INTRODUCTION GENERALE
Un enfant a, compte tenu de son inexpérience, de sa
faiblesse, de sa fragilité, de sa dépendance et de sa
vulnérabilité, besoin d'une attention et d'une protection
spéciales, notamment d'une « protection juridique
appropriée1(*)».
Cela est d'autant plus vrai pour les milliers d'enfants rendus orphelins et/ou
infectés par le VIH/SIDA au Burundi.
À qui incombe cette protection ?
La Convention relative aux droits de l'enfant (CDE)
en son article 5, la Constitution de Transition en son article 38 et le Code
des personnes et de la famille (CPF) reconnaissent que tout
naturellement la protection des enfants mineurs incombe en premier lieu
à la famille. La Constitution ajoute dans le même article que les
parents sont aidés dans cette tâche par l'Etat et les
collectivités publiques et que tout enfant a droit de la part de sa
famille, de la société et de l'Etat aux mesures de protection
spéciale qu'exige sa condition de mineur.
Cependant, ni la CDE ni le CPF n'ont tenu
compte du fait que le SIDA décimait déjà des familles
entières privant ainsi à un grand nombre d'enfants de toute
protection par un adulte.
La protection de ces enfants s'avère impérieuse
dans la mesure où, en plus d'être mineurs, ils sont privés
de leurs protecteurs naturels que sont les parents. En outre, il s'agit des
enfants qui sont les plus exposés aux problèmes de santé
à cause du VIH/SIDA. Cette protection incombe en premier lieu à
l'État qui a l'obligation de protéger le bien-être des
personnes qui ne sont pas aptes à s'occuper d'eux mêmes, parmi
lesquelles les enfants rendus orphelins et/ou infectés par le VIH/SIDA.
Néanmoins, en entraînant souvent la destruction
de la cellule familiale, en s'accompagnant d'une
« épidémie » de stigmatisation et de
discrimination, et en exacerbant la situation de pauvreté d'un pays
comme le Burundi, l'un des pays les plus pauvres au monde qui, de
surcroît vit en guerre depuis plus de dix ans, le VIH/SIDA est venu
bouleverser les mécanismes sociaux et juridiques prévus en faveur
de la protection des enfants. D'où la nécessité de revoir
la législation en vigueur en faveur des enfants afin de tenir compte des
problèmes liés au VIH/SIDA.
Le but de notre travail est de contribuer à la
promotion d'un cadre juridique qui oeuvre à la protection des droits de
ces milliers d'enfants touchés par le VIH/SIDA d'une manière ou
d'une autre. Le but est de réduire l'impact négatif de la
pandémie du SIDA sur les enfants ainsi que de promouvoir un
environnement juridique et social qui leur est favorable.
Notre travail se base principalement sur les articles 38 et
39 de la Constitution de Transition et sur la Déclaration d'engagement
adoptée lors de l'Assemblée générale extraordinaire
des Nations Unies sur le VIH/SIDA ainsi que les Traités internationaux
en rapport avec les droits de l'homme en général et les droits de
l'enfant en particulier ratifiés par le Burundi, comme outil de travail.
En outre, la doctrine nationale étant peu fournie, nous aurons recours
à une doctrine essentiellement étrangère. Enfin, nous nous
servirons largement des rapports des travaux et des séminaires en
rapport avec le VIH/SIDA.
Cependant, nous ne saurions passer sous silence une
difficulté majeure rencontrée liée au fait qu'en droit
burundais il n'y a aucun texte légal ou réglementaire qui parle
explicitement du VIH/SIDA, hormis la loi fondamentale qui fait
brièvement allusion au VIH/SIDA2(*).
Ce travail s'articulera sur quatre chapitres.
Au premier chapitre, nous allons dresser une sorte
d'état des lieux sur la problématique du VIH/SIDA sur les droits
des enfants au Burundi Aussi, après avoir identifié les
différentes catégories d'enfants touchés par le VIH/SIDA,
nous reviendrons sur la manière dont il affecte leurs droits.
Le deuxième chapitre quant à lui essaiera de
montrer comment la législation burundaise n'est pas adaptée
à la protection des droits des enfants dans le contexte du VIH/SIDA.
Pour ce faire, nous parlerons des mesures de protection qui sont
prévues. Ensuite, il sera question de dégager leurs limites et,
chaque fois, des propositions allant dans le sens de les adapter à cette
situation seront formulées.
Le troisième chapitre tentera de dégager ce qui
a été fait, surtout au niveau politique et social en faveur de la
lutte contre le VIH/SIDA et la prise en charge de ses victimes au Burundi et
sur le plan international.
Le quatrième chapitre sera consacré à la
formulation des recommandations visant une meilleure protection des droits des
enfants infectés ou affectés par cette pandémie.
Enfin notre travail se clôturera par une conclusion
générale.
CHAPITRE I : L'IMPACT DU VIH/SIDA SUR LES DROITS
DES
ENFANTS : PROBLEMATIQUE.
SECTION I. NOTIONS
Avant d'entrer dans le vif du sujet, il convient de s'entendre
sur la signification de certains termes dont il sera question tout au long de
ce travail. Il s'agit de « VIH/SIDA »,
« orphelins du SIDA » et « enfants
affectés par le VIH/SIDA ».
§1. Le VIH/SIDA.
Le mot VIH/SIDA a deux composantes qui désignent
deux réalités différentes même si l'une est la
conséquence de l'autre. Il s'agit de VIH et de SIDA.
Selon un ouvrage paru sous la direction de Didier JAYLE et de
Gilles PIALLOUX, le SIDA, acronyme de Syndrome d'Immuno-déficience
Acquise, est une maladie transmissible par voie sexuelle et sanguine. Souvent
mortelle, elle est caractérisée par une chute brutale des
défenses immunitaires de l'organisme. Quant au mot VIH, il est le sigle
de Virus de l'immunodéficience Humaine, virus tenu pour responsable du
SIDA3(*).
Le SIDA évolue généralement en trois
phases. La première phase est dite
« asymptomatique ». Les personnes contaminées ne
présentent aucun signe de la maladie. Après la phase
asymptomatique, la maladie peut évoluer vers une forme mineure ou
majeure, c'est le début du SIDA. Le VIH affecte les cellules et les
utilise pour se développer. Ainsi la cellule infectée
s'épuise et se détruit. La troisième phase est celle du
« SIDA avéré ». Le système immunitaire
devient déficient et laisse se développer certaines
maladies4(*).
§2. L'orphelin du SIDA.
D'après le dictionnaire encyclopédique pour tous
PETIT LAROUSSE, un orphelin est un enfant qui a perdu un ou les deux
parents5(*).
Cependant, la définition de l'orphelin du SIDA est
assez floue. Selon l'UNICEF, l'orphelin du SIDA est tout enfant de moins de 15
ans dont la mère est décédée du SIDA6(*).
L'OMS considère quant à elle que les orphelins
du SIDA sont des enfants qui ont perdu leurs parents ou leur mère par
suite du SIDA7(*).
La définition de l'UNICEF, en introduisant l'âge
maximum de 14 ans comme critère exclusif pour désigner un enfant
ayant perdu une mère comme un orphelin, risque d'être un facteur
de discrimination à l'égard de tout un segment de la population
globale des enfants8(*),
ceux-ci étant définis par la CDE dans son article
1er comme « tout être humain âgé de
moins de 18 ans, sauf si la majorité est atteinte plus tôt en
vertu de la législation qui lui est applicable. ».
Si la définition de l'Organisation Mondiale de la
Santé (OMS) est plus inclusive quant à la détermination
de l'âge d'un orphelin du SIDA, cependant, elle a en commun avec celle de
l'UNICEF de ne retenir comme orphelin qu'un enfant ayant perdu les deux
parents ou la mère seulement du SIDA et ne considère pas comme
tel un enfant ayant perdu uniquement le père par le fait du SIDA.
À notre avis, toutes ces deux définitions ne
tiennent pas compte de la réalité et devraient inclure un enfant
ayant perdu son père à cause du SIDA dans la définition de
l'orphelin du SIDA. En effet, d'une part, en perdant un père, l'enfant
perd un large soutien, tant matériel que moral, et d'autre part, la
veuve étant elle aussi probablement infectée, elle va avoir de
problèmes de santé liés au SIDA. Cela fait que sur le plan
social et matériel, il n'y a qu'une différence très minime
entre un orphelin de mère et un enfant qui a perdu son père. Ce
n'est qu'une question de nuance pour distinguer la catégorie d'orphelin.
Il y a plutôt lieu de parler de demi-orphelin pour désigner un
enfant qui a perdu un seul parent et d'orphelin total si l'enfant a perdu les
deux parents.
Dans ce travail, nous utiliserons le terme
générique d'orphelin tout court et adopterons la
définition de Mr. MANAT selon laquelle est orphelin « tout
enfant qui a perdu l'un ou les deux parents qui n'a pas
encore atteint l'âge de la majorité civile qui est fixé par
le législateur burundais à 21 ans et tant qu'il n'est pas capable
d'assurer ses responsabilités ou d'exercer son autonomie9(*) ».
Cette précision faite, voyons à présent
comment les enfants peuvent être affectés par le VIH/SIDA.
§3. Enfant affecté par le VIH/SIDA.
Les enfants peuvent être affectés par le VIH/SIDA
de multiples façons :
- des enfants sont infectés par le VIH/SIDA ;
- des enfants voient leurs parents devenir malades ou mourir
du SIDA ;
- des enfants voient leurs frères ou soeurs, proches ou
amis devenir malades ou mourir du SIDA ;
- des enfants vivent dans des foyers sans adultes
(ménages dont le chef est un mineur) ou dans un foyer sur lequel retombe
le poids d'accueillir des enfants d'une autre famille, devenus orphelins du
SIDA.
Parmi ces diverses catégories d'enfants affectés
par le VIH/SIDA, nous allons nous intéresser uniquement aux enfants qui
sont affectés directement par le VIH/SIDA soit qu'ils ont des parents
vivant avec le VIH/SIDA ou qui souffrent d'une maladie liée au VIH/SIDA,
soit qu'ils sont eux-mêmes infectés par cette pandémie,
soit enfin qu'ils en sont orphelins.
SECTION II. LE VIH/SIDA ET LES DROITS DE L'ENFANT.
§1. La situation du VIH/SIDA au Burundi.
Le SIDA est apparu au Burundi au début des
années quatre-vingt
(Le premier cas du SIDA a été
diagnostiqué en 1983).
Depuis, la situation n'a cessé de s'aggraver. Cependant
les chiffres officiels fournis n'arrivent pas à révéler
toute l'ampleur de l'épidémie de VIH à cause de la
faiblesse voire de l'inexistence, dans beaucoup d'endroits, du système
de sérosurveillance ainsi que de l'absence des services de
dépistage dans plusieurs centres du pays. Toutefois, les données
disponibles sont très inquiétantes.
En effet, selon l'Unité Sectorielle de la Lutte contre
le SIDA (USLS) du Ministère de la Santé publique10(*), le nombre de personnes vivant
avec le VIH/SIDA en fin 2002 est estimé, d'après les chiffres de
l'ONUSIDA pour le Burundi, à 390 000. Parmi ceux-ci, 330 000 sont
des adultes âgés de 15 à 49 ans dont 190 000 sont des
femmes et 60 000 sont des enfants de 0 à 14ans.
Selon la même source, les décès sont
estimés à 40 000, fin 2002 tandis qu'on estime que la
moitié des personnes infectées l'ont été avant leur
29ème anniversaire et que beaucoup sont mortes avant d'avoir
35 ans, laissant derrière elles -aux grands-parents ou aux frères
et soeurs- une génération d'orphelins à élever (le
nombre d'enfants ayant perdu leur mère ou leurs deux parents à
cause du SIDA, depuis le début de l'épidémie jusqu'en
2002, est estimé à 240 00011(*)).
Cependant, le nombre d'enfants dont l'un des parents est
séropositif est sensiblement supérieur au nombre d'enfants dont
l'un des parents est déjà mort du SIDA ; les enfants rendus
orphelins par le SIDA sont seulement la partie la plus visible du
problème latent, plus étendu, des enfants des parents vivant avec
le VIH/SIDA. Pour s'imprégner de l'ampleur de la situation du VIH/SIDA
au Burundi, il faut garder à l'esprit que selon l'OMS, la très
grande majorité des personnes infectées par le VIH/SIDA dans le
monde, plus particulièrement dans les pays en développement, ne
le savent pas.12(*)
A prédominance urbaine à ses débuts,
l'épidémie connaît aujourd'hui un glissement rapide vers le
monde rural où elle a atteint une séroprévalence de 2,5%
en 2002 contre 0,6 en 1989, d'après l'Enquête Nationale de
Séroprévalence conduite par le Centre de formation en maladies
Infectieuses (CEFORMI) en décembre 200213(*). Selon cette même étude, les taux de
séroprévalence sont de 9,42% en zone urbaine et de 10,5% en zone
semi-urbaine.
La frange de la population la plus touchée est celle de
vingt-cinq à quarante ans. Elle est en même temps celle qui
s'occupe essentiellement de la production et ce fait présente des
conséquences socio-économiques désastreuses. En outre,
selon encore la même étude, la prévalence globale chez la
femme est de 6,8% contre 3,2% pour les hommes. Or, dans la
société burundaise, c'est la femme qui s'occupe essentiellement
de la subsistance de la famille. Ainsi, le SIDA constitue une grave menace pour
les enfants qui, outre la possibilité d'en être infectés,
peuvent également être privés des parents et des adultes
qui prennent soin d'eux.
Enfin, au niveau sanitaire, en plus de la
détérioration de l'état de santé des personnes
infectées, les services de santé sont débordés si
bien que la prise en charge des autres malades subit les contre-coups de cet
engorgement. En effet, plus de 80 % des lits dans les services de
médecine interne de grands hôpitaux de Bujumbura sont
occupés par des personnes atteintes du SIDA14(*).
Il convient alors d'examiner l'impact de cette situation sur
la vie des enfants et sur leurs droits.
§2. L'impact du VIH/SIDA sur la vie des enfants.
Vivre dans une famille affectée par le VIH/SIDA menace
gravement le développement et le bien-être de l'enfant.
En effet, les enfants atteints du VIH sont souvent
chétifs et souffrent du retard dans la croissance. Il sont souvent
malades et ne bénéficient pas de soins médicaux
nécessaires.
Lorsque la mère ou le père est atteint du VIH,
l'enfant commence à ressentir le deuil, la peine et la souffrance bien
avant la mort du parent. En l'absence de moyens efficaces pour soulager la
douleur et d'autres symptômes, les enfants qui assistent à la
souffrance et à la maladie des parents sont souvent traumatisés,
stigmatisés et sont réduits à une misère terrible
après le décès du chef de famille. Ils souffrent de
malnutrition, ne vont pas à l'école. Ils sont ainsi privés
de leurs droits à grandir et à se développer.
Les enfants sont plus exposés au risque d'exploitation
et de mauvais traitements lorsqu'aucun adulte ne s'occupe d'eux ou lorsque les
parents sont trop malades pour prendre soin d'eux ; lorsqu'ils sont aux
prises avec une situation de grande pauvreté, d'abandon et de rejet.
Beaucoup sont contraints de travailler dans des conditions abusives, de gagner
leur vie dans la rue. Ils risquent alors d'être poussés dans la
prostitution, comme moyen de subsistance. Cela les expose à contracter
eux- mêmes le VIH/SIDA.
Enfin, des recherches faites ont montré que les
familles sont réticentes à prendre en charge les orphelins du
SIDA15(*)à cause de
la discrimination et de la stigmatisation liées au VIH/SIDA ainsi que de
la situation de pauvreté dans laquelle ils se trouvent souvent. Or, il a
été prouvé que l'enfant dont les parents avaient une bonne
situation est facilement accepté tandis que celui dont les parents
étaient pauvres ne trouve pas facilement de famille d'accueil16(*).
A cause de cette difficulté de prise en charge, les
orphelins sont souvent séparés et partagés entre les
membres de leur famille ce qui accroît le risque de spoliation de leurs
biens.
§3. Les violations des droits des enfants liées
au VIH/SIDA
Les enfants affectés ou infectés par le VIH/SIDA
sont souvent victimes de la violation de leurs droits à
l'éducation, à la santé et au logement. De plus, ils
doivent faire face aux situations d'exploitation et de spoliation des biens
leur laissés par les parents. Mais nous pouvons affirmer sans risque de
nous tromper que le plus grand problème qui est souvent à la base
de nombreuses violations des droits des enfants affectés ou
infectés par le VIH/SIDA est celui de la discrimination liée au
VIH/SIDA.
I. La discrimination.
A. Discrimination et droit humain.
1. Notion de discrimination
Dans la pratique internationale qui a vulgarisé
l'emploi du concept juridique de discrimination dans les textes de protection
des droits de l'homme, il n'y a que trois conventions en matière des
droits de l'homme qui ont essayé de définir une discrimination.
Il s'agit de:
- l'article 1, paragraphe 1 de la Convention de l'OIT
concernant la discrimination en matière de l'emploi et de profession
(1958).
- l'article 1, paragraphe 1 de la convention de l'UNESCO
concernant la lutte contre la discrimination dans le domaine de l'enseignement
(1960) et
- l'article 1, paragraphe 1, de la Convention
internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination
raciale (1965).17(*)
Chacune de ces trois conventions internationales
définit la discrimination uniquement dans son domaine respectif à
savoir l'emploi et la profession pour l'OIT, l'enseignement pour la Convention
de l'UNESCO et la race pour la Convention internationale sur
l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale.
A la lumière de ces trois textes, on peut tenter une
définition de la discrimination par les éléments qui
composent ce concept.
Ainsi, on peut dire que la discrimination est
« une différence de traitement fondée sur un
certain motif, en matière de droit et ayant pour effet ou pour but de
porter atteinte à l'égalité de
traitement »18(*). La discrimination survient lorsque l'on fait une
distinction à l'égard d'une personne, qui a pour résultat
un traitement inéquitable et injuste, sur base de son appartenance-
réelle ou supposée- à un groupe particulier19(*).
2. Principe de non discrimination
Le principe de non discrimination est au coeur de la
philosophie des droits de l'homme. Tous les instruments relatifs aux droits de
l'homme ratifiés par le Burundi ainsi que la Charte africaine à
laquelle il fait partie, interdisent la discrimination20(*) fondée sur la race, la
couleur, la langue, la religion, l'opinion politique ou autre, la
nationalité, l'origine ethnique ou sociale, la propriété,
l'incapacité, la fortune, la naissance ou tout autre statut.
Au Burundi, le principe de non discrimination est inscrit dans
la Constitution de Transition (art.23).
Le droit de ne pas être discriminé est un droit
humain fondamental basé sur les principes universels et
inaliénables de justice naturelle. Les caractéristiques de base
des droits de l'homme font qu'ils appartiennent aux individus et s'appliquent
à tous les individus où qu'ils se trouvent.21(*)
Les Etats ont des obligations relatives au respect, à
la protection et au plein exercice des droits de l'homme. Pour ce qui est de la
discrimination qui nous préoccupe ici, l'obligation de respect exige que
les États ne discriminent ni directement ni indirectement en
matière de lois, de politiques ou de pratiques. L'obligation de
protection exige des États qu'ils prennent des mesures empêchant
la discrimination par les tiers. L'obligation de pourvoir à la
réalisation du droit à la non discrimination, quant, à lui
exige des États de prendre toutes les mesures (législatives,
budgétaires, judiciaires et autres) appropriées pour favoriser sa
réalisation22(*).
B. Discrimination et stigmatisation liées au
VIH/SIDA
1. La discrimination liée au
VIH/SIDA
La discrimination liée au VIH/SIDA est une
discrimination fondée sur la maladie et les problèmes de
santé.
Le protocole pour l'identification de la discrimination
à l'égard des personnes vivant avec le VIH/SIDA
établi par l'ONUSIDA qui définit la discrimination
liée au VIH/SIDA, commence par opérer une distinction entre la
discrimination licite et la discrimination arbitraire23(*).
Selon ce protocole, le concept légal de discrimination
tient compte de la justification- en matière d'intention, de proportion
et de conséquences- de toute différence de traitement entre les
personnes. Pour lui, toutes différences de traitement ne sont pas
nécessairement discriminatoires : des différences
fondées sur des critères sensés et objectifs peuvent se
justifier24(*). Dans ce
cas, on parle de la discrimination licite par opposition à la
discrimination arbitraire. Cette dernière se définit par analogie
avec les clauses générales de non discrimination figurant dans
toute une gamme d'instruments internationaux parmi lesquels la CDE
dans son l'article 2.
Dans l'optique de ce protocole, la discrimination liée
au VIH/SIDA est « toute mesure imposant une distinction
arbitraire parmi les personnes en fonction de leur statut sérologique
confirmé ou supposé par rapport au VIH ou à leur
état de santé»25(*).
Quant à la discrimination licite, le droit
international des droits de l'homme la subordonne à trois conditions
essentielles :
- la mesure doit être prise en vue d'un objectif
légitime,
- pour évaluer cette mesure, il faut prendre en compte
sa visée et les moyens employés ne doivent pas être
disproportionnés au but poursuivi. La restriction doit être la
plus faible possible. Il faut également prendre en considération
l'efficacité attendue de la mesure.
- Enfin, la restriction doit être inscrite dans la loi
et mise en application selon la loi.26(*)
2. La stigmatisation liée au
VIH/SIDA
La discrimination liée au VIH/SIDA est souvent
précédée et renforcée par un autre
phénomène : celui de la stigmatisation qui touche les
personnes affectées par le VIH/SIDA ainsi que leur famille. On peut
définir la stigmatisation liée au VIH/SIDA comme étant la
honte associée à la maladie du SIDA et la peur de subir la
discrimination à cause d'elle.
La stigmatisation est dangereuse en soi car elle peut
entraîner des sentiments de honte, de culpabilité et d'isolement
chez les personnes vivant avec le VIH/SIDA, elle crée des conditions
idéales de propagation du VIH.
En effet, d'un côté, la peur d'être
discriminé pousse l'épidémie dans
« l'obscurité » et « la
clandestinité »27(*)dans la mesure où de nombreuses personnes
hésitent à se faire dépister ou préfèrent
cacher leur statut sérologique par peur de rejet et de stigmatisation
à leur égard si l'on découvre ou s'ils
révèlent leur statut sérologique.
D'un autre côté, en faisant passer le SIDA comme une
« maladie frappant les autres »28(*), la stigmatisation et la
discrimination peuvent engendrer un dangereux sentiment de
sécurité chez les personnes et les groupes qui n'en sont pas
l'objet en les amenant à conclure qu'ils ne courent donc aucun
danger.
Enfin, la stigmatisation et la discrimination privent les gens
de leurs droits et de leur dignité, en plus de les isoler et de les
opprimer ; en un mot, elles empirent la situation de vie de plusieurs
personnes qui vivent avec le VIH/SIDA ou qui sont affectées autrement
par cette épidémie.29(*)
La stigmatisation et la discrimination aggravent l'impact
négatif de l'épidémie du VIH sur les enfants
affectés et infectés par le VIH/SIDA à un double point de
vue : à la fois en tant qu' « enfants de parents
vivant avec le VIH » et en tant que « personne vivant avec
le VIH/SIDA » lorsqu'on apprend leur séropositivité.
La stigmatisation et la discrimination liées au
VIH/SIDA touchent tous les aspects de la vie des enfants affectés ou
infectés par cette pandémie.
II. Le droit à l'éducation.
Le droit à l'éducation est affirmé dans
divers instruments juridiques internationaux à commencer par la
Déclaration universelle des droits de l'homme et il est inscrit dans
l'Acte constitutif de l'Organisation des Nations Unies pour l'Education, la
Science et la Culture (UNESCO), le Pacte international relatif aux droits
économiques, sociaux et culturels (PIDESC) ainsi que la
CDE. En outre, le droit à l'éducation est garanti par
notre Constitution de transition.
Pourtant, bien que ce droit soit proclamé par tous ces
instruments internationaux ratifiés par le Burundi et par la
Constitution de Transition, beaucoup d'enfants affectés par le VIH/SIDA
ne sont pas scolarisés. Plusieurs raisons expliquent cet état de
chose.
Tout d'abord, le SIDA appauvrit les familles qu'il touche et
celles-ci ne sont plus en mesure de payer les frais de scolarité pour
leurs enfants. En effet, le revenu familial est parfois accaparé en
entier par le traitement du parent atteint du SIDA et il y a perte du revenu
consécutif à la maladie du parent qui ne peut plus gagner un
salaire ou travailler aux champs.
Ensuite, les enfants affectés par le VIH/SIDA courent
le plus le risque de devoir abandonner l'école. En effet, de nombreux
enfants, surtout les filles sont contraints d'abandonner l'école pour
s'occuper de leur(s) parent(s) malade(s) ou de leurs petits frères et
petites soeurs ou pour gagner de l'argent afin de subvenir aux besoins de la
famille.
Les enfants orphelins du SIDA quant à eux, subissent
souvent les contrecoups d'une moindre motivation de les envoyer à
l'école ou de la déconsidération sociale dont peuvent
faire l'objet les orphelins30(*)de la part des personnes qui les ont pris en charge
après la mort de leurs parents. Ainsi, dans une famille qui a accueilli
un orphelin du SIDA, celui-ci est souvent retiré de l'école parce
que- du fait de la mortalité prématurée liée au
SIDA-, l'on estime qu'amener à l'école un enfant infecté
par le SIDA est un investissement inutile ou alors parce que la
préférence va d'abord à ses propres enfants.
Même dans l'hypothèse où l'orphelin du
SIDA est scolarisé, il court le risque de s'absenter souvent à
l'école car le plus souvent, il est accablé par les tâches
domestiques plus que les autres enfants de cette famille. Il faut aussi
remarquer que certains tuteurs préfèrent envoyer les orphelins
dont ils ont la charge dans le système informel de Yagamukama
moins exigeant aussi bien sur le plan matériel que temporaire. En effet,
ce système coûte moins cher et en plus, il rend disponible
l'orphelin pour toutes sortes de travaux.31(*)
Enfin les obstacles au droit à l'éducation des
enfants affectés et infectés par le VIH/SIDA sont
exacerbés par les problèmes de santé liés à
cette pandémie qui conduisent ces enfants à l'absentéisme
et augmente le taux de l'abandon scolaire ainsi que la discrimination dont ils
sont souvent victimes à l'école à cause de leur statut
sérologique ou de celui de leurs parents, de la part des enseignants ou
de leurs paires.
III. Le droit à la santé.
A. Notion
Selon la constitution de l'OMS32(*), la santé est un « état
de complet bien être physique, mental et social, et ne consiste pas
seulement en une absence de maladie ou d'infirmité ». Le
droit à la santé serait quant à lui le
« droit de tout être humain au meilleur état de
santé qu'il est capable d'atteindre »33(*).
Cependant, il faut reconnaître que le droit à la
santé tel qu'il apparaît dans cette définition, est
très difficile à réaliser un pays pauvre comme le Burundi
et qui se trouve parmi les pays les plus touchés au monde par le
VIH/SIDA. Cette difficulté de mettre en oeuvre le droit à la
santé a des conséquences particulièrement néfastes
sur les enfants touchés par le VIH/SIDA.
B. Problématique du droit à la
santé des enfants dans le contexte du VIH/SIDA.
Les enfants touchés par la maladie du SIDA sont
affectés de façon disproportionnée par des
problèmes de santé alors que l'accès aux services de
santé pour ces enfants est très difficile. La principale cause en
est la pauvreté qui affecte souvent les familles touchées par le
VIH/SIDA mais également la négligence dont sont coupables
certains adultes ainsi que la discrimination que rencontrent ces enfants dans
leurs familles et dans les établissements de santé.
Ces problèmes s'aggravent pour les enfants devenus
orphelins. Ils sont couramment recueillis par leurs tantes ou leurs oncles qui
eux-mêmes ont des enfants à leur charge, ou par leurs
grands-parents qui comptaient éventuellement eux-mêmes sur le
soutien de la fille ou du fils qui a été emporté par le
SIDA.
En outre, l'accès aux soins de santé devient
encore plus difficile pour les foyers d'orphelins, de plus en plus nombreux,
où le chef de ménage est un mineur parce que le SIDA a
emporté tous les adultes de la famille et qu'on n'a trouvé
personne pour les prendre en charge.
D'un autre côté, la discrimination face aux
soins de santé est une forme majeure d'exclusion sociale à
l'encontre des orphelins du SIDA et rend encore plus difficile leur
accès aux soins de santé. En effet, selon une étude
menée dans les provinces de Bururi, Gitega et Bujumbura Mairie par
l'Association Famille pour vaincre le SIDA34(*), les orphelins du SIDA sont souvent assimilés
aux enfants vivant avec le VIH/SIDA. Pour cela, ils peuvent encore être
plus exposés au risque de mourir de maladies ou d'infections
évitables si elles étaient soignées à cause de
l'idée erronée que s'ils tombent malades ce doit être
à cause du SIDA et qu'il est donc inutile de les faire soigner.
De plus, selon les études menées dans les autres
parties du monde (en Inde35(*) et en Ouganda36(*) par exemple), le secteur des soins est peut
être le contexte où la discrimination, la stigmatisation et le
déni de droits liés au VIH/SIDA sont les plus manifestes. Cela
peut se manifester par une moindre qualité des soins médicaux, ou
dans le pire des cas, par un refus de soigner souvent à cause d'une
crainte non fondée de contamination. Cela peut également se
traduire par des traitements ou opérations différés ou un
isolement des malades dans les salles sans que le personnel hospitalier
s'occupe d'eux. La discrimination peut enfin conduire à la
négligence médicale et amener les médecins à
conclure à des pronostics à long terme (« de toute
façon, dit-on souvent, il n'en a pas pour longtemps »)
plutôt que de se baser sur ce qui est le mieux pour le patient.
IV. La spoliation des biens des enfants touchés
par le VIH/SIDA.
Les enfants touchés par le VIH/SIDA sont le plus
souvent confrontés à la violation de leur droit à la
propriété même du vivant de leurs parents.
En effet, ces derniers, souvent confrontés aux
problèmes de santé et de discrimination liés au VIH/SIDA
ainsi qu'aux problèmes de dénuement consécutif à la
situation créée par la maladie du SIDA, ne sont plus en mesure de
faire face aux prétentions des voisins ou de leurs relations qui, dans
bien des cas, les voyant sur le « chemin de la mort »,
tentent sans scrupule de s'approprier de leurs biens. Ainsi, à la mort
des parents, les enfants se trouvent souvent dépossédés.
En outre, au décès d'un parent, il arrive
souvent que les enfants se voient spolier des biens laissés par leurs
parents ou refuser leur héritage ou leur droit de
propriété par ceux-là mêmes qui sont sensés
les protéger. Cette situation peut être légitimée
par le fait que dans la société burundaise c'est
l'intérêt de la famille qui compte avant tout, le principe de
l'intérêt supérieur de l'enfant étant laissé
au second plan.
Enfin, d'une part, comme les droits des enfants sont
intimement liés à ceux du parent qui survit, la coutume
burundaise qui refuse à la femme ses droits à l'héritage
et à la propriété a des conséquences
néfastes pour les enfants notamment des femmes célibataires - de
plus en plus nombreuses dans les centres urbains- surtout si celles-ci sont
infectées par le VIH/SIDA. D'autre part, surtout dans les centres
urbains, les enfants issus de concubinage sont difficilement acceptés
par la famille de leur père, ils sont souvent
dépossédés et n'ont nulle part où aller
après la mort du dernier parent. Cette situation est exacerbée
par le fait qu'au Burundi, aucune loi n'organise la matière des
successions. Celle-ci est laissée sous l'empire de la coutume.
V. Le droit à l'alimentation.
Les enfants orphelins ou touchés autrement par le
VIH/SIDA voient leur droit à l'alimentation violé. En effet,
comme déjà souligné, d'une part, le VIH/SIDA contraint les
parents malades à engloutir les économies familiales dans les
soins médicaux. D'autre part, le VIH/SIDA fait perdre à ceux
qu'il touche leur capacité de travailler. Tout cela fait que très
peu d'argent est disponible pour l'achat de la nourriture.
En outre, s'il est vrai que les orphelins qui ont
été accueillis dans des familles d'accueil vivent les mêmes
conditions -souvent précaires- que ceux qui les ont accueillis, bien
d'orphelins cependant, surtout ceux dus au SIDA, subissent une situation de
discrimination, de négligence et de mauvais traitement dans ces
familles. Ainsi, on voit des enfants qui sont relégués dans un
coin et ne sont pas admis dans le partage du repas, qui n'ont droit qu'aux
restes, ce qui explique la fréquence du kwashiorkor chez certains
orphelins alors que les autres enfants de la famille d'accueil sont bien
portants37(*).
Le problème du droit à l'alimentation des
orphelins devient encore plus préoccupant si ceux-ci ont le VIH/SIDA
puisqu'ils ont besoin plus que tout autre enfant d'une alimentation
équilibrée.
VI. Le droit au logement
Les enfants des familles touchées par le VIH/SIDA sont
particulièrement touchés par des problèmes liés au
logement.
En effet, dans les centres urbains, le fait est que beaucoup
de personnes ne sont pas propriétaires des maisons dans lesquelles elles
logent. Elles occupent la maison au titre d'un contrat de location qu'elles
ont passé avec le bailleur, propriétaire de la maison. Ainsi,
d'une part, la situation de maladie qu'occasionne le VIH/SIDA fait qu'un parent
malade n'arrive plus à honorer ses engagements vis-à-vis du
bailleur. Ce dernier, n'étant pas tenu de lui témoigner de la
compassion, peut le jeter dans la rue. Les enfants vont alors subir davantage
une situation de précarité en vivant la condition de sans abri,
ce qui a un effet particulièrement dangereux sur leur vie.
D'autre part, à la mort d'un parent, les orphelins
peuvent être chassés de leur habitation par un bailleur parce
qu'ils ne sont plus en mesure de payer le loyer. Ils vont alors errer de
famille en famille pour aboutir finalement dans la rue.
Signalons que ce problème est également
perceptible dans le milieu rural. En effet, dans ce milieu, les orphelins
vivent souvent dans la promiscuité dans des maisons
délabrées ou inachevées, dans des maisons en shittings
communément appelées
« blindés »38(*). Cette situation devient encore plus
problématique pour les ménages dont le chef est un mineur; les
voisins souvent aussi démunis qu'eux n'ont pas les moyens de les
épauler et le système traditionnel de solidarité qui
consistait entre autres à construire des maisons pour les populations
vulnérables ne fonctionne pratiquement plus.
CHAPITRE II. LES INSUFFISANCES DES MECANISMES
ORDINAIRES
DE PROTECTION.
INTRODUCTION
La crise que traverse le Burundi ainsi que la situation
générée par le VIH/SIDA ont révélé
les lacunes qui devraient retenir l'attention du législateur. En effet,
d'une part, les mécanismes de protection de remplacement
érigés dans le CPF ont été conçus pour la
protection des enfants dans une situation normale. Elles s'avèrent
inadaptées dans cette situation exceptionnelle engendrée par le
SIDA. D'autre part, les dispositions de la loi burundaise qui protègent
les droits des individus ne sont pas adaptées à la situation de
violation des droits liée au VIH/SIDA. Elles ne peuvent pas
protéger efficacement le droit à la non discrimination, le droit
à la santé, le droit à la confidentialité, le droit
à l'éducation,...pour ne citer que les droits les plus pertinents
pour les personnes touchées par le VIH/SIDA.
Nous allons examiner les inadaptations des mécanismes
de protection prévus dans le CPF.
D'un autre côté, des dispositions tirées
de certains textes peuvent servir à la protection des droits des enfants
touchés par le VIH/SIDA même si elles présentent des
lacunes et qu'elles sont dépassées par la situation
engendrée par cette pandémie. Nous allons essayer de les
dégager afin de voir dans quelle mesure elles peuvent servir dans la
protection des droits de cette catégorie d'enfants.
SECTION I. L'INADAPTATION DES MECANISMES DE PROTECTION
DE REMPLACEMENT PREVUS PAR LE CPF.
Le législateur burundais a organisé en faveur
des personnes encore mineures des protections qui viendraient en remplacement
en cas d'absence ou d'insuffisance de la protection des parents. Il s'agit de
la tutelle, de l'émancipation et de l'adoption. Néanmoins, ces
protections sont inadaptées à l'ampleur de la situation
créée par le VIH/SIDA.
Il convient de relever leurs insuffisances.
§1. La tutelle des mineurs.
La tutelle est un mode de protection du mineur que le
législateur a substitué à l'autorité parentale
quand il n'est plus possible d'organiser cette protection à partir des
parents.39(*)En effet, la
tutelle s'ouvre lorsque l'unique parent, ou le parent survivant est
décédé, absent ou déchu de l'autorité
parentale. (art.300 al.1, CPF).
Lorsqu'elle n'est pas ouverte d'office, la tutelle peut
l'être par le tribunal à la requête de toute personne
intéressée ou du ministère public.
Cette institution de protection de remplacement protège
le pupille dans sa personne et dans ses biens.
Les limites de la tutelle dans protection des enfants
touchés par le VIH/SIDA résident dans le fait que celle-ci est
organisée essentiellement autour de la famille.40(*)Or la situation
engendrée par le VIH/SIDA a dépassé le seul cadre de la
famille comme en témoigne l'émergence des situations comme la
dislocation de la famille suite aux ravages du SIDA dans les familles qu'il
touche et l'émergence de toute une génération d'orphelins
dus notamment au SIDA et à la guerre. Ces enfants n'ont, le plus
souvent, ni parent ni conseil de famille pour les pourvoir d'un tuteur ;
ce qui explique le nombre de plus en plus important d'enfants chefs de
ménage, phénomène jusqu'alors inconnu au Burundi.
D'autre part, même dans des situations normales, le
caractère purement familial de la composition du conseil de famille a
valu à la tutelle de nombreuses critiques, d'autant plus que les proches
parents ne sont pas toujours les mieux indiqués pour protéger
l'orphelin. En effet, ils peuvent présenter une moralité douteuse
ou avoir des conflits d'intérêt avec ceux de l'enfant.41(*)Ainsi, il est fréquent
d'assister à la spoliation des biens de l'orphelins à la mort de
ses parents par le tuteur lui-même ou par les membres de la famille,
parfois avec la complicité ou dans l'indifférence du conseil de
famille qui est pourtant chargé par la loi de veiller à la bonne
administration de la tutelle42(*).Cela est exacerbé par le fait que dans la
société, les orphelins du SIDA sont souvent victimes de
déconsidération sociale à cause de la stigmatisation et la
discrimination dont ils sont souvent victimes.
Enfin, les dispositions organisant la tutelle ne
prévoient aucune solution pour l'enfant sans attache familiale soit que
le SIDA ou tout autre circonstance a décimé toute la famille soit
que personne n'est intéressé à requérir un tuteur
pour lui surtout si l'on sait que les magistrats du ministère public
sont peu nombreux et que par conséquent ils ne peuvent pas
connaître la situation de chaque orphelin.
§2. L'émancipation.
A. Emancipation et protection des enfants
affectés par le VIH/SIDA
L'émancipation permet au mineur ayant moins de 21 ans
d'avoir la capacité du majeur. Il s'agit d'un acte juridique par lequel
un mineur acquiert la capacité d'exercice et se trouve de ce fait
assimilé à un majeur.43(*)L'émancipation fait disparaître
l'autorité parentale44(*) ou celle du tuteur. Sur le plan patrimonial, son
incapacité est écartée. Cependant, il existe des points
sur lesquels l'émancipation ne confère pas au mineur
émancipé des droits semblables à ceux du majeur.
C'est ainsi qu'il doit demander la dispense du gouverneur
pour se marier avant l'âge requis (art.88 in fine) et
l'autorisation des parents ou du conseil de famille pour se faire adopter
(art.11 et 13, Loi n°1/004) ou se marier. Il ne peut non plus
acquérir la qualité de commerçant avant 18 ans
(art.353).
L'émancipation, peut être un
élément de réponse aux multiples problèmes auxquels
sont confrontés les orphelins du SIDA ou les enfants affectés
autrement par cette maladie. Elle peut être profitable à
l'ensemble de la famille dans le cas par l'exemple où le mineur
constitue par la suite de la disparition des parents le soutien matériel
de la famille - les orphelins chefs de ménage par l'exemple-, et qu'il
est souhaitable de lui donner les moyens juridiques pour assurer cette mission
de soutien. Ainsi un parent sur le point de mourir pourra demander devant le
juge l'émancipation d'un des enfants qui fait preuve d'une certaine
maturité afin qu'il continue la défense des intérêts
de la famille après sa mort.
L'émancipation peut permettre à l'orphelin
confronté à la spoliation de ses biens de défendre ses
intérêts et ceux de ses frères et d'ester en justice en cas
de litiges de propriété par exemples, ce que sa condition de
mineur ne lui permettrait pas.
En effet, bien souvent, les enfants sont confrontés aux
problèmes de spoliation des biens laissés en héritage
à la mort de leurs parents. Cela est rendu plus difficile par le fait
que les enfants dans la plupart des cas, ne peuvent pas exprimer leur point de
vue et sont juridiquement liés par des décisions prises par les
adultes alors que ces derniers en abusent souvent.
B. Les lacunes de l'émancipation.
Bien qu'elle présente une grande utilité
surtout en ce qui concerne la défense des intérêts des
orphelins ou des enfants autrement affectés par le VIH/SIDA,
l'émancipation telle qu'elle est organisée ne manque pas des
lacunes.
En effet, d'une part, le fait est qu'en subordonnant
l'émancipation judiciaire à la demande de la personne qui exerce
l'autorité parentale sur le mineur ou à son tuteur (art.356,
CPF), le législateur ne semble pas avoir prévu le cas
où le tuteur d'un orphelin serait de mauvaise foi envers le mineur et ne
voudrait pas son émancipation notamment lorsque ses
intérêts seraient en opposition avec ceux du mineur. En ne
prévoyant pas l'éventuelle mauvaise foi du mineur, le CPF a
enlevé à l'institution d'émancipation un peu de son
efficacité.
D'autre part, cette exigence de l'article 356 du CPF fait
penser que l'émancipation a été prévue uniquement
pour les enfants qui ont encore un ou des parents ou qui sont pourvu d'un
tuteur et exclut de ce fait l'enfant qui n'a ni l'un ni l'autre. Cela constitue
une discrimination à l'encontre des enfants chefs de ménages qui
n'ont pas de tuteur et les prive de ce fait d'un moyen de défendre leurs
intérêts.
§3. L'adoption.
A. Notion.
L'adoption est organisée par la Loi n° 1/004 du
30 avril 1999 portant modification des dispositions du Code des personnes et
de la famille relatives à la filiation adoptive45(*). L'article 1 de la loi
susmentionnée définit l'adoption comme étant la
création par un jugement d'un lien de filiation entre deux personnes
qui, sous le rapport de sang, sont généralement
étrangères l'une et l'autre.
Cette loi, prévoit plusieurs sortes d'adoption. En
effet, selon les effets sur la parenté par le sang, on distingue
l'adoption simple de l'adoption plénière. L'adoption simple
laisse subsister les liens entre l'enfant et sa famille d'origine (art.1,
4°), l'adopté reste dans sa famille d'origine et y conserve
ses droits héréditaires (art.42). L'adoption
plénière au contraire entraîne une repture des liens entre
l'adopté et sa famille d'origine, l'adopté est alors
assimilé à l'enfant légitime de l'adoptant et cette sorte
d'adoption est irrévocable (art.36).
On distingue également l'adoption nationale et
l'adoption internationale. L'adoption nationale étant l'adoption d'un
enfant par un citoyen résidant de manière permanente dans le
même pays que l'enfant (art.1, 2°) tandis que dans
l'adoption internationale, l'adoptant est un ressortissant étranger ou
un citoyen de la même nationalité que l'enfant mais
résidant à l'étranger (art.52).
En tout état de cause, l'adoption doit être
conforme à l'intérêt de l'enfant.46(*)
B. Les limites de l'adoption.
Les dispositions concernant l'adoption simple et l'adoption
plénière peuvent s'appliquer aux diverses catégories
d'enfants touchés par le VIH/SIDA, plus particulièrement aux
enfants chefs de ménages qui pourraient trouver une famille pour eux.
Néanmoins, l'adoption n'est pas adaptée pour
faire face à cette situation de milliers d'enfants devenus orphelins
à cause du VIH/SIDA ou de la guerre ; elle ne peut apporter qu'une
réponse somme toute limitée aux problèmes de l'enfant
privé de son milieu familial car peu de familles burundaises peuvent
adopter plus d'un enfant, quand elles sont disposées à adopter un
enfant. La réalité est que l'adoption rencontre la
méfiance de beaucoup de familles burundaises par peur de voir l'enfant
recueilli bénéficier de la succession familiale. Et si l'adoption
d'une fille est plus répandue, c'est parce que celle-ci constitue une
main d'oeuvre très recherchée et que plus tard, c'est à la
famille d'accueil que revient la dot alors que le garçon, non seulement
n'apporte pas de dot mais pourrait même prétendre hériter
dans sa famille d'accueil.47(*)
D'autre part l'adoption, surtout l'adoption
plénière, ignore une catégorie importante d'enfants qui en
ont besoin. En effet, elle ne concerne que les enfants pour lesquels les
père et mère ont valablement consenti à l'adoption, les
pupilles de l'Etat 48(*)(art.10) ou les enfants recueillis par un
particulier ou une oeuvre privée et des enfants qui ont
été déclarés abandonnés par le Tribunal de
Grande Instance (art.20). Ainsi, elle n'est d'aucun secours pour
l'orphelin qui n'est pas pupille de l'Etat et n'a été recueilli
par personne.
En outre, ses conditions très restrictives
l'empêchent d'être adaptée à la protection des
enfants sans attache familiale. En effet, la loi exige le consentement
préalable des parents ou du conseil de famille dans le cas où les
parents sont morts ou déchus de l'autorité parentale. Qu'en
est-il du cas où l'on est pratiquement dans l'impossibilité de
trouver le conseil de famille de l'enfant soit que ses membres sont tous morts
soit qu'il n'y ait jamais eu de conseil de famille du tout ?
Enfin, le fait que pour être déclaré
abandonné, l'enfant doit être recueilli par un particulier, une
oeuvre privée ou le service de protection sociale exclut de cette
protection les enfants privés de leur milieu familial qui n'ont pas eu
la chance d'être recueillis par personne et qui par conséquent,
vivent dans la rue ou errent sur les collines alors qu'ils ont besoin plus que
tous les autres enfants de protection par un adulte.
SECTION II. DE LA MODIFICATION DU CPF.
§1. Réorganisation des protections de
remplacement.
I. De la nécessité de repenser la
tutelle.
Il faut réorganiser la tutelle pour l'adapter à
la réalité mais également pour éviter qu'elle
n'aille pas à l'encontre de l'objet même de la loi qui est la
protection de l'orphelin dans sa personne et dans ses biens.
C'est pourquoi il faut confier la gestion de la tutelle
à une autorité judiciaire et impliquer davantage la
communauté, l'organisation de la tutelle autour de la famille ayant
montré ses limites.
Ainsi le Tribunal de Résidence remplacera le conseil de
famille dans sa mission de contrôle et de suivi de la tutelle. Quant au
conseil de famille, il aura un statut de consultation dans la
désignation du tuteur et dans la prise de décisions importantes
mais le juge ne sera aucunement lié par l'opinion du conseil de famille.
En outre pour atténuer le caractère
essentiellement familial de la tutelle et impliquer davantage toute la
communauté dans la défense des intérêts et la
protection des droits des orphelins et des autres enfants vulnérables,
il faut prévoir sur chaque colline et parallèlement au conseil de
famille, un autre organe : le comité de protection des orphelins et
des enfants en détresse. Cet organe sera « l'oeil »
et « l'oreille » du juge qui ne peut être partout
à la fois. En effet, son rôle sera de veiller au respect des
droits fondamentaux de l'orphelin ou de l'enfant vulnérable et de faire
rapport au juge le moment venu. Ses membres seront désignés par
le chef de zone sur proposition du chef de colline de la localité de
l'enfant en tutelle et sont issus de l'institution d'Ubushingantahe.
Quant au contrôle de l'administration de la tutelle, le
comité de protection des orphelins et des enfants en détresse est
délégué par le juge pour vérifier, au
côté du conseil de famille, état et inventaire des biens
immobiliers et mobiliers du pupille au début de la tutelle. En outre,
toujours délégué par le juge et à côté
du conseil de famille, il est tenu de réclamer au tuteur au moins une
fois l'an, un état complet de sa gestion et de procéder aux
vérifications nécessaires. Il doit pour cela faire rapport
contresigné par le conseil de famille au juge dans un délai ne
dépassant pas quinze jours.
Comme on le voit, la présence de cette institution dans
la tutelle donne à cette dernière une assise communautaire et une
certaine crédibilité qu'elle a perdue avec le temps. D'autre
part, dans l'hypothèse où l'enfant n'a pas d'attache familiale,
c'est-à-dire ni parent ni famille, le comité de protection des
orphelins pourra servir de conseil de famille pour cet enfant. Dans ce cas, il
sera désigné un tuteur parmi ses membres. Les membres de ce
comité, conjointement avec le tuteur, pourront engager leur
responsabilité personnelle en cas de faute préjudiciable à
l'orphelin commise par le tuteur avec leur complicité ou dans
l'indifférence de leur part.
Enfin, dans tous les cas, et pour responsabiliser les tuteurs
et les personnes qui ont la garde d'un orphelin ou d'un enfant en
difficulté, il serait nécessaire de prévoir des sanctions
civiles et pénales ou renforcer les sanctions existantes contre toute
personne, manquant délibérément à son obligation de
protéger un enfant, lui cause un préjudice grave. Ainsi, il faut
prévoir dans le CPF une disposition stipulant que le tuteur d'un
orphelin a l'obligation juridique de veiller à ce qu'il recouvre les
soins de santé ou aille à l'école, à défaut
de quoi, il peut engager sa responsabilité civile pour négligence
et/ou sa responsabilité pénale pour l'infraction de ne pas
fournir les choses essentielles à l'existence à un enfant dont on
a la garde et prévoir une telle infraction dans le Code Pénal.
II. De la nécessité de
réorganiser l'émancipation
Actuellement, comme déjà dit, la demande
d'émanciper est réservée au tuteur ou à la personne
qui a la garde de l'enfant uniquement, ce qui enlève à cette
institution un peu de son efficacité.
Pour cela, il faut ouvrir cette faculté à toute
personne intéressée et pourquoi pas à l'enfant candidat
à l'émancipation et prévoir une exception en sa faveur
compte tenu du fait qu'il n'a pas l'âge requis pour formuler sa demande
auprès du juge.
Cette proposition vise la nécessité de tenir
compte de l'existence de ces enfants chefs de ménages qui n'ont pas de
tuteur, d'une part et de prévenir des cas toujours possibles de mauvaise
foi de la part du tuteur ou de la personne ayant la garde de l'enfant, d'autre
part.
C'est ainsi que la réorganisation de
l'émancipation doit contenir une disposition qui oblige le tuteur ou la
personne qui a la garde de l'enfant candidat à l'émancipation
à faire diligence pour que l'émancipation soit
réalisée.
Dans le cas où c'est l'enfant qui en fait la demande,
le juge doit d'abord requérir l'avis du Conseil de famille et/ou du
comité de protection des orphelins et des enfants en détresse.
Enfin, concernant la qualité de l'orphelin ou de
l'enfant qui doit être prise en compte dans l'émancipation, il
faut tenir compte non de l'âge de 16 ans comme c'est le cas aujourd'hui,
et qui à notre avis est trop exclusif pour une bonne partie des enfants
touchés par le VIH/SIDA,- il faut le souligner- mais de sa
capacité de discernement.
Cette proposition se justifie par le fait que beaucoup
d'orphelins du SIDA ou d'enfants des parents malades du SIDA sont contraints de
gagner leur vie dès leur plus jeune âge ce qui fait qu'ils sont
assez mûrs pour leur âge, étant passés par la dure
école de la vie.
III. De l'introduction d'une institution
nouvelle : le placement
L'adoption, il faut le rappeler, n'est pas une pratique
couramment acceptée par la société burundaise. Cette
dernière lui préfère le placement temporaire et une prise
en charge matérielle de l'orphelin dans une famille d'accueil
jusqu'à sa majorité.49(*)C'est pourquoi il faut organiser, à
côté de l'adoption le placement en famille d'accueil. C'est ce que
font beaucoup d'intervenants dans les domaines de la prise en charge des
orphelins. Néanmoins, ils le font d'une manière si anarchique
qu'il faut de toute urgence organiser ce mode de prise en charge afin qu'il
puisse contribuer à donner une réponse efficace au
problème de plus en plus préoccupant de milliers d'enfants
désormais sans personnes pour s'occuper d'eux.
La loi organisant le placement doit définir
minutieusement le statut de l'orphelin dans sa famille d'accueil et ne pas
poser de conditions quant à l'âge limite de l'enfant à
placer. Cependant, si l'enfant a plus de 13 ans, il doit consentir
personnellement.
D'autre part, ses dispositions doivent couvrir le plus de
problèmes que rencontre l'orphelin, plus particulièrement la
discrimination, l'exploitation et la spoliation des biens laissés par
ses parents par les membres de la famille d'accueil. Ceci pour tenir compte du
fait qu'en réalité, le plus souvent, l'orphelin n'est pas
accueilli pour ce qu'il est mais pour ce qu'il représente ou pourra
apporter à la famille (dot, main d'oeuvre, biens,...).
Pour ces raisons, la famille candidate au placement doit
d'abord être soumise à une enquête approfondie. On doit
tenir compte notamment du profil cette famille afin de voir si elle a la
moralité et les moyens nécessaires à l'entretien et
à l'éducation de l'orphelin qu'elle se propose à
accueillir. De plus, lors de l'accueil de l'enfant, la famille d'accueil doit
signer, devant l'autorité publique- en l'occurrence l'administrateur ou
son représentant- un document officialisant le placement de l'orphelin
dans cette famille et définissant par là même les droits et
les devoirs aussi bien de la famille d'accueil, de l'orphelin que de
l'organisme auteur du placement. Le même document doit contenir en outre
l'engagement du preneur en charge d'assurer à l'orphelin les mêmes
droits que ses propres enfants aussi longtemps qu'il est sous sa garde.
Les dispositions organisant le placement doivent
prévoir autant que faire se peut la protection des biens du mineur en
placement. A cet égard, il faut prévoir une structure permettant
la participation de l'orphelin en placement dans la gestion de ses biens, s'il
a l'âge de discernement, sous la surveillance du conseil de famille et/ou
du comité de protection des orphelins et des enfants en détresse
dont nous avons déjà parlé.
Quant au contrôle et au suivi du bon déroulement
du placement en famille, il est exercé conjointement par la
communauté par le biais du conseil de famille de l'enfant secondé
en cela par le comité de protection des orphelins et des enfants en
détresse ou le comité seul en l'absence du conseil de famille
d'une part et les pouvoirs publics d'autre part. Les deux institutions issues
de la communauté dans laquelle vit l'enfant en placement ont un
rôle de suivi, de protection et de plaidoirie à jouer. Ils doivent
veiller à la protection du pupille en placement dans sa personne et dans
ses biens et requérir si besoin est, l'intervention des pouvoirs
publics.
Ces derniers doivent exercer le contrôle et le suivi de
l'Etat sur le placement en famille comme sur les autres protections de
remplacement instituées conformément au prescrit de l'art.3,
3.de la CDE que le Burundi a ratifiée.
En effet, cet article impose aux Etats Partie le devoir de
veiller « à ce que le fonctionnement des institutions,
services ou établissements qui ont la charge des enfants et assurent
leur protection » soit conforme aux normes légales,
« plus particulièrement dans le domaine de la
sécurité et de la santé et en ce qui
concerne...l'existence d'un contrôle régulier ». De
plus, le Burundi s'est engagé dans la CDE à assurer
à l'enfant en placement, le droit à un examen périodique
de sa situation (art.25). Il faut concrétiser cet
engagement.
Pour ce faire, il faudra décentraliser le
Département de la Protection Sociale jusqu'au niveau communal. Aussi, le
Département de la Protection Sociale doit comprendre en son sein un
service chargé entre autres de l'écoute et du suivi du processus
d'accueil et du placement ou de l'adoption. Ce service aura également
pour tâche de procéder régulièrement au
contrôle du bon déroulement du placement et des autres
institutions de remplacement et il doit faire rapport au juge du tribunal de
Résidence de la localité de l'enfant en placement.
Pour les autres points, le placement est organisé sur
le modèle de l'adoption.
Mais le CPF doit protéger davantage les enfants en
situation d'exclusion comme les enfants issus des unions
irrégulières.
§2. De la nécessité de
réaménager l'action en recherche de paternité.
Le CPF doit tenir en compte de la réalité de
cette catégorie d'enfants naturels ou de pères inconnus de plus
en plus nombreux surtout dans les centres urbains. A cet égard, nous
proposons que la représentation du mineur en recherche de
paternité soit étendue à d'autres personnes et que soient
assouplies les conditions exigées pour intenter l'action en recherche de
paternité.
Pour ce faire, les articles 235 et 237 du CPF doivent
être revus afin de tenir compte d'une part, des problèmes des
enfants qui n'ont ni mère ni tuteur pour les représenter et
d'autre part, des circonstances qui pourraient empêcher l'enfant devenu
majeur d'intenter l'action dans les délais impartis.
En effet, l'article 235 du CPF dispose que l'action en
recherche de paternité appartient à l'enfant qui est
représenté par sa mère ou son tuteur.
Quant à l'article 237, il pose des conditions à
la recevabilité de l'action. Ainsi, l'action doit être
intentée au plus tard dans l'année qui suit la majorité de
l'enfant. Si l'action est dirigée contre les héritiers du
père prétendu, elle doit être intentée avant que
ceux-ci n'aient été mis en possession de leur part
héréditaire et au plus tard un an après le
décès.
Ainsi, la représentation du mineur dans l'action en
recherche de paternité devrait être étendue à toute
personne, physique ou morale intéressée afin de prévoir le
cas où le mineur en question n'a ni mère ni tuteur pour le
représenter. Il faut entendre par personne morale
intéressée l'organisme d'intérêt public qui s'occupe
de l'enfant. D'autre part, tout en maintenant les conditions de l'article 237
ci-haut indiquées afin d'éviter des éventuels abus, nous
suggérons de prévoir des exceptions en faveur d'un mineur devenu
majeur que les circonstances ont empêché d'intenter l'action dans
les délais impartis. Ces circonstances doivent être
expressément précisées pour éviter, encore une
fois, les abus.
La réforme de ces deux articles permettrait de
procurer le maximum d'efficacité au but que vise le législateur
en organisant la filiation naturelle à savoir, la protection de l'enfant
né hors mariage et permettrait également de réhabiliter
beaucoup d'enfants exclus par la société.
Cependant, il est également nécessaire de
prendre d'autres mesures visant à accompagner et à appuyer la
réforme du CPF dans la protection des enfants infectés ou
affectés par le VIH/SIDA.
§3. Des mesures appuyant le CPF dans la protection des
enfants infectés ou affectes par le VIH/SIDA.
La réforme du CPF que nous avons proposée
serait sans grand effet en l'absence d'un système judiciaire qui tient
compte de l'impact de la pandémie du SIDA sur la vie et les droits des
enfants. De plus la nécessité de circonscrire et de s'occuper de
ce phénomène de plus en plus préoccupant de l'enfance de
la rue s'avère une urgence.
Pour cela, une série de mesures s'impose.
I. Réforme du système
judiciaire.
La protection juridique des enfants infectés ou
affectés par le VIH/SIDA comprend non seulement l'adoption des lois et
règlements, mais également la capacité de les invoquer et
de les faire appliquer par les tribunaux.
Cependant, notre système judiciaire actuel comporte des
procédures complexes et inadaptées aux plaignants mineurs, et
longues pour les personnes diminuées par la maladie.
C'est pourquoi, il s'avère nécessaire de tenir
compte des problèmes juridiques liés au VIH/SIDA et de rendre la
justice accessible pour les personnes vivant avec le VIH/SIDA et leurs familles
en butte avec la violation de leurs droits. Pour cela il faut organiser des
services d'assistance juridique pour eux.
1. Aménager des procédures
adaptées aux personnes touchées par le SIDA
Il faut, comme le recommande les Directives internationales
sur le VIH/SIDA et les droits de l'homme50(*), doter le système judiciaire des
procédures juridiques et/ou administratives rapides et simples pour un
plaignant malade notamment lorsqu'il est en phase terminale. De plus, il est
nécessaire de prévoir la possibilité pour les
organisations d'intérêt public d'agir en son nom.
En effet beaucoup de personnes sans scrupules profitent de ce
qu'une personne n'est pas en bonne santé, plus particulièrement
lorsqu'elles savent qu'elle a le VIH, pour s'approprier ses biens et comptent
pour cela sur un long procès pour arriver à leur fin.
Ainsi, la possibilité des procédures rapides et
simples prévues pour les plaignants malades ainsi que la
possibilité pour les organisations d'intérêt public d'agir
au nom du plaignant malade ou des orphelins permettraient d'éviter que
les enfants soient spoliés de leurs biens.
Cependant, beaucoup de personnes vivant avec le VIH/SIDA et
leurs familles ont besoin d'une assistance juridique.
2. Assistance juridique aux personnes vivant avec le
VIH/SIDA et aux orphelins.
Les personnes infectées ou affectées par le
VIH/SIDA, y compris les enfants, devraient avoir accès à une aide
judiciaire gratuite ou au moindre coût. Cette proposition va dans le sens
des recommandations formulées par les Directives internationales sur le
VIH/SIDA et les droits de l'homme précitées qui demandent aux
Etats de « créer et soutenir des services d'assistance
juridique qui informeront les personnes touchées par le VIH/SIDA de
leurs droits, fourniront gratuitement des conseils juridiques en vue de
l'exercice de ces droits,... ». (Directive 7)51(*)
En effet, comme déjà souligné le VIH/SIDA
entraîne aussi dans son sillage des phénomènes d'exclusion
sociale et de nombreuses violations de droits des personnes qu'il touche en
plus des problèmes de santé et de grande pauvreté. Cela
fait que les personnes touchées par cette pandémie et leurs
proches ont le plus besoin de recourir à la justice pour rentrer dans
leurs droits. Or les services judiciaires sont souvent inaccessibles pour ces
personnes vulnérables compte tenu du fait que les frais judiciaires sont
élevés, les procédures judiciaires longues et complexes,
alors que les questions juridiques liées au VIH/SIDA le sont autant
sinon plus.
D'où la nécessité pour l'Etat et les
autres intervenants en matière de prise en charge des personnes
touchées par le VIH/SIDA de créer et de soutenir les services
d'assistance juridique pour permettre aux orphelins et aux autres personnes
touchées par le VIH/SIDA d'exercer leurs droits de l'homme et les droits
qui leurs sont conférés par la loi en faisant appel à ces
services.52(*)
Ces services auront entre autres tâches d'informer les
personnes vivant avec le VIH/SIDA sur leurs droits et de les aider à
préparer l'avenir de leurs enfants. A cet égard un
intérêt particulier doit être mis sur la
nécessité pour les parents d'enregistrer leurs biens afin de
permettre aux enfants de connaître la nature, la quantité et la
localisation des biens que les parents leur laissent. Cette aide doit
également viser la rédaction par les parents des testaments et
leur authentification par un notaire. Dans le même ordre d'idées,
les parents doivent être encouragés à choisir un tuteur
pour leurs enfants et qui prendra soin d'eux à leur mort.
Concernant leur mise en place, les services d'assistance
juridique pour les populations vulnérables seront créés
sur toute l'étendue du territoire. Pour y parvenir, l'Etat peut entre
autres mesures, accorder un appui et des incitations d'ordre fiscal par exemple
aux services juridiques du secteur privé comme celui des avocats ou des
notaires pour leur permettre de fournir des prestations gratuites aux personnes
touchées par le VIH/SIDA, y compris les enfants, dans les domaines comme
la propriété, le droit à la santé, le droit
à l'éducation ou le droit au travail, etc.
Parallèlement, dans le milieu urbain, il faudra
encourager les organisations privées intervenant dans le domaine du
VIH/SIDA d'inclure dans leur sein des services d'assistance juridique aux
personnes touchées par le VIH/SIDA et leur octroyer de l'aide en ce
sens.
Dans les régions rurales, l'approche serait
d'encourager la création des réseaux communautaires de
collaboration avec les services publics d'assistance juridique aux personnes
vulnérables ou avec les associations des droits de l'homme.
II. Des mesures s'attaquant aux facteurs qui poussent
l'enfant dans
la rue
Il convient de noter que le phénomène de
l'enfance dans la rue est en partie le produit de l'impact
socio-économique du VIH/SIDA sur les familles. En outre, les enfants de
la rue sont susceptibles de contracter le SIDA plus que les autres enfants.
L'Etat avait prévu et organisé le système
d'orphelinats pour résoudre le problème de l'enfant privé
de son milieu familial. Mais les orphelinats n'ont pas la capacité
d'absorber les orphelins dont le nombre ne cesse de croître à
cause notamment du SIDA et de la guerre.
La prise en charge de l'orphelin ou autre enfant en
difficulté par sa famille ou sa communauté peut contribuer
à freiner ce phénomène de l'enfant abandonné
à lui-même. C'est ce que recommande le Principe 5 de la
Déclaration de Dakar qui énonce que « Toute personne
directement affectée par l'épidémie doit rester partie
intégrante de la communauté avec le même droit au travail,
au logement, à l'éducation, aux services sociaux, ...avec le
droit au conseil, aux soins et au traitement, à la justice et à
l'équité. »53(*)
Mais pour rendre efficace ce mode de prise en charge, il faut
prendre des mesures visant à alléger les conséquences
économiques du VIH/SIDA sur les familles et les communautés mais
aussi à éradiquer cette situation d'exclusion et de mauvais
traitements dont est souvent victime l'orphelin dans sa famille et sa
communauté.
1. Aider les familles et les communautés
à prendre en charge leurs orphelins.
Aider les familles à prendre en charge et à
encadrer leurs orphelins est le plus sûr moyen de circonscrire ce
problème de l'enfant dans la rue.
Pour ce faire, il faut mettre en place une politique visant
l'intégration sociale et l'encadrement des orphelins. Cette politique
doit comporter des programmes qui aident les familles qui prennent en charge
les orphelins et les autres enfants vulnérables afin d'améliorer
leur capacité à prendre en charge, soutenir et protéger
ces enfants et de les conduire à l'autofinancement par des
activités génératrices de revenus.
Cette proposition traduit dans la réalité la
disposition de l'article 38 de la Constitution qui engage l'Etat et les
collectivités publiques à aider les familles dans leur
tâche de protéger leurs enfants et de l'article 20 de la
CDE qui complète cette disposition constitutionnelle en
engageant les Etats qui l'ont ratifiée, dont le Burundi, à
assurer à « tout enfant qui est temporairement ou
définitivement privé de son milieu familial (...) une protection
et une aide spéciales de l'Etat ».
Cependant l'aide doit être dirigée vers tous les
enfants de la famille qui a accueilli les orphelins et non ces derniers seuls
afin d'éviter des statuts différents aux enfants d'une même
famille. En effet, il n'est pas utile de séparer les orphelins des
autres enfants vulnérables (les enfants des familles qui ont accueilli
des orphelins le sont souvent) car, cela risque de renforcer la
discrimination et le rejet à l'égard des orphelins. D'un autre
côté, cette façon de procéder peut avoir pour effet
de stimuler la prise en charge des orphelins et des autres enfants
vulnérables par les familles.
Ces programmes doivent également appuyer et soutenir
les initiatives locales en matière d'assistance aux orphelins, notamment
en suscitant la création des groupements et associations locaux qui
pourraient agir comme relais à l'exécution de programmes
d'assistance aux orphelins.54(*)Du même coup, ce sera une occasion de
redynamiser les mécanismes traditionnels de prise en charge et de
protection des populations vulnérables comme les veuves et les
orphelins.
Enfin, à long terme, ces programmes doivent appuyer
toutes les familles qui sont vulnérables et pas seulement les familles
touchées par le VIH/SIDA, ceci pour assurer l'équité et
lutter efficacement contre la discrimination des familles touchées par
le VIH/SIDA.
2. Combattre la situation d'exclusion et de mauvais
traitements
Combattre, uniquement au moyen de la loi, la situation
d'exclusion et de mauvais traitements qui se pratiquent dans les familles
contre les orphelins est une chose qui est à la limite du possible. Il
faut utiliser d'autres approches comme l'éducation du public et la
mobilisation de la communauté contre ces pratiques.
Ainsi, nous suggérons aux pouvoirs publics et aux
autres intervenants de lancer de vastes campagnes de sensibilisation du public
sur la nécessité de prendre en charge les orphelins du SIDA et
les autres enfants en difficulté.
Pour ce qui est des mauvais traitements des enfants orphelins
ou autres enfants en situation difficile, nous osons espérer que les
mesures que nous avons suggérées d'impliquer davantage la
communauté dans la défense de l'orphelin auront pour effet de
responsabiliser davantage les personnes ayant en charge un orphelin.
Néanmoins, notre proposition va dans le sens
d'appliquer et de renforcer, les règles du CP qui sanctionnent les
mauvais traitements infligés à un enfant afin de punir toute
personne qui est chargé de le protéger mais qui se rend coupable
maltraitance à son égard. A notre sens, le fait d'être
orphelin devrait constituer une circonstance aggravante dans le chef de la
personne qui a recueilli l'orphelin mais le maltraite car souvent, ce fait ne
laisse à l'orphelin désemparé d'autres recours que la
rue.
3. Nécessité d'une législation
sur les successions
A notre avis, le fait que la succession ne soit pas encore
organisée par le droit écrit porte un grave préjudice aux
enfants touchés par le SIDA, surtout les enfants issus des mères
célibataires qui vivent dans les centres urbains loin de leurs familles
d'origine.
En effet, comme la coutume burundaise refuse à la fille
le droit d'hériter, les enfants d'une femme qui n'a pas
été mariée héritent difficilement de leurs grands
parents maternels à la mort de leur mère. De plus, subissant
déjà une situation de déconsidération sociale
liée à leur état d'enfants issus d'unions
irrégulières, ils sont souvent rejetés par l'entourage et
ils n'ont d'autre recours que la rue.
Ainsi, élaborer une législation sur la
succession afin de l'enlever à l'empire de la coutume s'avère une
urgence.
Cette législation doit se pencher plus
particulièrement sur les problèmes de l'héritage des
filles et le droit à la propriété des femmes
mariées. Ainsi, tout en ayant à l'esprit de sauvegarder
l'équilibre social, la législation sur la succession doit traiter
autant que faire se peut, les filles et les garçons sur un même
pied d'égalité en matière d'héritage et garantir
expressément à la femme mariée le droit à la
propriété sur ses biens.
Parallèlement à l'élaboration d'une loi
sur les successions, il faut organiser des campagnes de sensibilisation et
d'éducation du public ayant pour objet d'encourager les parents et les
familles à aller au delà de la coutume et de traiter les filles
sur le même pied d'égalité que les autres enfants en
matière d'héritage. Car, les traiter différemment comme
c'est le cas aujourd'hui est une forme de discrimination que le Burundi s'est
engagé à éradiquer en ratifiant la CDE.
En effet, cette dernière stipule dans son l'article 2,
1. que : « Les Etats Parties s'engagent à respecter les
droits (...) et à les garantir à tout enfant relevant de leur
juridiction, sans distinction aucune, indépendamment de toute
considération de race, de couleur, de sexe, (...), de
ses parents ou représentants légaux, (...), de leur naissance ou
de toute autre situation. ». (C'est nous qui soulignons).
Cette disposition signifie que refuser l'héritage
à un enfant parce qu'il est de sexe féminin, ou parce qu'il est
naturel ou est né d'une femme non mariée ou parce qu'il est
infecté par le VIH/SIDA est illégal et constitue aux yeux du
droit international de l'homme des pratiques néfastes qui favorisent la
discrimination et l'exploitation et qui doivent être activement
combattues55(*).
III. La prise en charge des enfants de la rue ou qui
errent sur les
collines de notre pays
Pour les enfants qui vivent déjà dans la rue,
l'Etat doit constituer un tutorat public pour eux. Ce rôle sera
joué par le Département de la Protection Sociale qui sera
décentralisé sur tout le territoire et qui comprendra en son sein
une cellule constituée à cet effet.
Le département de la protection sociale, relativement
aux enfants de la rue aura pour mission de travailler en collaboration avec les
autres intervenants dans ce domaine à trouver les origines familiales de
ces enfants et les familles qui puissent les accueillir temporairement ou
définitivement. Pour ceux dont on ne peut trouver ni origines familiales
ni familles d'accueil, l'Etat devra diriger l'aide de la communauté
internationale vers la construction des maisons pour eux.
Il faut également prévoir pour tous ces enfants
des programmes comprenant des activités d'encadrement. A cet
égard les programmes d'enseignement aux métiers ainsi que les
activités génératrices de revenus semblent les mieux
indiqués pour amener progressivement ces enfants ainsi
réinsérés à se prendre en charge
eux-mêmes.
En dehors du CPF, il existe d'autres dispositions qui peuvent
nous être utiles dans la protection des droits des personnes en
général et des enfants en particuliers eu égard aux droits
les plus souvent violés dans le contexte de la pandémie du SIDA.
Néanmoins, elles présentent elles aussi des lacunes et
méritent d'être adaptées au contexte du VIH/SIDA.
SECTION II LA PROTECTION EN DROIT BURUNDAIS DE CERTAINS
DES DROITS DES ENFANTS LES PLUS COURAMMENT VIOLES DANS LE CONTEXTE DU
VIH/SIDA
Les droits des enfants les plus couramment violés dans
le contexte du VIH/SIDA sont le droit à la non discrimination, le droit
à la santé, le droit à la confidentialité, le droit
à l'éducation, le droit au logement et le droit à
l'alimentation.
Ces droits fondamentaux sont garantis et
protégés par la législation burundaise, mais
également par des traités internationaux relatifs aux droits de
l'homme ratifiés par le Burundi.
Il faut noter que les plus importants de ces traités
ont dans la législation burundaise, une valeur constitutionnelle.
En effet, l'article 15 de la Constitution de
Transition dispose que « les droits et les devoirs
proclamés et garantis par (...), la Déclaration Universelle des
droits de l'homme, les Pactes internationaux relatifs aux droits de l'homme,
(...) et la Convention relative aux droits de l'enfant font partie
intégrante de la présente Constitution de
Transition ».
§1. La protection contre la discrimination.
I. Le principe de non discrimination en droit
burundais
Le droit de ne pas être discriminé est
énoncé dans les traités internationaux relatifs aux droits
de l'homme ratifiés par le Burundi.
Relativement aux enfants, la CDE oblige en son
article 2 les Etats Partie au respect des droits qui y sont
énoncés et à les garantir à tout enfant relevant de
leur juridiction sans distinction aucune. En outre, l'Etat Partie à la
Convention a l'obligation de protéger l'enfant contre toute forme de
discrimination et de prendre des mesures positives pour le respect de ses
droits.
Cet article peut contribuer dans la lutte contre la
discrimination dont sont souvent victimes les orphelins, les enfants dont les
parents vivent avec le VIH/SIDA et surtout les enfants qui en sont
infectés. Non seulement il interdit aux Etats de prendre des mesures
discriminatoires, mais également il leur impose le devoir de prendre des
mesures appropriées pour protéger l'enfant contre toute forme de
discrimination.
Toutefois, il faut noter que bien qu'elle ait
été rédigée à une époque où le
VIH/SIDA avait déjà pris l'ampleur d'une épidémie
à l'échelle mondiale, la CDE ne mentionne le VIH/SIDA
nulle part dans ses dispositions. Mais la Commission des droits de l'homme des
Nations Unies a affirmé sans ambiguïté que
« l'expression « ou tout autre
situation » employée dans divers instruments relatifs aux
droits de l'homme, devrait être interprétée comme incluant
l'état de santé, notamment le VIH/SIDA » et que la
discrimination sur la base du SIDA ou de la séropositivité
réelle ou supposée est interdite.56(*)
Le principe de non discrimination est également garanti
par la loi burundaise. En effet, notre Constitution de Transition interdit la
discrimination liée au VIH/SIDA. Ainsi, après avoir
proclamé l'égalité de tous en dignité, en droit et
en devoir, son article 23 interdit parmi les divers motifs de discrimination,
la discrimination liée au VIH/SIDA en énonçant
que « nul ne peut faire l'objet de discrimination notamment
du fait de son origine, de sa race, de son ethnie, (...) ou du fait
d'être porteur du VIH/SIDA». Il précise en outre que
« tous les citoyens sont égaux devant la loi qui leur
assure une protection égale ».
Nous pensons que l'art.23 de la Constitution peut
être à la base des mesures anti-discrimination en faveur des
personnes touchées par le VIH/SIDA dont les enfants ainsi que leurs
familles. En outre, on peut se baser sur cet article pour intenter des actions
visant à réhabiliter éventuellement les victimes de la
discrimination.
D'autre part, la Constitution de Transition prescrit, en son
art.57, le devoir pour chaque individu « de respecter et
de considérer son semblable sans discrimination » et
d'entretenir avec lui des relations qui permettent la promotion, la sauvegarde
et le renforcement du respect et de la tolérance.
Cet article est très important dans la lutte contre la
discrimination liée au VIH/SIDA qui sévit dans les familles et la
communauté. En effet, il pourrait permettre de lutter vigoureusement
contre la discrimination dont sont victimes les personnes touchées par
le VIH/SIDA au sein de leurs communautés et surtout dans les familles,
domaine dans lequel rentre rarement le champ d'application des mesures
anti-discrimination, même dans les pays qui ont des législations
les plus avancées en matière de la lutte contre la
discrimination.
Ainsi, une personne, physique ou morale qui s'occupe des
intérêts de l'enfant victime de discrimination dans les structures
de santé ou à l'école pourrait agir en justice pour le
compte de cet enfant sur la base de l'art.23 ou de l'art.57
si la discrimination a eu lieu en famille ou dans la communauté.
Enfin, l'art.18 de la Constitution de Transition
stipule que « la dignité humaine doit être
respectée et protégée » tandis que
l'art.19 ajoute que « nul ne peut être
traité de manière arbitraire par l'Etat et ses
organes ». Or d'aucuns considèrent que la discrimination
prive les gens de leur dignité. De plus, la discrimination constitue une
distinction arbitraire parmi les personnes.57(*)Ces deux éléments combinés font
que la discrimination des enfants atteints du VIH/SIDA ou affectés
autrement par cette maladie constitue une violation flagrante des prescriptions
de la Constitution qui interdisent toute discrimination sur base du statut
sérologique d'un individu (art.23) et imposent à chacun
le devoir respecter et de considérer son semblable sans discrimination
(art.57). La discrimination viole également les prescriptions
des articles 18 et 19 qui proclament le respect et la protection de la
dignité humaine et interdisent tout traitement arbitraire de la part de
l'Etat et ses organes.
II. Les lacunes dans la protection contre la
discrimination en droit burundais.
La Constitution de Transition interdit d'une manière
générale la discrimination et cite le fait d'être porteur
du VIH/SIDA parmi les divers motifs prohibés de discrimination.
Cependant, elle ne définit pas la discrimination alors qu'il s'agit
d'une notion fort complexe et difficile à cerner.
En outre, toujours en ce qui concerne la discrimination, les
prescriptions de la CDE et autres instruments internationaux relatifs
aux droits de l'homme ainsi que celles de la Constitution restent au niveau des
principes. Il n'y a aucun texte législatif ou réglementaire qui
vient les concrétiser.
Cette lacune de nos textes de lois est très
préjudiciable aux personnes touchées par cette pandémie
car la discrimination touche tous les aspects de la vie de ceux qui en sont
l'objet, d'autant qu'elle a pour effet de les exclure et de les priver de ce
fait de tout soutien de la société.
C'est pourquoi il s'avère urgent d'intégrer dans
notre législation des mesures destinées à protéger
les personnes en général et les enfants en particulier contre la
discrimination liée au VIH/SIDA et d'abroger, le cas
échéant, les règles qui pourraient donner lieu à la
discrimination.
III. Propositions pour une meilleure protection contre
la discrimination liée au VIH/SIDA.
La lutte contre la discrimination doit être menée
sur deux fronts : l'élaboration des mesures anti-discrimination
ainsi que la mise sur pied des politiques visant à éduquer la
population et à mobiliser les communautés contre la
discrimination des personnes touchées par le VIH/SIDA et la
création d'un environnement qui leur est favorable.
A. Au niveau de la législation.
L'Etat devrait traduire dans la réalité les
dispositions de l'actuelle Constitution de transition qui peuvent être
d'une grande utilité dans la lutte contre la discrimination, notamment
les articles 23, 18, 19 et surtout 57.
Rappelons que L'article 23 interdit la discrimination
fondée notamment sur le VIH/SIDA et proclame
l'égalité de tous devant la loi qui leur assure une protection
égale. L'article 18 impose le respect de la dignité humaine
tandis que l'article 19 interdit à l'Etat et à ses organes de
prendre des mesures discriminatoires. Quant à l'article 57, il impose
à tout individu le devoir de respecter et de considérer son
semblable sans discrimination.
Pour traduire dans la réalité toutes ces
dispositions, il faut élaborer une législation contre la
discrimination qui s'applique notamment aux personnes vivant avec le VIH/SIDA,
et plus particulièrement aux enfants touchés par cette
pandémie. Le mot « discrimination » doit y
être spécifiquement et minutieusement défini afin de ne
laisser aucune équivoque. En outre, cette législation doit
préciser davantage les domaines dans lesquels la discrimination est
interdite.
Ainsi, cette législation doit avoir une portée
aussi large que possible de façon à couvrir les personnes vivant
avec le VIH/SIDA, leurs proches et leurs familles ; des domaines
variés comme les soins de santé, l'enseignement, le travail, les
assurances et la sécurité sociale, etc.,58(*) pour ne citer que les
principaux.
La loi anti-discrimination doit définir les
éléments pouvant être retenus pour établir
formellement une discrimination et le fait que la séropositivité
soit citée comme l'une des motivations d'un acte discriminatoire doit
suffire pour que l'action soit intentée. Egalement,
l'établissement d'un lien causal, plutôt que la preuve d'une
intention entre l'acte discriminatoire et la séropositivité doit
permettre de mener une action.59(*) En outre, comme les procédures
entraînent une publicité qui peut être préjudiciable
aux plaignants, il faut autoriser ceux-ci à utiliser les pseudonymes
pour protéger leur anonymat.60(*)
B. L'éducation du public sur la non
discrimination des personnes touchées par le VIH/SIDA et leurs
familles.
Parallèlement à la mise en oeuvre d'une
législation anti-discriminatoire, il faut organiser des campagnes de
sensibilisation et d'éducation du public pour rehausser le degré
de connaissance sur le SIDA et ses modes de transmission, et prévenir
ainsi les actes de discrimination et de stigmatisation envers les personnes
touchées par le VIH/SIDA.
Cette sensibilisation du public doit mettre l'accent sur la
responsabilité individuelle et sur la responsabilité collective
face à cette pandémie.
Chacun doit prendre ses responsabilités pour
éviter de se contaminer ou de contaminer les autres. La
responsabilité collective quant à elle doit se manifester par le
souci de tout un chacun de respecter et de protéger les droits des
personnes vivant avec le VIH/SIDA et de prendre en charge les malades et
orphelins.
Plus particulièrement, il est nécessaire
d'étendre cette sensibilisation vers le secteur public notamment le
secteur des soins. Le personnel de santé doit être
conscientisé sur les devoirs et responsabilités juridiques des
soignants vis-à-vis des patients en général et des
porteurs du VIH/SIDA en particulier. Il faut, en effet, savoir que l'absence
d'une éducation convenable sur le VIH/SIDA pour le personnel soignant
peut donner lieu à des craintes irrationnelles et à des pratiques
inappropriées dans le cadre des soins61(*) qui pourraient conduire à la
discrimination.
§2. Le droit à la santé.
I. La situation du droit à la santé au
Burundi.
L'embryon d'un droit à la santé apparaît
à l'article 25 de la Déclaration Universelle des Droits de
l'homme qui énonce que : « Toute personne a droit
à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son
bien-être et ceux de sa famille notamment pour...les soins
médicaux ainsi que les services sociaux nécessaires,
(...) ».
Le PIDESC va, pour sa part, être plus
explicite en énonçant dans son article 12 que : « Les
États Partie au présent Pacte, reconnaissent le droit qu'a toute
personne de jouir du meilleur état de santé physique et
mentale qu'elle soit capable d'atteindre »....
Cet article a été interprété dans
le sens d'une obligation pour les États de mettre en oeuvre les mesures
indispensables afin de garantir : « ...c) La prophylaxie et le
traitement des maladies épidémiques, professionnelles et autres,
ainsi que la lutte contre ces maladies ; d) la création des
conditions propres à assurer à tous des services médicaux
et une aide médicale en cas de maladie. »62(*).
Ce principe est aussi affirmé dans la Charte
Africaine des Droits de l'homme et des peuples dans son article 16 qui,
après avoir proclamé le droit à la santé dans les
mêmes termes que le PIDESC, affirme à l'alinéa 2
du même article l'engagement des États Partie à la Charte
de « prendre des mesures nécessaires en vue de protéger
la santé de leurs populations et de leur assurer l'assistance
médicale en cas de maladie ».
La CDE quant à elle, affirme avec vigueur
dans son article 24, le droit des enfants à la santé :
« Les États Partie reconnaissent le droit de l'enfant de jouir du
meilleur état de santé possible et de bénéficier de
services médicaux ». De plus, les États doivent
« s'efforcer de garantir qu'aucun enfant ne soit privé du
droit d'accès à ces services ».
A côté de ces instruments internationaux
ratifiés par le Burundi, notre Constitution de Transition énonce
expressément un droit à la santé spécifiquement aux
enfants. C'est ainsi que son article 39 stipule que « tout enfant
a droit à des mesures particulières pour assurer ou
améliorer les soins nécessaires à son bien-être,
à sa santé et à sa sécurité physique et pour
être protégé contre les mauvais traitements, les exactions
ou l'exploitation. ».
L'article 39 est très important. En effet, il
en appelle à des mesures particulières pour assurer ou
améliorer les soins nécessaires entre autres à la
santé de l'enfant. C'est d'ailleurs le seul article de la Constitution
qui parle explicitement d'un droit à la santé. Pour les autres
catégories de personnes, elle se contente d'énoncer le droit pour
chaque personne à la satisfaction des droits économiques, sociaux
et culturels (art.42) encore qu'elle conditionne la
réalisation de ce droit à la disponibilité des ressources
du pays.
L'autre point important de la Constitution de Transition pour
la réalisation d'un droit à la santé des enfants
infectés par le VIH ou affectés autrement est l'article
60 in fine qui dispose que l'Etat peut proclamer la
solidarité nationale devant les charges qui résultent des
calamités naturelles et nationales. Or le VIH/SIDA est qualifié
de « menace à la sécurité des
nations » et d'«état d'urgence » appelant
à des « mesures exceptionnelles »
par l'Assemblée Générale des Nations
Unies63(*) tandis que le
Sommet de l'OUA d'Abuja sur le VIH/SIDA parle d'un « état
d'exception ». Tous ces différents qualificatifs semblent
désigner une situation de « calamité » dont
parle l'article précité.
Il est intéressant de se demander si l'Etat ne peut
proclamer sur base de l'article 60, in fine une solidarité nationale en
faveur de ses citoyens touchés par cette terrible maladie, et
prévoir un fonds spécial pour soutenir les malades du SIDA et
leurs familles plus particulièrement les enfants infectés par le
VIH ou rendus orphelins par cette terrible maladie.
Il convient de se demander quelle est la portée
pratique de la disposition constitutionnelle relative au droit à la
santé.
II. Appréciation critique de la portée
de l'article 39.
La question que l'on pourrait se poser est celle de savoir si
l'on peut, se fonder sur l'article 39 pour exiger de l'Etat de
garantir l'accès à la tri thérapie ne fut ce que pour tous
les enfants burundais vivant avec le VIH/SIDA.
La réalité est que la tri thérapie est
encore trop chère et que le Burundi, l'un des pays les plus pauvres au
monde, ne peut l'offrir gratuitement à tous ses enfants ressortissants
séropositifs.
Cependant, cette question peut plutôt amener une
autre : celle de savoir si l'article 39 ne peut amener le Burundi
à exiger- sur base de l'article 12 du PIDESC
et sur l'article 24, CDE- des firmes multinationales
à baisser les prix des anti-rétroviraux.
La difficulté, répondent certains
auteurs64(*), c'est que le
PIDESC et la CDE ne peuvent contraindre que les Etats,
sujets de droit international, qui les ont ratifiés. Les firmes
multinationales, n'étant que les acteurs de la scène
internationale, ne sont donc pas liées par ces traités.
Néanmoins, soutiennent ces mêmes auteurs, il est
possible juridiquement, mais de manière détournée, de
contraindre les firmes multinationales pharmaceutiques à baisser leurs
prix.
En effet grâce à l'Accord sur les Aspects de
Droits de Propriété Intellectuelle qui touchent au Commerce
(ADPICs) instauré par l'Organisation Mondiale du Commerce
(OMC), il est désormais possible d'amener les firmes
internationales à réviser leurs prix à la baisse.
En effet, si le principe veut que les ADPICs obligent
les Etats à octroyer une protection par brevet65(*) aux produits pharmaceutiques
pour vingt ans minimum, il existe une exception selon laquelle dans un but
d'intérêt public ou en cas d'urgence nationale, un Etat à
séroprévalence élevée peut décréter
qu'il peut manufacturer localement et rendre accessible pour un prix moins
élevé les médicaments. Ce sont les licences
obligatoires66(*).
Malheureusement, le Burundi ne dispose pas d'infrastructures
ni de ressources nécessaires à la production des
anti-rétroviraux génériques, c'est à dire, des
médicaments généralement manufacturés sans licence
après expiration du brevet ou d'un autre droit
d'exclusivité67(*).
Toutefois, les ADPICs lui réservent une autre
possibilité.
En effet, cet accord, en ne l'interdisant pas, permet aux
pays qui n'ont pas les moyens de fabriquer l'anti-rétroviraux
générique, de recourir aux importations parallèles ;
c'est-à-dire les achats de médicaments de marques moins
chères au près d'un Etat tiers plutôt que directement
auprès du producteur pour bénéficier des prix plus bas que
ceux proposés par les firmes multinationales.68(*)
III. Les lacunes dans la mise en oeuvre du droit
à la santé pour les enfants touchés par le
VIH/SIDA.
Il reste beaucoup à faire en matière de la mise
en oeuvre du droit à la santé pour les enfants infectés ou
affectés par le VIH/SIDA comme pour les autres enfants et personnes
vulnérables. Les dispositions de la constitution et des instruments
internationaux relativement au droit à la santé des enfants
restent au niveau des principes.
En effet, au Burundi, il n'y a aucune loi, aucun
règlement qui vient les appliquer, constat amère d'autant plus
que le VIH/SIDA a causé de véritables problèmes de
santé publique qui touchent plus durement les enfants que les adultes.
La réalité est que les structures de
santé sont encore difficilement accessibles pour les enfants victimes de
la pandémie du SIDA. En effet, outre le fait que ces structures se
trouvent à de longues distances et sont sous-équipées en
matériel et en personnel qualifié, les enfants orphelins ou
autrement touchés par le VIH/SIDA ne disposent pas de moyens
nécessaires pour accéder aux soins de santé qui sont
aujourd'hui payants sans parler du coût des médicaments qui est
hors de portée des moyens dont disposent les familles. La discrimination
liée au VIH/SIDA dans les structures de santé, dont il a
été question plus haut, vient aggraver cette situation.
IV. Propositions pour une réalisation du droit
à la santé.
La situation engendrée par le VIH/SIDA a fait ressortir
la nécessité de réformer le secteur de santé et de
revoir la politique nationale en matière de la santé. Le but est
de traiter de façon adéquate les problèmes de santé
publique posés par le VIH/SIDA et d'offrir des services de soins de
santé de qualité répondant aux besoins des enfants et des
familles que le SIDA atteint.
A. La réforme du secteur de
santé
La réforme du secteur de santé doit viser
l'accès des services de santé pour les personnes touchées
par le VIH/SIDA. A cet égard, il faut rendre gratuits ou abordables les
soins de santé, les orienter vers les personnes les plus
vulnérables et lutter contre la discrimination dans les structures de
santé.
1. Rendre gratuits ou abordables les soins de
santé.
Il faut concevoir un système de soins médicaux
gratuits, clairement définis et accessibles pour tous les enfants
orphelins et vulnérables en particulier les enfants infectés par
le VIH/SIDA.
Pour y arriver, il est nécessaire de corriger
l'inadéquation qui existe aujourd'hui entre la politique sanitaire en
vigueur et l'assistance aux personnes sinistrées. En effet, l'autonomie
de gestion aux hôpitaux et aux centres de santé marginalise les
populations incapables de payer les soins et les cartes d'assurance maladie ne
sont plus facilement acceptées dans ce nouveau système plus
mercantiliste que social.69(*) Ainsi, l'accent doit être mis sur la
revalorisation et le développement du système de carte
d'assurance maladie et l'octroi de ces cartes à tous les orphelins et
aux familles qui les prennent en charge.
D'un autre côté, en dehors du secteur public, il
faudra obliger les intervenants privés dans le domaine des soins qui
reçoivent des subventions ou autres avantages de l'Etat, à
prendre en compte la qualité de l'orphelin ou d'enfant vulnérable
pour réduire le prix de leurs prestations. A cet effet il pourra
être demandé une attestation d'indigence octroyée par les
autorités pour éviter que cette mesure donne lieu à des
abus.
2. Mesures visant à rendre les soins de
santé plus proches des enfants touchés par le
VIH/SIDA.
La réforme du secteur de santé doit
également tenir compte du fait que dans la plupart des cas, des longues
distances séparent les structures de soins des patients. D'où la
nécessité pour l'Etat d'organiser régulièrement,
avec l'aide des autres intervenants et sur le modèle des campagnes de
vaccination, des séances de soins médicaux mobiles en faveur des
enfants séropositifs et autres enfants à santé fragile ou
enfants vulnérables dans leurs communautés. Cette approche a pour
avantage de rendre accessible les services de santé notamment aux
populations qui sont habituellement les plus défavorisées.
De plus, il faut voir dans la réforme du secteur de la
santé, l'opportunité de concevoir et de développer le
système d'hospitalisation de jour. Il est très adapté au
caractère épisodique du VIH/SIDA et est très peu exigeant
en termes de coût.
3. Mesures visant à combattre la discrimination
dans les structures de santé.
Cette réforme serait sans effet si elle ignorait les
obstacles à l'accès aux services de santé que
génère la discrimination. C'est ainsi que la réforme du
secteur de la santé doit prévoir des mesures qui interdisent
formellement la discrimination dans les structures de soins. Elles doivent
prévoir autant que faire se peut des sanctions claires et strictes pour
empêcher la discrimination envers ceux vivant avec le VIH/SIDA ou leurs
familles dans le secteur de santé.
En outre, il faut prévoir dans la nouvelle
législation sur la santé la subordination de l'autorisation de
pratiquer délivrée aux professionnels de santé à
l'élaboration et l'application par eux d'un code de conduite
fondé sur l'éthique et les droits de l'homme dans le contexte du
VIH/SIDA.
A côté de cette réforme du secteur de la
santé, la nécessité d'augmenter le budget consacré
à la santé se fait sentir.
B. Nécessité d'augmenter le budget
consacré à la santé
Cette proposition va dans le sens d'un engagement pris par le
Burundi lors de la Session Spéciale de la Conférence des Chefs
d'Etat de l'OUA réunie à Abuja au Nigeria en 2001.
En effet, au cours de ce sommet, le Burundi et les autres pays
africains se sont engagés à consacrer au moins 15% du budget
annuel du pays à l'amélioration du secteur de la santé
(Point 26).
Dans l'esprit de cette Conférence des Chefs d'Etat, les
sommes ainsi dégagées seront consacrées à la
construction des infrastructures de santé et à l'achat des ARV
pour les rendre accessibles à un prix abordable pour tous les malades
et gratuits (C'est nous qui soulignons), au moins à
tous les enfants malades et aux indigents car comme le dit si bien la
Déclaration d'engagement des Nations Unies sur le VIH/SIDA dont il sera
question plus loin, « les personnes vulnérables doivent avoir
priorité » ; or les enfants le sont doublement :
à cause de leur condition de mineur d'abord, ensuite lorsqu'ils sont
infectés ou orphelins ou encore lorsque les parents sont malades du
SIDA.
Mais notre pays n'a pas mis en oeuvre cet engagement comme on
le verra plus loin.
Néanmoins, tout compte fait, on ne peut
prétendre parler d'un droit à la santé dans le contexte du
VIH/SIDA sans parler, ne fut ce que brièvement du droit à la
confidentialité, ses nombreuses implications étant liées
à l'exercice d'un droit à la santé surtout dans le
contexte du VIH/SIDA.
§3. Le droit à la confidentialité
La règle de confidentialité trouve son fondement
dans la l'éthique médicale et dans la loi. Son essence est qu'un
personnel de la santé ne doit pas divulguer à une tierce personne
les informations qu'il a obtenues confidentiellement auprès d'un
patient70(*) sauf dans les
conditions déterminées par la loi (art.29 in fine,
Constitution de Transition).
Cependant, si elle est garantie par les traités
internationaux relatifs aux droits de l'homme et par la Constitution de
Transition, il ne semble pas qu'elle ait été prévue pour
les enfants d'autant plus que la CDE n'y fait pas allusion dans ses
dispositions.
En outre, relativement aux enfants, elle entraîne de
nombreuses interrogations d'ordre éthique et juridique dans la
pratique : qui souhaite savoir et pourquoi ? L'enfant a-t-il avantage
à subir un test et à savoir ? L'enfant peut-il donner un
consentement au test de dépistage ?...
D'une part, en théorie la stricte
confidentialité fait que seul le patient a le droit de connaître
son statut sérologique. Néanmoins d'aucuns soutiennent que
puisque les enfants sont présumés légalement n'avoir pas
le consentement, on peut alors révéler le statut
sérologique de l'enfant sans son consentement préalable à
ceux qui sont concerné en premier lieu par l'état de l'enfant et
qu'en matière de dépistage volontaire, c'est à son
représentant de prendre la décision pour lui. Ils recommandent
alors d'informer les parents ou le tuteur de l'enfant.
D'autre part, dans la pratique, en cas de
séropositivité chez l'enfant, il est nécessaire d'informer
les parents ou le tuteur et ce, pour une meilleure prise en charge de l'enfant.
Cependant, tout en tenant compte de la pertinence de ces
positions, nous sommes d'avis qu'en dehors de ces personnes, la règle de
la confidentialité doit être strictement respectée. Sa
violation doit entraîner une sanction disciplinaire ou une sanction
pénale conformément à l'article 177 du
CP.
Enfin, la règle de la confidentialité
relativement aux enfants touchés par la pandémie du SIDA, doit
être entendue sous un double point de vue : d'abord en ce qui
concerne l'enfant lui même ; ensuite en ce qui concerne les parents,
s'ils sont porteurs du VIH/SIDA.
Un enfant a le droit de réserver son consentement
à un test de dépistage du VIH/SIDA s'il a la capacité de
discernement et les résultats du test doivent être traités
en toute confidentialité.
S'il n'a pas de capacité de discernement, son parent ou
tuteur doit donner le consentement pour lui.
D'un autre côté, comme les droits de l'enfant
sont liés avec ceux de ses parents, et que la violation de la
règle de la confidentialité expose le parent à toute forme
de discrimination, de stigmatisation et de rejet social liés à
cette pandémie qui touchent également sa famille y compris les
enfants, les informations relatives au statut sérologique d'un parent
comme celui de l'enfant, doivent être inscrites dans les
définitions des données personnelles à protéger de
façon à interdire leur utilisation abusive71(*).
§4. Le droit à l'éducation
I. Principales dispositions relatives au droit
à l'éducation
Plusieurs instruments internationaux, nous l'avons
déjà souligné, consacrent le droit à
l'éducation. Deux d'entre eux semblent d'une grande importance pour la
protection du droit à l'éducation des enfants infectés ou
affectés par la pandémie du SIDA. Il s'agit de la CDE et
de la Convention concernant la lutte contre la discrimination dans le domaine
de l'enseignement (CLDDE), adoptée par la Conférence
générale de l'Organisation des Nations Unies pour
l'éducation, la science et la culture (UNESCO), le 14 décembre
1960 et entrée en vigueur le 22 mai 1962.
La CDE préconise en son article 28 la
réalisation progressive du droit à l'éducation sur la base
de l'égalité des chances.
A cet effet, les Etats Partie sont tenus de rendre
l'enseignement primaire obligatoire et gratuit pour tous (art.28,1.
a)), de rendre l'enseignement secondaire ouverte et accessible à
tout enfant en prenant des mesures appropriées telles que l'instauration
de la gratuité de l'enseignement et l'offre d'une aide financière
en cas de besoin (art.28,1. b). De plus, l'obligation est fait aux
Etats d'assurer à tous l'accès à l'enseignement
supérieur, en fonction des capacités de chacun.
Enfin, les Etats ont l'obligation de prendre des mesures pour
encourager la régularité de la fréquentation scolaire et
la réduction du taux d'abandon scolaire (art.28,1. b).
En ce qui concerne la Convention concernant la lutte contre la
discrimination dans le domaine de l'enseignement, elle interdit la
discrimination dans le domaine de l'éducation.
Son article 1 définit minutieusement la discrimination
dans ce domaine qui comprend « toute distinction, exclusion,
limitation ou préférence qui, fondée sur la race, la
couleur, (...), a pour objet de détruire ou d'altérer
l'égalité de traitement en matière de
l'enseignement ». Ensuite, il cite quatre types de comportements
qualifiés de discriminatoires parmi lesquels le fait : a)
d'écarter une personne ou un groupe de l'accès aux divers types
ou degrés d'enseignement ; b) de limiter à un niveau
inférieur l'éducation d'une personne ou d'un groupe et ...d) de
placer une personne ou un groupe dans une situation incompatible avec la
dignité de l'homme.
Ainsi, dans l'optique de la CLDDE, le fait de
limiter l'enseignement de l'orphelin au niveau primaire ou de ne pas inscrire
un enfant à l'école parce qu'il a le VIHSIDA constitue un acte
discriminatoire et illégal.
La définition de la discrimination que donne cette
convention ne mentionne pas le VIH/SIDA et n'utilise pas l'expression
« ou toute autre situation » habituellement
d'usage dans les autres instruments juridiques internationaux relatifs aux
droits de la personne et qui peut être interprétée comme
incluant l'état de santé, y compris le VIH/SIDA (voir la
Résolution 1996/44 de la Commission des droits de l'homme de Nations
Unies). Néanmoins, l'article 4, d) de cette convention cite le
« fait de placer une personne dans une situation incompatible avec la
dignité de l'homme » comme étant discriminatoire. Ce
point peut être entendu comme correspondant à la discrimination
des enfants affectés ou infectés par le VIH/SIDA dans la mesure
où cette discrimination les pousse dans une situation incompatible avec
la dignité humaine.
L'autre point fort à relever dans la dite convention en
ce qui concerne l'enseignement des enfants est le prescrit de l'article 4
de « rendre obligatoire et gratuit l'enseignement
primaire », de « généraliser et rendre
accessible à tous l'enseignement secondaire » et surtout
d' « assurer l'exécution par tous de l'obligation
scolaire prescrite par la loi » (c'est nous qui soulignons).
Cette dernière prescription est très importante
dans la protection du droit à l'éducation des orphelins et des
enfants autrement affectés par le VIH/SIDA dans la mesure où elle
permet à l'Etat de contrôler l'exécution par tous les
adultes plus particulièrement ceux qui ont accueilli des orphelins du
droit à l'éducation de ces derniers et de contraindre par la
force, le cas échéant, les adultes récalcitrants à
envoyer à l'école les enfants dont ils ont la charge alors qu'ils
en ont les moyens.
Le droit à l'éducation est également
consacré par notre Constitution de Transition. Deux de ses dispositions
sont relatives au droit à l'éducation. Il s'agit des articles 44
et 39.
L'article 44 est exclusivement
consacré au droit à l'éducation. En effet, il proclame le
droit de chaque citoyen à l'égal accès à
l'instruction, à l'éducation et à la culture, et le devoir
de l'Etat d'organiser l'enseignement public et d'en favoriser l'accès.
Quant à l'article 39 précité, il parle
implicitement entre autres d'un droit à l'éducation, car il
énonce le droit de tout enfant « à des mesures
particulières pour assurer ou améliorer les soins
nécessaires à son bien-être (...) ». Ces
« mesures particulières » font recours entre autres
à l'éducation dans la mesure où cette dernière est
l'un des éléments fondamentaux qui concourent au bien-être
de l'enfant.
De plus, le Décret-loi n°1/025 du 13 juillet
198972(*)
réorganise l'enseignement au Burundi de façon à l'adapter
aux exigences de la mise en oeuvre du droit à l'éducation et fait
obstacle à la discrimination dans le domaine de l'enseignement au
Burundi.
En effet, le dit Décret-loi dispose que les
institutions scolaires et parascolaires de l'enseignement public sont ouvertes
à tous aux mêmes conditions fixées par les pouvoirs publics
(art.6) et que les institutions scolaires privées formelles
doivent être ouverts à tous dans les conditions fixées par
le pouvoir organisateur et agréées par le Ministre de tutelle
(art. 10).
II. Problématique de la réalisation et
du contenu du droit à l'éducation appliqué au contexte du
VIH/SIDA.
Appliqué au contexte généré par la
pandémie du SIDA, la réalisation du droit à
l'éducation doit tenir compte des problèmes de deux ordres. D'une
part, les problèmes liés à pauvreté dans un pays,
l'un des plus pauvres au monde qui de surcroît, est accablé par
des maux sociaux comme la guerre et le SIDA. D'autre part, les problèmes
liés à la discrimination et à l'exclusion
qu'entraîne le VIH/SIDA dans la société.
Pour la première catégorie de problèmes,
il n'y a pas de solution immédiate. En effet, comme tous les droits
économiques, sociaux et culturels, le droit à l'éducation
n'est susceptible que de réalisation graduelle. Cependant, s'il s'agit
d'une privation ou d'une discrimination qui prive l'enfant d'école, elle
ne nécessite plus qu'une réponse graduelle, mais une
réponse immédiate73(*).
Ainsi que l'a observé la Commission pour les droits
économiques, sociaux et culturels, le droit à une
éducation libre de toute discrimination « n'est pas une
question de réalisation progressive ni de disponibilité de
ressources, il concerne tous les aspects de l'éducation et englobe
toutes les formes de discrimination ».74(*)
Sur base des dispositions des instruments juridiques
internationaux relatives au droit à l'éducation et de cette
position de l'organe de l'ONU chargé de veiller à l'application
des droits économiques, sociaux et culturels, nous pouvons dire que
l'Etat ne doit pas se cacher derrière le manque de ressources pour
refuser de lever les obstacles liés à la discrimination afin de
rendre possible la réalisation du droit à l'éducation.
Néanmoins, pour les problèmes liés au
manque des ressources, l'aide de la communauté internationale est
cruciale pour rendre effective la mise en oeuvre du droit à
l'éducation au Burundi comme d'ailleurs de tout autre droit de nature
socio-économique.
En effet, l'ensemble du système des droits de la
personne admet que la mise en oeuvre du droit à l'éducation exige
des ressources qui sont au dessus des moyens dont dispose un pays pauvre en
ressources. C'est pourquoi il impose aux Etats plus riches l'obligation de
s'engager dans l'aide et la coopération internationale75(*).
C'est le sens de l'article 2 du PIDESC qui stipule
que chacun des Etats Partie au Pacte s'engage à « agir tant
par son effort propre que par l'assistance et la coopération
internationales, notamment sur les plans économique et technique, au
maximum de ses ressources disponibles, en vue d'assurer progressivement le
plein exercice des droits reconnus dans le présent Pacte,
(...) »
Pour conclure, il faut noter que le droit à
l'éducation appliqué au contexte du VIH/SIDA, comporte trois
grands éléments que nous proposons aux acteurs dans la lutte
contre le SIDA et plus particulièrement aux pouvoirs publics :
1. Les enfants touchés par le VIH/SIDA ne doivent, en
aucun cas, être soumis à des restrictions en raison de leur
infection, réelle ou supposée. Ils ne doivent pas non plus faire
l'objet de mesures discriminatoires entravant leur accès à
l'éducation ;
2. Les enfants comme les adultes ont le droit de recevoir une
éducation en matière de VIH/SIDA portant notamment sur la
prévention et les soins.
3. On peut utiliser l'éducation pour promouvoir la
compréhension, le respect, la tolérance et la non discrimination
à l'égard des personnes vivant avec le VIH/SIDA et plus
particulièrement les enfants infectés ou affectés par le
VIH/SIDA.76(*)
Néanmoins, pour réaliser le droit à
l'éducation des enfants dans le contexte du VIH/SIDA, une série
de mesures s'imposent.
III. Propositions pour une meilleure
réalisation du droit à l'éducation des enfants
touchés par le VIH/SIDA.
Il est nécessaire de réformer le système
scolaire afin que l'éducation à des attitudes non
discriminatoires concernant le VIH/SIDA soit intégrée dans les
programmes scolaires. C'est la première des mesures à prendre et
qui ne demande pas beaucoup de moyens à l'Etat pour son application. En
effet, il faut que les jeunes et les enfants, adultes de demain, apprennent
à ne pas stigmatiser ou discriminer. Ils doivent également
être informés de leurs droits et bien comprendre le respect du
droit des autres.
D'un autre côté, la réforme du
système de l'enseignement doit tenir compte des problèmes
liés à la pauvreté ainsi que ceux liés au VIH/SIDA
comme la discrimination et l'abandon ou l'interruption de l'enseignement par
les enfants à la mort de leurs parents. A cet effet, il faut rendre
effectif l'engagement pris par le Burundi de rendre « l'enseignement
primaire obligatoire et accessible gratuitement à tous »
conformément à l'article 13 du PIDESC et à
l'article 28, CDE.
Cependant, la gratuité de l'enseignement secondaire
risque de déborder les moyens dont dispose le système
éducatif d'un pays pauvre en ressources comme le Burundi. C'est
pourquoi, nous proposons la création d'un fonds de soutien à la
scolarité des orphelins et des enfants vulnérables dont les
ressources proviendront de la solidarité nationale qui sera
proclamée en faveur des enfants victimes du SIDA sur base de
l'article 60 in fine de la Constitution
plus haut cité.
Rappelons que cet article dispose que l'Etat peut proclamer la
solidarité nationale devant les charges qui résultent des
calamités naturelles et nationales. Cet article a été
d'ailleurs appliqué en partie en ce qui concerne l'enseignement puisque
depuis l'année scolaire 2001-2002, l'Etat a décidé de
rendre l'enseignement primaire et secondaire gratuits pour les enfants
indigents.
Cependant, l'efficacité de cette meure est
entravée par le fait que c'est aux collectivités que revient la
charge de payer les frais scolaires des enfants indigents concernés par
cette mesure. Or, cette charge est au-dessus des moyens dont disposent la
plupart des collectivités. De plus, très souvent, on refuse de
qualifier les enfants touchés par le VIH/SIDA d'indigents, ce qui les
prive des avantages que cette mesure procure.
Pour le rendre efficace, les gestionnaires de ce fonds devront
travailler en toute transparence et en collaboration avec les comités
locaux de protection des orphelins et des enfants en détresse qui feront
le travail d'identification. Pour cela, il doit être
décentralisé sur tout le territoire et comprendre une
représentation du comité de protection des orphelins et des
enfants en détresse.
Enfin, la réforme du système éducatif
doit tenir compte du problème des enfants qui ont interrompu leur
scolarité par manque de moyens ou pour soigner leurs parents malades ou
prendre en charge leurs petits frères et soeurs et organiser pour ceux
qui peuvent encore intégrer l'école des écoles de
rattrapage aux programmes raccourcis, quitte à réintégrer
l'enseignement formel en 7ème année. Ce
système, s'il a l'inconvénient de dispenser un enseignement de
moindre qualité, a néanmoins l'avantage non négligeable de
compléter le système classique qui ne prévoit aucune
opportunité pour cette catégorie d'enfants. De plus, il ressemble
assez au système des collèges communaux très courant dans
le pays.
Pour les enfants qui ont abandonné l'école mais
qui sont trop âgés pour reprendre les études classiques, il
faut prévoir pour eux un enseignement dispensant une formation
professionnelle accessible à tous les enfants orphelins ou
affectés autrement par le VIH/SIDA. Après la formation, il faut
songer à les organiser en groupements de production avec l'octroi des
crédits afin qu'ils puissent arriver à leur auto-prise en
charge.
§5. Le droit au logement et à l'alimentation
pour les orphelins et les autres enfants vulnérables.
I. Le droit au logement et le droit à
l'alimentation dans la législation burundaise.
Les droits au logement et l'alimentation sont les composantes
du droit à un niveau de vie suffisant énoncé par le
PIDESC et spécifiquement aux enfants, par la CDE. Il
faut rappeler que ces deux instruments internationaux font partie
intégrante de notre Constitution de Transition77(*).
La CDE engage tous les Etats parties à assurer
« dans toute la mesure du possible la survie et le
développement normal de l'enfant » (art.6, al.2). Or
la survie et le développement normal supposent avant tout une
alimentation équilibrée et un logement décent. De plus,
cette Convention proclame en son article 27 al.1 « le droit de tout
enfant à un niveau de vie suffisant pour permettre son
développement physique, mental, spirituel, morale et social »
et met à la charge de l'Etat de prendre des mesures appropriées,
compte tenu de ses moyens, « pour aider les parents et autres
personnes ayant la charge de l'enfant à mettre en oeuvre ce
droit » ainsi que de donner, en cas de besoin, « des
moyens, une assistance matérielle et des programmes d'appui en ce qui
concerne l'alimentation, le vêtement et le logement »
(art.27, al3).
Quant au PIDESC, il reconnaît en son article
11,1 « le droit de toute personne à un niveau de vie suffisant
pour elle même et sa famille, y compris une nourriture, un vêtement
et un logement suffisants, ainsi qu'une amélioration constante de ses
conditions d'existence.». Il ajoute que le droit d'être à
l'abri de la faim est un « droit fondamental » (article
11, 2.). Ainsi, les Etats Parties ont l'obligation de prendre des mesures
appropriées pour la réalisation de ce droit. A cet effet,
« l'importance d'une coopération internationale librement
consentie » est primordiale.
Pour ce qui est de notre législation interne, il n'est
nulle part fait explicitement mention d'un droit au logement et d'un droit
à l'alimentation. Cette lacune est préjudiciable aux milliers
d'enfants sans logements décents et nourriture suffisante.
Néanmoins, certaines dispositions de la Constitution et plus
particulièrement l'article 39 précité peuvent s'appliquer
à ces deux droits fondamentaux.
II. La problématique de la mise en oeuvre du
droit au logement et à l'alimentation.
Dans une situation normale, la réalisation de ces
droits incombe en premier lieu aux parents. Mais dans le cas du VIH/SIDA,
beaucoup d'enfants deviennent orphelins. Cependant, même ceux qui ont
encore des parents, ces derniers, souvent diminués physiquement par la
maladie, ne peuvent plus subvenir aux besoins de leur famille. Aussi,
même pour les enfants qui ne sont pas frappés par la
pandémie du SIDA, la réalisation de ces deux droits fondamentaux
semble relever d'un futur lointain ; la situation d'extrême
pauvreté dans laquelle vit la plupart des familles burundaises en est la
cause principale.
En ce qui concerne les traités internationaux qui
énoncent ces droits, ils semblent avoir abouti à ce même
constat dans la mesure où ils préconisent la réalisation
progressive de ces droits et soulignent avec insistance la
nécessité de la coopération internationale dans ce
domaine.
Le pays devant faire face à des urgences
occasionnées par la situation de guerre et limité par le manque
de moyens, préfère s'en remettre aux ONGs. Celles-ci font ce
qu'elles peuvent, souvent de façon désordonnée parce
qu'il n'y a pas de politique claire du gouvernement en la matière. Le
nombre d'enfants dans la rue ne cesse de croître tandis qu'à
l'intérieur, de plus en plus d'enfants vivent dans des abris
précaires et n'arrivent plus à manger à leur faim.
Néanmoins, ce constat amer ne doit pas nous
empêcher de formuler quelques propositions allant dans le sens de
l'amélioration de cette situation.
III. Propositions pour une meilleure
réalisation du droit au logement et à l'alimentation pour les
orphelins et les enfants vulnérables.
L'Etat devrait élaborer une politique claire et
précise qui devra se concrétiser par la mise en place d'un fonds
de soutien aux orphelins et aux enfants vulnérables dont le but est
notamment de promouvoir l'amélioration de leur habitant.
D'un autre côté, les pouvoirs publics devraient
entreprendre des actions visant à redynamiser le système
traditionnel de solidarité qui se traduisait par l'organisation des
travaux communautaires de soutien aux orphelins et aux veuves. A cet
égard, l'Etat devrait instituer au moins une fois le mois une
journée nationale de solidarité avec les malades du SIDA ou les
malades démunis et leurs familles qui se traduira par l'organisation des
travaux communautaires en leur faveur. Pour ce faire, le Gouvernement doit
donner des instructions claires aux responsables locaux au niveau provincial et
communal de prévoir ce genre d'activités
régulièrement en dehors de la journée nationale ainsi
proposée.
Ce genre d'activités, en plus de leur utilité
pratique, ont le mérite de mobiliser la population en faveur des
personnes vulnérables et de faire du même coup front contre la
discrimination et le rejet des personnes touchées par la pandémie
du SIDA, ce qui aura pour effet de créer un environnement favorable et
habilitant non seulement aux orphelins mais à toutes les personnes
touchées par le VIH/SIDA.
En ce qui concerne ses rapports avec la communauté
internationale et les ONGs étrangères, l'Etat devrait orienter
l'aide internationale prioritairement vers l'assistance aux orphelins et aux
autres personnes vulnérables. Il doit en outre obliger les ONGs qui
interviennent dans l'assistance humanitaire à inclure dans leurs
activités un volet qui concerne l'assistance aux orphelins et autres
enfants vulnérables notamment en ce qui concerne l'alimentation et le
logement.
CHAPITRE III : LES REALISATIONS DANS LE DOMAINE DE
LA LUTTE
CONTRE LE SIDA ET DE LA PRISE EN CHARGE DE SES
VICTIMES.
Il faut souligner le fait que les autorités du pays
avaient pendant longtemps préféré ignorer la
réalité de la pandémie du SIDA. Cette inaction du pouvoir
n'a fait que renforcer la stigmatisation et la discrimination à
l'égard des personnes touchées par le VIH/SIDA et leurs familles
car cela les faisaient passer comme anormaux et marginaux. A notre avis, cette
attitude des autorités a empêché le pays d'apprécier
de manière réaliste sa vulnérabilité face au SIDA
et de prendre des mesures efficaces dans le sens d'une lutte efficace contre
cette épidémie.
Ce n'est que vers la fin des années quatre-vingt
qu'elles ont commencé à réagir pour faire face à
cette terrible maladie. C'est ainsi qu'a été mise en place un
Programme National de lutte contre le SIDA (PNLS) en 198778(*) et qu'en 1999, le
Président de la République a déclaré le VIH/SIDA
comme une priorité. Depuis, d'importants progrès ont
été réalisés dans le domaine de la
prévention du VIH/SIDA et de la réduction de son impact
négatif sur les personnes touchées et sur leurs familles en
particulier les enfants infectés ou rendus orphelins par ce
fléau.
Les efforts du Gouvernement dans ce domaine se sont traduits,
au début, par la mise en place des plans nationaux de lutte contre le
SIDA. Plus tard, des institutions chargées de la lutte contre le SIDA
ont été mises en place et un Plan d'action national de lutte
contre le SIDA élaboré.
SECTION I. LES PLANS NATIONAUX DE LUTTE CONTRE LE
SIDA.
Quatre objectifs ont été poursuivis
successivement ou concomitamment à travers différents plans
nationaux de lutte contre le SIDA. Il s'agit de la recherche de données
épidémiologiques pour guider les axes d'intervention, de la mise
en place des programmes de prévention de la transmission du VIH, du
développement de la prise en charge clinique et psychosociale des
patients infectés et surtout de la réduction de l'impact de
l'infection par le VIH/SIDA sur les individus, les familles et les
communautés. Seuls les deux derniers nous intéressent dans notre
travail.
§1. La prise en charge clinique et psychosociale des
patients infectés
Le développement de la prise en charge clinique et
psychosociale des patients infectés concerne la prise en charge des
infections opportunistes, la malnutrition, le traitement anti-rétroviral
et la prise en charge psychosociale.79(*)La prise en charge clinique a été
intégrée dans les stratégies du PNLS depuis seulement
1997. Depuis, 88 centres de dépistage ont été
créés dans le pays. 80(*)
Toutefois, la prise en charge contre les infections
opportunistes reste encore quasi inexistante à l'exception de la
tuberculose. La lutte contre cette dernière est organisée par le
Programme National de lutte contre la tuberculose. Les patients tuberculeux,
qui deviennent de plus en plus nombreux à cause du VIH/SIDA, sont pris
en charge gratuitement.81(*)
Cependant, cette prise en charge rencontre des obstacles
liés au faible niveau d'équipement sanitaire du pays, au faible
niveau de formation du personnel soignant dans la prise en charge diagnostique
et thérapeutique des infections opportunistes et le manque de
médicaments.
Quant aux médicaments anti-rétroviraux (ARV),
leurs coûts étaient excessivement élevés. Mais
depuis 2000, une politique des ARV a été initiée visant
à les rendre plus accessibles. Pour ce faire, trois mesures ont
été prises : la mise en place d'un fonds de
solidarité thérapeutique avec une dotation annuelle du
gouvernement de cent millions de Fbu, la détaxation des produits
pharmaceutiques dès janvier 2000 et les négociations avec les
firmes pharmaceutiques dans le but de réduire les coûts. C'est
ainsi que le Burundi a réussi à ramener le prix de ces
médicaments de 1000 dollars US à 300 dollars US dès
200182(*) et à
moins de 100 dollars US en 200383(*).
Cependant, l'accès aux ARV reste réservé
à un nombreux réduit de patients au Burundi. Environ 3210
personnes seulement sur les quelques 25 000 personnes vivant avec le VIH/SIDA
ayant besoin des ARV au Burundi y ont accès.84(*) Les raisons en sont que, outre
que leurs coûts sont très élevés, les traitements
par ARV nécessitent un suivi clinique et biologique très exigeant
et peu de médecins sont formés aujourd'hui pour en assurer le
suivi.
Pour arriver à prendre en charge le plus de victimes de
cette pandémie, d'autres approches ont été conçues.
Il s'agit principalement du système d'hospitalisation de jour et des
soins à domicile.
L'hospitalisation de jour a été envisagée
afin de compléter les structures de soins existants et pour
réduire les coûts par rapport à des hospitalisations
classiques. Cependant, aucune structure de ce type n'est encore
opérationnelle, mais une initiative dans ce sens a été
prise par les associations ANSS et SWAA/Burundi à Bujumbura.
Quant au système de soins à domicile, ils se
sont révélés comme une réponse efficace au
caractère chronique et invalidant du SIDA et à la
difficulté pour le malade de devoir parcourir de longues distances pour
aller vers les structures de soins alors qu'il est parfois très
fatigué et a besoin de soins quotidiens ne nécessitant pas
forcément une hospitalisation.
Actuellement, les soins à domicile sont
organisés dans certaines provinces du pays grâce à
l'implication des ONG et des personnes vivant avec le VIH/SIDA.
§2. La réduction de l'impact social du VIH/SIDA
sur les individus, les
familles et la communauté.
Sur ce point, il s'observe peu de percées
significatives. Tout d'abord dans le domaine de l'amélioration de
l'environnement juridique favorable aux personnes touchées par le
VIH/SIDA par le respect de leurs droits, deux études ont
été menées respectivement en 1993 et 1996. Elles ont
abouti à une proposition de textes de loi qui doit assurer un meilleur
environnement juridique aux personnes vivant avec le VIH/SIDA. Le projet a
été transmis au Gouvernement depuis octobre 200385(*).
Ensuite, en ce qui concerne la prise en charge des orphelins
dus à cette maladie, avant la mise en place du CNLS, rien n'avait
été prévu pour eux au niveau de l'Etat. Ce sont les
associations de la société civile qui oeuvraient dans ce domaine.
Toutefois, les moyens de ces associations étant trop limités par
rapport à l'ampleur du nombre sans cesse croissant d'orphelins, seul un
petit nombre d'entre- eux, soit 11 500 sur les 240 000 estimés
à travers tout le pays en 2001, était pris en charge.86(*)
SECTION II. LA MISE EN PLACE DES INSTITUTIONS CHARGEES
DE
LA LUTTE CONTRE LE SIDA ET L'ELABORATION D'UN
PLAN D'ACTION NATIONAL DE LUTTE CONTRE
LE SIDA.
§1. La mise en place des institutions chargées
de la lutte contre le
SIDA.
Il s'agit du Ministère à la Présidence
chargé de la lutte contre le VIH/SIDA et du Conseil National de Lutte
contre le SIDA.
I. Ministère à la Présidence
chargé de la lutte contre le VIH/SIDA
L'art.1 du Décret n°100/002 du 14 janvier
2001 organise un Ministère à la Présidence chargé
de lutter contre le SIDA. La mission du dit ministère est entre autres
de concevoir et exécuter la politique nationale ayant pour objectif de
réduire la propagation de l'épidémie du VIH/SIDA et son
impact socio-économique sur l'individu, la famille et la
communauté ainsi que de renforcer les capacités nationales pour
faire face à cette épidémie (al.1) et de susciter
et d'encourager la conception et la mise en oeuvre des actions de
prévention et de prise en charge des personnes vivant avec le VIH/SIDA
(al.2). De plus, il est également chargé de superviser
le Plan National de Lutte contre le SIDA suivant les orientations du CNLS
(al.6).
Comme on vient de le voir, réduire l'impact du
VIH/SIDA sur l'individu, la famille et la communauté ainsi que prendre
en charge les personnes vivant avec le VIH/SIDA, figurent en première
position parmi les objectifs qui ont été assignés au
Ministère à la Présidence chargé de lutter contre
le SIDA. Enfin, le fait est que la création du dit Ministère
témoigne de l'engagement des politiques au plus haut niveau à
lutter contre cette terrible maladie.
Pour réaliser ses missions, ce ministère dispose
d'un Cabinet et des organes de gestion autonome.
II. Le Conseil National de Lutte contre le SIDA
(CNLS)
Le CNLS a vu le jour par le Décret n°100/077 du 18
juillet 200187(*) portant
création et fonctionnement du Conseil National de lutte contre le SIDA.
Au départ, il y avait depuis 1987, un Programme National de Lutte contre
le SIDA et les maladies sexuellement transmissibles (PNLS/MST) dépendant
du Ministère de la Santé publique. C'est pour lutter efficacement
contre le SIDA qu'a été mise en place une institution autonome et
décentralisée chargée des questions relatives à la
pandémie du SIDA et placé sous le haut patronage du
Président de la République.
Le CNLS est organisé sur le modèle d'une
institution autonome et décentralisée. En effet cet organe est
composé de l'Assemblée Générale (AG/CNLS), du
Bureau de Coordination (BC/CNLS), du Comité Exécutif Permanent
(CEP/CNLS) et d'un Secrétariat Exécutif Permanent (SEP/CNLS). De
plus les hauts dignitaires de la République à commencer par le
Président et le Vice-Président font partie de ses structures et
toutes les composantes de la société civile sont
représentées au sein du CNLS.
Le CNLS une fois créé, a mis sur pied un Plan
d'action National de lutte contre le VIH/SIDA sur une période allant de
2002 à 2006.
§2. Le Plan d'action National de lutte contre le SIDA
2002-2006.
Pour répondre avec efficacité à la
nécessité de contenir la propagation du VIH/SIDA et
atténuer ses effets négatifs, le Plan d'action National de Lutte
contre le SIDA a été conçu en une stratégie
multisectorielle de lutte contre le SIDA destiné à être
dans ses deux premières années un plan d'urgence au même
titre que la reconstruction. Par ailleurs, des liens entre la propagation du
VIH/SIDA et la pauvreté étant établis88(*), il s'est avéré
nécessaire de le pérenniser à long terme au sein d'un Plan
National contre la pauvreté.
Le Plan d'action National de Lutte contre le SIDA s'accompagne
de 16 programmes d'action couvrant la prévention, la prise en charge et
la réduction de l'impact de l'épidémie ainsi que le
renforcement des capacités humaines et institutionnelles pour la
formulation et le suivi du plan d'action.
Parmi les 16 programmes d'action, trois
seulement nous intéressent au premier chef dans notre travail. Il s'agit
d'abord de la prise en charge des orphelins du SIDA (P11), ensuite de
l'amélioration de l'accès aux anti-rétroviraux contre le
VIH/SIDA (P9) et enfin, de la promotion et la protection des droits des
personnes vivant avec le VIH/SIDA et des groupes vulnérables (P10).
I. La prise en charge des orphelins du
SIDA
Pour la prise en charge des orphelins du SIDA, l'objectif
principal du Plan d'action National de Lutte contre le SIDA est
d'alléger le poids de l'impact social du VIH/SIDA sur les familles et la
communauté par la prise en charge des orphelins du SIDA. Pour ce faire,
il compte procéder d'abord par l'identification des orphelins ainsi que
de leurs besoins, ensuite par le renforcement des capacités des familles
d'accueil et des orphelins chefs de ménage et enfin par la mobilisation
de la communauté pour la prise en charge des orphelins89(*).
Toujours en ce qui concerne la prise en charge des orphelins
du SIDA, le CNLS a conçu en juillet 2002 un Programme multisectoriel de
lutte contre le VIH/SIDA (PMLS) qui comprend cinq composantes parmi lesquelles
l'appui à l'intégration et à l'éducation des
orphelins90(*). L'objectif
à court terme du PMLS est le renforcement des familles et de la
communauté afin qu'elles puissent protéger les orphelins et
favoriser leur intégration sociale. Quant au long terme, il est
question d'investir dans l'éducation de base, l'intégration
sociale et la nutrition des orphelins les plus vulnérables afin qu'ils
puissent atteindre le même niveau que les autres enfants de la
communauté.
La stratégie du PMLS en ce qui concerne les orphelins
place la famille au premier plan.
En effet l'approche privilégiée est la
réinsertion des orphelins dans leur famille restreinte ou
élargie, ou dans le cas où cela n'est pas possible, dans la
communauté plutôt que dans les institutions telles que les
orphelinats. Dans le cas où le chef de famille est un orphelin, l'aide
à apporter sera de nature économique et il est question de
trouver une famille voisine pouvant jouer le rôle de tutrice.
En ce qui concerne l'éducation de base, il est
prévu de payer les frais de scolarité pour les orphelins les plus
vulnérables qui sont en âge de faire les études primaires.
Pour les autres enfants de la famille d'accueil, on envisage de les aider avec
le produit des activités génératrices de revenus au profit
des familles d'accueil, ceci pour éviter les conflits et les jalousies
entre les enfants.
Enfin, concernant la formation professionnelle, elle est
prévue surtout pour les enfants qui ont interrompu leur scolarité
et pour lesquels il n'est plus question de reprendre les études
classiques. A la fin de la formation, ceux qui l'auront suivi seront
encouragés à s'organiser en coopératives de production
afin de se procurer des revenus et d'avoir un moyen de subsistance durable.
Il convient de noter que le PMLS en ce qui concerne les
orphelins, si ambitieux et si pratique qu'il apparaisse au premier abord,
contient quelques imperfections.
En effet, d'une part, il limite la définition
d'orphelin à l'âge de 16 ans au lieu de se conformer à la
définition internationale de l'enfant telle que contenue dans l'article
1 de la CDE ce qui risque de créer une situation de
discrimination à l'encontre des autres enfants sans parents mais qui ont
entre 16 et 18 ans. En effet, un enfant de 16 ans ne diffère
fondamentalement en rien de l'enfant de 10 ans dans la mesure où l'on
constate que des orphelins âgés de plus de 16 ans sont encore au
niveau primaire sur le plan scolaire, et sont considérés comme
des mineurs par leur entourage.91(*)
D'autre part, en s'occupant uniquement des orphelins du SIDA,
le PMLS laisse de côté les autres enfants autrement
affectés par le VIH/SIDA comme les enfants des parents malades du SIDA
alors que ceux-ci sont tout autant vulnérables que les orphelins.
Enfin, en ne prévoyant la prise en charge que pour
l'enseignement primaire et la formation professionnelle, le PMLS limite
l'opportunité offerte à l'orphelin en matière
d'enseignement. De plus, cette approche peut être ressentie comme
discriminatoire à l'encontre des orphelins qui ont eu la chance de
parvenir à l'enseignement secondaire parce que rien n'est prévu
dans le programme multisectoriel de lutte contre le SIDA en ce qui concerne
leur intégration et leur éducation.
II. La promotion des liens santé/droits de
l'homme/protection des droits des personnes vivant avec le VIH/SIDA et autres
groupes vulnérables.
La promotion des liens entre santé et droits de l'homme
ainsi que la protection des droits des personnes vivant avec le VIH/SIDA et les
autres groupes vulnérables sont essentielles à la protection des
droits des enfants touchés par cette pandémie, et cela à
un double point de vue.
D'une part, les enfants sont classés dans la
catégorie de « personnes vulnérables » au
VIH/SIDA92(*)dans la
mesure où ce dernier entraîne entre autres conséquences la
destruction de la cellule familiale et l'augmentation du nombre d'orphelins.
D'autre part, la possibilité d'être infecté mise de
côté, les enfants subissent le poids du VIH/SIDA lorsque les
parents en sont infectés.
Ainsi, il s'avère nécessaire de protéger
et les droits des enfants infectés par le VIH et les droits des parents
vivant avec cette maladie si l'on veut protéger efficacement les droits
des enfants dans le contexte du VIH/SIDA.
Le programme 10 du Plan d'action National de Lutte contre le
SIDA a pour objectif de protéger efficacement la société
contre la propagation du VIH/SIDA tout en réduisant la
vulnérabilité de ceux qui sont atteints et des autres membres des
groupes vulnérables, à travers la réalisation universelle
des droits de la personne humaine et des libertés
fondamentales.93(*)
Pour ce faire, il compte promouvoir, parmi d'autres
stratégies, la promulgation des textes de lois et la
réglementation des mesures appropriées. De plus, il compte
également promouvoir la mise en place d'un observatoire permettant de
veiller à ce que les personnes vivant avec le VIH/SIDA et les autres
groupes vulnérables puissent jouir pleinement de leurs droits et
libertés fondamentaux notamment l'accès à
l'éducation, à l'héritage, aux soins de santé,
etc., et à la protection juridique tout en respectant leur
confidentialité.94(*)
Néanmoins, force est de constater que dans ce domaine,
il n'y a pas eu de percée significative, si ce n'est le projet de loi
portant protection juridique des personnes vivant avec le VIH/SIDA qui, comme
déjà indiqué, traîne au Gouvernement depuis octobre
2003.
III. L'amélioration de l'accès aux
anti-rétroviraux contre le VIH/SIDA (ARV)
L'objectif du Plan d'action National de Lutte contre le SIDA
pour ce qui est relatif à l'accès aux anti-rétroviraux
contre le VIH/SIDA, est d'arriver, d'ici 2006, à faire
bénéficier d'un traitement anti-rétroviral et d'un suivi
médical adéquat à 30 000 personnes vivant avec le
VIH/SIDA95(*). Pour y
arriver, il compte sur la participation de la communauté internationale
et sur la solidarité nationale.
Il faut noter que, comme on le verra plus loin, l'objectif du
Plan d'action national de lutte contre le SIDA en ce qui concerne
l'accès aux ARV a été revu à la baisse.
En effet, il est prévu d'arriver à faire
bénéficier à 25 000 personnes vivant avec le VIH/SIDA le
traitement anti SIDA, en 2006, au lieu de 30 000 personnes initialement
prévues.
Mais avant de parler de l'évolution récente en
matière d'accès aux ARV au Burundi qui a abouti à
l'élaboration d'une stratégie nationale de prise en charge
globale des personnes vivant avec le VIH/SIDA, il faut d'abord parler de la
situation qui prévalait dans ce domaine il y a quelques mois.
1. Avant la mise en place de la stratégie
nationale de prise en charge globale des personnes vivant avec le
VIH/SIDA.
Avant avril 2004, date de l'exécution de la dite
stratégie, l'approvisionnement en médicaments ARV était
assuré grâce aux ressources du Fonds National de solidarité
thérapeutique et du Fonds mondial de lutte contre le SIDA, la
Tuberculose et le paludisme ce qui a considérablement contribué
à réduire leur prix.
Les médicaments ARV était achetés par le
malade moyennant une ordonnance contresignée par le médecin
membre du comité de contrôle des prescriptions à raison
d'une cure par mois96(*).
Cela faisait que peu de personnes pouvaient avoir accès à ces
médicaments vu leur inaccessibilité financière et
géographique due notamment à leur prix qui était au-dessus
des moyens dont dispose un patient.
En effet, d'une part, les prix d'une trithérapie sont
encore élevés au Burundi pour la plupart des personnes vivant
avec le VIH/SIDA qui ont besoin des médicaments ARV (ils variaient entre
30 000 et 100 000Fbu/mois en mai 200497(*)).
D'autre part le fait que seul le médecin membre du
Comité de contrôle des prescriptions pouvait valider l'ordonnance
et que la cure donnée ne pouvait aller au-delà d'un mois rendait
réellement ce médicament inaccessible pour les patients vivant en
dehors des centres urbains.
Au niveau de la société civile, des
communautés se sont organisées pour prendre en charge leurs
malades par le biais des contributions des familles, des voisins, etc. pour
procurer un médicament à un membre de la famille ou de la
communauté, malade du SIDA. Ces interventions avaient une portée
limitée vu les moyens modestes des initiateurs. A un niveau beaucoup
plus large, des travailleurs soutenus par leurs employeurs ont constitué
des caisses de solidarité en faveur de leurs collègues porteurs
du VIH/SIDA afin que ces dernières puissent accéder aux ARV. Ces
initiatives se rencontrent dans quelques entreprises et institutions comme la
BRARUDI, la BRB, l'INSS, pour ne citer que celles-ci.
La stratégie nationale de prise en charge globale des
personnes vivant avec le VIH/SIDA est venue renforcée ces acquis en
matière de l'accès aux ARV.
2. La stratégie nationale de prise en charge
globale des PVVS
En février 2004, le CNLS, en collaboration avec le
Ministère de la Santé publique, a élaboré une
Stratégie nationale de prise en charge globale des personnes vivant avec
le VIH/SIDA. Cette stratégie fonctionnera avec des ressources provenant
du Fonds mondial pour la lutte contre le SIDA, la tuberculose et la malaria, de
l'Etat à travers le Fonds National de Solidarité
thérapeutique et des caisses de solidarités du secteur
privé.
Le contenu de la dite stratégie englobe la prise en
charge psychosociale dès le dépistage volontaire de la maladie,
le traitement précoce des infections opportunistes et enfin le
traitement aux ARV dès que le malade en a besoin.
Quant à son objectif en ce qui concerne l'accès
aux ARV, il s'agit d'offrir un traitement pour 25 000 malades du SIDA qui
en ont besoin mais de façon progressive.
Pour y parvenir, il a été retenu que le
traitement sera subventionné pour tous afin de garantir un accès
équitable et la pérennité pour les
bénéficiaires, en partant des systèmes de subvention
existants parmi les différentes catégories
socio-professionnelles98(*).
En effet, il est judicieux de recourir aux mécanismes
de financement qui n'imposent pas une charge supplémentaire si l'on veut
rendre accessibles les ARV aux pauvres.
Ainsi, il est prévu que la subvention du traitement se
fera de la manière suivante.
1) Pour les affiliés de la Mutuelle de la Fonction
publique, cette dernière participe pour une partie du coût et les
caisses de solidarité (là où elles existent) ou l'Etat
pour le reste du coût.
2) Pour les employés des entreprises privées et
parapubliques, la subvention se fera soit sur le modèle de la BRARUDI
(100% par l'employeur), soit sur celui de l'INSS (subvention partagée
entre la caisse de solidarité et la participation de l'employeur).
3) En ce qui concerne les employés des petites et
moyennes entreprises, il faut distinguer selon la situation où les
caisses de solidarité existe de celle où elles n'existent pas.
- Dans le premier cas, la subvention se fera sur le
modèle de la BRARUDI ou de celui de l'INSS
- En cas d'absence des caisses de solidarité, l'Etat et
les partenaires interviendront pour 95% et l'employeur paiera 5% du coût.
Signalons ici qu'on ne précise de quels partenaires il s'agit.
4) Enfin, pour ce qui est de la structure non formel et les
indigents, l'Etat subventionnera le traitement à 100% du
coût99(*).
Mais pour réaliser ses ambitions, la stratégie
nationale de prise en charge globale des personnes vivant avec le VIH/SIDA
envisage la réalisation de son objectif par étapes100(*).
Ainsi dans la 1ère étape, elle
envisage d'approvisionner en ARV 8 sites de traitement qui sont le Centre
Hôspitalo Universitaire de Kamenge, l'Hôpital Prince Régent
Charles, l'Hôpital militaire de Kamenge, les hôpitaux de
l'intérieur comme l'hôpital de Gitega, ceux de Bururi et de Ngozi
ainsi que l'ANSS et la SWAA/Burundi, 2 associations impliquées dans la
prise en charge médicale des personnes vivant avec le VIH/SIDA.
Durant la même étape qui correspond à
l'année 2004, seuls 5000 parmi les 25 000 personnes vivant avec le
VIH/SIDA ayant besoin des médicaments ARV seront prises en charge.
Durant la 2ème étape,
l'hôpital de Muramvya et la Clinique Prince Louis RWAGASORE seront
ajoutés à la liste des 8 sites de traitement que compte la
1ère étape de la Stratégie. De plus, chaque
structure provinciale sera équipée de laboratoire et la prise en
charge de personnes vivant avec le VIH/SIDA ayant besoin de médicaments
ARV passera de 5000 à 12 500 personnes.
Enfin, la 3ème étape de la
stratégie aura pour public cible 25 000 personnes vivant avec le
VIH/SIDA. En outre, le suivi immunologique et virologique sera assuré au
niveau de chaque province au lieu des seuls Institut National de Santé
publique et Centre Hôspitalo Universitaire de Kamenge où il est
actuellement disponible.
Quant aux besoins financiers nécessaires pour mener
à bien cette stratégie, ils sont estimés respectivement
à un milliard huit cent millions de Francs burundais
(1 800 000 000 Fbu) pour la 1ère année,
quatre milliard cinq cent million de Francs burundais
(4 500 000 000 Fbu) la 2ème année et
neuf milliard de Francs burundais (9 000 000 000 Fbu) pour la
3ème année101(*).
Cependant, de légitimes questions peuvent être
posées quant à l'efficacité de la stratégie
nationale de prise en charge globale des personnes vivant avec le VIH/SIDA au
Burundi. En effet, comment seront choisis les 5000 premiers
bénéficiaires de la stratégie parmi les 25 000
personnes vivant avec le VIH/SIDA qui ont besoin de médicaments ARV au
Burundi ? Est ce qu'une personne qui a désespérément
besoin de ces médicaments pour se maintenir en vie peut attendre une
année voire même deux avant d'arriver sur la liste des
bénéficiaires de la stratégie ?
D'un autre côté, le chiffre de 25 000
personnes vivant avec le VIH/SIDA ayant besoin des ARV n'est pas
statique ; en 2006, date de l'expiration de cette stratégie, elles
se seront sûrement démultipliées. Alors l'autre question
que l'on peut se poser est celle de savoir ce que prévoit la dite
stratégie en ce qui concerne les personnes vivant avec le VIH/SIDA ayant
besoin des médicaments ARV qui se seront ajoutées au nombre de
25 000 personnes ayant actuellement besoin de ces médicaments.
C'est pourquoi encore une fois, l'implication de la
communauté internationale dans la lutte contre le SIDA et la prise en
charge de ses victimes s'avère primordiale.
SECTION III. LES EFFORTS REALISES AU NIVEAU
INTERNATIONAL
EN MATIERE DES DROITS DES PERSONNES EN
GENERAL ET DES DROITS DE L'ENFANT EN PARTICULIER DANS LE CONTEXTE DU
VIH/SIDA.
§1. L'évolution de l'engagement de la
communauté internationale dans la lutte contre le SIDA.
La communauté internationale s'est engagée
très tôt dans la lutte contre le SIDA et la réduction de
l'impact de cette épidémie sur les personnes en
générale et les enfants en particulier.
Cet engagement s'est traduit entre autres par la
création au sein des Nations Unies d'un Programme commun chargé
des questions relatives aux VIH/SIDA (ONUSIDA).
Au fur et à mesure de l'évolution de cette
pandémie, la communauté internationale, au premier chef les
Nations Unies, a pris conscience que l'épidémie du SIDA avait
dépassé les seuls problèmes de santé publique pour
devenir un problème social aux multiples facettes. Elle a alors abouti
à la conclusion qu'il faut aborder le VIH/SIDA sous l'angle des droits
humains.
En effet, dans la lutte contre le SIDA, la protection des
droits humains est nécessaire tant pour protéger les droits et la
dignité des personnes touchées par cette pandémie que pour
atteindre les buts de la santé publique qui sont la réduction de
la vulnérabilité à l'infection à VIH,
l'atténuation des conséquences néfastes du VIH/SIDA sur
les personnes touchées et l'octroi aux individus et aux
communauté des moyens pour y faire face102(*). C'est dans ce contexte que
le Haut Commissariat des Nations Unies pour les droits de l'homme a
élaboré, en collaboration avec l'ONUSIDA, des Directives
internationales sur le VIH/SIDA et les droits de l'homme. L'objectif de ces
dernières est d'aider les Etats à élaborer pour la lutte
contre le SIDA une politique fondée sur les droits de l'homme qui
contribue effectivement à réduire les cas de transmission et les
incidences du VIH, dans le respect des droits de l'homme103(*).
Durant la 2ème décennie de la
pandémie, avec l'apparition des médicaments pouvant faire cesser
toute activité du VIH dans le corps humain (médicaments ARV), une
nécessité s'est faite sentir de mettre un accent particulier sur
le droit à la santé afin de faire bénéficier ces
médicaments aux vastes populations qui vivent avec le VIH/SIDA plus
particulièrement dans les pays pauvres en ressources.
Cette nécessité a fait évoluer le droit
international au regard du droit à la santé. Ainsi, il est admis
aujourd'hui que la prévention et le traitement doivent être
intégrés dans une approche globale d'une action efficace contre
le VIH/SIDA104(*).
C'est dans ce sens que la Commission des droits de l'homme a
adopté des résolutions confirmant que l'accès aux
médicaments contre le SIDA était un élément
fondamental du droit de toute personne de jouir du meilleur état de
santé physique et mentale susceptible d'être atteint105(*). De plus, le Comité
des droits économiques, sociaux et culturels qui surveille le respect
par les Etats du PIDESC a clairement affirmé dans son
Observation Générale 14 sur le droit à la
santé106(*) que
ce droit comprenait entre autres choses l'accès à un traitement
du VIH et à une éducation en la matière.
Cette prise de position des organes des Nations Unies
chargés des droits de l'homme s'inscrit en faux contre les arguments de
ceux qui soutiennent que pour les pays pauvres en ressources, il faut
privilégier les programmes de prévention plus que le financement
des médicaments ARV. Pour eux, un pays en voie de développement
ne peut pas se permettre de « commencer avec des médicaments
plus chers pour ses maladies les plus complexes »107(*). Ce faisant, ils
considèrent que la prévention est en compétition avec le
traitement et que, dans les pays pauvres, la prévention prime sur
l'accès aux médicaments anti SIDA.
Les défenseurs de cette approche semblent avoir
oublié le fait que la prévention du VIH/SIDA et les traitements
ont un but commun qui est d'arriver à un niveau de santé le plus
élevé pour les personnes vivant avec le VIH/SIDA et les
communautés affectées108(*).
Cette préoccupation d'arriver à atteindre un
niveau de santé le plus élevé pour les personnes vivant
avec le VIH/SIDA a fait l'objet des nombreuses rencontres internationales de
haut niveau sur le VIH/SIDA et les droits de l'homme qui ont abouti à
d'importants documents de référence dans le domaine de la lutte
contre le SIDA et la prise en charge de ses victimes. Il s'agit de la
Déclaration et le cadre d'action d'Abuja sur le VIH, la tuberculose et
les autres maladies infectieuses connexes d'une part et de la
Déclaration d'engagement des Nations Unies sur le VIH/SIDA, d'autre
part.
§2. Les principales déclarations
adoptées sur le VIH/SIDA et les droits de l'homme.
Avant d'analyser le contenu de ces déclarations, il
convient de se fixer sur leur nature juridique dans le droit international afin
d'appréhender leur portée.
I. La nature juridique d'une Déclaration dans
le système du droit international.
Les Déclarations font partie de ce que l'on appelle
dans le droit international, « instruments juridiques
internationaux ». Ce terme désigne toutes sources obligatoires
et non obligatoires du droit international.109(*) Contrairement aux traités, conventions et
pactes qui ont force de loi et obligent les Etats les ayant signés puis
ratifiés de les faire respecter110(*), les Déclarations, au même titre que
les résolutions, les recommandations, n'ont pas force de loi.
Néanmoins, bien qu'elles ne soient pas légalement contraignantes,
dans certains cas, certaines de leurs dispositions peuvent être
considérées comme faisant partie du corps croissant du droit
coutumier international. Elles deviennent alors une règle
coutumière et les Etats doivent s'y conformer.111(*)
Cette précision faite, nous allons passer en revu les
éléments importants des ces deux déclarations qui peuvent
concerner la protection des enfants infectés ou affectés par le
VIH/SIDA.
II. La Déclaration et le cadre d'action d'Abuja
sur le VIH/SIDA, la tuberculose et les autres maladies infectieuses
connexes.
Il s'agit des engagements pris par les Chefs d'Etats africains
lors du sommet de l'Organisation de l'Unité Africaine avec l'OMS sur
VIH/SIDA, la Tuberculose et les autres maladies infectieuses connexes le 27
avril 2001.
Lors de ce sommet, les chefs d'Etat et de gouvernement
africains reconnaissent la nécessité de déployer des
efforts « pour protéger les enfants africains contre ces
pandémies et leurs conséquences... » (Point7). Au point
12, ils admettent que « la stigmatisation, le silence, le rejet et la
discrimination vis-à-vis des personnes vivant avec le VIH/SIDA
accroissent l'impact de l'épidémie » et constituent un
obstacle à une riposte efficace.
De plus, le SIDA y est considéré comme un
« état d'exception » nécessitant la
levée de toutes les contraintes tarifaires, économiques et les
conditionnalités à l'accès au financement dans le cadre de
lutte contre cette pandémie (Point 22).
C'est ainsi que l'engagement est pris de fixer au moins 15% du
budget annuel de chaque Etat à allouer à l'amélioration du
secteur de santé et à dégager les ressources
nécessaires pour une réponse multisectorielle globale pour la
lutte contre le SIDA (point 26).
Enfin, les chefs d'Etat et de Gouvernements présents
conviennent de « promulguer et d'appliquer les législations
appropriées et d'utiliser les règlements commerciaux
internationaux » afin d'accélérer l'accès aux
médicaments ARV à des prix abordables. A cet égard,
« des mesures immédiates comme les exonérations
fiscales et autres incitations seront prises en vue de la réduction des
prix de ces médicaments et les autres fournitures dans les services de
santé ».
Même si elle n'est qu'une déclaration
d'intention, cette Déclaration exprime un engagement fort de la part des
plus hautes autorités du continent à lutter contre le VIH/SIDA.
De plus, elle a joué un rôle précurseur dans l'engagement
mondial dans la lutte contre cette pandémie.
En effet, la déclaration d'engagement des Nations
Unies sur le VIH/SIDA rappelle et réaffirme les engagements contenus
dans la Déclaration et le cadre d'action d'Abuja sur le VIH/SIDA, la
tuberculose et les autres maladies infectieuses connexes. En outre, cette
dernière a joué un rôle déterminant dans le
mouvement mondial pour l'accès aux ARV. C'est ainsi que tenant compte de
l'engagement contenu à son point 26 « d'utiliser les
règlements commerciaux internationaux » afin
d'accélérer l'accès aux médicaments ARV à
des prix abordables, la délégation africaine à la
4ème Conférence ministérielle de l'Organisation
mondiale du commerce de Doha a été à l'origine de la
Déclaration sur l'Accord sur les ADPIC et la santé
publique112(*).
L'accord sur les ADPIC énonce des normes
minimales pour un régime de protection de la propriété
intellectuelle, notamment des brevets sur les produits et
procédés pharmaceutiques113(*). Cet Accord est considéré par la
plupart des pays en développement comme un obstacle pour eux
d'accéder aux ARV pour leurs populations malades. Ils demandaient alors
à ce qu'il soit revu. D'où la Déclaration sur les
ADPIC et la Santé publique de Doha dans laquelle il est
affirmé que l'entente de l'OMC en matière de brevets,
« n'empêche pas et ne devrait pas empêcher les Membres
[de l'OMC] de prendre des mesures pour protéger la santé
publique » ; et « que l'Accord sur les ADPIC
peut et devrait être interprété et mis en oeuvre d'une
manière qui appuie le droit des membres de l'OMC de protéger la
santé publique, et en particulier, de promouvoir l'accès de tous
aux médicaments».114(*)
En ce qui concerne le Burundi, certains des engagements
contenus dans cette déclaration ont été
réalisés comme la détaxation de tous les produits
pharmaceutiques depuis 1999. Toutefois, beaucoup d'autres n'ont pas encore
été traduits dans la réalité notamment l'engagement
pris de consacrer 15% du budget annuel national à allouer à
l'amélioration du secteur de santé. Et cela n'est pas pour
demain.
A titre indicatif pour étayer notre affirmation,
prenons le budget qui a été alloué au Ministère de
la Santé Publique au cours des deux dernières années.
Ainsi, pour l'exercice 2002, les crédits
accordés au dit Ministère s'élèvent à trois
milliards six cent quatre-vingt huit millions trois cent dix mille trois cent
quatre-vingt dix Francs burundais (3 688 310 398 Fbu) sur un
budget total de cent soixante neuf milliards cinq cent trente huit millions
quatre-vingt quatre mille deux cent deux Francs burundais
(169 538 084 202 Fbu)115(*), soit 2,175% du budget ordinaire de l'Etat
prévu pour cet exercice.
Quant à l'année 2003, le budget alloué
à au Ministère susmentionné est de trois milliards huit
cent trente six millions cent quatre-vingt cinq mille cinquante sept Francs
burundais (3 836 185 057 Fbu) sur un total de cent septante neuf
milliards quatorze millions quatre cent onze mille trois cent quatre-vingt-onze
Francs burundais (179 014 411 391 Fbu)116(*), soit 2,142% du budget de
l'Etat pour l'année 2003.
On voit alors que même si l'on ajoute les
100 000 000 de Francs burundais de dotation annuelle du Gouvernement
au Fonds National de Solidarité Thérapeutique, on est loin des 15
% du budget de l'Etat que le Gouvernement du Burundi s'est engagé
à réserver à l'amélioration du secteur de
santé.
Ainsi, les engagements pris par nos chefs d'Etat et de
Gouvernement lors de ce sommet risquent de devenir lettre morte surtout
lorsqu'on sait qu'aucun mécanisme de supervision de l'exécution
des engagements pris n'a été prévu.
III. La déclaration d'engagement des Nations
Unies sur le VIH/SIDA.
Déclaration d'engagement adoptée lors de la
26ème Session extraordinaire de l'Assemblée
Générale des Nations Unies le 27 juin 2001 appelle à
l'élargissement de l'action contre le VIH/SIDA pour l'adapter à
un cadre fondé sur les droits de l'homme117(*). En effet, elle aborde le
VIH/SIDA de manière spécifique à titre de
préoccupation mondiale et urgente et établit des buts
rattachés à des dates, ce qui permet d'en mesurer le respect par
les gouvernements.118(*)
1. Le contenu
Intitulée « A crise mondiale, action
mondiale », la Déclaration d'engagement souligne que le
VIH/SIDA est considérée en Afrique comme créant
un « état d'exception qui menace le développement,
la cohésion sociale, (...) », et que « la situation
dramatique du continent exige que des mesures exceptionnelles soient prises au
niveau national, régional et international ». Elle
précise que les plans nationaux doivent combattre « l'opprobre
et la dénégation » et mettre fin à
« la discrimination et à l'exclusion ». Elle fixe
une date limite (2003) pour l'élaboration de ces plans, ainsi que des
objectifs à long terme pour la mise en place d'autres
éléments des plans nationaux de lutte, tels que la prise en
charge des orphelins, etc.
Spécifiquement aux enfants touchés par cette
pandémie, elle consacre une section aux enfants rendus orphelins et
vulnérables par le VIH/SIDA où elle affirme qu'ils ont besoin
d'une assistance spéciale. De plus, plusieurs autres points qui peuvent
concerner la protection des droits de l'enfant dans le contexte du VIH/SIDA
sont développés dans cette déclaration.
Toujours en ce qui concerne les enfants rendus orphelins ou
autrement affectés par le VIH/SIDA, la Déclaration d'engagement,
en son point 65, prévoit d'élaborer, jusqu'en 2003, et de mettre
en oeuvre, jusqu'en 2005, des politiques et stratégies visant à
rendre les gouvernements, les familles et les communautés capables
d'assurer un environnement favorable aux orphelins et aux enfants
infectés ou affectés par le VIH/SIDA, « ...en veillant
à ce qu'ils soient scolarisés et aient accès à un
logement, à une bonne nutrition et à des services sanitaires et
sociaux sur un pied d'égalité avec les autres enfants ;
à offrir aux orphelins et aux enfants vulnérables une protection
contre toutes formes de mauvais traitements, de violence, d'exploitation, de
discrimination, de trafic et de perte d'héritage ».
De même, elle garantit la non-discrimination et la
jouissance de tous les droits fondamentaux à tous les enfants rendus
orphelins et vulnérables par le VIH/SIDA (Point 66) et exhorte
« les pays donateurs, les acteurs de la vie civile et le secteur
privé » à compléter les gouvernements à
appuyer « les programmes en faveur des enfants rendus orphelins et
vulnérables par le VIH/SIDA ...» et « à
fournir une assistance spéciale à l'Afrique subsaharienne».
(Point 67).
En outre, elle se donne jusqu'à 2005 pour arriver
à assurer un environnement favorable aux orphelins du SIDA ou aux
enfants autrement affectés par cette maladie. Pour ce faire, elle compte
promouvoir une série de droits fondamentaux parmi lesquels le droit
à l'éducation, le droit à l'accès au logement, le
droit à l'accès à une bonne nutrition, le droit à
la santé, etc. ainsi qu'une protection contre toutes formes de mauvais
traitements, de violence, d'exploitation, de discrimination..., et de perte
d'héritage, en un mot tous ces droits dont la non réalisation
pousse les enfants à la vulnérabilité au VIH/SIDA.
Enfin, d'autres points de la Déclaration ont
également leur importance dans la protection des droits des enfants
infectés ou affectés par le VIH/SIDA. Il s'agit principalement
des points 53, 55, 56, 58,63 et 90.
Le point 53 a trait à l'éducation et à
l'information en rapport avec le VIH/SIDA et à l'accès aux
services nécessaires pour acquérir les aptitudes requises pour
réduire leur vulnérabilité à l'infection par le
VIH/SIDA.
Les points 55 et 56 concernent le droit à la
santé et à l'accès aux ARV. L'objectif de la
Déclaration est de mettre sur pied avant la fin de l'année 2003,
en collaboration avec la communauté internationale, des
stratégies nationales visant à renforcer les soins de
santé, à rendre possible l'accès aux ARV et d'une
manière prioritaire, à assurer « progressivement d'une
manière durable le niveau de traitement du VIH/SIDA le plus
élevé possible ». Jusqu'en 2005, il est question
notamment de « renforcer les soins de santé aux niveaux
familial et communautaire, (...) afin de soigner les séropositifs et les
sidéens et de les suivre, en particulier les enfants
infectés et de soutenir les personnes, les ménages et
les communautés affectés par le VIH/SIDA » (c'est nous
qui soulignons !).
Le point 58 quant à lui a trait aux droits de l'homme
dans le contexte du VIH/SIDA. L'objectif est de « promulguer,
renforcer et appliquer, avant la fin de l'année 2003, des lois et
règlements » nécessaires à l'élimination
de « toute forme de discrimination contre les séropositifs et
les sidéens et les membres des groupes vulnérables, et de veiller
à ce qu'ils jouissent pleinement de tous leurs droits et libertés
fondamentaux ». On revient alors sur la nécessité de
mettre en oeuvre leur droit à l'éducation, à
l'héritage, à la santé et à la protection juridique
pour ne citer que ceux-là, dans le respect de l'intimité et de la
confidentialité ; et « de lutter contre la stigmatisation
et l'exclusion sociale liées au VIH/SIDA ».
Le point 63 fait partie de la section qui concerne la
protection des groupes vulnérable. Il revient encore une fois sur
l'importance du droit à l'éducation des garçons et des
filles dans la réduction de la vulnérabilité au VIH/SIDA.
Pour ce faire, il préconise des programmes scolaires relatifs au
VIH/SIDA et d'assurer l'accès des enfants à l'enseignement
primaire et secondaire qui comporte des cours pour VIH/SIDA à
l'intention d'adolescents, etc., l'échéance étant
fixée à l'année 2003.
Au point 90, est prévu la création, à
titre prioritaire, d'un fonds mondial pour la lutte contre le VIH/SIDA et pour
la santé destiné, d'une part, « à financer une
action urgente et de grande envergure visant à combattre
l'épidémie» et, d'autre part, à aider les
gouvernements dans leurs efforts de lutter contre le VIH/SIDA, la
priorité étant accordée au pays les plus touchés
(le Burundi figure parmi ces pays).
Enfin, il a été convenu d'inscrire la question
du VIH/SIDA et les problèmes de santé publique à l'ordre
du jour des réunions régionales organisées au niveau des
ministres et des chefs d'Etat et de gouvernement (point 97) et de consacrer au
moins une journée entière pendant la session annuelle de
l'Assemblée générale des Nations Unies à l'examen
d'un rapport sur les progrès réalisés dans la mise en
oeuvre des engagements énoncés dans la présente
Déclaration (point 100) afin d'en assurer le suivi.
2. La mise en oeuvre de la déclaration
d'engagement des Nations Unies sur le VIH/SIDA au Burundi.
Le Burundi a déjà commencé à
mettre en oeuvre certains des engagements issus de cette Déclaration.
C'est ainsi- il faut le rappeler- qu'a été créé en
2001 un organe suprême de la coordination des activités de lutte
contre le SIDA au Burundi, le Conseil National de lutte contre le SIDA (CNLS).
De plus, il faut signaler l'élaboration d'un Plan d'action National de
lutte contre le SIDA 2002-2006 qui comprend 16 programmes d'action, parmi
lesquels la prise en charge des orphelins du SIDA et la mise en oeuvre, depuis
2004, d'une stratégie nationale de prise en charge globale des personnes
vivant avec le VIH/SIDA. Ces différentes réalisations ont
été rendues possibles notamment grâce aux ressources venant
de la communauté internationale comme le Fonds mondial de lutte contre
le SIDA, la malaria et la tuberculose dont la création figurait parmi
les recommandations issues de la Déclaration et qui est
déjà opérationnel depuis janvier 2002.
Néanmoins, beaucoup de points de la Déclaration
d'engagement des Nations Unies sur le VIH/SIDA n'ont pas encore
été réalisés au Burundi.
En effet, jusqu'à l'heure actuelle, il n'y a au Burundi
aucun texte juridique qui protège les droits des enfants affectés
ou infectés par le VIH/SIDA contre la discrimination et les autres
violations de droits liés au VIH/SIDA. Pourtant, notre pays
s'était engagé au cours de cette déclaration à
promulguer, renforcer ou appliquer des lois et règlements en ce sens et
ce, avant l'année 2003.
De plus la grande majorité des orphelins du SIDA et
des enfants autrement affectés par cette pandémie, plus
particulièrement les enfants qui en sont infectés, n'est pas
prise en charge. Enfin, malgré les efforts consentis par les
différents acteurs, l'accès aux médicaments anti- SIDA
demeure encore lointain pour les enfants infectés comme d'ailleurs pour
les autres personnes vivant avec le VIH/SIDA. En effet, seulement 1% des
malades du SIDA qui devraient être mis sous traitement aux ARV, le sont
effectivement119(*).
CHAPITRE IV. RECOMMANDATIONS POUR UNE MEILLEURE
PROTECTION JURIDIQUE DES ENFANTS INFECTES OU
AFFECTES PAR LE VIH/SIDA.
SECTION I. L'ELABORATION D'UNE LEGISLATION PROTEGEANT
LES DROITS DES PERSONNES VIVANT AVEC LE VIH/SIDA ET DE LEURS
FAMILLES.
La nécessité d'adopter une loi ayant pour but de
protéger les droits des personnes vivant avec le VIH/SIDA et leurs
familles mais non de protéger les droits des seuls enfants se fait
sentir avec acuité. En effet, à notre avis, il n'est pas bien
indiqué de prévoir une loi ayant pour but de protéger les
seuls droits des enfants dans le contexte du VIH/SIDA. Ceci pour deux
raisons.
La première est qu'une telle loi aurait des
résultats opposés au but visé, qui est orienté dans
trois directions à savoir la protection des droits des enfants
touchés par cette épidémie, la réduction de son
impact négatif sur leur vie et la promotion d'un environnement juridique
et social habilitant pour eux. Ainsi, cette loi pourrait avoir au contraire
l'effet d'isoler et de marginaliser davantage les enfants touchés par
cette pandémie dans la mesure où ils seront
considérés comme une catégorie à part des autres
victimes de cette terrible maladie.
La deuxième raison qui milite en faveur d'une
protection légale de toute personne vivant avec le VIH/SIDA est que,
comme déjà souligné, les droits des enfants sont
inextricablement liés avec ceux des adultes. C'est ainsi que la
violation des droits d'un parent qui vit avec la maladie du SIDA a des
conséquences directes sur ses enfants. Ainsi pour protéger
efficacement les droits d'un enfant touché par le VIH/SIDA, il faut
également protéger les droits de ses parents.
Toutes ces raisons nous amènent à formuler des
recommandations allant dans le sens d'élaborer une législation
portant protection des droits des personnes vivant avec le VIH/SIDA.
Cependant, cette législation doit comprendre une partie
qui traite des droits des enfants affectés ou infectés par
VIH/SIDA eu égard à leur vulnérabilité et au fait
qu'ils ont des droits qui leur sont spécifiques.
De même, le SIDA étant une maladie ayant des
conséquences socio- économiques et juridiques aux multiples
facettes, cette législation doit aborder toutes les situations possibles
dans lesquelles cette pandémie contraint à vivre ses victimes.
D'un autre côté, pour ce qui concerne les enfants, elle doit viser
toutes les catégories d'enfants qui en sont victimes tout en mettant un
accent particulier sur leurs droits les plus violés et les plus
fondamentaux en relation avec cette pandémie.
SECTION II. DE LA NECESSITE DE PRENDRE EN COMPTE LES
CATEGORIES D'ENFANTS TOUCHES PAR LE VIH/SIDA DANS LA PROTECTION DE LEURS
DROITS.
Trois catégories des enfants sont
particulièrement touchées par les conséquences du VIH/SIDA
sur les individus et sur les familles. Il s'agit des enfants infectés
par le VIH, les enfants des parents malades et enfin, des orphelins du SIDA.
La violation des droits liée au VIH/SIDA touche les
enfants à des degré divers selon ces catégories. Ainsi la
protection des droits de ces enfants doit tenir compte des besoins
spécifiques pour chaque catégorie d'enfants visés et
porter une attention particulière à la protection des droits les
plus pertinents pour cette catégorie tout en ne perdant pas de vue les
autres droits des enfants les plus communément violés dans le
contexte du SIDA.
Néanmoins, la protection contre la discrimination doit
être au premier plan dans chaque cas, dans la mesure où celle-ci
constitue la violation des droits la plus commune à ces trois
catégories et qu'en outre la discrimination est- directement ou
indirectement- à l'origine de la violation des autres droits.
§1. De la protection de l'enfant vivant avec le
VIH/SIDA
La protection des droits des enfants infectés par le
VIH/SIDA doit être orientée en premier lieu vers la
réalisation du droit à la santé tel qu'il est
proclamé par le PIDESC et la CDE ainsi que la
protection contre la discrimination.
En effet, les enfants infectés par le virus du SIDA
ont une santé fragile ce qui fait qu'ils ont le plus besoin des soins
médicaux et d'un traitement appropriés. Or, dans la plupart des
cas, ces enfants n'ont pas accès aux structures de soins et aux
médicaments anti-SIDA, à cause notamment du manque des moyens
mais également de la discrimination liée au VIH/SIDA qui
sévit dans le secteur de la santé. De plus, souvent, leurs
parents ont eux aussi la maladie du SIDA ce qui fait que, souvent, ils ne sont
plus en mesure de leur procurer des soins nécessaires.
Cette situation nous amène à formuler des
recommandations aux pouvoirs publics et aux autres intervenants en
matière de prise en charge des victimes du SIDA allant dans le sens de
mettre un accent particulier sur la protection du droit à la
santé de ces enfants mais également de leurs parents.
Néanmoins, comme la réalisation de ce droit
surtout dans le contexte du SIDA exige la mise en oeuvre de moyens importants
qui ne sont pas toujours à la disposition d'un pays pauvre comme le
Burundi, nous recommandons de procéder progressivement à la mise
en place d'un système permettant l'accès aux services de soins et
de traitement du SIDA pour toutes les personnes vivant avec le VIH/SIDA tout en
commençant d'abord par les enfants. En effet, les enfants étant
parmi les plus vulnérables des personnes touchées par le
VIH/SIDA, ils doivent recevoir une priorité.
De même, il faut tenir compte du fait que les personnes
vivant avec le VIH/SIDA risquent d'être confrontées
régulièrement et de manière constante, à une
dégradation de leur santé. Ainsi, il faut organiser un
système de soins qui vont vers les patients au lieu du schéma
classique du patient vers soins de santé.
A cet effet, nous recommandons d'organiser et de
développer le système des soins de santé à domicile
et un système de soins médicaux mobiles en faveur des enfants
séropositifs et autres enfants à santé fragile dans leurs
communautés.
Cependant, pour organiser un système de soins
accessibles à toutes les populations touchées par le VIH/SIDA,
plus particulièrement les enfants qui en sont infectés, une
série de mesures s'imposent.
C'est ainsi qu'il faut concevoir et développer des
mécanismes de sécurité sociale adaptée à la
situation de dénuement dans laquelle se trouvent les victimes du
SIDA.
Pour ce faire, il convient de développer le
système de caisses de solidarité qui a été mis en
place dans certaines entreprises et sociétés privées ou
parapubliques, comme la BRARUDI, l'INSS, la BRB, etc. qui ont
déjà donné lieu à des résultats concrets.
Dans le milieu rural, il faudra revaloriser le système
des cartes d'assurance maladie afin de permettre à tous les malades du
système informel d'avoir accès aux soins de santé à
moindre coût.
Enfin, il faut encourager des conventions passées entre
les pouvoirs publics ou les autres intervenants en matière des soins,
d'une part et les structures de soins d'autre part et ayant pour objet d'amener
ces dernières à donner des soins gratuits ou au moindre
coût aux personnes vulnérables, plus particulièrement les
enfants ayant le VIH ; en contrepartie des subventions et subsides leurs
versées par les premiers.
Concernant l'accès aux ARV, nos recommandations
à l'Etat vont dans le sens de profiter des développements
internationaux récents en faveur de l'accès à ces
médicaments comme les arrangements issus de la Déclaration de
Doha sur les ADPICs et la Santé publique et de s'approvisionner
à des marchés les moins chers par le système
d'importations parallèles et l'achat des médicaments
génériques.
En outre, il faut augmenter les dotations aux Fonds National
de Solidarité thérapeutique et amener la Mutuelle de la Fonction
publique à inscrire les ARV sur la liste des médicaments qu'elle
subventionne.
D'un autre côté, il est nécessaire de
protéger le droit à la confidentialité et de prendre des
mesures visant à combattre la discrimination dans le milieu des soins.
Dans ce sens, il est recommandé de faire usage le cas
échéant du droit administratif et même du droit
pénal afin de sanctionner les comportements contraires à la
déontologie médicale et qui, souvent, mènent à des
actes discriminatoires.
§2. La protection de l'enfant des parents vivant avec
le VIH/SIDA.
Pour cette catégorie d'enfants, il faut mettre en
avant la protection contre la discrimination dont leurs parents sont souvent
victimes, et qui les touche par ricochet. Il est également
nécessaire- et cela concerne toutes les catégories d'enfants
touchés par cette pandémie- de prendre en compte la situation
d'extrême pauvreté dans laquelle vivent les familles
affectées par le SIDA. Ainsi, il s'avère nécessaire de
protéger plus particulièrement le travail des personnes vivant
avec le VIH/SIDA. Enfin, comme la spoliation des biens des orphelins commence
souvent bien avant la mort de leurs parents, il s'avère
nécessaire de prendre des mesures visant à protéger les
biens des enfants des parents malades du SIDA.
I. De la protection du travail des personnes
touchées par le VIH/SIDA.
D'une manière générale,
l'épidémie du VIH/SIDA enlève aux parents leur
capacité de travailler et de gagner un salaire, ce qui conduit à
des situations de misère dans les familles. De plus, cette
pandémie est à l'origine de la plupart des discriminations sur
les lieux de travail. C'est pourquoi il s'avère nécessaire, si
l'on veut protéger efficacement les droits des enfants touchés
par cette pandémie, de songer également à protéger
le travail des parents vivant avec le VIH/SIDA.
A cet égard, nous recommandons au Gouvernement
d'adapter la législation du travail à la politique du BIT en
rapport avec les conséquences du VIH/SIDA sur le milieu du travail, plus
particulièrement de se conformer aux Directives du BIT sur le VIH/SIDA
et le monde travail120(*). Cette recommandation se fonde sur l'article 12 du
Code du Travail qui prévoit qu'en sa qualité de membre de l'OIT,
le Burundi « mettra progressivement sa législation en
conformité avec les normes de cette organisation ». Le
même article souligne la prédominance des conventions
ratifiées par l'OIT sur une disposition légale nationale de
contenu différent.
Pour ce faire, l'Etat devrait adopter une politique claire et
précise en rapport avec les questions du VIH/SIDA liées au
travail. Cette politique doit interdire, avec des sanctions à l'appui,
la discrimination sur les lieux du travail et encourager autant que faire se
peut les personnes vivant avec le VIH/SIDA ou souffrant d'une maladie
liée au VIH/SIDA à travailler aussi longtemps que leur
état de santé les y autorisera121(*).
Pour cela, il est nécessaire d'amener les employeurs et
les représentants des travailleurs à adopter des
« aménagements raisonnables » à l'intention
des travailleurs souffrant d'une maladie liée au VIH/SIDA comme le
recommandent les Directives du BIT ci-haut mentionnées122(*). Ces aménagements
pourraient comprendre entre autres le réaménagement du temps de
travail, les absences autorisées en cas de rendez-vous médical,
des congés de maladie souples, le travail à temps partiel, des
possibilités pour les travailleurs susmentionnés de retrouver
leur emploi, etc.
Concernant la sécurité sociale enfin, il est
recommandé aux Etats membres de l'OIT de revoir leurs systèmes de
sécurité sociale afin de les adapter à la nature
progressive et intermittente du VIH/SIDA123(*).
Dans tous les cas, l'infection par le VIH/SIDA ne doit pas
être un motif de licenciement. Lorsqu'une personne touchée par le
VIH/SIDA est trop souffrante pour continuer à travailler, et que les
autres possibilités, y compris le congé de longue durée,
ont été épuisées, alors doivent s'appliquer les
dispositions relatives à l'invalidité.
II. De la nécessité de protéger
les biens des enfants touchés par le VIH/SIDA.
Il arrive souvent que les voisins ou relations d'affaires du
parent malade profitent de sa mauvaise santé pour s'accaparer de ses
biens. Or, nous l'avons déjà indiqué, notre système
judiciaire avec ses procédures longues et complexes n'est pas
adapté aux plaignants diminués par la maladie du SIDA. De plus,
il existe une corruption notoire au sein de l'administration locale et des
notables qui exigent des pots de vin124(*)ou de la bière avant de trancher
(« inzoga y'abagabo) alors que la maladie du SIDA a contraint le
plaignant à une situation de dénuement.
C'est pourquoi, nous avons suggéré
d'étendre la protection de l'orphelin ou l'enfant vulnérable dans
ses biens à la communauté et d'impliquer davantage les pouvoirs
publics par le biais du Département de la Protection Sociale qui sera
étendu sur tout le territoire, jusqu'aux communes. Pour ce faire, il
convient de prendre des mesures encourageant les responsables de la
communauté (les chefs de collines, les bashingantahe et les membres du
comité de protection des orphelins et des enfants en détresse)
à protéger les droits des orphelins, des enfants
vulnérables et plus généralement des personnes
vulnérables comme les malades du SIDA ainsi que les veuves.
D'un autre côté, nous avons suggéré
et suggérons encore de réformer le système judiciaire afin
de l'adapter à la situation des plaignants malades et des plaignants
mineurs. A cet égard, nous avons recommandé de prévoir
exceptionnellement pour les cas du plaignant en situation de maladie
avancée des procédures rapides et simples et la
possibilité pour les organismes d'intérêt public d'agir
pour le compte de l'enfant ou des personnes trop malades pour le faire comme le
recommande les Directives internationales relatives aux VIH/SIDA et les droits
de l'homme125(*).
Néanmoins, la question devient délicate pour les
parents malades du SIDA, qui le plus souvent ayant perdu la capacité de
travailler, sont contraints de vendre leurs biens, souvent à vil pris
alors qu'ils ont encore des enfants en bas âge. C'est pourquoi il est
d'une grande importance de responsabiliser les familles et les
communautés dans la prise en charge des personnes touchées par le
VIH/SIDA et la protection de leurs biens.
Enfin, dans le but de prévenir la spoliation des biens
des enfants à la mort du dernier parent, le Département de la
Protection Sociale en collaboration avec les autres intervenants dans ce
domaine devra mettre sur pied une structure chargée d'inventorier et
d'enregistrer les biens des orphelins et travaillant en collaboration avec les
conseils de famille et/ou les comités locaux de protection des orphelins
et des enfants en détresse. En outre, il faut vulgariser des campagnes
d'aide et de sensibilisation des parents sur la nécessité de
faire enregistrer leurs biens et de rédiger des testaments.
§3. De la protection de l'orphelin du SIDA.
Pour cette catégorie d'enfants, il faut mettre en
avant les protections de remplacement instituées par le CPF et les
adapter afin de faire face adéquatement au débordement de la
structure familiale à cause des maux sociaux comme le SIDA et la guerre.
C'est ainsi que nous avons proposé d'étendre les
protections de remplacement à la communauté et d'impliquer
davantage les services publics dans la protection de l'orphelin comme de tout
autre enfant vulnérable. C'est dans ce sens que nous avons
recommandé de renforcer le rôle des tribunaux dans le
contrôle des protections de remplacement et que la
décentralisation du Département de la Protection Sociale sur tout
le territoire a été suggérée.
En outre, pour améliorer la qualité des
mécanismes de protection de remplacement dans la protection des
orphelins du SIDA, il faut y intégrer des mesures qui protègent
efficacement les orphelins contre toute forme de discrimination dont ils
peuvent faire l'objet dans leurs familles d'accueil. Sur ce point, nous avons
recommandé de traduire dans la réalité les garanties
constitutionnelles y relatives, plus particulièrement l'article 57 qui
peut garantir la protection contre la discrimination dans les rapports
privés.
Ainsi, la réorganisation des protections de
remplacement devra comprendre des dispositifs anti-discrimination.
De même, la réorganisation de ces protections
doit prévoir des mécanismes visant à protéger les
orphelins contre la spoliation des biens leur laissés par les parents et
protéger l'orphelin contre les mauvais traitements dont il est souvent
victime dans la famille d'accueil.
D'un autre côté, il est recommandé de
responsabiliser davantage les tuteurs et autres personnes ayant la garde de
l'orphelin et de prévoir des sanctions claires et précises en cas
de défaillance de leur part. A cet égard, les dispositions du CP
pouvant s'appliquer aux cas de mauvais traitements peuvent être de grande
utilité et nous recommandons que le fait d'être orphelin soit
constitutif de circonstance aggravante dans le chef d'une personne qui,
chargée de le protéger, se rend coupable de mauvais traitement
à son égard.
Enfin, toujours en ce qui concerne la protection des droits
des enfants infectés ou affectés par le VIH/SIDA, de vastes
campagnes de vulgarisation du CPF et des textes visant la protection des droits
des personnes vivant avec le VIH/SIDA s'avèrent nécessaires et
urgentes.
Par ailleurs et dans tous les cas, l'Etat et les autres
intervenants doivent concevoir des programmes ayant pour but d'alléger
l'impact socio-économique du VIH/SIDA sur les familles et les
communautés. A cet effet, nous recommandons à l'Etat de prendre,
entre autres, des mesures visant à diriger l'aide de la
communauté internationale dans ce sens.
Cependant, nous ne saurions terminer un travail de protection
des droits des enfants infectés ou affectés par le VIH/SIDA sans
adresser quelques recommandations à l'endroit de la communauté
internationale.
SECTION III. QUELQUES RECOMMANDATIONS A L'ENDROIT DE LA
COMMUNAUTE INTERNATIONALE.
Le Burundi, l'un des pays les plus pauvres au monde, ne peut
à lui seul faire face à l'ampleur de la situation
créée par le VIH/SIDA sans l'aide de la communauté
internationale. En effet la solution aux problèmes créés
par le VIH/SIDA exige entre autres et plus particulièrement la
réalisation des droits économiques, sociaux et culturels que le
droit international de l'homme met à la charge des pays les plus riches
de coopérer et aider les pays les plus pauvres126(*). La Déclaration
d'engagement des Nations Unies sur le VIH/SIDA contient plusieurs
recommandations en ce sens. Nous faisons nôtre cette Déclaration
pour formuler quatre recommandations que nous jugeons pertinentes :
- Il faut mettre le VIH/SIDA au centre des
préoccupations de l'aide au développement, veiller à ce
que les ressources soient réparties de façon à permettre
la remise en l'état des infrastructures et les services sociaux et ne
soient détournés vers d'autres préoccupations (comme
l'armement par exemple) comme le recommande le Point 87 de la
Déclaration d'engagement ;
- Considérer les orphelins du SIDA comme une
priorité dans les plans élaborés pour
accélérer la réduction de la dette ainsi que dans l'octroi
de financement ;
- Promouvoir la mise en application des droits de l'enfant
tels qu'ils sont inscrits dans la CDE ;
- Prendre en compte et exiger du Burundi l'engagement
politique national concret en faveur de la protection des personnes vivant avec
le VIH/SIDA, les orphelins et les autres personnes vulnérables et de
rendre des comptes comme le prévoient les mesures de suivi et
d'exécution des directives internationales sur le VIH/SIDA et les
droits de l'homme établies par l'ONUSIDA et le HCDH ainsi que celles
prévues dans la Déclaration d'engagement des Nations Unies sur le
VIH/SIDA.
CONCLUSION GENERALE.
Il ressort de notre travail que les droits des enfants
infectés ou affectés par le VIH/SIDA ne sont pas suffisamment
protégés. Alors que le Burundi se trouve parmi les pays les plus
touchés au monde et que les enfants se trouvent dans la catégorie
des personnes les plus affectées par cette pandémie.
En effet, le VIH/SIDA aggrave la situation déjà
précaire des enfants du Burundi dans la mesure où il les tue et
tue leurs parents, aggrave leurs problèmes de santé et que de
nombreuses violations de leurs droits sont liées à cette
pandémie.
En outre, le VIH/SIDA est venu bouleverser les
mécanismes juridiques et sociaux de protection existant.
En effet, les mécanismes de protection
institués par le CPF sont organisés soit autours des parents,
soit autours de la famille ce qui fait qu'ils sont impuissants à faire
face à la situation engendrée par le VIH/SIDA dans la mesure
où cette pandémie tue les parents et a dépassé le
seul cadre de la famille pour devenir un problème de
société.
D'un autre côté, les dispositions relatives
à la protection des droits de l'homme se trouvant dans différents
textes de lois sont impuissantes à faire face à cette
« épidémie de discrimination » et de
violation des droits les plus pertinents dans ce contexte qui sont dans le
sillage de la pandémie du SIDA.
Enfin, la situation de guerre que nous traversons et
d'extrême pauvreté dans laquelle sont plongées beaucoup de
familles et communautés touchées par le VIH/SIDA a mis à
rude épreuve le système traditionnel de protection des
vulnérables comme les orphelins et les veuves qui prévalait dans
la société burundaise.
Cependant, beaucoup de choses sont entrain d'être
réalisées au Burundi. De même, la communauté
internationale s'est beaucoup investie dans le domaine de la lutte contre la
pandémie du SIDA et la réduction de son impact sur la population
en général et sur les enfants en particulier.
C'est ainsi que l'accès aux ARV et aux soins
médicaux de qualité devient de plus en plus une
réalité pour beaucoup de personnes, même si le chemin
à parcourir avant que tout enfant infecté par le VIH ait
accès à un traitement approprié reste très long.
Mais, il y a une grave lacune à souligner parmi les
réalisations : les acteurs dans la lutte contre le SIDA ont fait
passer au second plan la mise sur pied d'une législation qui
protège les droits des personnes vivant avec le VIH/SIDA et leurs
familles alors que l'élaboration d'une telle législation se
trouve au niveau des urgences.
En effet, les personnes touchées par la maladie du
SIDA, y compris les enfants ne sont pas protégées efficacement
contre la discrimination liée à cette pandémie. De plus
les protections du droit à la santé, du droit à
l'éducation,..., la protection contre la spoliation des biens des
enfants et contre les mauvais traitements sont inadaptées aux exigence
d'une protection efficace des droits des enfants dans le contexte du
VIH/SIDA.
C'est ainsi que dans ce travail, nous avons émis des
propositions allant dans le sens d'une part d'adapter les dispositions
existantes en matières de protection des droits des individus en
général et des droits des enfants en particulier à cette
situation déjà catastrophique engendrée par le VIH/SIDA et
d'autre part d'élaborer une législation portant protection des
droits des personnes touchées par le VIH.
De même, nous avons suggéré
d'étendre les protections de remplacement du CPF aux communautés
afin de donner à ces dernières des moyens juridiques de
défendre les orphelins et les enfants autrement affectés par
cette pandémie en cas d'absence ou de défaillance de la famille.
Cette réorganisation des mécanismes de protection sera
renforcée par le rôle déterminant du juge dans ces
institutions de remplacement et la décentralisation du
Département de la Protection Sociale sur tout le territoire nationale
afin de faire le suivi et le contrôle de ces mécanismes de
protection de remplacement.
Par ailleurs, tout au long de ce travail nous avons
souligné la nécessité de porter une attention
particulière à la réalisation des droits des enfants les
plus pertinents dans le contexte du VIH/SIDA comme le droit à la
santé, le droit à l'éducation, etc. A cet égard
nous avons recommandé de tenir compte de la situation de double
vulnérabilité dans laquelle se trouvent ces enfants d'abord en
tant que personnes vivant avec le VIH/SIDA mais également en tant
qu'orphelins ou enfants de parents vivant avec le VIH/SIDA pour donner
priorité à leur protection.
En outre, comme les droits des enfants sont souvent
liés à ceux des adultes, nous avons recommandé de
protéger les droits des parents. C'est dans ce cadre que nous avons
proposé la protection du droit au travail des personnes vivant avec le
VIH/SIDA et la législation sur les successions afin d'enlever ce domaine
à l'empire de la coutume burundaise qui refuse de traiter la fille sur
le même pied d'égalité que le garçon en ce qui
concerne l'héritage et le droit à la propriété.
Enfin, nous avons abouti à l'évidence qu'il
faut promulguer une loi spécifique à la protection des droits des
personnes vivant avec le VIH/SIDA, avec une partie consacrée à la
protection des droits des enfants touchés par cette terrible
pandémie.
TABLE DES MATIÈRES
Pages
Dédicace i
Remerciements ii
Liste des abréviations iii
INTRODUCTION GENERALE
CHAPITRE I :
L'IMPACT DU VIH/SIDA SUR LES DROITS DES ENFANTS :
PROBLEMATIQUE 1
Section I. Notions 3
§1. Le VIH/SIDA 3
§2. L'orphelin du SIDA 3
§3. Enfant affecté par le VIH/SIDA 4
Section II. Le VIH/SIDA et les droits de l'enfant 5
§1. La situation du VIH/SIDA au Burundi 5
§2. L'impact du VIH/SIDA sur la vie des enfants 6
§3. Les violations des droits des enfants liées au
VIH/SIDA 7
I. La discrimination 8
A. Discrimination et droit humain 8
1. Notion de discrimination 8
2. Principe de non discrimination 8
B. Discrimination et stigmatisation liées au
VIH/SIDA 9
1. La discrimination liée au VIH/SIDA 9
2. La stigmatisation liée au VIH/SIDA 10
II. Le droit à l'éducation 11
III. Le droit à la santé 12
A. Notion 12
B. Problématique du droit à la santé des
enfants
dans le contexte du VIH/SIDA 13
IV. La spoliation des biens des enfants touchés
par le VIH/SIDA 14
V. Le droit à l'alimentation 14
VI. Le droit au logement 15
CHAPITRE II :
LES INSUFFISANCES DES MECANISMES ORDINAIRES
DE PROTECTION 16
Introduction 16
Section I. L'inadaptation des mécanismes de
protection
de remplacement prévus par le CPF 16
§1. La tutelle des mineurs 16
§2. L'émancipation 18
C. Emancipation et protection des enfants affectés
par le VIH/SIDA 18
D. Les lacunes de l'émancipation 18
§3. L'adoption 19
a. Notion 19
B. Les limites de l'adoption 20
Section II. De la modification du CPF 21
§1. Réorganisation des protections de remplacement
21
I. De la nécessité de repenser la tutelle 21
II. De la nécessité de réorganiser
l'émancipation 22
III. De l'introduction d'une institution nouvelle :
le placement 23
§2. De la nécessité de
réaménager l'action en
recherche de paternité 25
§3. Des mesures appuyant le CPF dans la protection
des enfants infectés ou affectes par le VIH/SIDA 26
I. Réforme du système judiciaire 26
1. Aménager des procédures adaptées aux
personnes
touchées par le SIDA 26
2. Assistance juridique aux personnes vivant avec
le VIH/SIDA et aux orphelins 27
II. Des mesures s'attaquant aux facteurs qui poussent
l'enfant dans la rue 28
1. Aider les familles et les communautés à
prendre
2. en charge leurs orphelins 29
3. Combattre la situation d'exclusion et de mauvais
4. Traitements 30
5. Nécessité d'une législation sur les
successions 30
III. La prise en charge des enfants de la rue ou
qui errent sur les collines de notre pays 31
Section II la protection en droit burundais de certains des
droits
des enfants les plus couramment violes dans le contexte
du VIH/SIDA 32
§1. La protection contre la discrimination
32
I. Le principe de non discrimination en droit burundais 32
II. Les lacunes dans la protection contre la discrimination
en droit burundais 34
III. Propositions pour une meilleure protection contre la
discrimination liée au VIH/SIDA 35
A. Au niveau de la législation 35
B. L'éducation du public sur la non discrimination
des personnes touchées par le VIH/SIDA et leurs
familles 36
§2. Le droit à la santé 36
I. La situation du droit à la santé au Burundi
36
II. Appréciation critique de la portée de
l'article 39 38
III. Les lacunes dans la mise en oeuvre du droit à la
santé
pour les enfants touchés par le VIH/SIDA 39
IV. Propositions pour une réalisation du droit à
la santé 40
A. La réforme du secteur de santé 40
1. Rendre gratuits ou abordables les soins de santé
40
2. Mesures visant à rendre les soins de santé
plus proches des enfants touchés par le VIH/SIDA 41
3. Mesures visant combattre la discrimination
dans les structures de santé 41
B. Nécessité d'augmenter le budget
consacré à
la santé 41
§3. Le droit à la confidentialité
42
§4. Le droit à l'éducation 43
I. Principales dispositions relatives au droit à
l'éducation 43
II. Problématique de la réalisation et du
contenu
du droit à l'éducation appliqué au
contexte
du VIH/SIDA 45
III. Propositions pour une meilleure réalisation du
droit à l'éducation des enfants touchés
par le VIH/SIDA 47
§5. Le droit au logement et à l'alimentation pour
les orphelins
et les autres enfants vulnérables 49
I. Le droit au logement et le droit à l'alimentation
dans la législation burundaise 49
II. La problématique de la mise en oeuvre du droit au
logement et à l'alimentation 49
III. Propositions pour une meilleure réalisation du
droit au logement et à l'alimentation pour les
orphelins
et les enfants vulnérables 50
CHAPITRE III :
LES REALISATIONS DANS LE DOMAINE DE LA LUTTE CONTRE
LE SIDA ET DE LA PRISE EN CHARGE DE SES VICTIMES 52
Section I. Les plans nationaux de lutte contre le sida 52
§1. La prise en charge clinique et psychosociale des
patients infectés 52
§2. La réduction de l'impact social du VIH/SIDA
sur les
individus, les familles et la communauté 54
Section II. La mise en place des institutions chargées
de
La lutte contre le sida et l'élaboration d'un plan
d'action national
de lutte contre le sida 55
§1. La mise en place des institutions chargées de
la lutte
contre le SIDA 55
I. Ministère à la Présidence
chargé de la lutte contre le
VIH/SIDA 55
II. Le Conseil National de Lutte contre le SIDA (CNLS) 55
§2. Le Plan d'action National de lutte contre
le SIDA 2002-2006 56
I. La prise en charge des orphelins du SIDA 56
II. La promotion des liens santé/droits de
l'homme/protection
des droits des personnes vivant avec le VIH/SIDA et
autres groupes vulnérables 58
III. L'amélioration de l'accès aux
anti-rétroviraux
contre le VIH/SIDA (ARV) 59
a) Avant la mise en place de la stratégie nationale
de prise en charge globale des personnes vivant
avec le VIH/SIDA 59
b) La stratégie nationale de prise en charge globale
des PVVS 60
Section III. Les efforts réalisés au niveau
international en matière
des droits de la personne en général et des
droits de l'enfant en
particulier dans le contexte du VIH/SIDA 63
§1. L'évolution de l'engagement de la
communauté
internationale dans la lutte contre le SIDA 63
§2. Les principales déclarations adoptées
sur le VIH/SIDA et
les droits de l'homme 65
I. La nature juridique d'une Déclaration dans le
système
du droit international 65
II. La Déclaration et le cadre d'action d'Abuja sur le
VIH/SIDA,
la tuberculose et les autres maladies infectieuses
connexes 65
III. La déclaration d'engagement des Nations Unies sur
le VIH/SIDA 68
a. Le contenu 68
b. La mise en oeuvre de la déclaration d'engagement
des Nations Unies sur le VIH/SIDA au Burundi 70
CHAPITRE IV :
RECOMMANDATIONS POUR UNE MEILLEURE PROTECTION
JURIDIQUE DES ENFANTS INFECTES OU AFFECTES PAR
LE VIH/SIDA 72
Section I. L'élaboration d'une législation
protégeant les droits des
personnes vivant avec le VIH/SIDA et leurs familles 72
Section II. De la nécessite de prendre en compte les
catégories
d'enfants touches par le VIH/SIDA dans la protection de
leurs droits 73
§1. De la protection de l'enfant vivant avec le
VIH/SIDA 73
§2. La protection de l'enfant des parents vivant avec
le VIH/SIDA 75
I. De la protection du travail des personnes touchées
par le VIH/SIDA 75
II. De la nécessité de protéger les biens
des enfants touchés
par le VIH/SIDA 76
§3. De la protection de l'orphelin du SIDA 77
Section IV. Quelques recommandations à l'endroit de la
Communauté internationale 79
BIBLIOGRAPHIE 81
CONCLUSION GENERALE 80
TABLE DES MATIÈRES 82
* 1 Préambule de la
Convention relative aux droits de l'enfant, N.U., 20 novembre 1989.
* 2 En effet, l'article 23 de la
Constitution cite le VIH/SIDA parmi les divers motifs de discrimination
prohibés.
* 3 JAYLE (D), PIALLOUX (J),
(sous la direction de), Vivre avec le SIDA, Paris, 2002, p.25
* 4 DURRIEU-DIEUBOLT, Le sida
et vos droits, accessible au
www.sos-net.eu.org/medical/sida.htm,
date de consultation: 10/11/03
* 5Dictionnaire
encyclopédique pour tous PETIT LAROUSSE, librairie Larousse, Paris,
1972, p.392
* 6 KAMURAGIYE (A).,
Épidémie à VIH/SIDA au Burundi, projection
démographique de 1990 à 2005 et élément d'une
politique de prise en charge des séropositifs. Université de
Rennes, mémoire, 1992, p. 107.
* 7 Ibidem
* 8 CISD, Le VIH/SIDA et les
droits des enfants, in Bulletin canadien VIH/SIDA et le droit, vol. 5,
numéro I, automne/hiver 1999, p.20
* 9 MANAT, Plan de protection
sociale, 1997, p.22
* 10USLS/Ministère de la
Santé publique, Bulletin épidémiologique annuel de
surveillance du VIH/SIDA/IST, 2002, p.3
* 11Idem, p 4
* 12 REID (E), Les enfants
dans les familles affectées par l'épidémie d'infections
par le VIH : Une démarche stratégique. PNUD, NY
* 13 Cité par le journal
« Agir Contre la Sida » n° 00, 2004 mai
2004
* 14 Ministère de
l'aménagement du territoire et de l'environnement, Evaluation des dix
ans (1992-2002) de mise en oeuvre de l'Agenda 21 : Synthèses et
recommandations. Bujumbura, 2001
* 15 FVS/AMADE Burundi,
Etablissement de la situation de référence sur le
phénomène de la discrimination à l'égard des
orphelins du Sida dans les provinces de Bujumbura, Bururi et
Gitega, Bujumbura, novembre 2002, p.37 et p.40
* 16 Idem, p37
* 17 MARC (B),
L'interdiction de la discrimination dans le droit international des droits
de l'homme., Bruxelles,1976, p.33
* 18 Idem, p.10
* 19 ONUSIDA, Campagne mondiale
contre le Sida 2002-2003, Cadre conceptuel et base d'action :
Stigmatisation et discrimination associée au VIH/SIDA,
Génève, 2002, p.3
* 20 Le principe de non
discrimination figure dans l'article 2 de la Déclaration universelle
des droits de l'homme ; le Pacte international relatif aux droits civils
et politiques ; le Pacte international relatif aux droits
économiques, sociaux et culturels ; la Convention sur
l'élimination de toutes les formes de racisme et de discrimination
raciale ; la Déclaration sur l'élimination de la
discrimination à l'égard de la femme ; la Convention
relative aux droits de l'enfant ; la Charte Africaine des droits de
l'homme et des peuples.
* 21 Peter Aggleton,
Stigmatisation et discrimination liées au VIH/SIDA : un cadre
conceptuel, in Revue Canadienne VIH/SIDA et Droit, Vol 7, numéro
2/3, décembre 2002
* 22 Théodore de Bruyn,
VIH/SIDA et discrimination : un document de travail, in Revue juridique
canadien VIH/SIDA et Société canadienne du Sida,
Monréal, 1998
* 23 ONUSIDA, Protocole pour
l'identification de la discrimination à l'égard des personnes
vivant avec le VIH/SIDA, Génève, 2001, p.8
* 24 Idem, p.7
* 25 ONUSIDA, Protocole pour
l'identification...,, p.8
* 26 Idem, pp8-9
* 27 ONUSIDA, Campagne mondiale
contre le Sida, 2002-2003, op. cit, p.7
* 28 ONUSIDA, Inde:
Discrimination, stigmatisation et dénis liés au VIH/SIDA,
Génève, 2002, p.7
* 29 Un plan pour le Canada
pour réduire le stigmate et la discrimination : Ebauche,
accessible au site
www.aidslaw.ca/français
du Réseau juridique canadien VIH/SIDA et le droit. Date de
consultation : le 19/12/03
* 30 APRODEC, Analyse
sociale de la situation des orphelins, Rapport final, Bujumbura, janvier
2003,p.45
* 31 Ibidem
* 32 La constitution de l'OMS a
été adoptée par la Conférence mondiale sur la
santé tenue à New York du 19 au 22 juin 1946.
* 33 OMS, Documents
fondamentaux, Génève, 43ème édition
2001
* 34 FVS/AMADE Burundi,
op.cit., p.34
* 35 ONUSIDA, Inde: op.
cit, Génève, 2002.
* 36 ONUSIDA, Ouganda:
Discrimination, stigmatisation et dénis liés au VIH/SIDA,
Génève, 2002
* 37 APRODEC, op.cit.,
p.59
* 38 Idem, p.60
* 39 HAVUGIYAREMYE (V.), De
la protection des enfants privés de leur milieu familial en droit
burundais, Université du Burundi, mémoire, 2003, p.22
* 40 CHAILLOU (P), L'enfant
et sa famille face à la justice, Privat, Paris 1992, p.132
* 41 HAVUGIYAREMYE (V),
op.cit., p.29
* 42 Propos recueillis
auprès de la responsable de la FVS, une ONG locale qui s'occupe de la
prise en charge des orphelins du sida
* 43 Lexique des termes
juridiques, Dalloz 2001, p.232
* 44 BENABENT (A), Droit
civil, la famille, 4è éd., Litec, Paris 1991, p.496
* 45 B.O.B.n°6/99,
p.399
* 46 BENABENT (A), op.
cit, p.455
* 47 APRODEC, op.cit.,
p.41
* 48 C'est à dire, selon
l'art.1, 5° de la loi précitée, les enfants placés
sous le contrôle des services de l'aide sociale à l'enfance.
* 49 APRODEC, op.cit,
p.56
* 50 HCDH, ONUSIDA,
Directives Internationales VIH/SIDA et droits de l'homme, Directive 5,
Génève, 1997, pp 17-18
* 51 HCDH, ONUSIDA, op.
cit , p25
* 52 Ibidem
* 53 Déclaration de
Dakar in Réseau Africain sur l'Ethique, le droit et le VIH/SIDA,
op.cit., p.3
* 54 APRODEC, op.cit.,
p.78
* 55 ONUSIDA/UIP, Guide
pratique à l'intention du législateur, la législation et
les droits de l'homme, Génève 1999, p. 107
* 56 Résolutions de la
Commission des droits de l'homme des Nations Unies 1996/44 et résolution
de la sous-commission chargée de la prévention de la
discrimination et de la protection des minorités 1995/21 citées
par AGGLETON, in Revue canadienne VIH/SIDA et droit, Vol.7, n°1,
juillet 2002, p12
* 57 Voir à son sujet,
la définition de la discrimination établie par le Protocole pour
l'identification de la discrimination des personnes vivant avec le VIH/SIDA de
l'ONUSIDA.
* 58 ONUSIDA et IUP, Guide
pratique à l'intention du législateur sur le VIH/SIDA et les
droits de l'homme, Résumé de synthèse,
Génève 1999, p.26
* 59 Ibidem
* 60 HCDH, ONUSIDA,
op.cit, p.17
* 61 ONUSIDA, Inde:
Op.cit, p.66
* 62 HALIDOU (O), NDALA (M.L),
MOALLA (T.K), op. cit, p 28
* 63 Voir le point 8 de la
déclaration d'engagement adoptée par l'Assemblée
Générale des Nations Unies sur le VIH/SIDA en 2001
* 64 HALIDOU (O), NDALA (M.L),
MOALLA (T.K), op.cit,p 28
* 65 Le brevet (patent) est un
titre légal accordé par un gouvernement assurant à celui
qui le demande, un monopole provisoire sur la production et la vente d'une
invention ou d'une découverte.
* 66 Approche légale qui
permet la production des médicaments génériques sans
l'accord du détenteur de brevet
* 67 Conseil international des
organisations communautaires de lutte contre le sida, Document
d'information, Toronto 1999, p.11
* 68 HALIDOU (O), NDALA (M.L),
MOALLA (T.K), op. cit., p.29
* 69 APRODEC, op.cit,
p62
* 70 RACHIER (A), KIBWANA (K),
ODHIAMBO (D) et MURITHI (J), Réponse éthiques et juridiques
à la pandémie de VIH/SIDA au Kenya, in Réseau africain
sur l'éthique, le droit et le VIH : Actes de consultation
inter-pays, Dakar 1994, p.40
* 71 RACHIER (A), KIBWANA (K),
ODHIMBO (D) et MURITHI (J), op.cit., p.18
* 72 B.O.B. n°1/025,
p.239
* 73 Conseil économique
et social, résolution 1997/31
* 74 CISD, Le VIH/SIDA et les
droits des enfants, in Bulletin canadien VIH/SIDA et droit, op. cit.,
p.21
* 75GRUSKIN (S),
Les droits de la personne et la santé publique, in Bulletin
canadien VIH/SIDA droit, Vol.4, n°2-3, Printemps 1999, p.91
* 76 ONUSIDA et UIP,
op.cit., p.100
* 77 Voir l'article 15 de la
Constitution de Transition du Burundi.
* 78 Burundi, Plan d'action
national contre le sida 2002-2006, p.20
* 79 Burundi, op. cit.,
p.30
* 80 Idem, p.32
* 81 Ibidem
* 82 Idem, p.33
* 83 Idem, p.38
* 84 CNLS, Ministère de
la Santé publique, Stratégie nationale de prise en charge
globale des personnes vivant avec le VIH/SIDA, Bujumbura, 2004, p.3
* 85 CNLS, Rapport annuel
des activités du projet multisectoriel de lutte contre le SIDA et appui
aux orphelins, exercice 2003, p.2003
* 86 Burundi, op.cit,
p.10
* 87 B.O.B. n°7 bis/2001,
p.777
* 88Burundi, op.cit,
p27
* 89 Burundi, op., cit.,
p40
* 90 SEP/CNLS, Manuel
d'exécution du programme multisectoriel de lutte contre le VIH/SIDA,
Bujumbura 2002, pp.26-29
* 91 APRODEC, op.cit.,
22
* 92 HCDH, ONUSIDA, op.
cit., p.26
* 93 Burundi, op.cit,
p.55
* 94 Ibidem
* 95 Idem, p.54.
* 96 CNLS, Ministère de
la Santé publique, op.cit, p.14
* 97 Il s'agit des prix
pratiqués par l'Unité Sectorielle de Lutte contre le Sida du
Ministère de la Santé.
* 98 CNLS, Ministère de
la Santé publique, op.cit, p.17
* 99 Idem, pp.17-18
* 100 Idem, p.18
* 101 CNLS, Ministère
de la Santé Publique, op. cit., p.22
* 102 HCDH et ONUSIDA,
op.cit, p.12
* 103Idem, p.3
* 104 HCDH et ONUSIDA, Le
VIH/SIDA et les droits de l'homme, les Directives internationales, Directive
6 revisée, NU, New York et Génève 2003, p.14
* 105 Résolution
2001/33 et 2002/32, citées par CAMERON (E) et GUPTA (A), L'accès
mondial aux traitements, in Revue canadienne VIH/SIDA et droit, vol.7,
n°1, juillet 2002, p.73
* 106 Comité des droits
économiques, sociaux et culturels de l'ONU: Le droit au meilleur
état de santé susceptible d'être atteint, UN Doc
E/C.12/2000/4, 11 mai 2000, accessible au
www.unhchr./tbs/doc.nsf/(symbole)/EC.12/2000/4,+CESCR+observation+generale+14.Fr?opendocuments
citée dans Revue canadienne VIH/SIDA et droit, vol.7 n°2/3.
décembre 2002, p.58
* 107SPECTER (M), Annals of
medicine, in New York Times, cité dans Revue canadienne
VIH/SIDA et le droit, vol.7, n°1, juillet 2002.
* 108 GODWIN (J.),
Microbicides, traitements et vaccins anti-VIH : vers un plaidoyer
coordonné, in Revue canadienne VIH/SIDA et droit vol.9, n°1,
avril 2004, p.8
* 109 HALIDOU (O), NDALA (ML)
et MOALLAT (T.K), op.cit. p9
* 110 Ibidem
* 111 Ibidem
* 112 Adoptée le 14
novembre 2001, voir
www.wto.org, date de consultation le
21/02/04.
* 113 Réseau juridique
canadien VIH/SIDA et AIDS Law Project, La législation internationale
sur les droits de la personne, l'accès aux médicaments et
l'interprétation de l'accord de l'OMC sur les aspect des droits de
propriété intellectuelle qui touchent au commerce.
* 114 Déclaration de
Doha sur les ADPIC et la santé publique, citée par (R) ELLIOTT,
(S) PARMAR, (V) DIVAN et (J) BERGER in Revue canadienne VIH/SIDA et
droit vol.7, n°2/3, décembre 2002, p.97
* 115 Voir loi n°1/02/10
du 02/09/2002 portant fixation du budget général
révisé de la République du Burundi.
* 116Voir loi n°012/02/10
du 02/09/2003 portant fixation du budget général
révisé de la République du Burundi.
* 117 HCDH et ONUSIDA,
Directive 6 révisée, op.cit, p.6
* 118 ROSEMAN (M.J) et GRUSKIN
(S), La déclaration d'engagement de l'UNGASS: après une
année, in Revue canadienne VIH/SIDA et droit vol.8, n°1,
avril 2003, accessible au site
www.aidslaw.ca, date de
consultation:26/09/03
* 119 Propos du
Représentant de l'OMS au Burundi, recueillis par le journal
« Agir contre le SIDA n°00, 2004, p.14
* 120 BIT, Recueil de
directives pratiques du BIT sur le VIH/SIDA et le monde du travail,
Génève, 2001, p.8
* 121BIT, op.cit., p.
15
* 122 Idem, p8
* 123 Idem, p.5
* 124 APRODEC, op.
Cit., p65
* 125 HCDH et ONUSIDA,
op.cit, p17
* 126 Voir à cet effet
les articles 55 et 56 de la Charte des Nations Unies ainsi que la
Déclaration sur le droit au développement adoptée par
l'Assemblée Générale des Nations Unies dans sa
Résolution 41/128 du 4 décembre 1986.
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