LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE DANS L'ORDONNANCEMENT
CONSTITUTIONNEL CONGOLAIS DU 20 Janvier 2002.
Par
Xavier KITSIMBOU1(*)
L'institution présidence de la république a
toujours été au centre de toutes les mutations qui se sont
opérées dans la vie politique congolaise. En effet, du lendemain
des indépendances jusqu'à nos jours, le Congo a connu sept chefs
d'Etat 2(*). Ce qui le place
parmi les pays les plus instables de la sous-région3(*).
Lorsque la République du Congo accède à
l'indépendance en 1960, une constitution est adoptée par
référendum organisant la dévolution du pouvoir par la
voie des urnes. En 1961, l'Abbé Fulbert Youlou est élu
président de la jeune république. Les évènements
des 13-14-15 août 1963 qui entraînent sa chute posent le
problème de l'alternance au pouvoir à la suite de la vacance
entraînée par le coup d'Etat.
Sans être élu, Massamba Débat
accède à la magistrature suprême en 1964. Le mouvement
insurrectionnel qui amène le capitaine Marien N'Gouabi au pouvoir donne
le ton de la gestion politique par l'armée et surtout l'instauration du
parti Etat où dorénavant le pouvoir est détenu par le
parti dirigeant l'Etat donc le parti unique.
La conférence nationale souveraine qui se tient
à Brazzaville du 25 février au 10 juin 1991 reconfigure le
paysage politique. Le multipartisme est instauré. Une nouvelle
constitution est adoptée en 1992. Cette nouvelle constitution
prévoit désormais l'élection du président de la
République au suffrage universel direct en définissant les
règles applicables en cas de vacance du pouvoir4(*).
En 1997, le conflit armé qui éclate à
Brazzaville se solde par la victoire militaire de Dénis Sassou N'Guesso
qui devient le nouveau président. Or la constitution en vigueur en 1997
prévoit l'élection d'un nouveau président en cas de
vacance. L'abrogation de la constitution de 1992 et l'adoption d'un acte
fondamental le 24 octobre 1997 reprécise les termes du pouvoir en
légitimant cette victoire par la force.
A la lumière de cette réalité, il
apparaît que depuis 1963, l'alternance au poste de président de la
République au Congo s'est toujours opérée en dehors du
cadre juridique et constitutionnel en vigueur qui pourtant définissait
les conditions légales d'accession au pouvoir. De tout temps, la
constitution congolaise a toujours fait l'objet d'ajustements lorsque les
autorités politiques ont voulu répondre aux besoins que la
constitution n'a pas pris en considération ou encore pour orienter les
équilibres constitutionnels des institutions. A titre d'illustration, le
Congo a usé bien des constitutions, faisant ainsi de ce pays un
champion de l'instabilité et le plus vaste cimetière
institutionnel de l'ensemble des pays d'Afrique. En trente-six ans, six textes
et sept Actes fondamentaux ont été adoptés, de telle sorte
que le régime provisoire apparaît comme étant la
règle et la Constitution, l'exception5(*).
Soucieux de revenir sur des bases politiques plus saines, une
ènième constitution est adoptée par
référendum le 20 janvier 2002. En considération de
l'expérience vécue depuis 1991, date de l'instauration d'une
démocratie pluraliste, le Congo a entendu renforcer le rôle du
président de la République dans l'équilibre institutionnel
de l'Etat. En optant pour un régime présidentiel fort ou encore
un présidentialisme forcené selon l'expression du
professeur Félix Bankounda-Mpélé, le président de
la république du Congo est devenu un personnage stratégique dont
les pouvoirs ont été considérablement renforcés. Ce
qui fait dire à F. Bakounda-Mpélé que si en France, et
sous la Ve république, l'on a voulu faire du président de la
république la clé de voute des institutions, il ressort qu'en
Afrique (et plus précisément au Congo), celui-ci
s'impose, au-delà des institutions, comme la clé de voute de la
société, en raison de l'importance des prérogatives de
droit et de fait qui lui sont reconnues, ou qu'il s'octroie>>6(*)
Le président vient au premier rang dans l'ordre de
présentation des organes constitutionnels. La constitution lui consacre
son titre V7(*). Cette
préséance symbolise une primauté qui se traduit dans son
mode de désignation et son statut.
Dans cette étude, nous allons nous contenter de faire
une analyse des dispositions de la constitution actuellement en vigueur sur les
aspects qui concernent le président de la République en tant
qu'institution. Aussi sans revenir sur les conditions d'émergence de
cette constitution, nous allons décrypter le statut du président
de la république (I) avant d'aborder les pouvoirs que lui confère
la constitution du 20 janvier 2002 (II).
I - LE STATUT DU PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE
Aborder la question du statut du président de la
république du Congo revient à analyser les règles
applicables à son élection et les mécanismes d'alternance
au pouvoir.
A - LES REGLES APPLICABLES A L'ELECTION DU PRESIDENT DE
LA REPUBLIQUE
Tous les systèmes de désignation du chef de
l'Etat républicain ont à choisir entre l'élection directe
par le peuple et l'élection par ses représentants8(*). Au Congo, depuis 1992, le choix
de l'élection directe du chef de l'Etat a été
privilégié. Le but ultime de ce choix était de
conférer au titulaire de la charge suprême une
légitimité et une autorité accrues. Ainsi, la constitution
de 2002 en a définit les règles de désignation.
A1 - L'éligibilité
Pour être candidat à une élection
présidentielle au Congo, il faut satisfaire à sept conditions.
Aux termes de l'article 58 de la constitution <<nul ne peut
être candidat aux fonctions de président de la
république :
- S'il n'est de nationalité congolaise
d'origine ;
- S'il ne jouit de tous ses droits civils et
politiques ;
- S'il n'est de bonne moralité ;
- S'il n'atteste d'une expérience professionnelle
de quinze ans, au moins ;
- S'il n'est âgé de quarante ans, au moins,
et de soixante dix ans, au plus à la date du dépôt de sa
candidature ;
- S'il ne réside de façon interrompue sur le
territoire de la république au moment du dépôt de sa
candidature depuis au moins vingt quatre mois. L'obligation de résidence
sus-indiquée ne s'applique pas aux membres des représentations
diplomatiques ou consulaires, aux personnes désignées par l'Etat
pour occuper un poste ou accomplir une mission à l'étranger et
aux fonctionnaires internationaux ;
- S'il ne jouit d'un état de bien-être
physique et mental dûment constaté par un collège de trois
médecins assermentés, désignés par la cour
constitutionnelle >>.
L'article 48 de la loi 24-2001 du 24 novembre 2001 portant loi
électorale précise que tout candidat à
l'élection présidentielle doit faire une déclaration de
candidature légalisée comportant :
- Ses nom et prénom, date et lieu de naissance,
profession et domicile ;
- Quatre cartes de photographies d'identité et le
logo choisi pour l'impression de ses affiches électorales ;
- un curriculum vitae certifié sur l'honneur
;
- un certificat médical délivré par
un collège de trois médecins assermentés
désignés par le juge constitutionnel ;
- un spécimen de signature;
- un casier judiciaire ;
- un certificat de nationalité ;
- une déclaration de moralité fiscale
;
- le récépissé de versement au
trésor public d'un cautionnement de cinq millions (5.000.000) de francs
CFA, soit 7621,95€ remboursable au candidat ayant obtenu au moins 15% de
suffrages. Il appartient à la cour constitutionnelle9(*) de statuer sur la
recevabilité des dossiers de candidatures.
En restreignant les conditions d'éligibilité,
les constituants congolais entendaient s'inspirer des dérives qui ont
marqué les quatre dernières décennies de l'histoire
politique congolaise en misant sur la compétence et la maturité
dans la gestion des affaires de l'Etat.10(*) Or une lecture critique de ces conditions montre que
les considérations d'ordre partisanes ont prévalu dans ces
restrictions.
D'une part, l'obligation d'une résidence permanente et
ininterrompue sur le territoire de la république depuis au moins vingt
quatre mois, excepté les membres des représentations
diplomatiques ou consulaires, les personnes désignées par l'Etat
pour occuper un poste ou accomplir une mission à l'étranger et
les fonctionnaires internationaux, est difficile à prouver en raison du
flou entretenu par la loi elle-même. Il reste que cette restriction est
une réelle exclusion surtout pour les personnalités en
poste à l'étranger et des nationaux dont les missions de travail
imposent des multiples déplacements à l'étranger. On peut
citer entre autres les expatriés des sociétés
privées, les entrepreneurs, les enseignants chercheurs, les sportifs,
les artistes, les experts des missions des ONG etc. ;
D'autre part, en limitant l'âge à 70 ans maximum,
cette condition écarte beaucoup de candidatures potentielles qui sont
désormais frappées par le facteur âge car rien ne peut
justifier politiquement, intellectuellement ou physiquement cette limite. En
2009 par exemple, le candidat Dénis Sassou N'guesso n'a pas eu des
pointures crédibles dans la lutte pour son maintien au pouvoir car
né en 1943, il n'avait que 66 ans. Donc éligible pour un
deuxième mandat alors que tous ses adversaires vieillissants ne
pouvaient plus se prévaloir des conditions édictées par
les textes pour candidater à l'élection
présidentielle11(*).
C'est cet article qui a été utilisé par
la Cour Constitutionnelle pour vérifier la régularité des
candidatures à l'élection présidentielle de 2009. Dans sa
décision n°003/DCC/EL/PR/09 du 19 juin 2009
relative à la recevabilité des dossiers de candidatures à
l'élection du président de la République, scrutin du 12
juillet 2009, la Cour Constitutionnelle a invalidé les candidatures
de :
- M. Ange Edouard Poungui, M. Marcel
Guitoukoulou et M. Rigobert Ngouolali pour absence de
preuve de résidence permanente et ininterrompue au Congo sur les vingt
quatre derniers mois précédant le scrutin.
D'interprétation restrictive, le juge constitutionnel a
considéré que ne remplissait pas la condition de résidence
permanente et ininterrompue M. Ange Edouard Poungui qui a fourni deux adresses
différentes (Poto-Poto & Moungali) pourtant dans la même
ville Brazzaville et le fait d'effectuer pour des raisons de convenances
personnelles des voyages à l'étranger soit quatre voyages en 2007
et cinq voyages en 2008;
- M. Christophe Moukoueké pour avoir
dépassé l'âge requis pour être candidat. Né le
25 avril 1939, Le candidat avait atteint 70 ans, un mois et dix-huit jours au
12 juin 2009, date du dépôt de sa candidature. Au sens de
l'article 58, sa candidature était donc irrecevable car âgé
de plus de soixante dix ans.
Cette décision de la Cour Constitutionnelle a fait
l'objet de vives contestations. En effet, la Cour a été
vertement critiquée pour ces invalidations : il lui a
été reproché de faire de l'article 58-6 de la
constitution, une machine à éliminer, au seul
bénéfice du président sortant, et, en particulier, de
priver de compétition le candidat du seul parti d'opposition
représenté au parlement12(*) La lecture de cet article laisse clairement
apparaitre la volonté de verrouiller l'élection
présidentielle car les conditions de la compétition
présidentielle ont été revues et corrigées, de
manière à avantager le Président sortant par
l'élimination à priori de rivaux gênants.
A2 - Le mode de scrutin
Plus de quarante années après les
indépendances, le Congo n'aura connu que quatre élections
présidentielles libres et transparentes. En 1961, le Congo organise sa
première élection au suffrage universel direct qui a porté
l'abbé Fulbert Youlou au pouvoir. Après son renversement, une
longue période du parti unique met entre parenthèse le
phénomène du vote comme moyen d'accès au pouvoir.
A la faveur de la vague de démocratisation qui secoue
le continent africain à la fin des années 1980, le Congo opte
pour le pluralisme politique. Une élection est organisée pour
élire le nouveau président du Congo démocratique et
pluriel.
En 2002, la nouvelle constitution prévoit un mode de
scrutin uninominal, majoritaire à deux tours. Au premier tour la
majorité des suffrages exprimés est exigée pour être
élu. Au deuxième tour, seuls les deux candidats en tête
peuvent se présenter. C'est ce qui ressort des stipulations de l'article
59 selon lesquelles << le président de la république
est élu à la majorité absolue des suffrages
exprimés. Si celle - ci n'est pas obtenue au premier tour du scrutin, il
est procédé vingt et un jours après à un second
tour. Seuls peuvent s'y présenter les deux candidats ayant recueilli le
plus grand nombre de suffrages au premier tour. Est déclaré
élu au second tour, le candidat ayant recueilli le plus grand nombre de
suffrages exprimés >>. C'est sur la base de cet article que
furent convoquées les élections présidentielles de 2002 et
celle de 2009, élections qui consacraient la victoire par les urnes du
président Dénis Sassou NGUESSO avec des
résultats au premier tour qui rappelaient l'âge d'or du parti
unique. A titre d'illustration, les résultats des
élections de 2002 et 2009.
*Les résultats du 1er tour de
l'élection présidentielle du 10 mars 2002
|
Nombre
|
% des inscrits
|
% des votants
|
Inscrits
|
1 733 943
|
|
|
Votants
|
1 380 651
|
74,70
|
|
Suffrages exprimés
|
1 202 611
|
|
87,10
|
Bulletins blancs ou nuls
|
97 208
|
|
12,90
|
Abstentions
|
531 332
|
25,30
|
|
Candidat
|
Voix
|
% des exprimés
|
|
Dénis Sassou Nguesso
|
1 075 247
|
89,41
|
|
Kignomba kia Mboungou
|
33 154
|
2,76
|
|
Angèle Bandou
|
27 849
|
2,32
|
|
Jean Félix Demba Tello
|
20 252
|
1,68
|
|
Luc Adamo Mateta
|
19 074
|
1,59
|
|
Come Manckassa
|
15 054
|
1,25
|
|
Bonaventure Mizidy
|
11 981
|
1,00
|
|
*Les résultats du 1er tour de
l'élection présidentielle du 12 juillet 2009
|
Nombre
|
% des inscrits
|
% des votants
|
Inscrits
|
2 079 294
|
|
|
Votants
|
1 380 651
|
66,40
|
|
Suffrages exprimés
|
1 342 242
|
|
97,20
|
Bulletins blancs ou nuls
|
38 409
|
|
|
Abstentions
|
|
43,60
|
2,80
|
Candidat
|
Voix
|
% des exprimés
|
|
Dénis Sassou Nguesso
|
1 055 117
|
78,60
|
|
Kignomba kia Mboungou
|
100 181
|
7,50
|
|
Nicéphore Antoine Fylla de Saint
Eudes
|
93 749
|
7,00
|
|
Mathias Dzon
|
30 861
|
2,30
|
|
Joseph Hondjouila Miokono
|
27 060
|
2,00
|
|
Guy Romain Kinfoussia
|
11 678
|
0,90
|
|
Jean Francois Tchibinda Kouangou
|
5 475
|
0,40
|
|
Ernest Bonaventure Mizidy Bavoueza
|
3 594
|
0,30
|
|
Clément Mierassa
|
3 305
|
0,30
|
|
Bertin Pandi Ngouari
|
2 749
|
0,20
|
|
Marion Michel Mandzimba Ehouango
|
2 612
|
0,20
|
|
Jean Ebina
|
1 797
|
0,10
|
|
B - LE MANDAT DU PRESIDENT CONGOLAIS
Le mandat présidentiel peut être
considéré comme la période qui débute le jour de la
prestation de serment et prend fin après l'élection
présidentielle plus précisément à la passation de
pouvoir du nouvel élu. Ainsi définit, plusieurs interrogations
interpellent l'esprit à savoir la durée du mandat, son
interruption et celle de sa remise en cause, c'est-à-dire la
responsabilité du président pendant l'exercice de ses
prérogatives.
B1-La durée du mandat : le septennat
La durée du mandat présidentiel au Congo n'a
jamais fait l'objet de nombreux débats. En effet excepté
l'éphémère expérience démocratique du
lendemain des indépendances, le Congo a très tôt
opté pour un régime de parti unique. Le Parti dirigeant l'Etat,
le président du bureau politique du parti unique était de droit
chef de l'Etat. L'alternance au pouvoir ne se faisait qu'au rythme des
congrès du parti. C'est dans cet esprit que le président
Dénis Sassou Nguesso alors membre du bureau politique de Parti Congolais
du Travail était devenu le chef de l'Etat en 1979 jusqu'à la
vague de démocratisation de la fin des années 1980.
La conférence Nationale, après avoir
stigmatisé les maux dont avait souffert le Congo durant le long
règne du parti unique, a décidé la fin du monopartisme,
l'instauration de la démocratie pluraliste et de l'Etat de droit. En
reconnaissant l'existence des partis politiques comme un des fondements de la
démocratie pluraliste, le Congo tournait définitivement la page
à la période des « présidents à
perpétuité ».
La constitution du 15 mars 1992 qui concrétise cette
rupture prévoyait l'élection du président de la
république au suffrage universel pour un mandat de cinq ans.
C'est sous l'empire de cette constitution que sont
organisées les premières élections présidentielles
au Congo en élisant le 16 août 1992, de manière libre et
démocratique, Pascal Lissouba à 61,32% des suffrages contre
38,68%.
A la différence de la constitution du 15 mars 1992 qui
avait prévu le quinquennat, celle de 2002 a opté pour un
septennat renouvelable. L'article 58 de la constitution précise que le
président de la république est élu pour un mandat de sept
ans renouvelable une fois.
En rallongeant le mandat présidentiel, le Congo s'est
aligné dans la moyenne des pays de la sous-région dont la
durée du mandat est de 7 ans. Cette rallonge a été
également motivée par la nécessité de favoriser une
réelle stabilité des institutions au lendemain des
expériences vécues durant les vingt dernières
années essentiellement marquées par de violents conflits. Il
était tout à fait « normal » que le Congo
stabilise la vie politique.
B2-La fin du mandat
En principe, deux situations peuvent justifier la fin du
mandat présidentiel :
Soit, le président parvient au terme normal de son
mandat. Le scrutin est alors organisé trente jours au moins, et
quarante jours au plus, avant la date d'expiration du mandat du
Président de la République en exercice. La continuité de
la fonction présidentielle est ainsi assurée en même temps
qu'est limitée la situation désagréable et fâcheuse
due à l'existence simultanée de deux présidents : le
nouvel élu, en droit sans pouvoir, et le sortant, sans grands pouvoirs
en fait. Elu normalement en 2009, le mandat du président devrait prendre
fin si les règles constitutionnelles sont respectées en 2016 date
de la prochaine élection présidentielle ;
Soit le président cesse ses fonctions de
façon prématurée en raison d'un décès, d'une
démission, un empêchement définitif de remplir sa
mission. Le scrutin aura alors lieu 90 jours après cessation de
ses fonctions par le président sortant, ou après la constatation
du caractère définitif de l'empêchement. Il faut du temps
pour organiser l'élection sans toutefois laisser trop longtemps cette
vacance du pouvoir. En prévision de cette donnée, le constituant
congolais a organisé le régime de l'interruption du mandat selon
que cette incapacité découle des raisons indépendantes de
la volonté du président (Intérim) ou que celle - ci
découle de son propre chef (Suppléance).
- L'intérim.
En cas de vacance du président de la république
par décès, démission ou toute autre cause
d'empêchement définitif constatée par la cour
constitutionnelle, saisie par le président de l'assemblée
nationale, les fonctions du chef de l'Etat sont provisoirement exercées
par le Président du Sénat.
Les pouvoirs du président de la république par
intérim sont ceux reconnus au président de la république
sauf ceux relatifs à la nomination des membres du gouvernement (art.
74), à l'exercice du droit de grâce (art. 80), à l'exercice
des mesures exceptionnelles en cas de menace grave et imminente (art. 84),
l'organisation du référendum (art. 86) et enfin l'initiative de
la révision constitutionnelle (art. 185)
A la différence de la constitution française de
1958 qui prévoit à son article 7 l'intérim du
président du sénat <<et, si celui-ci est à son
tour empêche d'exercer ces fonctions, par le Gouvernement>>,
la Constitution congolaise n'a pas prévu cette
éventualité. Ce qui suppose un vide institutionnel en cas de
vacance simultanée du président de la république et du
Président du Sénat. Cette situation est d'autant plus
préoccupante qu'elle peut entraîner le Congo dans une
véritable crise en l'absence des mécanismes de substitution.
Dans tous les cas de figure, l'histoire politique du Congo n'a
jamais connu l'hypothèse d'une alternance normale et constitutionnelle
du pouvoir13(*). Depuis
1963, la dévolution et l'alternance au pouvoir ont toujours
été faites en dehors du cadre constitutionnel établi. En
1963, alors que la constitution de mars 1961 prévoyait les
mécanismes d'alternance en cas de vacance du pouvoir c'est-à-dire
l'organisation d'une élection, le président Massamba Débat
a été installé manu militari au pouvoir à la suite
des événements du 13-14-15 août 1963 qui ont
entraîné la chute du président Youlou.
A la mort du président Marien NGOUABI en 1977, un
comité militaire du parti a été mis en place pour
gérer les affaires de l'Etat alors que la constitution en vigueur
prévoyait l'intérim du pouvoir par le vice-président du
Bureau politique du Parti - Etat, le Parti Congolais du Travail.
En 1997, le président Dénis Sassou Nguesso s'est
autoproclamé président de la république après sa
victoire militaire contre le président Pascal Lissouba alors que la
constitution de mars 1992 qui a été adoptée par
référendum prévoyait l'urne comme mode constitutionnel
pour pallier à la vacance du pouvoir.
Par ailleurs, Il faut souligner que le régime de
l'intérim est bien encadré. L'article 71 de la constitution
prévoit la durée maximale de l'intérim à
quatre-vingt-dix jours. C'est le président du sénat, assurant les
fonctions du président de la république qui a pour mission
d'organiser le scrutin présidentiel qui doit avoir lieu, sauf cas de
force majeure constatée par la Cour Constitutionnelle, quarante-cinq
jours au moins, et quatre-vingt-dix jours, au plus après l'ouverture de
la vacance ou de la déclaration du caractère définitif de
l'empêchement.
Pour éviter toute ambiguïté et surtout pour
dépassionner le débat politique préélectoral, le
président du sénat, assurant l'intérim, ne peut être
candidat à cette élection.
Mais l'empêchement peut résulter aussi du propre
chef du président créant ainsi une situation de
suppléance.
- La suppléance.
Lorsque le président de la république ne peut
exercer une partie de ses prérogatives, il peut être
supplée dans ses fonctions par un ministre à condition que le
président l'ait décidé explicitement. C'est ce qui ressort
des stipulations de l'article 74 alinéa 3 aux termes desquelles le
président de la république <<... peut
déléguer une partie de ses pouvoirs à un
ministre>>
B3-La mise en cause du Président : la
responsabilité présidentielle
En principe, la responsabilité du président de
la république ne peut être engagée sous l'empire de la
constitution du 20 janvier 2002. Ce principe de l'irresponsabilité
présidentielle est celle qui a toujours prévalu dans tous les
textes constitutionnels congolais. Elle couvre :
- La responsabilité pénale et civile du
président pour les actes commis dans l'exercice de ses fonctions. Il ne
peut être poursuivi à leurs propos devant les tribunaux ;
- Et, surtout sa responsabilité politique, en ce sens
que même en cas de désaccord, le parlement ne dispose d'aucune
procédure pour le révoquer ou le contraindre à la
démission. Ceci est d'autant plus vrai que cette irresponsabilité
n'est que la traduction du régime présidentiel opté par la
constitution.
A tout bien prendre, les constituants congolais se sont
inspirés du principe de l'irresponsabilité en Droit
Français. En effet, sous la monarchie en France, le principe selon
lequel « le roi ne peut mal faire » excluait toute
responsabilité du souverain car le droit ne connaissait que la
responsabilité fondée sur la faute. La constitution
française de 1958 a confirmé ce privilège en faisant peser
cette responsabilité non sur le chef d'Etat mais sur le
gouvernement14(*). Sa
responsabilité ne pouvant être engagée que sur un terrain
particulier qui est celui d'une « hypothétique »
haute trahison15(*). Selon
l'article 87 de la constitution congolaise, <<La
responsabilité personnelle du chef de l'Etat peut être
engagée en cas de haute trahison. Le président de la
république ne peut être mis en accusation que par le parlement
réuni en congrès statuant par vote au scrutin secret à la
majorité des deux tiers de ses membres>>. La mise en
accusation du président de la république devant la haute cour de
justice est en théorie une limite au principe de
l'irresponsabilité car on ne saurait admettre que le président
viole gravement et impunément les devoirs de sa charge sans encourir de
sanctions.
Dans la réalité politique congolaise en
particulier et en Afrique en général, cette disposition
relève d'une pure « fanfaronnade
constitutionnelle » en ce qu'il est quasi impossible d'engager
la responsabilité d'un chef d'Etat africain en exercice. La plupart des
chefs d'Etat de la sous-région par exemple ont connu sinon animé
« des dictatures exotiques » et sont devenus
démocrates par la force du temps. On ne devient pas démocrate en
vieillissant. Pères de la nation, ils sont la loi.
Sur le plan politique, malgré le rôle important
joué par le Président congolais, la question de sa
responsabilité ne s'est jamais posée. Le chef de l'Etat Congolais
est politiquement irresponsable. La nature même du régime mis en
place en justifie le cadre. Le président de la république ne peut
dissoudre l'Assemblée Nationale, tout comme celle-ci ne peut le
démettre (article 114)
C - LES INCOMPATIBILITES
« Superman »16(*) peut être de la vie
politique congolaise en raison des attributions que les constituants lui ont
fixées, les fonctions du président de la république sont
soumises à un certain nombre d'incompatibilités auxquelles celui
- ci ne peut en échapper. Les fonctions du président de la
république selon la constitution du 20 janvier 2002, sont incompatibles
avec l'exercice de tout autre mandat électif, de tout emploi public,
civil ou militaire, et toute activité professionnelle. Le
président de la république ne peut pas non plus avoir une
responsabilité au sein d'un parti politique. N'étant pas un
citoyen comme les autres, il ne peut pas par lui-même ou par
intermédiaire, ni acheter, ni rien prendre en bail qui appartienne au
domaine de l'Etat. Il ne peut pas non plus prendre part aux marchés
publics et aux adjudications pour les administrations ou les institutions dans
lesquelles l'Etat a des intérêts.
Ces interdictions et incompatibilités sont d'autant
plus importantes qu'elles limitent les confusions qui règnent dans la
gestion patrimonialiste de l'Etat.
En considération de tout ce qui précède,
il y a lieu d'admettre que la constitution du 20 janvier 2002 a mis en place
les bases de sa solidité et défini des verrous pour permettre la
respiration de la vie politique.
En ce qui concerne les bases de sa solidité, la
constitution a proclamé :
- Le suffrage universel est la seule source du pouvoir
législatif et exécutif. Il garantit la légitimité
au Parlement et à l'exécutif ;
- La séparation stricte du pouvoir exécutif et
du pouvoir législatif avec pour conséquence
l'irresponsabilité respective du parlement vis-à-vis de
l'exécutif. Le gouvernement ne peut dissoudre l'assemblée et
celle-ci ne peut démettre le gouvernement.
- L'indépendance de l'autorité judiciaire
proclamée gardienne des libertés essentielles.
Pour éviter l'expérience des
« présidents éternels »17(*), père de la nation, la
nouvelle constitution a mis en place des verrous pour faciliter l'alternance
constitutionnelle donc la respiration de la vie politique.
· La limitation a deux mandats non
renouvelables. Elu en 2002 et réélu en 2009, le
président actuel aura atteint la limite fixée par l'article 58 de
la constitution ;
· Le verrou de l'âge. Né en
1943, le président Sassou NGUESSO aura 73 ans donc largement
au-delà de l'âge requis ;
· La non-révision constitutionnelle sur le
principe de la limitation du mandat. Contrairement au bidouillage
constitutionnel qui a été fait au Cameroun et au
Sénégal pour déverrouiller la constitution et permettre
une énième candidature du président sortant, au Congo, le
constituant a entendu -théoriquement- interdire toute révision
constitutionnelle qui a pour finalité de remettre en cause la limitation
du mandat du président de la République. L'article 185
alinéa 3 dispose que <<La forme républicaine, le
caractère laïc de l'Etat, le nombre de mandats du Président
de la République (...) ne peuvent faire l'objet de
révision>>.
En somme si ces dispositions ont été
adoptées en 2002, l'applicabilité stricte de la constitution pose
le problème de l'avenir politique du président Dénis
Sassou NGUESSO. Quel que soit les cas de figure, le président actuel ne
peut plus prétendre à une nouvelle candidature car ne remplissant
plus les conditions définies par la mouture constitutionnelle en
vigueur. De ce point vu, le respect des règles constitutionnelles
devrait permettre au Congo de connaître une alternance politique en
2016.
II - LES POUVOIRS DU PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE
Les différents conflits qui ont secoué la vie
politique au Congo dans la décennie 1990 ont justifié l'option
d'un régime présidentiel où le président de la
république est présenté comme l'alpha et l'oméga de
tout le dispositif institutionnel congolais. Selon l'article 56 de la
constitution, le président de la république est le chef de
l'Etat. Il incarne l'unité nationale. Il veille au respect de la
constitution et au fonctionnement régulier des institutions publiques.
Il protège les arts et les lettres.
Garant de la continuité de l'Etat, de
l'indépendance nationale, de l'intégrité du territoire et
du respect des traités et des accords internationaux, le
président est le chef de l'exécutif et du Gouvernement. Il
détermine et conduit la politique de la nation. Il dispose du pouvoir
réglementaire et assure l'exécution des lois. L'ensemble de ces
pouvoirs qui fait du président congolais le personnage central de la
constitution, peuvent être classés en deux
catégories : les pouvoirs exclusifs qui ne peuvent être mis
en oeuvre que par le président lui-même et les pouvoirs
partagés qui ne peuvent être mis en oeuvre qu'avec le concours
d'un autre organe du pouvoir.
A - LES POUVOIRS PROPRES DU PRESIDENT DE LA
REPUBLIQUE
Les pouvoirs propres du président sont ceux qu'il met
en oeuvre de façon indépendante. La constitution définit
la fonction du président autour de trois missions
fondamentales :
*Le gardien de la constitution. Le président
doit veiller au respect de la constitution. Pour cela, il devra rappeler, au
besoin, leurs devoirs aux autorités publiques, interpréter
parfois la constitution, user de ses pouvoirs pour la faire respecter.
*L'arbitre. Le président doit par son
arbitrage assurer le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi
que la continuité de l'Etat.
*Le garant. Le président est le garant de
l'indépendance de la nation, de l'intégrité du territoire
et du respect, par le Congo et par ses partenaires, des accords internationaux.
C'est le volet extérieur des attributions du chef de l'Etat. La
constitution lui donne aussi les moyens concrets de préserver les
intérêts supérieurs de la nation.
La constitution a mis à la disposition du
président de la république des pouvoirs et procédures
propres dont la mise en oeuvre n'exige pas le contreseing des ministres. Il
s'agit concrètement :
- Le pouvoir de nomination des membres du
Gouvernement. De caractère moniste, le pouvoir exécutif
congolais est dirigé par le chef de l'Etat qui est lui - même chef
du Gouvernement. Il nomme par voie de conséquence tous les ministres qui
ne sont responsables que devant lui. Il met naturellement fin à leurs
fonctions dans les mêmes conditions (article 74) ;
- Le droit de message. Aux termes de l'article 85, le
président de la république adresse, une fois par an, un message
sur l'état de la nation au parlement réuni en congrès. Il
peut à tout moment adresser des messages à l'assemblée
nationale ou au Sénat tout en sachant que ces messages ne peuvent donner
lieu à débat.
- L'organisation du référendum (article
86). Le Président Congolais a seul le pouvoir de recourir au
référendum après consultation des présidents des
deux chambres du parlement. Ce pouvoir n'est pas reconnu au président
de la république par Intérim.
- Les relations avec la Cour Constitutionnelle. Le
président nomme trois membres de la Cour Constitutionnelle. Il les
choisit librement. Il peut déférer à la Cour une loi ou un
traité qu'il estime contraire à la constitution. Il agit alors en
gardien de la constitution et n'a à solliciter l'accord de personne.
- L'exercice du droit de grâce. Le droit de
grâce est une prérogative exclusive du chef de l'Etat. Dans
l'esprit du constituant, le droit de grâce est l'affirmation du pouvoir
étatique et de l'autorité du chef de l'Etat qui seul peut punir,
et a fortiori, détient le pouvoir de pardonner. Au sens de l'article 80,
le président de la République exerce le droit de grâce
c'est à dire le droit de remettre aux condamnés, en partie ou en
totalité, leurs peines. Il est le dernier recours.
- La dictature de salut public ou l'exercice des
mesures exceptionnelles en cas de menace grave et imminente. Le
président de la république dispose des pouvoirs exceptionnels
qu'il met en oeuvre pendant les périodes de crise. Ce pouvoir propre au
président de la république n'est que la réplique de
l'article 16 de la constitution française de 1958. Selon l'article 84 de
la constitution congolaise <<Lorsque les institutions de la
République, l'indépendance de la Nation,
l'intégrité du territoire national ou l'exécution des
engagements internationaux sont menacés de manière grave et
imminente et que le fonctionnement régulier des pouvoirs est
menacé ou interrompu, le président de la république,
après consultation des Présidents des deux chambres du parlement
et du président de la cour constitutionnelle, prend les mesures
exceptionnelles exigées par les circonstances. Il en informe la nation
par un message. Le parlement se réunit de plein droit en session
extraordinaire. Le parlement fixe le délai au terme duquel le
président de la république ne peut plus prendre des mesures
exceptionnelles>>. La mise en oeuvre des mesures exceptionnelles
répond simplement à la maxime selon laquelle « à
période exceptionnelle, mesures exceptionnelles ». En d'autres
termes, le président de la république garant de la
continuité et du fonctionnement des institutions doit, pour sauver
l'Etat, exercer une «véritable dictature légale »
qui ne peut se justifier dans un Etat démocratique que par une menace
grave et imminente qui pèse sur les institutions de la
République, sur l'indépendance de la nation, sur
l'intégrité du territoire ou enfin sur l'exécution des
engagements internationaux. Le recours à ces pouvoirs quasi
illimités ne peut donc être invoqué que lorsque la menace
peut avoir pour conséquence d'entraîner le fonctionnement
irrégulier des pouvoirs publics constitutionnels
Même s'il est théoriquement encadré par la
consultation des deux chambres du parlement et par la cour constitutionnelle,
les pouvoirs « quasi-incontrôlés » que
confère la constitution du 20 Janvier 2002 au président de la
république lui sont propres. De plus dans les sociétés
politiques africaines, le recours à ses mesures constitue la
règle.
Dans le cas du Congo, la pratique politique congolaise a
montré que l'action aussi bien du parlement que le recours à une
institution n'a été que symbolique dans la prise des
décisions du Président. Toutefois, il faut reconnaitre les
pouvoirs propres font du président de la République, un acteur
qui compte dans le jeu politique, peut-être plus à cause du fait
que l'éventualité de leur utilisation doit être prise en
considération que par l'emploi qu'il en fait. Ils ne lui permettent pas
de gouverner18(*).
B - LES POUVOIRS PARTAGES
Les pouvoirs du président de la république sont
dits « partagés » lorsque ceux-ci ne peuvent
être mis en oeuvre qu'avec le concours d'un autre organe ou d'une autre
autorité. Dans le cas du Congo, le président ne partage pas assez
de prérogatives en raison du caractère moniste de
l'exécutif et surtout de son hyper - puissance. Toutefois, à la
lumière de la constitution actuellement en vigueur, on relève
quelques domaines d'action pour lesquels, la mise en oeuvre nécessite
l'aval des membres du gouvernement. Selon l'article 82, les actes du
président de la république, autres que ceux prévus aux
articles 74 (nomination des ministres), 84 (la mise en oeuvre des mesures
exceptionnelles), 86 (l'initiative du référendum), sont
contresignés par les ministres chargés de leur exécution.
C'est le cas de :
- La nomination des ambassadeurs et les envoyés
extraordinaires auprès des puissances étrangères et des
organisations internationales. Le président de la
république accrédite les ambassadeurs envoyés à
l'étranger et reçoit les lettres de créances des
ambassadeurs étrangers au Congo. Il négocie et ratifie les
traités.
- La nomination aux emplois civils et militaires de
l'Etat. Le président de la République dispose du pouvoir de
nomination aux emplois civils et militaires de l'Etat.;
- La promulgation des lois. Une fois votée, la
loi doit être mise en application. Sa promulgation par le
Président est la formalité qui permet sa mise en vigueur, c'est
le dernier acte de la procédure législative. Le président
dispose de vingt jours à compter de la transmission qui lui en est faite
par le bureau de l'Assemblée Nationale. Ce délai est
réduit à cinq jours en cas d'urgence déclarée par
le parlement. Avant l'expiration de ces délais, le président peut
demander au parlement une seconde délibération de la loi ou de
certains de ses articles. Cette seconde délibération ne peut
faire l'objet d'un refus (article 83) ;
- La convocation des sessions extraordinaires et leur
clôture. En dehors du rythme normal de ses sessions, la constitution
prévoit que le parlement peut se réunir en session
extraordinaire. Chaque chambre du parlement peut être convoquée en
session extraordinaire par son président sur un ordre du jour
déterminé, à la demande du président de la
république. La clôture intervient dès que la chambre saisie
a épuisé l'ordre du jour pour lequel elle a été
convoquée et, au plus tard, quinze jours à compter de la date du
début de sa réunion.
- L'initiative de la révision
constitutionnelle (article 185). L'initiative de la révision de la
Constitution appartient, concurremment, au Président de la
République et aux membres du Parlement. Lorsqu'il émane du
Président de la République, le projet de révision est
soumis directement au référendum, après avis de
conformité de la Cour constitutionnelle. Lorsqu'elle émane du
Parlement, la proposition de révision doit être votée par
les deux tiers des membres des deux chambres du Parlement réuni en
congrès, après avis de conformité de la Cour
constitutionnelle. Dans les deux cas, la révision n'est
définitive qu'une fois approuvée par référendum.
- La signature des décrets et des ordonnances.
Dans la tradition parlementaire, le pouvoir réglementaire appartient au
premier ministre, mais le président y est associé dans la mesure
où il doit signer les ordonnances et les décrets pris en conseil
des ministres. Le régime mis en place par le constituant Congolais
exclut l'existence d'un premier ministre. Il apparait dès lors que le
président de la république, chef de l'Etat est le chef du
Gouvernement. Il détermine et conduit la politique de la nation. A ce
titre, il dispose au sens de l'article 56 alinéa 2 du <<pouvoir
réglementaire et assure l'exécution des lois>>. Ici la
signature du chef de l'Etat n'est pas une simple convention.
- La relation avec la justice. En tant que garant de
l'indépendance de l'autorité judiciaire, le président de
la République dispose de certaines prérogatives à savoir
la présidence du Conseil Supérieur de la Magistrature et la
nomination des magistrats. Ici, il se fait souvent remplacer par le garde des
sceaux.
Tous ces pouvoirs partagés qui s'exercent dans des
domaines divers sont soumis à contreseing.
CONCLUSION
Fort de sa légitimité populaire liée
à son élection au suffrage universel direct, le président
de la République du Congo exerce une fonction qui fait de lui le centre
de tous les mécanismes constitutionnels et politiques. Malgré la
relative stabilité des institutions introduite par la constitution du 20
janvier 2002, et au regard des turpitudes de l'histoire politique de ce pays,
malin est celui qui déterminera avec exactitude, la durée de vie
d'un tel texte19(*) tant
et si bien que la pratique politique congolaise a montré que chaque
alternance correspondait à un nouveau texte constitutionnel20(*).
En optant pour le régime présidentiel, le Congo
a entendu pallier aux manquements de la constitution du 15 mars 1992 dont les
insuffisances ont été perceptibles dès les
premières années de son applicabilité.
En portant le mandat de 5 ans à 7 ans, le Congo a
misé sur la stabilité des institutions qui au regard des
péripéties des deux dernières décennies, ont
entraîné le pays dans un véritable chaos politico -
institutionnel entre 1992 à 2000. D'autre part, la durée
extrêmement longue permet au président de la république
d'avoir une maîtrise et une domination sur presque tous les rouages de
l'appareil d'Etat pour garantie la paix et la sécurité du
pays.
En somme, au-delà des critiques qui ont suivi
l'adoption de cette constitution, il faut reconnaître qu'elle a eu le
mérite de pacifier l'exercice du pouvoir depuis 2002. En
témoigne, l'accalmie qui a suivi les élections
présidentielles (2002 et 2009), législatives (2002 ; 2007 et
2012) qui généralement sont sources de conflit au Congo. Cette
constitution a peut-être « accalmisé » la vie
politique, la question que se posera, le néophyte de la vie politique
congolaise est celle de savoir si on doit imputer cette stabilité au
texte constitutionnel en vigueur ou encore à la personne du chef de
l'Etat tout en sachant qu'un texte constitutionnel aussi parfait soit-il ne
vaut que par la ténacité et la capacité des acteurs en
charge de l'appliquer. « That's a question ».
Seul le tourbillonnement politique post Sassou Nguesso pourra
clarifier la situation et surtout répondre à la question du
néophyte. L'expérience de ces cinq dernières
décennies du constitutionnalisme congolais a montré à bon
escient que les constitutions apparaissent rigides quant à la forme et
aux conditions de révision mais la pratique en fait très souvent
des constitutions souples, et allègrement modifiées au gré
des circonstances. Les constitutions congolaises, devenues pendant longtemps,
le jouet des politiques, ont toujours été aisément et
fréquemment remaniées par des montages et démontages au
gré des stratégies et alliances politiques.
L'inconsistance structurelle de l'Etat congolais et
l'histoire sociopolitique récente laissent à penser que les
fondements d'un Etat véritablement démocratique sont encore loin
d'être en place. Le processus de démocratisation de la vie
politique reste encore un grand chantier tant et si bien que les conditions qui
ont motivé le non respect des règles constitutionnelles au Congo
sont toujours réunies. C'est dire que le Congo n'est pas à l'abri
d'un dérapage sociopolitique si les règles constitutionnelles
relatives à l'alternance politique ne sont pas respectées en
2016. Les mêmes causes produisant les mêmes effets.
* 1 - Juriste,
Diplômé en Sciences Politiques. Chercheur, Consultant en
Gouvernance & Elections - Chargé de Cours visiteur à
l'Université Internationale de Brazzaville (UIB) et l'Ecole
Supérieure de Gestion et Administration des Entreprises
(ESGAE-Brazzaville).
* 2 - Abbé Fulbert Youlou
(1961-1963) ; Alphonse Massamba Débat (1963-1969) ; Marien
NGouabi (1969-1977) ; Jean Jacques Joachim Yhombi Opango (1977 -
1979) ; Dénis Sassou Nguesso ( 1977 - 1992) ; Pascal Lissouba
(1992 - 1997) ; Sassou Nguesso (Depuis 1997).
* 3 -Pour la même période
c'est-à-dire de 1960 à nos jours, le Gabon a
connu trois président : Léon Mba, Omar Bongo Ondimba et Ali
Bongo Ondimba depuis 2009 ; Le Cameroun, deux
présidents : Ahmadou Ahidjo et Paul Biya depuis 1982 ;
La RCA, six présidents, Barthélemy Boganda,
David Dacko, Jean Bedel Bockassa, André Kolingba, Ange Félix
Patassé et Francois Bozizé depuis 2003 ; Le
Tchad, cinq présidents, Francois Tombalbaye, Félix
Malloum, Goukouni Oueddei, Hissène Habré, Idriss Déby
depuis 1990 ; La Guinée Equatoriale, deux
présidents, Macias NGuema et Théodore Obiang Nguema depuis
1979 ; La RDC, quatre présidents, Joseph
Kasa-Vubu, Joseph Désiré Mobutu, Laurent désiré
Kabila, Joseph Kabila depuis 2001.
* 4 - Les articles 69, 70 et 71
de la constitution du 15 mars 1992 définissaient les règles
applicables pour assurer la vacance et l'élection du président de
la république.
* 5 -C'est-à-dire de
1961, année d'adoption de la première Constitution
postindépendance qui établissait un régime
présidentiel - sans préjudice pour les principes
du constitutionnalisme français - à 1997, année d'adoption
du tout dernier Acte fondamental, après le coup d'Etat de
l'été 1997, du général Sassou-Nguesso. Pour une
lecture plus approfondie, lire Félix Bakounda <Une septième
constitution, pourquoi faire ?>
http://www.politique-africaine.com/numeros/pdf/081163.pdf
* 6 - Pour une analyse
critique des régimes constitutionnels mis en place en Afrique noire
Francophone aux lendemains des indépendances, lire Félix
Bankounda-Mpélé, Repenser le Président Africain,
VIIe congrès de Droit Constitutionnel, Paris AFDC, septembre 2008
* 7 - Le titre V de la
constitution du 20 janvier 2002 ne parle pas expressément de
Président de la république mais plutôt du pouvoir
exécutif.
* 8 - Philippe Ardant, Les
institutions de la Ve république, Hachette Livre, Paris 1997,
p.45
* 9 - L'article 146 de la
constitution dispose <<La cour constitutionnelle veille à la
régularité de l'élection présidentielle...>>
* 10 - Né le 31
décembre 1938, le Président Marien NGouabi est devenu chef de
l'Etat en 1968 à la suite du mouvement insurrectionnel qui a
renversé le président Massamba débat. De même, le
président Dénis Sassou NGuesso né le 23 novembre 1943 est
devenu chef de l'Etat pour la première fois en 1979 avant de revenir en
1997
* 11 C'est le cas de Yhombi
Opango, président du RDD, Pascal Lissouba, président de l'UPADS
et Thystère TCHICAYA, président du RDPS tous mis « hors
jeu » par l'âge.
* 12 - Pour plus de lecture
concernant l'analyse critique de cette décision de la Cour
Constitutionnel, cf Stéphane BOLLE, La constitution est dure, mais c'est
la constitution, http :
www.la-constitution-en-afrique.org
* 13 - Une nuance doit
être faite lorsque le président de la république
s'inclinait sur le verdict des urnes en 1992 à la suite d'une transition
pacifique qui avait engagé l'ouverture de la vie politique au
pluralisme. Il y a lieu d'indiquer aussi qu'à cette période, le
président Dénis Sassou NGuesso n'avait pas la
réalité du pouvoir pour s'opposer de quelques manières que
ce soit à cette élection en particulier du fait de la vague de
démocratisation qui déferlait en Afrique.
* 14 - Philippe Ardant, les
institutions de la 5e république, 4e éd.
Hachette livre, 1997, p52
* 15 - La notion de haute
trahison est floue. Elle n'est ni définie par le code pénal ni
la pratique. Pour le Professeur Philippe Ardant, cette imprécision n'est
pas sans danger. Car on pourrait abusivement qualifier de haute trahison
n'importe quel comportement, n'importe quel désaccord politique. Or,
cette qualification doit être réservée au cas où le
président abandonnerait ou, au contraire, déborderait largement
ses prérogatives, ne respecterait pas la constitution dont il a la
garde.
* 16 -Pour Aymar, <<Le
président de la République est une personne qui n'est pas comme
les autres. Dans cet Etat, les constituants ont élevé le chef de
l'Etat d'une façon progressive jusqu'à créer un
« superman politique » par son rôle à jouer
dans les enjeux de la majorité parlementaire>> in «Le
président de la république dans la constitution congolaise du 20
janvier 2002 : L'écart du mimétisme de la 5e
république, Mémoire, Master Recherche, Université de
Poitiers, 2006 »
* 17 - Le président
Dénis Sassou Nguesso est au pouvoir : De 1979 à 1992 et
depuis 1997 à nos jours.
* 18 - Philippe Ardant, Idem,
P61
* 19 - Excepté les
lois constitutionnelles de 1958, le Congo a adopté à ce jour plus
d'une dizaine de textes constitutionnels, actes fondamentaux compris.
* 20 - Par exemple la
période qui part de 1991 à 2002 a vu apparaître deux textes
constitutionnels qui ont au fond ne correspondent qu'à deux changements.
En 1992, le président Dénis Sassou Nguesso a été
battu aux urnes sur la base de la constitution du 15 mars 1992. La victoire
militaire qui l'apporte au pouvoir a entraîné l'abrogation de la
constitution de 1992. Un acte fondamental organisant le fonctionnement des
institutions pendant la période transitoire, a été mis en
place. En 2002, une nouvelle constitution est adoptée par
référendum en remplacement de celle de 1992 pour légitimer
par la voie des urnes la victoire militaire du Président Dénis
Sassou Nguesso.
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