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Les publications des violations des droits de l'homme dans la presse écrite au Burkina : Essai d'analyse éthique

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par Mahamadou Soré
Université de Nantes - Diplome universitaire de troisième cycle en Droits Fondamentaux 2008
  

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    CAMPUS NUMERIQUE
    CODES

    « Campus Ouvert Droit, Ethique et Société »

    UNIVERSITE DE NANTES - UNIVERSITE PARIS II PANTHEON ASSAS - UNIVERSITE PARIS X NANTERRE -

    UNIVERSITE PARIS XII VAL DE MARNE - AGENCE UNIVERSITAIRE DE LA FRANCOPHONIE

    __________________________

    ANNEE UNIVERSITAIRE 2007-2008

    Les publications des violations des droits de l'homme dans la presse écrite au Burkina : Essai d'analyse éthique

    MEMOIRE DE RECHERCHE

    POUR L'OBTENTION DU DIPLÔME D'UNIVERSITÉ DE 3e CYCLE

    "DROITS FONDAMENTAUX"

    présenté par :

    Mahamadou SORE

    Tuteur :

    Jacques AMAR

    Maître de conférences, Université de Paris IX Dauphine

    Les publications des violations des droits de l'homme dans la presse écrite au Burkina : Essai d'analyse éthique

    Mahamadou SORE

    Mots clés : droit de l'homme, presse, déontologie, éthique, responsabilité

    Sommaire

    Sommaire 3

    Remerciements 6

    Liste des sigles et abréviations 7

    Introduction générale 8

    Première partie : L'éthique dans les publications des violations des droits de l'homme 14

    Chapitre 1 : Distinctions 15

    Chapitre 2 : L'impartialité et la promotion du respect des droits de l'homme comme principes éthiques 18

    Chapitre 3. L'éthique des droits de l'homme dans la pratique de la presse 22

    Deuxième partie : Les systèmes de garantie de l'éthique des droits de l'homme par la presse au Burkina Faso 28

    Chapitre 1. Les outils 29

    Chapitre 2. Les mécanismes de garantie de l'éthique des droits de l'homme dans la presse 43

    Troisième partie : Pour une presse respectueuse de l'éthique des droits de l'homme 56

    Chapitre 1 : Les facteurs explicatifs de la non observance de l'éthique des droits de l'homme par les publications de la presse écrite 57

    Chapitre 2. Pour des publications éthiques dans la presse écrite 72

    Conclusion 75

    Bibliographie 77

    Quelques liens utiles 80

    Tables des matières 81

    Annexes 83

    A :

    · ma maman Anta, première « victime » de mon engagement pour les droits de l'homme !

    · tous ceux d'Abrass (Adjamé - Côte d'Ivoire), éternelles victimes de violences policières acceptées, ce mémoire est votre mémoire en défense !

    A la mémoire de :

    · Norbert Zongo, journaliste retrouvé calciné le 13 décembre 1998 alors qu'il enquêtait sur des violations des droits de l'homme au Burkina Faso !

    · Pascal Kabungulu Kibembi, défenseur des droits de l'homme au Congo Démocratique, membre du réseau des formateurs en surveillance des violations des droits de l'homme du Programme Spécial Afrique d'Amnesty International - Pays-Bas, lâchement assassiné en juillet 2005 !

    Remerciements

    Aux personnes qui m'ont soutenu moralement ou techniquement à la réalisation du présent travail de recherche, je leur exprime mes reconnaissances. Un proverbe au Burkina Faso dit que la vache qui s'abreuve au marigot ne lui dit pas merci, car elle sait qu'elle y reviendra. C'est mon cas.

    Je cite :

    · Mon épouse Kady, pour m'avoir rappelé à l'ordre quand elle sentait que certaines de mes activités risquaient de prendre le pas sur la formation en droits fondamentaux ;

    · Monsieur Jacques Amar, mon tuteur à distance qui, dès ses premiers messages m'a accordé sa confiance ;

    · Professeur Patrick Chaumette, coordinateur pédagogique du DUDF, à travers son encadrement et ses mots pleins d'interrogations dignes de la maïeutique socratique ;

    · L'infatigable Brigitte Gassié, pour son appui technique à la formation,

    · Ibrahiman Sakandé du journal Sidwaya et Songré Etienne Sawadogo du Conseil Supérieur de la Communication (CSC) du Burkina Faso, pour m'avoir donné quelques éclairages sur le thème.

    · Les amis et parents qui m'ont encouragé dans ce travail.

    Liste des sigles et abréviations

    ACAT : Action des Chrétiens pour l'Abolition de la Torture

    AFJB : Association des Femmes Juristes du Burkina Faso

    AJB : Association des Journalistes Burkinabé

    CADHP : Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples

    CEDH : Convention Européenne des Droits de l'Homme

    CNDH : Commission Nationale des Droits Humains

    CNE : Comité National d'Ethique

    CODES : Campus Ouvert Droit, Ethique et Société

    CSC : Conseil Supérieur de la Communication

    DH : Droits de l'Homme

    DUDH : Déclaration Universelle des Droits de l'Homme

    FCFA : Franc de la Communauté Financière de l'Afrique

    ICHRP: International Council on Human Rights policy

    LIDEJEL : Ligue pour la Défense de la Justice et la Liberté

    MBDHP : Mouvement Burkinabé des Droits de l'Homme et des Peuples

    MBEJUS : Mouvement Burkinabé pour l'Emergence d'une Justice Sociale

    NDLR : Note De La Rédaction

    ONAP : Observatoire National de la Presse

    ONG : Organisation Non Gouvernementale

    PIDCP : Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques

    RSF : Reporters Sans Frontière

    UEMOA : Union Economique et Monétaire de l'Afrique de l'Ouest

    UIDH: Union Interafricaine des Droits de l'Homme et des Peuples

    Introduction générale

    « Si chercher le paradoxe est d'un sophiste, le fuir, quand il est imposé par les faits, est d'un esprit sans courage ou sans foi dans la science »

    Emile Durkheim, Les règles de la méthode sociologique, (préface à la première édition)

    Dans les Etats de droit, la liberté d'expression dont la liberté de presse constitue la principale traduction est reconnue comme faisant partie des droits fondamentaux. La presse joue un rôle déterminant dans la construction et la consolidation de la démocratie de par sa fonction d'expression des opinions plurielles. A coté des trois pouvoirs qui constituent les institutions démocratiques au sein des Etats modernes à savoir l'exécutif, le législatif et le judiciaire, la presse est souvent classée comme étant le quatrième.

    Dans le domaine particulier des droits de l'homme, les médias jouent un rôle important en publiant leurs violations ou les actions en faveur de la promotion de leur respect. Ce dernier aspect est d'autant important que la Déclaration universelle des Droits de l'Homme (DUDH) adoptée par les Nations Unies en 1948 reconnaît dans son préambule que c'est entre autres la méconnaissance des droits de l'homme qui a conduit aux atrocités des deux guerres mondiales.

    Pour s'en convaincre, l'organisation mondiale, de renommée internationale, de protection des droits de l'homme qu'est Amnesty International1(*) (AI) est née en 1961 suite à une publication par la presse britannique d'une violation des droits de l'homme. En effet, c'est consécutivement à la révélation, par la presse écrite, de la détention de deux jeunes portugais qui auraient levé un toast à la liberté que vint à l'idée de l'avocat britannique Peter Benenson de lancer un appel pour leur libération. Cet appel est publié dans la presse britannique sous le titre de « forgotten prisonners 2(*)» le 28 mai 1961. L'appel se base sur la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme - adopté en 1948 - notamment en ces articles 18 et 19, pour exiger la libération sans condition de tous « les prisonniers d'opinion »3(*) à travers le monde.

    Dès lors, on perçoit le rôle que joue la presse aussi bien dans la révélation des atteintes aux droits fondamentaux de l'homme que dans la médiatisation des actions en faveur de leur cessation.

    Aujourd'hui encore, que ce soit pour Amnesty International ou d'autres organisations de promotion et de protection des droits de l'Homme, et surtout pour l'opinion publique, la presse demeure une source privilégiée de révélation des violations comme pour leur dénonciation. C'est en cela que la résolution 1995/40 de la Commission des droits de l'homme4(*) des Nations Unies du 3 mars 1995 sur le droit à la liberté d'opinion et d'expression mentionne les « liens d'interdépendance qui existent entre le droit à la liberté d'opinion et d'expression et tous les autres droits de l'homme dont ils renforcent l'exercice ».

    Dans la fonction de dévoilement des infractions aux droits fondamentaux, il se trouve toutefois que les publications de la presse fassent fi de l'éthique, agissant ainsi à contre-courant de la promotion de ces droits. Autrement dit, parfois, les articles publiés bien que révélant des cas de violations en font un traitement qui dévoie ce qu'on pourrait appeler le « message des droits de l'homme ». Si fait qu'au lieu de promouvoir ces droits inhérents aux individus, elles font un black-out sur les droits violés si ce n'est une apologie à peine voilée des violations constatées. En conséquence, l'intervention de la presse dans le domaine des droits de l'homme peut s'avérer contreproductive. Ceci d'autant, que la presse de par son audience joue un rôle déterminant sur la formation des opinions et partant sur les actes des individus.

    En plus, la plupart des restrictions à la liberté de presse concernent des violations dont les victimes, facilement identifiables, disposent de capacité d'ester en justice ou de demander toute autre forme de réparation. Il s'agit, en l'espèce des délits liés au respect des droits ou de la réputation d'autrui et de ceux visant à la sauvegarde de la sécurité nationale, de l'ordre public, de la santé ou de la moralité publique. Ce qui n'est pas forcement le cas des publications qui portent atteinte à l'éthique des droits de l'homme. Ces derniers types de violations n'ont pas une victime connue ou identifiable car enfreignant à des principes d'ordre éthique en matière des droits de l'homme. A titre d'illustration, c'est le cas par exemple d'un journal, qui publiant un cas avéré d'exécution extrajudiciaire de présumés délinquants, en arrive à louanger l'acte comme une participation à la sécurité des populations. Ces types de violations sont, de ce fait insidieux, et nécessitent pour leur respect non une action civile de la victime mais celle d'une puissance publique habilitée qui peut être au delà du juge - gardien des droits fondamentaux - une ONG ou un organe consultatif le cas échéant.

    Ramener au cas du Burkina Faso, la présente étude a pour but d'analyser la fonction de révélation - autrement dit de surveillance - des violations des droits de l'homme à travers les publications de la presse écrite quotidienne sous une perspective éthique. Sous une forme interrogative, il s'agira de répondre à la question suivante : « Les publications relatives aux violations des droits fondamentaux publiés par la presse écrite au Burkina Faso sont elles éthiquement acceptables ? »

    A travers, la recherche, il s'agira plus spécifiquement de mener de réflexions autour des axes suivants :

    1. étudier certains articles publiés sur des violations des droits de l'homme dans la presse burkinabé afin d'en abstraire les questions éthiques qu'ils posent ;

    2. analyser les instruments et mécanismes d'encadrement de la presse en ce qui concerne la relation des violations des droits de l'homme au Burkina Faso ;

    3. proposer, à partir d'une analyse des facteurs juridiques et sociologiques explicatifs de la réalité étudiée, des recommandations pour une presse écrite éthique en matière de traitement des violations des droits de l'homme.

    La présente recherche se veut donc une réflexion sur le rôle de la presse dans la promotion des droits fondamentaux, de l'Etat de droit et de la démocratie à travers sa fonction de révélation des violations des droits de l'homme. Elle s'insère dans un champ dans lequel les garanties offertes par les textes internes et internationaux restent peu effectives. Car dans la réalité, la plupart des instruments internationaux sur la liberté d'expression et de presse évoquent davantage les droits liés à ces libertés que les obligations qui doivent y être associées. En conséquence, les restrictions à ces libertés restent limitées à l'atteinte de quelques droits subjectifs individuels (vie privée, diffamation) ou collectifs (ordre public, santé publique, sécurité publique). Il existe certes, des textes relatifs au rôle de la presse soit dans la contribution de la promotion des droits de l'homme soit à l'interdiction d'atteinte à ceux-ci. Mais, la plupart de ces instruments sont de type déclaratoire donc dénués de force obligatoire. C'est le cas par exemple de :

    · la déclaration universelle des droits de l'homme à travers son article 30 ;

    · la déclaration sur les principes fondamentaux concernant la contribution des organes d'information au renforcement de la paix et de la compréhension internationale, à la promotion des droits de l'homme et à la lutte contre le racisme, l'apartheid et l'incitation à la guerre - 28 novembre 1978,

    · la résolution 1995/40 de la Commission des droits de l'homme du 3 mars 1995 sur le droit à la liberté d'opinion et d'expression

    Et au niveau national, les restrictions à la liberté de la presse sont à l'image de ceux édictés dans l'ordre international. Si fait que les manquements à l'éthique des droits de l'homme contenus dans les publications des quotidiens restent « impunis » contrairement aux atteintes faites à l'ordre public ou à la réputation d'autrui. De même, les mécanismes nationaux de garantie des droits de l'homme constitués par l'articulation des juridictions nationales, du ministère de la promotion des droits humains, du Comité National d'Ethique, du Conseil Supérieur de la Communication (CSC), de la Commission Nationale des Droits de l'Homme (CNDH), des associations des droits de l'homme et de la presse n'ont - à ce jour - interpellé un quotidien sur un traitement peu éthique d'une violation des droits de l'homme. Ceci bien que la réalité offre à lire ce genre d'articles dans les journaux. Par contre, en ce qui concerne les publications ayant un caractère attentatoire à la sûreté de l'Etat5(*), aux valeurs culturelles nationales, à la réputation d'individus6(*) y compris les autorités politiques,... les cas de saisine des mécanismes sont légion.

    Par ailleurs, la presse jouant un rôle prépondérant dans la formation des opinions et par delà des attitudes, il s'en suit que ses dérives peuvent être préjudiciables à la construction puis à la consolidation de l'Etat de droit en construction dans un pays comme le Burkina Faso. Cette affirmation est d'autant importante qu'au regard de l'audience et de la crédibilité dont ils jouissent, les journaux au Burkina Faso constituent une alternative pour la garantie des droits fondamentaux. Elles ont aussi dans ce sens un rôle de « watch dog »7(*) de la situation de l'Etat de droit.

    Sur un plan sociopolitique, le Burkina Faso est un Etat qui vient de renouer avec la démocratie et l'Etat de droit depuis 1991 avec l'adoption d'une constitution. Toutefois, selon les constitutionnalistes burkinabé Augustin Loada et Luc Marc Ibriga, « la culture des droits de l'homme n'est pas assez ancrée au Burkina Faso. L'ignorance, la pauvreté, les coutumes rétrogrades conduisent souvent les individus et les groupes sociaux à méconnaître les droits fondamentaux dans leurs relations sociales. La violence sociale, les mutilations génitales féminines, les lynchages des délinquants ou présumés voleurs par les populations elles-mêmes sont autant d'exemples. Les autorités étatiques elles-mêmes ne sont pas non plus irréprochables... Il en va ainsi des disparitions ou des exécutions sommaires enregistrées dans le cadre de la lutte contre l'insécurité menée par les forces de l'ordre, souvent elles mêmes victimes des braqueurs. Ces pratiques sont cependant niées par les autorités du ministère de la sécurité. Mais les rapports et les témoignages de la presse8(*) et de certaines organisations de défense des droits de l'homme son assez éloquents. De même, les traitements inhumains, cruels, dégradants et humiliants, la torture physique ou morale ne sont pas rares »9(*). C'est un tel contexte, que la presse écrite du Burkina Faso vit, avec de toute évidence, une influence de son milieu. Autrement dit, les représentations que les populations ont des droits fondamentaux ont des répercussions sur le traitement de l'information y afférent par la presse écrite et vice-versa.

    Enfin, la fonction de révélation des violations des droits de l'homme, ou disons de dénonciations desdites violations n'est pas la chose la plus aisée pour la presse au Burkina Faso. En rappel, c'est pendant qu'il faisait des publications sur un meurtre impliquant le frère cadet du chef de l'Etat du Burkina Faso que le journaliste Norbert Zongo a été retrouvé mort, criblé de balles puis calciné le 13 décembre 1998. C'est justement suite à la grave crise sociopolitique née de ce meurtre que de nombreuses reformes institutionnelles ont été initiées par le gouvernement. Le Comité National d'Ethique fait partie des organes créés à cette occasion. Dans cette situation, faire table rase voire faire l'apologie des atteintes des droits de l'homme au Burkina Faso semble - consciemment ou inconsciemment - le penchant naturel vers lequel tendent les écrits de la presse lorsqu'ils en relatent des cas.

    En définitive, il s'agit de mener une étude sur une fonction ignorée de la presse qui a un impact sur l'Etat de droit, les droits de l'homme et la démocratie. Ceci dans le but d'aboutir à une réflexion sur une presse écrite respectueuse des principes éthiques des droits fondamentaux.

    Première partie : L'éthique dans les publications des violations des droits de l'homme

    Avant d'aborder les questions d'éthique des droits de l'homme que peuvent poser les publications de la presse écrite dans le contexte du Burkina Faso, il sied d'un point de vue méthodologique de procéder à une distinction des concepts qui seront utilisés dans le présent document. Mais avant cela, il est utile de préciser que la presse quotidienne écrite au Burkina Faso concerne quatre journaux. Les plus importants en termes d'audience, de tirage et de régularité dans leurs parutions sont les trois suivants :

    1. « L'observateur Paalga » : Organe privé et premier quotidien national crée le 28 mai 1973. Entre 1984 et 1991, le journal a cessé de paraître suite à un incendie motivé par des raisons politiques10(*).

    2. « Sidwaya » : quotidien gouvernemental crée le 5 avril 1984 sous la « Révolution » du président Thomas Sankara pour contrebalancer « L'observateur Paalga » tout en offrant au régime en place un organe de communication et de propagande politiques.

    3. « Le Pays », a été crée le 30 Octobre 1991 dans l'effervescence du vent de démocratisation de l'après discours de la Baule11(*). C'est un organe privé qui, semble être reconnu dans le paysage médiatique national comme l'un des plus indépendants.

    Chacun des ces trois journaux tirent en moyenne à 7 000 exemplaires journellement. Et chacun de ces journaux dispose d'une version électronique publiée sur leurs sites Internet respectifs.12(*)

    Chapitre 1 : Distinctions

    Les droits de l'homme sont des prérogatives universellement reconnus à tout individu quelle que soit sa provenance nationale. Ces droits inhérents à tout homme transcendent les normes juridiques. L'ensemble de ces droits est consacré au niveau international par un certain nombre de textes juridiques dont le socle est la charte internationale des droits de l'homme. En rappel, la charte des droits de l'homme est composée de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme (1948), du Pacte international sur les droits civils et politiques (1966) et ses deux protocoles facultatifs13(*) ainsi que du pacte international sur les droits économiques, sociaux et culturels (1966). En plus de cette charte, on compte de nombreux textes à vocation catégorielle : convention contre la torture, convention internationales sur les droits des enfants, convention internationale sur l'élimination des toutes les discriminations à l'égard des femmes. Au niveau régional également, on retrouve une déclinaison des outils internationaux. Ainsi en Afrique on citera la CADHP, la charte africaine du bien être et des droits de l'Enfant. Enfin, de nombreuses dispositions de ces instruments internationaux ont été intégrées dans les ordres juridiques nationaux. C'est le cas au Burkina Faso avec la constitution de 1991. Celle-ci renvoie clairement dans son préambule à la DUDH. Mieux, elle contient avec des dispositions expressément dédiées aux droits fondamentaux : droit à la vie, interdiction de la torture des traitements inhumains cruels et dégradants.

    Au regard de ce qui précède, une violation des droits de l'homme dans ce document renvoie à toute forme d'atteinte aux droits fondamentaux protégés par la charte internationale des droits de l'homme et les autres textes internationaux, régionaux ou nationaux des droits de l'homme.

    Quant à l'éthique, elle vient du terme grec ethikos. L'éthique renvoie à des valeurs d'ordre moral partagées au sein d'une communauté. Pour Daniel Cornu « l'éthique peut être considérée comme une instance supérieure à la morale car elle légitime les fondements moraux eux-mêmes »14(*). Des auteurs comme Ruwen Ogien15(*), ne font pas de distinction entre les deux concepts que sont morale et éthique. Une autre notion liée à l'éthique est la déontologie.

    Etymologiquement, la déontologie vient de déon (devoir) et logos (science). Elle se définit comme « l'ensemble des devoirs inhérents à l'exercice d'une activité professionnelle libérale le plus souvent définis par un ordre professionnel »16(*). La déontologie serait donc une catégorie de règles éthiques spécifiques à un corps de métiers. Elle se trouve très souvent inscrits dans un code ou une charte comme la charte des journalistes du Burkina Faso de 1990.

    Des définitions qui précèdent, l'expression « éthique des droits de l'homme » serait l'ensemble voire l'observance des principes et valeurs contenus dans les instruments internationaux de protection des droits de l'homme comme le droit à la vie, la dignité, l'égalité, la non-discrimination, l'interdiction de la torture, des traitements inhumains, cruels et dégradants, l'interdiction de l'esclavage... Dès lors, rapportée aux publications de la presse écrite sur des cas de violations des droits de l'homme, l'éthique repose sur un certain nombre de principes. Pour le guide de l'animateur en surveillance et documentation des violations des droits humains produit par le Programme Spécial Afrique d'Amnesty International17(*), les principes de recherche applicables aux violations des droits de l'homme sont : l'impartialité, l'exactitude, la confidentialité et l'approche "sexospécifique" autrement dit la prise en compte de la dimension genre.

    Dans le cadre de la présente étude, deux principes serviront de repères pour l'appréciation éthique des écrits publiés par les journaux burkinabé relativement à des cas d'atteinte des droits de l'homme. Pour la présente recherche, l'analyse portera spécifiquement sur deux principes à savoir l'impartialité et la promotion du respect des droits de l'homme. Ces deux principes seront appréciés à travers le cas des quotidiens d'informations générales paraissant au Burkina Faso.

    Dès lors comment interviennent ces principes d'ordre éthique dans la relation que fait la presse écrite burkinabé des cas de violations des droits de l'homme qu'elle est amenée à publier ?

    Chapitre 2 : L'impartialité et la promotion du respect des droits de l'homme comme principes éthiques

    2.1. L'impartialité

    L'impartialité est définie par Gérard Cornu comme l'« absence de partie pris, de préjugé, de préférence, d'idée préconçue, exigence consubstantielle à la fonction juridictionnelle dont le propre est de départager des adversaires en toute justice et équité »18(*).

    De cette définition, l'impartialité se rapproche d'autres notions comme l'égalité, l'équité et la non-discrimination qui sont des principes fondateurs des droits de l'homme. Plus prosaïquement, l'impartialité décrirait une situation sociale, juridique qui offre aux parties ou aux protagonistes en présence, les mêmes chances dans un traitement particulier. C'est pour cette raison, qu'en plus de l'indépendance, que le droit international des droits de l'homme requiert19(*) des juridictions l'impartialité dans le traitement des affaires Cette disposition est aussi exigée des autres corps sociaux qui sont amenés à traiter des faits impliquant au moins deux parties. Il est ainsi de l'administration publique voire des organisations des droits de l'homme20(*) et aussi de la presse. Dans cette acception, le concept d'impartialité apparaît comme le pendant nécessaire aux principes d'égalité, de non discrimination qu'il contribuer à fonder. Quel peut être le contenu de l'égalité et de la non discrimination en dehors de l'impartialité dans le traitement des individus en tant que sujet de droit ?

    C'est sans doute pour cette raison que la Déclaration sur les principes fondamentaux concernant la contribution des organes d'information au renforcement de la paix et de la compréhension internationale, à la promotion des droits de l'homme et à la lutte contre le racisme, l'apartheid et l'incitation à la guerre du 28 novembre 1978 affirme en son article 5 que « Pour que soit respectée la liberté d'opinion, d'expression et d'information, et afin que l'information reflète tous les points de vue, il est important que soient publiés les points de vue présentés par ceux qui considéreraient que l'information publiée ou diffusée à leur sujet a gravement porté préjudice à l'action qu'ils déploient en vue de renforcer la paix et la compréhension internationale et de promouvoir les droits de l'homme, ou de lutter contre le racisme, l'apartheid et l'incitation à la guerre ». Egalement, les chartes de déontologie des journalistes promeuvent une approche impartiale dans le traitement des faits. Ainsi l'article 8 de la charte des devoirs professionnels des journalistes français de 1918, édicte qu'il faut « recueillir tous les points de vue nécessaires. A cet effet, un contact est recherché avec les principales parties concernées par une affaire traitée par le journal, dans le souci de recueillir leur point de vue et de traiter l'information de manière équitable ». Cet esprit est aussi précisé dans le code des principes de journalisme de Belgique. « Les faits doivent être recueillis et rapportés avec impartialité »21(*) dit-il. Pour la charte du journaliste burkinabé de 1990, l'article 8 dit que celui-ci « doit éviter à tout prix de verser dans la partialité et l'esprit partisan».

    De ces textes, on perçoit l'importance de l'impartialité dans le processus du traitement éthique de l'information par les journalistes.

    Au-delà de l'éthique, l'impartialité conditionne un traitement pluraliste de l'information au sens où elle permet la prise en compte des opinions et points de vue des parties en impliquées dans le fait relaté. Or, le pluralisme, du moins son expression est un principe intimement lié à la démocratie, un gage de la liberté d'expression voire de la liberté tout court. C'est dans ce sens que dans certains systèmes juridiques, l'approche pluraliste de l'information a acquis le statut de principe de valeur constitutionnelle22(*) de garantie du droit du citoyen à l'information.

    Si l'impartialité est admise comme un principe éthique en matière de droit de l'homme et aussi comme un devoir pour le journaliste, qu'en est-il de la promotion du respect des droits de l'homme?

    2.2. La promotion du respect des droits de l'homme par la presse écrite

    La liberté d'expression en tant que liberté fondamentale est une prérogative reconnue à tout individu. Comme droit, elle reste toutefois assujettie au principe selon lequel qui veut que sa limite soit là où elle empiète sur d'autres libertés et droits. De ce point de vue, l'exercice de la liberté de presse fait donc obligation à celui qui en jouit de respecter les autres droits fondamentaux. C'est dans ce sens que doit être comprise la dernière disposition de la DUDH, en l'occurrence l'article 30. Celui-ci dit clairement qu' « aucune disposition de la présente Déclaration ne peut être interprétée comme impliquant, pour un Etat, un groupement ou un individu, un droit quelconque de se livrer à une activité ou d'accomplir un acte visant à la destruction des droits et libertés qui y sont énoncés ». Une restriction générale semblable est également reconnue par le PIDCP de 1966. L'article 46 de cette convention dit qu'« Aucune disposition du présent Pacte ne doit être interprétée comme portant atteinte aux dispositions de la Charte des Nations Unies et des constitutions des institutions spécialisées qui définissent les responsabilités respectives des divers organes de l'Organisation des Nations Unies et des institutions spécialisées en ce qui concerne les questions traitées dans le présent Pacte. »

    De la lecture de ces dispositions, on constate que la jouissance d'un droit reconnu par les textes fondateurs - fusse t'il lié à la libre expression des opinions - n'autorise pas l'atteinte aux autres. Dès, lors l'exercice de la liberté de presse doit se faire en respectant droits de l'homme, leurs caractères inaliénable, indivisible, interdépendant et universel.

    Si donc du point de vue juridique, la jouissance de la liberté de presse fait corps avec le respect des autres droits, au point de vue pratique, ce lien se justifie également. En effet, la presse en tant que vecteur, moyen de médiatisation de la pensée joue un grand rôle dans la formation des façons de faire, d'agir et de sentir des hommes pris individuellement et des sociétés. Dans nos pays, il n'est pas rare d'entendre dire « je l'ai lu dans le journal » pour affirmer que l'information est fondée, crédible. Car, comme le reconnaît à juste titre Dreyer, « ce que le message, nécessairement impersonnel, perd de force de conviction immédiate est compensé par l'élargissement de son champ de diffusion »23(*).

    Pour mémoire, on se rappellera du rôle qu'ont joué les « médias de la haine » dans le déclenchement puis dans l'envenimement des tueries interethniques lors du génocide survenu au Rwanda en 1994.

    De ce qui précède, la presse a donc une fonction qui est consubstantielle au droit qui le protège. La liberté de la presse ne saurait détruire les autres libertés sans risque de se détruire elle même. La presse a donc une responsabilité sociale de laquelle elle ne peut se départir au risque de mettre en péril les droits fondamentaux. Il lui incombe comme une obligation découlant de son droit à la libre expression un respect rigoureux des droits l'homme et partant une promotion effective du respect des droits de l'homme. La résolution 59(I) de l'Assemblée générale des Nations Unies, adoptée en 1946, déclare à ce sujet : " La liberté de l'information est un droit fondamental de l'homme et la pierre de touche de toutes les libertés à la défense desquelles se consacrent les Nations Unies... La liberté de l'information exige nécessairement que ceux qui jouissent de ses privilèges aient la volonté et le pouvoir de ne pas en abuser. L'obligation morale de rechercher les faits sans préjuger et de répandre les informations sans intention malveillante constitue l'une des disciplines essentielles de la liberté de l'information. .. ».

    Même dans les cas où il apparaîtrait un conflit éventuel entre cette liberté de presse et d'autres droits garantis, il peut être fait appel au principe de la fondamentalité du droit en cause, de son caractère dérogeable ou non en droit. Certains droits étant reconnus comme indérogeables (droit à la vie, interdiction de la torture, des traitements cruels, inhumains et dégradants, interdiction de la torture), ils doivent être respectés, protégés en toute circonstance. Dans le cas de la Belgique par exemple, le code des principes de journalisme de Belgique met le respect des droits fondamentaux au coeur des règles. Il érige en devoir le respect de la dignité humaine. Ce texte prévoit d'ailleurs qu'en cas de conflit entre la liberté d'expression et d'autres droits fondamentaux, « il appartient aux éditeurs et rédacteurs en chef, après consultation de tous les journalistes intéressés, de décider, sous leur seule responsabilité, du droit auquel ils accordent la priorité ». De là, on perçoit clairement la responsabilité personnelle des hommes de médias qui, dans le cas de conflit entre deux droits fondamentaux, auraient contrevenu à l'un des ceux-ci. Donc liberté de presse et respect des droits de l'homme sont définitivement liés. Et, le professeur Serge Théophile Balima de l'université de Ouagadougou (Burkina Faso) d'affirmer que le journaliste professionnel défend quatre valeurs fondamentales liées à la liberté d'expression ; la première étant relative au respect de la vie humaine, de la justice et du droit de la personne24(*).

    A partir de cette théorisation sur la relation entre liberté de presse et éthique des droits de l'homme, il serait intéressant d'aborder la question d'un point de vue pratique : celui des quotidiens de la presse écrite au Burkina Faso, lorsqu'ils publient des informations ayant un rapport avec des atteintes aux droits fondamentaux.

    Chapitre 3. L'éthique des droits de l'homme dans la pratique de la presse

    Au Burkina Faso, on peut d'emblée, dire de façon absolue (péremptoire) que la presse participe de la promotion de l'éthique des droits de l'homme. Sa simple existence plurielle peut déjà être considérée comme un gage d'exercice de la liberté de d'expression - pendant indissociable - de l'Etat de droit. Lorsqu'on lit la presse écrite burkinabé on y lit régulièrement les messages provenant des organisations et institutions de promotion et de protection des droits de l'homme ainsi que des articles sur les manifestations de celles-ci. Ces messages sont publiés à titre onéreux et le plus souvent gratuit. Ainsi, les conférences, les ateliers et séminaires, les actions de lobbying relatives à la promotion des droits des l'homme paraissent régulièrement dans la presse écrite. Parfois, il s'agit de cas de violations présentés par les services de police ou de l'action sociale comme ceux relatifs aux mutilations génitales féminines, aux mariages forcés et/ou précoces, à la maltraitance d'enfants ...

    Le plus important à noter est qu'au delà des publications suscitées de tiers, il y a quelques fois, l'intervention autonome des organes de presse pour dénoncer des cas de violations des droits fondamentaux. Autrement dit, sans avoir été expressément sollicités, il arrive que des journaux publient de leur propre chef des violations aux droits de l'homme. Ce fut le cas par exemple du journal « l'Observateur Paalga » qui publiait en juillet 2007, un article sur une orpheline objet de traitements inhumains25(*). Il s'agissait, en fait, d'une fillette d'une douzaine d'années née avec des malformations aux membres. Elle marchait de ce fait à quatre pattes. Comme la mère de la fillette est morte quelque temps après sa naissance, celle-ci est - dans la représentation locale - perçue comme une enfant maléfique. En conséquence, elle n'avait pas droit aux mêmes égards que les humains. La fille « Wendemi », gîtait dans une sorte de niche de chien, jusqu'au jour où l'article du journal révéla son cas. Il s'en est suivi des réactions dont la plus importante fut la décision du Ministère de l'Action Sociale et de la Solidarité du Burkina Faso de prendre totalement en charge la victime. Alors on peut se demander de ce que serait devenue cette victime innocente sans le travail de promotion du respect du droit fondamental à la dignité et à la vie qu'a fait « l'Observateur Paalga » ?

    Prenons également cet autre exemple du quotidien « Sidwaya ». L'article, publié le 20 août 2007, fait suite à une demande de pardon consécutivement à des violences que des militaires ont fait subir à des populations civiles dans la ville de Dédougou26(*). En l'absence de poursuites judiciaires contre les militaires fautifs, le journaliste signataire de l'écrit conclut en se demandant ceci : « Doit-on supposer que les militaires qui ont bastonné les populations ont été sanctionnés ou les a-t-on tolérés en vue de sévir rigoureusement la prochaine fois ? Il serait superfétatoire de croire que l'on peut "chicoter" impunément des gens et leur demander pardon sans aucune justice ni assurance. Et puis, et les affrontements entre militaires et civils à Ouahigouya [une autre ville du Burkina Faso] ?»27(*).

    Ici, le quotidien alerte l'opinion publique sur le risque de l'impunité des violences récurrentes que font subir les militaires aux civils.

    Même sans faire de dénonciation systématique, on peut avancer que quel que soit le traitement que la presse écrite au Burkina Faso fait des cas de violations des droits de l'homme, le simple fait de publier ces atteintes peut être considéré comme une participation à leur révélation. Ceci est d'autant important que dans le processus de protection des droits de l'homme, le dévoilement, la publication des situations attentatoires fonctionne comme le préalable à toute action protectrice. Il est pratiquement impossible d'agir pour des droits violés quand les faits ne sont pas connus. C'est en cela que la presse est aussi réputée comme une des sources pour la connaissance des infractions pour leurs éventuelles poursuites par le ministère public28(*). Vue sous cet angle, la presse burkinabé peut être considérée comme une véritable sentinelle des droits de l'homme. Du reste, c'est sur la base d'articles publiés par ces organes que la présente recherche tire sa substance.

    Pour revenir aux questions d'éthique des droits de l'homme, on peut se demander si au delà de cette fonction de dévoilement, de dénonciation, le traitement des situations d'atteintes aux droits de l'homme tels qu'il est fait par la presse écrite respecte toujours l'éthique des droits de l'homme à travers l'observance de l'impartialité et de la promotion du respect des droits de l'homme ?

    La réponse à cette question, au regard de l'analyse d'un certain nombre d'écrits peut revêtir une forme affirmative comme nous l'avons montré plus haut mais elle peut aussi être totalement négative.

    Parlant de la presse en Afrique de façon générale, le rapport final de la conférence africaine sur « Le journalisme et les droits de l'homme en Afrique » - cité par Réné Dégni Ségui29(*) - reconnaissait que « la presse en Afrique souffre de liberté d'expression et d'une information impartiale et objective comme c'est le cas dans la plupart des pays du tiers monde » ».

    La presse au Burkina Faso ne fait pas exception à ce constat général. Les principes éthiques souffrent d'une certaine inobservance par les publications de la presse écrite traitant des atteintes aux droits de l'homme.

    Pour apprécier le rôle équivoque de la presse dans la révélation des violations, en voici des morceaux choisis. La période de référence des articles analysés se situe entre 2006 et mai 2008.

    Dans sa livraison du 2 Novembre 2006, le quotidien national Sidwaya30(*) publiait un article signé par Aké Loba Lankoandé. L'article faisait suite à des exécutions extrajudiciaires de présumés « coupeurs de route ». Voilà un extrait de ce qui était écrit : «Il convient de saluer à sa juste valeur le courage et la bravoure des agents de la sécurité qui, malgré la modestie des moyens mis à leur disposition sont arrivées à mettre hors d'état de nuire le gang de Djolgou Yarga ». Déjà en titre on lisait « Le gang de Djolgou Yarga hors d'état de nuire». Or il se trouve que Djolgou Yarga était un conseiller municipal d'un parti d'opposition. Il a été établi qu'il avait été arrêté par la police avant que sa famille ne découvre son corps après. En conséquence, la famille a usé de son droit de réponse pour dénoncer l'exécution extrajudiciaire de leur parent. Mais, en dépit de la publication de ce droit de réponse de la famille de la victime dans la parution du même journal en date du 17 novembre, la rédaction sous une NLDR31(*) écrivait qu'elle ne reprochait rien à son correspondant sur cette affaire. Du reste, il a été, plus tard, établi, par des enquêtes internes de la police ainsi que des rapports circonstanciés, que Djolgou Yarga et ses compagnons d'infortune étaient des innocents qui avaient été sommairement abattus par la police après avoir été ligotés32(*).

    Dans un autre quotidien, à savoir cette fois-ci, « Le pays ». Dans l'édition du 15 juin 2007, on pouvait lire sous le titre « Un voleur téméraire » ceci : « ... Il avait à peine bougé avec son butin qu'il fut rattrapé par la foule. Il fut lynché jusqu'à ce que mort s'en suive, puis balancé dans un caniveau. La scène s'est passée la semaine dernière à Ouaga 2000 aux environs de 20 h. Les voleurs sont assurément de plus en plus téméraires et rien ne les arrêtera. Pas même la colère des foules ».

    Quand au journal « L'observateur Paalga », il publiait en fin août 2006, dans sa rubrique « faits divers » la mort en détention d'un présumé délinquant à Bobo Dioulasso. L'article signé de Jonas Apollinaire Kaboré a été écrit sur la base d'une conférence de presse donnée par le Service régional de la Police Judiciaire (SRPJ) de Lafiabougou. Le titre est sans équivoque « Lutte contre le grand banditisme : le tueur de Colma meurt dans sa cellule 33(*)». Le texte commence par une interrogation qui ne laisse aucun doute sur la position de l'auteur en ce qui concerne cette mort d'homme : « Pouvait-il en être autrement pour cet individu qui, à l'évidence n'avait aucun respect pour la vie humaine et qui avait à son actif cinq morts ? »

    Dans les extraits ci-dessus, il apparaît clairement qu'en plus de propos apologétiques de crimes qu'ils expriment, ces articles tout en révélant des violations aux droits de l'homme, des tueries en l'espèce, portent atteinte à ces mêmes droits ainsi qu'aux valeurs qui y sont contenues. Sont ainsi bafoués pour ne citer que ceux ci :

    · Le manquement le plus grave car justifiant, à certains égards, les autres violations des droits de l'homme est la présomption d'innocence. C'est un principe fondamental qui établit que toute personne accusée d'un fait est réputée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité soit établie par une décision juridictionnelle même si cette personne fait l'objet d'une poursuite pénale. La présomption d'innocence est reconnue par la charte internationale des droits de l'homme ainsi que par la charte africaine des droits de l'homme et aussi le code de procédure pénale. Dans l'ensemble des articles cités en exemple, aucun des auteurs n'a posé la question légitime, quasi évidente, de savoir si les suppliciés étaient coupables. Et même s'ils l'étaient, est-ce que le sort qui devait leur être réservé était la mort extrajudiciaire ou la procédure légalement établie au Burkina Faso. Ni Djolgou Yarga et ses compagnons, ni « le voleur téméraire » encore moins « le tueur de Colma » n'auront jamais l'occasion d'être entendus par le juge seul compétent pour décider de leur culpabilité. Pour la presse, leur culpabilité a été déjà reconnue.

    · Un autre droit violé par les faits relatés est le droit intangible à la vie et à l'intégrité physique. Ce droit est protégé par l'article 2 de la constitution du Burkina Faso, l'article 4 de la charte africaine des droits de l'homme et des peuples, l'article 3 (o) de l'acte constitutif de l'Union africaine qui proclame « le respect du caractère sacro-saint de la vie humaine ». Aucun des textes ne s'indigne de la mort ainsi infligée à des hommes, fussent-ils des délinquants. Au contraire !

    · Le droit à la justice, le droit à l'égalité de même que l'impartialité dans le traitement de l'information sont, dans ces publications, autant de principes et de valeurs des droits de l'homme qui sont ainsi foulés au pied. Ainsi, par exemple, les versions données dans les écrits reflètent toujours celle d'une partie ou de la même position. Pour le cas du « tueur de Colma », quelle a été la version des codétenus, des présumées victimes ? Les victimes ont' ils formellement identifié le présumé délinquant comme étant leur agresseur ? Le suicide est-ile fondé ? Au quel cas, quelles sont les mesures prises pour que de pareilles morts ne surviennent plus dans les lieux de détention ? Autant de questions dont les réponses auraient permis aux articles publiés d'être en plus en phase avec les valeurs des droits de l'homme.

    A partir de ces quelques extraits de publications parues dans la presse écrite au Burkina Faso, on perçoit clairement que contrairement à son rôle de dénonciation, de promotion du respect des droits de l'homme que l'on attend légitimement d'elle, il arrive que les médias fassent totalement fi de ces droits fondamentaux, s'ils n'y portent pas directement atteinte.

    Dès lors se pose la question de savoir s'il existe un système ou des systèmes de garantie éthique de l'intervention de la presse dans le champ des droits de l'homme, du moins dans la relation de leur violation ? De façon plus générale, quelles sont les dispositions applicables en matière de respect de l'éthique des droits fondamentaux par la presse ? Et quelles peuvent être leurs limites ?

    Deuxième partie : Les systèmes de garantie de l'éthique des droits de l'homme par la presse au Burkina Faso

    Les systèmes juridiques de garantie des droits de l'homme pour être efficaces et effectifs reposent sur deux facteurs complémentaires et indissociables. Il s'agit d'une part, des textes applicables et d'autre part des organes de contrôle de l'effectivité de l'application desdits textes. Les textes renvoient aux dispositions réglementaires, légales, à loi. Ils sont souvent regroupés sous les termes d'outils ou d'instruments juridiques. Quant aux organes de contrôle, ils désignent toute sorte de mécanisme de nature juridictionnelle ou quasi-juridictionnelle ou encore non juridictionnelle mis expressément en place pour surveiller l'application effective d'un texte particulier.

    Il s'agira, ici, de faire le point des instruments applicables aux questions éthiques liées aux publications de la presse écrite relatifs aux violations des droits fondamentaux ainsi que leurs mécanismes de leur garantie.

    Chapitre 1. Les outils

    La liberté de presse est reconnue comme une des libertés fondamentales. Elle est en ce sens consacrée par un ensemble d'instruments juridiques relatifs aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales. Egalement, la liberté de presse se trouve encadrée par des textes non juridiques ; des textes faisant référence en l'occurrence à des valeurs d'ordre éthique. De cet état de fait, on peut dire que la jouissance et l'effectivité de la liberté de presse se trouvent doublement contrôlées : au niveau juridique et au niveau éthique. Les garanties de la liberté de presse renvoient donc aux systèmes juridiques c'est-à-dire à l'articulation de textes juridiques et à un corpus de valeurs d'ordre moral ; l'ensemble assorti ou non de mécanismes de leur contrôle.

    1.1. La garantie de la liberté de presse au niveau juridique

    Les outils de garantie, de protection des droits liés à la liberté d'expression et par delà la liberté de presse peuvent se classer au triple niveau international, régional et national. Il est, toutefois, important de souligner que sur le plan du droit, la liberté de la presse n'est pas souvent littéralement inscrite dans les textes qui la consacrent. Elle se trouve associée à la liberté d'expression dont elle est une traduction.

    1.1.1. Les textes internationaux

    Les textes internationaux de garantie juridique de la liberté de presse sont comme décrits ci-dessous.

    1.1.1.1. La Déclaration universelle des droits de l'homme

    La déclaration universelle des droits de l'homme constitue l'instrument juridique de base de portée internationale sur les droits de l'homme. Rédigée dans la dynamique des textes précurseurs des droits de l'homme comme la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, la déclaration d'indépendance des Etats-Unis et de l'habeas corpus entre autres, la DUDH a été adoptée le 10 décembre 1948 par l'assemblée générale des Nations Unies dans sa résolution 217 A (III). En tant qu'elle est une résolution de l'assemblée générale, la déclaration de 1948 n'a pas force obligatoire pour la communauté internationale des Etats. Toutefois, bien que de portée déclaratoire, cet instrument constitue le socle des droits fondamentaux. Dès son préambule, la DUDH reconnaît implicitement l'importance de la diffusion des valeurs des droits de l'homme dans le processus historique de promotion et de protection de ceux-ci. Car il y est reconnu que c'est « la méconnaissance et le mépris des droits de l'homme [qui] ont conduit à des actes de barbarie qui révoltent la conscience de l'humanité et que l'avènement d'un monde où les êtres humains seront libres de parler et de croire, libérés de la terreur et de la misère, a été proclamé comme la plus haute aspiration de l'homme ». On peut en déduire que la garantie effective des droits de l'homme passe entre autres par une large diffusion de ceux-ci par les moyens de communication y compris la presse. Car plus les droits des individus sont connus par leurs détenteurs, il devient plus difficile de les violer. Concernant plus spécifiquement, la liberté de la presse, le texte de la DUDH l'a consacré à travers son article 19 en stipulant que « Tout individu a droit à la liberté d'opinion et d'expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d'expression que ce soit».

    Il est ainsi admis, les droits pour chaque individu de pouvoir chercher des informations et de les répandre par tout moyen. Ceci sans restrictions explicites autres que celles prévues par la disposition finale de la DUDH à savoir l'article 30 qui dit qu' « aucune disposition de la présente Déclaration ne peut être interprétée comme impliquant, pour un Etat, un groupement ou un individu, un droit quelconque de se livrer à une activité ou d'accomplir un acte visant à la destruction des droits et libertés qui y sont énoncés ». De la lettre de cette disposition, s'il existe une liberté d'expression et partant une liberté de presse proclamée, la jouissance de ces droits ne saurait aucunement induire un droit pour la remise en question des droits de l'homme inscrits dans la DUDH. En d'autres termes la liberté de presse se limite là où elle risque de porter atteinte aux droits de l'homme.

    1.1.1.2. Le pacte international relatif aux droits civils et politiques

    Le pacte international relatif aux droits civils et politiques constitue avec le pacte international sur les droits économiques, culturels et sociaux, un des premiers traités internationaux des droits de l'homme inspirés de la DUDH ayant force obligatoire pour les Etats qui y sont parties. Le PIDCP constitue donc à certains égards une reprise des principes de la DUDH dans un instrument opposable aux Etats qui l'ont signé. Cette convention a été adoptée le 16 décembre 1966. Elle est entrée en vigueur le 23 mars 1976. Le texte - comme son nom l'indique porte sur les droits civils et politiques dont fait partie la liberté de presse. En ce qui concerne cette liberté, sa garantie est prévue par l'article 19 du pacte. Celui-ci reconnaît que « 1. Nul ne peut être inquiété pour ses opinions. 2. Toute personne a droit à la liberté d'expression ; ce droit comprend la liberté de chercher, de recevoir et de répandre des informations et des idées de toute espèce, sans considérations de frontières, sous une forme orale, écrite, imprimée ou artistique, ou par tout autre moyen de son choix. 3. L'exercice des libertés prévues au paragraphe 2 du présent article comporte des devoirs spéciaux et des responsabilités spéciales. Il peut en conséquence être soumis à certaines restrictions qui doivent toutefois être expressément fixées par la loi et qui sont nécessaires : a) au respect des droits ou de la réputation d'autrui ; b) à la sauvegarde de la sécurité nationale, de l'ordre public, de la santé ou de la moralité publiques ».

    Ici, la liberté de presse est clairement reconnue comme une liberté d'expression. Tout individu peut rechercher, recevoir, répandre des informations sous forme écrite ou imprimée est-il précisé. Toutefois, à la différence de la DUDH, la liberté d'expression et par conséquent la liberté de presse fait ici l'objet de restrictions particulières pour son exercice. On pourrait dire, à cet effet, que la DUDH est généreuse en ce qui concerne cette liberté fondamentale. A contrario, le PIDCP dans sa disposition applicable à l'espèce, des dérogations sont précisées. Ces restrictions bien que prévues doivent cependant obéir à trois exigences. Elles doivent pour être applicables :

    1. être légales c'est-à-dire prévues par la loi au sens où nullem crimen sine lege ;

    2. être nécessaires au respect des droits ou de la réputation d'autrui ;

    3. être nécessaires à la sauvegarde de la sécurité nationale, de l'ordre public, de la santé ou de la moralité publiques ;

    En définitive, si le PIDCP reconnaît la liberté de presse, elle y associe des limites ayant pour but le respect des principes fondamentaux des droits de l'homme.

    Egalement à la différence de la DUDH, le PIDCP dispose d'un organe de contrôle. Il s'agit du comité des droits de l'homme des Nations Unies. C'est un organe de recours institué par le protocole facultatif au pacte de 1966. Les articles premier et deux du protocole font obligation aux Etats signataires au pacte de reconnaître la compétence de cet organe en ce qui concerne la connaissance des communications (ou plaintes) émanant de particuliers s'estimant victimes de violation par un Etat partie d'une des dispositions du pacte. La recevabilité des communications n'est toutefois possible qu'après épuisement des recours dans l'ordre juridique interne.

    1.1.1.3. Les textes internationaux spécifiques

    Outre les instruments internationaux de portée générale sur la question des droits de l'homme, la liberté de presse a fait l'objet d'un ensemble de textes internationaux spécifiques. Les principaux dans ce domaine sont :

    · La convention relative au droit international de rectification des Nations unies (résolution 630(VII) du 16 décembre 1952). Cette convention est entrée en vigueur le 24 août 1962. La convention vise à promouvoir le rôle de la presse dans la sauvegarde des droits fondamentaux et de la paix dans la coopération interétatique en établissant pour les Etats des droits de réponse internationale.

    · La déclaration sur les principes fondamentaux concernant la contribution des organes d'information au renforcement de la paix et de la compréhension internationale, à la promotion des droits de l'homme et à la lutte contre le racisme, l'apartheid et l'incitation à la guerre. La déclaration a été adoptée le 28 novembre 197834(*). Elle vise à promouvoir la participation de la presse à la promotion des droits de l'homme et de la paix entre les peuples de façon plus générale.

    · La résolution 1995/40 de la Commission des droits de l'homme du 3 mars 1995 sur le droit à la liberté d'opinion et d'expression. Cette décision reconnaît le caractère central de la liberté de presse dans le domaine de droits de l'homme.

    · La Déclaration sur le droit et la responsabilité des individus, groupes et organes de la société de promouvoir et protéger les droits de l'homme et les libertés fondamentales universellement reconnus : elle est a été adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies dans sa résolution 53/144 du 9 décembre 1998. Elle dit dans son article 11 que «  Chacun a le droit, individuellement ou en association avec d'autres, d'exercer son occupation ou sa profession conformément à la loi. Quiconque risque, de par sa profession ou son occupation, de porter atteinte à la dignité de la personne humaine, aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales d'autrui doit respecter ces droits et libertés et se conformer aux normes nationales ou internationales pertinentes de conduite ou d'éthique professionnelle ».

    Comme on le constate ici, les textes de portée spécifique en matière de liberté de presse sont en grande partie de type déclaratoire donc non contraignants pour les Etats.

    1.1.2. Les textes régionaux

    Les instruments juridiques régionaux relatifs à la liberté de presse renvoient aux traités adoptés au niveau régional par les organisations intergouvernementales. On en dénombre essentiellement trois, au niveau européen, au niveau africain et au niveau américain. Celui qui est applicable dans l'espèce présente est la charte africaine des droits de l'homme de 1986.

    1.1.2.1. Le cadre africain

    Au niveau africain, le texte de référence en matière de liberté de presse est la charte africaine des droits de l'homme et des peuples. Adoptée le 12 juillet 1981 par les Etats membres de l'Organisation de l'Unité Africaine (OUA) devenue Union Africaine34(*) depuis 2000, cette convention régionale est entrée en vigueur le 21 octobre 1986. Elle est au plan africain, la norme internationale des droits de l'homme. L'une des particularités qu'on reconnaît à ce texte est qu'il a prévu à coté des droits, des devoirs incombant aux individus.

    A l'instar des textes internationaux, la charte africaine proclame la liberté d'expression. Elle dispose dans son article 9 que « Toute personne a droit à l'information. Toute personne a le droit d'exprimer et de diffuser ses opinions dans le cadre des lois et règlements en vigueur ».

    Dans la charte Africaine des droits de l'homme, il n'est pas prévu des clauses dérogatoires spécifiques à la liberté d'expression qui fonde celle de la presse. Il est seulement précisé que cette liberté doit être exercée dans le cadre des lois et règlements. Autrement dit, la jouissance de ce droit doit être faite en conformité avec les dispositions légales en vigueur dans le ressort d'exercice de cette liberté.

    A la différence des textes internationaux généraux sur les droits de l'homme, la charte africaine introduit la notion de devoirs. Dans cette perspective, elle soumet dans son article 27.2 la jouissance des droits et partant ceux relatifs à la liberté de la presse au « respect du droit d'autrui, de la sécurité collective, de la morale et de l'intérêt commun ». Il ne s'agit donc pas d'une restriction spécifique à la liberté de presse mais d'une limitation valable pour l'ensemble des droits garantis par la charte.

    Ce vide de l'article 9 de la CADHP, semble toutefois, être comblé par la Déclaration de principes sur la liberté d'expression en Afrique adoptée par l'Union Africaine en 2002. Ce texte dispose dans son article 13 des mesures pénales ainsi qu'il suit : « 1. Les Etats doivent revoir toutes les restrictions pénales sur le contenu en vue de s'assurer qu'elles servent un intérêt légitime dans une société démocratique. 2. La liberté d'expression ne devrait pas être restreinte pour des raisons d'ordre public ou de sécurité nationale, à moins qu'il n'existe un risque réel de menace imminente d'un intérêt légitime et un lien causal direct entre la menace et l'expression ».

    Pour garantir l'exercice de la liberté de presse et des autres droits contenus dans la charte, il a été créé une commission et une cour africaines des droits de l'homme. Cette dernière a été instituée par le protocole du 9 juin 1998 adopté à Ouagadougou, au Burkina Faso. Egalement, un rapporteur spécial sur la liberté de la presse a été institué en 2005 par l'Union Africaine.

    La cour et la commission africaines des droits de l'homme sont réputées recevoir les communications émanant d'individus victimes d'une violation de la convention. Dans la réalité, ces organes restent peu actifs au regard de la forte implication des organes politiques dans leur fonctionnement. Pour ce qui est de la Cour par exemple, les juges sont désignés par leurs Etats. Ce qui fait douter certains spécialistes des droits de l'homme africains35(*), du pouvoir réel de cet organe judiciaire formulé à l'image de la cour européenne des droits de l'homme.

    1.1.2.2. Les autres cadres régionaux

    A coté des instruments africains, il existe d'autres normes régionales applicables en matière de liberté de la presse. Il s'agit de la CEDH et de la convention américaine relative aux droits de l'homme. Il est important d'aborder ces textes notamment la CEDH. En effet, le système européen représente le système modèle en matière de garantie des droits de l'homme. Mieux, l'interprétation que sa cour fait des instruments internationaux, influence grandement la jurisprudence en matière du droit international des droits de l'homme.

    Au niveau européen, l'instrument international de référence en matière des droits de l'homme est la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ce traité a été adopté le 4 novembre 1950. Il est entré en vigueur le 3 septembre 1953 et compte à ce jour 47 Etats signataires. L'article 10 de cet instrument stipule que « 1. Toute personne a droit à la liberté d'expression. Ce droit comprend la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques et sans considérations de frontières. Le présent article n'empêche pas les États de soumettre les entreprises de radiodiffusion, de cinéma ou de télévision à un régime d'autorisations. 2. L'exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l'intégrité territoriale ou à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d'autrui, pour empêcher la divulgation d'informations confidentielles ou pour garantir l'autorité et l'impartialité du pouvoir judiciaire ».

    La liberté de presse est reconnue comme liberté fondamentale au niveau européen avec toutefois des clauses dérogatoires. Ainsi, les restrictions possibles à la liberté de presse sont indiquées. Elles doivent obéir aux critères suivants :

    1. être prévues par la loi,

    2. protéger l'un des intérêts ou valeurs suivants :

    a. la sécurité nationale,

    b. l'intégrité territoriale ou à la prévention du crime,

    c. la protection de la santé ou de la morale,

    d. la protection de la réputation ou des droits d'autrui,

    e. empêcher la divulgation d'informations confidentielles

    f. l'impartialité du pouvoir judiciaire.

    3. enfin, constituées des mesures nécessaires dans une société démocratique,

    En plus de ces restrictions, pour la commission européenne, l'exercice de la liberté d'expression peut faire l'objet d'une ingérence de la puissance publique36(*) en vertu de l'article 17 de la convention européenne. Cet article dit qu' « Aucune des dispositions de la présente Convention ne peut être interprétée comme impliquant pour un Etat, un groupement ou un individu, un droit quelconque de se livrer à une activité ou d'accomplir un acte visant à la destruction des droits ou libertés reconnus dans la présente Convention ou à des limitations plus amples de ces droits et libertés que celles prévues à ladite Convention. »

    Comme pour le PIDCP, la convention européenne dispose d'un organe de contrôle. Mais dans le cas européen, le mécanisme de contrôle est de type juridictionnel au sens où ses décisions sous forme d'arrêt ont un caractère juridique contraignant. Elles sont revêtues de l'autorité de la chose jugée. La cour européenne est compétente pour connaître des plaintes individuelles relativement aux violations des droits promus par la convention. Ceci, une fois les recours juridiques internes épuisés.

    Dans la convention européenne, la liberté de presse n'est pas expressément visée mais l'interprétation de cette convention ne peut-être dissociée de la jurisprudence de la cour; ses arrêts ayant force obligatoire. Ainsi dans les arrêts, Castells c/ Espagne, 1992 et Prager et Oberschlick c/ Autriche, 1995, la Cour rappelle que le rôle éminent que joue la presse dans un Etat de droit. Elle ajoute dans une autre affaire (Lingens, 1986) que « si [la presse] ne doit pas franchir les bornes fixées en vue, notamment, de la « protection de la réputation d'autrui », il lui incombe néanmoins de communiquer des informations et des idées sur les questions débattues dans l'arène politique, tout comme sur celles qui concernent d'autres secteurs d'intérêt public. A sa fonction qui consiste à en diffuser s'ajoute le droit, pour le public, d'en recevoir ».

    En ce qui concerne les Etats américains, l'instrument régional de garantie des droits de l'homme est la Convention américaine pour la protection des droits de l'homme. Elle a été adoptée le 22 novembre 1969 et est entrée en vigueur le 18 juillet 1978. La convention contient un ensemble de dispositions relatives à la promotion et à la sauvegarde des droits des fondamentaux.

    Pour ce qui est spécifiquement de la liberté de presse, la convention américaine dit en son article 13 que « 1. Toute personne a droit à la liberté de pensée et d'expression ; ce droit comprend la liberté de chercher, de recevoir et de répandre des informations et des idées de toute espèce, sans considérations de frontières, que ce soit oralement ou par écrit, sous une forme imprimée ou artistique, ou par tout autre moyen de son choix. 2. L'exercice du droit prévu au paragraphe précédent ne peut être soumis à aucune censure préalable, mais il comporte des responsabilités ultérieures qui, expressément fixées par la loi, sont nécessaires : a) au respect des droits ou à la réputation d'autrui ; b) à la sauvegarde de la sécurité nationale, de l'ordre public, ou de la santé ou de la morale publique. 3. La liberté d'expression ne peut être restreinte par des voies ou des moyens indirects, notamment par les monopoles d'État ou privés sur le papier journal, les fréquences radioélectriques, les outils ou le matériel de diffusion, ou par toute autre mesure visant à entraver la communication et la circulation des idées et des opinions. 4. Sans préjudice des dispositions du paragraphe 2 ci-dessus, les spectacles publics peuvent être soumis par la loi à la censure, uniquement pour en réglementer l'accès en raison de la protection morale des enfants et des adolescents 5. Sont interdits par la loi toute propagande en faveur de la guerre, tout appel à la haine nationale, raciale ou religieuse, qui constituent des incitations à la violence, ainsi que toute autre action illégale analogue contre toute personne ou tout groupe de personnes déterminées, fondée sur des considérations de race, de couleur, de religion, de langue d'origine nationale, ou sur tous autres motifs ».

    Du contenu de l'article 13, on peut déduire les restrictions possibles à la liberté de presse. Les limitations prévues doivent en plus d'être stipulées par la loi être nécessaires :

    a) au respect des droits ou à la réputation d'autrui ;

    b) à la sauvegarde de la sécurité nationale, de l'ordre public, ou de la santé ou de la morale publique.

    Par ailleurs, le texte interdit expressément toute propagande constitutive d'incitations à la violence en faveur de la guerre, tout appel à la haine nationale, raciale ou religieuse, de même que toute autre action illégale analogue contre toute personne ou tout groupe de personnes déterminées, fondée sur des considérations de race, de couleur, de religion, de langue d'origine nationale, ou sur tous autres motifs.

    1.1.3. Les normes nationales

    Comme dit précédemment, la liberté de presse de façon générale est réglementée par un certain nombre d'instruments internationaux dont la plus importante est la charte internationale des droits de l'homme. De même, l'ensemble de ces textes précise, le cas échéant, les limitations possibles à ce droit notamment lorsqu'il entre en conflit avec d'autres droits ou valeurs contenus dans ces droits. Dans l'ordre juridique interne au Burkina, la norme supérieure dans l'ordonnancement juridique national qui est la constitution renvoie clairement à ces normes internationales. En rappel, la constitution du Burkina Faso a été adoptée par référendum le 2 juin 1991. Ainsi, le préambule de la constitution de 1991 - partie intégrante de cette loi - reconnaît la DUDH, la CADHP et les « autres instruments internationaux des droits de l'homme ». Plus loin dans ses dispositions, la constitution de 1991 reprend les grands principes fondateurs des droits de l'homme : l'égalité et la non discrimination (articles 1 et 4), la protection de la vie, l'intégrité physique (article 2), la protection de la vie privée (article 6), la liberté de croyance et de non croyance (article 7), les libertés d'opinion et de la presse (article 8).

    En ce qui concerne spécifiquement la presse, voici ce qu'en dit la constitution du Burkina Faso en son article 8 : « Les libertés d'opinion, de presse et le droit à l'information sont garanties. Toute personne a le droit d'exprimer et de diffuser ses opinions dans le cadre des lois et règlements en vigueur ».

    A partir de ce constat, on peut dire qu'au Burkina Faso, la liberté de la presse est juridiquement garantie car protégée par la norme supérieure dans l'ordonnancement juridique nationale.

    En vue de rendre effective la garantie, le Burkina Faso a adopté en outre, un code de l'information37(*). Le code de l'information va plus loin que la constitution en protégeant les hommes de médias dans l'exercice de la fonction de presse. En ce sens, l'article 108 dit clairement que « Les offenses par actes, propos ou menace contre un journaliste professionnel pendant ou à l'occasion de l'exercice de sa profession, seront punis conformément au texte en vigueur. »

    Egalement, pour revenir à la constitution, son texte dispose que les restrictions possibles à la liberté de presse sont les seules déterminées par la loi. Autrement dit, les dérogations possibles à la liberté de la presse doivent être légales. Alors que dit la loi en l'espèce ?

    Le code pénal à travers le code de l'information prévoit les infractions commises par voie de presse ou par tout autre moyen de publication. A la lecture de ce code, les faits incriminés renvoient à trois grandes catégories d'infractions de commission.

    La première catégorie comprend les contenus portant atteintes aux personnes. Elles concernent les actes comme l'offense, la diffamation et l'injure à l'égard des citoyens et des autorités publiques (chef de l'Etat, membres du gouvernement, diplomates et chefs d'Etat étrangers). Les peines prévues pour les infractions liées aux personnes vont de quinze jours ou 5 000 FCFA ou les deux à la fois à une peine d'emprisonnement de deux ans.

    La seconde catégorie d'infractions est constituée des contenus relatifs à l'ordre et à la moralité publics. Il s'agit des atteintes au secret militaire, à la décence et aux bonnes moeurs, à l'intimité de la vie privée, aux lois nationales, au secret de la procédure pénale ainsi que des informations erronées portant atteinte à la sûreté de l'Etat. Ces délits sont passibles de peines minimales pécuniaires de 5 000 FCFA et/ou de peines pénales d'un mois à 1 000 000 FCFA et/ou trois ans de prison.

    Et enfin, la dernière catégorie est composée des informations au contenu apologétique ou provocateur de comportements réprouvés. Le contenu apologétique encense un acte prohibé ou son auteur tandis que la provocation encourage à la commission d'un délit. On pourrait à certains égards affirmer que la provocation est antérieure à l'infraction alors que l'apologie, elle, est postérieure. Dans le code de l'information, il n'est pas fait pas de distinction entre ces deux notions. Car dans son article 103, il est dit que « Seront punis comme complices d'une action qualifiée de crime ou délit ceux qui auront directement ou indirectement fait par tous les moyens d'information, l'apologie d'actes qualifiés de crime ou délit. Cette disposition sera également applicable lorsque la provocation n'aura été suivie que d'une tentative de crime ou délit punissable. Ceux qui, par les mêmes moyens, auront directement provoqué l'un des crimes contre la sûreté intérieure de l'Etat, seront poursuivis et punis comme complices lorsque la provocation aura été suivie d'effet. Lorsque la provocation n'aura pas été suivie d'effet, la peine sera de six mois à cinq ans d'emprisonnement. Ceux qui par tout moyen auront fait l'apologie du racisme, du régionalisme, du tribalisme, de la xénophobie seront punis d'un emprisonnement de six mois à un an et d'une amende de 200 000 à 300 000 FCFA ou de l'une de ces deux peines seulement. »

    On le constate, les délits de presse sont sévèrement punis au Burkina Faso car leurs auteurs peuvent encourir jusqu'à de cinq années d'emprisonnement fermes. Au même moment le délit d'apologie, la provocation d'actes prohibés ne concerne que ceux qui sont légalement incriminés. Dès lors, l'apologie ou la provocation d'actes attentatoires aux principes des droits de l'homme même de valeur supra législative n'est pas sanctionné. Ainsi par exemple, un journal peut publier un texte enfreignant à la présomption d'innocence ou un autre principe en agissant ainsi en contre-courant des valeurs fondateurs des droits de l'Homme. Peut-être que c'est la présence de telles lacunes juridiques qui explique l'existence de textes alternatifs réglementant l'exercice de la liberté de la presse comme les codes ou chartes de déontologie ?

    1.2. La garantie de la liberté de presse au niveau éthique

    L'une des spécificités de la liberté de presse réside dans le fait qu'en plus des garanties juridiques qui l'encadre, elle fait l'objet d'une codification au plan de l'éthique professionnelle. Ainsi, la pratique révèle que dans de nombreux pays, les hommes de médias se sont dotés de textes réglementaires ayant pour vocation de contrôler le respect des principes propres à la profession.

    En plus de cette protection juridique et judiciaire, les journalistes ont des droits qui leurs sont reconnus par des textes d'ordre éthique. Ce sont en général, les codes de déontologie. Les chartes de déontologie sont des textes contenant des principes et des règles applicables à une corporation, ici les journalistes. Elles ont une valeur beaucoup plus morale que juridique. Ce sont donc des chartes d'autorégulation visant à une pratique saine du métier de journaliste. Ces codes sont souvent édictés par un syndicat ou une association professionnelle nationale à l'intention de ses membres et militants. Dans certains cas, le code de déontologie à une vocation nationale voire internationale. Ces textes également font l'objet pour certains de mécanisme de contrôle, de régulation.

    Le texte international de référence en matière de déontologie journalistique et « la déclaration des devoirs et des droits des journalistes ». Cette charte a été adoptée à Munich en 1971 par les représentants des fédérations de journalistes de la Communauté européenne, de Suisse et d'Autriche, ainsi que de diverses organisations internationales de journalistes. Elle a été ensuite adoptée par la Fédération International des Journalistes (FIJ) l'année suivante, en 1972, à Istanbul. Historiquement, cette charte est la version complète d'un code dont la première version datant de 1918 a été adoptée par le syndicat national des journalistes (SNJ) en France sous le nom de « la charte des devoirs professionnels des journalistes français » puis révisée et complétée en 1938.

    En plus de la déclaration de Munich, les organisations de journalistes ont dans de nombreux pays édicté des règles de déontologie. Ainsi dans le monde francophone on peut citer entre autres les exemples des pays suivants :

    · le Québec avec le guide de déontologie de la fédération professionnelle des journalistes du Québec de 1966 ;

    · la Belgique avec le code des principes de journalisme de Belgique de 1982 ;

    · et le Mali avec le code de déontologie du journaliste au Mali de Décembre 1991

    Au Burkina Faso, le code de référence en matière de déontologie journalistique est « la charte des journalistes burkinabé ». Elle a été adoptée par l'Association des Journalistes du Burkina (AJB) en 1990 à Bobo Dioulasso. C'est un corpus de devoirs et de droits reconnus aux hommes de médias au Burkina Faso. Même si c'est un document émanant au départ d'une association, la pratique révèle qu'il fait autorité dans la profession. En effet, en plus du code de l'information, le CSC utilise la charte du journaliste Burkinabé pour apprécier les cas litigieux dont elle a à connaître.

    Mais ici, il est important de souligner que l'éthique des droits de l'homme transcende les règles de déontologie. Elle fait référence à des normes, des valeurs et des principes universellement reconnus aux hommes. Comme dirait Nathalie Dollé « L'éthique ne se réfère qu'aux droits de l'homme, elle peut donc transgresser la déontologie aux intérêts catégoriels. Au nom de la liberté d'expression qui fonde son métier, le journaliste a « le droit » de révéler que cette femme est homosexuelle s'il en a la preuve. Une décision éthique peut lui faire garder le silence s'il pense par exemple qu'elle ne pourra pas assumer cette révélation publique. Le droit « autorise » mais le choix éthique peut consister à ne pas utiliser ce droit ». 38(*)

    Chapitre 2. Les mécanismes de garantie de l'éthique des droits de l'homme dans la presse

    Les mécanismes de garanties des textes juridiques peuvent être soit de type contentieux ou juridictionnels, soit de type non contentieux c'est-à-dire non juridictionnels. Ces deux types seront analysés en référence aux textes applicables en matière de publication de la presse.

    2.1. Les mécanismes juridictionnels

    Au Burkina Faso, la justice est la seule institution légale chargée de l'application effective de la loi par voie judiciaire. Elle est habilitée par la constitution39(*) à cet effet.

    Dans le principe, les traités internationaux sont de facto intégrés dans l'ordre interne dans le bloc de conventionalité. Ce statut est reconnu aux conventions en vertu de l'article 151 de la constitution de 1991. La constitution dispose que « Les traités et accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l'autre partie ».

    Mais, en l'absence de textes d'application spécifiques, les dispositions de certains traités sont difficilement justiciables devant les tribunaux nationaux même si le juge national est tenu de ne pas appliquer des lois contraires aux conventions liant le Burkina Faso. C'est pourquoi le texte de référence en matière de presse reste pour le juge - gardien des libertés individuelles et collective - le code de l'information.

    Le code énumère les infractions liées à la presse ainsi que les sanctions applicables. Les infractions y sont classées en deux chapitres : les crimes et délits commis par voie de presse ou par tout autre moyen de publication (Chapitre 2) et la protection de l'autorité publique et du citoyen (Chapitre 3).

    Sur la base de ce recueil de textes, l'initiative de la poursuite des d'infractions liées aux personnes physiques ou morales (diffamation, offense, injure) incombe à la victime mais la requête du ministère public est nécessaire pour le déclenchement de l'action publique. Le code de l'information dit en son article 123. : « La poursuite des délits et contraventions de simple police commis par la voie de la presse écrite, parlée ou filmée ou par tout autre moyen de publication aura lieu d'office ... et à la requête du ministère public ». Dans le cas spécifique des délits de diffamation, l'article 122 précise que l'action civile, sauf dans le cas de décès de l'auteur du fait incriminé ou d'amnistie, ne peut être séparée de l'action publique.

    De ces dispositions, il est clairement établi que le parquet joue un rôle central pour mettre en mouvement l'action publique même si il faut au départ une plainte de la partie lésée. Or, comme il est légalement reconnu au ministère public le droit d'apprécier l'opportunité ou non de la poursuite, il s'en suit que la partie lésée apparaît dépossédée d'une prérogative déterminante pour accéder à la justice. Par ailleurs, la loi prescrit la poursuite des infractions après un délai de trois mois révolus. Ceci, à compter du jour de la commission de celles-ci ou du jour du dernier acte de poursuite le cas échéant (article 140).

    Au regard de cette situation, il semble - selon certains auteurs comme E. DREYER - que la motivation du législateur ait été de « considérer qu'un procès médiatique risquerait d'accroître le scandale au lieu de laver l'affront 40(*)».

    Par ailleurs, dans le cas du Burkina Faso, en dehors de la victime et du ministère public, aucune autre forme de saisine n'est possible pour les atteintes que la presse pourrait faire aux droits fondamentaux pris comme principes ou valeurs protégées par des instruments internationaux contraignant auxquels le Burkina est partie. L'actio popularis, c'est-à-dire la possibilité pour un individu ou une association d'ester en justice au nom de la protection de l'ordre public ou du bien collectif n'est pas prévu dans le système judiciaire au Burkina Faso.

    S'il apparaît difficile du point de vue du droit pour une victime de délit de presse d'engager une action en justice en l'absence de la requête du parquet, le code a toutefois déterminé les personnes dont les responsabilités sont engagées dans les cas prévus (article 117). C'est une responsabilité en cascade car en l'absence d'une des personne présumée auteur du délit de presse c'est le second qui en répond et ainsi de suite. Les personnes responsables sont par ordre :

    1. les directeurs de publication ou éditeurs quelle que soit leur profession ou leur dénomination ou les co-directeurs de publication dans les cas où les directeurs jouissent d'une immunité légale ;

    2. ou les auteurs ;

    3. ou les imprimeurs ;

    Enfin, s'il est établi qu'il sont de connivence, la responsabilité des vendeurs, les distributeurs, les colporteurs et les afficheurs est engagée au même titre que celle du directeur de publication, des auteurs et des imprimeurs.

    En definitive, la responsabilité première d'une atteinte au droit par la presse incombe au directeur de publication du journal en cause.

    2.2. Les mécanismes non juridictionnels

    Par mécanisme non juridictionnel, on entend ici des organes non contentieux chargés de contrôlé la mise en ouvre de normes juridiques ou non, En ce qui concerne le domaine de l'observation de l'éthique des droits d el' homme par les écrits de la presse, on peut regrouper ces mécanismes en deux groupes, ceux qui internes aux organes de presse et ceux qui leurs sont externes.

    2.2.1. Les mécanismes internes aux organes de presse

    En vue de garantir le respect de l'éthique, de la déontologie et aussi de la loi en vigueur, le monde de la presse dispose de mécanismes de régulation internes à la corporation. On peut en distinguer deux types à savoir ceux qui sont internes à chaque organe de presse en tant que tel, ceux qui relèvent d'une organisation associative ou qui sont de organes consultatifs de l'Etat.

    2.2.1.1. Au sein des organes de presse

    Dans le souci de garantir la qualité professionnelle, au Burkina Faso, les rédactions des journaux disposent en général de deux mécanismes : le rédacteur en chef et la conférence de rédaction. Ces deux dispositifs interviennent en amont et aval de toute article susceptible de publication dans le journal. Avant d'écrire, le choix du sujet lorsque le temps le permet est discuté avec le rédacteur en chef. Dans les cas d'urgence, un événement soudain, la décision est prise par la journaliste sans observer la consultation préalable. Le texte une fois écrit, fait l'objet d'un avis du rédacteur en chef. La décision finale de publication relève en dernier de la conférence de rédaction.

    Entre ces deux dispositif, les rédactions des journaux ont des chefs de desk par thème : sports et loisirs, politique, économie, fait divers... Le nombre et la qualité des desks dépendent en grande partie de l'effectif de journalistes dont dispose chaque quotidien. Selon le thème majeur traité par un article, le chef du desk thématique en question peut être amené à apporter des observations aux écrits avant leur publication.

    Dans ce processus, certains hommes de médias que nous avons rencontrés affirment que, ni la quantité du travail, ni le temps ne joue en faveur d'un réel contrôle du contenu de tous les écrits paraissant dans les quotidiens. En dernier recours, toute personne se sentant lésée par une publication a, comme alternative, le droit de réponse. Celle-ci est prévue par la loi et fait obligation au journal de le publier. Mais, ce droit n'est pas applicable dans le cas des atteintes à l'éthique et aux principes de droits de l'homme. Car, ici c'est moins un individu doté de capacité d'intenter un procès que d'une valeur morale, éthique, ou d'un principe abstrait des droits de l'homme qui est remis en cause.

    2.2.1.2. Au sein de la profession de presse

    Au dessus des mécanismes internes à chaque organe de presse écrite dédié à la régulation des questions éthiques, on note au Burkina Faso, l'existence d'autres organes qui ont aussi cette vocation. Il s'agit cette fois, de structures mises en place par les professionnels des médias (les associations) ou crées par l'Etat avec la participation de ceux-ci (le CSC). Pour les premiers, on parle d'organes de corégulation alors que les seconds sont dits d'autorégulation41(*).

    · Les associations professionnelles de la presse

    Au sein de la profession, les journalistes au Burkina Faso sont organisés en associations à but non lucratif. Dans une liste « non exhaustive », le CSC a en dénombré vingt sept au Burkina Faso. A partir de la liste, on peut faire la catégorisation ci-dessous :

    l Les organisations syndicales : Celles-ci visent à défendre les intérêts moraux et matériels de ses membres. On en compte un seul, le syndicat national des Travailleurs de l'information et de la Communication (SYNATIC),

    l Les organisations spécifiques ou thématiques : Elles réunissent des journalistes partageant en commun certains attributs (femmes communicatrices) ou des spécialités thématiques (sport, droit, environnement, culture). C'est le type d'organisations le plus fréquemment rencontrées dans le monde des médias. Elles sont plus d'une trentaine42(*).

    l Les organisations à vocation généraliste réunissent elles, des professionnels des médias autour d'objectifs plus généraux communs à toute la profession. Ce type d'organisation fonctionne très souvent comme un observatoire de la déontologie. C'est le cas par exemple de l'Observatoire National de la Presse (ONAP) qui publie de temps à temps des communiqués relatifs à des actions en faveur de journalistes victimes de violations de leurs droits ou encore sur des questions de déontologie. Il y a surtout l'Association des Journalistes Burkinabé (AJB). C'est l'organisation qui est à la base de la charte du journaliste, document utilisé par le CSC dans l'appréciation des affaires qu'il a à connaître.

    · Le Conseil Supérieur de la Communication (CSC)

    Crée dans la dynamique de la démocratisation enclenchée au début des années 90 au Burkina Faso, le CSC s'appelait à sa création « Conseil Supérieur de l'Information »43(*). Elle a été modifiée par la loi N° 028 - 2005/AN du 14 juin 2005 portant création, composition et fonctionnement du Conseil Supérieur de la Communication.

    Le CSC est une autorité de régulation des activités des médias privés et publics exerçant au Burkina Faso ou qui y sont diffusés. A ce titre, son recours est non judiciaire. Elle est plutôt un organe non contentieux de règlement de conflits liés aux médias. Et, à la différence des pays comme la France, l'autorégulation au Burkina Faso, prend en compte la presse écrite. L'équivalent français du CSC, le CSA (Conseil Supérieur de l'Audiovisuel) n'est compétent qu'en matière de média audiovisuels.

    Parmi les attributions qui sont reconnues au CSC on note qu'il doit :

    1) veiller à l'application de la législation et de la réglementation relative à la communication du Burkina Faso ;

    2) contribuer au respect de la déontologie professionnelle ;

    3) veiller à la protection de la personne humaine contre les violences résultant de l'activité du secteur de la communication ;

    4) veiller au respect par les médias de la législation et de la réglementation en matière de protection et de promotion de la culture nationale ;

    5) fixer les règles d'intervention des médias appartenant à l'Etat en période électorale ;

    Le conseil est composé de douze membres désignés ainsi qu'il suit :

    · quatre membres par le Président du Faso44(*) ;

    · trois membres par le Président de l'Assemblée nationale ;

    · un membre par le Président du Conseil constitutionnel ;

    · et quatre membres par les associations professionnelles de la communication et de l'audiovisuel.

    Parmi les membres ci-dessus énumérés, président du Faso nommé le président du CSC.

    Au plan fonctionnel, le conseil est structuré en commissions. Celle qui a en charge les questions relatives aux manquements éthiques est la « commission chargée de liberté de la presse, de l'éthique de la déontologie et de la publicité dans les médias ». Elle procède par interpellation puis par audition des responsables des médias qui ont enfreint aux règles juridiques et/ou déontologique prescrites invariablement par le code de l'information et la charte des journalistes du Burkina. En général, les conclusions de ses auditions sont publiées dans la presse45(*).

    Annuellement, le Conseil supérieur de la communication est tenue d'adresser au Président du Faso, un rapport public. Celui-ci doit porter sur des éléments comme :

    1) l'exécution de ses missions, décisions et recommandations ;

    2) l'état des médias au Burkina Faso ;

    3) la situation de la liberté de la presse au Burkina Faso ;

    4) la qualité du contenu des programmes des médias ;

    5) le respect des textes législatifs et réglementaires relatifs à la communication et à la publicité ;

    6) les recommandations prospectives

    La saisine du CSC est ouverte à toute personne physique ou morale pour examiner une question relevant de sa compétence. Elle a pouvoir de s'autosaisir également.

    Dans les derniers rapports du CSC notamment ceux de 2005 et 2006, il apparaît clairement que ses constatations et arbitrage portent principalement sur l'observation des médias en période électorale. Les quelques cas relatifs à la presse écrite concerne les faits liés à des propos diffamatoires comme ceux reprochés en 2006 à l'hebdomadaire « l'indépendant » à propos d'un article relatif à la vie conjugale d'un député et un autre relatif à une caricature publiée par l'hebdomadaire satirique « Journal du Jeudi »46(*).

    Appréciant le rôle du CSC, son président, disait qu' « on peut limiter par la régulation l'exercice d'une liberté, telle la liberté de presse, si d'autres libertés plus importantes sont mises en danger par l'exercice non régulé de la première. Ainsi, l'instauration de la démocratie participative et de la paix dans un pays demande un respect strict de la déontologie journalistique. Si celle-ci n'est pas régulée efficacement par les rédactions ou la profession, il est acceptable de la voir régulée temporairement par une instance de régulation publique »47(*). Et de préciser que contrairement en Occident, où l'intervention d'un organe de régulation peut apparaître comme une ingérence, celui-ci permet en Afrique et particulièrement au Burkina Faso d'éviter des procès ou d'en réduire le nombre.

    Enfin, il est à noter que le CSC fait partie d'un certain nombre de réseaux internationaux. Il s'agit en l'occurrence du Réseau des instances africaines de régulation de la communication (RIARC) et le réseau des instances francophones de régulation des médias (REFRAM).

    2.2.2. Les mécanismes externes aux organes de presse

    Par mécanisme externe aux organes de presse on entend ici, tout dispositif de garantie des droits de l'homme qui n'est pas spécifiquement dédié aux médias mais qui de par ses attributions est censé réguler les cas de manquements aux valeurs des droits fondamentaux.

    · La Commission Nationale des droits de l'homme

    La commission nationale des Droits de l'Homme a été créée par le décret n° 2001- ... /PRES/MJPDH/SEPDH portant création, attributions, composition et fonctionnement de la commission nationale des droits humains. La CNDH au Burkina Faso comme ses consoeurs des autres pays fait partie des instances indépendantes de promotion des droits de l'homme prescrites par la déclaration de Paris. En rappel, ces principes portent sur le statut des institutions nationales. Ils ont été consacrés par l'Assemblée générale des nations Unies dans sa résolution 48/134 du 20 décembre 1993. Ces institutions ont pour vocation à être au niveau national ce qu'est le Conseil des Droits de l'Homme des Nations Unies48(*) au niveau international. Dès lors, elles sont chargées de contrôler la mise en oeuvre des conventions des droits de l'homme à l'échelle interne. Elles « sont à la charnière du pouvoir politique et de la société civile, du droit international et de l'ordre interne » comme le dirait DECAUX49(*) dans un article écrit à l'occasion du dixième anniversaire des principes de Paris.

    Aux termes du décret qui l'institue, la Commission Nationale des Droits Humains, au Burkina Faso se définit comme est un cadre national de concertation entre les acteurs publics concernés par les questions de droits humains, d'une part, et les représentants des associations, mouvements et organisations non gouvernementales de protection et de promotion des droits humains d'autre part. En tant qu'il est un organe consultatif en matière de droits de l'homme, il lui est reconnu, plusieurs attributions dans ce domaine à savoir :

    l l'établissement de rapports et des recommandations sur la situation des droits de l'homme au Burkina Faso,

    l la participation à la rédaction des rapports que le Burkina doit présenter aux comités et organes des traités des Nations ainsi que ceux de l'Union Africaine. Ceci conformément aux obligations conventionnelles de l'Etat.

    l alerter les autorités sur les éventuels écarts de fait et/ou de droit entre la situation des droits de l'homme au Burkina et les actes internationaux auxquels le pays a souscrit.

    l Attirer l'attention des pouvoirs publics sur les mesures favorables la protection et la promotion des droits humains, notamment en ce qui concerne : 1) La ratification des instruments internationaux relatifs aux droits humains ou l'adhésion à ces textes, ainsi que leur mise en oeuvre au plan national ; 2) Le cas échéant, la mise en conformité et l'harmonisation de la législation, des règlements et des pratiques nationaux avec les instruments internationaux relatifs aux droits humains, auxquels le Burkina Faso est partie, et leur mise en oeuvre effective ;

    La CNDH est composée de 24 membres votants dont 10 provenant des associations et mouvements des droits de l'homme, 6 des autorités coutumières et religieuses, 5 des syndicats, 2 personnes ressources en DH, un expert en médecine, un expert en communication et un représentant du médiateur du Faso (sorte de ombudsman). A ceux ci, il faut ajouter 8 membres représentants les ministères avec voix consultative.

    A travers ses attributions et aussi sa composition, la CNDH laisse transparaître de jure une organisation à même de promouvoir le respect de l'éthique des droits de l'homme dans tous les domaines de la vie. Mais, il semble qu'à ce jour cet organe est limité du fait de ses moyens limités et aussi de son incapacité à se saisir de nombreux cas de violations de droits de l'homme que connaît le Burkina Faso. En tous les cas, la CNDH n'a pas encore intervenu sur des cas de publications des violations des droits de l'homme attentatoires aux droits qu'elle est sensée promouvoir et protéger.

    · Le Comité national d'éthique

    Le comité national d'éthique du Burkina Faso fait partie des institutions créées suite à la tension sociopolitique née de l'assassinat non encore élucidé du journaliste Norbert Zongo et de trois de ces compagnons en décembre 2008. Il été créé par le décret N° 2001-278/PRES/PM du Président du Faso en date du 8 juin 2001. Il a été installé le 14 mars 2002. Crée au départ pour contribuer à l'apaisement d'une situation sociale explosive, le comité a pour objectif de veiller à la sauvegarde des valeurs laïques et républicaines aux plans moral, culture et humain. Il est chargé en outre, « de proposer toutes mesures visant à la préservation du civisme et à la moralisation de la vie publique et sociale »50(*). Le comité est composé de neuf membres nommés par décret pour un mandat de cinq ans non renouvelables. Les membres désignés se repartissent ainsi qu'il suit :

    · Autorités coutumières et religieuses : trois représentants

    · Les grands corps de contrôle de l'Etat (Cour des comptes, Médiateur du Faso, Inspection Général de l'Etat) : trois représentants

    · Trois personnalités désignées par le président du Faso.

    C'est une structure consultative dont la méthodologie de travail repose autour de rencontres d'échanges avec les autorités politiques, administratives, coutumières et religieuses, les responsables d'associations de jeunesse et de femmes. Sur la base de ces activités, le comité publie annuellement un rapport sur l'état de l'éthique au Burkina Faso. Au terme du décret l'instituant, « les recommandations et avis du Comité National d'Ethique sont transmis au Président du Faso qui en assure la publication par toute voie autorisée» (Article 8). En pratique, c'est à l'occasion d'une cérémonie solennelle que le rapport est remis officiellement au premier ministre qui en assure la transmission au chef de l'Etat. Pour le rapport 2003 remis au premier ministre le 31 mars 2005, ce sont principalement trois secteurs de la vie qui ont fait l'objet d'observation sur la période donnée. Il s'agit du domaine de la santé, de l'administration générale et de l'éducation. Pour les années à venir, le comité a recommandé de poursuivre son action en mettant l'accent sur les codes d'éthique et de déontologie dans les domaines de l'administration générale, de l'éducation, de la santé, de l'administration financière et l'administration sécuritaire.

    Dans la pratique, le comité national d'Ethique semble ne pas avoir gagné ses marques. Car sur de nombreuses questions éthiques dont celles soulevées par les publications de la presse, on l'attend toujours.

    · Les organisations des droits de l'homme

    Par organisation des droits de l'homme, on entend ici, toute association à but non lucratif dont l'objectif est la promotion et la protection des droits de l'homme en adéquation avec les normes internationalement reconnues en matière des droits de l'homme. Au Burkina Faso, une étude51(*) réalisée en décembre 2002 par le Centre pour la Gouvernance Démocratique (CGD) en avait dénombré vingt sept dont les plus actives, du moins visibles sont sans doute l'ACAT, Amnesty International Burkina Faso, le MBDHP, l'association « Promo Femme, Développement et Sport, le MBEJUS, la LIDEJEL, l'AFJB et l'UIDH. Dans le principe, les actions des organisations de droits de l'homme reposent sur deux volets inséparables qui sont la promotion d'une part et la protection de l'autre.

    La promotion vise de façon générale à la diffusion, à l'inculcation des valeurs et des principes des droits de l'homme au sein des communautés. Ces activités comprennent toutes les tâches relatives aux formations, aux campagnes médiatiques, à la sensibilisation, au plaidoyer et lobbying pour l'adoption puis l'application effective de lois protectrices des droits de l'homme par les Etats. Dans le cadre de tels types d'activités la presse joue un rôle important en participant à la diffusion des messages promotionnels de ces organisations.

    Quant à la protection elle consisterait à la surveillance de la situation des droits de l'homme dans une aire précise en vue d'agir pour la cessation, la réparation, la sanction des violations constatées et dans certains cas d'apporter une assistance aux victimes. Dans cette optique, la presse joue un double rôle, elle est une source de révélation de violations à travers généralement les « faits divers ». Mais elle constitue un moyen pour la publication des actions entreprises par les organisations de la société civile en vue de faire des violations. Ainsi, en est-il des actions urgentes et autres appels en faveur de victimes publiés régulièrement dans la presse par les organisations tels Amnesty International, Human Rights Watch, et le MBDHP52(*) au Burkina Faso pour ne citer que ceux-là.

    Mais que font ces organisations lorsque la presse elle-même, se rend coupable d'atteinte à des valeurs et des principes de droits l'homme en en faisant un traitement équivoque ? Pis quelles actions sont-elles mises en oeuvre à l'égard des publications qui objectivement, glorifient des actes violant les principes des droits fondamentaux ?

    Certes, dans le cas des « médias de la haine »53(*) au Rwanda appelant au meurtre des tutsi en prélude du génocide de 1994, certaines organisations comme la Commission Internationale des Juristes54(*) avaient attiré l'attention de l'opinion internationale. Egalement, il existe de plus en plus de structures (voir encadré 1) qui veillent sur le respect de règles d'éthique professionnelle par les médias. Mais dans le cas du Burkina Faso, une telle réaction n'a pas encore été notifiée.

    Encadré 1 : Une entreprise de veille de médias : Média ratings en France

    Il est à noter l'existence en France d'une structure privée de veille médiatique, il s'agit de média ratings. C'est une entreprise privée qui se veut indépendante. Elle a pour objectif, selon sa charte « d'observer les médias afin d'y déceler les dysfonctionnements médiatiques. Ainsi, [elle analyse] le contenu des médias sous différents aspects ». Sont surveillés entre autres par Média ratings, les journaux français suivants : le Monde, le Figaro, la Croix, Libération, l'Humanité, les Echos, Aujourd'hui, la Tribune. Mais ici, également, les questions d'éthique des droits de l'homme ne sont pas le critère déterminant dans la veille des dysfonctionnements de l'information fournie par les médias observés par Média ratings. Du reste, Média rating a fait l'objet d'une condamnation en 2006 par le tribunal correctionnel de Paris pour « avoir accusé le correspondant de France 2 à Jérusalem, Charles Enderlin, d'avoir "mis en scène" la mort d'un petit Palestinien sous les balles israéliennes en 2000 »55(*).

    Source : média ratings (www.m-r.fr)

    Troisième partie : Pour une presse respectueuse de l'éthique des droits de l'homme

    Les précédentes parties du mémoire se sont articulées sur la pratique journalistique et l'éthique des droits de l'homme, ainsi que sur les systèmes de garanties juridique ou non existants en la matière. La rigueur méthodologique implique que l'analyse de ces éléments aboutisse à des propositions visant à rendre le paysage médiatique plus respectueux des droits de l'homme lorsqu'il s'insère dans le champ de la révélation de leurs atteintes. Mais, de telles propositions ne peuvent se faire sans avoir au préalable étudier les différents phénomènes juridiques, sociologiques ou pratiques qui conditionnent une intervention peu éthique de la presse dans le domaine de la surveillance des violations des droits de l'homme.

    Chapitre 1 : Les facteurs explicatifs de la non observance de l'éthique des droits de l'homme par les publications de la presse écrite

    A l'analyse des textes juridiques et déontologiques, des mécanismes y afférents et de la pratique journalistique en matière de publication des violations des droits de l'homme, on peut en déduire un ensemble de facteurs explicatifs qui autorisent des traitements non respectueux de l'éthique des droits de l'homme. Ces facteurs se retrouvent à un double niveau : juridique et pratique.

    Au niveau juridique, il s'agit principalement des limites inhérentes au système juridique existant tandis qu'au niveau pratique un ensemble de contraintes dont certaines internes à la profession journalistique et les autres, externes, relèvent des contextes socio politiques particuliers d'exercice de la liberté de presse.

    1.1. Au niveau juridique

    A la lecture des instruments tant nationaux qu'internationaux encadrant la liberté de presse, il apparaît sans ambiguïté que la liberté de la presse est un droit fondamental protégé en conséquence. Dès lors, les possibilités de restreindre cette liberté sont strictes. Ce qui rend, juridiquement peu aisée tout recours civil ou public en cas de violation des autres droits à l'occasion de l'exercice de cette liberté. Cette situation est encore plus difficile lorsqu'il s'agit l'atteinte porte sur valeurs véhiculées par les droits fondamentaux comme la non observance de l'impartialité ou de la promotion du respect de ces droits. Dans le principe, la difficulté d'intervenir contre la liberté de la presse aussi bien dans les ordres juridiques international, régional que national.

    1.1.1. Le cadre international et ses limites

    Au niveau international, les normes applicables en matière de liberté de presse comme la charte internationale des droits de l'homme prévoient une possibilité de déroger à la liberté de presse. Non seulement, les dérogations restent soumises à des critères mais elles concernent seulement les cas de violations liées à la réputation et aux droits d'autrui ou attentatoire à l'ordre public (santé, moeurs, sécurité). Elles ne visent pas spécifiquement l'atteinte par les publications de la presse aux valeurs des droits de l'homme. Dès lors, on pourrait parler de mutité des normes internationales en qui concerne la violation des principes, des valeurs des droits de l'homme par les publications des journaux. Il est existe certes, des dispositions dans des textes internationaux qui peuvent être invoquées mais celles-ci relèvent d'instruments à portée déclaratoire. C'est le cas par exemple de la DUDH. Celle-ci en son article 30 précise que la jouissance d'un quelconque des droits protégés ne saurait en aucun cas remettre en cause un des droits y énoncés. Cette disposition pêche parce qu'elle n'est pas spécifique à la liberté de la presse mais également par le statut déclaratoire - donc non juridiquement contraignant - de son texte de référence.

    Il existe par ailleurs d'autres textes de portée internationale visant à réglementer l'intervention de la presse dans la promotion des valeurs des droits de l'homme. Mais, ceux-ci restent également des déclarations sans force obligatoire au sens juridique. Il s'agit en l'occurrence de :

    - la déclaration sur les principes fondamentaux concernant la contribution des organes d'information au renforcement de la paix et de la compréhension internationale, à la promotion des droits de l'homme et à la lutte contre le racisme, l'apartheid et l'incitation à la guerre - 28 novembre 1978,

    - la résolution 1995/40 de la Commission des droits de l'homme du 3 mars 1995 sur le droit à la liberté d'opinion et d'expression

    Dans le PIDCP par contre, on retrouve dans l'article 19, une possibilité de dérogation en cas d'atteinte à la moralité publique pourvue que cette limitation soit légalement prévue.

    Il en découle que les limitations à l'exercice de la liberté de la presse voire la poursuite pour des manquements - même grave - au respect de l'impartialité et des valeurs des droits de l'homme n'est pas chose aisée.

    1.1.2. Les limites du cadre régional

    L'esprit des restrictions à la liberté de la presse véhiculé par les textes internationaux se retrouve en grande partie repris dans la formulation des instruments des droits de l'homme au niveau régional. Ainsi, en est-il de la convention européenne, de la charte africaine et de la convention américaine respectivement dans leurs articles 10, 27.2 et 13.

    Tous ces textes disposent la possibilité de restrictions - préalablement prévues par la loi - à la liberté de la presse lorsque celle-ci porte atteinte « à la protection de la santé ou de la morale ».

    Ici comme au niveau international, l'atteinte aux valeurs des droits de l'homme n'est pas spécifiquement visée même s'il est prévu une dérogation en cas de nécessité pour la prévention de crimes. Ce qui revient à dire qu'une publication de la presse peut être considérée comme violant la convention dès lors qu'elle est susceptible d'inciter à des actes reconnus comme un crime. Ce qui exclue de jure les actes non légalement constitutifs de crimes comme les atteintes à l'éthique des droits de l'homme. Néanmoins, il est possible d'invoquer cette disposition si l'on considère les valeurs inhérentes aux droits de l'homme comme des valeurs morales. Encore que la morale relève d'une sphère qui n'est pas clairement établie pour tous les Etats et pour toujours. Reste à l'interprétation jurisprudentielle ou doctrinale de déterminer de façon précise quelles valeurs des droits de l'homme relèvent de la morale. Et dont la violation pourrait constituée une violation de l'article 10 de la convention européenne des droits de l'homme. Pour la cour européenne, les juridictions nationales sont les mieux à même d'en faire une interprétation applicable car pour les juges de Strasbourg ont eux-mêmes constaté l'absence d'une notion uniforme de la morale dans l'ordre juridique et social des divers Etats contractant. Ceci dans le cadre de l'appréciation de la clause dérogatoire à la liberté de presse qu'autorise l'expression « nécessaire dans une société démocratique »56(*).

    La convention interaméricaine, quant à elle, va plus loin en inscrivant dans son article 13. 5 que « sont interdits par la loi toute propagande en faveur de la guerre, tout appel à la haine nationale, raciale ou religieuse, qui constituent des incitations à la violence, ainsi que toute autre action illégale analogue contre toute personne ou tout groupe de personnes déterminées, fondée sur des considérations de race, de couleur, de religion, de langue d'origine nationale, ou sur tous autres motifs ».

    Dans le cas interaméricain, la particularité par rapport aux autres instruments régionaux réside dans le fait qu'il est précisé que la liberté de la presse peut être restreinte en cas d'incitation à des faits constitutifs de violence liée spécifiquement à des appels à la guerre ou à la haine nationale, raciale ou religieuse.

    On le perçoit assez clairement, les textes régionaux relatifs aux droits de l'homme sont allés un peu plus loin que les instruments internationaux pour empêcher une possible atteinte des valeurs des droits de l'homme par la presse. Mais, les textes restent limités car ils ne visent pas spécifiquement les actes des médias qui porteraient directement atteinte aux principes qui font l'objet du présent mémoire à savoir l'impartialité et la promotion du respect des droits de l'homme.

    Qu'en est-il au niveau national ?

    1.1.3. Les limites ou la mutité dans l'ordre juridique interne

    A titre comparatif, il est important d'évoquer l'état du droit positif dans d'autres Etats avant de présenter ce qu'il en est du Burkina Faso de façon spécifique. Pour cela, l'étude se réfère d'abord aux cas français et belge puis à la jurisprudence.

    Le ton est donné en France par la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Ce texte qui a acquis le rang de loi constitutionnelle proclame en son article 11, la liberté de presse en ces termes : « La libre communication des pensées et de opinions est un des droits les plus précieux de l'homme tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi ».

    Pour un auteur comme E. DREYER57(*), il y a en France une pléthore de textes en ce qui concerne la matière. Il y a d'une part le droit commun à travers le code pénal, le code de la santé, le code de justice militaire et de façon plus spécifique par la loi de 1881 qui dispose en son article premier que « l'imprimerie et la librairie sont libres » d'autre part. Pour ce qui concerne la présente recherche, l'étude portera uniquement sur les lois incriminant directement les faits relatifs aux valeurs objet de l'étude à savoir l'impartialité et la promotion des droits de l'homme par les publications de la presse écrite.

    La loi du 29 juillet 1881 est la loi de référence en matière de liberté d'expression et donc de liberté de la presse en France. Son autorité dans la matière est affirmée dans la jurisprudence. Ainsi, la cour de cassation a affirmé dans un arrêt en date du 12 juillet 2000 que «  les abus de la liberté d'expression prévus et réprimés par la loi du 29 juillet 1881 ne peuvent être réparés sur le fondement de l'article 138258(*) du code civil ».

    Relativement aux abus, la loi de 1881 distingue les actes d'omission et les actes de commission. Les actes d'omission porte sur exclusivement sur la non publication des droits de réponse ou des rectifications. Les infractions de commission porte sur trois types de contenus. On a les contenus liés aux personnes, les contenus liés aux actes et enfin ceux liés à certaines informations.

    L'atteinte aux valeurs des droits de l'homme s'inscrit dans les actes de commission liés non aux personnes mais aux actes et aux informations. Dans ce domaine précis, les infractions prévues portent sur les actes apologétiques de délits ou la contestation des crimes contre l'humanité. Selon DREYER, le législateur n'a pas donné un contenu exact à l'apologie des infractions. Et, aussi on établit souvent une distinction entre l'apologie et la provocation au crime. Pour des auteurs, « l'apologie peut-être définie comme tendant à justifier une action condamnée par la loi et à encenser celui qui l'a perpétrée » (P. 116). Aux termes de l'article 24, alinéa 3 de la loi de 1881, l'apologie incriminée ne concerne qu'une liste limitée d'infractions. L'incrimination de l'apologie porte sur les louanges des infractions de droit commun (comme le vol, l'extorsion, les destructions, les dégradations et détérioration dangereuses pour les personnes...), les crimes de guerre, les « infractions politiques » comme les infractions de collaboration avec l'ennemi et celle des crimes contre l'humanité.

    La liste des actes dont l'apologie est incriminée par la loi de 1881 étant limitative, il s'en suit, dès lors, que la répression de l'apologie ne saurait concernée les louanges faites relativement à d'autres actes même répréhensibles à fortiori à des actes non juridiquement incriminés comme les atteintes à l'éthique des droits de l'homme. Donc, en droit français, il serait difficile d'incriminer un acte constitutif d'une violation des valeurs des droits de l'homme lato sensu. Pis, un annotateur d'un arrêt de la chambre criminelle de la cour d'appel de Bourges en date du 28 novembre 1962, cité par DREYER, relativement à une affaire de publication vantant les mérites d'un guérisseur a observé que « l'article ne faisait qu'encourager d'hypothétiques infractions futures dont on ne savait même pas si elles auraient lieu, sous quelles modalité et avec quels participants. Ces délits futurs n'avaient encore aucune consistance réelle et n'étaient même pas arrivés aux actes préparatoires »59(*).

    On peut donc en conclure que ni la loi, ni la jurisprudence encore moins la doctrine n'autorise une incrimination directe des faits de publication de la presse attentatoires aux valeurs éthiques des droits de l'homme.

    Dans certains pays comme la Belgique, les journalistes jouissent d'un privilège de juridiction pour les délits autres que ceux liés à la xénophobie et au racisme. En effet, la constitution de la Belgique dispose que les délits de presse sont passibles de la cour d'assises ; une façon de décourager les poursuites contre la presse.

    A l'instar du cas français, au Burkina Faso, les délits de presse se retrouvent dans le droit commun mais surtout dans le droit spécial de la matière contenu dans le code de l'information.

    En dehors des infractions liées aux individus et à l'ordre public, il y est prévu ceux qui portent sur la publication de textes aux contenus apologétiques ou provocateurs d'infractions. En ce sens, l'article 103 du code de l'information incrimine sans distinction l'apologie de tout acte pourvu que ce dernier soit légalement reconnu comme un délit ou un crime. Les auteurs de telles publications sont punis au même chef comme complices de l'acte principal. Cette disposition va plus loin en incriminant les louanges faites aux actes de racisme, du régionalisme, du tribalisme, de la xénophobie. En rappel, si le racisme et la xénophobie peuvent être définies respectivement comme la haine contre les individus de race différentes et de non nationaux, le régionalisme et la tribalisme renvoient à la haine ou l'hostilité à l'encontre d'individus provenant de régions nationales ou de groupes ethniques différentes.

    Egalement, les mécanismes existants qui auraient pu - en cas de non respect de ces valeurs - être mis en mouvement dispose d'une marge de manoeuvre qui n'est pas forcement incitatif à la poursuite des potentiels auteurs de violation.

    D'abord parce que dans le cas des propos faisant l'apologie des crimes ou délits, l'initiative de la poursuite relève de la discrétion du ministère publique. Si fait que dans le cas du Burkina Faso, on a rarement assisté à une poursuite contre l'auteur d'une publication sur des violations des droits de l'homme qui n'auraient pas respecté l'impartialité voire qui en auraient fait l'apologie.

    Dans la législation burkinabé, il ressort donc que la poursuite pour des publications de presse non respectueuses de l'éthique des droits de l'homme n'est pas directement prévue. Pourtant, ces principes éthiques ont une valeur supra législative qui, en principe, devrait les rendre justiciables devant leurs juridictions nationales. Cet état s'expliquerait par la désarticulation entre l'ordre interne et l'ordre international.

    1.1.4. La désarticulation ou la disharmonie entre l'ordre interne et les normes internationales

    En comparant les dispositions juridiques relatifs au respect de l'éthique des droits de l'homme dans l'ordre interne et dans l'ordre international, il ressort une certaine disharmonie entre les deux niveaux. Ce phénomène n'est pas spécifique à la liberté de presse. On la retrouve pour d'autres types de droits reconnus, protégés par le droit international des droits de l'homme. En effet, bien que parties à de nombreux instruments internationaux des droits fondamentaux, de nombreux Etats dérogent à leur obligation positive consistant à rendre effectifs et applicables les dispositions de ces normes dans l'ordre juridique interne. Pour le Burkina Faso, la situation semble très criarde car dans une communication non publiée, le ministère de la promotion des droits humains a noter qu'en dépit de la signature de nombreuses conventions internationales par le gouvernement, aucune mesure n'était systématiquement prise pour leur internalisation. Si fait que ces textes internationaux restaient pratiquement sans effet dans le système juridique national. C'est l'exemple type du traité de Rome instituant la Cour pénale internationale. Elle a été ratifiée par le Burkina Faso le 16 avril 2004 mais n'a pas encore fait l'objet à ce jour d'une loi de mise en oeuvre en conformité avec la convention.

    Certes au Burkina Faso, la DUDH, la charte africaine des droits de l'homme et des peuples ont un statut de loi constitutionnelle car inscrits dans le préambule de la constitution de 1991, mais de là à être invoquée devant une juridiction nationale, la situation de jure et de fait en est loin. Ainsi, des publications de la presse écrite peuvent impunément violer les valeurs qui constituent les fondements des droits de l'homme et par conséquent l'Etat de droit.

    1.2. Les facteurs sociologiques

    1.2.1. Les facteurs internes au monde des médias

    En plus des lacunes inhérentes aux systèmes juridiques pour une garantie effective du traitement éthique des violations des droits de l'homme dans la presse quotidienne burkinabé, il y a une série de facteurs d'ordre pratiques et sociologiques qui concourent à cet état, si elles ne les encouragent pas. Parmi les facteurs les plus importants on peut citer :

    1.2.1.1. Le manque de formation en éthique des droits de l'homme

    Le manque de formation en éthique des droits de l'homme est une lacune largement partagée par les hommes de médias dans de nombreux pays y compris ceux du Nord. Dans un rapport destiné au Ministre de la Culture et de la Communication intitulé « réflexions et propositions sur la déontologie de l'information » et rédigé en 1999, Jean-Marie CHARON, notait que la réduction de la durée de la formation des journalistes ainsi que l'absence des curricula juridiques dans ces formations constituaient en amont, une porte ouverte à des dérives dans le traitement des informations ayant un contenu juridique ou ayant un rapport avec les questions de droit de l'homme.

    En plus du manque de formation appropriée des journalistes en droit fondamentaux, on observe dans la pratique au Burkina Faso que de nombreux hommes de média n'ont même pas la formation de base dans en journalismes. Le manque d'emploi associé aux bas salaires attire des diplômés dans d'autres domaines (philosophie, lettres, ...), dans le métier de journalistes. Pour ce qui est des correspondants de presse, très souvent le niveau d'instruction de base ne dépasse guère le baccalauréat. De ce fait, ni les principes de déontologie ni les règles de base du métier ne sont observés.

    1.2.1.2. Les limites des codes de déontologie

    Les chartes de déontologie sont par essence des textes à valeur morale. Elles ne comportent pas de sanctions. A titre d'illustration, le guide de déontologie de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec en 1996 se reconnaît explicitement comme dépourvu de force contraignante même à l'égard de ses membres. « Le présent Guide n'a donc pas de pouvoir coercitif, dit -il. ». Pour utiliser une expression consacrée les chartes déontologiques relèvent de « la justice des pairs » des journalistes. Dès lors, en cas de transgression ces chartes, les seules réprobations admises sont le rappel à l`ordre par des moyens comme la publication des articles incriminés et de recommandations voire au pire des cas l'exclusion de l'auteur de l'association.

    Enfin, bien que certains organes de presse aient leur propre code déontologique qui sont en général est une déclinaison spécifique des codes connus, ceux-ci restent d'application limitée au personnel de cet organe.

    N'est-ce face à cette situation que la Fédération International des Journalistes (FIJ) entrevoit, pour cette année 2008, de lancer une campagne internationale sur le thème « Initiative pour un journalisme éthique »61(*). Cette action, selon l'organisation, vise à rétablir les valeurs et mission propres au journalisme.

    1.2.1.3. La précarité du statut matériel des journalistes

    Publier un article dans un journal relève d'une profession dont le statut professionnel a de la peine à être officiellement reconnu. Déjà en France, un rapport établi en 1935, relativement à la proposition de loi sur le statut professionnel des journalistes, reconnaissait « qu'une des conditions de la liberté de la presse résidait dans la liberté du journaliste, et que celui-ci ne pouvait se sentir libre que dans la mesure où sa profession était assurée de l'indépendance matérielle et de la dignité ».

    Dans le cas du Burkina Faso, les conditions de travail des journalistes reviennent toujours comme l'un des problèmes actuels auxquels ces travailleurs sont confrontés. Cette situation est si mal vécue qu'aussi bien les organisations professionnelles de journalistes que le CSC font de la nécessité d'une convention collective une des principales recommandations des rapports produits sur la presse au Burkina Faso62(*).

    A l'absence d'une convention collective, on assiste à des phénomènes comme ce qu'on appelle au Burkina Faso, le « journalisme alimentaire ». Il agit de la course à l'argent avec les risques de partialité que cela peut faire peser sur le traitement de l'information voire sur la ligne éditoriale du journal. Le constat est ainsi établi par un rapport du MBDHP : « Contre toute attente, l'assassinat de Norbert Zongo a consacré une division nette au sein des journalistes burkinabé. Certains se sont érigés en véritables défenseurs du pouvoir ... Ces journalistes « alimentaires » ont ignoré les règles déontologiques et se sont assis sur leur conscience... Dérogeant aux règles de la déontologie de la profession, des média proches du pouvoir se sont singularisés par la haine déversée régulièrement dans leurs colonnes »63(*)

    A coté des contraintes inhérentes à la profession de journaliste au Burkina Faso, il en existe un certain nombre d'autres, propres à l'environnement national ; environnement national qu'il est utile de prendre en considération pour mieux apprécier son influence sur l'inobservance de l'éthique des droits de l'homme par les publications de la presse.

    1.2.2. Les facteurs externes

    Qu'est ce qui peut, en dehors, de la corporation journalistique justifier les traitements éthiquement tendancieux que la presse fait des violations des droits fondamentaux de l'homme. Plusieurs facteurs non exhaustifs et non exclusifs sont à prendre en considération.

    1.2.2.1. Les risques et menaces liés au traitement des violations des droits l'homme

    Au Burkina Faso comme dans nombre d'Etat se déclarant de droit, on est malheureusement obligé de reconnaître que les journalistes font l'objet de répressions. Arrestations, procès, emprisonnement, menaces et même mort sont des risques réels encourus.

    Pour ce qui des arrestations et procès, plusieurs dizaines ont été énumérés pendant les dix dernières années aussi bien dans les rapports64(*) du MBDHP, d'Amnesty International que de Reporters Sans Frontières.

    Pour Dégni Ségui, la répression dont sont victimes les hommes de médias trouvent malheureusement des fondements juridiques dans les législations nationales. Ainsi on se retrouve dans des situations dans lesquelles le délit d'opinion est sanctionné comme une « diffamation » ou de la «sédition ».  

    Le rapport 2008 de l'organisation RSF est très clair pour ce qui est des risques qu'encourent les hommes de médias dans l'exercice de leur profession. « En 2007, dit ce rapport, la liberté de la presse en Afrique a été durement blessée. Douze fois dans l'année, au moins, des hommes ont reçu l'ordre d'abattre des journalistes. Près de cent cinquante fois, des unités de la police ont reçu l'ordre d'arrêter, non pas un ministre corrompu ou un assassin notoire, mais un journaliste. Même les gouvernements des pays dans lesquels Reporters sans frontières avait fondé de l'espoir les années précédentes ont fait jouer les instruments de la répression contre la presse. Hormis quelques pays, comme le Ghana ou la Namibie, entre autres, l'année a été marquée par un recul général. Que s'est il passé ? »

    Dans cet environnement hostile, il v a s'en dire que l'exercice du métier de journaliste devient très risqué. Surtout lorsqu'il s'agit de traiter de façon impartiale et éthique des questions des droits de l'homme. A ce sujet, RSF rappelait dans son rapport 2007 à propos du Burkina Faso que « même si la critique est admise et les enquêtes dérangeantes largement publiées, mettre en cause le chef de l'Etat, sa famille ou ses plus proches alliés reste un exercice à risques. Le bimensuel privé L'Evénement en a fait l'expérience à la fin de l'année, après que François Compaoré65(*) eut porté plainte pour «diffamation» à son encontre». Cette assertion semble être confirmée par le CSC. Ainsi, dans sa recommandation n°001/2008/CSC/SG/CAB parue dans « l'Observateur Paalga » du 14 mars 2008 relativement à « des graves manquements professionnels », cet organe de régulation rappelle que ceux-ci « portent sur des articles écrits sur fond de rumeurs de toutes sortes, d'incitations à la haine, d'anathèmes basés sur des considérations régionalistes et ethnicistes. Cette fracture avec les normes professionnelles porte également sur des allégations et des insinuations ne reposant sur aucune preuve matérielle sur l'état de santé du Président du Faso »66(*).

    A titre de comparaison avec le contexte des pays occidentaux, « no one in a New York, London or Paris editorial conference will say, If we say this, will the authorities kill us or put us in jail?. Editors would be concerned about issues of libel and litigation67(*) ». C'est une réalité car, encore à ce jour, de nombreuses infractions de presse sont passibles de peines pénales en Afrique comme on l'a vu à travers le code de l'information du Burkina Faso. Le risque d'être emprisonné n'est donc pas seulement de jure, il est réel, permanent. A ce propos, on remarquera que la dépénalisation des délits de presse est un combat actuel des journalistes. Ils l'ont réaffirmé lors de la 36e Assises de la presse francophone tenue en novembre 2004 à Ouagadougou, Burkina Faso en appelant à la dépénalisation de ces délits qui constituent une menace sur liberté de presse.

    Mais, le pire des risques auquel peut être confronté un journaliste qui traite des sujets liés à des violations des droits de l'homme est la disparition physique. La mort du journaliste burkinabé Norbert Zongo aurait un lien avec ses enquêtes sur des atteintes aux droits de l'homme. En rappel, Norbert Zongo était un journaliste burkinabé qui a été retrouvé mort, criblé de balles et brûlé avec trois de ses compagnons, le 13 décembre 1998. Cette mort est survenue alors que le journaliste enquêtait sur la mort suspecte du chauffeur du frère cadet du chef de l'Etat. En dépit, de la désignation de « six suspects sérieux »68(*), membres du Régiment de Sécurité Présidentielle, par la commission d'enquête indépendante créée à cet effet, la justice burkinabé a finalement décidé d'un non lieu en 2006.

    Dans ce contexte, le choix éditoriale du journaliste qui traite des questions des violations semble être clair. Il faut éviter de mettre en exergue la responsabilité de ceux qui paradoxalement ont l'obligation impérieuse de promouvoir et de protéger les droits de l'homme au nom de tous les Burkinabé.

    1.2.2.2. Le contexte sociopolitique

    A coté des menaces que fait peser le pouvoir d'Etat sur les journalistes, il y a les pesanteurs d'ordre sociologique. Dans cet ordre d'idées on citera :

    · Le fort taux d'analphabétisme de la population qui atteint plus de 75 % des adultes. Dans son rapport sur le Développement durable 2006, le PNUD estimait à 21,8%, le pourcentage des adultes alphabétisés au Burkina Faso. A ce sujet, est-il important de rappeler que dans le préambule de la déclaration française des droits de l'homme et du citoyen de 1789, « Les Représentants du Peuple Français, constitués en Assemblée Nationale, [ont considéré] que l'ignorance, l'oubli ou le mépris des droits de l'Homme sont les seules causes des malheurs publics et de la corruption des Gouvernements... »

    · Le consensualisme propre aux coutumes traditionnelles qui veut que l'autorité du chef ne soit pas récusée même s'il est en faute.

    · La perception des défenseurs la promotion et de la protection des droits de l'homme comme des opposants politiques

    · L'impunité des violations des droits de l'homme ; les lynchages publics de présumés délinquants, les exécutions extrajudiciaires des prétendus bandits font rarement suivies de poursuites. Et pour les populations, ces actes s'apparentent aux meilleures méthodes de rendre justice.

    Bien que l'Etat ait ratifié un certain nombre de textes protégeant les DH, la situation de facto montre peu d'entrain au respect des règles contenues dans ces instruments. On peut dire qu' « au regard de l'arsenal juridique « démocratique » existant au Burkina Faso, il n'est pas abusif de prétendre que l'Etat de droit existe, mais son effectivité reste sujette à caution dans la mesure où se pose la question de l'application des textes en vigueur »69(*). Dans ces conditions, les individus, les journalistes qui promeuvent ces valeurs sont souvent perçus comme des personnes subversives. Car intervenir pour la promotion des droits de l'homme équivaut en général à rappeler aux Etats et par delà les gouvernants leurs obligations conventionnelles. C'est pourquoi de nombreux journalistes préfèrent au mieux traiter des questions des droits de l'homme dans les sens souhaité par les Etats et du milieu social. Il est important de souligner qu'en plus de l'Etat qui dont la responsabilité est engagé dans les violations des droits de l'homme, il y a un contexte sociopolitique peu favorable à la promotion des valeurs des droits de l'homme. A ce propos, le doyen Réné Dégni-Ségui écrit que « la presse devient en effet désormais une des cibles privilégiées des pouvoirs publics, parce qu'elle entend jouer le rôle qui est le sien, à savoir le vecteur transducteur des aspirations profondes et des revendications légitimes des citoyens »70(*).

    En plus de ce qui précède, il n'est pas vain de noter que le fait que le Président du CSC, instance de régulation de la presse au Burkina Faso, soit nommé par le Président du Faso, place celui-ci dans une situation de potentielle subordination directe à l'exécutif. N'est-ce peut-être pas cette position qui justifie la propension de cet organe à réagir lorsque le chef de l'Etat est cité dans un article de presse. Comme ce fut le cas récemment concernant sa maladie71(*). Autant, la presse doit être indépendante pour être impartiale, autant les institutions de régulations doivent également l'être.

    La conjugaison de cet ensemble de facteurs fait du contexte social un espace très peu favorable à la publication des violations des droits de l'homme comme telles. Dès, lors, le journaliste membre de la communauté est tenté de s'accommoder à ces perceptions. Il écrit et commente les faits dans le sens attendu par son audience, sa communauté. Il doit être dans l'air du temps. C'est pourquoi à juste titre, « This reactivity to something that is in the air also explains what the militants of a cause often deplore as a lack of consistency in the media coverage of their cause. Since the real motivation of the news people in treating a story with a human rights content is not generally to redress a wrong but to share in a collective sensitivity over a particular issue at a given time, they do not feel the necessity to pursue the coverage when they feel that the public attention wanes on that issue. »72(*)

    Le journaliste traitant des questions de droits de l'homme est donc confronté à deux courants d'hostilités, l'un provenant de l'Etat et des pouvoirs publics et l'autre lié au l'environnement social défavorable. Avec autant de risques réels, on peut avancer que l'environnement sociopolitique actuel n'offre pas suffisamment de garanties incitatives à un traitement éthiquement approprié des violations des droits de l'homme ; le journaliste risquant de se retrouver tout seul face aux pouvoirs politiques dans un environnement social lui même hostile.

    En definitive, la presse est libre au Burkina Faso, elle peut traiter de tous les sujets, sous tous les angles, même en portant atteinte aux valeurs des droits de l'homme. Les deux seules conditions à observer seraient seulement :

    · Etre, au minimum, conforme aux mentalités, aux façons de voir de la majorité de la population ;

    · éviter, au maximum, d'évoquer des cas de violations dans lesquels la responsabilité des autorités étatiques peut être engagée.

    Alors, que faire pour contribuer à ce que la presse burkinabé qui est une sentinelle des droits de l'homme continue, en tant que acteur clé de l'Etat de droit, à révéler les violations des droits fondamentaux dans le respect de ces mêmes droits ?

    Chapitre 2. Pour des publications éthiques dans la presse écrite

    A la suite de l'étude de l'intervention de la presse dans la surveillance des violations de l'homme, il sied à la suite de l'analyse des problèmes identifiés de suggérer quelques éléments visant à accroître le niveau éthique des publications que la presse fait des questions des droits de l'homme.

    2.1. Au niveau juridique

    A u niveau juridique, il y a tout d'abord la nécessité d'une harmonisation des lois internes aux normes internationales qui lient l'Etat du Burkina Faso. On pourrait dire qu'il s'agit d'une obligation positive qui pèse sur les Etats signataires de conventions. Car, il existe certes des organes internationaux de contrôle pour nombre de conventions internationales. Mais l'existence de ces mécanismes ne dispense pas les Etats parties à remplir leurs obligations de protéger efficacement les droits de l'homme conformément aux engagements internationaux qu'ils ont souverainement pris. Comme le reconnaît F. SUDRE, « un système de protection des droits de l'homme n`est crédible que s'il offre aux individus des garanties efficaces pour la protection des leurs droits »73(*). Ces garanties comprennent aussi bien l'adoption de lois pénales réprimant les violations aux droits garantis par les traités que l'application effective desdites lois.

    Par conséquent, si de façon générale, les droits de l'homme sont garantis par des instruments internationaux, il ressort que la responsabilité première de leur protection effective incombe aux Etats qui sont seuls à même d'adopter les mesures législatives requises.

    Dans cet ordre d'idées, il n'est pas superflu de reconsidérer une des préoccupations des hommes de médias qui à savoir la dépénalisation des délits presse. C'est à ce titre semble t'il que le journaliste peut se sentir suffisamment protéger pour traiter sans crainte mais surtout de façon éthique les sujets ayant trait aux atteintes des droits fondamentaux. Car comme l'a reconnu, le comité des droits de l'homme des Nations Unies, « la détention en tant que sanction négative de l'expression d'une opinion constitue l'un des moyens les plus répréhensibles destinés à imposer le silence et de ce fait, est une violation grave des droits de l'homme »74(*) . Cela, même si comme l'ont montré certains auteurs comme Alghassim Khassim 75(*) cette dépénalisation peut faire courir des risques potentiels de dérapages au sein de la profession.

    2.2. Au niveau pratique

    Au Burkina Faso, bien que la pratique révèle que la majorité des hommes de médias est constituée de non spécialistes, on compte au moins deux écoles publiques de formation. Il s'agit de la filière « journalisme » de la faculté des arts et communication76(*) de l'université de Ouagadougou et de le Centre de Formation Professionnelle de l'Information (CFPI). Mais, à l'instar des formations dispensées dans d'autres pays comme la France, ces écoles ne prévoient pas des cours sur les droits de l'homme. Il est donc important que cette dimension soit systématiquement intégrée aux contenus des formations dispensées par ces écoles. Les questions de droits de l'homme étant évolutives, les stages de formations continues devraient également contenir des aspects sur les droits fondamentaux ou leur être spécialement dédiés.

    La formation comme indiquée ici, est une mesure qui se situe en amont de la publication. Ce qui signifie qu'il faut prévoir un dispositif a posteriori pour réduire au mieux les traitements non éthiques des violations des droits de l'homme. Il peut s'agir à l'intérieur des rédactions, de mettre en place un système de « contrôle éthique » de toute publication abordant une question des droits de l'homme.

    Hors de l'organe de presse, les associations professionnelles qui ont un volet co régulation, les institutions consultatives chargées de la régulation des médias, des droits de l'homme, de l'éthique comme le CSC, la CNDH, le CNE doivent impérativement inclure dans les critères d'appréciation, les valeurs et principes fondateurs des droits fondamentaux lorsqu'il s'agit d'analyser des publications de la presse y afférents. C'est une obligation qui leur incombe au regard des attributions qui leur sont reconnues au titre des textes qui les instituent.

    De même, les organisations de la société civile dédiées à la protection et la promotion des droits de l'homme doivent savoir que les traitements éthiquement équivoques des violations des droits de l'homme par la presse constituent également un champ d'activités.

    En ce qui concerne la charte de déontologie de l'AJB, elle pourrait explicitement inscrire le respect de l'éthique des droits de l'homme pour renforcer son article 12 relatif au respect de la vie privée de la dignité humaine Car sans un respect des valeurs et principes fondateurs des droits de l'homme, l'observation des autres principes aura toujours un goût d'inachevé.

    Conclusion

    La liberté de la presse constitue une des pierres angulaires des droits fondamentaux de l'homme. Elle constitue un des ses droits de même qu'elle contribue à l'effectivité des autres droits par la diffusion de ceux-ci et aussi par la révélation des violations. Elle joue de ce fait un rôle sans comme mesure dans la construction de l'Etat de Droit ainsi que sa consolidation. La presse et la liberté qui l'encadre sont dont les pendants nécessaires à la démocratie.

    Toutefois, dans sa fonction de participation à la révélation des atteintes aux droits fondamentaux, il arrive que les publications des médias écrits en fassent un traitement peu respectueux des valeurs qui fondent les droits de l'homme. C'est le cas par exemple que donne à observer des articles publiés par la presse écrite au Burkina Faso. Cette attitude si elle est contraire à la déontologie et à l'éthique des droits de l'homme s'expliqueraient en partie par des facteurs comme : le manque de professionnalisme, la méconnaissance des fondamentaux des droits d e l'homme par les journaliste, un cadre juridique plus porté sur la poursuite des journalistes que de la protection des valeurs des droits de l'homme, un contexte sociopolitique peu favorable à la promotion des droits de l'homme.

    Il est donc important que le milieu de la presse au Burkina Faso, intègre les questions des droits de l'homme tant dans la manière de traiter l'information. Ceci au nom de l'obligation consubstantielle à la jouissance des droits protégés par la charte internationale des droits de l'homme. Ce qui du point juridique nécessiterait la prise en compte des valeurs des droits de l'homme telle que consacrées par les textes internationaux dans l'ordre interne. Si l'Etat du Burkina Faso a adhéré à ces normes de valeurs supra législatives, il lui incombe de les faire respecter, appliquer effectivement par tout individu relevant de ses juridictions y compris les journalistes.

    Pour finir, il est important de préciser que l'analyse éthique faite par la présente étude ainsi que les propositions y relatives visent à rendre compte d'un paradoxe liée à la liberté de la presse. Doit-on restreindre son exercice au nom du respect scrupuleux des valeurs des droits de l'Homme. Notre propos loin de tout « droit-de-l'hommisme » est à l'image de ce qu'a écrit, à ce propos, le Professeur Alain PELLET77(*) de l'Université de Paris X - Nanterre : « Ne pas, donc, imposer des valeurs qui, faute d'être passées dans le droit positif ne constituent pas des normes juridiques. Mais, en revanche, veiller, de manière sourcilleuse - aussi sourcilleuse que le droit le permet -, au respect de celles qui sont aujourd'hui reconnues comme telles par la communauté internationale dans son ensemble, et dont certaines ont acquis une valeur impérative, tant il est vrai que les normes protectrices des droits de l'homme sont, sans aucun doute, le domaine privilégié du jus cogens ».

    Sans cette disposition, comme Dieu hier et encore de nos jours, les valeurs des droits de l'Homme risqueraient d'être la raison au nom de laquelle d'autres abus risquent d'être perpétrés. Il s'agit plutôt de faire cohabiter tous les droits de l'homme et toutes les libertés fondamentales dans leur interdépendance, avec toujours en ligne de mire « l'irréductible humain » selon l'expression du Professeur Delmas-Marty.

    Bibliographie

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    SOYER Jean Claude Droit pénal et procédure pénale, LGDJ, 2006, 19e édition, 445 pages

    Quelques liens utiles

    · Cahiers du journalisme édités par l'Ecole Supérieure de Journalisme de Lille : http://www.cahiersdujournalisme.net/

    · Conseil Supérieur de la Communication : www.csi.bf

    · Organisations de défense des droits de l'homme :

    - Amnesty International : www.amnesty.org

    · Organisations de protection de la liberté de presse :

    - Reporters sans Frontières : www.rsf.org ;

    - Article 19 : www.article19.org ,

    - Fédération Internationale des Journalistes : www.ifj.org/fr

    · Quotidiens burkinabé :

    - Sidwaya : www.sidwaya.bf ;

    - Le pays : www.lepays.bf ;

    - L'observateur Paalga : www.lobservateur.bf

    · Revue Droits Fondamentaux : www.droits.fondamentaux.org

    · Surveillance et documentation des droits de l'homme :

    - HURIDOCS : www.huridocs.org;

    - Amnesty international : www.amnesty.nl/in_actie_vervolg/spa_fr

    · Médias ratings : www.m-r.fr

    · Mémoires d'études disponibles sur Internet : http://www.memoireonline.com/

    Tables des matières

    Sommaire 3

    Remerciements 6

    Liste des sigles et abréviations 7

    Introduction générale 8

    Première partie : L'éthique dans les publications des violations des droits de l'homme 14

    Chapitre 1 : Distinctions 15

    Chapitre 2 : L'impartialité et la promotion du respect des droits de l'homme comme principes éthiques 18

    2.1. L'impartialité 18

    2.2. La promotion du respect des droits de l'homme par la presse écrite 20

    Chapitre 3. L'éthique des droits de l'homme dans la pratique de la presse 22

    Deuxième partie : Les systèmes de garantie de l'éthique des droits de l'homme par la presse au Burkina Faso 28

    Chapitre 1. Les outils 29

    1.1. La garantie de la liberté de presse au niveau juridique 29

    1.1.1. Les textes internationaux 29

    1.1.1.1. La Déclaration universelle des droits de l'homme 30

    1.1.1.2. Le pacte international relatif aux droits civils et politiques 31

    1.1.1.3. Les textes internationaux spécifiques 32

    1.1.2. Les textes régionaux 33

    1.1.2.1. Le cadre africain 33

    1.1.2.2. Les autres cadres régionaux 35

    1.1.3. Les normes nationales 38

    1.2. La garantie de la liberté de presse au niveau éthique 41

    Chapitre 2. Les mécanismes de garantie de l'éthique des droits de l'homme dans la presse 43

    2.1. Les mécanismes juridictionnels 43

    2.2. Les mécanismes non juridictionnels 45

    2.2.1. Les mécanismes internes aux organes de presse 45

    2.2.1.1. Au sein des organes de presse 45

    2.2.1.2. Au sein de la profession de presse 46

    · Les associations professionnelles de la presse 46

    · Le Conseil Supérieur de la Communication (CSC) 47

    2.2.2. Les mécanismes externes aux organes de presse 50

    · La Commission Nationale des droits de l'homme 50

    · Le Comité national d'éthique 52

    · Les organisations des droits de l'homme 53

    Troisième partie : Pour une presse respectueuse de l'éthique des droits de l'homme 56

    Chapitre 1 : Les facteurs explicatifs de la non observance de l'éthique des droits de l'homme par les publications de la presse écrite 57

    1.1. Au niveau juridique 57

    1.1.1. Le cadre international et ses limites 58

    1.1.2. Les limites du cadre régional 59

    1.1.3. Les limites ou la mutité dans l'ordre juridique interne 60

    1.1.4. La désarticulation ou la disharmonie entre l'ordre interne et les normes internationales 63

    1.2. Les facteurs sociologiques 64

    1.2.1. Les facteurs internes au monde des médias 64

    1.2.1.1. Le manque de formation en éthique des droits de l'homme 64

    1.2.1.2. Les limites des codes de déontologie 65

    1.2.1.3. La précarité du statut matériel des journalistes 66

    1.2.2. Les facteurs externes 67

    1.2.2.1. Les risques et menaces liés au traitement des violations des droits l'homme 67

    1.2.2.2. Le contexte sociopolitique 69

    Chapitre 2. Pour des publications éthiques dans la presse écrite 72

    2.1. Au niveau juridique 72

    2.2. Au niveau pratique 73

    Conclusion 75

    Bibliographie 77

    Quelques liens utiles 80

    Tables des matières 81

    Annexes 83

    Annexe 1 : La charte des Journalistes Burkinabé 83

    Annexe 2 : Liste des associations de presse au Burkina Faso 84

    Annexe 3 : Les observations du CSC (publié dans la presse) 85

    Annexes

    Annexe 1 : La charte des Journalistes Burkinabé

    L'Association des Journalistes du Burkina (AJB) qui s'est fixé pour objectifs :

      De développer des rapports confraternels entre ses membres ;
      De tisser des liens d'amitié avec les journalistes des autres pays ;
      De définir et de défendre l'éthique du journalisme ;

    a élaboré et adopté la présente charte qui est le cadre de référence pour l'affirmation des droits et des devoirs des journalistes. Convaincu que le respect de la liberté de presse et le droit à l'information et à la communication constituent le fondement du plein exercice et de l'épanouissement de la profession de journaliste, l'AJB invite les journalistes du Burkina à observer scrupuleusement ce code déontologique et à le faire respecter

    DES DROITS DU JOURNALISTE BURKINABE

    Article 1 : Le journaliste burkinabé, de par sa profession, a droit à toutes les sources d'information.

    Article 2 : Le journaliste burkinabé est tenu de publier des informations justes dont les sources sont vérifiables, dans le souci de l'intérêt général. Il ne peut être l'objet de menace, de poursuite judiciaire et ou de sanction.

    Article 3 : Le journaliste burkinabé refuse de publier sous sa signature toute information qu'il juge contraire à ses propres convictions et à l'éthique professionnelle.

    Article 4 : Le journaliste burkinabé participe directement ou par l'intermédiaire de ses représentants, à toute décision concernant la vie de l'entreprise dans laquelle il travaille.

    Article 5 : Le journaliste burkinabé a droit à la sécurité physique, matérielle et sociale, dans l'exercice de ses fonctions.

    Article 6 : Le journaliste burkinabé a 1e droit de faire valoir la clause de conscience lorsque les orientations de l'organe de presse dans lequel il travaille ne répondent plus à ses convictions ou portent atteinte à l'éthique professionnelle. Par conséquent, il doit bénéficier des avantages liés à cette clause.

    DES DEVOIRS DU JOURNALISTE BURKINABE

    Article 7 : Le journaliste burkinabé est tenu au devoir de vérité par honnêteté intellectuelle, professionnelle et par souci de I'intérêt général.

    Article 8 : Afin de sauvegarder la dignité de la profession, le journaliste doit éviter à tout prix de verser dans la partialité et l'esprit partisan.

    Article 9 : Le journaliste digne de ce nom s'abstient de tout plagiat, de signer des articles qui ne sont pas les siens ou de se livrer à des manoeuvres de tout genre pour prendre la place d'un confrère.

    Pour sa crédibilité et celle de sa profession, il se doit de refuser toute forme de corruption et d'allégeance.

    Article 10 : Le journaliste s'interdit toute forme de rémunération illicite directe ou indirecte, tout avantage proposé en vue d'orienter son traitement de l'information.

    Article 11 : Le journaliste est tenu de protéger ses sources d'information de toute divulgation à même de le compromettre d'une manière ou d'une autre. En revanche, il ne doit pas user de moyens illicites pour obtenir des informations. Dans le respect de la loi, le journaliste peut utiliser tous 1es moyens pour obtenir une information.

    Article 12 : Le respect du droit des personnes à la vie privée et à la dignité humaine, en conformité avec les dispositions nationales et internationales en matière de droit concernant la protection des individus et interdisant la diffamation, la calomnie, l'injure, l'insinuation malveillante fait partie intégrante des normes professionnelles du journaliste burkinabè

    Bobo-Dioulasso Avril 1990

    Annexe 2 : Liste des associations de presse au Burkina Faso

    1. Association des Journalistes du Burkina (AJB)

    2. Observatoire NAtional de la Presse (ONAP),

    3. Association des Professionnelles Africaines de la Communication (APAC)

    4. Association des Editeurs et Publicateurs des Journaux en Langues Nationales (AEPJLN)

    5. Union Nationale de l'Audiovisuel Libre du FAso (UNALFA)

    6. Association des radios Association des Médias Communautaires (AMC)

    7. Association des Médias communautaires (ARC)

    8. Association des Radios Télévisions Privées du Burkina (ARTPB)

    9. Société des Editeurs de la Presse privée (SEP)

    10. Association des Journalistes Sportifs du Burkina (AJSB)

    11. Union de la Presse Sportive du Burkina (UPSB)

    12. Réseau des Journalistes traitant de l'Information Judiciaire (REJIJ)

    13. REseau des JOurnalistes en MEdecine TRAditionnelle (REJOMETRA

    14. Union Catholique Africaine de la Presse du Burkina (UCAP-B)

    15. Club de la Presse Diplomatique (CPD)

    16. Réseau Burkinabè des Communicateurs pour l'Environnement (RBCE)

    17. Club des Journalistes pour l'Environnement (CJE)

    18. Réseau des Journalistes en POpulation et Développement (RJPOD)

    19. Réseau des Journalistes de l'Education (RJE)

    20. Association Panafricaine des Communicateurs pour l'Intégration (APCI)

    21. Cercle des Journalistes Parlementaires (CJP)

    22. Réseau des Journalistes en Information Economique (RJIE)

    23. Réseau des Radios et Revues Rurales (4R)

    24. Association des Journalistes d'Information sur le Bâtiment, l'HAbitat et de la construction (AJIBHA)

    25. Club de presse des Nations unies (CPONU)

    26. Association pour la promotion des NTIC dans les médias (CLUBAROBASE)

    27. Club Patrick ILBOUDO (CPI)

    28. Réseau des Journalistes Burkinabè de Lutte contre le SIDA et les IST

    29. Ligue des communicateurs du Burkina (LICOB)

    30. Association Rayimkudumdé (AR)

    31. Ligue pour la défense de la liberté de la presse (LDLP)

    32. Reporter du Faso (RF)

    33. Union des journalistes et communicateurs culturels du Burkina (UJCB)

    34. SYndicat NAtional des Travailleurs de l'information et de la Communication (SYNATC),

    Source CSC, www.csi.bf

    Annexe 3 : Les observations du CSC (publié dans la presse)

    Le Conseil supérieur de la communication, gardien du respect de l'éthique et de la déontologie dans les médias, nous a fait parvenir le 12 mars sa recommandation n°001/2008/CSC/SG/CAB que voici.

    En dépit de conditions matérielles souvent difficiles, notre paysage médiatique s'illustre par la richesse des lignes éditoriales et la maturité professionnelle de ses acteurs. Cette situation vaut aux médias burkinabè d'être cités en exemple aussi bien dans la sous-région que dans l'espace francophone.

    Le Conseil supérieur de la communication constate malheureusement que, depuis quelque temps, il est amorcé de sérieuses atteintes à ces ressorts déontologiques et éthiques ainsi qu'un processus de rupture de cette assise professionnelle acquise par nos médias.

    A titre illustratif, et non exhaustif, le Conseil relève les graves manquements professionnels qui ont caractérisé les livraisons des n°134 du 25 février 2008 et 135 du 10 mars 2008 de l'Evénement, du n°462 du 29 février 2008 de l'Hebdo du Burkina, de l'Observateur Paalga n°7084 du 04 mars 2008, de l'Opinion n°543 du 05 au 11 mars 2008, du Journal du Jeudi n°859 du 06 au 12 mars 2008, de Bendré n° 485 du 03 mars 2008, du Libérateur n°51 du 05 au 19 mars 2008, de l'Indépendant n°757 du 11 mars 2008.

    Ces manquements, relayés notamment en langues nationales par certains médias audiovisuels, portent sur des articles écrits sur fond de rumeurs de toutes sortes, d'incitations à la haine, d'anathèmes basés sur des considérations régionalistes et ethnicistes. Cette fracture avec les normes professionnelles porte également sur des allégations et des insinuations ne reposant sur aucune preuve matérielle sur l'état de santé du Président du Faso.

    Le Conseil supérieur de la communication invite les responsables des organes sus-cités et, d'une manière générale, l'ensemble des professionnels tant du public que du privé, à cesser immédiatement ces pratiques antiprofessionnelles.

    A un moment où, sur le continent africain, la liberté de la presse est de plus en plus soumise à de graves aspérités, le plaidoyer du Conseil supérieur de la communication pour la dépénalisation des délits de presse peut se trouver contrarié par des comportements détonnant avec la responsabilité sociale qui se doit d'être le credo du journalisme.

    Face à de telles dérives, le Conseil supérieur de la communication rappelle aux organes de presse la nécessité pour eux de ne pas succomber au sensationnalisme facile, à la provocation inutile et indécente.

    Et cela, surtout pour des faits délitant nos références culturelles et exposant, en conséquence, toute la profession à une menace contre la tolérance. C'est au demeurant sur cette tolérance que repose le large consensus social, précisément illustré par la diversité des lignes rédactionnelles et éditoriales.

    Le Conseil supérieur de la communication, pour sa part, n'a cessé de rappeler aux hommes et femmes de médias la délicatesse de l'exercice de la liberté de la presse. Et cela, dans un contexte général où la démocratie, dont elle est une composante essentielle, se révèle être une oeuvre d'étape. Si l'exercice de la liberté de la presse à laquelle le Conseil attache du prix est la règle dans le traitement de l'information, il ne doit servir que l'intérêt général.

    Le Conseil supérieur de la communication sait compter sur leur sens de responsabilité pour éviter de remettre en cause les précieux acquis engrangés par notre pays dans la liberté d'opinion et de presse, surtout lorsque les faits relayés ne sont pas vérifiés.

    Aussi le Conseil invite-t-il les responsables des médias et les journalistes à éviter toutes les typologies d'instrumentalisation et à veiller à une stricte observation des règles fondamentales qui fondent la noblesse et la dignité de la profession.

    En tous les cas, cette recommandation, qui vaut une mise en demeure, sera suivie en cas de récidive de décisions administratives du Conseil supérieur de la communication, conformément à ses attributions et à ses missions régaliennes.

    Le président

    B. Luc Adolphe Tiao

    Commandeur de l'Ordre national

    NDLR : Dans sa recommandation sus-citée, le CSC a dû se tromper en citant le n°7084 du mardi 4 mars 2008 de l'Observateur Paalga, car nulle part dans cette édition il n'est fait cas de la santé du président, ou d'autres articles en rupture avec les ressorts éthiques et déontologiques.

    Par contre, dans l'édition 7082 de notre journal du vendredi 29 février au dimanche 02 mars, nous avons évoqué ce sujet "très sensible" de la santé du Président dans notre rubrique "Une lettre pour Laye".

    Si c'est cela l'objet querellé, nous dirons que, pour une fois, nous ne sommes pas en phase avec le CSC.

    Est-ce vraiment faire entorse à l'éthique et à la déontologie que de se préoccuper de la santé du Président ?

    Vraiment là, pas du tout !

    Source : L'Observateur Paalga N° 7092 du 14 mars 2008 (http://www.lobservateur.bf/spip.php?page=rubriquearchive&id_rubrique=7549)

    * 1 AI est un mouvement mondial, indépendant de bénévoles qui interviennent pour le respect universel des droits de l'homme.

    * 2 In « The observer », 28 mai 1961

    * 3 Un prisonnier d'opinion dans la terminologie d'Amnesty international est toute personne détenu du fait des distinctions comme la race, le sexe, l'opinion politique ou l'appartenance religieuse (AI, Mandat 1999).

    * 4 La commission des droits de l'homme a été remplacée en 2006 par le Conseil des Droits de l'Homme

    * 5 Voir à ce sujet Amnesty International, Rapport annuel 2000, Page 94 ; RSF, Rapport annuel 2007 et MBDHP, Rapport sur l'Etat des droits humains au Burkina Faso, période 1996 - 2002

    * 6 Voir à ce sujet CSC, Rapport public 2006, Pages 163 à 170

    * 7 Expression anglaise signifiant « chien de garde ». Elle est utilisée pour qualifier la fonction de surveillance des droits de l'homme

    * 8 Souligné par nous

    * 9 Augustin LOADA, Luc M. IBRIGA, Droit constitutionnel et institutions politiques, Collection précis de droit burkinabé, mars 2007, P.444

    * 10 Mouvement burkinabé des droits de l'homme et des peuples, Rapport 1996-2000. Ouagadougou 2001.

    * 11 Discours prononcé par le président Français F. Mitterrand lors du sommet Afrique France tenue à la Baule (France) en 1989. Ce discours inaugurait la conditionnalité de l'aide publique française au développement à la démocratisation dans les pays destinataires.

    * 12 www.lepays.bf; www.lobservateur.bf; www.sidwaya.bf

    * 13 Le premier protocole facultatif (1976) au PIDCP porte sur la procédure des communications (plaintes) individuelles devant le comité des droits de l'Homme des Nations unies. Le second (1989) concerne l'abolition de la peine de mort

    * 14 Cité par Anne-Eva AURE, Le journalisme citoyen : quelle réalité sociale ? Mémoire de master 1 en communication Juin 2007, Université Paul Valery Montpellier 3, CORNU.D, Ethique de l'information, Paris, PUF, « Que sais-je ? », 1997, p.5

    * 15 Ruwen Ogien, L'éthique aujourd'hui, Maximalistes et Minimalistes, Folio, 2007

    * 16 Gérard Cornu, 2007

    * 17 Amnesty international / CODESRIA, Ukwéli ; manuel relatif à la surveillance et la documentation des violations des droits humains en Afrique, 2005, page 33

    * 18 G. Cornu, Vocabulaire juridique, Paris, PUF, 2007 p.468

    * 19 Voir à ce sujet les articles 6.1 de la convention européenne des droits de l'homme et 7.4 de la charte africaine des droits de l'homme et des peuples.

    * 20 Une organisation comme AI se définit elle-même comme un « mouvement mondial indépendant et impartial de bénévoles ... »

    * 21 Code adopté par l'Association Générale des Journalistes professionnels de Belgique (AGJPB), l'Association belge des Editeurs de Journaux (ABEJ) et la Fédération Nationale des Hebdomadaires d'Information (FNHI) en 1982

    * 22 DC n° 81-129 du 30 octobre 1981, Recueil p. 35. cité par Frédérique BROCAL von Plauen, Le droit à l'information en France : La presse, le citoyen et le juge - 2004 - thèse de doctorat en Droit - université de Lyon

    * 23 Emmanuel Dreyer, 2003, page 81

    * 24 Serge Théophile Balima, Un journaliste professionnel est-il universel, réflexions sur la pratique journalistique en contexte africain, Cahiers du journalisme N° 16, automne 2006, page 193

    * 25 In L'observateur Paalga N° 6934, du 24 juillet 2007, « Wendemi, un don de Dieu mal entretenu », page 32.

    * 26 Rapport sur l'état des droits de l'homme au Burkina Faso, http://french.burkinafaso.usembassy.gov/uploads/images/qEM6Ppd3TgMchywy0kUe-g/HRR2008.pdf page 3

    * 27 In Sidwaya du 20 Août 2007 « Du pardon inachevé de l'armée à Dédougou »

    * 28 Jean Claude SOYER, Droit pénal et procédure pénale, LGDJ, 2006, 19e édition, page 272

    * 29 Réné Dégni Ségui, page 269

    * 30 Sidwaya N° 5741, page 27

    * 31 Sidwaya N° 5754, page 13

    * 32 Rapport sur l'état des droits de l'homme au Burkina Faso du Secrétariat d'Etat américain http://french.burkinafaso.usembassy.gov/uploads/images/qEM6Ppd3TgMchywy0kUe-g/HRR2008.pdf, page 2

    * 33 In « L'Observateur Paalga » N° 6716 du lundi 4 septembre 2006

    * 34 L'union Africaine a été créée en 2000 au sommet de Durban en Afrique mais c'est en 2002 qu'elle a effectivement remplacé l'OUA lors du sommet de Maputo au Mozambique.

    * 35 In ATANGANA AMOUGOU, « Avancées et limites du système africain de protection des droits de l'homme : la naissance de la cour africaine des droits de l'homme et des peuples », Revue Droits fondamentaux, n° 3, janvier - décembre 2003

    * 36 Arrêt du 2 mai 1988 D.I. c/Allemagne, Rapport de la Commission, 26 juin 1996, cité par Monica Macovei, 2003

    * 37 Loi N° 56/93/ADP du 30 décembre 1993

    * 38 Nathalie Dollé, Des espaces de déontologie et d'éthique pour une presse plus responsable, mémoire d'études diplôme d'université de 2e cycle, "éthique des droits de l'homme", 2006-2007. Page 27

    * 39 Burkina Faso, Constitution, titre VIII, page 39

    * 40 E. Dreyer, page 192

    * 41 Luc Adolphe TIAO, GUYOT, 2007

    * 42 Voir la liste des associations de journalistes en annexe 2

    * 43 Décret n°95-304/PRES/PM/MCC du 1er août 95

    * 44 Le président du Faso est le président de la République, « Faso » signifiant en langue nationale mooré « la patrie ».

    * 45 In « le pays » N° 4105 du 28 avril 2008, p 28 : « Respect de l'éthique et de la déontologie : le CSC auditionne 4 promoteurs de médias »

    * 46 CSC, Rapport d'activités 2006, Page 165.

    * 47 Jean-Claude Guyot, Luc-Adolphe Tiao, La régulation des médias : principes, fondements, objectifs et méthodes, Institut Panos, Paris, février 2007

    * 48 Le Conseil des droits de l'Homme est l'organe onusien qui a remplacé la commission des droits de l'homme en 2006. Il a pour vocation de promouvoir universellement le respect des droits de l'homme.

    * 49 In Emmanuel Decaux, « Le dixième anniversaire des principes directeurs des Institutions nationales des droits de l'homme dits «  Principes de Paris » in Droits fondamentaux, n°3, Janvier - décembre 2003, p.29

    * 50 Alimata Salembéré, communication au séminaire international sur la gestion de la transition en RDC, 26-28 avril 2004

    * 51 CGD/PNUD Burkina Faso, Etude sur les compétences et les potentialités des OSC au Burkina Faso, Ouagadougou, 2002

    * 52 Un exemple récent, le MBDHP a publié dans le quotidien « L'observateur Paalga » du 22 avril, un communiqué relatif à la mort d'un détenu à la Maison d'Arrêt et de Correction de Ouagadougou sous le titre « Mort d'un détenu à la MACO ».

    * 53 En plus de la radio « mille collines », le journal « Kangura » a été reconnue comme l'un de ceux qui ont ouvertement appelé aux tueries.

    * 54 JP Chrétien, Presse libre et propagande raciste au Rwanda, Kangura et les 10 commandements du Hutu, documents http://www.politique-africaine.com/numeros/pdf/042109.pdf

    * 55 France Matin, 20 octobre 2006

    * 56 Monica, 2003 Page 46.

    * 57 DREYER, Droit de l'information, page 3

    * 58 L'article 1382 du code civile dispose que « tout fait quelconque de l'homme qui cause dommage à autrui oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer »

    * 59 60 DREYER, page 121

    * 61Cf. http://www.ifj.org/assets/docs/056/082/5885b38-02de752.pdf

    * 62 CSC, Rapport d'activités 2005, page 73

    * 63 MBDHP, Rapport sur l'Etat des droits humains au Burkina Faso, période 1996 - 2002, p 72

    * 64 Amnesty International, Rapport annuel 2000, Londres, P 94. MBDHP, Rapport 2002,

    * 65 François Compaoré est le frère cadet du chef de l'Etat burkinabé. Conseiller à la présidence, son nom est cité dans la mort du journaliste Norbert Zongo parmi les présumés commanditaires.

    * 66 Voir le texte intégral en annexe 3

    * 67 Notre traduction « Personne dans une conférence de rédaction à New York, Londres ou Paris ne dira, si nous disons ceci, les autorités nous tueront t`ils ou nous mettrons t'ils en prison ? Les éditeurs s'inquiéteraient des questions de diffamation ou de procès. » ICHRP, Journalism, media and the challenge of human rights reporting, 2002, Page 74.

    * 68 Rapport de la commission d'enquête indépendante sur la mort de Norbert Zongo et trois de ses compagnons, Mai 1999.

    * 69 International IDEA, La démocratie au Burkina Faso, , Stockholm, 1998, P.10

    * 70 Réné Degni Ségui, Les droits de l'homme en Afrique Noire Francophone : théories et réalités, CEDA, P 268,

    * 71 Recommandation n°001/2008/CSC/SG/CAB du CSC, op cit

    * 72 Notre traduction « Cette réactivité aux faits qui sont dans l'air du temps explique aussi ce que les militants d'une cause déplorent comme un manque de consistance dans la couverture médiatique de leur cause. Dès lors que la vraie motivation des journaux traitant de faits relatifs aux droits de l'homme n'est pas généralement de corriger un tort mais de partager la sensibilité collective sur un sujet particulier à un moment donné, ils ne sentent pas la nécessité de poursuivre le traitement dès qu'ils sentent un manque d'intérêt du public pour ce sujet. »

    * 73 F. Sudre, « les mécanismes et les techniques de garantie internationale des droits, les mécanismes quasi-juridictionnels et juridictionnels », cours de droits fondamentaux, DUDF

    * 74 In « Le pays » N° 4079 du 19 mars 2008 « Déclaration des journalistes de l'UEMOA pour la dépénalisation des délits de presse »

    * 75 Alghassim Khamis, L'analyse de la liberté de la presse au Tchad, Mémoire de recherche Pour l'obtention du diplôme d'université de 3e cycle "droits fondamentaux, année universitaire 2005-2006

    * 76 Cité parmi les centres d'excellence, Guy Berger et Corinne Matras, Critères et indicateurs pour des institutions de qualité de formation au journalisme & Identification de centres potentiels d'excellence de formation au journalisme en Afrique, Série UNESCO sur la formation au journalisme, UNESCO 2007

    * 77 In Alain PELLET "droits-de-l'hommisme" et droit international », Revue Droits fondamentaux, n° 1, juillet - décembre 2001






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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote