Chapitre 4 : Les retombées de la concurrence
entre
les entreprises de montage de deux roues à
moteur
Au Burkina Faso, la possession d'un vélomoteur permet
de se déplacer avec une certaine aisance, une certaine
indépendance et d'être ponctuel à certains rendez-vous. La
place importante du vélomoteur dans la vie des habitants peut être
justifiée par cet article. « Le fétichisme des deux roues
» : "Rares sont les familles au Burkina Faso qui ne disposeraient pas
de moyen de locomotion, en l'occurrence la bicyclette, le vélomoteur ou
la motocyclette. Dans les centres urbains et semi urbains, les salariés,
les commerçants, de façon générale ceux qui ont les
« moyens » ont pour première préoccupation de s'acheter
un moyen de déplacement. Ces engins à « deux roues »
qui apparaissent comme « l'uniforme national » des burkinabé
sont essentiellement de marque française et Japonaise. Pour se rendre au
lieu de travail ou pour la petite virée du week-end le Burkinabé
enfourche son « char avec fierté »"24
4.1- Les avantages liés à la
concurrence
Les entreprises de montage de deux roues à moteur
facilitent non seulement le déplacement des habitants par leurs
produits, mais aussi elles créent des emplois et contribuent ainsi
à la réduction du taux de chômage à Ouagadougou.
Elles emploient 439 personnes. A cet effectif, nous pouvons ajouter environ 100
personnes employées par les entreprises d'importation de
vélomoteurs. Aussi, faut-il noter que la masse salariale
libérée annuellement par les entreprises de montage de
vélomoteurs dépasse le milliard. En plus de ces avantages
liés la création des entreprises de montage de deux roues
à moteur, quels sont ceux qui découlent de leur
compétition ?
4.1-1 Le développement du secteur
informel
La production et les ventes des vélomoteurs ont
favorisé le développement du secteur informel. Ce secteur occupe
une place importante dans la vie économique du Burkina. Il est toutefois
difficile d'avoir le montant de ses recettes.
24 Quotidien Le Pays N° 112 du 13 Mars 1992
4.1-1-1 Les artisans mécaniciens
Le métier de la mécanique est classé dans
la corporation des métiers des services de la réparation et de la
maintenance. Il est réglementé par le ZATU N°AN VII0048/FP/PRES
du 25 juillet 1990.
Il existe très peu de données concernant les
artisans mécaniciens et des ateliers de mécanique à
l'intérieur du pays et de la ville de Ouagadougou. Selon la Direction
Générale de l'Artisanat l'effectif des artisans
mécaniciens au niveau du Burkina Faso était de 20.404 personnes
dont 119 femmes en 1996, à raison de 4 personnes en moyenne par
atelier25. Au total 81.616 personnes travaillent dans ce secteur. Il
existe plusieurs types d'ateliers, et nous pouvons distinguer :
-les réparateurs des petites unités dont
l'activité se résume à de petites opérations telles
que le collage d'une rustine sur une chambre à air, le nettoyage d'une
bougie, etc. Ils s'installent généralement le long des
principales artères en plein air ou sous un arbre. Leur
équipement est sommaire et constitué de quelques clés
essentielles et de quelques pièces de rechange souvent usagées.
Ils constituent la majorité des artisans mécaniciens26
et disparaissent aussi spontanément qu'ils se sont installés. Les
meilleurs d'entre eux peuvent évoluer positivement passant au stade de
l'unité moyenne.
-les réparateurs d'unités moyennes sont mieux
installés que les précédents. Ils sont sous un hangar ou
dans un abri fermé. S'ils ne disposent pas d'un équipement
complet, ils possèdent tout au moins l'outillage indispensable pour
réparer les pannes courantes (décalaminage, changement de
pièces défectueuses, etc.). Ils travaillent souvent avec l'aide
d'apprentis.
-les réparateurs des grandes unités : anciens
dans le métier de la mécanique, ils sont
expérimentés dans l'entretien - réparation des engins. Ils
disposent d'un équipement important et emploient plusieurs apprentis.
-les réparateurs, vendeurs de cycles d'occasion : ils
sont situés dans la zone commerciale de Rood-Woko ou dans le
marché de vélomoteur du secteur 7. Ils achètent les
vélomoteurs déjà usagés, les réparent, puis
les revendent. Certains de ces réparateurs payent des vélomoteurs
volés ou d'origine douteuse.
25 INSD 1996, données définitives du
RGPH
26 Source : Direction Générale de
l'Artisanat
La répartition des artisans mécaniciens dans la
ville de Ouagadougou répond à des logiques spatiales : ils
s'installent généralement à proximité des
établissements générateurs de déplacements
(lycées, universités, centres médicaux, marchés),
le long des axes à forte circulation. Le nombre des ateliers est plus
important au centre ville qu'en périphérie et répond
à la division spatiale de la ville en deux sous systèmes : le
centre et la périphérie.27
Il ressort aussi de nos enquêtes que les
réparations vont du gonflage de la chambre à air, du nettoyage de
la bougie à la révision et au changement des pièces
défectueuses. Le prix de la réparation varie de 25 FCFA (gonflage
de la chambre à air) à 1500F CFA (révision de l'engin).
Les montants de réparation sont directement reversés
auprès du chef d'atelier et les recettes diffèrent selon les
ateliers et en fonction des jours. La recette peut atteindre 5 000F CFA la
journée. On peut ainsi évaluer les recettes mensuelles selon le
tableau ci-dessous 28
Tableau N°5 : Recettes moyennes des artisans
mécaniciens
Recettes journalières en F CFA
|
Recettes mensuelles en F CFA
|
Moins de 500
|
Moins de 13 000
|
500F à 1 500
|
13000F à 39 000
|
1500F à 3 000
|
39 000F à 78 000
|
3000F à 4 500
|
78 000F à 117 000
|
4500 à 6 000
|
117 000F à 156 000
|
Plus de 6 000
|
Plus de 156 000
|
OUEDRAOGO.E, Décembre 2007
27 BAMAS S (1995), Deux roues et transports collectifs
à Ouagadougou. Thèse de Doctorat.
28 Calcul sur la base de 26 jours de travail dans le
mois, la majorité des artisans mécaniciens ne travaillant pas les
dimanches
Photographie N°10 : Des
artisans mécaniciens en réparation
Source : cliché OUEDRAOGO. E, Janvier
2008
Nous apercevons ici deux types d'ateliers de
réparateurs de petites unités. Un atelier où on ne
répare que de vélomoteurs de 110 et 125 cm3. Un autre
atelier où on répare des vélomoteurs de 50 à 80
cm3. Les sites sont à proximité du grand marché
et ne sont pas clôturés.
4.1-1-2 Les laveurs de vélomoteurs
Les laveurs de vélomoteurs ont aussi leur rôle
à jouer dans l'entretien des vélomoteurs. Souvent situés
non loin des ateliers de réparation, ils ont pour mission de laver le
bloc moteur avec de l'essence ou du pétrole pour le débarrasser
des stocks de graisse accumulés. Ensuite ils lavent l'engin avec de
l'eau savonneuse avant de le rincer.
Ces laveurs disposent d'outils de travail pour démonter
les pièces, de seaux, d'éponges et de pinceaux, d'un fût
pour stocker une quantité suffisante d'eau. L'atelier du laveur comprend
2 à 3 personnes et est dirigé par le propriétaire des
outils de travail. Le prix du lavage varie de 250F CFA à 500F CFA. Le
prix est fonction du type d'engin et de son degré de salubrité.
La précaution supplémentaire que requiert le lavage des
vélomoteurs de 80 cm3 justifie le coût
élevé de ce service (500F CFA). En effet en cas de cassure des
pièces en plastique, le remboursement est à la charge du laveur.
Il faut noter aussi qu'en plus des vélomoteurs, les laveurs assurent
parfois le nettoyage et le lavage des voitures.
Photographie N° 11 : Un laveur de
vélomoteur au grand marché de Ouagadougou
Source : cliché OUEDRAOGO. E, Janvier
2008
Sur cette photographie, nous apercevons un laveur qui
après le lavage du bloc moteur est en train de laver au savon un
vélomoteur de 80 cm3 de marque Yamaha produit du groupe CFAO
MOTORS.
4.1-1-3 Les vendeurs de pièces
détachées
On distingue deux principales filières
d'approvisionnement, celles des pièces dites d'origine, provenant des
constructeurs de cycles basés en Europe (France, Allemagne, etc.) ou en
Asie (Chine, Japon, etc.). L'autre filière et qui est la plus
importante, est celle des pièces dites adaptables. Les pièces
adaptables proviennent du Nigeria et transitent par les pays comme la
Côte d'Ivoire, le Togo. Les importations de ces pièces sont
souvent illicites.
Du fait de la fraude le marché burkinabé est
inondé des pièces adaptables. Ces pièces sont moins
coûteuses que celles dites d'origine. Par exemple, un piston
importé du Nigeria coûte 2000F CFA alors que celui provenant de la
France se vend à 4500F CFA.
Il faut remarquer que de nos jours certains vendeurs avec la
complicité des artisans mécaniciens proposent aux clients des
pièces de mauvaise qualité avec des emballages provenant des
constructeurs de cycles. Le commerce des pièces détachées
profite peu aux consommateurs puisque celles-ci se détériorent
vite. En effet 60% de nos enquêtés doutent de la qualité
des pièces et s'interrogent sur la bonne foi des artisans
mécaniciens.
Tout comme pour les artisans mécaniciens, le nombre de
vendeurs de pièces détachées est difficile à
évaluer. Nombreuses sont les boutiques de vente des pièces
détachées disséminées à travers la ville.
Nous notons aussi une augmentation du nombre des gérants de parking qui
assurent la garde des engins.
4.1-1-4 Les gérants de parking
La gestion des parkings remonte à 1980, période
où on notait une recrudescence des vols de cycles et cyclomoteurs. Ces
gérants de parkings sont des personnes oeuvrant dans le secteur
informel. Pour créer un parking dans la ville de Ouagadougou, il faut
une demande adressée aux Maires des arrondissements. Mais, certains ne
respectent pas les règles en la matière. La création des
parkings à proximité des bars, des restaurants, et des
écoles se fait souvent avec l'accord des responsables des
établissements ci-dessus cités. Ces créations
parallèles ne sont pas prises en compte par l'association des
gérants de parking reconnue par l'arrête N°91-105 du
Ministère de l'Administration Territoriale et qui contrôle cette
activité de gardiennage des engins.
Les parkings sont situés presque partout dans la ville
de Ouagadougou surtout à proximité de quelques lieux de
fréquentation quotidienne. Ce sont par exemple les banques, les magasins
de commerce, les marchés, les salles de cinéma, les centres de
santé, les bars, les hôtels, les restaurants, les
établissements scolaires et universitaires.
En ce qui concerne le fonctionnement des parkings, on peut
dire que le client qui arrive au parking reçoit un ticket portant un
numéro et estampillé avec le nom et l'adresse du parking. Le
double du ticket est accroché à l'engin ; dans certains parkings
nous avons des plaquettes en bois ou en fer avec les numéros. Les prix
de gardiennage vont de 25F CFA à 200F CFA en fonction de la
période et des manifestations culturelles ou sportives. En effet pour le
parking de nuit, lors des manifestations comme le SIAO, le FESPACO, les matchs
de football le prix de gardiennage est de 200F CFA. La recette
journalière varie en fonction du site ; certains gérants gagnent
à la fin de la journée 2000 F CFA tandis que d'autres
comptabilisent 30 000F CFA.
Les gérants de parking et les autres acteurs du secteur
informel payent la taxe annuelle en fonction de la recette journalière.
L'imposition annuelle de cette activité est régie par les lois de
1996 et 2002. Ces lois distinguent six classes qui payent entre 20 00F
84 CFA et 100 000F CFA comme taxe annuelle au titre de la
contribution du secteur informel
au développement du pays. La grille de paiement pour les
catégories du secteur informel se présente comme suit :
Tableau N°6 : Imposition de taxe annuelle
selon la recette journalière
Classe
|
Recette
journalière en
CFA
|
Montant de la taxe annuelle en
CFA
|
|
1996
|
2002
|
1
|
[30.000-42.000]
|
100.000
|
500.000
|
2
|
[22.500-30.000[
|
90.000
|
400.000
|
3
|
[1 5.000-22.500[
|
70.000
|
300.000
|
4
|
[4.500-15.000[
|
50.000
|
200.000
|
6
|
=4.500
|
20.000
|
75.000
|
Source : Direction Générale des
Impôts, 2007
Il faut noter que beaucoup d'acteurs ci-dessus cités ne
payent pas les taxes sous prétexte que le montant à payer est
excessif. C'est ainsi que la direction générale des impôts
a suspendu l'application de la loi de 2002. En attendant l'élaboration
d'une nouvelle grille de recouvrement des impôts, celle qui est toujours
en vigueur date de 1996.
Photographie 12 : Un parking d'ordre artisanal
à l'université
Source : cliché OUEDRAOGO. E, Janvier
2008
Sur cette Photographie nous observons un parking
monté au sein de l'université de Ouagadougou avec des
matériaux rudimentaires : Il y a des piquets en bois reliés avec
des cordes avec une ouverture servant de porte d'entrée et de sortie du
parking. Elle présente un cas spécifique de parking qui n'est pas
aménagé. Les vélomoteurs sont rangés en fonction du
type de cylindrée.
Les activités des artisans mécaniciens, des
laveurs de vélomoteurs, des vendeurs de pièces
détachées, des gérants de parking découlent de la
concurrence dans le secteur industriel des deux roues à moteur. Ces
activités sont indirectement liées à celles des
entreprises de montage des deux roues motorisées. Cette concurrence a
favorisé aussi la création et le développement des
sociétés d'hydrocarbures
4.1-2- La création des sociétés
d'hydrocarbures
Les deux roues à moteur consomment différents
types d'énergie : les cyclomoteurs consomment de l'essence
mélange 2 temps, alors que les vélomoteurs et motocyclettes
fonctionnent avec de l'essence ordinaire ou du super 91 comme les
véhicules. Mais il est courant de voir des usagers de vélomoteurs
prendre de l'essence mélange 2 temps, soit parce que leurs engins sont
amortis, soit parce que les propriétaires ne sont plus à mesure
d'acheter de l'essence ordinaire ou super. Ils modifient alors le boc moteur et
font des réadaptations. Le prix du litre de carburant fluctue de nos
jours en fonction du cours du marché mondial du
pétrole.29
Nous distinguons quatre structures de vente pour la
distribution des hydrocarbures : - la station service qui commercialise cinq
types de carburant : le super 91, essence ordinaire, essence mélange 2
temps, gazole et pétrole. Elle est aussi équipée d'une
installation d'air comprimé, d'une aire de lavage et de graissage de
véhicules ;
-le « filing service » ne sert que les cinq types de
carburants et n'est pas équipé pour le lavage et le graissage des
véhicules ;
-le point de vente qui commercialise soit l'essence ordinaire,
soit le mélange 2 temps et le pétrole, soit le mélange et
le pétrole ;
-enfin la pompe mélangeur qui ne distribue que du
mélange 2 temps.
29 Ministère du Commerce, de l'Artisanat et de
la Promotion de l'Entreprise et de l'Artisanat (MCPEA)
Chaque station, filing service ou point de vente est
rattachée à l'une des sociétés
pétrolières appelées marqueteurs : Total, Burkina
&Shell, Petrofa, Plub, SOGEL-B, etc.30
Au cours de notre travail de terrain, nous avons
dénombré plus de 300 stations reparties dans la ville de
Ouagadougou. L'augmentation du nombre de stations démontre que le
commerce des hydrocarbures évolue parallèlement avec celui des
deux roues. En effet, il y avait en mars 1993, 138 pompes mélangeurs
fonctionnelles et 59 stations et filings services.31
Photographie N°13 : Des stations
services
Source : cliché OUEDRAOGO. E / Juin
2008
Sur ces Photographies nous avons au niveau de la station
service Shel de Dassasgho, et de celle du groupe SOGEL-B des
rangs de consommateurs qui attendent pour pouvoir s'acheter de l'essence
mélange 2 temps. Nous observons plusieurs types de
cylindrée.
En plus du développement du secteur informel et des
sociétés d'hydrocarbures, la concurrence crée une
facilité d'accès des consommateurs aux deux roues à
moteur.
30 BAMAS S (1995), Deux roues et transports collectifs
à Ouagadougou. Thèse de Doctorat.
31 Ibidem
4.1-3- La facilité de l'accès aux deux
roues à moteur
La concurrence apparaît comme un facteur
permetant d'avoir sur le marché plusieurs produits qui
se différencient selon la qualité et le prix. Cette
différence de prix permet à un chacun de payer son
vélomoteur en fonction de son revenu. De même qu'il y a des engins
coûtant plus du million et qui ne sont pas à la portée de
tous, on retrouve également sur le marché des engins de 200.000F
CFA à 300.000FCFA même s'ils ont une" origine douteuse". Cette
possibilité d'avoir un cyclomoteur en fonction de sa bourse est
appréciée par certains consommateurs sous cette affirmation :
« J'ai choisi cet engin, parce que je ne peux pas payer un autre, car
mon revenu est faible et j'ai beaucoup de dépenses». La
concurrence permet donc l'épanouissement d'une certaine catégorie
de la population.
Avec la concurrence nous avons constaté que la SIFA n'a
plus le monopole dans le domaine du montage des vélomoteurs sur le
marché intérieur burkinabé qui consomme 50.000 engins par
an. 32Nous avons plusieurs vélomoteurs qui sont
importés ou qui proviennent de la production des entreprises de montage
localisées sur le territoire national.
Le développement du secteur informel, la
création et la multiplication des sociétés
d'hydrocarbures, la facilité de l'accès aux engins
motorisés sont les avantages liés à la concurrence. Elle
est toutefois limitée par certaines pratiques.
4.2-Les limites à la concurrence
La concurrence est limitée par un certain nombre de
pratiques parmi lesquelles nous avons la fraude, la contrefaçon, le
coût des facteurs de production, etc
4.2-1-La fraude et contrefaçon massive
-La fraude
Selon les responsables de la Coordination Nationale de Lutte
contre la Fraude
32 SIDWAYA N° 5533 du 23-02-2006
(C.N.L.F), la fraude est une tromperie sur la nature,
l'origine, la qualité ou la quantité des vélomoteurs
importés. Elle est sensible et difficilement quantifiable au Burkina
Faso. Elle cause de sérieux dommages à l'économie
Burkinabé.
Sur le territoire burkinabé on rencontre plusieurs formes
de fraude dans le secteur des vélomoteurs. Ce sont :
-une sous facturation à l'entrée des
vélomoteurs qui consiste à présenter de faux reçus
de paiement pour avoir une réduction des frais de douanes.
-une sous estimation des quantités qui consiste à
mettre plusieurs engins dans un seul carton. Cette pratique trompe les
douaniers qui établiront une fausse déclaration.
-la contrebande ou l'importation frauduleuse de
vélomoteurs par les pistes. Cette pratique consiste à faire
entrer par vagues successives, des engins qui ne seront pas
dédouanés. Ces vélomoteurs sont en nombre important sur le
territoire et sont dépourvus de plaque d'immatriculation.
-une délivrance de faux papiers, cette pratique consiste
à délivrer de fausses cartes grises et de fausses plaques
d'immatriculation.
Un exemple de pratique frauduleuse nous est donné par
l'article de presse de Hervé D'AFRICK33
-la contrefaçon
La contrefaçon est une reproduction, un usage, une
apposition ou imitation d'une marque identique ou similaire à celle
désignée dans l'enregistrement, sans l'autorisation du
propriétaire ou du bénéficiaire du droit exclusif
d'exploitation. C'est aussi toute copie, importation où vente d'une
invention nouvelle, sans le consentement du titulaire du brevet. Enfin elle
désigne toute reproduction, totale ou partielle d'un dessin ou
modèle, sans autorisation de l'auteur.34
Tout comme la fraude, la contrefaçon a une grande
ampleur dans le domaine des vélomoteurs au Burkina. Elle est
réalisée par certains opérateurs économiques ou
commerçants qui font des imitations frauduleuses. Ces imitations violent
les droits de la
33 D'AFRICK Hervé. Journal LE PAYS N° 3786 du 12 janvier
2007, page 9
34 Direction Générale du
Développement Industriel. 2004, Rapport sur l'industrie au Burkina Faso,
période 2000-2002, page 15
propriété intellectuelle. La pratique de la
contrefaçon se manifeste de la façon suivante : le
vélomoteur est importé frauduleusement et une fois sur le sol
Burkinabé les contrefacteurs collent sur les engins de fausses
étiquettes sur la marque ou le lieu de production.
Cette pratique trompe la vigilance des consommateurs.
Les champs de la contrefaçon sont vastes et touchent
presque tous les secteurs économiques ; leurs conséquences sont
souvent désastreuses pour l'économie nationale. On note surtout
la perte de revenus fiscaux pour l'Etat Burkinabé. Pour les entreprises
de montage, la contrefaçon entraîne des pertes de parts de
marché pour celles qui en sont victimes et affecte également
l'image de marque des produits authentiques. Les entreprises sont, ainsi
spoliées. Elles n'obtiennent pas les bénéfices de leurs
efforts d'investissements. C'est pour lutter contres ces pratiques
anticoncurrentielles que les structures comme la Coordination Nationale de
Lutte contre la Fraude (C.N.L.F), la D.G.D et la COTECNA font des sorties et
contrôles inopinés. Au cours de ces sorties, les produits
fraudés ou contrefaits sont saisis ainsi que les responsables de ces
délits.35
Les éventuels faussaires interpellés sont
condamnés au paiement d'une amende de 1 000 000F CFA à 6 000 000F
CFA, ou à des peines d'emprisonnement.
4.3- La sanction des pratiques
anti-concurrentielles
A l'image des pratiques qui sont diversifiées, nous
avons une diversité de sanctions. Mais toutes les pratiques
anticoncurrentielles ne sont pas sanctionnées. En effet certaines
d'entres elles bénéficient d'exemptions. Notre étude sera
donc consacrée aux peines prévues par la loi n°15/94/ADP
pour les pratiques anti-concurrentielles.
En fonction de la gravité de l'acte produit, la loi
prévoit des sanctions administratives qui relèvent de la
compétence du ministère chargé du commerce. Le
prononcé de ces sanctions peut se faire après consultation de la
commission de la concurrence ; ensuite il y a les sanctions judiciaires. Elles
sont composées de sanctions pénales et civiles. Pour ce qui est
des sanctions pénales la loi prévoit à l'article 53 et
suivants des peines d'emprisonnement allant de 1 mois à 2 ans et d'une
amende de 5
35 D'AFRICK Hervé. Journal LE PAYS N° 3786 du
12 janvier 2007, page 9.
000F CFA à 25 000 000F CFA. En ce qui concerne les
sanctions civiles, le législateur Burkinabé prévoit d'une
part le retrait des produits frauduleux ou contrefaits, la fermeture de
l'entreprise responsable et d'autre part la mise en oeuvre de l'action en
réparation ; enfin nous avons les sanctions arbitrales. Les arbitres
peuvent annuler totalement ou partiellement des conventions. Ils peuvent
condamner aussi les faussaires à des dommages et intérêts.
Cependant ils ne peuvent appliquer des sanctions pénales aux infractions
dont ils ont tiré un principe de responsabilité civile. Ils ne
peuvent non plus prononcer des sanctions administratives pécuniaires
dont sont assorties les pratiques anticoncurrentielles qu'ils ont
constatées.
La concurrence dans le domaine des deux roues à moteur,
entraîne des conséquences positives. Toutefois, elle n'est pas
sans conséquences négatives.
4.4- Les conséquences négatives de la
concurrence
La concurrence entre les entreprises de montage des deux roues
à moteur favorise l'obtention de plusieurs produits sur le marché
provoquant une mévente. Les produits de ces entreprises sont
impliqués dans les accidents de la circulation routière.
4.4-1 - La mévente
Le marché des vélomoteurs est devenu important
dans la ville de Ouagadougou. Ainsi il existe un nombre important
d'opérateurs économiques qui font entrer des vélomoteurs
dans la ville. A ce nombre, il faut ajouter les productions des
différentes entreprises de montage des deux roues à moteur
implantées sur le territoire national. Nous avons ainsi plusieurs
personnes qui assurent la vente des vélomoteurs. Il est de nos jours
facile de se procurer un vélomoteur à moindre coût.
La SIFA a fait partie des 12 premières
sociétés les plus rentables à être
privatisées en 1994. Ses problèmes vont commencer en 2000 avec la
levée de l'avantage qui lui était octroyée de fonctionner
sous le régime TVA sur la marge. Cela s'est ressenti avec la chute du
chiffre d'affaires qui est passé de 15 milliards en 1999 à 9
milliards en 2000. Cette situation va s'empirer à partir de 2004 avec
l'ouverture des marchés, et la création des nouvelles entreprises
de montage de vélomoteurs. Il y a aussi, la diminution des
volumes de production. Les volumes étaient de 10 500
cyclomoteurs et 1 187 motocyclettes en 2006. Il y a enfin la diminution du
personnel avec un effectif de 106 permanents de nos jours.
Dans un contexte de vie chère, les vélomoteurs
ne s'écoulent pas aussi aisément. Il y a ainsi une grande
quantité de vélomoteurs dans les magasins des revendeurs de
vélomoteurs. Cette assertion se vérifie par ce témoignage
de Patrice NANA, revendeur de vélomoteur au grand marché
Rood-Wooko : « cela fait un mois que je n'ai pas vendu un
vélomoteur, cela s'explique par le nombre de revendeurs et aussi par la
faiblesse de revenus des populations ».
Le marché des vélomoteurs de nos jours est
marqué par une mévente. Cette situation ne permet pas aux
entreprises de montage de vélomoteurs de rentabiliser les frais de
production.
Les produits des entreprises sont impliqués dans les
accidents de la circulation routière. Les mauvais comportements des
usagers ternissent souvent l'image d'une marque. Ainsi, force est de constater
que les vélomoteurs de 110 cm3 sont plus impliqués
dans les accidents au niveau de la ville de Ouagadougou.
4.4-2-Les accidents de la circulation
routière
Les accidents de la circulation routière ont plusieurs
causes. On peut ainsi noter les causes humaines, techniques, etc. Parmi les
causes des accidents de la circulation, celles relatives à l'homme
représentent une part importante.
Les défaillances techniques des moyens de transport
sont aussi source d'accidents de la circulation. Ces défaillances se
résument à un problème d'éclairage, de freinage, ou
de direction pour les véhicules. On peut par exemple constater une
défaillance au niveau du système de freinage avec la rupture du
câble. Ce constat est notoire dans la circulation avec des usagers qui
usent de plusieurs stratégies pour s'arrêter au niveau des
panneaux « stop ».
Les deux roues motorisées n'ont pas de contraintes
liées à la visite technique, de ce fait, les visites pour
l'entretien ne sont que délibérées. Au cours de notre
enquête 32% de nos interlocuteurs ont affirmé qu'ils n'effectuent
leur révision que tous les deux mois
faute de moyens financiers ; 50% des enquêtés
effectuent quant à eux des contrôles mensuels tandis que 18% font
un contrôle toutes les deux semaines pour un entretien fréquent de
l'engin. Tous ces consommateurs reconnaissent que les contrôles
fréquents et le qualité de l'essence sont importants pour
éviter un temps d'amortissement réduit.
Dans la ville de Ouagadougou, le nombre des accidents est en
hausse et implique une grande partie des deux roues et surtout les deux roues
à moteur. En effet sur 4227 et 4608 cas d'accidents respectivement
constatés par les agents du Commissariat central de Police de
Ouagadougou en 2006 et 2007, l'implication des deux roues étaient
successivement de 64,30% et 60,39%36. Le graphique N°5, ci
dessous présente les parties en cause dans les accidents de la
circulation routière au cours de la période de 2006 et 2007. Les
données obtenues ne distinguent pas les deux roues motorisées et
les bicyclettes. La conclusion qui découle de l'analyse de ce graphique
révèle que les accidents entre les deux roues et les quatre roues
sont les plus importantes, puis viennent les accidents entre les deux roues
entre elles. L'année 2007, sera aussi marquée par la hausse des
accidents entre les deux roues et les piétons, et enfin les deux roues
entre elles.
Graphique N° 5 : Accidents de la circulation
routière en 2006 et 2007
Accidents de la circulation en 2006
2RouesxPiétons
4Rouesx2Roues 2Rouesx2Roues
Accidents de la circulation en 2007
4Rouesx2roues 2Rouesx2Roues
2Roues x Piétons
Source : Commissariat Central de Police de Ouagadougou, Janvier
2008
Les conséquences des accidents sont nombreuses. Ainsi,
il y a des conséquences d'ordre sanitaire et des conséquences
d'ordre économique et sociale. Les accidents de la circulation
contribuent à augmenter le taux de mortalité de la ville de
Ouagadougou. On enregistre en moyenne 4000 cas d'accidents par an dont 110
décès comme nous le
36 Commissariat Central de Police de Ouagadougou,
section des accidents
93 montre le graphique N°6. Ces chiffres (qui
concernent les accidents ayant nécessité une
évacuation vers une structure sanitaire et /ou les
victimes sont décédées sur place ou pendant le transport)
peuvent s'accroître si l'on considère les cas où on a
recours à la médecine traditionnelle, ou si l'on tient compte des
victimes qui succombent après quelques jours d'hospitalisation.
Graphique N° 6: Evolution
des accidents de la circulation et des décès
De 1995 à 2006 dans la ville de
Ouagadougou
Source : B.N.S.P, 2006
4000
7000
6000
5000
3000
2000
1000
0
Nombre d'accidents Nombre de décès
250
200
50
0
150
100
4.5-Les perspectives
La crise économique persistante et les nouvelles
politiques de transport ont contribué au désengagement de
l'état dans la gestion des transports urbains. Les entreprises de
transport en commun rencontrent ainsi des difficultés qui se
résument comme suit : déficit d'exploitation de plus en plus
croissant, insuffisance des moyens pour financer l'entretien des
véhicules en partie immobilisés, dégradation de la
qualité et du nombre des services, difficulté de gestion. Ces
difficultés ont permises la disparition de la majorité des
entreprises de transport en commun et la régression de celles qui
subsistent.
Cette situation a favorisé la création des
entreprises de montage de vélomoteurs qui proposent un moyen de
déplacement souple, rapide et commodes. Les facteurs favorables
permettent ainsi l'arrivée de nouvelles entreprises sur le
marché. C'est le cas
de la création récente de l'entreprise LIFAN
Motors.
L'état Burkinabé devrait aussi adopter une
nouvelle politique afin de protéger les entreprises de montage contre
les pratiques anti-concurrentielles. Ces mesures permettront aux entreprises de
toujours contribuer au développement du pays à travers les
investissements, la réduction du chômage, etc.
L'augmentation du nombre des entreprises de montage des deux
roues à moteur permettra d'obtenir une gamme variée de
vélomoteurs sur le marché. Ces vélomoteurs se
différencieront du point de vue de la qualité et du prix. Elle
permettra ainsi aux consommateurs de faire le choix en fonction de leur
revenu.
Cette augmentation aura pour conséquences un
accroissement du nombre des usagers. Il se posera ainsi un problème de
circulation à cause de l'étroitesse des voies de circulation. Une
nécessité s'impose pour la commune de Ouagadougou d'investir dans
la gestion de la voirie en vue d'améliorer la fluidité.
En plus de la congestion du trafic, il se posera un
problème de dégradation de l'environnement et de pollution. En
effet, l'augmentation du nombre des engins motorisés aura un impact sur
la qualité de l'air. Cette situation occasionnera une pollution
atmosphérique locale. Avec les effets dus au changement climatique, il
serait donc nécessaire de libéraliser le marché des
vélomoteurs et de penser aussi à la préservation de
l'écosystème.
Enfin, il faut noter que l'importance des flux de transport
dans la ville de Ouagadougou occasionnera aussi un problème
d'insécurité routière. Ce qui provoquera une hausse du
nombre des accidents. Ces accidents impliqueront en grande partie les deux
roues à moteur. La commune de Ouagadougou devrait, en plus de la
politique nationale sur la sécurité routière, adopter une
politique communale en vue de préserver la santé des citadins, et
de réduire les coûts et nuisances qui découlent du
système de mobilité urbaine.
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