UNIVERSITÉ DE LIÈGE
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Faculté de Gestion, d'Économie et de Sciences
Sociales
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La Convergence Régionale
dans l'Union Européenne
Le rôle des Fonds Structurels
Promoteur : Mémoire présenté par
M. le Professeur Jules GAZON François
DEFOURNY
Lecteurs : en vue de l'obtention du grade de
Mme le Professeur Fabienne FECHER Maître en
Sciences Économiques M. le Professeur Bernard JURION
Nous souhaitons exprimer notre sincère reconnaissance
à :
M. le Professeur Jules Gazon pour le suivi de notre travail,
ses encouragements et les précieux conseils dont il nous a fait
profiter.
Mme le Professeur Fabienne Fecher et M. le Professeur Bernard
Jurion pour avoir accepté de faire partie de la commission de lecture de
ce mémoire.
M. le Professeur Frédéric Docquier et M. Olivier
Lohest du Service des Études et de la Statistique du Ministère de
la Région Wallonne pour leurs avis d'experts sur les questions de
convergence régionale.
M. le Professeur Sergio Perelman, pour le temps et l'attention
qu'il a bien voulu nous consacrer.
Mme Patricia O'Hara et Mme Louise Kinlen ainsi que les membres
du personnel de la Border, Midland & Western Regional Assembly qui
nous ont permis de découvrir la politique régionale de l'Union
Européenne dans ses expressions concrètes en Irlande.
Enfin, nous tenons à remercier tous ceux qui ont
contribué de près ou de loin à la réalisation de ce
travail.
Table des Matières
Introduction .1
PREMIÈRE PARTIE : La convergence régionale
au sein de l'Union Européenne: Éclairages théoriques et
empiriques 3
Chapitre 1 : Les différentes théories de
convergence ou divergence économique: un aperçu
général 4
A. Les théories optimistes de convergence automatique
..4
1. La théorie néoclassique du commerce
international 4
2. La théorie néoclassique de la croissance .6
3. Les théories de l'écart technologique ..7
B. Les théories pessimistes de la polarisation
régionale 7
1. La théorie de la causalité cumulative 8
2. La théorie des pôles de croissance 9
3. Les théories de la croissance endogène 9
4. La (nouvelle) géographie économique 10
Chapitre 2 : Evaluations empiriques des
différents schémas de convergence
..13
A. La convergence: cadre méthodologique ..13
B. La a-convergence .15
C. La f3-convergence 18
1. La f3-convergence absolue (inconditionnelle) ..19
1.1. Les études empiriques de la f3-convergence absolue
(inconditionnelle) 20
1.2. La f3-convergence absolue au niveau NUTS II ..22 1.3. La
f3-convergence absolue au niveau NUTS I et NUTS II : les échantillons
reconstruits .26
2. La f3-convergence conditionnelle .29
2.1. Le concept de f3-convergence conditionnelle 29
2.2. Les études empiriques de la f3-convergence
conditionnelle .. 31
2.3. Principales critiques de la f3-Convergence 38
3. Autre limite de la f3-convergence : l'hypothèse de
clubs de convergence 40
4. Conclusions ..43
DEUXIÈME PARTIE : La Politique européenne
de Cohésion: son impact sur le processus de convergence 45
Chapitre 3 : La Politique européenne de
Cohésion
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.46
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A. La structure institutionnelle de la Politique
européenne de Cohésion
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.46
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B. La redistribution: de l'ambition à la
réalisation
|
49
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C. L'imperfection de la redistribution: quelques explications
possibles
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.. 51
|
Chapitre 4 : L'influence de la Politique
européenne de Cohésion sur l'évolution des
disparités
régionales 53
A. Les recommandations théoriques .54
B. L'évaluation de l'impact de la Politique
européenne de Cohésion sur la convergence
régionale
|
.57
|
1. Les évaluations plutôt positives
|
58
|
1.1. Les modèles macroéconomiques
|
58
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1.2. Les études économétriques
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.59
|
2. Les évaluations plutôt négatives
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..61
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Chapitre 5 : Les facteurs d'efficacité et de
distorsion de la Politique de Cohésion
|
.. 65
|
A. Les facteurs conditionnant l'impact des Fonds Structurels sur
la convergence
|
65
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B. Les effets pervers de la Politique de Cohésion
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67
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Conclusions
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72
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Bibliographies
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. 76
|
ANNEXES
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87
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Introduction
Au sortir de la seconde guerre mondiale, la Communauté
Européenne du Charbon et de l'Acier, puis le Marché Commun ont
été conçus comme des instruments du développement
économique et du maintien de la paix. L'interdépendance et le
rapprochement économique des différents pays concernés
apparaissaient comme des vecteurs majeurs de stabilité
géopolitique en Europe Occidentale. Imprégnés des vertus
du libre échange, les pays signataires du Traité de Rome avaient,
pour priorités économiques, l'abaissement progressif des
barrières au commerce et la réalisation d'un véritable
"marché commun". A l'exception de quelques secteurs particuliers,
principalement l'agriculture, nécessitant une politique publique forte,
l'intervention des autorités des "Communautés Européennes"
s'est longtemps limitée, pour l'essentiel, à la mise en place
d'un cadre légal et institutionnel favorisant le libre jeu de la
concurrence1.
L'enchaînement des élargissements a peu à
peu soulevé le problème des déséquilibres entre les
niveaux de développement des Etats membres. En effet, les
adhésions de l'Irlande en 1973, puis de l'Espagne et du Portugal en 1981
et enfin de la Grèce en 1986 ont considérablement creusé
les disparités de richesse entre régions de la Communauté
Européenne. En l'an 2000, les dix pour cent de régions
européennes les plus riches avaient un PIB/hab. 2,6 fois
supérieur au dernier décile du peloton2. A la veille
du passage à 25 Etats membres, près d'un quart de la population
vivait dans des régions dont le PIB/hab. est inférieur à
75% de la moyenne de l'Union. Et que dire depuis ce dernier
élargissement?
Une aggravation des inégalités de
développement pourrait constituer une menace pour la stabilité et
la progression de l'Union. En effet, de trop grands écarts de richesse
entre régions peuvent multiplier les situations conflictuelles. Mais la
capacité des régions plus défavorisées à
combler d'elles-mêmes leur retard est pourtant loin d'être
évidente. Face à l'ampleur du défi, l'Union
Européenne ne pouvait rester inactive: à la fin des années
quatre-vingt, elle s'est dotée d'un outil ambitieux de redistribution
des revenus et de correction des inégalités. Les Fonds
Structurels, dont la naissance formelle remontait à 1968, mais sans
moyens importants, ont alors pris leur véritable envol. A l'heure
actuelle, ils représentent probablement une des
1 Les missions principales assignées en ce sens aux
autorités européennes étaient alors la politique
anti-trust et le contrôle des aides d'Etat.
2 A titre indicatif, Puga (1999 et 2002) montre qu'aux
Etats-Unis, seuls deux Etats représentant 2% de la population totale ont
un revenu par habitant inférieur aux trois quarts de la moyenne
fédérale. Pour Boldrin & Canova (2001), les
inégalités régionales de l'Union Européenne sont
deux fois supérieures à ce qu'on rencontre aux Etats-Unis.
facettes de l'Union Européenne parmi les plus
médiatiques et les plus visibles du grand public. C'est en effet
à eux que l'on doit les innombrables panneaux annonciateurs de chantiers
estampillés du drapeau européen, qui jalonnent les routes du
Portugal, d'Irlande ou encore des îles grecques. C'est également
eux qui suscitent jalousie et convoitise au moment où la Commission
Européenne annonce sa sélection des régions retenues pour
bénéficier de ces aides.
Mais qu'en est-il de l'évolution des disparités
régionales au sein de l'Union Européenne? Peuton
reconnaître un rôle significatif à la Politique de
Cohésion dans cette évolution et si oui, lequel? Ce sont
là, les deux questions centrales de ce mémoire.
La première partie de notre travail s'articulera avant
tout autour du concept de convergence économique. Nous
présenterons les débats théoriques sur le sujet, puis nous
chercherons à cerner l'évolution des disparités
régionales dans l'Union Européenne au cours des dernières
décennies. Nous espérons alors être en mesure de
déterminer si nous sommes, à l'heure actuelle, dans une dynamique
de convergence ou de divergence.
Dans une seconde partie, nous nous consacrerons à
l'examen de la Politique de Cohésion dans son rôle de
réduction des disparités régionales. Après une
présentation de l'outil, nous essayerons de voir si des théories
économiques cautionnent cette intervention publique d'envergure. Enfin,
en combinant divers angles d'approche, nous tenterons d'évaluer de
manière critique l'impact des Fonds Structurels sur l'évolution
des inégalités de richesse entre les régions
européennes.
PREMIÈRE PARTIE
La convergence régionale au sein de
l'Union Européenne : Eclairages
théoriques et empiriques
L'enjeu majeur de cette première partie sera de cerner
progressivement les concepts et les outils permettant d'appréhender la
convergence économique. Nous synthétiserons d'abord les
principaux courants théoriques traitant de la convergence. Ensuite, nous
les confronterons aux observations empiriques de la convergence
régionale au sein de l'Union Européenne au cours de ces
dernières décennies. A cette occasion, nous comparerons les
résultats obtenus à l'aide de différents tests de
convergence en coupe transversale. Cela devrait nous permettre
d'apprécier la capacité prédictive des différentes
théories, mais surtout de découvrir le sens des évolutions
actuelles: les disparités sont-elles en train de se creuser ou bien
sommes-nous pris dans un processus de convergence régionale?
Chapitre 1 : Les différentes théories de
convergence ou
divergence économique : un aperçu
général
Face aux disparités régionales persistantes et
à une intégration économique toujours plus poussée,
que dit la théorie économique ? Existe-t-il des alternatives
à la pensée néoclassique? Peut-on espérer une
croissance plus rapide des régions les plus pauvres ? Les régions
convergent-elles, au moins à long terme, vers un même niveau de
revenu par habitant ?
On peut grossièrement scinder l'ensemble des
théories économiques en deux vastes courants divergents. D'un
côté, nous présenterons les théories plutôt
optimistes pour lesquelles la convergence est une question de temps et de
conditions favorables à réunir. De l'autre, nous verrons un
ensemble de théories nettement plus pessimistes selon lesquels
l'évolution naturelle est à la divergence régionale.
A. Les théories optimistes de convergence
automatique
Certaines théories économiques, notamment
néo-classiques, annoncent une convergence régionale automatique
et soutenue. Ces courants "optimistes" considèrent, au mieux,
l'intervention redistributive au niveau européen comme potentiellement
utile mais certainement pas indispensable. Dans le pire des cas, elle peut
même avoir de graves effets pervers à cause du détournement
de ressources qu'elle provoque.
1. La théorie néoclassique du commerce
international
Eli Heckscher (1919) et Bertil Ohlin (1933) dans leur
théorie des avantages comparatifs prédisent, sous certaines
conditions assez contraignantes, une amélioration automatique de la
convergence économique ainsi qu'une égalisation du prix des
facteurs de production. Selon ce modèle, l'avantage comparatif d'un pays
provient de sa dotation relative en facteurs de production. En outre, la
technologie est considérée comme un bien commun, accessible
à tous et à rendements constants3.
Deux pays passant de l'autarcie au libre-échange sont
amenés à se spécialiser dans la production du bien qui
utilise le plus intensément le facteur de production dont ils sont, l'un
et
3 L'hypothèse de rendements d'échelles non
croissants est essentielle pour l'égalisation des productivités
marginales des facteurs et donc de leur rémunération.
l'autre, le mieux dotés. Il exportera ce bien qu'il
produit, en échange du bien dont il a cessé la production. Les
deux économies devraient alors assister à la convergence de leurs
productivités marginales et de leurs revenus ainsi qu'à une
amélioration générale du bien-être.
Dans un tel cadre conceptuel, la taille d'un pays n'a pas
d'influence sur ses avantages comparatifs et le commerce des biens pouvant se
substituer au mouvement des facteurs de production, ceux-ci n'ont pas
d'incitation à migrer. Par hypothèse du modèle, les
facteurs de production sont donc immobiles entre pays.
Si toutefois, il devait y avoir mobilité parfaite des
facteurs (comme c'est partiellement le cas au sein de l'Union
Européenne), toute différence spatiale de
rémunération disparaîtrait spontanément du fait de
leurs déplacements et les conclusions de convergence du modèle ne
seraient pas altérées. Si l'on tient compte des coûts de
transport, la convergence n'est plus parfaite mais ne disparaît pas pour
autant. Par contre, la présence de taxes ou de subsides sur les
échanges internationaux ne peut que réduire l'augmentation de
bien-être global. A moins d'aider à la suppression des
barrières à la mobilité, toute politique régionale
est inutile dans un tel contexte.
Si les résultats prévus par le
théorème sont loin d'être observés dans la pratique,
c'est largement dû au caractère relativement restrictif de
certaines hypothèses. C'est notamment le cas pour les hypothèses
de plein emploi, d'homogénéité des facteurs de production,
de fonctions de productions identiques ou encore de concurrence
parfaite4.
Néanmoins, dans un tel cadre de réflexion
théorique, que la mobilité des facteurs de production soit
parfaite ou nulle, les inégalités entre revenus moyens par
habitant ne peuvent être que passagères. La convergence est
réelle et automatique et toute politique régionale en faveur des
régions défavorisées est relativement inutile. Les
obstacles à cet équilibre naturel étant liés aux
entraves posées à la mobilité des biens, du capital, de la
main-d'oeuvre ou de la connaissance, la seule politique européenne
envisageable revient alors à des mesures de dérégulation
et à la réalisation de programmes d'investissements en
matière de transport.
4 Gazon J. 2001-2002, "Economie Internationale", notes de cours,
Université de Liège, Faculté d'Economie, de Gestion et de
Sciences Sociales.
2. La théorie néoclassique de la
croissance
Solow (1956), dans sa théorie de la croissance,
reconnaît l'existence de disparités régionales initiales
mais prévoit à terme le même type de convergence que la
théorie néoclassique du commerce international. Partant des
hypothèses de rendements décroissants du capital et
d'exogénéité du progrès technique, chaque
région convergera vers un taux de croissance du revenu par tête de
long terme : le taux d'état stationnaire. "L'état
stationnaire est un phénomène important à deux
égards ... une économie qui l'a atteint ne bouge plus5
... et une économie qui ne l'a pas atteint tend vers lui. L'état
stationnaire représente l'équilibre de longue période de
l'économie." (Mankiw, 2001, p. 101)
Le modèle de Solow se développe autour de deux
équations : une fonction de production et une fonction d'accumulation du
capital. De leur interaction avec le progrès technique (exogène
et librement disponible pour tous) résulte cet état stationnaire
de longue période. La production par tête est donc parfaitement
déterminée par le taux de croissance de la population active
ainsi que par la productivité et le taux d'accumulation du capital
physique et humain. Le progrès technique étant postulé
exogène6, la formation de la main-d'oeuvre et le taux
d'épargne sont les déterminants clés du stock de capital
de l'état stationnaire. A l'état stationnaire, l'économie
est en équilibre : la production par travailleur progresse exactement au
même taux que le progrès technique, le long d'un chemin de
croissance équilibrée. Le taux de croissance du revenu par
tête y est alors complètement déterminé par la
technologie, exogène au modèle.
A cause des rendements décroissants du capital, le
principe de dynamique transitionnelle veut qu'une économie se trouvant
en dessous de son état stationnaire connaîtra temporairement un
taux de croissance supérieur à celui qui prévaudrait en
état stationnaire. En outre, plus une économie se trouve en
dessous de son état stationnaire plus elle convergera rapidement vers
celui-ci. Il faut néanmoins préciser que cet état
stationnaire n'est pas nécessairement identique pour toutes les
économies7. Il dépend en effet des
caractéristiques fondamentales de l'économie en question qui
peuvent la différencier de façon structurelle d'une autre
économie. Par exemple, plus le taux d'investissement en capital humain
et physique sera important et plus le taux de croissance de la population sera
bas, plus l'état stationnaire du niveau de
5 A l'état stationnaire, il n'y a plus de variation du
taux de croissance: le revenu par tête et le progrès techniques
(exogène) croissent exactement au même rythme.
6 "Le progrès technique de Solow est une "manne
tombée du ciel" car son action est automatique et indépendante
des circonstances économiques" (Jones, 1999, p. 41)
7 On parle alors de « convergence conditionnelle ».
revenu par tête sera élevé. Dans ce
modèle, en modifiant le taux d'investissement ou en améliorant la
formation de la main-d'oeuvre de l'économie en retard, une politique
publique pourra affecter le taux de croissance et le faire dévier de son
taux d'état stationnaire initial, mais uniquement temporairement,
jusqu'à un nouvel état stationnaire. Ceci revient à
accélérer ponctuellement un processus automatique. Des pays aux
économies structurellement semblables sont condamnés à
converger et l'accumulation de capital est l'outil de réduction des
différences de productivités.
Selon ces deux approches néoclassiques, la politique
d'assistance financière aux régions défavorisées
est donc relativement inutile et certainement pas indispensable à la
convergence. Au mieux, en augmentant le stock de capital physique, elle peut
accélérer temporairement le taux de convergence des
régions en retard mais sans en modifier l'état stationnaire de
long terme.
3. Les théories de l'écart technologique
D'autres auteurs, parmi lesquels Fagerberg & Verspagen
(1996)8, pensent que les caractéristiques de bien public de
la connaissance peuvent jouer en faveur des économies moins
développées. L'idée de base, d'influence
schumpetérienne, est assez simple : il est plus facile de copier que
d'inventer. Les régions plus défavorisées peuvent ainsi
adapter, imiter et utiliser les technologies élaborées dans les
régions les plus riches sans avoir à réinventer
ellesmêmes. Les régions en retard de développement
progressent donc par imitation et par ingénierie inverse. Ainsi, dans le
même ordre d'idée que la théorie néoclassique, plus
une région présente un retard technologique important, plus elle
dispose d'opportunités de combler son retard. Le processus de
convergence est donc ici aussi automatique. La seule politique
interventionniste envisageable serait alors de promouvoir le progrès
technologique local et d'investir dans la recherche de haut niveau pour
favoriser l'exploitation des technologies développées
ailleurs.
B. Les théories pessimistes de la polarisation
régionale
A ces modèles relativement optimistes annonçant
une convergence automatique des niveaux de revenu, on peut opposer une
série de théories prévoyant plutôt une polarisation
économique et une divergence accrue des niveaux de développement
des régions. Dans de tels
8 Voir aussi Cappelen, Castellacci, Fagerberg & Verspagen
(2003).
cadres théoriques, une politique régionale
proactive est absolument indispensable si on veut parvenir à une
répartition plus équilibrée des richesses entre les
régions. Voyons brièvement les lignes essentielles de ces
courants de pensée plus "pessimistes".
1. La théorie de la causalité cumulative
Déjà dans les années cinquante, Myrdal
(1957) considérait la croissance comme un processus spatial cumulatif
susceptible d'accroître les disparités régionales et
conduisant à une polarisation spatiale de l'économie. Selon lui,
les effets des économies d'agglomération et les rendements
d'échelle croissants conduisent à un processus cumulatif de
croissance créant des différences entre régions et
engendrant un cercle vicieux. Ce processus de renforcement de la richesse ou de
la pauvreté donne lieu à des effets de remous9
(l'agglomération draine vers elle les ressources aux dépens
des autres régions) mais aussi à des effets de
propagation10 de la croissance qui, eux, profiteraient aux
régions périphériques. C'est l'observation empirique de la
polarisation de l'économie qui pousse Myrdal à conclure que les
effets de remous dominent finalement les effets de propagation.
Vanhove (2000) rappelle que dans les années septante,
des auteurs tels que Nevin (1972) et Stahl (1974) entretenaient le pessimisme
ambiant quant à l'évolution de l'intégration
européenne. Ils prévoyaient alors que l'Union monétaire
provoquerait une migration massive du capital et du travail vers un nombre
restreint de pôles économiques. Ce phénomène aurait
dû accroître les salaires dans les régions
défavorisées sans que la productivité ne suive la
même évolution. Par ailleurs, considérant les puissantes
disparités au sein de l'Union Européenne et après avoir
énuméré les différents facteurs de divergence et de
convergence, Vanhove (2000) conclut que les forces agissant actuellement en
faveur de la convergence sont plus faibles que les forces creusant les
écarts.
Une telle conclusion débouche naturellement sur la
nécessité d'une politique régionale tentant d'inverser le
processus d'accumulation qui s'opère en faveur des régions
riches. La priorité devrait ainsi être donnée au
développement des infrastructures dans les régions
défavorisées, à la concentration des investissements
productifs sur de nouveaux pôles de croissance et à la
discrimination fiscale positive de ces régions pour les rendre plus
attractives pour les investisseurs.
9 Ces forces centripètes ou << Backwash effect
>> résultent essentiellement d'externalités technologiques
positives, d'effets du marché du travail ou de relations
commerciales.
10 Ces forces centrifuges ou << Spread effect >>
proviennent pour l'essentiel des effets de congestion, de la pollution ou de la
concurrence pour les facteurs immobiles (coût du terrain...).
La théorie des pôles de croissance
Pour François Perroux (1958), l'instauration du
marché commun devait conduire à l'accroissement des
disparités régionales et à une polarisation de
l'activité économique. Selon lui, certains secteurs exercent un
pouvoir d'attraction sur d'autres activités. Le pouvoir d'attraction de
ces entreprises pilotes se trouve ensuite renforcé par des effets
multiplicateurs locaux. La croissance économique se localiserait alors
dans certains points privilégiés de développement
actuel et virtuel au détriment des régions
défavorisées.
La politique régionale optimale serait d'investir
prioritairement dans des pôles à fort potentiel de croissance au
sein même des régions pauvres en acceptant un creusement
momentané des inégalités régionales dans l'espoir
de générer des bénéfices à plus long terme
pour l'ensemble de la région par effet de contagion.
Cette politique est, par exemple, poursuivie en Irlande dans
le cadre de la << National Spatial Strategy >> qui identifie des
<< Hubs >> et des << Gateways >> comme pôles
d'investissement privilégiés et prioritaires11. Le
développement de la région de Dublin a suivi, avec un certain
succès, cette logique durant les années 1990. La capitale devait
alors servir de locomotive pour l'ensemble de l'économie nationale.
Les théories de la croissance endogène
Romer (1986, 1990), Grossman et Helpman (1991), et les autres
théoriciens de la croissance endogène pensent que
l'intégration économique creuse les divergences
économiques entre pays et régions. Ces auteurs critiquent la
vision néoclassique du progrès technique en intégrant au
modèle les forces économiques qui l'induisent. Le progrès
technique est considéré comme le moteur de la croissance
économique et le profit que les entrepreneurs espèrent retirer de
l'innovation en est le carburant12. Le taux de rendement du capital
est ici non décroissant, notamment parce que le concept de <<
capital >> est, cette fois, élargi au capital humain, public et
technologique. D'après Aschauer (1989) et Barro (1990), en
considérant le capital humain ou public comme un input de la fonction de
production, la théorie reconnaît à une politique
finançant par exemple des infrastructures publiques ou améliorant
la formation de la main d'oeuvre, la possibilité d'améliorer la
productivité marginale du capital privé et
11 Pour plus de détails, voir Internship Report,
Defourny (2004), p. 32.
12 Jones (1999), p. 163-165.
ainsi de soutenir la croissance. Une telle politique peut rendre
les investissements suffisamment rentables pour garantir une croissance
continue du stock de capital.
Dans les modèles de croissance endogène, des
disparités dans la croissance économique de long terme peuvent
être expliquées par des efforts inégaux en recherche et
développement et en innovation technologique. Ceci est
particulièrement important si on considère que le taux de
rendement de la connaissance et de la technologie est croissant. Cela implique
que le fossé entre les régions défavorisées et les
régions plus développées aura touj ours tendance à
s'accroître, les régions les plus riches étant
vraisemblablement plus à même de gonfler leur stock
technologique.
Pour inverser cette tendance, les modèles de croissance
endogène préconisent dès lors une politique en mesure
d'aider les régions les plus pauvres à combler leur retard
puisqu'elles ne sont pas à même de le faire seules. Les efforts
politiques devraient donc être concentrés en priorité dans
le développement de nouvelles technologies au sein des régions
défavorisées. Plus généralement, les pouvoirs
publics doivent mettre en place des infrastructures et un environnement propice
au développement économique qui permettent notamment aux
chercheurs et aux entrepreneurs de tirer profit de leurs innovations et de
leurs investissements.
4. La (nouvelle) géographie économique
Ce courant s'est développé à partir d'une
constatation: l'activité économique est souvent polarisée
autour de quelques « clusters » et cette concentration
économique affecte bien entendu la répartition du revenu entre
les régions. Un des précurseurs de ce courant théorique,
Williamson (1965) pense que la croissance économique est initialement
entraînée par la dynamique d'un certain nombre
d'agglomérations majeures. Ainsi, dans un premier temps, une forte
croissance s'accompagne d'une plus grande disparité régionale.
Mais après un certain laps de temps, la vapeur aurait tendance à
se renverser à cause notamment de surcoûts liés à la
congestion de ces pôles économiques. Ces externalités
négatives pousseraient en effet les facteurs de production à se
re-localiser dans des régions moins engorgées, moins
saturées. Après une première période de divergence
économique, on assisterait ensuite à une convergence des niveaux
de revenu par tête.
La géographie économique introduit
également le problème du spillover effect qu'on peut
facilement illustrer en matière de transport : le développement
des infrastructures de transport pourrait s'avérer défavorable
aux régions pauvres en favorisant la migration d'entreprises
désireuses de profiter des externalités
positives des agglomérations. Un tel phénomène peut
être amplifié par une politique européenne dynamique en
matière de transports interrégionaux. Nous reviendrons plus
longuement sur cette question à la fin du travail.
Plus récemment, Krugman (1991) a
développé dans le cadre de la "nouvelle géographie
économique13" un schéma pour étudier
l'interaction entre les externalités positives des agglomérations
et les autres forces économiques influant sur les décisions de
localisation. Il s'agit en fait d'une théorie de commerce international
montrant que l'existence de rendements d'échelle croissants
combinés à des frais de transport suffit à produire une
concentration des activités économiques dans un nombre restreint
de régions. Une intégration économique plus poussée
accroît le commerce et la mobilité des facteurs, ce qui à
son tour génère de nouvelles opportunités
d'économies d'échelle et de spécialisation. Cela conduit
à un schéma "centrepériphérie" assez proche du
cercle vicieux de Myrdal. La différence entre les deux modèles
réside dans le caractère accessoire des économies externes
dans le modèle de Krugman14 alors que pour Myrdal, ces
mêmes économies d'agglomération sont le moteur de la
concentration territoriale de l'activité économique.
Chez Krugman, ce sont les économies internes aux
entreprises qui favorisent nécessairement la concentration spatiale. Les
coûts de transport, par contre, y jouent un rôle plus ambigu. En
cas de faible diminution, ils encourageront la polarisation alors qu'une forte
réduction de ceux-ci permettra une redistribution spatiale plus
équilibrée. Cela s'explique par le fait qu'une diminution des
coûts de transport, selon son ampleur, favorise soit la production dans
la région où elle est la moins chère, soit l'utilisation
extensive des économies d'échelle.
Dans le cadre européen, on peut élargir les
coûts de transport à tous les coûts de
transaction15 sans pour autant modifier les conclusions de Krugman :
si une éradication complète des obstacles aux échanges
accroît la compétitivité des régions
périphériques, une élimination partielle ou imparfaite de
ces obstacles peut, au contraire, engendrer des effets pervers en aggravant les
déséquilibres régionaux.
Par ailleurs, la nouvelle géographie économique
identifie trois scénarii plausibles pour le développement
régional de l'Europe (Braunerhjelm et al. 2000) :
13 Voir aussi Venables (1996)
14 La concentration spatiale de l'activité
économique y est expliquée par des « externalités
pécuniaires » (coûts de transport, économies
d'échelle).
15 Les coûts de transactions englobent les coûts de
transport et toutes les formes de barrières au commerce.
1. La plupart des régions vont être capables
d'exploiter leurs avantages comparatifs. Ce qui va nécessairement
conduire à un développement régional
équilibré et convergent.
2. On peut s'attendre à une forte concentration
géographique si les externalités positives des
agglomérations sont importantes. Combiné avec une grande
mobilité du travail, ce scénario prévoit une convergence
du revenu par tête mais en laissant certaines régions largement
dépeuplées.
3. En cas de faible mobilité du travail, on assistera
inévitablement à une polarisation accrue entre régions
avancées et régions pauvres et à une divergence du revenu
par tête.
Enfin, la géographie économique met en
évidence le trade-off entre équité et
efficience16 auquel font face les pouvoirs publics : si d'un point
de vue éthique, il semble opportun d'inve stir prioritairement dans les
régions pauvres, il peut être économiquement encore bien
plus efficace d'investir ces ressources dans les régions riches aux taux
de rendement social17 généralement supérieurs.
Nous verrons si, dans la pratique, l'Union Européenne rencontre ce
dilemme. Mais avant cela, nous allons confronter ces prédictions
théoriques aux réalités de ces dernières
décennies.
16 Signalons au passage que l'approche de Perroux (1958)
atténue sensiblement ce dilemme entre équité et efficience
puisque les investissement dans les pôles de croissance seraient alors
destinés à accentuer, à terme, les effets de contagion
profitables aux régions défavorisées environnantes.
17 Ou taux de rendement total pour la société en
général.
Chapitre 2 : Evaluations empiriques des
différents
schémas de convergence
Comme nous venons de le voir, la convergence économique
est un concept clé dont la littérature théorique ne cesse
de discuter. Que ce soit au niveau mondial ou dans le contexte européen,
il faut bien admettre que l'enjeu est capital. Parce que c'est une condition
sine qua non à sa prospérité et à sa
stabilité, l'Union Européenne a fait de la réduction des
disparités économiques une de ses priorités
absolues18. Nous présenterons plus loin les outils dont elle
s'est dotée pour réaliser ses ambitions. Nous tenterons alors de
voir dans quelles mesures la politique régionale européenne a
atteint ses objectifs de convergence. Mais avant cet examen, nous devons
d'abord essayer de comprendre en profondeur les termes du débat et pour
cela cerner précisément les concepts clés. Qu'entend-t-on
exactement par convergence? Existe-t-il différents types de convergence
économique régionale? Une fois le cadre méthodologique
dessiné, nous observerons l'évolution du processus de convergence
régionale en Europe ces dernières décennies. Ce n'est
qu'ultérieurement que nous chercherons un éventuel lien entre
l'évolution des disparités régionales et la politique
régionale européenne.
A. La convergence : cadre méthodologique
"Il y a convergence lorsque la différence entre des
séries ou leur dispersion se réduit dans le temps." (Fuss,
1999, p. 222)
Cette définition assez simple cache une réelle
complexité. La littérature présente en effet de nombreux
types de convergence économique. Il peut s'agir par exemple de
convergence nominale d'indicateurs macroéconomiques, comme dans
le cadre du Traité de Maastricht19. Pour notre part, nous
nous intéresserons ici à la convergence réelle et
plus précisément, à la réduction de
disparités de bien-être entre régions ou entre pays au sein
de l'Union Européenne.
Dans ce domaine particulier, il existe encore différents
schémas de convergence20 et quantité de techniques
d'évaluations différentes21. Si certains auteurs
proposent parfois des méthodes
18 Article 158 de l'Acte Unique Européen signé en
1986.
19 Convergence des taux d'inflation, des taux
d'intérêts, des déficits publics et des dettes publiques
nationales.
20 Voir notamment Fuss (1999).
21 Ex: tests de convergence en panel, tests de convergence en
distribution, tests de convergence en séries chronologiques. Pour une
revue de la littérature, voir Fuss (1999)
d'estimation très personnelles. En revanche, les tests
de convergence en coupe transversale, tels qu'introduits par Baumol (1986),
puis développés par Barro et Sala-i-Martin (1991, 1992), sont
incontournables et de nombreux auteurs emploient ces méthodes pour leurs
propres exercices empiriques.
Présenter, de façon synthétique et
comparée, un nombre important de ce type d'estimations de convergence
pour pouvoir en dégager certaines tendances nous a paru être le
meilleur moyen de participer au débat. Vu la quantité et la
diversité des travaux déjà menés dans le domaine,
ainsi que le faible nombre d'analyses synthétiques, il nous a
semblé utile de mener un tel travail pour l'essentiel des recherches
réalisées sur ce qu'on appelle la ý-convergence, la f3-
convergence absolue et conditionnelle. En effet, malgré les limites de
ces techniques sur lesquelles nous reviendrons, ces trois grands types de
convergence restent de loin, à l'heure actuelle, les méthodes
d'estimation les plus répandues et donc les plus à même de
permettre des analyses comparatives de leurs résultats.
Dans cette revue de la littérature, une comparaison
crédible et pertinente des résultats des différents
auteurs nécessite, dans la mesure du possible, l'emploi de termes et de
variables homogènes. Ainsi, pour ce qui est du découpage
géographique des régions, nous nous référons, comme
la plupart des auteurs, à la Nomenclature des Unités
Territoriales Statistiques (NUTS). Il s'agit du classement des
différentes zones et régions administratives de l'Union
Européenne en catégories relativement homogènes.
L'ensemble du territoire est ainsi subdivisé en plusieurs niveaux.
L'Europe des 15 compte 77 régions NUTS I, 206 régions NUTS II et
712 régions NUTS III. Pour la Belgique, le niveau NUTS I correspond aux
trois régions, le niveau NUTS II aux 10 provinces et le niveau NUTS III
aux 43 arrondissements. Soulignons tout de même que ces chiffres peuvent
évoluer avec certaines réformes nationales comme le passage de 9
à 10 provinces en Belgique ou la scission de l'Irlande en deux
régions NUTS II en vue de conserver une partie de son territoire
éligible à l'Objectif 122.
Enfin, les tests de convergence économique peuvent
porter sur quantité de variables différentes : la
productivité par travailleur (Boldrin & Canova, 2001), la valeur
ajoutée brute par travailleur (Martin, 2001), le produit
intérieur brut par travailleur (Paci & Pigliaru, 2001), la
production par personne en âge de travailler (Lebre de Freitas, Pereira
& Torres, 2003), le taux de chômage (Basile, de Nardis & Giradi,
2001), etc. Nous avons, pour notre part, retenu le Produit Intérieur
Brut par habitant (PIB/hab.) comme variable de référence pour nos
comparaisons. C'est incontestablement l'indicateur le plus couramment
utilisé dans la
22 Nous avons développé ce dernier point dans notre
rapport de stage (Defourny, 2004, p. 45.)
littérature, essentiellement en raison de sa
disponibilité23. Il n'est pourtant pas exempt de reproche et
son interprétation exige une certaine prudence. Comme le font remarquer
Houard et Marfouk (2000, p. 25) "le PIB doit être
interprété comme une mesure de la production totale d'une
région et non de son niveau de richesse ... il représente la
somme des valeurs ajoutées produites par les unités de
productions résidentes dans une région, sans prendre en
considération la localisation (lieu de résidence) des facteurs de
production."
Plus le niveau d'analyse sera détaillé et la
nomenclature fine (ex : au niveau NUTS III), plus le biais
généré par le choix du PIB par habitant comme indicateur
du bien-être régional sera important. Comme le souligne Magrini
(2003), cette remarque prend tout son sens dans le cas de régions
métropolitaines où le lieu de résidence est souvent
différent du lieu de travail. Le contexte belge est
particulièrement parlant. En effet, plus de la moitié des
travailleurs employés dans la région de Bruxelles-Capitale sont
des "navetteurs" résidant en Wallonie et en Flandre. En
préférant le PIB par habitant, nous observerons donc des
écarts régionaux nettement plus importants que si nous avions
choisi le revenu par tête.
B. La ý-convergence
La méthode la plus élémentaire et la plus
intuitive pour estimer la convergence consiste à observer simplement
l'évolution année après année de la dispersion de
l'ensemble de l'observation en coupe transversale. Différents
indicateurs de disparité régionale peuvent être
utilisés pour de telles observations. Les plus fréquemment
rencontrés dans la littérature sont le simple écart-type
en coupe24 et le coefficient de variation25 (rapport de
l'écart type au niveau de richesse moyen de l'échantillon
à un moment donné). La simple observation de l'évolution
de ces mesures de dispersion permet de conclure à la convergence ou
à la divergence des niveaux de richesse régionaux. On parle donc
de sigma (ý) convergence lorsque les indicateurs de disparité
régionale manifestent une évolution décroissante au cours
du temps.
D'un point de vue empirique, au sein de l'Union
Européenne, la convergence doit absolument être
considérée différemment au niveau régional et au
niveau national car ce sont là deux réalités radicalement
différentes. D'abord, il semble évident que les disparités
de PIB/hab. seront nettement plus importantes entre 206 régions NUTS II
qu'entre les quinze Etats membres. Par exemple, en 1996, le PIB par habitant du
centre de Londres était près de cinq
23 Soulignons tout de même que certains auteurs comme
Martin (2001) ou Armstrong (1995) qui préfèrent la valeur
ajoutée brut par habitant comme indicateur de comparaison, arrivent
globalement aux mêmes conclusions.
24 Voir par exemple Barro & Sala-i-Martin (1991) ou Ederveen
et al. (2002)
25 Voir par exemple Capron (2000)
fois supérieur à celui de la région grecque
d'Ipeiros. Au niveau des quinze pays membres, ce rapport n'était
même pas de deux.
Si on regarde l'évolution de la a-convergence, la
situation est également totalement différente entre le niveau
régional et national. En effet, toutes les études qui se penchent
sur la disparité des revenus entre les différents
pays26 européens observent un processus de a-convergence
soutenu et pratiquement ininterrompu depuis la fin de la seconde guerre
mondiale. C'est notamment le cas des travaux de Giannetti (2001), Capron
(2000), Cappelen, Fagerberg & Verspagen (1999), Ederveen et al. (2002),
Barry (2003). La seule irrégularité de cette tendance
apparaît à la fin des années septante et au début
des années quatre-vingt où la a-convergence connaît une
brutale interruption. En dehors de cette décennie particulière,
on assiste entre pays à un processus de a-convergence incontestable.
L'absence de débat à ce niveau de nomenclature est attribuable
d'une part à la puissance du processus de a-convergence et d'autre part
à la complétude des données et à la petite taille
de l'échantillon observé. Ces deux derniers aspects laissent
finalement peu de place à d'éventuelles erreurs statistiques.
En revanche, les études qui se sont penchées sur
la a-convergence entre régions n'arrivent pas toutes aux mêmes
conclusions. A ce niveau de découpage spatial, les échantillons
sont vastes et les bases de données parfois lacunaires. Dans le
Graphique 1, nous présentons sept études27 observant
l'évolution des disparités de PIB/hab. entre régions sur
la fin du vingtième siècle. Les auteurs utilisant tantôt le
simple écart-type tantôt le coefficient de variation28,
le niveau des différentes courbes ne nous apporte aucune information.
Par contre, l'évolution de ces courbes est très instructive.
Malgré des tailles d'échantillons très variables (de 88
à 171 régions), on observe que la plupart des études
trouvent des évolutions fort comparables. En effet, la majorité
de ces études reconnaissent un processus de a-convergence si faible
qu'on peut à peine conclure à une convergence effective.
Sala-i-Martin (1996) avait pourtant enregistré de
fortes réductions de disparité depuis 1950. Mais cette tendance a
été brisée par une phase de stagnation entre 1975 et 1985.
Neven & Gouyette (1995) ainsi que Capron (2000) identifient un timide
redémarrage de la convergence
26 Se basant sur une observation de 9 ou 12 pays de l'Union mais
sans tenir compte des élargissements ultérieurs qui biaiseraient
l'estimation.
27 Les échantillons observés sont composés
de régions NUTS II voire de quelques régions NUTS I, le cas
échéant, pour compléter les données indisponibles
au niveau NUTS II.
28 Contrairement à l'écart-type, le coefficient de
variation s'interprète comme un pourcentage.
en 1984. Mauresth (2001), pour sa part, situe la reprise en 1986.
Dans tous les cas de figure, la modestie de la ý-convergence
régionale est incontestable.
0,7 0,6 0,5 0,4
0,3
0,2 0,1 0
Graphique 1 : Evolution de la disparité du
PIB/
hab.
au niveau régional de 1980 à
1998
Fuss(1999) - 144 régions
Mauresth (2001) - 143 régions
Mauresth (2001) - 88 régions
Neven & Gouyette (1995) - 142 régions
Tondl (1999) - 171 régions
Basile, de Nardis & Girardi (2001) - 119 régions
Années de 1980 à 1998
|
|
Capron (2000) - 170 régions
|
À notre connaissance, Fuss (1999) est une des seules
à présenter des résultats nettement différents. En
effet, non seulement elle rejette radicalement l'hypothèse de
ý-convergence pour la période 80-92, mais la croissance de la
courbe traduirait même un important phénomène de divergence
régionale. Ne pouvant expliquer cette exception, nous nous rallierons
à la majorité, d'autant plus que d'autres auteurs
accréditent la thèse d'une ýconvergence très timide
au niveau régional, sans que nous ayons pu les intégrer dans
notre graphique faute de données annuelles suffisantes. C'est le cas
notamment de Cappelen et al. (1999 et 2003), de Boldrin et Canova (2001), de
Cour et Nayman (1999) ou encore de Ederveen et al. (2002) dont les travaux
confirment cette très légère tendance à la
réduction des disparités. Toujours dans le même sens, la
Commission Européenne (2003b) a enregistré, au cours des
années nonante, une réduction des disparités de 1,7% au
niveau régional29 contre 12% au niveau des quinze Etats
membres.
Ces importantes différences de vitesse de
résorption des inégalités aux niveaux national et
régional ne laissent pas d'interpeller. Une piste que nous pouvons
brièvement explorer à ce stade-ci consiste à se pencher
sur l'évolution des disparités entre régions au sein d'un
même
29 Lorsqu'on exclut les Länder "Est-allemands" de
l'observation, cette timide convergence régionale se transforme en
divergence à raison de 7, 9% en dix ans.
pays. En effet, si la diminution des disparités
inter-pays est manifeste, la convergence intrapays serait beaucoup plus
incertaine. Malheureusement, selon les auteurs, l'évaluation des
disparités entre régions d'un même pays donne des
résultats contradictoires. Ederveen et al. (2002), notamment, se sont
penchés sur une douzaine de pays30 pour finalement trouver
des résultats "internes" très mitigés. La France, le
Royaume-Uni, l'Italie et la Suède ne présentent pas de
ý-convergence quand les autres Etats membres montrent des signes,
parfois fébriles, de réductions des disparités
régionales internes. En revanche, selon Barry (2003) c'est en
Grèce et en Espagne que les disparités régionales se sont
le plus renforcées depuis le début des années
quatre-vingt.
Ces résultats ne concordent pas tout à fait avec
les affirmations de Capron (2000) pour lequel c'est principalement au sein des
pays retardataires qu'un nombre restreint de régions joueraient le
rôle de locomotives pour doper les résultats nationaux.
D'après lui, les disparités internes des pays, dits de la
Cohésion31 (Espagne, Portugal, Grèce et Irlande) ne
font que s'aggraver. Enfin selon les chiffres de la Commission (2003 b), les
disparités régionales internes se sont renforcées dans
pratiquement tous les pays au cours des années nonante. L'Allemagne, la
France et l'Autriche seraient les seuls à faire exception (voir Annexe
1).
Nous n'avons, bien entendu, pas relevé ici toutes les
divergences de la littérature à propos de la ý-convergence
intra pays. Une chose semble cependant certaine : toutes les régions
sont loin de profiter équitablement de la convergence observée
entre pays. Mais est-ce là une surprise? Si cette tendance devait se
confirmer par la suite, nous devrions pouvoir en tirer quelques conclusions
intéressantes.
C. La ?-convergence
Une autre façon d'estimer la convergence est de
chercher une relation, sur un ensemble de régions ou de pays, entre le
taux de croissance actuel et leur niveau de richesse initial respectif. Une
relation négative signifiera que plus un pays est "en retard au
départ", plus son taux de croissance sera élevé et vice
versa. En d'autres mots, une relation négative entre le taux de
croissance et le niveau de développement initial indique que les pays
pauvres manifestent des signes de rattrapage économique.
30 Ederveen et al. (2002, p. 30.) Les observations portaient
sur des périodes variables entre 1977 et 1996. En outre, l'Irlande, le
Danemark et le Luxembourg n'ont pas été étudiés car
ces pays sont considérés comme étant constitués
d'une seule région.
31 Le terme "cohésion" fait référence aux
Fonds de Cohésion dont bénéficient ces quatre pays
à cause de leur niveau de revenu par tête particulièrement
bas durant l'essentiel de la période d'après-guerre.
Cette relation négative, qu'on a coutume d'appeler
"f3-convergence", est étroitement liée au modèle de
croissance néoclassique de Solow (1956) présenté au
premier chapitre. Pour rappel, en présence de rendements
d'échelle constants et de rendements décroissants du capital,
Solow prédit un taux de croissance économique positivement
corrélé à la distance qui sépare une région
de son niveau stationnaire. En d'autres termes, chaque région
croît d'autant plus vite qu'elle est initialement retardataire. Mais au
sein même de ce concept de f3- convergence, il nous faut encore
distinguer la convergence absolue (ou inconditionnelle) de la convergence
conditionnelle dont nous allons parler successivement dans un instant.
Comme pour la a-convergence, il nous a semblé plus
opportun de tenter une revue de la littérature pour dégager les
grandes tendances et en tirer les principaux enseignements plutôt que de
conduire nous-même une régression originale dont la portée
et la pertinence risquaient d'être fort limitées. Après un
dépouillement approfondi de la littérature existante, nous
pensons pouvoir présenter ici la grande majorité des
études empiriques utilisant ces techniques.
1. La ?-convergence absolue (inconditionnelle)
Dans le modèle de croissance néoclassique de
Solow, des économies considérées comme structurellement
identiques, ayant le même accès à la technologie, un taux
d'investissement et un taux de croissance de la population active identiques,
évolueront à long terme vers un seul état stationnaire
commun. L'hypothèse de convergence devrait alors se vérifier :
les pays pauvres devraient bénéficier d'une croissance
économique moyenne supérieure à celle des pays riches. La
f3-convergence absolue décrit ce comportement de retour à une
moyenne unique.
Il y aura donc f3-convergence absolue entre une année
initiale t-n et une année t, lorsque l'on obtient un paramètre f3
significativement négatif pour la régression du taux de
croissance du PIB par tête d'un ensemble de i régions sur leur
niveau initial de richesse par habitant
respectifXi , t - n :
log(X )log(X))/n log Xu
i , t i , t n i , t n i , t
- = á + â+
- - (1)
On conclura à une convergence d'autant plus rapide, vers
un même niveau de revenu, que le paramètre f3 sera
significativement négatif. représente le terme d'erreur et
intègre les chocs
ui , t
aléatoires qui peuvent survenir entre t-n et t.
Il faut cependant se garder de confondre le paramètre
f3 et la vitesse de convergence proprement dite. Certains articles emploient
parfois abusivement le terme de taux (ou vitesse) de convergence pour
désigner le paramètre f332 . Nous tâcherons
d'éviter cette confusion car s'il existe évidemment une
importante corrélation entre les deux concepts, l'équation (1)
n'est qu'une version simplifiée de l'équation
généralement utilisée pour mesurer la vitesse de
convergence33. Cette dernière, dérivée de
l'équation (1), peut être calculée pour une période
n par :
b=-[log(1-n â )]/n (2)
où b est la vitesse (ou taux ) de convergence annuelle. En
sens inverse, on peut évidemment très facilement retrouver le
paramètre f3 : (1e-bn ) / n
â=--
Soulignons enfin que la f3-convergence absolue estimée
peut être tout à fait différente des résultats
obtenus en observant l'évolution des disparités régionales
au cours du temps (a-convergence). La f3-convergence est en effet une condition
nécessaire de la a-convergence, mais l'inverse n'est pas vrai. Quah
(1993), Hénin & Le Pen (1995) ont démontré que la
présence de chocs aléatoires (intégré dans
l'équation par le terme d'erreur ) propres à
ui , t
chaque région peut limiter la réduction de la
dispersion (a-convergence) sans pour autant affecter le processus de retour
à une moyenne (f3-convergence). Par conséquent, il est tout
à fait possible de rencontrer de la f3-convergence sans qu'il y ait pour
autant a-convergence.
1.1. Les études empiriques de la ?-convergence
absolue (inconditionnelle)
Comme nous l'avons fait pour la a-convergence, il faut
considérer différemment le niveau national du niveau
régional. Une nouvelle fois, comme le montrent Esteban (1994), Martin
(1999b) ou encore Dall'erba & Hewings (2003), la convergence entre pays
apparaît incontestable. La f3-convergence absolue est unanimement
acceptée entre les Etats membres.
32 Voir par exemple Dall'erba & Le Gallo (2003, p. 9); Herz
(2002) ou encore Ederveen, Gorter, de Mooi & Nahuis (2002, p. 55)
33 Voir Barro & Sala-i-Martin (1991 et 1992)
Les études les plus pessimistes trouvent un taux de
convergence annuel de 2% par an34. Les plus optimistes comme Solanes
& Dolores (2001) vont jusqu'à 8,6% par an, ce qui paraît tout
de même assez surprenant.
Autre indicateur de cette convergence inter-pays, de 1960
à 2000, le PIB/hab. de l'Espagne est ainsi passé de 59% de la
moyenne européenne35 à 82%. Celui du Portugal et de la
Grèce est passé de près de 40 à 70% de la moyenne
et le "miracle irlandais" n'est plus à présenter36.
Depuis la fin des années quatre-vingt, ce rattrapage n'a cessé de
se confirmer (voir Annexe 2). Entre 1994 et 2001, la croissance annuelle du PIB
par habitant des quatre pays de la cohésion37 a
dépassé de 1% par an la moyenne de l'Union. Bien que le dernier
élargissement représente un nouveau défi en termes de
convergence inter-pays, nous ne nous attarderons pas plus longtemps à ce
niveau de nomenclature où le débat à propos des
dernières décennies demeure relativement limité. Nous
retiendrons donc simplement pour la suite, la puissance du processus de
convergence entre les Etats membres.
C'est au niveau régional que les différents
travaux divergent davantage, du moins à première vue. Pour
synthétiser le débat, nous avons rassemblé les
résultats d'une petite cinquantaine d'observations de 3-convergence
absolue en Europe. Une comparaison immédiate de ces résultats
n'aurait eu que peu de sens étant donné la diversité des
échantillons observés tant au niveau de leur taille qu'au niveau
de la nomenclature utilisée. On trouve en effet des échantillons
de toute taille et de toute composition allant de moins de 70 régions
NUTS I38 à plus de 700 régions NUTS III39
en passant par des échantillons "reconstruits" pour lesquels les auteurs
ont choisi de sélectionner des régions de différents
niveaux de nomenclature.
Comme l'a démontré Capron (2000), même en
se cantonnant au cadre strict et restrictif de la 3-convergence absolue du PIB
par habitant au niveau régional, le choix de la nomenclature a un impact
décisif sur les résultats obtenus. Non seulement il obtient des
vitesses de convergence différentes pour les différents types de
régions, mais en plus, elles ne suivent pas nécessairement la
même évolution. Certains auteurs reconnus comme Maurseth (2001) et
Martin (2001) semblent pourtant négliger cet aspect du problème
et proposent des comparaisons qui nous semblent un peu hasardeuses.
34 Voir parmi d'autres, Ederveen et al. (2002), p. 27.
35 Référence = EU 15
36 Barry (2003) et European Commission AMECO database
37 Pour rappel, les "pays de la cohésion" sont l'Irlande,
le Portugal, la Grèce et l'Espagne.
38 Cappelen et al. (1999)
39 Capron (2000)
Ne voulant comparer que ce qui est comparable, nous avons
choisi de limiter notre comparaison aux deux types d'échantillons
régionaux les plus observés. La plus grande famille de
régressions porte sur des échantillons n'intégrant que des
régions de niveau NUTS II. Les critères
d'éligibilité à l'Objectif 1 portent exclusivement sur ce
niveau régional40, ce qui explique sans doute
l'intérêt des économistes pour cette classe de
régions. Nous verrons par la suite que certains auteurs justifient un
mélange de régions de type NUTS I et NUTS II pour une analyse
plus pertinente.
1.2. La ?-convergence absolue au niveau NUTS
II
Dans le Tableau 1, nous avons compilé une dizaine de
ces tests de f3-convergence absolue au niveau NUTS II. De même que pour
les tableaux qui suivront, plusieurs estimations peuvent provenir d'une
même étude, mais les différences d'échantillons et
de périodes observées nous imposent de les présenter
séparément. Les deux premières colonnes présentent
les caractéristiques de l'estimation : les auteurs de l'étude
dont elle est issue et l'année de publication.
Malgré la sélection que nous venons d'effectuer
en termes de nomenclature, d'importantes différences de taille
d'échantillon subsistent. Cela s'explique surtout par l'imparfaite
disponibilité des données. Ce problème se pose par exemple
pour certaines régions grecques et pour plusieurs Territoires
d'Outre-Mer français dont les données régionales sont
souvent incomplètes. Cette carence de données semble d'ailleurs
assez systématiquement corrélée au retard de
développement qu'accuse une région41.
D'autre part, certains auteurs choisissent arbitrairement de
laisser de côté l'une ou l'autre région pour son
évolution exceptionnelle relativement à l'ensemble de
l'échantillon. La région de Groningen est par exemple exclue de
l'échantillon par la plupart des auteurs, car, centre de l'industrie
pétrolière néerlandaise, elle a connu un déclin
très particulier et assez artificiel durant les années 80.
L'Irlande, pour ses performances économiques hors du commun au cours de
ces deux dernières décennies, est aussi
régulièrement sortie de l'échantillon. On peut penser que
la pertinence d'une étude est proportionnelle à la
complétude de son échantillon. Mais dans le contexte
européen, les disparités économiques entre régions
sont telles qu'il nous
40 La nomenclature NUTS II est utilisée pour observer
l'éligibilité à l'Objectif 1. Cela signifie que deux tiers
des Fonds Structurels ciblent ce type de région. Les autres types
d'objectifs s'adressent quant à eux à des régions de
niveau NUTS III.
41 Herz (2002)
paraît raisonnable d'exclure les régions les plus
originales si l'objectif est de tirer quelques conclusions fiables pour la
majorité des entités.
Enfin, la longueur de la période étudiée
varie également d'une étude à l'autre, ce qui complique
sérieusement l'observation de l'évolution de la vitesse de
convergence au cours du temps. Nous avons arbitrairement choisi de classer ces
estimations dans l'ordre croissant de l'année médiane de leur
période respective. Cela nous a semblé être le moins
mauvais critère de classement chronologique. Nous sommes parfaitement
conscient des limites d'une telle opération mais l'objectif n'est ici
que de dégager un "trend".
Tableau 1 : â-Convergence Absolue du
PIB/
hab.
au niveau NUTS II
Auteurs
|
Public ation
|
Période observée
|
Nbre de régions NUTS II
|
Nbre de pays
|
Paramètre
?42
|
Vitesse de converg. (en %)
|
Significativité
|
Neven & Gouyette
|
1995
|
1980-1985
|
142
|
12
|
-0,0025
|
0,25
|
NS
|
Neven & Gouyette
|
1995
|
1980-1985
|
110
|
12
|
/
|
<0
|
NS
|
Neven & Gouyette
|
1995
|
1980-1989
|
142
|
12
|
-0,0051
|
0,53
|
***
|
Neven & Gouyette
|
1995
|
1980-1989
|
110
|
12
|
-0,0045
|
0,46
|
**
|
Fuss
|
1999
|
1980-1992
|
144
|
12
|
-0,0076
|
0,79
|
NS
|
Neven & Gouyette
|
1995
|
1985-1989
|
142
|
12
|
-0,0075
|
0,77
|
***
|
Neven & Gouyette
|
1995
|
1985-1989
|
110
|
12
|
-0,0179
|
1,86
|
***
|
Ederveen & Gorter
|
2002
|
1984-1996
|
160
|
12
|
-0,018
|
2,02
|
Non précisé
|
Capron
|
2000
|
1985-1996
|
170
|
12
|
-0,017
|
1,88
|
***
|
Marques & Soukiazis
|
1998
|
1987-1995
|
175
|
12
|
-0,0139
|
1,47
|
***
|
Capron
|
2000
|
1991-1996
|
170
|
12
|
-0,028
|
3,01
|
***
|
*** = significatif à 5%, ** =significatif à 10%,
*=significatif à 15% et NS=non significatif au seuil de 15%
|
Dans leurs travaux, les auteurs fournissent la valeur
estimée du paramètre f3 ou du taux (ou vitesse) de convergence
qui en découle. A l'aide des formules (1) et (2), nous avons
calculé les valeurs manquantes de manière à pouvoir
conduire une comparaison. La significativité quant à elle,
lorsqu'elle est donnée, porte bien entendu sur le(s) résultat(s)
original(ux) de l'auteur, coloré(s) dans le tableau43.
Le relatif ordre chronologique dans lequel nous avons
classé les estimations du Tableau 1 nous permet d'observer une
augmentation notable du taux de convergence depuis la seconde moitié des
années quatre-vingt. Cette tendance44 apparaît encore
plus nettement sur le
42 Le nombre de décimales, dans les cases colorées,
dépend des données fournies par l'auteur.
43 En rouge: les estimations significatives au seuil de 15%. En
rose: les estimations non significatives au seuil de 15% ou dont la
significativité n'a pas été précisée.
44 Sur le Graphique 2, la courbe de tendance polynomiale d'ordre
deux, calculée par Excel apparaît en pointillés. Ce type de
tendance, est généralement utilisé pour représenter
des fluctuations de données. L'ordre de la courbe
Graphique 2 où nous avons aligné les
différents taux de convergence estimés du Tableau 1. On voit
notamment que le retrait des résultats non significatifs au seuil de dix
pour cent (en rose sur le graphique) ne modifie pas cette conclusion et que la
tendance à la hausse se maintient. Selon Capron (2000), le lancement de
la nouvelle politique régionale européenne en 1989 n'est
certainement pas étranger à cette amélioration de la
convergence. Pour notre part, il est encore trop tôt pour suggérer
un quelconque lien de cause à effet.
Graphique 2 : Evolution de la â-convergence
absolue du PIB/
hab.
au niveau NUTS II
2,5
3,5
0,5
1,5
2
3
0
1
Etudes classées chronologiquement en fonction
l'année médiane de la période observée
L'observation du Graphique 2 nous conduit à formuler
plusieurs remarques importantes :
- Il faut, avant toute chose, relativiser cette
amélioration du taux de convergence des régions du niveau NUTS
II, aussi significative puisse-t-elle apparaître. Elle reste en effet
très modeste comparée à ce que la plupart des
études évaluent au niveau national. La modestie de la convergence
régionale combinée à la puissance du processus au niveau
national nous amène à penser, comme pour la ý-convergence,
que la convergence intrapays n'est pas vérifiée pour tous les
Etats. Ederveen et al. (2002) et Barry (2003) ont largement montré ce
phénomène de divergence interne que manifestent certains pays.
Signalons au passage que la Commission Européenne reconnaît ce
phénomène qu'elle appelle "le paradoxe de la convergence
divergente"45. Si cette tendance devait se confirmer par la suite,
cela accréditerait les prévisions des théories plus
"pessimistes" présentées au premier chapitre. Nous y reviendrons
en détails plus tard.
(minimum 2) peut être déterminé par le nombre
de courbures de la courbe. Nous l'avons fait apparaître sur nos
différents graphiques à titre indicatif pour souligner
l'évolution de long terme de la vitesse de convergence. 45 Commission
Européenne (2003)
- Suivant nos critères de sélection, il ne nous
a été possible que de présenter des études se
penchant sur les années quatre-vingt et nonante. Or, il est
nécessaire de replacer cette évolution récente dans son
contexte historique. S'il apparaît sur notre graphique que la vitesse de
convergence régionale était extrêmement faible au
début des années 80, il n'en a pas été de
même au cours des décennies précédentes. Armstrong
(1995) trouve une vitesse de convergence absolue au niveau NUTS II de 0,2% pour
la période courant de 1981 à 1993 alors qu'elle était de
2,7% dans les années soixante et de 1,8% dans les années
septante. Pour Button et Pentecost (1999), ce taux de convergence était
de 1% de 1975 à 1985 pour 0,6% de 1980 à 1990. Ces
évolutions antérieures suggèrent que le graphique pourrait
prendre une forme convexe pour l'ensemble de la seconde moitié du
vingtième siècle. Nous verrons si cette intuition est
confirmée par la suite.
- Suite aux vagues successives d'élargissement, les
disparités régionales au sein de l'Union Européenne n'ont
cessé de s'accentuer. Du fait que les différents
échantillons ne suivent pas exactement l'évolution de la
construction européenne, la convergence ici étudiée ne
reflète qu'imparfaitement l'impact de ces vagues d'élargissement
successives. Pour donner une idée de cette problématique, 50 des
211 régions (NUTS II) de l'Union (à 15 pays) avaient en 2003 un
revenu par habitant inférieur à 75% de la moyenne. Cette
hétérogénéité de niveaux de richesse s'est
encore considérablement accentuée avec le tout récent
élargissement à l'Est, puisque tous les nouveaux membres ont un
niveau de revenu par habitant inférieur à ce seuil.
- Enfin, en nous limitant au niveau NUTS II, nous avons
contenu le débat dans des limites raisonnables. En se penchant sur les
autres niveaux de désagrégation spatiale, les différences
de résultats sont encore bien plus marquées. Par exemple, au
niveau NUTS I, Barro et Sala-i-Martin (1995) et Capron (2000) arrivent à
des résultats tout à fait contradictoires : le second rejette
l'hypothèse de f3-convergence absolue quand les premiers voient sur la
même période une convergence très significative. Le
même type de débat est également présent au niveau
NUTS III avec peut-être davantage encore de divergences dues à
l'ampleur et à la variété des échantillons.
Le faible nombre de travaux portant sur le niveau NUTS II rend
nos observations relativement vulnérables. Pour renforcer nos
intuitions, il nous faut rassembler davantage d'études. L'observation
d'échantillons mixtes nous permettra peut-être de confirmer la
tendance observée pour les régions NUTS II.
1.3. La ?-convergence absolue au niveau NUTS I et NUTS II :
les échantilons reconstruits
Plutôt que d'étudier la convergence à un
seul niveau de nomenclature comme nous venons de le faire au niveau NUTS II,
certains auteurs préconisent des échantillons "reconstruits"
composés de régions de différentes catégories. Les
régions d'un même niveau NUTS sont en effet loin d'être
homogènes. Par exemple, les plus petites régions NUTS II ne
dépassent pas 25000 habitants alors que les plus grandes en comptent
près de 10 millions46. "La Nomenclature des Unités
Territoriales Statistiques est une classification caractérisée
par une profonde hétérogénéité à tous
les niveaux, résultat de l'unification de systèmes
régionaux déjà existant au sein des Etats membres
européens." (Magrini, 2003, p. 29) Certaines régions d'une
catégorie particulière sont, dès lors, parfois plus
proches à bien des égards du niveau supérieur ou
inférieur. Ces différences de tailles, de population et de
richesse sont considérables, ce qui nuit à la
comparabilité et à l'estimation d'une éventuelle
convergence. Par souci d'intégrer les cas extrêmes dans l'analyse
sans pour autant sacrifier sa pertinence, certains auteurs ont reconstruit des
échantillons mixtes intégrant des régions de
différents niveaux de nomenclature (surtout NUTSI et II), en fonction de
leur comparabilité et de leur degré d'autonomie.
L'emploi d'échantillons "reconstruits" peut
également constituer une bonne réponse au problème de
disponibilité des données lorsque la nomenclature de
référence d'un pays ne correspond pas à la nomenclature
NUTS. C'est notamment le cas pour le Royaume-Uni où le niveau NUTS II
n'est pratiquement pas employé par les autorités nationales. Cela
justifie la préférence de beaucoup d'auteurs pour le niveau NUTS
I lorsqu'il s'agit d'observer les régions britanniques.
Suivant la même méthode de classement et de
présentation que précédemment, nous avons rassemblé
dans le Tableau 2 une série d'estimations réalisées sur
base de ce type d'échantillons "reconstruits".
46 La taille moyenne des régions NUTS II tourne autour de
1,25 million d'habitants par région.
Tableau 2 : â-convergence absolue du PIB/hab.
aux niveaux NUTS II et NUTS I selon la comparabilité des
régions
Auteurs
|
Public ation
|
Période observée
|
Nbre de régions NUTS I
et II
|
Nbre de pays
|
Paramètre
?
|
Vitesse de converg. (en %)
|
Significativité
|
Fagerberg & Verspagen
|
1996
|
1950-1970
|
68
|
6
|
-0,029
|
4,33
|
***
|
Fagerberg & Verspagen
|
1996
|
1970-1990
|
68
|
6
|
-0,018
|
2,23
|
***
|
Basile, de Nardis & Girardi
|
2001
|
1975-1985
|
119
|
12
|
-0,0012
|
0,12
|
NS
|
Cuadrado-Roura, Mancha-Navarro & Garrido-Yserte
|
2000
|
1977-1986
|
109
|
12
|
-0,0173
|
1,88
|
***
|
Cuadrado-Roura, Mancha-Navarro & Garrido-Yserte
|
2000
|
1977-1994
|
109
|
12
|
-0,0174
|
2,06
|
***
|
Martin
|
1998
|
1978-1992
|
104
|
12
|
-0,016
|
1,81
|
***
|
Paci
|
1997
|
1980-1990
|
109
|
12
|
-0,004
|
0,4
|
***
|
Fagerberg & Verspagen
|
1996
|
1980-1990
|
67
|
6
|
-0,006
|
0,62
|
NS
|
Basile, de Nardis & Girardi
|
2001
|
1975-1998
|
119
|
12
|
-0,0026
|
0,27
|
**
|
Mauresth
|
2001
|
1980-1994
|
143
|
11
|
-0,01
|
1,07
|
***
|
Mauresth
|
2001
|
1980-1994
|
88
|
11
|
-0,01
|
1,07
|
***
|
Baumont, Ertur & Le Gallo
|
2002
|
1980-1995
|
135
|
11
|
-0,00797
|
0,85
|
**
|
Cuadrado-Roura, Mancha-Navarro & Garrido-Yserte
|
2000
|
1986-1994
|
109
|
12
|
-0,009
|
0,96
|
*
|
Fayolle & Lecuyer
|
2000
|
1986-1996
|
119
|
12
|
-0,023
|
2,61
|
***
|
Fayolle & Lecuyer
|
2000
|
1986-1996
|
131
|
12
|
-0,023
|
2,61
|
***
|
Basile, de Nardis & Girardi
|
2001
|
1985-1998
|
119
|
12
|
-0,0047
|
0,48
|
**
|
Solanes & María-Dolores
|
2002
|
1989-1996
|
126
|
12
|
-0,025
|
2,74
|
***
|
Dall'Erba & Le Gallo
|
2003
|
1989-1999
|
145
|
12
|
-0,018
|
1,98
|
***
|
*** =significatif à 5%, **=significatif à 10%, *=
significatif à 15% et NS= non significatif au seuil de 15%
|
Dans le Graphique 3, nous présentons l'ensemble des
vitesses de convergence du Tableau 2 en négligeant les résultats
non significatifs au seuil de quinze pour cent (en rose). Au-delà de la
diversité des résultats, la tendance dominante, bien que moins
marquée, reste cohérente avec l'évolution que nous avions
trouvée pour les échantillons de niveau NUTS II. En effet, elle
semble prendre une forme convexe en "U" lorsque les observations remontent
jusqu'aux années cinquante. La f3-convergence absolue atteint le creux
de la vague à la fin des années septante ou peu après,
pour connaître ensuite une certaine amélioration mais sans
toutefois retrouver le niveau des Trente Glorieuses.
Seul bémol à nos observations, Basile, de Nardis
et Girardi (2001) trouvent une vitesse de convergence étrangement faible
et pourtant significative pour leur dernier test couvrant la période
1985-1998. Sans prétendre que c'est la seule explication, le recours
à une base de données différente joue certainement un
rôle. En effet; alors que la plupart des auteurs
emploient la base de données régionales
harmonisées (REGIO) de Eurostat47, Basile, de Nardis et
Girardi (2001) sont les seuls auteurs de notre tableau à avoir
employé des données issues de Cambridge Econometrics
Data.
Graphique 3 : Evolution de la â-convergence
absolue du PIB/
hab.
au niveau NUTS I et II (échantiions
reconstru its)
4,5
2,5
3,5
0,5
2 1,5
1
4
3
0
5
Etudes classées chronologiquement en fonction de
l'année médiane de la période observée
Au-delà de toutes ces nuances, il nous semble que l'on
peut résumer les principaux résultats examinés pour la
f3-convergence absolue de la manière suivante. Barro et Sala-i-Martin
(1991 et 1995) ainsi que Armstrong (1995) ont montré que la
f3-convergence absolue entre régions européennes semble avoir
connu son apogée pendant les années soixante et au début
des années septante. C'est ce que Barry (2003) appelle the European
Golden Age. La vitesse de convergence régionale a ensuite
décru pour connaître son plus bas niveau entre 1975 et 1985. Comme
nous l'avons montré sur le Graphique 2, elle s'est finalement
redressée vers la fin des années quatre-vingt pour
progressivement retrouver un niveau supérieur durant les années
nonante. Nous apprécierons plus tard le rôle éventuellement
joué par la politique régionale européenne dans ce
rétablissement.
Néanmoins, la convergence régionale en Europe
apparaît nettement moins importante que la convergence entre Etats
membres surtout en raison d'importantes différences de performances
entre régions. Cette différence de vitesse de convergence entre
le niveau régional et national nous amène à penser que la
convergence intra-pays n'est pas vérifiée pour tous les Etats. Le
rattrapage significatif des pays pauvres pourrait n'être le
résultat que d'un
47 Voir par exemple Neven & Gouyette (1995), Mauresth (2001),
Fagerberg & Verspagen (1996), Baumont, Ertur & Le Gallo (2002) ou
Dall'Erba & Le Gallo (2003)
petit nombre de régions à la croissance
particulièrement élevée. L'hypothèse de
"convergence divergente" que nous avions évoquée pour la
a-convergence semble sérieusement se préciser. Nous chercherons
par ailleurs d'autres signes de cette évolution paradoxale.
2. La ?-convergence conditionnelle
Après la a-convergence et la f3-convergence absolue,
voici un troisième grand schéma de convergence rencontré
dans la littérature. La f3-convergence conditionnelle, très
proche de la f3-convergence absolue, vient un peu en complément de
celle-ci pour affiner l'analyse et répondre à certaines
critiques.
2.1. Le concept de ?-convergence
conditionnelle
Les limites de la f3-convergence absolue proviennent
principalement de l'absence de prise en compte de l'éventuelle
hétérogénéité structurelle des
économies. La f3-convergence absolue se contente en effet d'observer
l'évolution de variables par rapport à un seul état
stationnaire supposé commun à toutes les régions.
Rappelons que dans le modèle néoclassique, des économies
distinctes ne partageront le même état stationnaire que si elles
sont identiques d'un point de vue technologique et qu'elles ont les mêmes
préférences48. Cette hypothèse apparaît
évidemment bien peu réaliste. Comme le fait remarquer Jones :
"Les écarts de niveau de revenu au plan mondial s'expliquent en
grande partie par la divergence des états
réguliers49... comme tous les pays n'ont pas un
niveau technologique, un taux d'investissement et un taux de croissance de la
population active identiques, il est normal qu 'ils ne convergent pas tous vers
le même état régulier" (Jones, 1999, p. 68).
Au vu des différences structurelles importantes entre
les régions européennes (en matières d'institutions, de
systèmes éducatifs, de niveaux technologiques, de
préférences...), il est plus que probable que les états
stationnaires ne soient pas identiques. Comme le fait remarquer De la Fuente :
"Même dans des modèles oil les forces de convergences
l'emportent, les niveaux de revenu de long terme peuvent varier entre
diffé rents territoires, reflétant des différences
sousjacentes de fondamentaux." (De la Fuente, 2000, p. 32). Les
études empiriques vont généralement dans ce sens en
montrant que des variables structurelles, autres que le revenu initial, entrent
significativement dans la régression de f3-convergence. "Chaque
région tend
48 Ce qu'on entend ici par préférences, ce sont
principalement le taux d'investissement et le taux de croissance de la
population active.
49 Certains auteurs appellent l'état stationnaire,
"état régulier".
vers un "état stationnaire" qui lui est propre et qui
traduit la pérennité de traits caractéristiques de la
région" (Fayolle et Lecuyer, 2000, p. 187).
Lorsque le modèle estimé intègre ces
variables structurelles ou des variables binaires capables de capter des
phénomènes spécifiques à chaque région ou
à chaque pays, on parle alors de f3- convergence conditionnelle. Cela
revient à supposer des états stationnaires multiples. Les
régions en question ne convergeront dès lors vers un même
état stationnaire que si elles sont structurellement "identiques". Le
paramètre f3 traduit désormais l'intensité d'un processus
de convergence vers des états stationnaires dont le niveau et les
caractéristiques sont déterminés par les valeurs actuelles
de variables "conditionnantes". La convergence observée ne traduira donc
plus nécessairement une diminution des disparités de l'ensemble
de l'échantillon. La version conditionnelle de l'équation (1)
donne cette fois :
log(X ) log(X))/ n log Xlog Zu(3)
i , t i , t n i , t n i , ti , t
- = á + â+ ã+
- -
où est l'ensemble des variables structurelles
explicatives du niveau de convergence atteint
Zi , t
par la région i à l'instant
|
t 50 et le terme d'erreur. Cela devrait
idéalement rassembler
ui , t
|
l'ensemble des caractéristiques d'un territoire qui ont
un effet permanent sur son taux de croissance. Nous verrons lors de la
présentation des études empiriques que dans la pratique, les
auteurs doivent se contenter de quelques variables qu'ils estiment
primordiales. La carence de données et la complexité des
économies ne permettent évidemment pas d'être exhaustif et
d'inclure dans la régression tous les facteurs déterminant le
taux de croissance.
Comme le suggèrent Solanes et María-Dolores
(2001), il est possible conceptuellement de réconcilier une convergence
conditionnelle, rapide, vers des états stationnaires multiples et une
convergence absolue, plus lente, vers un état stationnaire unique en
acceptant que les différences entre états stationnaires
spécifiques s'atténuent avec le temps. Si, selon Galor (2000),
une telle hypothèse est difficilement soutenable au niveau mondial, en
revanche, De la Fuente (2000a) pense que ces variables "conditionnantes"
convergent elles-mêmes avec le temps entre régions
européennes. Ainsi, la f3-convergence absolue des revenus
européens dans le long terme peut refléter une réduction
progressive de ces disparités régionales sousjacentes.
50 De la même manière que pour la convergence
absolue, la vitesse de convergence peut aisément être
calculée à l'aide de l'équation (2).
2.2. Les études empiriques de la ?-convergence
conditionnelle
Comme nous venons de le montrer, le contexte européen
semble imposer une approche en termes conditionnelle pour compléter les
estimations de convergence absolue.
L'hétérogénéité des régions et de
leurs économies ne peut être passée sous silence lorsque
l'on évalue la vitesse de convergence. De très nombreux auteurs
ont donc estimé nécessaire d'intégrer dans la
régression de f3-convergence, soit des variables dummy
d'appartenance nationale (country dummy variables) pour tenir
compte des différences d'états stationnaires entre pays, soit
d'autres variables plus fines restituant les différences de structures
entre les régions.
Dans notre exercice de revue de la littérature, comme
pour la f3-convergence absolue, nous avons été confronté
à certaines difficultés liées aux différences
d'échantillon, de nomenclature et de période observée. A
cela est venue s'ajouter une nouvelle source
d'hétérogénéité : les variables
structurelles que chaque auteur choisit d'introduire dans la régression.
En effet, des variables complémentaires relativement raffinées
peuvent être intégrées dans l'équation. Comme le
fait remarquer Martin (1998), cela revient à se poser la question :
"Quel aurait été le processus de convergence si les
différences régionales que ces variables reflètent avaient
été éliminées?" Voici une liste non exhaustive de
variables que des auteurs ont estimées "conditionnantes" ou alors pour
lesquelles ils ont cherché l'impact sur la convergence :
- les infrastructures physiques, la densité de
population, la structure industrielle et le
chômage de long terme (Cappelen, Castellacci, Fagerberg
& Verspagen, 2003) - la technologie et le niveau de qualification de la
main d'oeuvre (Herz, 2002)
- les dépenses en Recherche et Développement, la
structure de l'économie et du chômage,
l'investissement en capital physique (Fagerberg & Verspagen,
1996)
- les dépenses en Recherche et Développement et la
situation géographique par rapport au centre de l'Europe (Carmen
Guísan, Teresa Cancelo & Rosario Díaz, 1998)
- l'importance des secteurs agricole et industriel,
l'infrastructure, le chômage, la densité de population et les
investissements en R&D (Cappelen, Fagerberg & Verspagen, 1999) - le
tourisme (Tondl, 1999)
- des variables de dépendance spatiale (Baumont, Ertur
& Le Gallo, 2002)
- la densité de population, la productivité par
travailleur, la structure productive, la formation du capital humain et les
dépenses en R&D (Cuardrado-Roura, Mancha-Navarro &
Garrido-Yserte, 2000)
- la part de l'emploi total consacré à
l'agriculture (Button & Pentecost, 1995)
- la structure industrielle (Neven & Gouyette, 1995)
- la part de l'agriculture dans la valeur ajoutée
nationale, la productivité relative, la
proportion de l'emploi consacré au secteur des services et
de l'industrie (Giannetti, 2001)
- les infrastructures publiques de transport, de
télécommunication, d'énergie et d'éducation
(Martin, 1997)
Le nombre et la complexité des variables
"conditionnantes" intégrées dans l'estimation rendent une
comparaison immédiate des estimations impossible. Chaque auteur motive
son propre choix et trouve nécessairement des résultats
considérablement différents des autres. Face à cette
diversité, nous avons, une nouvelle fois, eu à faire un tri pour
tenter de parvenir à une comparaison pertinente.
Nous avons choisi de ne présenter que des tests de
f3-convergence conditionnelle intégrant des country dummy variables
dans leur régression. De nombreux auteurs procèdent de cette
façon, ce qui nous permettra de comparer les résultats entre
eux.
La convergence ainsi appréhendée est en fait une
forme de convergence conditionnelle minimale autorisant un "ensemble d'effets"
spécifiques à chaque pays, mais dont nous ne savons rien de plus.
Autrement dit, c'est une façon d'intégrer dans la
régression les forces propres à chaque pays qui agissent sur la
croissance régionale indépendamment du processus
"spontané" de rattrapage néoclassique. Pour Cuadrado-Roura,
Mancha-Navarro & GarridoYserte (2000), cette variable dummy pour
chaque pays constitue une "boîte noire" contenant les fixed effects
positifs ou négatifs, propres à chaque nation. Le contenu de
cette boîte noire ne pourra être décodé que par des
études plus approfondies.
Dans l'ignorance, les régions au sein d'un même
pays sont supposées identiques en termes d'institutions, de technologies
et de préférences. L'introduction de country dummy variables
revient implicitement à supposer que, si le temps court à
l'infini, les différentes régions d'un pays convergeront vers un
seul état stationnaire propre à ce pays. Comme le dit Capron
(2000), la f3-convergence absolue permet d'apprécier les effets
inter-pays et intra-pays combinés alors que l'introduction de
country dummy variables dans la régression permet de cerner
l'effet intra-pays indépendamment du reste.
Dans la pratique, un ensemble de variables binaires
complétera l'équation de f3-
Dij
convergence pour prendre la valeur 1 si la région i
appartient au pays j et 0 dans le cas contraire. Il y aura donc un nombre P de
termes supplémentaires égal à celui des pays couverts par
la régression.
P
log(X )log(X))/n log XDu
ã+ (4)
i , t i , t n i , t n jij
- = á + â + ?
- - i , t
j1=
Même si nous ne nous pencherons pas sur les
résultats individuels de chaque pays, il est utile de signaler qu'un
signe négatif pour le paramètre de la variable dummy
indique un état stationnaire (pour les régions de ce pays)
inférieur à la moyenne de l'échantillon. Inversement, un
paramètre positif signifie que les régions de ce pays convergent
vers un état stationnaire supérieur à la moyenne. Une
nouvelle fois, les résultats sont loin d'être identiques pour tous
les auteurs. Ainsi par exemple, pour les années 80-90, Capron (2000)
trouve un état stationnaire supérieur à la moyenne
européenne pour le Luxembourg, l'Irlande, le Danemark, la Belgique et le
Portugal. Alors que pour Tondl (1999), c'est le cas de l'Allemagne, de
l'Irlande de la Belgique, de l'Espagne et de l'Autriche.
Comme on pouvait s'y attendre, les résultats
présentés dans le Tableau 3 diffèrent également
d'un auteur à l'autre. Cela s'explique par la taille des
échantillons qui varie du simple au triple, par la période
observée qui va de 5 à 40 ans et par la sélection des
régions étudiées. On voit notamment que le nombre de pays
couverts oscille entre 6 et 15. Certains pays comme l'Irlande et la
Grèce sont régulièrement laissés de
côté pour leur comportement trop hors du commun et il faudra en
tenir compte.
De plus, les proportions de régions NUTS I et NUTS II
varient également considérablement d'un échantillon
à l'autre51. Comme le souligne Herz (2002), de telles
décisions ne sont évidemment pas sans conséquence sur le
résultat. Pour avoir une estimation correcte de la convergence
réelle au sein de l'Union Européenne, l'échantillon
devrait idéalement inclure toutes les régions. Que ce soit pour
des raisons de carence de données ou par choix
délibéré des auteurs, la mise à l'écart
d'une ou plusieurs régions crée forcément un biais dans
l'analyse par rapport à la réalité. Comme nous l'avons
déjà dit, ce biais peut être acceptable s'il permet
d'obtenir des résultats plus cohérents pour le plus grand
nombre.
51 L'estimation de la f3-convergence conditionnelle requiert
des bases de données plus complètes que
précédemment, ce qui justifie d'autant plus le recours à
certaines régions NUTS I pour compléter un échantillon
incomplet.
Tableau 3 : â-convergence conditionnelle du
PIB/hab. aux niveaux NUTS II et NUTS I avec insertion de "country dummy
variables"
Auteurs
|
Année
|
Période observée
|
Nbre de régions
|
Niv. NUT
|
Nbre de pays
|
?
|
Taux de converg. (en %)
|
Significat- ivité
|
Tondl
|
1999
|
1950-1960
|
74
|
I & II
|
9
|
-0,0187
|
2,08
|
***
|
Fagerberg & Verspagen
|
1996
|
1950-1970
|
68
|
I & II
|
6
|
-0,019
|
2,39
|
***
|
Tondl
|
1999
|
1960-1970
|
74
|
I & II
|
9
|
-0,0278
|
3,26
|
***
|
Tondl
|
1999
|
1960-1973
|
106
|
II
|
9
|
-0,0156
|
1,74
|
***
|
Tondl
|
1999
|
1960-1973
|
125
|
II
|
12
|
-0,0177
|
2,01
|
***
|
Sala-i-Martin
|
1996
|
1950-1990
|
90
|
I & II
|
8
|
-0,011
|
1,5
|
***
|
Tondl
|
1999
|
1975-1980
|
135
|
II
|
9
|
-0,0138
|
1,18
|
*
|
Tondl
|
1999
|
1975-1980
|
171
|
II
|
12
|
-0,0127
|
1,32
|
***
|
Tondl
|
1999
|
1975-1980
|
216
|
II
|
15
|
-0,0122
|
1,26
|
***
|
Basile, de Nardis & Girardi
|
2001
|
1975-1985
|
119
|
I & II
|
12
|
-0,0099
|
1,04
|
**
|
Fagerberg & Verspagen
|
1996
|
1970-1990
|
68
|
I & II
|
6
|
-0,006
|
0,64
|
NS
|
Neven & Gouyette
|
1995
|
1980-1985
|
142
|
II
|
12
|
-0,0191
|
2,01
|
***
|
Tondl
|
1999
|
1980-1986
|
134
|
II
|
9
|
-0,0454
|
0,53
|
NS
|
Tondl
|
1999
|
1980-1986
|
169
|
II
|
12
|
-0,0047
|
0,48
|
NS
|
Tondl
|
1999
|
1980-1986
|
214
|
II
|
15
|
0,0019
|
-0,19
|
NS
|
Mauresth
|
2001
|
1980-1988
|
143
|
II
|
11
|
-0,0125
|
1,31
|
NS
|
Neven & Gouyette
|
1995
|
1980-1989
|
142
|
II
|
12
|
-0,0105
|
1,11
|
***
|
Fagerberg & Verspagen
|
1996
|
1980-1990
|
67
|
I & II
|
6
|
0,0005
|
-0,05
|
NS
|
Martin
|
1998
|
1978-1992
|
104
|
I & II
|
12
|
-0,009
|
0,96
|
***
|
Basile, de Nardis & Girardi
|
2001
|
1975-1998
|
119
|
I & II
|
12
|
-0,0092
|
1,03
|
***
|
Neven & Gouyette
|
1995
|
1985-1989
|
142
|
II
|
12
|
-0,0041
|
0,42
|
NS
|
Mauresth
|
2001
|
1980-1994
|
143
|
II
|
11
|
-0,0104
|
1,1
|
*
|
Mauresth
|
2001
|
1980-1994
|
88
|
I & II
|
11
|
-0,0056
|
0,6
|
**
|
Tondl
|
1999
|
1986-1992
|
135
|
II
|
9
|
-0,0121
|
1,26
|
**
|
Tondl
|
1999
|
1986-1992
|
171
|
II
|
12
|
-0,0124
|
1,29
|
***
|
Mauresth
|
2001
|
1989-1994
|
143
|
II
|
11
|
-0,0133
|
1,37
|
**
|
Mauresth
|
2001
|
1989-1994
|
88
|
I & II
|
11
|
-0,0158
|
2,1
|
NS
|
Basile, de Nardis & Girardi
|
2001
|
1985-1998
|
119
|
I & II
|
12
|
-0,0097
|
1,03
|
**
|
*** =significatif à 5%, ** =significatif à 10%, * =
significatif à 15% et NS= non significatif au seuil de 15%
|
A l'instar de la plupart des auteurs, nous n'avons pas
accordé beaucoup d'attention à la valeur du coefficient de
détermination (). Toutefois, il peut être intéressant de
signaler que
R2
l'introduction de country dummy variables augmente
considérablement le pouvoir
d'explication de l'estimation. En effet, la valeur du est en
moyenne inférieure à 0,1 pour
R2
les tests de 3-convergence absolue, ce qui suggère que
des variables structurelles additionnelles peuvent influencer la croissance.
Suite à l'introduction de country dummy variables, le pouvoir
d'explication d'une 3-convergence conditionnelle fait plus que doubler
puisque le prend alors une valeur en moyenne supérieure
à 0,5.
R2
Graphique 4 : Evolution de la â-convergence
conditionnelle du PIB/hab. aux niveaux NUTS I et II en intégrant des
"country dummy variables"
-0,5
2,5
3,5
0,5
1,5
2
0
3
1
Etudes classées chronologiquement en fonction de
l'année médiane de la période observée
La tendance générale, visible sur le Graphique
4, confirme une nouvelle fois nos premières impressions. La
convexité de la tendance est manifeste et la forme en "U" indique bien
un redressement à la fin du siècle. Cette amélioration de
la convergence régionale maintient plausible l'hypothèse d'un
impact positif des Fonds Structurels européens, mais nous reviendrons
évidemment sur cette question plus loin.
Cependant, comme il y a une concentration de résultats
non significatifs dans les années de creux, il nous a paru utile de
reconstruire un graphique ne rassemblant que les résultats significatifs
pour nous assurer que nos conclusions sont toujours bien valables52.
Comme on peut le constater sur le Graphique 5, le fait de laisser de
côté les estimations non significatives au seuil de quinze pour
cent a, cette fois, une influence plus sensible sur la tendance que
précédemment. On constate en effet une atténuation
sensible du creux de 75-85 par rapport à ce qu'on pouvait observer pour
la 3-convergence absolue. En particulier, le redressement de la fin des
années quatre-vingt est ici nettement moins marqué que pour la
3-convergence absolue.
52 Nous n'avons pas procédé à une telle
reconstruction pour les graphiques précédents car le faible
nombre de résultats non significatifs et leur dispersion limitaient leur
influence sur la tendance générale.
Graphique 5 : Evolution de la â-convergence
conditionnelle du PIB/
hab.
au niveau NUTS I et II avec "country dummy
variables". Uniquement les résultats significatifs (Min.
15%).
0,035
0,025
0,015
0,005
0,03
0,02
0,01
0
Etudes classées chronologiquement en fonction de
l'année médiane de la période observée
Le Graphique 5 présente quelques résultats
inattendus qu'il nous faut commenter. En particulier, deux estimations pourtant
significatives sortent véritablement du lot et contredisent curieusement
nos conclusions. D'abord, Tondl (1999) obtient un résultat
particulièrement élevé pour la période 60-70. Dans
ce cas, le nombre restreint de régions (78) observées sur la
période en question peut expliquer cette incohérence, d'autant
plus que le même auteur se penchant sur les années soixante avec
des échantillons plus larges trouve des résultats nettement plus
modestes. De la part de Neven & Gouyette (1995), en revanche, les
résultats obtenus pour la période 80-85 sont plus
incompréhensibles. En effet, malgré un échantillon tout
à fait acceptable, ils obtiennent une vitesse de convergence
pratiquement deux fois supérieure aux autres résultats
environnants.
Si on néglige ces deux résultats un peu
exceptionnels, le Graphique 5 est riche en enseignements. En effet, comme le
suggèrent Solanes & María-Dolores (2001) et Neven &
Gouyette (1995), avec l'introduction des variables d'appartenance nationale,
nous aurions pu nous attendre à un niveau général de
convergence plus élevé qu'en termes absolus. Intuitivement, la
convergence vers un état stationnaire propre à chaque pays
devrait en effet être plus rapide que vers un seul état
stationnaire commun à l'ensemble de l'Union Européenne. C'est
pourtant le contraire qui apparaît dans notre comparaison puisque, pour
l'ensemble des résultats significatifs observés, on obtient une
vitesse de convergence moyenne de 1,8% en absolue et de 1,5% en conditionnelle.
Si cette différence semble un peu faible, elle cache en fait deux
évolutions différentes au cours du temps. En effet, si on compare
le
Graphique 5 aux Graphiques 2 et 3, à la fois le creux
de la période 75-85, mais surtout le redressement de la fin des
années quatre-vingt apparaissent moins marqués suite à
l'introduction country dummy variables. Ainsi, la convergence
conditionnelle est légèrement supérieure à
l'absolue entre, grosso modo, 1975 et 1985. Mais la situation se
renverse ensuite complètement pour les quinze années suivantes.
C'est à la fin du siècle que l'écart entre la convergence
absolue et la convergence conditionnelle avec country dummy variables
est le plus marqué.
Martin (1998), repris par Beine & Jean-Pierre (2000),
suggère que cette diminution de la vitesse de convergence, lorsque l'on
introduit des country dummy variables, indique un
phénomène de "convergence divergente". Il s'agirait de la
concomitance d'une convergence inter-pays et d'une divergence entre
régions d'une même nation (Pour une représentation
graphique de ce paradoxe, voir Annexe 3). Rappelons au passage que la puissance
de la convergence observée entre pays combinée à la
modestie de la convergence absolue au niveau régional nous avait
déjà conduit sur cette piste.
Pour illustrer cette réalité, imaginons le cas
d'un pays comme l'Espagne dont les régions les plus riches du Nord
rattraperaient les régions des autres pays riches sans que les
régions plus pauvres du Sud puissent suivre le même rythme de
croissance. La Catalogne aurait par exemple un taux de croissance
supérieur à la moyenne européenne et gonflerait ainsi la
croissance nationale alors que l'Andalousie se contenterait d'une croissance
tout juste égale à la moyenne européenne. Un tel cas de
figure serait tout à fait cohérent avec les écarts
observés à la fin du siècle. Le redressement du taux de
convergence absolue à la fin des années quatrevingt serait
essentiellement le fait d'un petit nombre de régions "leaders" et
cacherait, dès lors, un phénomène de divergence
intra-pays. En revanche le creux moins marqué pour la convergence
conditionnelle, quelques années plus tôt, indiquerait que les
écarts ne se sont pas creusés entre régions d'un
même pays entre 1975 et 1985.
De ces observations, ce qui nous paraît
particulièrement important, c'est que le phénomène de
divergence entre régions d'un même pays semble s'être
considérablement accentué ces dernières années pour
prendre une ampleur inégalée depuis la seconde guerre
mondiale.
Accréditant, par la même occasion les
théories "pessimistes" du déséquilibre régional, la
Commission affirme que dans les premiers stades d'un processus de convergence,
les
différences de PIB/hab. entre régions tendent
à s'élargir53. Cela permet à la croissance
économique nationale d'atteindre un niveau assez élevé.
L'activité économique devrait ainsi d'abord se concentrer dans
certains pôles urbains pour y jouer un rôle de locomotive. Par
exemple, selon Vanhove (2000), le rattrapage économique observé
pour le Portugal, l'Espagne et l'Irlande est principalement dû au
formidable développement des pôles urbains. Il s'agit là,
pour les pays retardataires, d'un arbitrage à court terme entre
croissance nationale et convergence régionale interne. Plus largement,
c'est le dilemme entre équité et efficience dont parle la
nouvelle géographie économique qui réapparaît. Nous
y reviendrons naturellement au moment d'évaluer l'impact de la politique
régionale européenne sur la convergence.
2.3. Principales critiques de la ?-convergence.
Comme nous l'avions annoncé, en nous limitant à
la présentation des tests de convergence en coupe transversale, nous
avons laissé de côté diverses autres techniques
d'estimation de la convergence. Mais ce n'est certainement pas parce que ces
tests sont les plus courants qu'ils sont exempts de reproches. Au contraire, de
nombreux auteurs leur destinent des critiques acerbes. Voici les principaux
reproches qui sont adressés à la f3-convergence et à la
a-convergence.
- Bernard & Durlauf (1991) critiquent la f3-convergence
qui n'observe que le taux de croissance annuel moyen du revenu. Pour eux, cela
revient à faire l'hypothèse que ce taux de croissance est
constant tout au long de l'année et qu'il ne résulte que d'un
choc initial. Or, les séries sont affectées par des chocs
aléatoires à chaque période. Cette remarque limite certes
la finesse de l'analyse de la f3-convergence, mais elle est nettement moins
pertinente lorsque l'objectif est de dégager un "trend" sur une
période relativement longue. Elle ne nous semble donc pas remettre
fondamentalement en question nos observations pour les cinquante
dernières années.
- Friedman (1992) et Quah (1993a) prétendent quant
à eux que le test de f3-convergence ne donne aucune information
pertinente, car il souffre d'une "erreur de Galton". Cela signifie
qu'un coefficient f3 significativement négatif peut être
associé à une dispersion de distribution constante ou croissante.
Inversement, l'analyse de la f3-convergence peut nous conduire à une
conclusion de divergence dès qu'un sous-ensemble diverge. Fuss (1999)
arrive, elle, à la conclusion que l'analyse de la f3-convergence seule
est clairement
53 Commission Européenne (2004, p. 148)
insuffisante et qu'il est donc recommandé de la combiner
à une analyse de la ýconvergence. C'est ce que nous avons fait
sans aboutir à des résultats contradictoires.
- Chesshire & Cabonaro (1995) mettent en évidence
le problème de la nomenclature NUTS dont nous avons déjà
parlé. Ils déplorent que les études de convergence se
basent sur une nomenclature administrative, artificielle qui a finalement peu
de liens avec la réalité économique du terrain. Ils
estiment que les régions devraient davantage être définies
de façon fonctionnelle selon leurs caractéristiques
démographiques et économiques. Malheureusement, il n'existe
à l'heure actuelle aucune nomenclature respectant ces critères
économiques à l'échelle européenne. Les bases de
données disponibles sont toutes construites à partir de la
Nomenclature des Unités Territoriales Statistiques. Faute de mieux, nous
devons nous en contenter, sans pour autant négliger cette remarque.
- De la Fuente (2000) et Islam (1995) font remarquer que
l'intégration de quelques variables structurelles dans la
régression de la f3-convergence conditionnelle n'est pas suffisante pour
refléter l'hétérogénéité des
économies régionales. Selon eux, l'omission de variables
pertinentes (en particulier, le niveau technologique et les changements
structurels pour le premier et le capital humain pour le second) est
susceptible de biaiser les estimations de tous les autres paramètres
dès que ceux-ci sont corrélés aux variables manquantes. En
d'autres mots, on ne peut compter sur le terme d'erreur pour intégrer
ces différences manquantes que si celles-ci sont non
corrélées à celles explicitement présentes dans la
régression. Une solution à ce problème serait de se
tourner vers des techniques de données en panel pour tenir compte de
tous les effets spécifiques non observés. Toutefois, De la Fuente
(2000) affirme que pour identifier une dynamique de long terme, comme nous
tentons de le faire ici, cette alternative peut, elle aussi, avoir d'importants
effets pervers.
- Enfin, Chaterrji (1992), Quah (1993b et 1996c), Mankiw
(1995) et Pesaran & Smith (1995) regrettent que ce type de modèle de
croissance ne relie le taux de croissance d'une région qu'à "sa
propre histoire" et considère chaque région comme une "île
isolée". Il ne met pas en évidence de façon explicite des
interactions inter-régionales ou des effets de co-dépendance.
Dans le même ordre d'idée, Dall'erba & Le Gallo (2003)
soulignent le fait que la plupart des études empiriques de
f3-convergence négligent deux aspects spatiaux essentiels des
données observées : l'autocorrélation
spatiale54 et l'hétérogénéité
spatiale55. Quah (1996c) trouve même que la localisation d'une
région et l'interdépendance
54 L'autocorrélation spatiale signifie que des similitudes
de caractéristiques coïncident avec des similitudes de
localisation.
55 L'hétérogénéité spatiale
signifie que les comportements économiques ne sont pas stables dans
l'espace.
géographique sont des facteurs plus déterminants
que les variables nationales et économiques traditionnellement
intégrées à la régression de la f3-convergence
conditionnelle. L'absence de considération pour ces variables spatiales
limiterait, selon ces auteurs, la portée des conclusions des tests
présentés précédemment. Il s'agit là, sans
doute, de la critique la plus fondamentale adressée à l'ensemble
des travaux ici recensés. Elle a, en tout cas, donné lieu
à de nombreux débats qui sortent largement du cadre de notre
travail56.
3. Autre limite de la ?-convergence : l'hypothèse de
clubs de convergence.
Nous avons dans un premier temps abordé le concept de
f3-convergence absolue correspondant au processus de retour à une
moyenne supposée commune à toutes les régions. Nous avons
ensuite présenté la f3-convergence conditionnelle
intégrant la prise en compte d'un certain nombre de variables
"conditionnantes". Ceci permettait de tenir compte des différences
fondamentales entre les régions et de concevoir un
phénomène de convergence vers un état stationnaire propre
à chaque région (ou pays). Dans ces deux hypothèses, des
économies structurellement identiques étaient "condamnées"
à converger vers un même état stationnaire. Nous n'avions
donc, jusqu'à présent, aucune considération pour la
"situation initiale" d'une région. Or, la tendance à la
polarisation de la croissance observée par plusieurs
auteurs57 ainsi que les différences de croissance
relevées entre économies pourtant structurellement très
semblables poussent à se pencher sur les conditions initiales et nous
encouragent à envisager l'hypothèse dite de "clubs de
convergence".
L'idée de convergence en clubs est issue des
modèles de croissance endogène et est apparentée aux
notions de "polarisation", de "trappe de pauvreté" et de
"clustering"58. C'est en quelque sorte un schéma
complémentaire de la convergence absolue vers un état
stationnaire unique et de la convergence conditionnelle vers une multitude
d'états stationnaires propres à chaque région, mais tenant
compte, cette fois, des conditions initiales. Selon Galor (2000, p. 114) :
"Les revenus par tête des régions dont les
caractéristiques structurelles sont identiques convergent vers un niveau
de long terme identique pour autant que les conditions initiales de ces
régions soient suffisamment proches." Différentes
économies convergeront donc entre elles si leurs conditions initiales
appartiennent au "bassin d'attraction" d'un même état
stationnaire. La convergence se fait alors vers quelques états
stationnaires localement et non
56 Voir notamment Moreno & Trehan (1997), López-Bazo
et al. (1999), Fingelton (1999), Rey & Montouri (1999), le Gallo &
Ertur (2000), le Gallo (2001) ou encore Baumont et al (2001).
57 Voir notamment Beine & Jean-Pierre (2000), Capron (2000),
Tondl (1999), Maurseth (2001). 58 Galor, traduit pas F. Docquier (2000, p.
114)
plus globalement stables. Enfin, soulignons que, à
l'instar de la f3-convergence, la convergence en clubs peut être
conditionnelle dans le cas où on y intègre des variables
conditionnantes.
Durlauf & Johnson (1995) font remarquer que les tests de
f3-convergence standards que nous venons de voir ne sont pas capables
d'établir une distinction entre ce type de convergence à
états stationnaires multiples et le schéma de Solow. Galor (2000)
démontre pourtant que ce schéma de convergence en clubs n'est pas
contradictoire avec le modèle de croissance néoclassique. En
effet, la f3-convergence est liée à l'hypothèse de
rendements marginaux décroissants59 qui assure la stricte
concavité de la fonction de production par tête par rapport au
capital par tête et, par la même occasion, l'unicité de
l'équilibre stationnaire60. Mais lorsque l'on introduit
l'hétérogénéité entre les
individus61, la fonction de production peut perdre sa stricte
concavité et la dynamique du taux de croissance, sa monotonie. La
convergence des clubs devient alors le résultat le plus plausible,
même en présence de rendements marginaux décroissants et de
rendements d'échelle constants.
D'un point de vue méthodologique, Bernard & Durlauf
(1996) et Galor (2000) montrent qu'un test de f3-convergence, comme
étudié jusqu'à présent, appliqué à
une réalité dominée par la formation de clubs de
convergence peut donner un paramètre f3 significativement négatif
et donc conduire à la conclusion erronée de f3-convergence. Ceci
constitue une limite supplémentaire des tests de f3-convergence. Pour
surmonter ce problème, Quah (1 993b, 1 996a, 1 996b et 1997) a
développé une méthodologie alternative permettant de tenir
compte de la forme de distribution dans son ensemble, mais surtout capable
d'appréhender la dynamique interne à la distribution. A l'aide de
chaînes de Markov et de matrices de probabilité de transition,
Quah obtient, au niveau mondial, la preuve de la formation de clubs (de pays)
de convergence et de la polarisation de la distribution du revenu par habitant
en deux pics. Les pays pauvres auraient ainsi tendance à converger entre
eux de même que les pays riches de leur côté. D'autres
auteurs comme Desdoigts (1999), Bianchi (1997), Paap & Van Dijk (1998) pour
de larges groupes de pays62 ou Johnson (2000) pour les Etats-Unis
ont observé ce même phénomène de formation de clubs
de convergence dans leurs études empiriques.
59 La croissance de l'économie va de pair avec la
croissance du capital par travailleur dont la productivité marginale
baisse, de sorte que le taux de croissance du stock de capital et de
l'épargne diminuera avec le temps.
60 Voir notamment Mankiw (2001, chapitre 4, p. 93-125) ou Jones
(1999)
61 Galor (2000, p. 119) montre qu'on peut introduire
l'hétérogénéité dans les dotations
factorielles. Il est alors possible, sur certains intervalles, que la fonction
d'épargne soit une fonction convexe du ratio capital/travail. Le taux de
croissance ne diminue alors plus nécessairement avec le capital par
travailleur. Cela peut conduire à des équilibres multiples et
à la formation de clubs de convergence.
62 Ces trois auteurs ont employé des échantillons
de plus de 120 pays.
Au niveau européen, pour la période 1980-1989 et
se basant sur un échantillon de 82 régions63, Quah
(1996c) n'arrive pas à la même conclusion et rejette
l'hypothèse de formation de clubs de convergence. En revanche, Tondl
(1999) identifie la naissance de clubs de convergence pour la période
1975-198664 . Le Gallo (2001), pour un échantillon de 138
régions européennes65, accrédite cette
théorie pour la période 1980-1995. Capron (2000), de son
côté, observe des résultats différents selon le
niveau NUTS sélectionné. Pour les périodes 1980-1996 et
1985-1996, l'échantillon de 712 régions NUTS III présente
clairement deux clubs de convergence, le niveau NUTS I manifeste
également une tendance à la formation de plusieurs clubs de
convergence alors que la même hypothèse est tout à fait
rejetée pour les 170 régions NUTS II. Pourtant, pour 145
régions de ce même niveau NUTS II, Dall'erba & Le Gallo (2003)
identifient la formation de deux clubs de convergence pour la période
1989- 1999. Dans ce dernier travail, les régions centrales et les
régions périphériques du continent apparais sent converger
vers deux états stationnaires différents. Ce dernier
résultat confirme les conclusions de Baumont et al. (2002) pour la
période 1980-1995.
Enfin, Beine & Jean-Pierre (2000) identifient un seuil de
rupture66 pour leur échantillon de 62 régions NUTS I
sur la période 1980-1995. Ce seuil scinde l'ensemble en un premier
groupe de 23 régions prospères et un autre de 39 régions
moins favorisées. Des dynamiques de convergence sensiblement
différentes semblent animer chacun des deux sous-groupes. "La
lenteur de la convergence au niveau global tend en fait à masquer la
présence de deux processus opposés. A un groupe de régions
aisées pour lesquelles l'hypothèse de convergence vers un
même niveau de PIB par habitant est rejetée, s'oppose un groupe
moins aisé où les régions convergent à un rythme
lent." (Beine & Jean-Pierre, 2000, p. 249). L'absence de convergence
au sein du club de tête et le rythme lent et éventuellement
conditionnel de la convergence au sein du club "en retard" peuvent, dans un
sens, être interprétés de façon assez optimiste.
Cela signifie en effet que la situation des régions plus démunies
n'a pas tendance à s'aggraver et que le fossé avec l'ensemble des
régions plus riches n'est pas en train de se creuser
irrémédiablement. Toutefois, la situation de la majorité
des régions pauvres demeure précaire et manifeste peu de
changement. Seul un petit nombre d'entre elles est parvenu à emprunter
"l'ascenseur régional" et a connu un rattrapage significatif. Ces
régions "leaders"
63 L'échantillon de Quah (1996c) couvre 6 pays au niveau
NUTS I et II sans inclure la Grèce et le Portugal ou l'Irlande.
64 L'échantillon de Tondl (1999) est composé ici de
215 régions NUTS II de l'EU-1 5.
65 L'échantillon de Le Gallo (2001) couvre l'EU-12 au
niveau NUTS II plus quelques régions NUTS I.
66 Les résultats sont obtenus à l'aide d'une
récente technique de détection endogène des seuils, issue
de la littérature sur les panels dynamiques.
sont ainsi parvenues à sauter d'un club de convergence
à l'autre67. C'est notamment le cas des régions du
Nord de l'Espagne, de l'Irlande et de la plupart des régions
métropolitaines.
En ce qui nous concerne, cette absence de véritable
dynamisme propre à chaque club combiné avec le dynamisme de
quelques régions "leaders" accrédite nos affirmations
précédentes et en particulier le "paradoxe de convergence
divergente".
En résumé, nous avons cherché à
savoir si la vitesse de f3-convergence (absolue et conditionnelle) relativement
modeste entre régions européennes masquait en fait un autre
processus de formation de clubs de convergence. Sur ce point, Beine &
Jean-Pierre (2000) et Capron (2000) s'accordent quant à la formation de
clubs de convergence au niveau NUTS I et nous n'y avons pas trouvé
d'opposition. Par contre, les résultats affirmatifs de Tondl (1999) et
Le Gallo (2001) au niveau NUTS II68 sont contredits par Capron
(2000) et Quah (1996c). Les régions NUTS II nous préoccupant
davantage, vu ces contradictions, nous ne pouvons pas conclure fermement
à la formation de clubs de convergence à ce niveau. Mais nous ne
rejetterons pas pour autant cette hypothèse qui, en tout état de
cause, n'invalide pas nos premières observations.
4. Conclusions
Comme nous l'avons vu, la plupart des critiques concernant
l'analyse conventionnelle de la f3- convergence ne semblent pas remettre
fondamentalement en cause les observations que nous avons
dégagées. La convergence régionale, conditionnelle ou non,
paraît bel et bien avoir connu son apogée pendant les
années soixante et au début des années septante. Elle a
ensuite décru pour connaître son plus bas niveau voire
pratiquement cesser à la fin des années septante et au
début des années quatre-vingt. Les deux types de f3-convergence
que nous avons étudiés ont alors pris des directions sensiblement
différentes. Alors que la f3- convergence absolue redémarrait
timidement vers la fin des années quatre-vingt pour croître
lentement tout au long des années nonante, la f3-convergence
conditionnelle avec country dummy variables ne manifestait
pratiquement aucun signe de reprise.
Comme l'ont montré différents auteurs, cette
diminution de la vitesse de convergence lorsque l'on introduit des country
dummy variables à partir du milieu des années quatre-vingt
indique le développement d'un phénomène de "convergence
divergente". Les résultats relativement
67 Comme le souligne Boldrin & Canova (2001) certains
"désastre économiques" au déclin particulièrement
rapide auraient emprunté le chemin inverse pour se retrouver dans le
groupe des régions plus pauvres.
68 Etudes portant exclusivement sur le niveau NUTS II ou incluant
le cas échéant quelques régions NUTS I.
modestes observés au niveau régional
combinés à la forte convergence inter-pays nous avaient
déjà poussé à considérer cette
hypothèse. Autrement dit, la convergence régionale
observée au niveau européen serait principalement le
résultat de la croissance assez exceptionnelle d'un petit nombre de
régions "leaders" au sein des pays plus défavorisés. La
croissance particulièrement importante de ces régions,
relativement pauvres à l'échelle européenne, mais riches
à l'échelle de leur propre pays, contribuerait à la
convergence régionale globale au niveau européen mais creuserait
par la même occasion des disparités au sein de leur propre
Etat.
Cet instant où la f3-convergence conditionnelle et
absolue ont pris des directions différentes coïncide justement avec
le véritable envol de la Politique de Cohésion de l'Union
Européenne. Nous verrons, dans la seconde partie, s'il existe un
quelconque lien entre cette politique d'assistance financière aux
régions et ce phénomène de "convergence divergente".
Dans le même ordre d'idée, l'hypothèse des
clubs de convergence offre une piste d'explication intéressante à
ce taux de convergence global relativement faible des années
quatre-vingt et nonante. La lenteur de la convergence au niveau européen
pourrait, en effet, masquer la présence de deux clubs de convergence
propres aux régions plus développées et aux régions
plus pauvres. Seul un petit nombre de régions "en retard" auraient connu
un véritable rattrapage et seraient ainsi parvenues à passer d'un
club à l'autre. Le cadre conceptuel est séduisant, mais cette
hypothèse, nous l'avons vu, ne fait pas l'unanimité parmi les
auteurs. Sur ce point précis, le débat reste donc ouvert.
Enfin, une synthèse globale de la littérature
telle que nous l'avons tentée permet de prendre un certain recul par
rapport à l'apparente extrême diversité des
résultats. Il n'est pas rare, en effet, de voir des auteurs69
affirmer d'emblée que les travaux empiriques réalisés sur
la convergence régionale en Europe conduisent à des
résultats profondément contradictoires, comme pour mieux
souligner l'utilité et l'intérêt de nouvelles estimations
censées dépasser les limites des précédentes. Loin
de nier l'existence de certaines divergences dans les conclusions des nombreux
travaux empiriques examinés, de telles positions nous paraissent trop
radicales. Lorsqu'on ne compare entre elles que des estimations observant la
même période et le même type d'échantillon, il
devient alors relativement rare de trouver de véritables contradictions.
Un examen systématique et détaillé de la
littérature laisse ainsi apparaître des tendances assez
claires.
69 Voir parmi d'autres Jean-Pierre (1999), Maurseth (2001) ou
Martin (2001).
DEUXIEME PARTIE
La Politique européenne de Cohésion:
son impact sur
le processus de convergence
Maintenant que nous avons étudié la convergence
régionale européenne d'un point de vue théorique et
empirique, il est temps de passer à l'analyse du rôle joué
par la politique régionale européenne dans ce processus.
Après une brève présentation de l'outil, nous analyserons
dans un premier temps l'effet redistributif des Fonds Structurels. Nous
chercherons principalement à voir si les pays riches contribuent au
financement de la Politique de Cohésion en fonction de leur richesse,
mais surtout si les fonds dont bénéficient les pays pauvres sont
proportionnels à leur retard. Dans un second temps, nous rechercherons
l'éventuel impact des aides européennes sur la réduction
des disparités économiques.
Chapitre 3 : La Politique européenne de
Cohésion
Dans le processus de construction de l'Union
Européenne, chaque nouvelle étape vers une plus grande
unification pose la question de la possibilité, pour les régions
les plus pauvres, de tirer profit de cette intégration à un grand
marché. Comme nous l'avons vu, à la fin des années
septante, le processus de convergence régionale que l'Europe connaissait
depuis les années cinquante semble s'être interrompu.
L'idée que les forces du marché ne sont pas nécessairement
suffisantes pour réduire significativement les inégalités
régionales a motivé la mise sur pied d'une politique
européenne de cohésion. L'Union Européenne a alors
construit cet outil de solidarité financière entre Etats membres
avec l'objectif d'améliorer la compétitivité des
régions défavorisées et de corriger les
déséquilibres régionaux.
A. La structure institutionnelle de la Politique
européenne de Cohésion
Institutionnalisé par l'Acte Unique européen de
1986, l'objectif de « cohésion économique et sociale »
vise à réduire l'écart entre les niveaux de
développement et de revenu des différentes
régions70. Mais ce n'est qu'en 1989 que la Politique de
Cohésion de l'Union Européenne a pris son véritable
envol71. Visant essentiellement à l'amélioration des
infrastructures, à la restructuration de l'industrie et à la
modernisation de l'éducation, cet ambitieux programme représente,
à l'heure actuelle, une redistribution de 213 milliards d'euros pour la
période 2000-2006, soit plus d'un tiers du budget européen
total.
Pour évaluer si les ressources mobilisées dans
ce cadre-ci sont importantes d'un point de vue historique, on peut comparer la
Politique de Cohésion au fameux Plan Marshall72 de 1948
à 1951 dont la réussite est souvent montrée en exemple.
Castanheira de Moura & Siotis (1994) de même que Boldrin & Canova
(2001) estiment que la Politique Structurelle actuelle de l'Union
Européenne est, en proportion du PIB annuel, deux fois plus importante
que ne l'était le Plan Marshall. Elle est aussi nettement plus
prolongée puisque les deux exercices
précédents73, à eux seuls, couvrent
déjà une période trois fois plus longue.
70 Les Fonds sectoriels (FSE et FEOGA-Orientation) ont
été créés en 1958 et le FEDER en 1975 mais ils sont
restés d'une ampleur très limitée jusqu'à la fin
des années quatre-vingt.
71 Le Conseil européen de Bruxelles a
réformé en février 1988 le fonctionnement des Fonds
Structurels et décidé de leur allouer 68 milliards d'Ecus pour
quatre ans.
72 Le plan Marshall ou Programme de rétablissement
européen a représenté, à l'époque, 13
milliards de dollars d'assistance économique (dont plus de 11 milliards
de dons) à 16 pays européens dévastés par la
seconde guerre mondiale.
73 Exercices courant de 1989 à 1993 et de 1994 à
1999.
Plusieurs réformes successives ont donné
à la Politique de Cohésion sa structure actuelle. La
dernière en date remonte à 1999. Il existe aujourd'hui quatre
Fonds Structurels répondant à autant d'objectifs
différents :
- Le Fonds Européen de Développement
Régional (FEDER) investit dans les régions
défavorisées (Objectifs 1 et 2). Il cible principalement le
développement des infrastructures et des PME et le soutien des
investissements productifs.
- Le Fonds Social Européen (F SE) se concentre sur la
formation de la main d'oeuvre et la lutte contre le chômage.
- Le Fonds Européen d'Orientation et de Garantie
Agricole Section Orientation (FEOGAOrientation) finance des mesures de
développement rural.
- l'Instrument Financier de la Pêche (IFOP) est
consacré à la restructuration et à la modernisation de ce
secteur.
En complément, le Fonds de Cohésion fournit, aux
pays dont le PIB national par habitant est inférieur à 90% de la
moyenne européenne, une aide financière directe pour des projets
environnementaux ou de transport. Les pays dits de la Cohésion et
bénéficiant de ces aides sont la Grèce, le Portugal,
l'Espagne et l'Irlande. Enfin, la Banque Européenne d'Investissement
(BEI) accorde des prêts pour le développement régional,
notamment en complément des Fonds Structurels.
La Commission Européenne voulant éviter le
gaspillage des ressources et un éparpillement des efforts, le premier
principe fondateur des Fonds Structurels est la concentration. Cette
concentration s'est considérablement renforcée pour l'exercice
2000-2006 par rapport aux précédents. L'ensemble des Fonds est
désormais alloué selon trois objectifs prioritaires (94% du
budget total) contre sept auparavant et la population de l'Union
concernée par ces aides est passée de 50% à 41%. (Pour une
carte représentant l'éligibilité des régions aux
différents Fonds pour la période de programmation 2000-2006, voir
Annexe 4)
- L'Objectif 1 représente 70% de l'ensemble des Fonds,
soit plus de 137 milliards d'euros de 2000 à 2006. Il s'attelle au
développement et à l'ajustement structurel des régions
considérées en retard de développement,
c'est-à-dire dont le PIB/hab. est inférieur à 75% de
la moyenne européenne74. Ces régions
représentent 22% de la population européenne.
74 Les régions extrêmement peu peuplées
(moins de 8 hab./km2) et celles bénéficiant du programme PEACE
sont également éligibles à l'Objectif 1.
- L'Objectif 2 s'adresse aux régions (industrielles,
rurales, urbaines ou dépendant de la pêche) en
difficultés structurelles afin de soutenir leur reconversion
économique et sociale. L'Objectif 2, avec 22 milliards d'euros sur six
ans, représente 11,5% de l'assistance financière totale et touche
18% de la population de l'Union.
- l'Objectif 3 (24 milliards d'euros correspondant à
12,3% des Fonds) quant à lui n'est pas régionalisé. Il
concerne la modernisation des politiques d'éducation, de formation et
d'emploi pour les régions non éligibles à l'Objectif 1.
Le reste des Fonds Structurels (un peu plus de 5%) est pour
l'essentiel consacré aux quatre Initiatives Communautaires
(INTERREG III, URBAN II, LEADER+, EQUAL). Ce sont des programmes de plus
petite ampleur, mis sur pied pour promouvoir la coopération
interrégionale ou pour résoudre certains problèmes
touchant un grand nombre d'Etats membres, comme par exemple des
problèmes urbains. Nous reviendrons ultérieurement sur ces
"initiatives".
La programmation est le second principe sur lequel se
base la Politique de Cohésion. Cela signifie pratiquement la mise en
place de programmes75 pluriannuels de développement
dotés d'un budget propre et répondant aux priorités d'une
stratégie plus large. L'approche est "top-down" : d'abord, le budget est
défini au niveau européen, ensuite il est distribué entre
les régions et enfin seulement, les projets précis sont
sélectionnés.
Vient ensuite le principe de partenariat lié
au principe de subsidiarité. Les Fonds Structurels sont, en effet,
gérés et les projets, mis sur pied en collaboration
étroite avec les autorités de gestion désignées par
les Etats membres. Ce sont elles qui sélectionnent les projets à
financer et qui doivent rendre des comptes à la
Commission76.
Enfin, le quatrième principe, celui de
l'additionalité, assure le cofinancement des projets. Un
programme n'est jamais totalement pris en charge par le budget communautaire.
Le taux de participation des Fonds varie en fonction de l'Objectif dont la
région concernée relève. Les régions
classées "Objectif 1" bénéficient logiquement de plafonds
supérieurs aux autres. L'aide européenne n'intervient donc qu'en
soutien des efforts financiers nationaux et ne peut, en aucun cas,
entraîner une réduction de ces derniers.
75 Les Fonds Structurels sont planifiés dans les Documents
Uniques de Programmation (DOCUP) et dans les Programmes Opérationnels
(PO) au sein d'un Cadre Communautaire d'Appui (CCA).
76 Notamment dans le cadre des rapports d'exécution et des
évaluations.
B. La redistribution: de l'ambition à la
réalisation
Le cadre de la Politique de Cohésion semble
relativement clair et les critères de sélection sont assez
rigoureusement définis. Pourtant, la pratique est moins nette et
derrière une ambition de redistribution affirmée se cache une
réalité plus complexe. C'est pourquoi, nous allons d'abord
essayer d'évaluer le degré de redistributivité effective
de la Politique de Cohésion en appréhendant à la fois la
distribution des Fonds Structurels et leur financement au niveau national, puis
régional.
Du point de vue de la simple répartition des Fonds
Structurels, pour les deux premières périodes de programmation,
les pays les plus assistés en termes absolus ont incontestablement
été l'Irlande, le Portugal, l'Espagne, l'Italie et la
Grèce77. Avec un sommet pour l'Irlande qui a reçu
près de 3000 Ecus/hab. entre 1989 et 1999 quand l'Espagne, l'Italie et
la Grèce en recevaient moins de 1000. Le Portugal, pour sa part, a
bénéficié de près de 1700 Ecus/hab. en dix ans. Ces
quatre pays étant au début des années nonante les plus
pauvres de l'Union Européenne, de ce point de vue là, l'ampleur
de la redistributivité peut être considérée comme
élevée.
Pour ce qui est de l'exercice actuel, courant de 2000-2006, la
Grèce, le Portugal et l'Espagne78 recevront chacun plus de
1000 euros par habitant en six ans. Ederveen et al. (2000) ont montré
qu'une simple régression au niveau des Etats membres fait
apparaître qu'une augmentation de 1% de PIB/
hab. va de pair avec une diminution des
aides communautaires/hab. de 3%. Un tel niveau de redistribution est nettement
supérieur à tous ceux connus lors des exercices
précédents. Mais cette redistribution, bien que
élevée, est imparfaite. Par exemple, l'Irlande, désormais
deuxième pays le plus riche d'Europe, demeure quatrième au
classement des pays les plus aidés pour l'exercice 2000-2006.
Après pondération des aides européennes
par le niveau de revenu par habitant79, cette
redistributivité est considérablement affaiblie. Pour De la
Fuente & Doménech, (1999) comme pour Solanes &
María-Dolores (2001), les plus grands bénéficiaires des
Fonds Structurels, relativement à leur niveau de richesse, seraient le
Luxembourg et l'Irlande, alors que la pire position relative reviendrait
à la Grèce. Vu sous cet angle, l'impact redistributif de la
Politique de Cohésion se trouve nettement amoindri.
77 Sans compter les Fonds de Cohésion qui s'adressent
à ces quatre mêmes pays.
78 L'Irlande ayant largement dépassé la moyenne
européenne en termes de PIB/
hab. ne reçoit plus la même
quantité d'aide que par le passé.
79 Niveau de revenu moyen pour la période 1986-1998.
Il nous faut, à présent, tenir compte de la
seconde facette de la redistribution : la contribution des différents
pays au financement des Fonds Structurels. Ceux-ci n'étant qu'une
rubrique du budget total européen, nous ne pouvons appréhender
leur financement qu'en élargissant notre analyse à l'ensemble de
celui-ci. En effet, pour tenir compte du revenue side effect aussi
bien que de l'expenditure side effect, le plus simple est certainement
de décomposer la balance budgétaire nette par habitant de chaque
pays vis-à-vis du budget total de l'Union Européenne. On calcule
ainsi la différence entre la somme des contributions d'un Etat membre au
budget européen et l'ensemble des transferts dont il
bénéficie en retour. Comme l'ont montré De la Fuente &
Doménech (1999), la balance nette pour la période 1986-1998 est
globalement positive dans les pays pauvres et négative dans les pays
riches80, ce qui veut dire que l'effet net du budget total
européen est, lui aussi, redistributif. (voir Annexe 5).
En analysant l'évolution du degré de
redistributivité du budget total, De la Fuente & Doménech
(1999) observent qu'il a augmenté sensiblement entre 1986 et
199881. Cette augmentation s'explique essentiellement par la
croissance progressive des Fonds Structurels dans le budget global. Les Fonds
Structurels représenteraient clairement la partie la plus redistributive
du budget puisque, comptant pour seulement un tiers des dépenses de
l'Union Européenne, ils sont responsables de 60% de la
redistribution.
Dans l'ensemble, la distribution des Fonds Structurels semble
donc inversement liée au niveau de développement des pays et la
participation de ceux-ci au financement de la politique européenne ne
vient pas modifier cette tendance, que du contraire. En outre, si cette
redistributivité est loin d'être parfaite, elle est tout de
même plus marquée pour la période 1994-1999 que pour
l'exercice précédent, courant de 1989 à 1993.
Au niveau régional82, pour la période
1989-1996, Solanes & María-Dolores (2001) concluent à la
même progressivité des Fonds Structurels par rapport au retard de
développement accumulé. Selon Ederveen et al. (2001), le constat
pour 2000-2006 est identique à celui observé pour les Etats : en
moyenne, une augmentation de 1% de PIB/hab. semble entraîner
80 "Pays riche" signifie pays dont le revenu par habitant est
supérieur à la moyenne européenne.
81 Pour la période 1989-1998, De la Fuente &
Doménech (1999) estiment un coefficient de redistribution de
l'ensemble du budget européen en tenant compte de la contribution
financière totale de chaque pays et de l'ensemble des transferts dont il
bénéficie. On observe que ce coefficient de redistribution
estimé pour l'ensemble de la politique européenne a
considérablement augmenté avec les années, passant de
moins de 0,02 en 1986 à 0,0576 en 1998. C'est comme si une taxe
était levée sur 5,76% de la différence entre le revenu
brut d'un pays riche et la moyenne européenne pour le transformer en
subside équivalent en faveur des pays pauvres. Toute proportion
gardée, comparée aux politiques régionales des Etats,
cette redistribution est relativement modeste.
82 L'aspect financement de la redistributivité a ici peu
de sens puisque ce sont les pays qui contribuent au budget européen.
Dès lors, nous ne regarderons ici que la simple distribution des Fonds
Structurels.
une diminution de 3% des aides communautaires/hab. L'essentiel
des aides européennes iraient donc effectivement aux régions les
plus pauvres.
C. L'imperfection de la redistribution : quelques
explications possibles
Quelques réserves ont déjà
été émises plus haut quant au niveau de
redistributivité effective des Fonds Structurels, en particulier une
fois que l'on pondère la redistribution par le niveau de revenu. Nous
voudrions apporter quelques explications complémentaires à ce
bilan. Quelles sont les principales raisons de ces imperfections de
redistribution?
- D'abord, la redistribution financière n'est qu'en
partie l'objectif de la politique européenne de cohésion.
Certaines aides européennes ne sont pas régionales mais
"thématiques", ce qui implique qu'elles ne sont pas
nécessairement destinées aux régions les plus
pauvres83. D'autre part, les aides liées aux Objectifs 2 et 3
n'entretiennent aucun lien précis avec le niveau de revenu par
habitant.
- Les jeux politiques de compensation et d'influence
viennent "polluer" la règle. En effet, on observe que des régions
de même niveau de développement peuvent avoir accès, dans
la pratique, à des fonds considérablement différents.
Ainsi, au sein d'un même Objectif, le montant des aides peut varier
énormément. Vanhove (2000) prétend que c'est le trop grand
nombre de critères d'éligibilité qui ouvre la porte
à ces pressions en tous genres. Toujours est-il qu'il y a là un
véritable "marchandage institutionnel" entre les différents
échelons communautaire, national et régional. Dans ces luttes
d'influence, toutes les régions, même les plus riches, semblent
parvenir à obtenir au moins quelques fonds. Comme le montrent Costa,
Magnette & Weerts (2001), le cas du Hainaut, loin d'être
isolé, est assez explicite. Avec un niveau de revenu par habitant
s'élevant en 1993 à 77,3% de la moyenne communautaire, la
province ne répondait pas strictement au critère
d'éligibilité à l'Objectif 1. Le Hainaut a
néanmoins obtenu ce statut pour la période de programmation de
1994 à 1999, lui permettant de bénéficier des sommes
considérables qui y sont attachées.
- A revenus par habitant identiques, les régions ayant
bénéficié d'aides lors d'un exercice
précédent semblent mieux positionnées pour en
bénéficier encore lors de l'exercice suivant. Il apparaît
en effet qu'une véritable force d'inertie opérerait en
faveur des régions aidées par le passé. D'autre part, en
créant les Objectifs "en transition" (ou "phasing out")
83 C'est par exemple le cas du Fonds Social Européen qui
peut être investi dans tous les types de régions.
sensés atténuer le choc de sortie, la Commission
n'a fait qu'institutionnaliser cette force d'inertie. Par exemple, la
moitié Sud de la République d'Irlande, précédemment
éligible à l'Objectif 1, mais qui présente
désormais un revenu par habitant parmi les plus élevés de
l'Union, continue de jouir de certains soutiens financiers européens
à travers ce statut de transition.
- Enfin, certaines autorités de gestion des Fonds
européens dans de petites régions pauvres manquent de moyens et
de compétences pour gérer ces aides de manière efficiente
et pour obtenir tous les fonds auxquels elles ont droit. C'est par exemple le
cas de petites régions périphériques grecques qui ne
disposent pas de capacités administratives et de gestion
suffisantes pour remplir les critères stricts de la Commission.
D'autres facteurs peuvent encore freiner significativement la
redistributivité des Fonds Structurels. Nous y reviendrons dans notre
dernier chapitre. A ce stade-ci, retenons néanmoins qu'en dépit
des limites qu'on vient de souligner, la redistributivité des Fonds
Structurels semble relativement élevée.
Chapitre 4 : L'impact de la Politique européenne
de
Cohésion sur l'évolution des
disparités régionales
Bien entendu, les Fonds Structurels ne se contentent pas de
redistribuer des ressources financières. Ils ambitionnent d'agir
positivement sur les facteurs de développement régional pour
favoriser la réduction des disparités. Si le processus de
convergence que nous avons observé entre les régions est
relativement modeste, il semble s'être amélioré depuis la
fin des années quatre-vingt. Il est temps pour nous d'évaluer le
rôle éventuellement joué par la politique régionale
européenne dans ce redressement.
Avant toute chose, soulignons prudemment qu'une multitude
d'autres facteurs peuvent influer positivement ou négativement sur le
processus de convergence84. Plus précisément encore,
l'impact macroéconomique des Fonds européens est d'autant plus
difficilement estimable que les variables structurelles sur lesquelles se
basent les critères d'éligibilité des régions
peuvent affecter la croissance économique indépendamment des
Fonds eux-mêmes85. Par exemple, les régions dites
"Objectif 1" sont sélectionnées en fonction de la faiblesse de
leur PIB/
hab. et il est, dès lors, difficile
de distinguer l'influence des Fonds Structurels de celle du retard
économique lui-même, censé générer un
processus de rattrapage de type néo-classique.
D'autre part, les effets de toute politique régionale
ou industrielle peuvent prendre un certain temps pour se concrétiser.
Que ce soit pour la construction d'infrastructures de transport ou le
redéploiement d'un bassin industriel en déclin, il peut y avoir
un important délai entre la planification et l'apparition de son impact
de long terme dans les statistiques économiques. Or, la Politique de
Cohésion dont nous allons chercher les effets n'a pas plus de quinze
ans. Cela reste un délai relativement court et bien des
résultats, en particulier des derniers exercices, pourraient encore
apparaître dans le futur.
Nous reviendrons, tout d'abord, sur les différentes
théories économiques présentées au premier chapitre
pour voir, cette fois, dans quelle mesure la Politique de Cohésion va
dans le sens de leurs recommandations respectives. Nous passerons ensuite
à l'évaluation proprement dite de l'impact des investissements
structurels européens sur la convergence régionale.
84 Pour plus de détails, voir Vanhove (2000).
85 Cappelen, Castelacci, Fagerberg & Verspagen (2003, p.
630)
A. Les recommandations théoriques
Comme nous l'avons vu au premier chapitre, les théories
les plus "optimistes", sur lesquelles nous ne nous attarderons pas,
prédisent une convergence automatique et soutenue. Néanmoins,
selon le modèle néoclassique de Solow (1956), un investissement
public continu dans des secteurs productifs peut déplacer vers le haut
le niveau de PIB/hab. d'état stationnaire et par là même
accroître le taux de croissance. De son côté, la
théorie de l'écart technologique86 reconnaît
l'effet positif sur la convergence d'une politique publique de soutien à
la recherche scientifique et de promotion du progrès technologique. Mais
aucune de ces interventions publiques n'est vue comme indispensable à la
convergence.
D'autres auteurs pensent que la constitution d'un
marché unique aura spontanément tendance à polariser
l'économie et à creuser les disparités de richesse. Une
intervention des pouvoirs publics est alors non seulement accueillie
favorablement, mais elle s'avère même nécessaire à
la convergence. Vont clairement dans ce sens, la théorie de la
causalité cumulative87, la théorie de pôles de
croissance88, les théories de la croissance
endogène89 ou encore la nouvelle géographie
économique90. Cependant, si chacune de ces théories
s'accorde sur la nécessité d'une politique interventionniste,
elles ne désignent pas pour autant les mêmes leviers d'action.
Nous allons voir, en fonction des priorités affichées par la
Politique de Cohésion, lesquelles de ces théories s'en
rapprochent le plus.
Selon la théorie de la causalité cumulative, la
polarisation de l'économie viendrait d'un cercle vicieux initié
par la domination des forces centripètes sur les forces centrifuges. Les
priorités d'action identifiées par Myrdal91 sont
résolument redistributives et visent à inverser cette tendance
naturelle. Il faudrait pour cela développer une véritable
discrimination positive en faveur des régions en retard pour contrer le
processus d'accumulation en faveur des pôles économiques. La
politique régionale de l'Union Européenne semble globalement
aller dans ce sens. D'abord, son degré de redistributivité
important montre que la Commission Européenne a opté pour une
approche similaire. Ensuite, on retrouve l'essentiel des recommandations de
Myrdal92 dans les textes fondateurs des Fonds Structurels
européens. A titre d'exemple, le
86 Fagerberg & Verspagen (1996)
87 Myrdal (1957)
88 Perroux (1958)
89 Romer (1986, 1990) et Grossman & Hepman (1991)
90 Krugman (1991)
91 Voir Chapitre 1.
92 Pour rappel, Myrdal préconise le développement
des infrastructures et l'intensification des investissements productifs dans
les régions défavorisées.
règlement (CE) n°1261/1999 définit le champ
d'application du Fonds de Développement Régional comme
étant essentiellement un soutien aux investissements productifs, aux
investissements en infrastructures et aux développements du potentiel
endogène93. Dans la réalisation, cela a notamment
signifié un investissement94 de plus de 23 milliards d'euros
dans les infrastructures de transport pour l'exercice 1994-1999.
En revanche, la politique européenne ne semble
guère s'inspirer de la théorie des pôles de croissance
développée par Perroux (1958). Ce dernier donne en effet la
priorité aux pôles de croissance dans l'espoir de
générer des bénéfices de long terme pour l'ensemble
de la région. Il n'est nullement spécifié par la
Commission que certaines zones à fort potentiel de croissance jouiraient
d'une priorité quelconque pour devenir des locomotives
économiques locales. Néanmoins, comme nous l'avons vu,
l'évolution économique régionale de l'Union semble en
partie donner raison à François Perroux puisque des pôles
de croissance95 émergent dans les différents pays
bénéficiaires des aides européennes, jouant un rôle
moteur pour une zone d'influence plus vaste. Le paradoxe de "convergence
divergente" sur lequel nous avions conclu la première partie trouve ici
un soutien théorique assez net.
Les théories de la croissance endogène, pour
leur part, prêtent aux politiques publiques un rôle important dans
la détermination d'un taux de croissance de long terme. Par exemple, en
considérant les infrastructures publiques et le capital humain comme
faisant partie de la fonction de production, Barro (1990) montre qu'une
augmentation de l'investissement public peut finalement accroître la
croissance de l"économie. Les infrastructures publiques, la formation de
la main d'oeuvre et l'innovation technologique sont les principaux leviers
d'action que ces théories préconisent pour encourager la
croissance des régions défavorisées. Les priorités
de la politique régionale européenne correspondent relativement
bien à ces recommandations puisque l'essentiel des Fonds Structurels
(plus de 80%) est alloué aux quatre domaines suivants : "Environnement
productif", "Infrastructures", "Recherche, développement technologique
et innovation" et "Formation, création d'emplois et insertion
sociale".
On peut reprocher aux théories de la croissance
endogène de raisonner principalement en économie fermée et
donc de ne pas assez tenir compte de l'impact des politiques publiques sur
93 Mesures de soutien aux initiatives de développement
local et d'emploi et aux activités des petites et moyennes
entreprises.
94 FEDER et Fonds de Cohésion combinés. 95 Ex:
Madrid, Barcelone, Berlin, Dublin...
la localisation industrielle96. Ce n'est pas le cas
de la nouvelle géographie économique sur base de laquelle Martin
(1999a) explique pourquoi le Marché Unique et l'Union Monétaire
Européenne sont susceptibles d'exacerber les disparités
économiques régionales. Selon lui, lorsque les barrières
commerciales disparaissent et que les marchés s'ouvrent,
l'activité économique a naturellement tendance à se
concentrer en différents pôles. Les entreprises fondent en effet
leurs décisions de localisation sur les économies
d'échelles et les externalités positives d'agglomération
dont elles pourront bénéficier. Lorsque la mobilité de la
main d'oeuvre est faible, comme c'est le cas en Europe, cette polarisation
économique conduit à de grandes disparités
régionales en matière de chômage puis de richesse. Le
rôle de la politique régionale est alors le suivant : "to
bring jobs to the people, if the people do not go to the jobs" (Funck,
Pizzati & Bruncko, 2003, p. 5).
D'autre part, la nouvelle géographie économique
met en garde face à la constante diminution des coûts de
transactions. D'un côté les régions
périphériques peuvent voir leur attractivité
s'améliorer, d'un autre, leur plus grande accessibilité peut les
transformer en véritables proies pour le loup97. Le
rôle de la politique régionale sera alors de réduire ces
risques en consolidant la structure industrielle des régions
défavorisées, tout en limitant le désavantage qu'est
l'éloignement par rapport au centre de l'Europe98, par
développement de réseaux de transport performants. La Commission
Européenne a, semblerait-il, l'intention de relever le défi.
En résumé, la Politique de Cohésion
européenne paraît plutôt rejoindre l'essentiel des
théories que nous avons abordées. En tout cas, d'après la
plupart de ces argumentations, une intervention publique devrait avoir un
impact positif sur la croissance des régions aidées. Dès
lors, nous pouvons, dans la foulée, nous demander si
l'amélioration de la vitesse de convergence absolue depuis la fin des
années quatre-vingt pourrait trouver là une partie au moins de
son explication? Ce sera la toile de fond de la prochaine section.
96 Martin (1998)
97 Nous faisons référence, ici, aux spill-over
effectx dont nous reparlerons plus longuement ultérieurement. Voir
aussi chapitre 1 .B.4.
98 Castanheira de Moura & Siotis (1994)
B. L'évaluation de l'impact de la Politique
européenne de Cohésion sur la convergence régionale
Nous avons vu dans la première partie que la
convergence régionale en Europe avait timidement redémarré
vers le milieu des années 80. Cette époque coïncide
justement avec le développement de la Politique européenne de
Cohésion. De là à y voir un lien de cause à effet,
il y a un pas que nous ne pouvons faire à ce stade. Le redressement de
la convergence peut en effet être le résultat de quantité
d'autres phénomènes structurels ou conjoncturels. Une estimation
de l'impact des Fonds Structurels sur la convergence requiert, dès lors,
une analyse bien plus approfondie. Un certain nombre d'auteurs s'y sont
déjà employés sans nécessairement arriver à
des conclusions concordantes. Essayons néanmoins de cerner ces
tentatives.
Une fois de plus nous devons limiter le champ de nos
investigations à un aspect particulier de la politique régionale
européenne. Sans nier les multiples influences de la Politique de
Cohésion ni la réussite microéconomique des projets, nous
ne nous intéresserons ici qu'à son impact sur le processus de
convergence régionale99. Un travail comme celui de Bachtler
& Taylor (2003) aide à prendre conscience de la complexité du
rôle joué par les Fonds Structurels. Notre approche limitée
du problème ne nous permettra donc en aucun cas de conclure à
l'échec ou à la réussite d'ensemble des Fonds
Structurels.
Dans la recherche de liens éventuels entre Politique de
Cohésion et croissance du PIB/hab., on peut distinguer deux grandes
approches radicalement différentes : d'une part l'évaluation par
études économétriques ex-post, d'autre part, l'analyse par
des modèles économiques se plaçant plutôt ex-ante.
Comme auparavant, dans le cadre de ce travail, nous ne arrêterons pas sur
les aspects techniques et méthodologiques de ces approches. Nous
rappelons une nouvelle fois, que l'objectif est ici de réaliser une
synthèse la plus complète possible de la littérature pour
en dégager, dans la mesure du possible, les principales tendances.
Comme précédemment pour la convergence, nous
privilégions ici le niveau régional car c'est à ce niveau
qu'il y a débat. Cour & Nayman (1999) résument bien les
raisons de notre choix : « Si toutes les études s 'accordent
pour reconnaître que la politique régionale européenne
contribue de façon significative au rattrapage économique des
pays, certaines attirent
99 Pour rappel, nous n'observons que la convergence du
PIB/hab.
l'attention sur le fait que le soutien européen aux
régions défavorisées peut ne pas atteindre l'objectif de
cohésion régionale recherché. » (Cour &
Nayman, 1999, p. 4).
Pour donner un premier aperçu de l'intensité du
débat, voici l'un ou l'autre exemple de ce qu'on peut trouver dans la
littérature. Du côté de la Commission Européenne, on
peut trouver l'affirmation suivante : "Les résultats positifs de la
politique régionale en termes de cohésion sont identifiables et
identifiés. C'est un avis général pratiquement
indiscutable. L'évaluation de la contribution (des Fonds
Structurels) à la cohésion et à la réduction
des disparités est extrêmement positive." (Commission
Européenne, 2003a). Boldrin & Canova (2001, p. 242) ont un tout
autre discours : "Si le véritable objectif de la politique
régionale est de favoriser la croissance des régions les plus
pauvres et d'encourager la convergence, alors les politiques adoptées
par l'Union ne sont pas justifiables à la lumière des
théories économiques récentes et des preuves
statistiques." Ces auteurs appellent à "la révision
immédiate et drastique des politiques économiques
régionales". Basile, de Nardis & Girardi (2001, p. 24), de leur
côté, simplifient un peu (trop) la situation : "En
général, il y a une large divergence entre le jugement (positif)
de la Commission Européenne et celui (plus critique) exprimé par
les autres travaux. " Essayons, pour notre part, d'y voir un peu plus
clair.
Les divergences entre les conclusions étant très
importantes, nous avons choisi de présenter successivement les travaux
obtenant des résultats plutôt positifs, puis les études
arrivant à des conclusions plus négatives quant à
l'influence de la Politique de Cohésion sur le processus de convergence
régionale. Nous avons renoncé à une présentation
sous forme de tableau, car les résultats dégagés ici s'y
prêtent moins que les estimations de la convergence.
1. Les évaluations plutôt
positives
Dans cette catégorie, on rencontre des évaluations
basées sur des modèles macroéconomiques, mais aussi
plusieurs études économétriques.
1.1. Les modèles
macroéconomiques
A notre connaissance, la plupart des simulations
macroéconomiques prêtent un rôle important aux Fonds
Structurels dans le processus de convergence à l'échelle
européenne. HERMES, HERMIN ou QUEST sont autant de modèles
sensés permettre de mesurer l'impact macroéconomique des Fonds
Structurels. La Commission Européenne, de même qu'un certain
nombre d'auteurs "indépendants"100, ont
ainsi modélisé l'influence des Fonds européens sur la
croissance régionale. Une telle modélisation présente
indéniablement certains avantages. Elle permet notamment de comparer la
situation actuelle avec ce qu'elle aurait été en l'absence de
Fonds Structurels. Pourtant, alors que la Commission fonde l'essentiel de son
discours sur des simulations macroéconomiques de ce type, ce genre
d'approche a été vivement critiqué :
- Pour Cappelen et al. (2003), de telles estimations
dépendent excessivement des hypothèses sous-jacentes au
modèle. La relation entre les causes et les effets est postulée.
Les suppositions sur lesquelles sont construites le modèle peuvent
influencer considérablement le résultat et ainsi conduire
à des conclusions erronées.
- De l'aveu même de la Commission
Européenne101, les bases de données existantes ne
permettent pas d'appliquer de manière efficace les modèles
macroéconomiques à l'analyse des régions. A l'heure
actuelle, la simulation ne peut être employée de façon
pertinente qu'à l'étude de la convergence au niveau national.
- Selon Ederveen et al. (2002), l'emploi de modèles
macroéconomiques ne donne qu'une idée des effets potentiels,
naturellement positifs, des Fonds Structurels. Les résultats sont
obtenus de façon "indirecte" et la simulation n'intègre aucune
des nombreuses complications qui peuvent intervenir dans la
réalité. Elle part du principe que l'intégralité
des Fonds est effectivement transformée en investissement public
productif. Nous reviendrons par la suite sur ces "imprévus" qui
affaiblissent l'efficacité des Fonds.
- Enfin, Cour & Nayman (1999) estiment que les
modèles reposent sur des simulations de ce qu'aurait été
la situation en l'absence de politique structurelle. Selon eux, cela permet, au
mieux, d'envisager un futur de court terme mais certainement pas
d'appréhender des effets à moyen et long terme.
1.2. Les études économétriques
Malgré l'intérêt grandissant pour la
convergence régionale en Europe, les études
économétriques de l'impact des Fonds Structurels sur la
croissance régionale sont relativement peu nombreuses. Parmi celles qui
présentent des résultats résolument positifs, on retiendra
surtout les suivantes :
100 Voir parmi d'autres: Hallet (2002), Sosvilla-Rivero,
Bajo-Rubio & Díaz-Roldán (2004), Gaspar & Pereira (1992),
Pereira (1999), Goybet & Bertoldi (1994) ou encore Bradley, Herce &
Modesto (1995)
101 Voir 6ème rapport périodique sur la
situation et l'évolution socioéconomique des régions
(1999)
Tout d'abord, comme on pouvait s'y attendre, la Commission
Européenne (2004)102, trouve un taux de convergence nettement
supérieur pour les 55 régions bénéficiant du statut
Objectif 1 depuis 1988. Avant cette date, en l'absence de véritable
soutien européen, ces mêmes régions retardataires ne
montraient aucun signe de rattrapage. Les résultats obtenus par la
Commission (2004, p. 146) sont "idéals" : "Parmi les régions
d'Objectif 1, celles qui avaient le niveau de PIB par habitant le plus bas ont
eu tendance à avoir la croissance la plus rapide aussi bien entre 1988
et 1994 que entre 1994 et 2001."
Selon Cour & Nayman (1998), les régions les plus
défavorisées affichent un taux de croissance nettement
supérieur à toutes les autres. Ils dressent un bilan tout aussi
positif que la Commission puisque, dès la première période
de programmation, ils trouvent un impact significatif des Fonds Structurels sur
la convergence. "Lorsqu'on introduit les Fonds Structurels dans
l'équation de convergence, il apparaît que ces derniers ont un
impact positif important : ils expliquent la moitié de la convergence
observée sur la période 1989-1993." (Cour & Nayman,
1999, p. 3).
Fayolle & Lecuyer (2000)103 sont
déjà plus nuancés. Ils ont développé une
estimation originale de l'évolution des différentes
régions par rapport à ce qu'ils considèrent être la
région leader : la région de Hambourg104. Ils ont
ainsi construit un indicateur de rattrapage et cherchent l'influence que
certains facteurs peuvent avoir sur celui-ci. "Quelles que soient les
autres variables introduites, la dotation en Fonds Structurels influence
significativement et positivement la performance de rattrapage" (Fayolle
& Lecuyer, 2000, 189). Ce résultat semble cependant uniquement
attribuable aux Fonds Structurels d'Objectif 1. Par ailleurs, certaines
appartenances nationales apparaissent significativement handicapantes. En
particulier, la mauvaise qualité de la coordination entre les instances
communautaires, nationales et territoriales contrecarre sérieusement
l'efficacité des Fonds Structurels.
Parmi les études mesurant directement l'impact de la
Politique de Cohésion sur la croissance régionale, le recours
à une régression de f3-convergence conditionnelle est
certainement une des techniques les plus utilisées. En effet, on peut
intégrer, dans l'équation (3) de f3- convergence conditionnelle
(voir chapitre 2), une variable reflétant la dotation en Fonds
Structurels ou l'éligibilité à un Objectif
spécifique. Le signe et la significativité du paramètre
102 Voir "Troisième rapport sur la cohésion
économique et sociale".
103 Pour 131 régions sur la période 1986-1996
104 L'objectif est donc ici d'estimer le rattrapage par
rapport à la région la plus riche et non plus la convergence vers
une moyenne européenne. Généralement, les régions
les plus riches ont une croissance économique supérieure à
la moyenne européenne. Un rattrapage significatif des régions
pauvres ne peut, dès lors, se traduire ici que par une convergence vers
la moyenne européenne.
de cette variable traduiront son influence sur la convergence.
Suivant cette méthode pour la période 199 1-1996, Capron (2000)
trouve un lien étroit entre croissance régionale et Fonds
Structurels. "La politique structurelle communautaire pourrait être
à l'origine d'une accélération de un à deux points
de pourcentage annuel du processus de convergence régionale au niveau
NUTS II." (Capron, 2000, p. 231). Toutefois, si la politique communautaire
renforce le processus de convergence entre Etats membres, elle n'y contribue
pas de manière uniforme au niveau régional. Par rapport à
d'autres, certaines régions semblent tirer nettement mieux profit des
Fonds mis à leur disposition.
Enfin, pour la période 1980-1997, Cappelen et al.
(2003) construisent, sans la nommer, une régression très proche
de la f3-convergence conditionnelle105. La nouvelle Politique de
Cohésion étant en vigueur à partir de 1989, ils
définissent deux sous-périodes allant respectivement de 1980
à 1988 et de 1989 à 1997. Parmi le grand nombre de variables
intégrées à la régression, une "time-slope dummy"
permet d'identifier les changements de comportements des autres variables entre
les deux sous-périodes. Les résultats obtenus sont clairs et
robustes : les Fonds européens jouent un rôle nettement plus
important au cours de la seconde sous-période, ce qui tend à
confirmer la réussite de la réforme de 1989. Depuis lors,
"Les aides régionales européennes ont un impact significatif
et positif sur la croissance des régions européennes. Elles
contribuent ainsi à une plus grande égalité de
productivité et de revenu en Europe." (Cappelen, Castellacci,
Fagerberg & Verspagen, 2003, p. 640). Toutefois, l'efficacité des
Fonds structurels semble dépendre du niveau de développement de
la région qui en bénéficie. Leur impact sur la croissance
régionale apparaît en effet plus marqué pour les
régions plus développées que pour celles qui sont plus
démunies.
Dans l'ensemble, ces différentes études
économétriques concluent à un impact positif et
significatif des Fonds Structurels sur la convergence régionale.
Toutefois, si on laisse de côté l'évaluation
réalisée par la Commission elle-même, cette influence
apparaît souvent conditionnée par l'un ou l'autre facteur comme
l'appartenance nationale, le niveau de richesse initial ou la qualité
des institutions. La Politique de Cohésion ne parviendrait donc pas au
même degré d'efficacité dans toutes les régions.
2. Les évaluations plutôt négatives
Nous allons maintenant aborder des études
présentant un tout autre bilan de l'impact de la Politique de
Cohésion sur la convergence régionale. Toutefois, parmi ces
travaux aux
105 L'échantillon compte 190 régions NUTS I et
II.
conclusions plus négatives, le discours peut aller du plus
radical au plus nuancé. Nous procéderons dans cet ordre pour les
présenter.
Peu d'études arrivent à des conclusions
totalement négatives ne reconnaissant absolument aucun impact positif
des Fonds Structurels sur la croissance. On compte parmi celles-ci les travaux
réalisés par Basile, de Nardis & Girardi (2001) et surtout
par Boldrin & Canova (2001). Ce dernier article en particulier est
régulièrement cité et représente, en quelque sorte,
le fer de lance de l'opposition à la Politique de Cohésion.
Boldrin & Canova (2001) trouvent, en effet, pour la
période de 1980 à 1996, une situation régionale
européenne extrêmement stable. En dehors de quelques "miracles" et
"désastres" économiques, ils n'observent ni convergence ni
divergence entre les régions. Pour eux, le développement de la
Politique de Cohésion à la fin des années quatre-vingt
n'aurait eu aucun impact et les régions bénéficiaires des
Fonds Structurels ne manifesteraient aucun signe de rattrapage. Selon ces deux
auteurs, les motivations sous-jacentes à la politique européenne
sont d'ordre politique et non économique. La Politique de
Cohésion ne fait, dès lors, que redistribuer une partie du revenu
sans espérer avoir la moindre influence sur le taux de croissance. Cette
étude a été vivement critiquée par Funck, Pizzati
& Bruncko (2003) et par Cappelen et al. (2003).
En fait, la grande majorité des travaux
économétriques arrivant à une conclusion plutôt
négative sont nettement plus nuancés. Certains, comme Herz (2002)
ou Solanes & MaríaDolores (2001) trouvent un impact non significatif
ou extrêmement faible. Dans de tels cas de figure, les Fonds Structurels
ne semblent pas avoir de véritable influence sur la convergence. Mais
d'autres travaux ne s'arrêtent pas là. Après avoir
observé la même "inefficacité absolue" de la Politique de
Cohésion, certains auteurs découvrent que son impact est en fait
conditionné par d'autres facteurs.
Ainsi, selon Lebre de Freitas, Pereira & Torres (2003),
dans l'ensemble, les régions NUTS II bénéficiant du statut
Objectif 1 n'obtiennent pas un taux de croissance supérieur aux autres
pour la période 1990-2001. Ils arrivent à ces résultats en
intégrant à l'estimation de f3- convergence conditionnelle une
variable dummy contrôlant l'éligibilité à
l'Objectif 1. Cependant, l'influence de la qualité des institutions
nationales et régionales semble très importante. Ces
résultats les amènent à la conclusion que la bonne gestion
des Fonds Structurels est bien plus déterminante que la simple
réception des aides. La Politique de Cohésion ne serait donc
efficace qu'en présence d'institutions de qualité.
Pour la période 1960-1995 au niveau NUTS I, des
économistes du CPB106 de La Haye, obtiennent, à l'aide
de régressions de f3-convergence conditionnelle des résultats
similaires. Ainsi, selon Ederveen, de Groot & Nahuis (2002), les Fonds
Européens de Développement Régional ne seraient que
conditionnellement efficaces. Ce n'est que combinés à des
instituions publiques de qualité et à un degré
élevé d'ouverture107 de l'économie que ces
Fonds influenceraient positivement la croissance.
Bien qu'il trouve une convergence régionale forte et
significative pour la période 1992-1999, Stoianov (2002) observe que
tous les paramètres liés aux Fonds européens sont non
significatifs. Il conclut dès lors que la convergence semble plus
dépendre de la rigueur des institutions publiques, de la
stabilité macroéconomique, de la capacité d'adaptation au
marché unique ou du niveau technologique que de la simple
réception de Fonds Structurels ou de Cohésion.
Pour la période 1989-1999, Dall'erba & Le Gallo
(2003)108 utilisent dans un premier temps une estimation de
f3-convergence conditionnelle qui les conduit à la conclusion que les
Fonds Structurels n'exercent pas d'influence significative sur le processus de
convergence. Dans un second temps, une "Spatial Weight Matrix" leur
permet de prendre en compte des influences et des interdépendances
spatiales dont nous avons déjà parlé plus tôt. Ils
identifient ainsi une forte autocorrélation spatiale, ce qui signifie
que la croissance d'une région est largement influencée par la
croissance des régions qui l'entourent. Il apparaît aussi que les
régions riches du centre de l'Europe109 ont un effet de
diffusion nettement plus puissant que les autres. En y regardant de plus
près, l'effet de diffusion et d'entraînement des régions
centrales ne semble atteindre que les régions
périphériques les plus proches du coeur du continent. Pour ces
régions "intermédiaires", les Fonds semblent jouer pleinement
leur rôle et leur permettre de rejoindre le "club" des régions les
plus avancées. Par contre, les régions les plus
éloignées, comme le Sud de l'Italie ou certaines régions
portugaises et grecques apparaissent totalement isolées de la dynamique
continentale. Les Fonds Structurels alloués aux régions
hyperpériphériques sont donc largement insuffisants pour leur
permettre de surmonter leurs handicaps. Les auteurs penchent, dès lors,
pour l'hypothèse de "clubs de convergence" distincts pour les
régions hyper-périphériques et pour les régions
centrales et avoisinantes. Ils confirment ainsi les estimations de Beine &
Jean-Pierre (2000) ainsi que de Baumont et al.
106 Cenraal Planbureau: Netherlands Bureau for Economic Policy
Analysis
107 Le degré d'ouverture d'une économie est
calculé par le rapport de la somme des importations et des exportations
sur le PIB.
108 Pour un échantillon de 145 régions NUTS I et
II.
109 Il s'agit essentiellement du Benelux, du Nord Est de la
France et de l'ex-Allemagne de l'Ouest.
(2002) pour lesquels l'impact global des Fonds n'est pas
significatif et leur efficacité conditionnée par le
développement et le dynamisme des régions environnantes.
En résumé, la plupart des études dites
négatives trouvent au mieux, pour la Politique de Cohésion, une
efficacité conditionnée par différents facteurs comme la
qualité des institutions, l'appartenance nationale, le degré
d'ouverture de l'économie ou la situation géographique par
rapport au centre de l'Europe. Ce qui importe ici, c'est que peu
d'études reconnaissent que la simple perception de Fonds
Européens joue un rôle significatif sur la croissance.
Au terme de ce chapitre, il semble, en tout cas, impossible de
tirer une conclusion nette et précise à propos de l'impact
réel ou potentiel de la Politique de Cohésion sur la convergence
régionale. Si certaines études nous paraissent plus pertinentes
et plus fouillées que d'autres, comme par exemple Cappelen et al. (2003)
ou Dall'erba & Le Gallo (2003), elles ne vont pas nécessairement
dans le même sens. Comme l'écrit Bradley (2002) : "Quiconque
attend une réponse simple et unique à la question : "Quel est
l'impact de la Politique de Cohésion sur le PIB régional?" sera
forcément déçu." (Bradley, 2002, p. 5).
De ces différents résultats, une tendance se
dégage néanmoins : si influence positive il y a, celle-ci serait
plus importante pour les régions plus développées. En
effet, les régions les plus favorisées semblent, en
général, collectionner les facteurs influençant
positivement l'efficacité des aides européennes. Comme dit Martin
(1998), si les dépenses structurelles ont renforcé la convergence
entre pays, c'est en accélérant la croissance des régions
déjà favorisées des pays pauvres.
Chapitre 5 : Les facteurs d'efficacité et de
distorsion de
la Politique de Cohésion
Nous avons vu que l'évaluation de l'impact de la
Politique de Cohésion sur la convergence demande beaucoup de nuances.
Suivant le point de vue adopté, la méthode employée ou
l'échantillon étudié, on peut arriver à des
résultats assez variables. Cette variabilité renvoie largement
à une série de conditions et circonstances dans lesquelles la
politique européenne est concrètement mise en oeuvre. Nous allons
maintenant synthétiser les principaux facteurs explicatifs de la
réussite ou de l'échec de la Politique européenne de
Cohésion.
On peut d'abord identifier les atouts ou les handicaps propres
à chaque région et déterminant la
réceptivité de celle-ci à l'aide
européenne. Ce sont des caractéristiques inhérentes
à chaque région permettant ou empêchant les Fonds
européens d'influer sur la croissance économique. Ensuite, il y
a, ce que l'on peut appeler, les complications qui viennent perturber
l'efficacité des aides européennes et qui peuvent expliquer
certains échecs. Il s'agit plutôt de tournures prises par les
évènements plutôt que de caractéristiques
régionales. Nous présenterons ainsi les effets pervers induits
par l'intervention européenne de même que certains
problèmes liés à la concrétisation de la Politique
de Cohésion.
A. Les facteurs conditionnant l'impact des Fonds
Structurels sur la convergence
Comme le montrent notamment Cappelen et al. (2003), l'impact
économique des aides régionales européennes dépend
considérablement de la réceptivité de l'environnement
bénéficiaire. Nous avions déjà vu, avec
l'introduction de country dummy variables dans les estimations de
f3-convergence, que l'appartenance nationale est un facteur
conditionnant significativement la convergence. Nous allons voir à
présent que la "nationalité" d'une région est importante
à plusieurs égards. En effet, la plupart des autres facteurs
déterminants y sont étroitement liés.
La toute grande majorité des projets pour lesquels les
Fonds Structurels interviennent sont le résultat d'un partenariat entre
plusieurs bailleurs de fonds, publics au niveau régional et/ou national,
privés et européens. En vertu de la règle de
l'additionnalité, le taux de participation des Fonds est plafonné
selon la région et l'Objectif dont elle relève. L'ampleur du
cofinancement peut donc être très
variable, ce qui peut, notamment, atténuer l'impact redistributif dont
nous avons parlé plus tôt. "Lorsque le coût total des
projets est pris en considération, la redistribution équitable
que nous avons observée au niveau européen disparaît."
(Basile, de Nardis & Girardi, 2001, p. 23). Mais l'ampleur du
cofinancement modifie aussi naturellement l'impact final de la Politique de
Cohésion sur la croissance régionale. Malheureusement, les moyens
dont une région dispose pour compléter l'investissement
européen dépendent généralement de la situation
économique initiale de celle-ci. "Les régions riches
sont plus à même d'accompagner les Fonds Structurels ... Il est
rare que les cofinancements parviennent à doubler la mise
européenne pour les régions pauvres alors qu'ils peuvent la
tripler ou la quadrupler pour des régions de richesse moyenne ou
élevée." (Fayolle & Lecuyer, 2000, p. 179). Evidemment,
l'appartenance nationale influence largement la capacité
d'investissement d'une région. Par exemple, les pays riches ont tendance
à se montrer plus généreux à l'égard des
régions qui, dans une perspective nationale, sont plus pauvres.
Parmi les facteurs influençant l'efficacité de
la Politique de Cohésion, on compte aussi la qualité des
institutions et le degré de décentralisation
politique et institutionnel. Stoianov (2002) et Lebre de Freitas, Pereira
& Torres (2003) ont montré que la qualité des
institutions conditionne à la fois la bonne gestion mais aussi
l'obtention des Fonds. Certains auteurs insistent sur la transparence des
administrations publiques et sur l'éventuelle présence de
corruption en leur sein. Mais si la qualité des institutions semble
déterminante, elle reste difficilement quantifiable et comparable. En
revanche, Fayolle & Lecuyer (2000), mais surtout Vanhove (2000) et Taylor
& Wren (1997) ont mis en évidence la nécessité d'une
gestion locale autonome des Fonds européens. Officiellement,
les autorités régionales sont sensées être
l'interlocuteur privilégié de l'Union Européenne.
Cependant, certains Etats membres (par exemple la France)
préfèrent centraliser le pouvoir de décision et traiter
directement avec les institutions européennes. Or, les priorités
et les sensibilités ne sont certainement pas toutes identiques en Corse
et à Paris.
Pour Quah (1996c) et Dall'Erba & Le Gallo (2003), ce sont,
avant tout, des facteurs proprement territoriaux qui conditionnent
l'efficacité des aides européennes : situation
géographique par rapport au centre de l'Europe, proximité de
pôles économiques de niveau continental, connexion à un
réseau international de transport, externalités entre
régions mitoyennes, etc. Nous ne reviendrons pas davantage sur ces
facteurs spatiaux dont nous avons déjà discuté lors de la
critique de la f3-convergence.
Si les auteurs insistent tantôt sur l'un ou l'autre
facteur, l'appartenance nationale semble être le meilleur indicateur
synthétique de ces différents facteurs, une sorte de "boîte
noire" dont parlaient Cuadrado-Roura et al. (2000). Malheureusement, comme on
pouvait s'y attendre, les études ne s'accordent pas tout à fait
sur les appartenances nationales favorisant (ou freinant) l'efficacité
des Fonds Structurels. Pour Ederveen, de Groot & Nahuis (2002), les pays
présentant les conditions les plus défavorables pour recevoir des
Fonds européens sont la Grèce, l'Espagne, l'Italie et le Portugal
et dans une moindre mesure la France. La mauvaise qualité des
institutions, le niveau de corruption et leur faible ouverture
économique annihileraient, dans ces pays, l'influence des aides
européennes sur la croissance régionale. Selon Fayolle &
Lecuyer (2000), les appartenances nationales les plus handicapantes seraient
françaises, italiennes, britanniques et espagnoles. Pour Dall'erba &
Le Gallo (2003), les régions hyper-périphériques
présentent un handicap tel qu'il est insurmontable dans le cadre actuel
de la Politique de Cohésion. Globalement, "il semble que les Fonds
soient les moins efficaces là où on en a le plus besoin."
(Cappelen et al., 2003, p. 640).
B. Les effets pervers de la Politique de
Cohésion
Venons-en à présent aux complications qui
peuvent surgir lors de la mise en oeuvre de la Politique de Cohésion.
Ces "imprévus" dont les modèles macroéconomiques ne
peuvent tenir compte et ont pourtant un certain pouvoir explicatif quant
à l'impact des Fonds européens sur la convergence.
Selon Puga (2001), Cour & Nayman (1999) ou Dall'erba &
Le Gallo (2003), l'une des principales complications résultant de la
Politique de Cohésion est le spillover effect. Près d'un
tiers des Fonds Structurels et deux tiers des Fonds de Cohésion sont
consacrés aux infrastructures de transport considérées par
la Commission Européenne comme un input majeur de la fonction de
production et donc comme un outil de développement. Mais Vickerman et
al. (1999) montrent que le réseau de transport européen est de
plus en plus composé de connexions de type hub-and-spoke
(centre et rayons). Autrement dit, les principaux projets de transport
visent à relier entre eux les grands pôles
économiques110. Pour la nouvelle géographie
économique, en présence d'une main d'oeuvre peu mobile et en
l'absence de fortes variations de salaires, une telle évolution peut
avoir des effets néfastes pour les régions pauvres proches du
réseau. Martin (2000), notamment, a montré que ce type
110 Particulièrement dans le cadre du "Trans-European
Transport Network" (TEN-T) comprenant 14 projets prioritaires et un grand
nombre de plus petits projets visant à faire disparaître les
principaux goulots d'étranglement du continent.
de réseau favorise les gros pôles vers lesquels
l'activité économique a tendance à migrer. Ces
concentrations deviennent de véritables centres stratégiques
incontournables. Les firmes qui s'y localisent profitent des
externalités positives de l'agglomération tout en faisant face
à moins de coûts de transaction. Il est, en effet, plus facile
d'atteindre n'importe quel endroit lorsque qu'on se trouve au carrefour de
plusieurs axes plutôt que simplement le long d'un de ceux-ci.
Le désenclavement des régions les plus
déshéritées peut donc avoir d'importants effets pervers
s'il se fait sans étoffer leur tissu industriel. Par exemple, Faini
(1983) a démontré que la réduction des coûts de
transport entre l'Italie du Nord et du Sud durant les années cinquante
avait accéléré la désindustrialisation du
Mezzogiorno qui avait ainsi perdu la protection dont il jouissait auparavant.
Pour l'ensemble de l'Union Européenne, Vickerman et al. (1999) et Martin
(2000) s'accordent pour affirmer que la promotion de la croissance globale par
des réseaux de transport interrégionaux peut ne
bénéficier qu'aux régions déjà
favorisées, principalement du centre de l'Europe. Soulignons tout de
même que si les infrastructures de transport entre régions peuvent
léser les régions les plus vulnérables, ce n'est pas le
cas des infrastructures locales intra-régionales.
Dans un autre registre, pointons aussi le principe
d'additionalité sur lequel s'appuient les Fonds Structurels : les Fonds
européens ne peuvent, en aucun cas, entraîner une diminution des
aides nationales aux régions concernées. Les exigences de
cofinancement n'empêchent pourtant pas toujours, dans la pratique, un
phénomène de crowding out111. Il
arrive inévitablement que des aides européennes se substituent
aux financements nationaux. La tentation peut en effet être grande de
réorienter des fonds nationaux initialement alloués aux
régions déshéritées puisque l'Union
Européenne "se charge" du développement régional. Vu la
diversité des taux de cofinancement, il est tout à fait possible
qu'une des conséquences du soutien européen au
développement d'une région retardataire soit le retrait partiel
des aides nationales à cette région. Bachtler & Taylor (1996)
prétendent même que le cofinancement exigé par la
Commission n'est qu'un pur exercice administratif, non respecté dans les
faits. Ederveen et al. (2002) ont tenté d'estimer l'ampleur de ce
phénomène de crowding out, c'està-dire de voir si
les régions défavorisées auraient reçu plus d'aides
de la part de leurs autorités nationales en l'absence de Fonds
européens. D'après cette étude, dans les 31 régions
liées à l'Objectif 1, un euro d'aide européenne diminue en
moyenne les transferts nationaux de 17 centimes.
111 Voir notamment Dignan (1995), Bachtler & Taylor (1996),
Ederveen & Gorter (2002), Ederveen et al. (2002) ou encore Stoianov
(2002)
Le principe d'additionalité peut être la source
d'un autre souci. Comme le souligne Stoianov (2002), les régions les
plus nécessiteuses peuvent parfois rencontrer de sérieuses
difficultés pour rassembler les sommes nécessaires au
cofinancement des projets. Devant l'attrait des Fonds européens, les
pouvoirs publics locaux peuvent être tentés de fournir un effort
budgétaire considérable pour parvenir au cofinancement requis.
Ces efforts, uniquement destinés à décrocher les aides
européennes, peuvent relever davantage de raisonnements opportunistes et
nuire en fin de compte à la croissance de la région.
Les critères de sélection établis par la
Commission Européenne pour décider de la participation à
un projet peuvent avoir certains effets pervers assez proches du
problème précédent. Les autorités régionales
peuvent, en effet, être davantage animées par le souci d'obtenir
des Fonds plutôt que par la croissance et le développement
régional proprement dit. Ce comportement de rent seeking
évoqué par Ederveen & Gorter (2002) consiste à
proposer des projets susceptibles d'attirer des aides extérieures
plutôt que les projets les plus porteurs pour une région. C'est
alors une sorte de jeu de séduction dont l'objectif ultime est d'attirer
un maximum de fonds extérieurs. Cette pratique, courante et bien connue
dans les pays en développement, est évidemment la hantise de tous
les bailleurs de fonds.
Dans un autre registre, selon Boldrin & Canova (2001), la
Politique de Cohésion aurait pour principal effet de retarder la
convergence en réduisant encore davantage la mobilité de la main
d'oeuvre européenne. Les Fonds Structurels encourageraient la main
d'oeuvre des régions les plus pauvres à y rester plutôt que
de migrer vers les régions les plus développées. Le
processus d'égalisation des salaires s'en verrait sérieusement
affaibli de même que la convergence qui en découle.
Pour d'autres auteurs, l'absence de résultats tangibles
s'expliquerait davantage par la modestie des moyens mis en oeuvre et par
l'éparpillement des efforts consentis. Ainsi, selon Buzelay (1996), la
faiblesse des résultats peut s'expliquer par l'insuffisance des moyens
financiers octroyés aux régions couvertes par l'Objectif 1. Il
faut reconnaître que si la politique régionale européenne
représente une part importante du budget de l'Union Européenne,
les Fonds Structurels restent souvent bien modestes relativement aux transferts
observés dans le cadre de politiques régionales menées au
niveau national. Stoianov (2002) va dans le même sens et rend le faible
niveau général de financement responsable des piètres
résultats enregistrés.
Beaucoup pensent que le saupoudrage des ressources et le
manque de concentration des énergies observé lors des deux
premières périodes de programmation112 ont conduit
à d'importants gaspillages. Ce n'est qu'en 2000 que la Commission a
entrepris de mieux cibler ses efforts en diminuant le nombre d'Objectifs au
profit des régions les plus nécessiteuses. Cependant, pour
Vanhove (2000), l'éparpillement demeure trop grand. Selon Bachtler &
Turok (1997), les Initiatives Communautaires que nous avons déjà
évoquées incarnent véritablement ce gaspillage. Ils les
estiment totalement superflues : s'attaquant aux mêmes problèmes
que les programmes régionaux et sectoriels, elles seraient de tailles
trop modestes pour espérer avoir le moindre impact significatif et
surtout elles créeraient un surcroît de bureaucratie inutile.
Plusieurs des remarques ci-avant renvoient au débat
entre équité et efficience introduit par la nouvelle
géographie économique. "D'un point de vue global, même
si l'apport des Fonds Structurels est profitable aux régions pauvres, il
peut être économiquement plus efficace d'investir ces ressources
dans des régions plus riches oil les taux de rendements sont
supérieurs." (Cour & Nayman, 1999, p. 3). La question est donc
la suivante : les Fonds Structurels doivent-ils, dans l'espoir d'un futur effet
de propagation, accentuer le rôle de locomotives de certains pôles
ou bien est-il préférable de réduire les
inégalités régionales le plus rapidement possible au
risque d'obtenir un taux de rendement social nettement plus faible? La
Politique de Cohésion renforce-t-elle la tendance spontanée
à la polarisation intra pays ou bien, dans un souci
d'équité (immédiate), s'obstine-elle à contrecarrer
cette évolution?
Le degré de redistributivité élevé
que nous avons constaté plus haut laisse penser que la Commission, dans
le cadre de sa politique régionale, a résolument pris le parti de
l'équité plutôt que de l'efficience. Pour De la Fuente
& Vives (1995), les efforts de redistribution ont un véritable
coût d'efficience. Pour illustrer cela, ils présentent le cas
espagnol : si tout l'investissement public espagnol avait été
alloué aux régions selon les principes redistributifs des Fonds
Structurels, la réduction des inégalités aurait
été deux fois supérieure, mais le PIB aurait
été inférieur de 1,2%. Pissarides & Wasmer (1996)
arrivent aux mêmes conclusions en se penchant sur le cas du Portugal,
où l'effet des infrastructures de transport sur l'investissement
privé y apparaît beaucoup plus important dans les régions
relativement plus riches.
112 De 1989 à 1993 et de 1994 à 1999.
Pour Martin (1998), le taux de rendement social113
des projets financés par l'Union Européenne est en
général relativement faible. Cela s'explique, entre autres, par
des distorsions dans l'analyse coûts-bénéfices : les
régions observeraient le bénéfice total d'un projet, mais
ne tiendraient pas compte des aides européennes lors de
l'évaluation des coûts. D'autre part, il faut bien admettre, dans
une certaine mesure, que cela correspond à la philosophie de la
Politique de Cohésion : permettre la réalisation de projets qui,
autrement, n'auraient pas été entrepris.
Si le degré de redistributivité des Fonds
Structurels est important, il ne signifie pas pour autant l'abandon du souci
d'efficience. "Des considérations d'efficience peuvent inciter
à limiter la redistribution primaire associée aux Fonds
Structurels. " (Fayolle & Lecuyer, 2000, p. 192). Ainsi certaines
régions, relativement riches, sont parfois assez bien dotées en
Fonds Structurels, car on nourrit l'espoir d'en faire des leaders
économiques capables d'entraîner la croissance nationale et celle
des régions déshéritées environnantes. Cette option
a, par exemple, été préconisée pour l'Irlande et
l'Espagne114. Une répartition plus redistributive des Fonds
Structurels réduirait sans doute certaines inégalités
régionales, mais pourrait, par la même occasion, freiner la
croissance collective.
113 Pour rappel: taux de rendement total pour la
société en général.
114 De la Fuente & Vives (1995).
Conclusions
L'objectif initial de ce mémoire était
d'appréhender l'évolution des disparités régionales
dans l'Union Européenne au cours de ces dernières
décennies et d'évaluer le rôle joué par la Politique
européenne de Cohésion en vue de réduire celles-ci.
Après avoir constaté d'importantes divergences
d'opinions et de prévisions dans la littérature théorique,
nous avons cherché à retracer l'évolution des
disparités de PIB/
hab. au niveau régional en Europe. La
compilation d'un nombre important d'études déjà
réalisées sur le sujet nous a permis de dégager certaines
tendances assez nettes.
Ainsi, après avoir décru jusqu'au milieu des
années septante, la convergence régionale a pratiquement disparu
pendant une dizaine d'années pour timidement redémarrer à
la fin des années quatre-vingt et progresser doucement depuis lors. Au
niveau national, la situation est sensiblement différente puisque les
disparités de richesse ont diminué à un rythme nettement
plus soutenu depuis la seconde guerre mondiale. Cette différence de
vitesse de convergence entre le niveau régional et national indique que
toutes les régions sont loin de connaître le même rythme de
croissance. Plus particulièrement, ce premier niveau d'analyse
suggère que seule une minorité de régions
défavorisées sont en train de rattraper significativement la
moyenne européenne.
L'examen de la convergence conditionnelle (avec country
dummy variables) est venu confirmer cette première
interprétation. En effet, la convergence entre régions d'un
même pays est apparue plus faible que la convergence globale au niveau
européen. En outre, cet écart s'est considérablement
accentué depuis la fin des années quatre-vingt. Le "paradoxe de
convergence divergente" est alors devenu une hypothèse majeure. Le taux
de convergence absolue relativement faible au niveau régional serait le
résultat d'un double mouvement : une forte convergence inter-pays
emmenée par un petit nombre de régions, conjuguée,
dès lors, à une sensible divergence au sein de certains pays.
Autrement dit, les résultats encourageants de plusieurs pays
retardataires seraient le fait de quelques régions "leaders"
particulièrement dynamiques qui auraient tendance à creuser
l'écart avec les autres régions de leurs pays respectifs,
incapables de suivre ce rythme de croissance.
Il restait alors à estimer le rôle joué par
la Politique de Cohésion dans cette évolution. Nous avons
constaté qu'en dépit d'une majorité de prévisions
théoriques favorables, les évaluations
empiriques de l'impact des Fonds Structurels sur la
convergence présentaient des résultats assez mitigés. De
ce débat pour le moins animé, il nous a semblé que nous
pouvions néanmoins conclure à la conditionnalité de
l'efficacité de la Politique de Cohésion dans son objectif de
réduction des disparités. En effet, au-delà de la
diversité des appréciations, la majorité des travaux
tendent à s'accorder sur l'importance majeure d'une série de
facteurs, souvent corrélés à l'appartenance nationale,
pour obtenir un impact significativement positif des Fonds européens sur
la croissance.
Nous voudrions, ici, nous arrêter un instant sur le cas
assez troublant du Hainaut. Sur base de ces dernières
considérations, la province devrait afficher de bonnes performances,
puisque la plupart des facteurs identifiés comme conditionnant l'impact
des Fonds Structurels sur la croissance s'y trouvent rassemblés.
Situé au coeur du continent et disposant de réseaux de transport
parmi les plus denses, le Hainaut jouit également d'institutions
très décentralisées. Enfin, le PIB/hab. de la Belgique,
largement supérieur à la moyenne européenne ainsi que la
proximité des pôles économiques flamands et d'une
région lilloise en plein redécollage devraient avoir quelques
effets de contagion.
Pourtant, le Hainaut présente des résultats
relativement médiocres tant sur la scène nationale que par
rapport à la moyenne des régions bénéficiant des
aides Objectif 1. Au niveau national, Monfort, Thomas & Wunsch (2000)
observent un processus de divergence intra-pays se traduisant par des
disparités régionales plus marquées en 2000 que quinze ans
auparavant. A l'échelle européenne, alors que le PIB/hab. de la
province atteignait 77% de la moyenne communautaire au moment d'accéder
au statut de région Objectif 1 en 1993, il ne représentait plus
que 69,1% de celle-ci en 2001. Pour la période 1995-2001, la croissance
économique hennuyère a été largement
inférieure aux plus mauvais résultats régionaux
recensés en Grèce ou au Portugal115. "Bien que
près de dix ans se soient écoulés depuis la mise en oeuvre
d'une politique forte de redéploiement économique de la province,
si l'on perçoit un frémissement, celui-ci reste fragile et
réversible. On ne peut encore conclure à ce stade que les
interventions aient infléchi significativement la trajectoire de la
croissance hennuyère" (DUBLEA-CERT & SERP, 2003). Ce constat ne
peut qu'interpeller et nous inviter à la prudence dans nos conclusions.
Mais une analyse approfondie de ce cas particulier, qui n'est peut-être
pas le seul, sortirait clairement du cadre de notre travail.
L'exception hennuyère ne semble pas pour autant invalider
nos observations à l'échelle européenne: l'impact de la
Politique de Cohésion sur la croissance semble plus important dans
115 Commission Européenne (2004)
les régions les moins défavorisées
rassemblant un maximum de facteurs déterminants. C'est en effet dans les
régions dotées d'institutions de qualité, plus proches du
centre du continent ou de métropoles en forte croissance, que les
projets cofinancés par l'Union Européenne montrent le taux de
rendement social le plus élevé. Ainsi, le Nord de l'Espagne, le
Sud de l'Irlande ou certains Länder Est-allemands de même
que les régions de Lisbonne, d'Athènes ou de Dublin font preuve
d'un dynamisme assez remarquable. Ce résultat nous semble
particulièrement important car, a contrario, il suggère
une relative inefficacité des Fonds Structurels là où on
en a le plus besoin.
Pour les décideurs publics, il s'agit en toile de fond
d'un véritable dilemme entre équité et efficience ou
encore entre croissance et convergence globale. Après examen, la
position de la Commission par rapport à ce trade-off
apparaît relativement ambiguë. D'une part, l'objectif premier
de la Politique de Cohésion est la réduction des
inégalités régionales, d'autre part, la Commission
prétend viser l'efficience et vouloir maximiser la croissance des
régions aux plus forts potentiels.
A première vue, le degré élevé de
redistributivité de la Politique de Cohésion aurait tendance
à montrer que la Commission a, tout de même, pris le parti de
l'équité plutôt que de l'efficience. En effet, plus des
deux tiers du budget des Fonds Structurels sont exclusivement destinés
au développement local des régions défavorisées.
L'objectif de réduction des disparités régionales pousse
donc la Commission à contrer le plus rapidement possible cette tendance
à la polarisation. Mais, comme nous venons de le voir, cette
redistribution a un véritable coût d'efficience. En effet, le taux
de rentabilité des projets est souvent positivement
corrélé au niveau de développement d'une région.
Dans l'autre sens, un exemple frappant du souci d'efficience
nous semble être la politique de transport. La structure
hubs-and-spokes des réseaux de transport interrégionaux
montre une nette volonté de la Commission d'optimiser le
développement de ses grands centres d'activité. Les spillover
effects discutés plus haut indiquent qu'en ce domaine, des
investissement consentis dans les régions pauvres pour le tracé
d'axes de transport peuvent in fine s'avérer surtout
bénéfiques pour certains pôles de croissance. Cette
difficulté d'arbitrage, somme toute assez logique, laisse penser que la
Commission est confrontée à l'exercice d'équilibriste
évoqué par la nouvelle géographie économique.
On peut finalement se demander si la pertinence de l'intervention
européenne et de ses priorités n'est pas liée au
caractère permanent ou temporaire de la "convergence divergente".
En ce sens, selon la persistance de la divergence intra-pays,
la priorité devrait peut-être être accordée à
l'équité ou à l'efficience. Deux scenarii nous paraissent
pouvoir être esquissés en suivant cette piste de
réflexion.
Dans une première hypothèse, le
phénomène de "convergence divergente" pourrait n'être que
transitoire et la polarisation intra-pays, constituer les prémisses de
la convergence. Dans un tel cas de figure, nous devrions assister rapidement
à un effet de contagion lié, par exemple, à la congestion
des principales agglomérations et/ou à l'amélioration des
institutions nationales. La Politique de Cohésion dans sa forme
redistributive actuelle pourrait alors ne pas être le meilleur moyen
d'anticiper cette convergence significative à moyen terme. Autrement
dit, davantage de considération pour la rentabilité des
investissements serait probablement souhaitable.
En revanche, si les disparités régionales entre
régions d'un même pays devaient continuer à se creuser
à long terme, ce serait le signe que les pôles de croissance
disposent d'atouts excessifs et que les régions retardataires souffrent
d'handicaps insurmontables par elles-mêmes. Dans un tel cas de figure, la
redistribution continuerait à être indispensable à
l'équilibre et à la pérennité de l'Union.
A l'heure actuelle, la Commission semble pencher pour cette
seconde éventualité. Mais le renforcement de la divergence
intra-pays de ces dernières années indique probablement que les
efforts actuels sont encore insuffisants ou trop peu efficaces pour
contrebalancer une tendance spontanée à la polarisation. La
perspective d'une plus grande dilution des aides européennes avec le
récent élargissement n'est évidemment pas de meilleure
augure, même s'il ne s'agit là que d'un des multiples
paramètres conditionnant l'avenir de la construction
européenne.
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ANNEXES
(*)
Annexe 1 : Disparités de PIB par habitant en SPA
selon les régions au
(**)
sein des Etats membres de l'Union Européenne,
1990-1999 (Écart type de l'indice UE-15 = 100)
Etat membre
|
1990
|
1991
|
1992
|
1993
|
1994
|
1995
|
1996
|
1997
|
1998
|
1999
|
Belgique
|
25.1
|
25.1
|
26.0
|
27.1
|
25.9
|
40.8
|
41.6
|
41.4
|
41.6
|
40.2
|
Allemagne
|
-
|
38.6
|
35.8
|
32.4
|
31.3
|
25.6
|
24.9
|
25.1
|
25.3
|
25.5
|
nouveaux Länder exclus
|
21.8
|
22.7
|
23.0
|
22.8
|
23.4
|
20.1
|
20.5
|
20.9
|
21.0
|
21.5
|
Grèce
|
6.3
|
6.1
|
6.6
|
7.6
|
7.8
|
10.4
|
10.3
|
9.5
|
9.5
|
9.5
|
Espagne
|
14.9
|
16.0
|
15.9
|
15.2
|
15.9
|
16.8
|
17.1
|
17.4
|
17.4
|
18.1
|
France
|
28.9
|
29.9
|
28.9
|
29.9
|
30.8
|
28.2
|
27.9
|
27.3
|
26.6
|
27.5
|
Irlande
|
-
|
-
|
-
|
-
|
-
|
13.7
|
12.9
|
15.8
|
16.7
|
18.2
|
Italie
|
24.8
|
24.7
|
24.9
|
24.7
|
25.5
|
28.5
|
28.9
|
27.7
|
28.1
|
27.8
|
Pays-Bas
|
10.6
|
11.8
|
11.3
|
11.5
|
10.8
|
13.5
|
14.6
|
15.3
|
15.7
|
15.8
|
Autriche
|
27.5
|
28.6
|
28.7
|
30.3
|
28.1
|
25.4
|
24.8
|
23.6
|
22.7
|
22.5
|
Portugal
|
13.5
|
15.0
|
13.6
|
14.3
|
13.8
|
15.2
|
15.4
|
17.3
|
17.9
|
17.6
|
Finlande
|
17.9
|
17.7
|
15.4
|
17.0
|
17.1
|
19.5
|
21.2
|
20.8
|
23.9
|
24.2
|
Suède
|
10.8
|
12.0
|
10.9
|
12.8
|
11.0
|
12.0
|
13.0
|
15.2
|
16.3
|
20.1
|
Royaume-Uni
|
20.2
|
19.2
|
19.6
|
20.6
|
18.3
|
31.5
|
32.0
|
34.0
|
35.6
|
34.2
|
(*) Le Standard de Pouvoir d'Achat (SPA) est une unité
représentant un volume identique de biens et de services. Cela permet de
faire des comparaisons sign ificatives d'indicateurs économiques entre
les pays, indépendamment du niveau des prix. La valeur d'une
unité de SPA est de environ 1 euro. (**) jusqu'en 1994 : PIB (chiffres
SEC79) pour les régions NUTS2 (v.95); à partir de 1995 : PIB
(chiffres SEC95) pour les régions NUTSII (v.98)
Données Eurostat + calculs DG REGIO
Source : Deuxième rapport d'étape sur la
cohésion économique et sociale (30 janvier 2003) :
http://europa.eu.int/comm/regional_policy/sources/docoffic/official/reports/pdf/interim2/table
s_0 1_1 2_fr.pdf
Annexe 2 : Croissance du PIB et de la population dans
les pays de la
(*)
cohésion, 1988-2003
|
Période
|
Grèce
|
Espagne
|
Irlande
|
Portugal
|
EU-12
(1)
|
EU-15
(1)
|
Variation annuelle moyenne du PIB total en %
|
88-98
|
1.9
|
2.6
|
6.5
|
3.1
|
2.0
|
2.0
|
88-93
|
1.2
|
2.0
|
4.4
|
2.6
|
1.7
|
1.7
|
93-98
|
2.7
|
3.1
|
8.7
|
3.6
|
2.4
|
2.5
|
98-03
|
3.9
|
3.1
|
6.8
|
2.1
|
2.0
|
2.1
|
PIB/hab. (en SPA), UE-15=100 (2)
|
1988
|
58.3
|
72.5
|
63.8
|
59.2
|
106.6
|
100.0
|
1989
|
59.1
|
73.1
|
66.3
|
59.4
|
106.4
|
100.0
|
1990
|
57.4
|
74.1
|
71.1
|
58.5
|
106.4
|
100.0
|
1991
|
60.1
|
78.7
|
74.7
|
63.8
|
105.2
|
100.0
|
1992
|
61.9
|
77.0
|
78.4
|
64.8
|
105.3
|
100.0
|
1993
|
64.2
|
78.1
|
82.5
|
67.7
|
105.0
|
100.0
|
1994
|
65.2
|
78.1
|
90.7
|
69.5
|
104.9
|
100.0
|
1995
|
65.9
|
78.2
|
93.3
|
69.7
|
104.8
|
100.0
|
1996
|
66.6
|
79.3
|
93.5
|
70.0
|
104.7
|
100.0
|
1997
|
65.9
|
79.9
|
103.7
|
73.3
|
104.5
|
100.0
|
1998
|
66.9
|
79.2
|
106.1
|
72.2
|
104.6
|
100.0
|
1999
|
68.2
|
82.1
|
112.2
|
71.9
|
104.2
|
100.0
|
2000
|
67.7
|
82.2
|
115.2
|
68.0
|
104.3
|
100.0
|
2001(3)
|
64.7
|
84.1
|
117.9
|
69.0
|
104.2
|
100.0
|
2002
|
69.0
|
83.4
|
119.1
|
72.5
|
104.1
|
100.0
|
2003
|
70.4
|
83.8
|
119.9
|
72.1
|
104.0
|
100.0
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En italique : estimations
(1) Taux de croissance 88-98 et 88-93 : les nouveaux
Länder allemands sont exclus
(2) méthodologie SEC95 à partir de
1995
(3) Grèce : nouveaux chiffres de population pour 2001
(résultats provisoires du recensement) (*) Données Eurostat
(comptes nationaux) + calculs DGREGIO
Source : Deuxième rapport d'étape sur la
cohésion économique et sociale (30 janvier 2003) :
http://europa.eu.int/comm/regional_policy/sources/docoffic/official/reports/pdf/interim2/table
s_0 1_1 2_fr.pdf
Annexe 3 : Représentation graphique du "paradoxe
de convergence divergente"
Taux de croissance du PIB/hab.
Pays 1
Pays 2
Pays 3
PIB/hab. initial
Sur le graphique on peut observer un certain processus se
convergence entre régions puisque globalement, les régions plus
pauvres tendent à avoir un taux de croissance supérieur à
celui des régions plus riches. Toutefois, au sein de chaque pays c'est
l'inverse qui se produit : les régions les plus
développées présentent un taux de croissance plus
élevé que les autres. On a dès lors un double mouvement de
convergence entre Etats (et même globalement entre régions) et de
divergence entre régions au sein de chacun de ces pays.
Source : Martin, Ph., 1998, "Can Regional Policies Affect Growth
and Geography in Europe?", World Economy, 21 (6), p. 757-774.
Annexe 4 : Les zones éligibles pour l'exercice
2000-2006
Source : Commission Européenne, DG REGIO :
http://www.europa.eu.int/comm/regional_policy/funds/prord/guide/euro2000-2006_fr.htm
Annexe 5 : Balance nette par habitant versus niveau de
revenu relatif, 1998.
Balance fiscale nette relative par habitant, 1998
Revenu relatif par habitant, 1998
Légende : Gr = Grèce; Po = Portugal; Sp =
Espagne; Jr = Jrlande; Fin = Finlande; Sw = Suède; UK = Royaume-Uni; Jt
= Jtalie; Nl = Pays-Bas; Fr = France; Ge = Allemagne; Ost = Autriche; Be =
Belgique; Dk = Danemark; Lux = Luxembourg.
Source : De la Fuente, A. & Doménech R., 1999, "The
Redistributive Effects of the EU Budget: An Analysis and A Proposal For
Reform", CEPR Discussion Papers, 2113, p. 26.
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