Chapitre 7 : Effets du contrat agricole sur la
performance de la production du maïs
Les résultats des chapitres précédents
nous enseignent que, dans la commune de Kétou, l'agriculture
contractuelle est en pleine expansion. Le crédit offert par les
commerçants est utilisé en grande partie pour louer de la main
d'oeuvre. Autrement dit, le contrat contribue à financer l'agriculture
dans le milieu. On peut alors projeter qu'il y a des effets positifs sur la
performance de la production agricole. Dans ce chapitre, nous
présentons, d'une façon conceptuelle le mécanisme de
l'impact du contrat sur la performance de la production vivrière dans la
commune de Kétou dans un premier temps, et, dans un second temps, nous
proposons une analyse empirique sur les principaux canaux à travers
lesquels cet impact se réalise.
7.1. Mécanisme de l'impact du contrat sur la
performance de la production vivrière dans la commune de
Kétou
Pour mesurer la performance de la production vivrière,
on peut exploiter plusieurs indicateurs. Compte tenu des données dont
nous disposons, nous avons choisi d'exploiter la productivité moyenne du
facteur fixe le plus rare. Dans la commune de Kétou, les facteurs fixes
de production les plus importants sont la terre et le travail familial (main
d'oeuvre familiale) mais le dernier est le plus rare. On prévoit que la
productivité du travail familial sera positivement affectée si le
paysan adhère au contrat.
L'amélioration de la productivité du travail
familial sera obtenue à travers deux canaux. Premièrement, le
contrat peut induire une augmentation de la superficie emblavée en
maïs puisqu'il permet d'accroître la disponibilité de la
main d'oeuvre. Le contrat peut induire aussi une amélioration des
rendements. Les deux effets combinés vont conduire à
l'amélioration de la productivité du travail familial. Il
convient de mentionner qu'un effet sur le rendement est attendu parce qu'on
pourrait assister à une intensification de la main d'oeuvre sur les
parcelles cultivées si cet input est rendu disponible à cause du
contrat. L'intensification de la main d'oeuvre signifie une amélioration
de la qualité de certaines opérations culturales (sarclage,
respect des dates de semis, etc.), ce qui peut induire de bons rendements. Des
effets additionnels sur les rendements pourraient être projetés si
le crédit reçu grâce au contrat est employé pour
améliorer les technologies utilisées (emplois des engrais
minéraux, des semences améliorées, etc.) ou pour
acquérir de la main d'oeuvre pour appliquer les engrais organiques.
Mais, ceci n'a pas souvent été observé dans le milieu.
Dans les tableaux 13 et 14, nous avons reporté des
résultats permettant d'effectuer une analyse exploratoire du
mécanisme décrit ci-dessus. Ces résultats sont toutefois
provisoires. Le tableau 13 présente pour les deux catégories de
producteurs (producteurs sous contrat et sans contrat), la productivité
moyenne du travail familial. Elle est obtenue en divisant la production
physique du maïs obtenu par parcelle par le nombre d'actifs du
ménage. Dans ce tableau, sont également reportés les
rendements du maïs et la superficie consacrée à cette
culture par parcelle.
Tableau 13 :
Productivité moyenne du travail familial, superficie moyenne
emblavée en maïs et rendement moyen du maïs par
parcelle
Variables
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Producteurs sous contrat (N=34)
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Producteurs sans contrat (N=43)
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Productivité moyenne du travail familial (kg/actif)
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532,65 (353,02)*
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442,25 (285,78)
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Superficie moyenne emblavée en maïs (ha)
|
2,29 (1,05)
|
2,05 (0,98)
|
Rendement moyen du maïs (kg/ha)
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875,44 (149,42)
|
901,93 (185,5)
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* sont reportés dans les parenthèses, les
écarts-types
Source : Nos enquêtes, Septembre - Octobre,
2009
Les tests statistiques d'analyse de variance montrent qu'il
n'y a pas de différence significative entre les deux groupes (voir
annexe 2). Cependant, une analyse grossière du tableau 13 ressort les
points suivants. Premièrement, la productivité du travail
familial est plus élevée au niveau des producteurs sous contrat.
Nous sommes alors tentés de conclure que le contrat a un effet positif
sur la productivité du travail familial. Deuxièmement, la
superficie emblavée en maïs est plus élevée au niveau
des producteurs sous contrat ; dans le même temps, nous constatons
que le rendement du maïs est plus faible au niveau de ce groupe de
producteurs. Nous sommes alors tentés de conclure que l'effet du contrat
sur la productivité du travail familial est surtout induit par
l'accroissement de la superficie emblavée en maïs et non pas par
l'amélioration des rendements du maïs.
Le tableau 14 présente les quantités de main
d'oeuvre extérieure (entraide et main d'oeuvre salariée)
employées sur les parcelles de maïs. Les valeurs du tableau 14 ont
été obtenues en tenant compte du sexe et de l'âge. En
effet, nous avons utilisé les coefficients de conversion
suivant :
· 1 femme adulte = 0,75 homme-jour
· 1 enfant = 0,5 homme-jour
Tableau 14 :
Quantités de main d'oeuvre employées
Variables
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Producteurs sous contrat
|
Producteurs sans contrat
|
Quantité totale moyenne de main d'oeuvre entraide
(hommes-jours)
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30,08 (38,98)*
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26,23 (45,33)
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Quantité totale moyenne de main d'oeuvre
salariée (hommes-jours)
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83,39 (51,16)
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85,23 (67,24)
|
Quantité totale moyenne de main d'oeuvre
extérieure (hommes-jours)
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113,47 (52,88)
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111,46 (65,75)
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Quantité moyenne de main d'oeuvre extérieure
utilisée par hectare (hommes-jours)
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52,75 (19,71)
|
53,07 (17,13)
|
* sont reportés dans les parenthèses, les
écarts-types
Source : Nos enquêtes, Septembre - Octobre,
2009
L'analyse de ce tableau montre que la quantité totale
de main d'oeuvre extérieure mobilisée est élevée au
niveau des producteurs sous contrat ; ce qui pourrait expliquer
l'accroissement de superficie emblavée en maïs observé au
niveau de ce groupe de producteurs. En ce qui concerne la quantité
moyenne de main d'oeuvre extérieure utilisée par hectare, elle
est plus faible au niveau des producteurs sous contrat. On pourrait conclure
que ces producteurs ne font pas une intensification de la main d'oeuvre sur les
parcelles ; ce qui semble justifier le faible rendement du maïs
observé au niveau de ce groupe de producteurs comparativement aux
producteurs sans contrat. Il faut cependant noter que les différences
entre les deux groupes ne sont pas significatives (voir annexe 2)
En résumé, dans la zone d'étude, on peut
effectivement projeter que le contrat a un effet positif sur la
productivité du facteur fixe le plus rare (la main d'oeuvre familiale).
Cet effet serait induit par l'accroissement de superficie emblavée en
maïs. L'accroissement des superficies a été rendu
probablement possible grâce à l'accroissement de la main d'oeuvre
extérieure mobilisée en utilisant le crédit reçu
à travers le contrat. Nous constatons, par ailleurs, que l'impact sur la
productivité n'est pas induit par l'amélioration des rendements
du maïs.
Pour approfondir l'analyse des effets constatés dans
les tableaux 13 et 14, nous proposons une analyse multivariée (analyses
de régression) dans les sections suivantes.
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