Quels sont les obstacles à la professionnalisation d'un club de basket-ball amateur ?( Télécharger le fichier original )par Nicolas MATHIEU Université Paris XII - Licence STAPS Management du Sport 2008 |
2.3. La comparaison avec les autres sports collectifsPartant du principe que les sports collectifs vivent dans le même environnement géographique et démographique, nous pourrions penser que le processus de professionnalisation est le même. Il suffirait donc aux dirigeants des clubs de basket-ball amateur de reconduire les schémas appliqués par les clubs professionnels de football, qui sont la référence en la matière. Hors il est clair que les sports collectifs présentent trop de différence en terme de nombre de licenciés, de potentiel médiatique, d'environnement économique pour que nous puissions imaginer reproduire sur le basket-ball les recettes employées par le football ou le rugby. D'ailleurs, pour Emmanuel BAYLE20(*), le football, le basket et le rugby sont dans des étapes différentes du processus de professionnalisation. Le football constitue le modèle pilote, le basket a été professionnalisé ensuite mais doit faire face à la concurrence de la NBA21(*). Le rugby lui termine sa métamorphose en s'adaptant aux mutations culturelles, économiques et organisationnelles. La première donnée qui permet de ne pas pouvoir comparer le basket avec le football, c'est la donnée économique. Les clubs de ces différents sports ne jouissent pas de la même manne financière, que ce soit en terme de droit TV ou de recettes guichets. D'après une étude de Jean-François BOURG22(*), le budget moyen d'un club de football en Ligue 1 est 6 fois supérieur pour un même niveau de compétition à celui d'un club de rugby, 10 fois supérieur à celui d'un club de basket, 31x pour le club de handball et 38 fois par rapport au club de volley. Des chiffres qui permettent de mieux situer le gouffre financier qui sépare le sport roi qu'est le football et les autres sports collectifs. Toujours selon J-F Bourg l'exposition médiatique en 2000 laissait apparaître le même ordre avec : football 27,5% du temps d'antenne sportif (740h), rugby (246h) et le basket avec 201h. Ce chiffre, par contre, ne tient pas compte de la compétition. Car, si le temps d'antenne sportif était ramené uniquement aux compétitions nationales ou aux compétitions européennes jouées par les équipes françaises, le chiffre du basket serait nettement plus faible, l'exposition de la NBA23(*) sur Canal + y étant pour beaucoup dans ces 201 heures. En effet, l'une des particularités du basket-ball est qu'elle doit faire face à la concurrence d'un système américain. Une concurrence qui l'oblige à vivre dans l'ombre et qui ne lui permet pas de s'offrir une réelle renommée. Enfin pour mettre encore en perspective la place de troisième sport collectif français qu'occupe le basket-ball (même si en nombre de licenciés elle occupe le deuxième rang) voici le tableau de l'évolution des budgets moyen des clubs pros.
Source Jean-François BOURG - Financement des clubs sportifs et stratégie des collectivités territoriales On y constate qu'en 1998/99 la Pro A était la deuxième compétition en terme de budget en France mais que le rugby et l'augmentation des droits télés Canal + lui ont permis de quasiment doubler son budget tandis que le basket stagnait. Le basket reste néanmoins loin devant le handball et le volley qui sont eux aussi éloignés des écrans des chaînes hertziennes. En ce qui concerne les recettes guichets, le basket c'est un peu plus de 3.000 spectateurs en moyenne au début des années 80 quand le football en compte 23.000. Et en 1997, le football (33%) et le rugby (28,4%) représentent plus de la moitié de toutes les recettes de sponsorisme. Pour terminer la comparaison, l'INSEE24(*) nous prouve qu'en 1999, le basket était toujours 2e sport collectif en terme de nombre de licenciés et de nombres de clubs.
Source Jean-François BOURG - Financement des clubs sportifs et stratégie des collectivités territoriales Toutes ces données permettent de valider mon hypothèse de départ, le basket n'évolue pas dans la même sphère économique que le football et même le rugby. Le processus de professionnalisation sera donc différent. Le basket-ball ne pourra pas reproduire les schémas du football, ni même celui du rugby. Il faudra l'adapter en tenant compte de sa présence médiatique, de ses rentrées financières et de son nombre de licenciés. De plus, le basket-ball est le seul sport à devoir être concurrencés par son « jumeau » américain qu'est la NBA. Cette NBA qui cristallise l'intérêt médiatique de la pratique ainsi que ceux de ses licenciés.
Par contre, il reste médiatiquement plus intéressant que le volley et le hand et possède une population sportive très intéressante. Avec quasiment plus du double de licencié par rapport au rugby (chiffres à nuancer suite à l'explosion des licenciés après la coupe du monde de rugby en France), le basket a semble t-il les moyens humains pour retrouver son rang. En tout cas, pour conclure sur l'aspect spécifique du basket-ball, on constate que la professionnalisation est dépendante de son environnement et que les sports collectifs possèdent trop de facteurs dépendants les uns des autres pour pouvoir assimiler le processus d'un sport à l'autre. Une hypothèse confirmée par STUMPP & GASPARINI25(*) qui résument que le processus de professionnalisation présente des différences selon l'activité considérée et que chaque étape intervient à son propre rythme.
* 20 BAYLE Emmanuel, La dynamique du processus de professionnalisation des sports collectifs : les cas du football, du basket-ball et du rugby, STAPS n°52, pages 33-60, 2000. * 21 National Basket-ball Association, Ligue professionnelle de basket-ball américaine. * 22 BOURG Jean-François, Financement des clubs sportifs et stratégies des collectivités, Voiron, Edition de « La Lettre du cadre territorial », 1999. * 23 Canal+ y consacre un créneau de 2h tout les vendredi soir et une émission d'1h30 chaque mercredi matin. La Pro A est relégué sur les chaînes câblées de la chaîne, Sport+. L'équipe de France de basket est elle aussi diffusée sur Sport+. * 24 INSEE, Ile-de-France à la page : Les franciliens sont aussi sportifs que les provinciaux et fréquentent davantage les équipements culturels, Ile-de-France, INSEE, 1999. * 25 STUMPP Sébastien et GASPARINI William, Les conditions sociales d'émergence du volley-ball professionnel. De l'espace nation au club local (1970-1987), STAPS n°63, pages 123-138, 2003. |
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