2EME PARTIE ANALYSE
I LES PROCESSUS DE DECISION
Dans cette deuxième partie nous allons analyser les
résultats de l'enquête pour répondre à notre
problématique, à savoir le processus résidentiel des
franciliens qui migrent jusqu'en Eure-et-Loir. Nous apporterons tout d'abord un
éclairage sur les causes qui déterminent le choix de
déménager et de migrer dans des lotissements de la région.
A travers ces explications nous verrons par la suite les éventuelles
déceptions de la vie en lotissement, ce qui nous permettra de
préconiser un modèle urbanistique plus en adéquation avec
les besoins des habitants.
Le processus décisionnel a ici deux sens qu'il est
important de distinguer. En effet dans notre étude « la
décision » peut être simplement l'achat d'une maison
individuelle. Dans ce cas, nous décèlerons les causes migratoires
des franciliens hors Ile-de-France si ce n'est pas une décision
spontanée et voulue. Mais la décision peut-être en premier
lieu la décision de « changer de région » sans mettre
en avant le souhait d'habiter une maison individuelle.
Chaque partie de notre analyse s'orientera tantôt sur la
décision d'acheter une maison individuelle, tantôt sur celle de
changer de région. Cette distinction est intéressante à
faire car elle permet d'avoir un angle différent sur les migrations qui
sont à première vue similaires mais qui ont des causes totalement
différentes.
Les migrations extra-régionales sont très
souvent qualifiées comme étant la recherche d'un « meilleur
cadre de vie » ou d'une « meilleure qualité de vie ».
Nous avons ainsi analysé au cours des entretiens ce que
révélaient précisément ces termes: le meilleur
cadre de vie s'est avéré être en lien avec la structure
matérielle de l'habitat et de la ville. La qualité de vie est
associée à toute la vie sociale et l'environnement de la commune.
Selon les ménages, nous verrons si leurs attentes en terme de cadre et
de qualité de vie sont les mêmes.
Afin de pouvoir faire cette distinction, nous avons
travaillé sur deux lotissements car l'un nous permet de décrire
une stratégie résidentielle guidée par des circonstances
familiales et l'autre une stratégie plus orientée vers la
recherche d'entre-soi, ici la recherche d'un statut social commun.
Ces deux lotissements ont par ailleurs la
caractéristique d'être habités ou prochainement
habités par des migrants qui ont des parcours migratoires
différents. Nous avons ainsi séparé ceux qui ont toujours
vécu en Ile-de-France et qui quittent pour la première fois la
région et ceux qui ont déjà eu un vécu en province
avant leur installation dans la région parisienne.
Si leur provenance diffère, nous expliquerons pourquoi
ils aspirent à la même destination. Les quartiers pavillonnaires
sont habités de personnes ayant des caractéristiques communes,
mais grâce à la distinction des trajectoires, nous avons pu
remarquer globalement que les natifs d'Ile-de-France sont ceux qui vont
s'installer dans le lotissement « Le vieux Château » à
Saint-Rémy-sur-Avre et les ex- provinciaux sont ceux qui habitent
actuellement dans le lotissement de Hanches. Il nous appartient de faire
découvrir quelles caractéristiques ont ces migrants, ces
quartiers et quelles sont les demandes des futurs résidents pour
comprendre l'homogénéité des trajectoires
résidentielles de certains mais aussi
l'hétérogénéité des autres. Leurs
trajectoires, forcément différentes sont dues à une
provenance, à des arbitrages, des événements divers et
variés qui favorisent à un moment donné la migration.
1.1 Décision et cycle de vie
Pour ce thème, nous prenons le cas des natifs de
l'Ile-de-France puisque leurs biens achetés, ou plus rarement
loués en Ile-de-France sont la plupart du temps des appartements de
petite surface et leur acquisition devient obsolète à un moment
de leur vie : à l'arrivée de leurs enfants.
En effet, dans notre enqurte les personnes rencontrées
sont tous dans une situation d'agrandissement de leur famille. Cette situation
est favorisée par l'kge des accédants à la
propriété qui ne dépasse pas 40 ans et une situation
économique actuelle assez favorable puisque les couples sont
bi-actifs.
Bien qu'ils appartiennent à la classe moyenne, la
présence d'enfants, très souvent en bas âge dans ces
ménages oriente ces « couples avec enfants » vers la recherche
d'un type d'habitat particulier qui est la conséquence de cet
événement familial spécifique. En effet, plus la famille
s'agrandit, plus ils choisissent la maison comme bien à acquérir.
Ce choix s'effectue en particulier à l'arrivée du deuxième
enfant puisqu'une forte majorité vont déménager avec leur
deux enfants dont un en bas-âge.
Le premier enfant n'est pas décisif dans la
décision de déménager puisque « avec le premier
nous pouvions toujours nous arranger et aménager l'appart comme il faut.
Mais avec deux, on ne pouvait pas, alors dés que j'ai su que
j'étais enceinte, on a recherché tout de suite autre chose, une
maison » (Trappes 78 - Saint-Rémy-sur-Avre 28 - Mme K.,
logisticienne).
Cette transformation familiale est déterminante dans la
décision de déménager et l'est aussi dans la
préférence pour un type d'habitat et de quartier
désirés puisque le lotissement n'est pas choisi par
élimination mais il est vraiment un choix de ces jeunes parents.
Dans notre échantillon, les migrants citant pour
1ère cause de déménagement «
l'arrivée d'un enfant )) sont très majoritaires. Le fait de
devenir propriétaire d'une maison individuelle est important pour «
avoir de la place )) et « avoir un jardin pour les enfants )) et par
conséquent pour le confort et le bien-être des enfants. Plus que
le pavillon, c'est le lotissement qui séduit les parents car il permet
la promiscuité entre les enfants, la possibilité qu'ils jouent
dans le jardin et dans la rue sans danger, favorisée par le
système de voie en impasse. En optant pour ce type de quartier, les
ménages pensent ne pas pouvoir se tromper et ne pas être
déçu par rapport à leurs attentes.
Dès leurs premières prospections ils ont donc
souhaité un pavillon en lotissement pour cette vie de famille puisque ce
type d'habitat correspond le mieux, selon eux, à un modèle de
réussite familiale, très souvent illustré par la
possession d'un jardin. Cet espace suscite beaucoup d'intérrt grkce
à toutes les activités que les franciliens pensent pouvoir
pratiquer à leur arrivée dans un pavillon, avec un raisonnement
systématique orienté vers les activités des enfants,
d'où l'importance de cet espace extérieur.
Voici un exemple des réponses les plus citées
à la question : « Quels seront les usages de votre jardin?
»
- Profiter de l'espace extérieur - Bronzer sans être
vu
- Manger dehors - Barbecue
- Aller dehors - Se détendre - Etendre le linge
dehors
- Animaux domestiques vivent dehors - Jardiner
- Enfants jouent dehors
- Être dehors sans sortir de chez soi
- Sentiment de liberté - Posséder de l'espace
- Ne pas être dérangés par les voisins -
Liberté d'entrée et de sortir
Les stratégies résidentielles que nous ont
racontées ces migrants sont intéressantes dans le sens où
ils savent qu'à un moment donné, leurs enfants partiront et
qu'à ce moment ils n'auront plus leur place dans un lotissement,
conscients nous disent-ils que c'est un espace réservé aux jeunes
familles.
En cela, ces ménages migrants vont connaîtront
peut-être un déménagement supplémentaire si le
lotissement ne leur correspond plus à un moment donné de leur
vie, à savoir lorsqu'ils se retrouveront sans enfant.
« La question s'est pas posée, avec les
p'tiots qui vont d'venir grands le lotissement c'est bien. Tout le monde est en
famille dans ces quartiers, y'a une vraie identité. On va rtre heureux
nous et les gosses, ça c'est sur » (Rambouillet 78 #177;
Saint-Rémy-sur-Avre 28 #177; Mme G., Congés parental).
Ce qui est étonnant est le fait que ces ménages
aient une opinion si arrêtée sur les lotissements alors qu'ils n'y
habitent pas encore. Cependant cette image leur plaît puisque c'est pour
cette raison « d'identité familiale » qu'ils choisissent ce
lieu pour s'installer.
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