Résumé
La présente étude a été conduite
dans la commune de Kétou située dans le département du
Plateau au Sud-est du Bénin. Les enquêtes se sont
déroulées dans les villages d'Adakplamè et d'Ewè
dans les mois de Septembre et d'Octobre 2009.
Dans les pays en voie de développement, les petits
producteurs ne participent pas pleinement aux marchés. Ils sont souvent
marginalisés parce que les commerçants et/ou les
sociétés agro-alimentaires choisissent en général
de coopérer avec les grands producteurs dans le but de réduire
les coûts et améliorer les profits (Eaton et Shepherd, 2002). Or,
les petits agriculteurs sont confrontés à des contraintes comme
celles liées à l'accès au crédit et aux
marchés. Dans la commune de Kétou, des arrangements contractuels
entre commerçants et producteurs permettent aux producteurs d'obtenir du
crédit. Après la récolte, le producteur vend une certaine
quantité de maïs au commerçant qui lui a octroyé le
crédit. Ce genre d'arrangement est appelé agriculture
contractuelle.
L'objectif de cette recherche est de présenter les
caractéristiques de l'agriculture contractuelle dans la commune de
Kétou et d'étudier ses effets sur la performance de la production
vivrière. Pour atteindre cet objectif, nous avons adopté une
approche plurielle qui combine les méthodes quantitatives et
qualitatives. Les analyses ont été possibles grâce aux
logiciels EXCEL et SPSS 16.0.
Les résultats de l'étude montrent que
l'agriculture contractuelle suit le modèle informel. Elle est
pratiquée exclusivement pour la culture de maïs. Le contrat est
verbal et n'a pas recours aux témoins. Les acteurs impliqués dans
l'agriculture contractuelle dans la commune de Kétou sont des
commerçants de maïs individuels et des producteurs de
maïs, également individuels. Les commerçants sont des
collecteurs grossistes, généralement de sexe féminin,
résidant à Kétou (chef-lieu de la commune) et
opérant pour la plupart sur le marché de Kétou.
Peu d'éléments sont spécifiés dans
le contrat. Les clauses du contrat portent seulement sur l'octroi d'un
crédit par le commerçant, l'engagement pris par le producteur de
vendre une certaine quantité de maïs à ce dernier et le
remboursement du crédit par le producteur. Les résultats de
l'étude montrent que dans la commune de Kétou, les clauses
contractuelles sont respectées. Nous avons constaté que tous les
contrats établis pour la campagne 2008 - 2009 ont été
respectés.
Le crédit obtenu grâce au contrat est
utilisé à raison de 76% pour financer l'agriculture. La partie
restante (24%) est destinée aux biens et services de base du
ménage (alimentation, santé, funérailles, éducation
des enfants). La part investie dans l'agriculture est destinée à
la location de la main d'oeuvre.
Le prix du maïs vendu sous contrat est fixé
suivant trois modes. Le premier mode est basé sur les prix fixés
ex ante. Pour le deuxième mode, le prix est fixé ex
post ; les parties acceptent d'adopter le prix du maïs qui est
observé sur le marché du village mais lui appliquent une
légère réduction. Le troisième mode est semblable
au second mais aucune réduction n'est appliquée ; les deux
parties adoptent le prix observé sur le marché du village. Le
mode de fixation varie substantiellement au sein de l'échantillon
d'étude. Cette variation est liée à l'âge du
producteur, à son ancienneté sous contrat et à l'existence
d'un lien de parenté entre les deux partenaires.
Une analyse empirique a été menée pour
étudier le mécanisme de l'impact du contrat sur la performance de
la production du maïs. L'analyse des modèles de régression
estimés montre que le contrat a un effet positif sur la
productivité du travail familial dans la zone d'étude. Cet effet
se réalise à travers les canaux suivants : on a
établi que le contrat permet d'accroître la main d'oeuvre
extérieure, et ceci favorise l'extension de la superficie
emblavée en maïs. Ce faisant, la production du maïs
augmente ; ce qui améliore la productivité du facteur fixe
le plus rare dans la zone (main d'oeuvre familiale). Les modèles
estimés ne confirment pas clairement que l'effet observé pour la
productivité du travail familial est lié à une
amélioration significative du rendement de maïs chez les
producteurs sous contrat. Ce dernier résultat est cohérent
puisque le crédit obtenu n'est pas utilisé pour l'acquisition
d'intrants comme les engrais minéraux et les variétés
améliorées de maïs. On a observé que la pratique du
contrat affecte positivement le rendement du maïs mais l'effet n'est pas
significatif.
Quelques suggestions en relation avec les politiques de
développement rural peuvent être retenues sur la base des
résultats obtenus dans le cadre de ce travail. Nous suggérons de
tenir compte à l'avenir des arrangements contractuels endogènes
dans les interventions publiques. Dans la commune de Kétou, on note
l'essor d'une agriculture orientée de plus en plus vers le marché
surtout pour le maïs. Cette évolution est le résultat d'une
collaboration entre commerçants et producteurs à travers
l'établissement de contrats agricoles. Les commerçants sont les
promoteurs de cette forme d'agriculture et ils acceptent d'octroyer des
crédits aux producteurs. Il apparaît juste à notre avis
d'encourager d'une part, cette collaboration entre acteurs locaux, et, d'autre
part, l'intégration des commerçants aux programmes de
développement agricole et rural. On peut, par exemple, établir
des accords entre le secteur public et les commerçants afin que ces
derniers soient dotés de plus de ressources financières. Ainsi,
ils pourront en retour octroyer des crédits et offrir d'autres services
aux producteurs en développant avec eux des contrats.
Par ailleurs, nous suggérons également de mener
dans le futur, des recherches pour étudier de manière approfondie
les différents modes de fixation de prix sous contrat, et leurs
déterminants en développant des méthodes plus
élaborées.
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