II -2) Attaque par les acides :
II -2-1) Introduction :
Le béton, matériau basique par excellence,
est très sensible aux milieux acides avec lesquels il réagit
suivant la réaction bien connue : Base + Acide ? Sel + Eau.
La nocivité d'un acide dépend de la
solubilité du sel qu'il forme lors de la réaction avec les
hydrates du ciment.
II -2-2) Définition :
Les attaques acides se font principalement suivant un
mécanisme de dissolution.
Suivant le cas, le phénomène de dissolution
peut être accompagné de la précipitation du sel
formé lors de la réaction base + acide si le sel est peu soluble.
Ce sel peut avoir un effet colmatant et ralentir les réactions de
dissolution.
Le produit final de dégradation par un acide
peut-être un gel de silice résultant de la décalcification
totale des C-S-H qui, selon Grube et al [35], peut
avoir un rôle protecteur à la surface du béton et ralentir
les réactions. Ces auteurs insistent également sur le fait que
les conditions de transport de l'agent agressif sont plus importantes que sa
concentration.
Figure II -10 : La
détérioration des silos-tours en béton due à
l'attaque des acides d'ensilage.
(Photo offerte par : Thomas P. Rylett Ltd.,
ingénieur-conseil en structures).
II -2-3) Les différents types des acides :
· les pluies acides (cas extrême des
eaux douces) :
Les pluies dites « propres » ont
généralement un pH compris entre 5,6 et 7. Elles n'ont pas
d'effets nocifs sur le béton réalisé suivant les
règles de l'art. Par contre, les pluies dites « acides », dont
le pH peut descendre jusqu'à 4 et parfois moins, sont agressives.
L'occurrence de ce type de pluies est en relation principalement avec la
pollution par les oxydes de soufre SOx d'origine industrielle ou domestique
(combustion des charbons, fiouls, carburants) qui représentent environ
un tiers de tous les oxydes de soufre de l'atmosphère. Le
résultat est la formation d'acide sulfurique très hygroscopique
qui se condense rapidement en gouttelettes susceptibles de contenir des
métaux lourds (mercure, plomb, argent, cadmium) et des sulfates
(d'ammonium, de sodium). Les oxydes d'azote NOx également
présents se transforment en acide nitrique. La composition et le pH des
pluies peuvent varier en fonction de la saison et des conditions locales.
Les pluies acides peuvent provoquer des
dégradations superficielles suivant des processus plus ou moins
complexes faisant entrer en jeu des phénomènes de dissolution dus
aux acides (sulfurique, nitrique, carbonique) et d'expansion dus à la
cristallisation de sels, tels que le gypse (salissures des façades) ou
l'ettringite.
· les acides
minéraux :
Les acides chlorhydrique et nitrique, acides
minéraux forts qui par réaction avec la chaux du ciment donnent
naissance respectivement, au chlorure de calcium CaCl2 et au nitrate
de calcium (NO3)2Ca, sels très solubles, sont
très agressifs vis à- vis des ciments Portland.
L'acide sulfurique H2SO4,
formé, par exemple, lors de l'oxydation de l'hydrogène
sulfuré produit dans les réseaux d'assainissement ou par
condensation à partir du SO2 atmosphérique, est
doublement agressif par son acidité et par l'anion SO4
2- qui peut conduire à la formation de sels expansifs tels
que le gypse et l'ettringite.
L'acide phosphorique H3PO4, qui
entraîne la précipitation de phosphates de calcium très peu
solubles, est modérément agressif, mais provoque une
désintégration lente du béton.
· les acides organiques
On les rencontre fréquemment dans les effluents
rejetés par les industries chimiques (fabriques d'engrais, papeteries,
teintureries, tanneries...) et agroalimentaires (vinaigreries, laiteries,
fromageries, distilleries, conserveries, élevages...).
Ils sont généralement moins agressifs que
les acides minéraux. Ils peuvent dans certains cas avoir un effet
colmatant sur le béton : c'est le cas par exemple, de l'acide tartrique
(cuves à vin) ou de l'acide oxalique. Les acides organiques tels que les
acides acétique, lactique, butyrique, formique, contenus dans certaines
eaux usées, attaquent les constituants calciques du ciment.
Ces acides faibles, peu dissociés, sont
généralement modérément agressifs et provoquent des
dégradations lentes. Toutefois leur neutralisation par les ions alcalins
(Na+, K+) et alcalino-terreux (Ca2+)
entraîne la permanence de la dissociation de l'acide et
corrélativement une augmentation de son agressivité par
production cumulée d'ions H+. Des dégradations
importantes du béton ont pu être observées en milieu
agricole dans des silos ou cuves destinés à contenir les
fourrages, fumiers, purins et sur des dallages d'étables
(érosion, déchaussement des granulats, pertes de masses, mise
à nu des aciers...). [10]
De façon générale, l'attaque chimique
du béton prend la forme d'une décomposition des produits de
l'hydratation et de la formation de nouveaux composés qui, s'ils sont
solubles peuvent être lessivés et qui, s'ils sont insolubles,
peuvent être préjudiciables in situ.
Le Ca (OH) 2 est l'hydrate le plus
vulnérable, mais les C-S-H peuvent aussi être attaqués. Les
granulats calcaires sont également vulnérables.
Le béton est aussi attaqué par l'eau
contenant de CO2 libre, telles les eaux minérales, qui
peuvent aussi contenir du sulfure d'hydrogène. Tout le CO2
n'est pas agressif par ce qu'une partie de ce CO2 est
nécessaire pour former et stabiliser le bicarbonate de calcium dans la
solution.
Quoique les eaux usées domestiques
elles-mêmes soient alcalines et n'attaquent pas le béton, on a
observé dans plusieurs cas, d'importants désordres dans des
égouts, en particulier à des températures assez
élevées, lorsque des composés contenant du soufre sont
transformés en H2S par des bactéries
anaérobies. Ce composé n'est pas en lui-même un agent
destructeur, mais il est dissout par le mince film d'humidité recouvrant
la surface du béton et subit une oxydation par les bactéries
anaérobies, ce qui produit finalement de l'acide sulfurique. L'attaque
apparaît donc au dessus de l'eau à l'intérieur de la
canalisation. La pâte de ciment durci est dissoute graduellement
provoquant une détérioration progressive du béton. Une
forme d'attaque assez similaire peut survenir sur les réservoirs de
stockage pétroliers en haute mer. [26]
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