II -3-3) L'eau de mer, du point de vue chimique :
Suivant les régions du monde, l'eau de mer peut
avoir des compositions chimiques différentes. Elle se caractérise
généralement par une grande concentration de sels dissous. La
salinité peut varier de 10g.l-1 dans la mer Baltique,
à 40g.l-1 dans la mer Rouge, voire pratiquement
400g.l-1 dans les mers Caspienne et Morte. Plus proche de nous,
l'océan Atlantique a une salinité proche de 35g.l-1 et
la mer Méditerranée 40g.l-1.
Les sels dissous qui composent l'eau de mer sont
généralement :
- le chlorure de sodium (NaCl), qui est
prépondérant,
- le chlorure de magnésium
(MgCl2),
- le sulfate de magnésium
(MgSO4),
- le sulfate de calcium (CaSO4),
- le chlorure de calcium (CaCl2),
- le carbonate de potassium (KHCO3).
Tableau I.3 : composition
des eaux de l'Atlantique, de la Méditerranée
et d'une eau de mer standard [10].
Le tableau I.3 montre que la composition d'une eau de
mer est très différente de la solution interstitielle d'une
pâte de ciment Portland. Comme pour la lixiviation à l'eau pure,
à cause de ces différences de composition, des échanges
ioniques vont se mettre en place. L'arrivée dans la matrice cimentaire
d'ions étrangers tels que les ions magnésium ou carbonates
conduit à la formation de nouvelles espèces, tandis que
l'augmentation de la concentration d'ions déjà présents
tend à sursaturer la solution interstitielle et par conséquent
à précipiter des espèces solides dans un milieu
rigide.
II -3-4) Les mécanismes d'attaques par les eaux de
mer :
L'attaque des ciments par l'eau de mer résulte de
plusieurs mécanismes physicochimiques plus ou moins simultanés et
interdépendants résumés par la figure II
-17 :
L'effet global n'est ni la somme des effets individuels,
ni proportionnel à une action isolée donnée. Par exemple
l'eau de mer est moins agressive qu'une solution de même concentration en
sulfate de magnésium en raison de la plus grande solubilité de
l'ettringite et du gypse dans les solutions chlorurées ainsi qu'en
raison de la formation de chloroaluminates de calcium qui consomme une partie
de l'alumine (du C3A et des aluminates hydratés) et de la
chaux nécessaires à la formation d'ettringite.
Les principaux mécanismes mis en jeu, fortement
imbriqués, sont les suivants :
- dissolution de la portlandite et lixiviation de la chaux
des C-S-H ;
échanges Ca2+? Mg2+ avec
précipitation de brucite Mg(OH)2, insoluble, et
transformation progressive des C-S-H en C-M-S-H, sans propriétés
liantes ;
- formation de monochloroaluminates de calcium
C3A.CaCl2.10H2O. Précipitation de gypse
secondaire CaSO4.2H2O ;
- formation
d'ettringiteC3A.3CaSO4.32H2O expansive par
réaction des sulfates avec les aluminates du ciment et par
transformation des chloroaluminates ; cristallisation de calcite ou d'aragonite
CaCO3 ;
- formation de thaumasite
CaCO3.CaSO4.CaSiO3.15H2O.
L'ensemble de ces réactions se traduit par un
accroissement de la porosité du béton, par des gonflements et des
fissurations, fortement aggravés par les cycles climatiques, les effets
mécaniques des vagues et éventuellement par la corrosion des
armatures.
La formation de brucite et de calcite à la surface
du béton peut avoir un effet
atténuateur.[10]
Figure II -17 : Les
différentes actions de l'eau de mer sur le béton. [10]
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