CONCLUSION
L'urbanisation très rapide de la Mauritanie, a eu des
conséquences majeures sur les conditions de vie dans les centres urbains
: forte pression sur les infrastructures sanitaires et scolaires et sur
l'ensemble des services urbains, développement de quartiers informels,
forte extension spatiale des villes, en particulier celle de Nouakchott.
Nouakchott a connu une croissance démographique
galopante passant de 5800 en 1962 à 558195 habitants en 2000 soit une
augmentation de 97 % de la population en 40 ans. Cette croissance s'explique
d'une part par une évolution naturelle, et d'autre part, par des
mouvements migratoires massifs des populations suite à une série
de sécheresses qui a rendu difficile la subsistance nomade. Ces
changements ont entraîné un bouleversement des formes de
production, de travail, d'alimentation, d'hygiène, d'habitat et des
habitudes familiales.
La position géographique de la ville de Nouakchott sur
la côte est à l'origine de la création d'un environnement
favorable au développement d'activités de services, de
pêche, d'artisanat et de petites industries qui ne sont pas seulement des
activités de subsistance mais englobent aussi des activités
génératrices d'emplois et de revenus. Ce constat est lié
au statut de cette ville qui fait d'elle un pôle attractif pour les
populations venant des centres urbains les plus démunis et aussi du
milieu rural en quête d'emploi pour l'amélioration de leur niveau
de vie ou pour des raisons d'études.
Ce constat est également lié au mode
d'urbanisation « spontané ou anarchique » résultant de
la crise du monde rural alors que les moyens humains et financiers disponibles
sont insuffisants pour répondre aux besoins des populations. Cette forme
de croissance urbaine et d'extension chaotique de la trame urbaine à
Nouakchott peut être expliquée par une politique urbaine
caractérisée par :
- un effort de planification urbaine qui s'est peu
concrétisée sur le terrain du fait des
retards observés dans l'élaboration et dans
l'application des documents d'urbanisme ;
- un effort très insuffisant dans la réalisation
des infrastructures et des équipements ; - la faible implication des
populations dans la gestion urbaine ;
- une implication encore timide des collectivités locales
dans la gestion des établissements humains.
L'occupation du sol à Nouakchott se déroule dans
un espace dont la topographie, l'altitude et la nature du substrat expliquent
les risques auxquels sont confrontés l'agglomération surtout dans
la zone de dépressions salées ou sebkha objet de notre
étude.
Les sebkhas, selon les critères géographiques,
sont impropres à l'habitat. L'effet de la forte concentration du sel
rend les habitations précaires et rend par ailleurs très
difficile et coûteux l'équipement des quartiers. La nappe
phréatique saumâtre sub-affleurante et les faibles topographies
comprises entre 1 et -1 m exposent les occupants à des risques
d'inondations lors de précipitations ou lors des incursions marines.
Cependant, les sebkhas sont actuellement l'une des zones les
plus densément peuplées de Nouakchott soit 37 % de la population
de cette ville. Plusieurs facteurs expliquent cette situation :
- les facteurs naturels comme la sécheresse des
années 70, qui a engendré un exode rural massif des populations
nomades ;
- les facteurs socio-économiques parmi lesquels la
proximité avec les sites de travail, le prix des terrains relativement
bon marché comparés aux autres communes de Nouakchott ;
- les facteurs politiques comme le conflit entre le
Sénégal et la Mauritanie en 1989, et la guerre du Sahara
occidental en 1975 ainsi que l'antécédent de
déguerpissement de populations pauvres. On note aussi un manque de
planification, l'absence de rigueur dans l'application des normes d'urbanisme
et une politique foncière peu adaptée à cette ville
marquée par une croissance démographique galopante.
L'étude de l'évolution de l'occupation du sol
fait apparaître d'importants changements dans les surfaces
occupées. Ces changements urbains accélérés et
incontrôlés ont provoqué une détérioration de
l'environnement et l'occupation des zones impropres à l'habitat. Les
dépôts sauvages d'ordures, un contexte d'absence
d'équipements en assainissement collectif ou individuel adapté,
ont accéléré la pollution de la nappe phréatique et
augmenté les risques de destruction de l'équilibre d'un milieu
naturel particulièrement fragile.
Cette situation met en relief plusieurs séries de
problèmes : la pollution, les inondations, l'érosion
côtière, la dégradation des ressources naturelles, des
problèmes sanitaires, les conflits socio-économiques, etc.
En ce qui concerne Nouakchott, l'étude de la dynamique de
l'occupation de la sebkha peut s'avérer intéressante pour les
plans d'aménagements de la ville.
Cependant, l'étude de cette dynamique ne peut pas se
faire dans le cadre étroit d'une seule discipline. Il est important
qu'il y ait une démarche interdisciplinaire qui étudie à
la fois les facteurs naturels et les facteurs sociaux, économiques et
historiques. D'où l'intérêt d'un cadre conceptuel qui
oriente la recherche géographique et la recherche sociale.
En approfondissant nos travaux, on pourrait aider à
étudier l'ampleur de ces problèmes et éventuellement
à prévenir d'autres problèmes ; ce qui pourrait être
une contribution à la planification de l'aménagement de
l'espace.
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