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La lutte contre la pauvreté dans les sections communales de Jean Rabel: Conditions de développement rural

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par Jhon Réginald RODNEY
Faculté de Droit et des Sciences Economiques de Port-au-Prince - Licence 1999
  

Disponible en mode multipage

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    Tables des matières

    Tables des matières 1

    Liste des abréviations et sigles 3

    Liste des tableaux 4

    AVANT - PROPOS 5

    1. INTRODUCTION 7

    CHAPITRE I 11

    1.1. Diagnostic de la situation 11

    A-Cadre géographique et physique 11

    B- Cadre économique et social 18

    1.2. Théorie et concept 26

    1.2.1. Aspects Théoriques 26

    1.2.1.1. Méthodes de quantification de la pauvreté 28

    1.2.1.2. Mesures statistiques de la pauvreté 28

    1.2.1.3. Critères d'identification des pauvres 29

    1.2.1.4. Seuils de pauvreté 30

    1.2.1.5. Utilité des mesures de la pauvreté 33

    1.2.2. Les Concepts 34

    1.2.2.1. Définition des concepts 34

    1.2.2.1.1. Le concept de pauvreté 34

    1.2.2.1.2. Le concept de lutte contre la pauvreté 35

    1.2.2.1.3. Le concept de développement rural 35

    CHAPITRE II 37

    2. Les dimensions, les formes, les facteurs et les caractéristiques de la pauvreté 37

    2.1 Les diverses dimensions de la pauvreté 37

    2.2 Les formes de pauvreté 38

    2.3 Les facteurs de la pauvreté rurale 39

    2.4 Caractéristiques de la pauvreté rurale 40

    CHAPITRE III 45

    3. Analyse des facteurs et de la lutte contre la pauvreté 45

    3.1. Les facteurs 45

    3.1.1. Croissance Démographique 45

    A-Evolution Démographique 45

    1- La répartition de la population 46

    2- Structure de la population par âge et sexe 47

    B- Les conséquences de l'accroissement démographique dans la commune 48

    3.1.2. Les mouvements migratoires ou Urbanisation 49

    a) La migration interne 49

    b) La migration vers d'autres communes et villes d'Haïti 50

    c) Migration vers l'extérieur 51

    3.1.3. Désastres naturels 52

    a) Les inondations 52

    b) Les sécheresses 52

    c) Les cyclones 52

    3.1.4. Habitat et logement 53

    3.1.5. Alimentation / Agriculture 54

    a) La lente expansion de l'agriculture 54

    b) La dégradation et l'épuisement des sols et autres ressources naturelles 55

    c) Inégalité de la répartition des terres 56

    d) Le fractionnement des petites exploitations agricoles 71

    e) Les effets indirects de la modernisation et la technicisation de l'agriculture 72

    3.1.6. Éducation 72

    3.1.7. Santé 82

    3.1.8. Eau potable et assainissement 87

    a) Eau potable 87

    b) Assainissement 88

    3.1.9. Les transports et communications 89

    a) Télécommunication 90

    b) Service postal 90

    c) La Presse 91

    3.1.10. Electricité / Energie 91

    3.2. La lutte contre la pauvreté 92

    3.2.1. Stratégies de lutte contre la pauvreté 92

    3.2.2. Les éléments de la stratégie 93

    3.2.3. Les effets de la lutte contre la pauvreté 94

    CHAPITRE IV 95

    4. Les domaines prioritaires et l'approche qui permettra d'y remédier 95

    4.1. Les domaines prioritaires 95

    4.2. L'approche qui permettra d'y remédier 96

    4.3. Contexte dans lequel devrait s'insérer la lutte contre la pauvreté: le développement de Jean Rabel 96

    4.3.1. Le contexte de lutte contre la pauvreté 96

    4.3.2. Le développement de Jean Rabel 97

    4.4. Le développement rural de Jean Rabel dans une perspective de développement global et national 99

    5. Conclusion et recommandations 103

    6. Bibliographie 105

    Liste des abréviations et sigles

    BM : Banque Mondiale

    BMF : Banque de Médicaments du Far-West

    BIT : Bureau International du Travail

    CEPAL : Comité Economique pour l'Amérique Latine

    DGI : Direction Générale des Impots

    DSRP : Document de Stratégie de Réduction de la Pauvreté

    EBCM : Enquête Budget-Consommation des Ménages

    EFA : Ecole Fondamentale d'Application

    EFACAP : Ecole Fondamentale d'Application-Centre d'Appui Pédagogique

    FMI : Fonds Monétaire Internationale

    HNDP : Hôpital Notre Dame de Paix de Jean Rabel

    IHSI : Institut Haïtien de Statistique et d'Informatique

    INARA : Institut National de la Réforme Agraire

    INFP : Institut National de Formation Professionnelle

    ODVA : Organisme de Développement de la Vallée de l'Artibonite

    OMS : Organisation Mondiale de la Santé

    ONG : Organisation Non-Gouvernementale

    PNB : Produit National Brut

    PNUD : Programme des Nations Unies pour le Développement

    RGPH : Recensement Général de la Population et de l'Habitat

    SHADA : Société Haïtiano-Américaine de Développement Agricole

    UNESCO : Organisation des Nations Unies pour l'Education de la Science et de la

    Culture

    UNICEF : Fonds des Nations Unies pour l'Enfance

    USA : Union des Etats Américains

    UTSIG : Unite de Teledetection et des Systemes d'Information Geographique

    Liste des tableaux

    Tableau 1 : Répartition des habitations de la commune par section communale

    Tableau 2 : Pluviométrie enregistrée à Jean Rabel de 2002 à 2005 (en millimètre)

    Tableau 3 : Evolution de la population

    Tableau 4 : Densités des sections communales de la commune pour l'année 2003

    Tableau 5 : Accroissement de la population urbaine et rural de 1950 à 2003

    Tableau 6 : Répartition de la population de Jean Rabel par sexe en 2003

    Tableau 7 : Superficie et distribution des propriétés

    Tableau 8 : Répartition géographique des centres préscolaires

    Tableau 9 : Répartition des écoles nationales et taux de scolarisation

    Tableau 10 : Situation des équipements et des infrastructures sanitaires fonctionnelles par

    section communale

    Tableau 11 : Personnel de santé

    Tableau 12 : Tarif du transport en moto-taxi (en gourdes)

    AVANT - PROPOS

    La question de la lutte contre la pauvreté restera dans l'avenir au centre des préoccupations économiques et sociales de nombreuses sociétés. Si le contenu de cette question diffère suivant les régions, elle procède d'un même principe qui est de garantir à toutes les personnes disponibles d'une meilleure condition de vie.

    Aujourd'hui les mots ne suffisent plus pour expliquer la situation de pauvreté et d'inégalités dans laquelle se retrouve Jean Rabel après 265 ans d'existence. Les réponses apportées jusqu'ici - à travers la mise en oeuvre de différentes stratégies, programmes et projets de développement - n'ont pas permis d'améliorer les conditions de vie de la population, constituée en majeure partie de paysans. L'expérience de la commune révèle donc que les programmes de développement réalisés grâce aux ONGs n'ont jamais profité à la majorité de la population.

    Pour les Pouvoirs Publics, la question de la lutte contre la pauvreté se confond avec celle de la stratégie de développement économique. La place accordée au développement rural s'avère aujourd'hui déterminante. C'est dans l'agriculture et les activités rurales liées à l'agriculture qu'il est possible de combattre la pauvreté et d'aboutir à une croissance économique soutenue. Une telle stratégie est souhaitable à la fois pour combattre la pauvreté dans les sections communales et augmenter l'emploi dans les endroits les plus reculés.

    Ce mémoire s'attelle, par rapport au cas de la commune, à identifier les causes et les caractéristiques de la pauvreté rurale, à analyser les mécanismes qui ont engendrés et continuent d'engendrer la pauvreté dans les sections communales de Jean Rabel et à proposer, le cas échéant, quelques pistes opérationnelles, parmi tant d'autres, dans le cadre de l'élaboration d'une politique alternative de développement rural. Mais un tel mémoire est une oeuvre de longue haleine et le fruit d'un travail assidu. Au début, il a été très difficile de trouver les informations relatives à notre travail, les données de base en vue d'analyser les facteurs de la pauvreté et de proposer des solutions appropriées aux problèmes que confrontent les pauvres des sections de la commune. De ce fait, plusieurs personnes ont participé de près ou de loin à ce travail car sans leur aide ce mémoire ne verrait pas le jour, et je tiens ici à leur exprimer ma gratitude.

    C'est en ce sens que je tiens à remercier vivement le professeur Georges E WERLEIGH qui est mon directeur de recherche.

    Mes remerciements les plus profonds s'adressent aussi à tous les professeurs de la Faculté de Droit et des Sciences Economiques de Port-au-Prince pour le temps qu'ils m'ont consacré tout au long de ces quatre années d'études.

    Je veux remercier aussi Mme Marie-Antoine CHARLEMAGNE (Library-Registry-Cleck Bureau FAO) pour m'avoir donné accès aux informations nécessaires pour la réalisation de ma mémoire.

    Je présente mes remerciements aussi à toute l'équipe de l'Initiative Développement spécialement à Isabelle FAUCON (Chef de Secteur Haïti pour Initiative Développement) et Virginie DESTUYNDER (Responsable Programme d'Appui au Développement Local) pour m'avoir passé des documents relatifs à mon travail de sortie. Je témoigne également mes remerciements au professeur Jean Bouco JEAN JACQUES pour ses fructueux conseils et toute l'aide qu'il m'a fourni. Un remerciement spécial à Junior JEAN MARY qui a été très sensible à mes requêtes. Un grand remerciement à tous mes amis, Widnet FELISSAINT, Olince MONDESTIN, Judith JEAN NOEL, Dario NOEL, Marie Mica ARISTILDE et à tous mes camarades de promotion qui étaient pour moi un stimulus car ils ne cessaient pas de m'encourager à finir mon mémoire. Je remercie également toute ma famille pour leur encouragement et leur support.

    1. INTRODUCTION

    La pauvreté est le phénomène le plus répandu à travers le territoire national. Partout où l'on passe, on trouve des gens mal nourris (alimentation maigre, trop chère et peu nourrissante), mal logés (logement lézardé, mal aéré, mal chauffé, chichement meublé et dangereux), mal vêtus (vêtements insuffisants, impropres et de mauvaises qualités), habitant dans des quartiers insalubres et sans services médicaux ; qui ont pas ou peu d'instruction, et enfin qui sont rejetés par la société.

    Cette situation de pauvreté se montre de manière plus critique au niveau de la paysannerie haïtienne. Les insuffisances alimentaires, les dénis d'éducation, de santé et de justice continuent à marquer la vie quotidienne d'une majorité de la population rurale.

    Les pauvres qui survivent souffrent souvent durant toute leur vie de problèmes physiques et mentaux. De plus, l'analphabétisme, l'absence d'études et de formations empêchent aux paysans de gagner leur vie et contribuent directement à aggraver la pauvreté (niveau de bien-être).

    Par ailleurs, l'anarchie du système agraire, la carence des ressources, la défectuosité des techniques, l'absence ou insuffisance du crédit agricole, le défaut de structures et d'infrastructures constituent autant de limitations imposées à la promotion économique et sociale de nos paysans.

    Les paysans des sections communales de Jean Rabel n'échappent pas à cette situation de pauvreté extrême. Exclus et non encadrés, ils vivent uniquement de ce que leurs lopins de terre peuvent produire. L'importance de leurs productions dépend en grande partie des aléas saisonniers et des caprices de la nature. Une insuffisance de pluie entraîne irrémédiablement la perte des récoltes et pour survivre, les paysans n'ont d'autre choix que de recourir à la production du charbon de bois. Ce qui entraîne le déboisement et à moyen terme l'érosion des sols avec des conséquences productives à long terme. De plus, le taux de fertilité des paysans induit une croissance démographique qui augmente la pression sur les surfaces cultivables et, par conséquent, entraîne la baisse continue de la production agricole. Il en résulte un affaiblissement de l'économie paysanne et l'enlissement des paysans dans un cercle vicieux de la pauvreté. Vu de cette manière, que faudrait-il faire pour parvenir à détruire ce piège pernicieux de la pauvreté et à libérer le potentiel de créativité d'une grande partie de la population ?

    Le déclin de la production agricole est la conséquence de l'extrême pauvreté qui sévit dans les sections communales. La commune ne dispose pas assez de nourriture pour couvrir les besoins de sa population et ne dispose pas de moyens financiers suffisants pour importer les quantités nécessaires. De plus, les sections communales constituent des espaces de misère dépourvus de toute forme d'infrastructures. Laissées à l'abandon depuis des années par un Etat absent - manquant de capacité ou de continuité dans son action - les infrastructures des sections sont en ruines. En témoigne par exemple l'état déplorable des infrastructures sanitaires, scolaires, en eau, en assainissement ou de la filière agricole des différentes sections. Cette situation a entre autre pour conséquences l'appauvrissement au jour le jour de la population des sections communales.

    Dans le souci d'apporter notre modeste contribution à la lutte contre la pauvreté et à un développement rural durable, nous avons posé les questions suivantes :

    - Qu'est-ce qui explique la pauvreté dans les sections communales de Jean Rabel ?

    - Que faudrait-il faire pour éradiquer l'extrême pauvreté ?

    - Comment la lutte contre la pauvreté peut-elle servir d'instrument d'outil de développement rural ?

    C'est autant de questions qui sont au coeur de notre réflexion et qui nous a conduit à formuler ces hypothèses :

    - L'insatisfaction des besoins essentiels est une conséquence de la pauvreté rurale.

    - La disponibilité des facteurs de production est une conséquence de l'extrême pauvreté.

    - L'appauvrissement est la conséquence du mode de fonctionnement des structures agraires.

    Alors, l'objectif de ce travail est de mettre en relief les causes de la pauvreté, de les analyser et de proposer des solutions adéquates qui conduira vers l'amélioration de la situation économique et sociale des ruraux de la commune.

    Notre choix de ce sujet se justifie par le fait que la pauvreté rurale demeure l'un des problèmes majeurs que les décideurs économiques n'arrivent toujours pas à solutionner. C'est donc une question qui demeure d'actualité pour tous les pouvoirs publics.

    Etant donné que la pauvreté est un phénomène essentiellement rural, la présente étude va se limiter à l'analyse de ces facteurs dans les différentes sections communales de Jean Rabel pendant ces derniers décennies.

    Pour nous permettre de présenter un travail scientifique et fouillé, nous allons utiliser essentiellement la méthode analytique rendue possible par la technique documentaire. Nous ne manquerons pas en plus d'utiliser la technique d'observation empirique pour mieux cerner le phénomène.

    Ainsi, ce travail se réalise à partir de deux sources d'information :

    Une première source comportant un ensemble de documents tels : les documents du Département du Nord-Ouest (les rapports), les documents de l'Initiative Développement (les rapports), les documents de la Mairie de Jean Rabel, les documents du Ministère de la Planification et de la Coopération externe, les documents de la Banque Mondiale (les rapports), les documents du PNUD (les rapports), les documents de la FAO, de CARE-Haïti (les bulletins), du Ministère de l'Agriculture, de la Banque de la République d'Haiti (les bulletins), de l'Institut Haïtien de Statistique et d'Informatique (IHSI), etc.

    Une deuxième source a lieu à partir d'observations empiriques et des ouvrages d'auteurs traitant déjà le thème.

    Notre réflexion portera sur les facteurs explicatifs de la pauvreté dans les sections communales de Jean Rabel. Le diagnostic de la situation de pauvreté dans la commune, l'aspect théorique et la définition des concepts seront les premières étapes de notre démarche. Il sera ensuite question de présenter les diverses dimensions de la pauvreté, les formes de pauvreté, les facteurs et les caractéristiques de la pauvreté rurale. Au regard des facteurs de la pauvreté, nous entreprendrons des analyses empiriques et théoriques, aussi une analyse a l'échelon microéconomique. L'identification des domaines prioritaires et l'approche qui permettront d'y remédier, en termes d'actions et stratégies dans le sens du renforcement de la lutte contre la pauvreté, boucleront l'étude.

    CHAPITRE I

    1.1. Diagnostic de la situation

    A-Cadre géographique et physique

    La localisation et les limites de la commune

    D'une superficie de 484 km², la commune de Jean Rabel est située dans le département du Nord-Ouest d'Haïti et fait partie de l'arrondissement du Môle Saint Nicolas. Fondé en 1743, Jean Rabel fut d'abord paroisse avant d'être élevé au rang de commune le 17 octobre 1821. Elle est limitée au Nord par l'Océan Atlantique, au Sud par les communes de Baie de Henne et d'Anse Rouge, à l'Est par la commune de Port-de-Paix et à l'Ouest par la commune du Môle Saint Nicolas. La commune de Jean Rabel est comprise entre les 19°41' et 19°55' de latitude Nord et entre les 72°56' et 73°45' de longitude Ouest1(*).

    Divisions administratives

    La commune de Jean Rabel comprend sept (7) sections communales et le bourg. Centre commercial et administratif, le bourg loge les services déconcentrés de l'Etat, l'administration communale, l'Hôpital, certaines institutions scolaires d'envergure (le Lycée, les collèges, les écoles congréganistes) et les bâtiments religieux les plus importants de la commune. C'est aussi au Bourg qu'on retrouve la plus grande concentration humaine de la commune (plus de 7000 habitants)2(*).

    Les sections communales jouent peu de rôle sur le plan administratif. Elles sont classées dans l'ordre selon la taille de leur population. Il convient de citer : Lacoma, Guinaudée, Vieille Hatte, La Montagne, Dessources, Grande Source et Diondion. Chacune de ces sections est subdivisée en habitations qui à leur tour se subdivisent en localités. Le nombre des habitations et des localités varie d'une section à l'autre.

    Il n'existe en effet aucune loi sur la construction et la délimitation des habitations malgré l'urgence en la matière et la volonté affichée par les gouvernements successifs, à travers les plans stratégiques, depuis 1996. D'après les informations recueillies auprès de l'Administration Communale de Jean Rabel, plusieurs critères sont pris en considération pour transformer une localité en habitation.

    1) La localité demandeuse doit se placer au centre de plusieurs autres localités

    2) Elle doit avoir une population plus importante que les autres

    3) Elle doit posséder une église, une école ou un marché

    4) Elle doit être la plus ancienne d'un groupe de localités habitées

    Ces critères sont inspirés d'une pratique utilisée par les anciens Chefs de Section Rurale (actuelle Section Communale) lorsqu'il s'agissait de créer de nouvelles habitations.

    En se référant aux registres de l'Administration Municipale, la commune de Jean Rabel compte deux sections à onze habitations chacune, une à 10 habitations, trois à neuf habitations et une à huit habitations, réparties selon le tableau ci-dessous.

    Tableau 1 : Répartition des habitations de la commune par Section Communale

    Sections communales

    Nombre d'habitations

    Distance du centre au bourg

    Les habitations

    Localités revendiquant un statut d'habitation

    01

    Lacoma

    11

    15 km

    Atrèl, Barbe Pagnol, Cabaret, Caletang, Dubois, Fond Lectine, Gombo, Lacoma, Pisée, Port-à-l'Ecu*, Raymond

     

    02

    Guinaudée

    11

    13 km

    Boucan Patriot, Café, Paul, Ca Philippe, Colette, Datty, Fond noir, Guinaudée, Lalande 2ème, Loubier, Péchaud, Sauval

     

    03

    Vieille Hatte

    10

    19 km

    Bassin Bleu, Campledo (Ca Matthieu), Fourby, Grande Falaise, La Source, La Réserve, Nan Solon (parfois appelée Fond Zombi), Repos, Trassael, Vieille Hatte

     

    04

    La Montagne

    9

    19 km

    Bois aux vents, Cademé, Ca Gaudette, Désabée, Gaudette, Jens, Labellée, Nan Jules, Nan Plaisir

     

    05

    Dessources

    9

    5 km

    Catron, Goimbert, Lalande 5ème, Leblanc, Moudo, Nan Man Noël, Porrier, Vert de Gris, Yawe

     

    06

    Grande Source

    9

    9 km

    Buron (+ Beauvoir), Fond Madame (+ Bois Neuf), Grande Source, Jean Solme (+ Métayer), Nan Digé, Nan Saut (+ La Salombe), Osina, Pellier (+ Bombel), Richard

    La Salombe, Bombel, Dicongé, Débauché, Beauvoir, Bois Neuf, Métayer

    07

    Diondion

    8

    9 km

    Gros Sable (+ Leban), Fond Ramadou, Baguette, Vieille Terre (Deschamps), Diondion, Corail, Bingo (Beauvoir), Coicou

    Leban

    Sources : Mairie de Jean Rabel

    En gras : l'habitation considérée comme le centre administratif de la section

    En italique : les localités revendiquant le statut d'habitation

    *: habitations donnant sur la mer

    Coicou : entièrement prise sur le bourg élargi (= agglomération du bourg)

    Il faut souligner que la délimitation administrative et territoriale de la commune de Jean Rabel, en ce qui concerne les habitations, est vieille de plus de quinze ans et n'a pas été réactualisée. Ce qui suscite beaucoup de protestations dans certaines sections, notamment dans la troisième et la sixième section où beaucoup de localités ont fait valoir leur prétention à être élevées au rang d'habitation. Ainsi dans la troisième section une localité, Bananier Blain, attend que le statut d'habitation lui soit conféré. C'est le même cas à Grande Source où les localités de Richard, La Salombre, Dicongé et Débauché ont la même revendication.

    Le Relief

    Le relief de la commune de Jean Rabel est diversifié et constitué de plateaux, collines et de massifs peu élevés. Leur hauteur varie de 300m à 900m d'altitude. Le Nord de la commune, le long de la côte, est marqué par un petit massif qui culmine à 324 mètres environ (Morne Bourrique). Les massifs les plus élevés se trouvent dans la partie Sud. Les mornes les plus importants sont : le morne Dublain (500m) et le morne Movent (711m) qui se trouvent à Guinaudée ; le morne Château (885m) qui se situe à la limite de la troisième et la quatrième section et le morne Déré (907m) qui sépare la commune de Jean Rabel avec celle de Baie de Henne. Ces massifs sont coupés de profondes vallées orientées Nord-Sud3(*).

    Il faut noter que la commune est coupée, à partir du morne Tapion, en deux bassins versants principaux : le bassin versant de Jean Rabel et celui de Catinette. Ceux-ci donnent naissance à deux ensembles de plaines qui sont : la plaine de Jean Rabel et la plaine sèche de Sauval.

    La première regroupe un ensemble de petites plaines, Colette, Coicou et Fond Ramadou qui se rencontrent avec la plaine alluviale La Source, qui occupe le lit majeur de la rivière de Jean Rabel, laquelle se prolonge jusqu'au littoral aux alentours du quartier du Bord de Mer. Elle a une superficie de 500ha environ. La seconde se trouve dans les deuxième et première sections communales. Elle se prolonge à l'Est à Lacoma et s'étend au Nord jusqu'aux confins de l'habitation dite Péchaud. Sa superficie est de 10000ha.

    Il faut toutefois mentionner la situation géographique particulière du bourg de Jean Rabel qui se trouve dans une cuvette. Coincé entre les Sections Communales de Vieille Hatte, de Dessources et de Diondion, le Bourg sert de déversoir aux eaux de ruissellement provenant des mornes avoisinantes. Cela rend la population du bourg très vulnérable pendant les saisons pluvieuses et au moment des cyclones.

    Hydrographie

    La commune de Jean Rabel est divisée en deux principaux bassins versants. Celui de la rivière de Jean Rabel (145 km²), à l'Ouest du Morne Tapion, et celui de la rivière Catinette (150 km²) à l'Est du Morne.

    La rivière de Jean Rabel mesure environ 23 km. Elle prend sa source au morne Château situé à 885m d'altitude. Dans sa partie supérieure, la rivière de Jean Rabel est essentiellement alimentée par des ravines torrentielles. Sur les 10 premiers kilomètres du cours de la rivière, on dénombre 20 ravines principales, pour un seul affluent régulier, la rivière Doucet. La rivière de Jean Rabel est donc sujette aux crues subites et destructrices, comme en Novembre 2006, où les inondations ont fait 6 morts et de nombreux dégâts matériels. Les berges de la rivière sont aussi fortement érodées4(*).

    Au Nord du bourg de Jean Rabel, 17 km après sa source, la rivière de Jean Rabel rencontre ses deux principaux affluents : la rivière Coicou (4,5 km) et la rivière Prien (15,5 km). Ces deux affluents connaissent eux aussi de graves problèmes d'érosion de leurs berges, en particulier la rivière Prien, dont le lit mesure près de 30 à 100 mètres de large sur les 12 derniers kilomètres de son cours, pour un débit moyen de quelques centaines de litres d'eau par seconde. De très importants aménagements de berges seraient nécessaires afin de contrôler l'érosion et de limiter les risques d'inondations destructrices.

    Les derniers kilomètres avant l'embouchure de la rivière de Jean Rabel sont moyennement aménagés, avec la présence de nombreuses parcelles irriguées.

    La rivière Catinette quant à elle, prend sa source à 500m d'altitude. Après un parcours de plus de 15km, elle rejoint la rivière Dispute (21km) pour donner naissance à la rivière de Lacoma. Celle-ci se perd dans les marais de Port à l'Ecu, sans atteindre la mer, tout comme la rivière Denisse, généralement incluse dans la même bassin versant.

    Globalement, les berges de ces cours d'eau sont moins endommagées que celle des rivières Prien et de Jean Rabel. Les crues peuvent malgré tout endommager fortement les aménagements effectués, comme en Novembre 2006 où l'adduction et le système d'irrigation de Sauval ont subit des dégâts importants.

    Le climat

    De par les caractéristiques de son relief, la commune de Jean Rabel connaît deux régimes climatiques bien distincts. Un climat d'altitude avec une pluviométrie moyenne annuelle de 1200 mm de pluie dans les hauteurs et un climat semi-aride5(*) allant de 500 mm à 900 mm de pluie dans sa plus grande partie.

    Deux saisons bien marquées caractérisent la première zone : une saison sèche de février à avril et une saison pluvieuse entrecoupée parfois de mois sec durant le reste de l'année. La végétation, de type arboré, est plus dense dans cette zone. Il ne s'agit pas de forêt à proprement parler. Il existe cependant beaucoup d'arbres fruitiers à l'ombre desquels le café et le cacao sont cultivés. Les sections communales concernées sont : La Montagne, Vieille Hatte (La Réserve, Bassin Bleu), les hauteurs de Grande Source et de Dessources.

    La zone semi-aride est très étendue. Elle commence à l'Est à partir du Bas des Moustiques, dans les environs de la commune de Port-de-Paix, couvre entièrement la partie septentrionale des sections communales de Lacoma, de Guinaudée et de Vieille Hatte et se prolonge à l'Ouest jusque dans les piémonts karstiques de Dessources, de Grande Source et de Diondion.

    Les observations faites à partir des pratiques culturales de la population et les données pluviométriques recueillies montrent que la zone semi-aride est caractérisée par quatre saisons : deux saisons sèche et deux saisons pluvieuses. La première saison pluvieuse va du mois de septembre à novembre. Elle est suivie immédiatement par une saison sèche de décembre à avril. La deuxième saison pluvieuse va de la première décade du mois de mai à la dernière décade du mois de juin. La période sèche se réinstalle à nouveau en juillet.

    Durant les saisons sèches le vent souffle très fort et le débit des sources et des cours d'eau diminue. Les périodes sèches nuisent au développement de l'agriculture. Dans la vaste plaine de 15000 hectares, qui va de Sauval à Lacoma, les cultivateurs sont contraints de pratiquer une agriculture pluviale c'est-à-dire liée à la tombée de la pluie. Dans les périmètres irrigués, la distribution de l'eau se fait dans des conditions qui aboutissent souvent à des conflits entre cultivateurs. Par ailleurs une pénurie d'eau potable est constatée au niveau du Bourg durant ces périodes.

    A noter que ces saisons ne sont pas toujours régulières. La pluviométrie varie d'une année à l'autre. Sur deux années consécutives un même mois peut-être sec ou pluvieux. C'est le cas, par exemple, du mois de janvier qui a été particulièrement pluvieux en 2006 et sec en 2007.

    Tableau 2 : Pluviométrie enregistrée à Jean Rabel de 2002 à 2005 (en millimètre)

     

    Janv.

    Fév.

    Mars

    Avr.

    Mai

    Juin

    Juil.

    Août

    Sept.

    Oct.

    Nov.

    Déc.

    2002

    101.4

    19.6

    13.6

    27.8

    73.6

    75.2

    17.4

    67.4

    66.4

    40.6

    18.8

    49

    2003

    262

    6.2

    70.9

    159

    86.4

    74.6

    13

    79.4

    57.8

    70.8

    51.8

    293.5

    2004

    74.3

    37

    132.5

    81.8

    99.5

    50.5

    39

    38

    136.5

    79.8

    75.8

    90

    2005

    137.5

     

    25

    84

    79

    118

    68

    52.5

    101

    212

    89

    17

    Sources : Ministère de l'Agriculture, des Ressources Naturelles et du Développement Rural ; CARE-Haïti ; BRH

    De même, l'année 2002 a été la plus sèche avec 462,5 millimètres de pluie. Ces instabilités climatiques sont liées en partie à la proximité de la commune par rapport au Tropique du Cancer, son ouverture sur l'Océan Atlantique et les caractéristiques de son relief, lequel est soumis de façon constante aux alizés qui soufflent durant une grande partie de l'année.

    Par ailleurs, du 21 au 26 novembre 2006 entre 300mm et 400mm de pluie ont été déversés sur la commune. Ces pluies diluviennes, liées à la saison cyclonique, étaient dues au passage d'une onde tropicale stationnaire sur Haïti notamment sur les régions du Nord-ouest, de la Grande Anse et des Nippes. Elles ont provoqué le débordement des rivières des deux principaux bassins versants de la commune, (BV de Jean Rabel et BV de Catinette) avec comme conséquence l'inondation du Bourg et des plaines. Il faut noter qu'une inondation pareille avait frappé la commune en avril 19716(*).

    Il faut enfin souligner qu'il n'existe aucune donnée disponible en matière d'enregistrement de température à Jean Rabel. Cependant il est constaté que la commune jouit d'une température relativement fraîche de novembre à mars.

    B- Cadre économique et social

    La commune de Jean Rabel est considérée parmi les plus pauvres du pays. Elle est caractérisée par l'insuffisance des infrastructures techniques de base et la faiblesse des réseaux de biens et services. La situation économique et sociale de la commune n'est pas très évoluée par sa marginalisation.

    Le secteur primaire qui occupe une position dominante dans la structure de la production de biens n'est pas trop diversifié. En effet, le secteur clef de l'économie, l'agriculture, est paralysé par de nombreuses contraintes et est réputé pour son faible niveau de productivité. Il est caractérisé par la défaillance du système d'irrigation, un système foncier complexe, la coupe effrénée de bois (même de fruitiers pour satisfaire de pressants besoins de numéraire), une méconnaissance de certaines techniques de production, un manque d'accès aux intrants agricoles de base, une dégradation croissante des exploitations limitant fortement les capacités productives des ménages.

    Les zones de production sont en grande partie enclavées. Le crédit est quasi inexistant. Le morcellement des terres favorise le déboisement et oriente les exploitants à la production de vivres (subsistance) au détriment des denrées.

    Ailleurs, la faible productivité agricole, la haute densité de la population et le manque d'infrastructure physique élémentaire génèrent de façon combinée la décapitalisation cyclique et progressive des ménages.

    Ainsi, dans les sections communales, la vie humaine se développe dans une sphère biologique, c'est-à-dire que la lutte pour l'existence se circonscrit autour des besoins primaires. Les paysans les plus arriérés sont enlisés au sein d'une nature hostile et précaire. Leurs techniques rudimentaires de travail ne leur permettent pas de dominer cette nature. Incapables de progresser, ils s'adaptent passivement au milieu ambiant, se renferment dans leurs coutumes et leurs traditions. Ils finissent ainsi par mener une existence misérable, essentiellement végétative, développant ainsi une singulière aptitude à la résignation et aux conditions de vie les plus inhumaines. Même les besoins fondamentaux ne sont pas satisfaits convenablement : la diète alimentaire, dépourvue de substances réellement nutritives, diminue la résistance physique et occasionne la dégénérescence de la race ; le rudimentaire accoutrement est le symbole de leur infériorité sociale.

    D'une manière générale, les agriculteurs de Jean Rabel pratiquent une agriculture pluviale et saisonnière. Le système d'irrigation mis en place en certains points de la commune ne permet d'arroser qu'une faible surface : 650 hectares dont 400 hectares pour la banane, ce qui représente à peu près 4,3% de la plaine (15000 hectares) soit 1,3% du territoire communal7(*). Cette situation est due principalement au faible débit des sources et des rivières lié notamment aux conditions climatiques de la zone. La plupart des rivières ont par ailleurs un régime temporaire, l'agriculture subit de jour en jour les conséquences d'un climat de plus en plus hostile à son émergence. La région est reconnue pour sa faible pluviométrie soit 400 à 800 mm de pluie par année, de plus, elle est caractérisée par deux longues périodes de sécheresse allant de juillet à la fin du mois d'août d'une part et de fin décembre à début avril d'autre part, période comprenant le carême. Cette situation de dépendance de l'agriculture vis-à-vis de la pluie rend de plus en plus compliquée la situation des agriculteurs et de ce fait réduit énormément les possibilités de reduire la pauvreté.

    La majorité des agriculteurs de la commune (environ 85%) pratique l'élevage8(*). Les terres en jachères, les bordures des chemins et les terres incultes sont les principaux sites utilisés. L'élevage libre est pratiqué dans toute la commune. Les bêtes de somme (âne, mulet, cheval) et les boeufs sont élevées à la corde près des habitations. Par contre, les animaux de basse cour tels : les poules, les pintades et les dindes sont élevés en liberté autour des maisons et les jardins où ils cherchent leur nourriture. Parfois, ils sont nourris par quelques grains et déchets de cuisine venant directement des membres de la famille. Il faut dire en nombre, ces animaux représentent le groupe le plus important alors que les caprins et les ovins occupent la deuxième place.

    Les contraintes liées au système d'élevage sont multiples et varient avec les espèces et les zones.

    L'élevage des cochons n'a pas retrouvé la position qu'il possédait à l'origine, avec la décimation des cochons créoles en 1982. Les problèmes d'élevage des cochons sont plutôt d'ordre alimentaire. En effet, leur alimentation se fait surtout à base de déchets de cuisine et de sous-produits de récolte. En conséquence, un retard général est constaté dans la croissance des porcs.

    Le cabri, plus robuste, et qui résiste mieux aux intempéries, est considéré par les paysans comme une forme d'épargne d'où la nécessité d'y investir. Par ailleurs, les cabris sont souvent attaqués et tués par les chiens sauvages et les voleurs.

    L'élevage des poules se rencontre dans toutes les aires agro-écologiques et surtout dans les plateaux et montagnes humides. Les poules, souvent atteintes de New castle, sont surtout attaquées par les chats qui pullulent dans la commune.

    L'élevage caprin est plus fréquent dans les mornes secs et humides malgré le degré avancé d'érosion et dans les savanes en jachère. Les caprins souffrent généralement de parasites externes et internes.

    Cependant, le disfonctionnement des coopératives et l'inexistence de matériels adéquats et modernes sont autant de facteurs qui expliquent le blocage de cette branche d'activité et en grande partie son sous-développement.

    En fait, la pêche représente l'une des principales activités productives de la commune après le commerce et l'élevage. Pour s'aventurer en mer, les pêcheurs prennent des embarcations mal adaptées tels que des bois fouillés et des canots dépourvus de moteurs. Pour la capture, ils utilisent les trémails, filets, nasses, lignes, sennes et éperviers. Ces matériels sont très archaïques et n'arrivent pas à fournir le rendement escompté.

    Ajoutés à cela, les eaux pauvres en éléments nutritifs connaissent un faible développement des espèces et en conséquence sont d'une faible productivité.

    La commercialisation des produits reste un handicap majeur pour le progrès économique des pêcheurs. Il n'existe pas de marché proprement dit à Jean Rabel pour la vente des produits halieutiques. En effet, dépourvus de moyens de conservation (électricité, congélateur, chambre froide, groupe électrogène,...), ils sont obligés de vendre à faible prix soit à des intermédiaires délégués par les exportateurs soit à des marchands locaux ou entre autre de pratiquer le séchage qui est d'ailleurs la forme la plus pratiquée. Ils confrontent aussi des problèmes de manque de formation et d'approvisionnement en matériel de travail.

    Malgré la grande diversité de la faune marine et les nombreux sites de pêches, le problème de la pêche est surtout lié à un manque d'organisation, de financement et du caractère archaïque des instruments utilisés.

    Le secteur secondaire est peu développé et est pratiquement inexistant. Il n'existe pas d'activités agro-industrielles importantes dans la commune. Seule la petite industrie est présente et relativement dynamique. Le nombre de produits destinés aux petites industries est plutôt faible, étant donné que ce secteur est encore au stade embryonnaire. Les denrées faisant réellement l'objet de conditionnement et de transformation sont surtout les céréales (maïs, riz), le manioc et le latanier.

    La majorité des unités de transformation est constituée de boulangerie et les moulins de maïs occupent la deuxième place.

    Des difficultés de fonctionnement liées à l'indisponibilité de l'énergie et surtout à l'approvisionnement en pièces de rechange auraient forcés certaines unités à travailler au ralenti et présente une contrainte majeure quand au développement des activités industrielles.

    Malgré l'existence de matières premières (lataniers, bambous, calebasse,...) l'artisanat est très peu développé. Cela tient surtout à la pénurie des capitaux, à la déficience des infrastructures (électricité, communication, route pour acheminer les produits vers d'autres régions) et à l'absence d'investisseurs potentiels. Cependant, certains artisans besogneux se consacrent avec habilité à la confection de paniers, de chapeaux, d'objets en terre cuite qu'on trouve sur les marchés. Toutefois, ces activités restent l'initiative de particuliers et ne reçoivent aucune aide.

    Le secteur tertiaire, second en importance, est dominé par le petit commerce. En effet, le commerce, la principale activité de la commune a connu un fort ralentissement. Ceci s'explique surtout par le quasi inexistence et le mauvais état des routes reliant la région au reste du département. Le problème de circulation des produits d'un endroit à un autre désavantage énormément les relations commerciales de la commune au reste du département. De ce fait, les difficultés de transport constituent un frein énorme dans le développement du commerce et influent dans une proportion importante sur les prix de vente au détail. L'activité commerciale gravite surtout autour des Gonaïves (Artibonite) et de Port-au-Prince. Les intermédiaires en profitent grandement. La dépendance des paysans par rapport aux spéculateurs, le manque de déboucher pour les produits et l'absence de coopératives agricoles confine les paysans dans l'autosubsistance. Cette situation facilite la hausse des prix de certains produits (périssables) et contribuent à la chèreté de la vie que connaît la commune.

    Le commerce, interne dans l'ensemble, se fait surtout au niveau des marchés publics. Mais le problème de l'emploi motive presque toute la population active à intégrer ce secteur. Par manque d'espace approprié, l'étalage des produits se fait à travers les rues les plus fréquentées9(*) ; ce qui crée des nuisances considérables à la circulation.

    L'infrastructure sociale (sanitaire, scolaire) souffre du manque d'équipements et de personnels.

    Les carences en matière de santé proviennent directement des conditions de vie souvent médiocres où la pauvreté, l'insalubrité et la malnutrition sont le lot de bien des adultes et d'enfants non-vaccinés. Les maladies infectieuses et parasitaires pullulent dans certaines localités de la commune où la population vit dans une promiscuité qui rend difficile le respect des principes les plus élémentaires d'hygiène.

    De ce fait, le mauvais état de santé est flagrant au niveau de la commune qui compte un nombre de médecins nettement insignifiant. Les dispensaires sans lits représentent dans les sections rurales les seuls établissements publics de santé qui dispensent des soins à la population. Ces établissements ont généralement à leur tête une aide infirmière dont les limitations, en fait de connaissances médicales, sont assez connues ; d'où l'impossibilité parfois de traiter sur place certaines maladies bénignes. De plus, ces établissements sont généralement sous-équipés en matière de matériel médical. D'ailleurs, la ville qui est supposée approvisionner les sections rurales ou suppléer à leur carence, est parfois privée des équipements les plus élémentaires. Par exemple, beaucoup d'établissements de santé ne disposent pas d'un cathéter et d'un réfrigérateur pour conserver les vaccins. La situation est donc grave dans les sections rurales où les problèmes sont réellement plus aigus.

    Toutes ces carences ont eu pour effet de favoriser le développement de la médecine traditionnelle qui a encore la faveur d'une fraction importante de la population. Sans vouloir nier ses mérites, il convient de reconnaître que cette médecine est incapable de faire face à la complexité de certains cas de maladies qui requièrent des connaissances et des techniques plus appropriées. Ainsi, bon nombre de décès sont souvent dus aux manoeuvres de certains « médecins-feuilles » ou charlatans qui, pourtant, sont tolérés dans le milieu et continuent même à donner des soins.

    Les transformations sociales et mentales conditionnent tout processus de développement et découlent d'une éducation équilibrée et bien orientée. A cet égard, qu'en est-il de la situation éducationnelle de la commune ?

    Les faiblesses en matière d'éducation des paysans proviennent directement du faible moyen économique des parents, où la pauvreté leur rend fort difficile l'accès aux établissements scolaires comme aux autres services sociaux. Les enfants des familles très pauvres n'ont en général pas accès à l'école. D'une part, leurs parents ne disposent pas de revenus suffisants pour faire face aux frais occasionnés par une scolarisation. D'autre part, la discipline scolaire exige par elle-même assiduité, ponctualité, propreté, voire le port d'un uniforme. En outre, les inscriptions scolaires se font à 6 ou 7 ans ; or, à cet âge, les enfants très pauvres sont amenés à soutenir leur famille en rendant de petits services : ils travaillent aux champs, vont vendre au marché ; sont placés comme domestiques. De ce fait, l'analphabétisme pullule dans toutes les localités de la commune où l'insuffisance d'établissements publics et l'éloignement des écoles encouragent la non-scolarisation des enfants.

    Aux problèmes économiques des parents, viennent s'ajouter une faiblesse quasi générale de l'offre d'éducation. En dehors, du nombre très restreint d'écoles publiques existant, la majorité des écoles fonctionne dans des maisons ne respectant aucune norme. Les locaux des établissements scolaires sont en mauvais état.

    Par ailleurs, bon nombre de ces écoles ne sont pas clôturées et sont dépourvus de structures sanitaires de première nécessité comme eau potable et latrines, de matériels pédagogiques (manuels, cartes), de fournitures (cahiers, craies, crayons, plumes) et de mobilier (bancs, buffets, bureaux, chaises,...), et fonctionnent sans cour de récréation, sans aucune bibliothèque etc.

    De plus, la compétence des professeurs laisserait à désirer. Les instituteurs sont en grande majorité pas qualifiés, ils n'ont reçu aucune formation pédagogique et ceux qui le sont, sont confrontés à des problèmes de salaires qui les encouragent à l'absentéisme et à ne pas tout donner d'eux-mêmes. La plupart des enseignants ont en général le baccalauréat 1er et 2ème partie. Beaucoup d'autres n'ont même pas le Certificat d'études primaires et enseignent dans les institutions primaires.

    Toutes ces faiblesses ont pour effet d'encourager la non-scolarisation des enfants et plus particulièrement d'accroître le taux d'analphabétisme de la population de la commune. Ainsi, il convient de signaler que le manque d'éducation des paysans ralenti considérablement leur progrès économique et social.

    Le problème de l'eau potable est un autre handicap dans le processus de développement de la communauté. En effet, la majorité des sections communales continuent à s'approvisionner à partir des sources ou des puits, avec les multiples conséquences qui peuvent en résulter : risques de maladies intestinales, approvisionnement à longue distance...

    Seule la ville est électrifiée pendant quelques heures par un moteur électrique géré par une Mission, ce qui ne favorise pas le développement de l'industrie et de l'artisanat ; ce qui constitue un handicap majeure dans le processus de développement de la commune.

    L'organisation rationnelle et systématique des loisirs, surtout dans les endroits reculés du pays, représente l'une de nos principales faiblesses. Or, nul n'ignore la fonction et le pouvoir des divertissements sains dans la vie sociale. Quel est, à ce sujet, l'état de la situation dans la commune de Jean Rabel ? Ce qui est d'abord évident, c'est le peu de variétés offertes dans ce domaine. Les combats de coqs représentent, de loin, la plus importante activité récréative de la commune et drainent une assistance toujours nombreuse. Les gaguères fonctionnent, à peu près, tous les jours. Cependant, cet horaire anarchique démobilise trop souvent de nombreux bras dont l'engagement dans les activités de production aurait été plus bénéfique à l'essor de la commune. Également, à Jean Rabel, comme partout dans le pays, le foot-ball suscite beaucoup d'intérêt. Mais les pratiquants du ballon rond profitent surtout des grandes vacances d'Été pour se livrer à des parties très animées, disputées par les équipes de quartiers.

    Nombreux sont ceux qui aiment la musique et la danse. Ils raffolent soit de la musique enregistrée, soit de celle orchestrée par les musiciens locales qui se perfoment souvent dans les night-clubs de la commune.

    D'autre part, les divertissements sont enrichis par les programmes de la radio locale et des radios qui émettent des communes avoisinantes, de Port-au-Prince ou de l'étranger. Il faut signaler que la commune est pourvue de trois bibliothèques, d'une salle de théâtre et de deux salles de cinéma par système vidéographique. Par ailleurs, elle n'est dotée d'aucune musée, de place publique, de monument et site et de temple notoire du vodou.

    1.2. Théorie et concept

    Pour appréhender la pauvreté sous tous ses aspects, nous avons jugé nécessaire de présenter ses aspects théoriques ainsi que son cadre conceptuel.

    1.2.1. Aspects Théoriques

    Jean Rabel est la commune la plus pauvre du département du Nord-Ouest et l'une des communes les plus pauvres du pays. En effet, plus de la moitié de sa population vit en dessous de la ligne de pauvreté extrême de 1 US $ par personne et par jour, et plus des trois quarts en dessous du seuil de pauvreté de 2 US $.

    Parallèlement, la production agricole est faible et très aléatoire du fait de la faible maîtrise de l'eau de surface et des pratiques productives destructrices pour le milieu. La commune est structurellement déficitaire en productions alimentaires et n'offre par ailleurs que peu d'opportunités pour la recherche de stratégie alternative de survie.

    Il faut également souligner que les indicateurs sociaux indiquent que la commune fait face à un accès très précaire en services sociaux de base tels que l'éducation, la santé, l'eau courante et l'assainissement. Par exemple : au niveau de la santé, l'espérance de vie à la naissance est de 57 ans, les taux de mortalités sont généralement très élevés. Par ailleurs, la population fait face à une faible consommation de calories et de protéines, car elles ont difficilement accès aux zones de bonnes productions. A peine 20% des enfants démunis ont accès à une éducation gratuite et plus de la moitié de la population des plus de 15 ans est analphabète (55%)10(*).

    L'analyse spatiale de la pauvreté démontre que la pauvreté est d'abord et avant tout un phénomène rural. Contrairement à d'autres régions où le critère de pauvreté rurale est l'inaccessibilité à la propriété, pour les ménages ruraux de la commune, l'accès à la terre (le bien le plus important du paysan) n'est pas le facteur de blocage de son développement. Le principal élément de blocage est la taille des exploitations et l'absence des autres facteurs de production comme le capital et la technologie.

    Les deux principales sources de revenus des ménages ruraux sont la production agricole et le commerce. Et depuis quelques années, la partie qui revient aux activités agricoles diminue sans que pour autant l'apport du commerce augmente.

    En résumé, les pauvres ruraux de la commune subissent toute une série de contraintes qui limitent leur développement telles que : un environnement dégradé qui compromet la production agricole, des infrastructures délabrées ou non existantes, des droits de propriétés mal définis et un manque de mécanismes de résolution de conflits fonciers, un faible accès au crédit en général, un appauvrissement des terres les rendant moins fertiles, et de plus en plus parcellisées, et en définitive, une mauvaise répartition des besoins essentiels ajouté à un manque d'opportunités ou d'alternatives. Cette persistance du niveau élevé de la pauvreté dans les sections a contribué grandement à une croissance démographique rapide et à une migration importante vers Port-de-Paix, Port-au-Prince, Gonaïves, Saint-Marc, Mare-Rouge, Anse-Rouge, USA, République Dominicaine, Grentock et le Canada.

    L'incidence de la pauvreté varie considérablement selon les sections et est nettement plus importante dans certaines localités que d'autres. Ainsi, les populations rurales de certaines localités et habitations manquent non seulement de revenu, mais elles sont dépourvues d'un manque de structures. Les pauvres ruraux de ces localités et habitations vivent uniquement de leurs biens le plus important la terre. Mais la taille des exploitations, l'absence d'encadrement technique, la situation sanitaire rend négligeable et insignifiant tout effort de développement de la productivité et d'augmentation de la production. Soumise à des aléas de toute nature pour survivre, elle se voit obliger de détruire son propre environnement. Cette tendance encourage le déboisement et généralement la détérioration des ressources naturelles (eau, sol, forêt). Par ailleurs, le taux de productivité des paysans infère un accroissement de la population qui augmente la charge sur les surfaces cultivables et, donc, provoque la décadence de la production agricole. Il s'ensuit une chute continue de l'économie de la commune et l'engloutissement des paysans dans une misère effarante.

    Vu l'état dégradant de la situation, nous aborderons des méthodes de quantification de la pauvreté afin de mieux cerner la question.

    1.2.1.1. Méthodes de quantification de la pauvreté

    Combattre efficacement la pauvreté c'est, d'abord et surtout, se donner les moyens de cerner ses contours et ses fondements. Et, pour ce faire, il faut recourir aux méthodes de quantification de la pauvreté.

    1.2.1.2. Mesures statistiques de la pauvreté

    La première difficulté d'évaluation et de quantification du phénomène provient de l'ambiguïté même de la notion de pauvreté. Depuis les débuts de l'appréciation chiffrée de la pauvreté qui remonte aux travaux de Boots (1889-92 : Londres) et Rowntree (1901 : New-York), l'essence de ces recherches a toujours été de définir un seuil de pauvreté qui sépare les pauvres des non pauvres. Les débats autour de cette question ont maintenu le même objectif, c'est-à-dire obtenir des normes permettant de distinguer les pauvres des non pauvres. Depuis environ six ans, un certain nombre d'enquêtes et d'études ont été réalisées en Haiti sur différents aspects de la problématique de la pauvreté monétaire et non monétaire. Elles proposent une mesure de la pauvreté (Pedersen/FAFO, Montas 2002, Accion 2003). En dépit des difficultés de mesure, la comparaison dans le temps de l'incidence de la pauvreté monétaire a constitué un autre angle d'approche en vue de mesurer les efforts accomplis. A cet effet, les enquêtes de l'Institut Haitien de Statistique et d'Informatique sur le budget des ménages a été mis à contribution (Pedersen/FAFO, Montas 2002, Accion 2003). Prises collectivement, elles proposent aussi un tableau actuel de la situation des ménages pauvres sur les plans économique, démographique, nutritionnel et sanitaire (Banque Mondiale 1998, IHSI 2000 et 2001, CNSA 2002, PNUD 2002) et du point de vue de leur répartition sur le territoire. Sur le plan spatial, le Ministère de la Planification et de la Coopération Externe a présenté en janvier 2002 une version provisoire d'une carte d'accès aux services collectifs intitulé « Carte de Pauvreté ». Une série d'études élaborées sur la base d'enquêtes dans le cadre d'une récente initiative de l'IHSI et du PNUD sur les statistiques sociales, proposent un profil des ménages pauvres et du phénomène de la pauvreté en Haïti (IHSI 2003), ainsi qu'une analyse qualitative et quantitative sur les perceptions de la pauvreté par la population elle-même. En 2004, le ministère de la planification et de la coopération externe a publié une autre version du « Carte de pauvreté ».

    1.2.1.3. Critères d'identification des pauvres

    D'après le lexique d'économie « Dalloz, 7 édition 2002, p.499 » la notion de pauvreté est liée à la non satisfaction des « besoins ». Il est facile, en théorie, de dire que la pauvreté rurale est un fléau qu'il faut éliminer. Il n'est pas si simple d'identifier les pauvres ni d'évaluer le nombre véritable de pauvres qui existe. Ainsi, pour identifier les pauvres, trois approches sont généralement proposés : la méthode directe, la méthode basée sur le revenu et une combinaison de ces deux.

    La méthode directe consiste à identifier tous ceux-là dont la consommation effective laisse insatisfaite quelques nécessités basiques. Ainsi, par exemple, les niveaux actuels de satisfaction en matière de calories sont tels que 48% des personnes n'atteignent pas le niveau minimal de la quantité nécessaire.

    La méthode des revenus : l'utilisation du revenu monétaire à des fins d'identifier et de mesurer la pauvreté date de très longtemps. C'est aussi la méthode la plus couramment utilisée, tant et si bien qu'elle est devenue le cheval de bataille de ceux qui favorisent une approche économique et quantitative du problème. Elle consiste à calculer un revenu minimum nécessaire pour satisfaire les besoins primaires. Ce revenu une fois déterminé constituera le seuil de pauvreté. Seront alors considérés comme pauvres tous ceux-la dont le revenu est inférieur à ce niveau. En dépit des sous-estimations attachées à l'application de cette méthode, elle présente néanmoins l'avantage d'indiquer le nombre minimum de personnes qui n'ont pas la capacité de subvenir adéquatement à leurs besoins à partir du revenu disponible.

    1.2.1.4. Seuils de pauvreté

    Le seuil de pauvreté est l'instrument de mesure utilisé pour évaluer le bien-être et déterminer qui est pauvre et qui ne l'est pas. Les individus sont considérés comme pauvres lorsque leur niveau de vie tel qu'il a été mesuré (généralement en fonction du revenu ou de la consommation) est inférieur à un plancher acceptable. Le seuil de pauvreté est essentiellement défini comme la valeur du revenu ou de la consommation nécessaire pour assurer le niveau minimum d'alimentation et d'autres besoins. Ainsi, on distingue trois seuils de pauvreté : la pauvreté absolue, la pauvreté relative et une combinaison des deux.

    La pauvreté absolue est un seuil de pauvreté fixé à partir d'un panier de biens de consommation nécessaires à la stricte reproduction des individus (ou des ménages). Elle définit un modèle de subsistance minimale en termes de nutrition, logement, santé, habillement et autres nécessités considérées comme basiques. Le revenu considéré comme nécessaire pour soutenir ce mode de vie minimal constitue le seuil de pauvreté absolue. A titre de guide, les pondérations des différents postes de consommation (IHSI) du pays par milieu donnent :

    - pour l'Aire Métropolitaine : Alimentation, Boissons et Tabacs (32.8%), Habillement et Chaussures (5.8%), Logement (18.4%), Education (3.7%), Santé (3.2%), Transport (15.1%), Loisirs et Culture (1.3%).

    - en milieu rural : Alimentation, Boissons et Tabacs (55.6%), Habillement et Chaussures (7.5%), Logement (14.2%), Education (2.7%), Santé (3.2%), Transport (2.4%), Loisirs et Culture (0.7%).

    - en milieu urbain : Alimentation, Boissons et Tabacs (41.2%), Habillement et Chaussures (8.8%), Logement (17.6%), Education (3.7%), Santé (3.6%), Transport (3.4%), Loisirs et Culture (1.1%).

    Pour l'ensemble du pays, en 2004, les pondérations des différents postes de consommation donnent :

    - Alimentation, boissons et tabacs (49.42%) ; Habillement et tissus, chaussures (8.48%) ; Loyer du logement, énergie et eau (9.08%) ; Aménagement et entretien du logement (4.96%) ; Santé (3.21%) ; Transport (8.72%) ; Loisirs, spectacles, enseignement et culture (7.19%) ; Autres biens et services (8.94%).

    En utilisant l'approche de la pauvreté absolue, le PNUD a pu déterminer en 2003 pour Haïti un pourcentage de 76% des personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté dans le pays avec respectivement 82% en milieu rural et 55% en milieu urbain. En l'absence de possibilité matérielle de réévaluer ces statistiques aujourd'hui, ces données sont retenues comme de simples ordres de grandeur pour dimensionner l'envergure de toute solution à apporter aux problèmes de pauvreté.

    Par ailleurs, selon les approches de la CEPAL, les indigents sont ceux-là dont le revenu ne permet pas de subvenir aux simples besoins nutritionnels. La détermination de ces types de besoin se fait à partir d'enquête réalisée auprès d'un échantillon de familles non pauvres en vue d'obtenir les aliments achetés avec la plus grande fréquence. Ensuite on élabore une liste des prix minimums pratiqués pour ces différents biens.

    En fonction de l'actuel panier de produits retenus par l'IHSI et la BRH pour le calcul du coût de la vie, on peut sélectionner leur coût moyen en gourde par unité, en décembre 2004 : riz (livre : 18.03 gourdes), maïs moulu (livre : 11.99 gourdes), farine de blé (livre : 17.44 gourdes), pain (livre : 13.08 gourdes), viande de boeuf (livre : 44.84 gourdes), viande de cabri (livre : 59.10 gourdes), poulets (livre : 61.07 gourdes), poissons frais (livre : 67.33 gourdes), lait évaporé non sucré (boîte de 6 oz : 19.19 gourdes), huile (gallon : 190.10 gourdes), banane (livre : 6.64 gourdes), pois sec (livre : 19.27 gourdes), sucre (livre : 15.77 gourdes), cola (bouteille de 33 cl : 12.65 gourdes), savon de toilette (140 gr : 20.01 gourdes), savon de lessive (barre : 10.95 gourdes), charbon de bois (« gros sac » : 250.24 gourdes).

    Face à la difficulté de chiffrer la quantité exacte requise pour ces produits selon les normes diététiques, une autre démarche a consisté à appliquer la proportion nationale des dépenses de consommation (84.3%) au revenu par tête pour ensuite déterminer la proportion des Haïtiens dont les revenus sont situés en dessous de cette valeur. En termes de revenus annuels par personne, le seuil d'indigence a été estimé à 2681 gourdes et le seuil de pauvreté à 5362 gourdes en 2004. Malgré les faiblesses d'une telle donnée, elle permet aux décideurs de disposer au moins d'un ordre de grandeur basé sur les statistiques officielles face à tout aspect d'un programme de lutte contre la pauvreté focalisée sur les besoins essentiels de la population cible.

    La pauvreté relative tient compte de la distribution effective des niveaux de vie (découlant des revenus déclarés). Elle considère de manière explicite l'interdépendance existant entre le seuil de pauvreté et la distribution de revenu. L'application la plus simple et la plus connue de cette approche consiste à retenir comme seuil de pauvreté le niveau de revenu qui sépare les 20 ou 40% les plus pauvres du reste de la population. La faiblesse de ce critère est de faire apparaître un pourcentage constant et permanent de pauvres.

    En utilisant les données de la distribution de revenus non agricoles de l'Enquête Budget-Consommation des Ménages (1999-2000 : EBCM/IHSI) il est permis de voir que les 20% et 40% des ménages les plus pauvres totalisent des revenus qui représentent respectivement 0.3% et 3% de l'ensemble du pays. Il est à noter qu'en 1999-2000, le revenu per capita en gourdes courantes fut d'une valeur de 8536,6.

    Si l'on applique ce seuil à chacun des milieux de résidence, il apparaît que près de 40% des ménages du milieu rural sont pauvres contre respectivement 3.0% et 18.1% dans la capitale et dans les autres villes de province.

    En fait, le milieu rural est doublement défavorisé : outre la forte incidence de la pauvreté relative observée, l'immense majorité des ménages pauvres résident en milieu rural (89.6%) contre respectivement 1.7% et 8.7% vivant dans l'Aire Métropolitaine et les autres villes.

    Enfin, si l'on prend le seuil de pauvreté relative de l'ensemble du pays comme seuil unique, on note que le milieu rural est, une fois de plus, le lieu où l'on échappe le moins à la pauvreté.

    La troisième approche, la mesure de base pour comptabiliser le nombre de pauvres, consiste à fixer un seuil en tant que pourcentage du revenu moyen de la population. En fonction de ce calcul, plus la distribution de revenu est équitable, moins nombreux sont les pauvres. L'indice de GINI obtenu à partir de ces mêmes données de l'EBCM/IHSI a révélé pour Haïti un coefficient de 0.63 pour tout le pays, ce qui correspond à une très forte concentration, donc à une grande inégalité des revenus.

    La méthode du seuil de pauvreté est intéressante, car elle donne une image assez rapide et vivante du phénomène.

    1.2.1.5. Utilité des mesures de la pauvreté

    Les statistiques de la pauvreté peuvent servir à différents niveaux. Si l'objectif est de chiffrer les niveaux de bien-être, on peut se baser sur le revenu per capita (actuellement autour de $390 US pour Haïti) et l'analyse de ce qu'un tel revenu permet d'acquérir sur le marché. Si cette évaluation est effectuée dans une perspective de lutte contre la pauvreté, la teneur des informations sera très utile par rapport aux besoins d'évaluation d'impact des programmes élaborés en ce sens. Les statistiques réunies avant et après ces réalisations permettront de déceler les niveaux de satisfaction atteints et de préciser l'incidence des facteurs négatifs ou positifs ayant influencé le déroulement du programme. Ce volume d'informations que tout participant pourra emmagasiner et interpréter (grâce à l'aspect chiffré) aura l'utilité de constituer une référence très pratique lors de programmes similaires à venir.

    1.2.2. Les Concepts

    Les concepts sont dans un sujet ce que les mots sont dans une expression. Ils sont d'une importance capitale, et exigent une compréhension exacte dans tout travail. Ainsi, il convient de définir les concepts clés de notre étude : pauvreté, lutte contre la pauvreté et développement rural ; pour une meilleure appréhension du phénomène.

    1.2.2.1. Définition des concepts

    1.2.2.1.1. Le concept de pauvreté

    De beaucoup de points de vue, la pauvreté est si manifeste que l'on n'a pas besoin de concepts bien pensés, ni de théories élaborées pour pouvoir la comprendre et la reconnaître en sa réalité brutale. Pourtant, tout n'est pas si simple que l'on puisse renoncer à des réflexions conceptuelles et théoriques. Celles-ci sont inévitables si l'on doit saisir ce qu'est la pauvreté, l'analyser plus précisément pour ensuite la combattre efficacement.

    Comme le montre son histoire, la pauvreté était et est encore un problème extraordinairement complexe et multi-dimensionnel, présentant non seulement des aspects économiques, mais aussi des aspects politiques, socioculturels, écologiques et bien d'autres11(*).

    Afin de bien cerner le concept, il est important de se référer à l'origine gréco-latine du terme « pauvre ». Sa racine latine est « pauper » qui signifie peu ou petit, et qui en elle-même est proche du mot grec « peina » qui signifie la faim. La traduction grecque du mot « pauvreté » est aporia qui signifie absence de chemin. En combinant les deux origines, nous aboutissons à une double conception de la pauvreté : c'est une notion, à la fois quantitative, en ce sens que la quantité des besoins fondamentaux pour assurer la reproduction physiologique est insuffisante et, qualitative, en ce sens que la qualité est peu fiable et elle traduit aussi l'idée de celui ou celle qui ne peut trouver son chemin.

    En faite, la signification essentielle du mot pauvreté est la carence de quelque chose jugé nécessaire ou entre autre le manque de ressources matérielles nécessaires, que celles-ci soient mesurées en termes de quantités ou de qualités.

    La pauvreté est donc un phénomène qui doit être traité avec un très grand sérieux, mais en prenant garde de ne pas verser dans le désespoir, car c'est un fait, nous pouvons et nous devons travailler, dans une première étape, à la réduire et, dans le long terme, à l'éliminer du corps social.

    1.2.2.1.2. Le concept de lutte contre la pauvreté

    La lutte contre la pauvreté est l'ensemble des mesures prises pour éradiquer ou du moins réduire la pauvreté tant du point de son niveau que du nombre de personnes touchées. Elle implique des outils efficaces de suivi ainsi qu'une approche holistique susceptible de prendre en compte ses racines historiques12(*).

    1.2.2.1.3. Le concept de développement rural

    A l'occasion d'une réunion tenue en Afrique de l'Ouest, en 1970, sous les auspices de l'UNESCO, le développement rural a été défini comme « le processus par lequel l'introduction d'une série de changements quantitatifs dans une population rurale donnée permet d'améliorer les conditions de vie de ses habitants grâce à un accroissement de la capacité de production »13(*).

    La Banque Mondiale, de son côté, définit le développement rural comme « une stratégie de croissance qui s'adresse à une catégorie de population particulière, à savoir, celle des pauvres ruraux. Il implique l'extention de moyens d'existence dans les campagnes, c'est-à-dire aux petits agriculteurs, aux métayers, à ceux qui n'ont pas de terre »14(*).

    En fait, nous ne considérons que ces définitions car elle présente une caractéristique commune qui peut être résumée ainsi : « le développement rural, ce sont des mesures apportant des changements quantitatifs et qualitatifs au sein d'une population rurale, en vue de répondre à ses besoins essentiels, d'améliorer son bien-être et d'engendrer un processus autonome de développement »15(*). Il demeure entendu que pour assurer la disponibilité et l'irréversibilité du processus de développement, ce dernier postule un changement de structure.

    Afin de comprendre pleinement leur situation désastreuse, et l'urgence de l'aide qu'il faut leur apporter en vue de trouver une solution durable à leur problème, nous chercherons à déterminer dans le chapitre suivant les diverses dimensions, les formes, les facteurs et les caractéristiques de la pauvreté rurale.

    CHAPITRE II

    2. Les dimensions, les formes, les facteurs et les caractéristiques de la pauvreté

    2.1 Les diverses dimensions de la pauvreté

    Nombreux sont ceux qui affirment aujourd'hui que la pauvreté est multidimensionnelle, qu'elle touche tous les aspects de la vie - économiques, politiques, humains et socioculturels - et qu'elle se caractérise non seulement par le manque de perspectives économiques, mais aussi par l'insécurité, la vulnérabilité et l'impuissance.

    Habituellement, la pauvreté est comprise d'abord comme le manque des biens matériels de base nécessaires pour la vie. Les pauvres ne peuvent pas se nourrir, se loger, s'éduquer ni se soigner convenablement et n'ont par conséquent aucune possibilité d'épanouissement personnel. Ils sont aussi extrêmement exposés aux maladies, aux bouleversements économiques et aux catastrophes naturelles. Enfin, ils sont souvent maltraités par les institutions de l'État et de la société et n'ont aucune influence sur les grandes décisions qui modèlent leur existence. Tous ces handicaps représentent chacun une dimension de la pauvreté.

    Par ailleurs, ces différentes dimensions de la pauvreté sont en interaction constante. De même, les interventions qui visent à améliorer le bien-être des pauvres agissent les unes sur les autres. Ainsi, les progrès de l'éducation influent positivement sur la santé. L'amélioration de la santé accroît les potentialités de revenu. La mise en place de dispositifs de sécurité permet aux pauvres d'entreprendre des activités plus risquées, mais aussi plus rentables. Enfin, l'élimination de la discrimination envers les femmes, les minorités ethniques et les autres groupes désavantagés améliorent directement leur bien-être, tout en accroissant leur capacité de revenu.

    L'approche multidimentionnelle nous permet de mieux saisir les causes de la pauvreté et, par là, multiplie les aires d'action et les politiques publiques susceptibles d'avoir un impact sur elle.

    2.2 Les formes de pauvreté

    Maintenant que nous avons identifié ses diverses dimensions, tournons-nous vers les différentes formes que peut revêtir la pauvreté16(*):

    Ø La pauvreté relative, envisagée par rapport à un niveau de bien-être admis comme normal au sein d'une société donnée. Ce terme est souvent utilisé comme équivalent approximatif de pauvreté générale;

    Ø La pauvreté est considérée, d'une manière absolue, comme l'incapacité d'atteindre un niveau de vie minimum adéquat. Le niveau de vie est mesuré par le niveau de consommation privée, et sont considérées comme pauvres les personnes qui vivent en dessous des seuils internationaux de pauvreté de 1 dollar par jour et de 2 dollars par jour;

    Ø La pauvreté de masse, liée aux conditions géophysiques et économique d'un groupe social ou d'une communauté donnée;

    Ø La pauvreté extrême, état absolu de dénuement, d'indigence ou de misère, de privation et d'isolement, par quoi l'on entend généralement l'incapacité de satisfaire les besoins alimentaires minimaux;

    Ø La pauvreté structurelle est celle qui touche des familles, des foyers, de génération en génération;

    Ø La pauvreté conjoncturelle est celle provoquée par un événement imprévu, une catastrophe naturelle ou autre;

    Ø La pauvreté humaine est considérée comme une manque de capacités humaines essentielles, comme de savoir lire et écrire et d'être correctement nourri;

    Ø La nouvelle pauvreté désigne une rupture brutale du niveau de revenu; elle touche des familles qui sont normalement insérée dans la structure sociale, mais qui se trouve prise dans un processus d'exclusion progressive.

    2.3 Les facteurs de la pauvreté rurale

    La pauvreté rurale tient à divers facteurs: l'augmentation de la population rurale, la lente expansion de l'agriculture, la dégradation des terres cultivées, la détérioration des ressources naturelles, l'inégalité de la répartition des terres, le fractionnement des petites exploitations agricoles, les effets indirects de la modernisation et de la technicisation de l'agriculture, et l'urbanisation.

    De plus, la situation des pauvres des régions rurales est encore aggravée par la rareté ou l'inexistence des services publics élémentaires: éducation, assistance médicale, approvisionnement en eau potable, voirie, électricité, etc.; à cela s'ajoute la carence ou le défaut de l'infrastructure physique rurale: routes et autres moyens de communication.

    Parmi les facteurs qui ont contribué à empirer la situation de pauvreté et de misère de la population rurale, il convient également de mentionner la fréquence des désastres naturels. Parmi les exemples récents de désastres importants on peut citer les inondations, la sécheresse, les ouragans et les tremblements de terre.

    Ce bref aperçu peut donner une idée de l'ampleur des dommages causés par les catastrophes naturelles qui ont non seulement détruit les cultures, le bétail et les logements, mais entraîné également des pertes de vies humaines, condamné à la faim et à l'exode des milliers de paysans et laissé des séquelles qui n'ont pas encore été effacées.

    Tous ces facteurs aggravent le chômage et la pauvreté dans les campagnes et accélèrent les migrations, aussi bien vers d'autres pays que vers les villes, où beaucoup de migrants viennent grossir les rangs des chômeurs et des travailleurs sous-employés et, dans le meilleur des cas, trouvent certains types d'emplois dans le secteur non structuré.

    Ces facteurs ainsi que d'autres que l'on examinera plus tard aggravent la pauvreté dans les campagnes.

    2.4 Caractéristiques de la pauvreté rurale

    La mauvaise santé, le manque d'éducation et la dénutrition sont des caractéristiques fondamentales communes aux couches pauvres des populations rurales dans tout le territoire national. Pourtant, même parmi les pauvres, il existe souvent des différences marquées dans les niveaux de nutrition, de santé et d'éducation. Pour cette raison, nous examinons ici les caractéristiques évidentes de la pauvreté. La terre étant la base de la production vivrière, du revenu et de l'emploi, et contribuant à donner accès aux services éducatifs et aux services de santé, le manque de terre et le régime foncier est lié à ces caractéristiques.

    Alimentation et pauvreté

    La nourriture étant biologiquement indispensable à la survie de l'homme, la ration alimentaire est un critère essentiel pour l'évaluation de la pauvreté. Toutefois, la dénutrition est plus qu'un simple problème de ressources vivrières. Les pauvres ne sont tous sous-alimentés, mais les sous-alimentés sont toujours pauvres. Dans un ménage disposant de ressources vivrières suffisantes, certains membres peuvent souffrir de la faim. L'état nutritionnel résulte d'un ensemble complexe de facteurs alimentaires et autres. Par conséquent, l'état nutritionnel est lié non seulement au revenu et aux ressources vivrières mais également à un grand nombre de facteurs sociaux et écologiques, tels que les possibilités d'accès aux soins de santé, au logement, à un approvisionnement en eau potable, à l'hygiène et au combustible. D'après certains constats, les femmes sont plus exposées à la dénutrition que les hommes. Les indicateurs les plus évidents de cette dénutrition chez les femmes adultes sont l'anémie et le poids peu élevé des nouveaux-nés.

    La terre étant le principal facteur productif qui détermine la répartition du revenu et de ce fait l'accès à la nourriture dans les zones rurales, il s'ensuit logiquement que l'alimentation des paysans de ces zones est étroitement liée au statut foncier et à la dimension de l'exploitation. Cette assertion se trouve confirmée dans les enquêtes nutritionnelles qui montrent que la dénutrition est largement concentrée chez les paysans sans terre, les métayers, les très petits exploitants et les petits pêcheurs.

    Les fluctuations saisonnières de la production alimentaire représentent un autre facteur de dénutrition, en particulier chez les paysans sans terre et les petits cultivateurs. Il a été clairement démontré que dans de nombreuses zones rurales, la faim s'intensifie au cours des mois précédant la nouvelle récolte, lorsque les réserves alimentaires sont maigres, les prix de la nourriture élevés, et que le travail agricole exige un apport énergétique plus élevé. Au cours de cette période, les adultes perdent jusqu'à un dixième de leur poids, les taux de mortalité infantile atteignent un maximum, et la maladie est répandue. Les familles pauvres et sans terre dont le chef est une femme, ou celles ayant de nombreux enfants à charge sont particulièrement vulnérables.

    Dans certaines circonstances, il y a détérioration rapide de l'accès précaire des paysans pauvres à la nourriture, dont la conséquence désastreuse est la famine. Les pauvres sont particulièrement exposés à l'insécurité alimentaire et au risque de famine, car le peu de ressources dont ils disposent ne leur permet pas de faire face aux successions d'infortunes ou à une catastrophe exceptionnelle. De plus, la famine - forme extrême d'insécurité alimentaire - peut engendrer une pauvreté permanente.

    L'insécurité alimentaire implique des carences réguliers ou des fluctuations temporaires dans l'approvisionnement des aliments de base nécessaires pour maintenir un niveau de consommation suffisant. La raison majeure en est généralement une chute de production due à des catastrophes naturelles ou d'origine humaine. Au niveau du ménage rural, qui est le principal objet de la présente étude, cette diminution de la production résulte de mauvaises récoltes et de pertes de cheptel, d'une hausse des prix des engrais et des pesticides, cultures commerciales, salaires et services, et d'une réduction des possibilités d'emploi. Il y a famine lorsque des déficits vivriers graves, dus à des défaillances de marché ou de production, aboutissent à une pénurie générale. Ainsi, les victimes étaient ceux qui disposaient de peu de ressources et occupaient des emplois mal rémunérés. Beaucoup de ces victimes, affaiblies par la dénutrition, meurent de maladies qui se propagent rapidement.

    D'après certains constats, même lorsque l'approvisionnement alimentaire est suffisant, les ménages qui n'ont pas les ressources suffisantes pour acheter de la nourriture, peuvent mourir de faim.

    La famine peut engendrer ou augmenter la pauvreté permanente, car ses victimes perdent leurs biens et leurs sources de revenus par suite de la décimation du cheptel, de la destruction des arbres et de l'infrastructure physique, de la vente forcée des avoirs en période de détresse, et des dettes. Il s'ensuit généralement une augmentation du nombre de personnes vivant au-dessous du seuil de pauvreté (à moins, toutefois, qu'il n'y ait un grand nombre de décès parmi les plus faibles).

    La relation entre la pauvreté et la nutrition est claire. La dénutrition est répandue parmi les plus pauvres de la population rurale et constitue un indicateur évident de leur niveau de pauvreté. Mais, même parmi ces gens, il y a des différences marquées dans la ration calorique selon le groupe d'âge et le sexe, entre les ménages et au sein des familles. En général, la dénutrition se rencontre le plus souvent chez les travailleurs sans terre, les communautés de petits pêcheurs et les femmes. Une autre conclusion est que l'état nutritionnel est régi par le niveau général de développement économique. Lorsque des désastres naturels ou d'origine humaine engendrent soudain des pénuries alimentaires graves, les pauvres sont les premiers à en souffrir et les premiers à mourir de faim.

    Santé et pauvreté

    La mauvaise santé est une autre caractéristique de la pauvreté dans les zones rurales. Elle ôte aux individus une partie de leur énergie productive, réduit les revenus des familles et empêche les enfants de tirer pleinement parti des bienfaits de l'instruction.

    De nombreux facteurs sont liés à l'état de santé, le principal d'entre eux étant la nutrition. Outre qu'elle fournit les matériaux de construction du corps humain, la nutrition détermine également l'aptitude de l'individu à se défendre contre la maladie. Les personnes souffrant de dénutrition sont donc les plus exposées à tomber malades ou mourir de maladie. On ne peut en trouver de preuves plus tragiques que le taux élevé de mortalité due à des maladies telles que tuberculose, pneumonie, méningite, hépatite et diarrhée parmi les victimes de récentes famines. La dénutrition chez les enfants est également associée à un taux de mortalité élevée provoquée par des maladies courantes chez les enfants.

    La situation sanitaire dans les zones rurales témoigne que la majorité de la population rurale est loin d'avoir accès au bien être. Le manque d'hygiène est absolu, général. Les paysans n'ont, en général, pas accès au centre de santé à cause de leur faible niveau de revenu. En général, les centres de santé n'ont pas de personnel qualifié et d'équipement adéquat. Les paysans des sections rurales reculées doivent accomplir de longs trajets pour se faire soigner.

    Education et pauvreté

    Le manque d'instruction est étroitement lié à la pauvreté rurale. Les enfants issues des familles pauvres n'ont en général pas accès à l'école. Ce triste constat s'explique d'une part par le faible niveau économique des parents et, d'autre part, par la faible capacité d'accueil des écoles. Souvent, les coûts d'opportunité sont tels que l'école, même gratuite, est inabordable pour certaines familles. Les parents se heurtent au problème que pose l'achat des uniformes, des livres de classe et autres fournitures.

    L'analphabétisme est quasiment général dans les campagnes. La grande majorité des chefs de ménages ne savent ni lire ni écrire. Ce qui aggrave leur situation et provoque un taux plus élevé de mortalité infantile et juvénile.

    Cependant, les écoles des bourgs, et en particulier les écoles congréganistes, attirent les fils et filles des paysans un peu aisés. On y voit, chaque année, pour la rentrée, une affluence considérable, de pressantes sollicitations, de nombreuses demandes d'inscription qu'il faut rejeter faute de place.

    Enfin, l'école rurale n'est souvent qu'une construction rudimentaire, dépourvue de tout matériel et incapable de faire face au besoin de la population.

    Jusqu'ici nous avons étudié séparément chacune des caractéristiques de la pauvreté. Mais dans la vie des paysans pauvres l'état de nutrition, de santé et le degré d'instruction sont intimement liés.

    Pour lutter contre la pauvreté, il faut donc nécessairement prendre en compte l'analyse des processus qui l'engendrent. De ce fait, pour mieux cerner les aspects particuliers de la pauvreté dans les sections communales de Jean Rabel, analysons d'abord les mécanismes qui en sont responsables plus directement.

    CHAPITRE III

    3. Analyse des facteurs et de la lutte contre la pauvreté

    3.1. Les facteurs

    3.1.1. Croissance Démographique

    Jean-Rabel, l'une des communes les plus denses de la République, la deuxième après Port-de-Paix dans le Nord-ouest en termes de population a connu un accroissement démographique exponentiel si l'on fait foi des chiffres disponibles depuis le premier recensement général de 1950.

    La croissance démographique accélérée, depuis ces dernières années, pose le problème de la dégradation des conditions de vie de la population, eu égard à la production agricole qui s'amenuise de plus en plus et qui, partant, se révèle inapte à répondre à la demande sans cesse croissante des consommateurs. La faible productivité agricole, l'absence d'industrialisation, le taux élevé d'analphabétisme, l'accentuation des disparités, le chômage endémique, la balance commerciale déficitaire, le sous-équipement généralisé sont autant de problèmes inhérents à la nature même du sous-développement et auxquels doivent faire face les Pouvoirs Publics, en vue de trouver des solutions satisfaisantes à la misère de la population.

    A-Evolution Démographique

    Tableau 3: Evolution de la population

    Année

    1950

    1971

    1982

    2003

    Population

    33372

    46378

    75053

    108738

    Source: IHSI

    De 1950 à 2003, la population de Jean Rabel serait passée de 33372 habitants à 108738 habitants, soit une augmentation d'environ 225.8%. Ces chiffres font que la population de la commune (108738) représente environ 20% de la population totale du département du Nord-Ouest (531198). Cette population vit en effet sur une superficie de 484 km²17(*) dont 98% représente son espace rural.

    La densité brute de la commune est de l'ordre de 224 habitants / km² (52 en 1950).

    Tableau 4: Densités des sections communales de la commune pour l'année 2003.

    Section communale

    Superficie (km²)

    Population

    Densités (hbts/km²)

    Lacoma

    136,33

    27427

    201

    Guinaudée

    104,83

    22312

    212

    Vieille Hatte

    100,47

    10250

    102

    La Montagne

    31,73

    10390

    327

    Dessources

    32,20

    10815

    335

    Grande Source

    30,64

    7281

    237

    Diondion

    47,66

    12522

    262

    Bourg

    1,69*

    7740

    4579

    Total commune

    484

    108738

    224

    Source: RGPH 4

    *En tenant compte des zones périphériques (Beldorin, Coicou, Roger)

    Le taux brut de natalité est actuellement estimé à 30 pour mille et le taux de mortalité infantile à 91 pour mille dans le milieu rural.

    1- La répartition de la population

    La population de Jean Rabel s'est accrue de 1.58% l'an de 1950 à 1971, de 4.47% de 1971 à 1982 et de 1.78% de 1982 à 2003, date du dernier recensement de la population.

    Elle se répartit inégalement entre le milieu rural (92.88%) et le milieu urbain (7.1%). Avec les 92.88% de sa population qui se concentre dans les zones rurales, la commune de Jean Rabel détient le pourcentage de population rurale parmi les plus élevés du pays.

    Tableau 5: Accroissement de la population urbaine et rural de 1950 à 2003

    Secteur de Residence

    Population de Jean Rabel

    Recensement de 1950

    Recensement de 1971

    Recensement de 1982

    Recensement de 2003

    Effectif

    Densité

    Effectif

    Densité

    Effectif

    Densité

    Effectif

    Densité

    1,58

    52 km²

    4,47

    72 km²

    1,78

    159.09 km²

     

    7740

    230.49 km²

     
     
     
     
     
     

    Rural

    32191

    44360

    70822

    100998

    Commune entier

    33372

    46378

    75053

    108738

    Source: IHSI

    Selon le tableau, la population rurale, comparativement à la population urbaine, n'a connu qu'un léger accroissement de 1982 à 2003 (43%). Ceci s'explique par la forte migration qui s'opère continuellement des campagnes vers les villes, à cause des faibles possibilités d'emploi offertes par le milieu rural.

    2- Structure de la population par âge et sexe

    D'après les données du recensement de 2003, l'âge moyen de la population de Jean-Rabel était de 25,4, l'âge moyen des hommes 25,3 et celui des femmes 25,6. A noter une légère différence entre l'âge des femmes par rapport à l'âge des hommes ce qui confirme une tendance mondiale. Le même constat est fait en milieu urbain et rural (voir tableau ci-dessous).

    Tableau 6: Répartition de la population de Jean-Rabel par sexe en 2003

     

    TOTAL

    HOMMES

    FEMMES

    Général

    108738

    53497

    55241

    % sexe

     

    49%

    51%

    Age moyen

    25,4

    25,3

    25,6

    Urbain

    7740

    3526

    4214

    % sexe

     

    46%

    54%

    Age moyen

    25,0

    24,5

    25,4

    Rural

    100998

    49971

    51207

    % sexe

     

    49%

    51%

    Age moyen

    25,5

    25,4

    25,6

    Source: IHSI, RGPH 2003.

    B- Les conséquences de l'accroissement démographique dans la commune

    Les causes de l'accroissement démographique sont assez claires et connues et partant, sans intérêt pour nous de les évoquer même brièvement ici. Nous nous limiterons plutôt à en déterminer les conséquences dans la commune.

    1- Le problème des migrations vers l'etranger (Voir Les mouvements migratoires)

    L'accroissement démographique accéléré et la détérioration des conditions de vie des paysans de la commune expliquent l'ampleur du mouvement migratoire vers les pays voisins notamment les USA et la Republique Dominicaine.

    2- L'exode rural (Voir Les mouvements migratoires)

    D'une facon générale, la commune de Jean Rabel se depeuple au profit de Port-au-Prince et d'autres villes avoisinantes telles que Gonaives et Port-de-Paix.

    Ainsi, chaque année, massivement et de façon incontrolée, les paysans se déplacent vers les villes dans l'espoir d'y trouver un emploi, de bénéficier d'une meilleure éducation, ou de changer de situation économique et de monter dans l'échelle sociale, estimant que la vie rurale est inférieure à la vie urbaine. Les migrants sont en majorité des paysans sans terre, en âge de travailler et qui cherchent à survivre et à échapper à la misère qui sévisse dans les sections rurales.

    3.1.2. Les mouvements migratoires ou Urbanisation

    La dynamique migratoire de la population de Jean Rabel s'opère suivant trois dimensions d'échange ou de causalités socioéconomiques. Ces trois dimensions sont caractérisées par des mouvements internes et externes repartis suivant cette typologie: a) une migration interne ou intra communale, b) une migration externe ou extra communale, c) une migration vers l'étranger ou extra nationale.

    a) La migration interne

    Beaucoup de déplacements qui se font à l'intérieur de la commune de Jean Rabel ont leur raison d'être à cause d'une mauvaise distribution des services sociaux de base, mais aussi pour des raisons agro-écologiques. La première raison s'explique surtout par un manque ou absence dans certaines sections, de services de qualité et adaptés tels que: l'éducation fondamentale et secondaire. Cet état de fait contraint des habitants des sections à favoriser l'envoi de leurs enfants aux écoles du bourg, rarement dans une autre section, dans l'optique de trouver une formation de qualité, mais souvent dans le but d'avoir accès à une classe, un niveau d'étude qui n'existe pas dans leur habitation d'origine. A cet égard, il faut souligner que sur les sept sections communales de Jean Rabel, seulement trois ont accès au niveau d'étude secondaire. (Voir secteur éducation)

    Les raisons agro-écologiques s'expliquent par le fait que de manière périodique, des cultivateurs laissent leur zone d'habitation pour aller s'établir de façon temporaire dans une autre zone, afin de profiter de leur saison de culture. C'est le cas de plusieurs habitants: de la première section qui vont vers la 2ème pour la culture du maïs et du haricot. Les habitants de la 2ème vers la 1ère pour le sorgho et le haricot; de la 6ème vers Fonds Ramadou (7ème) et Laplaine (2ème) pour l'arachide, le maïs, le haricot; de la 3ème vers les 1ère et 2ème pour les cultures pré-citées; de la 7ème vers la 1ère pour le sorgho; de la 4ème vers Laplaine (2ème), Fonds Ramadou, Gros-sable (7ème) pour le haricot, le maïs et l'arachide; de la 5ème (Porrier) vers Bord-de-Mer, Gros-Sable, Fond Bayahonde, Colette pour la culture du maïs, du haricot et de l'arachide. Ceci révèle la diversité des terres et des cultures d'une zone à une autre. Il est à remarquer que la période de plantation de toutes ces cultures se situe entre septembre et novembre tandis que les récoltes se font en mars et en avril. Ces migrants, une fois cette période terminée, reviennent dans leur communauté initiale. A côté de ces migrations à caractères temporaires, il y a aussi, celles qui sont plus ou moins définitives dues à des situations socioéconomiques obligeant une partie assez importante de la population des sections à s'installer dans la partie urbaine de la commune, en témoignent les nouveaux quartiers (Nan Vincent, Morne Pasteur, Beldorin...) dans l'espoir de trouver de meilleures conditions de vie18(*).

    b) La migration vers d'autres communes et villes d'Haïti

    Il faut comprendre le mouvement migratoire extra communal sous deux angles: celui caractérisant le flux sortant et celui du flux entrant.

    Pour ce qui a trait aux migrants qui partent, ils vont par ordre de préférence et d'importance à Port-de-Paix, Port-au-Prince, Gonaives, Saint-Marc, Mare-Rouge, Anse-Rouge. Tous ces lieux d'accueil sont choisis pour des motifs communs, généralement: la précarité économique, le faible niveau des services de base. Cependant, des directions sont prises en lieu et place d'autres pour des raisons pratiques et de proximité, c'est le cas des zones des parties Est, Ouest et le Centre de Jean Rabel (1ère, 2ème, 5ème, 6ème, 7ème section, bourg) qui préfèrent se rendre premièrement à Port-de-Paix, puis dans une moindre mesure à Port-au-Prince. Ceux qui habitent les parties Est et Sud-est (3ème et 4ème section) de la commune ont une tendance à se rendre aux Gonaïves, à Port-au-Prince, à Saint-Marc et faiblement à Anse-Rouge tandis que les habitants de l'extrême pointe Ouest de la commune (6ème et 7ème section) entretiennent des relations privilégiées avec Mare-Rouge.

    Quant à ceux qui viennent s'installer à Jean Rabel, ils le font pour diverses raisons. Il y a ceux premièrement qui arrivent des communes avoisinantes et d'autres contrées du pays pour avoir épousé quelqu'un de la zone, d'autres qui sont là supposément à la recherche de conditions de vie supérieure19(*) telles que: la recherche d'un boulot, la pratique d'un petit métier. Un autre groupe est composé de fonctionnaires de l'Etat venant des communes voisines, du département et d'autres villes du pays telles: Gonaives, Cap-Haïtien, Cayes. Ce groupe est composé également de missionnaires de l'Eglise, de personnels locaux et expatriés travaillant pour le compte d'ONG et de projets.

    c) Migration vers l'extérieur

    L'émigration de la population de Jean Rabel vers d'autres pays a changé de proportion et de direction suivant plusieurs périodes de l'histoire de la commune. La première vague d'émigration se faisait surtout en direction de Cuba entre le début et le milieu du XIXème siècle20(*). On y allait surtout pour la coupe de canne à sucre (migration temporaire). La deuxième moitié du siècle passé a vu la montée d'une émigration vers les îles Bahamas, les côtes de la Floride, la République Dominicaine, Grentock et le Canada (migration définitive). Les principales causes de ces déplacements étaient surtout économiques, ainsi pour fuir une réalité socioéconomique difficile21(*), beaucoup de gens depuis la fin des années 70 jusqu'au début des années 90 avaient quitté la commune pour se rendre surtout vers les Bahamas et la Floride. Une proportion moins importante quittait la commune sous le régime des Duvalier et pendant la période du Coup d'Etat militaire de 1991 pour des raisons politiques. Ces vagues d'émigration en majeure partie illégale ne sont pas sans effet sur l'économie rurale qui a vu bon nombre de paysans de toutes les sections s'embarquer au Bord-de-mer et à Port-de-Paix sur de frêles embarcations. Adieu, la terre, la machette, la houe et les kombites! Souvent, comme des propos désespérés de paysans, qui n'ont pas eu la chance d'être acceptés dans les pays précités, tentent de le faire croire, il vaut mieux affronter la gueule du requin et la mer houleuse au lieu de mourir sur place, même à petit feu. A côté de ses aspects négatifs, on ne peut pas ignorer un apport considérable de ses émigrations sur l'économie locale. En effet, les membres des familles restées à l'étranger entretiennent des relations de solidarité avec leurs pairs restés au terroir, ainsi à défaut de grandes activités d'investissement, des transferts d'argent et de nourriture plus ou moins réguliers atténuent la misère de toute une frange de la population de plus en plus dépendante. Parmi ces migrants, la majeure partie ne revient jamais, cependant ceux qui vivent dans les contrées où l'hiver est rude reviennent au bercail pour y passer leur vieux jour.

    3.1.3. Désastres naturels

    Les catastrophes naturelles ont leur part de responsabilité dans l'appauvrissement de la population de la commune. Le passage des désastres ont brisé tout processus d'amélioration de la vie des paysans et occasionner de grands dommages au secteur agricole et à l'économie en général.

    a) Les inondations

    Les inondations22(*), dues à de fortes pluies, des cyclones ou des ouragans, sont très fréquentes dans la commune. Elles ont pour conséquences : la déforestation et la dégradation de l'environnement. Pendant les périodes d'inondations, des pertes en vie humaines et d'animaux, des pertes de maisons (des éboulements) et la formation de grosses ravines (surtout à Fond-Ramadou dans la 7ème section communale) sont enregistrés au niveau de la commune.

    b) Les sécheresses

    La commune a connu plusieurs fois la famine au cours de ces dernières années, à la suite de fréquentes périodes de sécheresse grave. Les sécheresses ont non seulement entraînés des pertes de vies humaines, mais occasionnés également l'exode massif des paysans.

    c) Les cyclones

    De violents ouragans et des cyclones se sont abattus sur la commune, toutes les quelques années, causant d'énormes dégâts dans le secteur agricole et entraînant pour la population rurale des pertes considérables sur le plan économique. Les cyclones ont non seulement détruit les cultures, les logements (aussi des maisons sont endommagées), mais provoqués également des pertes en vie humaine et d'animaux.

    3.1.4. Habitat et logement

    Les pauvres de la commune qui peuvent se prévaloir d'un logement ne vivent souvent que dans des maisons construites avec des matériaux de fortune, d'accès difficile, insalubres et dépourvues de tout service (eau potable, latrines, électricité...). Les maisons ne répondent à aucune norme (ensemble de constructions - souvent de véritables taudis - disposées de façon anarchique sur une superficie assez réduite - et sur des sites dangereux). Les constructions défient les normes qualitatives les plus élémentaires.

    On y rencontre différentes catégories de construction:

    1- La «caille - paille» (maison couverte en chaume dont elle est le plus répandue), sol en terre battue.

    2- Mur en matériaux recyclés (fer blanc, carton, plastique), sol en terre battue.

    3- Mur inexistant, toit en tôles ondulées ou en chaume et sol en terre battue.

    4- Mur en tôles ondulées, ou clissades, toit en tôles ondulées ou en chaume.

    5- Mur en roches, blocs ou planches, toit en tôles ondulées.

    6- Toit en béton, mur en roches ou blocs et sol en béton enduit de ciment.

    A l'intérieur de la maison se trouve habituellement une table avec quelque vaisselle: assiettes, tasses et verres; puis deux ou trois chaises et une grande cruche poreuse ou «canari», contenant de l'eau fraîche. Ensuite, on voit les nattes en feuilles de bananier tressées qui servent à dormir. Quelquefois aussi on y trouve un lit formé de quatre piquets fourchus, fixés en terre, sur lesquels on a placé des tringles en bois, destinées à soutenir un matelas bourré d'herbe fine ou de coton. Aussi, il y a une espèce de malle ou coffre pour serrer les habits, car les armoires sont inconnues à la campagne.

    Dans plusieurs localités, les logements qui sont dépourvues de tout service et qui sont construits sur des terrains marécageux, des pentes escarpés sont la cause de nombreuses maladies et des pertes en vie humaines pendant les périodes de cataclysmes naturels.

    3.1.5. Alimentation / Agriculture

    a) La lente expansion de l'agriculture

    La stagnation de l'agriculture a considérablement ralenti la croissance économique et le progrès social. Les obstacles, les blocages et les contraintes de développement sont en grande partie liés au problème agricole.

    Malgré le rôle primordial de l'agriculture dans la structure de la production de biens, ce secteur est très affecté par le manque de crédit, la faiblesse de l'encadrement technique, les difficultés de transport, le manque de moyens de conservation et la dégradation de l'environnement, tandis qu'une forte pression démographique aggrave la parcellisation des terres cultivables.

    Par ailleurs, le manque de système d'irrigation, l'enclavement de certaines localités, le morcellement des terres, la déforestation intense, la sécheresse, le manque d'accès aux intrants agricoles, l'émigration des jeunes (dynamiques et qualifiés) et surtout les fortes pentes, sont autant de facteurs de blocage qui freinent le développement de l'agriculture. Le secteur agricole dans cette zone est dépendant du système pluvial qui est souvent très irrégulier. Les cultures pratiquées ne sont pas adaptées aux conditions climatiques, les paysans devant produire des vivres pour s'alimenter dans les milieux non-adaptés à de telles cultures.

    Les perturbations économiques, politiques et sociales ont rendu l'économie de la commune incapable de produire suffisamment pour satisfaire la demande alimentaire de la population et à alléger la pauvreté.

    b) La dégradation et l'épuisement des sols et autres ressources naturelles

    De tous les dons de la nature, aucun n'est plus indispensable à l'homme que le sol23(*). Reposant sur le noyau rocheux de la terre, à des profondeurs variables, cette mixture complexe de matière animale, végétale et minérale est l'un des quatre éléments indispensables à la vie. En collaboration avec la lumière du soleil, l'air, l'eau, le sol nourrit toute vie végétale et sert de support à toute vie animale et humaine. Ainsi, elle est l'une des principales ressources de la vie en milieu rural.

    Les sols cultivables représentent une ressource rare. Chaque année, des centaines de tonnes de terres arables sont drainées vers la mer avec des effets négatifs sur la productivité de l'agriculture. Avec la dégradation continue des zones montagneuses, les plaines restent les seuls terroirs où une action concertée peut être menée en vue d'une augmentation de la production agricole qui déjà est largement déficitaire.

    Or, les pratiques culturales ne sont pas, en effet, de nature à maintenir la fertilité des sols, qualité nécessaire pour une production durable. D'une façon générale, l'usage continu de la terre, sans apport de matières organiques ou de fertilisants chimiques, contribue à une réduction sensible de sa capacité à produire des récoltes abondantes et à rentabiliser les investissements. Les inondations répétées, dues soient à des cyclones ou aux pluies de forte intensité, accentuées par l'état dégradé des bassins versants, facilite le lessivage des sols qui s'appauvrissent de plus en plus.

    D'un autre coté, l'irrigation mal pratiquée a rendu impropre à la culture une bonne partie des terres. L'insuffisance d'eau d'irrigation et l'inexistence ou la déficience du réseau de drainage empêchent le lessivage des sols qui s'appauvrissent de plus en plus.

    Les pauvres, qui sont les plus menacés par la misère et la faim, sont obligés, pour leur survie, à couper les arbres pour les vendre comme combustible ou les utiliser à des fins diverses (comme la production de la chaux). Le déboisement constitue, en ce sens, une menace majeure pour la commune. A mesure qu'augmente la population, les forêts subsistantes sont abattues à une cadence soutenue, afin de mettre aussi en exploitation de nouvelles terres agricoles. Il en résulte une irrégularité des pluies, une érosion et un assèchement des sols, des sources et des cours d'eau, ce qui réduit la productivité.

    Enfin, l'érosion des sols et la dégradation des terres dues à la déforestation, au pâturage excessif et à l'agriculture sont l'une des causes principales de désastres naturels et de sous-développement.

    c) Inégalité de la répartition des terres

    La terre est la base de production des denrées alimentaires et des matières premières. Elle est également source de revenus, d'emplois, de sécurité économique et de pouvoir pour la plupart des gens de la campagne. C'est pourquoi la recherche des causes principales de ces carences et pénuries de la production qui s'opposent à la satisfaction des besoins essentiels de la population renvoient sans équivoque aux structures agraires qui a existé dans le pays au cours de son histoire.

    En effet, il est indispensable de présenter une analyse systématique des différentes modes d'appropriation de la terre en suivant une méthode historique qui s'efforcera d'identifier, pour chacune des grandes périodes, les différentes facteurs qui vont conduire à la situation que nous connaissons aujourd'hui pour appréhender la réalité. Cette analyse nous amènera à mettre à jour un certain nombre de contradictions:

    - contradiction entre les aspirations des différentes catégories sociales en présence,

    - contradiction entre les aspirations de certaines catégories sociales et la politique agraire des dirigeants,

    - contradiction entre la politique agraire et la disponibilité des autres facteurs de production: la main-d'oeuvre, les capitaux, la technologie, le marché.

    I - Période Coloniale

    Pour cette période, on peut identifier trois modes de tenure:

    - les plantations,

    - l'arpent vivrier,

    - les terres occupées par les marrons.

    A. Les plantations

    Ce sont de grandes exploitations de plusieurs dizaines de carreaux, dont on peut citer les deux types dominants:

    § les plantations sucrières, dans les plaines,

    § les plantations caféières, dans les mornes;

    Elles sont fortement capitalisées, utilisent une main d'oeuvre servile et produisent pour le marché de la métropole.

    Ces plantations étaient propriétés de colons, parfois absentéistes, qui en avaient probablement reçu concession de l'administration royale; mais avec le temps, on verra apparaître un autre type de propriétaires: les «affranchis».

    Propriétaires du quart des esclaves et du tiers des propriétés, les affranchis possédaient des habitations et avaient des biens dans les villes et les bourgs24(*).

    B. L'arpent vivrier

    Comme son nom l'indique, c'était une parcelle de terre de la plantation, que le colon mettait à la disposition de l'esclave pour qu'il y cultive de quoi se nourrir; mais l'esclave produisait aussi pour le «marché aux nègres».

    Quelques colons, par contre, résolvaient le problème de l'alimentation de l'esclave en lui confiant un lopin de terre ... où, à ses rares heures de répit ... il avait le loisir de planter à sa convenance des vivres ou d'engraisser quelque volaille25(*).

    Une Ordonnance de 1785 rendra obligatoire les jardins à nègres: Il sera distribué à chaque nègre ou négresse, une petite portion de terre de l'habitation; pour être par eux cultivée à leur profit; ainsi que bon leur semblera26(*).

    C. Les terres occupées par les marrons

    Celles-ci échappaient au contrôle de l'administration royale; elles sont le lieu d'une organisation sociale qui vise à assurer l'existence de cette catégorie sociale en dehors de la société coloniale.

    D'autres groupe enfin rejoignaient les bandes organisées et partageaient - lorsqu'ils étaient acceptés - la vie des marrons établis dans les hautes montagnes, les vastes étendues de bois debout où l'on défrichait, à la mesure des besoins et des bras, des places à vivres autour desquelles s'organisait une communauté de nègres libres dépendant d'un chef et astreints à des règles déterminées27(*).

    En 1717 et 1785, une communauté marronne fait parler d'elle avec Santiague à sa tête28(*).

    II. Période Révolutionnaire

    C'est durant cette période que vont commencer à se manifester les contradictions mentionnées au début de cette partie et qui vont se perpétuer, avec des connotations diverses selon le moment, jusque de nos jours.

    A. Aspirations et comportement des différentes catégories sociales

    1. Les colons

    Dès le début de la révolte des esclaves, les colons ont commencé à fuir la colonie où leur vie était en danger. Il faut se rappeler qu'à la même époque, en métropole, une bonne partie de l'aristocratie avait émigré pour rallier le camp des royalistes et que ses biens avaient été mis sous séquestre par les gouvernements révolutionnaires.

    Beaucoup de colons avaient émigré, laissant un bon nombre de plantations. Ainsi, des 40000 blancs résidant dans la colonie, en restaient seulement dix-mille en 180029(*).

    L'exode des colons vers la France, vers la partie espagnole de l'île ou vers les îles voisines, spécialement à Cuba, avait laissé à l'abandon beaucoup de plantations30(*).

    L'émigration des colons se fit aussi vers les Etats-Unis; on connaît l'essor qu'a connu l'industrie sucrière en Louisiane grâce à l'arrivée de colons fuyant Saint-Domingue qui amena avec eux leurs capitaux, leur technologie et leurs «esclaves à talents».

    2. La nouvelle classe dominante

    Elle est formée:

    § des affranchis ou anciens libres, qui sont soit descendants de colons soit des esclaves libérés par leur maître ou ayant acheté leur liberté, quelque fois eux-mêmes propriétaires de plantations comme on l'a signalé plus haut;

    § de nouveaux libres, esclaves libérés par l'abolition de l'esclavage, qui ont pris la tête des révoltés.

    Il faut noter la formation d'une nouvelle aristocratie terrienne composée des grands généraux amis de Toussaint ayant reçu en récompense de nombreux hectares de terres30(*).

    Le mode de vie des colons, et en particulier des colons absentéistes, était un modèle pour les membres de la nouvelle classe dominante et l'est resté encore aujourd'hui. Cette propension à accaparer autant de terre que possible n'a donc pas seulement une motivation économique, elle est aussi inspirée par le désir de reproduire le mode de vie des colons.

    C'est ce qui explique la ruée sur les terres que l'on peut observer tout au long de notre histoire, des terres que bien souvent ils n'exploitent même pas, ou, quand ils le font, c'est plus souvent comme «propriétaire absentéiste», qui donne des parcelles en ferme ou en métayage à de petits paysans, que comme entrepreneur.

    3. Le nouveau prolétariat rural

    Il comprend:

    § la masse des esclaves libérés par l'abolition,

    Pour eux, l'abolition signifiait qu'ils n'auraient plus à travailler sur une plantation sous les ordres de quelqu'un d'autre. Dans toutes les sociétés esclavagistes d'Amérique, en devenant travailleur agricole, et pour bien marquer la rupture avec son ancienne condition, l'esclave se refusa de travailler dans les plantations31(*).

    L'arpent vivrier est probablement à l'origine de l'aspiration de l'ancien esclave à posséder son «jardin» qu'il cultive en fonction de ses propres besoins.

    § les anciens marrons

    C'est dans l'organisation sociale des marrons qu'il faut trouver l'origine du «lakou» qui a caractérisé le monde paysan durant tout le XIXème siècle.

    B. La politique agraire

    La politique des Commissaires Civils puis du Gouverneur Général Toussaint Louverture avait pour objectif le maintien du système de plantation qui avait fait la richesse de la colonie.

    Les diverses tentatives des commissaires français, à partir de 1793, et celles de Toussaint, à partir de 1801, en vue d'introduire un nouveau système de production et les conséquences de cette politique agraire ont caractérisé la période révolutionnaire dans cette région. Au fond, les mesures ou lois de 1793 et de 1801 étaient une tentative visant à satisfaire l'autorité politique, les besoins et les intérêts antagoniques des planteurs, d'une part, et des masses libérées, d'autre part. Selon le «système portionnaire», le producteur, c'est-à-dire l'ancien esclave, avait droit à une partie de la production (le quart), et était obligé de rester sur la plantation32(*).

    Dans le but de maintenir la valeur des terres abandonnées et mises sous séquestre, Sonthonax prit des mesures pour préserver les plantations et envisagea l'organisation d'une administration centrale qui contrôlerait l'accaparement des terres. Cependant, sous la pression des affranchis, qui se sentaient menacés par cette mesure, on dû adopter le système de bail à des particuliers33(*).

    Parmi les mesures visant à assurer le maintien de l'intégrité des plantations on peut citer:

    § L'interdiction de transactions pour des superficies inférieures à 50 carreaux,

    § L'interdiction de se mettre à plusieurs pour entrer en possession d'une plantation.

    Conformément à la formule de Sonthonax, Toussaint Louverture interdit par le décret du 7 mai 1801 de passer devant notaire des actes de vente de propriété de moins de 50 carreaux34(*).

    Mais, comme le fait remarquer Suzy Castor, il ne suffit pas de la terre pour faire marcher une

    plantation. L'organisation de la production manufacturière à Saint-Domingue, exigeait de grands investissements, une nombreuse main-d'oeuvre, un développement technologique et

    l'accès à un vaste marché35(*). Or le départ des colons avait fait perdre une bonne partie des autres facteurs. Par ailleurs, les blancs esclavagistes, fuyant la tempête révolutionnaire, emportèrent leurs connaissances et expériences administratives et technologiques...Durant la première étape de la révolution, ils purent démonter les ateliers, emporter leurs biens et même leurs esclaves. Il fallut affronter un «manque de cadres économiques». De plus, à partir de la rébellion des esclaves et la proclamation de la liberté générale, l'existence des plantations dépendaient du maintien des anciens esclaves dans les habitations où ils prêtaient leur service36(*).

    Pour assurer que les plantations trouveront la main d'oeuvre nécessaire on aura recours au «système portionnaire»: Est établi le système portionnaire qui signifie qu'après la déduction des impôts sur la totalité de la production, on divise le reste en trois portions égales, les deux tiers reviennent au propriétaire et le tiers restant est partagé entre les cultivateurs37(*).

    III. Période Nationale

    D'une manière générale, on s'accorde pour dire que la tenure foncière est caractérisée par la coexistence de deux grandes catégories: les terres de l'Etat et les terres appartenant à des privés, lesquelles peuvent être divisées en terres de «grandons38(*)» et terres en appropriation paysanne.

    Pour Gérard Pierre Charles39(*), la structure agraire, du point de vue de la distribution de la terre, peut être caractérisée comme un mélange hybride de quatre formes de propriété précisément limitative d'un développement économique équilibré:

    1. Le latifundisme d'Etat provenant des origines de la nation;

    2. Le latifundisme privé, étroitement lié à un cadre politique de favoritisme;

    3. Le minifundisme né de contradictions à la fois économiques, démographiques et juridiques en vigueur depuis un siècle et demi;

    4. L'économie de plantation introduite par le capital étranger, spécialement dans des buts de lucre et en fonction des nécessités du commerce international.

    A. Constitution du Domaine Privé de l'Etat

    La constitution du domaine privé de l'Etat est l'oeuvre du premier chef du nouvel Etat, Jean-Jacques Dessalines.

    ...la loi du 2 Janvier 1804, les constitutions de 1805 et de 1806 avaient versé dans le patrimoine national tous les domaines qui, avant la proclamation de l'Indépendance, appartenaient de fait à la France40(*).

    L'Arrêté du 2 Janvier 1804 annule tous les actes de vente, de donations et de beaux-à-ferme en faveur des personnes aptes à résider dans l'île41(*).

    L'Arrêté du 20 Février 1804 résilie les beaux-a-ferme42(*).

    Aujourd'hui, on dit encore que l'Etat est le plus grand propriétaire foncier, même s'il n'a aucune donnée précise sur l'étendue et la localisation de son domaine.

    B. Constitution des grands domaines

    1. Leur origine

    On peut considérer que la constitution des grands domaines a, au départ, cinq sources.

    1. Les plantations abandonnées par les colons et qui faisaient objet de la convoitise de la nouvelle classe dominante.

    Le 2 Janvier 1804, Déssalines prend un décret déclarant: biens de l'Etat, toutes les propriétés ayant appartenu à des blancs français. Etaient considérées comme nulles toutes les transactions foncières entre Haïtiens et Français qui datent de la période 1802-1804. En effet, ces derniers, caressant le projet de revenir et de reprendre les propriétés, avaient signé pas mal de faux papiers avec certains Haïtiens.

    Face à cette situation, Dessalines décide la vérification des titres de propriétés et prend un décret en date du 24 Juillet 1805 autorisant les fonctionnaires du domaine national à commencer les opérations de vérification. L'Empereur distribua un certain nombre d'habitations aux hauts dignitaires du régime, et afferma les autres aux plus offrants enchérisseurs43(*).

    2. Les plantations qui, déjà durant la période coloniale, étaient propriété des affranchis.

    3. Les plantations de la nouvelle aristocratie terrienne ayant émergé durant la période révolutionnaire.

    4. Les «dons nationaux» accordés à des généraux par les premiers chefs de l'Etat: Dessalines, Christophe, Pétion, Boyer, ce qui représente une poursuite du cas précédent.

    Il est intéressant de signaler que la politique de Christophe, avec la création de sa noblesse, répondait bien aux aspirations aristocratiques de la classe dominante; il faut cependant ajouter qu'avec ses règlements il assurait que ces «nobles» feraient effectivement fructifier le don reçu.

    5. Les baux à ferme sur des terres de l'Etat accordés le plus souvent à des personnes proches du pouvoir.

    2. Les mesures conservatoires

    Dans une tentative de poursuivre la politique des différentes administrations de la période révolutionnaire, les premiers gouvernements ont pris des mesures visant à préserver l'intégrité des plantations et à leur assurer la main-d'oeuvre nécessaire.

    Le code rural Déssalinien est celui de Louverture revu, corrigé et augmenté. Il maintient le système des ateliers et la militarisation de l'agriculture. Le caporalisme agraire, formule substituée à l'esclavage, permettra d'obtenir de l'ouvrier agricole le maximum de rendement44(*).

    Le dernier a avoir pris des mesures légales allant dans ce sens est Jean-Pierre Boyer. ...il élaborait la loi du 20 Mars 1825 interdisant le morcellement des propriétés rurales...Le quota fixé pour une propriété est de 50 carreaux, il n'était pas permis aux gens de faibles conditions économiques de se mettre en commun pour acheter le minimum exigé45(*). Le Caporalisme Agraire est institutionnalisé par la promulgation du fameux Code Rural de 182646(*). La loi du 1er Mai 1826 abroge tous les actes antérieurs sauf l'arrêté du 30 Décembre 1809, ayant accordé des dons nationaux à titre civil ou militaire47(*). Cette dernière mesure visait probablement à éliminer les distributions de petites parcelles faites par Pétion.

    3. Généralisation de l'absentéisme

    En dépit de toutes ces mesures, l'économie de plantation ne put pas être reconstituée et les grands propriétaires devinrent des «grandons absentéistes».

    Les particuliers, ranges dans la catégorie des grands propriétaires demeurent le plus souvent des absentéistes, des non-Agriculteurs qui sont peu enclins à financer des améliorations foncières. Solidaires du pouvoir, ils manifestent le même comportement que l'Etat vis-à-vis de la terre. Ils tiennent de vastes étendus qui représentent pour eux des attributs de puissance ou de prestige. Ils laissent la fructification du fonds à la merci des gérants, des fermiers, des métayers

    moyennant le paiement de la rente. Cette pratique utilisée par les grands propriétaires est assortie d'une série de variantes et se caractérise par l'insécurité qui paralyse l'exploitant en absence de la motivation qui transformerait en agent économique, générateur de progrès. Propriétaires, fermiers, métayers sont impliqués au gré des rapports de production dans la reproduction d'un modèle d'entreprise non économique48(*).

    Un peu plus haut, le même auteur avait déjà abordé le problème des rapports de production entre les propriétaires, d'une part, et leurs fermiers et métayers d'autre part ...cette question fondamentale à savoir la dépendance quasi personnelle qui unit le paysan aux propriétaires terriens49(*).

    C'est ce qui a permis à Gérard Pierre-Charles de parler de «société féodale». Gérard Pierre-Charles, dans son livre L'économie Haïtienne et sa voie de Développement (1965), présente la mutation opérée à cette époque comme le passage de la société esclavagiste à la société féodale, caractérisée par l'existence de grandes propriétés exploitées par des serfs attachés à la glèbe, les célèbres «deux moitiés»50(*).

    Il faut signaler cependant que Pierre-Charles n'est pas le premier à avoir parlé de régime féodal pour caractériser cette période; c'est lui qui cite51(*) ce passage de Louis Joseph Janvier: «En Haïti, de 1821 à nos jours, le paysan avait été le sacrifié. Surtout dans les plaines, sur les anciennes habitations sucrières, cotonnières et indigotières, le paysan eut à subir les conséquences d'un véritable régime féodal. La terre avait été un instrument de domination entre

    les mains des grands propriétaires, militaires ou fils de militaires, comme il en fut en Europe au Moyen Age»52(*).

    4. Retour des grandes exploitations

    A. Reprise de l'industrie sucrière

    Durant le dernier quart du XIXème siècle, on va assister à un retour des grandes exploitations. Il est dû à une reprise de l'industrie sucrière.

    Toutefois, un leitmotiv central semble se dégager de la politique agraire de la fin du XIXème siècle; c'est ce qu'on pourrait appeler le «mythe industriel». Pour ressaisir l'exploitation de ces grands domaines et en tirer encore largement profit, l'aristocratie, tout imbue de la révolution économique européenne, essaie d'implanter des «usines centrals» dans le pays. Ce qui explique l'intérêt particulier que revêt «la question des sucres», la revalorisation de la spéculation sucrière par le capitalisme industriel53(*).

    C'est ainsi que les usines sucrières de O'Gorman, propriété du Général Brennor Prophète, celle de Château-Blond, propriété de Tancrède Auguste, les usines de Jean Gille et de Bayeux s'installe dans l'Ouest et le Nord du pays54(*).

    B. Arrivé du capital étranger

    La pénétration du capital étranger associée à la création de grandes exploitations a commencé avec le 20ème siècle. Mais c'est avec l'occupation nord-américaine que le mouvement va prendre de l'ampleur. Des dispositions légales vont faciliter l'arrivée des capitaux nord-américains: on a tout d'abord, la constitution «imposée» par l'occupant au début de la présidence de Dartiguenave: Le droit de propriété immobilière est accordé désormais aux étrangers55(*) puis la loi du 22 Décembre 1925 sur les bails à long terme56(*) et enfin la loi du 28 Juillet 1929 qui autorise la vente de terres agricoles à des compagnies nord-américaines57(*).

    Après l'occupation, et à la faveur de l'engagement d'Haïti aux côtés des alliés, on a eu le contrat passé entre le Gouvernement Haïtien et la Société Haïtiano-Américaine de Développement Agricole (SHADA).

    C. Constitution de la propriété paysanne

    Comme les grands domaines attribués au «grandons», la petite propriété paysanne s'est constituée à partir des terres de l'Etat, soit par des dons ou des concessions, soit par des acquisitions, mais très souvent, par occupation pure et simple.

    On a pris l'habitude d'opposer la politique agraire de Christophe, création de grands domaines attribués à des généraux anoblis, et celle de Pétion, qui a distribué des parcelles plus modestes aux sous-officiers et soldats. Il semble du reste que Boyer, avec sa loi du 1er Mai 1826, ait voulu annuler ces distributions58(*). Avec la disparition de Pétion, son successeur vint restaurer dans tout le pays les conceptions et pratiques d'une classe féodale déjà fortifiée, par l'accaparement antérieur de la terre et du pouvoir politique59(*).

    Mais les tenants du pouvoir ont bien fini par se rendre compte qu'il ne pouvaient s'opposer au désir des anciens esclaves d'acquérir des terres, ils se sont donc évertuée à limiter les dégâts en prenant des mesures pour limiter le morcellement à l'extrême.

    Le premier sera Alexandre Pétion: ...il faisait voter la loi du 30 Avril 1807 stipulant que nul citoyen ne pourrait acquérir que d'au moins 5 carreaux60(*).

    Un demi-siècle plus tard, on aura les mesures de Fabre Nicolas Geffrard: ...il faisait élaborer un nouveau code rural et une nouvelle loi, celle du 4 Août 1862, venait arrêter le morcellement. En effet l'article 2 stipulait que les biens du domaine national seront vendus par portions de cinq carreaux61(*).

    Quelques années plus tard Nissage Saget abaissait la superficie minimum: ...par la loi du 12 Juillet 1870, il faisait donation de 3 carreaux de terres à chacun des militaires cantonnés dans les campagnes du Sud62(*).

    Le président Salomon liait les concessions à la culture de denrées d'exportation: ...le 26 Février 1883, il faisait voter une loi portant concession conditionnelle des terrains du domaine national... «Tout citoyen qui s'engagera à cultiver les denrées suivantes: café, canne à sucre, coton, cacao, tabac, indigo et tout autre produit d'exportation, aura droit à une mise en possession de trois à cinq carreaux de terre du domaine public63(*)...

    Il faudra attendre le départ de l'occupant pour voir un gouvernement, en l'occurrence celui de Sténio Vincent, prendre des mesures en faveur de la petite propriété paysanne. La loi du 3 Septembre 1932 ou du 12 Septembre 1934 (?) sur le «bien rural de famille» accordait en toute propriété une superficie qui ne pouvait dépasser 5 hectares et devait être planté dans la proportion de 50% en denrées d'exportation64(*).

    La loi du 9 Mars 1938 sur les colonies agricoles65(*) présente un cas particulier. En 1938, le gouvernement haïtien organisa une expérience de colonisation intérieure avec les ouvriers agricoles, qui avaient échappé aux tueries organisées...6 mille personnes (1.425 familles) furent engagées pour la culture de ces terres...chaque famille reçut une propriété de 2,50 à 3 ha...chaque parcelle devait produite à la fois des vivres alimentaires et des articles d'exportation66(*).

    IV. La situation actuelle

    Quand on parle de la situation actuelle il faut distinguer l'aspect foncier et les rapports de production.

    A. L'aspect foncier

    Le foncier reste caractérisé par une situation des plus confuses, résultant de la perpétuelle compétition pour la possession de la terre, et qui se traduit dans l'insécurité aussi bien du propriétaire que de l'exploitant.

    D'une façon générale, on peut dire que la question agraire, dans le système actuel, se résume par l'insécurité de la tenure foncière, surtout dans le milieu rural67(*).

    Cette insécurité touche toutes les catégories. Le grandon voit sa possession contestée par des paysans, qui affirment qu'il s'agit de terre de l'Etat, ou par des compétiteurs qui présentent d'autres titres de propriété. Le moyen ou petit propriétaire n'a souvent pas de titre de propriété ou occupe des terres qui sont dans l'indivision. Les fermiers de l'Etat ne sont le plus souvent pas en règle avec la DGI. Les «sous-fermiers» de l'Etat, enfin, sont à la merci du «fermier en titre».

    B. Les rapports de production

    La situation n'a pas beaucoup évolué depuis l'apparition de la catégorie des grandons absentéistes. Le système des «de moitié», avec différentes variantes, est toujours en vigueur, autrement dit, les rapports de production sur les grands domaines sont toujours de type quasi-féodal.

    § Le cas de l'Artibonite

    La situation dans la plaine de l'Artibonite est un bel exemple de ce qui se passe dans l'ensemble du pays, avec l'avantage pour le chercheur d'offrir un champs d'observation bien défini dans le temps et dans l'espace.

    Du jour où le Président Dumarsais Estimé a pris la décision de construire un système d'irrigation qui arroserait la vaste plaine de l'Artibonite, cette région n'a cessé d'exciter la convoitise d'individus de tous acabits, désireux de profiter de l'aubaine offerte par la décision présidentielle, en accaparant les terres dont la valeur agricole serait plus que décuplée par l'irrigation. Tous les moyens leur étaient bons pour arriver à leurs fins: acquisitions entachées de délit d'initié, fabrication de faux titres de propriété, et si nécessaire, utilisation de la force.

    C'est ainsi que, en dépit du fait que le Président Estimé ait ordonné que soit fait le relevé cadastral de la région, elle est restée, pendant un demi-siècle, le théâtre de conflits fonciers, souvent d'une extrême violence, accompagnés de manoeuvres de corruption en vue d'obtenir des décisions en leur faveur de la part de l'appareil judiciaire, ou de se faire prêter main forte par les Forces Armées d'Haïti.

    La seule période relativement calme fut celle durant laquelle l'Artibonite vivait sous le régime de la loi dite «d'exception» du 28 Juillet 1975 qui autorisait l'Administration Générale des Contributions à «prendre possession au nom de l'Etat Haïtien, et sans l'accomplissement préalable d'aucune formalité, de toute étendue de terre de la Vallée de l'Artibonite, réputée être ou avoir été, à l'origine, propriété de l'Etat irrégulièrement sortie de son patrimoine»68(*).

    En 1986, le gouvernement du général Namphy abolissait cette loi et invitait les «grandons» à revenir récupérer «leurs terres», et les conflits reprirent avec d'autant plus de violence que nous étions dans une période d'instabilité politique, or on sait que chaque changement politique provoque des changements au niveau de la possession des terres, les protagonistes faisant également jouer leurs relations politiques.

    En Janvier 1995, devant la recrudescence des conflits, le Président de la République prit un arrêté s'inspirant de la loi du 28 Juillet 1975, mais cette fois-ci c'est l'ODVA qui était autorisé «à prendre, provisoirement, possession, et sans l'accomplissement préalable d'aucune formalité, de toute étendue de terre litigieuse située dans la Vallée et la Plaine de l'Artibonite»69(*).

    Une semaine plus tôt, le Premier Ministre avait pris un arrêté créant «une Commission Gouvernementale de cinq membres dont le mandat est de se pencher, d'une façon particulière, sur la situation explosive qui prévaut dans certaines zones de la Plaine et de la Vallée de l'Artibonite, et de faire, le cas échéant, à l'exécutif des recommandations en vue de l'adoption de promptes mesures pouvant ramener la paix et la sécurité dans cette région»70(*).

    Cette commission, à notre connaissance, n'a jamais fonctionné; quant à l'arrêté présidentiel, il n'a connu qu'une seule tentative de mise en application, à l'occasion d'une recrudescence d'affrontements sur la ferme de Bertrand St Ouen, dans la localité de Bocozelle, la 5ème section communale de St Marc, mais l'ODVA n'a jamais été en mesure de mettre en oeuvre les décisions prises alors et la ferme est restée plusieurs mois sous le coup d'une «quarantaine».

    Entre temps, l'INARA était créé par arrêté du Président de la République71(*) et son Directeur Général nommé72(*). Dès lors les appels à venir mettre fin aux conflits dans l'Artibonite se sont succédés. C'est ainsi que le Directeur Général de l'INARA intervint dans le cas du conflit de Trois Bornes, dans la Commune de Desdunes, pour arriver à une solution négociée entre les représentants du grandon et les fermiers; il donna également son feu vert aux paysans de Bocozelle qui désiraient reprendre le travail sur la ferme de Bertrand St Ouen.

    Cependant, en absence d'une loi sur la réforme agraire, l'INARA ne disposait pas des instruments légaux lui donnant autorité pour intervenir. Finalement, après de longues discussions avec le Ministre de l'Agriculture d'alors, le Directeur Général obtint un arrêté présidentiel, inspiré de celui du 13 Janvier 1995, mais autorisant l'INARA «à prendre possession provisoirement et sans l'accomplissement préalable d'aucune formalité, de toute étendue de terre litigieuse située sur le territoire de la République et réputée être ou avoir été à l'origine bien vacant et/ou propriété de l'Etat»73(*).

    Bien sûr, il ne s'agissait là que d'une solution provisoire, en attendant le vote d'une loi sur la réforme agraire; mais le pouvoir lavalas, selon sa mauvaise habitude de ne pas mener ses actions jusqu'à leur terme, n'a jamais pris la peine de présenter au Parlement le projet de loi

    cadre, préparé par l'INARA, avec le concours de juristes mis à notre disposition par la Mission Française de Coopération, et transmis, à plusieurs occasions, au Ministre de l'Agriculture et au Premier Ministre.

    d) Le fractionnement des petites exploitations agricoles

    La nature des exploitations agricoles, qui sont non seulement petites mais dispersées en de multiples lopins de terre, représente un autre handicap.

    Le morcellement des terres issu du partage des grandes propriétés laissées en héritage par les grands parents explique en partie la structure agraire. Les exploitations varient de 0.5 à 1.8 ha/1.4 carreau. Ceci explique en grande partie le déboisement et la tendance des petits exploitants à produire surtout des vivres au détriment des denrées.

    Tableau 7: Superficie et distribution des propriétés

    Groupe

    %

    Moy. (ha)

    Moyen

    Etendue en hectares

    Etendue en carreaux

    1

    21

    0.3

    0.2

    0.13-0.39

    0.10-0.30

    2

    20

    0.6

    0.5

    0.40-0.71

    0.31-0.55

    3

    16

    1.0

    0.7

    0.71-1.28

    0.55-0.99

    4

    23

    1.6

    1.2

    1.29-2.26

    1.00-1.75

    5

    20

    5.4

    4.3

    2.26-65.79

    1.75-51.00

    Total

    100

    1.8

    1.4

     
     

    Source: ECVH, VOL II, p.262

    Le petit paysan vit essentiellement des produits de son domaine familial, mais la taille de son exploitation est tellement insignifiante que, dans la plupart des cas, elle ne suffit pas à l'entretien de sa famille, qui comprend en moyenne cinq membres.

    En règle générale, le paysan montre une certaine répugnance à révéler - même approximativement - la superficie de ses terres.

    Par ailleurs, les informations fiables sur la tenure des terres dans la commune, qui sont occupées soit par des propriétaires, des fermiers, des métayers ou des locataires des terres de l'Etat, ne sont pas disponibles.

    e) Les effets indirects de la modernisation et la technicisation de l'agriculture

    Aux problèmes sus-mentionnés, il faut tenir compte également du caractère archaïque de l'agriculture. Dans le domaine de l'outillage, l'indigence technique se manifeste au plus haut point dans les localités rurales de la commune. Pour cultiver leur terre, les paysans utilisent jusqu'à présent les outils oratoires traditionnels comme la houe, la serpette, la machette, etc... Dans certains cas les travaux sont effectués à mains nues.

    Par ailleurs, la pratique du brûlis est très répandue, malgré sa prohibition par les agronomes. La charrue et tout autre instrument de trait sont rarement utilisés. Il en est de même des semences et des plants sélectionnés, du bétail amélioré, du fumier de ferme, d'engrais et de pesticides. Les insectes nuisibles et les maladies des plantes ne sont guère contrôlés.

    Abandonné à sa seule routine, le paysan ne possède aucune des précieuses notions qui lui permettraient de tirer meilleur parti du sol, en l'amendant selon les exigences de sa constitution, en y ajoutant telle variété d'engrais, tels éléments chimiques ou autres, que telle culture spéciale rend souvent nécessaires.

    En fait, le paysan rural généralement illettré n'a aucune aide technique. Il ne reçoit aucune formation, aucune orientation susceptibles d'améliorer son savoir-faire. Bien entendu, il existe des agronomes, des techniciens et des agents agricoles à travers la commune, mais leur impact sur l'amélioration des techniques de production est négligeable, eu égard à l'insignifiance de leur nombre. De plus, ils n'arrivent même pas à couvrir toutes les sections communales. Les habitants sont obligés de les rencontrer dans leur base pour un simple conseil. De ce fait, la formation des paysans est loin d'être une réalité.

    3.1.6. Éducation

    L'éducation est l'une des variables caractéristiques du sous-développement et de la pauvreté. De ce fait, l'information sur le niveau d'instruction d'une population est d'une importance fondamentale à la définition de toute politique économique, sociale ou démographique de lutte contre la pauvreté.

    L'éducation est, à Jean Rabel comme dans la plupart des communes, l'une des premières priorités des familles, en termes de préoccupations et de poste de dépense; c'est également le premier secteur d'emploi salarié permanent dans une zone où la plupart des activités économiques sont informelles, ce qui renforce son importance aux yeux de la population. Elle est le résultat dans la commune d'une multitude d'initiatives locales, foisonnantes, qui témoignent de son importance et de la volonté existante pour la développer, mais laissent malheureusement une impression d'inefficacité par rapport aux efforts déployés...

    La situation de l'éducation dans la commune est très critique. Les catégories sociales défavorisées et les populations des sections communales sont laissées pour compte par le système qui n'arrive pas à faire face à la demande. Ainsi, le taux d'analphabétisme des plus de 15 ans n'atteignait que 55% en 2003. Le taux de scolarisation pour l'enseignement primaire est de 96% en considérant les enfants de 6 à 17 ans et de nombreux élèves de plus de 17 ans des sections rurales. De nombreux enfants des localités rurales reculées n'ont pas encore accès à l'éducation de base. Parallèlement la qualité et l'éfficacité de l'éducation offerte est très faible avec seulement 5% des élèves qui atteignent la sixième année de l'école primaire.

    Au niveau des infrastructures scolaires, la majorité des écoles nationales, excepté au bourg, sont logées dans de vieilles bâtisses aux toits de paille. Elles appartiennent soit à des notables qui les louent pour des sommes modiques, soit à des conseils communautaires qui les mettent à disposition. Un problème particulier est posé en saison pluvieuse par l'état déplorable des toitures.

    Par ailleurs, le niveau d'équipement est faible pour la plupart des écoles, exception faite des 2 EFA, et de quelques écoles soutenues par des missions religieuses: absence de matériel didactique, mobiliers défectueux, absence de bibliothèque. La plupart ne disposent ni de latrines ni d'eau potable.

    Aussi, les ratios élèves/professeurs74(*), professeurs/salles de classe75(*) et élèves/salles de classe76(*) permettent de mettre en doute la qualité de l'enseignement qui y est dispensé. En effet, il n'est pas rare de rencontrer dans les sections communales plusieurs classes se réunissent dans une seule salle. Dans de telles écoles, on peut imaginer facilement le niveau d'encombrement et l'intensité des bruits qui ne peuvent que nuire à la transmission du savoir.

    Alphabétisation

    Malgré ses faiblesses, la commune comprend 35 centres d'alphabétisation, dont 7 privés, 16 communautaires et 14 publics. Les centres privés sont gérés par des missions protestantes ou ONG, tandis que les communautaires le sont par des missions catholiques. Les centres publics ont tous été mis en place en 2000-2001 avec le retour au pouvoir de Jean Bertrand Aristide, sous le nom d'alpha resto.

    Cependant, il n'y a pas de bureau d'alphabétisation au niveau de la commune, et les rares matériels pédagogiques disponibles sont stockés au Bureau Agricole Communal.

    Au niveau de la répartition géographique, notons que les 4ème et 5ème sections ne disposent pas de centres d'alphabétisation. Le secteur souffre d'une grande inconstance dans l'ouverture des centres, qui sont très dépendants de responsables extérieurs.

    Les niveaux de non-scolarisation sont jusqu'à présent très élevés et représente un handicap majeur au développement humain étant donné que la population de la commune est majoritairement jeune. Les causes de la non-fréquentation scolaire sont multiples dont les plus significatives sont l'inadéquation entre le coût de l'éducation et la situation économique des ménages, la carence d'infrastructures scolaires accessibles, les habitudes culturelles (les filles ne vont pas à l'école ou encore le premier ou le dernier enfant qui doit s'occuper des terres).

    Ailleurs, la défaillance de l'offre et de la demande explique en grande partie la non-fréquentation scolaire des jeunes de la commune.

    Enseignement pré-scolaire

    On dénombre 89 centres préscolaires dans la commune, dont la plupart sont intégrés à des écoles primaires. Les enfants fréquentant le préscolaire représentent 45% de la population d'âge préscolaire (3-6 ans). Plus encore qu'au niveau de l'enseignement primaire, les centres sont privés (7% de centres publics seulement, dans le bourg, la 1ère et la 3ème section).

    Malgré la relative fort taux de fréquentation du préscolaire, la répartition des centres préscolaires entre les sections est très disparate; le tableau ci-dessous montre les lacunes particulières de la 4ème et la 6ème section, et dans une moindre mesure de la 5ème et 7ème section. On remarque également que le bourg et la 3ème section accueillent plus d'élèves que le nombre d'enfants y résidant, ce qui montre que des enfants des sections avoisinantes y sont scolarisés. Au bourg, on peut considérer qu'au minimum ? des enfants scolarisés en préscolaire proviennent des sections proches.

    Tableau 8: Répartition géographique des centres préscolaires

     

    Superficie (km²)

    Superficie moyenne couverte par un centre

    Effectif élèves en 06-07

    Population des 3-6 ans

    Taux de scolarisation

    1ère

    136

    4,9

    860

    1899

    45%

    2ème

    105

    6,6

    697

    1545

    45%

    3ème

    100

    4,8

    827

    763

    108%

    4ème

    32

    32

    40

    719

    6%

    5ème

    32

    10,7

    82

    749

    11%

    6ème

    31

    31

    35

    504

    7%

    7ème

    48

    8

    130

    867

    15%

    Bourg

    2

    0,2

    714

    483

    148%

    Commune

    484

    5,4

    3385

    7529

    45%

    Sources: enquête de terrain pour les effectifs et recensement 2003 RGPH pour la population

    Enseignement primaire

    L'école primaire est le seul service disponible dans toutes les sections de la commune. Ainsi, un peu plus d'un enfant sur deux va à l'école primaire dans la commune.

    Le phénomène de la scolarisation tardive identifié depuis les années soixante-dix est toujours très présent dans la commune. D'une manière générale, la scolarisation tardive des jeunes enfants de la commune s'explique par la difficulté économique des parents qui retarde l'insertion d'une partie des enfants dans le système scolaire et l'inaccessibilité des écoles qui oblige les parents a attendent que les enfants soient suffisamment autonomes pour parcourir distance entre leur domicile et l'établissement scolaire.

    Cependant, l'école primaire présente de nombreux problèmes tant du point de vue de la qualité de l'enseignement que du nombre d'accès à une éducation gratuite. En effet, même si le taux de scolarisation primaire augmente mais elle n'a pas été accompagnée d'une amélioration de la qualité et le nombre d'institutions publiques est si faible qu'à peine 20% des enfants démunis ont accès à une éducation gratuite.

    Enseignement secondaire et 3ème cycle

    Au niveau de la scolarisation au 3ème cycle secondaire, les taux sont nettement plus bas (bien que nous ne disposions pas de chiffres réels sur la commune). Cette situation s'explique, d'une part, par l'insuffisance des établissements secondaires (La commune dispose aujourd'hui de 19 établissements enseignant de la 7ème à la 9ème Année fondamentale, et de 5 poursuivant de la 3ème au baccalauréat), mais aussi et surtout aux contraintes additionnelles d'accès à l'éducation secondaire: coût (4 nationales, 2 communautaires et 11 privées) et l'éloignement des infrastructures scolaires (5 dans la 1ère section, dont 2 nationales et 3 privées; un établissement national à la 2ème section; un établissement communautaire à la 3ème section; et les autres établissements se trouvent au bourg dont une nationale, une communautaire et 8 privées).

    Ces chiffres démontrent que les écoles secondaires se concentrent beaucoup plus dans le bourg que les sections communales, ce qui rend leur accès plus difficiles aux enfants des sections communales. Après les études primaires, ils ont le choix entre deux alternatives: arrêt des études classiques ou migration (vers le bourg ou encore plus vers la capitale ou vers les villes régionales la plus proche).

    Enseignement professionnel

    La commune dispose de 19 centres professionnels pourvus de 78 professeurs (dont 36% de femmes) pour 568 élèves (soit en moyenne 7 élèves par professeur). Deux de ces écoles travaillent avec le programme élaboré par l'INFP (Institut National de Formation Professionnelle): l'Ecole Professionnelle Béthel et celle de Martin Porrès, toutes deux au bourg, associées à des écoles classiques et soutenues par des missions religieuses (baptiste et catholique respectivement). Aucune des écoles professionnelles n'est publique, ce qui constitue un handicap pour la population pauvre de la commune.

    Au niveau de la répartition géographique, il faut noter que les 4ème et 6ème sections sont totalement dépourvues de centres professionnels. Les institutions les plus importantes sont situées au bourg.

    Les enseignements prodigués par ces 19 centres passent par l'art ménager en premier lieu (pâtisserie, broderie, coupe, art floral) pour 17 d'entre eux, puis les métiers artisanaux traditionnels (maçonnerie, ébénisterie) et parfois modernes (plomberie, électricité). Pour ces métiers artisanaux, 3 centres leur sont réservés (1ère et 3ème section), et 7 autres partagent cet enseignement avec celui de l'économie domestique. Les matières disciplinaires classiques sont parfois enseignées en parallèle (français, mathématiques, arithmétique, anglais) ainsi que les cours de savoir-vivre. Deux des écoles fournissent enfin des cours de musique, dont l'une est spécialisée dans ce domaine (Porrier, 5ème section), et 2 écoles du bourg fournissent des cours de nouvelles technologies (informatique, photo, vidéo).

    Ainsi, plus d'un - en raison de l'absence d'un centre professionnel dans leur section communale ou de l'éloignement de ce centre, additionné par un manque de revenu - ont appris informellement en travaillant dans un petit atelier pour un patron-boss ou sont restés sans rien apprendre.

    Déperdition scolaire

    L'un des problèmes majeurs que connaît l'éducation au niveau de la commune est la déperdition scolaire77(*). Il est bien connu que les élèves qui entrent dans la première année d'un cycle d'enseignement ne terminent pas tout ce cycle dans un minimum de temps prescrit. Certains abandonnent leurs études avant d'arriver à la fin du cycle, d'autres arrivent à la fin seulement après avoir doublé une ou plusieurs classes.

    La déperdition scolaire consiste donc dans les abandons et le doublement. On appelle:

    · Abandon (ou désertion scolaire) le fait de quitter l'école avant la fin des études correspondant à un degré d'enseignement donné ou à un point intermédiaire ou non terminal d'un cycle d'enseignement;

    · Redoublement (ou doublement) le fait pour un élève de rester dans la même classe et d'accomplir le même travail que l'année précédente.

    Les abandons sont parfois provisoires; souvent un élève qui a interrompu ses études les reprend un peu plus tard, soit dans la même classe, où il était inscrit, soit dans la classe immédiatement supérieure. Les raisons d'abandon des études sont d'ailleurs multiples:

    - L'éloignement de certaines écoles joue un rôle primordial. En effet, beaucoup d'élèves sont obligés de parcourir des kms à pied. Comme ces enfants sont, le plus souvent, pas nourris à l'école, ils sont de retour à la maison exténués et découragés par ces exercices pénibles et quotidiens qui ne leur rapportent peu ou pas de satisfactions dans l'immédiat.

    - Les activités agricoles, à certaines époques de l'année, représentent également une contrainte. Les enfants sont obligés d'aider leur parent à certaines activités telles que le semis et la récolte. Cette interruption crée un handicap sérieux à la poursuite de leurs études et se transforme souvent en arrêt définitif par suite de leur découragement.

    - Les conditions d'installations insuffisantes dans les écoles ... créent une ambiance inadéquate à une bonne réceptivité. Les élèves sont inconfortablement assis, dans l'impossibilité d'écrire correctement, les cahiers sont souillés, ils échouent fréquemment aux examens, doublent leur année et finissent par se lasser de venir en classe. L'instituteur ne peut, avec un effectif pléthorique consacrer un temps suffisant à chaque enfant, d'où négligences certaines dans les soins à apporter aux cahiers, à la préparation des leçons.

    - Le niveau économique très bas des parents explique aussi la tendance à l'abandon et le faible taux de scolarisation. Beaucoup de parents ne peuvent pas subvenir à la longue aux besoins de l'enfant (écolage, fournitures, habillement, etc) et de ce fait n'envoient plus l'enfant à l'école. Aussi, les faibles moyens du secteur public font que la majorité des écoles se trouvent dans le secteur privé, d'où l'impossibilité pour un grand nombre de fréquenter un établissement scolaire.

    Fréquentation scolaire

    Le faible taux de scolarisation de certaines sections communales montre clairement que le taux de fréquentation scolaire reste encore très insuffisant pour l'ensemble de la commune. Ceci s'explique surtout, d'une part, par le manque d'établissement public que possèdent les sections communales (notamment 4ème, 5ème, 6ème et 7ème sections communales), d'autre part, la proximité des établissements scolaires.

    Tableau 9: Répartition des écoles nationales et taux de scolarisation

    Section

    Superficie (km²)

    Superficie moyenne couverte par une école

    Ecoles nationales

    Taux de scolarisation

    1ère

    136

    2,5

    7 nationales

    98%

    2ème

    105

    2,3

    5 nationales

    89%

    3ème

    100

    2,6

    3 nationales

    139%

    4ème

    32

    1,3

    2 nationales

    88%

    5ème

    32

    1,5

    1 nationale

    77%

    6ème

    31

    2,4

    1 nationale

    72%

    7ème

    48

    2,7

    2 nationales

    50%

    Bourg

    2

    0,1

    3 nationales

    193%

    Commune

    484

    2,1

    24 nationales

    96%

    Sources: IHSI pour les superficies et enquêtes de terrain, mars 2007.

    Par ailleurs, la mauvaise perception que les parents ont de l'offre éducationnelle et les activités agricoles représentent également des contraintes à la scolarisation des enfants.

    Enfin, le taux de fréquentation scolaire varie également selon les sections communales. Ainsi, les sections communales les plus déficients sont: 7ème, 6ème, 5ème et 4ème section, si l'on tient compte des taux de scolarisation.

    Le problème de la formation des maîtres

    En ce qui concerne la formation des maîtres, la situation est catastrophique. Ces enseignants sont dans l'ensemble pas qualifiés et ceux qui le sont ne possèdent pas une connaissance approfondie des matières qu'ils enseignent, ignorant aussi bien les techniques pédagogiques adéquates78(*).

    Malgré tout, le système souffre d'un manque de motivation des maîtres lié à leur faible rémunération et agit en conséquence sur le temps qu'ils consacrent à leur ouvrage. Ces faibles salaires accroissent l'absentéisme, génèrent un effet démoralisateur et déresponsabilisant, encouragent l'incurie et l'embauche de personnes peu qualifiées. Les salaires versés

    n'encouragent nullement le renouvellement ni le recrutement de nouveaux enseignants ni même

    la persistance dans ce métier. Ces enseignants sont souvent payés en retard. Dans leur très grande majorité, ces enseignants vivent dans la pauvreté.

    Proximité des infrastructures scolaires et mode de transport

    L'éloignement des établissements scolaires joue un rôle primordial dans la non-scolarisation des enfants et l'analphabétisme qui pullule dans les sections communales. En effet, beaucoup d'enfants de Leban (7ème section) ne fréquentent plus l'école depuis 10 ans à cause de l'éloignement des écoles79(*). Les résultats du taux de scolarisation ont révélé des indices importants sur le problème de la proximité des écoles. On constate que les sections communales (4ème, 5ème, 6ème et 7ème section) ont les plus faibles taux de scolarisations à cause, d'une part, de l'éloignement des établissements scolaires et, d'autre part, du manque d'établissement public. A noter que les 4ème, 5ème, 6ème et 7ème sections n'ont pas d'établissement secondaire, les habitants de ces sections sont obligés de se rendre jusqu'au bourg ou dans une autre section pour

    fréquenter un établissement secondaire. Parallèlement, les 4ème et 6ème sections sont totalement dépourvues de centres professionnels. Par ailleurs, les 4ème et 5ème sections ne disposent pas de centres d'alphabétisation.

    L'école primaire constitue le seul service disponible sur place dans toute la commune et avec une large différence entre le bourg et les sections communales. Globalement, le fait que l'utilisation d'un engin motorisé soit plus élevée dans les sections communales résulte du fait que les populations des sections vivent beaucoup plus éloignées de ces services que les populations du bourg. Néanmoins, malgré ce plus grand éloignement, une forte proportion de la population des sections doit effectuer ses déplacements à pied pour atteindre les différents services. En particulier, on peut noter le cas de la 4ème et 5ème section qui possèdent plusieurs habitations accessibles uniquement à pied. Toute la 5ème section au dessus de Porrier (au sud) n'est desservie par aucune piste praticable en engin motorisé. Il existe aussi des habitations dans la 1ère section qui ne sont pas accessibles en véhicule motorisé (Fonlectune, Gombo).

    3.1.7. Santé

    La structure administrative de la santé de la commune est coiffée par la Direction Sanitaire qui coordonne et supervise tous les programmes et activités des institutions sanitaires. Elle arrive difficilement à jouer ce rôle vu son personnel réduit et les moyens disponibles précaires.

    Bien que la commune soit pourvue d'institutions de santé, la situation sanitaire est critique. En dehors de la dégradation de la vie de la population, qui n'arrive pas dans certains cas à couvrir les dépenses de santé, d'autres éléments très convaincants peuvent expliquer l'état déplorable de la situation sanitaire de la commune:

    La quasi-absence d'infrastructure sanitaire

    La commune, en ce qui concerne les besoins d'une population en constante augmentation, souffre d'une pénurie d'équipements sanitaires de façon dramatique. L'hôpital et les dispensaires sont sous-équipés ou très mal équipés, ne disposant que du strict minimum où même ce strict minimum est insuffisant et inadéquat. Les infrastructures qui existent, en y incluant les équipements médicaux, à cause de l'absence d'une politique d'entretien et d'un manque flagrant de ressources financières, sont dans un état de délabrement et sont mal gérées, à l'image de l'économie haïtienne. Aucune priorité n'est accordée à la formation d'un personnel chargé de l'entretien et des réparations, aggravant encore plus la détérioration matérielle. Non seulement, les infrastructures sanitaires sont insuffisantes et en mauvais état, mais elles sont réparties géographiquement de manière très inégale, créant ainsi des déséquilibres entre le bourg et les localités rurales.

    Tableau 10: Situation des équipements et des infrastructures sanitaires fonctionnelles par section communale

    Infrastructures

    1ère Lacoma

    2ème Guinaudée

    3ème Vielle-Hatte

    4ème Lamontagne

    5ème Dessources

    6ème Grande-Sources

    7ème Diondion

    Bourg

    Total

    Hôpital

    0

    0

    0

    0

    0

    0

    0

    1

    1

    Dispensaire public

    0

    0

    1*

    1

    0

    0

    0

    0

    2

    Dispensaire privé

    0

    1**

    0

    0

    0

    0

    0

    0

    1

    Dispensaire communautaire

    8

    6

    2

    1

    1

    0

    3

    0

    21

    Clinique Privée

    1***

    0

    0

    0

    0

    0

    0

    0

    1

    Sources: Données des enquêtes

    *Bord-de-mer, **Croix-Sauval, ***Clinique Materno-infantile (Fond Lectine)

    4 des dispensaires communautaires sont cogérés par l'église catholique

    Lacoma est la seule section où le nombre de dispensaires est suffisant pour la population soit respectivement 8 ce qui équivaut à un dispensaire pour 489 familles.

    La carence est beaucoup plus accentuée pour la 5ème et la 6ème section communale en terme d'infrastructures sanitaires. Dans ce cas, certains malades sont obligés de se rendre jusqu'au bourg pour se faire soigner.

    Au niveau de la qualité des infrastructures, la situation est précaire au niveau de la plupart des dispensaires, à commencer par l'eau courante en passant par la disponibilité de matériels pour aboutir à un problème de manque de médicaments essentiels.

    Ce manque d'infrastructure dans les sections communales est doublé d'une rareté/de crise d'ambulance (A ce propos, deux ambulances sont disponibles au niveau de l'hôpital: Notre Dame de Paix.) et d'un personnel médical minimal qui travaille dans des conditions souvent pénibles, ce qui complique gravement le cas des malades.

    L'insuffisance du personnel médical

    L'insuffisance du personnel de la santé est comparable à la situation de sous-équipement de l'infrastructure sanitaire. Le nombre de personnel disponible n'arrive pas à couvrir rationnellement toute la commune.

    Tableau 11: Personnel de santé

     

    1ère Lacoma

    2ème Guinaudée

    3ème Vielle- Hatte

    4ème Lamontagne

    5ème Dessources

    6ème Grande Source

    7ème Diondion

    Bourg

    Total

    Docteur

    1

    0

    0

    0

    0

    0

    0

    7

    8

    Dentiste*

    2

    1

    2

    3

    2

    2

    2

    2

    16

    Infirmière

    1**

    1

    0

    0

    0

    0

    1

    0

    2

    Laborantin

    1

    3

    0

    0

    0

    0

    0

    4

    8

    Auxiliaire

    16

    9

    5

    3

    2

    0

    9

    20

    64

    Agent de santé

    36

    29

    19

    12

    16

    13

    21

    1

    147

    Colvol*

    1

    5

    2

    0

    0

    0

    0

    0

    8

    Matrone

    103

    119

    73

    18

    62

    71

    64

    12

    522

    Médecin traditonnel

    49

    38

    73

    19

    83

    65

    52

    13

    392

    Sources: Données de l'enquêtes/Programme Santé-ID

    *Sont pris en compte les dentistes et les arracheurs de dents à la fois

    **Disponible, mais ne travaille pas dans le système

    Huit médecins dont 7 au bourg si on tient compte des 4 médecins cubains sont prévus pour 108738 habitants. A noter que Lacoma est la seule section où le service d'un médecin en poste est assuré, où le nombre d'auxiliaires est suffisant pour la population soit respectivement 16 ce qui représente un auxiliaire pour 244 familles. La faiblesse se situe surtout au niveau de la disponibilité de ce seul médecin pour une population estimée à 27427 habitants.

    La carence est beaucoup plus grave pour les autres sections communales où 13500 familles doivent se contenter du service d'un médecin basé au bourg pour se faire soigner.

    A côté, de ces faiblesses, il faut noter également le problème de la formation du personnel des dispensaires, de l'irrégularité de plusieurs membres du personnel soignant et de l'évacuation des malades dans des cas d'urgence.

    Le coût des services et le prix des médicaments

    En plus de l'insuffisance du personnel médical et l'éloignement des centres de santé, le coût des services et le prix des médicaments constituent également un facteur d'analyse déterminant dans la situation sanitaire de la commune.

    Le coût des services de santé est tellement élevé dans la commune qu'une frange importante de la population des sections préfère se faire soigner par les médecins feuilles, les hougans, les mambos et les bôkô.

    Parallèlement, le coût de l'assistance aux femmes enceintes par un personnel médical devient de plus en plus exorbitant pour les usagers à cause des multiples analyses prénatales et les ordonances de produits pharmaceutiques souvent très chers.

    Malgré la présence d'une banque de médicaments (BMF: Banque de médicaments du Far-West) rattachée à l'HNDP de Jean Rabel (Hôpital Notre Dame de Paix de Jean Rabel), les médicaments prescrits par l'hôpital (et les différents dispensaires) ne se trouvent pas facilement et lorsqu'on en trouvent ils sont trop chers pour les usagers.

    Pour finir, il faut signaler après les inondations du mois de novembre 2006, à peine 1 patient sur 2 arrive à avoir une consultation. Ceci est dû, d'une part, à une forte affluence de la population qui préfère se faire soigner par les médecins traditionnels, et d'autre part, au coût élevé des médicaments.

    Nutrition et état nutritionnel des enfants et des femmes

    La malnutrition constitue un problème majeur de santé dans les sections communales. Les enfants défavorisées, particulièrement à Fond-Ramadou, demeurent les premières victimes de la sous-alimentation. Le problème est que, le revenu familial est insuffisant pour faire face aux besoins normaux d'alimentation80(*). De ce fait, la sous-alimentation représente ainsi un sérieux

    problème pour les enfants qui sont donc très vulnérables aux infections et manifestent souvent des signes de retard de croissance physique et psychique.

    En plus de la malnutrition des enfants, l'état de santé des mères défavorisées est très précaire, présentant souvent des cas d'anémies importants. D'une façon générale, la population des sections fait face à une faible consommation de calories et de protéines, car elles ont difficilement accès aux zones de bonnes productions (et le prix des denrées est trop chèr pour les démunis).

    Accès et distance par rapport aux établissements de santé

    Le premier problème constaté dans la commune quant aux soins de santé est leur éloignement. La grande superficie de la commune fait qu'il est difficile pour les habitants des sections d'accéder aux services de santé du bourg (éloignement, coût exorbitant des transports à moto-taxi). Certaines sections n'ont accès à aucune structure de santé de proximité en témoigne la 6ème section.

    Les différentes sections communales (2ème, 3ème, 4ème, 5ème, 6ème et 7ème section) doivent se contenter du service d'un médecin basé au bourg, ce qui oblige dans certains cas à un malade de parcourir jusqu'à 37 km de mauvaises routes à des prix exorbitants (exemple d'un malade qui partirait de Boucan Patriot/Laréserve/3ème section pour se rendre au bourg et qui paierait 400 gourdes en taxi moto). Cet état de chose fait ressortir un sérieux problème de service de proximité au niveau de la majeure partie des sections communales de Jean Rabel. Les dispensaires qui sont sensés jouer le rôle d'une unité de premier niveau, donc de premier soin sont dans la majeure partie des cas, très éloignés de la population et lorsqu'ils existent sont pour la plupart sous-équipés et mal gérés.

    Par ailleurs, certains malades sont obligés très souvent de se rendre à un établissement de santé à dos d'animaux quand ils possèdent ce moyen de transport sinon ils s'y rendent à pied, après des heures de marche.

    3.1.8. Eau potable et assainissement

    a) Eau potable

    L'eau est un nutriment, c'est-à-dire qu'elle fait partie des éléments qui interviennent dans la composition des aliments et sont utilisés dans le métabolisme normal de l'organisme, dont elle est le principal constituant. La carence en eau provoque une mort beaucoup plus rapide que la carence en l'un quelconque des autres nutriments. L'eau imprègne tous les tissus de l'organisme et représente la matière de base des fluides du corps. Elle est le solvant de multiples substances présentes dans l'organisme telles que le glucose, l'urée, le potassium, le sodium, les bicarbonates, les sulfates.

    L'homme a donc besoin d'eau de manière constante pour conserver sa vie même. Cette eau, il l'utilise pour sa consommation et pour son hygiène mais encore à bien d'autres fins. Une eau de qualité est certainement une condition nécessaire, mais pas suffisante, à un impact positif sur la santé, encore faut-il que l'eau soit disponible en quantité suffisante pour satisfaire les besoins. D'une manière générale, on estime que la quantité quotidienne minimale d'eau nécessaire pour couvrir les besoins essentiels est de 5 litres par personne81(*).

    L'approvisionnement en eau potable pose de sérieux problèmes dans les sections communales de Jean Rabel. La distribution d'eau se fait à partir des sources, mais il n'existe pas de base de données exhaustive concernant le nombre de source. On estime malgré tout le nombre de sources captées à une centaine environ, alors qu'il n'y en aurait un peu plus de cent autres qui ne seraient pas captées. Les réseaux existants sont généralement insuffisants ou inadéquats et la qualité d'eau fournie laisse à désirer. Dans certaines localités, la population est obligée de s'abreuver en même temps que les animaux à des sources ou des rivières polluées et à des rivières qui servent aussi bien à la consommation courante (alimentation, lessive, toilette) que de décharge publique.

    L'eau potable est un sérieux problème dans le milieu. La distribution se fait à partir des sources, les prises domiciliaires sont inexistantes tandis que les fontaines publiques sont loin d'être suffisantes. L'approvisionnement en eau potable est souvent insuffisant et de surcroît contaminé, ce qui provoque diarrhées et multitude d'autres problèmes de santé. Les résultats d'analyses d'eau réalisées récemment sur un échantillon de 12 points d'eau ont montré que plus de 60% des sources de la commune de Jean Rabel sont relativement contaminées82(*). D'autres études ont révélé que le taux de désinfection chimique de l'eau à usage domestique est extrêmement faible83(*).

    Les données de l'étude de base84(*) montrent que près d'un quart des ménages utilise l'eau des rivières qui est toujours impropre à la consommation. Une étude UNICEF/OMS citée dans ce document indique même un pourcentage plus élevé (37.6%) de ménages utilisant cette eau.

    Dans certaines localités reculées, les paysans vont chercher l'eau plusieurs fois par jour à un point d'eau traditionnel, souvent situé à plus d'une heure de marche. Si l'approvisionnement était plus facile, ils économiseraient du temps qu'ils pourraient consacrer aux travaux agricoles, à la famille ou à d'autres activités.

    Ailleurs, quoiqu'il n'existe aucun système de protection des sources, l'eau distribuée n'est ni désinfectée, ni contrôlée. Ce qui seraient à l'origine de plusieurs cas de maladies.

    b) Assainissement

    La gestion des ordures pose un véritable problème de salubrité publique au niveau du Bourg. La commune ne dispose pas de décharge publique ni de service de traitement de détritus. Les ordures ménagères et les déchets provenant du marché sont jetés dans les canaux d'écoulement ou directement à la rivière. Parfois, ils sont rassemblés en tas et brûlés. Cet état de fait contribue à la pollution de la rivière de Jean Rabel et à rendre l'air malsain et irrespirable au niveau de la commune.

    Le problème de drainage ou de traitement des eaux usées facilite le développement des moustiques et des mouches, porteurs de virus et de microbes de toutes sortes qui sont à la base de diverses épidémies qui ravagent la commune notamment le paludisme et la typhoïde.

    3.1.9. Les transports et communications

    Le manque de routes et de moyens de transports constitue également un obstacle. Le mauvais état des routes reliant les sections communales entre elles et les sections au bourg (pentes raides, affleurements rocheux, glissement de terrain) limite fortement les échanges et constitue un frein énorme au développement de la commune.

    La commune dispose de 15 camions privés et de 4 autobus assurant le transport de Jean Rabel à Port-au-Prince. Le transport de Jean Rabel à Port-de-Paix est assuré par plus d'une vingtaine de Pick Up de Jean Rabel qui effectue chacun un voyage par semaine compte tenu que le nombre de pick up est trop élevé par rapport à la population desservie. Pour aller de la ville à un point des sections communales il faut utiliser le service d'une motocyclette-taxi. Ce type de transport est très cher par rapport aux autres. Plus d'une centaine de motocyclettes taxis sont au service de la population.

    Tableau 12: Tarif du transport en moto-taxi (en gourdes)

     

    Du bourg à ...

    De Lacoma à ...

    De Sauval à ...

    ... Lacoma

    100

     

    50

    ... Grande source

    125

    225

    200

    ... La Reserve

    400

    -

    -

    ... Diondion

    100

    200

    175

    ... Boucan patriot

    400

    -

    -

    ... Bord de mer

    50

    150

    -

    ... Sauval

    75

    -

    -

    ... Guinaudée

    300

    -

    375

    Données recueillies à la Mairie

    Les paysans des sections utilisent les bêtes de somme pour le transport des produits locaux d'une section à l'autre et des sections au bourg. Malgré la présence de véhicules assurant le transport du bourg à Port-de-Paix, la métropole du département, certains marchands, majoritairement des femmes, vont vendre à Port-de-Paix et à Saint-Louis du Nord des produits d'élevage et de fruits comme : des volailles, du citron, de grenadia et du charbon de bois à dos de mule pour des raisons économiques.

    Par ailleurs les habitants des côtes de la localité de Bord de mer, de Gros sable et de Port-à-L'écu utilisent des voiliers pour des voyages vers Port-de-Paix.

    Enfin, de nombreuses localités et habitations ne sont accessibles qu'à pied ou à dos de mule par les chemins, dont les plus importants couvrent 145 kilomètres. En particulier, on peut noter le cas de la 4ème et 5ème qui possèdent plusieurs habitations accessibles uniquement à pied. Toute la 5ème section au dessus de Porrier (au sud) n'est desservie par aucune piste praticable en engin motorisé. Il existe aussi des habitations dans la 1ère section qui ne sont pas accessibles en véhicule motorisé (Fonlectune, Gombo).

    a) Télécommunication

    En terme de communication, une grande partie de la commune capte maintenant les signaux des téléphones cellulaires, soit Voila (1ère et 2ème sections), soit Digicel (3ème à 7ème sections et bourg). Plusieurs habitations ne reçoivent pas encore ce signal.

    Par ailleurs, d'assez nombreux cyber cafés, permettant un accès à internet, et aux communications téléphoniques avec l'étranger à moindre coût: au bourg, à Cabaret.

    Un bureau de la Téléco fonctionnait au bourg jusqu'au premier semestre 2006, avant d'être coupé comme de nombreux bureaux Téléco avec la privatisation de ce service.

    b) Service postal

    Le service postal n'est pas très efficace. Un bureau est tenu par 2 employés, mais la lenteur du service (acheminement depuis la capitale, et plus difficile encore vers les sections) le rend quasiment inusité. D'ailleurs, les lettres ne parviennent pas toujours au destinataire, et les missives sont toujours confiées à des proches voyageant dans le pays plutôt qu'à ce service.

    c) La Presse

    Au niveau des médias, 2 radios fonctionnent dans la commune actuellement: Radio Flambeau 2000, radio dite communautaire et qui émet sur le 90.1 FM stéréo, et Radio Fidélité, à vocation évangélique. Toutes les deux sont situées dans l'agglomération du bourg. L'une d'elles retransmet la radio nationale et Vision 2000, ce qui permet ainsi à la population d'avoir un accès quotidien aux informations nationales et internationales. Les radios sont notamment très utilisées au moment des élections, mais aussi par les programmes de développement qui y font passer des messages de sensibilisation. Cependant, leur capacité n'est pas suffisante pour couvrir toute la commune, et la programmation manque de diversité pour être amplement écoutée. Les auditeurs se rabattent souvent sur d'autres radios au rayon d'émission plus large: Bois Caïman (communautaire émettant de Mare Rouge), radios de Port-de-Paix, de plus en plus nombreuses et puissantes, et diffusant les musiques à la mode, voire dans certains endroits les radios dominicaines.

    Il existe également un petit magazine diffusé environ chaque semestre par le volet culturel d'Initiative Développement. Bilingue, il s'adresse principalement aux jeunes lecteurs des écoles, et comprend de nombreuses rubriques destinées à distraire et informer ses lecteurs sur la vie de la commune et sur le milieu culturel en général.

    La plupart des informations concernant la population de la commune sont transmises par radio, ou encore par crieur public. D'un autre côté, la presse écrite et télévisée y est inexistante.

    3.1.10. Electricité / Energie

    La commune de Jean Rabel est dépourvue de réseau d'électricité publique fonctionnel. Le bourg dispose d'une génératrice reliée à un réseau, mais l'absence de fonds pour acheter le carburant nécessaire à son fonctionnement, lié à l'absence de taxes aux abonnés, le rend inusuté. Il est arrivé que la diaspora paie le carburant pour animer la fête patronale.

    Les installations électriques existantes sont donc privées, hors celle de l'hôpital du bourg (alimentant la morgue et les différents équipements de l'hôpital) et celle de EFACAP de Péchaud (alimentant les ordinateurs et l'accès à internet pour les élèves). Les commerçants du bourg, de Cabaret, de Bord de Mer, disposent souvent de génératrices pour faire fonctionner les ordinateurs, glacières, appareils musicaux et ateliers de réparation. Les particuliers socialement aisés ont plus souvent un voire deux panneaux solaires. Pour les particuliers encore, les principaux concernés habitent dans le bourg ou les quartiers de la commune. L'accès à l'énergie électrique est exceptionnel en campagne. La population utilise principalement des lampes à gaz. Cette situation ne favorise pas le développement d'industrie locale.

    Concernant l'énergie servant à la cuisson des aliments, la population utilise charbon et bois issus de la commune. Seules les institutions et quelques particuliers du bourg et des quartiers utilisent des réchauds à gaz, étant donné le coût du gaz, déjà élevé dans le pays, et auquel s'ajoutent en plus les forts frais de transport pour arriver à Jean Rabel.

    De ce qui précède, il ressort que les conditions de vie sont vraiment déplorables dans les sections communales et expliquent dans une large mesure le sous-développement de la commune.

    3.2. La lutte contre la pauvreté

    3.2.1. Stratégies de lutte contre la pauvreté

    En théorie, les responsables de l'action gouvernementale disposent d'un éventail de mesures pour réduire la pauvreté rurale, tant du point de vue de son niveau que du nombre de personnes touchées. Ces mesures se trouvent insérer dans des stratégies de développement anti-pauvreté.

    A cet effet, il convient de distinguer trois types de stratégies de lutte contre la pauvreté. La première consiste à favoriser une redistribution des biens productifs existants, notamment la terre, l'eau et les services connexes afin d'améliorer la productivité, l'emploi et les revenus des populations rurales déshéritées par l'instauration d'un nouvel ordre social. Cette stratégie s'accompagne d'investissements dans les ressources humaines (éducation, santé, logements et infrastructures rurales) destinés à développer les capacités et les possibilités d'emploi, ces investissements n'étant toutefois rentables qu'à long terme. La deuxième stratégie consiste à orienter le flux supplémentaire de revenus ou de consommation crée en imposant les riches. Ce système avantage certaines régions ou certaines zones rurales ainsi que des groupes précis de la population rurale (par le biais de projets de développement rural, de subventions en nature, de programmes vivres-contre-travail, de programmes de nutrition pour les enfants et d'alimentation scolaire, de services de santé maternelle et grâce à la possibilité pour les pauvres d'avoir accès à du capital générateur de revenus). La troisième est la stratégie classique de croissance globale du PNB, qui est censée profiter à tous les groupes de la population par le simple jeu des forces du marché, les interventions de l'Etat sur les prix et les salaires étant minimes et la répartition initiale des terres, du capital et des ressources humaines n'entrant pas en ligne de compte. L'efficacité de cette stratégie est controversée depuis les années 60. Employée seule, elle est rarement parvenue à atténuer la pauvreté, a souvent entraîné une répartition encore plus inégale des revenus et laissé les paysans sans terre à l'écart, particulièrement dans les zones accusant une forte croissance de la population et de la main-d'oeuvre agricole non qualifiée. Alors qu'aujourd'hui la population rurale défavorisée s'accroît avec une vitesse vertigineuse, il est légitime de se demander si un pays peut politiquement se permettre d'envisager une évolution structurelle lente et progressive.

    3.2.2. Les éléments de la stratégie

    La stratégie nationale de lutte contre la pauvreté est un ensemble articulé d'interventions visant à créer les conditions matérielles permettant à tout individu de satisfaire des besoins jugés essentiels.

    Elle contient un objectif général qui consiste à soulager la misère des plus démunis et garantir progressivement à toute la population une satisfaction adéquate de ses besoins fondamentaux. Cet objectif est poursuivi suivant deux approches distinctes bien que complémentaires:

    § ou bien l'individu reçoit, en contrepartie de sa participation à l'activité économique, une rémunération ou salaire qui lui permet d'acquérir sur le marché les biens et services désirés;

    § ou bien la société met l'individu en mesure d'accéder directement aux biens à usage personnel ou aux services collectifs nécessaires au maintien de ses fonctions vitales et à l'amélioration de la qualité de la vie.

    Enfin, depuis quelques années, le Document de Stratégie de Réduction de la Pauvreté (DSRP), mis au point par la Banque Mondiale (BM) et le Fonds Monétaire Internationale (FMI), est devenu l'un des principaux instruments utilisés au niveau national en vue d'atteindre des résultats durables en faveur des populations pauvres et vulnérables.

    Le DSRP décrive les politiques et les programmes macroéconomiques, structurels et sociaux que le pays devra mettre en oeuvre pendant plusieurs années, pour promouvoir la croissance et réduire la pauvreté. Il expose également les besoins de financement extérieur et les sources de financement connexes.

    Le DSRP est élaboré selon un processus participatif qui implique les parties prenantes au niveau national, mais aussi les partenaires extérieurs (FMI, Banque Mondiale, etc.).

    3.2.3. Les effets de la lutte contre la pauvreté

    La pauvreté, dans ses diverses dimensions, n'est qu'une des conséquences logiques d'une très faible développement économique et social. A cet effet, les responsables de l'action gouvernementale en vue de remédier à cette situation utilisent toute une panoplie de mesures qui se trouvent insérer dans des documents nationales de reduction de la pauvreté.

    Les actions de développement de la commune sont financées en majeure partie par l'aide bilatérale ou multilatérale. Les fonds alloués au développement sont gérés par les ONG et Projets qui, de leur côté, élaborent des programmes et des projets au bénéfice de la communauté, parfois en accord avec la Mairie.

    Cependant, les projets de développement de la commune manquant de durabilité et de renforcement peinent encore à trouver sa voie à l'image de la grande majorité des communes de la République d'Haïti. Il faut souligner que l'action prise en faveur des pauvres n'ont été que partiellement et les autorités concernés ne disposent pas d'instruments de mesure et de calculs adéquats pour évaluer les effets des projets de lutte contre la pauvreté. Ce qui explique en grande partie l'échec d'un si grand nombre de programmes et projets en termes de réduction de la pauvreté au niveau de la commune.

    CHAPITRE IV

    4. Les domaines prioritaires et l'approche qui permettra d'y remédier

    4.1. Les domaines prioritaires

    Les priorités pour atténuer l'extrême pauvreté, accélérer l'expansion de l'agriculture et le développement rural dans les sections communales de Jean Rabel sont notamment les suivantes:

    Ø Faciliter l'accès à d'autres sources d'énergie autre que le charbon de bois (gaz, énergie solaire);

    Ø Reboiser les sommets des mornes;

    Ø Aménager les fortes pentes par la mise en place des structures anti érosives;

    Ø Faire une étude à des fins de vulgarisation pour déterminer les zones cultivables, forestières et habitables;

    Ø Accès à une plus grande portion de terre cultivable;

    Ø Faciliter l'accès au crédit;

    Ø Construire de nouveaux systèmes d'irrigation;

    Ø Mettre en place des boutiques d'intrants (semences, outils, insecticides);

    Ø Organiser des séances de formation sur les techniques de conservation de semence et de fabrication d'insecticides naturels;

    Ø Modernisation de l'outillage et la formation des cadres;

    Ø Planifier et organiser des campagnes de vaccination (des animaux) à des dates régulières;

    Ø Mettre en place des pharmacies vétérinaires dans la commune;

    Ø Accès à des marchés rémunérateurs et compétitifs (rapport ville-campagne) pour l'écoulement des produits agricoles;

    Ø Accès aux infrastructures physiques: routes et autres moyens de communication: le desenclavement de la commune, construction et reparation des routes reliant les sections et les habitations;

    Ø Accès aux services publics élémentaires: éducation, assistance médicale, approvisionnement en eau potable (en quantité et de qualité), voirie, électricité, etc;

    Ø Ralentissement et le contrôle de la croissance démographique.

    4.2. L'approche qui permettra d'y remédier

    Les constatations faites au cours de ces dernières années et les objectifs du nouveau millénaire montrent la nécessité d'une nouvelle stratégie du développement. Si les stratégies traditionnelles axées sur la croissance se traduisent par une augmentation du nombre des pauvres et de l'extrême pauvreté, il y a de bonnes raisons d'organiser la stratégie du développement autour de la satisfaction des besoins essentiels en redistribuant les actifs et le revenu actuel et en orientant la croissance en fonction de la satisfaction de ces besoins.

    «Les besoins essentiels sont définis comme étant le niveau de vie minimum qu'une collectivité devrait fixer pour ses membres les plus pauvres. La satisfaction de ces besoins suppose que soient remplies les conditions minimales de consommation privée pour une famille: alimentation, logement, habillement; elle implique l'accès à des services essentiels, tels qu'eau potable, assainissement, transports, santé et éducation; elle demande que toute personne en mesure de travailler et désireuse de le faire ait un emploi convenablement rémunéré. Elle devrait comprendre encore la satisfaction de besoins d'un caractère plus qualitatif: un environnement sain, humain et satisfaisant et la participation de la population à l'élaboration de décisions qui affectent la vie et les moyens d'existence de chacun ainsi que les libertés individuelles» (BIT, 1976, 7).

    Selon cette définition, les besoins essentiels ne sont pas seulement de nature matérielle, mais aussi immatérielle et en plus, ils s'influencent mutuellement. Ils constituent les objectifs minimaux d'une société, et non la totalité de ce qui est souhaitable. Dans cette perspective, la pauvreté spécifiquement économique est comprise comme l'absence de satisfaction matérielle des besoins essentiels matériels et immatériels; par conséquent le minimum vital englobe la satisfaction matérielle de ces besoins.

    4.3. Contexte dans lequel devrait s'insérer la lutte contre la pauvreté: le développement de Jean Rabel

    4.3.1. Le contexte de lutte contre la pauvreté

    La mise en place et la réussite d'une stratégie de lutte contre la pauvreté au niveau de la commune posent comme points fondamentaux le développement de l'agro-industrie et une meilleure répartition des services sociaux de base de qualité.

    Pour cela, il faut définir une politique globale cohérente de développement rural dans laquelle l'action prise en faveur des couches de populations déshéritées doit engendrer des processus continus et qui se renforcent mutuellement.

    Dans ce contexte, il ne suffit pas seulement d'opter pour une forme de planification ou de stratégie. Il faut aussi disposer d'instruments de mesure et de calculs adéquats. Il ne faut pas se contenter de s'intéresser aux méthodes de planification et aux expériences faites en la matière, mais il faut évaluer les effets des investissements et les gains associés aux projets de lutte contre la pauvreté.

    Ainsi, il est souhaitable que le développement et la stratégie de lutte contre la pauvreté puissent être atteints, tout en mettant en place les différents types de clignotants nécessaires à l'échelle micro (projets), méso (programmes) et macro (grands agrégats économiques), nécessaire au recentrage continu du processus, tout au long de son exécution. Il sera alors possible de mieux apprécier les manques dont souffrent les stratégies au niveau de la commune et dans les différentes sections pour chacun des projets.

    Cela permettra d'apporter des réponses aux problèmes spécifiques touchant la pauvreté, tout en veillant à l'aspect dynamique de la question pour le développement global de la commune.

    4.3.2. Le développement de Jean Rabel

    Le développement de la commune doit passer par son redressement économique (agriculture, élevage, communication) et social (services de base). En effet, l'amélioration de la situation économique est un moyen d'augmenter les ressources de la commune et de la collectivité, et ainsi d'améliorer la qualité des services.

    Pour cela, il faudrait que l'amélioration de la rentabilité se fasse à travers la production, mais surtout la commercialisation de produits transformés. Autour de la production, la rentabilité sera augmentée par une meilleure gestion de l'eau d'irrigation. Il faudrait également diminuer l'impact des rongeurs et autres nuisibles, et faciliter l'accès aux intrants. L'accent devra être mis sur les produits naturels (engrais et pesticides) afin de préserver l'atout national d'une production non chimique, et de vendre ainsi des produits de meilleure qualité à un prix moins élevé.

    Pour l'élevage, il s'agit de mieux contrôler les reproductions, de diminuer les pertes de bétail dues à la sécheresse ou aux inondations, d'améliorer l'état de santé des bêtes pour les engrosser et augmenter leur valeur.

    La commune étant particulièrement vulnérable aux aléas climatiques, la protection de l'environnement a comme but principal de protéger la population, ses biens et ses cultures des risques naturels. Contrer la dégradation de l'environnement semble un but évident pour permettre aux futures générations de continuer à vivre et à produire sur le territoire. La protection concerne à la fois les sols et l'eau.

    Les activités de reboisement d'un côté visent à limiter l'érosion et l'assèchement des cours d'eau, mais aussi les glissements de terrain et l'appauvrissement des terres. Le reboisement sera vu sous un angle intégré: économiquement utile, et géographiquement ciblé.

    Les routes secondaires doivent être aménagées de façon à ce que leur entretien soit soutenable pour la collectivité. C'est-à-dire que les aménagements, même s'ils concernent des portions plus petites, doivent être faits en dur (béton, bitume, rampes...), et avec protection des contreforts. Des pistes reliant les sections entre elles devront être ouvertes.

    Quant aux soins de santé, il faudrait qu'on améliore les services de proximité (matériel, formation) et de faciliter la communication entre les structures de santé pour transférer les cas d'urgence vers l'hôpital (ambulance, téléphone ou radio). Par ailleurs, l'accès aux soins spécialisés ne doit être dépendant de la présence temporaire de médecins étrangers. L'alimentation en électricité ne devrait pas limiter les services (de laboratoire par exemple) étant donné sa puissance. La morgue devrait être moins cher pour les indigents.

    La distribution et l'entretien de l'eau doivent être plus équitables et économes: favoriser l'aménagement de structures là où la population est regroupée, prévoir un système d'entretien sur les ouvrages réalisés dans les sections avec contrôle communautaire.

    Il faudra encourager une meilleure qualité de l'enseignement en améliorant les conditions de travail des professeurs pour les inciter à mieux accomplir leur rôle de pédagogue (sécurité du travail, formation, etc.). Enfin, pour la formation professionnelle, il ne s'agit pas de multiplier les initiatives dans la commune, mais de s'attacher à donner la possibilité de formations de qualité, diversifiées, au bourg qu'au niveau des sections.

    4.4. Le développement rural de Jean Rabel dans une perspective de développement global et national

    A Jean Rabel, comme dans toutes les communes de la République d'Haïti, le monde rural demeure le principal réservoir de pauvreté. En effet, les ruraux pauvres représentent plus de trois quarts de la population totale de la commune, et 82% de la population nationale. Il s'ensuit que la pauvreté est un phénomène essentiellement rural tant qu'au niveau de la commune qu'au niveau national. C'est pourquoi le développement rural de Jean Rabel se révèle fondamental à la concrétisation du bien-être national. Alors, qu'est-ce qui mérite d'être fait?

    A la lumière des analyses présentées ci-dessus, il est possible d'indiquer les éléments fondamentaux d'une politique de développement rural pour la commune dans une perspective de développement global et national:

    a) Le développement rural de Jean Rabel ne peut être réalisé sans l'engagement de l'Etat. Cela s'explique surtout par les apports en crédit, en assistance technique, en irrigation, en voies de communication ainsi qu'en infrastructure de production et de commercialisation.

    Aujourd'hui, après plusieurs années d'instabilité politique, d'isolement international et de chaos économique, le secteur privé ne réunit pas les moyens nécessaires pour mettre en branle le processus de développement rural. Les ONGs ou les associations communautaires sont en train de pallier à des failles de l'Etat, mais elles n'ont pas encore les structures suffisantes (peu de resources, manque de coordination entre elles, etc.) pour réaliser le développement rural tant espéré. Alors, il revient à l'Etat de prendre en main sa responsabilité constitutionnelle et de recourir aux emprunts internationaux ou à d'autres moyens légaux de collecte de fonds pour se doter en ressources matérielles et humaines que nécessite la relance économique du monde rural.

    Aussi, des instruments plus adéquats - non seulement de type juridique et répressif - doivent être utilisés pour combattre la corruption des fonctionnaires de l'Etat et plus particulièrement ceux qui sont en charge du recouvrement des recettes fiscales (douanières, impôts) et non fiscales afin que cela ne fausse pas les investissements dans les infrastructures du développement et ne réduit pas le potentiel d'intervention social de l'Etat.

    b) L'engagement de l'Etat ne peut être efficient et efficace sans l'élimination des structures injustes et une bonne répartition des services sociaux de base. Dans le monde rural, il existe un profond dualisme qui se manifeste principalement à travers l'accès aux ressources et aux services sociaux de base. Ce sont surtout les grands propriétaires qui bénéficient des projets d'irrigation et de reboisement. Les programmes de crédit laissent de côté les petits propriétaires et les salariés agricoles. Plusieurs interventions réalisées dans le monde rural n'ont pas réussi à enclencher un processus de développement auto-soutenu parce qu'elles ont négligé les problèmes structurels.

    Parallèlement, la mauvaise répartition des services sociaux de base contribue grandement en l'appauvrissement des paysans. Pourtant, une bonne répartition et une bonne qualité des services sociaux de base sont les meilleurs moyens d'améliorer la productivité économique et le bien-être des familles.

    La constitution en elle-même, par le fait qu'elle recommande la réforme agraire, l'accès à une éducation de base et à la santé, indique déjà le chemin à suivre pour combattre les structures d'un tel dualisme. Il est vrai que, dans les années soixante et soixante-dix, de multiples erreurs ont été commises dans les politiques de réforme agraire appliquées en Amérique Latine. Heureusement, il existe aujourd'hui des instruments conceptuels et méthodologiques qui permettent de les éviter. L'essentiel est de savoir faire preuve de discernement et de volonté politique.

    c) L'élimination des structures injustes et une bonne répartition des services sociaux de base ne peuvent réduire la pauvreté rurale si elles ne sont pas accompagnées d'une politique de développement agricole. Il ne suffit pas de favoriser un meilleur accès aux ressources et aux services sociaux de base. Il est nécessaire de les améliorer de façon à garantir une croissance soutenue de l'agriculture qui est la principale activité des paysans.

    La croissance rapide de l'agriculture peut être engendrée de différentes manières. Elle peut provenir de l'expansion des superficies cultivées. Elle peut aussi résulter de l'utilisation efficace de technologies. Dans le cas de Jean Rabel, la deuxième option serait la meilleure. Même ainsi, on devrait choisir le type de technologies à utiliser. Les techniques qui augmentent la productivité de la terre serait à court et moyen terme les plus adéquates. L'essentiel est de déployer des efforts pour mettre en place des systèmes de production rentables en combinant des connaissances traditionnelles avec des innovations scientifiques modernes.

    On ne peut pas laisser les investissements des agriculteurs et des éleveurs totalement exposés aux caprices de la nature. Par exemple, il est nécessaire d'avoir des variétés de plantes et des races d'animaux plus résistantes à des maladies rencontrées dans la commune. A ce niveau, la raison de l'engagement de l'Etat est de rendre le secteur primaire plus flexible, c'est-à-dire plus âpte à répondre aux signaux des prix. Pour atteindre une telle flexibilité, l'agriculture ne doit plus être considérée comme une source d'excédent à être transféré au secteur urbano-industriel. Elle doit avoir à sa disposition une grande partie de la valeur ajoutée qu'elle produit (MELLOR, 1995).

    En ce qui a trait aux activités à entreprendre, la priorité est à accorder à la production d'aliments. Cela s'explique en partie par le fait qu'il est nécessaire de réduire dans l'immédiat la vulnérabilité alimentaire des ruraux. En plus de cela, il est indispensable d'économiser des devises qui seraient destinées à l'importation d'aliments d'autant plus que les perspectives d'obtention de celles-ci à court et moyen terme sont très modestes.

    Il y a deux autres points importants mais qui, à Jean Rabel, sont toujours oubliés dans les programmes de développement rural. D'abord, la localisation de chaque activité agricole est à déterminer essentiellement en fonction de la vocation des terres. C'est en quelque sorte anormal de voir les plaines largement couvertes d'arbres alors que les montagnes sont presque totalement dénudées et livrées à des cultures sarclées. En suite, une politique de prix alimentaires est à envisager. Elle doit être définie de manière à prendre en compte non seulement l'allocation de meilleures incitations aux producteurs mais aussi l'amélioration de l'accès des consommateurs aux aliments.

    c) Et, en dernier lieu, le développement agricole ne peut être garanti s'il n'est pas poursuivi dans le cadre d'une politique macro-économique bien structurée. Un contexte macro-économique inadéquat résulterait en l'échec de la meilleure politique de développement agricole. Pour atteindre des objectifs de croissance soutenue en agriculture, il est nécessaire de définir et d'appliquer des mesures à effets globaux et nationaux (voire internationaux).

    Les politiques budgétaires, fiscales et monétaires ainsi que les taux de change, les taux d'intérêts et le niveau des salaires ont une influence considérable sur le secteur agricole. Un manque d'attention budgétaire envers l'agriculture peut être fatal notamment à la mise en place d'infrastructures nécessaires à la production ou à la commercialisation d'aliments. Une forte taxation de l'économie peut décourager les producteurs. Les taux de change font varier significativement les importations de certains facteurs de production. Les taux d'intérêt conditionnent amplement la décision du producteur de consentir un emprunt. Le niveau des salaires est un déterminant évident de la disponibilité d'emplois et de la variation des revenus (TIMMER et al., 1986).

    Aujourd'hui, il est impératif de gagner la confiance des investisseurs petits ou grands afin qu'ils n'hésitent plus à entreprendre des activités tant dans l'agriculture que dans d'autres secteurs de l'économie. Pour concevoir et mettre en application une politique de développement rural propre à atteindre un tel objectif, on ne peut pas négliger les variables macro-économiques.

    5. Conclusion et recommandations

    Comme l'analyse ci-dessus l'a permis de constater, les nuances sociales s'expriment avec vigueur dans la commune. Une absence de service de proximité dans plusieurs sections, un manque d'équipements et de personnels qualifiés, la mauvaise qualité du service offert : sont autant de problèmes inhérents au sous-développement de la commune. De même, l'infrastructure routière et l'indisponibilité de l'énergie constituent un handicap majeur à la lutte contre la pauvreté. La population rurale qui constitue les 92.88% de la population totale, a comme unique moyen de subsistance et seule source de revenu, la culture de la terre. Malgré l'importance de l'agriculture, qui domine l'économie de la commune de par son apport et de par sa taille, loin d'être l'objet d'un quelconque programme de développement, a été abandonnée totalement au libre jeu des forces de la nature. Cela se traduit par une baisse continue de la production agricole, et des taux de chômage et de sous emplois qui atteignent des proportions alarmantes.

    La piètre performance de l'économie de la commune, sa marginalisation, le niveau élevé de prévalence de la pauvreté et de l'insécurité alimentaire montre très clairement que les solutions préconisées par les Pouvoirs Publics dans le cadre des différents programmes et projets de développement sont passées à coté de leurs objectifs.

    La lutte contre la pauvreté, et notamment dans les sections communales de Jean Rabel, est une condition nécessaire pour le développement de la commune et du pays. Des mesures prioritaires doivent néanmoins être prises pour s'attaquer directement aux causes de la pauvreté. La mauvaise répartition des besoins essentiels n'est pas seulement un effet de la pauvreté, elle en est aussi la cause. De nombreux éléments prouvent qu'une meilleure répartition des services sociaux de base de qualité améliorera les conditions de vie de la population des sections communales.

    Face à la nécessité de réduire la pauvreté des sections d'une manière appréciable et durable, il est nécessaire que des mesures concrètes soient prises pour promouvoir la croissance de l'agriculture et le développement rural. Les trois quarts des pauvres de la commune vivent dans les sections communales et tirent leurs moyens de subsistance de l'agriculture ou d'activités dont la survie est liée au secteur agricole. Le développement agricole et rural est donc essentiel pour la croissance économique globale et pour éradiquer l'extrème pauvreté.

    Cependant, pour mettre au point des politiques qui aient une chance d'aider effectivement les pauvres ruraux, les pouvoirs publics devraient cibler les principales recommandations suivantes :

    Ø Il faut mettre en place des mécanismes pour combattre la corruption au plus haut niveau des pouvoirs publics. Sans ce dernier, on ne pourra jamais implémenter avec efficacité des programmes et des politiques publiques en faveur des couches défavorisées.

    Ø L'Etat doit trouver les moyens nécessaires d'entreprendre graduellement et de façon soutenue des actions bien coordonnées dans le cadre des programmes et projets de lutte contre la pauvreté.

    Ø Les autorités concernées doivent disposer d'instruments de mesure et de calculs adéquats pour évaluer les effets des projets de lutte contre la pauvreté. Il sera alors possible de mieux apprécier les manques dont souffrent les projets et de pallier à ces faiblesses.

    Ø Les politiques de lutte contre la pauvreté rurale doivent fournir les moyens techniques (utilisation efficace de technologies) permettant d'accroître la rentabilité des exploitations, prendre appui sur une réforme agraire et prendre en compte la situation spécifique des populations pauvres de la commune.

    Ø Les mesures doivent viser à combattre non seulement les causes mais également les effets de la pauvreté.

    Bien sûr, résoudre le problème de la pauvreté rurale n'est nullement une tâche aisée. Je répète que cette tâche réclame une action énergique et coordonnée, appliqueé d'une façon graduelle et persistante. Mais l'important est de démarrer et de savoir où l'on va.

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    2- CRIBB, André - Yves. La vulnérabilité alimentaire des ruraux haïtiens: une situation préoccupante. Publié en deux parties au Journal «Le Nouvelliste», No. 35402 du 23-25 janvier, pp. 8 et 9; et No. 35403 du 26 janvier, s/pp.

    3- ETHEART, Bernard. Survol de l'évolution de la structure foncière, publié en quatre parties au Journal «Haïti en Marche», Nos. 6, 7, 8, 9, éditions du 9 au 5 Avril 2005.

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    * 1 Source : Département du Nord-Ouest, Rapport diagnostic PDC Jean Rabel, Janvier 2007.

    * 2 Idem.

    * 3 Source : Département du Nord-Ouest, Rapport diagnostic PDC Jean Rabel, Mars 2007.

    * 4 Source: Département du Nord-Ouest, Rapport diagnostic PDC Jean Rabel, mars 2007.

    * 5 Source: Rapport sur le diagnostic de la situation du Nord-Ouest, mai 1998.

    * 6 On ne dispose pas de données chiffrées sur la quantité de millimètres de pluie tombés en avril 1971.

    * 7 Source: Département du Nord-Ouest, Rapport diagnostic PDC Jean Rabel, mars 2007.

    * 8 Source : Département du Nord-Ouest, Rapport diagnostic PDC Jean Rabel, mars 2007.

    * 9 De la rue Fidelia passant par la grande rue jusqu'à la rue Saint Jean, des vêtements et chaussures usagés, des fruits, des bananes, du charbon de bois, des produits de consommation sont exposés en plein air dans des conditions non hygiéniques pouvant favoriser la propagation de microbes.

    * 10 Source: Département du Nord-Ouest, Rapport diagnostic PDC Jean Rabel, mars 2007.

    * 11 Cf. M. Mollat: «Le pauvre est celui qui, de façon permanente ou temporaire, se trouve dans une situation de faiblesse, de dépendence, d'humiliation, caractérisée par la privation des moyens, variables selon les époques et les sociétés, de puissance et de considération sociale: argent, relations, influence, pouvoir, science, qualification technique, honorabilité de la naissance, vigueur physique, capacité intellectuelle, liberté et dignité personnelles. Vivant au jour le jour, il n'a aucune chance de se relever sans l'aide d'autrui». (Les pauvres au Moyen Age, Paris, Hachette, 1978, p. 14).

    * 12 www.imf.org

    * 13 Le role des sciences sociales dans la planification du développement, UNESCO, 1970, E/CN. 14/SWCD. 48.

    * 14 «Rural development and Bank policies», Banque Mondiale, Washington, 1974.

    * 15 www.banquemondiale.org

    * 16 Ces informations sont tirées de l'intéressant travail du Ministère de la Planification et de la Coopération Externe (MPCE) sur le sujet: « Carte de Pauvreté pour Haïti» Version intérimaire, MPCE, juin 2002; et du rapport sur le développement dans le monde: Combattre la pauvreté: Banque Mondiale, 1998.

    * 17 Superficies calculés sur ordinateur d'après délimitations fournies par l'UTSIG.

    * 18 Source : Département du Nord-Ouest, Rapport diagnostic PDC Jean Rabel, mars 2007.

    * 19 Ceux qui sont interviewés ne sont pas trop enclins à parler de leur condition de vie.

    * 20 Source : Département du Nord-Ouest, Rapport diagnostic PDC Jean Rabel, mars 2007.

    * 21 Interview avec des parents d'émigrants.

    * 22 Par exemple en avril 1971 et en novembre 2006

    * 23 Source : Département de l'Agriculture des Etats-Unis, Manuel de conservation du sol, Washington D.C, 1950.

    * 24 Nicolas Jean Baptiste, Le problème agraire et la situation socio-juridique du paysan à travers l'histoire d'haïti 1697-1992, Port-au-Prince, Les Editions THELUSCOSI, Avril 2000, p.32

    * 25 Jean Fouchard, Les marrons de la liberté, Editions de l'Ecole, Paris, 1972, p.63

    * 26Id., p.64

    * 27 Id., p.424

    * 28 Nicolas Jean Baptiste, op. cit., p.34

    * 29 Nicolas Jean Baptiste, op. cit., p.35

    * 4 Suzy Castor, Les origines de la structure agraire en Haïti, CRESFED, Port-au-Prince, 1987, p. 11

    * 30 Nicolas Jean Baptiste, op. cit., p. 42

    * 31 Suzy Castor, op. cit., p. 25

    * 32 Giovanni Caprio, Introduction à l'histoire économique d'Haïti et l'après Duvalier, Cary Hector / Hérard Jadotte éditions, Port-au-Prince, 1991

    * 33 Suzy Castor, op. cit., p. 17; voir aussi Nicolas Jean Baptiste, op. cit., p.41

    * 34 Suzy Castor, op. cit., p. 21

    * 35 Id., pp. 23-24

    * 36 Id., p. 11

    * 37 Id., p. 15

    * 38 Bénéficiaires des grandes donations de l'Etat

    * 39 Gérard Pierre Charles, L'Economie haïtienne et sa voie de développement, Editions Henri Deschamps, Mai 1993, p. 67

    * 40 Nicolas Jean Baptiste, op.cit., p. 91

    * 41 Franck Blaise, Le problème agraire à travers l'histoire d'haïti, p. 37

    * 42 Ibid.

    * 43 Nicolas Jean Baptiste, op. cit., p. 55

    * 44 Nicolas Jean Baptiste, op. cit., p.56

    * 45 Id., p. 60

    * 46 Ibid.

    * 47 Id., p.61

    * 48 Nicolas Jean Baptiste, op. cit., p.94

    * 49 Id., p. 51

    * 50 Suzy Castor, op. cit., pp. 34 - 35

    * 51 Gérard Pierre Charles, op. cit., pp. 44 - 45

    * 52 Louis Joseph Janvier, Les affaires d'haïti 1983 - 84, Flammarion, Paris, p.17

    * 53 Paul Moral, Le paysan haïtien, Les Editions Fardin (reproduction), Port-au-Prince, 1978, p. 52

    * 54 Jean Jacques Doubout, Féodalisme ou capitalisme: Essai sur l'évolution de la formation sociale d'haïti depuis l'indépendance, Montréal, 1973, p. 16 - 17, cité par Kethly Millet, Les paysans haïtiens et l'occupation américaine 1915 - 1930, Collectif Paroles, La Salle, P. Q., Canada, 1978, p. 32

    * 55 Franck Blaise, Le problème agraire à travers l'histoire d'haïti, p. 99

    * 56 Bernard Etheart, Survol de l'évolution de la structure foncière, publié en quatre parties au journal « Haïti en marche » Nos. 6, 7, 8, 9, éditions du 9 au 5 Avril 2005.

    * 57 Gérard Pierre Charles, op. cit., p.146

    * 58 Paul Moral, op. cit., p.41

    * 59 Gérard Pierre Charles, op. cit., p.33

    * 60 Bernard Etheart, op. cit., No. 8

    * 61 Idem.

    * 62 Ibid.

    * 63 Paul Moral, op. cit., p.53

    * 64 Id., p18

    * 65 Bernard Etheart, op. cit., No. 8

    * 66 Gérard Pierre Charles, op. cit., p.90

    * 67 Nicolas Jean-Baptiste, op. cit., p. 97

    * 68 Le Moniteur, 130ème année, No. 62 du Jeudi 21 Août 1975

    * 69 Arrêté du 13 Janvier 1995, publié au Moniteur, 150ème année, No. 22 du Jeudi 16 Mars 1995

    * 70 Arrêté du 7 Janvier 1995, publié au Moniteur, 150ème année, No. 22 du Jeudi 16 Mars 1995

    * 71 Arrêté du 29 Avril 1995, publié au Moniteur, 150ème année, No. 35 du Jeudi 4 Mai 1995

    * 72 Arrêté du 18 Juillet 1995, publié au Moniteur, 150ème année, No. 58-A du 27 Juillet 1995

    * 73 Arrêté du 23 Octobre 1996, publié au Moniteur, 151ème année, No. 79 du Jeudi 24 Octobre 1996

    * 74 On constate en moyenne sur toute les écoles recensées 34 élèves par maître, avec une pointe à 38 pour la 2ème section (qui compte plus d'écoles nationales que les autres sections). Page 73 du diagnostic descriptif de la commune de Jean Rabel, Janvier 2007.

    * 75 On dénombre 956 maîtres pour 1323 classes (soit un déficit de 367 maîtres par rapport au nombre de classes); 26% des écoles recensées disposent d'un maître par classe. Au niveau des écoles nationals, 7 d'entre elles sur les 23 existantes (soit 30%) disposent d'un maître par classe. Page 72 du diagnostic descriptif de la commune de Jean Rabel, Janvier 2007.

    * 76 Les salles de classe ont des effectifs pléthoriques, supérieur à 50. Parmi les 33 écoles surchargées, 16 sont des écoles publiques, ce qui montre d'une part l'intérêt des familles pour les écoles publiques, d'autre part le grave problème de resources économiques qui mine ces dernières. Page 72 du diagnostic descriptif de la commune de Jean Rabel, Janvier 2007.

    * 77 On ne dispose pas de chiffres pour la déperdition scolaire

    * 78 Source : Département du Nord-Ouest, Rapport diagnostic PDC Jean Rabel, mars 2007.

    * 79 Source : Département du Nord-Ouest, Rapport Diagnostic PDC Jean Rabel, mars 2007.

    * 80 A cause de la formation des ravines et de l'état lamentable des routes qui rend difficile l'écoulement des produits vers la 7ème section, voir aussi le diagnostic descriptif de la commune de Jean Rabel élaboré par le département du nord-ouest en Janvier 2007.

    * 81 Claire Brisset, La santé dans le tiers monde, La Découverte (Le Monde), Paris, 1984, p.

    * 82 Initiative Développement-Programme Haïti, Accès à l'eau potable dans le Nord-Ouest, 2006, p. 1

    * 83 Idem, p. 2

    * 84 Care, La sécurité des moyens d'existence dans le nord-ouest d'Haïti, 1997.






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