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Contribution à l'etude du processus creatif dans un laboratoire de physiologie médicale norvégien

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par jean-francois Doucet
Université d'Oslo - Ingénieur Diplomé 2008
  

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JF Doucet

Contribution à l'étude du processus créatif

dans un laboratoire de physiologie médicale norvégien

Eiriksgate 10 - 0650 Oslo
Norvège

Remerciements

Je remercie Mr Aage Trollsås
qui m' a mis en contact avec le laboratoire
de physiologie médicale d' Oslo

Je remercie R. Abibon d' avoir pris le temps de dialoguer avec moi par courriel

Je remercie également tous mes correspondants sur Internet dialoguant avec moi sur ce thème.

Je remercie T. Berg de m'avoir donné accès
à un exemple où mettre à l'épreuve
certains concepts importants pour moi.

0.-Introduction

Après avoir étudié découvertes, inventions et productions artistiques pour en extraire certaines caractéristiques communes, la mesure de la tension artérielle des rats de laboratoire utilisés en physiologie médicale servira de cas concret pour, en retour, tester l'adéquation entre les concepts retenus au cours des études précédentes et l'intervention de l'imagination dans l'obtention des réponses aux questions posées par un laboratoire particulier. Sans doute doit-on attribuer à l'absence de ces concepts, l'aveuglement de la recherche scientifique actuelle qui se cantonne bien souvent à l'obtention de résultats déjà connus. Si cette connaissance ne peut évidemment pas nuire à la vie des laboratoires, le but assigné aux centres de recherche n'est pas de reproduire des connaissances anciennes ou même de les vérifier mais à partir de ces dernières d'établir des relations nouvelles entre les paramètres caractérisant les objets d'études. Se demander à quelles conditions - au moins nécessaires - un milieu de recherche peut émettre des résulats nouveaux devient donc urgent.

0.1.- Les objectifs et résultats attendus.

Pour une modeste part également, la mise en évidence d'éléments subjectifs dans le processus de recherche pourra équilibrer les méfaits du triomphe de la science actuelle. Prenant l'avantage sur les deux autres discours spéculatifs d'appréhension du monde extérieur, le discours philosophique et religieux, la science, entretient, en effet, l'illusion pour le commun d'être une certitude objective. Si, du fait de leur impact sur la réalité, ses résultats prennent valeur de certitude, le processus qui y mène, en revanche est loin d'être ni purement rationnel ni certain1. La subjectivité du chercheur qui laisse place au doute et aux produits de son imagination n'apparaît évidemment pas dans l'énoncé des résultats. Les analogies, en outre, produites par la subjectivité du chercheur et absentes des résultats finaux du fait de leur faible

1 A cet égard, les travaux de J. Kepler sont probants : dans son livre de 1596 « Mysterium Cosmographicum », Kepler construit son modèle de l' Univers en remarquant que les 6 sphères des 6 planètes connues du Soleil pouvaient être contenues dans les 5 solides de Platon,qui, parfaits, s' accordaient bien à la nature divine de la création.

valeur épistémologique, pourront, une fois remises à leur juste place, retrouver leur fécondité.

Pour ce qui concerne en particulier l'étude du processus créatif, l'essai d'utiliser les données expérimentales dans un modèle de simulation devrait mettre en lumière le rôle de l' anomalie dans le processus : elle apparaît plus clairement par comparaison entre les données expérimentales et les résultats obtenus par simulation. Faire apparaître cette divergence ne peut, en effet, que stimuler les recherches ultérieures.

0.1.- Le processus créatif sous 4 aspects

Depuis quelques années, ma conviction s'est forgée sur quelques aspects du processus créatif : essentiellement une pratique, il se trouve être hors de ce que les philosophes appellent la » clôture logocentrique » c'est-à-dire, à proprement parler, hors de ce qui peut se dire. De plus, pour préciser le point de vue de mon approche, j'ai dû choisir la théorie psychanalytique du sujet qui tient compte de l' inconscient. Ce dernier a été décrit par J. Lacan comme » Les alluvions laissés par le langage » tandis que G. Rosolato énonçait une conséquence de cette théorie, à savoir que tout énoncé d' une chaîne signifiante se double d' une autre chaîne, inconsciente celle-là dont l' origine est le désir (sexuel ) inconscient. Concernant non plus le sujet mais l' objet, ma conviction, fondée sur la distinction cartésienne entre le « res cogitans » et le « res extensa » s'était portée vers une conception de l' objet, par nature, non différent du sujet2. Après tout, le monde matériel qui nous entoure est fait, comme nous, de molécules et ce qu'on appelle la vie semble être un attribut particulier à certains objets sans que leur composition soit de nature différente. Pour marquer cette nature semblable de l'objet et du sujet, j'ai utilisé la même notation A (objet ou sujet apportant satisfaction) ou Ë (objet ou sujet apportant frustration) pour exprimer l'imperfection sous forme d' une barre qui manque à Ë pour s'écrire A. Du même coup, si je supposais que le sujet était le siège du désir, et par conséquent métonymique par nature, l'objet de parfait dans un certain état est découvert imparfait dans un autre avant que ne se déroule le processus créatif aboutissant à une nouveauté. Le cadre de l'étude est, lui, calqué sur les aspects abordés lors du questionnement.

2 A l'égard du sujet et de l' objet supposé de même nature, j' ai été séduit par les théories de Maturana et Vasela ou de F. Capra qui tentent de rompre avec la dichotomie cartésienne distinguant un » Res extensa » d' un » Res cogitans » pour marquer la différence de nature entre le sujet ( vivant ) et l' objet ( inanimé ).

1.- L' environnement : c ' est la question posée à un groupe de chercheurs dans une discipline considérée.

2.- la situation créative où la réponse est cherchée grâce à un dispositif technique (invention ) artistique ( oeuvre d' art ) ou scientifique ( découverte)

3.-le ou les sujet(s) créateur(s) disposé(s) à un réarrangement symbolique. 4.-la création qui est le produit auquel aboutit tout le processus.

1.- L'environnement de la recherche

Avant d'entrer dans les détails du dispositif de recherche aboutissant ou non à une réponse à la question posée, un bref aperçu du contexte dans lequel la recherche s'effectue est nécessaire. Si la question des causes de l'hypertension artérielle est un problème mondial, le laboratoire de physiologie dans lequel les expériences sont faites est, en revanche, norvégien.

Sans se livrer à une étude de culture comparée, il apparait important d'esquisser les caractéristiques culturelles du cadre dans lequel s'effectuent les recherches médicales, objet de cette étude. Comparé à un pays latin comme la France dont le modèle comportemental principal se résume par un couple « punition / récompense «, la Norvège, de tradition luthérienne, est caractérisée par «Fais ton devoir et exige ton droit « dont le couple correspondant est « droit/devoir ». Cette différence s'accompagne également de visions de la vie assez éloignées. Si l' on place la France dans la catégorie des pays où règne le principe de plaisir, la Norvège au contraire, serait plutôt le pays du principe de réalité. Le modèle norvégien « par objectifs «pragmatique », d' autre part, allant jusqu'à diviser les objectifs principaux en sous-objectifs, donne à la Norvège son efficacité très terre-à- terre.

On doit à Aksel Sandemose la loi de Janteloven3 qui s' exprime de la manière suivante :

1. Tu ne crois pas que tu es quelqu' un.

2. Tu ne dois pas croire que tu vaut autant que nous.

3. Tu ne dois pas croire que tu es plus astucieux que nous.

4. Tu ne dois pas te figurer que tu es mieux que nous.

5. Tu ne dois pas croire que tu sais plus que nous.

6. Tu ne dois pas croire que tu es plus que nous.

7. Tu ne dois pas croire que tu as du talent dans quelque domaine que ce soit.

8. Tu ne dois pas te moquer de nous.

3 La loi de Jante (Janteloven ) a éte formulée par Aksel Sandemose en 1933, dans « En flyktning krysser sitt spor» ( un réfugié retrouve ses traces ) .Cette loi, selon Aksel Sandemose, donne une bonne image «des gens pleins de méchanceté et capables de s'écraser les uns les autres.

9. Tu ne dois pas croire que quelqu un se preoccupe de toi.

10. Tu ne dois pas croire que tu peux nous apprendre quelque chose.

et qui marque profondément la mentalité norvégienne et donc a des conséquences sur les activités de recherches. Cette « janteloven » régulant la vie sociale norvégienne, est l'envers de la médaille d' un pays devenu riche en découvrant le pétrole, un peu plus grand que la moitié de la superficie francaise4 mais 6 fois moins peuplé, puritain où les idéaux de sociabilité ou de morale sont extrèmement hauts.

En particulier, la morale du devoir (Exige ton droit et fais ton devoir ) marque profondément les mentalités de la recherche scientifique. Habitué à étudier un « pensum » dès son plus jeune âge, un universitaire norvégien passe à force de volonté à travers une masse d'informations. S'il est ainsi capable de connaître un certain nombre de données, il ne lui est que rarement demandé de »briller » ou de montrer ses talents. La crainte de se distinguer de ses compatriotes est également une constante qui trouve son origine dans la pression sociale du groupe. Peu de gens osant se distinguer de l'ensemble de ses concitoyens, la société norvégienne est typiquement celle de » homme moyen ».

Dans une société, d' autre part, où la vie d'un individu est supposée essentiellement sociale, le besoin de satisfaction propre est reporté à un avenir lointain et diffus, les règles élémentaires d'économie libidinales (engagement, deuil ) ne sont alors respectées que pour une infime minorité (Famille royale, prêtrise etc ). Les valeurs d' égalité non pas de droits mais de pouvoir économique fait alors de la Norvège une société de «frères jaloux « comparées aux sociétés latines de « pères rivaux «.

Généralement très réservés, les chercheurs norvégiens sont, d' autre part, bien socialement organisés de telle sorte qu'aucune prise de décision ne se fait sans d'âpres discussions.5 dûment régulées. Mais l'idée généralement admise que certains

4 Superficie de la France : 675 417km2 pour 64 102 000 hab. Soit une densité de 93,59 hab./km2. Superficie correspondante de la Norvège : 324 220 km2 pour 4 640 219 hab. Soit une densite de 14 hab./km2

5 En 1979, Bruno Latour, publie avec Steve Woolgar Laboratory Life: the Social Construction of Scientific Facts ( le titre français la Vie de laboratoire : la Production des faits scientifiques (1988)). Dans cet ouvrage, les deux auteurs entreprennent une étude ethnologique d'un laboratoire de recherche spécialisé en neuroendocrinologie au Salk Institute. Ils montrent que la description naïve de la méthode scientifique, selon laquelle la réussite ou l'échec d'une théorie dépendent du résultat d'une seule expérience, ne correspond pas à la pratique réelle des laboratoires. Généralement, une expérience produit seulement des données peu concluantes, attribuées à un défaut du dispositif expérimental ou de la procédure. Ainsi, une grande partie de l'éducation scientifique consiste à apprendre comment trier les données qui doivent être gardées et celle qui doivent être jetées, un processus qui semble, pour un regard extérieur non- éduqué, une manière d'ignorer les données qui contredisent l'orthodoxie scientifique.

» phares » apparaissent dans un milieu de recherche qui entrainent d'autres chercheurs dans leur questionnement n' est pas très visible dans les départements scientifiques de l' Université. Il faut bien du temps au contraire, au chercheur extérieur à la Norvège pour découvrir autre chose que des chercheurs extrèmement réservés peu enclins à partager leurs connaissances. Dans ces conditions, en situation de recherche, la réponse considérée comme inscription de relations nouvelles laissant intactes d' autres, inscription encore nommée »mobile immuable6» prendra un aspect bien particulier en Norvège : la pression sociale tend à donner à la production de connaissances nouvelles l' avantage non pas aux éléments mobiles inédits qui pourraient déboucher sur l'inscription de la réponse mais aux éléments immuables répétant à quelques détails près des connaissances établies depuis longtemps. La réserve des chercheurs norvégiens, de plus, présuppose un certain rapport à la parole. En terme d'énergie psychique, la régulation des débats, si elle assure à chacun un égal temps de parole, ne permet pas de pertes indispensables à la production d'organisation signifiantes nouvelles. La féconditié de leur production dépend pour une lage part des possibilités offertes aux locuteurs d'exprimer un certain nombre d'erreurs évaluées selon les critères de validité retenus pour la recherche ainsi qu'une certaine quantité d'énoncés « hors sujet ». L' obligation faite à chacun de ne pas se distinguer d'autrui ou d'exprimer autre chose de des données factuelles, interdit du même coup l' apparition de paroles «hors sujet « ou « bavardage «. Seule peut-être la culture féminine connait-elle « la papote « qui est pratiquée à des fins d'activation mentale et de décharge émotionnelle. « Cette papote » (ou parlote), considérée en Norvège, comme pure perte de temps est l' très loin de la tradition de l' arbre à palabre africain7 !

La production d'organisations signifiantes nouvelles, d' autre part, provient , du point de vue adopté pour la créativité, d'une métaphore du sujet, métaphore générée à la suite d'une conversation8 où le signifiant présente 2 faces, l' une du coté de l'émetteur et l'autre du coté du récepteur.

Latour et Woolgar proposent une vision hétérodoxe et très controversée des sciences. Ils défendent l'idée que les objets d'étude scientifiques sont « socialement construits » dans les laboratoires, qu'ils n'ont pas d'existence en dehors des instruments de mesure et des esprits qui les interprètent. Ils considèrent l'activité scientifique comme un système de croyances, de traditions orales et de pratiques culturelles spécifiques.

6 En terme lacanien, on écrirait : une création est une ré-écriture de la réalité à l'aide du Symbolique

7 Dans les 2 sens du terme, loin (éloigné géographiquement ) et loin ( loin de pratiquer )

8 A cet effet, on peut classer les conversations en 3 niveaux :

1.-celles où il s' agit d'échanger de l' information pour une action orientée vers un but ( le si gnifiant est supposé porter un sens invariable qui pass d' un interlocuteur à l' autre ),

2.-celles où les interlocuteurs sont d' accord sur une réalité commune,

3.-celles où les interloctueurs construisent une réalité nouvelle à partir d' une plate-forme commune.

Le laboratoire observé se trouve d' autre part dans une structure hiérarchisée comme dans toute Université, la hiérarchie donnant la valeur des connaissances détenues par les chercheurs-enseignants, les étudiants et le personnel administratif. Au sommet de la hiérarchie se trouvent les professeurs, supposés détenir un savoir

d' experts9 qui donnent les prémisses de la recherche. Dans le processus de production des connaissances leur importance est considérable dans la mesure où, détenteurs d'un savoir étendu, ils sont supposés seuls à pouvoir renouveler le savoir en apportant une vision nouvelle sur un ancien thème.

Le découpage de l'Université en disciplines est d' autre part, une condition de production de nouvelles connaissances mais aussi un obstacle au « décloisonnement « des recherches pour les «transferts de technologie». Les recherches multidisciplinaires ont tenté de remèdier aux inconvénients du cloisonnement de l'Université en disciplines et à l' extrème spécialisation des chercheurs. Mais dans le cas présent, la recherche pluridisciplinaire n' a été envisagée que tardivement dans le processus pour la très simple raison que les experts éventuellement concernés par la recherche sont peu nombreux en Norvège.

Du point de vue de la créativité toutefois, les exemples sont nombreux où les véritables innovations ne sont pas venues des experts en la matière mais de « transfuges « d' une discipline à une autre. Pour prendre un exemple norvégien, J. Vaaler, ingénieur et mathématicien a surtout brillé par l'invention du trombone10 loin de préoccupations scientifiques puisque, c' est en tordant des cure-pipes, que l'idée lui serait venue d' attacher les feuilles de papier avec un tortillon de fer. Mais il est probable que beaucoup de gens ont tordu des cure-pipes avant J. Vaaler sans pour autant en découvrir un usage astucieux.

Si la richesse du pays 11 d' autre part, laisse supposer une abondance de moyens financiers, les objectifs de recherche, en revanche, sont largement

9 En terminologie lacanienne parmi les 4 discours

1.- Bureaucrate, (Universitaire )

2.- Travailleur ( Maître)

3.-Chômeur (Hystérique)

4.-Cabinet de recrutement ( Analyste)

5.-Employeur ( Capitaliste)

le discourse du professeur est à classer dans une des 2 catégorie (Bureaucrate ) ou du Travailleur (Maître))

10 L'invention du trombone est attribuée au mathématicien et ingénieur électricien norvégien,

Johan Vaaler de Lierfoss. En 1899, il présente ses idées à une Commission norvégienne. Comme la Norvège n'avait pas de bureau de brevets à cette époque, J. Vaaler enregistre son invention en Allemagne. Deux ans après, il obtient un brevet americain. J. Vaaler n'est jamais devenu riche : américains et britaniques acquièrent des brevets pour des concepts voisins plus proches du trombone à double tour que nous connaissons aujourd' hui. Toutefois, les norvégiens ont choisi le

trombone pendant la Seconde Guerre Mondiale comme symbole de ralliement contre l' occupant.

11 PIB par habitant (2002) : 34 500 euros (France : 24837 euros en 2002) Statistiques OCDE

tributaires de la masse critique12 en expertise, en temps et en partenariat pour l' obtention de résultats significatifs.

1.1. - Le mystère de l' hypertension artérielle

1.1.1.- Rappels sur la tension artérielle.

La tension artérielle s'exprime habituellement par deux chiffres, écrits avec une barre oblique, p. ex. 140/90 mm Hg. Le premier chiffre est la pression systolique. C'est la pression maximum du sang poussé dans les artères. Le deuxième chiffre est la pression diastolique. C'est la pression lorsque le sang revient vers le coeur - la période de repos entre les contractions.

La variation de la tension artérielle est régulée par le système nerveux végétatif. C'est un système autonome (non soumis à la volonté) qui travaille au moyen de deux leviers :

1. Les nerfs sympathiques qui incitent énergiquement le système cardio-vasculaire à augmenter son activité

2. Les nerfs parasympathiques, eux, veillent plutôt à envoyer au système cardiovasculaire des messages qui le calment.

A part le système nerveux, d'autres paramètres contribuent à régler le contrôle de la tension artérielle. Les reins, par exemple, jouent un rôle prépondérant. Ils se chargent d'éliminer l'eau et le sel et peuvent faire monter ou baisser la tension artérielle en modifiant le volume de sang disponible. En outre, ils sécrètent la rénine, une substance hypertenseur. L'hypertension se manifeste quand toute cette mécanique extrêmement sophistiquée se dérègle. Etant donné l' interdépendance de l' appareil circulatoire avec les autres systèmes ( respiratoire, digestif, nerveux et urinaire ), l' hypertension artérielle a des répercussion sur toutes les fonctions de l' organisme.

1.1.2.-Causes

Théoriquement, l'hypertension peut résulter d'une augmentation soit du débit cardiaque soit de la résistance périphérique. Dans près de 90 % des cas, l'hypertension est essentielle ou idiopathique, c'est-à-dire qu'elle n'a aucune cause organique décelable et des facteurs génétiques joueraient probablement un rôle important. Par ailleurs, dans d'autres cas, l'hypertension est dite secondaire, c'est-à-dire qu'elle résulte de pathologies diverses comme une maladie rénale (insuffisance rénale, pyélonéphrite) ou un trouble endocrinien ou vasculaire (artériosclérose)

12 Masse de noyau de matière fissile nécessaire pour obtenir une réaction en chaîne.

Fi.g-1.- Mesure de la tension artérielle.

Bien des recherches se sont lancées pour connaitre la cause de l'hypertension artérielle essentielle (80 % des cas) tandis que la médecine connait les causes de l'hypertension artérielle secondaires. Différents points de vue (mécanique, génétique etc ) ont, à ce jour, abordé la question sans qu'une réponse définitive en soit donnée. Cette interrogation de physiologie médicale sert d'exemple pour souligner quelques aspects du processus créatif.

Systole ( contraction) et diastole (remplissage) correspondent aux 2 valeurs de la pression artérielle

 

Interdépendance des systèmes circulatoire, digestif,

respiratoire et urinaire

 
 
 
 
 
 
 

La peau assure les

échanges entre l'

environnement et l'

organisme qui reçoit du système digestif les aliments et du système respiratoire l' air dont le sang extrait l' oxygène pour rejeter le gaz carbonique. A son tour, l' oxygène est

distribué dans toutes
les cellules. Les déchet
métaboliqes sont

éliminés par le

système urinaire (et respiratoire pour le gaz carbonique )

 
 
 
 
 
 
 

Tableau 1.- Circulation sanguine

Il n'est évidemment pas question de rentrer ici dans les détails des connaissances médicales sur l'hypertension artérielle pas plus que d'espèrer une quelconque réponse à la question posée, mais de souligner le « Zeitgeist « de notre époque sur le sujet par l'importance du nombre de personnes concernées (environ 7 millions en France) et les dépenses de santé (en France environ 9 milliards de francs ) correspondant aux médicaments antihypertenseurs. Si les causes exactes de l' hypertension artérielle ne sont pas connues, en revanche, le caractère souvent familial a, de longue date, fait rechercher une origine génétique. Cet état de fait lance les laboratoires autant pharmaceutiques qu'universitaires à la recherche tant d' une réponse sur l' origine de ce dyfonctionnement (par ex. une anomalie héréditaire de l'élimination rénale du sodium ) que sur son éventuel traitement.

2.- La situation créative

La situation créative est l'ensemble des moyens mis en oeuvre pour imaginer une réponse à une question posée dans un endroit donné. L'intervention de l' imagination pour la résolution de problèmes13 distingue la situation créative des autres occasions où se formule une réponse. Ces dernières sont dans la droite ligne des solutions satisfaisantes parce que largement expérimentées et admises. Elles sont elles-mêmes d'anciennes nouveautés devenues routines. Dans ces conditions satisfaisantes, l'imagination n'a pas lieu d'intervenir : elle ne se justifie que lorsque les pratiques établies deviennent imparfaites pour une raison ou pour une autre. L»imagination exprimée sous forme d'organisations signifiantes s'immisce alors dans les circulations14 stables de savoir, de données, de connaissances etc au point où les cycles soumis aux forces de déconstruction et de construction pourraient aboutir à une nouveauté.

2.1. Circulations dans la situation créative

Une situation est dite « créative » lorsqu' elle permet à certains chercheurs, utilisant dans ce but la spécificité du langage humain de produire une infinité d'énoncés, de passer une convention nouvelle sur la réalité après une réorganisation symbolique 15 : c'est dire que toute situation peut devenir ou cesser d'être créative selon les acteurs qui y participent. Bien qu'il soit impossible de dresser une cartographie exhaustive et définitive des éléments constitutifs d'une situation créative, l'intuition distingue les situations « vivantes » qui permettent de sortir des sentiers battus, des situations « figées » où l'on peut s'attendre, au mieux, à la reproduction des connaissances anciennes. Au contraire des situations où l'objectif est de mener à bien une action dirigée vers un but16, la situation créative exige de la part de ses acteurs un changement de point de vue aboutissant éventuellement à une réponse inventive à la question posée. Ce changement ne peut être obtenu que par une re-présentation17 de la situation existante, en particulier à l'aide du langage humain18, représentation mettant à distance cette situation et différant le temps dans

13 en anglais » Problem solving »

14 Du latin « circulus » petit cercle, la circulation s' applique aux astres, au sang pour signifier qu' ils reviennent au point de départ mais aussi aux automobiles selon un trajet bien déterminé. (je remercie S. pour sa clarification sur ce point )

15 En terme lacanien : une réécriture du Réel. Michel Faviez a établi un parallèle entre la théorie lacanienne et le sivaïsme du Cachemire du Xème et XIème siècle. Christiane Berthelet Lorelle établi elle un parallèle entre les écrits de Patañjali (Vème siècle ) et de Freud.

16 Souvent en accord avec l'idéologie masculine : « Réflexion, décision, action » qui reflète la dépendance des actions au langage.

17 Je remercie C. G. pour la clarification sur ce point, en particulier pour la mise en évidence de la néoténie humaine.

18 On sait que les systèmes de communication animale sont liés à une situation bien déterminée et ne sont pas transposable à une autre.

l'après-coup. Ces représentations peuvent se résumer à des circulations de produits, d'argent, de connaissances et de temps.

2.1.1. Circulation du savoir

2.1.1.1. Circulation de signifiants

Connaissances anciennes et nouvelles trouvent leur origine dans l'expression, à partir d'une réalité sensible, de signes autour d'un vide19 (ou d'un manque) engendrant un sens intelligible parmi tous les autres possibles dont la somme20 renvoie également à un vide21.

2.1.1.1.1. Généralité sur les paroles échangées : Les mots clairs obscurs

Du berceau à la tombe, les êtres humains sont immergés dans le langage grâce auquel ils perçoivent puis agissent sur la réalité. Ainsi le langage plonge les êtres humains dans le monde « comme des poissons dans l'eau » . Il leur fournit les moyens de voir la réalité au travers de concepts comme à l'aide de lunettes. Réciproquement, ces fenêtres ouvertes sur la réalité par les mots obscurcissent également leur vision. Les êtres humains ne voient pas le monde tel qu'il est mais tel qu'ils pouvent le voir au travers de signes. C'est certainement de cette impossibilité22 que vient leur propension à imaginer la réalité pour ensuite l' exprimer sous forme de signes. Si cette expression rencontre chez autrui un écho, une nouveauté peut voir le jour. Si, au contraire, un accord sur la réalité ne peut pas être conclu, soit parce que la réalité humaine est considérée comme un donné valable pour tous,- « un chat est, alors, un chat » soit que le point de vue d'une majorité fasse obstacle à l'expression d'un point de vue divergent, les chances de voir émerger une organisation signifiante novatrice sont extrèmement faible .

L'importance même de cette expression de la réalité commune à l'aide de mots est loin d'être nouvelle puisqu'elle fait appel à la conception médiévale du signe « aliquid stat pro aliquo » qui peut se résumer à « dire quelque chose à quelqu'un ici et maintenant »

19 C' est du moins un des présupposés de cette étude.

20 On remarquera ici le présupposé sous-jacent qu'il n'y a pas de réalité transcendantale.

21 «Ni le vide, ni les formes ne peuvent être séparés», enseigne le Zen.Il s'agit ici de l'absorption des formes par le vide et du vide par les formes. Le langage est articulé par la poussée du vide.

22 En termes lacaniens R, S, I: le Réel étant impossible à saisir, nous construisons une réalité à l'aide d'une articulation sensée de l'Imaginaire et du Symbolique qui exclut ce réel de l'ordre du sens. ( Dialogue avec Richard Abibon du 26 fèvrier 2006 ).

2.1.1.1.1.1. Dire

Dire quelque chose présuppose qu'on puisse emprunter ses organisations signifiantes à une réserve de conventions déjà passées sur la réalité. Ces conventions, apprises par exemple à l'école, n'appartiennent pas en propre au locuteur. Seule l'énonciation ou l'écriture lui sont sa propriété. Enonçant ou écrivant, il communique alors un sens par l'ordre d'apparition des termes, grâce à leurs accords entre eux et leurs modifications selon la fonction grammaticale qu'ils remplissent. Dire, d' autre part, présuppose une intention comme le souligne. P. Ricoeur distinguant 3 fonctions :

Les actes locutionnaires qui correspondent au fait de dire quelque chose. Les actes illocutionnaires accomplis en disant quelque chose.

Les actes perlocutionnaires accomplis par le fait de dire quelque chose.

2.1.1.1.1.2. Quelque chose

Dire quelque chose, c'est pouvoir substituer à un objet un signal sonore ( dont la trace mnésique est un signifiant) Cette substitution possible a, de tous temps, facilité l'action sur la réalité appelée par la tradition cartésienne « Res extensa ». Une fois un signe substitué à un objet, il est, par exemple, plus facile de calculer des aires sur des nombres que d'en mesurer les surfaces sur le terrain.

2.1.1.1.1.2.1 Désignation de l'objet.

Désigner un objet par un mot n'établit pas cependant une relation univoque entre mot et objet. A un mot, correspondent bien des objets puisque le même objet peut évoluer au cours du temps et que tous les objets ayant des caractéristiques voisines sont désignés par le même nom. De la même manière, les mots permettent de désigner une réalité corpusculaire ou ondulatoire sous le même vocable de lumière. Cette désignation des objets à usage scientifique permet de transposer des propriétés ou caractéristiques des objets à des signes pour éventuellement formuler des prédictions.

Ill.- 1 Usage des mots pour établir une convention sur la réalité

2.1.1.1.1.3. A quelqu'un.

Reprenant la distinction saussurienne du signifiant ( « significans » médiéval ) et du signifié ( significatum), J. Lacan définit un sujet23 appartenant au « Res cogitans » cartésien immergé dans le langage comme représenté par un signifiant pour un autre signifiant24 : la compréhension entre sujets suppose par conséquent la connaissance des signifiants communs aux deux sujets. Cette compréhension, d' autre part, est soumise aux contraintes des croyances respectives des interlocuteurs et de leur langue25.

23 A coté de la définition donnée par J. Lacan du signifiant qui désigne le sujet pour un autre signifiant, on trouve le référent des linguistes qui définit le signifié hors des traces mnésiques du sujet. Le référent serait ce qui pré-existe à tout langage.

24 Ce qui traduit le fait d' expérience qu' on ne peut s' exprimer qu' à l' aide de signifiants.

25 B. Muldworf, Le divan et le prolétaire,Editions sociale Paris 1986.

Cette médiation incontournable par le langage fonde non seulement le sujet mais également son objet de désir renvoyant, à l'insu du sujet conscient, à un autre objet lui ayant apporté antérieurement satisfaction. De la sorte, un sujet désire toujours ce qui lui manque en cherchant à le retrouver26.

Axe syntagmatique

Anneau du furet

Désir

=

Sujet

Signifiants mémorisés

Signifiants
énoncés

Illustration.- 1.- Analogie du jeu du furet pas la circulation des signifiants

L'analogie du jeu du Furet figure une situation de communication idéale de sens entre différents sujets. Les joueurs disposés en cercle se passent de mains en mains un anneau enfilé sur une ficelle. Un joueur placé au centre du cercle des joueurs cherchent à savoir qui, des joueurs, a l'anneau dans sa main. S'il le découvre, les deux joueurs échangent leurs places. L'anneau du furet représente le désir inconscient inconnu d'un personnage central : il court à son insu entre les mains tenant le fil du discours (ou axe syntagmatique) figuré par la ficelle entre les mains d'autrui.

Discours « ici et maintenant » il ne tiendra pas compte des évènements anachroniques dont s'encombre la conversation du sujet. Discours d'un sujet se déroulant (sur l'axe syntagmatique), il pourra s'élancer dans la recherche de métaphores (sur l' axe paradigmatique ) aboutissant seules à un sens nouveau.

26 M. Montrelay signale à cet égard les 2 sens du mot « Invention » du latin « inventio » signifiant trouver ou découvrir et que l' on retrouve dans l' expression « Invention de la Sainte Croix » célébrée le 3 Mai.

L'idéal norvégien d'une expression strictement factuelle sur un thème donné ou entre les personnes qui donnent à l'Université son abord froid est, sans doute, une limitation des possibilités créatrices du langage. Ainsi la découverte d'un effet secondaire de l'isradipine, utilisé notamment pour le traitement de l'hypertension artérielle, publiée dans la revue britannique « Nature27 » qui "rajeunit" les vieilles cellules à dopamine, fait partie des informations tues parce ne faisant pas partie de l'objet de la recherche centrée sur la circulation sanguine et non pas sur la maladie de Parkinson. Dans un autre contexte et lors de son étude méthodologique sur le comportement des fourmis, D. Lestel28 a mis en évidence l'importance de la narration dans le processus de recherche. Les chercheurs racontaient des histoires sur ce que faisaient les fourmis et sur ce qu'ils faisaient par rapport aux fourmis. Ils se mettaient même en scène de telle sorte que l'expérimentation avait une dimension théatrale. Pour ce qui concerne l'étude de cardiologie vasculaire sur les rats dans un environnement norvégien, cette mise en scène29 semble impensable.

Au contraire, la détention d'un savoir dans une discipline donnée encourage la concentration des connaissances, le secret et sa diffusion restreinte. Elle inhibe l'attitude exploratoire qui supposerait une curiosité s' appuyant sur un non-savoir. De plus, l'expression factuelle entre les chercheurs norvégiens limite les formes de l'échange à quelques règles convenues d'expression. Maintenir, par conséquent, un discours strictement factuel pour perpétuer les manières d'être norvégiennes, revient à évacuer cette possibilité de reformulation de conventions nouvelles. Admettre, au contraire, que le sujet créateur est décentré30 par rapport à l' objet réel de sa recherche favoriserait sans doute la reformulation d'objets nouveaux

2.1.1.1.1.3.1. Paroles adressée et non adressées.

Cette parole incapable de désigner l'objet de son désir s'adressant à quelqu'un ici et maintenant appartient à la sphère privée : il existe d'autres discours dont l'adresse n'est plus une seule personne mais un auditoire tout

27 . C. Savio Chan1, J, « 'Rejuvenation' protects neurons in mouse models of Parkinson's disease» Nature, 10 Juin 2007.

28 Maître de Conférence à l' Ecole Normale Supérieure : Conférence de l'Université de tous les savoirs du mercredi 5 janvier 2005, par Dominique Lestel, philosophe et éthologue.

29 Cette mise en scène est recommandée dans la pratique de méthodes comme la Synecstics (J.J. Gordon)

30 Ceci correspond au fait que « les chercheurs bien souvent ne trouvent pas ce qu' ils cherchent et trouvent ce qu'ils cherchent »

entier. Ces sont des discours politiques semblables aux courriers non adressés de nos boîtes aux lettres qui laissent au hasard la coïncidence entre le besoin d'une adresse et la satisfaction de sa demande.

2.1.1.1.1.4. Ici

Le lieu d'où l'on parle n'est évidemment pas indifférent. Un homme politique parle d'une tribune à l'Assemblée Nationale diffère des paroles du même homme politique dans la rue ou chez lui. Dans la société, chacun a sa place dans le système symbolique. Certaines positions accordent à certains de participer à l'échange des ressources. (Carré sur le schéma ci-dessous).

D'autres sont exclus de cet échange. (Cercle ci-dessous)

Généralement les citoyens bénéficiant de privilèges promettent aux autres citoyens de « devenir » comme eux au prix d'efforts étalés sur le temps.

Ceux qui disposent de ressources peuvent formuler leurs intentions sur la réalité sous forme de projets ou de programme. Ils voient le monde d'en haut et de l'extérieur. En revanche, ceux qui ne disposent pas de ressources sont soumis à la réalité construite par autrui : ils voient la réalité extérieure d'en bas et de l'intérieur.

2.1.1.1.1.5. Maintenant

A l'idéal, on peut espèrer vivre le plus possible dans l'instant présent de telle sorte que le poids du passé ne plombe pas l'avenir. Ce dernier est suffisamment maitrisé pour ne pas être un ombre au tableau du temps présent.

2.1.1.1.2. Les 4 discours lacaniens ( rappel )

Si l' on s' en tient à la division lacanienne des 4 discours du sujet, on remarquera le décalage entre la répartition des roles sociaux et celle du discours des chercheurs.

Soit un agent qui s' adresse à un autre

Agent -* autre (adresse)

Qui représente la chaîne consciente du discours Comme depuis la definition médiévale du signe - Aliquod stat pro aliquot - « Parler, c' est dire quelque chose à quelqu' un «. On remarquera que l'objet du discours n' est pas le discours lui-même, mais s'y fait représenter comme le sujet créateur par une production.

Agent -* autre (adresse) production

La chaîne consciente se double, selon notre option prise pour la théorie du sujet créateur, d'une chaîne inconsciente31.

Le désir inconscient produit une vérité du sujet de telle sorte que l' on puisse écrire :

Agent -* autre (adresse) Vérité production

A ces 4 places ainsi définies, J. Lacan distingue 4 opérateurs :

. - S1 : Le signifiant Maître, parole qui gouverne au sens, ordonne, tranche,

nomme, unifie.

. - S2 : Le Savoir S2, qui est le signifiant pour lequel S1 représente un sujet

. - $ : Le Sujet S, sujet assujeti au discours et à la représentation qui le divise

entre sujet de l'énonciation et sujet de l'énoncé. $ se fait représenter par S1 dans la chaîne signifiante.

. - a : L'objet a, cause du désir, objet partiel détaché du corps pour symboliser

le manque, l'incarner, entrer dans la circulation des désirs. Il devient représentation signifiante par analyse, toujours absent de sa représentation

31 .- G. Rosolato.- Essai sur le Symbolique. Gallimard Paris 1979.,

Les 4 opérateurs sont successivement mis aux 4 places définissant ainsi 4 discours par rotation, la chaîne signifiante de l' agent à son adresserestant sur la première ligne:

Maître

Hystérique32

Analyste

Universitaire

 
 
 
 

S1 -) S2

$-)S1

a -) $

S2 -) a

$ a

a S2

S2 S1

S1 $

Tableau 2.- Les 4 discours

Aux étudiants, il est demandé d'accorder aux différents experts la place du discours du Maître pour prendre celle de l' Hystérique, se plaignant de son manque de savoir tout en demandant que l'expert le comble. Sous-jacente à ce jeu de rôle, on trouve l'idée que « quelque chose se transmet « d'un savant à un étudiant sans que les éléments inconscients soient, à proprement parlér, pris en compte.

2.1.1.1.3. Les 5 fonctions du discours de R. Jacobson. ( rappel )33

Parmi les 5 fonctions du discours distinguées par R Jacobson, la function poétique peut amener à des organisations signifiantes nouvelles. Le sens est alors exprimé par la structure du message dans les jeux de mots ou les métaphores par exemple. L'objet de la conversation est le message lui-même pris dans un jeu entre les interlocuteurs.

Les autres fonctions sont :

2.-La fonction référentielle (ou denotative) permet d' interprèter des énoncés plus ou moins éloignés du themes central A.

3.- La fonction expressive ( ou émotive ) permet à l'agent d'exprimer le jugement et les sentiments des interlocuteurs vis à vis du theme A.

32 Le discours hystérique est celui par lequel on se plaint d'un manque, qui est représenté par cette barre dans l' S, cette barre qui est l 'objet a. ( R. Abibon.)

33 JF Doucet - Dialogue virtuel et créativité - Compte-rendu d' une année d' enseignement à l' Université Virtuelle : Oslo 2003.

4.- La fonction impressive ( ou conative) qui permet à l' agent d'influencer l' adresse de son discourse.

5.- La fonction phatique où une partie des mots écrits par les interlocuteurs est utilisée pour établir maintenir ou interrompre la communication.

Il est à se demander comment ces 5 fonctions se répartissent en fonction des lieux, des circonstances et des personnes.

2.1.1.2. Circulation d'informations

L'information (en pointillés) est comprise comme la matière première nécessaire à une action dirigée vers un but. Ainsi le montage expérimental envoie aux ordinateurs l'information (Inotropie, lusitropie, flux sanguine etc que les rats leur donnent après injection de produits. On suppose là que l'information est une matière transportant d'un endroit à un autre un sens invariable. Cette notion, on le voit, s'oppose à la conception de l'échange de signes non pas entre des machines mais entre des humains où l'on parle alors de dette symbolique circulant entre les différentes acteurs du laboratoire dont une peut être une organisation signifiante nouvelle, expression métaphorique de la réponse à la question posée.

2.1.1.2.1. Paradoxe du progrès

Les mesures une fois faites, les données sont acheminées par le réseau vers les 2 ordinateurs de calculs, l'un servant de terminal. Elles sont stockées sur un serveur, calculées puis stockées dans une banque de données.

De nombreuses routines apparaissent dans le calcul et une logique de pure efficacité reviendrait à automatiser le calcul routinier, ce qui, un instant a été envisagé. A partir ce ces données, en effet, il serait possible de construire un modèle tel que l' on puisse confronter les mesures expérimentales avec les mesures du modèle. Or, l'automatisation reviendrait à supprimer un poste de travail (pour en créer un autre de toute évidence). Supprimer le poste de travail est en contradiction avec la logique économique. On voit donc là, le pouvoir de l'argent, loin de concourir au progrès en être un inhibiteur.

De plus, au niveau du vécu du créateur, s'il veut vivre à l'équilibre entre son engagement vis-à-vis de sa recherche et le prix accordé par l' institution à cet engagement, c'est-à-dire défendre ses propres intérêts économiques, il ne doit pas effectue une tache


· Qui ne lui est pas demandée (circulation de mots ) dans une société de l' utile.


· Dont le salaire versé est en dessous de la valeur du marché. ( circulation d'argent )

2.1.1.3. Circulation de connaissances : la surrépression.

On sait que dans une organisation, tous les talents ne peuvent être réalisés : une partie des connaissances doit être sacrifiée et ne trouve pas à s'exprimer dans les objectifs fixés par l'organisation (faculté, institut etc). On rencontre en Norvège des activités annexes non pas dans le cadre de l'Université mais à l'écart, souvent dans ce qu' il est convenu d' appeler la « Culture des Maisons de Campagne » C' est ce qu' on peut appeler la répression de certaines connaissances.

De plus, si l'on suppose que chaque chercheur monnaye ses talents dans le cadre de l'institution, il arrive que des connaissances ne soient pas mises à profit dans des buts de recherche de crainte qu'elles ne soient pas suffisamment rémunérées. C'est la sur - répression à laquelle l' Université semble remédier en encouragean économiquement la publication..

2.1.2. Circulation d' argent34

La hiérarchie des salaires ne correspond toutefois pas à la hiérarchie des connaissances, l'accent n'étant pas mis sur ce qui se passe ENTRE les savants mais sur les savants eux-mêmes supposés détenteurs d'un savoir à valeur égale pour tous.

Hormis ces frais de personnel, on distinguera utilement les crédits concernant la maintenance des laboratories de ceux attribués pour un projet et qui sont attribués par un comité d'experts. La direction des recherches s'effectue donc par l'attribution ( ou non ) de crédits pour la gestion de projets. Pour ce qui concerne la créativité, si l'on peut supposer que l'acquisition de connaissances nouvelles (inconnue dans un lieu déterminé) est susceptible d'être monayée et par conséquent dirigée, en revanche la production d'idées nouvelles (exprimées sous forme d'organisations signifiantes nouvelles) avec son aspect aléatoire est peu ou pas susceptible d'être dirigée.

Une différence notable doit être signalée également entre les capitaux investis en fonction d'objectifs « porteurs » dont le retour sur investissements est prévisible et les capitaux à hauts risques dont les conséquences sont à

34 Ce texte » Contribution à l'étude du processus créatif » est lui-même financé sur l'argent versé à la caisse d' allocation chômage, le matériel de rédaction et les locaux étant grâcieusement offerts pendant cette période de chômage.

proprement parler imprévisibles. Cette différence est particulièrement nette en Norvège où la « mentalité du résultat », proche d'un état d'esprit terre-à- terre est largement répandue. Les tentatives de contrôle et de direction des activités de recherche est en contradiction avec les risiques inhérents à la production de connaissances scientifiques « L'argent (ou le temps) qui décide » n'est en rien une garantie de nouveautés pas plus que les contrats de recherche à durée déterminée en rupture avec les lois sur travail n' est pas l' assurance de trouvailles fécondes. Cette attitude de l'administration du travail centré sur les résultats et rétribué « à tâche » s'accorde mal avec les activités de recherche dont le principe est un intérêt personnel pour l' objet de recherche et non pas l' appât du gain. De ce point de vue, dans le processus de recherche innovante, l'accent est à mettre plus sur les centres d'intérêts du chercheur que sur l'opulence économique soit de la Faculté de Médecine soit de certains Laboratoires pharmaceutiques.

Laboratoires pharmaceutiques

Données brutes à analyser

Chercheur

Dispositif expérimental

Administration Centrale Université

Informatique

Centre d' excellence

Administration médecine

Illustration.- 2- Circulation d' argent et de données Argent : ( ) Données ( ) .

2.1.3. Circulation de temps.

Dans un contexte norvégien la conception du temps est celle du temps utile (à l' opposé du temps vécu des pays latins) qui prône une certaine efficacité, préjudiciable à la prise en compte des phénomènes aléatoires. Dans la réalité d'un

laboratoire, il est toutefois judicieux de distinguer un temps vécu individuel du temps des institutions dont les effets (plus lents) se font sentir par les décisions qui se prennent à l'Université.

2.1.4. Circulation des produits (rats et produits de laboratoires)

Deux types de rats (hypertendus et hypotendus) sont livrés pour assurer la reproductibilité des expériences par un départment de l'institut lorsqu'ils arrivent à une certaine maturité de poids. Cette exigence conditionne évidemment le rythme du travail de laboratoire. L'accès à ces rats est d' ailleurs reglementé pour des raisons d'éthiques.

2.2.- Production de connaissances sur le modèle de la fabrique d'Adam Smith35

Argent

Prémisses

Publications

Data

Expérimentation

Ill.- 2.- Production de connaissances sous forme de publications

35 En complément de modèle de manufacture désormais célèbre illustrer la parcellisation du travail, on verra avec profit le film « Babette Gjestebud« ( en fr. Le Festin de Babette ) un film de Gabriel Axel ( 1987 ) inspiré d'une nouvelle de Karen Blixen qui retrace le contact d' une parisienne faisant un «vrai repas « ( à la francaise ) dans une ferme danoise où l'on retrouve les rôles sociaux scandinaves de la production agricole. Cette ferme scandinave d' ailleurs est souvent présentée par les norvégiens comme un âge d' or où la vie sociale était parfaitement organisée.

2.-2-1.- La division du travail de recherche :

Le rapport entre capital et travail, on le sait, distingue la coopération qui accroit l'efficacité du travail en oeuvrant dans un but commun et la parcellisation qui consiste à diviser un même métier en plusieurs opérations distinctes de telle sorte que l'ouvrier parcellaire n'en réalise qu'une partie. La production est alors celle d'un ouvier collectif, (somme d'ouvriers parcellaires) associé au capital dans les institutions siège de cette forme particulière de coopération.

Dans la réalité du laboratoire, on retrouve la parcellisation des tâches du préposé au nettoyage aux professeurs en passant par les assistants techniques. La valorisation des tâches est marquée par le salaire dont la hiérarchie correspond à celle des fonctions. De ce fait, on enlève aux tâches considérées comme subalterne stoute valeur alors que ces obligations pourraient très bien favoriser l'éclosion d' idées nouvelles dans la mesure où elles introduisent dans les tâches plus gratifiantes une variation génératrice de stimulations intellectuelles.

A long et moyen terme, d' autre part, des récompenses sont accordées aux chercheurs sous forme de prix ou de distinctions honorifiques de telle sorte que la connaissance soit associée à la reconnaissance.

De Janvier 2005 à Juin 2007 seules 3 personnes ont travaillé par intermittence sur l'hypertension artérielle de telle sorte que la répartition des tâches était des plus élémentaires, les premisses étant posées par le professeur.

2.2. Le dispositif expérimental

Le dispositif expérimental de mesure de la tension artérielle est obenu par géométrisation, isolant par ce procédé quelques paramètres jugés importants, comme la lusitropie, l'inotropie, le nombre de battements par minute et le volume sanguin pulsé au cours du battement pour l'étude de la circulation sanguine chez le rat. Plusieurs milliers de rats36 de deux types, hypertendus et non hypertendus ont ainsi reçus dans le dispositif experimental ci-dessous 1, 2 ou 3 injections dont on mesure alors les effets à la sortie des canules. Rappelons que depuis R. Bacon37, les preuves expérimentales, plus que les arguments donnent leur valeur épistémologique aux résultats expérimentaux.

36 Le présupposé sous-jacent est ici évident que les données obtenues sur certains rats permettent mieux que sur d' autres animaux une extrapolation aux êtres humains. Les rats d' autre part peuvent ne pas survivre à l'expérience ce qui augmente l'éventail des expériences.

37 Méthode de R. Bacon (12 14-1294) dont on retiendra les citations : « l' homme qui apprend doit croire, celui qui sait doit examiner » et « On peut, sur les vérités de fait, se passer de la démonstration si l' on sait se servir de l' expérience »

Illustration.- 3-Dispositif expérimental de mesure de la tension arterielle chez les rats.

paramètre

Idée directrice

Hypothèse

=

Objet de recherche

Illustration.- 4-Géométrisation du dispositif expérimental

Si l'on s' en tient à la terminologie lacanienne du Réel, de l' Imaginaire et du Symbolique, le savant peut couvrir le Réel de ses lois ou des relation entre ses aspects. Il reste cependant tributaire du Symbolique de telle sorte que ses découvertes sont une imposition sur le Réel d'éléments du Symbolique et non pas des éléments qui préexisteraient à toute réalité.

Dans le cas présent, les rats auxquels certains paramètres ont été attribués pour découvrir les lois de leurs variations en fonction des substances injectées ne sont que le support d'attribution de ces paramètres : ces derniers ne pré-existent pas aux rats qu'ils caractérisent en l'occurrence dans le dispositif expérimental38. Les rats

38 Voir dialogue avec Richard Abibon du 13 Mai 2007-

représentant une certaine réalité muette à étudier ne livrent donc les secrets qu'on veut bien leur donner. Ces paramètres une fois choisis, le savant a l'intuition d'une corrélation entre les substances injectées et les paramètres caractérisant les rats dont l' expérimentation viendra confirmer ou infirmier la validité.

Paramètre = p1

Paramètre = p2

Paramètre = pn

Idée directrice

Hypothèse

=

Paramètre = p3

Objet de recherche

Illustration.- 5-Mesure des valeurs expérimentales p1, p2 ....pn

Paramètre

Paramètre p1

Paramètre p2

Paramètre p3 ...

Paramètre pn

Valeurs

p1

P2

p3 ...

pn

Tableau 3 .- Extraction des valeurs des paramètres

Paramètre

Paramètre p1

Paramètre p2

Paramètre p3 ...

Paramètre pn

Valeurs

p1

P2

p3 ...

pn

Tableau 4.- Découverte de corrélations entre les paramètres selon les substances injectées

3.- Le sujet créateur.

L'imagination n'intervient dans le travail du laboratoire que lorsque certaines routines ou idées admises ne sont plus satisfaisantes. Hormis ces étatsde crise, les procédés rationnels de recherche39 peu exigeants en ressources de tous ordres suffisent habituellement pour les besoins quotidiens. L'utilisation de l'imagination, cependant, contrairement aux routines et idées admises attachées à des locaux et à des appareillages déterminés, n'est pas propre à un lieu particulier. Telle idée viendra un soir au moment où le chercheur s'y attend le moins. Telle autre idée vient au contraire d'un épisode aléatoire40 se déroulant dans le laboratoire lui-même. 41C'est dire que, si les routines et les appareillages sont liés au laboratoire, le processus créatif lui-même est lié au chercheur et lui est spécifique.

Pour définir une réalité nouvelle, le sujet créateur cessant de combiner des signes existants, fait usage de symboles42 qui, au sens étymologique du terme, est un pont établi entre 2 chercheurs à l'aide du langage sur le sens à donner à une réalité commune. Les exemples sont nombreux de symboles ou de concepts aujourd'hui disparus qui ont fait l'unanimité parmi les chercheurs d'autrefois. Ainsi, le chimiste Lavoisier43 pensait que tous les corps sont immergés dans le « calorique », notion qui, de nos jours, ne figure plus dans les fondements de la thermodynamique. C'est à ce genre de consensus que l'intervention de l'imagination aboutit, consensus entre 2 chercheurs d' abord puis admis et, au besoin, réfuté par la communauté scientifique..

39 En particulier d' information sur les idées généralement admises.

40 L'épisode aléatoire le plus connu est celui de la découverte de la penicilline par A. Flemming qui, par hasard, découvre après ses recherches sur le lysozyme le premier antibiotique sur des boîtes de Pétri qu'il devait laver à la place de son laborantin parti en vacances.

41 Dans certaines entreprises cette délocalisation des processus de recherhe sont encore plus poussés : une petite unité un peu à l'écart, presque secrète se charge de l' innovation de la naissance des idées à leur réalisation.

42 Dans l' Antiquité, deux adeptes d' une même secte s'échangeaient un teissère, petite plaque d' argile qu'ils cassaient lorsqu'ils se quittaient. La concordance des cassures assuraient à la prochaine rencontre que les détenteurs du teissère appartenait à la même secte ( partageaient le même point de vue sur la réalité )

43 « Nous savons, en général, que tous les corps de la nature sont plongés dans le calorique, qu'ils en sont environnés, pénétrés de toutes parts, et qu'il remplit tous les intervalles que laissent entre elles leurs molécules ; que dans certains cas le calorique se fixe dans les corps, de manière même à constituer leurs parties solides, mais que le plus souvent il en écarte les molécules, il exerce sur elles une force répulsive, et que c'est de son action ou de son accumulation plus ou moins grande que dépend le passage des corps de l'état solide à l'état liquide, de l'état liquide à l'état aériforme ».

Antoine-Laurent de Lavoisier

Le passage du sensible à l'intelligible par l'intermédiaire de symboles (ou concepts) nouveaux est donc affaire de paroles44, le « moi » des 2 chercheurs étant réduit à « un précipité d'identification45 »

Illustration.- 6.- Dialogue entre 2 chercheurs

L'émergence, à partir des paroles échangées d'organisations signifiantes nouvelles est dûe au passage de l'Imaginaire au Symbolique lors d' une ré-écriture46 de la réalité, le Réel47 restant l' impensé. On appellera « Je » cette instance du sujet

44 « L'homme a pu entrer dans l'ordre symbolique, comme sujet, par la voie d'une béance spécifique de sa relation imaginaire à son semblable. » J. Lacan. Écrits.Le Seuil, Paris, 1966. p 53.

45 Voir J. Lacan. Ces identifications, pour un individu donné, sont ce qu'il a retenu des gens qui ont compté pour lui.

46 Je remercie C. G. pour sa clarification sur ce point.

47 Ce Réel impensable est à rapprocher du Tao qui, lui aussi, est irreprésentable et dont on retient les vers :

La Voie dont on parle

n' est pas la Voie suprème

Concepts et noms sont des illusions

Toute réalité émane du sans-nom Le nom est ce qui divise

créateur capable de réorganisations symboliques, instance distincte du « moi » et de l' « ego » , reliquat qui s'oppose, chez les individus, à passer des conventions nouvelles en maintenant, pour différentes raisons, en particulier d'équilibre, les conventions déjà admises.

La question reste alors dans un laboratoire de savoir où et quand l'instance appelée « Je » dont le désir s'exprime dans le fil de son discours par des métonymies, devient apte à reformuler les représentations de la réalité (Imaginaire) par les éléments du langage (Symbolique). Sur l'illustration suivante, on voit en particulier qu'un chercheur dont la conscience est centrée sur son « ego » fait de son refus à passer des conventions nouvelles sur la réalité reste figé à une perception de sa réalité comme si elle était « la Réalité » (immuable). On voit également que l'instance appelée « moi » utilise les éléments du Symbolique pour exprimer ceux de l' Imaginaire sans pour autant reformuler .la réalité.. Quant à des éléments forclos du Symbolique, dans l'impossibilité d'être intériorisés48 par le chercheur, réapparaissent dans le Réel sous forme de ce que la psychiatrie appelle hallucinations.

Illustration.- 7.- « Ego », « Moi » et « Je » face à la réalité.

En donnant à toute chose une identité

48 Je remercie RA pour sa clarification sur ce point

A supposer que le chercheur soit concerné par la question posée et donc soit à même de fournir tout ou partie de la réponse, l'institution, justement parce qu'elle est la concrétisation d'anciennes routines, peut embarasser le chercheur au point de lui ôter toute possibilité de voir la réalité avec des yeux neufs. Les routines, dans ce contexte, sont aux institutions ce que les mots sont aux sujets, à la fois les inhibiteurs et catalysateurs de visions nouvelles sur la réalité.

Supposer que la réalité habituelle peut être autre, en particulier peut se revèler mieux connue qu'elle ne l' est, c' est du même coup adhérer à la croyance que les forces de constructions49 et de destructions50. sont à l'oeuvre chez les êtres humains et que la victoire revient nécessairement aux forces de construction origine du monde actuel. Sous cet aspect, la vie d'un laboratoire innovant est nécessairement un équilibre entre le libre jeu des forces menant au chaos et de celles établissant un nouvel ordre.

3.1. Les 4 phases du processus créatif. ( Rappels )

Dès 1926 G. Wallas51 propose un modèle général en 4 phases appliquable à chaque chercheur en 4 phases :

3.1.1.- Préparation : la phase de préparation qui peut durer des heures, des mois voire des années définit le problème, le besoin ou le désir, rassemble toutes informations utiles et statue sur la validité de la réponse. La phase de préparation se déroule avant tout dans ce que J. Lacan appelle l'ordre Symbolique constitué par le langage52.

3.1.2.- Incubation : la phase d'incubation prend ses distances vis à vis du problème ou de la question posée et se laisse « travailler par la création » pendant des heures, des jours voire des années comme la phase de préparation. Cette phase fait appel à des ressources inconscientes décrites par des auteurs comme S. Freud et H. Poincaré. L'incubation est la phase où intervient les 3 ordres lacaniens du Réel53, du Symbolique et du Réel qui, lui, est impensable et impossible à symboliser.

49 Ce jeu des forces destructrices et constructrices se retrouvent dans différentes traditions en particulier celle de Shiva Nataraja, dieu hindou qui danse à l' origine du cosmos. Dans une de ses mains, il tient le Damaru petit tambour sacré assistant à la création et de l' autre une flamme président à sa destruction.

50 Voir : S. Spielrein « La destruction comme cause du devenir » in Entre Freud et Jung, Editions Aubier, Paris 1981. Ce texte est cité par Freud comme l'une des sources de ses propres réflexions sur la pulsion de mort.

51 Le nombre de phases du processus créatif varie d' un auteur à l'autre : le modèle de Roger von Oech, par exemple, comporte 7 phases,

52 J. Lacan. Écrits Le Seuil, Paris, 1966. p 445.

53 J. Lacan. Radiophonie. Scilicet, 2-3:55-99, 1970. p 69

Comme dans le rêve, les éléments constitutifs de la création ne suivent pas la logique sous jacente aux résultats qui n'en sont que la façade. Derrière elle, la plus rationnelle des découvertes scientifiques cache toute une série de croyances54 impossibles à fonder55 rationnellement.

Objet de recherche

paramètre

Idée directrice
=
Hypothèse

Tableau 5.- Intuition de chaînes causales de l'hypertension artérielle

54 En premier lieu, les convictions religieuses.

55 Les arguments de Copernic en faveur de la sphère comme forme du monde ne sont pas du tout rationnels . « Tout d'abord, il nous faut remarquer que le monde est sphérique, soit parce que cette forme est la plus parfaite de toutes, totalité n'ayant besoin d'aucune jointure ; soit parce qu'elle est la forme ayant la capacité la plus grande, qui convient le mieux à tout contenir et tout embrasser ». Quant à la place centrale du Soleil, elle n'est pas déterminée par des impératifs d'ordre mécanique mais par une croyance relevant de la tradition platonicienne: de par sa perfection, parce qu'il donne au monde sa lumière, le Soleil doit être en position centrale; «le Soleil assis sur le trône royal dirige la ronde de la famille des astres», écrit Copernic dans le De revolutionibus.

3.1.3.- Illumination .- La phase d'illumination56 voit émerger les idées à l' origine de la réponse créative. Ces idées qui s' accompagnent lors de leurs expression d'une jubilation esthétique57 peuvent faire partie d'un tout, ou le tout lui-même. Au contraire des autres phases, l' illumination est une phase brève comptées en minutes ou, au plus en heures. Les 3 ordres lacaniens du Réel, du Symbolique et de l' Imaginaire concourent à faire exprimer au « Je » des organisations signifiantes nouvelles.

Illustration.- 8.- Le "Je" créateur lors de la phase d'illumination

La forme la plus élémentaire de solution exprimée lors de la phase d'illumination est l'analogie qui est « la règle de trois de l'innovation ». Dans le cas de l'hypertension artérielle, l'analogie la plus utilisée est celle du coeur analogue à une pompe aspirante et refoulante.

56 L'illumination est le plus souvent associée à « Eurêka » le cri qu'aurait poussé Archimède en sortant de son bain au moment de découvrir la solution au problème posé Hiero II, roi de Syracus. Censé déceler la fraude d'un orfèvre sur une couronne d'or ( auquel l' orfèvre aurait substitué une certaine quantité d' argent ), Archimède eut l'idée de mettre un poids d'or pur égal à celui de la couronne dans un récipient rempli d'eau jusqu'à ras bord. Ensuite l'or pur était enlevé et la couronne suspecte mise à sa place. Un ajout d'argent plus lèger que l'or devait accroitre le volume de la couronne et provoquer un débordement du récipient.

57 Oscillation métaphoro-métonymique de G. Rosolato. Essai sur le Symbolique, Gallimard Paris 1969.

Ill.- 3.-L' appareil circulatoire assimilé à une pompe ( le coeur ) et à une vanne ( contraction des artérioles )

Mais d'autres analogies sont envisageables. En particulier, la complexité du système de régulation nerveux cardiaque fait penser à une approche systèmique58 qui redéfinit la causalité en interraction circulaire. Le coeur peut, également, être comparé à une écluse selon le schéma suivant :

Ill.- 4.- Fonctionnement d' une écluse (Phase 1)

58 Ludwig von Bertalanffy, biologiste, a présenté, dès 1937, le concept de "système ouvert" qui évoluera petit à petit vers la "théorie générale des systèmes" («General System Theory).

Le schéma correspond à l'écluse pour le coeur est présenté dans le schèma suivant.

Ill.- 5.- Le fonctionnement cardiaque analogue à une écluse

3.1.3.1. Depuis Aristote, on distingue plus généralement, deux sortes d'analogies : l' analogie d'attribution et l'analogie de proportionalité. :

Dans la première, ( analogie d' attribution ) un lien direct est affirmé entre plusieurs termes, les analogates59. Pour l' un des termes, la propriété est attendue tandis que pour les autres cette propriété est affirmée par extension.

Dans le second type d'analogie ( de proportionalité), le rapport analogique est calqué sur la quatrième proportionnelle : dans l'analogie (a,b,c,x) l'analogue x est à c ce que a est à b. L'analogie de forme ou de fonction est à l'origine du transfert de technologie. Dans l'analogie de la pompe aspirante et refoulante , on peut écire :

Le sang est au coeur ce que l' eau est à la pompe.

Pour ce qui concerne l' analogie de l'écluse , on écrira :

Le sang est au coeur ce que l' eau est à l'écluse.

Dans les 2 cas le « tertium comparationis » est le fluide ( eau, ou sang ) qui permet de passer du coeur à la pompe aspirante et refoulante ou à l'écluse. L'analogie de la circulation sanguine avec la circulation automobile jouerait-elle sur l'ambivalence du terme artères qui désignent à la fois des voies de circulations et des vaisseaux sanguins.

59 Ou analogues.

3.1.4.- Vérification : la phase de vérification, c' est la phase finale du processus où les réponses à la question posée sont confrontées aux critères de validité de la phase de préparation.

Ce modèle, d' autre part, suppose lors de son déroulement qu'une réponse ( ou solution ), en partie à l' aide de processus inconscients, puisse-t-être donnée et évaluée selon des critères énoncés à l' avance.

Le bon déroulement du processus permet d'exprimer une grande variété de « pistes » de recherche avant que la ou les réponses convenables soient choisies dans l' ensemble des idées émises. Quelques phases peuvent être cependant parcourues sans problème spécifique : on a à faire alors à une « solution qui cherche son problème ». Ces dernières sont alors un cas particulier des faits d'observation de la recherche qui « cherche sans trouver et trouve ce qu'elle ne recherche pas »

3.1.1. Observation du laboratoire

Bien longtemps la créativité, caractéristique de l'esprit humain est restée le privilège des arts mais si l'on adopte les critéres de Rogers (1954) des esprits créatifs :

1.- l'ouverture d' esprit curieux à l'expérience nouvelle sans exigence de cohérence ni de certitudes et tolérance à l' inconnu, l' ambigü et l'incertainune source interne d'évaluation

2.- l'autonomie intellectuelle indépendante de la recherche d' une approbation

3.- l'aptitude à jouer avec les concepts propre à la fluidité et la flexibilité conceptuelles.

On remarquera que ces caractéristiques ne sont pas l'apanage des milieux artistiques mais traversent métiers et classes sociales. D'ailleurs bien des savants ont eu des préoccupations esthétiques si l' on ne présuppose pas que, comme la plupart, ils essaient d'éviter du déplaisir en recherchant le plaisir (souvent, de leur dire même, leur seule motivation )!

3.1.2. Les difficultés liées à la Science triomphante.

La faible fécondité des laboratoires tient entre autre à la confusion entre :

.- la présentation des résultats selon une logique parfaite et rigoureuse de la branche de connaissance considérée, la valeur épistémologique des résultats étant estimée « par les pairs » ou les « referee » des revues. Ainsi le raisonnement qui aboutit à de nouvelles recherches sur le SIDA semble logique : L'Adn de notre ancêtre le plus proche, publie60 une revue scientifique, comporte la trace de 130 copies d'un virus61 aujourd'hui éteint. C'est un retrovirus qui aurait touché les chimpanzés et d'autres primats il y a environ 4 millions d' années. Mais en se penchant sur notre propre génome, les chercheurs n'ont pas identifié de marque de ce virus. Ils ont donc suspecté la présence d'un facteur antiviral présent chez l'homme. Une protéïne62 protège, présente chez les primates, contre les rétrovirus et semble avoir perdu cette propriété en s'adaptant pour lutter contre ce virus éteint, la protéine aurait donc perdu de ses capacités à protéger l'organisme contre le virus du SIDA. Si le raisonnement est parfaitement logique, le cheminement qui aboutit à porter son attention vers tel ou tel composé ne l' est pas. Bien des protéïnes ont été examinées avant que le mécanisme ainsi découvert ait pu être formulé.

et

-le processus qui mène à ces résultats.

Cette confusion tend à faire croire que la subjectivité du savant n'intervient pas dans le processus de recherche alors que l'objectivité scientifique n'est, en fait, que le partage de toutes sortes de subjectivités.

Peut-être cette confusion est-elle l'origine d'une certaine dévalorisation de la subjectivité et des croyances (voir le statut épistémologique de l'analogie) qui leur interdit d'entrer en ligne de compte et ainsi privilégie les aspects rationnels au détriment des éléments irrationels de la recherche pourtant nécessaires.

Cette réduction au silence de la subjectivité s'accompagne d'une disparition des doutes du champ de la recherche pourtant partie intégrante du processus et de leur expression lors de la recherche de telle sorte que se trouve amplifiée l'impression que la science produit des certitudes absolues voire la « réalité vraie » elle-même par simple déduction rationnelle.

60 Ancient disease resistance made us vulnerable to HIV.- http://www.nature.com/news/2007/070618/full/070618-15.html

61 Nommé PtERV1

62 Nommée TRIMa5

3.2. Implication63 du savant dans sa recherche

Pourtant d'autres branches de connaissance que la physiologie médicale ou la créativité tiennent compte du savant dans le processus de recherche. En physique quantique64, en particulier, on suppose que la présence d'un observateur a des conséquences sur les résultats de la mesure. Or le processus créatif fait osciller le savant entre 2 degrés d'implication :

- un état de conscience satisfait proche de la complétude narcissique noté A lorsque sa perception intérieure n'est pas très différente de la réalité extérieure ordinaire.

- Un état de conscience de profonde insatisfaction notée Ë où la différence entre perception intérieure et extérieure induisent le réarrangement symbolique.

La réalité extérieure, avec nos notations, oscille également entre 2 positions - Un objet ayant apporté pleine satisfaction noté A

- Un objet imparfait Ë auquel « il manque quelque chose » ( la barre médiane pour s'écrire A )

Ainsi, lors du processus créatif, le savant passe alternativement d' un état d'insatisfaction à un état de satisfaction alors que concommitamment la réalité extérieure est percue comme imparfaite puis parfaite, l' objet nouveau venant rétablir l' équilibre65 du sujet et une perception satisfaisante de l' objet.

 

Objet

Sujet

A

Ë

Ë

A

63 .- On doit à J. Ladrière63 la distinction entre les implications du savant, du philosophe et du religieux dans l' entreprise de connaissance. Si le savant est supposé rester objectif vis-à-vis de la réalité qu'il interroge, le philosophe prend parti dans l'interprétation qu' il en donne alors que le religieux la couvre de ces explications. On voit l'alternance de ces 3 rôles dans la processus créatif : chercher des explications certes réfutables mais considérées comme vraies parce qu'adéquates à la réalité expliquée implique une certaine philosophie ne serait-ce que par la conception d'une certaine hypothèse. Mais le savant est tout comme les autres humains soumis aux contraintes du langage et de la croyance63. En particulier, il a construit avec d' autres à l' aide du langage un consensus sur la réalité dont il cherche les lois ou des relations entre les aspects

64 .- Voir en particulier N. Bohr, Quantum mechanics and Physics Reality, Nature, 136, 1025.

65 En termes savants : l' homéostase de recherche du plaisir et d'évitement du déplaisir.

Selon le point de vue adopté faisant intervenir l'inconscient, l'objet de la recherche est décentré par rapport à l'objet ayant apporté antérieurement satisfaction sans que la relation puisse être entièrement explicitée. Certains liens entre les éléments biographiques des savants66 et le thème de la recherche peuvent être établis. Il en va de même avec l'expression de certains symptômes chez les chercheurs liés à l'hypertension artérielle. C'est dire que le thème de la recherche est liée aux signifiants fondamentaux des chercheurs. L'objectivité scientifique reste cependant un idéal pour la production d'énoncés valides indépendants de l'expérimentateur et de l'expérimentation67 mais ne doit pas laisser dans l'ombre la subjectivité du savant.

3.2.1. Introduction à la notion de patrimoine génésique.

Plus généralement, on suppose que des « messsages muets68 » sont émis lors de l'éducation et la formation des savants tels qu' ils constituent à l' âge adulte le « patrimoine génésique » des chercheurs. Ce terme est calqué sur le patrimoine génétique tant ces « messages muets » peuvent être comparés à des gênes qui détermine le développement biologique de leurs porteurs. Correspondant à ces messages inconscients dont on peut repèrer les effets, le patrimoine génésique est particulièrement visible dans les dynasties de savants. Ainsi, le patrimoine génésique69 donne à des génerations successives les aptitudes requises propre au

66 Comme la thèse soutenue en 1930 à Paris par V. E . Doucet sur l'hydrodynamique des pompes centrifuges. thème voisin de l' analogie du coeur avec une pompe aspirante et refoulante

67 A ce titre, le processus de recherche est purement humain dans la mesure les systèmes langagiers fréquents dans le règne animal sont liés aux situation pour lesquelles ils sont crée.

68 B. Muldworf, Le divan et le prolétaire, Messidor / Editions sociales 1986 220 p

69 On peut citer d'autres dynasties comme celle :

· des Cassini à l'observatoire de Paris,

· des Piccard qui volent à haute altitude et plonge à des profondeurs abyssales.

· Des Kornberg ayant obtenu des prix Nobel dans des domaines voisin : Roger Kornberg, en Chimie (2006) alors qu' Arthur Kornberg obtenait celui de Médecine (1959) sur des domaines de recherche voisin, le père en génétique et le fils en chimie moléculaire de la transcription de gènes.

· la famille Curie dont Pierre et Marie recoivent le prix en physique (1903) avec H. Becquerel pour des travaux sur la radioactivité, puis Marie en 1911 celui de Chimie pour sa découverte du radium et du polonium. Sa fille Irène recevra en 1935 le prix Nobel de chimie avec son époux Joliot .

· Père et fils ont également reçu le prix comme William Henry et William Laurence Bragg en physique en 1915.

· Le fils après le père comme dans le cas des Thompson où Joseph reçoit le prix de physique en 1906 tandis que George, son fils le reçoit en 1937 dans la même discipline.

processus créatif. Le goût de la physique, par exemple, est transmis chez les Becquerels sur 4 générations. En particulier le phénomène de la luminescence ( phosphoressence, luminescence ) intéresse les Becquerel de père en fils.

Dans le cas de C. von Linné, le goût pour la botanique semble lui avoir été transmis par son père. Quelques fois la paternité d'une oeuvre est seulement symbolique lorsque le père spirituel diffère des parents biologiques du créateur. Quelques idées enfin se transmettent de savants à savants un peu à la manière d'un patrimoine génésique 70

3.3. Autres facteurs intervenant probablement dans le processus créatif.

D'autres facteurs supposés intervenir dans le cours du processus créatif mériteraient un développement plus conséquent :

.- le confident du créateur : dans bon nombre de cas d'innovation, le sujet créateur à une relation privilégiée avec un confident . Ce fut le cas de Vincent Van Gogh avec sont frère Théo, de Freud avec Fliees ou de Montaigne avec la Boetie. Malheureusement, dans le laboratoire concerné, les différents acteurs n' ont pas d' eux-même et des autres une connaissance suffisante pour se prononcer.

- L' intervention du hasard qui revient à envisager les situations créatives comme un ensemble de circulations fluides et non pas figées de telle sorte que le hasard puisse manifester son effet. Là encore, l'importance du hasard est observable si l' accent n' est pas mis exclusivement sur l' efficacité des travaux et l' obtention de résultats.

· De la même manière, Niels Bohr est lauréat en physique en 1922 avant que son fils Aage le soit également en 1975.

· Hans von Euler est lauréat de chimie en 1929 alors que son fils Ulf le sera en médecine en 1970.

· Karl Siegbahn est en 1924 lauréat du prix de physique comme son fils Kai en 1981.

70 Ainsi O Römer ( 1644-1710) reprend une idée de Cassini sur les éclipses Io de Jupiter permettant de mesurer la vitesse de la lumière et annonce à l' Academie en septembre 1676 que l'éclipse du premier satellit prévue le 9 novembre suivant se produirait avec exactement 10 minutes de retard .

4.- Création en tant que produit

C' est à une analogie qu' est due l'utilisation des données expérimentales à des fins de simulations. Au cours de la constitution des premières banques de données, on constatait que les expérimentateurs fournissant les données à mettre en banque négligeaient bien souvent l' organisation des données elles-mêmes ( redondance, incohérence des codes etc ) alors que les concepteurs de banques de données manquaient le plus souvent de données expérimentales dont la valeur épistémologiques soit suffisante pour justifier un investissement informatique important. Dans ce cas, l'analogie s'écrit :

Les données de physiologie cardiaque sont aux modèles de simulation ce que les données expérimentales étaient au banque de données.

Laboratoires pharmaceutiques

Données brutes à analyser

Chercheur

Dispositif expérimental

5

1

Administration Centrale

Université

2

Informatique

4

3

Centre d' excellence

Administration médecine

Ill 1.- Chronologie du nouveau cheminement.

1.- Dans un premier temps, le prix et le temps passé à la recherche apparait disproportionné par rapport aux résultats de recherche. Evocation d' une situation antérieure où un manipulateur chevroné permet la constitution d' une banque de ses données expérimentales.

2. Il existe, dans un domaine voisin des banques de données, un département de simulation très actif à l'Institut d' Informatique.

3.-Proposition d'étude de faisabilité d'un simulateur à l'administration centrale de l' Université par analogie avec une étude de faisabilité faite pour une banque de données. Visite des autorités administratives responsables du financement. Discussion virtuelle avec un groupe parisien intéressé par la recherche.

5.- Intervention à l' Académie des Sciences du constructeur de simulateurs de l' Institut d' Informatique. Le chercheur ou manipulateur de physiologie se convainc qu' un simulateur peut-être utilisateur de données.

6.- Réunion à l' Institut de Physiologie des principaux intéressés ( Informatique, Physiologie, Physique ) dont la volonté de « se comprendre71 » est évidente.

Programme X

Expérimentation

Simulering

Programme III

Programme II

Programme I

Ill.- 6.-Installation de traitement des données en mars 2007 le projet ( en pointillé ...) et traits pleins ( état actuel )

La nouvelle utilisation des données expérimentales est, en fait, une solution « a minima » tenant compte de l'incapacité des unités de recherche sous la taille critique de trouver des résultats significatifs. Elle offre également la possibilité de

71 Au contraire des chercheurs mentionnés par D. Lestel à propos de l'éthologie des fourmis, chercheurs qui parlaient souvent de leur relation aux fourmis, objet de leur étude et qui étaient parfaitement conscients que, sur le thème de recherche, du fait de la pluridisciplinarité des équipes de recherches, personne ne savait tout.

confronter les données expérimentales avec les données fournies par le simulateur pour y détecter les anomalies souvent si fécondes.

Une autre conséquence probable de cette manière de travailler est l'ouverture des chercheurs d'un aspect purement physiologique à d'autres aspects comme :

· celui de la génétique. Dès 2005 des équipes de recherche ont abordé le problème de l'hypertension d'un tout autre point de vue en cartographiant les indicateurs d'hypertension sur les chromosomes de familles dont la généalogie est connue depuis plusieurs siècles.

· Celui des effets secondaires de l'isradipine, commercialisée notamment pour le traitement de l'hypertension artérielle, qui "rajeunit" les vieilles cellules à dopamine, celles dont la mort cause la maladie, selon les auteurs72.

La mise en place de ce dispositif pourrait favoriser une stratégie de recherche 73« Comme si le problème était résolu ... » qui se formule ainsi : « Et si la cause de l' hypertension était ... » . Formulant le problème de l'hypertension artérielle à l'aide d' une réponse possible, ils peuvent donner un sens à cette hypothèse même si, a priori, cette formulation n' a pas de contenu manifeste. Elle pourrait seulement en acquérir si l'équipe de recherche est attentive aux évènements du laboratoire puisque ce sont eux, qui traduits en mots - et pas seulement les résultats chiffrés des mesures - sont porteurs de sens et donc au moins d'un embryon74 de réponse75.

72 Professeur James Surmeier (Chicago)

73 Je remercie R. A. de m' avoir rappelé que le contenu de la lettre volée est sans importance vis-à-vis de l' enjeu qui se joue dans l'intrigue de la nouvelle d' E. Poe.

74

Un pidgin se définit linguistiquement selon un certain nombre de critères définis qui s ont pour l'essentiel: (pour des détails sur les pidgins par exemple voir Sebba (1997 : 37 -66).

1. l'absence de locuteurs natifs. Les usagers d'un pidgin sont en général des per sonnes issues de communautés linguistiques différentes qui pour une circon stanc spécifique utilise un langage, un code qui leur est commun pour la circ onstance définie.

2. le résultat d'un contact entre deux ou plusieurs langues

3. le caractère purement conventionnel

4. l'absence de compréhension avec la ou les langues sources qui ont donné nai ssance au pidgin

5. l'existence d'une grammaire particulière plus ou moins différente de celle de s langues d'origine

6. la grammaire est plus simple que celle des langues sources

7. le lexique est majoritairement issu d'une des langues source appelée lexifier

8. la vitalité est aléatoire, dépendant de la durée et de l'intensité du contact entr e les groupes constituants

9. mode de transmission par apprentissage entre adultes

Diallo Abdourahmane (Francfort) LE KAKKA?E ENTRE PIDGIN ET LANGUE MIN ORITAIRE

75 Elle apparait alors comme un idiome né de la production par l'équipe de recherche d' un idiolecte commun au département de physiologie.






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"Le don sans la technique n'est qu'une maladie"