idée qu'ils s'en faisaient.
VI.1.2. Un Etat démocratique improductif
L'Etat est un mal nécessaire dans le contexte malgache.
En effet, après le désengagement de l'Etat du secteur productif,
le rôle de l'Etat est limité à offrir des services de bases
comme l'éducation, la santé, la construction de l'infrastructure
publique. Pourtant l'Etat n'arrive pas à remplir ses fonctions de bases.
L'accès de la population à ces droits est difficile du fait qu'il
n'y pas de moyen pour s'investir. A titre illustratif, il est un droit de
l'enfant d'aller à l'école toutefois l'accès à ce
droit est problème parce que les parents n'ont pas de travail de payer
la scolarisation de leurs enfants. Ce circuit se reproduit à chaque fois
qu'on prend un cas que ce soit dans la santé, ou dans d'autre domaine du
service public. A cela s'ajoute la corruption qui
gangrène le service public ou tout est payé sans
norme. Les faiblesses structurelles de l'appareil étatique conduisent
une immoralité de ceux qui occupent des postes de
responsabilités.
L'Etat au lieu d'être le protecteur est une source
d'exclusion sociale. Les hommes au pouvoir n'ont d'autre but que de s'enrichir
et de gérer un système défaillant. Les hommes politiques
se comportent comme un gestionnaire qui ne fait qu'encaisser des revenus et de
maximiser les profits. L'existence politique se résume en une question
comment se maintenir au pouvoir et le plus longtemps possible à tout
prix.
La conséquence devient cruciale à cause de la
dépendance du pays à l'étranger. La politique est
financée par les étrangers et les programmes pour espérer
sortir de la pauvreté sont des programmes formatés à
l'étranger qui ne répondent pas aux besoins de la population.
L'Etat est réduit en une machine distributeur des bons vouloirs des
étrangers, un Etat d'urgence.
Au niveau de l'application de la loi, la loi est
confectionnée sur fond de rationalité européenne alors que
les malgaches sont habitués à résoudre des
différends par l'attachement aux valeurs coutumières à
savoir le « fihavanana », le principe de la moralité
collective autour du dina. Le problème devient difficile avec
l'analphabétisme de la population. La loi est rédigée en
français entravant ainsi la compréhension des règles qui
régissent la société. En outre, l'absence des institutions
qui informent les citoyens concernant les lois ne fait qu'accentuer
l'incivisme.
VI.1.3. de la mauvaise gouvernance
Malgré les reformes déployées, la
gouvernance reste un grand défi pour les malgaches. La plupart des
reformes de la gouvernance ont été en définitive
renforcé le pouvoir central. Le système de gouvernance à
Madagascar se caractérise par se caractérise par le
clientélisme. Le changement de l'exécutif que ce soit au terme de
l'élection, à l'issue d'un mouvement social ou au moyen de coup
d'Etat, n'entraîne pas un effondrement de l'Etat. Il se traduit
simplement par une rupture avec la situation existante et par la
création d'une situation nouvelle. L'analyse permet de constater que si
les présidents ont fait des reformes, ils les ont fait à leur
profit et ses prébendes et non au profit d'une bonne gouvernance. Les
institutions, y compris, celles chargées d'exercer un contrôle sur
l'exécutif, agissent en fonction de l'orientation des leaders politiques
au lieu de suivre une orientation institutionnelle. Le système
administratif est voué à l'échec car au nom de la
politique tout est permis, les détournements de fonds publics, la
corruption qui gangrène l'administration où tout est
monnayé sans norme, l'enrichissement illicite. L'état de
gouvernance se résume en une personnification du pouvoir autour d'un
individu au détriment de l'image de l'Etat, corruption
généralisée, et combine politicienne visant avant tout les
arrangements du pouvoir. Les
politiciens se contentent de s'attribuer les postes les mieux
payés dans le plus grand amateurisme politique puis tentent de se
maintenir au pouvoir à perpétuer. Ils produisent le même
schéma de gouvernance dont ils profitent. On assiste au pillage des
ressources du pays, à la négation des problèmes de fond du
pays, à la mise en scène politique, une machine administrative
corrompue.
Par ailleurs, l'injonction de la bonne gouvernance dans le
pays se situe dans la ligne évolutive du développement. Elle
n'est qu'un prétexte d'identification d'éléments
permettant d'expliquer l'échec du programme d'ajustement structurel.
L'analyse des bailleurs est pointée dans le diagnostic des facteurs et
dysfonctionnements internes (pas de transparence, corruption, etc.). L'action
gouvernementale est pilotée par des programmes sociaux, politiques, et
économiques financés par les bailleurs de fonds. A l'appui de ce
propos, on peut dire par exemple le DSRP, le projet ambitieux du MAP visant
l'éradication de la pauvreté en 2015. Là encore nous
sommes loin du développement, la pauvreté règne en
maître.
Si la gouvernance du pays est dominée par un homme et
de ses équipes, il faut reconnaître aussi que le militaire joue
des rôles prépondérants dans le champ politique malgache.
Comme nous l'avons souligné précédemment, la
première expérience des militaires au pouvoir a eu lieu en 1972.
A partir de cette année, la militarisation de la vie nationale a
commencé à affecter la vie nationale et à contaminer
progressivement les plus hautes fonctions gouvernementales. Les militaires ont
occupé et continuent à occuper toutes sortes de postes
ministériels variés à savoir l'élevage,
l'environnement, lesquels ne semblent pas relever de leur compétence.
Comme dans toutes les armées du monde, les militaires malgaches sont
soumis à un code d'éthique et qu'ils ont un statut spécial
leur imposant des obligations spécifiques ainsi que des devoirs
particulières, d'obéissance hiérarchique et de service
stricte. Constitutionnellement, le président de la république est
le chef suprême de l'armée, en effet, chaque chef d'Etat a
abusé de ce prorogatif pour multiplier les nominations et les promotions
d'officiers généraux. La nomination à un poste politique
ou gouvernementale devient un moyen de remonter le grade tout en oubliant que
la fonction de ministre est par définition éminemment politique.
Ce dysfonctionnement de la nomination à des postes gouvernementales ne
fait qu'engendrer une instabilité du champ politique malgache.
Dans le même esprit, on reconnaît que la raison
d'être de l'armée est de défendre le territoire national de
toute intervention ou menace étrangère, il incombe aux force de
l'ordre de maintenir la paix publique dans le cadre de l'exercice par les
citoyens de leur droit constitutionnel en protégeant la
sécurité et l'intégrité physique de la population y
compris
celle des manifestants. Pourtant, on assiste à l'inverse
de la théorie dans la pratique, l'armée est devenue des forces
répressives et protectrices du pouvoir en place.
VI.2. L'incohérence de la formation sociale
Nous avons posé au début de travail que la
société est composée de trois niveaux d'instance, les
instances idéologiques, les instances politiques juridiques et les
instances économiques. Cette matrice de société nous
permet de reconnaître le dysfonctionnement de la démocratie dans
le contexte malgache.
VI.2.1. Contradiction entre mode de
production
Le projet économique libéral qui repose sur la
liberté d'entreprendre ou l'initiative individuelle est contradictoire
avec le monde économique malgache qui se base sur la production
collective. En effet, la production est distribuée entre les membres des
familles, des proches, et ce à partir d'une base de la parenté.
Au moment de l'introduction de la libéralisation du pays, le pays n'est
pas encore prêt à accepter les initiatives individuelles, et les
investissements nationaux sont laissés de côté en
remplaçant par des investissements étrangers.
Les détenteurs du pouvoir ont utilisé leur
position pour prendre le contrôle de secteurs importants en leur nom
personnel ou par l'intermédiaire de leur famille ou de leurs
réseaux de clientélisme. Le président qui se
succède dans le pays reproduit toujours ce schéma. La
monopolisation de l'économie par le pouvoir en place explique la
décadence économique du pays et l'inégalité de la
redistribution de la richesse dans le pays39.
VI.2.2. Distorsion entre système politique et
idéologie
La contradiction existe aussi au niveau de l'organisation
politique. En effet le pays fonctionne actuellement avec la république
ou le président est élu par l'intermédiaire de
l'élection. Or, une grande majeure partie de la population se comporte
en sujet du roi mais non pas en citoyen. Cette situation se reflète
d'abord par les résultats du referendum organisé dans le pays ou
l'on assiste au culte du oui. Les populations ignorent leurs rôles dans
une vie démocratique d'où les interrogations sur la signification
réelle de ces suffrages universels qui provoquent toujours des crises
importantes.
La contradiction vient également au niveau culturel, en
effet, l'homme malgache se caractérise par son obéissance au
groupe social, l'homme malgache agit en fonction des rapports
hiérarchiques entre les groupes d'âges et le groupe de
parenté. Le respect absolu des détenteurs de l'autorité
morale constitue une norme sévère du comportement des
malgaches.
39 Entretien individuel avec Serge Zafimahova.
Les transgressions des normes sociales provoquent le «
tsiny ». Ce comportement autorégulé enlève de
spontanéité aux débats publics et surtout aborde rarement
le fond du problème. Le comportement est soumis aux règles
hiérarchiques, il n'existe pas vraiment de liberté individuelle
en dehors du groupe social. La société malgache est fondée
sur le principe de soumission, la soumission de l'individu au groupe,
soumission des moins âgés aux plus âgés. Cette
pratique culturelle s'illustre par des proverbes comme « tsy misy
raiamandreny hanolobato mafana ny zanany » et « ny
tenin-draiamandreny toy tsipakom-balahy mahavoa mahafaty, tsy mahavoa
mahafanina ». Qui se traduisent littéralement « aucun parent
ne donnerait une pierre brulante à ses enfants » et « les
conseils d'un parent sont comme une ruade de zébu, s'ils vous
atteignent, ils vous tuent, sinon vous êtes sonné ».
Au niveau politique ce langage se traduit par le rapport entre
les hommes politiques et le peuple. Entre les hommes politiques c'est la
démocratie et avec les peuples c'est l'infantilisation. Les gouvernants
savent ce qui est bon pour le peuple et les parents ont toujours raison. Mais
l'histoire a montré que lorsque l'infantilisation atteint un
degré, le peuple va appeler les dirigeants à descendre avec eux
sur la rue. Nous revenons ici à l'idée selon laquelle la
démocratie ne peut exister que dans une attitude qui est prête
à se remettre en question c'est-à-dire accepté une
démocratie où chacun peut exprimer librement mais surtout
être écouté. Cette instrumentalisation de position
hiérarchique est contradictoire avec la philosophie mettant en valeur la
communication consensuelle « ny marimaritra iraisana »
c'est-à-dire le compromis entre les interlocuteurs. De surcroît,
les politiciens n'arrivent pas à comprendre que les malgaches ont une
culture qui dit « aleo alan'andriana toy izay alambahoaka » qui se
traduit littéralement il vaut mieux être haï par les nobles
que par les peuples.
L'Etat lui-même est conçu comme un régime
monarchique. Chaque président arrivé au pouvoir est
incontesté, sacré, il construit un pouvoir personnel et familial,
et de ses pleins pouvoirs il abuse tout et ne pense jamais quitter le pouvoir
qu'à coup de force.
Le champ politique malgache est confondu entre traditionnelle
et moderne, les classes politiques instrumentalisent la valeur traditionnelle
malgache telle que le « fihavanana » lorsqu'ils veulent arranger le
pouvoir entre eux, on met en avant la vertu du « ady hevitra »,
débat ou discussion. On rappelle que les malgaches sont des grandes
familles, et que les problèmes doivent être résolus en
privilégiant la concertation, la discussion. Cette pratique sert
à évacuer le problème et non pas à les
résoudre à tel point que à chaque moment fort du pays on
assiste à la foire d'empoigne. La stabilité politique du pays
repose sur l'intégration des opposants dans l'appareil étatique
là ou il y a mutisme.
VI.3. La persistance des inégalités
sociales
L'intuition tocquevillienne selon la laquelle la
démocratie consiste en une égalisation de condition est encore
difficile dans le contexte malgache. Dans la constitution les citoyens se
trouvent sur un même pied d'égalité ou tout citoyen peut
jouir de ses droits. Pourtant dans la réalité les
inégalités sociales persistent.
VI.3.1. L'exclusion sociale
L'exclusion sociale apparaît le signal de la crise
démocratique malgache. L'exclusion sociale n'est pas uniquement
politique mais aussi une exclusion sociale. Malgré les efforts
déployés par les organismes qui s'opèrent dans la lutte
contre les inégalités sociales force est de constater que la
pauvreté prend une proportion inquiétante. Le dernier rapport de
l'EPM 2010 a montré que 56,5 % de la population vit dans une
pauvreté extrême. Pour ce qui est de l'inégalité les
10 % des plus riches consomment 5,4 fois plus que les 10 % des plus pauvres. Le
revenu quotidien d'un ménage s'élève à moins de 2
dollars par jour.
Le taux de chômage est de 3,8 %. Ce sont les jeunes
actifs âgés de 25 ans qui rencontrent le plus de difficulté
à s'insérer sur le marché de travail. Le taux de
chômage est de 5,9% pour ce groupe d'âge. A cela s'ajoute
l'exclusion des femmes dans le système éducatif40.
L'exclusion sociale ne se limite pas seulement à l'incapacité de
l'Etat à accomplir ses rôles. Elle est également le produit
d'une crise politique qui asphyxie la vie économique du pays. La crise
politique a entraîné des effets pervers sur la vie de la
population en générale. Prenons un exemple le contexte de la
crise 2009 ou l'on a vu des plusieurs personnes perdre leurs emplois. Le
recours au secteur informel reste le seul moyen pour survivre.
L'insécurité et la violence dans le pays, l'augmentation de
l'analphabétisme.
Ces appréciations quantitatives nous servent
d'illustration pour dire que l'accélération de
l'inégalité sociale inhibe à une culture de
responsabilité et de participation indispensable à la
démocratie.
VI.3.2. L'impact de la mondialisation
Dans la perspective d'un village planétaire
véhiculé par le phénomène de la mondialisation et
de la globalisation, l'emprise des pays du Nord sur le sud se raffermit. La
mondialisation véhicule une idéologie qui déconnecte la
réalité sociale malgache. Actuellement, l'essor fulgurant de la
nouvelle technologie et de la communication accentue les
inégalités sociales. La démocratisation des TIC dresse une
barrière sociale rigide notamment entre les personnes formées et
la grande majorité non formée. Les groupes sociaux les moins
préparés pour
40 Enquêtes périodiques auprès
des ménages 2010.
comprendre et utiliser les nouvelles technologies sont
considérés comme des espèces inaptes. La nouvelle
technologie est en train de créer une humanité à deux
vitesses, on assiste à un apartheid social. Dans le monde
économique, la démocratie libérale a transformé le
pays en économie nationale non viable. L'impact de la
libéralisation est aussi visible sur le plan culturel, on assiste
à la perte de l'identité, de fracture sociale. Plus le pays veut
rattraper l'Occident plus il s'appauvrit.
L'impact de la mondialisation se traduit aussi par la
domination politique. Actuellement, les occidentaux et les bailleurs de fonds
imposent aux pays une modèle d'organisation politique. La diffusion de
cette forme d'organisation politique s'est effectuée par
l'intermédiaire de toute sorte ingénierie constitutionnelle.
L'imposition du modèle politique est le produit de pressions explicites.
Les bailleurs de fonds par le biais de la conditionnalité
démocratique ont favorisé l'exportation des modèles
d'organisation politique comme l'Etat de droit, la bonne gouvernance bien que
leur statut exige une interdiction de toute immixtion dans les affaires
étrangères. Les bailleurs de fonds ont exigé la
nécessité des institutions publiques efficaces pour accompagner
le développement économique. Les bailleurs de fonds ne donnent
pas leurs argents qu'au nom de la bonne gouvernance et de l'Etat de droit donc
de la démocratie. Les bailleurs de fonds n'hésitent pas à
utiliser leur force pour imposer la démocratie, l'Etat de droit, la
bonne gouvernance. Si dans d'autre pays, la démocratie est un instrument
de légitimation du recours à la force, force est de constater que
dans le cas de Madagascar, l'économie de marché est devenue la
contrainte absolue de la politique. La démocratie devient ainsi un
vecteur de domination. La démocratie devient une arme au service de la
puissance. La question de reconnaissance internationale est un exemple
convaincant pour illustrer ce propos.
La pratique de gouvernance mondialisée a
provoqué aussi un impact dans l'administration. En effet, les buts
proposés par les différentes reformes administratives sont
l'orientation d'une gestion publique suivant le style de gestion de
l'entreprise privée. La gratuité des services publics n'est plus
à l'ordre du jour. Des hommes qui sont habituées à la
politique d'assisté ont du mal à inculquer rapidement un tel
changement d'autant plus qu'il n'existe pas de préparation pour passer
à ce changement. Non seulement il n'y a pas de préparation mais
les inégalités règnent en maître.
CHAPITRE VII : APPROCHE PERSPECTIVE
Le dernier chapitre du travail consiste à proposer des
perspectives de réflexion concernant le dynamisme de la politique et de
la démocratie malgache. Le chapitre relève d'une réflexion
personnelle. Nous reconnaissons que la reconstruction de la
société ne fait pas du jour au lendemain, elle nécessite
une grande participation de toutes les parties prenantes. En ce qui nous
concerne, nous efforcerons de limiter à notre domaine de recherche.
VII.2. Pour une démocratie fonctionnelle
La démocratie avec ses structures libérales n'a
pas joué en faveur du peuple censé le lieu du pouvoir politique.
Elle a profité d'une minorité de personne au pouvoir et de ses
réseaux de clientélisme. A ce titre il convient de concevoir une
démocratie fonctionnelle c'est-à-dire productrice d'idée.
Pourtant, avancer des perspectives est facile pratiquer serait difficile
surtout lorsqu'on pose la question « qui vont les exécuter, par
où commencer, agir et comment ». La difficulté est de taille
surtout dans une société dominée par hybridation de
moderne et de traditionnelle. La modernité impose la mondialisation de
pratique sociale et le traditionalisme est le reflet de la résistance,
l'expression d'une revendication ou selon le langage de Balandier « le
conservatoire d'identité ».
La société modèle ou le modèle de
société ça n'existe pas. La démocratie telle que
nous l'avons pratiqué est une démocratie structurelle
vidée de son sens et de son contenu et a laquelle le débat
démocratique est assujetti au questionnement du fonctionnement de
l'appareil étatique mais jamais une discussion concernant les
problèmes de fond de la population considérée comme le
lieu du pouvoir politique.
VII.2.1. Remettre en question le
multipartisme
La société démocratique a placé au
son centre l'idée de conflit, de la division, elle a permis que
s'exprime l'antagonisme des passions. Encore aujourd'hui ce sont dans les
sociétés démocratiques que s'expriment avec plus de force
des discussions sur les fondements des liens sociaux à travers la
définition des rapports hommes femmes, l'interrogation sur la vie. La
démocratie doit plutôt être saisie comme une attitude de
questionnement face à l'organisation sociale. Nous estimons qu'une
démocratie saine ne peut être instaurée que dans une
culture qui est prête à se remettre continuellement en question. A
ce propos, nous tenons à signaler quelques points.
D'abord autour du multipartisme, ce n'est pas la
multiplicité de l'organisation aussi démocratique qui fait la
démocratie et encore moins la citoyenneté. Ce n'est pas au nom de
la liberté d'association qu'on construit la démocratie. La
pratique démocratique ne se limite pas
à l'existence d'une structure purement formelle, il
convient avant tout de savoir elles sont des organisations au service de quoi
et de qui. Certes, des efforts ont été déployés
pour la reconstruction des partis politiques à Madagascar mais il n'y
pas d'application. A l'appui de ce propos on peut dire par exemple les
différentes propositions concernant les lois des partis politiques dans
le pays. En novembre 2006 il y avait une proposition de loi portant sur le
statut de l'opposition. En décembre 2008, on a tenu dans le pays le
focus sur les lois sur les partis politiques à l'hôtel panorama.
Le plan de projet de loi sur les partis politiques par le ministère de
la décentralisation et le ministère de l'intérieur en
2008.
Vouloir reconstruire les partis politiques ne se borne pas
à produire des textes juridiques il s'agit de voir les avantages, les
limites, les faisabilités au regard de l'évolution morale et
technique de la collectivité humaine. Un parti politique doit être
une structure représentable des intérêts nationaux. Il doit
être présent dans tous les territoires malgaches oeuvrant pour la
défense du bien commun, l'éducation des masses à la
démocratie et à l'évolution du monde. Pourquoi se fait-il
que dans le pays il n'existe pas des partis politiques qui
réfléchissent sur ce qu'est l'avenir de la nation en
matière environnementale, la politique de l'emploi, de
l'éducation, et surtout le processus de la mondialisation dans lequel le
problème de Madagascar s'oscille que ce soit économique,
culturel, et politique.
L'une des pesanteurs que les partis politiques doivent faire
face actuellement est le désintéressement de la population
à la chose politique surtout les femmes et les non
éduqués. Le problème de politique de notre recouvre une
dimension personnelle considérable c'est la passivité des
citoyens, leur indifférence allant jusqu'à l'ignorance de la
réalité politique, sociale et économique. La
conscientisation de population est une difficulté de taille dans un
contexte où il n'existe pas des acteurs politiques crédibles. Une
difficulté aussi dans la mesure où la population est
déçue par une politique démagogique, une machine
administrative corrompue même s'il y a des volontés des acteurs,
les populations ne vont pas croire facilement.
Les partis doivent favoriser les productions d'idées,
un cercle de réflexion proposant des alternatives nationales au
problème du pays. Une structure qui classifie les partis politiques est
nécessaire permettant de ranger les partis au sein d'une
idéologie et programme commun. Dans ce cadre, il appartient à
l'Etat de résoudre les problèmes des partis politiques concernant
le financement à condition que les partis remplissent les
critères dignes d'un parti. Les partis politiques doivent constituer un
effort considérable dans l'éducation citoyenne de la population
car on s'achemine vers l'atmosphère d'incivisme en raison de la
méconnaissance des droits et des devoirs d'une grande majeure partie de
la population. Cette disposition reste utopique s'il n'existe pas d'une
volonté politique capable de rompre avec la politique
politicienne car l'incivisme ne résulte pas seulement de
la méconnaissance des droits mais également de l'injustice et la
difficulté à jouir de ces droits.
VII.2.2. La place de la société civile
En ce qui concerne la société civile, nous avons
souligné qu'elle ne gagne pas la confiance des gouvernements en place.
Leurs actions sont invisibles aux yeux de la population. Elle ne dispose pas de
projet de société capable de combler le vide réflexif
qu'entretiennent les partis politiques.
Néanmoins, des actions ont été
réalisées malgré les pressions du pouvoir en place. Pour
illustrer cette affirmation la SEFAFI publie des articles par presse pour
éclairer l'opinion sur les problèmes de la nation. Le groupement
Friedrich a déployé des efforts dans l'éducation sur la
démocratie par l'organisation des ateliers, par l'organisation des
conférences des débats télévisés mais qui
reste encore l'apanage des cercles des lettrés. En outre, il est
intéressant de signaler que des sociétés civiles comme le
KMF/CNOE déploient des efforts dans l'éducation politique de la
population à savoir l'éducation électorale, la
socialisation politique concernant les atouts et les faiblesses des formes de
régime politique. Non seulement cette société civile joue
des rôles importants dans l'éducation citoyenne, mais aussi elle
supervise le déroulement des élections dans le pays, propose des
solutions et des idées en matières de code électoral. Par
sa couverture nationale et son partenariat avec les autres
sociétés civiles, depuis 1995 elle multiplie des actions de
sensibilisation en matière de bonne gouvernance, la protection de
l'environnement, la lutte contre la corruption. L'action de sensibilisation se
caractérise par la publication des affiches, les émissions
télévisées la production des éditions ou des
manuels.
La tâche de la société civile dans la
pratique démocratique est importante. La société civile
doit se constituer en force pour préserver les intérêts du
pays. Il est étonnant de constater que pendant la période
d'accalmie, la réflexion en provenance des nationaux est absente sur la
place publique et on vit des théories vouées à
l'échec des bailleurs de fonds et de leurs politiques de domination. La
société civile dans le pays est active à chaque moment
fort du pays. Elle n'est que de simple médiateur de règlement des
différends des protagonistes politiques. Mais l'histoire nous a
montré que le problème de fond de ce pays ne peut pas se
résoudre à un moment critique de l'histoire. Tant que le
débat est réduit aux arrangements du pouvoir, et aux calculs de
l'intérêt. Le pays connaîtra une instabilité
politique.
Ce que nous voulons en venir est que le refus de débat
démocratique contradictoire ne fait que biaiser la démocratie.
L'insuffisance de débat entre société civile nationale et
pouvoir en place explique notre échec. Dès que le débat
est interdit par le pouvoir en place, il ne saurait y avoir de prise de
décision capable de satisfaire les besoins de la collectivité car
c'est par l'intermédiaire de la société civile que l'on
peut adopter une culture de participation. Une
discussion entre société civile et pouvoir
étatique doit être un exercice permanent pour combler le manque de
discussion au niveau parlementaire. Il n'y pas de démocratie sans la
reconnaissance d'un champ politique où s'expriment les conflits sociaux
et ou se prennent par un vote majoritaire des décisions reconnues comme
légitimes par l'ensemble de la société. Là ou le
gouvernement est ouvert et rend compte de ses actes, il est possible
d'identifier les politiques néfastes et d'en débattre
publiquement, de surveiller l'usage fait des fonds publics.
Le rôle de la société civile doit
être redéfini pour que la véritable démocratie se
réalise dans le pays. Il s'agit de concevoir un cadre légal de
l'exercice des rôles de la société civile dans un
régime supposé de démocratie. C'est une obligation du
pouvoir étatique de faciliter les moyens de promotion de la
société civile afin qu'elle puisse accomplir leurs
rôles.
Un Etat qui se veut démocratique assure la promotion de
la société civile dans le contrôle de l'appareil politique.
Il doit donner à la société civile les moyens d'exercer un
contrôle direct sur certaines activités de l'Etat. Par exemple, la
surveillance des élections, la participation à
l'élaboration avec le pouvoir en place des politiques sociales et
économiques tout en tenant compte de la réalité
malgache.
La société civile ne peut exister sans une
population qui à la volonté et la capacité d'en
défendre les valeurs et les institutions. Dans cette perspective
l'éducation est indispensable, elle donne aux citoyens la
capacité de développer la société civile. John
Dewey avait souligné sur ce point que « les écoles ne font
pas et ne peuvent pas faire ce que les gens veulent tant que la
communauté n'a pas conscience plus coordonnée et plus
précise des ses propres besoins, mais il appartient à
l'école de promouvoir cette conception, d'aider les gens à avoir
une idée plus claire systématique de leurs besoins et de la
manière de les satisfaire »41 l'absence de l'éducation est
probablement la cause principale de l'apathie et de l'indifférence de la
société. Il y aura toujours une perversion de la
démocratie si les citoyens ne réagissent pas aux méthodes
de gouvernement. L'engagement de la société civile est
indispensable pour protéger les intérêts collectifs.
Dans ce cadre la société civile doit
déployer des efforts considérables à l'éducation
des citoyens non seulement au changement de la mentalité mais aussi par
la socialisation des citoyens afin de s'intégrer dans le processus. Une
culture civique se repose sur la mobilisation à l'activisme politique
à l'égard de la chose politique. Cependant, la
société civile seule ne peut pas effectuer ce travail
d'éducation. Il s'agit de toutes les parties prenantes comme la famille,
l'école, les fokontany, les communes etc. à ce titre
toutes les institutions concourent à la réalisation de
l'éducation de la société à la démocratie, a
titre illustratif il serait facile pour les citoyens d'afficher les droits
qu'ils disposent en matière d'élection dans le
fokontany.
41 Dewey (J.), Démocratie et
éducation, Armand colin, 1975-1990 p. 22.
VII.2.3. La démocratie de
proximité
Si la participation sociale constitue une réponse
adéquate à la crise du gouvernement représentatif. La
décentralisation apparaît le moyen nécessaire pour pouvoir
la pratiquer. Nous tenons à souligner que le pays avait
déployé des efforts en matière de décentralisation.
Cette volonté de décentraliser n'est pas nouvelle que ce soit du
temps du royaume, de la colonisation ou celle de la république
successive. Elle est marquée par la volonté du pouvoir
étatique des cadres légaux par la constitution ou par des
documents énonçant la politique nationale de
décentralisation.
Pourtant, elle n'est jamais efficace en raison de
l'insuffisance des moyens, de l'indifférence de la population,
dissimulation à des intérêts politiques, une politique
d'assistanat et malgré les différentes épisodes de la
décentralisation, on n'hésite pas affirmer que Madagascar est un
pays centralisé. Chaque régime qui se succède dans le pays
a inauguré une décentralisation à sa guise et ses profits
personnels pour consolider le pouvoir. Si dans l'esprit, la
décentralisation permet la participation sociale de la population, il
faut affirmer que dans la pratique l'écart est considérable. Elle
n'est jamais discutée dans toutes les dimensions de la
société.
La démocratie de proximité exige un renversement
de la pyramide du pouvoir. Le pouvoir doit être là ou le peuple
vit et produit le social. Sans supprimer le pouvoir central, les divers
pouvoirs locaux peuvent participer à ses décisions. Dans ce cadre
elle exige une négociation de statut avec le pouvoir central
définissant le niveau de compétence et l'autonomie de chaque
collectivité. Il s'agit de concevoir une démocratie locale
donnant le maximum de l'initiative citoyenne. En effet, un problème
crucial que l'on ne traite pas de fond est la responsabilité des
citoyens dans la décentralisation. S'agit-il tout simplement de
groupements d'individu constitués en force délibérative
des idées préconçues en haut ou vontils contribuer
réellement à l'élaboration des décisions qui leurs
concernent. Nous pensons qu'une décentralisation doit tenir compte de la
participation de la population dans la conception, l'élaboration, et
l'exécution des programmes politiques qui touchent chaque
collectivité.
Une démocratie de proximité nécessite un
transfert de ressource durable et une utilisation rationnelle des ressources.
La collectivité doit développer l'esprit de création et de
concevoir un programme issu d'une délibération collective. Dans
ce cas, chacun a le droit de décider de tout ce qui touche les formes de
vie sociale comme la culture, les institutions, voir même
l'économie.
VI.2.4. Le rôle de l'Etat
Actuellement, les malgaches vivent dans une pauvreté
inquiétante donc il appartient à l'Etat de corriger les
inégalités sociales qui constituent un dysfonctionnement à
la pratique démocratique. Il convient de remarquer que la
citoyenneté est définie par un droit, à ce titre l'Etat
est le garant de la liberté de chacun pour qu'il puisse jouir
véritablement de ses droits. À notre sens, l'obligation
première est de concevoir une loi qui s'adapte à la
réalité malgache mais surtout à l'évolution de la
mentalité de la population dans le contexte mondialisé. La loi
doit s'appliquer pour tout le monde qu'aux citoyens qu'aux politiciens. Dans un
régime démocratique, le dernier mot revient à la loi mais
non pas à la politique. Le raisonnement qui consiste à dire c'est
la loi il n'y a rien à faire qui renferme tout discussion est
antidémocratique. La loi n'est pas absolue. Elle constitue la
règle et rien ne dit que la règle ne peut pas être
modifiée. Cette discussion concernant la loi est une entreprise
chimérique s'il n'y pas d'institution parlementaire représentant
la population et qui n'est pas assujettie au gré de
l'exécutif.
La lutte pour l'inégalité est complexe car une
société ne sera jamais égale, il y aura toujours une
position hiérarchique, et même l'inégalité prend
diverse source à savoir économique, social, culturel. Pourtant,
il n'y a pas de sens à parler de démocratie dans un Etat ou
pauvre ne cesse de devenir pauvre. Faudrait-il rappeler que pour de Tocqueville
la démocratie est une lutte incessante à l'égalisation des
conditions. Dans ce cadre, la diminution de l'inégalité passe par
une volonté de l'Etat à appliquer la loi. Par exemple si
l'éducation est un droit donc stipulé par la loi, il appartient
à l'Etat d'exécuter cette loi. L'éducation doit être
au premier plan dans la lutte des inégalités sociales du fait
qu'elle est la source de l'exclusion politique et l'indifférence
à l'égard de la chose publique. Il s'agit de former un être
social, politique, culturel capable de reconnaître sa place et de se
reproduire en société. Ensuite, on aperçoit souvent
l'égalité comme une distribution des richesses. Il revient donc
à l'Etat de promouvoir une distribution équitable des richesses.
Cette situation est difficile à réaliser s'il n'y pas une
volonté étatique de produire des richesses.
En matière d'organisation d'élection, il revient
à l'Etat de promouvoir un environnement à la réalisation
d'une élection crédible. Organiser une élection ne
signifie pas de démocratie si les conditions requises dans lesquelles
l'élection se déroule sont remplies. Il faut repenser
l'architecture juridique et administrative dans l'organisation de
l'élection pour qu'il ait une alternance politique.
CONCLUSION GENERALE
Au terme de cette contribution portant sur l'étude
sociologique de la pratique démocratique malgache, nous avons vu
à partir des exemples historiques que la quête de la
démocratie est l'oeuvre d'une dynamique interne et externe
complémentaire. Au niveau interne, elle est mise en pratique dans le
pays par l'action des mouvements de foule dirigés par une
minorité qui a voulu accéder au pouvoir. L'instrumentalisation du
concept pour les exclus du pouvoir politique est une arme efficace
utilisée par cette minorité.
Elle dissimule les intérêts d'une classe
politique. Les actions de foule pour instaurer la démocratie dans le
pays ne sont que le substitut des intérêts particuliers et les
luttes démocratiques ne sont que des luttes d'intérêts
partisans maquillés de luttes d'intérêts
généraux. Dans sa vérité objective, elle n'est
autre chose qu'un espace de constitution d'une classe politique qui n'aurait
d'autre but que son propre pouvoir et l'enrichissement personnel. Le peuple,
qui est théoriquement le lieu du pouvoir politique, se réduit
à une simple force légitimante.
La mobilisation des instruments d'analyse nous a permis de
voir le fonctionnement, le dysfonctionnement et la contradiction de la pratique
de la démocratie dans le contexte malgache. Nous avons montré que
les institutions matérialisant la participation citoyenne de la
démocratie rencontrent des problèmes. L'organisation des
élections comme moyen pour instaurer la démocratie souffre de
crédibilité et devient une source de conflit sociopolitique
à répétition. L'élection est devenue une exclusion
sociale du fait que le minimum de conditions requises pour préparer une
élection crédible n'est pas rempli à savoir la liste
électorale.
L'exclusion de la population ne vient pas seulement du
problème administratif mais aussi de la méconnaissance de la
population de ses droits. Les déterminismes sociaux empêchent
l'individu d'exercer ses droits politiques et civils. Nous avons insisté
aussi sur le dysfonctionnement des institutions relais entre le peuple et le
pouvoir étatique. Nous nous sommes évertués à
comprendre les rôles des acteurs essentiels de la démocratie
à savoir les partis politiques et les sociétés civiles. En
effet, les partis politiques dans l'état actuel des choses ne sont que
des machines de recyclage des personnels politiques dont le système
démocratique a besoin pour fonctionner. Ils ne jouent pas les
rôles qui leur incombent. La prolifération des partis politiques
d'aujourd'hui s'explique par les intérêts portés au pouvoir
comme moyen d'enrichissement et de bénéficier de
l'immunité.
En ce qui concerne la société civile, elle ne
bénéficie pas encore de confiance de la part du pouvoir en place
pour instaurer un véritable débat démocratique. Cette
situation se
reflète par l'absence des alternatives nationales en
laissant le destin du pays par des programmes formatés à
l'étranger et des bailleurs de fonds qui ne font que renforcer la
pauvreté durable.
De nos jours, le processus démocratique est
considéré comme un corollaire de la mondialisation qui s'appuie
sur l'existence virtuelle d'un village planétaire
véhiculé. De ce fait, force est de reconnaître que toute la
pratique démocratique malgache relève d'un concept diffusé
à travers le monde. L'échec du programme d'ajustement structurel
mis en place par les Institutions de Bretton Woods a incité les
bailleurs à imposer une démocratisation de façade en
escamotant le concept par des notions abstraites comme la bonne gouvernance,
l'Etat de droit, le multipartisme et la décentralisation. L'illusion est
de croire qu'en démocratisant, le pays s'achemine vers le
développement. Pourtant, nous sommes loin du résultat attendu. Le
développement tant espéré n'a pas eu lieu.
Il s'agit d'une politique pour inciter le pays à
orienter vers la logique marchande libérale. La conséquence en
est que les dirigeants autochtones en place ont utilisé leur pouvoir
pour accaparer les richesses nationales. L'Etat devient un instrument
d'enrichissement personnel. L'écart entre riche et pauvre s'amplifie
chaque jour davantage. Les marchés mondiaux accentuent les
inégalités sociales. Ils produisent des exclus. Le fait dominant
est la concentration entre les mains d'une poignée de personnes de
toutes les richesses produites.
Avec la mondialisation de la démocratie, le
gouvernement qui ne respecte pas la règle du jeu démocratique est
sanctionné économiquement. C'est l'économie qui dicte les
règles du jeu politique et non l'inverse. Nous constatons que le
résultat du rapport entre pays riche et pays pauvre est dans l'ensemble
négatif. La gestion du pouvoir politique devient une gestion
économique et l'adaptation de la société selon les
règles établis par les étrangers.
L'hypothèse posée au début du travail
semble se vérifier dans la mesure où nous avons montré que
la pratique de la démocratie laisse peu de chance à la population
de prendre part à toute prise de décision commune. Elle est
même source d'exclusion sociale. La démocratie telle que nous
l'avons pratiquée aujourd'hui n'est autre chose que la défense de
l'intérêt des politiciens, d'une classe politique qui veut
régner sur le pays. La tentative de la mise en place de la
démocratie par la rue n'est qu'une lutte politique entre les classes qui
veulent accéder au pouvoir. Les populations mobilisées par ces
mouvements sont manipulées parce que c'est insensé de parler de
démocratie sans la présence de la population.
La quête démocratique n'a fait que profiter les
politiciens et pour mieux préserver leurs intérêts. Les
classes politiques réduisent le débat démocratique
à une question d'ordre juridique et le fonctionnement de l'Etat est
source d'insatisfaction et de l'exclusion sociale. Les institutions ou les
instruments qui sont censés représenter les peuples dans la
sphère de
décision sont stériles. Il en découle une
crise de représentation et un discrédit de la classe
politique.
L'instauration de la démocratie ne se fait pas de jour
au lendemain et elle ne se réduit pas à un moment circonstanciel
de l'histoire du pays. On ne peut pas parler de démocratie à
travers l'organisation d'une élection de façade ou poussée
par un mouvement de foule. La pratique démocratique ne se limite pas
à l'existence des structures purement formelles. De ce constat, nous
avons avancé des propositions constructives et des pistes de
réflexion.
Notre idée est que la démocratie devrait
être un espace de dialogue permanent et franc entre la
société civile et le pouvoir en place. Nous avons
privilégié la société civile comme institution
relais qui devrait mobiliser un débat démocratique avec le
pouvoir. Il s'agit d'un débat démocratique dans le but de trouver
une alternative nationale pour résoudre le problème de fond du
pays. C'est d'ailleurs l'avis du grand sociologue Durkheim lorsqu'il a
affirmé qu'une nation ne peut être maintenue que si entre Etat et
individu s'interpose toute série de groupes secondaires. Les groupes
intermédiaires permettraient d'éviter l'anarchie sociale et de
rapprocher les hommes d'un Etat toujours distant et contraignant. La
société civile n'est pas seulement une organisation relais entre
l'Etat et le peuple mais aussi une organisation oeuvrant pour la défense
des intérêts communs dans toute la dimension de la
société.
Nous avons énuméré aussi que la
démocratie de proximité dans le cadre d'une
décentralisation pourrait être un rempart à la crise de
représentation actuelle. La décentralisation ne saura jamais
effective. Mais il s'agit de voir les atouts et les limites tout en tenant
compte de la réalité sociale. Nous reconnaissons que la grande
difficulté dans laquelle nous assistons à l'heure actuelle est le
comportement apathique de la population à l'égard de la chose
publique. La régression de la participation citoyenne laisse le
champ libre aux politiciens. Un effort doit donc être
déployé dans ce domaine.
Dans le contexte actuel où Madagascar est plongé
dans une crise sociopolitique profonde, le débat sur l'élection
est soulevé comme moyen de sortie de crise. Tout le monde espère
instaurer une démocratie par l'intermédiaire d'une
élection libre, transparente et crédible. L'histoire a
montré qu'une élection mal préparée prend en otage
le pays dans un conflit social. Alors, dans quelle mesure le pays sera-t-il
capable de tenir des élections à même de consolider les
acquis démocratiques assurant une stabilité politique
jalonnée de bonne gouvernance ? L'avenir nous en dira la
réponse.
ELEMENTS BIBLIOGRAPHIQUES
Ouvrages généraux
1. Brechon (P.), Les grands courants de la sociologie,
édition PUG (Presses Universitaires de Grenoble), 2000
2. Claude (R.), Introduction à l'anthropologie,
Collection les fondamentaux, La Bibliothèque de base de
l'étudiant, éd. Hachette supérieure, Paris, 1995
3. Durkheim (E), de la division social du travail,
éd. PUF, 1978
4. Durkheim (E.) : Les règles de la méthode
sociologique, Ed. Flammarion, champ, 1988
5. François (L.), L'anthropologie, Petite
bibliothèque Payot, Paris, 1995
6. Giaccobi (M.), Roux (J.-P.), Initiation à la
sociologie, édition Hatier, collection J. Bremond, Paris, 1990
7. Godelier (M.), Au fondement des sociétés
humaines. Ce que nous apprend l'anthropologie, coll. Bibliothèque
idées, Albin Michel, 2007
8. Gurvitch (G.), La vocation actuelle de la
sociologie, tome 1, éd. PUF, 1968
9. Jean-Paul (C.), Eléments d'anthropologie sociale
et culturelle, Université Libre Bruxelles, 1988
10. Marx, Engels, Lénine, contribution à la
critique de l'économie politique, éd. progrès,
1975
11. Mendras (H.), Eléments de sociologie, Paris,
1978-2001
12. Rocher (G.), Introduction à la sociologie
générale 3. Le changement social», éd. HMH,
Paris, 1968
13. Rocher (G.), Introduction à la sociologie
générale. 2. L'organisation sociale, éd. HMH, Paris
1968.
Ouvrages spécifiques
1. Aron (R.), Démocratie et totalitarisme,
éd. Gallimard, 1965.
2. Bourdieu (P), la représentation politique,
éléments pour une théorie du champ politique, actes de
la recherche en sciences sociales, février - mars 1981.
3. De Rivero (O.), Le mythe du développement,
coll. Enjeux et planète, groupe Cérès productions,
2003
4. Dewey (J.), Démocratie et éducation,
Nouveau Horizons, Armand colin, paris, 1975 et 1990.
5. Diamond (L.), Juan J (L), Seymour Martin (L), Les pays en
développement et l'expérience de la démocratie,
Nouveaux Horizons, 1990
6. Esoavelomandroso (M.) et Feltz (G.),
Démocratie et développement. Mirage ou espoir
raisonnable ? , éd. Omaly sy Anio, 1992.
7. Eyasu (R.), Démocratie en Afrique francophone :
une pire fiction, le cas de la Congo, L'Harmattan, 2010
8. Fukuyama (F.), La fin de l'histoire et le dernier
homme, Flammarion Nouveaux Horizons, 1992
9. Gaxie (D), la démocratie représentative,
Paris, Montchrestien, 2003.
10. Gaxie (D), le cens caché :
inégalité culturelles et ségrégation
politique, Paris, seuil, 1996
11. Gemdeu (X.), Les avatars de l'Etat en Afrique,
éd. Karthala, 1997.
12. Harouna (S.), Les paradoxes de la démocratie.
Sociologie de la théorie et de la pratique démocratique,
L'Harmattan, 2010.
13. Machiavel, le prince, Librairie
Générale Française, 1983
14. Randriamamonjy (F.), Histoire de Madagascar de
1895, 2002, Trano Printy Loterana Malagasy Antananarivo, 2001
15. Rousseau (J.-J.), Du contrat social, Discours sur
les sciences et les arts, discours sur l'origine de l'inégalité
parmi les hommes, Paris, 1973
16. Seguela (J), le vertige des urnes, Paris,
Flammarion, 2000
17. Sfez (L), la politique symbolique, PUF, 1996
18. Spacensky (A.), « Madagascar, 50 ans de vie
politique de Ralaimongo à Tsiranana », nouvelles
éditions latines, 1970.
19. Tchakotine (S), le viol des foules par la propagande
politique, Gallimard, 1992.
20. Tocqueville (A), de la démocratie en
Amérique, éd. Flammarion, 1981
21. Touchard (J.), Histoire des idées
politiques, PUF, 1963.
22. Touraine (A.), Qu'est ce que la démocratie,
éd. Fayard, 1994.s
23. Weber (M), le savant et la politique, UGE,
collection, 10/18, Paris, 2002
24. Zafimahova (S.), Jeu de fanorona autour de la
privatisation. Le désengagement de l'Etat des entreprises publiques :
frein ou arme de développement ? Le cas de Madagascar, éd.
ORSA PLUS, 1998
25. Ziegler (J.), Le pouvoir africain, éd.
Seuil 1971 et 1979
26. Duverger (M), démocratie libérale et
démocratie totalitaire, in Vie Intellectuelle, juillet 1948
Publication
1. Cahiers des sciences sociales n° 01, EESS
DEGS, Université de Madagascar, 1984
Articles :
1. Lefort (C.), « Pour une sociologie de la
démocratie », in Annales. Économies,
Sociétés, Civilisations. 21e année, N. 4,
1966. p. 750-768. Document disponible sur le site Internet
http://www.persee.fr/web/homes/prescript/article/ahess.
2. Montesquieu de l'esprit des lois livre II. Ch.
11, in
www.wikipedia.org
3. Rajaoson (F.), « Réflexions sur les crises
sociopolitiques en Afrique après l'indépendance. L'exemple
historique malgache », Brazzaville, 16-19 février 2010.
4. Rajaoson (F.), « Réflexions sur les
différents aspects de la démocratie », Académie
Malagasy, Antananarivo le 10-11 mars 2011.
5. Roubaud (F.), « Qui vote pour qui et pourquoi ?
», un essai de sociologie électorale à partir des
élections présidentielles dans l'agglomération
d'Antananarivo, 1992-1996. Novembre 1997
6. Thériault (J.-Y.), « La société
civile est-elle démocratique ? » un texte publié dans
l'ouvrage de Boismenu (P), Hamel (P), et Labica (G), Les formes modernes de
la démocratie, chapitre 4, p. 57-79. Montréal : L'Harmattan
et Les Presses de l'Université de Montréal, 1992, 300 p.
Collection : Politique et économie. Tendances actuelles. Un document
disponible sur le site Internet
http://bibliothèque.uqac.ca
7. Thériault (J.-Y.), « Sociologie,
démocratie et aventure du sujet moderne », in Cahier de
recherche sociologique, n° 30, 1998, p. 231-248, article disponible
sur le site Internet.
http://www.erudit.org./apropos/utilisation.html.
Documents officiels
1. Enquête périodique auprès des
ménages 2010, rapport principal août 2011.
2. Nina Cevtek et Friedel Daiber, « Qu'est-ce que la
société civile », Antananarivo, document fourni par
Friedrich Ebert Stiftung, avec la collaboration de la KMF/CNOE
3. Plan du projet de loi sur les partis politiques,
ministère de l'Intérieur et de la Décentralisation
2008.
Revue de presse
1. Andriamahefa, « Le velombazaha », in Revue de
l'Océan Indien n° 315.
2. Razanadrakoto (L.), Une démocratie radicale à
revisiter pour la Quatrième République malgache, in Revue de
l'Océan Indien n° 315.
Webographie :
1-
http://www.erudit.org./apropos/utilisation.html
2-
http://bibliothèque.uqac.ca
3-
www.wikipedia.org
4-
http://www.persee.fr/web/homes/prescript/article/ahess
TABLE DES MATIERES
REMERCIEMENTS SOMMAIRE
SOMMAIRE 4
INTRODUCTION GENERALE 1
Tableau n° 01 : groupe d'échantillonnage selon
l'âge et le genre. 5
Tableau n° 02 : groupe d'échantillonnage selon le
genre et niveau d'étude 5
CHAPITRE I : AUTOUR DE LA DEMOCRATIE 10
I.1. Les profondeurs historiques de la démocratie 10
I.1.1. La démocratie athénienne 10
I.1.2. L'apport des siècles lumières 11
I.1.3. La révolution de 1789 12
I.2. Démocratie et sociologie 12
I.2.1. Alexis de Tocqueville 13
I.2.2. Raymond Aron 14
I.2.3. La sociologie politique de Max Weber 14
I.2.4. Marx et la démocratie bourgeoise 15
CHAPITRE II : THEORIES ET CONCEPTS 17
II.1. Mise au point des usages terminologiques 17
II.1.1. La démocratie 17
II.1.2. La démocratie électorale 17
II.2. La socialité démocratique 18
II.2.1. Peuple et citoyenneté 18
II.2.2. La participation 19
II.2.2. la bonne gouvernance 19
II.3. les instruments de la réalisation de la
démocratie 20
II.3.1. Les partis politiques 20
II.3.2. Les sociétés civiles 21
CHAPITRE III : LES MODALITES DE DEMOCRATISATION A MADAGASCAR
24
III.1. Le contexte de la décolonisation 24
III.1.1.Une lutte pour la démocratie 24
III.2. De l'ajustement structurel à l'ajustement
démocratique 25
III.2.1. Modalité de l'injonction de la démocratie
à Madagascar 26
III.2.2. Le contexte politique nationale 26
III.3. Un régime politique en crise 27
III.3.1. La crise politique en 1972 27
III.3.2. Le mouvement pour la démocratie en 1991 28
III.3.3. La contestation électorale en 2002 29
III.3.4. La crise politique de 2009 30
CHAPITRE IV : REFLEXIONS SUR LA PRATIQUE DEMOCRATIQUE 33
IV.1. Les élections 33
IV.1.1. Election : pratique démocratique difficile
à maîtriser 33
IV.1.2. L'abstentionnisme 35
Tableau n° 05 : comportement des citoyens à l'acte
électoral 38
IV.2. Les acteurs de la démocratie 40
IV.2.1. Des partis politiques absents 40
IV.2.2. Les problèmes de la société civile
43
CHAPITRE V : LA PERCEPTION CITOYENNE 46
V.1. Implication de la population 46
V.1.1. Comportement politique des citoyens 46
Tableau n° 08 : Le genre et la discussion politique 48
V. 1.2. Rapport du citoyen à la presse 48
Tableau n°09 : Rapport genre et suivi d'un débat
politique 50
V.1.3. Le problème de la presse 51
V.2. Participation effective de la population 52
V.2.1. Le postulat d'une société libre 52
V.2.2. Le dysfonctionnement de la démocratie 53
V.2.3. participation de la population dans le processus de
décision 54
CHAPITRE VI : ELARGISSEMENT DE LA REFLEXION 58
VI.1. A l'heure du bilan 58
VI.1.1. Une démocratie de façade 58
VI.1.2. Un Etat démocratique improductif 59
VI.1.3. de la mauvaise gouvernance 60
VI.2. L'incohérence de la formation sociale 62
VI.2.1. Contradiction entre mode de production 62
VI.2.2. Distorsion entre système politique et
idéologie 62
VI.3. La persistance des inégalités sociales 64
VI.3.1. L'exclusion sociale 64
VI.3.2. L'impact de la mondialisation 64
CHAPITRE VII : APPROCHE PERSPECTIVE 66
VII.2. Pour une démocratie fonctionnelle 66
VII.2.1. Remettre en question le multipartisme 66
VII.2.2. La place de la société civile 68
VII.2.3. La démocratie de proximité 70
VI.2.4. Le rôle de l'Etat 71
CONCLUSION GENERALE 72
ELEMENTS BIBLIOGRAPHIQUES 75
LISTE DES TABLEAUX LISTE DES FIGURES
LISTE DES ABREVIATIONS ANNEXES
RESUME
LISTE DES TABLEAUX
Tableau n° 01 : groupe d'échantillonnage selon
l'âge et le genre. 4
Tableau n° 02 : groupe d'échantillonnage selon le
genre et niveau d'étude 5
Tableau n°03 : résultat du referendum du 08 octobre
1972. 28
Tableau n° 04 : l'élection présidentielle en
1996 29
Tableau n° 05 : comportement des citoyens à l'acte
électoral 38
Tableau n° 06 : intérêt pour la vie politique.
47
Tableau n° 07 intérêt politique et niveau
d'étude 47
Tableau n° 08 le genre et la discussion politique 48
Tableau n°09 : rapport genre et suivi d'un débat
politique 50
Tableau n°11 le dysfonctionnement de la démocratie.
53
LISTES DES GRAPHIQUES
Graphique n° 01 : Représentation des
élus 36
Graphique n°02 : La perception sur le changement de
la classe politique 38
Graphique n° 03 : Etat de connaissance sur les
rôles de la société civile 43
Graphique n°04 : Les sources de l'information de
l'individu 48
Graphique n°05 : Jugement sur la liberté
d'expression 49
Graphique n° 06 : Participation à la
décision au niveau de l'instance de base 53
Graphique n° 07 : Modalité de participation
dans le processus de décision au niveau local53
LISTE DES ABREVIATIONS
AGOA: African growth and opportunity act
AREMA : Avant garde de la révolution malgache
CENI : Commission électorale nationale
indépendante
CERS : Centre d'étude et de recherche sociologique
CNOSC : Coordination nationale des organisations de la
société civile CSP : Catégorie socioprofessionnelle
CUA : Commune urbaine d'antananarivo
DSRP : Document de stratégie de réduction de
pauvreté
FES: Fridriech Ebert Stiftung
FFKM: Fiombonan'ny fiangonana kristiana eto Madagasikara FMI :
Fonds monétaire international
HCC : Haute cour constitutionnelle
IRD : Institut de recherche pour le développement
KMF/CNOE: Komity mpanaramaso ny fifidiananana
MAP : Madagascar action plan
MDRM : Mouvement démocratique pour la rénovation de
Madagascar ONG : Organisation non gouvernementale
ONU : Organisation des Nations unies
PADESM : Parti des déshérités de
Madagascar
PANAGED : Plan d'action national pour le genre et le
développement PAS : Programme d'ajustement structurel
PPN : Produits de première nécessité
PSD : Parti social-démocrate
SEFAFI : Sehatra fanaraha-maso ny fiainam-pirenena
TGV : Tanora malaGasy Vonona
TIC : Technologies de l'information et de la communication TIM :
Tiko i Madagasikara
UDSM : Union Démocratique et sociale de Madagascar
UPDN : Union des partis des démocrates et nationalistes
malgaches
Annexes
ANNEXE I
QUESTIONNAIRES
Annexe
ORGANIGRAMME DU KMF/CNOE
Assemblée générale
(1 représentant par section + CIC)
CIC comité inter - régional de coordination (23
CR, 9BN, 2CGN, 2CCN, ECN)
CR coordonnateurs régionaux (22 régions)
Sections
(112 sections) (2560 membres)
BN bureau national
(9 membres élus en AG)
coordination nationale
ECN équipe de la
CCN commissaires aux
comptes nationales (2
membres élus)
F/A formateurs,
accompagnateurs
(Au nombre de 23)
CGN contrôleur de
gestion nationale (2
membres élus)
Source : KMF/CNOE 2012.
ETATS GENERAUX DES PARTIS POLITIQUES
Du 28 et 29 septembre 2002
À l'Hôtel Madagascar Hilton
Antananarivo
En collaboration avec la Friedrich Ebert Stiftung (FES)
DECLARATION COMMUNE DES PARTIS POLITIQUES
Les 23 partis politiques qui se sont réunis les
28 et 29 septembre 2002 affirment leur engagement à respecter les
règles démocratiques afin d'améliorer la pratique
politique et de revaloriser les partis politiques à
Madagascar.
Nous sommes convaincus que l'ordonnance 90-001 portant
régime général des partis ou organisations politiques est
obsolète et doit être actualisée. Dans ce cadre, nous avons
décidé de commun accord de faire des réflexions sur le
Code Electoral et sur la loi concernant le financement des partis politiques et
des campagnes électorales dans le sens du fahamarinana et du principe de
l'alternance démocratique.
Nous nous engageons à respecter les lois en vigueur, les
règles de jeu républicaines et le choix du peuple traduit par les
résultats de toutes les élections prochaines.
Afin d'éviter les erreurs du passe, nous faisons appel
a l'actuel gouvernement d'assurer la liberté, la transparence et
l'équité des élections, et de mettre tous les partis
politiques et tous les candidats aux élections sur le même pied
d'égalité, suivant des règles arrêtées
communément avec les responsables concernes, surtout en ce qui concerne
l'accès aux medias publics pendant les périodes
d'élections et dans la vie politique quotidienne.
Nous avons décidé de commun accord que le
gouvernement s'occupera de l'impression des bulletins de vote et de leur
acheminement vers les bureaux de vote.
Nous faisons appel au peuple malagasy de participer dans le calme
aux élections et aux campagnes électorales, et de prendre part
activement aux affaires de la nation.
Une comite a été chargée du suivi de la mise
en oeuvre des décisions prises dans le cadre de la réunion.
Les Etats Généraux des partis se sont
déroulés dans la fraternité et le respect mutuel qui vont
désormais régir les collaborations entre les partis
politiques.
Nous exprimons à la Friedrich Ebert Stiftung (FES) nos
vifs et sincères remerciements pour son soutien a la tenue des Etats
Généraux des partis politiques.
Fait à Antananarivo, le 29 septembre 2002
AVANT-PROPOSITION DE LOI
SUR LES PARTIS POLITIQUES
(validée le 27 mai 2004)
EXPOSE DES MOTIFS
A Madagascar, les partis politiques sont apparus, au cours du
XXe siècle, lors de la lutte anticoloniale et durant le
processus de décolonisation. Leur principal objet était, alors,
la construction d'un Etat nation.
En ce début de troisième millénaire et
dans le contexte de la mondialisation, le pays se trouve dans un processus de
transformation sociopolitique et économique. Les partis politiques sont
ainsi, appelés a assumer un rôle dans la construction d'un Etat
moderne respectant un multipartisme structure et fonctionnel, et organisant
l'éducation politique des citoyens. La présente proposition de
loi entend définir un nouveau cadre juridique aux partis politiques afin
qu'ils puissent jouer leur vrai rôle, en tant qu'acteurs politiques
principaux, a qui échoient des fonctions essentielles et
décisives pour la population, pour les gouvernants et pour l'Etat, dans
le processus de transformation démocratique et de développement
de la société.
DISPOSITIONS GÉNÉRALES
Article premier. - La Constitution ne dispose que les citoyens
jouissant pleinement de leurs droits Civiques peuvent se constituer librement
en partis politiques. Ces derniers participent librement et de façon
permanente a la formation de la volonté du peuple et remplissent une
mission de service public.
Art.2.- Constitue un parti politique tout groupement
d'individus qui, professant les mêmes vues politiques, s'efforcent de les
faire prévaloir de manière démocratique et pacifique, a la
fois en y ralliant le plus grand nombre possible de citoyens et en cherchant a
conquérir le Pouvoir ou, du moins, d'influencer ses décisions. Sa
participation a la vie politique se fait a travers la représentation du
peuple au Parlement ou dans les autres organes délibérants au
niveau régional ou local, et a travers sa contribution a la formation de
la volonté politique. Le parti perd le bénéfice de la
présente loi si, pendant cinq ans, il n'a présente de candidats
ni a une élection présidentielle, législative ou
sénatoriale ni a une élection provinciale, régionale ou
communale. La loi garantit l'égalité en droit des partis.
Art.3.- Les rôles et devoirs des partis s'étendent a
tous les domaines de la vie publique :
- ils élaborent des programmes politiques et les
introduisent dans le processus de formation de la volonté
étatique,
- ils renforcent les valeurs civiques du peuple et encouragent la
participation active des citoyens
a la vie publique,
- ils forment des citoyens capables d'assumer des fonctions
politiques,
- ils participent a la formulation et a l'articulation des
intérêts multiples des électeurs afin de les persuader et
font une liaison constante entre les citoyens et l'Etat,
- ils participent aux élections à travers la
présentation de candidats,
- ils influent sur l'évolution politique au sein notamment
de l'Assemblée nationale, du Senat et du Gouvernement,
- ils fournissent le personnel politique à l'Etat et aux
collectivités territoriales.
Les partis doivent créer les structures internes
afférentes a la réalisation de leurs rôles et devoirs.
Art.4.- Seules les personnes physiques peuvent être
membres d'un parti. Tout citoyen malgache des deux sexes, jouissant de ses
droits civiques et âges au moins de 18 ans, peut adhérer librement
à un parti, selon les dispositions de la présente loi.
Les jeunes de moins de 18 ans peuvent faire partie d'une
structure interne spécialisée d'un parti en vue de leur
éducation civique et politique.
Art.5.- L'existence de l'opposition est reconnue par la
présente loi. L'opposition s'exprime dans le cadre parlementaire a
travers des partis ou extraparlementaire, au cas ou les partis n'ont pas de
représentants au Parlement.
Art 6.- Les partis, et notamment ceux de l'opposition, ont un
accès équitable aux medias Audiovisuels publics.
CONDITIONS DE CRÉATION
Art.7.- La création d'un parti ne doit pas porter atteinte
a l'unité nationale, a la souveraineté nationale, a
l'intégrité territoriale et aux principes
démocratiques.
Art.8.- Tout parti est constitue par un organe central, des
structures intermédiaires et des sections locales. Son siège doit
se situer sur le territoire national.
Il peut organiser des congres, des assemblées ou des
réunions conformément à la législation en vigueur
et dans les conditions prévues par les statuts.
Art.9.- La création d'un parti doit faire obligatoirement
l'objet d'une déclaration écrite par ses fondateurs à
déposer ou à adresser :
- au ministère charge de l'Intérieur en ce qui
concerne l'organe central et les formations affiliées ;
- au sous-préfet de région en ce qui concerne les
structures intermédiaires et les sections, avec l'aval de l'organe
central du parti.
Cette déclaration doit être déposée
ou adressée à l'autorité compétente dans un
délai maximum de 3 mois à compter de la date de clôture de
la réunion au cours de laquelle la constitution de l'organe central ou
de la formation affiliée a été décidée. Ce
délai est de trente jours pour les sections.
En cas d'envoi postal, le cachet de la poste fait foi.
Art.10.- L'organe central doit communiquer à
l'autorité compétente lors de la déclaration de sa
création, les documents et produits suivants en version originale et en
cinq copies :
a. les statuts et le projet de société
b. le procès-verbal de l'assemblée
constitutive,
c. les noms et fonctions des membres de l'organe central.
De même, cette instance doit communiquer à
l'autorité compétente la dissolution du parti. Art.11.- A la
déclaration de création d'une section devront être annexes
:
a. les statuts du parti,
b. la copie du récépissé de
déclaration de constitution délivrée à l'organe
central,
c. l'indication du ressort territorial de la section,
d. les noms et fonctions des membres charges de la direction et
de l'administration de la section,
e. un certificat d'apparentement délivré par
l'organe central.
Ces documents doivent être produits en trois exemplaires et
déposés auprès du sous préfet qui transmettra deux
exemplaires au préfet et au tribunal.
Art 12.- L'autorité compétente inscrit la
déclaration sur un registre ad hoc et en délivre obligatoirement
un récépissé, sous huitaine.
Art.13.- Nul ne peut être élu membre dirigeant
d'un parti ou de l'une de ses structures intermédiaires et sections s'il
n'est de nationalité malgache, ne jouit de la plénitude de ses
droits civiques et n'est âge de 18 ans au moins.
Art.14.- Tout parti régulièrement déclare
peut :
- ester en justice en son nom ;
- recevoir des dons, legs et cotisations de ses membres ;
- acquérir, posséder, administrer et disposer des
biens meubles, immeubles, nécessaires au but Qu'il se propose.
Art 15.- Chaque parti constitue en application de la
présente loi a droit a la protection de ses nom, sigle, emblème,
couleur et autre signes distinctifs.
Art.16.- Il est strictement interdit d'utiliser ou
d'intégrer dans la dénomination d'un nouveau parti, le nom d'un
parti déjà existant. Il en est de même pour son sigle, son
emblème et son slogan.
Art 17. L'organe central du parti est tenu de faire
connaître au ministère charge de l'Intérieur, dans un
délai maximum de trois mois, tous les changements ou les modifications
apportes à ses statuts et aux membres de son organe central.
Art 18.- L'organe dirigeant de la section locale est tenu de
faire connaître à l'autorité territoriale
compétente, dans un délai maximum de trois mois, tous les
changements intervenus dans sa direction ou son administration.
Art 19.- Les déclarations de constitution de l'organe
central des partis seront publiées au Journal officiel de la
République sous la forme d'un extrait précisant la
dénomination du parti, son siège social, un résumé
de son projet de société, son objet et la date de
délivrance du récépissé.
Les modifications ou changements se rapportant a la
dénomination, au siège social ou a l'objet du parti doit
être rendus public dans les mêmes conditions et délai. Ils
ne sont opposables aux tiers qu'a partir du jour ou ils auront
été publies.
Art 20.- Tout parti doit avoir des statuts, un
règlement intérieur et un programme écrits. Les sections
locales peuvent gérer leurs affaires au moyen de statuts propres, qui
doivent être conformes aux statuts du parti.
FUSION ET REGROUPEMENT DES PARTIS
Art.21.- Le regroupement ou la fusion de deux ou plusieurs
partis politiques, conformément aux principes et conditions de
création de partis politiques édictes par la présente loi,
doit être préalablement approuvée par les organes de
décision interne et selon la procédure prévue de chaque
parti.
Le regroupement ou la fusion entraînera la dissolution
juridique des partis concernes. FINANCEMENT DES PARTIS
Art 22.- Les partis peuvent bénéficier de fonds
publics ou prives.
Art.23.- Tous les partis doivent être traits sur le
même pied d'égalité, lorsque l'Etat met des services et
autres prestations publiques à leur disposition.
L'octroi de prestations publiques est subordonne a certaines
conditions a remplir par tous les partis. L'ampleur des prestations
accordées pourra être échelonnée, selon l'importance
des partis, jusqu' au minimum requis pour la réalisation de leurs
fins.
Art 24.- L'Etat octroie aux partis des fonds destines au
cofinancement des activités qui leur
incombent. Les critères
déterminant la répartition de ces fonds publics sont le
succès remporte
par un parti lors des élections législatives,
provinciales, régionales et communales, ainsi que le montant des
cotisations de ses membres et des dons encaisses.
Art 25.- Le volume annuel total des fonds publics pouvant
être versés à l'ensemble des partis est fixe par la loi de
finances.
Art 26.- Les partis obtiennent par an dans le cadre du
cofinancement de l'Etat :
a. ...ARIARY pour chacun des suffrages valablement expriment
pour leur liste ou leur candidat respectif,
b. ... ARIARY pour chaque ARIARY obtenu a titre de
contribution (cotisations des membres ou dons acquis licitement). Il sera tenu
compte uniquement des contributions des personnes physiques s'élevant a
.... ARIARY au maximum.
c. ... ARIARY par élu au niveau national,
d. ... ARIARY par élu au niveau provincial,
régional et communal,
Ne peuvent prétendre a des fonds publics que les partis
qui, d'après les résultats définitifs des dernières
élections législatives, ont remporte au moins 1 pour cent des
suffrages valablement exprimés ou, pour les élections communales,
au moins 5 pour cent des suffrages valablement exprimes calcules au niveau
régional.
La part de financement de l'Etat ne doit pas dépasser
pour un parti le montant de ses propres recettes annuelles.
Si un parti est dissous ou frappe d'interdiction par le
tribunal, il est exclu du cofinancement de L'Etat à partir du moment de
sa dissolution.
Art.27.- En vue de la fixation du montant des fonds publics
attribues et de leur versement, une demande écrite doit être
adressée par les partis, a fin février au plus tard, a une
commission spéciale, comprenant, selon une répartition paritaire
des sièges, des représentants des partis de la majorité et
de l'opposition parlementaires, présidée par le Président
de l'Assemblée Nationale. Toute demande ultérieure a cette date
ne pourra être prise en considération.
Art 28.- La commission spéciale fixe annuellement au 30
avril le montant des fonds publics a attribuer a chaque parti pouvant y
prétendre afin qu'il soit inscrit dans le projet de loi de finances
Art 29.- Les ressources privées des partis proviennent
:
a) des droits d'adhésion,
b) des cotisations mensuelles des membres,
c) des contributions de toutes natures versées par les
membres et sympathisants ainsi que les responsables du parti exerçant
des fonctions officielles au sein de l'Etat,
d) des souscriptions, dons et legs,
e)
des produits des oeuvres artistiques et des manifestations
organisées par le parti ;
f) des produits de la vente des travaux et publications du
parti,
g) des produits de toute autre activité du parti.
Art 30.- Les partis politiques légalement
créés peuvent bénéficier de dons et legs de
formations politiques ou personnes privées de l'étranger. Le
compte annuel du parti doit faire apparaître le montant et l'origine de
cette aide étrangère qui ne doit pas dépasser 75% du
budget du parti, sous peine de dissolution.
Art 31.- Les partis doivent avoir, au moins, un compte
bancaire, une comptabilité annuelle de leur gestion et l'inventaire
annuel de leurs biens, meubles et immeubles sous peine de perdre le droit de
bénéficier des aides financières octroyées par
l'Etat sans préjudice de sanctions prévues par d'autres
textes.
Art 32.- L'organe central du parti est tenu de rendre
publiquement compte, dans un rapport financier, de l'origine et de
l'utilisation des fonds que son parti a reçus pendant une année
civile ainsi que l'avoir du parti a la fin de l'année civile.
Art 33.- Le rapport financier consiste en un compte de
recettes et de dépenses ainsi qu'en un compte des avoirs. Il doit
être établi conformément aux principes d'une
comptabilité régulière et en tenant compte de l'objet de
la présente loi.
Art 34.- Le rapport financier doit être
vérifié par un commissaire aux comptes ou par une
société agréée d'expertise comptable.
Toute irrégularité constatée sera
passible d'une suspension de financements publics pendant un an.
DISPOSITIONS TRANSITOIRES
Art. 35 - Les partis légalement constitues avant la
promulgation de la présente loi continuent à exercer leurs
activités sous réserve d'une adaptation de leurs statuts aux
dispositions de la présente loi, dans un délai de six mois,
après la promulgation de la présente loi et de ses textes
D'application. Le dépôt de nouveaux statuts équivaut
à la confirmation de la légalisation du parti.
Art.36.- Des décrets préciseront, en tant que de
besoin, l'application des dispositions de la présente loi.
Art. 37.- Est abrogée par la présente loi
l'ordonnance n° 90-001 du 9 mars 1990 portant régime
général des partis ;
Toutes autres dispositions contraires à la présente
loi sont et demeurent abrogées.
Résumé
Nom : RANINDRIANORO
Prénom : Alain
Adresse : Lot VN 25 B A Ankazolava Ambohitsoa Tel : 033 40 424
11
Titre du mémoire : « CONTRIBUTION À
L'ÉTUDE SOCIOLOGIQUE DE LA PRATIQUE DÉMOCRATIQUE DANS LE CONTEXTE
MALGACHE »
Rubrique épistémologique : Sociologie politique
Nombres de page : 79
Nombres de tableau : 11
Nombres de figure : 07
La présente recherche contribue à l'étude
sociologique de la pratique démocratique se focalisant sur l'enjeu de la
participation des acteurs concernés dont la société
civile, les partis politiques et les citoyens ordinaires. S'appuyant sur
l'évolutionnisme, le fonctionnalisme, le matérialisme historique
et des auteurs en sociologie, l'analyse se propose d'expliquer les
déterminismes qui fondent la participation des citoyens dans la
société. Si l'élection et le mouvement populaire cadre
l'exercice de la participation démocratique, force est de souligner que
ces pratiques demeurent une source d'exclusion sociale et d'exclusion politique
renforçant la démocratie des politiciens. La pérennisation
de l'architecture juridicoadministrative illégitime débouche sur
un contentieux électoral et une instabilité politique. Le
dysfonctionnement des acteurs engendre une perversion de la démocratie
plongeant le peuple censé être le lieu du pouvoir politique dans
une illusion. Le dynamisme de la pratique démocratique dans le pays suit
le rythme du contexte de la mondialisation et de la globalisation actuelle.
L'économie de marché devient une contrainte absolue de la
politique. L'introduction de l'Etat de droit et la bonne gouvernance est une
arme entre les mains des oligarchies mondialisées comme condition du
salut économique. En effet, le processus profite de façon
unilatérale aux bailleurs et minorités nationales.
Mots-clés : démocratie,
élection, exclusion, mondialisation, participation. Encadreur
: André Rasolo, maître de conférences