SECTION 2 :
INVESTISSEMENT DANS LE SECTEUR AGRICOLE: EVOLUTION ET PERSPECTIVES
2.1. Investissements privés dans le secteur agricole
2.1.1. Investissements privés nationaux
A. Ménages agricoles privés
La plupart des agriculteurs sont de petits exploitants. En
tant que groupe, ces hommes et ces femmes sont les principaux investisseurs du
secteur agricole. Mais ils souffrent généralement
d'insécurité alimentaire; c'est-à dire que leur
accès à l'alimentation est en règle générale
insuffisant ou précaire. Lorsqu'ils sont en mesure de tirer des
bénéfices de leurs activités agricoles, ils peuvent
nourrir leurs familles pendant toute l'année et réinvestir dans
leurs exploitations sous forme d'achat d'engrais, de semences de meilleure
qualité et d'équipements de base. Les petits producteurs se
heurtent à une multitude d'obstacles indépendants de leur
volonté: absence de crédit, précarité de la
propriété foncière, mauvaise qualité des
transports, faiblesse des prix et relations commerciales insuffisantes avec les
agro-industries au dernier maillon de la chaîne - sans compter les
phénomènes naturels tels que sécheresse, inondations,
ravageurs et maladies.
B. Systèmes postproduction
Dans le secteur après-récolte, qui comprend
essentiellement la commercialisation et la transformation privées,
l'estimation des investissements repose sur les coûts unitaires types des
investissements dans la capacité de commercialisation et de
transformation et sur des hypothèses quant à la part de la
production agricole qui entre dans les circuits commerciaux.
2.1.1. Investissements privés étrangers
L'aide étrangère à l'agriculture et au
développement rural n'a cessé de diminuer. Au cours des 20
dernières années, elle a accusé une chute vertigineuse -
passant de plus de 9 milliards de dollars EU par an au début des
années 80 à moins de 5 milliards de dollars EU à la fin
des années 90. Et pourtant, 854 millions d'êtres humains
continuent à souffrir de sous-alimentation dans le monde.
Les données disponibles ne permettent pas de
décomposer les investissements privés étrangers en
catégories. Il est peu probable cependant que la production agricole
primaire ait reçu une part importante des investissements privés
internationaux. A supposer que les secteurs liés à l'agriculture
soient visés, les investisseurs internationaux s'intéressent
davantage à la fourniture d'intrants, à l'agro-industrie et
à l'exploitation des forêts et des pêches.
Les raisons qui expliquent le déclin de l'aide
extérieure à l'agriculture sont les suivantes: résultats
en général médiocres de certains types de projets
agricoles; complexité et coût des prêts à
l'agriculture; influence des groupes de pression en faveur de l'agriculture et
de l'environnement dans les pays développés; concurrence des
prêts pour l'ajustement structurel dans les années 80;
réduction du personnel agricole spécialisé dans les
organismes d'aide extérieure (von Braun et al., 1993) et jusque
récemment, baisse des prix des produits de base agricoles sur les
marchés internationaux. Par ailleurs, une partie de cette baisse traduit
l'élimination progressive de programmes dont les résultats ont
été médiocres, tels ceux concernant l'aménagement
rural intégré et le crédit agricole. L'élimination
des investissements non performants freine l'endettement des pays,
élargit la marge de manoeuvre pour des initiatives privées et
augmente l'efficacité globale du portefeuille de créances. C'est
probablement dans le domaine du financement de l'irrigation que la
réduction de l'aide extérieure a eu les conséquences les
plus néfastes pour la production agricole.
La part de l'aide extérieure réservée au
soutien direct de la production vivrière pourrait encore diminuer, les
donateurs continuant de se concentrer sur les questions sociales et
écologiques. A long terme, ces préoccupations
supplémentaires devraient cependant avoir des retombées positives
sur la production agricole.
2.1.2. Investissements publics dans le secteur agricole
Un ensemble de processus politiques et d'effets sociaux
attendus détermine d'ordinaire les investissements publics dans le
secteur agricole. Dans les pays les plus pauvres, la majeure partie des
investissements publics dans l'agriculture est financée par des sources
extérieures. Les statistiques ne ventilent pas toujours les
dépenses publiques par origine, intérieure ou
étrangère, si bien qu'il y a des risques de comptages doubles. En
outre, une grande partie des investissements qui soutiennent le secteur
agricole passe par l'intermédiaire d'autres ministères, à
savoir les ministères de la santé, de l'éducation, et des
travaux publics. Par exemple, les routes rurales absorbent au Ghana trois fois
plus d'investissements publics que ne le fait directement le secteur agricole.
Selon les données disponibles, les dépenses
publiques destinées à l'agriculture ne représentent
d'ordinaire qu'un pourcentage modeste du total et - bien que la distinction
soit floue - les investissements publics ne constituent qu'une faible part des
dépenses publiques consacrées au secteur agricole.
On peut donc voir que les dépenses allouées
à l'agriculture sont, dans de nombreux cas, mal réparties,
plutôt qu'insuffisantes. La réaffectation de subventions
inefficaces et d'autres dépenses improductives, permettrait
d'accroître les investissements publics dans l'agriculture et, dans de
nombreux pays, de fournir équitablement des services publics dans les
zones rurales.
Les réformes budgétaires visant à une
plus grande efficacité des dépenses publiques dans l'agriculture
devraient reposer sur un certain nombre de principes:
Ø financer davantage de services producteurs de
croissance; supprimer progressivement les subventions qui ont atteint leur
objectif (ou qui sont inefficaces) et cibler le reste sur des objectifs
spécifiques de développement en les rendant dans le même
temps transparents;
Ø augmenter la mise en place de biens publics et
privatiser la fourniture de biens privés;
Ø arrêter l'hémorragie budgétaire
causée par les entreprises d'Etat;
Ø allouer des crédits suffisants pour les
dépenses de fonctionnement;
Ø recouvrer le coût intégral des biens et
services fournis par l'Etat au profit de particuliers (certains
médicaments à usage vétérinaire, conseils de
vulgarisation spécialisés, services collectifs pouvant être
répartis entre les utilisateurs); et Rationaliser l'élaboration
du budget
2.1.3. Aide extérieure à l'agriculture
A. Aide Publique au Développement (APD)
En 1991, la plupart des pays occidentaux ont
décidé de suspendre la coopération directe avec la
République Démocratique du Congo à la suite des massacres
commis au Campus universitaire de Lubumbashi. Outre le gel de la
coopération bilatérale, le Fonds Monétaire International
et la Banque Mondiale ont rompu leurs relations avec la République
Démocratique du Congo respectivement en 1992 et en 1993, en raison de
l'accumulation des arriérés de paiement de la dette
extérieure et de l'absence de volonté politique de mettre en
oeuvre des réformes économiques. D'où l'arrêt du
déboursement de tous les crédits d'ajustement structurel. C'est
ce qui explique également la chute de l'aide publique au
développement qui est passé, selon les données
disponibles, de 862 millions de dollars US en 1989 à 298 millions en
1994 puis à 123 millions en 1998
En réalité, cette aide n'a
représenté en moyenne que 25,9 % du total renseigné. Car,
l'aide alimentaire et les secours d'urgence se sont chiffrés en moyenne
à 74,1 % des flux de la période. Ceux-ci ont eu la
particularité d'être gérés directement par les
organisations non gouvernementales qui continuent du reste à jouer un
rôle dynamique dans la production des services sociaux (santé et
éducation) et depuis peu dans le micro-crédit. S'agissant des
concours au titre de la coopération technique liée aux projets
d'investissement, ils se sont inscrits en hausse. Ils ont
représenté en 1996 21,2 % du total de l'aide reçue, 28,8 %
en 1997 et 32,5 % en 1998. Cette remontée s'explique par la
nécessité comprise de certains partenaires bilatéraux et
multilatéraux de mettre en oeuvre quelques projets de
réhabilitation en raison de la dégradation avancée des
infrastructures économiques et sociales. Quoique la tendance soit
à la baisse dans tous les pays, l'aide publique au développement
en faveur du pays diminue pour trois raisons :
la poursuite du gel de la coopération structurelle
depuis 1991 ;
l'attentisme des donateurs à cause de la situation de
guerre que connaît le pays depuis 1998 ;
les difficultés de reprise de dialogue avec la
communauté financière internationale au sujet
particulièrement des arriérés de la dette
extérieure.
B. Dette extérieure
Le stock de la dette extérieure de la République
Démocratique du Congo a atteint 13.535 millions de dollars US à
fin décembre 1999, alors qu'il se chiffrait à 9,6 millions de
dollars US en 1990. Il se répartit comme suit :
1. Dette bilatérale (Club de Paris)
|
9.385,1
|
2. Dette multilatérale
dont: - B.A.D
- Banque Mondiale
|
2.497,3
(878,7)
(1.281,5)
|
3. Club de Londres
|
37,2
|
4. Club de Kinshasa
|
393,4
|
5. Dette sur les biens des expatriés remis aux
nationaux
|
145,2
|
6. F.M.I.
|
517,8
|
7. Autres (dette commerciale)
|
557,4
|
TOTAL
|
13.553,4
|
Source :
La dette bilatérale à moyen et long terme
représente 70 % du stock, contre 18,7 % pour la dette
multilatérale (hors FMI) et 3,9 % pour la dette envers le FMI. Ces
dettes ont financé essentiellement les appuis à la Balance des
paiements (importations des produits pétroliers et des
équipements) ainsi que les programmes de stabilisation et d'ajustement
structurel.
Le service de la dette s'est chiffré à 7.600
millions de dollars US en 1999 (soit 121,2 % du PIB) alors qu'il était
à 2.300 millions de dollars US (soit 30,2 % du PIB) en 1990.
Rapporté aux recettes publiques et aux recettes d'exportations, le ratio
du service de la dette est passé respectivement de 249,7 % et 98,6 % en
1990 à 2.287,6 % et 536,3 % en 1999. Sur la même période,
il a représenté successivement 345.118 % des dépenses de
santé et 80.828 % des dépenses de l'éducation en 1990. La
capitalisation des échéances non honorées à des
taux très élevés explique pour plus de 40 % la progression
du stock de la dette.
A ce jour, il est clairement établi que la dette
extérieure du Congo n'est pas soutenable. Le pays est éligible au
mécanisme des Pays Pauvres Très Endettés (PPTE).
2.1.4. Besoins d'investissement agricole
Il y a plusieurs manières de prévoir les besoins
d'investissement agricoles futurs. Il faut examiner à la fois les
aspects quantitatifs et qualitatifs. Ces deux aspects sont étroitement
liés car les investissements de meilleure qualité -
c'est-à-dire ceux qui génèrent un plus grand volume de
profits pour un capital donné - peuvent réduire le montant total
des investissements nécessaires pour réaliser un accroissement
donné de la production vivrière. Ni l'un ni l'autre ne peuvent
être examinés sans prendre en compte le secteur public, qui est un
élément catalyseur permettant de stimuler les investissements
privés en créant des économies extérieures aux
investisseurs privés. Les investissements publics sont donc largement
disproportionnés comparés à leur part dans le total des
investissements, mais ils peuvent également avoir des effets
néfastes. Moins sensible aux forces du marché, l'investissement
public peut continuer malgré de faibles niveaux d'efficacité.
Cela entraîne un gonflement inutile de l'investissement global et tient
à l'écart des investissements privés, potentiellement plus
efficaces.
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