FACULTE DES SCIENCES ECONOMIQUE ET DE
GESTION
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UNIVERSITE DE YAOUNDE II THE UNIVERSITY OF
YAOUNDE II
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FACULTY OF ECONOMICS AND MANAGEMENT
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UNITE DE FORMATION DOCTORALE: ECONOMIE MATHEMATIQUE ET
ECONOMETRIE (Deuxième promotion)
DECOMPOSITION REGIONALE DU BIEN ETRE SOCIAL
AU
CAMEROUN PENDANT ET APRES LES AJUSTEMENTS
STRUCTURELS: UNE APPLICATION D'UNE FONCTION
DU BIEN ETRE SOCIAL GENERALI SEE
|
Mémoire présenté et soutenu en vue
de l'obtention du Diplôme
D'Etudes Approfondies ( DEA) en sciences
économiques
Option: Economie mathématique et
économétrie
Par:
MBENDA KOMBO Ferdinand Joël
Martin
Maître ès Sciences
Economiques
Option: Techniques quantitatives
Sous la co- direction de:
Francis MENJO BAYE (Ph. D) Chargé de
cours à l'université de Yaoundé II
|
Dr. Samuel FAMBON Chargé de cours
à l'université de Yaoundé II
|
AVERTISSEMENT
« L'université de Yaoundé II n'entend donner
aucune approbation ou improbation aux opinions contenues dans ce
mémoire. Celles-ci doivent être considérées comme
étant propres à l'auteur. »
DEDICACES
A
Mon père MACKY DICKONGUE Martin
Ma mère MOUKALA Elise
Mon frère BIKOU Richard
Qu'ils trouvent ici l'expression de ma profonde gratitude pour
les innombrables sacrifices consentis pour mon éducation et mon
épanouissement.
REMERCIEMENTS
Je remercie l'Eternel Dieu tout puissant, pour sa Bonté et
sa Fidélité à mon endroit.
J'exprime ma profonde gratitude à tous ceux qui de
près ou de loin ont participé à cet ouvrage et
particulièrement, à Francis MENJO BAYE (Ph. D) et au Dr. Samuel
FAMBON qui, malgré leurs multiples occupations, ont accepté de
sacrifier de leur temps précieux pour diriger mes travaux
Merci au Dr. CHAMENI NEMBUA pour son engagement dans la
coordination de ce programme de DEA économie mathématiques et
économétrie.
Mes remerciements vont également :
-aux enseignants de la faculté de sciences
économiques et de gestion de l'université de Yaoundé II et
particulièrement à ceux de l'option économie
mathématique et économétrie ;
-à tous mes camarades de la deuxième promotion de
DEA économie mathématique et économétrie ;
-à mes Frères: BIKOU Richard et toute sa famille,
EBOUE JPP, EBOUE Henri Serge. - au pasteur NGOHE EMANDE Narcisse et toute sa
famille;
- à Mlle OHO EKWA Thamar pour son soutien multiforme ;
- à mes amis : NGOUDJI Charly, NTUNGWANAYO
Diomède, LEKEUFACK Calvain, TSEKANE Patrice, BILOA Gabriel, NGOH TEDGA
Pauline, NGOULE Marilyne, BONGUEN Béatrice, MBAH Yves, Elesa'a Emmanuel,
PENDA Pierre, NDEDI Ballong, MOSSI Hans, EBONGUE Jacques, MADIBA Bertrand,
EBOUMBOU James.
- à mes voisins et amis de la cité Eyid'a
Bédi : Yves, Lucien, Basile, Sok J. C, Jean Luc, DOHOR Jules.
- à Mr JABEA Alfred, pour la disponibilité et la
patience à mon endroit. - aux familles : NGANTCHOU, KOUMKANG, BONA.
TABLE DES MATIERES
AVERTISSEMENT
|
.....2
|
DEDICACES
|
3
|
REMERCIEMENTS
|
4
|
TABLE DES MATIERES
|
.. 5
|
RESUME
|
..8
|
ABSTRACT
|
9
|
LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS
|
...10
|
LISTE DES TABLEAUX ET FIGURES
|
.11
|
CHAPITRE 1
INTRODUCTION GENERALE
|
13
|
1.1.
|
Contexte et problématique
|
.13
|
1.2.
|
Questions de recherche
|
15
|
1.3.
|
Objectifs de recherche
|
15
|
1.4.
|
Hypothèses de recherche
|
15
|
1.5.
|
Importance théorique du Sujet
|
16
|
1.6.
|
Importance empirique du Sujet
|
... 16
|
1.7.
|
Méthodes d'analyse
|
17
|
1.8.
|
Définition des termes
|
18
|
1.9.
|
Portée et limites de l'étude
|
.19
|
1.10.
|
Organisation du travail
|
....19
|
CHAPITRE 2
EVOLUTION DE L'ECONOMIE ET DU NIVEAU DE VIE AU CAMEROUN
20
2.1. Introduction ..20
2.2. Evolution de l'économie Camerounaise .20
2.2.1 L'économie camerounaise de 1960 à 1985 : une
période de croissance
soutenue 20
2.2.2. L'économie camerounaise de 1986 à 1994
: une période de crise .21
2.2.3. L'économie camerounaise depuis 1994 : une
période de relance économique 22
2.3. Evolution de la pauvreté au Cameroun pendant et
après les PAS
25
2.3.1. Croissance et pauvreté au Cameroun 25
2.3.2. Inégalité et pauvreté au Cameroun
28
2.3.3. Croissance, redistribution et pauvreté au Cameroun
31
2.4. Conclusion 35
CHAPITRE 3
CADRE CONCEPTUEL DE LA THEORIE DU BIEN-ETRE
SOCIAL......37 3.1.
Introduction.........................................................................................37
3.2. Les Fondements du bien-être social ...37
3.2. 1. L'approche Néoclassique du bien-être
social.......................................38
3.2. 2. L'approche de la Nouvelle économie du
bien-être.................................38
3. 2. 2. 1.
L'efficacité..................................................................38
3. 2. 2. 2. La distribution du
revenu.................................................40
3. 3. Critique de la Théorie du Bien-être
Social....................................................41
3. 3. 1. Les approches économiques et leurs
limites........................................41
3. 3. 2. Rawls, Sen, Walzer et la pluralité des biens
..44
3. 4.
Conclusion..........................................................................................48
CHAPITRE 4
REVUE DE LA LITTERATURE SUR LA THEORIE DU BIEN-ETRE
SOCIAL 49
4. 1. Introduction 49
4. 2. Revue de la littérature théorique 49
4. 2. 1. La fonction de bien-être social Utilitariste et
ses extensions 49
4. 2.2. La fonction de bien-être social Individualistique
et ses extensions ...52
4. 3. Revue de la littérature
empirique...............................................................54
4. 3. 1. Evaluation du bien-être social par la fonction de
bien-être Social .54
4. 4. Conclusion ..57
CHAPITRE 5
MÉTHODOLOGIE ET DONNEES
D'ANALYSE...58
5. 1.
Introduction..........................................................................................58
5. 2. La fonction de bien être social
généralisée 58
5. 2. 1. La fonction de bien-être social et l'optimum de
Pareto .59
5. 2. 2. La fonction de bien-être social
généralisée .61
5. 3. Décomposition de la FBS
généralisée par sous-groupes de la population 63
5. 4. Présentation des données d'analyse 67
5. 5. Conclusion 68
CHAPITRE 6
RESULTATS EMPIRIQUES 69
6. 1. Introduction 69
6. 2. Analyse des disparités régionales au Cameroun
..69
6. 2. 1. Distribution des revenus et des
inégalités dans les régions du Cameroun......69
6. 2. 2. Contribution au bien-être et à
l'inégalité au Cameroun 73
6.3. Estimation du bien-être social au Cameroun 75
6. 3. 1. Tendance du bien-être social entre les
régions du Cameroun .75
6. 3. 2. Analyse de la sensibilité du bien-être
social au Cameroun par rapport au
revenu moyen par région .77
6. 4. Conclusion 79
CHAPITRE 7
CONCLUSION GENERALE ..80
7. 1. Résumé des Résultats de l'Analyse
81
7. 2. Recommandations de Politiques économiques 82
7. 3. Perspectives de recherche future .86
BIBLIOGRAHIE 87
ANNEXE 91
RESUME
L'objectif poursuivi dans ce travail est de décomposer
la tendance du bien-être social au Cameroun, en examinant l'arbitrage
entre efficacité et équité, pendant et après les
ajustements structurels. Il s'agit, de déterminer la distribution du
bien-être social à travers les régions du Cameroun. Pour
cela, nous avons utilisé une fonction de bien-être social
généralisée que nous avons décomposée en
sous-groupes. Cependant, l'utilisation du coefficient de Gini comme indice
d'inégalité, rend impossible la décomposition en sous-
groupe de la FBS. Nous avons donc pour décomposer la FBS
généralisée, usité la méthode de
décomposition de l'indice de Gini en sous-groupe
développée par Podder. Par ailleurs, cette fonction non
Parétienne sous certaines conditions, permet de déterminer les
groupes cibles, et sa décomposition permet d'identifier les causes des
disparités de bien-être social entre les régions.
En outre, cette étude a été
appliquée aux données issues des enquêtes ECAM I et ECAM
II, réalisées en 1996 par la direction nationale de la
statistique (DNS) et 2001 par l'institut national de la statistique (INS)
respectivement. On peut donc se rendre compte de ce que le bien-être est
plus élevé dans les régions rurales que dans les
régions urbaines. Les parts relatives de bien-être sont maximales
dans les régions rurales, des régions qui présentent aussi
des équités relatives réductrices
d'inégalités. Les régions urbaines très
inégalitaires contribuent très peu au bien-être social, qui
d'ailleurs est plus sensible à toute augmentation de revenu dans les
régions rurale hauts plateaux et rurale Savane.
Ainsi donc, à la faveur d'élasticités de
bien-être social par rapport au revenu plus élevées, et de
meilleures contributions au bien-être social, les régions rurale
hauts plateaux et rurale Savane, apparaissent comme étant les
régions cibles. D'où la nécessité d'accorder la
priorité des interventions à ces régions, qui sont
susceptibles de stimuler l'économie, et de maximiser le bien-être
social, dans un contexte de contraintes budgétaires. Ce qui permettra,
dans un processus de croissance et de réduction de la pauvreté
d'atteindre les objectifs d'équité et d'efficacité.
Mots clés : Fonction de bien-être social
généralisée, Coefficient de Gini, Optimum de Pareto,
Ajustement structurel, Equité relative.
ABSTRACT
The aim of this study is to decompose trends in social welfare
in Cameroon during and after structural adjustments, while appropriately
addressing the trade-off between equity and efficiency. The principal method
applied in the study is a generalized social welfare function (SWF), which can
be non Paretian under special circumstances, and which can also be decomposed
in subgroups of the population. Since the function contains the Gini
coefficient, it could not be formally decomposed by subgroup of the population.
Using a method of subgroup decomposition of Gini coefficient developed by
Podder, we succeed in decomposing the SWF. The method is shown to be useful in
the determination of target groups. Using this decomposition analysis we are
now able to find out the reason for the change in share of social welfare of
various regions. This study is based on the ECAM I and ECAM II survey data of
1996 and 2001 collected by the national institute government's statistical
office.
It was found that, rural welfare is higher than urban welfare.
Yaoundé and Douala have the lowest levels of welfare. With the maximum
total income share, the rural regions have relative equity with inequality
reducing effects. The urban regions which have important inequality, present a
very little contribution to social welfare in Cameroon. Social welfare in
Cameroon is very sensitive to any increase of income in the regions of Rural
Highlands and Rural Savannah.
Disaggregating further to capture regional specific aspect of
welfare decomposition, Rural Highlands and Rural Savannah are identified as the
potential target regions in terms of social welfare maximisation in that order,
as revealed by their respective social welfare elasticities with respect to
mean well-being and their total incomes shares. if pilot interventions were to
target these regional-mix in the context of budgetary constraints, they could
generate spill-over effects to the rest of economy in terms of social welfare
maximisation that blend both equity and efficiency in the process of growth and
poverty reduction.
Key words: Generalized Social Welfare
Function, Gini coefficient, Pareto criteria, relative Equity, Structural
adjustments.
LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS
ACT : Australian Capital Territory
ASS : Afrique Sub-Saharienne
BM : Banque Mondiale
BS : Bien-être Social
DL : Dominance de Lorenz
DSA : Dimension Sociale de l'Ajustement
DSCN : Direction de la Statistique et de la
Comptabilité Nationale
DSRP : Document Stratégique de
réduction de la pauvreté
ECAM: Enquête Camerounaise Auprès
des Ménages
FBS : Fonction de Bien-être Social
FCFA : Franc de la Coopération
Financière Africaine
FMI : Fond Monétaire International
FRPC : Facilité pour la Réduction
de la Pauvreté et la Croissance
FASR : Facilité d'Ajustement Structurel
Renforcée
INS : Institut National de la Statistique
OMC : Organisation Mondiale du Commerce
ONG : Organisation Non Gouvernementale
PAS : Programmes d'ajustement structurel
PFNL : Produit Forestier Non Ligneux
PIB : Produit Intérieur Brut
PME : Petite et Moyenne Entreprise
PMI : Petite et Moyenne Industrie
PNB : Produit National Brut
PNUD : Programme des Nations Unies pour le
développement
PPTE : Pays Pauvres très
Endettés
PSA : Programme Spécial d'assistance en
Afrique
Q'ld : Queesland
SA : South Australia
SWF : Social Welfare Function
TMS : Taux Marginal de Substitution
TMT : Taux Marginal de Transformation
WA : West Autralia
LISTE DES TABLEAUX
Tableau 1 : Evolution de quelques indicateurs de performances
macroéconomiques au
Cameroun de 1976 à
2001............................................................24
Tableau 2: Evolution du taux de croissance du PIB réel au
Cameroun depuis la seconde
moitié des années
1990................................................................26 Tableau
3 : Evolution du taux de pauvreté au Cameroun 26
Tableau 4: Evolution des inégalités de revenus dans
les milieux de résidence et dans les
régions du Cameroun 29
Tableau 5: Décomposition de l'évolution des
indicateurs de pauvreté entre 1996 et 2001
en (%) 32
Tableau 6 : Variations des indicateurs de la pauvreté
selon les régions 33
Tableau 7: Taille de la population, Revenu moyen annuel, Part de
la population, revenu
moyen proportionnel, Coefficient de concentration et
variation de la
concentration entre les deux périodes par région
70
Tableau 8: Parts de revenu, Équité relative et
Parts relatives de bien être par région de
1996 à 2001 73
Tableau 9: Tendance du bien-être social au Cameroun entre
les différentes régions de
1996 à 2001 75
Tableau 10: Élasticité du
bien-être social par rapport au revenu moyen au Cameroun pour
les différentes régions : entre 1996 et 2001 77
LISTE DES FIGURES
Figure 1 : Evolution de quelques indicateurs de performances
macroéconomiques au
Cameroun de 1976 à
2001............................................................24
Figure 2 : Evolution du taux de croissance du PIB réel au
Cameroun depuis la seconde
moitié des années
1990................................................................26
Figure 3 : Evolution de l'incidence de la pauvreté au
Cameroun (P0).......................27
Figure 4 : Evolution de la profondeur de la pauvreté au
Cameroun (P1)....................27
Figure 5 : Evolution des inégalités dans les
milieux de résidence au Cameroun...........29
Figure 6 : Evolution des inégalités dans les
régions au Cameroun..........................30
Figure 7 : Evolution des indicateurs de pauvreté selon le
milieu de résidence entre 1996 et
2001
(%).................................................................................32
Figure 8: Evolution des indicateurs de pauvreté selon le
milieu les régions entre 1996 et
2001 (%) ...33
Figure 9 : Part de la population, revenu moyen proportionnel,
Coefficient de concentration et variation de la concentration entre les deux
périodes par région 71
Figure 10 : Parts de revenu, Équité relative et
Parts relatives de bien être par région de
1996 à 2001 ...73
Figure 11 : Tendance du bien-être social au Cameroun entre
les différentes régions de
1996 à 2001 ...76
Figure 12: Élasticité du bien-être social par
rapport au revenu moyen au Cameroun pour
les différentes régions : entre 1996 et 2001 78
CHAPITRE 1
INTRODUCTI ON GENERALE
1.1. Contexte et problématique
Dans les années 1980, la Banque Mondiale (BM) et le
Fonds Monétaire International (FMI) ont fait adopter à plusieurs
pays d'Afrique subsaharienne (ASS) des programmes d'ajustement structurel
(PAS). L'ère des ajustements structurels, au cours de laquelle presque
tous les Pays Africains ont fait appel au soutien des Institutions de Bretton
Woods pour restaurer leur situation financière et ajuster leurs balances
de paiement. C'est une période marquée par la «
Conditionnalité » à travers laquelle les Institutions de
Bretton Woods accordent leur aide. L'octroi de cette aide se fait cependant en
échange de réformes économiques susceptibles de
réduire les distorsions et de rendre la confiance aux investisseurs. On
peut considérer qu'il y a eu deux périodes d'ajustements
structurels, la période 1980-1986 et la période 1987-1994. Durant
la période 1980-1986 les pays devaient effacer les effets du boom des
matières premières de la fin des années 1970, qui avait
entraîné des dérapages budgétaires importants et
déstabilisé beaucoup d'économies. Par la suite, ces
actions se sont poursuivies de façon souvent plus douloureuse dans la
période qui a suivi l'effondrement des cours des produits primaires de
1987 à 1994.
Jusqu'en 1994, le processus d'ajustement structurel pouvait
être considéré comme un échec, en raison notamment
des dérapages importants observés dans l'exécution de
certains critères quantitatifs :
-déclin des exportations provoquant un déficit de
la balance courante,
-recettes fiscales collectées en deçà des
objectifs,
-stabilisation du solde négatif des avoirs
extérieurs au lieu de son amélioration, -accentuation de la
situation débitrice du gouvernement à l'égard du secteur
monétaire, - accumulation des arriérés extérieurs
et intérieurs.
Les PAS ont été la cible de nombreuses attaques,
qui n'ont pas toujours abouti. En particulier, à partir de 1986 on a
entendu beaucoup de voix s'élever au nom de « l'ajustement à
visage humain » ou « de la dimension sociale de l'ajustement ».
Beaucoup de groupes influents, notamment chez les donateurs nordiques ou au
sein des nations unies relayés par
divers groupes universitaires, ont reproché aux
institutions financières internationales de privilégier le retour
à la stabilisation macroéconomique, au détriment du
développement humain et de la lutte contre la pauvreté.
L'idée influente de « coût social de l'ajustement »
s'est alors imposée comme un dogme, d'autant plus qu'elle était
alors impossible à tester, par manque de données fiables. C'est
à cette époque que la BM, a crée le programme
spécial d'assistance en Afrique (PSA), forum des bailleurs de fonds ou
ces deniers ont cherché à coordonner leurs efforts et à se
comprendre mutuellement. Mais aussi la dimension sociale de l'ajustement (DSA)
aujourd'hui démantelée, une division chargée de collecter
toutes les données requises pour apprécier scientifiquement les
effets des politiques d'ajustement sur le bien-être des ménages.
Dans cette optique le FMI donne en septembre 1999 une nouvelle dimension
à ses interventions, qui intègre la lutte contre la
pauvreté. Ainsi, la facilité pour la réduction de la
pauvreté et la croissance (FRPC) est appelée à fonctionner
parallèlement à l'initiative en faveur des pays pauvres
très endettés (IPPTE).
Le bien-être social apparaît donc avoir une
importance capitale, surtout qu'il permet de mieux apprécier
l'adéquation entre politique de relance de la croissance
économique et politique de lutte contre les inégalités. En
effet plusieurs études conduites depuis le milieu des années 1980
tendent à montrer que la pauvreté est en nette augmentation au
Cameroun (Fambon et al, 2001). Toutefois, ces études ont
tendance à se concentrer soit sur l'évolution de la croissance,
soit sur l'évolution des inégalités, soit encore sur la
contribution spécifique de chacun de ces éléments sur la
pauvreté au Cameroun. Alors que prendre en compte simultanément
la croissance et les inégalités rendre l'analyse plus
pertinente.
En effet un décideur qui est intéressé
par le bien-être social doit tenir compte de l'amélioration de la
croissance mais aussi des problèmes de répartition de cette
croissance. Par ailleurs, en se fixant comme principaux objectifs pour le
compte de l'exercice budgétaire 2008, la lutte contre la corruption, le
redressement économique et l'amélioration des conditions sociales
: le gouvernement camerounais s'est engagé à améliorer le
bien-être de ses populations. Et pour y parvenir, il apparaît
primordial de définir des politiques adéquates, susceptibles de
répondre efficacement à cet engagement de l'Etat camerounais. La
détermination des régions de faiblesse et des régions plus
porteuses de bien-être, d'ailleurs objet de notre étude, contribue
ainsi à rendre optimales les politiques économiques retenues.
1.2. Questions de recherche
Le problème qui fait l'objet de notre étude
soulève une question principale qui est celle de savoir :
Quel est l'effet de l'arbitrage entre efficacité et
équité sur la tendance du bien-être social au Cameroun,
pendant et après les ajustements structurels?
De cette question principale, il ressort un certain nombre de
questions spécifiques :
+ Quelles sont les régions qui contribuent à
réduire l'inégalité au Cameroun?
+ Quelle est la part relative de bien-être social par
région au Cameroun?
+ Quel est l'effet de la croissance économique de chaque
région sur le bien-être social au Cameroun?
1.3. Objectifs de recherche
L'objectif poursuivi dans ce travail est celui de
décomposer la tendance du bien-être social au Cameroun, en
examinant l'arbitrage entre efficacité et équité. Plus
spécifiquement il s'agira :
+ De déterminer les régions qui contribuent
à réduire l'inégalité au Cameroun.
+ De déterminer les parts relatives de bien-être
entre les régions du Cameroun.
+ De déterminer l'effet de la croissance
économique de chaque région sur le bien-être social au
Cameroun, afin d'identifier les régions susceptibles de maximiser ce
dernier.
+ De formuler des recommandations de politique
économique qui pourraient permettre une meilleure conception de la
politique de bien-être social au Cameroun.
1.4. Hypothèses de recherche
Pour résoudre le problème qui fait l'objet de notre
étude nous partirons d'une hypothèse principale:
L'évolution du bien-être social est plus sensible
à l'efficacité qu'à l'équité. De cette
hypothèse principale découlent d'autres plus
spécifiques:
+ Les régions urbaines sont plus susceptibles d'augmenter
l'inégalité dans la société.
+ Une forte part de revenu ne garantit pas nécessairement
une plus grande part de bien-être social.
+ Les régions à forte croissance économique
influencent plus le bien-être de la société.
1.5. Importance théorique du sujet
L'une des branches de la théorie économique, qui
a connu récemment un développement particulier, est celle de la
théorie du bien-être social (welfare economics) ou de l'optimum
économique. Il s'agit ici de déterminer, les critères
corrects de la politique économique, de découvrir la fin la
meilleure parmi les diverses fins possibles ou la voie qui est
économiquement la meilleure pour atteindre une fin économique
donnée. La théorie du bien-être s'attache principalement
aux problèmes que soulève la répartition des ressources
économiques entre divers emplois possibles et la répartition des
biens produits entre les consommateurs. Elle est étroitement liée
à la théorie de l'équilibre général, en
raison des interdépendances qui existent entre les diverses
activités économiques concernant les ressources limitées.
L'analyse d'optimalité, qui est valable à l'échelle de la
firme ou de la nation consiste à prendre en considération les
diverses décisions possibles et à rechercher celles qui
répondront le mieux aux objectifs fixés. Autrement dit, il s'agit
de rechercher les décisions optimales ou les meilleures. L'analyse
d'optimalité se propose donc d'assurer l'efficience de l'activité
économique. La détermination des solutions optimales est
facilitée par l'utilisation de techniques mathématiques de la
programmation linéaire ou non linéaire. Il apparaît dont
primordial de pouvoir construire une fonction de bien-être social pour le
cas spécifique du Cameroun. Dans la mesure où elle permet une
étude qui combine à la fois les effets de la croissance et de sa
redistribution sur le niveau de vie des camerounais. Mais en plus, elle permet
d'envisager des politiques optimales, visant à améliorer le
bien-être social au niveau national et à travers les
régions.
1.6. Importance empirique du sujet
Pour avoir une idée du niveau de vie des populations
d'une société, on peut étudier la pauvreté dans
cette société et ses relations avec, soit la croissance, soit les
inégalités (Fambon, 2001). On peut également se servir des
agrégats macroéconomiques pour évaluer
la pauvreté et ainsi définir des
stratégies de lutte contre la pauvreté (Kamgnia et al,
2003). Cependant, des études qui prennent simultanément en compte
la croissance et l'inégalité peuvent aussi être
menées, même si ces dernières sont assez rares au Cameroun,
pourtant elles donnent une vision assez claire des politiques
économiques. Ainsi par exemple Mukhopadhaya (2001), pour enquêter
sur les disparités de bien-être social entre les régions,
utilise une fonction de bien-être social
généralisée. Ce qui lui permet, de déterminer le
groupe cible, de même que les raisons des différences de
bien-être social entre les régions d'Australie. On en arrive
également à la détermination des contributions des
régions à l'inégalité sociale globale. Autant
d'informations qui peuvent aider dans l'adoption de mesures de politique
économique, en vue d'améliorer le bien-être social.
1.7. Méthodes d'analyse
Pour estimer la tendance du bien-être social au Cameroun et
à travers ses régions, nous utiliserons une fonction de
bien-être social généralisée.
Cette fonction apparaît être plus flexible et plus
avantageuse que la fonction de bien- être social fonctionnelle de Sen,
beaucoup plus rigide du fait de sa forte relation avec le principe de Pareto.
Nous utiliserons cette fonction de bien-être social
généralisée que nous décomposerons en sous-groupes
de la population. Par ailleurs, du fait la flexibilité de cette
fonction, on peut faire le choix de l'efficacité ou de
l'équité.
Toutefois, le fait d'utiliser l'indice de Gini (G) comme
paramètre d'inégalité pose certains problèmes. En
effet l'utilisation de G fait que la fonction ne peut être
désagrégée en sous-groupes, mais en utilisant la
méthode de décomposition du coefficient de Gini
développée par Podder (1993), on arrive à
décomposer la fonction du bien-être. A partir de cette
méthode, il nous sera possible d'estimer la fonction de bien-être
social au niveau des sous-groupes et des régions.
Dans le cadre de cette analyse nous nous servirons des
données obtenues de l'enquête camerounaise auprès des
ménages de 1996 (ECAM I) pour la période pendant les ajustements
structurels et celle de 2001 (ECAM II) pour la période après les
ajustements structurels. Ces enquêtes ont été
réalisées respectivement par la Direction Nationale de la
Statistique et l'Institut Nationale de la Statistique. L'enquête ECAM I
portait sur un échantillon 1.731
ménages urbains et ruraux, tandis que l'enquête
ECAM II concernait un échantillon aléatoire de 10.992
ménages. Pour pouvoir comparer les résultats, des ajustements ont
été faits sur les éléments de collecte et les
méthodes de calcul des indicateurs.
1. 8. Définition des termes
Pour une bonne compréhension de notre étude, la
définition d'un certain nombre de concepts paraît judicieuse,
notamment:
-Fonction de bien-être social : c'est
simplement une représentation quelconque des fonctions d'utilité
individuelle. Elle permet de classer différentes allocations sur la base
des seules préférences individuelles, et elle est croissante par
rapport à l'utilité de chaque individu.
-L'optimum de Pareto : une organisation est dite
optimale ou efficiente au sens de Pareto, dès lors que toute
réorganisation qui augmenterait l'utilité d'un individu
diminuerait nécessairement celles d'un autre au moins.
-Le coefficient de Gini : c'est la mesure
d'inégalité la plus couramment utilisée, une statistique
de résumé qui varie le plus souvent entre 0 et 1. Elle est
notée G, lorsque G = 0 on a une égalité parfaite des
revenus entre tous les ménages ; G = 1 indique une
inégalité complète. En d'autres termes un individu ou un
ménage détient tout le revenu alors que les autres n'en ont
aucun.
-Equité relative d'une région : c'est
l'influence qu'exerce une région sur l'inégalité totale de
la société. Lorsque celle-ci est inférieure est à
1, elle augmente l'inégalité dans la société et
dans le cas contraire, elle est plutôt réductrice
d'inégalité.
-Part de revenu totale : représente la proportion
du revenu totale détenue par l'ensemble de la population d'une
région.
-Part relative de bien-être : c'est la
contribution de chaque région au bien-être total de la
société.
1. 9. Portée et limites de l'étude
Notre étude portera sur les différentes
régions du Cameroun. Ces régions seront organisées suivant
une stratification en zone géographique retenue par l'enquête ECAM
I, réalisée en 1996 par la Direction Nationale de la Statistique.
Nous aurons donc comme région : Yaoundé, Douala, Autres villes,
Rurale forêt, Rurale hauts plateaux et Rurale Savane.
Toutefois l'utilisation du concept de fonction de
bien-être constitue une façon très générale
de définir le bien-être social et du fait de cette
généralité, elle peut être utilisée pour
représenter de nombreux types de jugement de valeur. Par contre elle
n'est pas très utile quand il s'agit de décider quels types de
jugement éthiques pourraient être judicieux. Certaines autres
approches consistent donc à partir des jugements de valeurs et à
examiner ensuite leurs implications au niveau de la répartition
économique : c'est ce type d'approche qui est suivi dans l'étude
des allocations équitables.
1. 10. Organisation du Travail
Notre étude sera répartie en sept chapitres.
Après une brève introduction générale au premier
chapitre, le deuxième chapitre portera sur l'évolution de
l'économie et du niveau de vie au Cameroun. Dans les troisième et
quatrième chapitres, il s'agira pour nous de présenter le cadre
conceptuel ainsi qu'une revue de la littérature concernant la
théorie du bien-être social. Le cinquième chapitre
présentera la méthodologie et les données d'analyse, le
sixième chapitre analysera et interprètera les résultats
empiriques. Le dernier et septième chapitre quant à lui sera
consacré à la conclusion générale de notre
étude.
CHAPITRE 2
EVOLUTION DE L'ECONOMIE ET DU NIVEAU DE
VIE AU
CAMEROUN
2.1. Introduction
Comme bon nombre de pays d'Afrique Subsaharienne, le Cameroun
a connu depuis son indépendance en 1960, une évolution
économique très mouvementée. Marquée par des
périodes d'expansion et de récession économiques, on
assiste depuis peu à un retour de la croissance dans l'économie
camerounaise. Aussi, les autorités camerounaises, galvanisées par
l'atteinte en avril 2006 du point d'achèvement de l'initiative en faveur
des pays pauvres très endettés (IPPTE), veulent reprendre en
mains la direction des politiques économiques du pays. Pour cela il
s'avère capital de faire des choix de politiques économiques
efficientes et efficaces susceptibles d'améliorer le bien-être des
camerounais.
Pour contribuer à cette entreprise, ce chapitre
présentera une évolution globale de l'économie
camerounaise depuis l'indépendance (2-2) avant d'analyser
l'évolution de la pauvreté au Cameroun pendant les ajustements
structurels (1996) et après (2001), à travers les facteurs que
sont la croissance et la redistribution (2-3).
2.2. L'évolution de l'économie Camerounaise
depuis l'Indépendance
On peut distinguer trois principales phases dans
l'évolution de l'économie camerounaise depuis 1960 : Une
période de croissance soutenue (1960-1985), une période de crise
(1986-1994) et une période que l'on pourrait qualifier de relance
économique que nous vivons depuis 1994.
2.2.1. L'économie camerounaise de 1960 à 1985
: une période de croissance soutenue
Durant la période de 1960 à 1985, le Cameroun
connaît une croissance soutenue. Toutefois, cette croissance est
marquée par une variation de rythme. C'est ainsi que pendant la
période 1960-1976, l'économie a connu une croissance
modérée et équilibrée, exempte de distorsions des
prix relatifs et de déficits insoutenables. Bien que très
dépendant des produits primaires (cacao, café, etc.), le
dynamisme a reposé sur un tissu économique assez
diversifié
et une main-d'oeuvre relativement bien adaptée aux
besoins. La découverte puis l'exploitation du pétrole, en 1978,
ont inauguré un nouveau régime caractérisé par une
forte croissance qui a duré jusqu'en 1985. Par ailleurs notons que de
1965 à 1985, la croissance du Cameroun s'accélère en
termes réels ; le PIB par tête double quasiment. Au cours de cette
même période de 1965 à 1985, on distingue trois sous
périodes :
- de 1965 à 1977, la croissance atteint un rythme moyen
d'environ 4%, permettant une lente amélioration du PIB par tête
;
- de 1977 à 1981, la croissance s'accélère
(+13% en moyenne) à la suite de la découverte du pétrole
et de sa mise en exploitation ;
- de 1982 à 1985, la croissance se maintient à un
rythme soutenu (autour de 8%).
Tout au long de la phase de décollage (1977-1985), le
PIB réel par tête augmente rapidement, plaçant le Cameroun
dans la catégorie des pays à revenu intermédiaire selon la
classification de la Banque Mondiale (Aerts et al, 2000).
2.2.2. L'économie camerounaise de 1986 à 1994
: une période de crise
A partir de la fin 1986, le Cameroun est entré dans une
longue phase de crise engendrée par des facteurs externes et internes.
Comme facteurs internes, on peut noter les fortes tensions de
trésoreries dans les caisses de l'Etat et des entreprises dues à
leurs mauvaises gestions. Tandis que comme facteurs externes on peut retenir la
concordance de la baisse des recettes pétrolières, de la chute
des cours des produits agricoles de base et de la dépréciation du
dollar américain, qui ont entraîné une dégradation
considérable des termes de l'échange entre 1986 et 1988. Ainsi
entre 1985 et 1995, le produit intérieur brut a chuté de 6,3 %
par an, avec des taux de croissance négatifs -6,4% en 1987, -13,3% en
1988, -3,4% en 1989, -2,5% en 1990, -5,8% en 1991, -4,0% en 1992, -3% en 1993
(Touna Mama, 2007). La crise économique que le Cameroun traverse se
traduira alors par un déséquilibre des comptes
macro-économiques, et en particulier des finances publiques.
Face à cette situation défavorable, les
autorités se sont engagées dès 1987, dans une politique
d'ajustement appuyée par un programme autonome, sans intervention des
institutions internationales de Bretton Woods. Ce programme visait à
réduire les dépenses de l'Etat et à alléger le
poids du secteur public au sens large. Ces mesures se sont
avérées insuffisantes pour juguler la crise. Le gouvernement en
est donc parvenu à adopter en 1988, un accord de confirmation du FMI et
un crédit d'ajustement structurel de la Banque Mondiale.
Cette politique s'est traduite par la liquidation des
entreprises déficitaires et la privatisation de celles réalisant
des bénéfices. Les dépenses sociales (éducation,
santé) ont été comprimées, les fonctionnaires ont
connu des baisses importantes de leurs salaires (entre 50 % et 60 %)
intervenues en janvier et novembre 1993, etc... (Fambon et al,
2001).
Jusqu'en 1994, le processus d'ajustement pouvait être
considéré comme un échec, notamment en raison des
dérapages importants observés dans l'exécution de certains
critères quantitatifs :
-déclin des exportations provoquant un
fléchissement de la balance courante, -recettes fiscales
collectées en deçà des objectifs,
-stabilisation du solde négatif des avoirs
extérieurs au lieu de son amélioration, -accentuation de la
situation débitrice du gouvernement à l'égard du secteur
monétaire et accumulation des arriérés intérieurs
et extérieurs.
2.2.3. L'économie camerounaise depuis 1994 : une
période de relance économique
Après une décennie de récession qui a
duré de 1985 à 1994, l'économie camerounaise a
retrouvé le chemin de la croissance. Ceci à la faveur de la
dévaluation du FCFA intervenue en janvier 1994 et des autres mesures de
politiques économiques prises par les autorités camerounaises.
La dévaluation du FCFA a entraîné une
hausse des recettes d'exportation qui a eu des répercussions favorables
sur les revenus budgétaires, sur ceux des exportateurs et des
producteurs des matières premières, notamment le café, le
coton et le cacao.
Pour ne pas en rester à un ajustement structurel
limité à la sphère financière avec le
rééquilibrage des comptes macro-économiques, le pays a
redéfini sa stratégie de développement, au coeur de
laquelle se trouve le rôle de l'Etat. Cela s'est traduit par la mise en
place d'un environnement largement libéralisé :
-suppression des barrières non tarifaires,
-désengagement de l'Etat de la plupart des entreprises des
secteurs de production et de commercialisation (privatisation),
-libéralisation des prix (disparition des prix garantis
aux producteurs et des mécanismes de stabilisation), etc.
Depuis 1995/1996, la reprise économique s'affirme avec
des taux de croissance qui se situent autour de 5 % par an, avec notamment 3,3%
en 1994/1995, 5% en 1995/1996, 5,1% en 1996/1997, 5% en 1997/1998 et 4,4% en
1998/1999/2000 (Touna Mama, 2007). L'équilibre des finances publiques
retrouvé a permis d'atteindre les objectifs du premier programme
économique et financier triennal signé avec les institutions de
Bretton Woods et réalisé entre 1997 et 2000.
Au delà du dynamisme économique, c'est la
relative stabilité des performances au cours des dernières
années (malgré les résultats instables du secteur
pétrolier) qui différencie le Cameroun des pays voisins. En
mettant en relief la structure relativement diversifiée de l'appareil de
production. A court terme, le Cameroun bénéficie aussi des
retombées de la construction de l'oléoduc tchado-camerounais, qui
permettent une bonne tenue des investissements. La croissance du PIB a en
conséquence été relativement forte, aux alentours de 5,3%
en 2000/2001, malgré la désorganisation des filières
d'agriculture d'exportation (cacao et café) et de la forêt (DSRP,
2002). Par ailleurs, après avoir exécuté de manière
satisfaisante le deuxième programme économique et financier
triennal au titre de la FASR, le Cameroun a atteint en octobre 2000 le point de
décision de l'initiative PPTE. Cette performance qui permettra au pays
d'aspirer à la réalisation de l'ensemble des conditions requises
pour accéder au point d'achèvement, et bénéficier
alors d'un allègement substantiel de sa dette extérieure.
La baisse des volumes de pétrole extrait à
partir de 2001/2002, associée a des dysfonctionnements importants de
l'offre d'électricité, aux difficultés des filières
d'exportation traditionnelles et aux problèmes d'ajustement, aux
reformes en cours a entraîné un ralentissement de la croissance en
2001/2002, estimé aux alentours de 4,4% (DSRP, 2002). En 2002,
malgré une activité industrielle plus dynamique du fait d'un
approvisionnement en électricité plus régulier en cours
d'année et la demande restée soutenue, malgré la
détérioration des termes de l'échange, la croissance est
élevée à 4,1%. Au terme de l'année 2003, le taux de
croissance réel du PIB est estimé à 4,2% (DSRP, 2003). En
2004 l'économie est caractérisée par un taux de croissance
en terme réel estimé à 3,6% (révision DSRP
Cameroun, 2005). Un dérapage observé sur la tenue des finances
publiques qui a eu pour conséquence la non atteinte du point
d'achèvement de l'initiative PPTE courant 2004, comme escompté
par le gouvernement.
Le 28 Avril 2006, le Cameroun va atteindre ce fameux point
d'achèvement malgré la faible croissance enregistrée en
2005 et 2006 avec respectivement 2,8% et 4,3%. Avec l'atteinte du point
d'achèvement de l'initiative en faveur des pays pauvres très
endettés, le Cameroun doit pouvoir envisager sérieusement son
décollage économique, pour devenir un pays émergent dans
une quinzaine d'années (Touna Mama, 2007).
Tableau 1 : Evolution de quelques indicateurs de
performances macroéconomique de 1976 à 2001 : croissance
(%)
Période
Secteur
|
1976-1984
|
1985-1993
|
1994-1996
|
1997-2001
|
PIB
|
8,2
|
-0,6
|
3,4
|
4,6
|
Primaire
|
3,0
|
1,4
|
0,8
|
2,2
|
Secondaire
|
20,3
|
-3,2
|
-5,0
|
1,3
|
Tertiaire
|
5,1
|
0,6
|
8,7
|
6,8
|
Consommation
|
6,5
|
0,7
|
2,6
|
2,4
|
Investissement
|
14,5
|
-8,0
|
-0,8
|
7,5
|
Investissement public
|
19,5
|
-10,3
|
5,1
|
4,1
|
Investissement privé
|
13,2
|
-6,7
|
-1,9
|
6,3
|
Source : DSRP du Cameroun (projet 2002)
Figure 1 : Evolution de quelques
indicateurs de performances macroéconomique de 1976 à 2001 :
croissance (%)
25
20
15
10
5
0
1976-1984 1985-1993 1994-1996 1997-2001
-5
-10
-15
PIB
Primaire Secondaire
Tertiaire Consommation Investissement Investissement public
Investissement privé
Périodes d'évolution
Source : Construit par l'auteur à partir
du tableau 1
Les performances macroéconomiques caractéristiques
des années fastes (1970, début 1980), des années de crise
(fin des années 1980, début des années 1990), et des
années de
relance économiques (depuis le début des
années 1990) au Cameroun sont présentées au tableau 1 et
à la figure 1 ci-dessus.
Dans l'ensemble, la reprise économique souhaitée
par la mise en oeuvre des programmes d'ajustement ne se précise
qu'à partir de la période 1997-2001, notamment en ce qui concerne
les secteurs primaire, secondaire, et investissements privés. Quoique la
croissance de la consommation soit restée positive sur la période
considérée, le taux des années 1990 est resté
largement inférieur à ce qu'il fût au cours des
années 1970 et 1980. La croissance du PIB est passée quant
à elle de -0,6% à 4,6%.
2. 3. Évolution de la pauvreté au Cameroun
pendant et après les PAS
Nous aborderons la pauvreté ici à travers sa
relation avec les paramètres que sont la croissance et
l'inégalité. Il s'agira d'abord de les prendre
séparément, puis de les analyser ensemble de manière
à ressortir leurs contributions respectives à la
pauvreté.
2.3. 1. Croissance et pauvreté au Cameroun
Entre 1985 et 1989, le Cameroun a subi les effets des chocs
extérieurs majeurs, et a vu sa performance économique
s'effondrer. Ce qui a engendré un bouleversement de la structure
sociale, non seulement sur le plan régional, mais aussi en termes des
réactions de la population pour y faire face. Les conclusions du rapport
du PNUD (1998) sur le Développement Humain au Cameroun, dont le
thème central porte sur la pauvreté, révèlent qu'au
milieu des années 80, une pauvreté de grande ampleur et de
dimension multiple s'est installée dans l'ensemble du pays et dans
toutes les couches socioprofessionnelles. Au regard de la pauvreté
monétaire, le rapport note que 50,5 % de la population était
considérée comme pauvre en 1996, contre 40 % en 1984. Face
à une pauvreté généralisée, la
préoccupation est celle de la coordination entre croissance et lutte
contre la pauvreté.
Cependant comme le révèle le tableau 2 et la
figure 2, le taux de croissance du PIB réel est passée à
5% en 1995/1996, oscillant autour de cette valeur tout au long de la seconde
moitié des années 90 au point d'atteindre en 2000/2001 le taux de
5,2%.
Tableau 2 : L'évolution du taux de
croissance du PIB réel au Cameroun depuis la seconde moitié des
années 90
Année
|
1994-1995
|
1995-1996
|
1996-1997
|
1997-1998
|
1998-1999
|
1999-2000
|
2000-2001
|
Croissance du PIB (%)
|
3,3
|
5,0
|
5,1
|
5,0
|
4,4
|
4,2
|
5,2
|
Source : DSRP (1998) et World Table (Banque
Mondiale 2002).
Figure 2 : L'évolution du taux de
croissance du PIB réel au Cameroun depuis la seconde moitié des
années 90
6
5
4
3
2
1
0
1994-
|
1995-
|
1996-
|
1997-
|
1998-
|
1999-
|
2000-
|
1995
|
1996
|
1997
|
1998
|
1999
|
2000
|
2001
|
Source : Construit par l'auteur à partir
des données du tableau 2.
Dans ces conditions de croissance modérée, sur
la base des résultats de deux enquêtes ECAM I et II (tableau 3 et
figure 3), le taux de pauvreté a régressé d'environ 13
points sur les 5 ans, passant de 53,3 à 40,2% de la population. Au cours
de la même année, l'écart entre le revenu moyen des pauvres
et la ligne de pauvreté s'est aussi amélioré, passant de
19,1% en 1996 à 14,1% en 2001(tableau 3 et figure 4). Ceci implique
qu'en 1996 il fallait transférer en moyenne un revenu
supplémentaire de 35.429 francs CFA à un individu pauvre pour le
sortir de la pauvreté contre 26.154 francs CFA en 2001 (INS, 2002).
Tableau 3 : Evolution du taux de pauvreté
(%)
|
1996
|
2001
|
Variation en %
|
Incidence (P0)
|
Rural
|
59,6
|
49,9
|
-9,7
|
Urbain
|
41,4
|
22,1
|
-19,3
|
Total
|
53,3
|
40,2
|
-13,1
|
Profondeur (P1)
|
Rural
|
21,5
|
18,3
|
-3,2
|
Urbain
|
14,7
|
6,3
|
-8,2
|
Total
|
19,1
|
14,1
|
-5,0
|
Source : DSCN, rapport ECAM I et II.
Figure 3 : Evolution de l'incidence de la
pauvreté au Cameroun (P0)
60
50
40
30
20
10
0
-10
-20
Rural Urbain
Total
Milieu de
résidence
1996 2001 Variation en %
Années et variation de (P0)
Source : Construit par l'auteur à partir
du tableau 3
Figure 4 : Evolution de la profondeur de la
pauvreté au Cameroun (P1)
25 20 15
10
Milieu de
résidence 5
0
-5
-10
|
|
|
|
|
Rural Urbain Total
|
|
|
1996 2001 Variation en %
Années et variation de (P1)
Source : Construit par l'auteur à partir
du tableau 3.
L'analyse de l'évolution de l'incidence de la
pauvreté ne peut à elle seule, permettre d'apprécier
correctement les progrès réalisés en matière de
réduction de la pauvreté. Elle doit être
complétée par une analyse de l'évolution des
inégalités dans la distribution des revenus pour disposer d'une
vue complète de la dynamique de la pauvreté monétaire.
2.3. 2. Inégalité et pauvreté au
Cameroun
Au niveau national, les trois indicateurs
d'inégalité utilisés, à savoir le coefficient de
variation, l'indice de GINI et le rapport du cinquième au premier
quintile de revenus Q5/Q11, indiquent que les
inégalités se sont maintenues et parfois accrues entre 1996 et
2001. Comme le révèle le tableau 4 et la figure 5, le coefficient
de variation est passé de 1,043 en 1996 à 1,054 en 2001; ce qui
correspond à une hausse de 0,011 point de pourcentage. Ainsi, la
dépense par unité de consommation qui est l'indicateur de revenu
est plus dispersée au sein de la population en 2001 qu'en 1996. En
d'autres termes, il existe en matière de revenus, plus de
disparités entre les individus en 2001 qu'en 1996.
Cette situation est confirmée par l'indice de GINI qui
montre qu'en 2001, la distribution des Revenus s'est un peu plus
éloignée d'une répartition égalitaire qu'en 1996.
En passant de 0,406 en 1996 à 0,408 en 2001, l'indice de GINI
révèle que les inégalités se maintiennent au lieu
de se résorber.
De même que l'inégalité globale au sein de
toute la population, celle entre les groupes extrêmes (en terme de
pauvreté) s'est accrue. En 1996, la consommation des 20% de la
population les plus riches représentait en moyenne 7,6 fois celle des
20% les plus pauvres. En 2001, ce rapport est de 8,3 fois, ce qui montre que
les écarts se sont accrus entre les deux groupes au détriment des
pauvres. La croissance économique aurait donc davantage profité
aux plus riches.
1 Le rapport du cinquième quintile sur le
premier Q5/Q1 : c'est le rapport de la moyenne des revenus des 20 % de la
population les plus riches et de la moyenne des revenus des 20 % des individus
les plus pauvres.
Tableau 4 : Evolution des inégalités
de revenus dans les milieux de résidence et dans les régions du
Cameroun
|
1996
|
2001
|
coefficient de variation
|
l'indice de GINI
|
rapport Q5/Q1
|
coefficient de variation
|
l'indice de GINI
|
rapport Q5/Q1
|
Urbain
|
1,112
|
0,449
|
9,1
|
1,072
|
0,406
|
8,5
|
Rural
|
0,786
|
0,345
|
5,8
|
0,801
|
0,369
|
6,8
|
Yaoundé
|
1,307
|
0,487
|
7,5
|
1,202
|
0,433
|
6,8
|
Douala
|
1,082
|
0,485
|
4,8
|
1,082
|
0,410
|
6,5
|
Autres villes
|
1,009
|
0,397
|
6,5
|
0,879
|
0,378
|
7,2
|
Rural forêt
|
0,588
|
0,287
|
5,8
|
0,839
|
0,377
|
5,7
|
Rural plateau
|
0,775
|
0,346
|
7,5
|
0,875
|
0,398
|
8,1
|
Rural savane
|
0,789
|
0,354
|
8,4
|
0,696
|
0,330
|
9
|
Ensemble
|
1,043
|
0,406
|
7,6
|
1,054
|
0,408
|
8,3
|
Source: ECAM I; ECAM II; INS
Figure 5 : Evolution des inégalités
dans les milieux de résidence au Cameroun
10 9 8 7 6 5 4 3 2 1 0
Urbain Rural Ensemble
coefficient de
variation
l'indice de GINI rapport Q5/Q1
coefficient de
variation
l'indice de GINI rapport Q5/Q1
2001
1996
Source : Construit par l'auteur à partir
du tableau 4
Selon le milieu de résidence, la situation des zones
urbaines se caractérise par une légère amélioration
des inégalités, traduite par le comportement des trois
indicateurs utilisés. En effet, on enregistre une réduction des
inégalités, quel que soit l'indicateur utilisé. En zones
rurales, les résultats sont moins favorables qu'en milieu urbain; la
hausse du coefficient de variation, de l'indice de GINI et du rapport
Q5/Q1 dans ce dernier milieu est caractéristique de
l'accentuation des inégalités. Néanmoins, les
inégalités y demeurent moins importantes en terme d'ampleur par
rapport au milieu urbain. Bien que le rattrapage en terme de niveau
d'inégalités entre les deux milieux ne soit pas encore
réalisé, il est socialement dangereux de ne rien faire pour
arrêter le phénomène d'accroissement des
inégalités dans le monde rural qui a par ailleurs les revenus les
plus bas.
Figure 6 : Evolution des inégalités
dans les régions au Cameroun
2001
1996
coefficient de
variation
l'indice de
GINI
rapport
Q5/Q1
coefficient de
variation
l'indice de
GINI
rapport
Q5/Q1
Yaoundé Douala
Autres villes Rural forêt Rural plateau Rural savane
Ensemble
Source : Construit par l'auteur à partir
du tableau 4.
A l'intérieur du milieu urbain, selon le tableau 4 et
la figure 6, la «palme d'or» du recul des inégalités
revient à la ville de Douala. Cette région enregistre une baisse
de l'indice de GINI de 15%. La distribution des revenus à Douala en 2001
se rapproche donc d'une répartition égalitaire par rapport
à celle de 1996, même si les inégalités demeurent
assez importantes par rapport aux autres régions. Dans cette ville
également, l'inégalité entre les groupes extrêmes
des plus pauvres et des plus aisés (Q5/Q1) diminue très
sensiblement, par rapport à la ville de Yaoundé où la
baisse de cet indicateur est moins importante. Cette différence entre
Douala et Yaoundé en ce qui concerne l'évolution des
inégalités, traduirait les fortes disparités de revenus
à Douala dans le secteur privé et une certaine
homogénéité des revenus à Yaoundé dont la
bonne frange de revenus issue de la fonction publique présente
très peu de variation ces dernières années.
En termes de niveau et non plus d'évolution, les
inégalités demeurent plus importantes à Yaoundé
qu'à Douala ; l'indice de GINI y est de 0,43 3 en 2001. Toujours en
2001, la consommation moyenne des 20% de la population la plus aisée de
Yaoundé représente 6,8 fois celle de la tranche des 20% les plus
pauvres contre 6,5 fois pour la ville de Douala.
Le milieu rural pour sa part présente une plus grande
hétérogénéité que le milieu urbain. La
hausse des inégalités est enregistrée en région
rurale Hauts plateaux et en région
rurale Forêt. Cette dernière enregistre des
hausses records pour tous les indicateurs (43% pour le coefficient de
variation, 31% pour l'indice de GINI et 35% pour le rapport des quintiles). En
1996, la région rurale Forêt était celle où la
distribution des revenus était la plus proche d'une répartition
égalitaire (indice de GINI le plus bas). En 2001, la répartition
des revenus y est aussi inégalitaire que dans les villes du Cameroun
autres que Yaoundé et Douala, et devient même plus
inégalitaire que la région rurale Savane. En plus de la
région rurale Forêt, une autre région qui s'illustre en
milieu rural est la région rurale Savane ; c'est la seule région
dans ce milieu à enregistrer une baisse des inégalités
(baisse de l'indice de GINI de 6,8%). La bonne tenue des campagnes
cotonnières entre 1996 et 2001, et le fait que la région dispose
en général de bas revenus seraient responsables de cette
évolution.
Le gain notoire en terme de recul de l'incidence de la
pauvreté indique bien que celle- ci est sensible à la croissance
et aux politiques d'accompagnement mises en oeuvre par le gouvernement.
Toutefois, la persistance d'un niveau élevé
d'inégalités indique aussi qu'il y a un manque à gagner en
terme d'impact des politiques sur la pauvreté. Les politiques et
stratégies à mettre en oeuvre, dans le cadre de la
réduction de la pauvreté devront de ce fait viser non seulement,
l'intensification de la croissance afin de relever les revenus moyens, mais
aussi assurer une meilleure distribution des fruits de la croissance.
2.3. 3. Croissance, redistribution et pauvreté au
Cameroun
Dans un contexte où la pauvreté a une forte
ampleur et où la lutte pour sa réduction est au coeur des
politiques de développement, il faut se poser la question de savoir dans
quelle mesure la croissance et éventuellement la redistribution sont
profitables aux plus pauvres. Il s'agit en outre de chiffrer leur contribution
en terme de réduction de la pauvreté. L'approche
méthodologique utilisée pour décomposer la modification de
la pauvreté entre effets croissance et redistribution est celle
proposée par Datt et Ravallion (1992). L'analyse prend en compte
l'incidence, l'intensité et la sévérité de la
pauvreté. Les résultats obtenus montrent que le recul de la
pauvreté, quel que soit l'indicateur examiné, est beaucoup plus
imputable à la croissance qu'à la redistribution des revenus. La
redistribution n'a contribué ni à la baisse de l'intensité
ni à celle de la sévérité. Ceci présagerait
d'une aggravation des inégalités chez les pauvres.
Comme on peut le voir à partir du tableau 5 et de la
figure 7, l'ampleur du recul de l'incidence de la pauvreté en milieu
urbain est le double de celui obtenu en milieu rural. La
baisse en milieu urbain est le résultat de la
conjugaison à parts égales des effets de croissance et de
redistribution. Par contre, la diminution de l'incidence enregistrée en
milieu rural est totalement imputable à la croissance économique.
Les effets de redistribution dans ce milieu perturbent l'impulsion
donnée au niveau de vie par la croissance. La différence qui
apparaît entre les deux milieux de résidence s'explique par la
répartition des revenus. Ceux ci sont nettement plus disparates en
milieu urbain qu'en zone rurale. En 2001, le coefficient de variation des
revenus en milieu urbain est de 1,07 alors qu'il est de 0,80 en milieu rural et
ces niveaux n'ont pas changé significativement depuis 1996.
Tableau 5 : Décomposition de
l'évolution des indicateurs de pauvreté entre 1996 et 2001 en
(%)
|
Variation totale
|
Effets de croissance
|
Effets de redistribution
|
Résidus
|
P0
|
P1
|
P2
|
P0
|
P1
|
P2
|
P0
|
P1
|
P2
|
P0
|
P1
|
P2
|
Urbain
|
-19,3
|
-8,3
|
-4,3
|
-9
|
-4,7
|
-2,5
|
-8,4
|
-4,7
|
-2,5
|
-1,8
|
1
|
0,8
|
Rural
|
-9,8
|
-3,1
|
-0,8
|
-13,3
|
-6,6
|
-3,8
|
1,7
|
3,4
|
3,1
|
1,9
|
0,1
|
-0,2
|
Cameroun
|
-13,1
|
-4,9
|
-2
|
-11,8
|
-5,9
|
-3,3
|
-1,8
|
0,6
|
1,2
|
0,6
|
0,4
|
0,2
|
P0 : incidence de la pauvreté P1 :
intensité de la pauvreté P2 : sévérité de la
pauvreté
|
Sources: ECAM I; ECAM II; INS
Figure 7 : Evolution des indicateurs de
pauvreté selon le milieu de résidence entre 1996 et 2001
(%)
80,00% 60,00% 40,00% 20,00%
0,00%
variation en %
-20,00% -40,00% -60,00% -80,00%
-100,00%
P0
P1
P2 P0
P1
P2
P0 P1
P2
Variation totale Effets de croissance
Effets de redistribution
Cameroun Rural Urbain
Source : Construit par l'auteur à partir
du tableau 5.
En ce qui concerne l'intensité de la pauvreté,
elle a reculé au niveau national de près de 5 points, recul
essentiellement dû à la croissance. Le milieu urbain est encore
celui qui a enregistré le plus fort recul (8,3 points). Ceci est
attribuable à parts égales à la croissance
économique et à la réduction des
inégalités.
La sévérité (tableau 5 et de la figure 7)
de la pauvreté quant à elle a également baissé au
niveau national de 2 points. La baisse est faible en milieu rural et
exclusivement imputable à la croissance économique alors qu'elle
est assez forte en milieu urbain et attribuable autant à la croissance
qu'à la baisse des inégalités de revenus. Le résidu
ou élément qu'on ne maîtrise pas, s'interprète comme
la part de la modification qui n'est attribuée ni à l'effet
croissance ni à l'effet redistribution. Le fait qu'il soit nul pour un
indicateur de pauvreté dans un milieu signifie que la totalité de
la modification de cet indicateur dans ce milieu est imputable aux deux
facteurs que sont la croissance et la redistribution. En somme, la croissance
est autant bénéfique au milieu urbain qu'au milieu rural, mais
les fortes inégalités existantes en milieu urbain font jouer
à la redistribution un rôle très important dans la lutte
contre la pauvreté.
Tableau 6 : Variations des indicateurs de la
pauvreté selon les régions
|
Variation totale
|
Effets de croissance
|
Effets de redistribution
|
Résidus
|
P0
|
P1
|
P2
|
P0
|
P1
|
P2
|
P0
|
P1
|
P2
|
P0
|
P1
|
P2
|
Yaoundé
|
-30,7
|
-13,3
|
-6,7
|
-9,7
|
-5,3
|
-3,2
|
-20,2
|
-10
|
-5,3
|
-0,8
|
2
|
1,8
|
Douala
|
-18,8
|
-8,6
|
-4,4
|
-7,9
|
-4,4
|
-2,3
|
-7,5
|
-5,2
|
-3
|
-3,4
|
1
|
0,9
|
Autres villes
|
-10,1
|
-4,2
|
-2,1
|
-8,7
|
-4,2
|
-2,1
|
0,7
|
-0,2
|
-0,1
|
-2
|
0,2
|
0
|
Rural forêt
|
-17,1
|
-5,7
|
-1,5
|
-15
|
-8,2
|
-4,8
|
-6,8
|
1,1
|
2,8
|
4,7
|
1,4
|
0,5
|
Rural plateau
|
-12,2
|
-2,1
|
0,3
|
-14,4
|
-6,9
|
-4
|
-0,8
|
4,2
|
4,4
|
3
|
0,7
|
-0,1
|
Rural savane
|
1,3
|
-1,2
|
-1
|
-10,2
|
-4,7
|
-2,6
|
13,4
|
5,4
|
2,6
|
-1,9
|
-1,9
|
-0,9
|
Cameroun
|
-13,1
|
-4,9
|
-2
|
-11,8
|
-5,9
|
-3,3
|
-1,8
|
0,6
|
1,2
|
0,6
|
0,4
|
0,2
|
P0 : incidence de la pauvreté P1 :
intensité de la pauvreté P2 : sévérité de la
pauvreté
|
Sources: ECAM I; ECAM II; INS
Figure 8: Evolution des indicateurs de
pauvreté selon le milieu les régions entre 1996 et 2001
(%)
60% 40% 20% 0%
-20%
variation en %
-40%
-60% -80% -100%
Cameroun Rural savane Rural plateau Rural forêt Autres
villes Douala Yaoundé
P0 P1 P2
P0 P1 P2
P0 P1 P2
Variation totale
Effets de
croissance
Effets de
redistribution
Source: Construit par l'auteur à partir
du tableau 6.
Il faut remarquer que la situation présentée
ci-dessus n'est pas uniforme dans tous les milieux urbains du pays. Le tableau
6 et la figure 8, montre que Douala et Yaoundé se démarquent
très nettement des autres villes et le cas particulier de Yaoundé
qui enregistre un effet de redistribution de 20 points sur l'incidence de
pauvreté est assez révélateur de l'ampleur de
l'inégale répartition des revenus dans cette ville; de plus, les
effets de redistribution des revenus font diminuer la profondeur de la
pauvreté deux fois plus que ceux de la croissance.
Dans la ville de Douala, la diminution de l'incidence de la
pauvreté, de la profondeur et dans une certaine mesure de la
sévérité de la pauvreté est autant imputable
à la croissance qu'à la redistribution. Les autres villes du pays
se comportent à peu près comme la moyenne dans le milieu rural
à savoir un effet de redistribution quasiment inexistant. Toute la
réduction de la pauvreté est soutenue par la croissance.
De même que le monde urbain, le milieu rural
recèle de très fortes disparités qui méritent
d'être soulignées. Tout d'abord, les performances
enregistrées dans la région rurale Forêt sont assez
intéressantes. L'incidence de la pauvreté y recule de 17 points
et la contribution de la croissance à ce mouvement atteint 15 points, ce
qui est la plus forte contribution enregistrée par rapport à
toutes les zones agro écologiques retenues pour l'étude. De plus,
l'apport de la réduction des inégalités est assez palpable
(près de 7 points). Cette zone présente donc des performances
semblables à celles enregistrées dans le monde urbain bien que se
situant en milieu rural.
Cette ressemblance ne s'étend pas à la
réduction de la profondeur de la pauvreté et encore moins
à la sévérité de la pauvreté. La
redistribution dans la région rurale Forêt aggrave
légèrement la profondeur de la pauvreté, de même que
sa sévérité d'environ 3 points de pourcentage. En somme,
la zone rurale Forêt bénéficie surtout de la croissance que
de la redistribution, du fait sans doute d'un accroissement des
activités des sociétés forestières et du
comportement des prix du cacao. Ce n'est pas le cas de la région rurale
Hauts plateaux qui présente une évolution du type de celle
présentée pour l'ensemble du monde rural. Cette région
enregistre néanmoins une légère augmentation de la
sévérité de la pauvreté (due à la
redistribution) malgré le fait que l'incidence ait fortement
reculé. Le cas de la région rurale Savane est
particulièrement paradoxal. C'est la seule région qui fait
exception à la baisse générale de pauvreté
constatée. L'incidence de la pauvreté y est un peu plus grande en
2001
qu'en 1996. Elle augmente de 1,3 points malgré la forte
contribution de la croissance (10 points de pourcentage) pour la
réduire, cette situation est imputable à une quasi-absence de la
redistribution.
Contrairement à ce que l'on pourrait attendre et
à ce que l'on observe dans tout le reste du pays, la redistribution des
revenus dans cette partie du pays s'effectue fortement au profit des non
pauvres. S'il n'y avait pas eu cette modification de la distribution des
revenus, l'incidence de la pauvreté y aurait reculé de
près de 11 points. Cependant, l'intensité de la pauvreté
dans la région rurale Savane a reculé ; les pauvres y ont en
2001, un niveau de revenus moyens plus proche du seuil de pauvreté qu'en
1996. Ceci est confirmé par une légère baisse de la
sévérité de la pauvreté (indicateur de dispersion
des revenus moyens des pauvres), baisse qui traduit le fait que les pauvres ont
des revenus moyens moins dispersés en 2001 qu'en 1996.
L'équité et l'efficacité sont deux
éléments qui intéressent le décideur en politique
économique, et la décomposition de la pauvreté
monétaire en effet croissance et effet redistribution apparaît
être un assez bon début dans la capture de ces deux
éléments. Seulement, pour une prise en compte plus pertinente de
l'équité et de l'efficacité, il serait intéressant
de les analyser dans le cadre d'une fonction de bien-être social, comme
nous envisageons le faire dans la suite de notre travail.
2. 4. Conclusion
Dans ce chapitre, il était question de présenter
l'évolution de l'économie camerounaise depuis
l'indépendance. Il ressort dont de cette analyse que la situation
économique du Cameroun a connu d'énormes fluctuations. De la
période de croissance modérée entre 1960 et 1976, on est
passé à une période de forte croissance entre 1978 et 1985
grâce à la découverte et à l'exploitation du
pétrole. A partir de 1986 le Cameroun est entré dans une longue
phase de crise engendrée par des facteurs internes et externes, avant de
se reprendre en 1994. Le niveau de vie des camerounais n'a évidemment
pas été épargné par ces changements de rythme ; au
contraire si de 1984 à 1996 la pauvreté monétaire a
augmenté, passant de 40% à 50,5%, on peut par ailleurs noter, de
1996 à 2001, un légé recul de la pauvreté qui est
passée de 53,3 à 40,2%. La décomposition de
l'évolution de la
pauvreté montre que le recul de celle-ci est plus dû
à l'effet de la croissance économique qu'à celui de la
redistribution.
Mais pour véritablement apprécier le niveau de
vie des populations au Cameroun, il faudrait également envisager une
étude qui prenne simultanément en compte la croissance et
l'inégalité à travers notamment la fonction de
bien-être social.
CHAPITRE 3
CADRE CONCEPTUEL DE LA THEORIE DU
BIEN-ETRE SOCIAL
3.1. Introduction
La pauvreté est facilement perceptible lorsque les
agents ne peuvent atteindre un niveau de bien-être matériel
correspondant au minimum acceptable par les normes de la société.
S'il est souvent aisé de reconnaître la pauvreté d'un
individu ou d'un ménage par son mode de vie, il est plus difficile de la
quantifier. La détermination de la pauvreté exige non seulement
qu'on évalue le seuil à partir duquel une personne peut
être considérée comme pauvre, mais qu'on détermine
également le niveau bien-être des individus. Toutefois, si pendant
longtemps la mesure du bien-être soutenue, a été
fondée sur le revenu, l'une des avancées de la théorie
économique et qui va au delà de la simple considération du
revenu, est celle de la théorie du bien-être social. Cette
théorie vise à déterminer les décisions de
politique économique les plus optimales pour atteindre une fin
économique donnée. L'idée étant de trouver l'angle
d'attaque ou la cible idéale des politiques économiques pour
améliorer le bien-être social et donc réduire la
pauvreté.
Il s'agira donc de présenter dans ce chapitre, le cadre
conceptuel de la théorie du bien- être social, à travers
ses fondements (3-2) et les critiques y relatives (3-3).
3. 2. Les Fondements du bien-être social
Le bien-être social (BS) se réfère au
niveau de satisfaction de la société dans sa totalité.
Avec suffisamment d'hypothèses solides, le BS peut être
spécifié comme la somme de bien-être de tous les individus
de la société. Un autre aspect du bien-être traite de la
distribution du revenu ou des biens en incluant l'égalité, comme
dimension supplémentaire du bien-être.
L'économie du bien-être est une branche de
l'économie qui utilise les techniques microéconomiques pour
déterminer simultanément les allocations efficaces dans une
économie et la distribution des revenus qui y est associée. Elle
analyse le bien-être social qui est cependant mesuré en termes
d'activités économiques des individus qui composent la
société. Ainsi donc les individus et les activités qui
leurs sont associées constituent l'unité de base pour
l'agrégation du bien-être social que ce soit pour un groupe, une
société ou même
une communauté. De plus il n'existe pas d'autre
bien-être social mis à part le bien-être associé aux
unités de base individuelles.
Par ailleurs il existe deux approches de l'économie du
bien-être qui peuvent être prises en comptes : l'approche
Néoclassique et l'approche de la Nouvelle économie du bien-
être.
3.2. 1. L'approche Néoclassique du bien-être
social
L'approche Néoclassique fut développée par
Edgeworth, Sidgwick,
Marshall et Pigou. Elle suppose que :
-L'utilité est cardinale, c'est-à-dire qu'elle est
mesurable à l'échelle des observations ou des jugements,
-Les préférences sont des données
exogènes et stables,
-Une consommation additionnelle améliore petit à
petit l'augmentation de l'utilité (l'utilité marginale est
décroissante),
-Tous les individus ont une fonction d'utilité inter
personnellement comparable.
Avec ces hypothèses il est possible de construire une
fonction de bien-être social simplement en sommant toutes les fonctions
d'utilité individuelles.
3.2. 2. L'approche de la Nouvelle économie du
bien-être
Celle-ci est basée sur les travaux de
Pareto, Hicks et Kaldor.
Elle reconnaît explicitement les différences entre la partie
Efficacité de la discipline et la partie Distribution et les traite
différemment. Les questions relatives à l'efficacité sont
examinées avec des critères tels que l'efficacité de
Pareto et les tests de compensation de Kaldor-Hicks, tandis que les questions
relatives à la distribution du revenu sont couvertes par la
spécification de la fonction de bien-être social. Ici,
l'efficacité ne tient pas compte des mesures de l'utilité
cardinale; l'utilité ordinale qui est simplement un rangement des
paniers de biens, tel que représenté par une carte de courbe
d'indifférence, est plus adaptée à l'analyse.
3.2.2. 1. L'efficacité
Des situations sont considérées comme ayant une
distribution efficace lorsque à partir d'elles, des biens sont
distribués à des personnes qui maximisent leur utilité.
Plusieurs économistes utilisent l'efficacité de Pareto comme leur
efficacité cible. En accord avec cette
mesure du bien-être social, une situation est optimale
seulement si aucun individu ne peut améliorer sa position sans
détériorer celle d'un autre au moins. Cet état
idéal ne peut être possible que si quatre critères sont
observés :
-Le taux marginal de substitution (TMS) entre deux biens est
le même pour tous les consommateurs de ces deux biens. Ceci se produit
lorsque aucun consommateur ne peut améliorer sa situation sans
détériorer celle d'un autre.
-Le taux marginal de transformation (TMT) dans la production
est le même pour tous les produits. Ceci se produit quand il est
impossible d'augmenter la production d'un bien quelconque sans réduire
la production d'un autre bien.
-Le coût marginal des ressources est égal au
revenu marginal des produits pour tous les processus de production, ceci prend
place lorsque la production marginale physique d'un facteur doit être la
même pour toutes les firmes qui produisent ce bien.
-Le TMS est égal au TMT de la production, tel que le
processus de production doit être en accord avec ce que veulent les
consommateurs.
Il existe un nombre de conditions avec lesquelles plusieurs
économistes sont d'accord et qui peuvent conduirent à
l'inefficacité. Parmi elles :
-Les structures de marchés imparfaites telles que, le
monopole, monopsone, oligopole, oligopsone etc.,
- L'allocation inefficace des facteurs dans la théorie de
base de la production, - Les erreurs du marché et les
externalités, mais aussi les coûts sociaux,
- Discrimination imparfaite des prix,
- L'asymétrie d'information,
- Le déclin du coût moyen des monopoles naturels
à long terme,
- Certains types de taxes et d'impôts.
Il est presque impossible d'entreprendre une action sociale,
telle qu'un changement de politique qui en améliorant la situation des
uns, ne détériore celle d'un autre au moins. Ainsi malgré
son importance analytique, le critère de Pareto connaît quelques
limites. Premièrement : le critère de Pareto ne classe pas une
allocation optimale (efficace) supérieure et une allocation non optimale
(non efficace), il ne permet pas non plus de classer des allocations optimales
(ce qui revient à dire qu'il ne permet pas de déterminer la
distribution des revenus "idéale"). Deuxièmement, étant
donné la rareté des projets où il n'y aurait que des
gagnants directs, l'application stricte du critère conduirait à
une paralysie des politiques : très
peu d'actions seraient recommandées ou
exécutées. L'une des réponses à ces limites est
apportée par le test de compensation de Kaldor- Hicks ou
Critère de Kaldor- Hicks.
Le test de compensation de Kaldor- Hicks, s'énonce
comme suit : Un état E2 est préféré à un
état E1 si, dans l'état E2, tous les individus peuvent
potentiellement2 voir leur utilité augmenter, grâce
à une redistribution faisable qui aurait lieu après le
changement. Autrement dit L'état E2 est préféré
à l'état E1 si, en passant de l'état E1 à E2, ceux
qui gagnent peuvent dédommager ceux qui y perdent, tout en demeurant
dans une meilleure situation qu'en E1.
Ce principe parle d'une compensation "potentielle" et non
d'une compensation "véritable", ceci dit ; L'état E2 est
préférable à tout autre état E1 si, dans
l'état E2, il est hypothétiquement possible de mettre en place
une redistribution forfaitaire non coûteuse permettant d'atteindre une
allocation qui est Pareto supérieure à l'autre état E1.
3. 2. 2. 2. La distribution du revenu
Il y a plusieurs combinaisons d'utilité des
consommateurs, des facteurs de production, qui tiennent compte de
l'efficacité. En fait il y a une infinité d'équilibres de
consommateur et de producteur qui conduisent à un résultat
optimal au sens de Pareto. Il y a autant d'optima que de point sur la
frontière des possibilités de production agrégés.
D'où l'efficacité de Pareto qui est une condition
nécessaire mais pas suffisante pour le bien-être social. Chaque
optimum de Pareto correspond à une distribution de revenu
différente dans l'économie. Certaines distributions pouvant
engendrer de grandes inégalités de revenus. Le problème
est dont de savoir comment décider de quel optimum de Pareto est plus
désirable ? Cette décision est prise soit tacitement soit
ouvertement lorsque l'on spécifie la fonction de bien-être social
(FBS). Cette fonction incarne des jugements de valeurs relatifs à
l'utilité inter personnelle. La FBS est une manière
mathématique de présenter l'importance relative des individus qui
composent la société.
2 Tous les individus ne voient pas nécessairement leur
utilité augmenter.
La fonction de bien-être Utilitarienne, somme les
utilités de chaque individu dans l'ordre pour obtenir le bien-être
de la société entière. Tous les individus sont
traités de la même manière, indépendamment de leur
niveau initial d'utilité. Une unité supplémentaire
d'utilité pour une personne pauvre n'apparaît pas avoir plus de
valeur que l'utilité supplémentaire chez un millionnaire. De
l'autre côté il y a la fonction Max-min. Par rapport au
critère Max- min le bien-être est maximisé quand
l'utilité des pauvres ou des moins nantis est plus grande. Aucune
activité économique ne peut donc accroître le
bien-être à moins qu'elle n'améliore la position des plus
démunis de la société. Plusieurs économistes ont
spécifié des fonctions qui sont des intermédiaires entre
ces deux extrêmes. Ces intermédiaires des FBS peuvent être
interprétés comme montrant que lorsque l'inégalité
augmente, une large amélioration de l'utilité des personnes
relativement riches est nécessaire pour compenser les pertes
d'utilité des personnes relativement pauvres.
L'économie du bien-être comprend donc deux parties
:
-L'efficacité économique et,
-la distribution des revenus.
Si l'efficacité économique est largement
positive, elle est liée à la taille du revenu, tandis que la
distribution du revenu est plus normative et liée au partage du revenu.
D'ou la nécessité de bien définir l'instrument de mesure
du bien-être social.
3. 3. Critique de la Théorie du Bien-être
Social
La critique de la théorie du bien-être social ici
sera bâtie autour de deux questions. La première est relative
à la possibilité de traiter du bien-être social de
manière normative, en laissant hors champ les jugements politiques et
moraux sur les finalités du développement social. La seconde a
trait à la nature des biens (économiques ou autres) qui doivent
être pris en compte pour évaluer le bien-être.
3. 3. 1. Les approches économiques et leurs
limites
- La richesse au sens de la comptabilité
nationale : une évaluation marchande
Le reproche fait à la comptabilité nationale est
de ne pas fournir de mesure pertinente du bien-être social. L'un des
problèmes auquel se heurte actuellement la Comptabilité
nationale, et qui justifie certaines des critiques qui lui sont
adressées, résulte du poids croissant d'activités
économiques pour lesquelles cette convention marchande ne fournit pas de
réponse claire. Le caractère peu satisfaisant de la mesure de la
productivité des services
révèle la fragilité du partage
volume-prix dès que la production n'est plus faite d'objets
matériels standardisés. Que l'on soit mieux soigné, les
professeurs plus compétents, les administrations plus efficaces, etc.,
constituent indéniablement des faits économiques que l'on devrait
pouvoir mesurer. Or, la Comptabilité nationale ne le permet pas. La
modification de la structure de la production en faveur des services et de
l'immatériel rend de ce fait plus douteuse la signification du taux de
croissance de l'économie. Il n'est cependant pas évident que la
solution consiste à remettre en cause la philosophie actuelle des
comptes nationaux pour essayer d'y faire entrer, par exemple, une mesure de
l'utilité sociale des activités de service. Le gain
d'informations risquerait d'être bien maigre comparé à
l'inconvénient d'une perte de cohérence du système. Reste
que cela n'interdit pas d'élaborer des indicateurs de bien-être
économique au sens d'Osberg et Sharpe, partiellement fondés sur
les données de la comptabilité nationale.
De fait, le procès du taux de croissance est d'abord
celui de son utilisation, réelle ou supposée, comme mesure de
l'évolution de la richesse et du bien-être social. Nul ne
contestera qu'un accroissement général de la production, toutes
choses restant égales par ailleurs, améliore le bien-être,
mais cela ne signifie pas que l'on puisse se limiter à des fonctions de
bien-être social dont les seuls arguments sont des biens pris en compte
dans le calcul du PNB.
- Les théories du bien-être et du choix
social conduisent à une impasse.
Cette autre critique vaut pour toutes les fonctions
d'utilité, indépendamment de leur capacité à
prendre en compte la question des inégalités. Dans sa version la
plus sommaire (définissant l'utilité sociale comme la somme des
utilités individuelles), l'utilitarisme ignore les problèmes de
répartition et présente un biais évident en faveur des
inégalités (dans la mesure où celles-ci peuvent être
favorables à un accroissement global de la richesse). Cette
première critique n'atteint pas l'ensemble de l'économie du
bien-être, dans la mesure ou rien n'interdit d'utiliser des fonctions
« de type Rawls » W= min (U1, ....Un) qui font dépendre le
bien-être global de celui des plus démunis.
On s'attachera aussi à deux critiques plus
fondamentales qui visent toute formulation faisant usage d'une fonction
d'utilité. La première critique a été
formulée depuis longtemps par les économistes eux mêmes et
elle est au point de départ de la « nouvelle économie du
bien-être »: d'un point de vue logique, rien n'autorise à
supposer la comparabilité (ou la
commensurabilité) des utilités individuelles
(postulat individualiste). Or, toute fonction d'utilité suppose qu'il
existe une commune mesure des bonheurs individuels.
La seconde critique semble viser également la nouvelle
économie du bien-être. Rappelons brièvement le principe de
Kaldor-Hicks qui en constitue l'un des fleurons: un état de
l'économie est jugé supérieur à un autre si, pour
parvenir à cet état, les bénéficiaires du
changement peuvent potentiellement dédommager les perdants et ainsi en
arriver à une amélioration parétienne (qui permet
d'améliorer le bien-être d'au moins une personne impliquée
sans pour autant détériorer le bien-être des autres). Ce
principe se résume en fait à postuler que l'on peut dissocier les
problèmes de production et de redistribution ou, ce qui revient à
peu près au même, que les diverses formes d'utilité sont
monnayables.
L'exemple suivant montre quelles conclusions aberrantes
peuvent être tirées d'une telle prémisse: en 1991, Laurence
Summers, alors économiste en chef à la Banque Mondiale,
recommandait que la Banque encourage le transfert des industries polluantes
dans les pays en développement, en application directe du principe de
Kaldor-Hicks. Si l'on admet que des gains économiques peuvent
légitimement compenser les atteintes à la santé des
populations, le raisonnement est difficilement attaquable: « la mesure des
coûts de santé liés à la pollution dépend des
pertes économiques dues à un accroissement de la morbidité
et de la mortalité. De ce point de vue, un montant donné de
pollution doit être fait là où les salaires sont les plus
bas. Je pense que la logique économique qui sous-tends l'exportation des
nuisances toxiques dans les pays à bas salaires est impeccable et que
nous devons la prendre en compte »3. Supposer que l'on puisse
compenser monétairement toute atteinte au bien-être revient
à renforcer le pouvoir (discrétionnaire) de l'argent: c'est donc
tout sauf un choix politiquement neutre.
Pour contourner l'obstacle de la non comparabilité des
utilités individuelles, K. Arrow a tenté de remplacer les
fonctions d'utilité par les préférences (ou plus
généralement des relations d'ordre) auxquelles elles sont
associées, replaçant en fait la théorie du bien-être
dans le cadre plus large d'une théorie du choix social. Mais cette
tentative débouche sur une impasse.
3 Cité par House, repris dans Bernard Perret
L'évaluation des politiques publiques, collection Repères, La
Découverte 2001).
Par ailleurs dans sa conférence Nobel4,
Amartya Sen suggère que la seule issue pour l'économie du
bien-être consiste à remettre en cause l'hypothèse de non
comparabilité des utilités individuelles. Si les
économistes veulent prétendre qu'une situation est meilleure
qu'une autre, ils doivent s'autoriser certains jugements comparatifs sur le
bien-être des individus.
3. 3. 2. Rawls, Sen, Walzer et la pluralité des
biens
- John Rawls : le bien-être est
conditionné par l'accès aux « biens premiers
»
L'idée selon laquelle le Bien-être ne
dépend pas uniquement du niveau de ressources économiques n'a, de
toute évidence, rien de très novateur, du moins pour les
philosophes. Dans sa théorie de la justice, John Rawls considère
ainsi un ensemble de « biens premiers » nécessaires au
bien-être individuel (« dont chacun est supposé avoir besoin
»)5. Ces biens sont de deux ordres :
-Les biens premiers naturels (santé, talents), qui ne
dépendent pas directement de l'organisation sociale,
- Les biens premiers sociaux : libertés de base
(nécessaires au développement et à l'exercice des
facultés morales) ; liberté de circuler et de choisir son
activité (nécessaire à la réalisation de «
fins ultimes ») ; pouvoirs et prérogatives des fonctions et des
postes de responsabilité (dans les institutions politiques et
économiques) ; revenu et richesse (" moyens polyvalents (munis d'une
valeur d'échange) ; on en a besoin pour réaliser directement ou
indirectement une gamme étendue de fins, quelles qu'elles soient" ) ;
bases sociales du respect de soi (constituées par "les aspects des
institutions de base qui sont en général essentiels aux citoyens
pour qu'ils possèdent un sens aigu de leur propre valeur en tant que
personnes et pour qu'ils soient capables de développer et d'exercer
leurs facultés morales et de faire progresser leurs buts et leurs fins
avec confiance en eux-mêmes").
Pour Rawls, une société juste est une
société qui assure une répartition équitable des
biens premiers sociaux, en tenant compte du fait que les individus sont
inégaux en terme de biens premiers naturels. On ne discutera pas ici les
idées de Rawls sur la justice sociale. En ce qui concerne notre objet,
leur importance tient dans l'affirmation de la non substituabilité
4 « La possibilité du choix social -
Conférence Nobel », Revue de l'OFCE n° 70, juillet 1999
5 J. Rawls, Théorie de la justice, paris,
seuil, 1987.
des biens: toutes les formes de richesse ne sont pas à
mettre sur le même plan quand on cherche à définir un
état souhaitable de la société.
- Amartya Sen : le bien-être comme
capacité d'agir
Dans l'approche de Rawls, le bien-être individuel est
défini en terme d'accès à un ensemble de biens (même
si la définition de ces biens est suffisamment large pour inclure des
aspects relevant de l'activité et des modes de vie). Comme le remarque
Sen en critiquant Rawls, on peut contester cette limitation et adopter un point
de vue plus large, prenant en compte l'interaction des individus et des
ressources auxquelles ils ont accès : « On peut améliorer
cette procédure [de Rawls] en prenant en compte non seulement la
possession des biens premiers et des ressources, mais aussi les
différences existant entre individus pour les transformer en
capacité de bien vivre » (conférence Nobel). Dans cette
perspective, Sen souligne, premièrement, le fait que les individus sont
les acteurs de leur propre bien-être et deuxièmement, que ce
bien-être dépend de la « réalisation des buts et des
valeurs qu'une personne a des raisons de poursuivre, qu'elles soient en rapport
ou non avec son propre bien- être »6. En termes plus
triviaux, on pourrait résumer le message de Sen en disant que le bien-
être dépend autant du faire que de l'avoir.
Pour préciser comment les biens économiques
contribuent au bien-être, Sen introduit les deux concepts importants de
fonctionnements (functionnings) et de capabilités (capabilities). Les
fonctionnements sont les modes de vie et pratiques sociales qui
déterminent l'usage des biens et leur confèrent une plus ou moins
grande utilité. Les capabilités, représentent la
capacité réelle qu'ont les individus d'atteindre les buts qu'ils
se fixent. En pratique, la perspective de Sen incite à prendre en compte
les libertés réelles, c'est à dire la possibilité
concrète qu'ont les gens d'accomplir certaines actions importantes de
leur point de vue.
- Michael Walzer et
l'hétérogénéité des biens
L'ouvrage majeur du philosophe américain Michael Walzer
« Sphères de justice »7 est une critique explicite de la
théorie de la justice de Rawls. Schématiquement, Walzer
6 Inequality reexamined, Oxford India
Paperbacks1995,p.56
7 Le Seuil, 1997
reproche à Rawls de discuter abstraitement des
principes de la justice redistributive en ignorant le fait que, dans les
sociétés réelles, les critères de
répartition des biens sociaux sont toujours conditionnés par la
nature particulière de ces biens. Dans une certaine mesure, Rawls
reconnaît cette relativité des principes à la nature des
biens, puisque l'exigence d'équité ne concerne que les biens
premiers. Walzer va cependant plus loin en montrant que l'impératif
égalitaire ne peut pas être compris de la même
manière selon qu'il s'applique à la santé, à
l'éducation, à l'accès à la justice, à la
répartition des travaux pénibles, à l'accès aux
responsabilités, etc.
En conséquence, il est erroné de penser que des
principes de justice tels que ceux formulés par Rawls puissent avoir une
portée pratique et universelle. Walzer observe que la répartition
des biens sociaux s'opère selon trois principes : le marché, le
mérite (à chacun selon son mérite) et le besoin (à
chacun selon ses besoins). Le poids respectif de ces trois principes ne peut
être fixé par aucune règle abstraite: il dépend de
la manière dont les citoyens comprennent les exigences sociales de la
démocratie: « Tout bien social ou tout ensemble de biens sociaux
constitue pour ainsi dire une sphère distributive à
l'intérieur de laquelle seuls certains critères ou dispositifs
sont appropriés »8. Un exemple limite,
particulièrement parlant, est celui de l'obligation militaire: dans
toutes les démocraties, il est admis qu'un principe
d'égalité stricte doit s'appliquer en cette matière. Bien
que formulées dans une perspective très différente, les
réflexions de Walzer et celles de Sen aboutissent aux mêmes
conclusions :
1) on ne peut s'en tenir à la distribution des
revenus. Il faut mesurer distinctement l'accès à
différentes catégories de biens tels que la santé,
l'éducation, le logement, etc., qui ont une signification
particulière et qui font l'objet de politiques sociales
spécifiques,
2) Les critères d'évaluation de la justice
sociale et du bien-être doivent être validées par le «
sens commun », en fonction de valeurs et de « fonctionnements »
propres à chaque société: « le fait que les membres
d'une communauté historique partagent des sensibilités et des
intuitions est bien réel »9.
8 Op. Cit., p. 32.
9 Idem, p. 57
- La notion de capital social
Une autre limite de la représentation économique
du bien-être provient du fait qu'elle reste centrée sur l'individu
et ne prend pas en compte les aspects collectifs et systémiques du
développement social, à commencer par la culture au sens large du
terme. Si nous considérons la société comme un
système complexe incluant la culture (c'est à dire comme une
`civilisation'), la mesure du bien-être individuel ne nous dit rien des
conditions de sa pérennisation. En économie, la notion de capital
(physique et humain) fait référence aux conditions de base de la
production économique future. Il est donc tentant d'étendre ce
concept pour prendre en compte la "soutenabilité" de la culture civique
et de l'organisation sociale. De ce point de vue, la notion de "capital social"
comble un vide dans la théorie sociale. La définition la plus
souvent citée est due à Robert Putnam : « Le Capital social
fait référence à des caractéristiques de
l'organisation sociale telles que les réseaux, les normes et la
confiance sociale, qui facilitent la coordination et la coopération en
vue d'un bénéfice mutuel »10
.
Ce détour philosophique, vise à renforcer la
crédibilité de trois affirmations que l'on pourrait tout aussi
bien considérer comme évidentes : premièrement, il n'y a
pas de « théorie du bien-être » qui permette de faire
l'économie de jugements de valeurs nécessairement «
situés » sur le caractère plus ou moins souhaitable de tel
ou tel état de la société ; deuxièmement, nos
jugements sur la société dépendent de la « base
informationnelle » à partir de laquelle ils s'exercent ;
troisièmement, choisir et hiérarchiser les aspects de la
réalité sociale qu'il importe de connaître et de faire
connaître doit être considéré comme un acte de
jugement à part entière, ce qui veut dire qu'il doit s'effectuer
collectivement et dans un cadre institutionnel approprié.
La Nouvelle économie du bien-être s'efforce de
répondre à ces critiques, à travers notamment la fonction
de bien-être social de Sen. En effet cette fonction prend en compte outre
le revenu moyen, le niveau d'inégalité dans la
société. Elle incarne des jugements de valeurs relatifs à
l'utilité interpersonnelle. C'est d'ailleurs à ce titre qu'elle
nous intéresse pour la suite de notre étude.
10 R. Putnam, « Bowling alone : America's
declining social capital », The journal of democracy,
january 1995.
3. 4. Conclusion
Présenter le cadre conceptuel du bien-être
était l'objectif de cette partie. Il a donc été question
d'exposer ses fondements suivant les approches Néoclassique et de la
Nouvelle économie du bien-être dans la première partie. On
a également tenu compte dans la seconde partie, des débats
critiques, quelques peu philosophiques qui tourne autour des limites de
l'approche économique du bien-être et de la pluralité des
biens pris en compte dans l'évaluation du bien-être. Il nous faut
aborder maintenant les applications théoriques et pratiques de la
théorie du bien-être social.
CHAPITRE 4
REVUE DE LA LITTERATURE SUR LA THEORIE DU
BIEN-ETRE
SOCIAL
4. 1. Introduction
Nous avons abordé au chapitre précédent,
dans le cadre conceptuel de la théorie du bien-être social, les
fondements et les débats critiques relatifs à cette
théorie. Aussi la revue de la littérature dont il est question
dans ce chapitre, nous permettra de voir comment il est possible de capter le
bien-être de la société. Une revue de la littérature
théorique nous permettra donc d'aborder un certain nombre d'instruments
de mesure de ce bien-être (4. 2). Par la suite plus concrètement
nous apprécierons, comment appliqués à certains pays ces
instruments ont pu rendre compte du niveau de bien-être, et avec quel
degré de pertinence. Cette dernière approche se fera à
travers une revue de la littérature empirique (4. 3).
4. 2. Revue de la Littérature Théorique
Pour représenter la façon dont les allocations
peuvent être jugées d'un point de vue distributif ou encore pour
apprécier le niveau de vie des populations d'une société,
les économistes utilisent souvent les fonctions de bien-être d'une
forme ou d'une autre. On distingue ainsi la fonction de bien-être
Utilitariste, qui présente en son sein quelques extensions (4.2.1), et
la fonction de bien-être social Individualistique qui présente en
également quelques unes (4.2.2).
4. 2. 1. La fonction de bien-être social Utilitariste
et ses extensions
Dans le cadre d'un processus d'agrégation des
préférences, on peut naturellement se poser la question de savoir
s'il existe des processus de décision sociale, c'est-à-dire des
méthodes d'agrégation des préférences qui soient
à l'abri des manipulations. Pour cela trois exigences paraissent
extrêmement naturelles :
1) A partir d'un ensemble quelconque de
préférences individuelles complètes, réflexives et
transitives, le processus de décision sociale devrait engendrer un
système de préférences sociales qui possède les
mêmes propriétés.
2) Si tout le monde préfère l'alternative x
à y, les préférences sociales devraient classer x avant
y.
3) Les préférences entre x et y ne devraient
dépendre que de la façon dont les gens classent x par rapport
à y et non de la façon dont ils classent d'autres
alternatives.
Cependant il peut être assez difficile de trouver un
processus qui les satisfasse toutes les trois. A cet égard Kenneth Arrow
établi un résultat très important: « si un processus
de décision sociale satisfait les propriétés 1, 2 et 3, il
doit s'agir d'une dictature: tous les classements sociaux correspondent dans ce
cas aux classements effectués par un seul individu ».
Le théorème d'impossibilité d'Arrow
ci-dessus est assez surprenant. Il indique que trois caractéristiques
très naturelles d'un processus de décision sociale sont en fait
incompatibles avec le système démocratique. Si nous devons
laisser une des caractéristiques souhaitées de la FBS, il s'agira
vraisemblablement de la propriété 3, à savoir le fait que
les préférences sociales à l'égard de deux
alternatives ne dépendent que du classement de ces deux alternatives.
Une méthode pour obtenir les préférences
sociales à partir des préférences individuelles consiste
à additionner les utilités individuelles et à utiliser le
nombre ainsi obtenu comme une sorte d'utilité sociale. Cela fonctionne
mais évidemment, c'est totalement arbitraire puisque le choix de
représentation est lui même arbitraire. Ce type de fonction
d'agrégation porte un nom: on l'appelle fonction de
bien-être social.
Une fonction de bien-être social est simplement une
fonction quelconque des fonctions d'utilité individuelles. Elle permet
de classer différentes allocations sur la base des seules
préférences individuelles et elle est croissante par rapport
à l'utilité de chaque individu. Un des cas particulier
déjà mentionné ci-dessus est celui de la somme des
fonctions d'utilités individuelles. On appelle parfois cette fonction :
la fonction de bien-être Utilitarienne classique ou
fonction de bien-être de Bentham11.
11 Jeremy Bentham (1748-1832) est le fondateur de
l'école Utilitarienne de philosophie morale, une école qui
considère que l'idéal est le plus de bonheur possible pour le
plus grand nombre.
En procédant à une petite
généralisation de cette forme, nous obtenons comme fonction de
bien-être social, la somme pondérée des utilités.
Les pondérations sont censées être des
nombres indiquant l'importance de l'utilité de chaque
agent dans le bien-être social général. Il s'agit
logiquement des valeurs positives.
Une autre fonction de bien-être social
intéressante est la fonction de bien-être social
minimax ou fonction de bien-être social de
Rawls12. Cette fonction de bien-être social indique
que le bien-être social dans le cas d'une allocation dépend
uniquement du bien-être de l'individu qui a le niveau de satisfaction le
plus bas, c'est à dire la personne avec l'utilité minimum. Ainsi
le bien-être social ne peut s'accroître que si le détenteur
de l'utilité minimale connaît une amélioration dans son
bien-être ou dans son utilité.
Chacune de ces fonctions permet de comparer les fonctions
d'utilité individuelles. Chacune représente en fait un jugement
éthique différent quant à la comparaison du
bien-être des différents agents. La seule restriction
imposée à ce stade sur la structure de la fonction de
bien-être, étant que celle ci soit croissante par rapport à
l'utilité de chaque consommateur.
Dès que nous disposons d'une fonction de
bien-être, nous pouvons examiner le problème de maximisation du
bien-être. Il s'agira dont de trouver une allocation réalisable
qui maximise le bien-être social avec les propriétés
suivantes :
1) Une allocation qui maximise le bien-être social doit
être une allocation efficace au sens de Pareto ;
2) Toute allocation efficace au sens de Pareto doit correspondre
à un niveau de bien-être maximum pour une fonction de
bien-être particulière.
La fonction de bien-être nous donne donc une
méthode de sélection des allocations efficaces au sens de Pareto
: tout point de bien-être maximum est une allocation efficace au sens de
Pareto et toute allocation efficace au sens de Pareto est un point de
bien-être maximum.
12 John Rawls est un philosophe moral contemporain de
l'Université de Harvard qui a plaidé en faveur de ce principe de
Justice.
4. 2. 2. La fonction de bien-être social
Individualistique et ses Extensions.
Jusqu'à présent, nous avons
considéré que les préférences individuelles
étaient définies par rapport à l'ensemble de l'allocation
et pas uniquement par rapport au panier de biens de l'individu. Mais comme il
faut le souligner, les individus pourraient se préoccuper uniquement de
leur panier de consommation personnelle.
La fonction de bien-être est une fonction directe des
niveaux d'utilités des individus et une fonction indirecte de leurs
paniers de consommation, donc de leur revenu ; étant donné que
les paniers de consommation dépendent du revenu réel individuel,
on appelle cette forme particulière de fonction de bien-être
: fonction de bien-être Individualistique ou fonction de Bergson-
Samuelson13.
L'utilité de chaque individu ne dépend que de sa
propre consommation qui elle même dépend du revenu réel de
l'individu, il n'y a donc pas d'externalité de consommation.
Mais lorsque le niveau d'utilité d'une personne peut
dépendre de sa consommation qui dépend à son tour de son
revenu, une certaine désutilité peut apparaître du fait de
l'inégalité qui existe dans la société
entière. Par ailleurs, il est généralement admis que
l'équité et l'efficacité sont les deux
éléments qui intéressent les décideurs. Par
conséquent la forme non Utilitarienne traditionnelle de la fonction de
bien-être social de Bergson-Samuelson change de forme.
Pour la FBS ci-dessus, une augmentation de l'efficacité
entraîne une augmentation du bien-être social, et une augmentation
de l'inégalité entraîne une réduction du
bien-être de la société.Si cette fonction est
supposée parétienne, pour une augmentation de revenu, toutes
choses restant égales par ailleurs, on a une augmentation du
bien-être dans la société.
L'ensemble des FBS admises qui satisfont à ces
conditions est large. Dans l'optique de réduire cet ensemble
réalisable, davantage de restrictions sont nécessaires. Ces
restrictions peuvent être spécifiées par un certain nombre
d'axiomes. A la base de cet ensemble de quatre
13 Abram Bergson et Paul Samuelson sont des
économistes contemporains. Ils ont analysé les
propriétés de ce type de fonction de bien être au
début des années 40. Samuelson a reçu le prix Nobel
d'Economie pour ses nombreuses contributions.
axiomes, Sen (1974) arrive à une forme spécifique
de la fonction de bien-être sociale de Bergson- Samuelson tel que : W= g
(1-G)
où W est la fonction de bien-être social de Sen,
u est le revenu moyen et G le coefficient d'inégalité de Gini.
Sen (1976) montre que cet indice calculé à partir de la
distribution des revenus, est une sous relation de la relation des
préférences sociales définies dans la distribution des
biens. Dagum (1990, 1993), Yitzhaki (1979,1982) et Sheshinski (1972) sont
arrivés à la même forme, ainsi on peut appeler cette
fonction de bien-être social SDYS (Sen, Dagum, Yitzhaki et
Sheshinski).
Par ailleurs avec cette même forme, d'autres auteurs se
proposent d'utiliser d'autres indices d'inégalité, notamment
Foster (1996) qui utilise l'indice d'Atkinson, mais la fonction de
bien-être social de Foster peut également être
calculée directement avec l'indice de Theil.
En outre il est possible de décomposer ces
dernières formes de FBS en sous-groupes de manière à
obtenir la FBS correspondant à chaque sous-groupe. Mais cette
décomposition en sous-groupes de la fonction de bien-être social
dépend de la forme spécifique de l'indice
d'inégalité utilisé dans la fonction. Ainsi Shorrocks
(1980) montre que seule la classe généralisée des mesures
entropiques est susceptible d'être décomposée en
inégalité intra groupe et inter groupe ; l'indice de Gini
n'appartenant pas à cette classe , il n'est pas possible de le
décomposer de la même manière.
Ainsi donc la FBS de Sen ne peut être
décomposée du fait de la présence de l'indice de Gini.
Néanmoins si le but principal est d'avoir une idée sur la
contribution ou la part de chacun des groupes dans le bien-être social
total, ou encore l'effet exact d'un changement proportionnel du revenu de
chaque membre d'un groupe spécifique sur l'ampleur totale du
bien-être, il est possible d'imaginer un autre type de
décomposition. Dans ce sens on peut se servir de la méthode
développée par Podder (1993) pour décomposer le
coefficient de Gini en sous-groupes. Récemment Podder et Mukhopadhaya
(1999) ont démontré que cette méthode permet de
répondre à d'importantes questions relatives à la
contribution au bien-être de toute la population des différents
sous-groupes. Il faut tout de même relever que la FBS de Sen est
très rigide, toutefois elle peut aisément être
modifiée pour en faire une fonction plus flexible, telle la classe des
FBS généralisées. Par ailleurs, cette FBS
généralisée qui sera
l'outil de nos travaux empiriques, peut bénéficier
de la même décomposition en sous-groupes que la FBS de Sen.
4. 3. Revue de la Littérature
Empirique
Le niveau de vie d'un individu ou de la société
est un concept multidimensionnel englobant en principe chaque aspect de la
consommation directe, ainsi les activités et principes non
immédiatement consommables (Sen, 1987). La nature pluridimensionnelle du
concept de bien-être vient du fait qu'on ne peut pas facilement
transformer plusieurs de ses composantes en numéraires. Deaton et
Muellbauer (1980) pense que la meilleure façon de mesurer le
bien-être individuel est donc d'utiliser une mesure monétaire. On
doit dont disposer de données exhaustives sur le niveau de revenu ou de
dépense des ménages. L'utilisation d'une mesure de
bien-être fondée sur la dépense est soutenue par deux
arguments :
- Sur le plan conceptuel, la théorie du revenu
permanent suggère que les dépenses sont une meilleure
approximation des revenus à long terme dont du niveau de vie ; que le
revenu courant dévoilé par une enquête auprès des
ménages.
-Sur le plan empirique, on peut montrer que les
dépenses sont mesurées avec une plus grande précision que
le revenu, surtout dans le cas ou une part importante de ceux ci est
tirée du secteur informel. Toutefois il s'avère qu'une
évaluation empirique du bien-être social par la FBS est encore
plus éloquente.
4. 3. 1. Evaluation du bien-être social par la
fonction de bien-être Social
De nombreuses études sur le bien-être des
populations ont eu recours à la fonction de bien-être social, et
plus spécifiquement à celle de Sen. Mukhopadhaya dans un de ses
articles paru en 2001, analyse les changements dans le bien-être social
à Singapour en utilisant les données de l'enquête sur la
force de travail de 1982, 1991 et 1999. Pour analyser ces changements
Mukhopadhaya utilise à la fois les mesures ordinales que sont :
l'approche de dominance de Lorenz et l'approche
généralisée de dominance de Lorenz ; mais aussi une mesure
cardinale qui est la FBS.
Avec l'approche de dominance de Lorenz (DL), Mukhopadhaya
trouve que le bien- être social à Singapour en 1991 était
supérieur à celui de 1999 et qu'à partir du moment ou le
revenu par tête a changé durant cette période, on ne peut
pas émettre de jugements relatifs au
bien-être sur la base de la DL ; dans la mesure ou les
courbes de Lorenz des deux périodes 1982-1991 et 1991-1999
s'entrecoupent.
Pour résoudre ce problème (le revenu moyen de
ces années ayant changé, ce qui crée un autre
problème) et pour introduire le concept d'efficacité que la
dominance de Lorenz n'admet pas, dans la construction du bien-être
social, il a analysé et appliqué le critère de Dominance
de Lorenz généralisée. Il a trouvé que même
ce critère ne peut conduire à un rangement sans
ambiguïté de ces 3 années, à cause de
l'intersection.
Le classement basé sur la fonction de bien-être
social de Sen montre quant à lui une croissance continue du
bien-être social à Singapour, il montre également que
l'accroissement observé de l'inégalité est
éclipsé par l'accroissement du revenu moyen. Ceci dit, pour
résoudre le problème du classement en terme de bien-être
social, la DL est l'approche la plus utilisée dans la
littérature, cependant comme cette procédure ne fourni pas un
classement complet, une extension théorique (utilisée aussi pour
des observations empiriques) est la dominance de Lorenz
généralisée. Ces deux approches sont
complétées par une cardinalisation de la DL
généralisée qui est en fait la FBS de Sen.
Par ailleurs, considérant certaines de ses limites
liées au fait qu'elle est Parétienne et qu'elle donne plus
d'importance à l'aspect efficacité, on peut introduire une
fonction de bien- être social plus générale qui de
surcroît est non Parétienne dans des cas spéciaux. Avec
cette FBS on trouve que lorsque l'accent est plus mis sur
l'équité, le bien-être social à Singapour
décroît. Il est observé avec seulement une exception que
malgré le fait que les fruits de la croissance soient toujours
distribués à tous les secteurs de la population, le secteur le
plus riche bénéficie toujours d'une marge supplémentaire.
Il a aussi été démontré, en utilisant des facteurs
autres que le revenu, que le bien-être social à Singapour a
augmenté en terme d'amélioration de secteurs éducatif, de
la santé et du niveau de vie des populations.
En dehors de cette étude de Mukhopadhaya qui
grâce à la FBS, a examiné les changements du
bien-être social à Singapour, ce même Mukhopadhaya dans une
autre de ses études (novembre 2001), pour estimer la tendance du
bien-être social en Australie pour les périodes 1983-84 et 1988-89
utilise encore la forme fonctionnelle de la FBS de Sen. Il essaie de
désagréger cette fonction en sous-groupes, grâce à
la méthode de décomposition du coefficient de Gini
développée par Podder. Avec cette méthode, il arrive
à identifier les
groupes désavantagés par leur part relative dans
le bien-être total, et la distribution des parts relatives de
bien-être social total entre les différents groupes
régionaux. L'analyse donne aussi de spécifier l'effet sur le
bien-être de la société du changement de revenu d'un groupe
d'un point de pourcentage et la tendance du bien-être relatif d'un
groupe. C'est ainsi que l'on trouve comme résultat que les
régions de New south wales (NSW) et de Victoria ont le maximum de parts
de bien-être qui a d'ailleurs augmenté durant les périodes
1983-84 et 1993-94. Par ailleurs l'on trouve aussi que un Dollar
supplémentaire accordé aux régions du Queensland (Q'ld),
South australia (SA), West Australia (WA) ou Tasmania augmente toujours le
bien-être social total.
Pour des raisons déjà évoquées, il
peut s'avérer, pour affiner les résultats déjà
obtenus en utilisant la FBS de Sen, que l'on se serve d'une forme plus
générale, qui peut également être
décomposée en sous-groupes avec la même méthode de
Podder.
Dans un autre de ses articles (2001) Mukhopadhaya le fera pour
enquêter sur les disparités de bien-être social en
Australie, sur les périodes 1983-84 et 1993-94. Cette méthode
permettra de déterminer le groupe cible, et aussi les raisons d'un
changement de la part de bien-être social dans les régions. A
l'issue de cette analyse, Mukhopadhaya observe une réduction du
bien-être total en Australie, les disparités régionales
liées à la part du bien-être vont également
s'amplifier. Les régions du NSW, Victoria et Q'ld avec la part de revenu
maximale, a presque 70% de la part de bien-être total. Pour Q'ld, quand
la part de revenu décroît dans le temps, l'équité
relative montre une tendance ascendante. Comme à la fois la part de
revenu et l'équité relative en ACT (Australian capital territory)
décroît de la période 1983-84 à la période
1993-94, la part relative de bien-être de cet Etat décroît
durant la même période. Par contre la raison de la même
progression durant la même période en WA, était la forte
décroissance de la seule part de revenu (et cette baisse était
éclipsée par l'augmentation de l'équité relative).
Les Etats de Tasmania, WA, SA, Q'ld ont une influence négative sur
l'inégalité en Australie alors que les régions ACT et NT
au contraire ont un effet positif sur l'inégalité.
L'élasticité du bien-être par rapport au revenu moyen a
montré une tendance croissante pour la région du NSW, du fait de
l'accroissement de sa part totale de revenu. Et enfin entre la période
1983-84 et 1993-94 la part relative de bien-être social a diminué
pour Victoria, Q'ld, ACT et augmenté pour la Tasmanie et NT.
Il apparaît dont clair que le recours à l'analyse du
bien-être social permet d'avoir une meilleure visibilité dans la
mise en oeuvre d'un certain nombre de politiques.
4. 4. Conclusion
Dans ce chapitre, nous avons pu apprécier, un certain
nombre d'instruments de mesure du bien-être social, notamment la FBS dans
ses différentes variantes à travers une revue de la
littérature théorique. La revue de la littérature
empirique quant à elle, a permis de mettre en évidence la
qualité des instruments utilisés pour la capture du
bien-être social, et de se rendre compte de la pertinence dans l'analyse
de la FBS de Sen que nous développerons davantage dans la suite de ce
mémoire.
CHAPITRE 5
MÉTHODOLOGIE ET DONNEES
D'ANALYSE
5. 1. Introduction
En général, un décideur qui est
intéressé par le bien-être de la société,
doit nécessairement prendre en compte l'équité mais aussi
l'efficacité dans la distribution du niveau de vie. Bien que la
définition et l'admission de l'équité créent un
certain nombre de problèmes, la définition de l'efficacité
en économie du bien-être est largement appuyée par le
principe de Pareto. Par ailleurs, du fait de sa nature désirable, ce
principe est largement accepté et fait en plus partie des
propriétés fondamentales de la fonction de bien-être
social. Cependant ce principe présente un certain nombre de
désavantages. En effet, si l'on considère qu'un homme riche le
devienne encore plus du fait d'une quelconque modification de politique, en
accord avec le principe de Pareto ce changement est acceptable. Ce qui signifie
que le critère d'efficacité va toujours éclipser celui
d'équité dans le bien-être, à chaque fois que l'on
admet le principe de Pareto.
Dans la suite de notre étude nous démontrerons
cette propriété de Pareto en développant la fonction de
bien-être social généralisée qui est plus flexible
et non parétienne dans des cas spéciaux (5.2). Dans la mesure
où le coefficient de Gini est l'un des arguments de la fonction de
bien-être social proposée, il n'est pas possible de
décomposer la fonction de bien-être social par sous-groupes de la
population de manière formelle. En utilisant la méthode de
décomposition de Gini élaborée par Podder nous montrerons
comment décomposer la fonction de bien-être social
généralisée et les implications de cette
décomposition (5.3), avant de présenter les données sur
lesquelles notre application sera faite (5. 4).
5. 2. La fonction de bien être social
généralisée
Dans cette section il sera question de démontrer la
propriété de Pareto par rapport à la fonction de
bien-être social (5.2.1) avant de développer la fonction de
bien-être social généralisée (FBS
généralisée) (5.2.2).
5. 2. 1. La fonction de bien-être social et l'optimum
de Pareto
La forme fonctionnelle de la fonction de bien-être
social en elle-même, fut élaborée par Sen, Dagum, Yitzhaki
et Sheshinski (indépendamment). Soit un vecteur de revenu,
(x1 ,x 2 ,. . .,xn)
représentant la distribution de revenu dans la société, la
forme générale de la
fonction de bien-être social de Bergson et Samuelson
s'écrit :
(1)
W=W(x1,x2,...,xn
)
Cette fonction est croissante et unique pour toute
distribution de revenu. Elle est encore appelée fonction de
bien-être Utilitarienne. Généralement cette fonction est
appelée forme fonctionnelle de la fonction de bien-être social
car, on soutient souvent que W le bien- être social dépend de
l'utilité individuelle qui dépend à son tour du revenu
réel. Ainsi si pi = pi
(xi) est l'utilité de la ième personne alors
:
(2) ( 1 ( 1 ), 2 ( 2
),..., ( ))
W = W p x p x p n x n
Cette forme est appelée welfarist par
Sen du fait de sa seule dépendance en l'utilité individuelle.
L'utilité de chaque individu ne dépend que de sa propre
consommation, donc de son revenu; il n'y a donc pas d'externalité de
consommation. Dès lors, lorsque le niveau d'utilité d'une
personne peut dépendre de son panier de biens ou de son revenu une
certaine désutilité peut être créée par
l'inégalité de la société entière. Par
conséquent la forme de la fonction de bien-être social (FBS) non
Utilitarienne commune de Bergson et Samuelson s'écrit :
(3) W=W(S, O) où S est le niveau de revenu total
représentant l'Efficacité et q = q (x1 ,
x2 ,...,xn ) la mesure
d'inégalité représentant l'Equité.
La FBS ci-dessus doit ainsi satisfaire les conditions suivantes :
(4) 0, 0
a a
W W
> <
et
a a
S q
En plus si la fonction de bien-être sociale est
supposée parétienne, elle doit satisfaire la condition suivante
:
(5) 0
O W >
O x i
|
quel que soit i.
|
Ceci signifie que toute augmentation du revenu (toutes choses
restant égales par ailleurs) entraîne une augmentation du bien
être social. Ainsi, si l'on augmente le revenu du plus riche de la
société, le bien-être augmente également. Notons que
ceteris paribus, l'augmentation du revenu de la personne la plus riche de la
société entraîne une hausse de l'inégalité
dans la société en même temps qu'une hausse du revenu
global. Mais l'augmentation du bien-être due à l'augmentation du
revenu total est supérieur à la baisse du
bien-être social due à l'augmentation de
l'inégalité, ceci signifie que 0
O W > O x i
i implique :
|
quel que soit
|
O O O O
W S W q
(6) dx dx
i i 0
+ >
O O O O
S x x
q
i i
Ce principe est lié à l'aspect
efficacité de la FBS. Ainsi lorsque les bénéfices de
l'efficacité de la société entière sont
savourés par les plus riches de la société (individus ou
groupes), la question est de savoir s'il y aura amélioration du
bien-être social. Pour la forme Utilitarienne de la FBS toute
augmentation de la croissance implique une amélioration du
bien-être social quel que soit le bénéficiaire des fruits
de cette croissance.
La série de FBS admise et qui satisfait les conditions
ci-dessus est énorme. Un certain nombre de restrictions doit donc
être imposé pour réduire cette série. Sen à
l'aide de quatre axiomes a introduit la classe des FBS de Bergson et Samuelson
comme :
(7) W= jt (1-G) u étant le revenu moyen de la
société et G le coefficient de Gini.
Sen en 1976 a montré que cet indice calculé sur la
base de la distribution de revenu est une sous relation des relations de
préférence sociale définie suivant la distribution des
biens.
Il est aisé de montrer que la FBS de Sen est aussi
parétienne, d'ailleurs pour cette FBS le taux marginal de substitution
(TMS) entre l'inégalité et l'efficacité pour un même
niveau de bien- être peut être donné par :
(8) dG 1 - G du u
Il apparaît dont clair que le FBS est plus sensible au
revenu moyen qu'à l'inégalité. Comme G et u sont
déterminés par le profil de revenu de la société et
ne peuvent être changés par les décideurs pour
différents niveaux de croissance ou de distribution de revenu, Cette FBS
est très rigide. Le bien-être marginal par rapport au revenu moyen
dans ce cas est (1-G) qui est constant. Ainsi dans le cas d'une comparaison
internationale cette FBS sera toujours favorable à des régions
plus développées, qui ont un revenu par tête plus
élevé et un niveau d'inégalité relativement bas.
Aussi quelque soit la région, le niveau de bien-être ne peut
être comparable en utilisant la fonction de bien-être social si le
pays fait l'expérience d'un fort taux de croissance du fait d'une
exploitation minière, à cause d'une distribution de revenu
défavorable.
5. 2. 2. La fonction de bien-être social
généralisée
La FBS de Sen peut aisément être modifiée
pour en faire une fonction plus générale et plus flexible : telle
la classe de fonction de bien-être social
généralisée (FBS généralisée)
présentée comme :
(9) W = ub (1- G) avec 0
< 13 <1
Cette fonction, avec la variable 13 qui représente le
coefficient d'arbitrage entre équité et efficacité, a un
certain nombre d'avantages que la FBS de Sen ne possède pas. Pour cette
fonction :
(10) dG = (1 -
G)(3
du u
Il est clair ici qu'on peut faire le choix de 13 et ainsi la FBS
est maintenant flexible, en respectant un certain arbitrage entre
l'efficacité et l'égalité. Si l'on accorde donc plus
d'importance à l'efficacité plutôt
qu'à l'égalité on doit choisir un 13 plus grand et tendant
vers 1, au contraire si l'on s'intéresse à l'équité
il faut un 13 faible.
Examinons maintenant si cette fonction est parétienne ou
pas. De l'équation (5) et (9), nous savons que la FBS est
parétienne si :
0(u (1- G))
(11) > 0
xi
|
Ce qui implique
|
2i - n -1
(12) b -bG+ G > .quel que soit i= 1, 2,
....., n
n
Cette expression est toujours vraie lorsque l'on
considère les revenus, des plus faibles aux revenus médians,
comme le terme de gauche de l'équation (12) est toujours positif.
Connaissant le niveau existant d'inégalité dans la
société, par la variation de la valeur de 13 on peut
aisément déterminer la direction du changement du bien-être
social lorsqu'une personne au dessus de la médiane gagne un revenu
supplémentaire (toute chose restant égale par ailleurs). Si la
condition de paretianité est satisfaite pour les plus riches elle le
sera pour les autres ; ainsi en utilisant la valeur maximale de i dans (12)
nous avons :
(13) b -b G + G > n -1
n
Pour un n de grande taille on aura :
(14) b -bG+G~1
La condition (14), ne sera jamais satisfaite pour une valeur
de 13<1 ainsi cette FBS est Parétienne pour de grande valeur de 13,
pour lesquelles cette FBS deviendra une FBS de Sen. Il est évident
à partir de la condition (14) que si c'est seulement les groupes les
plus riches qui profitent des fruits de la croissance, le bien-être
social de la société ne s'améliorera pas tant que 13<1.
Cette FBS peut être critiquée pour son parti pris en faveur des
pauvres. S'il s'agit plutôt d'une augmentation du revenu des pauvres
quelque soit la valeur de 13 et G (dans notre cas spécifique c'est entre
0 et 1), le bien-être va s'améliorer. Ainsi cette FBS a un certain
parfum Rawlsien. Cependant pour la FBS de Rawls si les personnes les plus
riches ont une augmentation de revenu le bien-être reste inchangé,
mais pour notre FBS avec 13<1 une
augmentation du revenu des plus nantis entraîne une
réduction du bien-être social. Cette classe de FBS avec f3<1
n'est donc ni parétienne ni rawlsienne.
5. 3. Décomposition de la FBS
généralisée par sous-groupes de la
population
Il est bien connu que le coefficient de Gini ne peut pas
exactement14 être décomposé en sous-groupes de
population en termes d'intra groupe et d'inter groupe de Gini comme les autres
indices d'inégalité, notamment l'indice de Theil et d'Atkinson.
Cependant il peut être décomposé de manière
différente en utilisant la méthode de Podder (Podder ,1993). Pour
montrer que cette méthode de Podder permet de décomposer la FBS
généralisée en sous- groupes de population, nous
essayerons de représenter le bien-être total comme une somme
pondérée du bien-être individuel de groupes variés.
Ainsi notre objectif est de décomposer le bien-être total W comme
:
g
(15) i
W å
= W iW i=1
où Wi est le bien être du ième sous-groupe et
Ùi est le poids attaché au bien-être individuel du groupe
en supposant que l'on a g sous-groupes.
En appliquant la méthode de Podder le coefficient de
Gini peut être décomposé en sous-groupes de population.
Cette méthode, pas très répandue peut être
expliquée très brièvement comme suit : considérons
une société constituée de cinq personnes dont les revenus
sont rangés selon un ordre croissant dans un vecteur Y = [y1, y2, y3,
y4, y5]. Aussi supposons que la société en question est
constituée de deux sous-groupes tel que le premier sous-groupe a deux
membres dont les revenus sont représentés par le second et le
troisième élément du vecteur de revenu. Les
éléments restants sont les revenus des trois membres du second
groupe. Nous pouvons maintenant construire deux vecteurs, un par groupe, et
chacun de ces groupes sera constitué de cinq éléments. Le
vecteur du premier groupe contiendra les revenus de ses membres placées
à leurs positions respectives dans Y, et les positons restantes seront
complétées par zéro. Un vecteur similaire peut être
construit pour le second groupe également. Ainsi :
14 Dans le cas ou les sous groupes se chevauchent
entre eux, il n'est pas possible de décomposer exactement l'indice de
Gini en sous groupe, dans la mesure ou cette décomposition admet un
résidu.
é0 ù ê y ( 1 ) ú
ê 2 ú
y et
( 1 ) y ( 1 )
= ê ú
3
ê ú
ê 0 ú
êê úú
ë 0 j
é y ( 2 ) ù
1
ê ú
ê 0 ú
y par conséquent, Y = y ( 1 ) +
y ( 2 )
( 2 ) 0
= ê ú
ê ú
(2)
ê y ú
4
(2)
êê úú
ë y5 j
En appliquant donc cette méthode le coefficient de Gini
peut être décomposé en sous- groupe de population comme
:
g
(16) = å
G
i
nii C
'u
)
i
n 'u
(
Ou ci est le coefficient de concentration
(défini selon Podder ,1993) du groupe i, ni est
la
taille de la population du groupe i et 'ui est le
revenu moyen de ce groupe. n et u sont
respectivement la taille et le revenu moyen de la population
entière. Comme le coefficient concentration est compris dans
l'intervalle (-1 ; 1) et satisfait à la condition de Pigou-
Dalton15 de transfert progressif de revenu d'une personne moins
pauvre à une personne pauvre, il sert d'indicateur
d'inégalité dans ce groupe, ainsi nous écrivons :
(17) W='ub(1-G)
g
= - å
'u (1
b
i
n 'u
i i C
i )
n 'u
g n
C i
= å -
n
'u
'u b
b i i
'u
- 1
i
g
= å -
n b
i i 'u
'u
i
g
i i
'u
CComme å =
n
in'u
i
g n
å -
i i
'u
1
b
1
n'un 'u
i
C i )
g 'u
= å n (1
i i
1 b
n 'u
i
-
g
=å új [ - ]
é -
n ( ) 1 b b (1 )
ù
i i 'u C
'u
i i
êë n 'u
i
15 La sensibilité de transfert de Pigou-
Dalton est un critère qui est réalisé lorsqu'un transfert
de revenu d'une personne moins pauvre à une personne pauvre,
entraîne une baisse dans la mesure de l'inégalité sans
contrarier la direction des richesses.
g
= åW iWi
i
On a donc - b
W = 1
i , est le poids attaché au sous-groupe i et
W i = p i b (1 - C i )
n i i
p
( )
n p
est le bien-être du groupe i. Il est clair que si
0<f3<1, le poids ne sera jamais supérieur à 1. Pour f3=1
(i-e pour une FBS de Sen), cette même forme de décomposition
établit une relation du bien-être total comme une somme
pondérée du bien-être individuel des sous-groupes (Podder
et Mukhopadhaya, 1995,1999). Le poids dépendant de la part de population
du sous- groupe, du revenu moyen proportionnel du groupe et de la valeur de f3,
quand la valeur de f3 augmente, l'importance du revenu moyen proportionnel
diminue dans le poids. On a donc
)
én i i
( ) 1 (1 )
p - b b
ù úû -
[ ]
p C
i i
W êL n p n p 1 - C
i W i
(18) = = ( )(
i i i
Wp G
b (1 )
- n p 1 - G
Cette expression représente la part relative de
bien-être de chaque sous- groupe. Cette part dépend de la part de
revenu de ce sous-groupe et du coefficient de concentration de ce sous-groupe.
Dans cette part, le coefficient f3 n'a aucun rôle à jouer. La
raison est très évidente; en fait le paramètre f3 sert de
coefficient d'arbitrage entre équité et efficacité. Quand
notre intérêt est de trouver la contribution relative d'un
sous-ensemble de la population au bien-être total, la question
d'arbitrage entre efficacité et équité ne se pose plus. Le
dernier terme entre parenthèse à droite de l'équation
c'est-à-dire :
1 Ci
1 G
a une interprétation intéressante : nous
l'appelons équité relative du groupe i. Il est connu que si le
coefficient de concentration d'un sous-groupe est supérieur
(inférieur) à l'indice global de Gini ce sous- groupe a un effet
positif (négatif) sur l'inégalité16. Ainsi, si
la valeur de l'équité relative est supérieure
(inférieure) à 1, le ième sous-groupe aura tendance
à réduire (augmenter) l'inégalité. Par
conséquent, la part relative de bien-être total de tout
sous-groupe peut changer à tout moment du fait de 2 facteurs :
a) sa part de revenu et,
b) son équité relative.
16 Un franc supplémentaire dans ce groupe
augmente (réduit) le niveau d'inégalité.
La contribution relative du bien-être a une autre
interprétation très intéressante. Il est aussi possible
d'obtenir l'élasticité de la fonction de bien-être social
par rapport à l'équité d'un groupe sans changer son revenu
moyen. Cette élasticité du ième sous- groupe peut
être définie comme :
(19)
aW 1-Ci ni
pi 1- Ci h 1 W =
_
- CI a(1- Ci) W n p
1-G
Ceci n'est rien d'autre que la part relative de
bien-être du ième sous-groupe. Par conséquent une autre
interprétation de la part relative de bien-être de tout
sous-groupe est l'élasticité du bien-être par rapport
à l'équité de ce sous-groupe.
Comme notre objectif est toujours de trouver le groupe cible
pour une politique donnée, il est très intéressant
d'obtenir l'élasticité du bien-être par rapport à un
changement proportionnel du revenu du sous-groupe sans modification de la
distribution du revenu. Cette élasticité est donnée par
:
W pi
(20) h =
W
pi W
)
=
pi ni (b -1)
pini(1- Ci
+
p
n
pn(1-G
Ainsi la part relative de bien-être du sous-groupe i est
égale à l'élasticité du bien-être par rapport
au revenu moyen de ce sous-groupe si 13= 1 (parce que le premier terme de
droite disparaît pour 13=1); si 0< 13<1, cette
élasticité est inférieur à la part relative de
bien-être (comme dans ce cas le premier terme de droite est
négatif). Ainsi pour une augmentation proportionnelle du revenu, le
sous-groupe au plus grand revenu a plus d'effet réducteur que le
sous-groupe au faible revenu. C'est ici que se trouve la beauté de cette
FBS, le décideur en considérant cette élasticité
pour des prescriptions de politique pourra être à mesure de
choisir le groupe cible. De l'équation (18) et (20), il est
évident que le groupe cible sera cette partie de la population pour
laquelle la part relative de bien-être et l'élasticité par
rapport au revenu moyen seront les plus élevées. Et celles-ci
sont élevées pour les groupes dont l'équité
relative est élevée et une part relative de revenu assez
substantielle. D'où, pour des propositions de politiques deux facteurs
très importants sont l'équité relative et la part de
revenu.
5. 4. Présentation des données d'analyse
Dans notre étude, nous utiliserons les dépenses
réelles de consommation des ménages des enquêtes ECAM I et
ECAM II réalisées respectivement en 1996 par la Direction
Nationale de la Statistique (DNS) et 2001 par l'Institut National de la
Statistique (INS).
L'Enquête Camerounaise Auprès des Ménages
: ECAM I avait duré trois mois, couvrait les dix provinces du pays et
concernait un échantillon aléatoire de 1731 ménages
urbains et ruraux. Elle visait trois principaux objectifs à savoir :
mesurer les effets de la crise et des ajustements sur le niveau et les
conditions de vie des ménages, établir les interrelations entre
les dimensions des niveaux de vie et analyser les tendances et les
évolutions par rapport aux autres sources de données. Il
s'agissait d'une enquête stratifiée à deux degrés
à Yaoundé et à Douala et à trois degrés dans
les autres villes du pays avec la distinction urbaine- rurale. Deux types de
questionnaires étaient élaborés l'un pour les villes et
les grandes villes, et l'autre pour le reste du pays. Ces questionnaires,
soumis aux ménages sélectionnés, comportaient 11 sections
dont plusieurs pouvaient permettre l'analyse de la pauvreté au Cameroun.
Pour ECAM I, six strates ont été retenues : Yaoundé,
Douala, les autres villes (d'au moins cinquante mille habitants selon les
estimations de 1995), la région Coton-Elevage dite «Rurale
savane» (localités rurales des provinces septentrionales :
Extrême-Nord, Nord et Adamaoua), la région Cacao dite «Rurale
Forêt» (localités rurales des provinces du Centre, du Sud, et
de l'Est) et la région Café dite «Rurale Hauts
plateaux» (localités rurales des provinces de l'Ouest, du
Nord-Ouest, du Sud-Ouest et du Littoral).
L'enquête Camerounaise Auprès des Ménages
: ECAM II était une enquête par sondage qui couvrait l'ensemble du
territoire national et portait sur un échantillon de 10992
ménages17. Elle visait à construire un profil de
pauvreté au niveau national et au niveau des dix provinces. A cet effet
Douala et Yaoundé ont été considérées comme
des strates à part, et chacune des dix provinces a été
divisée en deux strates, une rurale et une urbaine. L'enquête
était donc réalisée sur 22 strates, dont 10 rurales et 12
urbaines. Le questionnaire était articulé en 15 sections pouvant
permettre d'étudier les différents aspects de la pauvreté
au Cameroun.
17 A l'exclusion des membres du corps diplomatique et
leurs ménages
La collecte des données avait duré 3 mois dans
chacun des 3 milieux urbain, semi urbain et rural (de septembre à
décembre 2001). Par ailleurs un volet particulier de l'enquête
s'était occupé pendant la même période de relever
les données relatives aux prix afin de pouvoir évaluer
l'autoconsommation et rendre comparables les dépenses des ménages
des différentes régions.
Les objectifs visés à travers l'exécution
de ces deux enquêtes sont globalement similaires, à savoir
l'appréciation des conditions de vie des ménages.
Néanmoins, la taille de l'échantillon, la méthodologie de
collecte, la durée et la période de la collecte, et certains
postes de la nomenclature ne sont pas exactement les mêmes au cours des
deux opérations. Il a donc fallu retraiter ces différents aspects
pour disposer des données comparables. En outre, la confection des
indicateurs de niveau de vie devant servir à la comparaison entre les
deux enquêtes a nécessité que l'INS ramène les
dépenses à la même base.
5. 5. Conclusion
Dans ce chapitre, il était question pour nous de
présenter la fonction de bien-être social
généralisée mais surtout de la décomposer en
sous-groupes de population. En démontrant la propriété de
Pareto à travers les conditions nécessaires à une FBS pour
respecter le principe de Pareto, nous avons également pu
développer une FBS non Parétienne sous certaines conditions, plus
avantageuse et plus flexible, qui est la fonction de bien-être social
généralisée (FBS généralisée). La
décomposition de cette fonction en sous-groupes de population c'est
également faite, grâce à la méthode de
décomposition de l'indice de Gini élaborée par Podder qui
permet ainsi de contourner le problème de décomposition auquel
faisait face l'indice de Gini. Une décomposition de la FBS
généralisée qui est susceptible d'apporter un certain
nombre d'informations notamment pour ce qui est de la détermination du
groupe cible, la détermination des parts relatives de bien-être
social, la détermination des raisons d'un changement de bien-être
social dans les différentes régions. Les données ECAM I et
ECAM II auxquelles sera appliquée cette décomposition dans le
chapitre suivant ont également été
présentées de part leur source, leur nature mais aussi l'objet de
leurs collectes respectives pour montrer combien elles sont adaptées
à notre étude.
CHAPITRE 6
RESULTATS EMPIRIQUES
6. 1. Introduction
Dans cette analyse, nous utiliserons des données ECAM I
et II, publiées respectivement par la Direction Nationale de la
Statistique et par l'Institut Nationale de la Statistique, pour les
périodes 1996 et 2001. La période de 1996 étant
considérée comme la période pendant les ajustements et la
période 2001 comme la période après. Ces données,
pour des besoins de comparaison ont subi un travail important
d'harmonisation.
Par ailleurs nous utiliserons ici la stratification retenue
par ECAM I, à savoir six strates ou sous-groupes: Yaoundé,
Douala, les Autres villes, Rurale savane, Rurale Forêt et Rurale Hauts
plateaux. Le revenu annuel moyen ici considéré est estimé
par la dépense moyenne réelle par équivalent adulte.
Il s'agit donc dans cette partie d'analyser les
disparités régionales au Cameroun (6-2), avant de faire une
estimation du bien-être social au Cameroun (6-3) à la
lumière des résultats empiriques.
6. 2. Analyse des disparités régionales au
Cameroun
Cette analyse des disparités régionales au
Cameroun, se fera à travers l'examen de la distribution des revenus, de
la population et des inégalités entre les régions. Des
données qui nous seront par la suite nécessaires, pour la
détermination des différentes contributions au bien-être
social et à l'inégalité.
6. 2.1. Distribution des revenus et des
inégalités dans les régions du Cameroun
Nous apprécierons la distribution des revenus et des
inégalités au Cameroun à travers les résultats que
nous donnent le Tableau 7 et Figure 9. En effet, si le calcul de la part de la
population et du revenu moyen proportionnel est assez simple, la
décomposition en sous- groupes de l'indice de Gini fait problème.
Nous avons donc dû avoir recours à la méthode de
décomposition en sous-groupes de l'indice de Gini
développée par Podder et qui donne lieu à
l'équation (16), pour calculer les coefficients de concentration.
Tableau 7: Taille de la population,
Revenu moyen annuel, Part de la population, revenu moyen proportionnel,
Coefficient de concentration et variation de la concentration entre les deux
périodes par région.
|
Taille de la
Population par région,
ni
|
Revenu moyen annuel
par région,
p.i
|
Part de la
population par région en (%),
ni/n
|
Revenu moyen
proportionnel par région,
p.i/p.
|
Coefficient de
concentration,
Ci
|
ACi
|
1996
|
2001
|
1996
|
2001
|
1996
|
2001
|
1996
|
2001
|
1996
|
2001
|
|
Yaoundé
|
123
|
958
|
312025,16
|
467242,51
|
7,10
|
8,72
|
1,283
|
1,587
|
0.567
|
0.663
|
0.097
|
|
|
|
|
|
(0,01)
|
(0,006)
|
(0,177)
|
(0,083)
|
(0.074)
|
(0.025)
|
(0.104)
|
Douala
|
169
|
1066
|
398919,39
|
441118,70
|
9,76
|
9,70
|
1,64
|
1,498
|
0.692
|
0.637
|
-0.055
|
|
|
|
|
|
(0,014)
|
(0,006)
|
(0,215)
|
(0,077)
|
(0.055)
|
(0.026)
|
(0.071)
|
Autres villes
|
222
|
1799
|
306168,25
|
357061,21
|
12,85
|
16,37
|
1,259
|
1,213
|
0.560
|
0.526
|
-0.034
|
|
|
|
|
|
(0,019)
|
(0,017)
|
(0,117)
|
(0,041)
|
(0.056)
|
(0.021)
|
(0.078)
|
Rural forêt
|
314
|
1590
|
161407,06
|
219527,09
|
18,16
|
14,47
|
0,664
|
0,746
|
0.024
|
0.185
|
0.161
|
|
|
|
|
|
(0,022)
|
(0,022)
|
(0,046)
|
(0,042)
|
(0.064)
|
(0.042)
|
(0.073)
|
Rural plateau
|
483
|
2885
|
192642,82
|
233448,94
|
27,91
|
26,25
|
0,792
|
0,793
|
0.212
|
0.252
|
0.040
|
|
|
|
|
|
(0,04)
|
(0,028)
|
(0,08 1)
|
(0,03)
|
(0.087)
|
(0.029)
|
(0.092)
|
Rural savane
|
419
|
2693
|
246620,13
|
242429,31
|
24,22
|
24,50
|
1,014
|
0,823
|
0.421
|
0.231
|
-0.190
|
|
|
|
|
|
(0,031)
|
(0,028)
|
(0,133)
|
(0,032)
|
(0.097)
|
(0.032)
|
(0.117)
|
Total
|
1731
|
10992
|
243240,44
|
294403.4 1
|
100,00
|
100,00
|
|
|
0.406*
|
0.408*
|
0.002
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
(0.017)
|
(0.008)
|
(0.018)
|
*indique le coefficient de Gini pour toute la
société Camerounaise Les valeurs entre parenthèses sont
les écart-types
|
Source : Calculs de l'auteur à partir des
données harmonisées des enquêtes ECAM I et II et des
logiciels DAD 4.4 et Excel.
Figure 9 : Part de la population, revenu moyen
proportionnel, Coefficient de concentration et variation de la concentration
entre les deux périodes par région
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
1996
|
2001
ni/n
|
1996
ui/u
|
2001
|
1996
|
2001
Ci
|
|
|
Part de la population par région en (%),
|
revenu moyen proportionnel par région,
|
Coefficient de concentration,
|
Ci
|
2,000
1,500
1,000
0,500
0,000
-0,500
Yaoundé douala
autres villes rurale forêt rurale plateau rurale savane
total
Source : construit par l'auteur à partir
du tableau 7.
Le Tableau 7 fourni des statistiques nécessaires à
la décomposition du bien-être par région au cameroun.
On peut déjà remarquer qu'entre les deux
périodes d'enquête, la taille de la population a augmenté.
Elle est passée de 1.731 pendant les ajustements (1996) à 10.992
après (2001). Le revenu moyen de la société camerounaise a
également augmenté entre ces deux périodes d'étude,
passant de 243.240,44 FCFA en 1996 à 294.403,41 FCFA en 2001, soit une
augmentation de 21% (Tableau 7 et Figure 9).
A partir du tableau 7 et de la figure 9, on constate que la
plus grande part de la population est concentrée dans les régions
rurales (Rurale forêt, Rurale hauts plateaux, Rurale savane). De 1996
à 2001, on observe cependant la réduction de cette part de
population qui est passée de 70,3% en 1996 à 65,2% en 2001. Cette
réduction est la conséquence de la baisse de la part de la
population dans les régions Rurale hauts plateaux et Rurale forêt,
même si la région Rurale hauts plateaux continue à avoir la
plus grande part de la population au delà des périodes, avec
27,91% en 1996 et 26,25% en 2001. Plus concrètement, cette
réduction de la population en régions rurales entre 1996 et 2001
peut être le fait d'une migration des populations rurales vers les
régions urbaines (exode rural).
Quant aux régions urbaines (Yaoundé, Douala, Autres
villes), de 1996 à 2001 elles connaissent un accroissement de leur part
de population qui passe globalement de 29,7% en
1996 à 34,8 en 2001. Cette augmentation est due
à l'accroissement de la population dans les régions de
Yaoundé et des Autres villes. Malgré cela Yaoundé reste la
région la moins peuplée du Cameroun avec 7,10% en 1996 et 8,72%
en 2001.
Le Tableau 7 et la Figure 9, nous permettent d'observer que
les revenus les plus élevés se retrouvent en régions
urbaines, malgré leur faible démographie. Plus encore de 1996
à 2001, ces revenus se sont améliorés, mais à des
taux différents. Ce qui permet d'avoir Yaoundé avec le revenu le
plus élevé en 2001 à la place de Douala qui occupait le
premier rang en 1996, et qui passe second en 2001. Par ailleurs, les
régions rurales ont des revenus plus faibles qui contrastent avec leur
forte démographie, même si de 1996 à 2001 les
régions Rurale hauts plateaux et Rurale forêt ont
enregistré des revenus croissants. La région Rurale savane quant
à elle a vu son revenu chuter de 1,7% entre 1996 et 2001.
La distribution des revenus moyens et des parts de population
explique l'évolution des revenus moyens proportionnels. En fait, la
faible population en régions urbaines et le niveau de revenu moyen assez
substantiel font que en régions urbaines le revenu moyen par
ménage est supérieur au revenu moyen total. Ainsi, on a dans ces
régions des revenus moyens proportionnels supérieurs à 1.
Tandis que l'association d'une forte population et de revenus relativement
faibles conduit à avoir en régions rurales des revenus moyens par
ménages qui sont inférieurs aux revenus moyens total de la
société. Et cela malgré le fait que la région
Rurale savane en 1996, à la faveur d'un revenu assez substantiel, ait pu
faire valoir des revenus moyens par ménage au dessus du revenu moyen de
la société, avant de chuter en 2001 du fait d'une baisse de
revenu. Relevons cependant que malgré tout, les revenus moyens
proportionnels par région ont globalement connu une hausse en dehors des
régions que sont Douala et Rurale savane, entre 1996 et 2001.
Si le revenu a globalement augmenté au Cameroun entre
1996 et 2001, il en est de même des inégalités. L'indice de
Gini connaît une variation positive de 0,002, qui dénote de
l'accroissement des inégalités au Cameroun. Au niveau
régional, l'inégalité apparaît plus
élevée en régions urbaines qu'en régions rurales,
dans les deux périodes. Malgré cette forte concentration des
inégalités en régions urbaines, on relève cependant
en 2001 une réduction de celles-ci, la région de Yaoundé
étant exclue. En effet, La région de Yaoundé connaît
plutôt une hausse de ses inégalités, soit une variation
positive de son coefficient de concentration de 0,097 entre 1996 et 2001.
Contrairement à Yaoundé, la région Rurale
savane connaît quant à elle une variation négative de son
coefficient de concentration (-0,19), ce qui laisse entrevoir une diminution de
l'inégalité. Cette diminution de l'inégalité dans
la région rural savane contraste cependant avec l'évolution des
inégalités dans les autres régions rurales, ou l'on
enregistre plutôt un accroissement des inégalités en 2001,
passant 0,024 en 1996 à 0,185 en 2001 dans la région Rurale
forêt et de 0,2 12 en 1996 à 0,252 en 2001 pour la région
Rurale hauts plateaux.
6. 2. 2. Contribution au bien-être et à
l'inégalité au Cameroun
La contribution au bien-être et à
l'inégalité sera évaluée à l'aide des
données du tableau 7.
Tableau 8: Parts de revenu, Équité relative
et Parts relatives de bien être par région de 1996 à
2001
|
Parts de revenu par région
(%). uini/un
|
Equité relative (1-Ci)/ (1-G)
|
Part relative de bien-être
(%).ÙiWi/W
|
1996
|
2001
|
1996
|
2001
|
1996
|
2001
|
Yaoundé
|
9,11
|
13,84
|
0,729
|
0,569
|
6,64
|
7,88
|
Douala
|
16,00
|
14,54
|
0,519
|
0,613
|
8,30
|
8,91
|
Autres villes
|
16,18
|
19,85
|
0,741
|
0,801
|
11,98
|
15,90
|
Rurale forêt
|
12,05
|
10,79
|
1,643
|
1,377
|
19,80
|
14,85
|
Rurale plateau
|
22,10
|
20,81
|
1,327
|
1,264
|
29,32
|
26,30
|
Rurale savane
|
24,56
|
20,17
|
0,975
|
1,299
|
23,94
|
26,20
|
Total
|
100,00
|
100,00
|
1,000
|
1,000
|
100
|
100
|
Source : Calculs de l'auteur à partir des
données du Tableau 7 et du logiciel Excel.
Figure 10 : Parts de revenu,
Équité relative et Parts relatives de bien être par
région de 1996 à 2001
1996 2001
1996 2001
1996 2001
100
90
80
70
60
50
40
30
20
10
0
Yaoundé douala
autres villes rurale forêt rurale plateau rurale savane
total
Parts de revenu par région (%). uini/un
|
(1-Ci)/ (1-G) Equité relative
|
Part relative de bien être (%).DiWi/W
|
|
Source : construit par l'auteur à partir
du tableau 7.
Le Tableau 8 et la Figure 10, présentent les parts
relatives de bien-être dans les différentes régions, de
même que leurs parts de revenu et leurs équités
relatives.
Pour la période de 1996, les contributions maximales au
bien-être de la société sont l'oeuvre des régions
rurales (73,06% de contribution globale) au premier rang des quelles se trouve
la région Rurale hauts plateaux avec 29,32%. Cette forte contribution
est rendue possible grâce à des parts de revenu
élevées dans ces régions (58,71% globalement) et des
équités relatives avec effets réducteurs sur les
inégalités. On observe cependant une équité
relative qui accroît l'inégalité dans la région
Rurale savane.
Les régions urbaines quant à elles enregistrent
de faibles contributions au bien-être de la société par
rapport aux régions rurales. Ceci est dû à leurs faibles
parts de revenu avec notamment la région de Yaoundé qui
enregistre la plus faible contribution avec 9,11 %. Cette faible contribution
des régions urbaines est surtout due à leur niveau
élevé d'inégalité. En effet, elles
présentent des équités relatives qui sont de nature
à augmenter l'inégalité dans la société.
L'évolution des contributions au bien-être en
régions rurales est décroissante en 2001. Même si la
contribution maximale reste celle de la région Rurale hauts plateaux,
elle a globalement diminuée en régions rurales soit 67,35 % en
2001 au lieu de 73,06 % en 1996. Cette diminution est le fait de la
réduction des parts de revenus dans ces régions, malgré
les équités relatives toujours réductrices
d'inégalités.
Notons cependant qu'à la faveur de
l'amélioration de son niveau d'inégalité, et d'une
équité relative dorénavant réductrice
d'inégalité, la région Rurale savane a vu sa contribution
s'accroître passant de 23,94 en 1996 à 26,20% en 2001. Cet
accroissement de la contribution au bien-être s'observe également
dans les régions urbaines. Ainsi, l'augmentation des parts de revenus et
la légère amélioration des inégalités dans
les régions de Douala et des autres villes entre 1996 et 2001 ont permis
d'améliorer cette contribution, et ce, malgré la hausse de
l'inégalité à Yaoundé.
On peut aussi noter que dans les régions urbaines,
même si les parts de revenu sont faibles, elles demeurent
supérieures aux parts de population, et ceci selon les régions et
au fil des périodes. Or, en régions rurales, la part de
population est généralement plus élevée que la
part de revenu, à l'exception de la région
Rurale savane qui, en 1996, a enregistré une part de revenu
supérieure à la part de la population, soit 24,56 % contre 24,22
%. De 1996 à 2001, le revenu par tête en régions urbaines
reste dont supérieur au revenu par tête en régions rurales.
Ce qui tend à confirmer les conclusions de certains auteurs (Fambon et
al, 2001), comme quoi la pauvreté au Cameroun serait rurale.
6.3. Estimation du bien-être social au
Cameroun
L'estimation du bien-être social dont il est question
ici, permettra non seulement de déterminer la tendance du
bien-être social au Cameroun, mais également d'apprécier la
sensibilité de ce bien-être par rapport au revenu.
6. 3. 1. Tendance du bien-être social entre les
régions du Cameroun
Le Tableau 9 et la Figure 11 ci-dessous, nous donnent les
résultats de l'estimation du bien-être social au Cameroun. Ces
résultats sont issus de l'application de l'équation (17) aux
données du Tableau 7, ce qui permet de ressortir la tendance du
bien-être total et régional suivant les valeurs de f3, sachant que
f3 permet d'arbitrer entre efficacité et équité. Un f3
faible accorde plus de poids à l'équité et un f3
élevé plus de poids à l'efficacité.
Tableau 9 : Tendance du bien-être social au
Cameroun entre les différentes régions de 1996 à
2001
|
Wi (f3=0,5)
|
Wi (f3=0,75)
|
Wi (f3=1,0)
|
1996
|
2001
|
1996
|
2001
|
1996
|
2001
|
Yaoundé
|
241,89
|
230,36
|
5717,22
|
6022,64
|
135129,55
|
157460,73
|
Douala
|
194,53
|
241,09
|
4888,94
|
6213,31
|
122867,17
|
160126,09
|
Autres villes
|
243,46
|
283,24
|
5726,94
|
6923,65
|
134714,03
|
169247,01
|
Rural forêt
|
392,11
|
381,86
|
7859,44
|
8265,59
|
157533,29
|
178914,58
|
Rural plateau
|
345,86
|
361,41
|
7245,87
|
7944,12
|
151802,54
|
174619,81
|
Rural savane
|
287,54
|
378,63
|
6407,67
|
8401,66
|
142793,06
|
186428,14
|
Total
|
292,96
|
321,21
|
6505,99
|
7482,19
|
144484,82
|
174286,82
|
Source : Calculs de l'auteur à partir des
données du tableau 7 et du logiciel Excel.
Figure 11 : Tendance du bien-être social au
Cameroun entre les différentes régions de 1996 à
2001
Yaoundé douala
autres villes rurale forêt rurale plateau rurale savane
total
200000
180000
160000
140000
120000
100000
80000
60000
40000
20000
0
1996 2001
2001
1996
2001
1996
Wi (3=0,5)
Wi (8=0,75)
Wi (j3=1,0)
Source : construit par l'auteur à partir
du tableau 9.
Dans le Tableau 9 et la Figure 11, le bien-être total et
par région est présenté pour différentes valeurs de
p. On observe ici que quelle que soit la valeur de p, le bien-être total
a augmenté entre 1996 et 2001. Le taux d'augmentation varie cependant
d'une valeur de p à une autre, soit 20,6 % pour p =1 ; 15 % pour p =
0,75 % et 9,5 % pour p = 0,5 (ainsi pour de petites valeurs de p l'augmentation
est moins prononcée).
Cette augmentation du bien-être au Cameroun, peut se
justifier par l'augmentation du revenu global en 2001, malgré la modeste
hausse de l'inégalité entre 1996 et 2001. Par ailleurs plus p est
grand plus le revenu moyen annuel joue sur le bien-être; la forte
croissance du bien-être entre les deux périodes pour p=1 ou encore
pour des p élevés s'explique donc.
Globalement le bien-être est plus élevé
dans les régions rurales que dans les régions urbaines
au-delà de la valeur de p et du temps. Les régions rurales
doivent beaucoup plus leurs niveaux de bien-être aux faibles niveaux
d'inégalités qui les caractérisent. C'est ainsi que les
régions Rurale forêt et Rurale savane entretiennent les niveaux
les plus élevés de bien- être au-delà des valeurs de
p. En effet, la région Rurale forêt est le leader en 1996 tandis
que la région Rurale savane l'est en 2001; sauf pour p= 0,5 où la
région Rurale forêt reste leader de 1996 à 2001. La
région Rurale savane doit son leadership de 2001 pour p=1 et pour p=
0,75, à un revenu assez consistant et à une amélioration
en 2001 de son niveau d'inégalité.
Douala et Yaoundé ferment la marche en terme de niveau
de bien-être, du fait de la forte inégalité qui
règne dans ces régions, malgré des revenus
élevés. À l'exception du cas ou f3 = 0,50, et qui a vu
Yaoundé avoir le plus bas niveau de vie, Douala a toujours
été dernier (en 1996) ou avant dernier (en 2001) à la
faveur d'une baisse relative de son niveau d'inégalité en cette
période.
On enregistre aussi de 1996 à 2001 un accroissement
général des niveaux de bien-être par région
au-delà des valeurs de f3, mis à part le cas des régions
de Yaoundé et Rurale forêt. Dans ces deux dernières
régions en effet pour f3=0,5, les niveaux de bien-être
décroissent. Pour la région de Yaoundé, cela peut
s'expliquer par l'accroissement de son niveau d'inégalité entre
1996 et 2001. Or, plus f3 est faible, plus l'inégalité influence
le bien-être, réduisant l'effet du revenu. Pour ce qui justifie la
décroissance du bien-être en région Rurale forêt, il
s'agit également de l'accroissement de l'inégalité,
malgré la hausse du revenu dans cette région. Il faut surtout
noter pour la région Rurale forêt que, malgré le niveau
d'inégalité resté faible en 2001, celui-ci a subi un
accroissement exponentiel de 670% en passant de 0,024 à 0,185 (voir
Tableau 7).
6. 3. 2. Analyse de la sensibilité du
bien-être social au Cameroun par rapport au revenu moyen par
région
L'analyse de la sensibilité du bien-être social
au Cameroun se fera grâce au calcul des élasticités.
L'équation (20) permet ainsi de calculer les élasticités
suivant différentes valeur de f3, d'afficher leurs valeurs dans le
Tableau 10 et de les représenter dans la Figure 12.
Tableau 10 : Élasticité du bien-être
social par rapport au revenu moyen au Cameroun pour les différentes
régions : entre 1996 et 2001
|
W
h (f3 = 0,5)
ui
|
W
h (f3 = 0,75)
ui
|
W
h (f3 = 0,90)
ui
|
1996
|
2001
|
1996
|
2001
|
1996
|
2001
|
Yaoundé
|
0,021
|
0,010
|
0,044
|
0,044
|
0,057
|
0,065
|
Douala
|
0,003
|
0,016
|
0,043
|
0,053
|
0,067
|
0,075
|
Autres villes
|
0,039
|
0,060
|
0,079
|
0,109
|
0,104
|
0,139
|
Rural forêt
|
0,138
|
0,095
|
0,168
|
0,122
|
0,186
|
0,138
|
Rural plateau
|
0,183
|
0,159
|
0,238
|
0,211
|
0,271
|
0,242
|
Rural savane
|
0,117
|
0,161
|
0,178
|
0,212
|
0,215
|
0,242
|
Source : Calculs de l'auteur à partir des
données du Tableau 7 et du logiciel Excel
Figure 12: Élasticité du bien-être
social par rapport au revenu moyen au Cameroun pour les différentes
régions : entre 1996 et 2001
0,3
0,25
0,2
0, 1 5
0, 1
0,05
0
Yaoundé douala
autres villes rurale forêt rurale plateau rurale savane
1 996 2001 1 996 2001 1 996 2001
(13 = 0,5) (13 = 0,75) (13 = 0,90)
Source : construit par l'auteur à partir
du tableau 10.
Le Tableau 10 et la Figure 12, présentent les
élasticités de bien-être social par rapport aux revenus
moyens des différentes régions, pour différentes valeurs
de f3 et pour les deux périodes. Cette élasticité mesure
les changements espérés dans le bien-être total pour une
augmentation d'un point de pourcentage dans le revenu moyen par région
(qui est distribué proportionnellement entre tous les membres,
l'inégalité restant inchangée).
A partir du Tableau 10 et de la Figure 12, on relève
que au-delà du temps et de la valeur de f3, les régions Rurale
hauts plateaux et Rurale savane présentent les élasticités
les plus élevées. Les régions de Douala et Yaoundé
quant à elles présentent les plus faibles
élasticités, montrant ainsi que toute augmentation de revenu dans
les régions Rurale hauts plateaux ou Rurale savane
bénéficie plus à la société qu'une
augmentation de revenu à Yaoundé ou Douala.
La grande sensibilité du bien-être liée
à une augmentation de revenu dans les régions Rurale hauts
plateaux et Rurale savane est due à la forte contribution de ces
régions au bien- être du pays tout entier. De même, parce
que les régions de Douala et Yaoundé contribuent peu au
bien-être total, elles ne peuvent influencer véritablement le
bien-être dans la société camerounaise. La
sensibilité du bien-être total vis-à-vis de toute
augmentation de revenu en régions rurales peut également
s'expliquer par le niveau de revenu qui est bas dans ces régions. En
effet, le fait pour ces régions d'avoir de faibles revenus
démontre dans une certaine mesure que toute augmentation de leur revenu
influence plus la vie des populations rurales qu'une augmentation
proportionnelle en régions urbaines.
Notons que de 1996 à 2001, au-delà des valeurs
de 13 l'élasticité de bien-être dans la région
Rurale hauts plateaux diminue, alors qu'elle croît plutôt dans la
région Rurale savane. L'évolution de l'élasticité
dans ces deux dernières régions est respectivement due à
la hausse de l'inégalité pour la première et à sa
réduction pour la seconde. Par ailleurs, en dehors du cas de
Yaoundé, l'élasticité croît de 1996 à 2001
au-delà des valeurs de 13 à Douala et dans les autres
régions. En fait, à Yaoundé pour 13= 0,5
l'élasticité décroît passant de 0,021 à 0,010
entre 1996 et 2001, avant de devenir constante à 0,044 pour 13=0,75 et
finalement croître pour 13 = 0,9, en passant de 0,057 à 0,065.
Cette évolution de l'élasticité à Yaoundé
est surtout le résultat d'un accroissement de l'inégalité
en son sein, alors que sa diminution à Douala a permis à cette
région d'améliorer son élasticité quoique toujours
faible.
6. 4. Conclusion
L'objectif poursuivi dans ce travail est celui de
décomposer la tendance du bien-être social au Cameroun, en
examinant l'arbitrage entre efficacité et équité. A
travers une analyse les disparités régionales et une estimation
du bien-être social au Cameroun, ce chapitre a contribué à
atteindre cet objectif. Nous avons donc déterminé des variables
telles que la part de revenu, l'équité relative, l'indice de
bien-être et l'élasticité de bien-être social par
rapport au revenu, qui nous ont permis de décomposer la tendance du
bien-être social. De même que nous avons pu examiner l'arbitrage
entre efficacité et équité, grâce au
paramètre d'arbitrage 13.
Il se dégage donc de ce chapitre, que les
régions rurales contribuent plus au bien-être et à
l'équité dans la société camerounaise que les
régions urbaines. Par ailleurs ces régions rurales connaissent
les niveaux de bien-être et les élasticités de
bien-être par rapport au revenu les plus élevés. Ce qui
justifie le choix des régions Rurale Hauts Plateaux et Rurale Savane
comme régions cibles pour la maximisation du bien-être social au
Cameroun. Néanmoins, même si le bien-être social est plus
sensible à toute augmentation de revenu dans ces régions rurales,
le niveau de vie y est resté inférieur à celui des
régions urbaines, qui conservent des revenus par tête
supérieurs.
CHAPITRE 7
CONCLUSION GENERALE
L'économie camerounaise connaît depuis quelques
années une assez bonne santé. Ce regain de forme relatif a
d'ailleurs été renforcé par l'atteinte du point
d'achèvement de l'initiative en faveur des pays pauvres. Ainsi, de plus
en plus il est question pour les politiques camerounais de reprendre en main la
gestion des affaires du pays, après une période d'ajustements
structurels très contraignante. Pour des besoins d'efficience et
d'efficacité, il est important de bien définir pour les
politiques à engager, la cible la plus susceptible de diffuser le
bien-être dans la société.
L'objectif de notre étude était celui de
décomposer la tendance du bien-être social au Cameroun, en
examinant l'arbitrage entre efficacité et équité. Pour le
faire, nous sommes partis de l'hypothèse que l'évolution du
bien-être social est plus sensible à l'efficacité
qu'à l'équité. Partant delà, nous avons posé
un certain nombre d'hypothèses à savoir que: (1) les
régions urbaines sont plus susceptibles d'augmenter
l'inégalité dans la société; (2) une forte part de
revenu ne garantit pas nécessairement une grande part de bien-être
social ; (3) les régions à forte croissance économique
influencent plus le bien être de la société.
Pour vérifier ces hypothèses, nous avons
utilisé une fonction de bien-être social
généralisée qui peut sous certaines
conditions18, être non parétienne. Cette méthode
nous a permis de déterminer les groupes cibles. Par ailleurs la
décomposition de cette fonction nous a permis d'expliquer les raisons
des disparités de bien-être entre les régions.
L'application de cette méthode s'est faite sur les données ECAM I
et II harmonisées, données collectées en 1996 et 2001
respectivement par la DNS et par l'INS. Nous présenterons donc ici
succinctement les résultats de notre analyse (7.1), quelques
recommandations de politiques économiques suivront (7.2), avant de
conclure avec nos perspectives de recherche future (7.3).
18 Notamment pour (3 < 1
7. 1. Résumé des Résultats de
l'Analyse
Nous avons retenu dans notre analyse 6 régions, que les
résultats obtenus permettent de classer en deux grandes
catégories: les régions rurales (Rurale Forêt, Rurale Hauts
Plateaux, Rurale Savane) et les régions urbaines (Yaoundé,
Douala, Autres villes).
On observe conformément à notre première
hypothèse, que les régions urbaines sont plus susceptibles
d'augmenter l'inégalité dans la société
camerounaise. Alors que les régions rurales avec à la tête
la région Rurale forêt contribuent plus à rétablir
l'équité dans le pays, à travers des équités
relatives réductrices d'inégalités. La région
Rurale savane a connu une équité relative inférieure
à 1 en 1996 mais s'est rapidement rattrapée en 2001, alors que
les autres régions rurales ont connu une baisse de leurs
équités relatives qui sont cependant restées
supérieures à 1.
Avec les parts de revenus les plus importantes (73,06% en 1996
et 67,35% en 2001), les régions rurales contribuent plus au
bien-être de la société, que les régions urbaines.
Ce qui est tout à fait contraire à notre seconde hypothèse
selon laquelle : une forte part de revenu ne garantit pas nécessairement
une grande part de bien-être social. Ainsi, alors que les plus grandes
contributions viennent des régions Rurale hauts plateaux et Rurale
savane; les plus faibles viennent de Douala et Yaoundé. Notons aussi que
de 1996 à 2001 à l'exception des régions Rurale hauts
plateaux et Rurale forêt, toutes les autres ont vu leurs contributions au
bien-être social augmenter.
Par ailleurs on relève que, au-delà du temps et
de la valeur de f3, les régions Rurale Hauts Plateaux et Rurale Savane
présentent les élasticités les plus élevées.
Ce qui tend à infirmer notre troisième hypothèse suivant
laquelle : les régions à fortes croissances économiques
influencent plus le bien-être de la société. Les
régions de Douala et Yaoundé quant à elles
présentent les plus faibles élasticités. Ce qui montre que
toute augmentation de revenu en région Rurale Hauts Plateaux ou Rurale
Savane bénéficie plus à la société qu'une
augmentation de revenu à Yaoundé, Douala ou ailleurs.
En dehors du cas de Yaoundé, l'élasticité
croît à Douala et dans les autres régions du Cameroun, de
1996 à 2001 au-delà des valeurs de f3. Cette évolution de
l'élasticité à
Yaoundé est surtout le fait d'un accroissement de
l'inégalité en son sein, alors que sa diminution à Douala
a permis à cette région d'améliorer son
élasticité quoique toujours faible
De 1996 à 2001 le bien-être au Cameroun s'est
globalement amélioré, au même titre que le revenu total.
Tandis que le niveau global d'inégalité a augmenté. On
peut dont dire que globalement notre hypothèse principale d'après
laquelle : l'évolution du bien-être est plus sensible à
l'efficacité qu'à l'équité, est satisfaite.
Toutefois, cette hypothèse ne se vérifie pas au niveau
régional, car en étant plus équitables et en ayant des
revenus relativement faibles, les régions rurales ont enregistré
le maximum de bien-être, avec en tête la région Rurale
Forêt en 1996 (pour f3 =0,75 et f3 =1) et 2001 (pour f3 =0,5). La
région Rurale Savane ayant le maximum dans les autres cas. Les niveaux
de bien-être les plus bas se retrouvent à Douala en 1996 et
Yaoundé en 2001 pour toutes les valeurs de f3. D'autre part quelles que
soient les valeurs du paramètre f3, le bien-être s'est
amélioré dans les régions du Cameroun de 1996 à
2001, sauf dans les régions Yaoundé et Rurale Forêt ou il a
plutôt régressé.
.
l'observation que nous venons de faire sur la tendance du
bien-être social au Cameroun, sur la sensibilité de celle-ci
vis-à-vis des revenus et des inégalités, nous donne de
retenir comme régions cibles les régions Rurale Hauts Plateaux et
Rurale Savane. Par ailleurs on se rend également compte de ce que les
disparités régionales sont le fait des parts de revenus et des
équités relatives entre les régions. Il nous est donc
maintenant possible, de poser un diagnostique économique dans l'optique
d'améliorer le bien-être social au cameroun.
7. 2. Recommandations de Politiques
économiques
Après avoir déterminé le trend du
bien-être social au Cameroun, nous avons trouvé un certain nombre
d'éléments explicatifs de la disparité de bien-être
social entre les régions du Cameroun. Deux éléments
fondamentaux sont donc la cause de ces disparités à savoir les
parts de revenu et l'équité relative.
Il se dégage de cette étude, que sur les deux
périodes 1996 et 2001, les régions Rurale Hauts Plateaux et
Rurale Savane contribuent plus au bien-être de la société
camerounaise. Par
ailleurs, le bien-être social au Cameroun est
resté plus sensible à toute augmentation de revenu dans ces deux
régions. Par conséquent, une recommandation de politique
économique serait de prendre ces deux régions comme groupe cible
dans une optique de maximisation du bien-être social au Cameroun. Il
s'agirait donc, pour toute politique économique qui vise
l'amélioration du bien-être social de penser prioritairement
à ces régions.
Relevons cependant que par groupe cible, il faut entendre,
considérant les contraintes budgétaires, un groupe qui est
susceptible par son développement, d'induire le développement
dans les autres régions et maximiser le bien-être dans la
société. Les régions Rurale Hauts plateaux et Rurale
Savane sont donc les plus susceptibles de diffuser le bien- être dans la
société camerounaise. Pour cela il faut y investir de
manière productive et compétitive. Cela se justifie
également sur un plan pratique.
En effet, la région Rurale Hauts plateaux est
constituée de localités rurales des provinces de l'Ouest, du Nord
Ouest, du Sud-Ouest et du Littoral. Cette région est marquée par
une abondance de ressources naturelles (terres arables), une position
géographique attractive et d'une ressource humaine valeureuse.
L'activité principale ici c'est l'agriculture. Cette agriculture est
constituée de cultures vivrières porteuses (banane plantain,
pomme de terre, manioc, fruits, légumes frais et autres tubercules
ect...), de cultures traditionnelles d'exportation (café, cacao ou
encore palmier à huile) et de nouvelles filières agricoles
porteuses de croissance (poivre, horticulture, pastèque et agriculture
biologique). De bonnes perspectives de développement de ces
activités existent dans cette région. La proximité
à la mer de cette région, y permet également
l'éclosion de la pêche des crustacés et autres
espèces à haute valeur marchande. Cette région
bénéficie également d'une forêt dense et riche.
C'est aussi le lieu d'un certain nombre de gisements pétroliers du
pays.
Malgré ces atouts énormes dans l'agriculture et
la pêche voir même la forêt, les rendements sont
restés faibles. Faibles pour l'agriculture du fait de la non utilisation
des intrants améliorés et performants, des mauvaises pratiques
culturales et du vieillissement des vergers et des planteurs. D'autres limites
non directement imputables au secteur sont la déficience des
infrastructures rurales de transport, le manque de structure de financement
approprié et les coûts de commercialisation des produits
élevés. Par ailleurs les contraintes qui freines
l'éclosion du secteur de la pêche sont : la faible
professionnalisation de la filière artisanale, le coût
élevé d'acquisition de matériel d'exploitation et les
difficultés de transport
et de conservation des produits, et la pauvreté des eaux
maritimes. La forêt quant à elle subit entre autre une
exploitation frauduleuse et sauvage.
Face aux contraintes et limites, et afin d'impulser la
croissance dans la région Rurale Hauts plateaux, des axes d'intervention
prioritaire dans le secteur agricole sont : une meilleure exploitation des
débouchés que constituent le marché urbain
intérieur et de la sous région, l'élaboration le lancement
et l'organisation des programme spécifiques d'appui au
développement des filières prioritaires comme l'ananas, la banane
plantain, la pomme de terre, la gomme arabique et l'oignon. Un accent
particulier sera mis sur la facilitation de la commercialisation et de
l'exportation des produits frais grâce au désenclavement des zones
de production à travers, la mise en place d'infrastructures
routière et ferroviaire. L'appui à l'aménagement des
marchés de gros, aussi bien au niveau des grandes zones de collecte
qu'au niveau des grands centres de commercialisation et des marchés
frontaliers, et l'amélioration des structures de conditionnement
Il s'agit également de développer la pêche
industrielle et artisanale qui sont des atouts compétitifs pour le
Cameroun. Aussi l'amélioration de la productivité de la
pêche artisanale passe par le regroupement des pêcheurs artisanaux,
la formation, l'encadrement permanent des jeunes et la facilitation de leur
accès à un matériel adéquat, l'exploitation
efficiente des eaux nationales. La bonne gestion des forêts
communautaires revêt une grande importance comme source de revenu pour
les populations rurales. Il s'agit donc de lutter contre l'exploitation
frauduleuse des ressources forestières ; préserver et stabiliser
les écosystèmes forestiers, y compris l'aménagement des
aires protégées ; mettre en oeuvre et réglementer des
produits forestiers non ligneux (PFNL). Enfin il faudrait améliorer la
gestion du secteur pétrolier, l'un des principaux supports de croissance
dans ce pays. Par ailleurs la proximité de la ville de Douala,
principale porte d'entrée et de sortie du pays, à ces
régions de production constitue un atout important pour les
opportunités d'exportations.
Pour ce qui est de la région Rurale savane, elle est
constituée des localités rurales des provinces septentrionales :
Extrême-Nord, Nord et Adamaoua. C'est une région
caractérisée par la coexistence d'une agriculture pluviale
améliorée centrée sur la culture cotonnière, d'une
agriculture traditionnelle associant céréales (sorgho, mils,
maïs), arachides, oignon, riz et
autres plantes, et d'une agriculture intensive à vocation
également commerciale développée sur de petits
périmètres irrigués. C'est également une
région propice aux activités pastorales.
La région Rurale Savane souffre cependant de nombreuses
contraintes. Globalement il s'agit, de la faible irrigation de la région
qui gène l'agriculture (avancée du désert); l'enclavement
des zones de production et la faible connaissance des techniques de production
; la prévalence de parasitisme (mouche tsé-tsé) ; l'emploi
quasi généralisé des feux de brousse
incontrôlés et des problèmes fonciers ; la
méconnaissance du secteur de l'élevage, la faible
productivité des animaux laitier locaux.
Pour véritablement valoriser les atouts de cette
région un certain nombre d'actions peuvent être menées.
Notamment l'amélioration des infrastructures de transport ;
l'amélioration de l'hydraulique a travers la mise en place des mares,
puits et autres forages ; la formation aux techniques agricoles ; la formation
et la structuration des éleveurs et des agroéleveurs ; le
développement d'activités d'embouche ou de production
laitière.
Il est important de relever que toutes les entreprises
ci-dessus énoncées, ne sont pas à mettre à l'actif
du seul gouvernement. Il est donc question ici d'une synergie d'actions. Ainsi
l'Etat pourrait s'occuper des infrastructures de transport, de la formation des
producteurs, l'établissement et le suivi d'une réglementation
stricte par secteur. Les producteurs de leurs côtés pourraient
s'organiser en coopératives ou autres PME et PMI, pour pouvoir
améliorer leur productivité et réaliser la transformation
de leurs produits pour accroître la valeur ajoutée. Cette
organisation leur permettrait de bénéficier du soutien
(formations, financements, etc...), des ONG locales et internationales, des
établissements financiers voir même de l'Etat.
À la suite de l'étude de Fambon et al
(2001), qui affirme que la pauvreté est rurale, nous arrivons donc
à la conclusion que les potentialités d'augmentation du
bien-être social sont plus grandes en régions rurales (plus
précisément Les régions Rural Hauts plateaux et Rurale
Savane) qu'en régions urbaines. Corroborant ainsi l'idée des
régions cibles de politiques économiques qui sont rurales. Mais
notre conclusion vient de ce que l'inégalité lorsqu'elle est trop
prononcée comme en régions urbaines, atténue fortement
l'effet de la richesse. Une autre recommandation serait donc d'améliorer
la qualité de la redistribution en
régions urbaines, de manière à ce que
celles-ci soient plus réceptives aux effets du bien-être induit
par les régions cibles. Le combat contre la corruption et pour
l'amélioration de la gouvernance en général apparaît
à ce titre indispensable, et les régions de Douala et
Yaoundé devraient être les principales cibles de ces
politiques.
Si les priorités sont accordées aux quatre
régions si dessus citées, il ne s'agit pas d'isoler les autres
régions. Car selon qu'il s'agit d'une région rurale ou d'une
région urbaine, la nécessité d'un accroissement de
l'investissement pour les régions rurales reste autant
d'actualité, que celle d'une amélioration de la redistribution
des revenus en régions urbaines. .
7. 3. Perspectives de recherche future
A l'issue de notre analyse, les débats et critiques
autour du bien-être montrent que pour rendre compte du bien-être
économique d'une société complexe, il faut
inévitablement porter des jugements statistiques et éthiques. Le
bien-être recouvre bien des aspects, dont l'appréciation
diffère selon les observateurs. Il peut être
particulièrement difficile de discerner, à partir d'un simple
indice l'importance relative des jugements de valeur et des choix techniques
dans la construction de l'indicateur. Dans l'optique de mieux capter le bien-
être social au Cameroun, nous pourrons dans le cadre de nos recherches
futures sur l'état du niveau de vie et de la qualité de vie au
Cameroun, construire un indicateur multidimensionnel du bien-être
économique.
.
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ANNEXES
Dérivation de l'équation (12)
5 W > 0 Sx i
Þ [ ] 0
8 -
p G
(1 ) >
axi
x (2 1)
Þ ( ) (1 ) 0
å å
é - -
å i n x ù
i i
b -
ê ú >
S x i n x
ê n
ë û ú
i
é 0 (2 1) (2 1)
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Þ b p b
- - - + - -
i n n p n i n x
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1 å ù
1 b i
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G p ê ú > 0
( ) 2
n ê n x
ë å û ú
i
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- +
(1 ) (2 1)
- - - -
G n p i n
2 1
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n p
2
+- -
p n i n x
b å (2 1) i
Þ
1 bp
n
1
n
4 2
p
2
> 0
Þ - + å - - > - -
1 b b b
- +
1 4 2 2 1
b p n p G p n i n x n p i n
(1 ) (2 1) (2 1)
i
n
Þ - + å - - > - -
n p G p n i n x n p i n
3 1 2 1
b b b
+ +
b (1 ) (2 1) (2 1 )
i
Þ - + å - - > - -
1
n G
b i
(1 ) (2 1) 2 1
i n x i n
np
Þ b (1 - G ) +
å (2 1) i 2 1
i n x
- - i n
- -
>
n
p n
2
n
Pour i=1,2,..., n
Dérivation de l'équation (20)
W=p b (1-G)
p
b -p b G
= å - å
( ) ( ( )
n b
n n
i p C
i i
p p
i i i i
n n n
Avec :
np = å nip i et npG= å
n i p i C i .
Alors :
1 n i Ci
n
aW å - å - å -
n n n n
= - - -
b b b b b
n
( ) ( 1)( ) ( )
i 1 2
i i i
i
p p p C p
p n n n n n
i i i i i
i
n
n
n i i i
- ( - 1) - 2 - - 1
b b b
p pG p C i
n
n n
1
b b -
= p
1 [ i i i i ]
b b b b b
- - - - - -
=
n
1 ( 1) 1 1
p n p Gn p n C
Ainsi donc on a l'élasticité :
[ ]
b b b b b
p n p Gn p n C p
- - -
1 1 ( 1) 1
- - -
i i i i i
p G n
b (1 )
-
[ ]
b b
n i Gn i n i C i p i
- - -
( 1)
p G n
(1 )
-
[ ]
b b
n Gn n C n n p
- - - + -
i i i i i i i
( 1)
p G n
(1 )
-
[ ( 1) ( 1)
b b
- - -
n Gn
i i
|
] p n C p
+ -
i i i i
(1 )
|
p
|
(1
|
-
|
G n
)
|
[ ]
p i n i Gn i
(b 1)( )
- -n i p i C i
(1 )
-
+
p G n
(1 )
- p G n
(1 )
-
+
) n i p i C i
(1 )
-
p i n i G
(J3 1) (1
- -
p G n
(1 )
-
p G n
(1 )
-
+
n
= (b - 1)
p i i
p n
n i p i C i
)
(1 -
(1
p G n
- )