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La perestroika ou réformer l'irreformable

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par Vincent Geraud
Université de Toulon La Garde - Master 1 2006
  

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Introduction

L'économie soviétique se trouve au début des années 80 dans une situation alarmante. Son système économique basé sur une économie centralement planifiée révèle bien des imperfections. Ces incohérences sont alors le résultat d'un demi-siècle d'immobilisme devant un système qui se fissure. Le système de planification centralisé instauré en URSS à la fin des années 20 est resté pour l'essentiel inchangé pendant les cinquante années qui ont suivi. Evidemment, les différents gouvernants ont tous leur part de responsabilité à des degrés divers. En effet, si Khrouchtchev a tenté, sans succès, des changements, il n'en a pas été de même pour ses successeurs. En atteste l'ère Brejnev qui dirigea le pays pendant vingt ans, et dont le passage au pouvoir fut marqué par un immobilisme absolu et qualifié par Gorbatchev de période de stagnation. Enfin, le passage des gérontocrates Andropov et de Tchernenko sont quasi négligeables en raison de leur durée (trois ans à eux deux !), mais n'en sont pas moins révélateurs d'une tendance au conservatisme et au statu quo.

Ainsi à son arrivée au pouvoir, Gorbatchev trouve l'économie dans une situation catastrophique dans laquelle les dysfonctionnements systémiques sont la règle et l'efficacité  l'exception. Les facteurs d'inefficacité touchent toutes les composantes de l'économie et repose sur des causes de natures idéologique, organisationnelle, systémique... Ces innombrables incohérences amènent à s'interroger sur la pertinence de la planification en tant que mode de fonctionnement économique mais aussi dans la façon de la pratiquer avec les modes d'organisations qui en découlent. Les caractéristiques en terme de monnaie, de marché du travail (et de ses conséquences sur les salaires), de conditions de travail, de comportements individuels d'un tel système s'éloignent largement de ce que l'on a l'habitude d'observer dans les systèmes capitalistes traditionnels. C'est donc dans un état d'esprit volontariste que Gorbatchev a souhaité rompre avec l'héritage d'une certaine pratique de la planification et sortir le pays d'un système qui le conduisait vers un inexorable déclin. Ainsi la perestroïka qu'il lance à partir de 1985 pose le problème de la transition. Cette transition du plan vers le marché a été aujourd'hui adoptée par la totalité des économies socialistes européennes avec plus ou moins de succès. Elle se retrouve devant un choix : soit, elle choisit de réaliser le passage ambitieux, mais risqué, de l'économie soviétique dans l'ère moderne, soit, elle maintient un système, certes archaïque, mais qui a fait la preuve de son efficacité quant à l'atteinte de ses objectifs idéologiques.

L'étude de l'économie russe nécessite une approche particulière car il est impossible d'évoquer cet héritage sans évoquer le poids de l'histoire et le rôle de l'idéologie. En effet deux éléments d'analyse se dégagent :

D'une part, l'économie soviétique n'a pas le même statut d'autonomie par rapport aux autres composantes de la vie sociale dans les pays occidentaux. Toutes les dimensions du système social soviétique sont intimement liées, mais elles semblent largement déterminées par l'idéologie et la politique. Idéologie par la double utopie communiste d'édification d'une société sans classe et d'entraînement du reste de l'humanité dans le sillage de la révolution. Politique ensuite par la prise en charge par un parti, très fortement organisé, de l'ensemble de la vie sociale d'un pays immense pour mettre en oeuvre, envers et contre toutes les résistances, cette utopie. Ainsi, l'économie ne peut être comprise que par référence à la politique et à l'idéologie.

D'autre part concernant les comportements de la population, ceux-ci ne sont pas dictés par l'appartenance à un groupe ou à une classe sociale. En Union soviétique les comportements sont d'abord individuels, même s'ils sont soumis à des contraintes étatiques très fortes. Il en résulte qu'aux décisions politiques, prises souvent de façon arbitraire dans le domaine économique, vont répondre des comportements rationnels d'ajustement individuels. Par exemple une baisse de salaire réel va provoquer non pas un mouvement de protestation ou de grève, mais une augmentation de l'absentéisme.

Il apparaît donc important de poser avant toute analyse ces ressorts psychologiques qui contribuent à expliquer la trajectoire de l'économie soviétique.

Cette trajectoire a été sinueuse pour l'économie. A cet effet, la perestroïka et la glasnost devaient aider à sortir de la crise grâce à une réforme de nature principalement économique mais s'attaquant aussi aux problèmes concernant la société, l'administration le système politique et les relations internationales. Gorbatchev s'attaqua à ces divers problèmes mais se heurta à l'obstruction de tous ceux qui bénéficiaient du système. C'est pourquoi on peut résumer la perestroïka en disant qu'elle s'apparente avant tout à une lutte entre un homme voulant réformer son pays avant qu'il ne s'effondre totalement et les inerties d'un système tentaculaire dont profite une classe de privilégiés.

Ainsi nous nous interrogerons tout au long du mémoire sur ce qui a poussé Gorbatchev à réformer l'économie russe et pourquoi cette réforme n'a pas connu le succès escompté ?

Nous nous efforcerons de répondre à ces interrogations en démontrant dans une première partie en quoi la perestroïka était nécessaire en expliquant les dysfonctionnements de ce système.

Dans un second temps nous expliciterons le contenu des réformes de Gorbatchev et nous expliquerons les raisons de leur échec.

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