Les problèmes de la paix dans la corne de l'afrique( Télécharger le fichier original )par Sagefils Katumba N'senga Université de Lubumbashi - Licence 2008 |
LES CONFLITS DANS LA CORNE DE L'AFRIQUEParmi les conflits qui rythment l'évolution de l'Afrique à intervalle plus ou moins régulier, les guerres constituent assurément le défi majeur à relever en ce début de millénaire. Nombreux sont en effet, les conflits qui déchirent le continent. Les fondements de ces guerres restent à des degrés variables, les mêmes un peu partout : une mainmise totale sur la pouvoir politico-économique par des groupes ethniques. Les conséquences majeures en seront la violence comme mode d'alternance politique et l'effondrement des Etats. Dans le présent chapitre, il sera question de l'examen minutieux du conflit Erythréo-Ethiopien, du conflit Somalien, de leurs causes ainsi que de leurs conséquences dans la Corne de l'Afrique. Section Première : LE CONFLIT ERYTHREO-ETHIOPIENNous allons, dans cette section, voir les causes lointaines, immédiates et les conséquences du conflit Erythréo-Ethiopien. III.1.1. Les causes lointainesLes causes lointaines sont à chercher dans la profondeur de l'histoire de ces deux pays, elles se sont profilées à l'horizon de l'histoire de ces deux pays depuis le temps anciens. Les belligérants de la Corne de l'Afrique sont très souvent présentés à juste titre, comme des frères d'armes devenus ennemis. C'est que les deux dirigeants actuels ont écrit ensemble une partie de l'histoire de leurs pays avant de se brouiller et de se vouer une haine profonde86(*). C'est d'abord le passé Ethiopien, seul pays d'Afrique à n'avoir jamais subi la colonisation, excepté une courte occupation par l'Italie à partir de 1935, avant d'être libérée par la Grande-Bretagne en 1941. Cet empire exerçait une véritable fascination sur l'occident à cause de ses origines légendaires qui remonteraient au fils de la Reine de Saba et du roi Salomon. En outre il était considéré comme un « Bastion » de la chrétienté au milieu des peuples animistes ou musulmans ; donc, un Etat « Civilisé » aux yeux des Européens du 19e Siècle. L'histoire de l'Erythrée, de son côté, s'est longtemps confondue avec celle de l'Ethiopie. Jusqu'à la fin du 19e Siècle, rien ne permettait de séparer les deux pays, tant au plan géographique qu'humain. Ce passé nous apprend que l'Erythrée, ancienne dépendance du royaume copte d'Axoum jusqu'à sa destruction, était intégré à l'empire Ethiopien. Annexée par l'Italie fasciste en 1935, qui souhaitait en faire sa vitrine de l'Outre-Mer, elle resta sous occupation jusqu'à ce que l'Italie perde ses colonies africaines en 194587(*). Objet des convoitises entre puissances, l'Erythrée se retrouvent fédérée à l'Ethiopie avec un statut d'entité autonome, conformément à la résolution 390 de Décembre 1950 de l'Assemblée générale des Nations Unies. Cette décision ambiguë des Nations Unies octroyait aux érythréens un statut singulier de « peuple reconnu titulaire de droit mais non sujet de droit ». Dans le même temps, elle ne reconnaissait pas l'indépendance, ni d'ailleurs l'annexion du pays, se contentant de poser le principe d'une « étroite association politique et économique avec l'Ethiopie, qui assure aux habitants de l'Erythrée le respect et la sauvegarde de leurs institutions, de leurs traditions, de leurs religions ou de leurs langues88(*). Enfin, la résolution 390 de l'Assemblée Générale mentionnait expressément les notions de constitution, d'administration, d'Assemblée érythréenne, autant d'attribut d'une souveraineté mais uniquement conçues pour renforcer l'autonomie. Ce statut, savamment élaboré, ne survivra pas à la volonté Ethiopienne qui n'hésita pas à le remettre en cause. Rien ne semblait donc s'opposer à l'annexion de l'Erythrée devenue en 1962, la quatorzième province éthiopienne. Les germes d'une future crise étaient posés avec les débuts d'une guérilla, prélude à une guerre de libération, en ce début des années 1960, ou nombre de pays africains accédaient à la souveraineté. Conjuguant leurs efforts avec ceux des membres du Front de Libération du Tigré (FPLT), les érythréens contribuèrent à la chute du régime de Mengistu Hailé Mariam en 1991. Dans la foulée, le Premier Ministre Ethiopien Melez Zenawi organisa un referendum d'autodétermination, qui abouti à l'indépendance de l'Erythrée, le 24 Mai 1993. Dans son principe même, le referendum semblait aller à l'encontre d'un fondement majeur de la charte de l'Organisation de l'Unité Africaine (OUA) : celui de l'intangibilité des frontières héritées de la colonisation. Cette consultation pouvait faire craindre l'émergence d'une jurisprudence tirée du cas érythréen, ouvrant la voie à d'éventuelles tentatives de remise en cause des frontières, dans un continent marqué par une multitude d'ethnies éparpillées au gré des conquêtes coloniales. L'Erythrée devenait ainsi le 52ème Etat d'Afrique avec comme Président Issaias AFEWORKI, ancien chef de guerre charismatique et ambitieux pour son pays89(*). Le paragraphe suivant traitera des causes immédiates du conflit Erythréo-Ethiopien. * 86 PENINOU, J.L., « Erythrée-Ethiopie : Une guerre absurde »,in Le Monde Diplomatique, n°336 du juin 1998, p.11. * 87 PENINOU, J.L., Art.cit., pp.11-12 * 88 BA ABOU, Y., Ethiopie-Erythrée : Apres la paix, à nouveau la guerre, IDPD, Nice, 1998, p.4. * 89 BA ABOU, Y., Op.cit., p.6. |
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