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Agriculture et croissance économique au Cameroun

( Télécharger le fichier original )
par Hervé BELLA
Institut Sous-régional de Statistique et d'Economie Appliquée (ISSEA) - Ingénieur d'Application de la Statistique 2009
  

Disponible en mode multipage

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    Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

    (CEMAC)

    (ISSEA)

    Organisation Internationale

    B.P: 294 Yaoundé (République du Cameroun) ; Tél.: +237 22 22 01 34 ; Fax: +237 22 22 95 21.

    Email : isseacemac@yahoo.fr

    MÉMOIRE DE FIN DE FORMATION

    AGRICULTURE ET CROISSANCE ÉCONOMIQUE AU CAMEROUN

    Rédigé en vue de l'obtention du diplôme d'Ingénieur d'Application de la Statistique.

    Rédigé par :

    BELLA Hervé, Élève Ingénieur d'Application de la Statistique, quatrième année

    Soutenu le 15 juin 2009 devant le jury composé de :

    Dr. Emmanuel DOUYA :

    Président

    Dr. Achille JAZA FOLEFACK :

    Examinateur

    M. Jeannot NGBANZA :

    Directeur de mémoire

    Année scolaire 2008/2009

    DÉDICACE

    À mes parents MEKANDA Zénon et BELLA Élise.

    REMERCIEMENTS

    La sagesse africaine nous apprend qu'il est plus aisé à un homme de grimper sur un arbre avec ses deux bras qu'avec un seul. Ceci revient à dire que dans le cadre d'un travail intellectuel, une seule tête fut-elle celle d'un érudit ne peut le mener à terme toute seule. Cette recherche a bénéficié des conseils scientifiques des uns, de l'appui moral et du soutien financier des autres. Dans l'impossibilité de les citer tous, nous adressons nos remerciements particulièrement à :

    · M. NGBANZA Jeannot, enseignant permanent à l'ISSEA, pour avoir dirigé ce travail ;

    · tout le corps enseignant de l'ISSEA pour les enseignements prodigués tout au long de notre formation ;

    · M. DOUYA Emmanuel et Dr JAZA FOLEFACK Achille, membres du jury de soutenance, qui de par leurs remarques et suggestions ont permis d'améliorer la qualité de ce travail ;

    · nos parents MEKANDA Zénon et BELLA Élise pour l'appui moral, matériel et financier dont nous avons toujours bénéficié ;

    · nos frères et soeurs Alain, Serge, Joël, Sandrine, Eric, Nadine et Davy pour tous leurs encouragements ;

    · toute notre famille ;

    · tous ceux qui de près ou de loin ont contribué à la réalisation de ce travail, qu'ils s'en trouvent ici remerciés.

    TABLE DES MATIÈRES

    DÉDICACE i

    REMERCIEMENTS ii

    AVANT-PROPOS vi

    LISTE DES ACRONYMES ET ABRÉVIATIONS vii

    LISTE DES TABLEAUX x

    LISTE DES FIGURES ET GRAPHIQUES xi

    LISTE DES ENCADRÉS xii

    RÉSUMÉ xiii

    INTRODUCTION 1

    PARTIE I : FONDEMENTS THÉORIQUES ET PRÉSENTATION DU SECTEUR AGRICOLE CAMEROUNAIS 6

    CHAPITRE I : FONDEMENTS THÉORIQUES DU RÔLE DE L'AGRICULTURE SUR LA CROISSANCE ÉCONOMIQUE 7

    1.1 Définition des concepts 8

    1.1.1 Agriculture 8

    1.1.2 Croissance économique 9

    1.2 Agriculture au service du reste de l'économie 11

    1.2.1 Agriculture, offre de produits alimentaires et croissance de la population 13

    1.2.2 Agriculture et réserves de changes 15

    1.2.3 Agriculture et formation du capital 16

    1.2.3.1 Taxation des bénéfices agricoles 17

    1.2.3.2 Modification des termes de l'échange 17

    1.2.3.3 Compression des investissements dans l'agriculture 17

    1.2.3.4 Marché rural des biens industriels 18

    1.2.4 Agriculture et transfert de la main d'oeuvre vers l'industrie 18

    1.3 Développement de l'agriculture en tant que secteur à part entière de l'économie 20

    CHAPITRE II : SITUATION DU SECTEUR AGRICOLE CAMEROUNAIS DEPUIS 1960 22

    2.1 Plans quinquennaux et politique agricole camerounaise 23

    2.1.1 Les acteurs du secteur agricole 24

    2.1.1.1 L'État 24

    2.1.1.2 Les sociétés de développement 25

    2.1.1.3 Les missions de développement 26

    2.1.1.4 Les organismes coopératifs 27

    2.1.1.5 Les organismes financiers 27

    2.1.2 Le financement de l'agriculture 27

    2.1.3 La commercialisation des produits agricoles 29

    2.1.4 L'accès aux intrants 31

    2.1.5 La formation et la recherche 31

    2.2 La nouvelle politique agricole 32

    2.2.1 Les acteurs du secteur agricole 33

    2.2.1.1 L'État 33

    2.2.1.2 Les organisations paysannes rurales 35

    2.2.1.3 Les opérateurs privés 35

    2.2.2 Financement de l'agriculture 35

    2.2.3 La commercialisation des produits agricoles 37

    2.2.4 L'accès aux intrants 37

    2.2.5 La formation et la recherche 38

    2.3 La politique agricole dans le Document de Stratégie de Réduction de la Pauvreté 40

    PARTIE II : MESURE DE L'IMPACT DE L'AGRICULTURE SUR L'ÉCONOMIE CAMEROUNAISE 42

    CHAPITRE III : ÉTUDE DESCRIPTIVE DU SECTEUR AGRICOLE CAMEROUNAIS 43

    3.1 Les principaux produits 43

    3.1.1 Exportations des cultures de rente 43

    3.1.1.1 Le cacao 43

    3.1.1.2 Le café 44

    3.1.1.3 Le coton 44

    3.1.2 Production des cultures vivrières 45

    3.1.2.1 Le manioc 45

    3.1.2.2 Le maïs 45

    3.1.2.3 Le riz paddy 46

    3.1.3 Les produits de l'élevage 47

    3.1.3.1 La volaille 47

    3.1.3.2 Les bovins 47

    3.2 Caractéristiques macroéconomiques du secteur agricole camerounais 48

    3.2.1 Importance de l'agriculture dans la formation du PIB 48

    3.2.2 La superficie cultivable 50

    3.2.3 Consommation d'engrais 51

    CHAPITRE IV : APPROCHE ÉCONOMÉTRIQUE 53

    4.1 Présentation des données 54

    4.1.1 Taux de croissance du PIB réel par habitant (TCPRH) 54

    4.1.2 Taux de Croissance du PIB réel agricole 56

    4.1.3 Taux de croissance du PIB réel industriel 57

    4.1.4 Taux de croissance du PIB réel des services 58

    4.2 Présentation de la méthodologie 60

    4.2.1 Détermination de l'ordre d'intégration : tests de stationnarité 60

    4.2.2 Formulation du modèle 62

    4.2.3 Détermination du nombre de retards du VAR à niveau 64

    4.2.4 Analyse des résultats de l'estimation du VECM 65

    4.2.4.1 Tests de causalité 65

    4.2.4.2 Analyse des réponses impulsionnelles 66

    4.2.4.3 Décomposition de la variance 66

    4.3 Présentation des résultats 66

    4.3.1 Stationnarisation des variables 66

    4.3.2 Nombre de retards du VAR à niveau 67

    4.3.3 Test de co-intégration 67

    4.3.4 Estimation du VECM 68

    4.3.4.1 Vecteur de co-intégration 68

    4.3.4.2 Les coefficients de court terme 69

    4.3.4.3 Analyse de la causalité 69

    4.3.4.4 Analyse des chocs 70

    4.3.4.5 Décomposition de la variance de l'erreur de prévision 70

    4.3.4.6 Validation des hypothèses sur les résidus 70

    4.3.4.6.1 Stabilité du modèle 70

    4.3.4.6.2 Autocorrélation des résidus 71

    4.3.4.6.3 Normalité 71

    4.4 Analyse des résultats 71

    CONCLUSION 74

    BIBLIOGRAPHIE 77

    ANNEXES 80

    AVANT-PROPOS

    L'Institut Sous-régional de Statistique et d'Économie Appliquée (ISSEA) est un établissement spécialisé de la Communauté Économique et Monétaire d'Afrique Centrale (CEMAC). Il a pour objectif la formation des cadres statisticiens et des économistes de niveau supérieur et moyen, le recyclage et le perfectionnement des cadres, la recherche appliquée. L'ISSEA offre trois cycles de formation :

    · le cycle des Ingénieurs Statisticiens Économistes (ISE) : 3 ans de formation ;

    · le cycle des Ingénieurs d'Application de la Statistique (IAS) : 4 ans de formation ;

    · le cycle des Techniciens Supérieurs de la Statistique (TSS) : 2 ans de formation.

    La fin de formation à l' ISSEA est sanctionnée, pour le cycle IAS, par le diplôme d'Ingénieur d'Application de la Statistique. Dans le but de juger de l'efficience de ladite formation, les dispositions académiques astreignent chaque élève-sortant à présenter les résultats d'un thème de recherche de son choix, condition sine qua none à la délivrance du diplôme sanctionnant la fin des quatre années d'étude de ce cycle. Cette présentation a pour but de tester la capacité des étudiants sortants à mettre en application les connaissances dispensées au sein de l'école, d'autant plus que ces derniers vont définitivement faire partie du monde professionnel.

    À cet effet, nous nous sommes intéressés à un secteur d'activité qui est resté au centre des préoccupations des gouvernements successifs du Cameroun. Le thème retenu est Agriculture et croissance économique au Cameroun. Un thème qui se justifie par la nécessité d'évaluer empiriquement l'impact dans l'économie camerounaise d'un secteur sur lequel furent centrées les stratégies de développement du Cameroun.

    LISTE DES ACRONYMES ET ABRÉVIATIONS

    APE

    :

    Accord de Partenariat Économique

    BCD

    :

    Banque Camerounaise de Développement

    BEAC

    :

    Banque des États de l'Afrique Centrale

    BM

    :

    Banque Mondiale

    CAC

    :

    Crédit Agricole du Cameroun

    CAMCULL

    :

    Cameroon Cooperative Credit Union Ligue

    CAMSUCO

    :

    Cameroon Sugar Compagny

    CARBAP

    :

    Centre Africain de Recherche sur Bananiers et Plantains

    CDC

    :

    Cameroon Development Corporation

    CEMAC

    :

    Communauté Économique et Monétaire d'Afrique Centrale

    CENADEC

    :

    Centre National de Développement Coopératif

    CENADEFOR

    :

    Centre National de Développement des Forêts

    CENEEMA

    :

    Centre d'Etude et d'Expérimentation du Machinisme Agricole

    CIFOR

    :

    Center for International Forestry Research

    CIRAD

    :

    Centre de Coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement

    COBAC

    :

    Commission Bancaire de l'Afrique Centrale

    CORAF

    :

    Conseil Ouest et centre africain pour la Recherche et le développement Agricoles

    CRA

    :

    Centres De Recherches Agronomiques

    CVECA

    :

    Caisses Villageoises d'Épargne et de Crédit Auto-gérées

    DFA

    :

    Dickey-Fuller Augmenté

    DSRP

    :

    Document de Stratégie de Réduction de la Pauvreté

    ECM

    :

    Error Correction Model

    ENSSAI

    :

    l'École Nationale Supérieure des Sciences Agro-industrielles

    FAO

    :

    Food and Agriculture Organization

    FASA

    :

    Faculté d'Agronomie et des Sciences Agricoles

    FIMAC

    :

    Financement des Micro-réalisations Agricoles et Communautaires 

    FMI

    :

    Fond Monétaire International

    FOCAOB

    :

    Fond Commun d'Aide aux Organisations de Base

    FONADER

    :

    Fond National de Développement Rural

    GIC

    :

    Groupement d'Intérêt Commun

    HEVECAM

    :

    Hévéa du Cameroun

    IAS

    :

    Ingénieur d'Application de la Statistique

    ICRAF

    :

    International Center for Research in Agroforestry

    IITA

    :

    International Institut of Tropical Agriculture

    IPPTE

    :

    Initiative Pays Pauvre Très Endettés

    IRA

    :

    Institut de Recherche Agronomique

    IRAD

    :

    Institut de Recherche Agricole pour le Développement

    IRD

    :

    Institut de Recherche pour le Développement

    IRZ

    :

    Institut de Recherche Zootechnique

    ISSEA

    :

    Institut Sous-régional de Statistique et d'Économie Appliquée

    M

    :

    Mutuelles Communautaires de Croissance

    MIDENO

    :

    Mission de Développement du Nord-Ouest

    MIDEVIV

    :

    Mission de Développement des cultures Vivrières et maraîchères

    MINADER

    :

    Ministère de l'Agriculture et du Développement Rural

    MINCOMMERCE

    :

    Ministère du Commerce

    MINEPIA

    :

    Ministère de l'Élevage, des Pêches et des Industries Animales

    MINRESI

    :

    Ministère de la Recherche Scientifique et de l'Innovation

    MINREST

    :

    Ministère de la Recherche Scientifique et Technique

    NPA

    :

    Nouvelle Politique Agricole

    OCB

    :

    Organisation Camerounaise de la Banane

    OCDE

    :

    Organisation de Coopération et de Développement Économiques

    OMC

    :

    Organisation Mondiale du Commerce

    ONAREF

    :

    Office National de Régénération des Forêts

    ONCC

    :

    Office National du Cacao et du Café

    ONCPB

    :

    Office National de Commercialisation des Produits de Base

    ONDAPB

    :

    Office National de Développement de l'Aviculture et du Petit Bétail

    ONPD

    :

    Office National de Participation au Développement

    PADC

    :

    Programme d'Appui au Développement Communautaire

    PAS

    :

    Programmes d'Ajustement Structurel

    PGE

    :

    Programme Général des Échanges

    PIB

    :

    Produit Intérieur Brut

    PME

    :

    Petite et Moyenne Entreprise

    PMI

    :

    Petite et Moyenne Industrie

    PNB

    :

    Produit National Brut

    PNDP

    :

    Programme National de Développement Participatif

    PNE

    :

    Programme National des Engrais

    PNVA

    :

    Programme National de Vulgarisation Agricole

    PNVRA

    :

    Programme National de Vulgarisation et de Recherche Agricole

    PRASAC

    :

    Pôle Régional de Recherche Appliquée au développement des Savanes d'Afrique Centrale

    RDM

    :

    Rapport sur le Développement dans le Monde

    RQ

    :

    restriction quantitative

    SEMRY

    :

    Société d'Expansion de Modernisation de la Riziculture de Yagoua

    SNRA

    :

    Système National de Recherche Agricole

    SOCAPALM

    :

    Société Camerounaise des Palmeraies

    SODEBLE

    :

    Société de Développement du Blé

    SODECOTON

    :

    Société de Développement du Coton

    SODENKAM

    :

    Société de Développement agro-industrielle du Nkam

    TVA

    :

    Taxe sur la Valeur Ajoutée

    UE

    :

    Union Européenne

    UNDVA

    :

    Upper Noun Valley Development Authority

    VAR

    :

    Vectoriel AutoRégressif

    VECM

    :

    Vectorial Error Correction Model

    WADA

    :

    Wum Area Development Authority

    WDI

    :

    World Development Indicators

    ZAPI

    :

    Zones d'Action prioritaires Intégrées

    LISTE DES TABLEAUX

    Tableau 1 : liste des sociétés de développement par filière de production pendant la phase de planification 26

    Tableau 2: coût financier des structures parapubliques du secteur agricole au cours de l'exercice budgétaire 1988/1989. (Résultats annuels en millions de FCFA) 28

    Tableau 3: Différence entre prix au producteur et prix FOB pour le cacao (en F CFA/kg) 30

    Tableau 4: Situation des prêts du projet FIMAC en 2001 36

    Tableau 5: Évolution de la part de l'agriculture dans le PIB au Cameroun 48

    Tableau 6: Part de l'agriculture dans le PIB de quelques pays développés et émergents (%) 49

    Tableau 7: Contribution de l'agriculture à la croissance du PIB 50

    Tableau 8: Évolution de la part de la superficie utilisée pour l'agriculture au Cameroun 50

    Tableau 9: Importation d'engrais au Cameroun 51

    Tableau 10: Description des données 59

    Tableau 11: coefficients de la dynamique de court terme 69

    LISTE DES FIGURES ET GRAPHIQUES

    Figure 1: Évolution des exportations de cacao au Cameroun 43

    Figure 2: Évolution des exportations de café au Cameroun 44

    Figure 3: Évolution des exportations de coton au Cameroun 44

    Figure 4: Évolution de la production de manioc au Cameroun 45

    Figure 5: Évolution de la production de maïs au Cameroun 46

    Figure 6: Évolution de la production de riz paddy 46

    Figure 7: Évolution de la production de volaille au Cameroun 47

    Figure 8: Évolution de la production de bovins au Cameroun 47

    Figure 9: Évolution du taux de croissance du PIB réel par tête au Cameroun 55

    Figure 10: Évolution du taux de croissance du PIB réel agricole au Cameroun 56

    Figure 11: Évolution du taux de croissance du PIB réel de l'industrie au Cameroun 57

    Figure 12: Évolution du taux de croissance du PIB réel des services au Cameroun 58

    Figure 13: Graphe de causalité entre les secteurs d'activité au Cameroun 70

    LISTE DES ENCADRÉS

    Encadré 1: Définition de la stationnarité 60

    Encadré 2 : Principe des tests ADF 61

    Encadré 3 : Principes des tests de co-intégration 63

    Encadré 4 : Détermination du nombre de retards du VAR à l'aide des critères d'information 64

    RÉSUMÉ

    L'importance de l'agriculture dans l'amorçage du développement économique est unanimement admise par les économistes du développement. Pour les pionniers de ce courant de pensée, le secteur agricole est un secteur en amont des autres secteurs d'activité ; il leur fournit les ressources nécessaires à leur développement. Le secteur agricole est un pourvoyeur de produits alimentaires pour les travailleurs des autres secteurs, de matières premières pour les industries et de devises étrangères pour le pays. De plus, le surplus de main d'oeuvre du secteur agricole peut être transféré au secteur non agricole avec une hausse de salaire dans les deux secteurs.

    L'activité agricole tient ainsi une place centrale dans les premières phases du développement d'un pays. Elle est restée au centre des préoccupations des gouvernements camerounais depuis l'indépendance du pays en 1960, des mesures spéciales y ont toujours été appliquées. Ce secteur a connu des mutations. D'abord administrée par l'État avant 1987, la politique agricole a été libéralisée à partir de 1990, suite à la crise économique et l'application des Programmes d'ajustement structurel qui s'en sont suivis. Ce changement a eu des effets sur la production des différentes cultures et plus généralement sur les caractéristiques macroéconomiques du secteur agricole camerounais. Une mesure de l'impact de l'agriculture sur la croissance économique au Cameroun s'est faite à l'aide de la co-intégration et les tests de causalité au sens de Granger. Sur des données allant de 1966 à 2005, il existe une relation de long terme entre le taux de croissance du PIB réel par tête, les taux de croissance des PIB réels agricole, industriel et des services. Dans cette relation de long terme, le taux de croissance du PIB réel agricole entre avec un coefficient négatif et significatif. Concernant la causalité, la croissance du secteur agricole n'a pas causé celle des autres secteurs sur la période 1966-2005.

    INTRODUCTION

    Contexte et problématique

    Après son indépendance obtenue en 1960, le Cameroun, comme bon nombre de pays africains, s'est spécialisé dans les produits primaires notamment les produits agricoles. Ces produits étaient destinés en partie à l'exportation principalement vers l'Europe. Cette spécialisation entre en droite ligne avec d'une part, les théories du développement, selon lesquelles un pays, dans les premières phases de son développement, amorce celui-ci dans les activités du secteur primaire, et d'autre part, la théorie de l'avantage comparatif. Les devises obtenues devaient permettre de financer les investissements pour mettre en place le tissu industriel, plus apte à créer les conditions véritables d'un développement économique.

    Le Cameroun est un pays de l'Afrique centrale. Il présente de nombreuses diversités qui lui ont fait valoir le qualificatif d'Afrique en miniature. Ces diversités se retrouvent tant sur le plan géographique que social. Le pays est doté d'énormes potentialités naturelles. Sur le plan climatique, quatre grands domaines climatiques sont observés1(*) :

    · le climat de type Guinéen. Il règne sur une partie de la côte et sur le plateau Sud-camerounais. Il est caractérisé par quatre saisons : une grande saison de pluie, une grande saison sèche, une petite saison sèche et une petite saison de pluie ;

    · le climat de type Camerounien qui règne au voisinage du Mont Cameroun et s'étend jusqu'à l'embouchure de la Sanaga englobant les hauts plateaux de l'ouest. Il se caractérise par une surabondance des pluies qui tombent en une seule saison annuelle de 9 mois ;

    · climat tropical soudanien avec des températures élevées et des pluies peu abondantes. Il compte deux saisons : une pluvieuse de 7 mois environ (très torride de mai à juin et entre juillet à octobre, très fraîche et humide) et une sèche de 5 mois (fraîche de novembre à janvier). On le retrouve dans la province de l'Adamaoua ;

    · climat tropical sahélien : températures élevés, pluies irrégulières. Il compte également deux saisons : une sèche de décembre à janvier et une pluvieuse. Ce climat se retrouve dans les provinces du Nord et de l'Extrême-nord.

    La diversité du climat est un facteur explicatif important de la diversité des cultures agricoles au Cameroun. Contrairement à d'autres pays d'Afrique dépendant des produits de base, le Cameroun présente un système de production agricole très diversifié. Il se démarque par exemple du Burkina Faso ou du Mali qui dépendent fortement de la production de coton. Cette diversité du climat permet également à l'agriculture camerounaise de produire à toutes les saisons de l'année.

    Depuis l'indépendance, les autorités camerounaises ont toujours fait du développement agricole une condition du développement économique. Avant la crise économique de 1987, l'État intervenait de façon directe dans le déroulement de l'activité agricole. Malgré la crise économique et les Programmes d'Ajustement Structurel (PAS) qui s'en sont suivis, l'État a confirmé l'importance placée dans le secteur agricole comme moteur de la croissance. Cette importance a été réaffirmée tout récemment lors de la visite le 9 mars 2009 au Cameroun du secrétaire d'État français chargé de la Coopération et de la Francophonie.

    L'agriculture tient ainsi une place particulière dans l'économie camerounaise. Sa contribution à la formation du Produit Intérieur Brut (PIB) a toujours été supérieure à 20 %2(*) et est même de l'ordre de 40 % depuis la dévaluation du F CFA en 1994. Sa contribution à l'emploi de la main d'oeuvre reste supérieure à 40 %. La Banque Mondiale (BM) l'estimait à 60 % en 1990. De plus, elle reste l'activité majeure en milieu rural, milieu dans lequel la population était estimée en 2000 à 56 % de la population totale par la FAO.

    Cette place particulière de l'agriculture dans l'économie camerounaise justifie l'intérêt qui a été porté au thème Agriculture et croissance économique au Cameroun. Ce thème pose le problème du rôle de l'agriculture dans l'économie camerounaise. Il nous amène à la question de savoir quel est l'impact du secteur agricole sur la croissance économique au Cameroun. En effet, entre 1960 et 1987, un modèle de planification a été appliqué au sein de l'économie en général et dans le secteur agricole en particulier qui en était au centre. Quels peuvent avoir été les effets sur la croissance économique et celle des autres secteurs, d'un tel ciblage de l'activité économique sur le secteur agricole ? Ou encore, le secteur industriel et le secteur des services ont-ils été positivement influencés par le développement du secteur agricole ? L'agriculture a-t-elle influencée la croissance économique au Cameroun ? Si oui, à quel niveau peut-on situer cette influence ?

    Objectifs

    Objectif principal

    L'objectif principal de cette étude est de déterminer l'impact du secteur agricole sur la croissance économique au Cameroun. Cet objectif sera atteint à travers certains objectifs spécifiques.

    Objectifs spécifiques

    · quantifier le lien qui existe entre l'agriculture et le reste de l'économie ;

    · déterminer la contribution de l'agriculture à la croissance du PIB ;

    · déterminer le sens de la causalité entre le secteur agricole et les autres secteurs d'activité ;

    · déterminer l'effet de l'application des politiques agricoles sur la production agricole ;

    · caractériser le secteur agricole camerounais.

    Hypothèses de recherche

    Hypothèse 1 : la croissance économique n'a pas été influencée l'agriculture au Cameroun.

    Hypothèse 2 : le développement du secteur agricole n'a pas causé le développement des autres secteurs notamment le secteur industriel et le secteurs des services.

    Approche méthodologique

    Concernant l'approche méthodologique utilisée pour mesurer l'impact de l'agriculture sur la croissance économique, une approche traditionnelle était d'estimer une relation entre les performances de l'économie entière et celles du secteur agricole. Le secteur agricole était considéré comme exogène. Il s'agissait d'évaluer l'effet de son développement sur les autres secteurs de l'économie considérés comme endogènes. Mais il existe des possibilités d'interactions bidirectionnelles entre les secteurs de l'économie, et en plus, l'exogénéité de l'agriculture doit d'abord être établie comme le suggère KANWAR (2000).

    Afin de s'affranchir des problèmes de régression fallacieuse sur données temporelles, les résultats récents sur l'économétrie des séries chronologiques ont été exploités. Notamment l'utilisation des modèles Vectoriel AutoRégressif (VAR) et les propriétés de co-intégration. Ces nouvelles méthodes ont été largement utilisées dans les évaluations récentes de l'impact de l'agriculture sur la croissance économique de plusieurs pays. YAO (2000) a démontré la contribution de l'agriculture dans l'économie chinoise en utilisant des méthodes de co-intégration. Il est arrivé à deux conclusions : l'agriculture a entraîné la croissance des autres secteurs, et la croissance du secteur non agricole n'a pas d'effet sur le secteur agricole. KATIRCIOGLU(2006) a étudié la relation entre la production agricole et la croissance économique dans la partie nord de Chypre. En utilisant la co-intégration sur des données allant de 1975 à 2002, il recherchait le sens de la causalité selon Granger entre la croissance du secteur agricole et la croissance économique générale. Les variables qu'il emploie sont les taux de croissance du PIB réel et du PIB réel agricole. Une deuxième étude du même auteur3(*) recherche la co-intégration et les relations causales entre les différents secteurs d'activité de Chypre du nord. L'auteur utilise les valeurs en logarithme du PIB réel, du PIB réel agricole, du PIB réel industriel et du PIB réel des services. L'agriculture reste encore l'épine dorsale de l'économie de ce pays, elle a une relation d'équilibre de long terme avec la croissance économique et donne la direction du développement de l'industrie.

    L'évaluation de l'impact du secteur agricole sur la croissance économique au Cameroun se fera par la co-intégration et l'estimation d'un modèle vectoriel à correction d'erreur (VECM : Vectorial Error Correction Model). Les variables utilisées sont : le taux de croissance du PIB réel par habitant, le taux de croissance du PIB réel agricole, le taux de croissance du PIB réel de l'industrie, le taux de croissance du PIB réel des services. La mise en oeuvre du modèle est la suivante :

    · détermination de l'ordre d'intégration des séries à l'aide des tests de Dickey-Fuller Augmentés (ADF : Augmented Dickey-Fuller) ;

    · détermination du nombre de retards du modèle VAR à niveau à l'aide des critères d'information;

    · test de co-intégration (séries non stationnaires intégrées au même ordre) ;

    · estimation du VECM (la co-intégration est significative) ;

    · analyse des résultats du VECM : validation des hypothèses, tests de causalité, fonctions de réponse impulsionnelle, décomposition de la variance.

    Organisation du travail

    Afin d'étudier l'impact de l'agriculture sur la croissance économique au Cameroun, il est nécessaire de présenter les fondements théoriques qui sous-tendent le rôle que l'agriculture est censé jouer dans une économie, particulièrement dans les premières phases de son développement. Le chapitre 1 propose une revue des théories développées dès 1950 par les économistes du développement. Dans le chapitre 2, la situation du secteur agricole camerounais sera présentée. Il s'agit de l'évolution des différentes politiques agricoles mises en oeuvre depuis 1960, des acteurs du secteur agricole et leurs rôles respectifs. Le chapitre 3 a pour objet de montrer, à partir des faits stylisés, les effets des différentes politiques agricoles sur la production, la contribution du secteur à la formation du PIB et en terme d'emploi. La méthodologie économétrique utilisée et les résultats qui en sont issus sont présentés au chapitre 4. Des recommandations sont enfin formulées à partir de ces résultats.

    PARTIE I : FONDEMENTS THÉORIQUES ET PRÉSENTATION DU SECTEUR AGRICOLE CAMEROUNAIS

    CHAPITRE I : FONDEMENTS THÉORIQUES DU RÔLE DE L'AGRICULTURE SUR LA CROISSANCE ÉCONOMIQUE

    Il existe une certaine unanimité au sein des économistes sur l'importance du secteur agricole dans une économie en développement. De la pensée des physiocrates jusqu'aux écrits des auteurs contemporains, le secteur agricole demeure un pilier important sur lequel doit s'appuyer tout décollage de l'économie. Les historiens font d'ailleurs remarquer que dans de nombreux pays dits développés d'aujourd'hui, la révolution agraire a été un préalable à la révolution industrielle. Cette vision justifie la place centrale qu'occupe l'agriculture dans la théorie du développement. De nombreux auteurs de ce courant de pensée tels LEWIS (1955), HIRSCHMAN (1958), FEI et RANIS (1964), ou encore MELLOR (1966) y ont consacré des écrits importants. Et même en cette période du 21e siècle, la mise en oeuvre de politiques agricoles efficaces par la FAO demeure une condition nécessaire à l'éradication de la faim et la réduction des inégalités dans les pays du monde.

    L'analyse de l'impact du secteur agricole sur la croissance et le développement économique se fait suivant plusieurs points de vue dans la littérature économique. Les premiers auteurs de la théorie du développement lui assignaient un rôle "passif" dans l'économie. LEWIS (1955), HIRSCHMAN (1958), RANIS et FEI (1964) pour ne citer que ceux-là, le situent en amont des activités des autres secteurs de l'économie qui impulsent réellement le développement. L'agriculture doit fournir au reste de l'économie les ressources dont il a besoin pour son fonctionnement. La part du secteur agricole est ainsi vouée à la décroissance au fur et à mesure que l'économie croît. Mais, La notion d'une agriculture au service du développement du reste de l'économie, réservoir de main d'oeuvre et de capital à exploiter, recule de plus en plus devant celle qu'il faut s'engager dans la voie du développement agricole pour lui-même et que l'agriculture peut parfois s'avérer un secteur en tête de l'économie, surtout en période d'ajustement économique4(*). Un développement du secteur agricole en tant que secteur d'activité dans l'économie est également un gage d'atteinte d'un niveau de développement économique. La coexistence des secteurs urbain et rural ne transparaît plus comme une aberration en ce sens qu'un développement du secteur agricole permettrait de voir des améliorations de niveau de vie dans le monde rural. Avant d'exposer plus en détail ces différentes approches de l'impact de l'agriculture sur la croissance de l'économie, il est opportun de définir ces concepts.

    1.1 Définition des concepts

    1.1.1 Agriculture

    L'agriculture dans son acception large désigne l' « ensemble des travaux transformant le milieu naturel pour la production des végétaux et des animaux utiles à l'homme »5(*). En plus donc de la culture des végétaux, sont également pris en compte les activités d'élevage, de pêche et de chasse.

    Du point de vue économique, l'agriculture représente un secteur d'activité, une activité génératrice de revenu à partir de l'exploitation des terres, de la culture des animaux, etc. À ce titre, elle contribue à la formation du revenu national et emploie de la main d'oeuvre. Les principes d'économie politique peuvent donc s'appliquer à l'agriculture afin de comprendre les différents mécanismes qui concourent à son fonctionnement en tant qu'activité économique. Il s'agit des mécanismes de production, de maximisation du profit, de formation des prix, d'écoulement du produit, etc. C'est un secteur d'activité doté d'un caractère spécifique pour l'économie d'un pays ; il répond au besoin le plus important de l'être humain : l'alimentation.

    L'activité agricole est dotée de nombreuses spécificités dont il faut tenir compte pour comprendre son fonctionnement :

    · La Terre.

    La Terre joue un rôle particulier dans l'activité agricole. Les techniques agricoles exigent d'être développées sur des grandes étendues de Terre, les superficies des exploitations agricoles se mesurent souvent en hectares. Comparativement à l'activité industrielle, la Terre est un facteur de production important pour la pratique de l'activité agricole. Par ailleurs, l'abondance ou non des Terres peut justifier le système de production pratiqué. Ainsi, dans les zones où le facteur Terre est limitant, l'activité agricole sera plus intense en capital ou en travail. Contrairement aux zones dans lesquelles ce facteur est abondant où l'activité sera extensive.

    · Les conditions naturelles et les saisons

    La dépendance de l'agriculture vis-à-vis des conditions naturelles et des saisons est très marquée. Elle l'est davantage dans les pays en développement où la maîtrise des techniques sophistiquées n'est pas encore un acquis. Cette dépendance entraîne certaines conséquences : la saisonnalité de l'emploi des facteurs et le risque. La saisonnalité des facteurs, même si elle n'est pas spécifique à l'agriculture impose à la fonction de production agricole des caractéristiques particulières. On parle par exemple de tomates pluviales, de tomates irriguées. Quant au risque, aucune activité économique n'y échappe. En agriculture, au risque classique qui provient de l'incertitude quant au prix auquel une marchandise sera vendue, s'ajoute une incertitude sur la quantité de produits obtenus avec des moyens de production et une technique de production donnée. Un orage peut par exemple ravager l'ensemble des résultats, une pluviométrie peu abondante peut entraver le développement normal des plantes, une épidémie peut détruire la production d'un élevage.

    · La rigidité de la demande

    Concernant la demande des produits alimentaires, elle est peu sensible aux prix (loi de KING) et au revenu (loi de ENGEL). Mais, il faut tout de même faire la distinction entre produit alimentaire et produit agricole. Tout produit alimentaire n'est pas agricole et tous les produits agricoles ne sont pas alimentaires. Cependant, il apparaît que la rigidité de la demande alimentaire se transmet pour l'essentiel à la demande des produits agricoles. Cette situation a pour effet une difficile intégration de l'agriculture dans une économie en croissance.

    1.1.2 Croissance économique

    Lorsqu'on parle de croissance dans le sens courant, on entend par là un accroissement, une augmentation. La croissance traduit le fait d'apporter à ce qui existe une valeur supplémentaire.

    En économie, la croissance désigne l'augmentation du stock de richesse nationale sur une longue période. Le lexique d'économie6(*) en fournit une définition plus quantitative. Il la définit comme une augmentation sur une longue période du Produit National Brut (PNB) par tête. L'idée de longue période permet de faire ressortir la caractéristique évolutive de la croissance, ce qui la distingue de l'expansion dans ce sens. La croissance est ainsi une notion quantitative qui se distingue du développement à résonance plus qualitative.

    La question de la croissance économique est une préoccupation pour tous les gouvernements du monde moderne. Elle est nécessaire pour faire face à la croissance de la population ainsi qu'à la croissance des besoins de cette population. Elle est un préalable à tout développement économique, et les politiques économiques en font un de leurs objectifs précis.

    B. GUERRIEN (2002) note que le problème de la croissance est clairement apparu dans la pensée économique chez les classiques, à commencer par A. SMITH. Jusqu'alors, l'économie se souciait plus de la survie de la population face aux fléaux (sécheresse, famine, épidémie, etc.). Il s'agissait d'une « reproduction simple » du système. Cette vision restrictive ne reflète pas exactement la réalité ; mais elle permet tout de même de comprendre que la croissance bien qu'étant en quelque sorte présente, n'était pas explicitement une préoccupation pour les économistes d'alors. Avec les classiques, l'idée de surplus se fait plus formelle. Il apparaît plus clairement qu'à chaque période, un excédent peut être dégagé et réinvesti pour accroître davantage la production grâce à la division du travail et le progrès technique.

    Par la suite, de nombreuses théories économiques seront développées sur la croissance économique. L'économiste britannique R. HARROD et l'économiste américain E. DOMAR ont développé le célèbre modèle Harrod-Domar. Les deux principales notions sont le capital et l'épargne. Le capital est le déterminant principal de la croissance, l'épargne a pour rôle d'induire l'investissement. Dans les modèles de croissance endogène, en plus du capital physique, les auteurs de cette théorie reconnaîtront l'importance d'un capital immatériel dans la génération de la croissance économique.

    La notion de croissance économique est ainsi devenue une préoccupation pour les économies car au-delà de la satisfaction des besoins de la population, l'objectif de l'économie est aussi de connaître la phase de croissance et de développement économique. Au Cameroun, un taux de croissance à deux chiffres reste une condition nécessaire à un développement économique.

    L'agriculture, en tant que secteur d'activité de l'économie peut contribuer à la croissance de celle-ci. Dans la théorie économique, la contribution de l'agriculture à la croissance économique se fait selon plusieurs points de vue. Le caractère "primaire" des activités agricoles en fait souvent un secteur en amont des autres. Il est donc un secteur d'activité au service des autres secteurs dans le processus du développement. Mais au-delà de ce rôle de secteur en amont du développement, d'autres auteurs estiment que le développement du secteur agricole pour lui-même offre aussi des gages d'un véritable développement. Les sections suivantes ont pour objet d'exposer ces différentes approches.

    1.2 Agriculture au service du reste de l'économie

    L'élément central des modèles de développement expliquant le rôle de l'agriculture sur la croissance est la notion de surplus, généré dans le secteur agricole. À cet effet, les physiocrates reconnaissaient que l'importance d'un surplus agricole était essentiel pour la bonne santé des finances publiques et le niveau de l'activité économique.

    Trois préoccupations majeures ressortent de la littérature sur le rôle de l'agriculture dans la croissance et le développement économique7(*) :

    · les déterminants de la génération d'un surplus dans le secteur agricole à travers des gains de productivité dus à l'investissement et aux innovations ;

    · les différents mécanismes de transfert de ce surplus ;

    · l'utilisation de ce surplus pour réaliser le développement industriel via les investissements publics, lorsque ce surplus est transféré par les taxes.

    Avant 1950, de nombreux auteurs affirmaient que la croissance du secteur agricole a précédé ou peut être causé la révolution industrielle. En 1767, à l'aube de la révolution industrielle, J. S. MILL affirmait que la productivité de l'agriculteur limite la taille du secteur industriel. Les historiens de la révolution industrielle ont noté la récurrence d'une certaine logique par laquelle la révolution agricole a précédé la révolution industrielle par un décalage de cinquante à soixante années.

    Mais à partir de 1950, les économistes considéraient de plus en plus le secteur agricole comme un secteur retardé dans l'économie, générateur d'un surplus de main d'oeuvre tel que l'a formalisé LEWIS (1955). L'intérêt était porté sur la croissance résultant dans le secteur non agricole. Le secteur agricole devait fournir à ce dernier les éléments nécessaires à son expansion.

    En s'inscrivant dans cette logique, l'économiste KUZNETS (1964) distingue quatre voies par lesquelles l'agriculture concourt au développement économique8(*) :

    · Les produits

    Le secteur agricole fournit la nourriture permettant d'alimenter les travailleurs des autres secteurs. Il fournit également à l'industrie les matières premières. Un secteur agricole productif fournira des produits bon marché, d'où une amélioration du niveau de rémunération réel et donc une possibilité d'accumulation pour les autres secteurs. De plus, l'augmentation de la production agricole a un effet sur la croissance du Produit Intérieur Brut (PIB).

    · Le marché

    Le secteur agricole peut constituer une demande de biens industriels et de services. Une amélioration de la productivité dans ce secteur devrait permettre l'amélioration des revenus du monde paysan et par conséquent l'accroissement de leur consommation. Le secteur agricole peut ainsi faciliter l'émergence de nouvelles débouchées pour les industries.

    · Les devises

    L'exportation de produits agricoles est une source de devises pour l'économie. Dans un contexte où l'activité agricole est importante, ces devises peuvent servir à l'importation des machines et matières premières dont a besoin l'industrie pour se développer. D'un autre côté, l'agriculture peut permettre l'économie de devises en produisant des denrées qui étaient autrefois importées.

    · Facteurs de production

    L'agriculture fournit aux autres secteurs le surplus de main d'oeuvre dont elle dispose.

    Ces analyses de KUZNETS se retrouvent dans différents travaux des économistes du développement d'alors. L'accent était mis sur le développement industriel, car lui seul était à même de fournir des conditions d'un véritable développement économique. Cette fascination pour la modernisation leur a fait avoir une « doctrine de primauté de l'industrialisation sur le développement agricole, qui a sapé du même coup les possibilités de contribution de l'agriculture au développement global »9(*). A. KRUEGER10(*) a résumé ces premières théories du développement comme composées de plusieurs fils directeurs :

    · le désir et la volonté de «modernisation»;

    · l'interprétation de l'industrialisation comme la voie de la modernisation;

    · la conviction qu'une politique de «substitution des importations» était nécessaire à la protection des industries «naissantes»;

    · la méfiance à l'égard du secteur privé et du marché et la conviction que le gouvernement, en sa qualité de tuteur paternaliste et bienveillant, devrait prendre la direction du développement;

    · la méfiance vis-à-vis de l'économie internationale et le manque de confiance dans les possibilités de développement des exportations des pays en développement.

    Nous présentons ci-dessous en détail les implications d'un développement du secteur agricole sur des pans particuliers de la réalité économique selon les économistes du développement de la première génération.

    1.2.1 Agriculture, offre de produits alimentaires et croissance de la population

    L'agriculture subvient au besoin le plus important de l'homme : l'alimentation. En effet, bien que tous les produits alimentaires ne soient pas agricoles, il existe tout de même un lien très étroit entre produits alimentaires et produits agricoles.

    La ration alimentaire d'un individu est un indicateur direct de son bien être, et elle peut expliquer de façon indirecte ses aptitudes et capacités au travail. La théorie du capital humain développée entre autres par SCHULTZ et BECKER présente la composante santé de l'individu comme un élément contribuant à augmenter sa productivité. Cet état de santé est largement tributaire de nombreux éléments dont la qualité des aliments consommés par l'individu. MELLOR (1970) note l'effet que peut avoir une situation de malnutrition sur la productivité des travailleurs. La malnutrition qu'il faut distinguer de la faim entraîne des déficiences, ce qui élève le taux de morbidité et diminue la résistance aux parasites.

    Une offre de produits alimentaires en qualité et en quantité en provenance du secteur agricole, couplé de politiques de redistribution, augmente les chances d'avoir des travailleurs en bon état de santé et donc plus productifs. Certes, l'offre de produits alimentaires peut provenir des importations, sans que le secteur agricole n'y contribue énormément. Mais dans les premières phases du développement, les économies manquent d'assez de ressources financières ; le secteur agricole doit ainsi produire abondamment pour permettre l'économie de devises qui pourraient être affectées à d'autres investissements. De plus, GILLIS M. et autres11(*) soulignent l'importance que pourrait recouvrir la notion d'autosuffisance alimentaire pour une économie. Ils attirent l'attention sur le danger pour la santé économique, que représente la dépendance à l'égard des importations alimentaires. L'alimentation tend de plus en plus à devenir un bien stratégique, quasiment du même ordre que l'armement. Ainsi, un pays dépendant des autres pour sa nourriture pourrait subir des pressions de différents ordres par ces derniers. De plus, la croissance démographique faisant fondre les excédents alimentaires mondiaux, les pays fortement importateurs des produits alimentaires feraient par conséquent face à des prix élevés pour satisfaire leur demande. Et plus récemment, avec le développement des biocarburants, de vastes superficies cultivables sont utilisées à cet effet, au détriment des produits agricoles destinés à la consommation alimentaire. Dans le même ordre d'idées, l'explosion des classes moyennes dans les économies chinoises et indiennes s'est faite avec une augmentation de la demande alimentaire en terme qualitatif. Le besoin de consommer de la viande et des produits dérivés est allé croissant. Pour des pays d'Asie de l'est à l'exemple de la Thaïlande, grand producteur de riz, il devenait plus rentable de cultiver pour nourrir le bétail. La hausse des prix du riz dans les pays d'Afrique subsaharienne, importateurs nets de ce produit, et plus généralement la crise alimentaire sont des conséquences de ce changement de conjoncture mondiale.

    Une augmentation de l'offre de produits alimentaires est aussi nécessaire pour faire face à la croissance démographique. L'accroissement de la population est sans aucun doute le mieux connu de tous les problèmes du développement économique12(*). Il constitue l'argument le plus souvent avancé en faveur de l'augmentation de la production agricole. En plus de l'accroissement de la population en terme quantitatif, un accroissement des besoins de la population est souvent observé au fur et à mesure que s'installe le développement économique. Les besoins alimentaires vont croissants. La production se doit d'évoluer à un rythme au moins égal. À défaut, des risques de survenance d'une crise alimentaire se font plus grands. L'offre de produits alimentaires émanant du secteur agricole a ainsi un rôle pour contribuer à assurer la sécurité alimentaire.

    1.2.2 Agriculture et réserves de changes

    Tout comme KUZNETS ou encore MELLOR, de nombreux économistes du développement s'accordent sur l'effet positif que peut avoir le secteur agricole sur la détention de devises étrangères. Si l'on considère les cinq étapes du développement présentées par ROSTOW13(*), à savoir :

    · la société traditionnelle ;

    · mise en place des conditions préalables au décollage ;

    · décollage ;

    · marche vers la maturité ;

    · ère de la consommation de masse.

    Lorsque les premières étapes du développement sont franchies, il devient opportun de disposer des biens de capital nécessaires à une industrialisation en rapide expansion. De même, la demande en biens de consommation importés, de meilleure qualité se fait plus importante. Comme le souligne MELLOR (1970)14(*), l'effet conjoint de ces types de besoins exerce une pression sur la demande de devises étrangères.

    L'agriculture peut contribuer de façon importante aux recettes nettes en devises étrangères. D'une part en se substituant aux importations présentes et potentielles, et d'autre part en produisant plus pour l'exportation. MELLOR (1970)15(*) en offre un exposé plus détaillé de cette contribution. D'après lui, la réduction des importations peut prendre deux formes :

    · substitution des produits agricoles importés par des produits nationaux. Cela nécessite tout de même que cette production agricole soit plus rentable que les importations ;

    · réduction des importations non agricoles, ceci consécutivement à une modification des structures de consommation au profit des produits alimentaires nationaux.

    Concernant les exportations agricoles, sauf dans le cas des pays riches en ressources naturelles (pétrole, minerais, etc.), elles constituent l'essentiel des exportations lors des premières phases de développement. Il est donc bénéfique de se spécialiser dans la production de produits spécifiques destinés à l'exportation. Les ressources doivent être affectées au produit qui assurera aux investissements les rendements les plus élevés comparativement à d'autres utilisations possibles des ressources. Cette spécialisation en un produit agricole peut avoir des avantages tels que présentés par MELLOR (1970). Notamment l'évolution de la maîtrise technique qui accompagne généralement toute spécialisation. Toutefois, une telle spécialisation peut avoir des conséquences à long terme particulièrement la détérioration des termes de l'échange. Malgré cet inconvénient, l'histoire présente des exemples de pays qui ont su bénéficier des mouvements à la hausse de certains produits de base pour réaliser des investissements dans l'industrie.

    1.2.3 Agriculture et formation du capital

    Dans les premières phases du développement économique, les besoins en capital sont immenses pour le pays. Il y a nécessité de capitaux pour la création directe d'emplois non agricoles par la construction d'usines et par l'acquisition de machines.

    Le capital nécessaire au développement économique provient généralement de trois sources : l'aide étrangère, les investissements étrangers et l'épargne nationale. Les deux premières sources ont l'avantage d'apporter des capitaux importants sans peser sur la consommation intérieure. Mais dans le cas particulier de l'aide, elle peut être assortie de restrictions politiques et économiques désavantageuses mettant en mal l'indépendance du pays. L'investissement étranger quant à lui nécessite, pour une grande efficacité, le développement au préalable des infrastructures (routes, communication, énergie)16(*).

    Un pays à faible revenu décidant de ne pas recevoir ou de moins solliciter l'aide étrangère devra ainsi faire appel à ses ressources propres notamment son secteur agricole qui est prépondérant. CHENERY et SYRQUIN (1975) ont souligné que l'agriculture devrait être source de transferts de capital et de main d'oeuvre vers les zones urbaines pour encourager le développement général de l'économie.

    De nombreux mécanismes existent pour faire passer les ressources créées dans le secteur agricole vers le secteur industriel. MELLOR (1970) distingue quatre formes par lesquelles l'agriculture peut contribuer à la formation du capital : taxation des bénéfices agricoles, modification des termes de l'échange, compression des investissements dans l'agriculture, marché rural des biens industriels.

    1.2.3.1 Taxation des bénéfices agricoles

    La taxation du secteur agricole est par exemple un moyen de transférer le surplus financier du secteur agricole vers l'industrie. L'exemple du Japon est souvent présenté à cet effet. Pays à revenu faible et à population très dense au 19e siècle, le Japon a su axer son développement sur le secteur agricole. Le gouvernement a joué un rôle actif dans l'investissement consacré à l'infrastructure et aux industries. À la fin du 19e et au début du 20e siècle, c'est le gouvernement qui a fourni le tiers ou la moitié environ des investissements totaux dans le pays17(*). Pendant ce temps, les recettes fiscales provenaient de 50 à 80 % du secteur agricole. La part de l'agriculture dans les revenus fiscaux de l'état entre 1888-1892 était de 80% et elle était encore de 40% en 1918-1922. Ces ressources ont été très importantes pour financer les investissements publics et les services de base comme l'éducation et la recherche. La mise en place de cette structure fiscale a été centrale. Elle a permis d'extraire une part du surplus de l'agriculture pour financer l'industrialisation.

    1.2.3.2 Modification des termes de l'échange

    Une augmentation de la production agricole peut entraîner une baisse des prix. Cette baisse des prix a pour effet une amélioration du salaire réel dans le secteur non agricole de telle sorte que le salaire nominal peut y diminuer sans pour autant affecter le niveau de vie. Les termes de l'échange s'en trouvent modifiés au détriment de l'agriculture et en faveur des autres secteurs. L'industrie percevra des profits plus élevés. Ces profits pourraient être utilisés pour la formation du capital ou pour la consommation dans les secteurs public ou privé. Dans les années 1920 en URSS, PREOBRAJENSKI était pour un transfert forcé du surplus agricole par des termes de l'échange défavorables à l'agriculture18(*). Il est question d'effectuer un contrôle de prix pour arriver à une augmentation rapide du prix relatif des produits industriels par rapport aux produits agricoles. Un transfert de valeur de l'agriculture vers le secteur industriel peut ainsi être observé.

    1.2.3.3 Compression des investissements dans l'agriculture

    Même si l'agriculture utilise parfois les produits issus des autres secteurs, elle a une contribution nette à la formation du capital dans ces secteurs.

    1.2.3.4 Marché rural des biens industriels

    La véritable croissance et le développement économique dépendent plus de l'expansion du secteur non agricole. Mais les obstacles à l'expansion de ce secteur proviennent aussi de la faiblesse des bénéfices sur investissement due à l'étroitesse des marchés. Un accroissement des revenus des agriculteurs offre ainsi des débouchés supplémentaires au secteur industriel.

    1.2.4 Agriculture et transfert de la main d'oeuvre vers l'industrie

    La notion de surplus de main d'oeuvre a été au centre des développements sur l'impact de l'agriculture sur le reste de l'économie. En se basant sur l'observation empirique, les économistes du développement de la première génération ont essayé de formaliser les différents mécanismes à travers lesquels l'excédent de main d'oeuvre du secteur agricole est transféré vers le reste de l'économie. Le cadre de l'analyse se fait généralement à travers un modèle bi-sectoriel. Ils mettent en évidence deux secteurs dans l'économie : un secteur traditionnel, de subsistance ou encore agricole et un secteur moderne ou non agricole. Les premiers éléments de ces analyses se retrouvaient déjà au 18e siècle. RICARDO (1817) dans The principles of political economy and taxation, a présenté le plus connu des premiers modèles19(*). Il part de deux hypothèses : présence d'un secteur agricole à rendements décroissants et existence d'une main d'oeuvre sous-employée dans ce secteur. RICARDO affirme que le secteur industriel peut recruter dans le secteur agricole sans qu'il y ait une hausse de salaire dans le secteur urbain ou le secteur rural.

    La version moderne des modèles bi sectoriels a été initiée par l'économiste LEWIS (1955). Il considère ainsi deux secteurs dans l'économie. D'une part le secteur moderne, développé, capitaliste dans lequel il existe un marché bien structuré. Et d'autre part le secteur traditionnel qui comprend principalement l'agriculture. Dans son modèle classique d'économie duale, LEWIS établit, à travers le marché du travail un lien entre la main d'oeuvre sous-employée et bon marché du secteur agricole et le niveau de salaire dans le secteur industriel. Le secteur industriel ou encore secteur avancé utilise du capital qui peut être accumulé tandis que le secteur agricole utilise un facteur de production qui ne peut être accumulé, la Terre. Les travailleurs du secteur agricole ont une productivité faible voire nulle ; plusieurs employés exercent une activité qui aurait pu l'être par un seul. L'économie dispose ainsi d'un excédent de main d'oeuvre. L'expression « offre illimitée de main d'oeuvre » employée par LEWIS se justifie ainsi par cette abondance de main d'oeuvre non qualifiée. Pour LEWIS (1955), le développement consiste dans la « réduction progressive du secteur archaïque et le renforcement du secteur moderne ». Bien que le surplus de main d'oeuvre soit observé aussi bien dans le secteur traditionnel que dans le secteur moderne, dans le secteur traditionnel, il est déguisé. En ce sens qu'une partie de la main d'oeuvre peut y être extraite sans que la production agricole n'en pâtisse, les travailleurs restant n'auront qu'à augmenter leur volume de travail.

    Le secteur moderne va embaucher dans le secteur de subsistance grâce à un salaire un peu plus élevé mais qui reste tout de même faible. Il continuera à embaucher tant que la productivité marginale des travailleurs est supérieure au salaire. Un profit sera ainsi dégagé. Ce profit sera réinvesti par les capitalistes, ce qui accroîtra la productivité marginale et permettra d'entamer une nouvelle embauche. Ce cycle se poursuivra jusqu'à l'égalisation du salaire et de la productivité marginale des travailleurs. Il en résultera en fin de compte que tout le surplus de main d'oeuvre du secteur de subsistance sera absorbé par le secteur moderne. Cette baisse conséquente de la main d'oeuvre dans le secteur de subsistance y entraînera une hausse des salaires. De même, dans le secteur moderne, les salaires vont s'élever.

    Ce modèle de LEWIS met l'accent sur la part croissante des profits dans le revenu national, liée à la progression du secteur capitaliste. L'élévation du taux d'investissement permet une croissance rapide.

    À la suite de LEWIS, FEI et RANIS (1964) vont montrer qu'en transférant le surplus de main d'oeuvre de l'agriculture vers l'industrie, l'économie peut complètement se développer. Ils vont modifier ou améliorer certaines hypothèses du modèle de LEWIS. L'absorption du surplus de main d'oeuvre est due à la modification de la répartition des facteurs de production et ils n'admettent pas que les travailleurs du secteur agricole aient une productivité marginale quasi-nulle. Pour FEI et RANIS, le transfert de main d'oeuvre doit être précédé d'une augmentation de la production agricole. Le taux auquel cette main d'oeuvre est transférée dépend du taux de croissance de la population, de la qualité des progrès techniques dans le secteur agricole et la croissance du stock de capital dans le secteur industriel.

    Ces différentes approches du rôle de l'agriculture limite cette dernière au rôle d'un secteur uniquement au service des autres pour l'atteinte du développement. Le secteur agricole doit fournir aux autres secteurs les ressources nécessaires à leur développement. Ainsi, le secteur agricole n'est pas en soi un moteur de croissance et de développement économique, mais il permet de réaliser ce développement via les autres secteurs de l'économie. Avec ces conceptions, la croissance et le développement renvoient à une « modernisation » de l'économie, le secteur agricole s'y intègre donc difficilement. Son rôle est d'amorcer le développement global de l'économie et ensuite de s'"éclipser".

    Mais de plus en plus, des arguments plus récents plaident en faveur d'un développement du secteur agricole en tant que secteur d'activité propre. L'agriculture pourrait ainsi contribuer directement à la croissance et au développement.

    1.3 Développement de l'agriculture en tant que secteur à part entière de l'économie

    Il est certes admis que dans une économie en pleine croissance, la part du secteur agricole dans l'économie est vouée à la décroissance. La Banque Mondiale dans son Rapport sur le Développement dans le Monde (RDM) distingue trois catégories de pays : les pays à vocation agricole, les pays en transition et les pays urbanisés. Dans ces groupes de pays, la contribution de l'agriculture au PIB est, en moyenne, respectivement de plus de 40 %, 20 % et 8 %. Tandis que la part moyenne d'actifs occupés dans le secteur agricole est respectivement de 34 à 64 %, 43 % et 22 %20(*). La raison vient des caractéristiques propres de l'agriculture qui est une activité dotée d'une productivité relativement faible. La BM résume mieux cela lorsqu'elle énonce une des hypothèses formulées par les économistes : « la croissance de la productivité agricole est intrinsèquement lente »21(*). Il pourrait ainsi paraître difficile de se baser sur l'agriculture pour réaliser des objectifs de croissance et de développement soutenus.

    Mais dans un contexte de décollage économique, l'agriculture peut s'avérer un secteur en tête de l'économie. Il existe des exemples où l'agriculture a crû plus rapidement que l'industrie. « Au Chili et au Brésil, l'agriculture s'est développée plus rapidement que l'industrie pendant la décennie 1990 »22(*). Le RDM fait état d'une forte population rurale vivant en dessous du minimum acceptable. L'activité majeure de ces ruraux demeure l'agriculture. Ainsi, « du simple fait de sa taille, le secteur agricole est capital pour le développement, au moins à moyen terme»23(*).

    La BM note également que dans les pays où la croissance non agricole s'est accélérée, l'écart entre revenus urbains et revenus ruraux s'est accentué. En effet, les mécanismes de redistribution du fruit de cette croissance ne sont pas toujours favorables au monde rural. Le développement du secteur agricole pour lui-même permettrait ainsi d'élever le niveau de vie des personnes vivant en milieu rural. En plus, les politiques qui consisteraient à taxer le secteur agricole ont eu un effet positif pour la croissance de nombreux pays industrialisés d'aujourd'hui. Mais ces politiques peuvent être désastreuses si elles sont mises en application immédiatement après la réalisation des investissements. Le risque est élevé que la poule soit tuée avant d'avoir pondu les oeufs d'or. D'ailleurs, comme le montre une étude menée par KRUEGER, SCHIFF, VALDÈS (1998) et d'autres, il existe une relation négative entre les politiques de taxation et la croissance globale de l'économie. Une croissance plurisectorielle s'impose ainsi pour assurer un développement harmonieux de l'économie. Le secteur agricole doit ainsi être développé pour son plein épanouissement.

    CHAPITRE II : SITUATION DU SECTEUR AGRICOLE CAMEROUNAIS DEPUIS 1960

    La politique économique au Cameroun depuis son indépendance en 1960, a toujours accordé une place particulière au secteur agricole. Les autorités camerounaises se sont depuis rendues à l'évidence que la voie du développement économique passe par le développement de l'agriculture. Ceci parce que cette activité a toujours été la principale en milieu rural, milieu qui reste le plus concerné par le faible niveau des revenus ainsi que la précarité des conditions de vie. Toute politique d'amélioration des conditions de vie de la population passe par l'augmentation de la productivité agricole. Ce secteur a occupé depuis 1960, plus de 40 % de la population active.

    L'élaboration de la politique économique au Cameroun n'a pas toujours été homogène depuis son accès à l'indépendance, elle a connu un certain nombre d'étapes :

    · une phase de planification allant de 1960 jusqu'au milieu des années 1980. Durant cette phase, des plans quinquennaux étaient exécutés. Au total six plans quinquennaux ont été mis en oeuvre dont cinq sont arrivés à terme, le sixième ayant été interrompu par la crise économique du milieu des années 1980. Cette période de l'histoire du Cameroun fut marquée par une prépondérance de l'État dans le déroulement de l'activité économique ;

    · la phase de la libéralisation. Suite à la crise économique, le gouvernement, conjointement avec le Fond Monétaire International (FMI) a mis en place les Programmes d'Ajustement Structurels (PAS). L'État camerounais a du se désengager de l'activité économique afin de laisser les règles du marché la réguler. Quelques années après le début de l'exécution des PAS, l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC) a prôné le libre échange et l'ouverture des frontières. Des restrictions quantitatives (RQ) sur certains produits étrangers ont été levées.

    · Dans le prolongement des PAS, le Cameroun a atteint le point de décision de l'Initiative Pays Pauvre Très Endettés (IPPTE) en 2000 dont le point d'achèvement a été atteint en avril 2006. Avec cette initiative, une nouvelle orientation a été donnée à la politique économique avec notamment la rédaction en 2003 du Document de Stratégie de Réduction de la Pauvreté (DSRP).

    La politique agricole a logiquement connu des changements durant ces différentes phases de l'évolution institutionnelle du Cameroun. D'abord marquée par la forte présence de l'État en amont et en aval de l'activité agricole durant la phase de planification, elle a connu un démantèlement de l'activité étatique avec les PAS et la Nouvelle Politique Agricole (NPA) mise en place dès 1990.

    Il sera présenté dans ce chapitre les différents traits marquants de la politique agricole au cours de ces périodes.

    2.1 Plans quinquennaux et politique agricole camerounaise

    Cinq plans quinquennaux ont été complètement exécutés au Cameroun depuis 1960. Les périodes d'exécution de ces plans ont été les suivantes :

    · de 1960 à 1965 : premier plan quinquennal dont l'objectif était de doubler le PIB par tête en 20 ans ;

    · de 1966 à 1971 : deuxième plan quinquennal avec un accent sur l'amélioration du niveau de vie de la population des zones rurales ;

    · de 1971 à 1976 : troisième plan quinquennal dont l'objectif principal était l'accroissement de la production et de la productivité agricole. À cet effet, plus de la moitié des investissements avaient été destinés aux projets agricoles directement productifs;

    · de 1976 à 1981 : quatrième plan quinquennal dont l'objectif majeur était l'accroissement du taux de croissance du PIB par tête d'au moins 5 %. Durant ce plan, la majeure partie des investissements a été consacrée à l'infrastructure rurale, à l'économie rurale et à l'énergie ;

    · le cinquième plan quinquennal a été mis en oeuvre durant la période allant de 1981 à 1986. Il visait également l'augmentation du revenu réel par habitant afin de donner un nouveau visage au Cameroun des années 2000. Une place de choix était également accordée au secteur agricole ;

    · Le sixième plan quinquennal a été un mort né. Son interruption a été provoquée par la crise économique survenue en 1987 au Cameroun et le début en 1988 de l'exécution des PAS sous l'aide du FMI et la BM.

    Le contexte économique de cette période imposait l'agriculture comme un pilier du développement de l'économie camerounaise. En effet, l'agriculture exige pour son expansion, relativement moins de moyens que le secteur industriel par exemple. De plus, le matériel dont ont besoin les paysans pour pratiquer des activités agricoles est facilement mobilisable sur place. Ainsi, au lendemain de son indépendance l'activité agricole possédait pour le gouvernement camerounais un avantage comparatif sur les autres secteurs dans la mise en place d'une politique économique de développement. Car elle restait pratiquée par une grande partie de la population et l'incidence d'une amélioration de la situation de cette activité aurait des effets plus marquants sur la population.

    Dans chacun de ces plans quinquennaux donc, l'agriculture ressort comme un des principaux éléments sur lequel devait se baser le développement économique. Les objectifs de ces plans seront centrés sur le secteur agricole ainsi que les stratégies de développement rural. Le deuxième plan quinquennal a même été baptisé "plan du paysan". Les buts visés ont été globalement les mêmes durant les quatre premiers plans quinquennaux. Ils peuvent se résumer par les éléments suivants :

    · l'augmentation de la production agricole tant vivrière qu'industrielle ;

    · l'amélioration de la productivité dans le secteur agricole ;

    · l'amélioration des revenus du monde rural ;

    · le développement des structures de transformation locale ;

    L'analyse de la politique agricole au Cameroun au cours de cette période de planification se fera en examinant les différents acteurs du secteur agricole et leurs rôles respectifs, le mode par lequel s'est opéré le financement de l'activité agricole ainsi que la politique commerciale, l'accès aux intrants et le volet formation et recherche.

    2.1.1 Les acteurs du secteur agricole

    Plusieurs acteurs aux rôles divers intervenaient dans le secteur agricole camerounais avant la phase de libéralisation à savoir l'État, les sociétés de développement, les missions de développement, les organismes coopératifs, les organismes financiers.

    2.1.1.1 L'État

    La politique agricole s'inscrivait dans le plan global de développement de l'économie camerounaise. Les administrations sectorielles, dont celles traitant des problèmes agricoles, préparaient des documents qui étaient consolidés par une commission nationale de planification qui en assurait la cohérence et élaborait le plan. Deux départements ministériels étaient impliqués dans l'élaboration de la politique agricole :

    · un ministère en charge des questions relatives à la production végétale : le ministère de l'agriculture ;

    · un ministère en charge des questions liées au développement des productions animales: le Ministère de l'Élevage, des Pêches et des Industries Animales.

    Durant cette période des plans quinquennaux, l'État est fortement impliqué dans l'élaboration et la mise en oeuvre de la politique agricole. Il est présent dans les différentes phases de l'exécution de celle-ci. Il s'engage dans les opérations de production, de distribution, de commercialisation, et la recherche. Son souci était d'assurer l'encadrement gratuit des agriculteurs de la production à la commercialisation, y compris le financement. Pour la commercialisation, les prix d'achat aux producteurs pour certaines productions étaient administrés par l'État. L'État s'était ainsi constitué maître d'ouvrage et maître d'oeuvre comme le relève ONDOA (2006). Les destinataires des différentes mesures de politique agricole en l'occurrence les agriculteurs avaient une marge de manoeuvre très réduite pour influencer la conception de la politique. La politique agricole impliquait beaucoup plus les fonctionnaires que les producteurs. Et même lorsque l'État mettait en place des coopératives pour accompagner les paysans, le rôle de ces associations de paysans était d'aider les fonctionnaires à mieux gérer leurs activités.

    Les ministères de l'agriculture et de l'élevage disposaient de structures déconcentrées qui fournissaient un encadrement aux paysans : distribution gratuite des intrants, centres de stockage, centre de conseils et de vulgarisation.

    2.1.1.2 Les sociétés de développement

    Les sociétés de développement avaient un statut d'établissement public pendant la phase de planification. Leur création se faisait suite à un décret qui déterminait les statuts, les missions, l'organisation administrative et financière, ainsi que les modalités de constitution du capital social. Ces sociétés de développement étaient des agro-industries publiques dotées d'une autonomie financière, qui était constituée essentiellement des subventions publiques. Ces sociétés publiques menaient des actions en coexistence d'autres agro-industries privées.

    Ces sociétés se retrouvaient principalement dans des filières d'exportation telles la banane, le thé, l'hévéa, etc. certaines exerçant parfois dans plusieurs filières. Les sociétés de développement prenaient une part entière dans le fonctionnement de ces filières. Elles rachetaient la production d'un groupe ciblé de paysans, généralement des organisations de paysans créées par elles, à des prix subventionnés. L'encadrement de ces paysans leur incombait ainsi que la facilitation pour ces derniers de l'accès au crédit et aux intrants agricoles. Leur action a porté sur la production, la formation et l'information des paysans, ainsi que la garantie d'un circuit de commercialisation. Le tableau 1 liste quelques sociétés de développement publiques par filière durant la phase de planification.

    Tableau 1 : liste des sociétés de développement par filière de production pendant la phase de planification

    FILIÈRE

    SOCIÉTÉS

    Riz

    SEMRY

    SODERIM

    UNDVA

    Banane

    OCB

    Huile de palme

    SOCAPALM

     

    PAMOL

    Sucre de canne

    CAMSUCO

    Caoutchouc

    HEVECAM

    Thé

    CDC

    Maïs

    SODEBLE

    Coton

    SODECOTON

    Cacao

    SODECAO

     Café

    UCCAO

    Source : compilation de l'auteur

    2.1.1.3 Les missions de développement

    Les missions de développement sont assez proches des sociétés de développement. Elles ont été créées pour répondre à des besoins immédiats dans les domaines où l'État n'a pas jugé nécessaire de créer une société de développement. Elles n'avaient pas de capital social et recevaient essentiellement des subventions publiques. On peut citer particulièrement :

    · Wum Area Development Authority (WADA);

    · Mission de développement de la Haute Vallée du Noun ;

    · MIDEVIV (Mission de Développement des cultures Vivrières et maraîchères).

    2.1.1.4 Les organismes coopératifs

    Le mouvement coopératif a suscité un grand espoir auprès des paysans dès son lancement. L'essor était considérable. Mais de nombreux problèmes de gestion ont miné son évolution. L'État avait une présence marquante dans le déroulement de l'activité des coopératives. Leur fonctionnement obéissait plus à une logique administrative, les paysans n'y jouaient pas un grand rôle. Ces coopératives apparaissaient plus comme des organismes étatiques déconcentrés, elles ont servi de relais dans la réalisation des différentes interventions de l'État dans le secteur agricole. Ainsi, la fourniture des intrants aux paysans s'est faite via celles-ci. De même, les coopératives ont joué le rôle de centre de collecte des produits de base auprès des paysans, qu'elles devaient fournir aux offices de commercialisation.

    2.1.1.5 Les organismes financiers

    Cette catégorie d'acteurs regroupe les organismes étatiques chargés d'apporter un appui financier aux agriculteurs, ainsi que les banques de développement. Des principaux organismes ayant joués un rôle majeur dans la mise en oeuvre de la politique agricole camerounaise, on peut retenir le Fond National de Développement Rural (FONADER), la BCD (Banque Camerounaise de Développement), le Crédit Agricole du Cameroun (CAC). Le FONADER et la BCD ont été liquidés et fermés en 1989. Les mauvaises performances financières et l'incapacité du FONADER à mobiliser et recycler l'épargne rurale ont eu raison de cet établissement 16 ans après son ouverture. Avec l'ajustement structurel, l'État a du se désengager de plusieurs activités en liquidant notamment ces organismes financiers qui constituaient des gouffres financiers.

    2.1.2 Le financement de l'agriculture

    La très forte présence de l'État qui a déjà été mentionnée plus haut se retrouve également sur le plan du financement de l'activité agricole. Durant cette phase de planification, deux acteurs majeurs contribuent au financement de l'activité agricole au Cameroun : l'État et le secteur bancaire. Le secteur bancaire a joué un rôle important dans la mise sur pied d'un secteur agricole moderne. Il a financé les activités de certaines agro-industries privées.

    L'essentiel du financement de l'activité agricole provenait de l'État à travers les sociétés de développement ci-dessus citées. Des ressources financières importantes leur ont été allouées jusqu'à l'application de la NPA. Bien que l'efficacité de l'action de ces sociétés pour l'État ait souvent été mise en cause, leurs actions se sont parfois révélées bénéfiques pour les producteurs. Ceux-ci ont profité des prix fixes pour écouler leur production. Mais la mauvaise gestion a fait que des investissements n'ont pas été réalisés pour moderniser l'appareil productif. Le tableau 2 présente la situation financière des gains nets de l'État concernant quelques sociétés de développement au cours de l'exercice budgétaire 1988/1989.

    Tableau 2: coût financier des structures parapubliques du secteur agricole au cours de l'exercice budgétaire 1988/1989. (Résultats annuels en millions de FCFA)

    NOM

    DÉPENSES

    RECETTES

    DÉFICIT

    1

    CDC

    2 390

    1 540

    1 850

    2

    CENADEC

    1 240

    390

    850

    3

    CENADEFOR

    2 970

    150

    2 820

    4

    CENEEMA

    1 000

    100

    900

    5

    HEVECAM

    4 100

    3 400

    700

    6

    MIDENO

    1 480

    0

    1 480

    7

    MIDEVIV

    4 300

    370

    3 330

    8

    MIDO

    500

    0

    500

    9

    Office Céréalier

    1 210

    630

    580

    10

    ONAREF

    4 790

    1 460

    3 330

    11

    ONDAPB

    4 500

    3 650

    850

    12

    ONPD

    1 200

    0

    1 200

    13

    SEMRY

    11 430

    2 830

    8 600

    14

    SODECAO

    12 500

    2 400

    10 100

    15

    SODECOTON

    41 000

    27 280

    13 720

    16

    SODENKAM

    930

    160

    770

    17

    SODERIM

    1 070

    90

    980

    18

    UNDVA

    4 500

    3 900

    600

    19

    WADA

    1 010

    690

    320

    20

    ZAPI-EST

    3 600

    2 800

    800

    TOTAL

    106 720

    51 840

    54 880

    Source: Stratégies de développement agricole 1980-1990 (extrait du document de ONDOA (2006))

    Ce tableau montre un déficit financier important de l'État dans la gestion des sociétés et missions de développement au cours de l'exercice budgétaire 1988/1989. Ce gouffre financier que constituaient ces sociétés de développement a largement justifié les liquidations, restructurations et privatisations qui y ont été faites durant l'application des PAS qui visaient entre autres l'assainissement des finances publiques.

    Le financement de l'État s'est aussi fait de manière directe. Il a également apporté un appui aux agriculteurs à travers les subventions à l'acquisition d'intrants ainsi qu'au matériel agricole. Les subventions ont pris plusieurs formes : primes diverses (à l'arrachage, à la création de nouvelles plantations, etc.).

    Le concept de "crédit agricole" était au centre de la politique de financement agricole. Ce crédit était considéré comme un intrant dans le processus de production et était distribué via les banques agricoles, les banques de développement ou les projets.

    Le financement de l'État à la recherche était assez important. Il reflétait l'ambition nourrie par l'État de développer et moderniser le secteur agricole. « En 1985/1986, les frais annuels de fonctionnement et d'équipement par chercheur étaient de 30 millions de FCFA pour l'IRA et de 60 millions de FCFA pour IRZV »24(*).

    2.1.3 La commercialisation des produits agricoles

    La politique commerciale du Cameroun au cours des vingt années qui ont suivi l'indépendance a été marquée par un souci de protéger l'industrie naissante. Ainsi, « d'importantes barrières tarifaires et de Restrictions Quantitatives (RQs) prévalaient alors dans le Programme Général des Échanges (PGE) »25(*). Le secteur agricole a été relativement moins protégé. Toutefois, des barrières tarifaires étaient dressées pour limiter la compétitivité de certains produits alimentaires importés.

    Durant la période de planification, les prix étaient pour la plupart administrés ; l'État veillait à la stabilité de leurs fluctuations. Des organismes publics ou parapublics achetaient aux petits et moyens agriculteurs, leur production à des prix fixés par l'État en début de campagne; l'on parlait alors de "prix au producteur". Pour le cacao, le café et le coton, l'Office National de Commercialisation des Produits de Base (ONCPB) constituait une interface entre les producteurs et les exportateurs. Cet office opérait avec une caisse de stabilisation. Il contrôlait ainsi le commerce des produits de base sus cités en assurant aux agriculteurs un prix de vente rémunérateur des coûts de production. L'ONCPB a constitué un intermédiaire entre les producteurs du cacao, du café et du coton, et le marché mondial. Tout en offrant des circuits de commercialisation aux producteurs, il a également joué un rôle de tampon face aux fluctuations des prix sur le marché mondial. En cas de baisse des prix mondiaux, les prix aux producteurs devaient être subventionnés, dans le but d'encourager les agriculteurs à continuer la production des cultures d'exportation jugées stratégiques. Mais cette politique n'a pu être mise en oeuvre au cours de la crise et la baisse drastique des cours des produits de base. La tendance était la même pour toutes les autres cultures de rente ; l'État ou encore des sociétés privées assuraient aux producteurs des circuits de commercialisation.

    Plusieurs autres organismes ont joué un rôle similaire dans la commercialisation des produits agricoles. Pour les céréales, l'office céréalier devaient constituer des stocks de sécurité et régulateur afin de lutter contre la famine et la pauvreté et de stabiliser les prix des céréales. Les sociétés de développement avaient en leur charge des paysans généralement regroupés en organisations auxquelles elles constituaient l'acheteur exclusif de la production en fin de campagne. C'est le cas de la SODECOTON, qui joue d'ailleurs encore ce rôle auprès de nombreuses associations paysannes du Nord-Cameroun.

    Tableau 3: Différence entre prix au producteur et prix FOB pour le cacao (en F CFA/kg)

    Campagne

    Prix planteur

    Prix FOB

    Pourcentage (%)

    1980/1981

    300

    401

    74,8

    1981/1982

    310

    446

    69,5

    1982/1983

    330

    493

    66,9

    1983/1984

    370

    657

    56,3

    1984/1985

    410

    812

    50,5

    1985/1986

    420

    804

    52,2

    1986/1987

    420

    606

    69,3

    1987/1988

    420

    513

    81,9

    1988/1989

    420

    553

    75,9

    1989/1990

    250

    386

    64,8

    1990/1991

    220

    375

    58,7

    1991/1992

    220

    374

    58,8

    1992/1993

    200

    352

    56,8

    1993/1994

    172

    381

    45,1

    1994/1995

    500

    783

    63,9

    1995/1996

    400

    638

    62,7

    1996/1997

    400

    628

    63,7

    1997/1998

    550

    859

    64,0

    1998/1999

    520

    800

    65,0

    1999/2000

    480

    570

    84,2

    2000/2001

    580

    750

    77,3

    2001/2002

    700

    1050

    66,7

    2002/2003

    700

    950

    73,7

    2003/2004

    500

    800

    62,5

    Source : UNCTAD (2006)

    Pour les cultures vivrières, la MIDEVIV a joué le rôle d'office de commercialisation. Cet organisme public s'occupait de la commercialisation et de l'assistance à la production des cultures vivrières. La MIDEVIV rachetait les produits vivriers aux agriculteurs et assuraient le transport vers les centres urbains pour la commercialisation.

    2.1.4 L'accès aux intrants

    Dès 1960, le gouvernement camerounais a commencé à procéder à la sensibilisation sur le rôle bénéfique des engrais. À cet effet, fut créé en 1960 le Programme National des Engrais (PNE). Ce programme avait pour objectifs la sensibilisation de la population sur l'usage rationnel des engrais, la mise en évidence de l'efficacité des engrais par des démonstrations pratiques. Le FONADER assurait la fourniture aux agriculteurs des intrants agricoles (engrais, produits phytosanitaires, etc.). Ces intrants étaient tous subventionnés par l'État et distribués aux agriculteurs. Les taux de subvention allaient de 75 % en moyenne pour les engrais à 100 % pour les produits phytosanitaires (VARLET et BERRY, 1997)26(*). Parallèlement à l'action du FONADER, la MIDEVIV approvisionnait les planteurs en semences sélectionnées. Dès 1980, un projet a été exécuté par la MIDEVIV conjointement avec la FAO, il permettait l'accès aux semences sélectionnées à moindres coûts.

    2.1.5 La formation et la recherche

    La recherche agricole est présente au Cameroun depuis les années 1970. Elle a longtemps été assurée par deux institutions :

    · l'Institut de la Recherche Agronomique (IRA)

    · l'Institut de la Recherche Zootechnique (IRZ).

    L'IRA comprenait quatre Centres de Recherches Agronomiques (CRA), un centre de recherches forestières (CRF) et un centre national des sols (CNS). Quant à l'IRZ, il était structuré autour de 3 centres, 7 stations et 5 antennes. Le choix des différents centres de recherche était fait selon la zone. L'objectif étant d'appliquer les résultats issus de la recherche pour l'amélioration de la production dans la zone agro écologique.

    La recherche a bénéficié de dotations budgétaires importantes de la part de l'État avant la survenance de la crise économique en 1987. Si l'importance du financement public à la recherche montrait la volonté des pouvoirs publics de faire émerger l'agriculture camerounaise, il ressort tout de même que l'impact de la recherche n'a pas été significativement positif sur l'amélioration de la productivité agricole. Des explications peuvent être trouvées à divers niveaux. Il existait une inadéquation entre les résultats de la recherche et les besoins des producteurs des exploitations de taille modeste. La concertation ne s'est pas assez faite entre les chercheurs et les agriculteurs. D'un autre côté, l'utilisation des résultats de la recherche nécessitait dans certains cas une formation supplémentaire des paysans afin que l'efficacité en soit garantie. Durant cette période, les plus grands bénéficiaires de la recherche agricole ont été les grandes agro-industries, plus outillées à utiliser les résultats de celle-ci et par ailleurs travaillant souvent en coopération avec des centres de recherche. La recherche agricole a ainsi de façon explicite ou non privilégié les besoins de l'agro-industrie au détriment de ceux des paysans.

    Le développement de la mécanisation était assuré par le Centre d'Étude et d'Expérimentation du Machinisme Agricole (CENEEMA). Il assurait Le transfert de technologies. Il était chargé d'expérimenter la mécanisation de l'agriculture camerounaise et de promouvoir l'utilisation des machines.

    2.2 La nouvelle politique agricole

    L'économie camerounaise et le secteur agricole qui en était le pilier ont connu une situation relativement viable avant le milieu des années 1980. Dès 1987, la chute brutale du cours des matières premières, dont dépendait fortement l'économie camerounaise, la dépréciation du dollar, la monnaie de référence dans laquelle était libellée la valeur des exportations, et la dégradation de l'environnement économique international ont provoqué une grave crise économique au Cameroun. Cette crise a débouché sur l'application des PAS sous l'égide des bailleurs de fonds internationaux. L'objectif d'assainissement des finances publiques a entraîné une baisse des salaires, une compression du personnel de l'État, des gels de certains recrutements dans la fonction publique27(*).

    Un premier accord dit de confirmation avait été signé avec le FMI le 18 septembre 1988 pour une période de 18 mois. L'objectif était de stabiliser les finances publiques. Le programme économique exécuté comportait les grands axes suivants : relèvement du niveau des impôts et taxes, réduction de la masse salariale, restructuration des entreprises publiques, avec des options de liquidation ou de privatisation pour celles qui ne sont pas performantes. Les résultats ne seront pas probants. Un deuxième accord de confirmation est signé en décembre 1991 pour une durée de neuf mois, suivi d'un troisième en mars 1994 pour 18 mois.

    Le secteur agricole a particulièrement été affecté par cette crise économique. L'application des PAS a entraîné un démantèlement de l'action de l'État camerounais dans l'activité économique en général et celle du secteur agricole en particulier. La politique agricole s'en est trouvée modifiée. Dès le début des années 1990, les différents acteurs du secteur agricole (État, associations paysannes, secteur privé, etc.), leurs rôles et les relations existantes entre eux, se sont profondément modifiés. L'État, sous l'égide des bailleurs de fonds a décidé de se désengager des activités liées à la production en général et de recadrer son action sur ses fonctions régaliennes et les missions de service public. C'est la fin de la planification et le début du libéralisme. L'État camerounais confirme la place prioritaire de l'agriculture dans l'économie camerounaise. Malgré la crise, elle continue d'occuper une grande partie de la population active (60 % en 199028(*)) et générer 30 % des recettes en devises. La NPA visera à consolider ces acquis tout en améliorant les performances du secteur.

    2.2.1 Les acteurs du secteur agricole

    Les acteurs intervenant dans le secteur agricole restent pratiquement les mêmes, seules leurs fonctions et les différentes relations entre eux vont connaître de réelles mutations.

    2.2.1.1 L'État

    Avec la NPA, la mise en oeuvre de la politique agricole concerne toujours deux départements ministériels en charge d'une spécialisation sectorielle précise. Le ministère de l'agriculture devenue en 2004 Ministère de l'Agriculture et du Développement Rural (MINADER) pour les questions relatives aux productions végétales et le Ministère de l'Élevage, des Pêches et des Industries Animales (MINEPIA) pour les productions animales. Cette bipolarisation a parfois été décriée car elle peut constituer un obstacle à la mise en place d'une politique agricole cohérente.

    Avec l'application des PAS, le rôle de ces deux départements ministériels s'est amoindri dans la définition des politiques agricoles. La réalisation des équilibres budgétaires étant prioritaire, le ministère en charge de l'économie et des finances s'occupe des grandes questions économiques. C'est ainsi qu'un ensemble de mesures ont été prises en marge de l'avis éventuel des ministères de l'agriculture et de l'élevage. L'arrêt des subventions et la réforme fiscale subits par le secteur agricole en sont des illustrations. En 2006, la loi des finances a supprimé l'exonération de la Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA) sur les intrants agricoles et le matériel d'élevage, une mesure qui a été jugé contradictoire avec l'objectif de faire du secteur agricole le moteur de la croissance économique. Les négociations des Accords de Partenariat Économique (APE) avec l'Union Européenne (UE) sont menées au Cameroun par le Ministère du Commerce sans association véritable du MINADER, alors que les produits agricoles constituent le sujet central de ces accords. La multiplicité des départements ministériels en charge des questions économiques a amenuisé l'influence du MINADER et du MINEPIA sur la gestion des affaires du secteur agricole. Le MINCOMMERCE pilote les négociations commerciales avec l'OMC même lorsque celles-ci portent sur des produits agricoles phares comme la banane d'exportation. De même, l'organisation de la commercialisation du cacao et du café relève du MINCOMMERCE. Avec la libéralisation, les actions de l'État sur le secteur agricole se sont faites de façon transversale, plusieurs départements ministériels s'y retrouvent plus ou moins impliqués.

    Le changement de l'action de l'État dans le secteur agricole ne concerne pas seulement les nouveaux départements ministériels impliqués. La NPA a été le prolongement logique des PAS. De nouvelles fonctions ont été attribuées à l'État dans son intervention. Les activités de production et d'encadrement qu'il assurait ont du être abandonnées. Également suspendues, les subventions accordées aux producteurs. Un recentrage s'est fait outre les missions régaliennes, sur la recherche agricole. La considération de l'État sur le secteur agricole est très vite devenue celle d'un secteur économique comme les autres, qui devait subir les règles du marché sans une protection particulière. Ainsi, l'État camerounais a signé les accords de l'OMC en 1995, réduisant ainsi des RQ qui ont été jusqu'alors appliquées sur certains produits alimentaires importés. L'entrée sur le territoire camerounais des poulets congelés a mis en mal la filière avicole camerounaise qui devait faire face à cette concurrence alors même que l'arrêt des subventions de l'État avait déjà réduit ses capacités financières. La filière riz n'a pas été épargnée par ces mesures d'ouverture. La libéralisation des échanges commerciaux a quasiment démantelé cette filière de production, elle n'a pas pu faire face à la concurrence créée par les importations de riz en provenance de l'Asie dès le milieu des années 1990. Des plans de relance sont proposés mais force est de reconnaître que les importations de riz se sont largement généralisées.

    Mais depuis quelques années, les institutions internationales sont favorables à un assouplissement de l'exercice de cette politique de libéralisme. Le FMI, au cours de l'année 2008 a encouragé l'État camerounais à se réengager dans l'activité économique notamment celle du secteur agricole. À cet effet, le ministre camerounais de l'agriculture et du développement rural, a accordé, le 5 novembre dernier, une subvention de 1 milliard F CFA à 200 organisations paysannes pour relancer la filière cacao-café. Des actions similaires avaient été envisagées pour les filières coton et avicole.

    2.2.1.2 Les organisations paysannes rurales

    Avec le désengagement de l'État, les PAS ont donné, au moins dans les discours, plus de pouvoirs aux organisations paysannes. L'État devait leur transférer de nombreuses responsabilités. Dans la réalité, ce transfert n'a pas été évident.

    2.2.1.3 Les opérateurs privés

    Leur rôle s'est davantage accru dans l'activité agricole. Des exportateurs privés rachètent les produits de base qu'ils revendent sur le marché international. La libéralisation de la distribution d'engrais a également drainé des opérateurs privés dans ce pan de l'activité agricole.

    2.2.2 Financement de l'agriculture

    Après la crise économique, il eut une restructuration du secteur bancaire qui avait été frappé par la crise. Les conditions d'accès au crédit se durcirent, une très grande partie des producteurs du monde rural fut exclue du crédit bancaire. Le crédit bancaire se fit davantage plus ciblé, orienté vers les grandes agro-industries ainsi que certaines filières d'exportation. Avec le désengagement de l'État, marqué notamment par la liquidation du CAC et la fermeture du FONADER, le secteur bancaire se devait de prendre le relais et d'accentuer davantage son rôle dans le financement de l'activité agricole. Mais le secteur agricole camerounais n'avait pas atteint le niveau de développement requis pour prétendre à des prêts bancaires. Plusieurs raisons peuvent justifier ce constat. D'abord, l'agriculture camerounaise reste encore de type traditionnel, et donc très exposée aux risques relatifs aux conditions naturelles. À ces risques climatiques, il convient d'ajouter les risques classiques liés au prix de vente de la production. En plus de ces risques, la faible ou même l'absence d'intensité technologique allonge considérablement le délai de retour sur investissement pour certaines cultures (exemple du palmier à huile). L'effet conjoint de ces facteurs a pour résultat l'exigence par les banques de garanties insoutenables pour financer l'activité agricole. Le désengagement de l'État a ainsi rendu problématique le crédit à l'activité agricole, moins de 10 % de crédits bancaires sont accordés au secteur agricole pourtant déclaré secteur stratégique par les autorités politiques camerounaises.

    L'État s'étant désengagé, le financement de l'agriculture se fait depuis 1990 principalement par les bailleurs de fonds à travers des projets et programmes. L'agence Française de Développement et l'Union Européenne ont été les principaux pourvoyeurs de fonds du Projet Crédit Rural Décentralisé; le Programme National de Vulgarisation et de Recherche Agricole (PNVRA) a comme principal bailleur de fonds La Banque mondiale. L'Agence canadienne pour le Développement International finance des Micro Projets Productifs en Faveur des Femmes. L'État et la Banque Mondiale ont signé en 1991 un accord de prêt de 23 milliards de dollars pour un projet qui comprend cinq composantes dont le « Financement des Micro-réalisations Agricoles et Communautaires » (FIMAC). Le tableau ci-dessous présente la situation des prêts de première génération de ce projet en 2001.

    Tableau 4: Situation des prêts du projet FIMAC en 2001

    Province

    Nombre de groupes financés

    Montant des crédits (FCFA)

    Montant échu (FCFA)

    Montant remboursé (FCFA)

    Taux de remboursement (%)

    Extrême-Nord

    267

    114 797 659

    108 069 899

    75 059 609

    65

    Nord

    382

    234 038 332

    200 540 925

    130 170 398

    56

    Adamaoua

    243

    368 191 615

    238 427 715

    121 353 206

    33

    Est

    253

    104 732 980

    103 549 114

    61 717 153

    59

    Centre

    154

    124 141 412

    74 925 804

    39 524 306

    32

    Sud

    214

    90 804 905

    82 136 106

    44 030 341

    48

    Littoral

    257

    148 656 829

    144 387 329

    87 911 900

    59

    Sud-Ouest

    179

    98 595 435

    78 911 195

    48 757 825

    49

    Ouest

    384

    162 098 775

    153 771 685

    116 222 568

    72

    Nord-Ouest

    570

    363 259 290

    291 893 820

    226 157 655

    62

    Total

    2 903

    1 809 317 232

    1 476 613 592

    950 904 961

    53

    Source : Cellule FIMAC

    L'aide bilatérale et multilatérale constitue également une source de financement pour les programmes et projets dans le secteur agricole. Selon l'OCDE, L'aide bilatérale à l'agriculture du Cameroun se chiffre à 596 953 000 de dollars US en 30 ans. Ce qui représente moins de 10 milliards par an avec un taux de change moyen de 1$ = 500 FCFA. Les trois principaux bailleurs (France, Allemagne, États-Unis) ont fourni 88,88% du montant total. Toujours selon l'OCDE, l'aide multilatérale a représenté 49 % de l'aide totale à l'agriculture au Cameroun entre 1973 et 2004.

    Les organismes financiers étatiques ayant été restructurés voire fermés, la micro finance s'est développée au Cameroun. La loi n° 92/006 du 14 août 1992 relative aux coopératives et GIC et le décret n° 98/300/PM de septembre 1998 fixant les modalités d'exercice des activités des coopératives d'épargne et de crédit ont été les déclencheurs de l'activité de micro finance. Depuis 2002, cette activité est coordonnée par la COBAC. Les établissements de micro finance qui interviennent dans le secteur agricole sont généralement regroupés dans des réseaux. On peut citer : CAMCULL, M, CVECA, FOCAOB. Ces établissements signent des conventions avec les ministères pour servir d'interface entre les bailleurs de fond et les producteurs.

    2.2.3 La commercialisation des produits agricoles

    L'ajustement structurel a ouvert la voie à une série de mesures libérales dans l'économie camerounaise. Les offices de commercialisation ont été restructurés, privatisés voire dissous. L'ONCPB sera liquidé en 1991, l'Office National du Cacao et du Café (ONCC) reprendra certaines de ses missions. Cette période marque aussi le début de l'ère de la libéralisation du commerce, avec son corollaire de suppression des monopoles. Les commerçants privés sont désormais autorisés à prendre activement part à la commercialisation des produits agricoles relevant autrefois de façon exclusive de l'État. Le paysan est libre de vendre à qui il veut sans contrainte à lui fixée. La libéralisation du commerce suppose également l'abolition des prix fixes.

    2.2.4 L'accès aux intrants

    Avec l'application de la NPA, le rôle de l'État a profondément été modifié dans le secteur agricole. Les mesures de protection et d'encadrement dont bénéficiaient les agriculteurs ont été levées. Il fallait dès lors pour ces agriculteurs exercer leurs activités comme tout entrepreneur privé. Cela suppose donc l'acquisition des intrants aux prix du marché. Dès 1989, la distribution gratuite d'intrants sera suspendue. Cette mesure sera suivie d'un arrêt des subventions aux engrais, pesticides et herbicides. On observe dès lors une privatisation de la distribution des engrais. Une étude de FOLEFACK et GOCKOWSKI (2004)29(*) montre que la fourniture en intrants est assurée à 80 % par des opérateurs privés dont 52 % seulement d'entre eux ont un agrément. Les 20 % résiduels sont assurés par les organisations paysannes. Tout de même, l'État camerounais, conscient de la place qu'occupe le secteur agricole dans l'économie du pays, a toujours pris des mesures spéciales pour ce secteur. C'est ainsi que les engrais et certains matériels d'élevage ont été, pendant plusieurs années, exonérés de la TVA. Cette mesure sera levée par la loi de finances de 2006.

    Avec, le recul de l'État du secteur, les institutions internationales ont accru leur rôle dans le secteur agricole et la fourniture des engrais aux agriculteurs. Ces initiatives s'inscrivent dans le cadre de projets financés par ces institutions. Les bénéficiaires sont généralement des organisations paysannes dont l'émergence a été favorisée par le désengagement de l'État.

    2.2.5 La formation et la recherche

    Le Ministère de la Recherche Scientifique et de l'Innovation (MINRESI) autrefois MINREST, est l'organe étatique chargé de l'application de la politique gouvernementale en matière de recherche scientifique et technique en général et de recherche agricole en particulier. Il assure ainsi la tutelle de tous les centres de recherche agricole exerçant sur le territoire national. Ces centres de recherche font partie du Système National de Recherche Agricole (SNRA) dont l'Institut de Recherche Agricole pour le Développement (IRAD) en constitue le pilier.

    L'IRAD a été créé par le décret n° 96/050 du 12 mars 1996 sous les cendres de l'IRA et de l'IRZ dont elle a été une fusion. L'IRAD a la mission de conduire les activités de recherche visant la promotion du développement agricole dans les domaines des productions végétales, animales, halieutiques, forestière et de l'environnement, ainsi que des technologies alimentaires et agro-industrielles. L'IRAD travaille en collaboration avec quelques sociétés de développement dans la recherche d'accompagnement par filière. Il s'agit de la SODECOTON pour la filière coton, la CDC et HEVECAM pour la filière hévéa, etc.

    Outre les centres de recherche, certains établissements d'enseignement supérieur assurant la formation des cadres d'agriculture apportent aussi une contribution à la recherche. Il s'agit de la Faculté d'Agronomie et des Sciences Agricoles (FASA) de l'Université de Dschang, de la Faculté des sciences (FS) de l'Université de Yaoundé 1 (UY1), et de l'École nationale supérieure des sciences agro-industrielles (ENSSAI) de l'Université de Ngaoundéré.

    Les résultats antérieurs de la recherche ont été très peu exploités, à cause, d'une part de leur inadaptation aux besoins des producteurs agricoles, et d'autre part de l'inorganisation des services de recherche et de vulgarisation30(*). Après la restructuration, il a été mis en place le PNVRA qui a démarré ses activités en 1988 sous l'appellation de PNVA. Il était chargé d'assurer entre autres la valorisation des résultats de la recherche agricole. Son rôle est d'accroître l'impact de la recherche sur le développement agricole.

    À côté de l'IRAD, d'autres centres de recherche régionaux et internationaux interviennent de façon directe ou indirecte à la formation et la recherche agricole au Cameroun. On peut citer :

    · le CIRAD (Centre de Coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement)

    Il est issu des anciennes institutions françaises de recherche en agronomie tropicale implantées au Cameroun depuis 1942. Outre la recherche, le CIRAD s'occupe également des aspects méthodologiques, de la formation en politique agricole, du renforcement des capacités nationales.

    · l'IRD (Institut de Recherche pour le Développement)

    · l'ICRAF (International Center for Research in Agroforestry)

    · le CIFOR (Center for International Forestry Research)

    · l'IITA (International Institut of Tropical Agriculture)

    · Centre du riz pour l'Afrique qui travaille en association avec l'IRAD

    · le Pôle régional de Recherche Appliquée au développement des Savanes d'Afrique Centrale (PRASAC)

    · Le Centre Africain de Recherche sur Bananiers et Plantains (CARBAP)

    · Le Conseil Ouest et centre africain pour la Recherche et le développement Agricoles (CORAF)

    · Les universités étrangères : elles contribuent à la formation des cadres nationaux en les accueillant pour des thèses et mémoires.

    2.3 La politique agricole dans le Document de Stratégie de Réduction de la Pauvreté

    L'atteinte du point d'achèvement de l'Initiative Pays Pauvre Très Endetté (IPPTE) passait entre autre par la proposition par le gouvernement camerounais, d'une stratégie de réduction de la pauvreté. Ainsi, en avril 2003, le gouvernement camerounais a rédigé le DSRP, dans lequel il définissait un ensemble de programmes devant permettre de réduire la pauvreté à l'horizon 2015. Une place avait été évidemment accordée au secteur agricole. La stratégie du secteur agricole se situait elle-même dans le cadre plus large de la stratégie intégrée du développement rural. Car, comme il est mentionné dans le DSRP, des analyses faites sur le profil de pauvreté au Cameroun montrent que « la pauvreté au Cameroun est un problème rural ».

    Concernant le secteur agricole, le gouvernement camerounais avait prévu d'apporter un soutien aux exploitations familiales paysannes concernant leur production. Ce soutien passait par le développement des activités en milieu périurbain, ceci dans le but de permettre l'essor de systèmes de production à rendements élevés où l'espace est occupé de façon optimale et avec une grande productivité. Un approvisionnement des villes en produits locaux devait s'accroître.

    Des actions spécifiques avaient été dirigées vers des filières choisies. Il s'agissait des féculents, des céréales, des fruits et légumes, ainsi que des cultures d'exportation. Les actions visaient en général l'accroissement de la production par une amélioration de la productivité au travers de la vulgarisation de semences de qualité et des itinéraires techniques. Pour les cultures vivrières, l'augmentation de la production s'avère être une condition pour réduire les importations alimentaires et assurer la sécurité alimentaire. Les actions visaient également la stabilisation des prix, la promotion des PME/PMI orientées vers l'exportation ou la transformation.

    Ces actions spécifiques en direction du secteur agricole s'inscrivaient dans une stratégie plus large orientée vers le développement du milieu rural. La stratégie intégrée de développement rural devait être mise en oeuvre à travers un plan d'action comprenant des programmes regroupés autour de cinq domaines prioritaires :

    a. le développement local qui passait entre autres par le renforcement du rôle des communautés. On note la mise sur pied du Programme National de Développement Participatif (PNDP), du Programme d'Appui au Développement Communautaire (PADC) ou encore le projet RUMPI ;

    b. le développement des productions dont un accent particulier était porté sur l'appui au développement des exploitations agricoles, au développement des filières porteuses, à l'émergence des organisations professionnelles et interprofessionnelles, au développement de la recherche en vue d'améliorer la productivité ;

    c. l'appui institutionnel et la rénovation de l'enseignement technique et de la formation professionnelle ;

    d. la gestion durable des ressources naturelles ;

    e. les modalités de financement du secteur rural, comportant deux volets : un programme national de micro finance et des modalités de financement à moyen long terme pour les investissements dans les exploitations et entreprises agricoles.

    Les stratégies de développement du secteur agricole coupent de façon transversale cette stratégie intégrée du développement rural dont elles constituent un des éléments centraux, l'agriculture restant encore l'activité majeure en milieu rural.

    Il est à noter qu'avec la rédaction du DSRP, le rôle joué par les ministres en charge de l'agriculture et du développement rural et celui de l'élevage et des industries animales s'est fortement amoindri dans la définition de la politique agricole. La priorité étant donnée aux équilibres budgétaires, un contrôle de l'activité économique en général est fait par les ministres en charge de l'économie et des finances.

    PARTIE II : MESURE DE L'IMPACT DE L'AGRICULTURE SUR L'ÉCONOMIE CAMEROUNAISE

    CHAPITRE III : ÉTUDE DESCRIPTIVE DU SECTEUR AGRICOLE CAMEROUNAIS

    L'application de la politique agricole au Cameroun a connu des évolutions dues au changement de conjoncture mondiale comme on l'a montré au chapitre précédent. Ce chapitre a pour objectif de faire une présentation quantitative du secteur agricole camerounais à travers ces différentes phases de l'évolution du Cameroun. Il s'agit à travers quelques statistiques sur le secteur agricole, d'observer l'effet de l'application des différentes politiques agricoles sur des aspects précis du secteur agricole camerounais notamment la production, la contribution à la formation de la richesse nationale, l'occupation de la main d'oeuvre, etc.

    3.1 Les principaux produits

    Le système de production agricole camerounais est l'un des plus diversifiés d'Afrique. Cette diversité est le reflet de la diversité climatique du pays. Sans prétendre à l'exhaustivité de la production agricole, dans cette partie, nous retiendrons un certain nombre de produits selon leur importance économique et leur position stratégique.

    3.1.1 Exportations des cultures de rente

    3.1.1.1 Le cacao

    Figure 1: Évolution des exportations de cacao au Cameroun

    Source : Banque Mondiale (WDI, 2005)

    Les exportations de cacao présentent une légère tendance à la hausse sur toute la période. On observe une chute de la production entre 1988 et 1994. La figure 1 montre une fluctuation des exportations de cacao. Ce secteur n'est pas à même de maintenir l'offre de cacao à l'exportation sur un sentier de croissance. Cette situation peut s'expliquer principalement par la fluctuation des cours mondiaux du cacao. On pourrait également évoquer la prépondérance de la demande sur l'offre dans le marché du cacao. À cela s'ajoute également la multiplicité des pays offreurs de cacao dans les pays du sud.

    3.1.1.2 Le café

    Figure 2: Évolution des exportations de café au Cameroun

    Source : Banque Mondiale (WDI, 2005)

    La figure 2 présente les exportations de café (arabica et robusta) au Cameroun. Après avoir connu une tendance à la hausse entre 1965 et 1989, le secteur va connaître une forte baisse jusqu'en 1998 où la valeur des exportations de café a atteint son pire niveau.

    3.1.1.3 Le coton

    Figure 3: Évolution des exportations de coton au Cameroun

    Source : Banque Mondiale (WDI, 2005)

    Le coton est la seule filière à ne pas avoir été libéralisée. Les exportations de coton ont été stabilisées autour de 20 000 tonnes entre 1965 et 1989. Depuis 1992, l'on observe une tendance à la hausse des exportations de coton. Cette filière de production n'a pas été particulièrement affectée par la crise économique de 1987, une baisse particulière de la production exportée ne ressort pas de la figure 3.

    3.1.2 Production des cultures vivrières

    3.1.2.1 Le manioc

    Figure 4: Évolution de la production de manioc au Cameroun

    Source : Administrations économiques et financières, FMI et BEAC (2006)

    La production de manioc au Cameroun reste inférieure à 3000 tonnes comme le montre la figure 4. Cette figure présente des fluctuations, avec une tendance à la hausse dès 1993, une baisse entre 1998 et 2000 et une reprise depuis 2000. Dans le DSRP, le gouvernement camerounais insistait sur l'augmentation de la production des cultures vivrières notamment le manioc pour l'amélioration de la sécurité alimentaire.

    3.1.2.2 Le maïs

    La figure 5 présente l'évolution de la production de maïs au Cameroun entre 1992 et 2005. La production de maïs est en hausse depuis 1992, avec une production qui a atteint un million de tonnes en 2005. Ce produit, en plus de la consommation finale à l'état, entre en consommation intermédiaire dans de nombreuses productions.

    Figure 5: Évolution de la production de maïs au Cameroun

    Source : Administrations économiques et financières, FMI et BEAC (2006)

    3.1.2.3 Le riz paddy

    Figure 6: Évolution de la production de riz paddy

    Source : Administrations économiques et financières, FMI et BEAC (2006)

    Comme le montre la figure 6, la production de riz reste à un niveau relativement bas au Cameroun. Depuis 1992, la production de riz est restée inférieure à 80 000 tonnes, avec une valeur record de 73 000 tonnes en 1998. Or ces dernières années le riz est devenu un produit alimentaire important pour la population camerounaise. Une reprise de la production dans cette filière contribuerait à réduire les importations de riz en provenance de l'Asie et donc réaliser l'économie des devises étrangères.

    3.1.3 Les produits de l'élevage

    3.1.3.1 La volaille

    Figure 7: Évolution de la production de volaille au Cameroun

    Source : Administrations économiques et financières, FMI et BEAC (2006)

    La figure 7 présente la production de volailles au Cameroun entre 1994 et 2005. La tendance récente de ce secteur reste très en deçà des performances réalisées entre 1997 et 1998. Le "démantèlement" de cette filière de production, illustrée ici par la chute drastique de la production entre 1998 et 2000, est du à la levée des restrictions à l'importation des poulets, le produit phare de la filière. L'entrée sur le territoire camerounais des poulets congelés a créé de fortes distorsions sur le marché des volailles.

    3.1.3.2 Les bovins

    Figure 8: Évolution de la production de bovins au Cameroun

    Source : Administrations économiques et financières, FMI et BEAC (2006)

    La production des bovins connaît également une tendance actuelle qui est très en deçà du niveau de 1999.

    Les graphiques ci-dessus présentés montrent des fluctuations dans la production agricole au Cameroun. Ce secteur a une faible capacité à soutenir un rythme de croissance dans le temps. Pourtant l'augmentation de la production vivrière reste une condition nécessaire pour assurer la sécurité alimentaire.

    3.2 Caractéristiques macroéconomiques du secteur agricole camerounais

    3.2.1 Importance de l'agriculture dans la formation du PIB

    Tableau 5: Évolution de la part de l'agriculture dans le PIB au Cameroun

    Année

    part de l'agriculture dans le PIB (%)

    1965

    32,732

    1966

    31,851

    1967

    31,133

    1968

    31,506

    1969

    30,724

    1970

    31,364

    1971

    31,004

    1972

    31,965

    1973

    30,793

    1974

    29,54

    1975

    29,12

    1976

    27,61

    1977

    33,645

    1978

    31,353

    1979

    30,824

    1980

    31,272

    1981

    29,397

    1982

    28,66

    1983

    24,311

    1984

    23,769

    1985

    21,57

    1986

    22,364

    1987

    24,816

    1988

    24,663

    1989

    26,112

    1990

    24,575

    1991

    24,795

    1992

    27,272

    1993

    27,921

    1994

    39,565

    1995

    40,202

    1996

    41,327

    1997

    42,093

    1998

    42,432

    1999

    42,326

    2000

    38,456

    2001

    39,864

    2002

    39,897

    2003

    40,583

    2004

    41,098

    2005

    41,058

    Source : Banque Mondiale (WDI, 2007)

    La part de l'agriculture dans le PIB est restée supérieure à 20 % depuis 1965. Jusqu'en 1982, cette part se situait autour de 30 %. Cette valeur était inférieure à 30 % dans le milieu des années 1980, en raison entre autre de la découverte du pétrole. Depuis 1994 et la dévaluation du F CFA, la part de l'agriculture dans le PIB est de l'ordre de 40 %. Ces valeurs restent tout de même élevées. En effet, si aux premières phases de l'évolution économique l'agriculture est une activité prépondérante pour un pays, sa part est amenée à décroître dans le temps. Cette décroissance indique le rôle de locomotive qu'aurait joué le secteur agricole sur les autres secteurs qui se seraient alors développés plus vite que le secteur agricole. Ainsi, si comme le montre le tableau ci-dessus, le secteur agricole camerounais représente 40 % de son PIB dans les années 2000, il peut être légitime de penser que le secteur agricole au Cameroun n'a pas pleinement joué le rôle qui lui est assigné par la théorie économique. À titre illustratif, nous présentons ci-dessous la part de l'agriculture dans le PIB de quelques pays développés et émergents.

    Tableau 6: Part de l'agriculture dans le PIB de quelques pays développés et émergents (%)

     
     

    Année

     
     

    1975

    1980

    1990

    2000

    2005

    Pays

    France

    5,938

    4,7542

    3,7877

    2,8364

    2,1965

    États-Unis

    4,0718

    2,8964

    2,0613

    1,2318

    ..

    Chine

    32,399

    30,09

    27,049

    14,832

    12,601

    Afrique du Sud

    7,6617

    6,1963

    4,6301

    3,2749

    2,5456

    Source : Banque Mondiale (WDI, 2007)

    Tableau 7: Contribution de l'agriculture à la croissance du PIB

    Année

    Contribution (%)

    Année

    Contribution (%)

    Année

    Contribution (%)

    1966

    1,28%

    1980

    0,07%

    1994

    0,96%

    1967

    2,00%

    1981

    3,90%

    1995

    2,85%

    1968

    1,99%

    1982

    1,09%

    1996

    2,55%

    1969

    2,04%

    1983

    -2,09%

    1997

    2,66%

    1970

    1,84%

    1984

    2,11%

    1998

    2,44%

    1971

    0,50%

    1985

    2,09%

    1999

    2,49%

    1972

    2,18%

    1986

    1,48%

    2000

    1,68%

    1973

    1,52%

    1987

    0,12%

    2001

    1,69%

    1974

    1,84%

    1988

    -3,14%

    2002

    1,40%

    1975

    0,44%

    1989

    1,67%

    2003

    1,37%

    1976

    0,44%

    1990

    -0,26%

    2004

    1,31%

    1977

    0,46%

    1991

    -1,08%

    2005

    1,63%

    1978

    1,19%

    1992

    1,62%

     
     

    1979

    3,99%

    1993

    0,35%

     
     

    Source : Banque Mondiale (WDI, 2007)

    La contribution de l'agriculture à la croissance du PIB est le rapport de la variation de la valeur ajoutée du secteur agricole par le PIB de l'année précédente. Cette contribution indique donc la valeur absolue du taux de croissance du PIB réel qui est due à l'agriculture. Avant l'année 1988, les valeurs sont restées positives, excepté en 1983 où le PIB agricole a contribué de - 2,09 % à la croissance du PIB réel. Comme on peut le voir sur ce tableau, avant la crise, le secteur agricole contribuait de façon non négligeable à la croissance du PIB. On note même une valeur de 3,99 % en 1979. Le plus mauvais niveau a été atteint justement en 1988. Mais depuis 1992, le PIB agricole croît de façon régulière. Notons tout de même que ces valeurs restent en deçà des capacités réelles du secteur agricole camerounais au regard de sa part dans le PIB (tableau 5) et la main d'oeuvre qu'il emploie.

    3.2.2 La superficie cultivable

    Tableau 8: Évolution de la part de la superficie utilisée pour l'agriculture au Cameroun

    Année

    1965

    1975

    1985

    1995

    2003

    Superficie agricole (% de la superficie totale)

    16,631

    18,038

    19,682

    19,682

    19,682

    Source : Banque Mondiale (WDI, 2007)

    D'après l'encyclopédie libre Wikipédia, moins de 20 % de la superficie cultivable au Cameroun est utilisée pour les besoins de l'agriculture. Comme le montre le tableau ci-dessus, la superficie consacrée à la pratique de l'activité agricole a très peu évolué dans le temps. De vastes étendues de terres restent en friche dans les zones rurales du pays. Dans ces zones, le droit coutumier prime encore dans l'attribution des Terres et l'application des lois en cas de litige. Les spécialistes du secteur agricole camerounais évoquent l'urgence d'une réforme agraire avec le principe « la Terre à ceux qui la cultivent ».

    3.2.3 Consommation d'engrais

    Tableau 9: Importation d'engrais au Cameroun

    Année

    Importations d'engrais (tonnes)

    1989/1990

    81 503

    1990/1991

    43 551

    1991/1992

    32 641

    1992/1993

    55 610

    1993/1994

    32 690

    1994/1995

    107 047

    1995/1996

    93 104

    1996/1997

    141 499

    1997/1998

    112 655

    1998/1999

    85 020

    1999/2000

    104 898

    2000/2001

    103 846

    2001/2002

    109 971

    Source : Ministère de l'agriculture (2003)

    Depuis 1989 jusqu'en 2002, la consommation d'engrais au Cameroun était en moyenne supérieure à 80 000 t. avant la crise économique, la distribution des engrais relevait de l'action de l'État. Avec l'application des PAS, cette activité a vu une forte implication des opérateurs privés.

    Conclusion du chapitre 3

    Les statistiques sur le secteur agricole camerounais montrent une influence de la crise économique survenue dès 1987 et donc des mesures de libéralisation qui s'en sont suivis. De nombreuses productions ont subi des chocs à la baisse dès cette date. Les exportations de cacao et de café en sont des illustrations. La libéralisation qui s'en est suivie dans le secteur a également eu des conséquences néfastes. La levée des restrictions sur les importations de poulets a profondément affecté le secteur de production de la volaille. Ainsi, c'est un secteur agricole camerounais qui a été fortement marqué par le changement de conjoncture économique mondiale.

    L'objectif du présent chapitre était de présenter par des faits stylisés, les tendances sur l'évolution de l'agriculture au Cameroun. Dans le chapitre suivant, une mesure de l'impact du développement du secteur agricole sur l'économie camerounaise sera faite à l'aide d'un modèle économétrique.

    CHAPITRE IV : APPROCHE ÉCONOMÉTRIQUE

    L'objectif de ce travail est de déterminer l'impact du secteur agricole sur l'économie camerounaise. À cet effet, la mesure de l'impact de l'agriculture sur l'économie camerounaise se fera à l'aide d'un modèle économétrique. Il s'agit d'estimer une relation entre les performances économiques du secteur agricole et celles des autres secteurs, et de l'économie en général. Afin de s'affranchir des aléas dus à l'application des méthodes de régression linéaire classique sur des données évoluant dans le temps, les développements récents sur l'économétrie des séries temporelles seront utilisés.

    Dans la littérature économique, l'approche traditionnelle utilisée pour mesurer l'impact du secteur agricole sur la croissance économique se faisait en déterminant l'effet de la croissance du secteur agricole sur les autres secteurs dits "modernes" et sur l'économie dans son ensemble. Le secteur agricole est considéré comme exogène ; ses performances servent à expliquer une part de l'évolution du reste de l'économie.

    Mais cette méthodologie sera critiquée. KANWAR (2000) a suggéré que pour évaluer la relation entre l'agriculture et le reste de l'économie, le secteur agricole ne devrait pas être considéré comme exogène, le cas échéant, cela doit être prouvé a priori. Il a également proposé l'utilisation des méthodes de co-intégration afin d'éviter les problèmes de régression fallacieuse.

    De plus, comme le souligne YAO (2000), des liens entre les secteurs peuvent exister dans plusieurs sens. Si l'industrie bénéficie des ressources issues du secteur agricole comme le montrent les différentes théories présentées au chapitre 1, la productivité du secteur agricole s'améliore aussi par l'utilisation des machines et engrais issus du secteur industriel. Ainsi, le développement du secteur non agricole peut également causer celui du secteur agricole.

    La prise en compte de toutes ces considérations nous a amené à retenir pour cette modélisation un modèle Vectoriel AutoRégressif (VAR), éventuellement un modèle à correction d'erreur (Error Correction Model : ECM) en cas de présence d'au moins une relation de co-intégration entre les variables. Les modèles VAR ne font pas de restrictions a priori sur l'exogénéité des variables. Il s'agit d'une « modélisation sans autre restriction a priori que le choix des variables sélectionnées et du nombre de retards ».31(*)

    4.1 Présentation des données

    La mesure de l'impact de l'agriculture sur la croissance économique au Cameroun sera faite à l'aide d'un modèle de co-intégration. Ce modèle devrait permettre d'atteindre l'objectif fixé dans ce travail à savoir déterminer l'impact de l'agriculture sur la croissance économique au Cameroun. Il permettra également d'éprouver la véracité des hypothèses formulées à l'introduction. L'idée générale est qu'à partir des données sur les différentes activités au Cameroun couvrant une longue période, il soit mis en exergue, grâce aux techniques statistiques et économétriques la relation qui existe entre les performances économiques obtenues dans le secteur agricole et les performances de l'économie dans son ensemble au Cameroun.

    La grandeur utilisée pour mesurer les performances économiques est le PIB. Il représente l'ensemble des richesses créées au sein d'une économie au cours d'une année. Il donne la meilleure mesure du niveau d'activité.

    Quatre variables sont utilisées dans le modèle :

    · le taux de croissance du PIB réel par habitant noté TCPRH ;

    · le taux de croissance du PIB réel agricole noté TCPRA ;

    · le taux de croissance du PIB réel industriel noté TCPRI ;

    · le taux de croissance du PIB réel des services noté TCPRS.

    Toutes les données sont annuelles et couvrent la période allant de 1966 à 2005. Ces données proviennent de la Banque Mondiale. La table des données est présentée en annexe 10. Une description plus détaillée de ces données sera faite ci-dessous.

    4.1.1 Taux de croissance du PIB réel par habitant (TCPRH)

    Le PIB réel par habitant représente la valeur du PIB réel rapporté à la population totale. Il donne une idée de la part moyenne qui revient à chaque habitant dans la richesse totale créée au cours d'une année. Il est utilisé comme un indicateur du bien être. Le taux de croissance du PIB réel par habitant quant à lui représente la variation relative du PIB réel par tête d'une année à l'autre. Il se calcule suivant la formule suivante :

    représente la valeur du PIB réel par habitant au cours de l'année t.

    La figure ci-dessous représente l'évolution de cette variable au Cameroun sur la période allant de 1966 à 2005.

    Figure 9: Évolution du taux de croissance du PIB réel par tête au Cameroun

    Source : Banque Mondiale.

    Comme le montre ce graphique, le taux de croissance du PIB réel par tête a fluctué au Cameroun sur la période allant de 1966 à 2005. Sur la période précédant l'année 1987, on note des valeurs négatives en 1967, 1976 et 1980. De 1987 à 1994, la valeur du taux de croissance du PIB réel par tête est restée négative. Cette situation s'explique par la crise économique qui a sévi au Cameroun dès 1987. La chute brutale du cours des matières premières, qui étaient alors une des principales sources de devise pour l'État camerounais et la crise de l'endettement ont mis en mal l'économie camerounaise. Les politiques d'ajustement structurels mises en oeuvre avec l'aide du FMI et la BM ont certes contribué à l'assainissement des finances publiques mais se sont accompagnées d'une forte paupérisation des masses. Le taux de croissance moyen du PIB réel par tête sur cette période est de l'ordre de -6,5 % avec une valeur de -10 % en 1988. En 1994, la monnaie camerounaise, le F CFA a été dévaluée de 50 % par rapport au Franc Français. Les exportations du Cameroun sont redevenues plus compétitives. Sur le graphique ci-dessus, on observe une tendance à la hausse du taux de croissance du PIB réel par tête depuis 1995, avec une forte reprise après la dévaluation. Le PIB réel par tête a crû sans rupture au Cameroun de la dévaluation jusqu'à l'année 2005.

    4.1.2 Taux de Croissance du PIB réel agricole

    Le PIB réel agricole est le PIB agricole à prix constants. Le PIB agricole est évalué selon la même méthodologie que le PIB global. D'ailleurs, le PIB agricole n'est qu'une composante du PIB, il ne prend en compte que la part de la richesse totale créée par le secteur agricole. Le taux de croissance du PIB réel agricole est la variation relative de ce dernier d'une année à l'autre. Son calcul est similaire à celui du taux de croissance du PIB réel par habitant.

    , où représente le PIB réel agricole au cours de l'année t.

    Le taux de croissance du PIB réel agricole traduit ainsi l'augmentation en volume de la richesse produite par le secteur agricole. Les valeurs utilisées ici sont calculées aux prix de l'année 2000 et proviennent de la Banque Mondiale.

    La figure ci-dessous représente l'évolution de cet agrégat au Cameroun sur la période allant de 1966 à 2005.

    Figure 10: Évolution du taux de croissance du PIB réel agricole au Cameroun

    Source : Banque Mondiale

    Le PIB réel agricole a en général crû sur la période 1965-2005 au Cameroun. Les taux de croissance de cet agrégat sont en général positifs sur la période, comme le montre le graphique ci-dessus. Néanmoins des reculs sont relevés en 1983 (-7,6 %), 1988 (-12 %), 1990 (-1 %) et 1991 (-4 %). Le graphique présente une certaine fluctuation dans la croissance du secteur agricole, ce qui laisse croire à une faible capacité à maintenir un sentier de croissance. Les reculs enregistrés d'une année à une autre n'ont pas été abondants sur la période mais leur effet reste très important. En effet, la régression du PIB réel du secteur agricole de 12 % qui a fait suite à la crise économique débutée en 1987 a été suivie d'une reprise de l'ordre de 7 %. Après les retraits de 1990 et 1991, une hausse de la valeur du PIB réel est observée depuis 1992 sans discontinuité jusqu'en 2005. L'effet de la crise a été important dans le secteur agricole camerounais, ce n'est qu'en 1995, après la dévaluation du F CFA que le PIB réel du secteur agricole reprend un niveau supérieur à celui qu'il avait avant la crise économique.

    4.1.3 Taux de croissance du PIB réel industriel

    Le PIB industriel, tout comme le PIB agricole représente une partie de la richesse totale créée dans un secteur précis de l'économie en l'occurrence le secteur industriel. Le taux de croissance du PIB réel industriel est donc la variation relative de ce dernier d'une année à la suivante, selon la formule suivante :

    , où représente la valeur du PIB réel industriel au cours de l'année t.

    Le taux de croissance du PIB réel industriel traduit ainsi l'augmentation en volume de la richesse produite par le secteur industriel. Les valeurs utilisées ici sont calculées aux prix de l'année 2000 et proviennent de la Banque Mondiale.

    La figure ci-dessous représente l'évolution de cette valeur au Cameroun sur la période allant de 1966 à 2005.

    Figure 11: Évolution du taux de croissance du PIB réel de l'industrie au Cameroun

    Source : Banque Mondiale

    Le graphique représentant l'évolution du taux de croissance du PIB réel de l'industrie est à l'image des deux graphiques précédents. Une variabilité est observée dans l'évolution du taux de croissance du PIB réel industriel avec une chute dès le déclenchement de la crise économique et une forte reprise après la dévaluation du F CFA en 1994 et une tendance à la hausse qui se confirme jusqu'en 2005.

    4.1.4 Taux de croissance du PIB réel des services

    Le PIB des services est la richesse créée par le secteur des services. Le taux de croissance du PIB réel des services est ainsi la variation relative de celui-ci d'une année à l'autre. Il se calcule suivant la formule :

    représente le PIB réel des services au cours de l'année t.

    Le taux de croissance du PIB réel des services traduit ainsi l'augmentation en volume de la richesse produite par le secteur des services. Les valeurs utilisées ici sont calculées aux prix de l'année 2000 et proviennent de la Banque Mondiale.

    La figure ci-dessous représente l'évolution de cette valeur au Cameroun sur la période allant de 1966 à 2005.

    Figure 12: Évolution du taux de croissance du PIB réel des services au Cameroun

    Source : Banque Mondiale

    Sur ce graphique, on observe une certaine alternance des valeurs du taux de croissance du PIB réel des services qui prend des valeurs positives alternées des valeurs négatives. La crise économique n'a pas épargné ce secteur de l'activité économique camerounaise. Durant toute la période allant de 1988 à 1995, le PIB réel a connu un recul permanent. L'après dévaluation marque une timide reprise de la croissance dans ce secteur de 13 % en 1994 et de 5 % en 1995. Un léger mouvement de baisse permanente a refait surface entre 1996 et 1999. Une légère tendance à la hausse est observée depuis 2000. On remarque que la tertiarisation de l'économie du Cameroun s'est faite avec quelques heurts. Un fort repli a été observé entre 1967 et 1969 avec une contraction du PIB réel des services de 42 % en 1968 qui a fait suite à une première de 23 % en 1967.

    Tableau 10: Description des données

    Variable

    Symbole

    Période d'observation

    Source

    Taux de croissance du PIB réel par tête (année de base = 2000)

    TCPRH

    1966-2005

    Banque Mondiale

    Taux de croissance du PIB réel agricole (année de base = 2000)

    TCPRA

    1966-2005

    Taux de croissance du PIB réel industriel (année de base = 2000)

    TCPRI

    1966-2005

    Taux de croissance du PIB réel des services (année de base = 2000)

    TCPRS

    1966-2005

    Les taux de croissance du PIB réel par tête et du PIB réel agricole sont les principales variables d'intérêt du modèle qui sera mis en oeuvre. En effet, il s'agit ici de voir si une variation du niveau de richesse créée dans le secteur agricole induit une variation significative du niveau moyen de bien être de l'économie mesuré ici par le PIB réel par tête. Si cette influence de la croissance du secteur agricole sur celle de la croissance économique s'avère significative, son sens et sa valeur sont des éléments à déterminer.

    Les variables de taux de croissance du PIB réel des autres secteurs sont utilisés parce qu'elles constituent des déterminants de la croissance économique ; ne pas les prendre en compte augmenterait les chances d'avoir un modèle au pouvoir explicatif très réduit. De plus, la théorie économique postule à un impact indirect du développement agricole sur la croissance économique via les secteurs dits modernes. Ainsi, hormis l'impact de l'agriculture sur la croissance économique qui constitue l'objectif principal du modèle, il sera également estimé un impact du développement du secteur agricole sur le secteur industriel et sur celui des services. Enfin, l'effet du développement des secteurs modernes sera observé sur le secteur agricole.

    4.2 Présentation de la méthodologie

    4.2.1 Détermination de l'ordre d'intégration : tests de stationnarité

    La modélisation du comportement d'un ensemble de variables par la méthode VAR nécessite au préalable d'étudier la stationnarité de chaque variable afin d'en déterminer l'ordre d'intégration.

    Encadré 1: Définition de la stationnarité32(*)

    Processus stationnaire au sens strict

    Soit un processus .

    Le processus est dit strictement ou fortement stationnaire si quelque soit le n-uple du temps tel que et pour tout avec ,

    , la suite a la même loi de probabilité que la suite .

    Ainsi un processus aléatoire est strictement stationnaire si toutes ses caractéristiques, c'est-à-dire tous ses moments sont invariants pour tout changement de l'origine du temps.

    Stationnarité faible

    Le processus est dit faiblement stationnaire si seuls les moments d'ordre 1 et 2 sont stationnaires.

    Depuis les travaux de NELSON et PLOSER (1982), les cas de non stationnarité les plus fréquents sont analysés à partir de deux types de processus33(*) :

    · les processus TS (Trend Stationnary) qui représentent une non-stationnarité de type déterministe. La méthode de stationnarisation utilisée dans ce cas est celle des moindres carrés ;

    · les processus DS (Differency Stationnary) pour les processus non stationnaires aléatoires. Ce type de processus est stationnarisé par l'application du filtre aux différences ;

    La stationnarisation d'une série exige d'identifier au préalable le type de processus afin d'appliquer la méthode de stationnarisation appropriée. Une mauvaise stationnarisation aurait certaines conséquences :

    · l'application d'un filtre aux différences à un processus TS créée une perturbation artificielle ;

    · Nelson et Kang ont montré que lorsque l'on applique la méthode des MCO à un processus DS, les résidus sont de moyenne nulle mais leur covariance dépend de la taille de l'échantillon et du temps.

    Ces conséquences sont présentées plus en détail dans BOURBONNAIS et al. (pp 37-39).

    La stationnarité des séries est vérifiée à l'aide de tests. Plusieurs tests existent dans la littérature à cet effet. Dans le cadre de ce travail, il sera utilisé les tests de Dickey-Fuller Augmentés (ADF : Augmented Dickey-Fuller) dont le principe est présenté en encadré ci-dessous.

    Encadré 2 : Principe des tests ADF

    Le test ADF est une correction paramétrique des tests de Dickey-Fuller Simple qui supposent que les erreurs des modèles sont des bruits blancs. Le test ADF est un cas étendu dans lequel l'erreur suit un processus AR (p). Trois modèles servent de base à la construction de ces tests :

    [1]

    [2]

    [3]

    Si dans l'un de ces trois modèles, l'hypothèse nulle n'est pas rejetée, on est en présence d'une racine unitaire, le processus n'est pas stationnaire.

    Dickey et Fuller ont tabulé des valeurs critiques car sous , les règles habituelles de l'inférence statistique ne peuvent pas être appliquées, en particulier la distribution de .

    · Si la valeur de la t-statistique associée à est inférieure à la valeur critique, on rejette l'hypothèse nulle de non stationnarité ;

    · Si la valeur de la t-statistique associée à est supérieure à la valeur critique, on ne rejette pas l'hypothèse de stationnarité.

    Le test ADF ne s'effectue pas sur les trois modèles, on l'applique sur un seul modèle en pratique, le test se fait selon une stratégie séquentielle en partant du modèle [3].

    Il est à noter que pour effectuer le test ADF, il convient de choisir le nombre de retards p de sorte que les résidus soient des BB (Bruits Blancs). Un nombre trop important de retards réduit le nombre de degrés de liberté. Le choix de p peut se faire par l'étude des autocorrélations partielles de , et l'on retient pour p le retard correspondant à la dernière autocorrélation partielle significativement différente de zéro.

    Lorsque les séries sont intégrées au même ordre, on effectue un test de co-intégration. Lorsque ce test est significatif, la spécification correcte du VAR est un modèle VECM.

    4.2.2 Formulation du modèle

    Si l'on pose , le vecteur des quatre variables représentant l'évolution de l'activité économique au Cameroun. Avec les quatre séries de variables intégrées à l'ordre 1, le modèle théorique, composé de quatre équations s'écrit de façon synthétique :

    =

    Avec , matrices (4,4) de paramètres

    est un entier naturel appelé ordre du modèle.

    , un vecteur (4,1) de termes d'erreur de type où ? est une matrice diagonale de dimension (4,4) définie positive, et

    est la force de rappel vers l'équilibre

    et la matrice dont les vecteurs sont les coefficients de la relation de long terme entre les variables.

     : matrices (4,r) ; r étant le rang de ou encore le nombre de relations de long terme.

    Le modèle formulé ci-dessus est un modèle VAR sous la forme d'un VECM. En réalité sa spécification est consécutive à la significativité des tests de co-intégration sur les séries de variables. L'encadré ci-dessous présente les principes du test de la trace qui est un des tests de co-intégration proposés par Johansen (1991) et Johansen et Juselius (1990). Ces tests restent efficaces lorsque l'échantillon n'est pas de très grande taille.

    Encadré 3 : Principes des tests de co-intégration

    Si l'on considère un vecteur de N variables I(1). La représentation VAR (p) de est donnée par :

    Cette relation peut se réécrire :

    Dans cette relation tous les membres sont I(0) à l'exception de qui est I (1). Il y a un déséquilibre entre le membre de gauche et celui de droite. Il faut donc que soit I (0).

    On pose

    Où : est une matrice (r,N) contenant les r vecteurs de co-intégration

    et est une matrice (N,r) contenant les poids associés à chaque vecteur de co-intégration.

    En cas d'existence de r relations de co-intégrations, . Les tests proposés par Johansen reposent sur cette condition.

    Test de la trace

    C'est un test basé sur les valeurs propres d'une matrice calculée en deux étapes :

    Etape 1 : calcul des résidus et

    On estime les deux équations suivantes :

    est un vecteur de N variables I(1)

    Étape 2 : calcul de la matrice permettant le calcul des valeurs propres

    Quatre matrices de variance-covariance des résidus sont calculées :

     ;  ;  ;

    Les k valeurs propres de M sont calculées.

    La statistique du test de la trace est donnée par

    est la ième valeur propre de M

    q : rang de la matrice

    TR suit une loi dont les valeurs ont été tabulées par Johansen et Juselius (1990) puis par Osterwald-Lenum (1992).

    Trois cas peuvent se présenter :

    ·  : pas de relation de co-intégration. est I (1), le VAR est estimé sur

    · , il existe r relations de co-intégration ; la spécification correcte du VAR est un ECM.

    ·  : est stationnaire. Le VAR est estimé à niveau.

    Les valeurs critiques de ces statistiques de test dépendent de la présence d'une constante dans la relation de co-intégration ou l'ECM, et de la présence d'un trend dans la relation de co-intégration.

    4.2.3 Détermination du nombre de retards du VAR à niveau

    L'estimation du modèle VAR nécessite de déterminer au préalable le nombre de retards p. plusieurs critères peuvent être utilisés pour réaliser cet exercice crucial :

    · une méthode basée sur l'examen des propriétés statistiques des résidus du modèle VAR ;

    · une méthode basée sur l'utilisation des critères d'information ;

    · une méthode basée sur des tests de nullité emboîtés sur les paramètres associés au dernier décalage du modèle.

    Nous utiliserons la méthode basée sur les critères d'information.

    Encadré 4 : Détermination du nombre de retards du VAR à l'aide des critères d'information

    L'idée sur laquelle sont basés les critères d'information est que l'ajout d'un ensemble de variables explicatives dans le modèle améliore l'information mais en même temps réduit les degrés de liberté. La démarche consiste à fixer une valeur maximale pour p, (), et de calculer pour chaque modèle VAR (p), la valeur du critère d'information. Le retard retenu est celui qui optimise (minimise) la valeur du critère d'information.

    Dans les modèles VAR, quatre critères sont généralement utilisés :

    Critère FPE (Final Predictor Error)

    Critère AIC (Akaike Information Criterion)

    Critère SC (Schwartz Criterion)

    Critère HQ (Hannan Quinn)

    4.2.4 Analyse des résultats de l'estimation du VECM

    4.2.4.1 Tests de causalité

    Une variable X cause une variable Y si la prédictibilité de Y est meilleure lorsque l'on tient compte de l'information apportée par X. Plusieurs définitions statistiques de la causalité existent. Nous utiliserons l'approche de Granger. La causalité peut se mesurer de plusieurs manières :

    Mesure de la causalité de X vers Y

    Mesure de la causalité instantanée de X vers Y

    désigne l'erreur de prévision de Y sachant X

    désigne l'information relative au passé

    Si X ne cause pas Y,

    Statistique de test

    Le test est effectué au moyen de la statistique du maximum vraisemblance. L'on teste l'hypothèse nulle d'absence de causalité. La statistique de test est qui suit sous une loi de chi-deux à degré de libertés.

    · Si , on ne rejette pas l'hypothèse nulle d'absence de causalité

    · Sinon, l'hypothèse nulle d'absence de causalité est rejetée.

    En présence d'une co-intégration, les tests de causalité de court terme ou de long terme sont menés à partir du VECM.

    4.2.4.2 Analyse des réponses impulsionnelles

    La Fonction de Réponse Impulsionnelle (FRI) représente l'effet d'un choc d'une innovation sur les valeurs courantes et futures des variables endogènes.

    En considérant un modèle VAR (p) :

    L'application du théorème de Wold à ce processus permet d'écrire :

    est le vecteur des innovations. Ces innovations constituent la partie non prévisible du VAR. les innovations sont interprétés comme des chocs qui se propagent dans tout le système par la dynamique du VAR. les multiplicateurs dynamiques sont les matrices .

    Grâce aux FRI, on caractérise les réponses des différentes séries aux innovations  :

    , effet du choc j sur la variable i après h périodes.

    4.2.4.3 Décomposition de la variance

    La décomposition de la variance de l'erreur de prévision a pour objectif de calculer pour chacune des innovations, sa contribution à la variance de l'erreur de prévision.

    4.3 Présentation des résultats

    Cette section présente les résultats des estimations faites sur les données décrites, en utilisant la méthodologie présentée ci-dessus. Les estimations ont été faites à l'aide du logiciel Eviews dans la version 4.1.

    4.3.1 Stationnarisation des variables

    Les différents graphiques représentatifs des séries étudiées laissent croire que ces séries ne sont pas stationnaires. Une étude des relations structurelles existant entre les taux de croissance des performances économiques des différents secteurs d'activité au Cameroun nécessite au préalable d'effectuer des tests de stationnarité afin de déterminer l'ordre d'intégration de chaque série. Les tests ADF ont été utilisés. La détermination du nombre de retards utilisé pour effectuer le test s'est faite par l'examen des corrélogrammes partiels des séries différenciées à l'ordre 1 pour le test sur les séries à niveau et des corrélogrammes partiels des séries différenciées à l'ordre 2 pour le test sur les séries en différence première (Annexe 1).

    Les résultats des tests de racine unitaire sont présentés en Annexe 2. Pour le TCPRH, la tendance et la constante ne sont pas significatives respectivement sur les modèles [3] et [2] appliqués à la série à niveau. Dans le modèle sans constante ni tendance, la valeur de la statistique ADF est de -1,786, supérieure à la valeur critique à 5 % qui vaut -1,950. Ainsi l'hypothèse nulle de non stationnarité n'est pas rejetée, on différencie la série et on reprend la procédure. La statistique ADF est significative dans le modèle [1] ; sa valeur (-3,667) est inférieure à la valeur critique au niveau de signification de 5 % (-1,950). La série TCPRH est ainsi intégrée à l'ordre 1.

    En appliquant le même procédé à TCPRA, TCPRI, TCPRS, comme présentés en Annexe 2, les résultats montrent que les variables sont intégrées à l'ordre 1, on note qu'elles sont I (1).

    L'égalité des ordres d'intégration conduit à effectuer un test de co-intégration. Ce test nécessite préalablement la détermination du nombre de retards sur le modèle VAR à niveau.

    4.3.2 Nombre de retards du VAR à niveau

    Pour des raisons spécifiques à la taille des données, la taille maximale est fixée à 4. Au-delà de 4, les estimations pourraient souffrir d'un manque de précision. Pour chaque valeur de p allant de 1 à 4, le modèle suivant est estimé :

    Ensuite les valeurs des critères d'information sont calculées. Les résultats sont présentés en annexe 3. Trois critères d'information (LR, FPE, AIC) donnent le retard optimal 2. Les critères SC et HQ donnent le retard optimal 1. Les critères SC et HQ conduisent à des estimateurs convergents de p alors que le critère AIC donne un estimateur efficace de p34(*). La valeur retenue est à cause de la longueur de nos séries.

    4.3.3 Test de co-intégration

    La recherche du nombre de relations de co-intégration a été faite selon l'approche de Johansen. Le test a été effectué avec la spécification 1) c'est-à-dire, modèle sans constante dans l'ECM ni dans la relation de long terme, les séries ne présentent pas de trend. Le test est effectué avec un retard de 1. Les résultats sont présentés en Annexe 4. Le test de la trace indique la présence d'une relation de co-intégration à 1 % et deux relations à 5 %. Quant au test de la valeur propre maximale, il indique l'existence d'une relation de co-intégration à 1 % et à 5 %. La représentation VAR n'est plus valide, un modèle à correction d'erreur est utilisé.

    4.3.4 Estimation du VECM

    Les résultats de l'estimation comprennent l'estimation du vecteur de co-intégration, c'est à dire la relation de long terme, et l'estimation des coefficients des équations d'ajustement ou de court terme. Ces résultats sont présentés en Annexe 5.

    4.3.4.1 Vecteur de co-intégration

    La relation de co-intégration, obtenue en normalisant le coefficient de TCPRH s'écrit :

    TCPRH

    =

    -0,270 * TCPRA

    +

    0,424 * TCPRI

    +

    0,031 * TCPRS

     
     

    (0,135)

     

    (0,069)

     

    (0,048)

     
     

    [1,994]

     

    [-6,157]

     

    [-0,645]

    Ecart-types des coefficients entre ( )

    t-student entre [ ]

    Le coefficient relatif aux services n'est pas significatif au seuil de 5 % dans la relation de long terme, la valeur de la statistique de student vaut -0,645. Les autres coefficients sont significatifs. Le coefficient du taux de croissance du PIB agricole a un coefficient négatif et significatif, il vaut -0,27. Ainsi, sur le long terme, une augmentation du taux de croissance du PIB réel agricole de 1 point a eu en moyenne pour effet une baisse du taux de croissance du PIB réel par tête de 0,27 point, toute chose étant égale par ailleurs.

    4.3.4.2 Les coefficients de court terme

    Tableau 11: coefficients de la dynamique de court terme

    Error Correction:

    D (TCPRH)

    D (TCPRA)

    D (TCPRI)

    D (TCPRS)

    CointEq1

    -1.007701

    (0.25593)

    [-3.93735]

    -0.412046

    (0.27032)

    [-1.52426]

    0.716837

    (0.35247)

    [2.03373]

    -1.801930

    (0.75100)

    [-2.39937]

    D (TCPRH(-1))

    0.319347

    (0.19461)

    [1.64093]

    0.474015

    (0.20556)

    [2.30601]

    0.033907

    (0.26802)

    [0.12651]

    1.606937

    (0.57107)

    [2.81393]

    D (TCPRA(-1))

    0.063818

    (0.14977)

    [0.42611]

    -0.404451

    (0.15819)

    [-2.55672]

    0.039012

    (0.20626)

    [0.18914]

    -0.322735

    (0.43948)

    [-0.73436]

    D (TCPRI(-1))

    -0.320905

    (0.10813)

    [-2.96775]

    -0.224709

    (0.11421)

    [-1.96750]

    -0.758527

    (0.14892)

    [-5.09358]

    -0.201115

    (0.31729)

    [-0.63385]

    D (TCPRS(-1))

    -0.053644

    (0.06782)

    [-0.79097]

    0.000855

    (0.07163)

    [0.01193]

    -0.109250

    (0.09340)

    [-1.16966]

    -0.392685

    (0.19901)

    [-1.97319]

    Ecart-types des coefficients entre ( )

    t-student entre [ ]

    CointEq1 désigne le vecteur associé à la relation de co-intégration contenant des coefficients des termes à correction d'erreur. Ses coefficients dans l'estimation traduisent les forces de rappel vers l'équilibre de long terme. Le coefficient de force de rappel relatif à l'industrie est positif, un résultat qui peut paraître surprenant. Pour le reste, les autres coefficients de retour vers l'équilibre de long terme sont négatifs, ce qui traduit un retour vers la relation de long terme.

    La dynamique de court terme montre que le taux de croissance du PIB réel par habitant est influencé uniquement par le taux de croissance du PIB réel industriel retardé d'une période, avec un coefficient négatif (-0,321). Le TCPRA est influencé par TCPRH et TCPRI, retardés également d'une période. Cette dynamique de court terme est confirmée par les tests de causalité au sens de Granger.

    4.3.4.3 Analyse de la causalité

    Les tests de causalité ont été effectués à partir du VECM. Les résultats sont présentés en annexe 6. Seul TCPRI cause TCPRH. Le TCPRA est causé par le TCPRH. On remarque qu'il n'existe qu'une relation de causalité entre les taux de croissance des PIB sectoriels. Le graphe ci-dessous résume ces relations :

    Figure 13: Graphe de causalité entre les secteurs d'activité au Cameroun

    TCPRH

    TCPRA

    TCPRI

    TCPRS

    4.3.4.4 Analyse des chocs

    Les résultats des chocs sont présentés en annexe 7. Un choc sur TCPRA a un effet négatif sur TCPRH sur les 10 périodes observées. L'effet reste quasiment invariant après deux périodes, il suit une tendance horizontale. L'effet sur TCPRI suit la même tendance. Après la première période, l'effet du choc suit une trajectoire horizontale. Un constat qui est observé après trois périodes sur TCPRS.

    4.3.4.5 Décomposition de la variance de l'erreur de prévision

    La décomposition de la variance permet de déterminer dans quelle mesure les variables ont une interaction entre elles, c'est à dire dans quelle « direction » le choc a t-il le plus d'impact. Les résultats sont présentés en annexe 8.

    Sur un horizon de 10 ans,

    · la variance de l'erreur de prévision du TCPRH est due à 76,7 % à ses propres variations et à 20,9 % à celles de TCPRI. Les variations de TCPRA n'expliquent que 2 % de cette variance

    · la variance de l'erreur de prévision de TCPRA est due à 95 % à ses propres variations.

    4.3.4.6 Validation des hypothèses sur les résidus

    Les résultats des tests sur les résidus sont présentés en annexe 9. Ces résultats concernent la stabilité du modèle VAR, l'indépendance et la normalité des erreurs.

    4.3.4.6.1 Stabilité du modèle

    Trois racines du polynôme caractéristique ont été fixées à 1. Les autres racines sont en module inférieures à 1 (voir annexe 9). Le modèle est donc stable.

    4.3.4.6.2 Autocorrélation des résidus

    Le test a été fait en calculant la statistique de Box-Pierce/Ljung-Box. Les résultats figurent en annexe 9. Aucune autocorrélation sérielle n'a été détectée à l'ordre minimal 2.

    4.3.4.6.3 Normalité

    La normalité a été testée grâce à la statistique de Jarque et Bera. On teste l'hypothèse nulle de normalité des résidus. Les résultats du test sont présentés en annexe 9. L'hypothèse de normalité n'est pas rejetée.

    4.4 Analyse des résultats

    Le modèle à correction d'erreur utilisé pour mesurer l'impact du secteur agricole sur la croissance économique au Cameroun durant la période allant de 1966 à 2005 a présenté une faible structure causale entre les différents secteurs d'activité. Au seuil de significativité de 5 %, il n'existe pratiquement aucune relation de causalité entre les taux de croissance des PIB sectoriels ; le seul sens significatif est celui de l'industrie vers l'agriculture avec tout de même une p-value de 4,91 % au seuil de 5 %. Ce résultat peut s'expliquer par la désarticulation des économies d'Afrique subsaharienne en général et de l'économie camerounaise en particulier. L'économie camerounaise est une économie extravertie, les matières premières issues du secteur primaire sont exportées à l'état brut et l'industrie n'utilise pas toujours les matières premières produites localement. Les produits finis commercialisés sont issus des importations pour la plupart. Un article de Syfia International sur le secteur du cacao souligne que les industriels utilisant la poudre de cacao dans leur processus de production l'acquièrent à l'étranger à un prix valant 5 fois le prix auquel cette poudre produite localement est exportée. Avant la libéralisation, la société industrielle camerounaise des cacaos (Sic-cacaos) achetait le cacao de mauvaise qualité auprès des planteurs à un prix subventionné, tandis que le meilleur cacao était entièrement exporté. L'application des PAS les a mis en concurrence avec les exportateurs privés. Et depuis quelques années, la Sic-cacaos exporte également le cacao qu'elle rachète. Conséquence de cette situation, les industriels importent de la poudre de cacao alors même que le Cameroun est le cinquième producteur mondial de ce produit.

    De plus, l'hypothèse d'un transfert de main d'oeuvre du secteur agricole vers le secteur industriel est difficilement observable au Cameroun. D'une part, le secteur industriel n'est pas structurellement apte à absorber la main d'oeuvre sous-employée du secteur agricole. D'autre part, cette main d'oeuvre n'est pas suffisamment qualifiée. Le transfert de main d'oeuvre se fait alors vers le secteur informel avec le phénomène d'exode rural. On a observé au cours des dernières années, une évolution croissante du secteur informel dans l'économie camerounaise. Concernant le sens de la causalité entre croissance de l'agriculture et croissance de l'économie en général, un seul sens de la causalité est significatif. Sur la période 1966-2005, la croissance du secteur agricole n'a pas causé celle de l'économie en général, par contre, le sens inverse de la relation est significatif.

    Ces résultats montrent ainsi que le secteur agricole n'a pas encore joué un rôle de secteur en amont dans l'économie camerounaise, c'est-à-dire, le secteur qui par son expansion peut induire le développement des autres secteurs, pourtant l'importance qu'avait ce secteur en terme de contribution au PIB et d'emplois pourvus pendant les années 60 laissait envisager qu'il serait le moteur du développement des autres secteurs. Or, depuis son indépendance en 1960, le gouvernement camerounais a toujours mis l'agriculture au centre du développement économique. Durant les plans quinquennaux, les agriculteurs ont été en quelque sorte taxés par le gouvernement. L'écart entre prix au producteur et prix mondial pour le cacao et le café en sont des illustrations. Ces revenus tirés du secteur agricole étaient censés financer le développement du secteur industriel, plus apte à mettre sur pied de véritables conditions d'un développement économique, et dans le même temps, la part du secteur agricole dans le PIB était vouée à la décroissance telle que le prévoient les théories du développement. Les raisons évoquées dans la littérature font état de nombreux problèmes dont au premier plan la mauvaise gestion35(*). Les fonds prélevés ont été utilisés à d'autres fins qu'au financement du développement. Une autre raison de cette incapacité du secteur agricole à induire la croissance des autres secteurs et de l'économie est la fluctuation du cours des matières premières. Les prix des produits de base sont fixés sur le marché mondial, les producteurs des produits de base sont des "price-taker", ils subissent les variations à la baisse de ces prix sans possibilité d'y exercer une influence. La crise économique survenue au Cameroun en 1987 a eu pour principale cause une baisse de 50 % du cours des produits de base.

    L'existence d'une relation de co-intégration montre une certaine stabilité de l'économie camerounaise à long terme. Ainsi, dans le long terme, la structure économique est restée la même. Par structure, on entend la répartition de la part des différents secteurs dans l'économie. Ce résultat rejoint l'analyse précédente : la croissance du secteur agricole n'a pas été à même d'influencer la croissance des autres secteurs. L'effet d'entraînement du secteur agricole tel que le prédisait LEWIS n'a pas encore été observé au Cameroun, plus de 40 ans après son indépendance.

    L'examen des fonctions de réponses impulsionnelles montre que l'effet d'un choc de l'agriculture sur la croissance économique est faible et négatif. Le coefficient de TCPRA apparaît négatif et significatif dans la relation de long terme, les autres composantes ont un coefficient positif. Ainsi, sur la période allant de 1966 à 2003, une croissance du PIB agricole a eu en moyenne pour effet un recul du PIB réel par habitant, toute chose étant égale par ailleurs. Ce résultat fait penser au phénomène de croissance appauvrissante relevée dans les pays dotée d'un fort potentiel en ressources naturelles comme le montre une étude réalisée par THORVALDUR (2000). En considérant les pays d'Europe centrale et de l'Est, il montre que l'abondance des ressources naturelles et une agriculture extensive peut entraver la croissance économique. La dépendance vis-à-vis des produits agricoles peut générer un comportement de rente et entraîner la corruption et la mauvaise gestion.

    CONCLUSION

    L'objectif de cette étude était d'évaluer l'impact de l'agriculture sur la croissance économique au Cameroun et donc parallèlement sur le développement des autres secteurs d'activité. Le secteur agricole a toujours été au centre de la politique économique du Cameroun. Ce secteur a connu des mutations tout au long de l'histoire du Cameroun, avec dès 1990, une redéfinition des rôles joués par les différents acteurs de ce secteur. Le gouvernement du Cameroun l'avait désigné comme le moteur du développement économique au lendemain des indépendances. Ce discours demeure d'actualité près de 50 ans après l'indépendance ; le secteur agricole tarde encore à avoir un effet d'entraînement en vue d'amorcer un véritable décollage économique. Des estimations faites à l'aide des données sur l'activité économique au Cameroun montre qu'il existe une relation de long terme entre les taux de croissance du PIB réel par tête, des PIB réel agricole, industriel et des services. Ainsi, l'économie camerounaise a évolué dans une certaine stabilité au niveau de sa structure. Cette relation de long terme montre qu'une hausse du PIB réel agricole a eu en moyenne une baisse du PIB réel par tête. Les estimations révèlent également que le développement du secteur agricole n'a pas causé celui des autres secteurs. Ces résultats s'expliquent d'une part par le caractère traditionnel qu'a conservé l'activité agricole au Cameroun, le secteur agricole tarde encore à se moderniser complètement. D'autre part l'économie est encore relativement désarticulée. On pourrait ajouter des facteurs externes. Les producteurs sont price taker sur le marché mondial, il existe donc des risques de pertes liées à la chute des cours des produits de base, comme cela fut le cas au début des années 1980. Ces différents résultats débouchent sur quelques recommandations :

    Recommandations

    (1) Renforcer la liaison entre l'agriculture et le secteur moderne

    Le secteur industriel s'est révélé comme celui qui a positivement influencé la croissance du PIB réel par tête au Cameroun dans le long terme. Ainsi, une croissance du PIB industriel a jusqu'ici été la plus à même d'induire en moyenne une amélioration du niveau de vie mesurée par le PIB réel par habitant.

    Dans le même temps, le développement agricole n'a pas causé le développement des autres secteurs. Les secteurs ont pratiquement évolué de façon indépendante. Or, une liaison de l'agriculture vers l'industrie s'impose lors des premières phases du développement énoncées par ROSTOW. La théorie économique montre cette nécessité et de nombreux exemples empiriques en fournissent une illustration. Pour les autorités camerounaises, de nombreuses mesures s'imposent :

    Transformation des produits de base

    Il y a nécessité de promouvoir une transformation locale plus accrue des produits de base. Cette proposition n'a rien d'original, elle est évoquée depuis des décennies dans les analyses économiques du Cameroun. La transformation des produits de base donne une plus grande valeur ajoutée au produit, et donc augmente la richesse créée. En même temps, il y a création d'emplois. L'exportation des produits de base à l'état brut contribue à la détérioration des termes de l'échange.

    Appui à la création des agro-industries

    L'industrie alimentaire est l'une des industries utilisant les produits agricoles. Les importations alimentaires se sont fortement multipliées au Cameroun. La contribution de la production traditionnelle a baissé de 86 % en 1970 à 63 % en 199036(*). Entre 1960 et 1998, la production céréalière, le premier poste alimentaire des ménages, a baissé de 157 à 84,9 kg. Des mesures incitatives doivent être mises en place pour permettre l'essor des agro-industries locales utilisant la matière première issue du secteur agricole. Avec l'essor considérable des agro-industries, la structure de la demande à l'agriculture serait modifiée afin que le secteur agricole serve de secteur en amont des autres secteurs d'activité.

    Création des industries pour les intrants agricoles

    La cherté des engrais et autres intrants agricoles reste un problème récurrent pour les agriculteurs. Une industrie locale permettrait de réduire les coûts d'accès à ces intrants.

    (2) Développer le secteur agricole

    Moderniser l'agriculture

    L'économiste P. HUGON constate qu'en Afrique, l'augmentation de la production agricole est généralement plus due à une augmentation de la surface cultivable qu'à une amélioration des rendements. L'agriculture utilise très peu de capital. Les exploitations utilisant plus de capital sont les grandes exploitations dont la production est vouée à l'exportation. Des estimations du MINADER font état d'une agriculture camerounaise à 95 % familiale. Il y a urgence d'améliorer la productivité agricole par une augmentation de l'intensité capitalistique et technologique.

    Procéder à une réforme agraire

    La Terre est un facteur de production crucial dans l'activité agricole. L'attribution des terres cultivables doit se faire en faveur de ceux qui ont la capacité de les mettre en valeur et les droits des propriétaires fonciers doivent être davantage protégés. L'application du droit coutumier expose souvent les entrepreneurs à des expropriations abusives. Dans un tel contexte d'incertitude, l'investissement dans le secteur agricole devient risqué.

    Investir dans l'agriculture

    Les États africains s'étaient engagés à fournir 10 % de leur budget à l'agriculture. Ce chiffre n'est pas encore atteint. Or les problèmes dans le secteur agricole sont nombreux notamment la cherté des engrais et autres intrants, l'insuffisance des moyens de conditionnement en particulier pour les cultures vivrières.

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    13. GILLIS M., PERKINS D. H., ROEMER M., SNODGRASS D. R. (1998), «Économie du développement», 2e édition, Nouveaux Horizons, Bruxelles.

    14. GUERRIEN B. (2002), «Dictionnaire d'analyse économique», La Découverte, Paris.

    15. HIRSCHMAN A. O. (1958), «The strategy of economic development», New Haven, Yale University Press.

    16. JOHANSEN S. (1991), «Estimation and hypothesis testing of cointegration vectors in Gaussian Vector Autoregressive models», Économétrica, 59, 1551-1580.

    17. JOHANSEN S., JUSELIUS K. (1990), «Maximum likelihood estimation and inferences on cointegration with application to the demand of money», oxford bulletin of economics and statistics, 52, 169-210.

    18. JOHNSTON J., DINARO J. (1999), «Méthodes économétriques», Économica, Paris.

    19. KANWAR S. (2000), «Does the dog wag the tail or the tail the dog? cointegration of indian agriculture with nonagriculture». Journal of Policy Modeling, vol. 22 (5), pp. 533-556.

    20. KATIRCIOGLU S. T. (2006), «Causality between agriculture and economic growth in a small nation under political isolation: A case from North Cyprus», International Journal of Social Economics, Vol. 33 (4), pp. 331-343.

    21. KATIRCIOGLU S. T., «Co-Integration and Causality Between GDP, Agriculture, Industry and Services Growth in North Cyprus: Evidence from Time Series Data, 1977-2002», Review of Social, Economic & Business Studies, Vol.5/6, 173 - 187.

    22. KRUEGER A. O. (1995), «Policy Lessons from Development Experience since the Second World War», dans: Jere Behrman et T. N. Srinivasan, éd., Handbook of Development Economics, vol. IIIB, North-Holland Publishing Company, Amsterdam.

    23. KRUEGER A. O., SCHIFF M., VALDÉS A. (1998), «Agricultural Incentives in Developing Countries: Measuring the Effect of Sectoral and Economy-Wide Policies», The World Bank Economic Review, vol. 2, n°3.

    24. KUZNETS S. (1964), «Economic growth and the contribution of agriculture: notes for measurement», in C. EICHER and L. WITT, eds., Agriculture in economic development, New York: McGraw-Hill.

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    30. MINADER (2004), «Diagnostic du sous-secteur agricole 1960-1980», document de travail.

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    32. MUNDLAK Y., CAVALLO D., DOMENECH R. (1989), «Agriculture and economic growth in Argentina, 1913-84», International Food Policy Research Institute.

    33. NORTON R. D. (2005), «Politiques de développement agricole: concepts et expériences», FAO, Rome.

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    39. YAO S. (2000), «How important is agriculture in China's economic growth?», Oxford Development Studies, vol. 28 (1), pp. 33-49.

    ANNEXES

    ANNEXE 1 : corrélogrammes partiels

    Corrélogramme de D(TCPRH) corrélogramme de D2(TCPRH)

    Corrélogramme de D(TCPRA) corrélogramme de D2(TCPRA)

    Corrélogramme de D(TCPRI) corrélogramme de D2(TCPRI)

    Corrélogramme de D (TCPRS) corrélogramme de D2 (TCPRS)

    ANNEXE 2 : résultats des tests de racine unitaire sur les variables.

    1. tests ADF sur TCPRH

    Variable TCPRH

    modèle

    retard

    Statistique ADF

    t-statistique à 5 %

    En niveau

    Trend et constante

    2

    -

     

    constante

    2

    -

     

    sans constante ni trend

    2

    -1,786

    -1,950

    En différence première

    Trend et constante

    3

    -

     

    constante

    3

    -

     

    sans constante ni trend

    3

    -3,667*

    -1,950

    *significatif au niveau de 5 %

    2. test ADF sur TCPRA

    Variable TCPRA

    modèle

    retard

    Statistique ADF

    t-statistique à 5 %

    En niveau

    Trend et constante

    4

    -

     

    constante

    4

    -

     

    sans constante ni trend

    4

    -1,092

    -1,950

    En différence première

    Trend et constante

    4

    -

     

    constante

    4

    -

     

    sans constante ni trend

    4

    -3,808*

    -1,951

    *significatif au niveau de 5 %

    3. test ADF sur TCPRI

    Variable TCPRI

    modèle

    retard

    Statistique ADF

    t-statistique à 5 %

    En niveau

    Trend et constante

    1

    -

     

    Constante

    1

    -

     

    Sans constante ni trend

    1

    -1,352

    -1,950

    En différence première

    Trend et constante

    3

    -

     

    constante

    3

    -

     

    Sans constante ni trend

    3

    -2,192*

    -1,951

    *significatif au niveau de 5 %

    4. test ADF sur TCPRS

    Variable TCPRS

    modèle

    retard

    Statistique ADF

    t-statistique à 5 %

    En niveau

    Trend et constante

    4

    -

     

    Constante

    4

    -

     

    Sans constante ni trend

    4

    -1,721

    -1,951

    En différence première

    Trend et constante

    2

    -

     
     

    Constante

    2

    -

     
     

    Sans constante ni trend

    2

    -4,712*

    -1,950

    *significatif au niveau de 5 %

    ANNEXE 3 : comparaison des critères d'information sur le modèle VAR à niveau

    Lag

    LogL

    LR

    FPE

    AIC

    SC

    HQ

    1

    -471.1972

    NA

    6707191.

    27.06651

    27.77030*

    27.31215*

    2

    -452.4518

    29.15962*

    5912872.*

    26.91399*

    28.32156

    27.40527

    3

    -441.7900

    14.21567

    8580226.

    27.21056

    29.32192

    27.94748

    4

    -422.8911

    20.99879

    8576088.

    27.04951

    29.86465

    28.03207

    ANNEXE 4: test de co-intégration

    1. test de la trace

    Hypothesized

     

    Trace

    5 Percent

    1 Percent

    No. of CE(s)

    Eigenvalue

    Statistic

    Critical Value

    Critical Value

    None **

    0.559347

    58.04839

    39.89

    45.58

    At most 1 *

    0.361310

    26.90751

    24.31

    29.75

    At most 2

    0.202308

    9.870751

    12.53

    16.31

    At most 3

    0.033162

    1.281526

    3.84

    6.51

    *(**) denotes rejection of the hypothesis at the 5%(1%) level

    Trace test indicates 2 cointegrating equation(s) at the 5% level

    Trace test indicates 1 cointegrating equation(s) at the 1% level

    2. test de la valeur propre

    Hypothesized

     

    Max-Eigen

    5 Percent

    1 Percent

    No. of CE(s)

    Eigenvalue

    Statistic

    Critical Value

    Critical Value

    None **

    0.559347

    31.14088

    23.80

    28.82

    At most 1

    0.361310

    17.03676

    17.89

    22.99

    At most 2

    0.202308

    8.589224

    11.44

    15.69

    At most 3

    0.033162

    1.281526

    3.84

    6.51

    *(**) denotes rejection of the hypothesis at the 5%(1%) level

    Max-eigenvalue test indicates 1 cointegrating equation(s) at both 5% and 1% levels

    ANNEXE 5: estimation du VECM

    Cointegrating Eq:

    CointEq1

     
     
     

    TCPRH(-1)

    1.000000

     
     
     
     
     
     
     
     

    TCPRA(-1)

    0.270155

     
     
     
     

    (0.13546)

     
     
     
     

    [ 1.99434]

     
     
     
     
     
     
     
     

    TCPRI(-1)

    -0.424093

     
     
     
     

    (0.06888)

     
     
     
     

    [-6.15707]

     
     
     
     
     
     
     
     

    TCPRS(-1)

    -0.030700

     
     
     
     

    (0.04758)

     
     
     
     

    [-0.64526]

     
     
     

    Error Correction:

    D(TCPRH)

    D(TCPRA)

    D(TCPRI)

    D(TCPRS)

    CointEq1

    -1.007701

    -0.412046

    0.716837

    -1.801930

     

    (0.25593)

    (0.27032)

    (0.35247)

    (0.75100)

     

    [-3.93735]

    [-1.52426]

    [ 2.03373]

    [-2.39937]

     
     
     
     
     

    D(TCPRH(-1))

    0.319347

    0.474015

    0.033907

    1.606937

     

    (0.19461)

    (0.20556)

    (0.26802)

    (0.57107)

     

    [ 1.64093]

    [ 2.30601]

    [ 0.12651]

    [ 2.81393]

     
     
     
     
     

    D(TCPRA(-1))

    0.063818

    -0.404451

    0.039012

    -0.322735

     

    (0.14977)

    (0.15819)

    (0.20626)

    (0.43948)

     

    [ 0.42611]

    [-2.55672]

    [ 0.18914]

    [-0.73436]

     
     
     
     
     

    D(TCPRI(-1))

    -0.320905

    -0.224709

    -0.758527

    -0.201115

     

    (0.10813)

    (0.11421)

    (0.14892)

    (0.31729)

     

    [-2.96775]

    [-1.96750]

    [-5.09358]

    [-0.63385]

     
     
     
     
     

    D(TCPRS(-1))

    -0.053644

    0.000855

    -0.109250

    -0.392685

     

    (0.06782)

    (0.07163)

    (0.09340)

    (0.19901)

     

    [-0.79097]

    [ 0.01193]

    [-1.16966]

    [-1.97319]

    R-squared

    0.477434

    0.405919

    0.578927

    0.316535

    Adj. R-squared

    0.414093

    0.333910

    0.527888

    0.233691

    Sum sq. resids

    1009.221

    1125.902

    1914.192

    8689.834

    S.E. equation

    5.530141

    5.841083

    7.616155

    16.22739

    F-statistic

    7.537476

    5.637004

    11.34282

    3.820848

    Log likelihood

    -116.2273

    -118.3060

    -128.3895

    -157.1338

    Akaike AIC

    6.380383

    6.489789

    7.020500

    8.533358

    Schwarz SC

    6.595855

    6.705261

    7.235972

    8.748830

    Mean dependent

    0.347812

    -0.051044

    0.015977

    0.796918

    Schwarz Criteria

    29.18410

     
     

    ANNEXE 6: test de causalité de Granger

    Dependent variable: D(TCPRH)

    Exclude

    Chi-sq

    df

    Prob.

    D(TCPRA)

    0.181568

    1

    0.6700

    D(TCPRI)

    8.807565

    1

    0.0030

    D(TCPRS)

    0.625628

    1

    0.4290

    All

    9.610231

    3

    0.0222

     
     
     
     

    Dependent variable: D(TCPRA)

    Exclude

    Chi-sq

    df

    Prob.

    D(TCPRH)

    5.317702

    1

    0.0211

    D(TCPRI)

    3.871057

    1

    0.0491

    D(TCPRS)

    0.000142

    1

    0.9905

    All

    8.231645

    3

    0.0415

     
     
     
     

    Dependent variable: D(TCPRI)

    Exclude

    Chi-sq

    df

    Prob.

    D(TCPRH)

    0.016004

    1

    0.8993

    D(TCPRA)

    0.035772

    1

    0.8500

    D(TCPRS)

    1.368110

    1

    0.2421

    All

    1.728591

    3

    0.6306

     
     
     
     

    Dependent variable: D(TCPRS)

    Exclude

    Chi-sq

    df

    Prob.

    D(TCPRH)

    7.918199

    1

    0.0049

    D(TCPRA)

    0.539282

    1

    0.4627

    D(TCPRI)

    0.401762

    1

    0.5262

    All

    9.011989

    3

    0.0291

     
     
     
     

    ANNEXE 7: chocs impulsionnels

    ANNEXE 8: décomposition de la variance de l'erreur de prévision

    Décomposition de la variance de TCPRH

    Period

    S.E.

    TCPRH

    TCPRA

    TCPRI

    TCPRS

    1

    5.530141

    100.0000

    0.000000

    0.000000

    0.000000

    2

    5.910808

    96.02974

    1.797505

    1.971156

    0.201604

    3

    6.280855

    85.18550

    1.762940

    12.79784

    0.253715

    4

    6.497194

    84.44586

    1.784198

    13.45990

    0.310042

    5

    6.881519

    83.04036

    1.805383

    14.87177

    0.282484

    6

    7.121518

    81.68344

    1.956127

    16.06514

    0.295295

    7

    7.373521

    79.60414

    2.001400

    18.11804

    0.276414

    8

    7.604406

    78.67871

    2.059597

    18.98903

    0.272669

    9

    7.853120

    77.55458

    2.098736

    20.09079

    0.255895

    10

    8.075056

    76.67611

    2.153471

    20.92185

    0.248571

    Décomposition de la variance de TCPRA

    Period

    S.E.

    TCPRH

    TCPRA

    TCPRI

    TCPRS

    1

    5.841083

    2.632137

    97.36786

    0.000000

    0.000000

    2

    6.442955

    3.442542

    96.09469

    0.402751

    0.060014

    3

    7.738693

    4.562130

    92.43198

    2.875008

    0.130882

    4

    8.543646

    4.131478

    93.39431

    2.360148

    0.114065

    5

    9.325968

    3.467819

    94.07996

    2.281090

    0.171129

    6

    10.00001

    3.104118

    94.72714

    2.016369

    0.152377

    7

    10.66811

    2.855691

    94.92366

    2.037699

    0.182949

    8

    11.27945

    2.643045

    95.30611

    1.879411

    0.171438

    9

    11.86601

    2.443821

    95.54221

    1.830669

    0.183304

    10

    12.41761

    2.297150

    95.78709

    1.738226

    0.177533

    Décomposition de la variance de TCPRI

    Period

    S.E.

    TCPRH

    TCPRA

    TCPRI

    TCPRS

    1

    7.616155

    18.91358

    11.73985

    69.34657

    0.000000

    2

    8.660875

    28.83656

    14.07004

    53.95585

    3.137545

    3

    10.69634

    30.85155

    12.48242

    54.57618

    2.089854

    4

    11.46485

    32.54601

    13.70535

    50.65093

    3.097706

    5

    12.70769

    32.88303

    13.71881

    50.86878

    2.529375

    6

    13.50070

    34.64796

    14.20378

    48.35102

    2.797245

    7

    14.46402

    35.10384

    14.29313

    48.10529

    2.497742

    8

    15.20094

    35.95706

    14.57329

    46.91418

    2.555469

    9

    16.01285

    36.32761

    14.69039

    46.58683

    2.395178

    10

    16.71082

    36.91414

    14.85773

    45.83770

    2.390428

    Décomposition de la variance de TCPRS

    Period

    S.E.

    TCPRH

    TCPRA

    TCPRI

    TCPRS

    1

    16.22739

    17.86163

    12.63639

    17.62592

    51.87607

    2

    19.85685

    17.21172

    20.93375

    11.99704

    49.85748

    3

    22.46035

    13.77996

    22.09512

    9.868909

    54.25601

    4

    24.99927

    11.77894

    23.34752

    8.354057

    56.51948

    5

    27.24475

    10.77958

    24.01892

    8.013217

    57.18828

    6

    29.37198

    9.740009

    24.73979

    7.220607

    58.29960

    7

    31.25033

    8.873869

    25.29481

    6.813054

    59.01827

    8

    33.08137

    8.256760

    25.63530

    6.399515

    59.70842

    9

    34.79901

    7.784161

    25.96610

    6.151745

    60.09799

    10

    36.44519

    7.369416

    26.21746

    5.881765

    60.53136

    ANNEXE 9 : Tests sur les résidus

    Autocorrélation

    Lags

    Q-Stat

    Prob.

    Adj Q-Stat

    Prob.

    df

    1

    9.412862

    NA*

    9.667263

    NA*

    NA*

    2

    21.34547

    0.1656

    22.26279

    0.1349

    16

    Stabilité

    Normalité

     
     
     
     
     

    Component

    Skewness

    Chi-sq

    df

    Prob.

    1

    0.151488

    0.145341

    1

    0.7030

    2

    0.059461

    0.022392

    1

    0.8810

    3

    0.268515

    0.456636

    1

    0.4992

    4

    0.231107

    0.338265

    1

    0.5608

    Joint

     

    0.962634

    4

    0.9154

     
     
     
     
     

    Component

    Kurtosis

    Chi-sq

    df

    Prob.

    1

    2.073188

    1.360051

    1

    0.2435

    2

    3.209877

    0.069743

    1

    0.7917

    3

    2.731460

    0.114180

    1

    0.7354

    4

    3.608854

    0.586948

    1

    0.4436

    Joint

     

    2.130922

    4

    0.7117

     
     
     
     
     

    Component

    Jarque-Bera

    df

    Prob.

     
     
     
     
     
     

    1

    1.505392

    2

    0.4711

     

    2

    0.092136

    2

    0.9550

     

    3

    0.570815

    2

    0.7517

     

    4

    0.925212

    2

    0.6296

     
     
     
     
     
     

    Joint

    3.093555

    8

    0.9283

     

    ANNEXE10 : Tableau des données

    ANNÉE

    TCPRH

    TCPRA

    TCPRI

    TCPRS

    1966

    2,27

    4,02

    5,27

    4,78

    1967

    -12,95

    6,31

    1,30

    -23,58

    1968

    3,86

    5,26

    12,04

    -42,25

    1969

    2,40

    5,44

    6,53

    -4,16

    1970

    0,58

    4,89

    -1,30

    20,03

    1971

    0,91

    1,29

    12,06

    2,83

    1972

    0,08

    5,81

    -3,43

    33,26

    1973

    2,64

    3,92

    4,18

    -0,51

    1974

    7,79

    4,83

    5,42

    17,50

    1975

    8,20

    1,23

    3,65

    25,18

    1976

    -8,17

    1,34

    7,68

    -9,35

    1977

    10,44

    1,32

    18,34

    23,75

    1978

    18,43

    3,78

    10,44

    46,92

    1979

    2,96

    14,93

    43,66

    -6,22

    1980

    -4,76

    0,25

    8,86

    -12,40

    1981

    13,83

    13,16

    30,68

    14,06

    1982

    4,58

    3,82

    17,99

    8,03

    1983

    3,97

    -7,58

    18,34

    11,57

    1984

    4,52

    8,83

    4,92

    0,84

    1985

    5,03

    8,64

    8,64

    9,26

    1986

    3,70

    6,09

    6,09

    7,15

    1987

    -4,99

    0,51

    0,51

    -7,73

    1988

    -10,51

    -12,66

    -7,09

    -2,73

    1989

    -4,65

    7,11

    -2,30

    -10,01

    1990

    -8,76

    -1,00

    -6,80

    -8,26

    1991

    -6,47

    -4,00

    -6,60

    -2,25

    1992

    -5,72

    6,00

    -10,40

    -11,04

    1993

    -5,74

    1,20

    -4,30

    -5,68

    1994

    -4,98

    3,10

    -14,40

    13,08

    1995

    0,77

    8,72

    -2,42

    5,89

    1996

    2,53

    7,42

    4,53

    -2,81

    1997

    2,73

    7,55

    7,65

    -0,93

    1998

    2,76

    6,78

    7,66

    -0,76

    1999

    2,20

    6,80

    6,30

    -0,21

    2000

    2,07

    4,50

    5,00

    3,50

    2001

    2,44

    4,50

    8,03

    3,50

    2002

    2,01

    3,73

    4,99

    9,50

    2003

    2,09

    3,67

    3,18

    7,98

    2004

    1,83

    3,50

    2,39

    8,10

    2005

    0,27

    4,37

    1,91

    6,70

    Source : Banque Mondiale (WDI, 2007)

    TCPRH: Taux de croissance du PIB reel par tête

    TCPRA : Taux de croissance du PIB réel agricole

    TCPRI : Taux de croissance du PIB industriel

    TCPRS : Taux de croissance du PIB réel des services

    * 1 Encyclopédie libre Wikipédia

    * 2 Banque Mondiale, WDI (2007)

    * 3 KATIRCIOGLU S. T., «Co-Integration and Causality Between GDP, Agriculture, Industry and Services Growth in North Cyprus: Evidence from Time Series Data, 1977-2002», Review of Social, Economic & Business Studies, Vol.5/6, 173 - 187

    * 4 NORTON R. D. (2005), Politiques de développement agricole: concepts et expériences, p. 7.

    * 5 Dictionnaire Petit Robert

    * 6 Lexique d'économie, Édition Dalloz, Paris, 2006

    * 7 WINTERS P., DE JANVRY A., SADOULET E., STAMOULIS K. (1997), The role of agriculture in economic development: visible and invisible surplus transfers, p. 2

    * 8 BRASSEUL J., Introduction à l'économie du développement, Armand Colin, Paris, 1989.

    * 9 NORTON R. D., Politiques de développement agricole: concepts et expériences, p. 3

    * 10 Anne O. Krueger, Policy Lessons from Development Experience since the Second World War, dans: Jere Behrman et T. N. Srinivasan, éd., Handbook of Development Economics, vol. IIIB, North-Holland Publishing Company, Amsterdam, 1995, p. 2501. cité par NORTON (2005), p. 4

    * 11 GILLIS M., PERKINS D. H., ROEMER M., SNODGRASS D. R., Économie du développement, 2e édition, Nouveaux Horizons, Bruxelles, 1998, p. 553.

    * 12 MELLOR (1970), p. 37

    * 13 ROSTOW W. W., Les étapes de la croissance économique. Un manifeste non communiste, 3e édition, économica, Paris, 1997, p. 47.

    * 14 MELLOR J. (1970), p. 75

    * 15 Op. cit. pp 75-78

    * 16 Op. cit. pp 64-65

    * 17 MELLOR (1970)

    * 18 BRASSEUL (1989)

    * 19 Cité dans GILLIS M. et al. (1998), p. 66

    * 20 Banque Mondiale, Rapport sur le développement dans le monde 2008 : L'agriculture au service du développement, p. 34

    * 21 Op. cit. p. 47

    * 22 NORTON R. D. (2005), p. 7

    * 23 Banque Mondiale, Rapport sur le développement dans le monde 2008 : L'agriculture au service du développement, p. 38

    * 24 FAO (2008), «DIAGNOSTIC DU SYSTÈME NATIONAL DE RECHERCHE ET DE VULGARISATION AGRICOLES DU CAMEROUN et stratégie de renforcement des capacités pour la dissémination des connaissances et des technologies agricoles», FAO

    * 25 BAMOU E., NJINKEU D., DOUYA E. (2001), «Agriculture et nouveau programme des négociations de L'OMC des années 2000: analyse économique des intérêts et options politiques du Cameroun», Contribution au projet conjoint Banque Mondiale et Consortium de la Recherche Economique en Afrique (CREA).

    * 26 Cité par BAMOU E., NJINKEU D., DOUYA E. (2001)

    * 27 Les étudiants de l'ENSP ou encore de la FASA ont connu une suspension de leur recrutement à la fonction publique

    * 28 Banque Mondiale

    * 29Cité par AWOUMOU (2006), p 23

    * 30 FAO (2008), «DIAGNOSTIC DU SYSTÈME NATIONAL DE RECHERCHE ET DE VULGARISATION AGRICOLES DU CAMEROUN et stratégie de renforcement des capacités pour la dissémination des connaissances et des technologies agricoles».

    * 31 LARDIC S., MIGNON V. (2002), p 83

    * 32 BOURBONNAIS R., TERRAZA M. (2004), p 74

    * 33 Op. Cit. p 133

    * 34 LARDIC S., MIGNON V. (2002), page 97

    * 35 MINADER (2004), «Diagnostic du sous-secteur agricole 1960-1980»

    * 36 BAMOU, NJINKEU, DOUYA (2001)






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"La première panacée d'une nation mal gouvernée est l'inflation monétaire, la seconde, c'est la guerre. Tous deux apportent une prospérité temporaire, tous deux apportent une ruine permanente. Mais tous deux sont le refuge des opportunistes politiques et économiques"   Hemingway