Mécanismes d'altérations des matériaux cimentaires soumis aux milieux fortement agressifs( Télécharger le fichier original )par Soumaya Amina BENSAFIR Université de Mascara- Algérie - Diplôme d'ingénieur d'état en génie civil option : construction civile et industrielle 2010 |
II -2) Attaque par les acides :II -2-1) Introduction :Le béton, matériau basique par excellence, est très sensible aux milieux acides avec lesquels il réagit suivant la réaction bien connue : Base + Acide ? Sel + Eau. La nocivité d'un acide dépend de la solubilité du sel qu'il forme lors de la réaction avec les hydrates du ciment. II -2-2) Définition :Les attaques acides se font principalement suivant un mécanisme de dissolution. Suivant le cas, le phénomène de dissolution peut être accompagné de la précipitation du sel formé lors de la réaction base + acide si le sel est peu soluble. Ce sel peut avoir un effet colmatant et ralentir les réactions de dissolution. Le produit final de dégradation par un acide peut-être un gel de silice résultant de la décalcification totale des C-S-H qui, selon Grube et al [35], peut avoir un rôle protecteur à la surface du béton et ralentir les réactions. Ces auteurs insistent également sur le fait que les conditions de transport de l'agent agressif sont plus importantes que sa concentration. Figure II -10 : La détérioration des silos-tours en béton due à l'attaque des acides d'ensilage. (Photo offerte par : Thomas P. Rylett Ltd., ingénieur-conseil en structures). II -2-3) Les différents types des acides :· les pluies acides (cas extrême des eaux douces) : Les pluies dites « propres » ont généralement un pH compris entre 5,6 et 7. Elles n'ont pas d'effets nocifs sur le béton réalisé suivant les règles de l'art. Par contre, les pluies dites « acides », dont le pH peut descendre jusqu'à 4 et parfois moins, sont agressives. L'occurrence de ce type de pluies est en relation principalement avec la pollution par les oxydes de soufre SOx d'origine industrielle ou domestique (combustion des charbons, fiouls, carburants) qui représentent environ un tiers de tous les oxydes de soufre de l'atmosphère. Le résultat est la formation d'acide sulfurique très hygroscopique qui se condense rapidement en gouttelettes susceptibles de contenir des métaux lourds (mercure, plomb, argent, cadmium) et des sulfates (d'ammonium, de sodium). Les oxydes d'azote NOx également présents se transforment en acide nitrique. La composition et le pH des pluies peuvent varier en fonction de la saison et des conditions locales. Les pluies acides peuvent provoquer des dégradations superficielles suivant des processus plus ou moins complexes faisant entrer en jeu des phénomènes de dissolution dus aux acides (sulfurique, nitrique, carbonique) et d'expansion dus à la cristallisation de sels, tels que le gypse (salissures des façades) ou l'ettringite. · les acides minéraux : Les acides chlorhydrique et nitrique, acides minéraux forts qui par réaction avec la chaux du ciment donnent naissance respectivement, au chlorure de calcium CaCl2 et au nitrate de calcium (NO3)2Ca, sels très solubles, sont très agressifs vis à- vis des ciments Portland. L'acide sulfurique H2SO4, formé, par exemple, lors de l'oxydation de l'hydrogène sulfuré produit dans les réseaux d'assainissement ou par condensation à partir du SO2 atmosphérique, est doublement agressif par son acidité et par l'anion SO4 2- qui peut conduire à la formation de sels expansifs tels que le gypse et l'ettringite. L'acide phosphorique H3PO4, qui entraîne la précipitation de phosphates de calcium très peu solubles, est modérément agressif, mais provoque une désintégration lente du béton. · les acides organiques On les rencontre fréquemment dans les effluents rejetés par les industries chimiques (fabriques d'engrais, papeteries, teintureries, tanneries...) et agroalimentaires (vinaigreries, laiteries, fromageries, distilleries, conserveries, élevages...). Ils sont généralement moins agressifs que les acides minéraux. Ils peuvent dans certains cas avoir un effet colmatant sur le béton : c'est le cas par exemple, de l'acide tartrique (cuves à vin) ou de l'acide oxalique. Les acides organiques tels que les acides acétique, lactique, butyrique, formique, contenus dans certaines eaux usées, attaquent les constituants calciques du ciment. Ces acides faibles, peu dissociés, sont généralement modérément agressifs et provoquent des dégradations lentes. Toutefois leur neutralisation par les ions alcalins (Na+, K+) et alcalino-terreux (Ca2+) entraîne la permanence de la dissociation de l'acide et corrélativement une augmentation de son agressivité par production cumulée d'ions H+. Des dégradations importantes du béton ont pu être observées en milieu agricole dans des silos ou cuves destinés à contenir les fourrages, fumiers, purins et sur des dallages d'étables (érosion, déchaussement des granulats, pertes de masses, mise à nu des aciers...). [10] De façon générale, l'attaque chimique du béton prend la forme d'une décomposition des produits de l'hydratation et de la formation de nouveaux composés qui, s'ils sont solubles peuvent être lessivés et qui, s'ils sont insolubles, peuvent être préjudiciables in situ. Le Ca (OH) 2 est l'hydrate le plus vulnérable, mais les C-S-H peuvent aussi être attaqués. Les granulats calcaires sont également vulnérables. Le béton est aussi attaqué par l'eau contenant de CO2 libre, telles les eaux minérales, qui peuvent aussi contenir du sulfure d'hydrogène. Tout le CO2 n'est pas agressif par ce qu'une partie de ce CO2 est nécessaire pour former et stabiliser le bicarbonate de calcium dans la solution. Quoique les eaux usées domestiques elles-mêmes soient alcalines et n'attaquent pas le béton, on a observé dans plusieurs cas, d'importants désordres dans des égouts, en particulier à des températures assez élevées, lorsque des composés contenant du soufre sont transformés en H2S par des bactéries anaérobies. Ce composé n'est pas en lui-même un agent destructeur, mais il est dissout par le mince film d'humidité recouvrant la surface du béton et subit une oxydation par les bactéries anaérobies, ce qui produit finalement de l'acide sulfurique. L'attaque apparaît donc au dessus de l'eau à l'intérieur de la canalisation. La pâte de ciment durci est dissoute graduellement provoquant une détérioration progressive du béton. Une forme d'attaque assez similaire peut survenir sur les réservoirs de stockage pétroliers en haute mer. [26] II -2-4) Mécanisme d'attaque des acides :Le béton est très alcalin en nature, il est extrêmement susceptible à l'attaque de l'acide. Le mécanisme pour ce processus est très simple. De façon générale, les réactions chimiques et/ou l'élimination physique n'endommage qu'un ou deux composants de la pâte de ciment. Le tableau I.1 mentionne les composants du béton menacés par la corrosion.
Tableau I.1 : Composants du béton menacés par la corrosion. On distingue deux types de détérioration: i- L'agression résolvante ; ii- Le gonflement. i- Agression résolvante : Lorsqu'il y a suffisamment d'eau en qualité de fluide de transport, les composants de la pâte de ciment sont détachés de la surface par l'eau douce ou les substances chimiques nuisibles qu'elle contient. Les granulats non-solubles et des parties de la pâte de ciment durcie sont alors mis à nu, ils se forment une surface en forme de "béton lavé" et la porosité augmente. L'attaque par l'acide est provoquée par la réaction d'un acide et la partie d'hydroxyde de calcium (Ca (OH) 2) de la pâte de ciment qui produite un sous-produit de sel de calcium fortement soluble. Ces sels de calcium solubles sont facilement enlevés de la pâte de ciment affaiblissant de ce fait la structure de la pâte dans l'ensemble. Cette réaction de base est montrée ci-dessous : Acide X + CH CX + H acide hydroxyde de calcium sel de calcium eau Par exemple : Ca(OH) 2 + 2HCl ? CaCl2 + 2H2O Hydroxyde de calcium + acide chlorhydrique ? chlorure de calcium + eau Ca(OH) 2 + 2HNO3 ? Ca(NO3) 2 + 2H2O Hydroxyde de calcium + acide nitrique ? nitrate de calcium + eau Ca (OH)2 + 2 H3PO4 ? Ca (H2PO4)2 + 2H2O Hydroxyde de calcium + acide orthophosphorique ? hydrogéno phosphate de calcium Des acides plus agressifs tels que les acides chlorhydriques, acétiques, nitriques, et sulfuriques produisent les sels de calcium qui sont très solubles. Les acides moins agressifs tels que les acides phosphoriques et humiques produisent des sels de calcium avec une faible solubilité. Ces sels de basse solubilité peuvent agir en tant qu'inhibiteur partiel au processus global en bloquant les pores dans la pâte de ciment par lesquels l'eau passe. Ceci réduit la quantité de sels de calcium qui entrent dans la solution et retardent le processus global. Un cas plus agressif et plus destructif d'attaque par l'acide se produit lorsque le béton est exposé à l'acide sulfurique. Le sel de calcium produit par la réaction de l'acide sulfurique et de l'hydroxyde de calcium est un sulfate de calcium qui cause alternativement une dégradation accrue due à l'attaque de sulfate. Ce processus est illustré ci-dessous : H2SO4 + Ca (OH) 2 Ca (SO4) + 2H2O Acide sulfurique + hydroxyde de calcium sulfate de calcium + eau. (Le produit de sulfate de calcium contribue à l'attaque de sulfate). La dissolution de l'hydroxyde de calcium provoquée par l'attaque acide procède en deux phases. La première phase étant la réaction acide-hydroxyde de calcium dans la pâte de ciment. La deuxième phase étant la réaction acide-silicate de calcium hydraté, cette phase ne commencera pas jusqu'à ce que tout l'hydroxyde de calcium soit consommé. La dissolution de silicate de calcium hydraté, dans les cas les plus avancés de l'attaque par l'acide, peut endommager considérablement le béton. Les attaques acides sont, dans leur principe, similaires au phénomène de lixiviation. En effet, l'acide réagit avec la portlandite qui est dissoute, puis avec les autres hydrates qui sont décalcifiés. On mettra de côté ici l'action des acides forts comme l'acide chlorhydrique ou l'acide nitrique, qui dissolvent entièrement le béton, conduisent à un recul de l'interface matériau-acide, et pour lesquels une protection de surface du béton est absolument nécessaire. La nocivité de l'attaque acide dépend essentiellement de la solubilité du sel formé par réaction avec la portlandite. Par exemple, pour l'acide oxalique on a: (COOH) 2 + Ca (OH) 2 Ca (COO) 2 + 2H2O Le sel formé (oxalate de calcium) est insoluble dans l'eau et donc le béton n'est pas endommagé. C'est aussi le cas avec les acides phosphorique et tartrique. Le cas de l'acide carbonique (solution aqueuse de CO2) est un peu particulier. En effet, comme dans le cas du CO2 sous forme gazeuse, l'acide carbonique réagit avec la portlandite pour former de la calcite. Mais, s'il y a du CO2 en excès et si l'eau est douce, la calcite va réagir avec l'acide carbonique pour donner du bicarbonate de calcium très soluble dans l'eau (165g/l). Il y a alors lixiviation. L'agressivité d'une eau contenant du gaz carbonique dépend donc de la quantité de gaz dissous et de la dureté de l'eau. [3] H2CO3 + Ca(OH)2 CaCO3 + 2H2O Dioxide de carbon Calcite H2CO3 + CaCO3 CaH2 (CO3)2 Bicarbonate de calcium Le tableau I.2 résume quelques solubilités des sels de calcium formés à partir différentes attaques acides :
Tableau I.2 : Solubilité dans l'eau des sels calciques sélectionnés. [3] Les graisses et huiles d'origine végétale et animale réagissent avec l'hydroxyde de calcium pour former des sels d'acides gras. L'effet de dégradation sur le béton dépend principalement de la solubilité dans l'eau des produits de réaction formés. La pâte de ciment fortement alcaline (valeur pH env. 12.5) offre une excellente résistance aux bases. Seules des bases très fortes (hydroxyde de sodium ou potasse caustique, > 20 %) attaquent l'alumine de la pâte de ciment et les granulats amorphes. ii- Effet d'éclatement lié au gonflement : Les attaques sous la forme de gonflement sont provoquées par les réactions des matières transportées dans la structure susceptibles de donner naissance à des formations nouvelles très volumineuses. A l'état plastique, les pressions de cristallisation et d'hydratation sont neutres étant donné qu'il y a des possibilités de déformation. Ce n'est qu'après un état de durcissement minimal que les réactions de gonflement peuvent causer des dommages. (C'est pourquoi une eau contenant des sulfates peut tout à fait être appropriée en qualité d'eau de gâchage, bien qu'elle causerait des dommages ultérieurement au béton durci.) La figure II -11 peut résumer l'attaque par les acides. Figure II -11: L'attaque par les acides. [29] II -2-5) Revue des essais :- Attaque des mortiers par les acides ASTM C 267-96 : Pour la caractérisation de la résistance chimique, des éprouvettes cubiques de mortier 50 x 50 x 50 mm3 sont confectionnées selon la Norme ENV 197-1. Démoulées à 24 heures, les éprouvettes sont conservées dans l'eau à 20° #177;2°C jusqu'au 28ème jour. Après 28 jours de cure sous l'eau, les éprouvettes sont pesées pour déterminer leurs masses avant l'attaque chimique puis elles sont immergées dans les différentes solutions acides : La résistance due aux agressions chimiques des éprouvettes immergées dans ces solutions acides est évaluée selon la Norme ASTM C 267-96. Figure II -12 : Eprouvettes cubiques 50x50x50mm immergées dans la solution acide. Les éprouvettes sont nettoyées 3 fois avec l'eau douce pour éliminer le mortier altéré puis laissées sécher pendant 30mn. Ensuite on procède à la pesée des éprouvettes avec une balance de précision de 0.01g. Cette opération est effectuée à 1-7- 14 -21- 28- 35- 42- 49 et 56 jours après l'immersion dans la solution Les solutions d'attaque sont renouvelées chaque semaine, de telle façon à maintenir un pH constant et égale à un. - Le degré de l'attaque est évalué par la formule de perte de masse suivante : Perte de masse (%) = [(M1- M2)/M1)] x 100 Avec M1 : masse des éprouvettes avant immersion. M2 : masse des éprouvettes après immersion. [3] -Essais de lixiviation aux acides organiques : Des essais spécifiques ont été développés pour étudier le comportement des matériaux cimentaires au contact d'acides organiques présents dans les milieux agricoles (jus d'ensilage, lisiers) ou agroalimentaires (laiterie, fromagerie...). Ils consistent généralement à plonger des échantillons de pâte ou de mortier dans des acides organiques en maintenant le pH à 4 (ou 6) et à suivre l'évolution de la profondeur dégradée (microanalyse par sonde électronique). Les acides utilisés sont généralement l'acide acétique et l'acide lactique, la valeur initiale du pH étant obtenue par addition de soude.. [10] II -2-6) Moyens de protection contre les acides :Indépendamment des moyens supplémentaires de protection qu'il peut être nécessaire de mettre en oeuvre (résines, bitumes et autres revêtements), les mesures à prendre pour réduire les risques d'attaque par les acides, sont les suivantes : - bien identifier les risques : nature de(s) (l') acide(s), concentrations, mode d'action (mobilité, renouvellement, température...), actions extérieures (piétinement, abrasion...) ; - utiliser des ciments à faible teneur en chaux, en particulier des ciments avec ajouts minéraux consommateurs de chaux (laitiers, cendres volantes silico-alumineuses, pouzzolanes réactives, fumées de silice). Les travaux de Mehta [30] effectués sur des bétons de faible rapport E/C contenant soit des fumées de silice soit un ajout de latex styrène-butadiène et soumis à des solutions d'acides chlorhydrique (1 %), sulfurique (1 %), lactique (1 %) et acétique (5 %), concluent à la meilleure tenue générale des bétons avec fumées de silice. L'effet du latex se traduirait par un enrobage des hydrates qui les protègerait des agressions chimiques. Les expériences de Bertron et al. [31] sur des pâtes de ciments (deux CEM I dont l'un à faible teneur en C3A, et un ciment au laitier de haut-fourneau) soumises à un mélange d'acides organiques à pH 4 simulant l'agression accélérée d'un lisier, montrent l'effet bénéfique du laitier sur les pertes de masse des échantillons et confirment la nécessité de réduire la quantité de chaux et d'augmenter celle de la silice. D'autres tests ont été effectués par les mêmes auteurs sur un ciment au laitier de haut-fourneau et trois ciments Portland ordinaires, le premier sans ajout, le deuxième avec ajout de fumée de silice, le troisième avec ajout de cendres volantes : l'analyse du comportement des éléments chimiques Ca, Si, Al, Fe et Mg dans chacune des pâtes de ciments, montre l'influence favorable des éléments Si, Al et Fe sur la résistance chimique des liants vis-à-vis des acides organiques acétique, propionique, butyrique, iso-butyrique et lactique, ce dernier étant le plus agressif . Figure II -13: perte relative de masse de pâtes de ciment (E/C = 0,27) en fonction de la durée d'immersion dans une solution d'acides organiques (maintenue à pH 4) simulant un lisier de porc [10] . Les éprouvettes cylindriques (hauteur 75 mm, diamètre 25 mm) de pâtes de ciment ont été plongées après 28 jours de cure humide dans une solution d'acides organiques composée d'acides acétique (12,8 g/L), propionique (2,8 g/L), butyrique (1,6 g/L), iso-butyrique (0,6 g/L) et valérique (0,3 g/L) ramenée à pH 4 par une solution de soude à 2g/L et maintenue à ce pH par renouvellement de la solution. Le rapport volumique solide / liquide était de 0,059. Les courbes montrent que le ciment au laitier de type CEM III/B est celui qui présente la plus faible perte relative de masse alors que les deux ciments sans ajouts de type CEM I conduisent à des plus fortes pertes de masse, indépendamment de leur teneur en C3A (faible teneur pour le CEM I PM/ES (3,4 %), teneur élevée pour le CEM I (10,5 %)). Des conclusions semblables ont été avancées par De Bélie et al. [32], [33] qui classent la résistance des ciments aux attaques par les acides lactique et acétique dans l'ordre suivant, du plus résistant au moins résistant : ciment au laitier de haut-fourneau, ciment aux cendres volantes, ciment Portland ordinaire et ciment Portland sans C3A. Cependant, il convient de faire attention au choix des critères de durabilité utilisés pour qualifier un matériau ou un liant (profondeur dégradée, perte relative de masse, taux de dissolution des éléments chimiques...) car cela peut conduire à des classements différents en terme de performances. Par ailleurs, les études réalisées par Monteny et al. [34] ont montré l'effet bénéfique de l'addition d'un polymère de type ester styrène-acrylique sur la tenue des bétons soumis à l'acide sulfurique d'origine biogénique. La mise en oeuvre de béton de haute compacité, susceptible de ralentir de manière importante le transport des acides au sein du béton, constitue également une bonne mesure de protection. Toutefois, en cas de risque d'attaque très sévère, il peut être nécessaire d'appliquer une protection supplémentaire, les phénomènes de dissolution et d'érosion superficielle ne pouvant être évités. [10] II -2-7) Conclusion :Le tableau suivant conclue la dégradation due à l'attaque des acides :
II -3) Les dégradations dues à l'eau de mer :La présentation des dégradations des bétons dues aux attaques des sulfates et des acides dans les paragraphes (II-1 et II -2), nous aide à comprendre les attaques marines car l'eau de mer contient une grande proportion d'acide et du sulfate, ainsi que d'autres composants tels que les chlorures. II -3-1) Introduction :L'eau de mer est intrinsèquement un milieu modérément agressif chimiquement. Toutefois, dans les zones de marnage et d'aspersion, soumises aux cycles d'humidification/ séchage ainsi qu'aux effets mécaniques des vagues, le milieu doit être considéré comme fortement agressif. [10] L'eau de mer est constituée de sels chargés en ions chlorures de composés sulfatiques contenant les ions sulfates (SO4 2-), etc. Ces ions sont nocifs au béton lorsqu'ils pénètrent en son sein. La grande particularité de l'eau de mer est que les proportions relatives de ses constituants sont sensiblement constantes (c'est-à-dire indépendante de la salinité (teneur en sels dissous)). La salinité moyenne de l'eau de mer est 35g/l. Le pH de l'eau de mer est proche de 8,2. Les gaz dissous comprennent principalement : 64% d'azotes, 34% d'oxygène ; 1,8% de dioxyde de carbone (soit 60 fois la proportion de ce gaz dans l'atmosphère terrestre). [12] Figure II -14: Quelques photos d'ouvrage en BA dégradés par l'eau de mer. [12] II -3-2) Définition de l'attaque marine :Les environnements maritimes sont parmi les milieux naturels les plus agressifs vis-à-vis des matériaux à matrice cimentaire. En terme de composition chimique, par exemple, la présence d'ions étrangers à la solution interstitielle, tels que les ions chlore ou magnésium peut conduire à la formation de précipités, la dissolution ou la modification de la structure de certaines phases, au sein de la matrice cimentaire. A l'échelle de structures en béton armé, des risques de corrosion des armatures sont à considérer, à la suite de la pénétration d'ions chlore ou d'un abaissement du pH de la solution interstitielle. A ces agressions d'origines chimiques, l'eau de mer est source, pour un matériau cimentaire, d'agressions physiques et mécaniques. La houle et les vagues sont des sollicitations mécaniques qui peuvent abraser la surface de la structure en béton. L'alternance des marées provoque, dans la zone de marnage, des cycles de mouillage/séchage. Des organismes tels que les algues peuvent se fixer et altérer la surface du matériau. Dans la zone immergée, le matériau béton est constamment saturé. L'agression chimique due à l'eau de mer y est prépondérante. Cette zone se caractérise par une évolution importante de la microstructure de la pâte de ciment. En particulier, il se forme à la surface du matériau des couches de carbonates de calcium (calcite et aragonite) et d'hydroxyde de magnésium, qui ont tendance à imperméabiliser la paroi. Plus en profondeur, sur une épaisseur plus ou moins importante le matériau subit une attaque sulfatique. Dans la zone de marnage, puisque le matériau est partiellement soumis à l'eau de mer, les couches protectrices de carbonate de calcium et d'hydroxyde de magnésium ont une épaisseur plus faible. Le matériau est soumis à une agression mécanique provoquée par les vagues, et par des cycles de mouillage/séchage, ce qui se traduit par l'apparition de fissures et par une abrasion de la surface. Lorsque les ions chlore atteignent les armatures de béton armé, il y a un risque de corrosion de ces armatures et par conséquent de fissuration du béton. En partie totalement émergée, le matériau est soumis aux embruns et par conséquent à une alternance de cycles de séchage/humidification, initiant la corrosion des armatures en béton armé qui induisent une fissuration du matériau. [5] Les diférentes zones et les processus d'attaque du béton par l'eau de mer, sont illustrées dans la figure II -15. Figure II -15 : représentation schématique des différents processus d'attaque du béton par l'eau de mer, d'après Mehta. Les ions chlorures constituent un facteur important de risque pour le béton armé : ils pénètrent, en effet, dans le béton et peuvent provoquer la corrosion des armatures. Ces chlorures, d'origine externe, sont présents dans les ouvrages en environnement marin ou lorsque des sels de déverglaçage sont utilisées. Les conditions d'exposition de la structure sont des éléments prépondérants dans le mécanisme de dégradation. Suivant le type d'exposition, différents mécanismes de transports des ions chlorures sont considérés. En environnement marin par exemple (figure II -15), on distingue les zones submergées, pour lesquelles le béton est saturé ce qui conduit a un transport des chlorures uniquement par diffusion, de celles où le transport se fait par diffusion et convection lorsque le béton n'est que partiellement saturée (zone de marnage par exemple). [20] Figure II -16: Conditions d'exposition en environnement marin. [20] II -3-3) L'eau de mer, du point de vue chimique :Suivant les régions du monde, l'eau de mer peut avoir des compositions chimiques différentes. Elle se caractérise généralement par une grande concentration de sels dissous. La salinité peut varier de 10g.l-1 dans la mer Baltique, à 40g.l-1 dans la mer Rouge, voire pratiquement 400g.l-1 dans les mers Caspienne et Morte. Plus proche de nous, l'océan Atlantique a une salinité proche de 35g.l-1 et la mer Méditerranée 40g.l-1. Les sels dissous qui composent l'eau de mer sont généralement : - le chlorure de sodium (NaCl), qui est prépondérant, - le chlorure de magnésium (MgCl2), - le sulfate de magnésium (MgSO4), - le sulfate de calcium (CaSO4), - le chlorure de calcium (CaCl2), - le carbonate de potassium (KHCO3). Tableau I.3 : composition des eaux de l'Atlantique, de la Méditerranée et d'une eau de mer standard [10]. Le tableau I.3 montre que la composition d'une eau de mer est très différente de la solution interstitielle d'une pâte de ciment Portland. Comme pour la lixiviation à l'eau pure, à cause de ces différences de composition, des échanges ioniques vont se mettre en place. L'arrivée dans la matrice cimentaire d'ions étrangers tels que les ions magnésium ou carbonates conduit à la formation de nouvelles espèces, tandis que l'augmentation de la concentration d'ions déjà présents tend à sursaturer la solution interstitielle et par conséquent à précipiter des espèces solides dans un milieu rigide. II -3-4) Les mécanismes d'attaques par les eaux de mer :L'attaque des ciments par l'eau de mer résulte de plusieurs mécanismes physicochimiques plus ou moins simultanés et interdépendants résumés par la figure II -17 : L'effet global n'est ni la somme des effets individuels, ni proportionnel à une action isolée donnée. Par exemple l'eau de mer est moins agressive qu'une solution de même concentration en sulfate de magnésium en raison de la plus grande solubilité de l'ettringite et du gypse dans les solutions chlorurées ainsi qu'en raison de la formation de chloroaluminates de calcium qui consomme une partie de l'alumine (du C3A et des aluminates hydratés) et de la chaux nécessaires à la formation d'ettringite. Les principaux mécanismes mis en jeu, fortement imbriqués, sont les suivants : - dissolution de la portlandite et lixiviation de la chaux des C-S-H ; échanges Ca2+? Mg2+ avec précipitation de brucite Mg(OH)2, insoluble, et transformation progressive des C-S-H en C-M-S-H, sans propriétés liantes ; - formation de monochloroaluminates de calcium C3A.CaCl2.10H2O. Précipitation de gypse secondaire CaSO4.2H2O ; - formation d'ettringiteC3A.3CaSO4.32H2O expansive par réaction des sulfates avec les aluminates du ciment et par transformation des chloroaluminates ; cristallisation de calcite ou d'aragonite CaCO3 ; - formation de thaumasite CaCO3.CaSO4.CaSiO3.15H2O. L'ensemble de ces réactions se traduit par un accroissement de la porosité du béton, par des gonflements et des fissurations, fortement aggravés par les cycles climatiques, les effets mécaniques des vagues et éventuellement par la corrosion des armatures. La formation de brucite et de calcite à la surface du béton peut avoir un effet atténuateur.[10] Figure II -17 : Les différentes actions de l'eau de mer sur le béton. [10] II -3-5) Les paramètres qui conditionnent la durabilité des bétons en milieu marin :La durabilité du béton en milieu marin est fonction d'un nombre relativement important de paramètres : ° Paramètres chimiques (ions agressifs) ° Paramètres géométriques (marées et fluctuation du niveau de la mer) ° Paramètres physiques (cycles de gel-dégel, activation par les hautes températures) ° Paramètres mécaniques (abrasion) Une faible porosité et une faible perméabilité sont essentielles pour obtenir un bon comportement face à l'eau de mer. Un béton bien formulé et bien mûris possède généralement une très bonne durabilité face à l'eau de mer. Des ouvrages maritimes en Belgique sont encore en très bonne condition après plus de 100 ans d'exposition à l'eau de mer. Des dégradations peuvent apparaître très rapidement (5 à10 ans) dans le cas d'ouvrages mal conçus (mauvais recouvrement des armatures) ou fabriqués avec un béton de mauvaise qualité (choix du type de ciment, dosage en ciment trop faible, E/C trop élevé, etc.). [4] L'attaque par l'eau de mer est fortement conditionnée par la température de l'eau. Activation des réactions chimiques - accélère la cinétique des réactions de dégradation. II -3-6) Essai de tenue à l'eau de mer :La norme NF P 18-837 propose un essai de tenue à l'eau de mer pour les produits de calage et/ou de scellement à base de liants hydrauliques. Cet essai, qui a souvent été transposé aux mortiers normaux, permet un classement des ciments. Bien que de nombreux essais sur bétons aient été effectués soit en laboratoire, soit en milieu naturel dans des stations expérimentales (Boulogne-sur-Mer, La Rochelle, Treat Island aux USA), il n'existe pas de mode opératoire recommandé ou normalisé. [10] II -3-7) Paramètres contrôlant la durabilité du béton en milieu marin :
° Un ciment à faible teneur en C3A et en C3S peut être nécessaire. ° Utiliser un ciment ayant un rapport C3A /SO3 inférieur à 3. ° Le choix du type de liant est un paramètre important de la durabilité des bétons en milieu marin ° L'expérience européenne montre que les liants contenant une forte teneur en laitiers (>60%) ont un bon comportement en eau de mer.
II -3-8) Conclusion :Le tableau qui englobe les dégradations dans un milieu marin.
II -4) Attaque par les ions chlorures :II -4-1) Introduction :Dans les bétons les chlorures proviennent pour l'essentiel du milieu extérieur, mais il est important de limiter les sources internes chlorures. Pour l'acier, le processus de corrosion généralement admis et débute par la dissolution du métal et la formation des ions ferreux. L'hydrolyse de ces derniers entraîne l'acidification de la matière et la formation d'hydroxyde ferreux insoluble dont l'évolution donne la rouille. Figure II -18 : Agression du béton par activité des chlorures. [2] La diffusion d'ions de chlorure dans le béton est le résultat de complexes mécanismes où l'échange d'ions entre la solution agressive et la solution poreuse (interstitiel) dans le béton joue un rôle important. · La capacité de fixation des ions ClÎ par le ciment dépend de la nature du ciment, utilisé principalement de la quantité d'aluminate C3A présente dans le clinker. · D'autres espèces ioniques peuvent provenir sur la fixation chimique des chlorures. · La vitesse de pénétration des chlorures dépend de la porosité de la pâte du ciment, elle décroît avec le rapport E/C, de façon exponentielle et dépend de la concentration de la solution environnante en sels. [2] II -4-2) Définition de l'attaque par les ions chlorures :La corrosion des armatures générée par les ions chlorures est la principale cause de dégradation des structures en béton armé. Les chlorures agissent dans les mécanismes de corrosion en diminuant la résistivité de l'électrolyte et en permettant un amorçage plus rapide de la corrosion en dépassivant la couche superficielle. La corrosion qui en résulte sous forme de piqûres à la surface de l'acier est une corrosion localisée. Les chlorures agissent aux zones anodiques, de surface bien plus petite que celles des zones cathodiques, et la vitesse de corrosion sur les zones anodiques s'en trouve fortement augmentée. Une fois la corrosion amorcée, il est bien plus difficile d'y remédier que dans le cas de la carbonatation car le processus est autocatalytique. [12] II -4-3) Source de l'attaque des ions chlores :Les chlorures présents dans le béton peuvent provenir de deux sources différentes. Soit ils sont présents au moment du gâchage : utilisation d'eau contenant des chlorures ou agrégats contaminés. Soit ils proviennent de l'environnement (atmosphère marine, sels de déverglaçage, produits chimiques) et ont diffusés dans le béton. Les chlorures existent sous deux formes dans le béton : · Les chlorures libres qui sont dissous dans la solution interstitielle ; · Les chlorures piégés ou liés qui sont combinés à des hydrates du ciment et à des agrégats, ou absorbés physiquement sur les parois des pores. [12] On considère que seuls les chlorures libres peuvent diffuser et jouer un rôle actif dans le processus de dépassivation et de corrosion des armatures. II -4-4) Mécanisme d'attaque des ions chlores :Les ions chlorures qui pénètrent dans le béton peuvent réagir chimiquement avec l'aluminate tricalcique (C3A en nomenclature des cimentiers) et former des monochloroaluminates hydratés (C3A. CaCl2. 10H2O), relativement stables dans le béton. Par rapport au mécanisme induit par la carbonatation, le mécanisme de corrosion électrochimique en présence de chlorures est différent dans le sens où la corrosion n'est plus une corrosion généralisée mais une corrosion locale sous forme de piqûres [12]. Si l'on observe que la vitesse de corrosion est, en général, plus élevée en présence d'ions chlorure, les mécanismes physico-chimiques sous-jacents ne sont pas encore parfaitement expliqués. Toutefois, il apparaît qu'une conséquence de la présence des ions chlorure est la dissolution locale de la couche passive et une migration à travers celle-ci. De très faibles concentrations en chlorures (> 0,01 %) modifieraient la morphologie de la couche passive en formant le composé FeOOH, puis des ions complexes instables FeCl3 - qui consomment les ions hydroxyles présents selon les réactions : Fe + 3 Cl- ? FeCl3 - + 2e- FeCl3 - + 2 OH-? Fe(OH)2 + 3 Cl- Les électrons libérés par la réaction d'oxydation se déplacent à travers le métal jusqu'aux sites cathodiques. Selon les réactions ci-dessus, le processus conduit à une diminution du pH et à un recyclage des ions chlorure (Figure II -19). La création de piles électrochimiques sur l'armature conduit progressivement à la dissolution du métal dans les zones anodiques. Figure II -19 : mécanisme de la corrosion électrochimique en présence de chlorures. L'attaque du métal est localisée en des points particuliers se matérialisant par des trous étroits : les piqûres. A la surface du métal, on observe une distribution de micropiles, les piqûres sont les sites anodiques et le film passif environnant constitue de larges surfaces cathodiques. Les piqûres constituant les sites anodiques et le film passif les surfaces cathodiques, on observe des micropiles dont le rapport des surfaces cathode/anode est élevé. Cela conduit à des densités de courant de corrosion localement très grandes. Au niveau des aires cathodiques, la production des ions OH- relève le pH, ce qui réduit les possibilités d'attaques ultérieures sur ces surfaces. Pour que les réactions se poursuivent, il faut que les ions Cl- soient toujours disponibles au détriment des ions OH- afin de maintenir le rapport Cl-/OH- au-dessus de la valeur critique de dépassivation. Or, la formation des produits de corrosion intermédiaires contenant du chlore diminue temporairement la concentration en chlorures. En outre l'apport d'ions OH- à partir de la réserve alcaline du liquide interstitiel tend à repassiver les zones attaquées et limite la propagation de la corrosion. Si l'apport en chlorures se maintient, la concentration de ces derniers augmente dans les aires anodiques, puis se redistribue grâce aux courants de corrosion sur toute l'armature. Les variations d'humidité et les gradients de concentration en chlorures créent de nouvelles anodes qui finissent par se rassembler en larges zones corrodées. La corrosion est d'autant plus élevée que la quantité de chlorures disponible au niveau de l'armature est importante. Il est difficile de connaître exactement la concentration en chlorures libres « critique » (appelée encore « seuil ») susceptible de permettre l'amorçage de la corrosion des armatures. En effet, cette concentration dépend de nombreux paramètres tels que, notamment, la microstructure au contact des armatures. De plus, Béton d'enrobage la concentration en chlorures de la solution interstitielle n'est pas identique (même au voisinage des armatures) à la concentration au niveau des sites de corrosion (piqûres). En outre, l'amorçage de la corrosion dépend du potentiel électrochimique de l'acier .Un critère d'amorçage de la corrosion souvent retenu est celui proposé par Hausman [25]. Il prend en compte le rapport entre la concentration en chlorures libres et en hydroxyles au droit des armatures : [Cl-] / [OH-] = 0,6. Plus ce rapport est élevé, plus la vitesse de corrosion est grande. Ce critère est compatible avec une analyse thermodynamique de la stabilité de la couche de passivation en fonction du pH, et sa fiabilité a été démontrée expérimentalement .On peut alors déduire de ce critère la valeur de la concentration « critique » en chlorures, si l'on connaît le pH de la solution interstitielle. Précisons de plus que cette relation permet d'intégrer les interactions entre carbonatation (diminution de la concentration en OH-) et pénétration des chlorures (augmentation de la concentration en chlorures libres). Rappelons ici que l'état hydrique du béton est un paramètre déterminant vis-à-vis de la corrosion des armatures, d'une part, pour le transport des espèces chimiques (nécessité d'une phase gazeuse pour le transport du CO2 gazeux et d'une phase liquide pour les ions chlorure), et, d'autre part, pour les réactions chimiques entre ces espèces et le béton. [10] II -4-5) L'attaque des structures par les chlorures via les fissures ou la porosité :L'évaluation de la durée de vie des structures de béton fissurées est influencée par leurs caractéristiques, et par les propriétés du béton et les conditions d'exposition environnementales comme il est indiqué à la figure II -20. [19] Figure II -20: Schéma de l'attaque des structures par les chlorures via les fissures ou la porosité. [19] II -4-6) Les essais de pénétration des ions de chlores :-Essai de migration des ions chlorure : Figure II -21: Essai de migration. Cet essai permet la détermination du coefficient de diffusion des chlorures en régime non stationnaire à partir d'un essai de migration sous champ électrique. Un échantillon cylindrique de béton est placé au centre d'une cellule constituée de deux compartiments qui contiennent, du côté aval, une solution exempte de chlorures (solution basique), et du côté amont, une solution de NaCl. A l'extrémité de chaque compartiment, se trouve une électrode (métallique) reliée à un générateur de tension stabilisée. Une différence de potentiel est appliquée entre ces électrodes de sorte que les ions chlorure migrent en direction du compartiment aval. L'essai consiste à mesurer la profondeur de pénétration des chlorures xd induite par une différence de potentiel électrique DE entre les faces de l'échantillon appliquée pendant un temps Dt. Cette profondeur de pénétration est mesurée après fendage de l'échantillon à l'aide d'une méthode colorimétique (pulvérisation de nitrate d'argent). Le coefficient de diffusion apparent des ions chlorure est calculé à partir de DE, Dt et xd. [18] -Autres essais de migration : Pour accélérer le transport des chlorures, l'essai de migration a été développé. Le principe consiste à appliquer une différence de potentiel dans la cellule de diffusion des chlorures, afin d'accélérer leur transport à travers le matériau. Il existe deux types d'essais : A- Essai de migration en régime permanentLa figure (II -22), montre le principe de cet essai. Une éprouvette de béton saturée est placée entre deux conteneurs avec deux solutions différentes. Le conteneur attaché à la cathode contient une solution de chlorure de sodium, hydroxyde de sodium et hydroxyde de potassium. Le conteneur attaché à l'anode contient la même solution sauf les chlorures de sodium. La mesure de taux de chlorures est effectuée quand la concentration de chlorures dans le béton est stable. Le champ électrique utilisé est situé entre 3 et 10V/cm. Pour la majorité des essais, le champ électrique est fixé à 4 V/cm. En effet cette valeur est suffisante pour le mouvement des chlorures et permet de limiter l'augmentation de la température, par conséquent, le risque de modification de la porosité du béton est négligeable. Sous l'effet du champ électrique, les ions chlorures se déplacent de la cathode vers l'anode quand le régime de l'écoulement est stable, et le coefficient de migration peut être déterminé. Figure II -22: Cellule de migration en régime permanent. B- Essai de migration en régime transitoire :Cet essai a pour but la détermination de la profondeur de pénétration des chlorures pendant l'état de transition. Le premier essai de migration à l'état non stable est appelé « Rapid chloride permeability test ». Cette méthode est utilisée principalement aux USA. Comme dans l'essai de migration en régime permanent, une tranche de béton est mise entre deux électrodes et un champ électrique est appliqué à travers l'échantillon. Les paramètres qui sont mesurés pendant l'essai sont :
D'autres essais de migration en régime transitoire ont été développé par Tang Luping et par des chercheurs du LMDC (Laboratoire Matériaux et Durabilité des Constructions), à Toulouse qui permettent de déterminer un coefficient de diffusion. Un champ électrique a été appliqué à travers l'éprouvette comme dans l'essai de migration en régime permanent, mais l'équipement utilisé et la façon d'obtenir le coefficient de migration sont fondamentalement différents. Les détails de la cellule de migration utilisée au LMDC sont présentés sur la figure (II -23). [19] Figure II -23: Cellule de migration en régime transitoire (LMDC standard). [19] II -4-7) Influence de la microstructure et des additions minérales sur l'attaque des chlorures :L'ajout de produits minéraux modifie la valeur critique du seuil de dépassivation, mais surtout réduit la vitesse de pénétration des chlorures, ce qui est déterminant dans le développement de la corrosion. On peut cependant affirmer qu'en ce qui concerne la période d'amorçage, la qualité du béton (faible rapport E/C et classe de résistance du ciment élevée) a une plus grande influence que le choix du type de ciment utilisé et que les conditions d'exposition des ouvrages jouent un rôle majeur sur la corrosion des armatures. [10] II -4-8) Précaution contre la pénétration des ions chlores :La fabrication d'un béton dense et compact est la précaution « de base » á prendre, quelles que soient les espèces chimiques qui composent le milieu agressif auquel le béton est exposé. Toutefois, le choix d'un ciment « le mieux approprié » reste la mesure additionnelle indispensable pour garantir une durabilité á long terme vis-à-vis d'une substance « nocive » spécifique tel que la pénétration des ions Cl-. Le béton á base de laitier moulu a été largement utilisé en Europe pour les constructions situées en bord de mer : c'est notamment le cas en Hollande. Figure II -24 : Coefficient de diffusion en fonction du Type de Ciment. [28] Un coefficient de diffusion plus élevé témoigne d'un taux de pénétration plus élevé des chlorures dans le béton. [28] La désignation des types de ciment est montrée dans le chapitre I paragraphe (I -7). II -4-9) Conclusion : L'attaque par les ions chlorures est illustrée dans le tableau suivant :
II -5) La carbonatation :II -5-1) Introduction :Un climat doux et tempéré, un environnement urbain, peuvent être considérés comme confortables et propices aux activités humaines. Cependant, du point de vue du béton armé cela constitue un environnement agressif, qui pourra affecter la durabilité d'une structure. C'est bien la durabilité du béton armé qui est concernée, et non directement celle du béton. En effet, si la carbonatation entraîne des modifications notables dans la structure du matériau, elle n'altère pas systématiquement ses propriétés mécaniques et de transfert. Il semble même qu'elle conduise à une augmentation de la résistance en compression et du module, cependant le matériau deviendrait plus fragile. En revanche, la carbonatation peut entraîner la corrosion des armatures. Le dioxyde de carbone CO2 qui pénètre dans le béton se dissout dans la solution interstitielle et réagit avec la portlandite Ca(OH)2 et les silicates de calcium hydratés. La réaction provoque la diminution du pH de la solution interstitielle, et les armatures en acier ne sont alors plus passivées. En présence de dioxygène, leur corrosion peut alors débuter. Le gonflement des produits d'oxydation des armatures qui en résulte pourra à terme entraîner l'éclatement du béton d'enrobage. [11] II -5-2) Définition de la carbonatation :La carbonatation est un phénomène de vieillissement naturel qui concerne tous les bétons et qui conduit à la formation de carbonates de calcium par réaction entre les composés des ciments (principalement la portlandite) et le dioxyde de carbone atmosphérique (CO2), présent dans l'air à un taux moyen de 0,03 % en volume. Ce taux est plus important en milieu urbain qu'en milieu rural. Elle est un phénomène chimique présent dans l'épiderme du béton tout au long de sa vie. La combinaison de l'hydrate de chaux (contenu dans le ciment) et de l'acide carbonique de l'air forme du calcaire en libérant de l'eau, le pH du béton baisse et la corrosion des aciers commence. [2] [13] A partir d'une distance de 25 à 30 mm à l'intérieur du béton, il n'y a plus d'échange gazeux grâce aux dépôts de calcaire de la pâte du ciment. Le pH reste stable à une valeur d'environ 11. La corrosion ne se manifeste pas. Compte tenu de l'absence d'échanges gazeux, les bétons immergés ne carbonatent pas. Il est à remarquer que des manifestations de carbonatation peuvent survenir sur des faces intérieures de béton lors de climatisation et d'humidification de l'air ambiant. [14] Figure II -25: Coupe théorique d'un mur en béton. [14] II -5-3) Mécanisme de la carbonatation :Les armatures du béton armé sont passivées, c'est-à-dire recouvertes d'une couche protectrice d'oxydes, dans un milieu basique de pH environ égal à 13 comme dans la solution interstitielle du béton. La portlandite constitue une réserve importante d'ions OH-: Ca(OH)2 ? Ca2+ + 2 OH- Le dioxyde de carbone, présent dans l'atmosphère en faible proportion, 0,035 % en volume, se dissout dans l'eau et forme l'acide H2CO3. Ce dernier réagit avec la portlandite pour former des carbonates de calcium qui précipitent selon la formule suivante [17] : Ca(OH)2 + CO2 + H2O ? Ca2+ + CO- 3 + 2H++ 2OH-? CaCO3 + 2H2O. Les réactions chimiques de la carbonatation sont illustrées par la figure II -26. Figure II -26: mécanisme de carbonatation de Ca(OH)2 . [10] Tant que de la portlandite peut se dissocier et apporter des ions OH- un fort pH est maintenu. Mais quand la majeure partie de la portlandite est consommée, le pH de la solution interstitielle diminue fortement, les armatures sont alors dépassivées. Le front (ou la profondeur) de carbonatation est théoriquement défini comme étant la limite entre la zone carbonatée où le pH n'est plus assez élevé pour protéger les armatures et la zone non carbonatée (ou très faiblement) où le pH est encore égal à 13. Pour suivre l'évolution du phénomène, il est essentiel de pouvoir déterminer la profondeur de carbonatation. La méthode consiste à rompre un échantillon de béton et à répandre sur la face de rupture une solution alcoolique de phénophtaléine qui sert d'indicateur coloré. Pour un PH de l'ordre de 9, on observe le virage de l'indicateur: la partie superficielle carbonatée reste incolore, alors que la partie interne non transformée prend une coloration rose (voir figure II-30). Cependant, la méthode à la phénophtaléine ne donne qu'une vue incomplète de la zone carbonatée qui s'étend au-delà du front de neutralisation décelé par le virage. Pour un échantillon de béton avec E/C=0.7, le PH évolue progressivement sur une épaisseur de 20 mm comme l'indique la figure II -27 suivante. Figure II -27: Gradient de pH en fonction de la profondeur carbonatée. [17] Par ailleurs, la profondeur du front de neutralisation n'est pas régulière, les valeurs les plus grandes sont à considérer en priorité car elles témoignent d'un béton perméable avec risques précoces de corrosion des armatures. La vitesse de carbonatation est fonction de nombreux paramètres dont les plus importants sont la porosité et le taux d'humidité relative du milieu ambiant. Elle est maximale pour une humidité comprise entre 40% et 80% (60% semble la valeur la plus critique). - Dans les environnements secs, la quantité d'eau est insuffisante pour dissoudre de CO2. - Dans les environnements très humides, le béton est saturé, ce qui ralentit considérablement la diffusion du CO2. [17] II -5-4) Les conséquences de la carbonatation :La principale conséquence de la carbonatation est l'amorce d'un phénomène de corrosion des armatures du béton armé ou précontraint lorsque le front de carbonatation est au moins égal à leur profondeur d'enrobage. Les désordres associés correspondent alors pour l'essentiel à des fissures et à des épaufrures (expulsion du béton d'enrobage) consécutives aux gonflements provoqués par la formation d'oxydes et hydroxydes de fer sur les armatures. Ces dernières peuvent alors montrer des diminutions de section importantes ou, au stade ultime, des ruptures ayant des conséquences graves sur la capacité portante des éléments de structure. Une conséquence secondaire du phénomène de carbonatation correspond à une densification de la zone carbonatée par rapport au béton sain. Cette densification, qui ne revêt aucun caractère pathologique, peut, dans certaines conditions, conduire à une diminution relative de 10 à 15 % de la porosité de la zone carbonatée, formant ainsi une barrière diffusionnelle limitant les phénomènes de transfert. [13] II -5-6) Possibilité de ralentir la progression de la carbonatation : En :- Augmentant le dosage en ciment ; - Diminuant le rapport E/C ; - Augmentant le temps de cure ; - Augmentant la résistance à la compression. L'incorporation de fortes teneurs en cendres volantes (> 30%) et en laitiers (>50%) peuvent accélérer significativement la vitesse de carbonatation du béton. Dans ce cas, une cure humide prolongée est de rigueur. [17]
du béton d'un pilotis. II -5-7) Les essais sur la carbonatation :-Essai de carbonatation
accélérée : Figure II -29: Essai de carbonatation accélérée. [18] -La mesure de la carbonatation : La technique la plus simple à mettre en oeuvre pour mesurer la profondeur de carbonatation des bétons correspond au test à la phénolphtaléine réalisé sur des fractures fraiches de béton. La phénolphtaléine est un indicateur de pH coloré dont le virage se situe aux alentours de 9. Cela permet de différencier la zone carbonatée (pH < 9) qui reste incolore, de la zone non carbonatée (pH > 9 et allant jusqu' à 13) colorée. Cet essai doit être effectué à l'échelle d'un ouvrage, sur un nombre de points de mesure représentatifs en tenant compte des conditions locales d'exposition et de l'hétérogénéité possible du matériau. Ce test permet une mesure fiable et rapide de la profondeur de carbonatation dans le cadre de diagnostic d'ouvrages. [13] Figure II -30 : Section d'éprouvette partiellement carbonatée, avec mise en évidence de la zone carbonatée (incolore) par la phénolphtaléine. [11] II -5-8) Techniques d'investigation :Les différentes techniques d'investigation sont: - l'observation visuelle directe ; - le prélèvement d'échantillons (carottes ou éclats) ; - la détermination de l'âge du béton ; - mesure du pH par contact avec des réactifs, - la mesure électrique afin de localiser les armatures et d'en déterminer leur diamètre et la distance du front de carbonatation. II -5-9) Méthodes d'assainissement et actions préventives :A- Carbonatation avec éclats et armatures apparentes :Les diverses étapes de restauration sont énumérées ci-après: - Lavage, bouchardage, hydrodémolition du béton afin de détacher toutes les parties non solidaires de l'ensemble. - Décapage par sablage des armatures, couper celles très corrodées. - Protection des fers par un revêtement alcalin. - Réalisation de l'adhérence à la structure par l'emploi de mortiers de résine. - Application d'un enduit de finition micro-perméable et éventuellement d'une peinture micro-poreuse. B- Carbonatation sans ou avec très peu de dégâts :Il est possible de ré-alcaniser le béton et donc de recréer un environnement fortement basique autour des armatures, par infiltration de substances alcalines. Cette solution respecte les caractéristiques esthétiques et géométriques initiales de l'ouvrage. Cette technique consiste en l'application contre la surface à traiter d'un "manteau" composé d'une pâte cellulosique, imbibée d'une solution alcaline, installée contre un treillis métallique. Une circulation électrique est mise en place entre l'armature du béton et le "manteau". En deux à trois semaines, la solution alcaline est passée dans le béton. Le milieu est à nouveau non corrosif. Il convient ensuite de laver la surface et d'y appliquer une peinture micro-poreuse. Cette méthode n'est toutefois utilisée que lorsque les effets de la carbonatation sont minimes, elle est plutôt considérée comme prophylactique (préventif ou protecteur). C-Actions préventives :Assurer une distance de 30 mm entre les armatures et les faces du béton. Les dernières normes en la matière le stipule très clairement. Pour des ouvrages particuliers en milieux très exposés, il est possible d'utiliser des armatures zinguées, revêtues de composés époxydiques ou en acier inoxydable. [14] II -5-10) Conclusion :La pathologie de la carbonatation est résumée dans ce tableau suivant :
II -6) Corrosion des armatures :La corrosion des armatures est induite par la carbonatation et par la pénétration des ions chlores, c'est pour cette raison, qu'il faut mieux connaître ces deux altérations chimiques avant d'étudier la corrosion des bétons armés. II -6-1) Définition de la corrosion:Le béton, du fait de sa forte alcalinité, apporte aux armatures une excellente protection face à la corrosion. Dans ces conditions de pH, l'acier est protégé grâce à la formation d'un film extrêmement mince et adhérent appelé film passif pouvant être constitué de divers oxydes. En présence d'eau et d'oxygène, ce film est détruit par différents agents tels que les chlorures, les sulfates et le gaz carbonique. Le métal est alors dépassivé et la corrosion devient possible avec formation de nouveaux oxydes, dont le volume au moins deux fois supérieur (jusqu'à six fois supérieur pour certains oxydes) à celui du fer initial entraînera des fissurations du béton qui accéléreront le processus de corrosion en facilitant la diffusion de l'oxygène et des espèces corrosives. La corrosion des armatures est issue d'un processus électrochimique qui ne peut se produire que si certaines conditions sont réunies. En effet pour qu'un acier se corrode, il doit y avoir simultanément : - un électrolyte ayant une conductivité ionique non négligeable ; - une quantité suffisante d'oxygène accédant à la zone catholique ; - la présence d'un agent agressif (comme les ions chlores). [22]
a) Fissuration b) Éclatement localisé
c) Corrosion d'armature. Figure II -31: Exemples de détériorations dues à la corrosion des poteaux en béton armé dans une bâtisse à Mascara (Photo A.Bensafir) II -6-2) Processus de la corrosion :Il est d'abord important de souligner que la durabilité de n'importe quelles structures est conditionnée par le béton qui protège physiquement et chimiquement l'acier de la corrosion. En effet, la forte alcalinité (pH =13) de la solution interstitielle contenue dans les pores du béton permet la formation d'une couche passivante d'oxydes et d'hydroxydes de fer qui protège les aciers de la corrosion. Cependant, certaines espèces chimiques délétères, provenant du milieu environnant, peuvent traverser la barrière physique que constitue le béton d'enrobage, perturber la stabilité chimique de la couche passivante et corroder les armatures. La carbonatation du béton par le dioxyde de carbone (CO2) de l'atmosphère et la pénétration des ions chlorures (provenant de l `eau de mer, des embruns marins ou des sels de déverglaçage) sont les deux principales causes de ce phénomène. [21] Figure II -32 : Processus de corrosion dans le béton armé. [21] Les processus fondamentaux de la corrosion des aciers dans le béton sont illustrés sur la figure II -33 suivante : Figure II -33: Représentation schématique de processus de base de la corrosion des aciers dans le béton. L'oxygène qui peut diffuser dans le béton via le réseau poreux, se dissout dans la solution interstitielle et finit par atteindre la surface de l'acier. Sur cette surface, dans la zone catholique, l'oxygène est réduit en ion hydroxyde (OH-) selon la réaction électronique : O2 + 2H2O ? 4e- + 4OH- C'est, dans la plupart des cas, la réaction cathodique associée à la corrosion des aciers dans le béton. Cependant, dans le cas d'un béton carbonaté ayant un pH moins élevé (8-9), l'eau peut être réduite en dihydrogène selon la réaction: 2H2 O+ 2e- ? H2 + 20H- Quelque soit la réaction cathodique mise en jeu, la production d'ions hydroxyde fait augmenter le PH de la solution interstitielle au niveau de la zone cathodique. La réaction anodique correspondante est la dissolution de l'acier conformément à la réaction : Fe? Fe2+ + 2e- . Celle-ci entraîne une diminution de la section de l'acier qui peut finir par rompre. Les ions Fe2+, produits intermédiaires de la corrosion, pouvant s'oxyder ensuite en Fe3+ sous certaines conditions, s'accumulent à la surface de l'acier ou sont dissous dans la solution interstitielle ou bien encore diffusent loin de l'armature en fonction des caractéristiques du milieu. Dans la solution interstitielle du béton, normalement riche en oxygène et possédant un pH élevé, les ions Fe2+ peuvent rester sous la forme Fe (OH)2 ou être oxydés en ions Fe3+, qui hydrolysés se trouvent alors sous la forme Fe (OH)3, formant ainsi un mince film passif à la surface de l'acier, ce qui va retarder la dissolution du fer. Dans ce cas, l'acier est bien protégé et il n'y aura pas de dommages détectables dus à la corrosion. Sous certaines conditions, le cas lorsque le béton a été carbonaté et que le pH de la solution interstitielle est descendu en dessous de 9 ou lorsqu'une qualité suffisante d'ions chlorure (Cl-) a pénétré dans le béton, saturé en eau, et atteint l'armature de ce fait, la section de l'acier peut continuer de se réduire et la rupture de l'armature se produire. Ce processus, préjudiciable à la durée de vie d'un ouvrage, est favorisé lorsque le béton est saturé en eau car l'évacuation des ions Fe2+ de la surface de l'acier est facilitée. Ces ions peuvent alors migrer à la surface du béton et y former des rouilles mais ce type de dommage dû à la corrosion n'a pas d'impact significatif sur l'enrobage du béton ; il améliore même l'adhérence du béton sur l'acier. La corrosion devient préjudiciable lorsque la vitesse de corrosion de l'acier est très élevée et que les produits de corrosion, ne pouvant être évacués de la zone de corrosion, s'accumulent à la surface de l'acier. C'est le cas si la solution interstitielle est riche en oxygène et en espèces agressives, et si l'enrobage de béton n'est pas assez humide. Une partie des ions Fe2+ dissous peuvent alors s'oxyder et être transformés en oxydes ferriques hydratés (Fe2O3, H2O) qui se déposent ensuite, avec des oxydes et hydroxydes ferreux, à l'interface acier béton. Le volume des produits de corrosion étant 2 à 6 fois supérieur à celui du métal, une contrainte d'expansion se crée à cette interface plus acier est corrodé, plus cette contrainte est importante, et lorsque celle-ci devient plus importante que la résistance à la traction de l'enrobage, des fissures apparaissent. Ces fissures vont accélérer la pénétration des espèces agressives et de ce fait les processus de corrosion. Un processus corrosion ? fissures ?pénétration d'espèces agressives ? plus de corrosion ? plus de fissures ?plus d'espèces agressives ... s'instaure. [22] II -6-3) Les deux étapes de la corrosion :Dans la durée de vie d'une structure en béton armé, on peut distinguer deux périodes : Une période d'initiation et une période de propagation (Figure II -34) .La durée de la première période est déterminée par la vitesse de neutralisation du béton d'enrobage ou la vitesse de pénétration de substances agressives telles que les ions chlorures. Lorsque la concentration en chlorures au niveau de la barre d'acier est suffisamment importante, la période de propagation commence, puis l'acier se corrode jusqu'à ce que la section des aciers soit inférieure à une valeur acceptable. On atteint alors la durée de vie de la structure ou la durée d'utilisation avant réparation. La façon la plus simple et la plus efficace de prédire la durée de vie des ouvrages consiste à évaluer la phase d'initiation (ou d'incubation) de la corrosion. [21] Figure II -34: Evolution du niveau de corrosion des armatures en fonction du temps. [21] Selon TUUTI [41], l'évolution de la corrosion des armatures du béton s'effectue généralement en deux étapes (Figure II -35) - Au départ, l'acier est stabilisé par la couche de passivation qui empêche la formation de rouille supplémentaire. Puis, durant la phase d'amorçage (incubation), les espèces néfastes vis-à-vis de la corrosion pénètrent dans le béton et l'acier se dépassive alors progressivement. Cette dépassivation peut être engendrée par de nombreux facteurs dont la carbonatation et la pénétration des ions chlores. - Les oxydes et hydroxydes produits par des réactions d'oxydation à la surface du métal s'accumulent. La formation de ces produits d'oxydation va alors entraîner un gonflement qui finira par provoquer la fissuration de l'enrobage de béton (point D). Figure II -35: Schéma de la cinétique de corrosion des armatures dans le béton. [22] En pratique, il doit être fait en sorte que la période d'amorçage (incubation) soit la plus longue possible. Pour cela, il faut prévoir des épaisseurs d'enrobage suffisantes et choisir une formulation de béton permettant de diminuer sa perméabilité à l'eau et aux gaz.[22] II -6-4) Facteurs influents de la corrosion :Les facteurs environnementaux (humidité, température, dioxyde de carbone, ions chlorure) ne peuvent affecter directement le processus de corrosion mais ils peuvent causer des dégradations du béton et accélérer l'entrée d'espèces agressives rendant la solution interstitielle en contact avec l'acier plus corrosive. La température et l'humidité, tout comme les autres facteurs pouvant détériorer le béton, jouent aussi un rôle important dans la corrosion des armatures. La corrosion de l'acier n'est donc pas dépendante d'un unique paramètre mais de plusieurs dont les interactions concourent ou non à la corrosion. -Influence de l'enrobage : L'épaisseur de l'enrobage en béton détermine le temps que vont mettre les espèces agressives pour arriver à l'armature. -Influence de la composition du béton : Tout ce qui conditionne la solution interstitielle et la porosité du béton est un facteur pouvant affecter ou non la corrosion. Le type et la teneur en liant, les additions minérales et le rapport E/C (Eau/ciment) déterminent la performance d'un béton. -Influence de l'humidité : L'effet du taux d'humidité, ou degré de saturation en eau, dans le béton est important car la vitesse de corrosion dépend fortement de ce taux, celui-ci influençant directement la conductivité, la résistivité électrique et la diffusion de l'oxygène. -Influence de la résistivité du béton : La résistivité électrique affecte de manière significative la corrosion des armatures puisqu'il existe une relation entre la corrosivité et la résistivité du béton. La résistivité du béton est fonction de la composition de la solution interstitielle, de la microstructure du béton (taille et distribution des pores), de l'humidité et de la teneur en sels ainsi que de la température. -Effet de l'oxygène : Dissous dans la solution interstitielle, l'oxygène est primordial dans la réaction cathodique du processus de corrosion des armatures dans le béton. -Autres agents agressifs : Des sels, contenus dans l'eau pénétrant le béton, peuvent contribuer à la formation de produits de corrosion sur l'acier. Ainsi, les ions sulfate agissent qualitativement comme les ions chlorures et certains sels solubles tels les perchlorates, les acétates, les halogénures autres que les chlorures peuvent aussi être corrosifs pour les armatures. [12] II -6-5) Conséquences des désordres provoqués par la corrosion des armatures :-L'aspect du parement de l'ouvrage : Les efflorescences et les tâches de rouille qui sont la conséquence de la pénétration d'agents agressifs dans l'enrobage du béton, altèrent l'aspect de l'ouvrage. Parfois, ce point est considéré comme étant de peu d'importance par le gestionnaire des ouvrages mais par contre ce sont les fissurations et les fracturations du béton qui commencent à inquiéter le gestionnaire car des éclats de béton peuvent se produire. -La sécurité vis-à-vis des usagers : Les éclats de béton présentent un risque pour les personnes qui circulent près de l'ouvrage ou l'exploitent. Leur prévention et leur élimination doivent par conséquent être traitées avec grand soin. Des essais effectués sur des éprouvettes ont permis d'estimer les valeurs des forces d'adhérence pour des éléments en béton dont les armatures sont corrodées. Il est apparu que ni la qualité du béton ni le rapport enrobage/diamètre d'armature n'influent sur la force résiduelle d'adhérence, même si l'enrobage est fissuré par la corrosion de l'armature sans qu'il ne soit détruit par éclatement. [12] II -6-6) Investigation de la corrosion in situ :Une investigation type se compose d'une série de tests différents suivie d'une phase d'analyse permettant le choix de la stratégie optimale de réparation. La réalisation du même genre de tests est également un moyen de contrôle de qualité pour les ouvrages récents. Le programme des investigations est établi en tenant compte des contraintes et impératifs suivants : - l'importance de la structure ; - la nature, la gravité et l'intensité des phénomènes, la sécurité des personnes ; - les délais et les coûts ; - l'accessibilité ; - l'environnement, etc. [12] II-6-7) Prévention et réhabilitation :II-6-7.1) Prévention. Mesures constructives :Pour se prémunir des problèmes liés à la corrosion, il est possible d'utiliser des armatures en acier inoxydable. Le coût d'investissement initial est plus élevé que celui des armatures classiques, mais il faut considérer le coût global de la structure en incluant les actions de maintenance sur toute la durée de vie. Dès lors, les différences sont moindres et le choix de l'inox peut s'avérer économique. Le développement d'armatures en matériaux composites (fibres de verre) est également en cours mais pas encore en phase opérationnelle à grande échelle. La conception générale d'un ouvrage n'est pas non plus sans influence sur la durabilité générale du béton. Un certain nombre de règles de l'art simples doivent être respectées afin de réduire au maximum les effets de la corrosion.
Figure II -36 : effets de la corrosion au niveau des angles des constructions. Pour éviter ce décollement du béton d'enrobage, on dispose des armatures transversales.
Figure II -37 : dispositions constructives permettant d'éviter la stagnation d'eau. Ainsi les ponts, les aires de stationnement, les routes, les balcons et terrasses doivent être conçus de façon à d'éviter la stagnation d'eau. Cependant les zones les plus exposées des surfaces horizontales soumises à une humidité fréquente, à des éclaboussements répétés avec des sels en ambiance hivernale sont à traiter de façon spécifique et nécessitent souvent un revêtement imperméable. II-6-7.2) Requalification des ouvrages en béton armé :Si, comme nous l'avons vu, les ruines d'ouvrages directement liées à la corrosion sont rares, il faut garder à l'esprit que, selon le degré d'avancement des réactions, la structure atteinte perd une partie de sa capacité portante. Il est donc essentiel de garder à l'esprit le respect de la sécurité de l'ouvrage en service. Si la perte de section des armatures est manifeste, il est nécessaire de réévaluer la capacité portante de l'ouvrage par un calcul mécanique. L'estimation de la section n'est toutefois pas toujours aisée car elle ne peut se faire que de manière discrète par l'intermédiaire de sondages, et il est parfois difficile de remonter à des moyennes statistiques. Si la perte de section est supérieure à 10 %, il convient de renforcer les armatures. L'apport de nouvelles armatures peut se faire dans la masse, après démolition des zones atteintes et reconstitution du béton, soit par un apport externe enrobé dans un béton projeté connecté à la structure, soit par des armatures additionnelles collées sous forme de plaque de tôles ou de tissus de fibres de carbone. La corrosion entraîne également une perte d'adhérence qui nécessite la dépose du béton dégradé puis la reconstitution de l'enrobage. Il est à noter que cette opération libère totalement les ancrages des barres. Il faut généralement étayer l'ouvrage pour ce type d'opération car le risque de modification du comportement et de mauvais fonctionnement des matériaux en tant que béton armé, peut alors être important. Si les aciers sont la partie dégradée la plus naturelle quand on parle de corrosion, il ne faut pas négliger la diminution de la section efficace de béton qui joue un rôle dans le fonctionnement du béton armé notamment en compression. Comme pour les problèmes d'adhérence, il faut s'assurer du bon fonctionnement des matériaux acier et béton ce qui peut nécessiter un étayement. Les produits de réparation doivent être compatibles avec les matériaux en place et assurer une adhérence suffisante à défaut de quoi le comportement mécanique initial ne sera pas restauré. II-6-7.3) Méthodes de réhabilitationL'objectif de ce paragraphe n'est pas de recenser de manière exhaustive toutes les techniques existantes mais plutôt de passer en revue les grandes familles de méthodes. Les différentes méthodes de réhabilitation des ouvrages en béton armé concernent:
- la ré-alcalinisation et l'extraction des chlorures. Ces traitements consistent à polariser l'armature à l'aide d'une anode enrobée d'une pâte saturée d'un électrolyte approprié et recouvrant le parement. Le courant de polarisation circule de l'anode vers l'armature (cathode). Les armatures plus profondes doivent être reliées électriquement à celle qui est directement polarisée. Ces traitements durent environ de une à six semaines et sont temporaires. On distingue la technique suivant laquelle un générateur électrique (technique du courant imposé) est placé entre l'anode et l'armature et la technique suivant laquelle l'anode, en alliage judicieusement choisi, est directement reliée à l'armature (courant galvanique). L'objectif de ces méthodes est de redonner au béton d'enrobage sa capacité à protéger les armatures. La réalcalinisation permet d'augmenter le pH d'un béton qui a été carbonaté ; la déchloruration permet d'extraire les ions chlorure qui ont pénétré l'enrobage, - la protection cathodique : La protection cathodique des armatures permet de ralentir, voire d'arrêter la corrosion. Elle consiste à abaisser le potentiel électrochimique de l'armature jusqu'à une valeur seuil, dite potentiel de protection, qui est telle que la vitesse de corrosion de l'acier devient négligeable. Le principe de la protection cathodique consiste à polariser l'armature dans le béton à l'aide d'une anode placée de façon permanente sur le parement, ou parfois dans l'enrobage. Le courant de polarisation, qui circule de l'anode vers l'armature, se situe entre 2 et 50 mA/m2 de surface d'armature. Il existe deux techniques de protection cathodique : - par courant imposé : un générateur électrique est placé entre l'anode et l'armature, - par anode sacrificielle (courant galvanique) : l'anode, en alliage correctement sélectionné, est directement reliée à l'armature. Une installation de protection cathodique est efficace tant que les éléments les moins durables que sont les électrodes de références et l'anode, sont fonctionnels. Ces éléments sont facilement remplaçables et, dans le cas d'une électrode de titane, la durée de vie peut atteindre 20 ans. Ce survol rapide des différentes méthodes de réparation et de protection montre qu'il existe aujourd'hui un large éventail de techniques permettant de prolonger la durée de vie des ouvrages dégradés. Le choix de la technique repose sur des aspects technico-économiques liés à la structure et nécessite une étude au cas par cas de manière à optimiser les coûts. [10] II-6-8) Quelques solutions pratiques pour protéger les fondations contre la corrosion :-Principe du drain : Figure II -38 : Principe du drain. - Dégagement de la coupure de capillarité : Pour combattre les remontées capillaires, les murs des constructions anciennes comportaient à leur base un appareillage de pierre très peu poreux (granit, silex) destinées a empêcher le phénomène .Les murs étaient ensuite élevés avec des pierres plus poreuse (calcaire par exemple) sans risque de remonté d'humidité. Avec le temps, par apports progressifs de terre autour du bâtiment (jardinage, cultures....),le niveau de sol a pu être remonté jusqu'à venir recouvrir les premiers rangs de pierres calcaires .Par infiltration , cette partie du mur s'est trouvée en contact avec l'eau et l'humidité ascensionnelle a pu se développer . Le remède à la situation consiste dans ce cas à simplement dégager la terre pour retrouver le niveau initial et redonner son efficacité à la coupure capillaire.
Figure II -39 : Dégagement de la coupure de capillarité. [12] II-6-9) Conclusion :Le tableau suivant conclue la dégradation due à la corrosion.
II -7) L'alcali-réaction :II -7-1) Introduction :Vers 1940, STANTON a découvert une pathologie, la réaction alcali-granulats (ou alcali-réaction), qui affecte les bétons et que les chercheurs ont surnommée «le cancer des bétons». Sous ce terme se regroupent toutes les réactions chimiques qui peuvent se produire entre les granulats du béton et les alcalins de la pate de ciment. [27] II -7-2) Définition :L'alcali-réaction, que l'on appelle aussi communément réaction alcali-granulat, désigne la réaction chimique entre la silice amorphe ou mal cristallisée contenue dans les granulats réactifs et certains ions de la solution interstitielle. Les conséquences macroscopiques de la réaction sont le gonflement des ouvrages atteints qui entraînent de la fissuration et la chute des caractéristiques mécaniques du béton. Ces phénomènes sont préoccupants pour les gestionnaires des structures atteintes car ils mettent en péril la sécurité des personnes et l'exploitation des ouvrages. De plus, il n'existe aucun moyen d'arrêter la réaction. Ainsi, la prédiction de l'évolution du gonflement et des dégradations des ouvrages atteints et l'évaluation de l'efficacité et de la périodicité des opérations d'entretien sont des points cruciaux. [6] [5] II -7-3) Les différents types d'alcali-réaction :Il est admis que les alcali-réactions se présentent sous trois types : réaction alcali-silice (les plus fréquentes), réaction alcali-silicate, réaction alcali-carbonate. - Réaction alcali-silice (RAS) : Certains granulats siliceux, lorsqu'ils sont constitués de silice amorphe, mal cristallisée ou microcristalline (par exemple des verres, de l'opale, de la calcédoine...) sont attaqués par la solution interstitielle qui occupe les pores du béton. La silice libérée réagit ensuite avec les alcalins Na+, K+ de cette solution interstitielle et l'on observe finalement, l'apparition de gels silico-alcalins s'ils renferment Si, Na (et ou K) ou calco-silico-alcalins s'ils contiennent, en plus, du calcium. - Réaction alcali-silicate : La différence essentielle avec la réaction alcali-silice réside dans le fait que les granulats réactifs ne sont pas formés de silice libre mais sont des silicates variés (phyllo-silicates, tecto-silicates, sains ou altérés). En ce qui concerne les produits de la réaction, on admet qu'ils sont voisins de ceux apparus dans la réaction alcalisilice ; des études plus anciennes signalaient que l'on n'observe pas la production de gels siliceux. - Réaction alcali-carbonate : On désigne par cette expression la réaction manifestée par des calcaires dolomitiques qui renferment des impuretés phylliteuses. Sur le plan pratique, on retiendra que les expansions causées par cette réaction sont moins importantes que celles dues aux réactions alcali-silice et alcali-silicate sauf si le béton est soumis à des ambiances hivernales rigoureuses .[10] II -7-4) Conditions d'apparition de l'alcali-granulat :Trois conditions doivent être simultanément remplies pour que ces réactions puissent avoir lieu. Il faut que : - Le granulat soit potentiellement réactif, - L'humidité relative excède 80 à 85% - La concentration en alcalins dépasse un seuil critique. [9] Figure II -40 : facteurs intervenant sur l'apparition des 3 conditions nécessaires au déclenchement de l'alcali-réaction. [10] II -7-5) Source de cette attaque :Ces alcalins proviennent d'une part du ciment, et d'autre part, des autres constituants du béton (granulats, eau de gâchage, adjuvants,..). Initialement, ils sont présents à l'état diffus dans les phases anhydres, et ils se dissolvent à l'état basique (K+OH-, Na+OH-) lors de l'hydratation. [7] II -7-6) Pathologie et manifestations externes :La dégradation du béton des ouvrages résultant du phénomène d'alcali-réaction a été répertorié dans de nombreux pays. En général les désordres apparaissent à des échéances variables de deux à dix ans ou plus. La pathologie et les manifestations externes se signalent par un ou plusieurs des symptômes suivants : - Une fissuration ; - Un faïençage à mailles plus ou moins larges ou en étoile ou une fissuration orientée suivant une direction fonction de la distribution des armatures ; - Des exsudations blanches formées de calcite et parfois de gels translucides ; - Des pustules ou cratères avec des éclatements localisés en forme de petits cônes résultant de la réaction de gros granulats superficiels qui sont visibles au fond des cratères d'éclatement, - Des mouvements et déformations, - Des colorations ou décolorations. [7]
a) Fissuration sévère d'un massif de fondation . b) Exhaussement des bordures de crête sur le barrage du Chambon . Figure II -41 : Exemples bétons dégradés par l'alcali-réaction. [6] II -7-7) Mécanisme de l'alcali-réaction :Les mécanismes de l'alcali-réaction consistent, généralement, en la dissolution de la silice par la solution interstitielle alcaline du béton suivie de la formation d'un gel gonflant. L'alcali-réaction dépend de plusieurs facteurs conditionnant les particularités de certains de ses mécanismes, à savoir :
La structure : c'est-à-dire les facteurs dépendant de la structure cristalline des minéraux réactifs dont le réseau peut avoir des défauts. Ces derniers sont en général dus à la destruction des liaisons siloxanes . Ces anomalies constituent un site des réactions pour les ions présents dans la solution (Na+, Ca2+, K+, OH-). La texture : les facteurs liés à cet aspect concernent essentiellement la granularité, la microfissuration et la microporosité. Ils conditionnent plus la cinétique des réactions. Les surfaces d'échange des granulats en relation avec l'état de microfissuration sont en croissance en fonction de leur classe granulaire. La composition chimique: on cite ici les facteurs : PH, concentrations en K+, Na+, Ca2+, et la quantité de la silice réactive. La vitesse des réactions : dépend essentiellement des facteurs structuraux, texturaux et des facteurs de composition. Le mécanisme général des réactions alcali-silice est, généralement, présenté par un processus en deux étapes fondamentales : *Une première étape consistant à la neutralisation des radicaux silanols Si-OH suivant une réaction du type acide-base : et Les charges terminales sont équilibrées par les ions Na+, K+ diffusés. D'autres ions OH- peuvent se présenter soit dans les trous de la structure soit sur sa surface externe. L'accessibilité des OH- et de Na+ est limitée par la dimension des trous et par leur distance à la surface de la particule. *La deuxième phase, est une attaque des ponts siloxanes Si-O-Si par les ions OH- : Lors de cette réaction, on remarque la destruction de la structure du minéral et la formation d'un gel silico-alcalin polymérisé. [7] II -7-8) Les méthodes d'essais de qualification des granulats :Essais de qualification : Concernant les essais de qualification, il convient de bien préciser les objectifs : - S'il s'agit de qualifier un lot de granulats ou d'échantillons de roches ; - S'il s'agit de qualifier une carrière. Qualification des granulats : Aux termes du projet de norme P 18-541 "Granulats pour béton hydraulique", en cours de parution, les granulats vis-à-vis de l'alcali-réaction peuvent être qualifiés : - Soit de non réactifs (NR), pouvant être utilisés sans précautions particulières ; - Soit de potentiellement réactifs (PR) c'est-à-dire susceptibles de réagir, si les conditions nécessaires et suffisantes à la manifestation de la réaction sont réunies. Ces granulats peuvent, dans la plupart des cas, être utilisés dans les bétons moyennant des précautions particulières définies dans les recommandations précitées. Les granulats potentiellement réactifs comportent une sous classe, qui est celle des granulats potentiellement réactifs à effet de pessimum (PRP). Ce sont des granulats qui contiennent des espèces réactives pour lesquelles existe la notion de teneur critique. Les effets expansifs ne se manifestent que lorsque l'on se rapproche de cette teneur dite pessimale, ce phénomène étant lié à des notions de cinétiques de réactions et de rapport SiO2/Na2O des solutions interstitielles. De tels granulats pourront être utilisés sans danger si d'une part, leur teneur en espèces réactives est suffisamment éloignée de la teneur critique, et d'autre part, s'ils sont utilisés seuls ou avec des granulats de même nature pétrographique. La méthodologie de conduite d'une opération de qualification des granulats : La démarche de qualification des granulats impose d'identifier le type de granulats auquel on a à faire et les espèces réactives qui sont contenues dans ce granulat. Cela implique, d'une part la recherche d'espèces réactives par une identification pétrographique du granulat au sens large et d'autre part par la vérification de la potentialité de réactivité qui implique des essais rapides et à long terme. La recherche d'espèces réactives peut s'appuyer, soit uniquement sur une analyse chimique, soit par des examens pétrographiques plus poussés utilisant tout ou partie de méthodes telles que : - l'analyse pétrographique sur lame mince, Après identification pétrographique du granulat : - soit le granulat ne contient pas d'espèces réactives en quantité néfaste et il est directement classé non réactif (NR), - soit le granulat contient des espèces réactives en quantité supposée critique ou néfaste, et dans ce cas là, on vérifie que la présence et la teneur de ces espèces réactives confèrent au granulat une potentialité de réactivité (PR) qui peut être testée par l'un des essais normalisés. La vérification de la potentialité de réactivité : on procède à des essais qui sont : - soit des essais rapides donnant des résultats, dans un délai de l'ordre d'une semaine : - essais Microbar P 18-588 ; - test cinétique P 18-589 ; - autoclave P 18-590. - soit des essais à plus long terme, qui sont aussi des essais accélérés, mais qui donnent des résultats en quelques mois : . essais sur mortier P 18-585, Ces essais peuvent être classés en deux familles d'essais : - d'une part, les essais de gonflement dans des conditions d'accélération qui utilisent l'alcanisation du milieu et la température. Si le gonflement est inférieur à un seuil déterminé, le granulat est classé "non réactif", si le gonflement est supérieur au seuil déterminé, le granulat est classé "potentiellement réactif" avec une plage d'incertitude de 10 % autour de la valeur du seuil. - d'autre part, un essai chimique basé sur la mesure de l'évolution du rapport SiO2/Na2O en fonction du temps d'une solution de soude dans laquelle le granulat broyé est conservé à 80°C. Trois essais permettent d'obtenir un résultat de qualification en moins d'une semaine. Les trois normes proposées sont expérimentales. L'essai Microbar P 18-588 : Cet essai utilise des micro-éprouvettes 1 x 1 x 4 cm qui sont soumises successivement à une cure humide, à la vapeur d'eau bouillante, puis à une cure alcaline en milieu KOH à 10 % et à 150°C et dont on mesure les variations dimensionnelles pour trois rapports C/G (ciment - granulats). L'essai de cinétique chimique P 18-589 : Cet essai est une optimisation déterminante de l'ASTM C 289 ou de la norme P 18-584 par introduction notamment de la notion de cinétique de dissolution et du suivi de l'évolution du rapport SiO2/Na2O de la solution. Aux échéances de 24, 48, 72 heures, le point représentatif de l'évolution du rapport SiO2/Na2O est reporté sur un diagramme qui permet le classement non réactif, potentiellement réactif ou potentiellement réactif à effet de pessimum. L'essai P 18-590 : Cet essai s'appuie sur le suivi dimensionnel d'éprouvettes 4 x 4 x 16 suralcanisées à 4 % en équivalent Na2O par rapport au ciment, qui après cure humide et une conservation pendant 24 heures, sont soumises à un autoclavage à une pression de 0,15 MPa durant 5 heures. Les essais P 18-588 et P 18-589 sont actuellement les seuls qui permettent le classement (PRP) (potentiellement réactifs à effets de pessimum). Il existe dans le projet de fascicule de documentation P 18-542 un diagramme de classement des essais P 18-589 et P 18-588 qui permet le classement des granulats en (NR), (PR), (PRP) suivant leur appartenance à une des trois zones définies. Les deux normes proposées sont expérimentales. Dans les essais à moyen terme, il s'agit d'optimisation extrêmement importante des essais ASTM C 227 d'une part, et de l'essai canadien ACNOR, optimisation qui porte sur l'alcanisation du milieu (1,25 % en équivalent Na2O par rapport au ciment) et sur le maintien de conditions strictes d'hygrométrie et de température (38°C et saturation d'humidité) qui sont extrêmement importantes pour la fiabilité de ces essais. Pour la norme P 18-585 : Les essais sont réalisés sur mortier (prismes 2,5 x 2,5 x 28,5 cm) et concernent les sables. Les résultats sont obtenus à six mois avec une mesure indicative à trois mois. Pour la norme P 18-587 : Les essais sont réalisés sur béton (prismes 7 x 7 x 28 cm) et concernent les gravillons ; le sable utilisé pour la confection des prismes étant un sable non réactif. Les résultats sont obtenus à huit mois. [7] II -7-9) Traitements de protection et de réparation :Il n'existe pas, à l'heure actuelle, de traitement qui assure la réparation définitive d'un ouvrage atteint d'alcali-réaction : les procédés existants ne font que prolonger la durée de vie du service. Ces traitements interviennent à deux niveaux: chimique et mécanique. Au niveau chimique, partant du principe que le déroulement de l'alcali-réaction exige simultanément {eau + alcalins + silice soluble}, on peut soit assécher le béton soit inhiber la réaction alcali-silice. Au plan mécanique, on contrecarre l'effet des contraintes résultant de l'expansion: on opère alors soit par libération de ces contraintes soit en s'y opposant par des renforcements variés. II -7-9.1) Assèchement du béton :On dispose de plusieurs techniques pour réduire les venues d'eau dans le béton. - Injection des fissures Par injection d'un produit scellant, on peut obturer les fissures et réduire ainsi la pénétration, à condition que ce produit soit suffisamment souple pour suivre l'élargissement de la fissure avec le temps : on emploie souvent des résines époxydiques. Ce genre de traitement n'a qu'une efficacité très réduite car il n'empêche pas l'eau de pénétrer par les espaces interfissuraux et il ne freine pas le développement de la fissuration superficielle. - Application de revêtements superficiels Lorsqu'il s'agit d'une simple application de peinture, donc de faible épaisseur (<300ou400ìm), le film n'est pas totalement imperméable à l'eau et il est perméable à la vapeur d'eau : le résultat est donc médiocre. Par contre, l'application d'un revêtement plus épais (quelques millimètres), généralement sous la forme d'une membrane en matière plastique, est une pratique qui réduit considérablement la pénétration de l'eau dans le béton. L'efficacité du film protecteur est évidemment abaissée lorsqu'il est déchiré, situation à envisager au cours de son vieillissement. Cette technique a été fréquemment mise en oeuvre et a montré son aptitude à prolonger la durée de service des ouvrages. -Imprégnation par des agents hydrophobes Plusieurs expérimentations en laboratoire et des retours de mesures in situ montreraient qu'on peut fortement diminuer l'humidité relative dans un béton et ralentir le gonflement consécutif à l'alcali-réaction par imprégnation au moyen d'une solution hydrophobe : produits essentiellement à base de silanes. II -7-9.2) Imprégnation par des agents chimiques inhibiteurs :Des sels de lithium pouvaient contrer les effets de l'alcali-réaction : LiNO3 est le plus sûr d'emploi. Néanmoins, comme la pénétration du lithium dans le béton est faible (au mieux 5 cm), ce genre de traitement présente essentiellement un intérêt pour des ouvrages tels que des bétons de revêtement routier. Dès lors que le degré de fissuration du béton est le facteur essentiel qui commande la profondeur de pénétration du lithium, il se pose la question suivante : à quel moment faut-il traiter un ouvrage dont la fissuration progresse avec le temps? Figure II -42: Schématisation des évolutions comparées de la dégradation et de la résistance à la pénétration de lithium .D'après [42] Si le traitement est appliqué trop tôt, il est inefficace car non pénétrant : trop tard implique que les dégâts sont irréversibles donc incurables. Thomas et Stokes [42] résument la situation sur la figure ci-dessus et suggèrent que l'optimum correspond à une expansion de l'ordre de 1.10-3. II -7-9.3) Relâchement des contraintes :Un traitement propre aux barrages, consiste à relâcher les contraintes en réalisant des saignées par sciage. Il a été appliqué, notamment, aux barrages de Beauharnois et Mactaquac (au Canada), du Chambon (en France) : dans ce dernier cas, trois campagnes de sciage (1995-1997) ont permis de réduire une contrainte de compression parasite, évaluée à 5 MPa, en diminuant l'effet « voûte » exercé sur les appuis et en redonnant à cet ouvrage son fonctionnement de barrage-poids. II -7-9.4) Renforcement par des armatures :Une structure endommagée par l'alcali-réaction peut être renforcée par la pose d'armatures actives ou passives. Ces armatures constituent un réseau soit unidirectionnel, soit bi ou tridirectionnel suivant l'effet recherché : une armature agit en effet de façon anisotrope et ne s'oppose qu'au gonflement suivant sa direction. Cette technique a été employée dans des ouvrages variés : appuis de pont, piles du barrage du Temple-sur-Lot, massifs de fondation de pylônes de lignes électriques. Dans ces derniers cas, les massifs ont été épinglés par des barres d'acier Ø 25 mm et recouverts par une couche de nouveau béton ; dans les deux ans suivant la réparation la vitesse moyenne d'expansion est passée d'une valeur de 0,011 %/an (moyenne de 6 années précédant la réparation) à 0,002 % environ, soit cinq fois moins. D'autres solutions innovantes de remplacement apparaissent : par exemple utilisation de plaques d'acier frettant l'élément endommagé, de feuilles de polymères renforcés de fibres de carbone . [10] II -7-10) Conclusion :Le tableau suivant conclue la dégradation due au cancer des bétons ( l'alcali-réaction).
II -8) La lixiviation en eau douce :II -8-1) Définition :La phase interstitielle contenue dans le béton a un pH très élevé. Si le béton se trouve au contact d'une eau douce, très peu chargée en ions, et donc de pH plus faible que celui de la solution interstitielle, la pâte de ciment durcie se trouve en déséquilibre avec ce milieu. On constate alors une lixiviation progressive des hydrates se traduisant par une décalcification de la pâte : dissolution de la portlandite et attaque progressive des C-S-H. Ce phénomène est lent (quelque centimètre pour plusieurs centaines d'années) et ne pose problème que dans le cas où le béton est potentiellement au contact permanent de l'eau douce. La lixiviation entraîne une variation très importante de la porosité et donc une variation forte des propriétés de transfert, notamment la diffusivité. Les propriétés mécaniques sont également affectées : on constate par exemple que la résistance à la compression chute fortement. Les autres propriétés mécaniques comme le module d'élasticité et la résistance en flexion sont aussi affectées. Les cinétiques de dégradation sont très variables et dépendent en particulier du matériau et de l'environnement aqueux. Par exemple, F. Badouix rapporte que, pour des durées d'exposition et un environnement agressif comparables (53 et 66 ans), les couches superficielles dégradées du barrage de Saint Etienne du Vigan et de l'écluse de Krembs ont pour épaisseur respectives 6 à 8 mm d'une part, et 1 à 3 mm d'autre part. Cet écart est imputé aux ciments utilisés, un CEM I/CPA pour le barrage et un CEM II/CPJ pour l'écluse. Y. Fujiwara a montré que la présence d'ions dissous dans l'eau modifie aussi fortement les cinétiques de dégradation de bétons enfouis dans un sol. En effet, certains de ces bétons, âgés de 60 à 100 ans, ont été dégradés sur quelques centimètres en présence d'une eau saline, soit des épaisseurs dix fois plus importantes qu'en eau douce. Des études précédentes ont mis en évidence une dissolution progressive des principaux hydrates : d'abord la portlandite, qui est l'hydrate le plus soluble, puis le monosulfoaluminate de calcium, et enfin l'ettringite. Après que la portlandite soit totalement dissoute, les C-S-H se décalcifient jusqu'à former, dans l'état ultime de dégradation un gel de silice. La variation de porosité (et donc des autres caractéristiques) dépend notamment de la quantité de portlandite présente. L'utilisation d'un ciment aux cendres volantes ou l'ajout de fumée de silice, en réduisant la quantité de portlandite, permet en général d'améliorer la résistance à la lixiviation et de réduire la chute de résistance. Un rapport eau/liant plus bas permet également de diminuer la vitesse de lixiviation. [5] II -8-2) Mécanisme :En ce qui concerne le béton on parle plus généralement de lixiviation qui, dans sa définition première, est une opération qui consiste à faire passer lentement un solvant à travers un matériau en couche épaisse afin d'en extraire un ou plusieurs constituants solubles. C'est le terme souvent employé pour décrire le phénomène d'extraction progressive des ions calcium (dissolution de Ca(OH)2 et décalcification des C-S-H) lors de la percolation des solutions agressives dans le béton. La lixiviation peut être décrite comme une dissolution progressive résultant d'une succession d'états d'équilibre entre les hydrates et la solution : au fur et à mesure que les ions agressifs arrivent au contact des hydrates, l'équilibre entre ces hydrates et la solution interstitielle est rompu ; mais il est aussitôt rétabli par une nouvelle dissolution des hydrates et/ou par la précipitation d'un nouveau composé selon que la solution est sous-saturée ou sursaturée par rapport à ce composé. Le terme de « lessivage » parfois employé, a un sens analogue. Les composés précipités peuvent être nocifs ou non vis-à-vis de la durabilité du béton. [10] Figure II -43 : représentation schématique de la dégradation d'une pâte de ciment soumise à la lixiviation par une eau pure déionisée stabilisée à pH 7. Zone 1 : solubilisation totale des hydrates Ca(OH)2, mono et trisulfoaluminates ; lixiviation totale du calcium des C-S-H et formation d'un gel résiduel de silice hydratée très peu soluble; zones 2, 3 et 4: solubilisation totale de Ca(OH)2, décalcification progressive des C-S-H et solubilisation des phases AFm (monosulfoaluminates) d'abord, puis des phases AFt (trisulfoaluminates) ; Zone 5 = matériau non dégradé. [10] II -8-3) Conséquences générales :La dissolution des hydrates, accompagnée ou non de la précipitation de composés nouveaux, a deux effets majeurs : - d'une part, un accroissement de la porosité du béton qui a pour conséquence une augmentation de sa perméabilité et de sa diffusivité. L'augmentation de porosité se traduit également par une dégradation plus ou moins importante des caractéristiques mécaniques : module d'Young, résistances; - d'autre part, selon la nature, la solubilité et les conditions de précipitation des composés néoformés, un gonflement et une fissuration plus ou moins importants du matériau : ce peut être le cas, par exemple, de l'ettringite due à une agression par des sulfates d'origine externe. L'agressivité des eaux naturelles dépend : - du pH (compris entre 4 et 6,5 suivant les cas) ; - de la teneur en dioxyde de carbone agressif ; - de la dureté ou titre hydrotimétrique (principalement [Ca2+] + [Mg2+]) ; - de la mobilité du milieu agressif. Le processus d'altération correspond essentiellement à la lixiviation des ions Ca2+ de la portlandite Ca(OH)2 et des silicates de calcium hydratés C-S-H (accompagnée de la dissolution plus tardive des phases AFm et AFt). Il conduit à une augmentation de la porosité et, dans les cas les plus graves, à la dégradation des propriétés mécaniques du matériau. [10] II -8-4) Essai de lixiviation à pH constant :L'essai utilisé reprend le principe de celui développé au CEA pour étudier les effets de la lixiviation et des sulfates sur les pâtes de ciment (Planel, 2006). A l'issue de la cure humide « 24 h - Eau », l'échantillon de béton est immergé pendant au moins 60 jours dans 1,5 L de solution régulée à pH = 5 par ajout d'acide nitrique. Tous les 30 ml d'acide ajoutés, la solution est renouvelée et dosée par spectroscopie d'absorption atomique. Les quantités d'acide ajoutées et d'ions calcium passés en solution donnent accès aux cinétiques de lixiviation, et l'épaisseur dégradée peut être évaluée en fin d'essai après pulvérisation de phénolphtaléine sur une section de l'échantillon. [11] Figure II -46 : Photo des deux dispositifs expérimentaux de lixiviation à pH constant. [11] II -8-5) Les critères de résistance à l'agression par les eaux naturelles : sont :- la compacité du béton (perméabilité et diffusivité réduites) ; - l'incorporation, aux ciments ou aux bétons, d'additions minérales (laitiers de haut-fourneau, cendres silico-alumineuses, fumées de silice, pouzzolanes) qui abaissent la teneur en chaux et sont favorables à l'accroissement de compacité du matériau. [10] II -8-6) Conclusion :Le tableau suivant conclue la dégradation due à l'attaque par l'eau douce :
Conclusion généraleLes besoins des hommes évoluent eux aussi avec le temps. Des bâtiments ou des équipements construits il y a seulement quelques dizaines d'années peuvent ne plus être adaptés aux besoins actuels et aujourd'hui démolis. Mais certains ponts construits il y a plusieurs siècles sont encore très empruntés. En fonction de l'évolution prévue des besoins, est donc définie pour chaque ouvrage une durée de vie ou « durabilité » souhaitée (50 ou 100 ans par exemple), pendant laquelle le bâtiment, stade ou pont en question devra non seulement être stable, mais en plus offrir un confort d'utilisation constant, moyennant un entretien régulier. Le niveau de risque doit donc être maîtrisé et les matériaux conçus en conséquence, en fonction des sollicitations mécaniques et environnementales. La durabilité d'un béton n'est pas une de ses caractéristiques, mais plutôt sa réponse aux charges en service et aux conditions environnementales. Ainsi, la durabilité d'un béton dépend d'une multitude de caractéristiques du matériau, mais aussi de l'agressivité de son environnement. Cependant, la durabilité du béton peut être affectée non seulement par son environnement, mais aussi par les caractéristiques du matériau telles que la perméabilité, la teneur en ciment, la nature des hydrates formés lors de l'hydratation du ciment. Les propriétés du béton ont une influence directe sur la durabilité de l'ouvrage facteurs liés à la conception de l'ouvrage. Un béton durable est un béton compact (présentant une faible porosité) dont les constituants de qualité ont été bien choisis conformément aux normes. Un béton est d'autant plus durable qu'il résiste à la pénétration des agents extérieurs. Le béton est un système chimique fortement basique, évolutif, plus ou moins réactif au contact du milieu extérieur souvent plus « acide » (atmosphère, eaux, solutions salines, acides).Le béton est un solide poreux, qui renferme dans ses pores une solution interstitielle enrichie en alcalis dont le pH varie de 12,5 à 13,5. Le système chimique du béton, avec son pH élevé, est presque toujours en déséquilibre avec son environnement, dont le pH est bien inférieur. L'eau de l'extérieur pénètre à travers le système des pores et des capillaires, même dans un béton non fissuré, entraînant une diminution de son pH. Cette eau de l'extérieur peut également apporter des agents agressifs tels que les ions sulfates. La durabilité d'un ouvrage dépend de nombreux paramètres dont la qualité de sa conception, la qualité des matériaux utilisés, la qualité des dispositions constructives, de la réalisation de l'ouvrage et les diverses conditions d'usage, d'exploitation et maintenance. Les principaux processus chimiques à la base des dégradations du béton sont généralement regroupés en trois catégories. · L'hydrolyse ou la lixiviation (dissolution) des hydrates ; · Les échanges ioniques entre les hydrates et le milieu agressif ; · La formation des nouveaux produits (généralement expansifs). Compte tenu des multiplicités des types d'agressions chimiques d'une part, et des similitudes des dégradations constatées d'autre part, il est souvent très difficile d'établir un diagnostic simple et univoque. Mais malgré ces similitudes, on peut distinguer les attaques chimiques d'après les manifestations et les caractéristiques de chaque attaque :la corrosion par exemple est induite soit par la carbonatation, soit par la pénétration des ions chlorure , et dans la plupart du temps on peut différencier entre les deux par l'éclatement : s'il est local , on parle des ions chlorures mais s'il est général c'est une carbonatation .Même les autres attaques telles que la réaction alcali-granulat (due aux granulats réactifs) , l'attaque par les acides , par les sulfates et par l'eau de mer engendrent une fissuration et un gonflement mais chaque attaque a ses conséquences et ses manifestations qui la caractérisent. Donc la connaissance du milieu ou de l'environnement où se trouve l'ouvrage participe à connaitre l'attaque. La durabilité pose un problème lorsque la résistance d'un matériau à la dégradation est moins grande que celle qui est nécessaire pour s'opposer à l'agressivité du milieu dans lequel il doit fonctionner. Par exemple, l'acier ne sera pas affecté par la corrosion dans un environnement sec et sans sel, mais il le sera en présence d'humidité et d'ions chlorures. Pour choisir le matériau qui convient, il faut connaître les conditions environnementales auxquelles il sera exposé de manière à pouvoir prévoir son comportement et à en tenir compte au stade de la conception. A l'exception des sollicitations mécaniques, tous les effets néfastes à la durabilité font intervenir l'écoulement de fluides (liquides ou gaz) à travers le béton. La perméabilité du béton doit presque toujours être prise en considération. Les milieux les plus agressifs pour le béton sont soit des acides, soit salins (nitrates, sulfates). On peut observer des dégradations du béton par dissolution et érosion en cas d'attaque acide, par fissuration et éclatement dans le cas d'attaques salines, en particuliers sulfatiques.
Il est possible désormais de définir des objectifs de durabilité et de choisir avec précision les caractéristiques du béton en fonction de l'agressivité du milieu dans lequel se trouve l'ouvrage et d'optimiser ses caractéristiques afin de les adapter à la durée de service souhaitée. Les spécifications concernent la nature et le dosage minimal en ciment, la compacité minimale, la valeur maximale du rapport Eau/Ciment, l'enrobage minimal des armatures et la teneur maximale en chlorures dans le béton. Généralement une réduction du E/C est presque toujours bénéfique car elle entraîne une diminution de porosité de la pâte de ciment hydraté et de perméabilité de la pâte et du béton, et donc empêcher les agents agressifs de se diffuser à l'intérieur du béton. La notion de durabilité d'un ouvrage se traduit par un ensemble de spécifications techniques basées sur des méthodes d'essais directes ou indirectes, sur l'expérience et sur des préconisations de mise en oeuvre, de fabrication et d'entretien. Pour les essais, on a parlé des essais accélérés parce que l'apparition des attaques chimiques prend plusieurs années. Toutefois, pour les durées de vie prévues par les normes, le matériau est durable s'il est fabriqué et mis en place conformément aux règles de l'art. Il est utile d'ajouter que le concept de durabilité ne signifie pas une durée de vie infinie, pas plus qu'il ne signifie que le béton doit résister à n'importe quelle agression. De plus, on constate maintenant, ce qui n'était pas toujours le cas auparavant, que, dans des cas, un entretien régulier du béton est nécessaire.. Pour le béton, l'environnement externe (l'eau de pluie ou de ruissellement, le CO2 de l'air) apparaît comme un milieu extrêmement corrosif. C'est un peu comme si nous devions vivre dans un environnement constitué d'acide sulfurique ! Dans le design de bâtiments, les concepteurs prévoient une grande marge de sécurité (c'est-à-dire qu'ils construisent en surabondance), mais une fois que la dégradation atteint une certaine limite critique, il faut procéder immédiatement à des travaux de réparation ou de réhabilitation pour rétablir le niveau de service prévu au départ. 10 Références et bibliographies :[1] CHIHAOUI Ramdane : Durabilité des matériaux cimentaires vis-à-vis d'un environnement chimiquement agressif (Mémoire de Magister- USTMB d'Oran -2008). [2] Saida BOUALLEG : Effet des milieux agressifs sur les caractéristiques de durabilité des bétons et des matrices cimentaires (Mémoire de Magister- Université Mohamed Boudiaf de M'sila-2004). [3] KERBOUCHE : Influence des ajouts minéraux sur les résistances mécaniques et la durabilité des mortiers (Mémoire de Magister- l'ENSET d'Oran-2009). 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| "Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes" |