3.1.2. L'impact d'un site
internet sur l'imagination de l'auditeur
Selon Bertelson et Radeau, la vision est
privilégiée par rapport à l'audition. Ce sont les effets
sonores qui viennent travailler l'image. L'auditeur se concentre uniquement sur
ce qu'il entend, lorsqu'il allume la radio. Ce processus est modifié
lorsqu'il devient internaute du site de radio, car au moment où il
arrive sur la page d'accueil, il perçoit en premier lieu les
éléments visuels, et, dans un second temps, les
éléments sonores s'il y en a. C'est par conséquent un
autre processus de perception sensorielle qui se met en place.
Le site internet d'une radio transforme les effets de ce
média dans le sens où il provoque moins l'imaginaire de
l'auditeur au moment où il se connecte sur le site. Donner un ensemble
visuel à une radio qui n'utilise à la base que des
éléments auditifs, c'est diminuer la stimulation imaginaire du
récepteur, puisque celui-ci a moins à imaginer en se basant sur
ce qu'il écoute. Un exemple : un auditeur qui n'a jamais vu le site
d'une radio mais qui est fidèle à ce média audio entend
tous les jours la même voix animer l'émission qu'il écoute
le matin en se levant. Il s'est forcément, au moins une fois, poser la
question de savoir quel est le visage qui se cache derrière cette voix,
comme toutes les personnes qui écoutent la radio... Sans la vision
directe de l'émetteur que constitue l'animateur de la radio, l'auditeur
a tendance à construire une image de cette personne à partir des
caractéristiques de sa voix. Il s'imagine un homme, mais se
demande : brun ou blond ? Petit ou grand ? En se basant sur la
voix, il peut même être tenté d'imaginer que c'est un homme
jeune, au « look » actuel, ... etc.
Bien souvent, l'image que l'auditeur peut se faire de
l'animateur radio est à l'opposé de sa
« vraie » physionomie. Avec Internet, les radios mettent
en ligne les photos de leurs animateurs. Deux attitudes alors : soit la station
de radio prend en compte cette possibilité, presque un "devoir"
d'après le nombre de radios qui exercent cette pratique, et choisit
aussi son animateur de façon à pouvoir le « mettre en
valeur » sur le site, soit elle n'en tient pas compte et là,
c'est l'auditeur qui éprouve un sentiment de déception lorsqu'il
découvre la photo de son animateur favori sur le site et que ce dernier
ne répond pas aux critères que l'auditeur s'était
imaginé...Il y a désormais presque une contrainte
« physique » pour les animateurs de radio, alors que c'est
un média qui, par définition, ne diffuse pas d'image !
Cependant, l'exposition photographique des
présentateurs d'émissions sur le site d'une radio a ses
avantages. Au fond, un phénomène de familiarisation s'exerce.
L'auditeur qui a vu le visage de celui dont il entend la voix
quotidiennement a un réflexe : la photo vient à l'esprit
lorsque l'animateur est annoncé à la radio. Il s'établit
alors une sorte de relation de complicité avec ceux qui connaissent son
physique, les internautes qui ont vu la page du site, par rapport aux auditeurs
qui n'ont pas été voir le site de la radio et qui, par
conséquent, ignorent le visage de celui qui leur parle à
l'antenne. On en revient ici aux idées de fidélisation et de
privilèges des internautes, concepts que l'on a abordés dans la
présentation du phénomène de filmer le studio
d'enregistrement.
Avec l'apparition d'Internet dans la communication des
radios, on agit davantage sur le concret. Moins d'imagination mais davantage
d'attractivité, en cernant ce qui plaît visuellement à
l'internaute par les statistiques de fréquentation du site, et en
développant un espace internet correspondant à l'identité
de la cible. Nous allons développer cette idée par la suite, mais
force est de constater que pour adapter le média (c'est-à-dire sa
politique de programmes) à la cible visée, internet apporte un
type de baromètre efficace. En effet, habituellement, les radios n'ont,
pour tout moyen de mesure d'audience (hors, évidemment, la mesure de
participation téléphonique aux jeux), que les chiffres
donnés par l'Institut Médiamétrie à chaque
trimestre. Difficile d'être réactif à très court
terme si on ne connaît pas le succès de chaque émission en
dehors de ces données ...
Dans cette situation, Internet, par deux moyens, facilite la
réactivité par rapport à la conception des
émissions proposées :
- l'observation de la fréquence d'envois de mail, ou de
discussions sur un tchat, c'est-à-dire la participation des
radionautes à l'émission diffusée (et
éventuellement leurs commentaires, puisque les mails ne sont pas tous
lus à l'antenne et sont sélectionnés par l'animateur)
- la prise en compte du nombre de connexions sur le site au
moment de l'émission. Par exemple, si lors d'un programme à grand
succès, l'animateur introduit Internet comme sources d'informations
complémentaires, ou d'activités proposées en rapport avec
l'émission, il a un grand nombre de connexions, mesuré
grâce à un programme informatique basique. Lors d'une nouvelle
émission où l'on sollicite également les internautes, la
radio peut comparer le nombre de connexions par rapport au programme
connaissant une forte audience. Les chiffres sont analysés et l'on
conclut, au terme de quelques études, si l'on doit modifier ou non le
concept de l'émission. Cela peut se faire à un terme plus court
que celui nécessaire à l'obtention des résultats de
Médiamétrie. Dans ce sens, posséder un site permettant
bien sûr une relation d'interactivité entre les internautes et la
radio, permet d'être plus réactif au niveau de la programmation et
de la cible visée.
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