6. Conclusion
Le but de cette étude était d'étudier la
variation des paramètres cinétiques et cinématiques au
cours de la répétition de sprint (4 × 100m) et l'effet de la
fatigue physiologique sur la performance au 100m.
Notre première hypothèse était l'effet de
la raideur mécanique sur la conservation de la vitesse maximale de
course. Nous avons prouvé que la raideur verticale affecte indirectement
la performance au cours du 100m, en faisant varier les paramètres de la
foulée. Notre hypothèse n'est pas confirmée car nous
n'avons démontré aucune relation directe entre la raideur des
membres inférieurs ou la raideur verticale et la vitesse de course. Au
cours du 100m sprint, l'abaissement des membres inférieurs et le temps
de contact varient dans le même sens que la raideur verticale. Cela nous
amène à conclure que des valeurs optimales de raideur verticale
sont nécessaires pour optimiser la restitution de l'énergie
élastique au cours du cycle étirement- raccourcissement, ce qui
permet le maintien de la vitesse maximale.
Nous avons émis l'hypothèse que la raideur des
membres inférieurs est corrélée avec la diminution de la
vitesse de course au cours de la répétition de 100m. Nous avons
démontré que la performance au 100m diminue avec la
répétition de 4 × 100m, et que l'expertise permet de
diminuer les effets de la fatigue. Cette dernière n'affecte ni la
raideur des membres inférieurs ni la raideur verticale.
Notre protocole amène à une fatigue
périphérique qui affecte les paramètres de la
foulée. Le temps de contact, le temps d'envol et l'abaissement du centre
de masse reste inchangés au cours de la répétition. La
fatigue induit une diminution de l'amplitude et de la fréquence de la
foulée à travers les répétitions de 100m. Cela
empêche les sprinters experts de garder leur haut niveau de vitesse et
à décélérer à la fin de la course. Chez les
novices [23], la fatigue induit une diminution de la fréquence de la
foulée qui s'accompagne d'une diminution du temps de contact. Le temps
d'envol reste inchangé. Cela n'est pas le cas pour les experts de notre
expérience car la fatigue affecte leurs fréquences et leurs
amplitudes de foulée indépendamment des paramètres
temporels.
L'insensibilité de la raideur des membres
inférieurs et de la raideur verticale des athlètes experts
à la répétition se présente comme un processus
d'adaptation à la fatigue. Selon Nummela et al. (1992), cette
dernière induit une augmentation de la durée de la contraction
musculaire responsable de la prolongation du temps de contact au sol. Le temps
de contact ne varie pas avec la fatigue due à la
répétition de sprint. Les fluctuations verticales du centre de
masse sont ainsi réduites par la conservation du temps de contact et de
l'abaissement des membres inférieurs. Chez les experts, la raideur des
membres inférieurs est restée inchangée avec la
répétition de 100m. La conservation d'une certaine valeur de la
raideur mécanique est-elle une stratégie du SNC pour gérer
les différents paramètres mécaniques ?
La diminution de la performance avec la
répétition peut être expliquée, au niveau
énergétique, par l'augmentation des concentrations de lactate.
Notre troisième hypothèse est confirmée. Le
métabolisme anaérobie est incapable d'endurer un effort
supramaximal sur une durée telle que celle du 100m. L'accumulation des
lactates sanguins avec la répétition de sprint est due à
l'enchaînement de répétition de course à vitesse
maximale avec des récupérations incomplètes, donc à
la sommation des taux de lactate de chaque 100m.
Notre travail de recherche a permis de mieux comprendre la
variation des paramètres biomécaniques avec la
répétition et l'effet de la fatigue physiologique sur la
performance au 100m sprint. Ceci présente un constat intéressant
qui permet d'appréhender les causes et les effets de la fatigue sur la
performance, sans pour autant expliquer les interactions entre les
différents systèmes du corps humain. En effet, le système
musculosquelettique est piloté par des commandes centrales,
c'est-à-dire par le SNC qui reçoit des afférences
relatives à la fatigue, i.e. des informations physiologiques,
biomécaniques, sensorielles et psychologiques. Dans le modèle
complexe [26], ces rétroactions sont envoyées par les
différents systèmes impliqués dans la réalisation
de l'exercice, sont centralisées et intégrées par le
système nerveux et enfin transformée de façon inconsciente
en sensation de fatigue.
Les résultats de notre étude sont à
compléter avant de pouvoir être publiés et
généralisés. Les données qu'y ont été
recueillies présentent un échantillon de 8
sprinters. Des études neuromusculaire et psychologique
s'avèrent nécessaires pour compléter notre
interprétation de la fatigue et répondre aux questionnements
suivants:
- Comment sont traitées les différentes
rétroactions dans le système nerveux ?
- Quels sont les modes et les délais d'ajustement de
l'effort ?
Pour répondre à cela, nous proposons d'utiliser
notre méthode d'expérimentation et de la compléter par des
enregistrements électromyographiques (« EMG ») de
l'activité musculaire des membres inférieurs et une étude
de la poulaine afin de comprendre l'adaptation des experts à l'effort et
à la fatigue.
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