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Evénements de vie signicatifs, détresse psychologique et dépendance aux drogues

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par Dzodzo Eli Ekploam KPELLY
Université de Lomé - Diplôme d'études supérieures spécialisées  2011
  

Disponible en mode multipage

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    Résumé

    Le phénomène de la consommation des drogues est devenu un enjeu

    sociétal majeur pour toute l'humanité. Aucun pays n'est épargné par cette surprenante évolution de la toxicomanie. Les conséquences de l'abus des droguespeuvent être ponctuelles ou durables selon les habitudes de consommation, la quantité consommée et le niveau de dépendance. Mais les raisons, de la forte consommation des droguesobservée depuis peu chez les jeunes adultes, ne sont pas toujours très bien connues.

    Pendant la période du 1er Février au 22 Avril 2011, nous avons effectué une étude sur l'usage des drogues par les jeunes adultes au Centre Hospitalier National Spécialisé. L'objectif de cette étude est de repérer les événements de vie significatifs susceptiblesd'avoir fragilisé les jeunes adultes et favorisé chez eux la dépendance aux drogues. Au moyen de l'observation, d'un guide d'entretien et d'un questionnaire des événements de vie élaborés, du questionnaire Drug Abuse Screening Test-20 et de l'échelle de détresse psychologique K6, nous avons recueilli les informations sur 82 toxicomanes. Les résultats auxquels nous sommes parvenu sont les suivants :

    - les événements de vie significatifs ont entraîné une détresse psychologique chez les jeunes adultes,

    - la détresse psychologique, causée par les événements de vie significatifs, a conduit les jeunes adultes à la prise de drogues,

    Au total, notre étude permet de comprendre que les conduites de consommations de drogues observées chez les jeunes adultes dépendent visiblement des événements de vie significatifs vécus avant la consommation.

    Ainsi, le rôle prégnant des décideurs est de réduire l'offre et la demande de la drogue sans pour autant se désintéresser de la création des centres de soins et d'aides spécialisés pour une meilleure prise en charge des toxicomanes.

    Mots-clés : Evénements de vie significatifs - Détresse psychologique - Dépendance aux drogues - Jeunes adultes.

    INTRODUCTION

    L'abus de drogues, connu communément sous le terme « toxicomanie », est devenu un problème de santé publique et un fléau sociétal majeur suite à la mondialisation favorisée par les facteurs socioéconomiques complexes.Le trafic et la forte augmentation de la consommation d'alcool, du tabac et des drogues illicites préoccupentau plus haut niveau la communauté internationale.L'ampleur des conséquences sociales et sanitaires de l'abus des drogues, il faut le dire, conduit la communauté internationale à s'organiser autrement pour lutter efficacement contre les problèmes de drogues.En outre, les statistiques des regrettablesconséquences des consommations de drogues sont alarmantes.A l'échelle mondiale, la consommation du tabac est l'une des causes les plus importantes de décès dans le monde avec 5 millions de morts par an. A cette allure galopante, le nombre de morts par consommation de tabac atteindra 10 millions par an, d'ici 2020.

    Au Togo, la consommation de drogues s'est largement répandue au cours de ces dernières années. Leur évolution semble coïncider avec la progression mondiale du phénomène de la toxicomanie.Cetterapide progression des conduites de consommations de drogues s'explique aussi par la prolifération des trafics de drogues. Ce phénomène prend de plus en plus de l'importance.Il touche malheureusement toutes les couches sociales et surtout les jeunes qui se créent de solides bases et de probants motifs pour l'utilisation des drogues.

    Les conséquences, auxquelles les services d'urgence et de prise en charge médico-psychosociale sont confrontés, sont considérables et varient selon les habitudes de consommation, le niveau de dépendance et la vulnérabilité des sujets.Les conséquences, généralement rencontrées, sont les intoxications et les complications psychiatriques. Il peut s'agir aussi des risques sociaux pour l'usager et son entourage, des troubles organiques graves à l'instar des dommages dans le cerveau, des altérations des voies

    respiratoires et / ou des arrêts cardiaques pouvant entraîner la mort. A court terme, les consommations de drogues provoquent l'apaisement, l'euphorie et très souvent une sensation de bonheur.C'est justement pour cette raison que certains les consomment régulièrement. En cas d'usage répété, les premières consommations ne durent que quelques semaines et laissent place à de sévères dépendances.

    Face à ces urgences organiques et psychiatriques, les services de prise en charge médico-psychosociale restent parfois sans voix, vu leur nombre restreint. Cependant depuis les législations universelles en matière de la drogue, ces services d'aides spécialisées tentent, peu ou prou, de résoudre les problèmes engendrés par les conduites de consommations de drogues à travers la recherche-action.

    L'expérience clinique, connue lors de nos stages au Centre Hospitalier National Spécialisé auprès des toxicomanes, nous conduit à étudier le phénomène de la toxicomanie sous l'aspect des facteurs ayant conduità ces consommationsde drogues. Cetteétude vise à montrer le lien entre les événements de vie significatifs vécus et les conduites de consommations de drogues.

    Au risque d'être schématique, notre travail est organisé autour de trois grandes parties : d'abord, nous présentons la problématique et le cadre théorique dans la première partie, ensuite, nous relatonsla méthodologie de notre travail dans la deuxième partie et enfin dans la troisième partie, nous exposons les résultats avec les commentaires, interprétation et discussions.

    PREMIERE PARTIE
    PROBLEMATIQUE ET CADRE THEORIQUE

    Chapitre I : ANALYSE DE LA SITUATION ET QUESTIONDE LA RECHERCHE

    1.1. Analyse de la situation

    Selon le rapport sur la santé dans le monde de l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) en 2003, 140 millions de personnes souffraient des troubles liés à l'alcool, un adulte sur trois fumait du tabac, ce qui représentait 1,2 milliard de personnes et on a estimé qu'il y avait environ 5 millions de personnes s'injectant des drogues illicites.

    Au Togo, selon le rapport annuel 2010 du Centre Hospitalier National Spécialisé en Santé Mentale d'Aného, les statistiques alarmantes des cinq dernières années montrentque la toxicomanie représente l'une des cinq premières causes d'hospitalisation au centre à côté de la schizophrénie, des psychoses hallucinatoires chroniques, des bouffées délirantes polymorphes et de la dépression psychotique. Elle représente 20% des hospitalisations et elle constitue également avec tout ce qu'elle engendre comme troubles mentaux associés, l'un des plus fréquents motifs de réadmission (environ 30% sur un taux global de réadmission de 74%).

    La présente recherche trouve son origine dans un constat pertinent : la présence d'une histoire événementielle constatéelors de nos entretiens cliniques avec les patients toxicomanes que nous avons reçus au cours de notre stage au Centre Hospitalier National Spécialisé en Santé Mentale d'Aného du 1erFévrier au 22 Avril 2011.

    D'abord, la majorité des patients que nous avons rencontrés sont de sexe masculin. Outre l'abondance du sexe masculin, nous avons constaté que les patients addictifs sont relativement jeunes avec un pic situé entre 26 et 29 ans.Les qualifications professionnelles des patients rencontrés sont diverses. Toutefois, elles semblent être de l'ordre de la classe défavorisée. Les professions les représentées sont les sans profession, les apprenants et les employés.

    Ensuite, certains patients addictifs décrivaient une histoire marquée par des difficultés financières, principalement par la diminution significative des revenus, des problèmes conjugaux articulés autour des difficultés relationnelles, des disputes, des interruptions de la vie conjugale, des séparations ou même des décès de leurs conjoints. C'est l'exemple d'un polygame de 44 ans resté pendant longtemps sans emploi qui a connu une vie conjugale pleine de mésententes suivie de la séparation d'avec sa première femme.

    Et puis, d'autres patients addictifs retraçaient la vie familiale avec des événements familiaux épouvantables comme des mésententes entre les enfants et / ou les parents, une séparation d'avec la famille,ou un décès d'un membre de la famille.En exemple, nous avons le cas d'une patiente de 28 ans toxicomaneà l'héroïne et au cannabis. Elle est la 18ème enfant de la fratrie,leur vie familiale est pleine de disputes dramatiques etses parents sont décédés la même année pendant qu'elle était encore très jeune. Un autre cas de patient de 25 ans, aîné d'une fratrie de deux enfants, choyé par sa mère et maltraité par son père, s'adonne à l'alcool, au tabac et occasionnellement au cannabis depuis le décès de sa mère.

    Enfin, d'autres patients addictifs relataientdes problèmes de santé comme une maladie ou unaccident grave ; des difficultés liées au milieu de vie comme un déménagement suivi d'un changement de voisins mais aussi desdifficultés de la vie sociale exposées en termes d'une modification importante du statut social, d'une absence d'aide en cas de besoin, d'un décès d'un ami procheou des conflits avec la loi.

    Dans le souci d'appréhender d'une part les multiples raisons intervenant essentiellement dans le déterminisme des conduites de consommation de drogues et d'autre part les conséquences imminentes issues des événements de vie traumatiques, d'innombrables travaux ont été réalisé par plusieurs chercheurs.

    Les alcooliques ont été l'objet d'une étude prospective réalisée par Hall et al.(1990). Les explications données par les alcooliques à leur rechute formulaient principalement autour d'un état de stress important. Cette rechercheprécise la précaution avec laquelle il faut considérer les explications des toxicomanes, d'autant plus qu'elle s'intéresse aux situations qui peuvent déclencher la rechute des alcooliques. Cela indique qu'il peut avoir d'autres mobiles intrinsèques à la personnalité du toxicomane que lui-même peut méconnaître.

    En 1994, Adams et al. ont effectué une intéressante étude sur le rôle respectif des événements de vie éprouvants (stress majeurs) et des tracas quotidiens (stress mineurs) dans la sévérité et les fluctuations d'un jour à l'autre de la symptomatologie du lupus, sur une population de 41 sujets. Les auteurs constatent qu'environ 1/5 de la population étudiée présente des corrélations significatives entre le stress ou les variables émotionnelles et les symptômes physiques : ce sous-groupe peut être considéré comme définissant une population de sujets répondeurs au stress, ce qui laisse entendre que dans toute affection à composante psychosomatique la part attribuable à des facteurs psycho-émotionnels est très variable d'un sujet à un autre.

    Larecherche effectuée sur l'addiction tabagique et la disposition narcissiquechez des fumeurs consultant pour sevrage tabagique(Fernandez, 1997) trouve son origine dans un double constat : d'une part, celui d'une variabilité des effets des addictions et d'autre part, celui d'une variabilité de la disposition narcissique chez les addictés.Les résultats montrent que les fumeurs ayant une disposition narcissique moyenne ou forte sont dépendants du tabac auniveau psychologique et comportemental. Autrement dit, plus les fumeurs sont narcissiques, plus ils sontdépendants psychologiquement du tabac. L'examen des relations entre le degré et l'intensité de la dépendance àla nicotine et le degré et l'intensité de la dépendance psychologique et comportementale au tabac révèle le faitsuivant : les fumeurs ayant une

    disposition narcissique moyenne ou forte peuvent aussi être dépendantsphysiologiquement de la nicotine et donc présenter les deux dépendances associées.

    L'étude de l'impact du climat affectif familial sur la personnalité de l'enfant : cas des toxicomanes de Lomé (Sévon, 2002) a montré que l'âge actuel, le type de famille et la position occupée dans la fratrie ne sont pas des facteurs déterminants dans l'explication de l'étiologie de la toxicomanie. Cependant, il ressort que le phénomène est essentiellement masculin, que la consommation se fait en groupe et la plupart des toxicomanes le sont devenus lorsqu'ils vivaient encore avec leurs parents géniteurs. D'après les facteurs subjectifs, le désir d'attirer l'attention des parents constitue un facteur déterminant. Parmi les facteurs psychologiques, la disqualification du père (absence physique et / ou psychique) et la surprotection maternelle sont les facteurs prépondérants entraînant le trouble de l'organisation de la personnalité pouvant déboucher sur la dépendance à la drogue.

    Clément, Darthout et Nubukpo (2003) estiment que l'étiopathogénie des démences relève d`un déterminisme multiple qui implique différents facteurs de vulnérabilité d`ordre génétique, biologique et psychopathologique. Les résultats suggéraient que la fréquence des événements de vie survenus au cours de l`enfance, mais aussi au cours de la vie de couple et de la vie professionnelle était significativement plus élevée et le retentissement affectif plus important chez les sujets déments que chez les sujets contrôles.

    Les travaux effectués (Atger, Corcos, Perdereau,&Jeammet,2003) révélaientque les conduites addictives peuvent être considérées comme des modalités de régulation de l'équilibre psychique du sujet face aux menaces de perte que représente la problématique de séparation-individuation qui se rejoue à partir de l'adolescence. Le recours au comportement survient lorsque les moyens habituels de régulation, ressources internes du sujet et étayage sur les objets externes, sont débordés. Les facteurs intervenant dans la genèse et

    la pérennisation des conduites addictives sont biologiques, psychologiques, culturels et sociaux.

    Les récents travaux que nous avons effectués (Kpelly, 2010) montraient d'une part, que les addictionsaux drogues dépendentdes types d'attachement parental et d'autre part que, les toxicomanes d'un attachement insécure détaché sont dirigés vers l'alcool, le tabac et le cannabis, ceux de l'attachement insécure préoccupé touchent à la plupart des substances psychoactives et ceux de l'attachement insécure désorganisé sont conduits plus vers l'alcool et le tabac.

    A la suite du programme Alzheimer, de recherche et de données (Poillot, Menecier & Ploton, 2011), 59 malades Alzheimer ont été comparés à 31 sujets témoins, afin de rechercher une association entre facteurs de vulnérabilité liés à l'histoire de vie et révélation clinique ultérieure d'une maladie d'Alzheimer. Des facteurs pathogènes apparaissent, les malades ont plus souvent été placés avant l'âge de dix ans et reconnaissent plus d'antécédents familiaux de nature psychiatrique. La présence d'évènements de vie difficiles peut influencer les capacités du sujet à effectuer un travail de deuil ainsi, l'élaboration des pertes liées au vieillissement peut être rendue difficile et dépasser les capacités psychiques du sujet.

    1.2. Questionpréliminaire

    Au regard de ces pertinentes observations effectuées et de ces interprétationsélaborées par différents auteurs surl'étiologie des addictions aux drogues, nous nous interrogeons sur la présence d'une relation entre les événements de vie significatifs et les conduites de consommation de drogues constatées chez les jeunes adultes.

    Chapitre II : ETAT DE LA QUESTION ET CADRE THEORIQUE

    2.1. Définition des concepts

    2.1.1. Evénements de vie

    2.1.1.1.Définition

    Etymologiquement, événement vient du latin « evenire » qui veut dire « arriver ». En probabilités ou en statistiques, un événement est le résultat d'une expérience aléatoire. Par exemple, la phrase « la personne choisie est untoxicomane » définit un événement de l'expérience aléatoire « choix d'un individu dans une population ». En sciences, il s'agit d'un changement d'état ou de contexte, lié à une modification substantielle de la valeur d'un paramètre mesurable, dans un bref intervalle de tempsà l'échelle de l'expérience.Un événement, c'est un fait important qui marque ou qui se produit dans la vie des hommes.

    Pour Freud (1929), les événements de vie sont toutes les situations l'on subit un préjudice, une humiliation, une déception, situations qui peuvent

    introduire dans la relation une opposition d'amour et de haine ou renforcer une ambition déjà présente.

    Les évènements de vie sont des situations ou des faits importants survenant de façon brutale, imprévisible ou non, soumettant l'individu à une agression émotionnellement choquante ou non et sur laquelle un contrôle peut ou peut ne pas être possible dans l'urgence de la situation.

    2.1.1.2. Approches conceptuelles

    La conceptualisation des événements de la vie tient un rôle majeur dans le développement et l'évolution du mouvement centré sur l'étude de la relation événement/maladie. Au fur et à mesure que les chercheurs élaborent leurs approches conceptuelles, ils mettent au point des méthodologies et par là même des instruments et des modes d'approche de plus en plus spécifiques des problèmes traités.

    Pour les chefs de file que sont Holmes et Rahe (1967), c'est la « quantité de changement » impliquée par un événement survenant dans la vie d'une personne qui confère à celui-ci un rôle pathogène ou non. Pour évaluer l'importance du changement, ces auteurs construisent the Schedule of Recent Experiences. Il s'agit d'une liste de 43 événements considérés comme potentiellement perturbants, dans la mesure où ils impliquent une certaine quantité de changement lorsqu'ils surviennent dans la vie de tout un chacun. Ce changement, qui exige alors un effort d'adaptation et de réajustement de la part de celui qui le vit, a été quantifié par un grand nombre de sujets-juges, devant se référer à leurs expériences personnelles et à ce qu'ils ont pu voir autour d'eux. En pratique, il suffit de faire remplir en auto-passation des listes d'événements. Les sujets doivent indiquer, dans la liste qui leur est proposée, les événements survenus dans leur vie au cours de la période précisée. Ensuite, à chaque événement est attribuée la note standard correspondante. Le tout étant sommé, donne la note globale d'impact événementiel de chaque sujet.

    Après l'utilisation de la liste des événements proposée par les précurseurs Holmes et Rahe pendant une décennie, les chercheurs font le choix d'un guide d'entretien pour cerner davantage les événements.

    Brown et Harris (1978) traduit en français par Gorwood et Rouillon (1994), mirent au point un guide d'entretien la LEDS (Life Events and Difficulties Schedule) pour passer en revue de nombreux événements et difficultés dans 12 grands domaines de la vie.

    La mise au point du guide d'entretien pour apprécier les événements a été d'un intérêt incontestable. Néanmoins, la nécessité d'une méthode plus structurée et plus plausible s'imposait aux chercheurs, d'où la création du questionnaire d'événements.

    Le Questionnaire d'événements, mis au point par Amiel-Lebigre (1984), s'inspire dela précédente liste. Il comprend 52 items plus deux possibilités pour pouvoir coter d'autres évènements. L'évaluation de l'impact

    de l'événement au moment de sa survenue est faite rétrospectivement par le sujet, au cours d'un entretien, avec l'attribution d'une note d'impact de retentissement affectif (dans le sens de la difficulté) allant de 0 à 100.

    Il convient de préciser que les événements de vie se situent dans plusieurs domaines de la vie.Pour ce qui est de notre recherche, nous nous sommes intéressé principalement à l'aspect qualitatif des événementsd'ordre familial, affectif, social, sanitaire et financier conduisant fréquemment à un traumatisme.

    2.1.1.3. Traumatisme

    Le traumatisme est un choc moral ou psychologique important ou c'est un événement qui provoque un choc moral ou psychologique important. En médecine, c'est un trouble physique causé par une blessure grave occasionnée par un agent extérieur. En psychologie, c'est un choc émotionnel pouvant entraîner un désordre psychique et modifier la personnalité.

    Pour comprendre les différentes manifestations du traumatisme psychique, il s'avère inévitable et impérieux de circonscrire la notion de traumatisme psychique.

    2.1.1.3.1. Notion de traumatisme psychique

    Le traumatisme psychique est un terme désignant un type de dommage causé à la psyché survenu après un événement traumatisant.Un événement traumatisant inclut une seule situation ou un ou plusieurs événements longs et répétés,et peut complètement submerger la capacité de l'individu à intégrer les idées et émotions inculquées lors de cette expérience.Le traumatisme peut être causé par une variété d'événements, mais il en existe que quelques aspects communs. Il y a fréquemment une violation des idées reçues de l'individu concernant le monde et des droits de l'homme, mettant ces individus dans un

    état de confusion extrême et d'insécurité.Le traumatisme psychique peut s'accompagner d'un traumatisme physique.

    Un traumatisme désigne une expérience de violence hors du commun au cours de laquelle l'intégrité physique et psychique d'un individu ou d'un groupe a été menacée. Lorsquele terme « traumatisme » désigne l'effet sur l'individu d'un événement, il est question d'événement traumatogène ou potentiellement traumatique. La notion de traumatisme psychique ne se réduit pas à cette conception factuelle. Par ailleurs, un même « événement » vécu par plusieurs personnes, pourra avoir des effets traumatiques très différents d'une personne à l'autre.Pour avoir un effet potentiellement traumatique, l'événement représente une menace pour l'intégrité de la personne, dépassant ses possibilités de réaction, survenant de manière soudaine et non anticipée, et s'accompagnant d'un sentiment de terreur, de détresse, d'effroi, de solitude, d'abandon.

    La gamme des événements traumatogènes est donc large : violence physique, violence sexuelle, exposition à des scènes de violence, violence conjugale, menace ou témoin d'un événement marquant, particulièrement durant l'enfance, les séismes et éruptions volcaniques, autres violences aggravantes peuvent également contribuer à un traumatisme psychiqueet plus généralement dans un sens étendu, dans tous les cas où une personne ne peut s'empêcher de penser à une situation qui l'a débordée émotionnellement.Une exposition à long terme à des situations telles que la pauvreté ou autres formes d'agression, comme les agressions verbales, peuvent être traumatisantes.

    Pour certains chercheurs, il y a deux catégories de traumatismes :

    - le traumatisme de type 1 se rapportant à un événement unique, isolé,

    limité dans le temps (accident, catastrophe naturelle, agression

    physique, viol, deuil traumatique, etc.) ;

    - le traumatisme de type 2 correspondant à une situation qui se répète : l'individu se trouve réexposé à un danger identique ou

    comparable (violences familiales, guerres, traumatismes secondaires des professionnels de l'aide, etc.).

    2.1.1.3.2. Conséquences des traumatismes psychiques

    Lorsqu'il y a eu traumatisme psychique, des troubles peuvent apparaître de manière transitoire ou durable. Il y a plusieurs niveaux :

    - Manifestations immédiates : Pendant l'événement traumatique, le corps réagit, c'est la réaction très courte d'immobilité du système parasympathique puis celle de fuite / combat du système sympathique pouvant se manifester par des comportements d'agitation, fuite panique, réactions mimétiques, voire des manifestations névrotiques ou psychotiques chez des sujets prédisposés. Une fois l'événement terminé, survient la phase de réaction du stress aigu (agitation, angoisse, souvenirs intrusifs, absence d'émotions...). Ce sont des réactions normales et naturelles après une expérience traumatique.

    - Manifestations post-immédiates : L'événement traumatique peut être vécu comme une vague de stress aigu reliée à des symptômes anxieux, un choc ou chaos émotionnel, des symptômes dépressifs.

    - Manifestations différées : après une période, il peut arriver que les réactions prennent la forme de symptômes tels que l'hyperexcitation somatique, syndrome de répétition, la dissociation et l'évitement. Ceci correspond à l'état de stress post-traumatique. Finalement, cet état peut devenir chronique et être associé à d'autres problèmescomme anxiété, dépression, alcoolisme, etc.

    2.1.2. Vécu événementiel

    Parler du vécu événementiel revient avant tout à parler de la problématique du sens de l'événement. En effet, c'est le sens qu'une personne attribue oudonne à un événement de vie qui va entraîner des conduites

    conscientes ou inconscientes, normales ou pathologiques qui témoigneront de son vécu.

    De manière générale, la signification que l'on donne à un événement peut être consciente ou inconsciente. Chaque personne va accorder un sens à sonévénement de vie, qu'il soit conscient ou inconscient avec des représentations propres (contenus de la pensée, images) et des affects (émotions).

    Dès lors, les chercheurs se sont plutôt intéressés à l'aspect qualitatif de l'événement, tel son impact ou son retentissement affectif sur le sujet au moment de sa survenue.

    L'impact événementiel est alors envisagé différemment suivant qu'il représente un gain ou une perte pour le sujet (Dohrenwend, 1973) ou suivant sa désirabilité sociale (Cochrane & Robertson, 1973 ; Myers &al., 1974 ; Paykel, 1974). Cette dernière peut être considérée comme « négative » ou « positive ». Le fait qu'un événement constitue une entrée ou une sortie du « champ social » (Paykel& al., 1969 ; Jacobs & al., 1974) ou bien que le sujet soit censé exercer un « contrôle » ou non sur l'événement, qu'il ait une part de responsabilité ou non, dans la survenue des événements (Dohrenwend, 1973), que ceux-ci aient été prévisibles, anticipables, dans l'ordre des choses ou non, qu'ils surviennent à un âge particulier de la vie est aussi considéré (Neugarten, 1968a, 1983b; Riley, 1963a, 1985b).

    L'évaluation de la quantification de l'impact événementiel par les sujets eux-mêmes fait l'objet d'une autre approche fondamentale (Thomson &Hendrie, 1972 ; Schless&al., 1974 ; Amiel-Lebigre& al., 1984).

    Elle consiste à demander directement aux sujets, au cours d'un entretien, d'estimer personnellement et rétrospectivement le retentissement affectif des événements qu'ils ont vécus, parmi ceux d'une liste. L'impact événementiel recherché est celui ressenti au moment de la survenue de l'événement.

    Un autre mode d'approche du vécu événementiel se veut « contextuel » (Brown & Harris, 1978). L'examen du contexte historique dans lequel un événement survient dans la vie d'un sujet donné, associé à la façon dont cette personne exprime son vécu événementiel, contribue à approcher et à comprendre la signification de cet événement pour cette personne.

    Dans la construction de leur modèle, Brown et Harris introduisent la notion de « difficulté majeure ». Il s'agit de situations difficiles dans lesquelles peuvent se trouver les sujets depuis un certain temps, lorsque surviennent les événements, situations problématiques en elles-mêmes ou qui peuvent contribuer à déterminer l'importance de l'événement.

    Un événement qualifié de sévère ou une situation qualifiée de majeure, constitue, dans le modèle un agent inducteur de la dépression. Toutefois, les agents inducteurs ont rarement une force pathogène suffisante pour déclencher à eux seuls une pathologie mentale. Lorsqu'ils surviennent en présence de facteurs de vulnérabilité, autres variables de ce modèle, la probabilité qu'une décompensation survienne est alors beaucoup plus élevée.

    L'important survol effectué sur la notion de traumatisme psychique apporte des indications précises sur les événements de vie. Toutefois, cette notion de traumatisme psychique ne peut être comprise sans le formulerautourdu stress, qui résulte du traumatisme.

    2.1.2.1. Stress

    Le stress ou syndrome général d'adaptation, est l'ensemble des réponses d'un organisme soumis à des pressions ou contraintes de la part de son environnement.Le stress est l'état de tension chronique (à la fois physique et psychique) qui découle d'une façon inadéquate de gérer la pression (psychique) pendant une période prolongée. Plusieurs ingrédients sont nécessaires pour créer un stress. Il faut une situation comportant de la

    pression (psychique); pendant une période prolongée (autrement, il ne s'agira que de tension passagère); une façon inadéquate de réagir à cette situation.

    Il est impératif de s'attarder un tant soit peu sur la notion de stress et les types de stress fréquemment rencontrés en vue de délimiter le vaste champ du stress.

    2.1.2.1.1. Notion de stress

    La notion de stress a été introduite parSelye (1956). Il y décrit le mécanisme du syndrome d'adaptation, c'est-à-dire l'ensemble des modifications qui permettent à un organisme de supporter les conséquences d'un traumatisme naturel ou opératoire.

    D'après Selye (1973), le syndrome de stress évolue en suivant trois stades successifs :

    - « Réaction d'alarme » : les forces de défense sont mobilisées. L'organisme reconnaît l'agression, se prépare à agir (soit à combattre, soit à fuir), puis met en oeuvre la défense. Le délai minimal de réponse est de quelques minutes. Les glandes endocrines libèrent des hormones qui accélèrent les rythmes cardiaque et respiratoire, élèvent la glycémie, augmentent la sudation, dilatent les pupilles et ralentissent la digestion.

    - « Stade de résistance » : adaptation à l'agent stressant.L'organisme s'adapte à l'agent agresseur persistant, et régule les perturbations provoquées par la réaction d'alarme.

    - « Stade d'épuisement » : inexorablement atteint si l'agent stressant est suffisamment puissant et agit longtemps. Une agression prolongée affaiblit notamment les réserves énergétiques de l'organisme, du fait de la dépense occasionnée par la réponse à l'agression.

    Les causes du stress sont extrêmement nombreuses, variables d'un sujet à l'autre et non spécifiques : accident, intervention chirurgicale, maladie, conditions de vie difficiles, etc.

    Un événement stressant provoque une réaction en chaîne qui débute dans le cerveau et aboutit à la production de cortisol par les glandes surrénales. Le cortisol active alors en retour deux zones du cerveau : le cortex cérébral pour qu'il réagisse au stimulus stressant (fuite, attaque, immobilisation...) et l'hippocampe, qui va apaiser la réaction. Si le stress est trop fort ou prolongé, l'hippocampe saturé de cortisol ne peut plus assurer la régulation. Le cortisol envahit le cerveau et installe une dépression. Les zones altérées sont l'hippocampe, l'amygdale, le cortex cingulaire antérieur et le cortex préfrontal.

    Toutefois, la tendance quedéveloppent les êtres vivants à vouloir maintenir l'homéostasie et rester constants face aux facteurs stressants, ne dépend pas seulement de l'action du cortex cérébral ni de la régulation de l'hippocampe. Elle est très souvent également fonction du type de stress vécu.

    2.1.2.1.2. Types de stress

    Le management du stress peut s'avérer être une chose compliquée car il existe différents types de stress : le stress aigu, le stress aigu répété et le stress chronique.

    - Le stress aigu :il est la forme de stress la plus répandue. Il dure généralement moins d'une heure et trouve son origine dans les pressions récentes et dans les pressions à venir. Le stress aigu peut être excitant et même bénéfique dans certaines situations.En raison de sa courte durée, le stress aigu n'a pas assez de temps pour causer des troubles plus graves associés au stress à long terme. Ainsi, les symptômes du stress aigu les plus répandus sont : un changement émotionnel qui mélange colère, irritabilité et déprime, des problèmes musculaires comme des maux de têtes, des douleurs dans le dos, le mal de dents, un rythme cardiaque accéléré, une hausse de la

    pression artérielle, des palpitations, des migraines, le souffle court, des douleurs à la poitrine, des vertiges.

    - Le stress aigu répété : les personnes atteintes de stress aigu répété font souvent preuve d'un tempérament irritable, d'anxiété et de nervosité. Elles se décrivent souvent comme étant une boule d'énergie nerveuse en mouvement. Toujours dans l'urgence, leur état irritable peut se transformer en colère.Une autre forme de stress aigu répété provient d'un sentiment d'inquiétude permanent. Cela revient à imaginer des désastres à chaque coin de rue, à être pessimiste sur l'avenir et à penser que le pire va se produire dans chaque situation.Les symptômes du stress aigu répété sont les symptômes d'un état d'excitation quasi-permanent comme maux de têtes persistants, migraines, hypertension, douleurs à la poitrine, maladies cardiaques.

    - Le stress chronique : c'est un stress qui va être ressenti jours après jours, années après années et il a des conséquences sur le corps, l'esprit et la vie. Le stress chronique touche souvent les gens qui vivent dans une situation financière précaire, les familles connaissant de graves problèmes, ou bien les personnes ayant des problèmes avec leur travail ou leur carrière.Le stress chronique tire son origine du fait qu'une personne ne voit pas de sortie positive dans une situation problématique. Certaines formes de stress chronique proviennent d'expériences traumatisantes dans l'enfance qui continuent d'être douloureuses au moment présent. La conséquence la plus malheureuse de cette forme de stress est que les personnes qui en souffrent finissent par s'y habituer.

    Face aux situations potentiellement stressantes, deux issues sont immanquablement réalisables. Il peut s'agir soit d'une résilience soit d'une détresse psychologique.

    2.1.2.2. Résilience

    La notion de résilience demeure très floue pour beaucoup de chercheurs malgré sa spécificité.C'est Bowlby (1951) qui le premier a utilisé au sens

    figuré le terme de résilience, issu de la physique des matériaux. En physique, la résilience signifie littéralement la capacité ou l'aptitude à résister aux chocs. Insistant sur le rôle de l'attachement dans la genèse de la résilience, Bowlby la définissait ainsi : « ressort moral, qualité d'une personne qui ne se décourage pas, ne se laisse pas abattre ».

    La résilience a d'abord été étudiée chez l'enfant. Rutter (1985) la définissait comme « un phénomène manifeste par des sujets jeunes qui évoluent favorablement bien qu'ayant une forme de stress qui dans la population générale est connue comme comportant un risque sérieux de conséquences défavorables ».

    Kleisler (1996)s'intéresse aux qualités d'un individu résilient et donne cette définition : « La résilience est la capacité d'un sujet à surmonter des circonstances singulières de difficultés, grâce à ses qualités mentales de comportement et d'adaptation ».

    La résilience a été ensuite appliquée à l'adulte puis étendue à des familles et des communautés pour évoquer une évolution favorable suite à un traumatisme important. En 2001,Manciaux écrit : « La résilience est la capacité d'une personne ou d'un groupe à se développer bien, à continuer à se projeter dans l'avenir en dépit d'événements déstabilisants, de conditions de vie difficiles, de traumatismes parfois sévères ».

    Lecomte (2002) part du postulat philosophique selon lequel toute personne est potentiellement résiliente, le regard posé sur une personne ne doit donc jamais être figé. Il définit la résilience comme un « processus non linéaire qui permet à une personne ayant subi un traumatisme de mener une vie satisfaisante». Le terme de processus implique une évolution qui intègre les récidives et les rechutes. En effet, le parcours des personnes se fait par étapes, par phases successives. On ne parle alors plus d'échec, mais d'étape difficile dans le parcours de résilience de la personne. Selon Lecomte, un professionnel sera d'autant plus à même de favoriser la résilience d'une autre personne qui ne se situera pas uniquement dans la juste distance

    professionnelle mais aussi dans ce qu'il appelle une juste proximité humaine. C'est dans cet espace de notre humanité commune que peut se construire la résilience.

    La notion de résilience apporte une véritable respiration dans un contexte où les concepts de reproduction en sociologie et de répétition en psychanalyse dressaient un mur contre lequel la volonté de changement des professionnels venait buter. (Desmons, 2001).

    Delage (2003) est un des premiers à tirer les conséquences pratiques de la notion de résilience pour les interventions contextuelles en psychiatrie. Selon lui, « c'est un nouveau paradigme d'intervention thérapeutique qui se dégage, centré, non plus sur le trouble, mais sur les ressources des personnes pour faire face à ce trouble et rebondir de façon positive ».

    En face des situations traumatisantes, quand les ressources internes des personnes sont absentes ou défaillantes, elles laissent place dans un abord immédiat à la détresse psychologique.

    2.1.2.3. Détresse psychologique

    La détresse psychologique se caractérise par la présence de symptômes, le plus souvent dépressifs ou anxieux. Ces symptômes, relativement communs, apparaissent généralement dans un contexte d'accidents de vie ou d'événements stressants et peuvent être transitoires.

    Dans la majorité des cas, les personnes en détresse psychologique ne présentent pas de maladie psychiatrique et n'en présenteront jamais (European Commission, 2004).

    Toutefois, mal repérée ou mal accompagnée, la détresse psychologique peut faire basculer la personne dans une maladie ou multiplier les difficultés sociales.Dans l'enquête décennale santé, la proportion de jeunes exprimant une détresse psychologique est significativement plus élevée parmi ceux qui ont vécu des événements de vie dramatiques (décès ou maladie grave d'un des deux parents, graves disputes ou divorce des parents...). En effet, ces

    événements constituent des facteurs de risque d'une détresse psychologique chez les jeunes, qu'ils en soient « victimes » directes ou « témoins » (maladie d'un proche...). Leur impact varie toutefois selon les individus, en fonction de leur capacité de résilience, c'est-à-dire leur capacité à surmonter les événements de vie douloureux. Certaines situations, comme par exemple une bonne entente avec les parents ou des activitésextrascolaires favorisent la résilience et peuvent aider à surmonter des événements difficiles. Mieux connaître, comprendre et promouvoir ce qui favorise la résilience, notamment dans les familles à risque, constitue aujourd'hui un des axes d'action pour prévenir la souffrance psychique des jeunes (HCSP, 2000).

    Par ailleurs, les analyses réalisées à partir de l'enquête décennale santé montrent que, chez les garçons uniquement, le risque de détresse psychologique apparaît plus élevé lorsque les parents ont eux-mêmes connu des événements de vie négatifs comme décès, maladie ou divorce des parentsdans la jeunesse, décès d'un proche, divorce, difficultés matérielles au cours de l'année ou lorsque l'un d'eux souffre de dépression (INSEE, 2003). Certains pédopsychiatres avancent que les garçons, habituellement peu enclins à exprimer leur mal-être s'autoriseraient alors à reconnaître ou exprimer leur souffrance en présence de tels événements.

    Les jeunes exprimant une détresse psychologique déclarent également davantage d'incapacités physiques (difficultés à courir, marcher, monter des escaliers...) que les autres. Il est en effet bien établi, chezles adultes comme chez les enfants, que la détresse psychologique et les troubles de santé mentale sont plus fréquents chez les personnes souffrant de problèmes de santé physique, notamment de maladies chroniques(diabète, maladies respiratoires...) que chez les autres (Barlow, 2006 ; Pratt, 2007).

    Après 18 ans, les jeunes inactifs ou au chômage expriment significativement plus souvent une détresse psychologique que les jeunes actifs occupés chez les filles comme chez les garçons et ce, indépendamment de la situation socio-économique du foyer et de leurs antécédents en termes

    d'accidents de vie ou de problèmes de santé mentale. Deux explications sont possibles : ces situations peuvent être à l'origine d'une détresse psychologique, notamment parce qu'elles s'accompagnent souvent d'un isolement social et qu'elles entraînent une mauvaise estime de soi. Inversement, les cas les plus sévères de détressepsychologique pourraient être à l'origine de difficultés sociales, notamment de problèmes d'insertion par le travail. Cette relation à double sens entre état de santé mentale et situation sociale devrait impliquer une collaboration entre les acteurs, du soin et du social, qui sont en contact avec ces jeunes (HCSP, 2000).

    Plusieurs signes, facilement repérables, sont indicateurs de la détresse psychologique chez toutes les couches sociales.

    Signes de détresse psychologique

    Les signes de la détresse psychologique sont de quatre ordres : physique, cognitif, émotif et comportemental. Pour être significatives, ces manifestations doivent correspondre à un changement dans les habitudes et le comportement.

    Signes physiques

    Il s'agit plus précisément de fatigue, nervosité, maux de dos ou de tête, sensation de lourdeur dans la poitrine ou l'estomac, accélération des battements du coeur, tensions musculaires, insomnie.

    Signes cognitifs

    On a : difficultés à prendre des décisions, distraction (faire des oublis, avoir des problèmes de concentration et d'attention), pessimisme (envisager l'avenir, son futur, de façon très négative), cauchemars, méfiance.

    Signes émotifs

    On peut citer : irritabilité, anxiété, dépression, colère et excitabilité. Signes comportementaux

    Il s'agit de : disputes, agressivité, sautes d'humeur, isolement, silence, attitudes rigides, passivité, abus de café, d'alcool, de drogues ou surconsommation de médicaments.

    Suite aux nombreuses recherches effectuées, il est convient inéluctablement de préciser que la détresse psychologique s'articule très souvent autour d'un tableau clinique fait d'anxiété et de dépression.

    2.1.2.3.1. AnxiétéL'anxiété n'est pas un phénomène pathologique en soi, et elle

    s'inscritdans le registre émotionnel humain normal. L'anxiété, liée à des stress de la vie comme les difficultés professionnelles, financières, familiales ou les maladies,est légitime et compréhensible. La limite entre le normal et le pathologique est toujours difficile à tracer, mais on peut considérer qu'il existe de véritables « maladies de l'anxiété », qui sont surtout caractérisées par la persistance dans le temps de leurs manifestations et par leur retentissement dans la vie du sujet (souffrance subjective, handicap social ou professionnel par exemple) en développant d'autres pathologies.

    2.1.2.3.1.1. Définition

    L'anxiété est un état psychologique et physiologique caractérisé par des composants somatiques, émotionnels, cognitifs, et comportementaux. En l'absence ou présence de stress psychologique, l'anxiété peut créer des sentiments de peur, d'inquiétude, de difficulté et de crainte. Lorsque l'anxiété devient excessive, elle peut être classifiée sous le terme de trouble de l'anxiété. L'intensité et le raisonnement derrière l'anxiété déterminent si c'est une réaction normale ou anormale.

    L'anxiété est définie par un sentiment d'insécurité indéfinissable, et ce terme est donc préférentiellement employé pour caractériser le versant psychologique du trouble anxieux.

    L'angoisse,plutôt réservé pour le versant somatique du trouble, est l'ensemble des sensations et des réactions somatiques (sensations de « constriction », d'oppression) qui accompagnent ordinairement l'anxiété.

    L'intensité de l'anxiété associée aux composantes somatiques disparates observées ainsi que la durée, l'objet ou la situation mis en jeu conduisent à parler de types d'anxiété suivant les classifications précises.

    2.1.2.3.1.2. Types d'anxiétéSelon la classification du Manuel Diagnostique et Statistique des

    Troubles Mentaux, 4ème édition (DSM IV), on distingue différents troubles anxieux.

    - Trouble anxieux généralisé : c'est une inquiétude quasi permanente et durable (au moins six mois), concernant divers motifs de la vie quotidienne (risque d'accident ou de maladies pour les proches ou soi-même, anticipation de problèmes financiers ou professionnels...), sans aucune possibilité de se

    « raisonner » et de contrôler ces ruminations. Elles engendrent un état de tension permanente, physique (myalgies, céphalées...) et psychique (hypervigilance, irritabilité, fatigabilité, difficultés de concentration, insomnie...), souvent à l'origine d'une demande de traitement anxiolytique.

    - Attaque de panique :encore appelée « crise d'angoisse aiguë » à début brutal, imprévisible et sans raison apparente, avec une durée le plus souvent brève. On constate : malaise intense, peur d'avoir une syncope, ou une crise cardiaque, sensation de danger imminent, peur de perdre la raison, peur de commettre un acte incontrôlé, difficultés de concentration, troubles de la mémoire, impressions de dépersonnalisation, de déréalisation, palpitations, tachycardie, gêne respiratoire, sueurs, bouffées vasomotrices, frissons, tremblements, nausées, diarrhées, spasmes, pollakiurie...

    - Trouble de panique : Il est défini par la récurrence d'attaques de panique (crises d'angoisse aiguës), dont certaines sont imprévisibles, entraînant une gêne quotidienne, des conduites d'évitement et une anxiété d'anticipation quasi permanente. Ce trouble peut lui-même évoluer vers une agoraphobie.

    - Trouble de l'adaptation : trouble transitoire qui survient en réaction à un facteur de stress identifiable venant déborder les capacités d'adaptation du sujet. Il apparaît rapidement après un événement stressant. Il y a plusieurs éléments symptomatiques : tristesse, retrait affectif, irritabilité, céphalées, myalgies, insomnie, troubles fonctionnels digestifs, respiratoires ou cardiovasculaires, difficultés de concentration et d'attention, opposition, fugue, isolement...

    - Pathologies post-traumatiques :réaction aiguë de stress et syndrome de stress post-traumatique.

    - Phobies : elles sont toutes caractérisées par une peur intense, et perçue commeexcessive par le patient, d'objets ou de situations non réellementdangereuses.

    - Trouble obsessionnel compulsif :il correspond à des pensées irrépressibles et/ou à des actes que le sujetse sent contraint d'effectuer sous la forme de rituels tout en en admettant le caractère absurde. L'anxiétésurvient lorsque le patient tente de résister à ces pensées ou à cesrituels.

    De façon générale, les troubles anxieux ne sont pas exempts des facteurs de risque qui peuvent soit déclencher ou favoriser leur apparition soit maintenir leur évolution.

    2.1.2.3.1.3. Facteurs de risque des troubles anxieux

    Il existe de nombreux facteurs pouvant contribuer au développement des troubles liés à l'anxiété.

    L'environnement d'une personne peut jouer un grand rôle dans le développement de l'anxiété. Les problèmes financiers, les conflits familiaux, des parents trop stricts, des parents eux-mêmes anxieux et le manque de soutien sont autant de raisons qui peuvent conduire au stress et à l'anxiété chronique.

    Les traits de personnalité ont une influence sur la façon de réagir au stress et sur les conséquences du stress. Les gens atteints de troubles liés au

    stress perçoivent souvent le monde qui les entoure comme un endroit menaçant et ont l'impression de ne pas pouvoir faire face à leur environnement. Cette perspective pessimiste peut conduire à un manque de confiance en soi et à une faible capacité à affronter les événements.

    Certaines études montrent que des déséquilibres dans les neurotransmetteurs du cerveau tels que la sérotonine ou l'épinéphrine peuvent contribuer à l'émergence de problèmes liés au stress. Des anomalies dans l'hormone du stress appelée cortisol peuvent aussi être détectées. De nombreuses médications peuvent être prescrites pour réajuster ces déséquilibres.

    Les troubles anxieux ont tendance à se retrouver de génération en génération. Les gens atteints d'anxiété ont souvent des antécédents familiaux de problèmes liés à l'humeur ou à l'anxiété. Même les problèmes d'anxiété sont souvent liés à l'environnement, les chercheurs pensent aussi qu'il existe des facteurs génétiques dans l'apparition de l'anxiété. Cela peut être par exemple une vulnérabilité biologique face au stress.

    Un trouble de l'anxiété et du stress peut se développer suite à un événement traumatisant comme un accident de voiture ou un divorce. L'anxiété peut aussi remonter à l'enfance à cause d'un traumatisme particulièrement fort ayant laissé des traces et des prédispositions à l'angoisse.

    De temps à autre, la détresse psychologique rend compte d'un état plus abattant, plus accablant et plus déstabilisant que dans le cas de l'anxiété. Il s'agit manifestement de la dépression.

    2.1.2.3.2. Dépression

    Le terme dépression provient du latin « depressio », qui veut dire enfoncement. C'est autour du XIXe siècle que le terme est apparu dans son usage psychologique. Le terme dépression recouvre au moins trois significations. Il peut se rapporter à un symptôme, un syndrome ou une entité

    nosologique qui se manifeste par une perte durable de l'élan vital (lassitude, dépréciation de soi, pessimisme).

    2.1.2.3.2.1. Définition élargie

    La dépression caractérise essentiellement un état de perte de motivation ou d'élan vital chez un individu, associé ou non à différents symptômes. C'est une véritable maladie qui se caractérise notamment par une grande tristesse, un sentiment de désespoir et l'impression de ne pas avoir de valeur en tant qu'individu.Les symptômes les plus caractéristiques sont une perte d'espoir, de l'envie, d'estime de soi. D'autres signes peuvent survenir, tels que l'angoisse, la fatigue, la tristesse, des pensées négatives, des idées noires, des intentions suicidaires.

    Pour Sillamy (1983), la dépression est un état mental, morbide plus ou moins durable, caractérisé par une diminution du tonus musculaire et psychique.

    La dépression, parfois appelée dépression unipolaire, est un trouble mental courant se caractérisant par une tristesse de l'humeur, une perte d'intérêt pour toute activité et une baisse d'énergie. Elle se distingue des changements de l'humeur qui font normalement partie de la vie par son degré de gravité, ses symptômes et la durée des troubles. Toutefois, sa description clinique pose un problème de précision face à la variabilité théorique et culturelle.

    2.1.2.3.2.2. Description clinique

    La Classification Internationale des Maladies, 10ème révision(CIM-10) décrit trois symptômes typiques de la dépression, la déprime, l'anhédonieet une forte baisse d'énergie (élan vital). Deux de ces trois symptômes doivent être présents pour conclure à une dépression majeure.

    D'après le Manuel Diagnostique et Statistique des Troubles Mentaux, 4ème édition, Texte Révisé (DSM-IV-TR), il existe deux symptômes de

    dépression : humeur dépressive et perte d'intérêt ou de plaisirdont au moins un de ces deux symptômes doit être présent pour conclure à une dépression majeure.

    Le terme « épisode dépressif majeur » proposé par le Manuel Diagnostique et Statistique des Troubles Mentaux, 4ème édition (DSM-IV), signifie en fait « dépression caractérisée ». Bien qu'ils ne fassent pas l'unanimité, les critères américains du Manuel Diagnostique et Statistique des Troubles Mentaux, 4ème édition, Texte Révisé du trouble dépressif majeur sont :

    - Humeur dépressive présente pratiquement toute la journée, presque tous les jours, signalée par le sujet ou observée par les autres. Eventuellement irritabilité chez l'enfant et l'adolescent ;

    - Diminution marquée de l'intérêt ou du plaisir pour toutes ou presque toutes les activités pratiquement toute la journée, presque tous les jours ;

    - Perte ou gain de poids significatif en l'absence de régime ou diminution ou augmentation de l'appétit presque tous les jours. Chez l'enfant, prendre en compte l'absence de l'augmentation de poids attendue ;

    - Insomnie ou hypersomnie presque tous les jours ;

    - Agitation ou ralentissement psychomoteur presque tous les jours ; - Fatigue ou perte d'énergie presque tous les jours ;

    - Sentiment de dévalorisation ou de culpabilité excessive ou

    inappropriée (qui peut être délirante) presque tous les jours ;

    - Diminution de l'aptitude à penser ou à se concentrer ou indécision

    presque tous les jours ;

    - Pensées de mort récurrentes (pas seulement une peur de mourir), idées suicidaires récurrentes sans plan précis ou tentative de suicide ou plan précis pour se suicider.

    Une personne dépressive doit présenter au moins 5 des 9 symptômes suivants pour une durée d'au moins deux semaines et avoir présenté un changement par rapport au fonctionnement antérieur ; au moins un des symptômes est soit une humeur dépressive, soit une perte d'intérêt ou de plaisir.

    La fluctuation des symptômes ainsi que leur nette prédominance orientent vers un afflux des formes de dépression constatées inlassablementen clinique.

    2.1.2.3.2.3. Formes de dépression

    Le Manuel Diagnostique et Statistique des Troubles Mentaux, 4ème édition, Texte Révisé reconnait d'autres classifications du trouble dépressif majeur. Il s'agit de :

    · La mélancolie est caractérisée par une perte de plaisir dans la plupart des activités, une réactivité très faible voire inexistante du plaisir, une humeur dépressive plus prononcée, réveil tôt le matin, retard psychomoteur, perte de poids excessif (ne pas confondre avec anorexie), ou culpabilité sévère.

    · La dépression atypique est caractérisée par une réactivité (anhédonie paradoxale) et positivité, gain de poids significatif ou appétit très confirmée, sommeil lourd et excessif (hypersomnie), sensation de paralysie à certaines parties du corps et haute sensibilité au rejet interpersonnel.

    · La dépression catatonique est une forme rare mais sévère de dépression majeure impliquant des troubles du comportement moteur et autres symptômes. L'individu est muet, et exhibe certains mouvements bizarres parfois dénués de sens. Les symptômes catatoniques surviennent lors d'épisodes de schizophrénie ou maniaques, ou peut être causés par un syndrome malin des neuroleptiques.


    · La dépression post-partum, est une dépression soutenue et très intense dont une femme fait l'expérience après avoir donné naissance à un enfant. La dépression post-partum possède un degré d'incident entre 10-15 % parmi les nouvelles mamans. Le Manuel Diagnostique et Statistique des Troubles Mentaux, 4ème édition, explique que, dans l'ordre de qualifier la dépression postpartum, cette dépression dure environ plus de trois mois.

    · La dépression psychotique se caractérise par des délires de culpabilité, de honte universelle, de punition, de damnation, d'appauvrissement mental, de négation d'organes.

    · Les dépressions alexithymiques ou d'involution caractérisent des difficultés dans l'expression verbale des émotions.

    · La dépression hostile ou agressive caractérise la personnalité du sujet qui semble avoir changé radicalement. Il est devenu plus agressif, plus impulsif, ses colères sont mal maitrisées, il a des violences soudaines inhabituelles. Cela viendrait du fait que le sujet ne supporte plus l'idée d'être l'objet de remarques blessantes (existantes ou supposées) à son égard.

    · Les dépressions masquées, ou hypocondriaques, se caractérisent par une absence de symptômes de l'humeur dépressive avec une prépondérance des plaintes somatiques. Elles prennent souvent l'aspect d'une douleur atypique, continue, fixée, qui reste malgré la prescription d'antidouleurs. Habituellement,le sujet est inconscient qu'il souffre moralement, c'est la raison pour laquelle il « somatise ».

    · Les dépressions anxieuses ou agitées caractérisent des sujets qui courent un risque suicidaire élevé. Contrairement aux caractéristiques courantes de la dépression, les agitations psychique et motrice sont majeures, ils sont enclins à des crises de panique.

    Il nous est apparu nécessaire, voire indispensable de préciser que cette pléthore des formes de dépression rencontrées dans la routine n'est pas exonérée des facteurs de risque.

    2.1.2.3.2.4. Facteurs de risque de la dépression

    Plusieurs facteurs sont susceptibles d'engendrer les troubles dépressifs.

    Les facteurs psychosociaux et environnementaux peuvent parfois prédisposer ou précipiter la dépression. La manifestation de symptômes dépressifs peut provenir d'une perte de repères sollicitant davantage de capacités d'adaptation. Il existe une relation entre niveau élevé de facteurs de stress et déclenchement d'une dépression.

    On sait désormais aussi qu'il n'existe pas un gène de la dépression.En revanche, le terrain génétique a une influence dans le déterminisme de ces pathologies. Chez les jumeaux monozygotes ou vrais jumeaux : lorsque l'un est atteint de dépression, la probabilité que l'autre le soit également est de 50% ; chez les jumeaux dizygotes ou faux jumeaux, cette probabilité diminue à 30%.

    Quelquefois, les facteurs toxiques jouent un rôle non négligeable dans l'apparition de la dépression. L'alcool est dépresssogène : alors que son usage ponctuel peut produire un effet de bien-être, son usage répété finit par favoriser l'émergence de symptômes dépressifs.Les signes dépressifs sont fréquents lors d'un sevrage de certains toxiques comme l'alcool, le tabac, le cannabis ou l'héroïne.

    Les facteurs somatiques peuvent aussi être à l'origine de la dépression. Chez la femme, pendant les phases prémenstruelles, en fin de grossesse ou à la ménopause ;un changement de statut hormonal peut être contemporain d'états dysphoriques.

    La dépression est une maladie à déterminisme complexe et multifactoriel. Elle peut résulter d'une addition de faits :

    - Vulnérabilité qui peut être soit innée soit acquise ;

    - Eléments de fragilisation tels que les troubles de la personnalité ou de l'adaptation ;

    - Existence d'une pathologie somatique ou psychique ;

    - Stress, rupture affective, situation sociale difficile ;

    - Rôle éventuel de toxiques.

    2.1.3. Drogues

    La consommation de drogues par l'homme afin de modifier ses fonctions psychiques, ses réactions physiologiques et ses états de conscience n'est pas récente. On désigne par drogue, tout composé chimique, biochimique ou naturel, capable d'altérer une ou plusieurs activités neuronales et/ou de perturber les communications neuronales.Selon la Santé Canada, une drogue est toute substance, autre que les aliments, qui est absorbée pour modifier la façon dont le corps ou l'esprit fonctionne. Deux attributs sont essentiels dans l'évocation du terme « drogue » : la nature des effets biologiques induits par le produit et les rapports que le consommateur entretient avec le produit.

    2.1.3.1. Etymologie et définition

    L'étymologie du terme est imprécise. Pour la plupart des ouvrages modernes, le terme « drogue » provient du terme néerlandais « droog » qui veut dire « matière sèche ».En 1752, dans le dictionnaire de Trévoux, le terme drogue est défini comme « un terme général de marchandise d'épicerie de toute sorte de nature, et surtout des pays éloignés, lesquelles servent à la médecine, aux teintures et aux artisans ». Selon ce même dictionnaire, le terme désigne aussi « des choses de peu de valeurs qu'on veut mettre en commerce ». Les drogues étaient donc des matières premières (plantes exotiques, épices, produits pharmaceutiques ou autres) mises en vente par les herboristeries et les drogueries.

    La drogue est un produit psychoactif naturel ou synthétique, utilisé par une personne en vue de modifier son état de conscience ou d'améliorer ses performances, ayant un potentiel d'usage nocif, d'abus ou de dépendance, dont l'usage peut être légal ou non (OFDT, 2001).

    On appelle drogue toute substance qui peut modifier la conscience et le comportement de l'utilisateur. En ce sens, tout médicament peut être désigné par le mot drogue. Selon l'usage qui en est fait, les drogues peuvent être employées à des fins médicales ou des fins non médicales. Seules les substances susceptibles de modifier la fonction psychique peuvent être retenues comme drogues. Ce sont les drogues psychotropes, c'est-à-dire l'ensemble des substances d'origine naturelle ou synthétique qui peuvent, par leur action sur le système nerveux central, modifier l'activité mentale, les sensations et les comportements.

    Toutes les drogues disposent des capacités à changer l'état de conscience ou à perfectionner les performances.Ces habiletés particulières des drogues nous conduisent à les classifier suivant leur origine, leur statut juridique, les facteurs de dangerosité et leur activité sur le système nerveux central.

    2.1.3.2. Classification des drogues

    Au cours du XXe siècle,plusieurs classifications des drogues ont été établies en prenant en compte leur origine, leurs effets, leur famille pharmacologique, leur activité sur le système nerveux, leur dangerosité, leurs implications sociales ou leur statut juridique. Les classifications se font sur la base de critères issus de notre « grille de lecture » du monde, et portent donc l'empreinte de notre culture et de nos valeurs.

    2.1.3.2.1. La classificationselon leur origine

    On distingue 3 types de produits en fonction de leur mode de production : > Les produits naturels

    Ces produits se trouvent immédiatement à l'état fini. Ils ne nécessitent donc aucune manipulation chimique.

    Exemples : les champignons hallucinogènes, le cannabis, le tabac, le café... > Les produits synthétiques

    Ils sont fabriqués dans un laboratoire. La molécule reproduite en laboratoire a souvent été observée préalablement dans la nature.

    Exemples : le LSD, les amphétamines, etc.

    > Les produits semi-synthétiques

    Une forme de consommation de ces produits existe à l'état naturel, mais une manipulation chimique en donne une seconde.

    Exemple : la feuille de coca devenant la cocaïne ou le crack après manipulation.

    2.1.3.2.2. La classification drogues douces - drogues dures

    La séparation drogues douces - drogues dures est la plus couramment utilisée parmi le commun des mortels et les médias.

    Le terme « drogue dure » qualifie les substances à même de provoquer une dépendance psychique et physique forte. Ce terme désigne généralement les dérivés de cocaïne et d'héroïne.

    Les drogues dites douces seraient celles qui ne seraient pas (ou peu) toxiques et qui n'induiraient pas de dépendance. Le terme « drogue douce » désigne presque exclusivement le cannabis, du fait que celui-ci induise une dépendance mentale très faible et que le risque de décès par surdose soit nul.

    2.1.3.2.3. La classification selon le régime juridique

    Les termes drogue licite et drogue illicite sont utilisés depuis la mise en place des diverses législations sur les psychotropes.

    Une drogue illicite est une drogue dont la consommation et la vente sont interdites par la loi d'un pays. Le caractère illicite de certaines drogues varie d'une législation (et donc d'un pays) à l'autre. Le cannabis, par exemple, est illicite en France et au Togo mais autorisé sous réglementation stricte à la vente et à la consommation aux Pays-Bas.

    Les « drogues licites » désignent les substances psychotropes dont la consommation et la vente ne sont pas interdites par la loi d'un pays. Par drogue licite, on désigne en général l'alcool, le tabac, le café, les médicaments psychotropes ou les solvants organiques.

    2.1.3.2.4. La classification selon la dangerositéDécrite par Roques (1998), cette classification considère les propriétés

    pharmacologiques des produits psychotropes ainsi que les problèmes et risques sanitaires et sociaux liés à la consommation de ces produits.

    Tableau 1

    Répartition des drogues selon les facteurs de dangerosité

     

    Héroïne

    Alcool

    Tabac

    Cocaïne

    Psychostimulants

    Benzodiazépines

    Cannabinoïdes

    Dépendance Physique

    Très
    forte

    Très
    forte

    Forte

    Faible

    Faible

    Moyenne

    Faible

    Dépendance

    Très

    Très

    Très

    Forte mais

    Moyenne

    Forte

    faible

    Psychique

    forte

    forte

    forte

    intermittente

     
     
     

    Neurotoxicité

    Faible

    Forte

    0

    Forte

    Forte

    0

    0

    Toxicité Générale

    Forte

    Forte

    Très
    forte

    Forte

    Forte

    Très faible

    Très faible

    Dangerosité Sociale

    Très
    forte

    Forte

    0

    Très forte

    Faible (exception possible)

    Faible (sauf conduite)

    Faible

     

    Source : Roques, B. (1998). Rapport sur la dangerosité des produits. Paris : Gouvernement Kouchner. URL.

    2.1.3.2.5. La classification par les effets

    Actuellement, la classification la plus couramment utilisée par les chercheurs se centre sur les effets queles produits ont sur le corps et le système nerveux central. Cette classification est l'apanage de l'Organisation des Nations Unies et de l'Organisation Internationale de la Prévention du Crime (O.I.P.C).Le modèle le plus courant répartit les produits en trois catégories :

    > Les dépresseurs

    Les dépresseurs génèrent une dépression du système nerveux central : les organes fonctionnent au ralenti. Les symptômes sont :

    - au niveau physique : une diminution de la tension artérielle, de la respiration, du rythme cardiaque...

    - au niveau mental : une accalmie, une relaxation, un relâchement des tensions nerveuses...

    Ce sont principalement : les opiacés et leurs dérivés (héroïne, médicaments à base d'opiacés : Codéine, Méthadone...), les benzodiazépines, le cannabis, l'alcool, le protoxyded'azote (le gaz hilarant), la kétamine, les hydrocarbures volatiles (gaz, essence, ...), etc.

    > Les stimulants

    A l'inverse des dépresseurs, les psychostimulants ont pour effet une hyperstimulation dusystème nerveux central.Les symptômes sont :

    - au niveau physique : la dilatation pupillaire et l'augmentation de la température corporelle, de la fréquence cardiaque et de la pression artérielle.

    - au niveau mental : des effets euphorisants, une sensation de compétence intellectuelle accrue, l'envie de s'extérioriser, de s'exprimer, de bouger...

    Ce sont principalement : la coca et ses dérivés (cocaïne, crack), les amphétamines, l'ecstasy, la nicotine, la caféine, les médicaments à base d'amphétamines et autresproduits dopants, etc.

    > Les perturbateursou les hallucinogènes

    Leur action est compliquée à définir car il n'y a pas de signes physiques de la perturbation. L'effet est plutôt d'ordre mental, pouvant aller de l'hallucination jusqu'au délire.L'hallucination consiste en la modification des perceptions sensorielles (auditives, visuelles,tactiles, gustatives, olfactives).

    Ce sont principalement : le LSD, laphencyclidine, les champignons psilocybes, la mescaline, l'ecstasy, le cannabis, le peyotl, la kétamine, l'alcool, le poppers, le protoxyded'azote (le gaz hilarant), les hydrocarbures volatiles (gaz, essence, ...), etc.

    Qu'il s'agisse des dépresseurs, des stimulants ou des perturbateurs ou qu'il s'agisse des produits naturels, synthétiques ou semi-synthétiques, leurs effets sur le système nerveux central sont spécifiquement bien déterminés et toutes ces drogues empruntent le même circuit.

    2.1.3.3. L'action des drogues sur le cerveau

    2.1.3.3.1. La dopamine et le circuit de la récompense

    Les drogues qui agissent le plus fortementsur l'humeur sont les psychostimulants et les opiacés. Les psychostimulants, comme leur nom l'indique, augmentent la vigilance et diminuent la sensation de fatigue et de sommeil : c'est le cas des amphétamines et de la cocaïne. Au contraire, les opiacés, comme la morphine ou l'héroïne, ont un effet d'endormissement. Bien que ces deux groupes de produits aient des effets opposés, les recherches actuelles ont montré qu'ils possèdent en commun la propriété d'augmenter dans le cerveau la libération d'une molécule fabriquée par les neurones, la dopamine. En fait, ce ne sont pas seulement les psychostimulants et les opiacés mais aussi tous les produits qui possèdent cette propriété de faire libérer la dopamine, comme le tabac, l'alcool, l'ecstasy ou le cannabis, qui déclenchent la dépendance chez l'homme. L'intérêt de cette découverte vient de ce que la dopamine active chez l'homme un circuit appelé le « circuit de la récompense ». Il s'agit d'un ensemble de structures cérébrales qui, comme un

    baromètre, nous indiquent à chaque instant dans quel état physique et psychique nous nous trouvons. Lorsque la quantité de dopamine augmente dans ces structures, quelle qu'en soit la raison, nous ressentons du plaisir et considérons que tout va bien, même si par ailleurs notre corps souffre ou que nous sommes déprimés.

    Ainsi les drogues, par leur action biochimique, modifient la conscience que nous avons de notre environnement et de nous-mêmes. La prise répétée de drogues modifie à long terme la façon dont notre cerveau perçoit l'origine de ses satisfactions et perturbe notre recherche du plaisir.

    2.1.3.3.2. Les effets des substances sur le cerveau

    2.1.3.3.2.1. Alcool

    L'alcool est obtenu par fermentation de végétaux riches en sucre ou par distillation et entrent dans la composition des boissons alcoolisées : vin, cidre, bière, rhum et alcools distillés, vodka et whisky, et communément sodabi.

    L'alcool se lie à de nombreux récepteurs biologiques comme les récepteurs au glutamate ou au GABA. Il intervient aussi, comme certains composés de la fumée du tabac, en bloquant la dégradation de dopamine, de noradrénaline et de sérotonine.

    A court terme et lorsqu'il est consommé à des doses importantes, l'alcool provoque un état d'ivresse et peut entraîner des troubles digestifs, des nausées, des vomissements, des pertes de contrôle de soi qui peuvent conduire à des comportements de violence, à des passages à l'acte, à des agressions sexuelles, à l'homicide et même au suicide.

    2.1.3.3.2.2. Tabac

    Le tabac est une plante cultivée dans le monde entier. C'est un produit manufacturé élaboré à partir de feuilles séchées de plantes appartenant à la famille des solanacées et caractérisées par la présence de nicotine.

    La nicotine est une substance alcaloïde psychotrope contenue dans le tabac et pouvant être à l'origine d'une dépendance durable. Elle possède un effet « éveillant », anxiolytique et coupe-faim. La nicotine a longtemps été considérée comme le seul composé responsable de la dépendance au tabac. En fait, plusieurs observations indiquent que la nicotine n'est pas seule responsable de la dépendance au tabac. Des recherches récentes ont montré que la fumée du tabac contient aussi des produits qui bloquent la dégradation de neuromédiateurs comme la dopamine, la sérotonine et la noradrénaline. La dépendance au tabac serait donc due à un effet synergique entre le blocage de la dégradation de ces neuromédiateurs et l'action de la nicotine qui agit en imitant l'action d'un neuromédiateur naturel, l'acétylcholine qui se lie aux récepteurs nicotiniques.

    2.1.3.3.2.3. Cannabis

    Le cannabis est une plante. Le principe actif du cannabis responsable des effets psychoactifs est le THC (tétrahydrocannabinol), inscrit sur la liste des stupéfiants. Par l'intermédiaire du tétrahydrocannabinol, le cannabis entraîne une faible libération de dopamine selon un mécanisme encore mal compris. Les récepteurs au THC (cannabinoïdes) sont présents en forte densité dans le système limbique.

    Les consommateurs recherchent un état de détente, de bien-être et une modification des perceptions. Mais les effets recherchés ne sont pas toujours obtenus. Les effets de la consommation de cannabis sont variables : légère euphorie accompagnée d'un sentiment d'apaisement, légère somnolence... Mais elle peut entraîner aussi parfois un malaise, une intoxication aigüe qui peut se traduire par des tremblements, des vomissements, une impression de confusion, d'étouffement, une angoisse très forte.

    2.1.3.3.2.4. Cocaïne

    La cocaïne se présente généralement sous la forme d'une fine poudre blanche, cristalline et sans odeur. Elle est extraite des feuilles de cocaïer.

    La cocaïne agit en empêchant la recapture de la dopamine, de la noradrénaline et de la sérotonine au niveau des synapses. Ce faisant, elle augmente la présence et donc l'effet de la dopamine, notamment au niveau du cerveau des émotions (système limbique).

    L'usage de cocaïne provoque une euphorie immédiate, un sentiment de toute-puissance intellectuelle et physique et une indifférence à la douleur et à la fatigue. Ces effets laissent place ensuite à un état dépressif et à une anxiété que certains apaisent par une prise d'héroïne ou de médicaments psychoactifs. La prise de cocaïne entraine une augmentation de l'activité psychique et, par conséquent, des insomnies, des pertes de mémoire et des phases d'excitation. Une autre caractéristique de la cocaïne est de lever les inhibitions, ce qui peut conduire à des actes de violence, des agressions sexuelles, des dépenses compulsives, etc.

    2.1.3.3.2.5. Héroïne

    L'héroïne est un opiacé puissant, obtenu par synthèse à partir de la morphine, extraite du pavot. L'héroïne se présente sous la forme d'une poudre ou de granulés à écraser.

    L'héroïne est transformée dans le cerveau en morphine. C'est en se liant sur des récepteurs situés sur des neurones à GABA (un neuromédiateur inhibiteur) que la morphine augmente la libération de dopamine. Lorsqu'ils sont stimulés par la morphine, ces récepteurs, dont le rôle naturel est de recevoir des endorphines, bloquent la libération de GABA et activent donc les neurones à dopamine.

    L'héroïne provoque très rapidement l'apaisement, l'euphorie et une sensation d'extase. Cet effet immédiat de plaisir intense est suivi d'une sensation de somnolence, accompagnée parfois de nausées, de vertiges et d'un

    ralentissement du rythme cardiaque. L'héroïne agit ponctuellement comme anxiolytique puissant et comme antidépresseur.

    2.1.3.4. Usage simple, usage nocif et dépendances

    2.1.3.4.1. Usage simple

    L'usage simple est une consommation de substances psychoactives qui n'entraîne ni complications pour la santé, ni troubles du comportement ayant des conséquences nocives pour soi ou pour autrui. Il en est ainsi chez les adolescents et les jeunes qui essaient les drogues illicites par curiosité, ou qui consomment avec les autres par effet d'entraînement. Beaucoup en resteront à une unique expérience ou n'auront qu'une consommation occasionnelle en petite quantité.Le passage à des consommations de plus en plus régulières ou à des produits de plus en plus dangereux ne se produit pas de façon axiomatique. Il varie selon le potentiel addictif de chacune des substances et la vulnérabilité des individus due à leur contexte de vie, leur histoire personnelle et l'existence ou non de troubles psychologiques.

    2.1.3.4.2. Usage nocif

    L'usage nocif est une consommation susceptible de provoquer des dommages physiques, affectifs, psychologiques ou sociaux pour le consommateur et pour son environnement proche ou lointain.Cet usage n'est pas uniquement lié à la quantité consommée en une seule fois (l'abus), ni à la répétition d'une consommation modérée et contrôlée de certaines substances. Les risques tiennent à la dangerosité spécifique du produit, aux dommages pour la santé et aux conséquences sociales de la consommation.

    > Les risques pour la santé (risques sanitaires) : l'usage est nocif lorsqu'il entraîne une détérioration de l'état physique, la complication de certaines maladies, voire des décès prématurés.

    > Les risques pour la vie quotidienne (risques sociaux) : l'usage est nocif dans les situations où la consommation et ses effets peuvent

    occasionner un danger, entraîner des dommages pour soi et pour les autres.

    Plus concrètement, on parle d'usage nocif lorsque l'on peut constater :

    - l'utilisation d'une substance dans des situations où cela peut devenir dangereux : perte de vigilance (conduite automobile, d'une mobylette, d'une machine) ;

    - des infractions répétées, liées à l'usage d'une substance (violences commises sous l'effet d'un produit, accidents divers sous l'effet du produit...) ;

    - l'aggravation de problèmes personnels ou sociaux causés ou amplifiés par les effets de la substance sur les comportements (dégradation des relations familiales, difficultés financières...) ;

    - des difficultés et/ou l'incapacité à remplir ses obligations dans la vie professionnelle, à l'école, à la maison (absences répétées, mauvaises performances au travail, mauvais résultats, absentéisme scolaire, exclusion, abandon des responsabilités...) ;

    - l'incapacité à se passer du produit pendant plusieurs jours ;

    - la mise en péril de la santé et de l'équilibre d'autrui (risques que fait encourir une femme enceinte à la santé de son bébé).

    2.1.3.4.3. Dépendances

    La dépendance est, au sens phénoménologique, une conduite qui repose sur une envie répétée et irrépressible, en dépit de la motivation et des efforts du sujet pour s'y soustraire.

    La dépendance est un état pathologique où l'organisme est incapable de fonctionner physiologiquement en dehors de la consommation de la substance responsable. Le terme dépendance ne doit pas être confondu avec le terme addiction.

    2.1.3.4.3.1. Définition de l'Organisation Mondiale de la Santé

    En 1975, l'Organisation mondiale de la santé définit la dépendance comme : « un état psychique et parfois physique, résultant de l'interaction entre un organisme vivant et un produit, caractérisé par des réponses comportementales ou autres qui comportent toujours une compulsion à prendre le produit de façon régulière ou périodique pour ressentir ses effets psychiques et parfois éviter l'inconfort de son absence (sevrage). La tolérance peut être présente ou non ».

    2.1.3.4.3.2. Dépendance selon le Manuel Diagnostique et Statistique des Troubles Mentaux, 4ème édition

    Le Manuel Diagnostique et Statistique des Troubles Mentaux, 4ème édition, présente l'addiction comme un mode d'utilisation inapproprié d'un produit entraînant des signes physiques et psychiques. Elle se manifeste par l'apparition d'au moins trois des signes ci-après sur une période d'un an.

    · une tolérance (ou accoutumance) qui se traduit soit par une augmentation des doses pour un effet similaire, soit par un effet nettement diminué si les doses sont maintenues à leur état initial ;

    · un syndrome de sevrage en cas d'arrêt ou une prise du produit pour éviter un syndrome de sevrage ;

    · une incapacité à gérer sa propre consommation, l'usager consomme plus longtemps ou plus qu'il ne le voulait ;

    · des efforts infructueux pour contrôler la consommation ;

    · un temps de plus en plus important est consacré à la recherche du produit ;

    · les activités sociales, culturelles ou de loisir sont abandonnées en raison de l'importance que prend le produit dans la vie quotidienne ;

    · une poursuite de la consommation malgré la conscience des problèmes qu'elle engendre.

    Tolérance et sevrage constituent la dépendance physique, et ne recouvrent que deux critères sur 7. Il est donc possible d'être dépendant au sens du Manuel Diagnostique et Statistique des Troubles Mentaux sans avoir développé de tolérance physique.

    2.1.3.4.3.3. Dépendance selon la Classification Internationale des Maladies, 10ème révision

    La Classification Internationale des Maladies, 10ème révision présente la toxicomanie comme la manifestation d'au moins trois des signes ci-après sur une période d'un an et ayant persisté au moins un mois ou étant survenus de manière répétée.

    · un désir compulsif de consommer le produit ;

    · des difficultés à contrôler la consommation ;

    · l'apparition d'un syndrome de sevrage en cas d'arrêt ou de diminution des doses ou une prise du produit pour éviter un syndrome de sevrage ;

    · une tolérance aux effets (augmentation des doses pour obtenir un effet similaire) ;

    · un désintérêt global pour tout ce qui ne concerne pas le produit ou sa recherche ;

    · une poursuite de la consommation malgré la conscience des problèmes qu'elle engendre ;

    2.1.3.4.3.4. Types de dépendances

    On distingue deux types de dépendances :

    > Dépendance physique

    La dépendance physique est l'état où l'organisme assimile à son propre fonctionnement la présence d'un produit développant des troubles physiques parfois graves en cas de manque (non-présence du produit dans l'organisme), l'ensemble de ces troubles constituant ce qu'on appelle le syndrome de sevrage.La dépendance physique résulte des mécanismes d'adaptation de

    l'organisme à une consommation prolongée et peut s'accompagner d'une accoutumance, c'est-à-dire la nécessité d'augmenter les doses pour éprouver un même effet. La dépendance physique se traduit par des troubles organiques dès que la drogue cesse d'être consommée : c'est l'état de manque, caractérisé par des vomissements, des crampes, une angoisse intense, etc.

    L'intensité des symptômes diffère selon les substances, l'individu et les habitudes de consommation. L'explication médicale de ce phénomène parle du temps requis (généralement de 7 à 10 jours) par l'organisme pour rétablir l'équilibre suite au dysfonctionnement de certaines neurones.

    > Dépendance psychique

    La dépendance psychique qui se subdivise en deux sous-groupes : - La dépendance psychologique

    La dépendance psychologique est le désir insistant et persistant de consommer qui peut parfois se traduire par des manifestations psychosomatiques. La dépendance psychologique est bien plus liée aux caractéristiques des individus (habitudes, états affectifs, styles de vie) qu'au produit lui-même. La dépendance psychologique s'inscrit dans un processus à caractère compulsif afin d'amener le consommateur à se sentir bien ou à mieux s'adapter à la réalité. C'est un mécanisme d'adaptation coûteux, voire destructeur.

    - La dépendance comportementale ou sociale

    La dépendance comportementale correspond à des stimulations générées par les habitudes ou l'environnement, facteur de rechute. Elle correspond également aux modes de vie du toxicomane. Elle dépend de la pression sociale et conviviale.Le produit est en effet associé à des circonstances, à des personnes et à des lieux qui suscitent l'envie de le prendre.

    2.1.3.4.3.5. Syndrome de sevrage

    On appelle syndrome de sevrage un ensemble de symptômes provoqués par l'arrêt brusque de consommation d'une substance psychotrope. Il varie en forme et en intensité non seulement selon les substances et les doses consommées, mais aussi selon le sujet et le contexte socioculturel où il se trouve (prison, hôpital, domicile).

    On parle de sevrage lorsque l'arrêt ou la diminution de la consommation d'une substance amène une modification comportementale inadaptée avec des répercussions physiologiques et cognitives.

    2.1.3.5. Addictions aux drogues

    L'étymologie du terme « addiction » dérive du latin « addictus » qui désignait la contrainte par corps. C'est en fait un vieux mot français, revenu dans sa pleine acception par le monde Anglo-Saxon : « lier une personne à une chose ou à quelque chose ». La notion de lien central se trouve dans le mot dépendance. La clé de cette dernière sera à chercher dans la source de ce sentiment de dette dans le vécu du sujet.

    L'état d'addiction désigne un ensemble de phénomènes adaptatifs développés autour de la consommation répétée d'une ou plusieurs substances psychoactives et caractérisés par leur extrême robustesse dans le temps (évolution chronique et récidivante) ainsi que par l'induction de conséquences néfastes pour l'individu.

    Goodman (1990) propose une définition conforme aux critères du Manuel Diagnostique et Statistique des Troubles Mentaux, 4ème Edition :

    · Impossibilité de résister aux impulsions à réaliser ce type de comportement ;

    · Sensation croissante de tension précédant immédiatement le début du comportement ;


    · Plaisir ou soulagement pendant sa durée ;

    · Sensation de perte de contrôle pendant le comportement ;

    · Présence d'au moins cinq des neuf critères suivants :

    - préoccupation fréquente au sujet du comportement ou de sa préparation,

    - intensité et durée des épisodes plus importantes que souhaitées à l'origine, - tentatives répétées pour réduire, contrôler ou abandonner le comportement,

    - temps important consacré à préparer les épisodes, à les entreprendre, ou à s'en remettre,

    - survenue fréquente des épisodes lorsque le sujet doit accomplir des obligations professionnelles, scolaires ou universitaires, familiales ou sociales,

    - activités sociales, professionnelles ou récréatives majeures sacrifiées du fait du comportement,

    - perpétuation du comportement bien que le sujet sache qu'il cause ou aggrave un problème persistant ou récurrent d'ordre social, financier, psychologique ou physique,

    - tolérance marquée : besoin d'augmenter l'intensité ou la fréquence pour obtenir l'effet désiré, ou diminution de l'effet procuré par un comportement de même intensité,

    - agitation ou irritabilité en cas d'impossibilité de s'adonner au comportement.

    2.1.3.6. Toxicomanie

    La toxicomanie est une appétence à absorber de façon régulière et importante une substance susceptible d'engendrer un état de dépendance physique et psychique.

    Olievenstein(1978) pensait que : « est toxicomane, quiconque, à partir d'un produit de base, fait l'escalade vers d'autres produits et l'utilise

    quotidiennement ou quasi quotidiennement ».C'est une définition descriptive qui oriente vers la notion de polyconsommation qui fait parfois de ce toxicomane un polytoxicomane.

    Aujourd'hui, les experts de l'Organisation Mondiale de la Santé préconisent une nouvelle terminologie plus objective qu'est la pharmacodépendance compte tenu de la diversité des produits consommés et des degrés de dépendance induits. Elle signifie une instauration d'une dépendance psychique et/ou physique à la substance, induisant des effets nocifs pour l'individu et la collectivité.

    2.2. Cadre théorique : la théorie de l'assuétude de Stanton

    La théorie de l'assuétude ou « dépendance » élaborée par Stanton (1982),repose sur l'interrelation entre les facteurs physiques, psychologiques et sociaux de la personne et le rôle que la substance (ou le comportement) occupe dans la vie de celle-ci.

    2.2.1. La théorie de l'assuétude de Stanton (1982) :le cycle de l'assuétude

    Les drogues ont toutes en commun l'effet d'éliminer l'angoisse et de faire oublier les ennuis de toutes sortes et la douleur chez l'individu. C'est pourquoi certaines personnes les consomment régulièrement pour tenter de rendre permanent ce côté de la drogue. Par contre, lorsque les consommateurs recherchent cet effet à long terme, ils entrent dans ce qui est appelé le cycle de l'assuétude. En consommant de la drogue pour éviter de faire face à la réalité et ce qu'elle comporte, les personnes en arrivent à un point où leurs problèmes ne peuvent plus se régler parce qu'elles les ont évités, c'est cela qui créé de la peur et de l'angoisse. Elles se retournent donc encore vers la drogue pour oublier ces problèmes qui empirent de jour en jour, tout comme leur consommation. Ces personnes en arrivent à un point où leur consommation est le point central de leur vie parce qu'elles ne trouvent plus aucune

    satisfaction dans leur vie. Elles essaient de retrouver cette satisfaction dans les psychotropes qu'elles consomment, si bien que les psychotropes consommés deviennent leur seule satisfaction. Les personnes, graduellement, perdent l'envie de faire des choses pourtant aimées auparavant pour se consacrer à leur consommation, qui occupe le temps, structure la vie et procure un rituel rassurant, tout en donnant une certaine identité aux individus. Quatre éléments de base permettent de reconnaître une personne engagée dans le cycle de l'assuétude :

    - L'assuétude est un continuum, c'est-à-dire qu'il est un cercle vicieux,
    qui recommence sans arrêt et qui n'a pas de fin sans intervention.

    - L'assuétude détourne la personne de tous ses autres centres d'intérêt, ce qui veut dire que l'usage des drogues devient omniprésent, enéliminant progressivement tous les autres centres d'intérêt de la personne.

    - L'assuétude n'est pas une expérience agréable, la personne utilise des psychotropes presque uniquement dans le but de soulager sa souffrance et qu'il n'y a plus le plaisir lié à la consommation, comme au début.

    - L'assuétude est l'incapacité de choisir de ne pas faire quelque chose, c'est-à-dire que la personne a placé les psychotropes au centre de sa vie et qu'elle ne vit que pour cela. Les substances la dominent totalement et la personne n'est plus maître de sa vie.

    Figure1 : Le cercle vicieux de l'assuétude

    L'individu qui au départ possède des antécédents personnels, vit donc dans un contexte socio-économique défini. Tout au long de sa vie, il est susceptible de se trouver dans les situations favorables ou défavorables qui engendrent des émotions. Les émotions de l'individu peuvent lui donner du plaisir ou du déplaisir et elles peuvent créer de l'angoisse, et un sentiment d'impuissance faisant en sorte qu'il se sente dépassé. L'individu adopte alors une façon qui lui est propre de fonctionner et de rechercher des solutions pour apaiser la souffrance engendrée par ces émotions négatives. Il recherche ces solutions en fonction de sa compréhension du problème. Deux possibilités s'offrent à lui : il peut choisir des solutions adaptées ou des exutoires.

    Le premier choix consiste à développer ou à mettre à profit des habiletés qui permettent une réelle satisfaction et un sentiment de confiance et de compétence.

    Le second choix consiste à opter pour les exutoires. Ces exutoires apportent une satisfaction apparente, sans toutefois répondre adéquatement aux besoins réels. Elles procurent un apaisement momentané mais elles impliquent une détérioration progressive de la situation de vie, le déracinement de la personne et la perte du sentiment d'efficacité et de l'estime de soi.

    Lorsque l'effet de l'exutoire est passé, l'individu se retrouve face aux mêmes difficultés. L'angoisse et le sentiment d'être dépassé reviennent. L'individu applique les mêmes solutions pour soulager sa souffrance. Cellesci engendrent d'autres difficultés, et le problème perpétue. Un continuum s'est installé.

    L'anxiété est ainsi prise comme exemple des émotions négatives. Elle est donc la porte d'entrée dans le cycle. L'exutoire constitue le recours aux substances psychoactives qui procurent du bien-être, de l'euphorie, diminuent la peur en décrispant ainsi des échanges sociaux, réinstaurent l'impression de puissance. L'anxiété diminue. Les contraintes sont dégagées. Cela ne dure qu'un bout de temps : en effet, l'effet de cet exutoire diminue et les difficultés réapparaissent. C'est le retour de la tension qui engendre à nouveau des émotions négatives qu'on fuyait au départ. Et comme les substances psychoactives constituent les voies qui soulagent rapidement, on en fait encore recours. Et ainsi recommence le cercle vicieux.

    L'assuétude possède des caractéristiques particulières bien déterminées. Elle est l'incapacité de choisir ou de ne pas choisir de faire quelque chose. C'est aussi le désir de fuir la réalité ou le désir de simplification et de facilité. L'assuétude amène l'individu à rechercher la solution adéquate à son angoisse à l'extérieur de soi. Elle créé le besoin d'avoir une satisfaction immédiate. D'après certains chercheurs, c'est à la fois le sentiment d'être incapable d'affronter sa vie et un besoin de sécurité. C'est aussi une tendance à être dépendant et passif. L'assuétude suscite chez l'individu un besoin de pouvoir sur les autres.

    2.2.2. Synthèse théorique

    La théorie de l'assuétude de Stanton (1982) stipule que l'individu consomme de la drogue pour éviter de faire face à la réalité désagréable parce que toutes les drogues ont en commun l'effet d'éliminer les ennuis, la douleur et l'angoisse.

    Face à la souffrance engendrée par les émotions négatives résultant des situations quotidiennes, l'individu recherche des solutions en fonction de sa tolérance. Deux éventualités se présentent à lui : solutions adéquates ou exutoires.

    - Solutions adéquates consistent à développer des sentiments de confiance et compétence et des habiletés pour une authentique satisfaction, bref à être résilient ;

    - Exutoires consistent à recourir aux psychotropes qui apportent une satisfaction superficielle et momentanée. Lorsque l'effet des exutoires devient caduc, l'individu se retrouve face aux mêmes difficultés. Pour apaiser sa souffrance, il opte pour les mêmes exutoires et le problème se pérennise.

    2.3. Etat de la question

    Beaucoup de travaux ont porté sur les drogues mais peu se sont réellement intéressés aux facteurs intervenant de façon essentielle dans la genèse des conduites de consommation de drogues.

    Nous avons organisé notre revue des travaux autour de deux axes principaux : l'axe des travaux relatifs aux événements de vie vécus et l'axe des travaux relatifs aux consommations de drogues.

    2.3.1. Axe des travaux relatifs aux événements de vie

    L'hypothèse d'un lien entre les stimuli issus de l'environnement et le phénomène de la maladie a été formulée depuis la préhistoire. Cependant depuis l'époque contemporaine, plusieurs études ont été élaborées dans le but

    de préciser principalement cette relation constatée entre les événements de vie malheureux et les diverses incommodités.

    Séville(1977) montre, dans une étude longitudinale de trois ans sur 132 patients, non seulement que les épisodes de psoriasis sont liés à des événements de vie, mais que les rechutes sont d'autant moins fréquentes que le stress lié à ces événements est identifié par les malades.

    Il est sans doute plus surprenant de constater que la crise d'appendicite peut survenir aussi à la suite des événements de vie significativement vécus par certains patients. C'est dans cette optique que l'étude de Creed a été accomplie en 1981.

    L'étude rétrospective (Creed, 1981) a apporté des éléments intéressants sur la liaison entre stress et crise d'appendicite. Malgré les signes cliniques évidents qui avaient conduit à l'intervention, les chirurgiens ont trouvé chez 50% des patients un appendice présentant une faible réaction inflammatoire, contrairement à ce qui était trouvé chez les autres patients. Avec la méthodologie de Brown et Harris (1978) et s'intéressant aux événements vécus par tous les opérés dans les treize semaines précédant les premières douleurs abdominales,Creedconstate que les sujets ayant les appendicites typiquement connues au moment de l'intervention, avaient expérimenté des événements sévères, au cours de la période explorée, contrairement aux autres opérés dont les événements étaient comparables à ceux trouvés dans un groupe témoin. Les types d'événements trouvés dans le premier groupe, avaient une connotation très sévère. Contrairement aux attentes, les malades dont l'appendice présentait une faible réaction inflammatoire avaient tendance à ressentir, après l'intervention, un plus grand nombre de symptômes physiques banaux, se rétablissaient moins vite et avaient été plus nombreux à présenter des symptômes d'ordre psychiatrique au moment et après l'intervention, que les autres.

    Depuis quelques années, le rôle déclencheur éventuel d'événements de vie éprouvants dans les maladies auto-immunes a été l'objet de certaines études.

    La littérature sur les stress des examens est également très fournie. On peut rappeler par exemple le travail de Kiecolt-Glaser et al. (1984) chez des étudiants en médecine en période d'examen. Les auteurs avaient constaté une baisse du nombre relatif de lymphocytes (sur le nombre total de globules blancs), une diminution relative des lymphocytes T, sans modification du rapport T "helper" sur T suppresseurs (CD4/CD8), une atténuation des réponses aux mitogènes, enfin une diminution de l'activité des cellules "naturel killer". Cette dernière était d'autant plus basse que les étudiants avaient subi, avant l'investigation, des changements vitaux plus intenses ou souffraient d'un isolement social plus accusé.

    Toujours dans la même dynamique, une récente recherche a été effectuée par Morell-Dubois en 2006. L'objectif de cette recherche (MorellDubois, 2006) était d'étudier les événements de vie stressants chez les patients présentant une maladie auto-immune en comparaison avec une population de témoins sains, et de rechercher un lien potentiel entre ces événements de vie et le premier symptôme ou l'aggravation de la maladie. L'étude épidémiologique clinique descriptive comportait un entretien avec le patient, un recueil de l'histoire clinique dans le dossier des patients, les événements de vie étant replacés secondairement dans l'histoire clinique, à l'aveugle du patient. L'entretien est semi-structuré avec 2 échelles d'évaluation : l'inventaire d'événement de vie de Paykel (1997) qui est une échelle de recueil et d'évaluation d'événements de vie validée sur le plan international, et le Mini International Neuropsychiatric Interview (Pinninti, Madison, Musser &Rissmiller, 2003) qui permet aux personnes « non initiées » d'avoir une première approche diagnostique psychiatrique.Soixantedix-sept patients porteurs de maladie auto-immune et trente et un témoins

    sains, appareillés en sexe et en âge ont été inclus. Morell-Dubois a retrouvé chez 71,43 % des patients, des événements de vie stressants survenant 1 à 10 mois avant les premiers signes ou l'aggravation sévère d'une maladie auto-immune (délai inférieur à 6 mois chez 89 % des patients). Chez les témoins sains, l'auteur n'a retrouvé qu'un pourcentage d'événements de vie stressants de 32,26% dans les 2 ans avant l'entretien. La comparaison par un test de Chi 2 a fait apparaître une différence significative à un niveau élevé : p = 0.0002.Ces résultats permettent de conclure que les événements de vie stressants pouvaient donc s'intégrer dans les mécanismes multifactoriels physiopathologiques des maladies auto-immunes au même titre que d'autres facteurs de risque (infections virales, vaccinations....), ou constituer un facteur précipitant ou déclenchant sur un terrain prédisposé.

    L'influence des événements de vie traumatiques dans les maladies auto-immunes a été inéluctablement prouvée. Cependant, certains chercheurs pensent que c'est plutôt la délinquance juvénile qui est la conséquence immédiate des événements de vie stressants vécus.

    Djassoa(1990) a travaillé sur le phénomène de la marginalité juvénile à Lomé. Il aborde l'importante question des conséquences à long terme de perturbations de l'attachement chez les jeunes. Il illustre, l'insécurité affective que connaissent les jeunes qui ont subi des carences précoces.

    En effet, il parvient à la conclusion selon laquelle toute perturbation du milieu familial n'est pas la cause directe ni nécessaire de la délinquance juvénile. C'est le bouleversement psychique qu'il est susceptible d'engendrer chez le jeune qui rend compte de la marginalité. Ainsi à partir de l'analyse de contenu d'un échantillon de dossiers de 20 mineurs au Centre d'Observation et de Réinsertion Sociale de Cacavelli à Lomé, il a isolé certains facteurs pouvant conduire à la marginalité juvénile à Lomé :

    - Les facteurs sociologiques tels que l'éclatement de la cellule familiale auxquels s'associent la désintégration de la cellule familiale traditionnelle et

    l'éveil du besoin d'argent par l'introduction de l'économie de marché, entraînant des conflits insurmontables entre la vie de famille et les activités financièrement rentables.

    - Les facteurs psychologiques : le milieu familial perturbé est vécu comme une situation d'insécurité affective. Une telle insécurité se traduit par divers processus psychologiques de manières diverses qui peuvent se combiner, s'intriquer : le sentiment d'abandon affectif, la carence d'objets identificatoires, l'angoisse de morcellement, l'intolérance à la frustration.

    - Les facteurs psychopathologiques : ils se résument à un trouble relationnel précoce qui serait de type abandonnique, et s'exprimant sous forme de carence affective.

    Tout comme les maladies auto-immunes et la délinquance juvénile, les pathologies psychosomatiques peuvent résulter de la survenue des événements de vie traumatiques.

    Sur le plan méthodologique, une étude intéressante (Adams et al., 1994)a été effectuée sur le rôle respectif des événements de vie éprouvants (stress majeurs) et des tracas quotidiens (stress mineurs) dans la sévérité et les fluctuations d'un jour à l'autre de la symptomatologie du lupus, sur une population de 41 sujets. Les auteurs ont utilisé la technique de l'agenda pour faire évaluer par les patients eux-mêmes, jour après jour, sur une durée totale de 56 jours, l'intensité de divers symptômes somatiques, le niveau de stress quotidien, mais aussi la présence d'une humeur dépressive, d'anxiété, et de sentiments de colère. Cette technique a l'avantage de pouvoir tester les deux relations de causalité, psycho-somatique et somato-psychique, en corrélant les mesures d'un type effectuées le jour j avec les mesures d'un autre type effectuées le jour j+1. Il ressort de cette étude que l'intensité moyenne des symptômes sur la période d'observation des 56 jours dépend bien plus de l'impact des stress quotidiens pendant la même période que de l'impact des événements de vie éprouvants ayant éventuellement précédé la poussée. Par

    ailleurs, la symptomatologie physique du jour j est prédite par les stress subis et par l'humeur dépressive du jour j-1, même si la plus grande partie de la variance est expliquée par l'intensité des symptômes physiques de la veille. Enfin, les auteurs constatent qu'environ 1/5 de la population étudiée présente des corrélations significatives entre le stress ou les variables émotionnelles et les symptômes physiques : ce sous-groupe peut être considéré comme définissant une population de sujets répondeurs au stress, ce qui laisse entendre que dans toute affection à composante psychosomatique la part attribuable à des facteurs psycho-émotionnels est très variable d'un sujet à un autre.

    Tout autant surprenant pour l'homme de la rue que pour les médias, les troubles de l'érection peuvent s'ensuivre après la survenue des événements de vie désastreux chez certaines personnes.

    La recherche de Vincent, Bonierbale, Porto, Colson et Lançon (2004) avait pour objectif l'étude du rôle des événements récemment vécus par l'individu dans la survenue d'un trouble de l'érection. Lavulnérabilité des sujets, vis-à-vis d'une anxiété qui induit un défaut d'adaptation aux événements extérieurs, a été envisagée. L'échantillon compte un groupe de 26 patients souffrant de troubles de l'érection secondaires et un groupe de 20 témoins, correctement appariés. Le questionnaire d'événements de vie mis au point par Amiel-Lebigre (1986) a permis de lister les événements vécus durant les cinq années précédant l'installation du trouble de l'érection pour les patients et durant les cinq années précédant le jour de passation du questionnaire pour les témoins et auxquels les sujets attribuaient une note d'impact émotionnel sur une échelle de 0 à 100. Les auteurs ont également mesuré les scores d'anxiété des sujets à l'aide du State-Trait AnxietyInventory ou STAI (Spielberger, 1983). Les résultats montrent une accumulation d'événements de vie durant l'année précédant l'installation des troubles de l'érection plus importante chez les patients que chez les témoins. L'analyse

    détaillée de ce pic événementiel, montre que les événements les plus représentés sont ceux appartenant au domaine affectif et ceux représentant une perte. Les auteurs constatent également que les patients attribuèrent fréquemment un impact fort à ce type d'événement.

    Les évènements de vie sont repérés dans la hiérarchisation proposée par Rihmer (1996) comme des facteurs de risque suicidaire secondaires. En effet, en opposition aux facteurs de risque primaires (trouble psychiatrique, traits de personnalité impulsifs ou violents, antécédents personnels et familiaux de conduites suicidaires), les facteurs environnementaux ne sont pas suffisamment spécifiques du risque suicidaire, d'autant qu'ils sont largement retrouvés dans la population générale.

    Les facteurs de risque environnementaux les plus souvent retrouvés chez les sujets qui réalisent des gestes suicidaires sont : la survenue de pertes parentales précoces (dans l'enfance), l'isolement social et affectif, l'exclusion, les problèmes financiers, la perte d'emploi, le chômage, une maladie grave, la prison, les situations d'échecs d'autant qu'elles sont vécues de façon humiliante, les déceptions sentimentales, les situations de stress (professionnel, émotionnel, affectif), les disputes ou bagarres avec les amis ou proches, les fugues.

    Plusieurs études montrent par exemple que les adolescents, qui se sont suicidés, ont fait face durant l'année précédent à plus de conflits interpersonnels, de pertes et de problèmes légaux ou disciplinaires.

    On attribue souvent une valeur causale à un environnement socio-économiquedéfavorable dans l'apparition d'une conduite suicidaire. Chez les adolescents présentant des problèmes psychologiques et psychiatriques (au sens large), on retrouve plus souvent un faible niveau éducatif des parents, un faible niveau de revenus, un nombre élevé d'enfants dans la famille, une grande mobilité de résidence. Toutefois, il semble que le statut socio-économique n'exerce pas une influence directe, mais qu'il intervienne à travers la diminution des liens familiaux et sociaux à laquelle il

    est souvent associé. Tout comme la distension des liens affectifs, la perte des repères et le sentiment de relégation semblent plus pertinents que les difficultés économiques et sociales, l'isolement (peu d'amis et de confidents)dont font état les adolescents suicidants est bien plus un sentiment d'isolement qu'un isolement réel.

    La maladie Alzheimer fait partie de la liste non exhaustive des maladies auxquelles les événements de vie malheureux peuvent prédisposer.

    Le programme Alzheimer, de recherche et de données permet d'apporter un regard clinique essentiel à une compréhension globale de la maladie. Une proportion de 59 malades Alzheimer (Poillot, Menecier&Ploton, 2011) ont été comparés à 31 sujets témoins, afin de rechercher une association entre événements de vie stressants vécus et révélation clinique ultérieure d'une maladie d'Alzheimer. Un questionnaire de 11 items, relatifs à des événements de vie difficiles a été élaboré. Les témoins ont cumulé moins d'évènements de vie difficiles (Chi2=7,72 ; p <0,05) pouvant agir sur l'économie psychique. Des facteurs pathogènes apparaissent, les malades ont plus souvent été placés avant l'âge de dix ans (Chi2=5,06 ; p <0,01) et reconnaissent plus d'antécédents familiaux de nature psychiatrique (Chi2=5,06 ; p <0,05). La présence d'évènements de vie difficiles peut influencer les capacités du sujet à effectuer un travail de deuil ainsi, l'élaboration des pertes liées au vieillissement peut être rendue difficile et dépasser les capacités psychiques du sujet. Un facteur protecteur est mis en évidence : une pratique spirituelle en référence à une forme de foi et/ou d'adhésion philosophique (Chi2=5,64 ; p <0,05).

    Somme toute, beaucoup de travaux ont été effectués sur les événements de vie significatifs qui organisent la vie de tous les jours des personnes. Les hypothèses évoquées varient d'un auteur à un autre et suivant différentes écoles. Depuis les travaux de Séville (1977),Creed (1981),Kiecolt-Glaser et al. (1984),Morell-Dubois(2006),en passant par ceux de Djassoa (1990), Adams et al.(1994),jusqu'à ceux de Vincent, Bonierbale, Porto, Colson et

    Lançon (2004),Rihmer (1996),Poillot, Menecier et Ploton (2011) ; il est surprenant de constater que toutes les éventualités évoquées par ces auteurs confirment de près l'existence d'une relation entre les événements de vie malheureux et les maladies. D'aucuns évoquent comme séquelles, les maladies auto-immunes, les maladies psychosomatiques, les pathologies graves comme l'Alzheimer ou les démences. Pour d'autres, ce sont les troubles de l'érection, la délinquance juvénile ou le suicide qui sont les conséquences de ces événements de vie traumatiques.

    2.3.2. Axe des travaux relatifs aux consommations de drogues

    Du jour au lendemain, plusieurs études se construisent sur les drogues. Les tendances s'intéressent soit à leur genèse, soit à leur évolution ou soit aux complications psychiatriques que les drogues sont susceptibles de provoquer à court ou à long terme. Nous nous sommes intéressé de près aux recherches essayant de repérer les facteurs psychologiques et socioculturels intervenant de façon décisive dans le déterminisme des conduites de consommation de drogues.

    Hall et al. (1990) ont réalisé une étude prospective auprès des alcooliques. Dans leurs explications, les alcooliques ont associé leur rechute à un état de stress. Cette étude, s'intéressant également aux situations ou événements qui peuvent déclencher la rechute des alcooliques, relève la prudence avec laquelle il faut considérer les explications des toxicomanes. Cela signifie qu'il peut avoir d'autres variables intrinsèques à la personnalité du toxicomane que lui-même peut ignorer.

    Outre que l'état de stress peut conduire à la reprise des conduites alcooliques, les états émotionnels pénibles et les désaccords nés des relations interpersonnelles déclenchent aussi la rechute dans l'alcoolisme.

    Marlatt et Larimer(1990) dans leur étude initiale sur les alcooliques, ont demandé aux personnes qui avaient rechuté de décrire les situations qui avaient déclenché cette rechute, au moment du suivi. Ils ont constaté que les

    situations relevées par les alcooliques pouvaient être classées en catégories et que près des trois quart des rechutes étaient associés à trois d'entre elles : les états émotifs désagréables, la pression sociale et les conflits interpersonnels.

    Les facteurs sociaux et familiaux sont non négligeables dans le déterminisme des conduites de consommation de drogues.

    Tremblay et al. (2000) ont mis en évidence des facteurs socio-familiaux et l'influence des pairs sur la cause et la poursuite des conduites toxicomaniaques chez les toxicomanes.

    Parfois, certaines recherches incriminent manifestement les problèmes émotifs et les problèmes personnels vécus par les individus pour expliquer le retour aux consommations de drogues.

    Westermeyer et Boedicker (2000), ont montré que le retour à la consommation après une période d'abstinence tient à des pressions internes, aussi bien qu'externes : problèmes émotifs (anxiété, dépression, colère), fuite des problèmes personnels ou soulagement de la douleur, disponibilité de la drogue.

    Depuis les années 2000, les troubles de la personnalité sont identifiés comme jouant un rôle prééminent dans l'apparition des conduites de consommation de drogues.

    Franques et al. (2000) ont cherché à étayer l'hypothèse d'une relation entre abus de cannabis et personnalité dans une étude longitudinale sur un an. Cette étude qui avait pour objectif d'étudier la relation entre la consommation du cannabis et l'évolution symptomatologique d'une pathologie psychotique de début récent, a porté sur 93 patients âgés de 15 à 26 ans. Les résultats ont montré que la consommation d'importantes quantités de cannabis se retrouve chez les psychopathes. Ils concluent que la personnalité antisociale est une personnalité à haut risque pour la consommation du cannabis.

    En 2001, C'est Dulit qui s'inscrit dans cette approche selon laquelle le rôle des troubles de la personnalité dans les addictions aux drogues est prépondérant.

    Dulit (2001) a pu montrer dans une étude portant sur la consommation de substances psychoactives chez les états limites que si la toxicomanie ne faisait plus partie des symptômes de diagnostic de personnalité-limite, le cours de la maladie devenait plus favorable. Il ajoute que ces patients peuvent engendrer lors des sevrages soit des symptômes psychotiques, soit des troubles anxieux, soit des états dépressifs majeurs sur l'un des quatre pôles : cognitif, affectif, psychotique ou comportemental.

    Dans le souci de répertorier les facteurs probables d'explication des habitudes de consommation de drogues, il est apparu un élément essentiel : la prégnance des traumatismes antérieurs.

    Une étude (Nardeau& Bertrand, 2001) menée à Montréal dans le cadre d'un projet sur l'inadaptation grave et persistante chez les toxicomanes, a montré que pratiquement, les rechutes sont fréquentes et font partie intégrante du processus de rémission. Les auteurs ont ainsi pu identifier, suite aux entrevues de deux heures avec chacune de ces femmes toxicomanes, que ces rechutes sont dues aux mêmes facteurs associés que l'on retrouve dans la progression de la consommation, mais aussi au contexte qu'évoquent les situations de traumatisme dans l'enfance.

    La toxicomanie des jeunes adultes peut être la conséquence de la perturbation du climat affectif familial, qui se veut apaisant et sécurisant à travers l'amour, la sympathie, la tendresse, la solidarité, la cordialité et la bienveillance des membres de la famille.

    Sévon(2002), dans son étude sur « l'impact du climat affectif familial sur la personnalité de l'enfant : cas des toxicomanes de Lomé », a montré que l'âge actuel, le type de famille et la position occupée dans la fratrie ne sont pas des facteurs déterminants dans l'explication de l'étiologie de la toxicomanie. Cependant, il ressort que le phénomène est essentiellement masculin, que la consommation se fait en groupe et la plupart des toxicomanes le sont devenus lorsqu'ils vivaient encore avec leurs parents géniteurs. D'après les facteurs subjectifs, le désir d'attirer l'attention des

    parents constitue un facteur déterminant. Enfin, parmi les facteurs psychologiques, la disqualification du père (absence physique et / ou psychique) et la surprotection maternelle sont les facteurs prépondérants entraînant le trouble de l'organisation de la personnalité pouvant déboucher sur la dépendance à la drogue.

    Dans la poursuite des recherches et suite aux diverses expériences, certains chercheurs font prévaloir les résultats positifs, obtenus suite aux attentions, soins et services additionnels accordés aux femmes, dans l'issue favorable des traitements d'alcoolisme et de toxicomanie des femmes.

    Ashley (2003) a effectué une étude portant sur le traitement des femmes qui ont des problèmes importants d'alcoolisme et de toxicomanie.Pour ce faire, elle a examiné 38 études sur le traitement des femmes, dont 7 étaient aléatoires, et cerné plusieurs composantes du traitement qui étaient associées à des résultats positifs : garderies, services prénataux, programme pour femmes seulement, services additionnels et ateliers axés sur les femmes, soins de santé mentale, et soins de santé intégrés. Les études ont trouvé des associations de ces six composantes de l'achèvement du traitement : la durée du séjour, la diminution de la consommation d'alcool et des drogues, la réduction des symptômes touchant la santé mentale, une meilleure issue de la grossesse, l'emploi, l'état de santé auto déclaré et la réduction des risques de contracter le VIH.

    Par ailleurs, la consommation de drogues peut être considérée comme une réponse à la mauvaise estime de soi et à la détresse psychologique des jeunes adultes.

    Hattah (2007), a fait ressortir les situations et les effets tirés des substances psychoactives qui maintiennent la conduite de consommation, en dépit de la connaissance des conséquences néfastes que ces produits engendrent.Cette étude a permis de cerner la consommation de drogue comme répondant à un certain nombre de facteurs à savoir la nervosité, les soucis, la tristesse, la fatigue, la déprime, les frustrations, la difficulté à réaliser son

    rêve, l'image négative de soi, qui sont à l'origine de la consommation des drogues.

    Outre que les situations désagréables et l'image négative de soi facilitent l'apparition des conduites de consommation de drogues, les traits de personnalité sont de plus en plus primés dans le déclenchement des consommations de drogues.

    Allouky(2008) dans une étude portant sur 38 alcooliques au Centre Hospitalier Universitaire de Kara a relevé les conséquences organiques et psychologiques que peuvent entraîner l'alcoolisme. Il a trouvé que la dépendance à l'alcool conduit à des décompensations psychopathologiques (troubles anxieux, dépressifs et psychotiques). Il a également relevé que l'addiction à l'alcool est liée à des facteurs externes et internes et que les facteurs internes rendent compte de la vulnérabilité de l'individu. Il a en effet identifié les traits de personnalité associés à l'abus de l'alcool. De plus, il a identifié chez ces sujets de nombreuses complications neurologiques de l'alcoolisme chronique.

    Au total, les drogues demeurent un domaine de prédilection à la fois pour les consommateurs et pour les chercheurs, qui tentent tant bien que mal de repérer les facteurs psychologiques, sociaux et physiques intervenant dans le déclenchement des conduites de consommation de drogues. Les travaux des différents auteurs, que nous avons cités, tentent d'élucider et de justifier les consommations de drogues par des facteurs antérieurs aux habitudes de consommation et non pas comme étant à l'origine d'autres troubles ultérieurs, selon certaines littératures. Que se soient Hall et al. (1990), Marlatt et Larimer(1990), Tremblay et al. (2000), Westermeyer et Boedicker (2000), Franques et al. (2000), Dulit (2001), Nardeau et Bertrand (2001), Sévon (2002), Ashley (2003), Hattah (2007) et Allouky(2008) ; tous s'accordent pour incriminer soit les troubles de la personnalité dans ses modalités de personnalité antisociale et borderline, soit les émotions désagréables et les états de stress, soit les facteurs socio-familiaux affectifs.

    2.3.3. Synthèse des travaux

    L'étude catamnestique de Séville (1977) a montré sans doute aucun que les épisodes de psoriasis sont liés scrupuleusement aux événements de vie vécus alors que celle de Adams et al. (1994) constata plutôt la symptomatique du lupus après la survenue des événements de vie éprouvants et des tracas quotidiens.

    Par ailleurs, Creed (1981) a confirmé l'existence d'une liaison entre le stress et l'appendicite dans sa recherche.

    La mise en évidence de l'influence des événements de vie traumatiques dans les maladies auto-immunitaires a été réalisée par Morell-Dubois (2006) dans une récente étude épidémiologique clinique utilisant principalement l'entretien.

    L'étude de Djassoa (1990) s'est résumée à évaluer le bouleversement psychique que peut engendrer la perturbation du milieu familial sur certains sujets et le phénomène de marginalité juvénile qui peut en résulter. Mais, cette étude n'a pas identifié la pharmacodépendance qui peut découler de cette marginalité.

    Le suicide (Rihmer, 1996), les troubles de l'érection (Vincent, Bonierbale, Porto, Colson& Lançon, 2004) et la maladie d'Alzheimer (Poillot, Menecier&Ploton, 2011) sont les diverses incommodités évoquées, comme étant corrélées avec les événements de vie vécus significativement par les personnes.

    Les études effectuées auprès des alcooliques de Hall et al. (1990) et de Marlatt et Larimer (1990) se sont intéressées aux facteurs responsables de la rechute et se sont limitées à l'alcoolisme. Elles ont pu relever comme facteurs déclencheurs de la rechute, le stress, les états émotifs désagréables, la pression sociale et les conflits interpersonnels.

    Les travaux de Westermeyer et Boedicker (2000) ont indiqué que les problèmes émotifs traduisant la détresse psychologiquesont les facteurs avantcoureurs des conduites de consommation de drogues. Néanmoins, ces travaux

    ne relatent pas les événements auxquels ont été soumis ces sujets avant le début des consommations.

    Franques et al. (2000) ont conclu à l'issu de leur étude que la personnalité antisociale est une personnalité à haut risque pour la consommation du cannabis.

    La recherche menée par Nardeau et Bertrand (2001) chez les femmes toxicomanes met en relation les situations de traumatismes vécus dans l'enfance et la toxicomanie.

    Les études de Sévon (2002) et Hattah (2007) ont révélé respectivement l'importance du climat affectif dans la personnalité du toxicomane et les facteurs qui maintiennent la consommation des drogues notamment la nervosité, les soucis, la tristesse, les frustrations. Ces études se sont particulièrement intéressées d'une part au climat affectif familial des toxicomanes sans pour autant préciser les traumatismes liés à ce climat familial et d'autre part aux facteurs de maintien des conduites de consommation de drogues.

    D'une part, les recherches effectuées mettent en évidence la présence d'un lien les événements de vie et les maladies ; d'autre part, les facteurs psychologiques, sociaux et familiaux orientent les individus dans les habitudes de consommation de drogues.

    2.4. Synthèse et spécification du problème

    A l'issue de l'analyse des travaux, il ressort que plusieurs études ont tenté d'exposer les facteurs de rechute de la prise des drogues. Très peu d'études ont persisté sur les facteurs déclenchant la prise de drogues. Les quelques-unes effectuées ont évoqué comme facteurs : le stress, les émotions désagréables, la pression sociale, les soucis, la tristesse, les frustrations, la perturbation du climat affectif familial, les traits de personnalité et même la personnalité elle-même. Outre les consommations de drogues, les événements de vie malheureux ont fait l'objet d'une pléthore d'études. Suite à cela, il est

    apparu que les événements de vie stressants ou traumatisants contribuent à développer des pathologies diverses notamment les maladies psychosomatiques, les maladies auto-immunes, la maladie d'Alzheimer, les démences, les troubles de l'érection, la délinquance juvénile et le suicide.

    Toutefois, ces recherches n'ont pas justement mis en relation les types d'événements de vie significativement vécus au cours des 12 derniers mois ayant précédés le début de la consommation et les conduites de consommation des drogues. C'est ce qui nous a motivé à entreprendre cette étude sur la nature du lien existant entre les différents événements de vie vécus et la consommation des drogues.

    2.5. Question fondamentale de la recherche

    Les événements de vie stressants, traumatisants bref significatifs survenus au cours des 12 derniers mois ayant précédés le début de la consommation n'ont-ils pas fragilisé et favorisé chez les jeunes adultes les conduites de consommation de drogues ?

    Plus précisément, nous nous sommes posé les questions suivantes :

    - Les événements de vieconjugaux, familiaux, sociaux, sanitaires et financierssignificatifs entraînent-ilsune détresse psychologique chez les jeunes adultes ?

    - Les événements de vie conjugaux et familiauxfavorisent-ilsplus la détresse psychologique chez les jeunes adultes que les événements sociaux, sanitaires et financiers ?

    - La détresse psychologique observée chez les jeunes adultes conduitelle à la consommation des drogues ?

    2.6. Hypothèses de la recherche

    2.6.1. Hypothèse théorique

    Les événements de vie significatifs survenus au cours de la vie fragilisent les jeunes adultes et favorisent chez eux les conduites de consommation de drogues.

    2.6.2. Hypothèses de travail

    Pour répondre à ces questions fondamentales que nous nous sommes posé, nous avons élaboré des hypothèsesde travail :

    1. Les événements de vie conjugaux, familiaux, sociaux, sanitaires et financiers significatifs entraînent une détresse psychologique chez les jeunes adultes.

    2. Les événements de vie conjugauxet familiaux significatifs favorisentplus la détresse psychologiqueque les événements sociaux, sanitaires et financiers chez les jeunes adultes.

    3. La détresse psychologique observée chez les jeunes adultes conduit aux consommations de drogues.

    2.7. Objectifs de la recherche

    2.7.1. Objectif général

    L'étude des conduites de consommation de drogues chez les jeunes adultes liées aux événements de vie significatifs est une contribution à la compréhension de l'étiologie des conduites de consommation des drogues en vue d'une prise en charge psychosociale meilleure et globale.

    2.7.2. Objectifs scientifiques

    A l'issue de cette étude, nous voulons atteindre les objectifs suivants :

    - Décrire les conduites de consommation de drogues observées chez les jeunes adultes ;

    - Décrire les événements de vie significatifs survenus avant le début des conduites de consommation de drogues ;

    - Evaluer la détresse psychologique des jeunes adultes toxicomanes suite aux événements de vie significatifs vécus ;

    - Estimer l'indice derelation entre les événements de vie significatifs et la détresse psychologique observée chez les jeunes adultes toxicomanes ;

    - Identifier la corrélation entre la détresse psychologique et la consommation des drogues chez les jeunes adultes.

    2.7.3. Objectifs d'application

    Dans la pratique, nous voulons parvenir aux objectifs suivants :

    - Participer à l'amélioration et à la précision des diagnostics des conduites de consommation de drogues ;

    - Procurer aux professionnels de la santé les éléments essentiels sur les pharmacodépendants pour une meilleure prise en charge psychologique et psychosociale ;

    - Contribuer à une amélioration de la qualité de vie des patients toxicomanes ;

    - Faciliter les réinsertions sociales et professionnelles des patients toxicomanes.

    DEUXIEME PARTIE
    METHODOLOGIE

    Chapitre III : CADRE ET POPULATION DE L'ETUDE

    3.1. Description du site

    Nous avons mené notre étude au Centre Hospitalier National Spécialisé en Santé Mentale d'Aného. Ce centre est un établissement spécialisé dans la prise en charge des malades mentaux au Togo. Les malades qui y sont traités proviennent de toute l'étendue du territoire national et des pays avoisinants. Créé en 1904 et réorganisé en 1931, il est érigé en établissement autonome depuis 1996.

    3.1.1. Présentation du centre

    Le Centre Hospitalier National Spécialisé à l'origine se composait de six (06) cellules d'isolement servant d'hébergement aux malades. Le régime d'internement était rigoureux. En 1960 a été ébauchée la construction d'un pavillon de seize (16) nouvelles cellules qui ne seront fonctionnelles qu'à partir de 1964. Dans les années 1980, d'autres bâtiments verront le jour, conférant à l'établissement une capacité d'accueil de 120 lits. Jusque-là, le centre ressemblait à une maison d'arrêt. En 1995, grâce aux apports de l'Etat, le centre s'est engagé dans un vaste programme de réaménagement dans le but de rendre les soins plus efficaces et le séjour plus agréable aux patients. De 2002 jusqu'à ce jour, le centre est structuré comme suit :

    - Service administratif

    - Cinq (05) Unités Fonctionnelles

    - Unité Psychologique

    - Unité de Pharmacie

    - Unité de gestion et de dons de médicaments

    - Unité Sociale

    - Centre Médico-Psychologique (à Lomé)

    Les ressources

    Les ressources humaines

    Débuté avec 1 infirmier et 3 manoeuvres, le personnel soignant compte aujourd'hui : 1 Médecin psychiatre, 2 Psychologues de la Santé, 1 Assistant médical, 4 Infirmiers d'Etat, 3 Infirmiers auxiliaires, 1 Technicien de laboratoire, 1 Assistant social, 1 Agent de promotion sociale, 15 Aidessoignants.

    Les ressources matérielles

    Elles comprennent l'équipement d'une part et les consommables d'autre part.

    Les ressources financières

    Les caisses du centre sont alimentées par les ressources propres provenant des services vendus, de la session des médicaments essentiels et génériques et de la subvention d'exploitation de l'Etat.

    Paquet des activités

    Le centre s'occupe essentiellement de l'administration des soins curatifs aux malades mentaux à titre interne comme externe.

    3.1.2. Problèmes

    Les problèmes auxquels le centre est confronté sont essentiellement : l'insuffisance de locaux, d'équipements techniques et logistiques, et le manque de moyens pour la prise en charge des indigents stabilisés et non libérés pour cause d'abandon.

    3.2. Population

    3.2.1. Population cible

    Notre population cible est constituée de tous les patients toxicomanes du Togo.

    3.2.2. Population d'étude

    Notre population d'étude est constituée de tous les patients toxicomanes du Centre Hospitalier National Spécialisé et qui ont été hospitalisés, qui ont honoré leur rendez-vous de contrôle ou qui ont consulté durant l'année 2010.

    Les critères de sélection

    Critères d'inclusion

    Pour être sélectionné, le patient toxicomane doit être présent au Centre Hospitalier National Spécialisé et doit accepter être enquêté ou il doit être accessible à son numéro de téléphone et doit accepter être enquêté ; il doit être lucide et coopérant et doit pouvoir parler français ou éwé.

    Critères de non inclusion

    Les patients qui ont refusé toute rencontre ou qui sont restés inaccessibles au téléphone, non lucides, non coopérants et ne parlant pas ni français ni éwé n'ont pas été pris en compte dans notre échantillon.

    3.3. Echantillon d'étude

    Nous avons donc considéré tous les patients toxicomanes qui ont été hospitalisés,qui ont honoré leur rendez-vous de contrôle ou qui ont consulté au Centre Hospitalier National Spécialisé durant l'année 2010, soit 97 cas. Mais, compte tenu de nos critères de sélection, des complications psychiatriques, du manque de lucidité et de collaboration de certains patients toxicomanes, nous n'avons pu retenir que 82 cas.

    Chapitre IV : VARIABLES ET METHODES

    4.1. Variables et Indicateurs

    4.1.1. Variable indépendante

    La variable indépendante de la présente étude est : Types d'événements de vie

    Elle a pour modalités :

    Modalité 1 : Conjugaux

    Ses indicateurs sont :

    - Infidélité

    - Conflit conjugal

    - Interruption de la vie conjugale

    - Séparation, divorce - Décès du conjoint

    - Difficultés relationnelles, disputes

    - Mésentente sévère

    Modalité 2 : Familiaux

    Ses indicateurs sont :

    - Conflits relationnels

    - Séparation d'avec la famille, éloignement - Disputes entre les parents et/ou les enfants - Négligence ou défaillance des parents

    - Maladies, Handicap des parents

    - Violences familiales,Rupture familiale - Difficultés communicationnelles

    Modalité 3 : Sociaux Ses indicateurs sont :

    - Isolement, oisiveté

    - Décès d'un ami proche

    - Modification importante du statut social

    - Manque d'emploi, départ à la retraite

    - Manque d'aptitudes personnelles, difficultés à s'exprimer - Déménagement, changements de voisins

    - Absence d'aide en cas de besoin

    - Conflits avec la loi

    Modalité 4 : Sanitaires Ses indicateurs sont :

    - Accident, agression

    - Maladies et problèmes de santé en général

    - Maltraitances physiques, sexuelles, psychologiques - Baisse des capacités physiques

    Modalité 5 : Financiers

    Ses indicateurs sont :

    - Diminution significative des revenus

    - Difficultés financières pour assumer logement, alimentation, soins de santé et besoins personnels

    - Payement des impôts ou des dettes, remboursement d'un prêt

    4.1.2. Variable additionnelle

    La variable additionnelle de la présente étude est :Détresse psychologique

    Elle a pour indicateurs :

    - Fatigue, maux de tête

    - Colère, nervosité

    - Sentiment de tristesse, isolement

    - Insomnie, cauchemars

    - Désintérêt, sensation de peur,

    - Sensations soudaines de panique, soucis - Ralentissement psychomoteur

    - Autodépréciation, indifférence aux proches - Ennui, dégoût de vivre,

    4.1.3. Variable dépendante

    La variable dépendante de la présente étude est : Dépendance aux drogues (alcool, tabac, cannabis, cocaïne, héroïne)

    Elle a pour Indicateurs :

    - Consommation répétée de substances psychoactives

    - Besoin impérieux de consommer la substance

    - Tolérance vis-à-vis de la substance

    - Poursuite de la consommation de la substance malgré la connaissance de ses effets néfastes

    - Effort infructueux d'arrêter ou de réduire l'utilisation de la substance

    - Apparition de syndrome de sevrage à l'arrêt ou diminution de la consommation de la substance

    4.2. Méthodes de collecte des données

    Dans le cadre de notre étude, nous avons opté pour la méthode d'enquête parmi les méthodes de collecte des données distinguées par Mucchielli (1984). Nous avons fait recours à la méthode d'enquête pour recueillir les informations dont nous avons besoin.

    Parmi les moyens offerts par la méthode d'enquête, nous avons choisi l'entretien, le questionnaire et l'observation et nous avons élaboré un guide d'entretien, un questionnaire des événements de vie. Nous nous sommes également servi du questionnaire Drug Abuse Screening Test-20 (Skinner, 1982) et de l'échelle de détresse psychologiqueK6 de Kessler (2002).

    > Guide d'entretien

    Notre guide d'entretien est composé de 5 grandes parties. La première partie nous permet de recueillir les informations sociodémographiques de nos sujets. La deuxième partie nous permet de collecter des informations sur la nature des relations affectives, familiales et sociales avant et après la prise des drogues.La troisième partie concerne l'histoire des drogues. Il s'agit notamment des types de drogues consommées, la rencontre avec ces substances, le début de la consommation, la durée de la consommation, les modalités, les fréquences et les habitudes de consommation, les effets attendus de la consommation de ces substances et la motivation pour le sevrage. Les deux dernières parties concernent les événements de vie vécus et la détresse psychologique observée.

    > Questionnaire des événements de vie

    Plusieurs événements de vie regroupés dans 5 catégories sont énumérés

    dans un tableau. L'objectif de ce questionnaire est de repérer les
    événements de vie auxquels les sujets pourraient avoir été confronté au
    cours des 12 derniers mois ayant précédés le début des conduites de

    consommation de drogues et d'évaluer leur retentissement sur ces sujets. Ce questionnaire des événements de vie comporte 23 items auxquels les sujets doivent répondresoit par oui soit par non. A chaque fois qu'il s'agit d'une réponse positive, le sujet doit évaluer subjectivement et rétrospectivement l'impact psychologique de cet événement sur sa personnalité. Le retentissement psychologique de l'événement peut prendre trois modalités. D'abord, la premièremodalité c'est que l'événement n'a pas eu d'impact psychologique sur le sujet, donc il n'y a pas de eu retentissement. Ensuite, le retentissement peut être modéré. Et enfin, le retentissement peut être sévère.

    > Questionnaire DAST-20

    Le questionnaire Drug Abuse Screening Test-20 (Skinner, 1982) a pour but d'évaluer le niveau de dépendance aux drogues. Il est composé de 20 items auxquels les sujets doivent répondre soit par l'affirmative soit par la négative. Les points sont attribués selon les réponses données. A chaque réponse affirmative, on attribue 1 point alors que 0 point est attribué à chaque réponse négative. La somme des points obtenus au test donne un score total correspondant à un niveau de dépendance donné. Pour un score de 0 point, il n'y a pas de dépendance. Un score compris entre 1 et 5 correspond à une dépendance faible. La dépendance devient modérée si le score est compris entre 6 et 10. Si le score se situe entre 11 et 15, la dépendance est élevée mais elle devient sévère pour un score compris entre 16 et 20.

    > Echelle de détresse psychologique K6

    L'échelle de détresse psychologique K6 est une échelle construite par
    Kessler (2002) pour mesurer la détresse psychologique chez les sujets. Cette
    échelle est composée de 6 questions. L'échelledes choix de réponses aux
    questions est une échelle 0 à 4 qui se présente sous la forme suivante :0 =
    « jamais », 1 = « rarement », 2 = « parfois », 3 = « la plupart du temps, 4
    80

    =« tout le temps ».Les scores obtenus sur l'échelle de détresse psychologique K6, qui résultent de la somme des scores obtenus aux six questions, varient de 0 à 24; plus la cote est élevée, plus la détresse psychologique est prononcée. Un score de 7 ou plus à l'échelle de K6 correspond à la valeur du quintile supérieur de l'échelle et indique un niveau de détresse psychologique élevé.

    4.3. Méthodes d'analyse des données

    Pour analyser nos données, nous avons utilisé les méthodes qualitatives et les méthodes quantitatives.

    Parmi les méthodes qualitatives, nous avons utilisé l'analyse de contenu sous sa forme logico sémantique qui se veut une méthode capable d'effectuer l'exploitation totale et objective des données informationnelles. Nous nous sommes également servi du logiciel TROPES pour analyser de façon minutieuse les discours obtenus auprès des toxicomanes.

    Parmi les méthodes quantitatives, nous avons utilisé les méthodes statistiques car elles nous permettent de calculer les fréquences, les pourcentages, les indices de relation entre les variables de nos hypothèses notamment le khi deux (X2), le coefficient de contingence et l'analyse de la variance.

    Pour y parvenir, nous nous sommes servi des logiciels statistiques EpiData pour saisir nos données et SPSS pour analyser et traiter ces données.

    Le khi deux ÷2

    Le but est d'étudier la dépendance entre deux variables qualitatives. Le khi deux s'obtient par la formule :

    ( n1 - n1') 2 ( n2 - n2') 2

    ÷21 = +

    n1' n2'

    n1 = Effectifobservé

    n1'= Effectif de la norme

    n2 = Effectif de l'échantillon - Echantillon observé n2'= Effectif de l'échantillon - Effectif de la norme Il peut se calculer aussi de la façon suivante :

    ×2ddl = ? ( ni - ni') 2

    ni'

    ni = effectif observé

    ni' = effectif théorique

    ddl = degré de liberté

    Lorsque ni < 10 on utilise la correction de Yates : en remplaçant ( ni - ni')2 par (ni - ni'- 0,5)2

    ni ni'

    Nos résultats sont lus au seuil 0.05

    L'hypothèse nulle (Ho) est celle d'indépendance entre les indicateurs de deux modalités si le khi deux calculé est inférieur au khi deux lu sur la table de ce test.

    L'hypothèse alternative (Hl) qui suppose l'existence d'une liaison entre les caractères des deux modalités si le khi deux calculé est supérieur au khi deux lu sur la table.

    Le coefficient de contingence : C

    Il permet de voir si la relation est élevée ou faible entre les variables étudiées. Elle varie entre 0 et 1

    Sa formule est : C = X2

    X2 + n

    n = Total de toutes les entrées du tableau

    L'analyse de la variance à un facteur

    Le but est d'étudier la dépendance entre deux variables dont l'une est quantitative et l'autre qualitative.

    Soient J observations: zj ; j = 1 à J, d'un caractère Z.

    On notera z la moyenne de ce caractère, définie par: z = 1 Ezj

    i= 1
    J

    On notera V(Z) ou ó2 ( Z ) la variance de Z, définie par: V ( Z) = E( zj-z)2

    j= 1

    On appellera :

    Y la variable quantitative

    yik la valeur de Y pour l'observation i du groupe k.

    K le nombre de groupes

    Ik le nombre d'observations dans le groupe k.

    K

    )

    I le nombre total d'observations réalisées ( I = EIk

    k= 1

    1

    yk = Zdyik

    I k i= 1

    est la moyenne de Y dans le groupe k.

    Ik

    1

    y = yik

    k= 1 i=1

    est la moyenne globale de Y.

    K Ik

    K I

    Remarque :y = E

    1

    E yik

    k= 1 I k i= 1 k=1

    Ik

    ) =

    K

    yk

    La moyenne globale est donc une moyenne des moyennes des groupes pondérées par leurs effectifs.

    1 Ik

    Vk ( Y ) = ó2k( Y = E( y k -yk)

    I k i = 1

    2 est la variance de Y à l'intérieur du groupe k.

    1 K Ik

    V (Y ) = ó2 ( Y ) = EE( yik -y)

    I k= 1 i=1

    2 est la variance totale de Y.

    L'idée est la suivante :

    Si le facteur de groupe induisait des différences sur la variable Y, toutes autres influences mises à part, on obtiendrait une dispersion de Y qui traduirait ces groupes: On aurait donc une dispersion entre les groupes petite par rapport à la dispersion à l'intérieur des groupes.

    Mesure de la dispersion :

    - La dispersion est mesurée par la variance.

    - On peut d'ores et déjà établir une décomposition intéressante de la variance totale de Y:

    K K

    I I

    k k

    V Y

    ( ) = V Y

    ( ) + ( )

    y y

    -

    k k

    I

    k = I

    1 k = 1

    2

     

    On remarque que le premier terme de cette somme est la moyenne des variances internes aux groupes pondérées par leurs effectifs, il s'agit donc d'une variance interne moyenne, ou: variance dans les groupes. Quant au second terme, c'est clairement la variance des moyennes des différents groupes, soit une variance entre les groupes.

    La décomposition ci-dessus de la variance de Y s'interprète donc tout simplement comme:

    Variance totale = Variance dans les classes + Variance entre les classes On notera:

    K I

    - la variance dans les classes: V Y

    d ( ) =

    k= 1

    k

    V Y

    ( )

    k

    I

    K I

    -

    I ( y k - y

    k

    ) 2

    1

    la variance entre les classes: V Y

    e ( ) =

    =

    k

    Le critère et le test:

    dispersion

    L'idée est la suivante: si le rapport

    est grand, on admet la

    entre

    dispersion dans

    significativité de l'influence dépistée du facteur de groupe sur la variable Y. Formule du test

    Sous l'hypothèse que le facteur de groupe n'induit aucune différence sur Y entre les groupes (i.e. aucun effet spécifique, autrement dit tous les bk = 0), la

    statistique suivante: F

    V e ( Y ) .K K

    V d ( Y) .I I - K

    - 1 suit une loi bien précise: la loi de

    Fisher à respectivement K-1 et I-K degrés de liberté, notée F (K-1, I-K).

    On calcule donc la statistique F sur les observations, et l'on regarde si elle est tombée dans une région "peu probable" de cette loi (i.e. par exemple une région dans laquelle F ne devrait tomber que dans 5% des cas, et où la densité de probabilité est faible). Si c'est le cas, on est enclin à considérer que l'hypothèse de non-influence est trop peu plausible, et donc à admettre l'hypothèse d'une influence du groupe sur Y. A contrario, si F est tombée en dehors de la région "peu probable", tout paraît normal, et l'on n'a pas à rejeter l'hypothèse de non-influence. On ne considère donc pas que le groupe ait une influence significative sur Y.

    On compare donc F au fractile d'ordre 95% ou 99% de la loi F(K-1,I-K), noté f0.95(K-1,I-K) ou f0.99 (K-1, I-K).

    TROISIEME PARTIE
    PRESENTATION, ANALYSE, INTERPRETATION
    ET DISCUSSION DES RESULTATS

    Chapitre V : PRESENTATION ET ANALYSE DES RESULTATS 5.1. Tableaux simples

    Tableau 2

    Répartition des patients selon le sexe

    Sexe Effectif Pourcentage

    Masculin 74 90,25%

    Féminin 8 9,75 %

    Total 82 100 %

    Au vu des statistiques de ce tableau, il ressort que sur 82patientsinterrogés, 90,25 % sont des hommes alors queseulement 9,75 % sont desfemmes. Ces proportions nous indiquent que la population enquêtée,sur les habitudes de consommation de drogues,est inégalement répartie. On note quasiment un déséquilibre entre le nombre d'hommes et celui de femmes. Le nombre d'hommes est 9 fois supérieur à celui des femmes.

    Tableau 3

    Répartition des patients selon l'âge

    Age

    Effectif

    Pourcentage

    17 - 25 ans

    22

    26,82 %

    26 - 29 ans

    24

    29,26 %

    30 - 35 ans

    20

    24,40 %

    36 ans et plus

    16

    19,52 %

    Total 82 100 %

    Du tableau précédant, la structure par âge montre,de façon générale, que la grande majorité des sujets enquêtés appartientà la catégorie jeune. Toutefois, la tranche d'âge la plus représentéeau sein de cet échantillon est la tranche 26 - 29 ans soit au total 29,26 %. Cette catégorie d'âge est suivie de celle de 17 - 25 ans avec un pourcentage de 26,82 % de l'effectif total. La tranche d'âge la moins représentée est celle de 36 ans et plus. Elle représente 19,52 % de l'effectif. Il fautégalement noter que la catégorie d'âge de 30 - 35 ans représente uneproportion aussi importante que toutes les autres avec un pourcentage de 24,40 %.

    Tableau 4

    Répartition des patients selon la profession

    Profession

    Effectif

    Pourcentage

    Sans profession

    29

    35,37 %

    Employés

    11

    13,41 %

    Commerçants

    10

    12,20 %

    Apprenants

    16

    19,51 %

    Artistes

    9

    10,98 %

    Elèves/Etudiants

    7

    8,53 %

    Total

    82

    100 %

    Les patients enquêtés ont fait cas de leur profession. Les cas les plus
    représentés sont les sans profession qui occupent35,37 % de l'effectif total et
    88

    les apprenants qui représentent19,51 %. Cependant, il faut noter que ces deux premières proportions sont suivies par les employés avec un pourcentage de13,41 %, les commerçants avec 12,20 % et les artistes 10,98 %. Toujours selon ce tableau, 8,53 %de l'échantillonsont des élèves et / ou des étudiants concernés aussi par les phénomènes de consommation de drogues.

    Tableau 5

    Répartition des patients selon le type de famille dont ils sont issus

    Type de
    famille

    Effectif

    Pourcentage

    Monogame

    10

    12,20 %

    Polygame

    46

    56,10 %

    Monoparentale

    5

    6,10 %

    Recomposée

    21

    25,60 %

    Total

    82

    100 %

    Selon ce tableau, plus de la moitié des patients enquêtéssoit 56,10 % de l'échantillon sont issus d'une famille polygame. Cette forte proportion est suivie de 25,60 % qui représentent le pourcentage des patients issus d'une famille recomposée. Les données collectéesprécisent également que d'autres patients sont issus des familles monogame et monoparentale. Toutefois, leur proportion est relativement plus faible que celui des patients naissant dans les familles polygame et recomposée. Les pourcentages sont respectivement de 12,20 % pour les patients qui proviennent d'une famille monogame et de 6,10 % pour les patients issusd'une famille monoparentale.

    Tableau 6

    Répartition des patients selon la fratrie dont ils sont issus

    Fratrie Effectif Pourcentage

    2 - 6

    20

    24,40 %

    7 - 12

    35

    42,68 %

    13 et plus

    27

    32,92 %

    Total

    82

    100 %

    Au regard de ce tableau, on constate que près de 42,68 % des patients toxicomanes enquêtés au Centre Hospitalier National Spécialisé proviennent d'une famille ayant une fratrie comprise entre 7 et 12 membres. Il s'agit de la proportion la plus représentative de l'échantillon. Cet important quota est suivi de 32,92 % qui représentent le pourcentage des patients toxicomanes issus d'une fratrie dont le nombre est de 13 et plus. La fratrie de 2 - 6 membres occupe la dernière place avec un pourcentage de 24,40 %. En résumé, les toxicomanes proviennent davantage des familles ayant une fratrie moyenne et supérieure que des familles à fratrie comprise entre 2 et 6 membres.

    Tableau 7

    Répartition des patients selon la situation matrimoniale

    Situation
    matrimoniale

    Effectif

    Pourcentage

    Célibataire

    31

    37,80 %

    Marié

    39

    47,56 %

    Séparé /

    12

    14,64 %

    Divorcé

     
     

    Total

    82

    100 %

    Les toxicomanes ont renseigné leur état matrimonial. La situation matrimoniale « marié » est plus observée que les autres états : célibataire, séparé ou divorcé. Elle a un pourcentage qui atteint presque la moitié soit 47,56 % de l'effectif total. La situation « célibataire » est la deuxième plus renseignée avec une proportion de 37,80 %. Toujours selon ce tableau, les toxicomanes enquêtés qui sont séparés ou divorcés, sont aussi concernés par le phénomène des drogues à un pourcentage de 14,64 % de l'échantillon.

    Tableau 8

    Répartition selon les différentes drogues consommées

    Drogues
    consommées

    Effectif

    Pourcentage

    Alcool

    50

    60,97 %

    Tabac

    33

    40,24 %

    Cannabis

    42

    51,22 %

    Cocaïne

    15

    18,29 %

    Héroïne

    7

    8,54 %

    Les résultats du tableau 8précédant signalent ce qui suit :

    - L'alcool est la drogue la plus consommée par les toxicomanes de notre échantillon. Il occupe à lui seul un fort pourcentage de 60,97 %.

    - Le cannabis est la deuxième substance psychoactive la plus consommée par les sujets enquêtés. Il représente 51,22 %. Toutefois, le cannabis est la drogue illicite la plus consommée par les toxicomanes de notre échantillon parmi toutes les drogues illicites.

    - Le tabac vient en troisième position des substances psychoactives consommées avec un pourcentage de 40,24 %. Il est suivi de la cocaïne (18,29 %) et de l'héroïne (8,54 %).

    Tableau 9

    Répartition des patients selon la durée de consommation des drogues

    Durée de la
    consommation

    Effectif

    Pourcentage

    1 - 5 ans

    15

    18,29 %

    6 - 9 ans

    27

    32,93 %

    10 - 14 ans

    23

    28,05 %

    15 ans et plus

    17

    20,73 %

    Total

    82

    100 %

    Le tableau 9 nous indique que la majorité des toxicomanes sont de vieux usagers de la drogue. La grande majorité(environ 81,71 %) de ces vieux usagers sont dans la drogue il y a au moins 6 ans. Parmi eux, 32,93 % ont une durée de consommation comprise entre 6 et 9 ans alors que 28,05 % ont une durée comprise entre 10 et 14 ans. La proportion de 20,73 % représente les

    toxicomanes qui consomment la drogue, il y a 15 ans et plus. A côté de ces vieux usagers de la drogue, on constate que les toxicomanes, qui utilisent la drogue il y a moins de 6 ans (plus précisément entre 1 et 5 ans),représentent 18,29 % de l'échantillon.

    Tableau 10

    Répartition des patients selon la nature des relations familiales avant et après la prise de drogues

    Relations familiales avant la prise de drogues

    Bonnes Acceptables Mauvaises

    Total

     
     

    Effectif 36 27 19 82

    Pourcentage 43,90 % 32,93 % 23,17 % 100 %

    Relations familiales après la prise de drogues

    Bonnes Acceptables Mauvaises Total

    Effectif 13 20 49 82

    Pourcentage 15,85 % 24,39 % 59,76 % 100 %

    L'analyse de ce tableau montre que les relations familiales ne sont pas les mêmes avant et après la prise de drogues. Sur les 82 patients enquêtés sur la nature des relations familiales avant la prise de drogues, 43,90 % déclarent avoir de bonnes relations familiales, 32,93 % les estiment acceptables et 23,17 % pensent que leurs relations familiales étaient mauvaises. Les données changent après la prise de drogues selon les toxicomanes. Les relations familiales deviennent plus mauvaises qu'auparavant soit une proportion de 59,76 % déclarée. De 32,93 %, les relations familiales acceptables passent à 24,39 %. Les relations familiales qui demeurent bonnes malgré la prise de

    drogues représentent 15,85 % selon les déclarations effectuées par les toxicomanes enquêtés.

    Tableau 11

    Répartition des patients selon les types d'événements de vie significativement vécus

    Types d'événements de vie
    significativement vécus

    Effectif

    Pourcentage

    Conjugaux

    29

    35,37 %

    Familiaux

    19

    23,17 %

    Sociaux

    15

    18,29 %

    Sanitaires

    11

    13,41 %

    Financiers

    8

    9,76 %

    Total

    82

    100 %

    Les événements de vie vécus significativement diffèrent d'un patient à un autre. Le tableau 11 nous l'indique convenablement. Il en ressort que 35,37 %de l'effectif total ont connu des événements de vie significatifs d'ordre conjugal au cours des 12 derniers mois ayant précédés le début des consommations des drogues. Ils sont d'ailleurs les plus représentés dans l'échantillon. Toujours sur les 82 patients interrogés, 23,17 % ont connu des événements familiaux significatifs. Ils sont suivis de 18,29 % qui ont connu plutôt des événements de vie sociaux stressants ou traumatiques. Les patients qui ont connu des événements de vie financiers significatifs sont les plus faibles et représentent 9,16 % après les 13,41 % qui ont vécu des événements de vie sanitaires significatifs avant le début des consommations de drogues.

    Tableau 12

    Répartition des patients selon la détresse psychologique

     

    Détresse psychologique

    Effectif

    Pourcentage

    Oui
    Non

    56
    26

    68,29 %
    31,71 %

    Total

    82

    100 %

    L'analyse de ce tableau révèle que :

    - la majorité des patients enquêtés (68,29 %) ont connu une détresse psychologique à la survenue des événements de vie significatifs avant le début des consommations de drogues soit 56 patients sur 82.

    - le reste de l'échantillon soit 31,71 % n'ont pas connu de détresse psychologique bien qu'ayant vécus des événements de vie.

    En résumé, presque les trois quartsdes patients enquêtés ont développé une détresse psychologique après la survenue des événements de vie.

    Tableau 13

    Répartition des patients selon le score et le niveau de dépendance aux drogues

    Score et niveau de
    dépendance aux drogues

    Effectif

    Pourcentage

    1 - 5 (Faible)

    10

    12,20 %

    6 - 10 (Modéré)

    19

    23,17 %

    11 - 15 (Elevé)

    23

    28,05 %

    16 - 20 (Sévère)

    30

    36,58 %

    Total

    82

    100 %

    Au regard du précédant tableau, on remarque que la proportion des patients faiblement dépendants aux drogues est basse avec un pourcentage de 12,20 %. Par contre, la proportion des patients sévèrement dépendants aux drogues est élevée soit un quota de 36,58 %. Ces derniers sont suivis d'un taux de 28,05 % pour les dépendants élevés et de 23,17 % pour les dépendants modérés.

    Tableau 14

    Répartition selon les effets attendus après la prise des drogues

    Effets attendus

    Effectif

    Pourcentage

    Recherche du bien-être, bonheur

    45

    54,88 %

    Lutte contre l'anxiété

    22

    26,83 %

    Lutte contre la tristesse

    25

    30,49 %

    Fuite de la réalité difficile

    36

    43,90 %

    L'analyse de ce tableau montre que plusieurs effets sont attendus après la prise des drogues et varient d'un patient à un autre. Pour la majorité des toxicomanes enquêtés, la principale raison de la prise des drogues est la recherche du bien-être ou du bonheur. Cette seule raison représente 54,88 %. Elle est suivie d'abord, de la fuite de la réalité difficile, qui occupe une proportion de 43,90 %, puis de la lutte contre la tristesse (30,49 %) et enfin de la lutte contre l'anxiété (26,83 %).

    5.2. Tableaux croisés

    Tableau 15

    Relation entre le type de familleet la détresse psychologique

     

    Types de famille

     

    Total

    Détresse psychologique

    Monogame

    Polygame

    Monoparentale

    Recomposée

     

    Oui

    4 (8%)

    33 (66%)

    1 (2%)

    12 (24%)

    50

    Non

    6

    13

    4 (12,5%)

    9

    32

     

    (18,75%)

    (40,63%)

     

    (28,12%)

     

    Total

    10

    46

    5

    21

    82

    ddl=3 X2cal=4,91 X2lu=7,81 DNS(S.05)

    Les résultats du tableau 15 montrent que:

    - parmi les 50 patients qui ont connu une détresse psychologique après la survenue des événements de vie, plus de la moitié soit 66 % (33 patients) sont issus d'une famille polygame, et 24 % d'une famille recomposée alors que seulement 2 % des patients en détresse psychologique, sont issus d'une famille monoparentale et la proportion des patients provenantd'une famille monogame est de 8 % ;

    - 40,63 % des patients (soit 13 patients sur 32), n'ayant pas connu de détresse psychologique après la survenue des événements de vie significatifs, proviennent d'une famille polygame, 28,12 % d'une famille recomposée, 18,75 % d'une famille monogame et seulement 12,5 % d'une famille monoparentale.

    Malgré ces statistiques, le khi deux calculé prouve que la différence n'est pas significative statistiquement au seuil P=.05. Il n'y a donc pas de liaison entre le type de famille et la détresse psychologique.

    Tableau 16

    Relation entre les événements de vie significatifs vécuset la détresse psychologique

    Evénements de vie significativement vécus durant les
    12 derniers mois avant le début des consommations

     
     
     
     
     
     

    Total

    Détresse psychologique

    Conjugaux

    Familiaux

    Sociaux

    Sanitaires

    Financiers

    Oui

    25

    16

    8

    4

    3 (5,36%)

    56

     

    (44,64%)

    (28,57%)

    (14,29%)

    (7,14%)

     
     

    Non

    4

    3

    7

    7(26,92

    5 (19,23%)

    26

     

    (15,39%)

    (11,54%)

    (26,92%)

    %)

     
     

    Total

    29

    19

    15

    11

    8

    82

    ddl=4 X2cal=12,03 X2lu=9,48DS(S.05) C=0,35

    Il ressort de ce tableau que sur les 82 patients, 56 d'entre eux ont connu une détresse psychologique contre 26 qui ne l'ont pas connu.

    Sur les 56 patients ayant connu une détresse psychologique, 44,64 % ont connu des événements de vie d'ordre conjugal et 28,57 % ont connu des événements d'ordre familial. Toujours sur ces 56 patients, 14,29 % des patients ont connu durant les 12 derniers mois ayant précédé le début des consommations de drogues des événements de vie sociaux, 7,14 % des événements de vie sanitaires et 5,36 % des événements de vie financiers.

    Des 26 patients n'ayant pas connu de détresse psychologique après la survenue des événements de vie, 26,92 % ont vécu des événements sociaux, 26,92 % également ont vécu des événements sanitaires, 19,23 % ont connu des événements financiers, 15,39 % ont vécu des événements conjugaux et 11,54 %familiaux.

    La différence est significative statistiquement au seuil P=.05. Il y a donc une relation de dépendance entre les événements de vie significativement vécus et la détresse psychologique observée. Cette liaison est confirmée par le coefficient de contingence C=0,35.

    En résumé, les événements de vie significatifs affectifs et familiaux sont plus représentés dans la détresse psychologique que les événements de vie significatifs sociaux, sanitaires et financiers.De façon générale, les événements de vie significativement vécus par les patients entraînent une détresse psychologique chez les jeunes adultes.

    Tableau 17

    Relation entre la détresse psychologique et le score de dépendance aux drogues

    Détresse
    psychologique

    Effectifs

    Moyenne

    Variance

    Ecart-
    type

    Somme

    Oui

    56

    15,02

    13,07

    3,62

    841

    Non

    26

    6,61

    15,05

    3,88

    172

    T de Student 2.42

    Signification 0.00

    Suite à la détresse psychologique connue ou non et aux scores de dépendance aux drogues obtenus par les patients, le test T de est significatif au seuil 0.00. On conclutdonc que le score de dépendance aux drogues dépend de la détresse psychologique observée chez les patients. La détresse psychologique observée chez les patients a provoqué les conduites de consommation de drogues.

    Tableau 18

    Relation entre les événements de vie significatifs vécus et le score de dépendance aux drogues

    La loi statistique de Fischer calculée F(4,77) est égale 85,79 avec une probabilité de 0,00 qui est inférieure au seuil 0,05 dont la valeur critique lue

    Evénements de vie

    Effectifs

    Moyenne

    Variance

    Ecart-type

    Somme

    Conjugaux

    29

    17,59

    3,39

    1,84

    510

    Familiaux

    19

    13,74

    4,09

    2,02

    261

    Sociaux

    15

    9,66

    8,09

    2,84

    145

    Sanitaires

    11

    5,54

    8,27

    2,88

    61

    Financiers

    8

    4,5

    6

    2,45

    36

     
     

    Analyse de la variance (ANOVA)

     

    Source

    Somme des
    carrés

    ddl

    Variance

    F

    Signification

    Intergroupe

    15,31

    1

    15,31

     
     

    Intragroupe

    1096

    80

    13,70

    89,40

    ,000

    de F(4,77)=2,49. Ce qui est inférieur à la valeur calculée F(4,77)=85,79. On conclut donc que le score de dépendance aux drogues dépend des événements de vie stressants ou traumatisants vécus.

    Les événements de vie significatifs survenus au fil des jours ont fragilisé les jeunes adultes et ont favorisé chez eux les conduites de consommations de drogues.

    Chapitre VI : INTERPRETATION ET DISCUSSION DES RESULTATS

    6.1 Interprétation des résultats

    Dans cette partie de notre travail, nous allons donner une signification psychologique aux résultats obtenus en nous inspirant de la théorie de l'assuétude de Stanton. Il s'agit principalement d'expliquer le lien entre les événements de vie significatifs vécus et les conduites de consommations de droguesobservées chez les jeunes adultes.

    La théorie de l'assuétude de Stanton (1982) stipule que l'individu consomme de la drogue pour éviter de faire face à la réalité désagréable parce que toutes les drogues ont en commun l'effet d'éliminer les ennuis, la douleur et l'angoisse.

    6.1.1. Sexe, âge et profession

    Les résultats obtenus au tableau 2 montrent que la grande majorité des sujets interrogés sont des hommes. Ce fait indique que le phénomène de la consommation des drogues demeure un phénomène masculin par essence. Depuis de nombreuses années, c'est l'observation la plus plausible qui est faite par les chercheurs.

    Le tableau 3 nous renseigne sur les tranches d'âge. Il faut noter que la tranche d'âge la plus représentée dans notre étude est celle de 26 - 29 ans. Cette tranche d'âge est suivie par celle de 17 - 25 ans. Ces deux tranches d'âge occupent à elles seules plus de la moitié de l'effectif total. Ces faits montrent, sans doute aucun, que le phénomène de la consommation de drogues concerne singulièrement la population jeune. La jeunesse est une époque de la vie humaine comprise entre l'enfance et la maturité. C'est une période de croissance ou de développement progressif au cours de laquelle les choses nouvellement établies n'ont pas encore atteint leur plénitude. Il faut préciser qu'au cours de cette étape, les jeunes se posent beaucoup de

    questions existentielles auxquelles ils ne trouvent pas de réponse pour la plupart du temps. Durant ce temps de vie, les jeunes se créent de grands besoins et sont portés à une satisfaction immédiate et complète. Il s'agit par exemple de la nécessité de s'affirmer devant l'entourage et, très souvent, du doute de sa capacité de réussir. Face à ces difficultés passagères, les jeunes cherchent des solutions promptes. Selon Stanton (1982), tout individu adopte une façon qui lui est propre de fonctionner et de rechercher des solutions à un problème en fonction de sa compréhension. Face à ces difficultés rencontrées pendant la jeunesse, les jeunes optent pour la consommation des drogues pour s'affirmer devant l'entourage ou pour renforcer leur performance. Malheureusement, ces solutions apportent une satisfaction apparente, sans pour autant répondre convenablement aux nécessités.L'ignorance et la naïveté rendent les jeunes plus vulnérables auxdifficultés existentielles. Et face à ces contrariétés et complexités de la vie et surtout de la jeunesse, les jeunes manifestent indubitablementla peur et la détresse.Or les drogues sont connues pour leursubtilité d'éliminer l'angoisse et de faire oublier les ennuis.Pour les jeunes, le principal mobile de la fréquente consommation des drogues est d'échapper à l'anxiété, à la mélancolie et aux ennuis que créent les difficultés existentielles. En consommant de la drogue pour éviter de faire face à la réalité déplaisante et pénible, les jeunes arrivent à un point où leurs problèmes ne peuvent plus se régler parce qu'ils les ont évités ; et cela crée également l'angoisse. Ainsi, ils font recours encore à la drogue pour oublier cette angoissenouvelle qui corrode leur vie du jour au lendemain.

    Les résultatsdu tableau4 montrent que les sans profession et les apprenants sont significativement plus dominants dans notre échantillon.L'oisiveté (représentée par les sans profession) occupe la grande proportion et revêt une signification très essentielle et importante. La consommation des drogues devient impérativement un centre d'intérêt et de plaisir pour la majorité des toxicomanes. L'usage des drogues produit considérablement du plaisir et permet de réduire voire d'annihiler totalement

    toutes les activités susceptibles d'être une source de plaisir. La consommation de drogues organise désormais l'oisiveté à tel point qu'elle conduit très rapidement à une dépendance sévère vis-à-vis des substances psychoactives. La fierté et le bien-être, que concède un emploi stable et rémunéré, sont désormais garantis par l'usage régulier des drogues. La consommation des drogues devient le centre d'intérêt le plus prisé et le plus apprécié à telle enseigne que tous les autres centres d'intérêt sont éludés au profit de l'usage des substances psychoactives. Le recours à la consommation des drogues constitue un exutoire selon Stanton (1982). C'est la voie la plus courte qui procure une satisfaction apparente et éphémère.

    L'absence d'emploi ou d'occupation professionnelle conduit certains sujets à prendre de la drogue et cette oisiveté renforce davantage les conduites de consommation de drogues chez les sans profession. Les apprenants utilisent aussi la drogue, mais dans le but de développer leur performance.

    Pour se frayer une place non moins importante dans le monde du travail et garantir de surcroît l'avenir, les jeunes s'adonnent très tôt et facilement à des métiers d'apprentissage. Ces jeunes apprenants se sentent investis des obligations et des nécessités de subvenir adéquatement aux besoins de leurs parents et de leurs plus jeunes frères et soeurs bref de toute la famille. Pour se donner toutes les chances de réussir son métier d'apprentissage, il faut durement travailler. Les capacités et les performances, dont nous disposons, ont des limites raisonnables. Pour surpasser ces limites et travailler durement, les jeunes apprenants optent pour des exutoires. Ils s'adonnent essentiellement à la drogue pour augmenter leur performance et développer de grandes capacités de travail. Les drogues confèrent à ces apprenants un sentiment de toute-puissance et une aptitude d'infatigabilité devant le travail. Lorsque l'effet de l'exutoire est passé, les apprenants se retrouvent face aux mêmes difficultés. L'angoisse et le sentiment d'être dépassé reviennent. Les apprenants appliquent les mêmes solutions pour soulager leur souffrance et développer leur performance. Celles-ci engendrent d'autres difficultés, et le

    problème perpétue. C'est ce que Stanton (1982) appelle le cycle de l'assuétude.

    6.1.2. Type de famille, fratrie et situation matrimoniale

    Les résultats du tableau 5 nous montrent que les familles polygame et recomposée sont les familles les plus représentées dans notre échantillon.Très souvent, la famille polygame est une famille à problèmes. La famille recomposée aussi n'épargne pas pour autant ses membres des controverses et des rivalités fraternelles. Au contraire, elle prédispose aux situations angoissantes et désavantageuses que rencontrent ces membres. En toute évidence, la famille recomposée est aussi une source de problèmes déconcertants. Ces deux types de famille génèrent souvent de moult crises. Pour sortir de ces innombrables crises, les membres de ces familles optent pour les solutions très éphémères. Il s'agit notamment du recours aux psychotropes qui apportent une satisfaction superficielle et momentanée lors des crises de ces familles. Lorsque l'effet de ces substances devient caduc, les membresdes familles polygame et recomposée se retrouvent face aux mêmes difficultés et problèmes. Ils sont tentés de recourir aux mêmes solutions passagères et les difficultés s'éternisent malheureusement.

    Le tableau 6 révèle des résultats surprenants sur la fratrie des familles. La fratrie de 7 à 12 membres est majoritairement représentée.Les chercheurs s'accordent pour dire que le groupe idéal est celui de 2 à 6 membres. A l'intérieur d'un groupe, chaque membre émet des énergies en termes de messages vers les autres membres en utilisant le langage aussi bien verbal que le langage non verbal. Si les intérêts personnels des membres du groupe ne sont pas en harmonie avec les intérêts communs du groupe, il y a conflit. Et face à ce conflit, les membres les plus vulnérables cherchent des solutions immédiates, apparemment apaisantes et s'adonnent aux substances psychoactives pour se procurer le bien-être et la satisfaction

    momentanée.Malheureusement, ils tombent dans le cycle de l'assuétude de Stanton (1982). C'est un continuum qui recommence sans arrêt et qui n'a pas de fin sans intervention. Cette assuétude détourne l'individu des autres centres d'intérêt et de plaisir. La consommation des drogues devient un élément nodal dans la vie de ces personnes.

    Les résultats du tableau 7 montrent un pourcentage élevé de mariés et de célibataires. Les mariés de notre échantillon vivent dans tout type de famille. Ils sont manifestement exposés aux crises familiales. Sur le plan affectif, les mariésrencontrent beaucoup de difficultés à accommoder les sentiments et les émotions dans le foyer. Tout contrat de couple repose implicitement sur des idéaux amoureux : « être heureux ensemble, prendre du plaisir ensemble, tisser un lien intime et solide ». Toutefois, après la lune de miel de quelques mois voire quelques années, ce contrat change déplorablement d'idéauxdirecteurs et devient une source de conflits intenses entre les mariés. Les difficultés relationnelles, les disputes, les infidélités et / ou les séparations sont autant d'événements significatifs qui organisent désormais la vie de couple. Une seule solution apparaît : fuir la réalité agaçante et contrariante. Les mariés se tournent vers la drogue pour oublier ces difficultés existentielles qui empirent de jour en jour, tout comme leur consommation. Ces personnes en arrivent à un point où leur consommation devient le point central de leur vie parce qu'elles ne trouvent plus aucune satisfaction dans leur vie. Ces mariés essaient de retrouver leur plaisir dans les psychotropes qu'elles consomment, si bien que les psychotropes consommés deviennent leur seule satisfaction. Ils perdent progressivement l'envie de faire des choses pourtant aimées auparavant pour se consacrer à leur consommation qui,désormais, occupe le temps et structure leur vie agréablement mais de façon très éphémère.

    Par contre, les célibataires,étant de jeunes adultes, cherchent à devenir autonomes et à s'affirmer devant toute la communauté de la famille surtout durant les moments de crises familiales. Pour y arriver, les jeunes

    célibatairesconsomment la drogue pour réguler leurs émotions et faire dissiper toute angoisse. Les drogues sont connues pour éliminer les ennuis, la douleur et la peur. C'est la seule solution que trouvent les jeunes célibataires pour résoudre leurs problèmes.

    6.1.3. Drogues, durée de consommationet effets des drogues

    Les résultats du tableau 8signalent que l'alcool, le tabac et le cannabis (drogue illicite) sont les drogues les plus consommées par les toxicomanes de notre échantillon. Ce fait s'explique spontanément par la facilité d'accès de ces différentes drogues sur le marché à travers leur faible coût de vente.

    Le tableau 9 nous renseigne sur la durée de consommation des drogues effectuée par les toxicomanes de notre échantillon. Il est important de préciser que la majorité des toxicomanes utilisent la drogue il y a au moins 6 ans. Cette longue durée de consommation de la drogue nous renseigne que non seulement la drogue procure du plaisir aux usagers mais aussi ces usagers sont totalement dépendants de la drogue. Il s'agit du cycle de l'assuétude selon Stanton (1982) qui se développe progressivement. En effet, la porte d'entrée dans le cycle de l'assuétude est l'anxiété ou la mélancolie. Face à ces émotions négatives, la solution est le recours aux psychotropes qui procurent du bien-être, de l'euphorie et diminuent la peur en décrispant ainsi les échanges sociaux. L'anxiété ou la mélancolie diminue. Les contraintes sont ainsi dégagées. Cela ne dure qu'un laps de temps : en effet, l'effet de cet exutoire diminue entièrement et les difficultés resurgissent soudainement. C'est le retour de la tension qui engendre à nouveau des émotions négatives qu'on fuyait au départ. Et comme les psychotropes constituent les voies qui soulagent rapidement, on en fait encore recours. Et ainsi recommence le cercle vicieux de l'assuétude.

    Il ressort des résultats du tableau 14 que la plupart de nos toxicomanes ont déclaré avoir utilisé les drogues pour retrouver le bien-être ou le bonheur.

    L'autre effet recherché abondamment, qui suit immédiatement celui du bienêtre, est la fuite de la réalité difficile. C'est une preuve indéniable que les toxicomanes utilisent la drogue pour retrouver le bonheur perdu après la survenue des événements de vie négatifs significatifs qui organisaient leur vécu existentiel. Les toxicomanes utilisent essentiellement la drogue comme une arme de lutte contre les difficultés de la vie dans le but de retrouverà nouveau la joie de vivre.Nous savons avec Stanton (1982) que toutes les drogues ont en commun l'effet d'éliminer l'angoisse et de faire oublier les ennuis de toutes sortes et la douleur chez l'individu. D'ailleurs, les récentes recherches effectuées montrent que toutes les drogues,qu'il s'agisse des dépresseurs, des stimulants ou des perturbateurs, ont la propriété d'augmenter dans le cerveau la libération d'une molécule fabriquée par les neurones, la dopamine. Lorsque que la quantité de la dopamine augmente dans les structures nerveuses, quelle qu'en soit la raison, nous ressentons du plaisir et considérons que tout va bien, même si par ailleurs notre corps souffre. C'est pourquoi les toxicomanes consomment régulièrement les substances psychoactives pour tenter de rendre ce côté permanent de la drogue. Par contre, lorsque les consommateurs recherchent cet effet à long terme, ils entrent dans le cycle de l'assuétude de Stanton (1982).

    6.1.4. Evénements de vie, détresse psychologique et dépendance aux drogues

    A travers la différence significative obtenue par le khi deux calculé, le tableau 16 attestequ'il y a une relation de dépendance entre les événements de vie significatifs vécus et la détresse psychologique observée chez les jeunes adultes.

    Le tableau 17 montre,par l'analyse de la variance, que le score de dépendance aux drogues dépendde la détresse psychologique observée chez les toxicomanes.

    Ces résultats clarifient la relation de dépendance entre les événements de vie significatifs vécus, la détresse psychologique et la dépendance aux drogues des toxicomanes. Toutefois, il est primordial de préciser que les résultats du tableau 18 confirment davantage cette relation de dépendance entre les événements de vie significatifs vécus et la dépendance aux drogues observée chez les jeunes adultes.

    Ces résultats sont approuvés par la théorie de l'assuétude de Stanton (1982) qui repose sur l'interrelation entre les facteurs physiques, psychologiques et sociaux des sujets et le rôle que la substance joue dans leur vie.Selon cette théorie, les drogues ont toutes en commun l'effet d'éliminer l'angoisse et de faire oublier les ennuis de toutes sortes et la douleur chez l'individu. C'est pourquoi les toxicomanes les consomment régulièrement pour tenter de rendre permanent ce côté de la drogue.

    6.2. Discussion

    L'objectif de notre étude s'articulait comme suit : « identifier l'indice de relation entre les événements de vie significatifs et la consommation de drogues observée chez les jeunes toxicomanes ». A l'issue de la présentation des résultats et de leur interprétation, il est fondamental de discuter de la méthodologie adoptée pour la réalisation de ce travail et de discuter des résultats obtenus par rapport aux travaux antérieurs.

    6.2.1. Discussion de la méthodologie

    Nous avons effectué une étude prospective sur les événements de vie significatifs vécus par les jeunes adultes et la consommation de drogues observée chez ces toxicomanes. Nous nous sommes servi de l'entretien, du questionnaire et de l'observation pour collecter les données sur un échantillon de 82 toxicomanes obtenus suite à nos critères de sélection au Centre Hospitalier National Spécialisé. L'analyse de contenu et les méthodes statistiques nous ont permis de confirmer et de valider toutes nos hypothèses. De plus, presque tous nos objectifs sont atteints sauf, manifestement, les objectifs d'application. Toutefois, la petitesse de la taille de notre échantillon et le cadre d'étude limité au Centre Hospitalier National Spécialisé ne nous permettent pas de faire une généralisationsans réserve de nos résultats. Il conviendrait d'effectuer une étude plus exhaustive et, si possible, d'allure nationale.

    6.2.2. Discussion des résultats

    Les résultats de notre étude énoncent expressément que les événements de vie significatifs ont entraîné,chez les jeunes adultes,une détresse psychologique qui a conduit aux conduites de consommation de drogues. En d'autres termes, les événements de vie significatifs ontfragilisé les jeunes adultes et ont favorisé chez eux la dépendance aux drogues.

    Plusieurs recherches ont été effectuées pour mettre en évidence les relations entre les événements de vie vécus, généralement négatifs et les conduites de consommationsde drogues. Nos résultats s'harmonisent avec ceux deMc Glothin (1975), O'Farrel (1989), Gorman et Brown (1992), Elisha et Galaif(2001), Ondersma (2002), Chen (2003), Bader (2004), Fernandez, Bonnet, Jauffret, Niel et Pedinielli, (2006).

    Pour Mc Glothin(1975), les sujets dépendants au cannabis sont souvent issus de familles désunies quoique de statutsocioéconomique plus élevé ; les relations parents-enfants sont décrites comme pauvres bienque les parents se montrent libéraux ; bien souvent, les pères abusent d'alcool et de tabac, etles mères de tranquillisants.Toutefois, nous précisonsque Mc Glothin s'est limité seulement à la dépendance au cannabis alors que nous, nous avons élargi la dépendance à plusieurs autres drogues les plus fréquemment utilisées.

    O'Farrel (1989) rapporte que les événements de vie liés à la diminution des relationssont, le plus souvent non pas,la conséquence de l'addiction mais sa cause. On observe unaccroissement du nombre d'événements stressants dans l'année qui précède l'entrée en addiction aux drogues.

    Nos résultats vont également dans le même sens que les travaux de Gormanet Brown (1992). Selon leurs résultats, les caractéristiques du rapport entre événements de vie et dépendances aux drogues sont : la spécificité del'événement de vie, la vulnérabilité du sujet et le diagnostic spécifique.

    En 2001, Elisha et Galaif, et un an plus tard, en 2002, Ondersma ont trouvé que certains événements de vie négatifs prédisposent aux dépendances aux drogues.Il s'agit particulièrement du suicide d'un ami, du rejet des parents ou de l'épouse, des difficultés relationnelles, de l'instabilité ou de la diminution de lasatisfaction professionnelle, des négligences parentales envers les enfants mais également des événements de vietraumatiques (abus sexuels, par exemple).Mais, les recherches de Elisha et Galaif (2001) et de

    Ondersma (2002) diffèrent quelque peu de la nôtre, à partir du moment nous avons trouvé que les événements de vie significatifs entraînent, certes,

    les conduites de consommations de drogueschez les jeunes adultes mais à travers la détresse psychologique causée par ces événements de vie.

    Nos résultats sont conformes avec ceux de Chen (2003). En effet, selon Chen (2003), les dépendances aux drogues,qu'il s'agisse du début et/ou du maintien, surviendraient après unexcès d'événements stressants négatifs,

    comme conflit familial, séparation, divorce, changementprofessionnel, perte, stress émotionnel ; pour diminuer la tension engendrée par ces événements.

    L'étude de Bader (2004), réalisée auprès d'adolescents et de jeunes adultes présentant des troubles des comportements addictifs et interrogés sur leursreprésentations mentales au sujet de leur constellation familiale et des modèlestransgénérationnels, montre que les adolescents et les jeunes adultes présentant des comportements addictifs ont vécu desévénements de vie stressants négatifs dans leurs familles (conflits familiaux, séparations,pertes non résolues). Le modèle transgénérationnel mis en évidence est celui du manque destructuration des figures parentales.Les résultatsde Baker concordentaussi avec nos résultats.

    Fernandez, Bonnet, Jauffret, Niel et Pedinielli (2006) ont montré que la dépendance au cannabis est favorisée par des événements de vie traumatisants, une transmission familiale transgénérationnelle caractérisée par une cohésion familiale et un support familial défaillants et une surreprésentation familiale des problèmes psychologiques, organiques et des décès sur trois générations.

    Plusieurs études correspondent à nos résultats. Cependant, nos travaux diffèrent des travaux de Vincent et al. (2004) qui ont montré qu'une accumulation d'événements de vie durant l'année précèdentl'installation des troubles de l'érection chez les patients plutôt que les conduites de consommations de drogues.

    Nos résultats diffèrent également des travaux de Sévon (2002). D'après ces résultats, l'âge actuel, le type de famille et la position occupée dans la fratrie ne sont pas des facteurs déterminants dans l'explication de l'étiologie de la toxicomanie. Cependant, il ressort que le phénomène est essentiellement masculin, que la consommation se fait en groupe et la plupart des toxicomanes le sont devenus lorsqu'ils vivaient encore avec leurs parents géniteurs. D'après les facteurs subjectifs évoqués par les sujets, le désir d'attirer l'attention des parents constitue un facteur déterminant. Parmi les

    facteurs psychologiques, la disqualification du père (absence physique et / ou psychique) et la surprotection maternelle sont les facteurs prépondérants entraînant le trouble de l'organisation de la personnalité pouvant déboucher sur la dépendance à la drogue. Les résultats de notre étude montrent par contre que les événements de vie significatifs d'ordre affectif et familial survenus avant le début des conduites de consommation de drogues sont, avec la détresse psychologique qu'ils entrainent chez les jeunes adultes, les facteurs déterminants des conduites de consommation de drogues.

    - Portée et limites de nos résultats

    A travers notre étude, nous avons montré la relation de dépendance entre les événements de vie significatifs et les conduites de consommations de drogues. Mais, cette relationde dépendance n'est pas axiomatique. D'ailleurs, d'autres facteursinterviennent considérablement dans cette relation de dépendance, en l'occurrence le sensde l'événement de vie et la détresse psychologiquecausée par cet événement.Du coup, nous nous gardons de toute généralisation des résultats, vusaussi la petite taille de notre échantillon et le cadre d'étude limité au Centre Hospitalier National Spécialisé.

    6.3. Suggestions

    A l'issue de notre étude, nous formulons des suggestions, d'abord à l'endroit des autorités politiques et administratives, ensuite à l'endroit de la population et enfin à l'endroit des toxicomanes.

    A A l'endroit des autorités politiques et administratives

    - Réduire l'offre et la demandede la drogue en luttant contre le trafic et le commerce des drogues illicites,

    - Encouragerla création des centres de prise en charge des toxicomanes,

    - Promouvoir la multiplication des structures spécialisées de prise en charge des toxicomanes,

    - Développer des politiques de soins et d'aides adaptés dans la prise en charge des toxicomanes en se référant aux psychologues.

    A A l'endroit de la population

    - Collaborer avec les spécialistes afin de leur permettre de mieux comprendre les événements que vivent les toxicomaneset de pouvoir les aider à abandonner la consommation des drogues,

    - Eviter de stigmatiser les toxicomanes car les condamner les conduit davantage vers les drogues.

    A A l'endroit des toxicomanes

    - Prendre conscience des conséquences que vous encourez en consommant les drogues,

    - Se rendre disponibles pour se faire aider par les spécialistes dans le but abandonner les pratiques addictives,

    - Participer activement aux thérapies proposées par les spécialistes pour
    vous aider à abandonner les conduites de consommations de drogues,

    - Faire appel aux spécialistes pour vous aider quand vous vous sentez
    menacés par l'envie irrépressible de prendre les produits psychoactifs.

    CONCLUSION

    La toxicomanie n'est pas certes une maladie mais c'est le nouveau cancer de la société. Depuis quelques décennies, c'est le fléau le plus ravageur de toutes les couches sociales de la population, malgré les multiples prouesses matérialisées par la communauté internationale et plus spécifiquement, les actions menéespar les pays les plus concernés par ce phénomène.

    Au Togo, plusieursrecherches encourageantes et d'innombrables initiatives louables ont été réalisées dans le cadre de la lutte contre les conduites de consommations de drogues et le commerce des drogues illicites. Cependant, beaucoup reste à faire pour tenter véritablement d'endiguer ce phénomène d'enjeu sociétal majeur.

    Notre étude a porté sur 82 toxicomanes du Centre Hospitalier National

    Spécialisé et avait pour objectif de mettre en relation les événements de vie

    significatifs vécus et les conduites de consommations de drogues. A l'issue de

    cette étude, les résultats auxquels nous sommes parvenusont surprenants :

    - le phénomène de la toxicomanie demeure par essence un phénomène masculin, touche beaucoup plus les jeunesque les sujets relativement plus âgés et concerne davantage les sans profession et les apprenants plutôt que les employés, les commerçants, les artistes, les élèves et les étudiants ;

    - les toxicomanes proviennent pour la plupart du temps des familles polygames et recomposées, appartiennent à des familles de fratries très élargies, environ 7 à 12 membres, et les mariés et les célibataires sont plus représentés dans l'échantillon que les séparés et / ou les divorcés ;

    - l'alcool, le tabac et le cannabis sont les drogues les plus consommées par les toxicomanes de notre échantillon, la durée de consommation des drogues effectuée par la majorité des toxicomanes (soit 81,71 %) est de 6 ans et plus, de plus les deux principales raisons évoquées pour la prise de drogues selon les sujets sont : la recherche du bien-être ou du bonheur et la fuite de la réalité difficile ;

    - les événements de vie significatifs vécus ont fragilisé les jeunes adultes et ont favorisé chez eux la dépendance aux drogues.

    Cette étude permet de mieux comprendre la relation de dépendance quiexiste entre les événements de vie significatifs et les conduites de

    consommations de drogues.

    A partir des résultats obtenus, nous estimons avoir confirmé toutes nos hypothèses et avoir atteint aussi, la majorité de nos objectifs, sauf bien entendu, les objectifs d'application.

    La poursuite de cette étude permettra d'obtenir un échantillon plus conséquent pour valider ces résultats préliminaires obtenus. Toutefois, gardons à l'esprit que l'amélioration de la qualité et de la nature des relations familiales et leur valorisation conduiraient indubitablement à créer davantage le bien-être ou le bonheur au sein des familles et par ce fait, à réduire le phénomène de la toxicomanie dans nos sociétés.

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    ANNEXES






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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius