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Niveau : L3
LE CAMEROUN SOUS LES FOURCHES CAUDINES DU FMI D'APRES
LES JOURNAUX : 1988-2006
Mémoire présenté et soutenu le 28 juillet
2023 en vue de l'obtention du Diplôme de Master en Histoire
Spécialisation : Histoire des Relations
internationales
Par
Symphorien Loïc EMBOLO
Licencié en Histoire
MEMBRES DU JURY
Président : Pr. Mathieu Jérémie
ABENA ETOUNDI (MC)
Rapporteur : Pr. Philippe Blaise ESSOMBA
(Pr)
Examinateur : Dr. Jean Louis NDO ABE
(CC)
Juillet 2023
AVERTISSEMENT
Ce document est le fruit d'un long travail approuvé par
le jury de soutenance et mis à disposition de l'ensemble de la
communauté universitaire élargie.
Il est soumis à la propriété
intellectuelle de l'auteur. Ceci implique une obligation de citation et de
référencement lors de l'utilisation de ce document.
Par ailleurs, le Centre de Recherche et de Formation Doctorale
en Sciences Humaines, Sociales et Éducatives de l'Université de
Yaoundé I n'entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions
émises dans ce mémoire ; ces opinions doivent être
considérées comme propres à leur auteur.
SOMMAIRE
SOMMAIRE
Erreur ! Signet non défini.
DEDICACE iii
REMERCIEMENTS
i
LISTE DES ACRONYMES, ABREVIATIONS ET
SIGLES
v
LISTE DES
ILLUSTRATIONS...............................................................................viii
RESUME
ix
ABSTRACT
x
INTRODUCTION GENERALE
1
CHAPITREI : FACE AUXDEFIS DE
L'HEURE,LE CAMEROUN RECOURT AU FMI 17
I. UNE ECONOMIE ENTRE RESILIENCE ET
CONTROVERSE....................................17
II.LES RAISONS JUSTIFIANT LE RECOURS AU FMI
37
III.AUX ORIGINES DU FMI ET DES PROGRAMMES
D'AJUSTEMENT STRUCTUREL (PAS).. 45
CHAPITRE II : VERS UNE COOPERATION
EFFECTIVE ENTRE CAMEROUN ET FMI 52
I. LA NATURE DES ACCORDS CONCLUS
52
II. LES CONDITIONNALITES D'EMPRUNT ET LEUR
MISE EN APPLICATION CONCRETE AU CAMEROUN 60
III. LE DESACCORD SURL'APPLICATION DES PAS
AU CAMEROUN
1
CHAPITRE III : ANALYSE DES
PERFORMANCES ECONOMIQUES ET SOCIO-POLITIQUES DES PAS AU CAMEROUN, 18 ANS
APRES 84
I. ANALYSE DES PERFORMANCES ECONOMIQUES
84
II. ANALYSE DES
PERFORMANCESSOCIO-POLITIQUES 100
III. LES INDICATEURS DE MESURE DU
DEVELOPPEMENT A L'ATTEINTE DU POINT D'ACHEVEMENT DE L'IPPTE 117
CHAPITRE IV : QUEL AVENIR POUR LA
COLLABORATION CAMEROUN-FMI ? 127
I. LE FONDS MONETAIRE INTERNATIONAL :
UN INSTRUMENT DEVANT PERMETTRE AUX POUVOIRS PUBLICS D'AMELIORER LES
CONDITIONS FINANCIERES DURANT LA DECENNIE 1990 ? 127
II. QUEL INTERET POUR LE CAMEROUN A COOPERER
AVEC LE FMI ? 136
III. QUELQUES PERSPECTIVES POUR TIRER
PLEINEMENT PROFIT DE CETTE COOPERATION 141
CONCLUSION GENERALE 148
ANNEXES 151
SOURCES ET REFERENCE BIBLIOGRAPHIQUES
186
TABLE DES MATIERES 219
À la famille EMBOLO
REMERCIEMENTS
Nous convenons d'adresser des remerciements ànotre
Directeur de recherche, le Pr. Philippe BlaiseEssomba, pour son soutien durant
tout le processus. En tant que nouvel étudiant en Master 2, il nous a
pris sous son aile et nous a aidé à naviguer les méandres
de la recherche scientifique. Sans son aide indéfectible, ses
orientations et les opportunités offertes, nous n'aurions jamais eu des
ressources pour parachever ce travail.
Notre profonde gratitudeau Dr. Jean PaulinMengue Me Ndongo,
pour ses orientations, au Pr. Mathieu Jérémie Abena Etoundi, pour
ses remarques, et au Dr. Jean LouisNdo Abbe, dontl'examination, les
commentaires et les suggestionsont contribué à améliorer
ce travail.À tous lesprofesseurs du département
d'Histoire,veillez trouver en ces mots l'écho et l'expression d'une
âme en reconnaissante admiration.
Nous
remercionségalementnotre famille, dontnous devonsnotre vie, notre
passion, tout le chemin parcouru et cette confiance absolue que rien n'est
impossible. Vous êtes et serez toujours les piliers de notre vie
grâce à tout ce que vous nous avez donné et
enseigné.
Un merci spécial à toutes ces personnes, vieux
complices ou nouvelles amitiés qui ont été
présentes durant les moments de découragement ou d'euphorie,
ceux-là qui ont écouté patiemment les monologues de
dépit ou les cris de joie à chaque étape franchie. A
PaulinZapoueNgouanet, dont la compétence n'a d'égale que sa
gentillesse, il a su prêter une oreille bienveillante et prodiguer des
conseils utiles qui nous ont permis d'atteindre le bout du chemin. À
Emmanuel RochelAzoaEmbolo et Diane DaïlaMessi Emmanuelle, qui nous ont
inlassablement ramené à l'ordre et encouragé lorsque nous
perdions espoir, chicané lorsque nous inventions des excuses.
Notre gratitude à Paul Ulrich OndoaMvondo, Michel
Arsène AtemballaOmgba et Sidoine Ghislain TsimiAbondo, pour leur
amitié fraternelle ; aux archivistes et gestionnaires des centres
de documents qui nous ont facilité l'accès à la
documentation ;et à ceux-là qui nous ont prêté
une oreille attentive à nosdifférentes préoccupations.
LISTEDESACRONYMES,ABREVIATIONSETSIGLES
APEB : Accords de Partenariat
Économique Bilatéral
AAS : Appui à l'Ajustement
Structurel
BAD : Banque Africaine de
Développement
BICEC : Banque Internationale du
Cameroun pour l'Épargne et le Crédit
BIRD : Banque International pour la
Reconstruction et le Développement
BM : Banque Mondiale
BUCREP : Bureau Central des Recensements
et des Études de Population
CAMAIR :CameroonAirline
CAST : Crédit d'Ajustement
Structurel Triennal
CEMAC : Communauté
Économique et Monétaire de l'Afrique Centrale
CTS : Comité Technique de
Préparation et de Suivi des Programmes économiques
CTSE : Comité Technique de Suivi
et d'Évaluation des activités de mise en oeuvre du DSRP
DSA : Dimension Sociale d'Ajustement
DSCE : Document de Stratégie pour
la Croissance et l'Emploi
DSRP : Document de Stratégie pour
la Réduction de la Pauvreté
DTS : Droit de Tirage Spécial
EMF : Établissement de Micro
Finance
FAD :Fonds Africain de
Développement
FASR : Facilité d'Ajustement
Structurel Renforcé
FMI : Fonds Monétaire
International
FNE : Fonds National de l'Emploi
FOGAPE : Fonds de Gestion et d'Appui aux
Petites et moyennes Entreprises
FONADER : Fonds National de
Développement Rural
FRPC : Facilité pour la
Réduction de la Pauvreté et pour la Croissance
HEVECAM : Société
d'Hévéa du Cameroun
IADM : Initiative d'Allègement de
la Dette Multilatérale
INS : Institut National de la
Statistique
IPPTE : Initiative Pays Pauvre
Très Endetté
IPPTR : Initiative Pays Pauvre
Très Endetté Renforcée
MIDEVIV : Mission de
Développement des cultures Vivrières
MINEPAT : Ministère de
l'Économie, de la Planification et de l'Aménagement du
Territoire
MINEFI : Ministère de
l'Économie et des Finances
MINFI : Ministère des Finances
MINFOPRA : Ministère de la
Fonction Publique et de la Réforme Administrative
MINREX : Ministère des Relations
Extérieures
OCDE : Organisation de
Coopération et de Développement Économique
OMC : Organisation Mondiale du
Commerce
OMD : Objectifs du Millénaire
pour le Développement
ONCPB : Organisation Nationale pour la
Commercialisation des Produits de Base
PEFT : Programme Économique et
Financier Triennal
PGE : Programme Général
des Échanges
PIB :Produit Intérieur Brut
PME : Petite et Moyenne Entreprise
PMI : Petite et Moyenne Industrie
SISI : Stratégie
d'Industrialisation par Substitution aux Importations
SNH : Société Nationale
des Hydrocarbures
SPE : Stratégie de Promotion des
Exportations
SOCAPALM :Société
Camerounaise de Palmeraies
SODECAO : Société de
Développement du Cacao
SODECOTON : Société de
Développement de Coton
SONARA :Société Nationale
de Raffinage
STABEX :Fonds de stabilisation des
recettes d'exportation sur les produits agricoles
UC : Unité de compte
UE : Union Européenne
LISTEDES ILLUSTRATIONS
I. CARTES
1- Localisation du Cameroun en Afrique
1
2- Carte géographique du Cameroun
7
II. TABLEAUX
1- Évolution de la population camerounaise entre
1988 et
2006..........................................................................................................5
2- Structuration de la population camerounaise en
2004..........................................................................................................5
3- Évolution du taux de croissance, des recettes et
des dépenses au Cameroun entre 1977 et
1985......................................................................................................31
4- Les engagements financiers des bailleurs de fonds pour
la FASR........................59
5- Évolution du PIB de l'État camerounais
entre 1989 et 2005...............................91
6- Évolution des effectifs des enseignants au
Cameroun entre 1989 et 2006...............123
7- Évolution de la dette publique du Cameroun entre
1980 et 1988........................137
III. GRAPHISMES
1- Structuration de la population camerounaise en
2004..........................................................................................................5
2- Évolution du taux de croissance, des recettes et
des dépenses au Cameroun de 1977 à
1985.........................................................................................................31
3- Évolution du PIB de l'état camerounais
entre 1989 et 2005.............................91
RESUME
Les difficultés économiques des années
1970 ont contraint bon nombre de chefs d'États africains à
recourir au Fonds Monétaire International (FMI) dans le cadre des
programmes d'ajustement structurel (PAS).Maispour le Cameroun de façon
particulière, c'est en 1988 qu'une telle ambition est
manifestée.Cardeux décennies après son
indépendance, «le miracle camerounais''est l'expression qui
caractérise l'évolution économique du pays, rendantainsi
compte de l'impressionnante expansion économique imposée par
l'abondance de ressources nationales et le pragmatisme des
dirigeants.Acculé par l'échec de l'ajustement autonome et le
poids des pesanteurs extérieuresaprès la création d'un
contexte d'incertitude économique en 1985, le gouvernementse
résout àsigner des accords de prêt avec le FMI dont la
contrepartie signifie l'applicationdes PAS.Obnubilé par le processus de
libéralisation et de démocratisation dès 1990, la
problématique qui se pose iciest celle de savoir,quela
été l'influence et l'opiniondes journaux sur l'évolution
de cette coopération Cameroun-FMIentre 1988et2006 ?Pour traiter ce
sujet, la méthode inductivo-déductive est adoptée. Il a
fallu dépouiller des fonds d'archives et les articles de journaux.Et
après une confrontation des sources et d'un travail de réflexion,
de petites synthèses sur toute une série de faits sont
proposées où il ressort, selon les journaux, quecette
coopération durant la période d'étude aété
un fiasco malgré la relativestabilisationde l'économie
camerounaise au début des années 2000.
Mots clés : Crise
économique, coopération,ajustement structurel, mondialisation,
conditionnalité
Abstract
The economic difficulties of the 1970s led many
Africanheads of state to resort to the IMF's structural adjustment plans (SAP),
but. for Cameroon in particular, itwas only in 1988 that such ambition is
manifested. Indeed, over the decades after its independence, the Cameroonian
miracle is the expression that characterizes the economic evolution of the
country, thus reflecting the impressive economic expansion imposed by the
abundance of national resources and the pragmatism of its leaders. But after
the strengthening of protectionist policies in the USA at the 1980s, a context
of uncertainly was created in the Cameroonian economy. Cornered by the failure
of autonomous adjustment and the weight of external constraints subsequently,
the government resolves to sign confirmations with the IMF in order to benefit
from the financial support in exchange for application of SAP. Therefore, the
problem that arises here is to know, what was the influence and opinion of the
newspapers on the evolution of Cameroon-IMF cooperation between 1988 and 2006?
To deal with this subject, the inductive-deductive method is adopted. It was
necessary to examine archive funds and newspapers articles. After a comparison
of sources and a work of reflection, small summaries on a whole series of facts
are proposed where it emerges, according to the newspapers, that this
cooperation was a fiasco despite the relative stabilization of the Cameroonian
economy in the early 2000s.
Keys words:Financial
institution, cooperation,structural adjustment, globalization,
conditionality
INTRODUCTION GENERALE
1. Contexte
général de l'étude
Ledébut de la décennie 1970 marque la fin des 30
glorieuses européennes et le début d'une crise économique
mondiale engendrée par la crise du billet vert et la succession des
crises pétrolières1(*).Pendant que
lesÉtats se dépêchaient à trouver des moyens de
régulation face à cette déchéance conjoncturelle,
l'abondance des ressources nationales et le pragmatisme des autorités
empêche àl'économie camerounaisede s'effondrer jusqu'en
1984, d'où le miracle camerounais. Avec untaux de croissance moyen de
8%durant cette période, le Cameroun se présente comme un
modèle de développement raisonnable en Afrique2(*). Mais, au cours de l'exercice
budgétaire 1985/86, le Cameroun qui était pourtant bien parti
voit son économie dégringolée et connaitre une involution
après la dévaluation du dollar et la chute des prix des
principaux produits d'exportation3(*).
De 1985 à 1987, soit en deux ans, la valeur des
exportations chute de 65% pour le pétrole, 25% pour le cacao, 11% pour
le café, 20% pour le caoutchouc et le revenu par habitant d'un tiers.
Les termes de l'échange se détériorent pratiquement de
45%, entraînant une dégradation rapide des équilibres
interne et externe du pays, tandis que les recettes d'exportations
baissentde 8% par rapport au PIB4(*).Le 20 juin 1987, le gouvernement élabore, avec
l'aide de la France, un plan de rigueur consistant à réduire les
irrégularités afin de rétablir les équilibres
macroéconomiques5(*).
Maisface à l'échec dudit plan à cause de la mauvaise
gestion des finances et à la pression de l'opinion publique nationale et
internationale, les autorités camerounaisesse résolvent à
prendre le chemin de New York en1988 pour recourir au soutien financier et aux
conseils économiques du FMI, selon le quotidien national Cameroon
tribune6(*).
2. Les raisons de choix du
sujet
Le choix d'un sujet ne se fait pas au hasard, il émane
d'un certain nombre de déterminants qui peuvent être personnels,
académiques et scientifiques.
Du point de vue personnel, c'est
une fierté de relever le défi de l'écriture scientifique.
Ce sujet suscite en nous une curiosité à plus d'un titre. Il
reflètenotre passion pour l'économie monétaire,
l'économie politique, la finance et la diplomatie économique. En
effet, l'ambition de rédiger sur la coopération entre le Cameroun
et le FMI selon les journaux a été marqué par des
entretiens pluriels, d'où l'originalité de ce sujet qui permet de
créer une banque de données dont d'autres chercheurs pourront en
bénéficier.
Les raisons académiques s'inscrivent dans la motivation
d'obtenir un Doctorat PhD sous un système LMD (Licence-Master-Doctorat)
qui exige la rédaction d'un mémoire en fin de cycle de Master,
ceci dans le but de justifier des bases solides de l'étudiant dans sa
spécialisation et sur le respect de la déontologie de la
recherche scientifique.
Concernant les raisons scientifiques, elles concernent le
devoir qu'a un chercheur de renouveler les problématiques afin de faire
avancer la science à travers la recherche. C'est la raison pour laquelle
ce sujet apporte des alternatives et des nouveautésdans la connaissance
antérieure afin de les ajouter à la littérature
scientifique existante.Depuis le sacre du capitalisme sur le collectivisme en
1989, les relations diplomatiques du Cameroun n'ont cessé de se
développer sous l'angle économique.Ainsi, mener une étude
sur ce sujet selon les journaux, d'où son originalité,
permetd'explorer les contours de la question de manière objective, de
desceller les manquements et d'apporter une contribution significative dans ce
vaste champ d'étude.
3. Intérêts
du sujet
«Tout entreprise
intellectuelle ou artistique de quelque importance sociale procède
à la fois d'un malaise et d'un élan d'enthousiasme''7(*). C'est dans cette optique que
s'inscrit ce travail de recherche qui revêt un triple
intérêt. Il se propose d'explorer les dix-huit premières
années de coopération entre le Cameroun et le FMI du point de vue
des journaux.
Sur le plan scientifique, l'intérêt de la
présente étude s'apprécie à deux niveaux. D'une
part, elle permet devérifier l'applicabilité des accords du
FMI dansles États africains de façon générale, et
au Cameroun particulièrement. D'autre part, cette recherche est
scientifiquement intéressante car elle se préoccupe de
l'étude des décisions politiques, diplomatique et
stratégiques prises en situation de crise économique. En effet,
l'analyse des processus de décision gouvernementale, centrée sur
l'étude des crises, constitue un domaine privilégié de
l'étude des Relations internationales.
Sur le plan politique, cette étude permet au futur
décideurs et diplomates de s'imprégner des marques de la
politique du pays qu'il s'engage à servir, à travers la maitrise
de ses rouages essentiels et ses objectifs, mais aussi de ses
déterminants et contraintes.Elle permet également de comprendre
l'économie politique internationale (EPI) en Afrique et les logiques qui
guident le Cameroun dans ses relations avec les institutions financières
internationales.Cette étude permet également d'évaluer le
niveau de rapport entre les États africains et les institutions
internationales.
Sur le plan historique, ce sujet traite de
l'historicité du Cameroun. Pour cernerles soubresauts de la
coopération entre le Cameroun et le FMI de nos jours,comme dans tout
autres domaines d'ailleurs, une étude rétrospective s'est
toujours avérée primordiale. Car selon M. Bloch,
«l'explication du plus proche par le plus lointain a toujours
meublé nos recherches jusqu'à l'hypnose''8(*). Ainsi, dans l'optique d'avoir
une vue globalesur les relations entre Cameroun et les institutions de Bretton
Woods (IBW), il est préjudiciable d'aménager le contexte et les
circonstances qui ont permis leur aboutissement. Ne dit-on pas quel'Histoire
est le juge du monde ?
4. Cadre
spatio-temporel
Du point de vue spatial, le
Cameroun est un pays
d'Afrique Centrale situé au fond du Golfe de Guinée entre les
2e et 13e degrés de latitude Nord et les
9e et 16e degrés de longitude Est. Il a une forme
triangulaire,et occupe une superficie de 475000 km2dont la
moitié est couverte par la forêt. Il s'étend du Sud,depuis
la forêt sempervirente du climat équatorial, jusqu'aux steppes
sahéliennes du Nord sur près de 1200 km ; une base d'Ouest
en Est de 800 km2et dispose d'un microcosme de climats et
d'écosystèmes variées9(*). Cette diversité confère une
biodiversité riche et une forte vocation agricole au Cameroun. Il est
bordé à l'Ouest par le Nigéria, au Nord-Est par le Tchad,
à l'Est par la République Centrafricaine, au Sud par le Congo, le
Gabon et la Guinée Équatoriale etau Sud-Ouest, le pays s'ouvre
sur l'Océan Atlantique10(*).À cause de son énorme richesse en
sous-sol, le territoire est considéré comme une Afrique en
miniature.Cet État est une mosaïque humaine, riche de plus de 200
ethnies et presqu'autant de langues nationales. Le tableau ci-dessous
présente l'évolution de la population de cet État entre
1988et 2006.
Tableau n°1 :
Évolution de la population camerounaise entre 1988et
2006
Années
|
1988
|
1990
|
1992
|
1994
|
1996
|
1998
|
2000
|
2002
|
2004
|
2006
|
Populations
|
10759573
|
11430520
|
12128604
|
12848862
|
13575324
|
14698973
|
15091594
|
15914033
|
16909407
|
17751333
|
Source : Banque mondial
D'après le tableau ci-dessus, de1988 à
2006, soit en 18 ans, la population du Cameroun a presque doublée
passant de 10.759.573 habitants en 1988 à 17.751.333 habitants en
2006avec une densité moyenne de 39 habitants au kilomètre et une
structuration relativement jeune comme le présente letableau statistique
de l'annuaire 2004ci-dessus.
Tableau n°2 : Structuration
de la population camerounaise en 2004
Age
|
0-4
|
5-14
|
15-24
|
25-34
|
35-44
|
45-54
|
55-64
|
65-65+
|
Pourcentage
|
16%
|
28,3%
|
20,2%
|
15,4%
|
7%
|
5,1%
|
4,2%
|
3,8%
|
Source : Annuaire statistique 2004
Source : Graphique réalisé
à partir des données statistiques de l'annuaire 2004.
D'après l'Annuaire Statistique 2004 du Cameroun, la
structure de la population de plus en plus jeune se présente ainsiqu'il
suit : -5 ans (16%), 5-14 ans (28,3%), 15-24 ans (20,2%), 25-34 ans
(15,4%), 35-44 ans (7%), 45-54 ans (5,1%), 55-64 ans (4,2) et plus de 65 ans
(3,8%)11(*).
Concernant le cadre temporel, plusieurs raisons motivent le
choix des bornes chronologiques, soit 1988 et 2006. Le 24 septembre 1988,est
choisie parce qu'elle représente la date à laquelle le Cameroun
conclut avec le FMI lepremier accord de confirmation. Celle du 28avril 2006,par
contre renvoie à l'atteinte du point d'achèvement de l'initiative
Pays Pauvre et Très Endetté (IPPTE) par le Cameroun.
Carte n°1 :
Localisation du Cameroun en Afrique
Source :
www.openEditions-Books.com,
vendredi le 16 juin 2023 à 19h06.
Carte n°2 :Carte
géographique du Cameroun
Source :
www.Wikimémoires.com,
vendredi, 16 juin 2023, à 19h 15.
5. Clarification
conceptuelle
Dans le but de déterminer
le sens des concepts«fourches caudines'' et Fonds monétaire
international'' employer dans cette étudeafin d'éviter toute
confusion, une clarification azimutale s'avère primordiale.
En effet, l'expression«fourches caudines'' vient du latin
FurculaeCaudinae qui, à l'origine, est un défilé
pratiqué à l'Est du Caudium, une région située en
Capoue et Beneventum dans l'Italie centrale12(*). Mais cette expression se comprend de nos jours
à plusieurs niveaux. Selon Fernand De Vischer et Violaine Epitalon,elle
fait d'abord référence à la bataille qui opposait
l'armée romaine et les Samnites à l'issue de laquelle les
Samnites humilièrent les Romains en 321 avant J. C, rapportée par
l'historien romain Tite-Live13(*). Ensuite, l'expression de «fourches caudines'' a
été comprise au sens figuré par transposition du lieu
géographique et de la fameuse bataille par le biais d'une
métonymie.
Aujourd'hui, elle se comprend donc au sens assez large de
«vivre une situation désagréable''selon le
journalExpressio qui considère que passer sous les fourches
caudines c'est être vaincu, être contraint d'accepter des
conditions humiliantes ou ruineuses imposées par une personne ou une
situation, ou encore subir une cuisante humiliation14(*). Dans ce travail,
l'expression«fourches caudines'' ou «passer sous les fourches
caudines''traduiraitdonc l'allégeance et la soumission de l'État
camerounaisau Fonds Monétaire International.
Pour ce qui est duFonds monétaires international
(FMI),il est primordial de noter que cette expressionoppose les opinions depuis
sa création en 1944.Pour les néo-libéralistes tels que
M.Vaisse, C. Morelleou encore M.Lelart, le FMI est une institution
financière internationale qui détient une provision de devises
fournies par chacun des États adhérents en fonction de leur place
dans les échanges internationaux et dont le but consiste à
permettre les opérations de compensation entre les États membres,
à remédier aux problèmes créés par les
crises financières, et à rappeler à ses membres les
règles d'orthodoxie monétaire15(*).
Ce point vu est contesté par des auteurs tels que
Mongo Beti, Yves Tavernier et Joseph Stiglitzqui soutiennent plutôt
l'idée selon laquelle cette institutionne serait rien d'autre qu'un
instrument de l'impérialisme,soit une arme au service des
intérêts des occidentaux,un véritable prédateur
économique16(*). En
effet, selon l'analyse de ses performances de façon
générale, il ressort que sesinterventions plurielles dans les
pays en développement se sont toujours soldées par la hausse des
inégalités, du chômage,de la dette et de la suppression ou
la diminution de la capacité d'intervention des États17(*).Mais dans cette étude,
le sens retenue du FMI est celui d'une institution financière à
vocation internationale, apportantun soutien financier et des conseils
économique aux États qui en font la demande.
6. Cadre
théorique
Tout travail de recherche
scientifique s'inscrit dans un cadre théorique bien précis. Pour
le chercheur, l'élaboration d'un cadre théorique permet de donner
une orientation à son travail, pour l'inscrire dans un domaine
scientifique donné. Dans ce travail,deux théories à
l'instar du capitalisme et le libéralisme sont confirmées.
En effet, le dictionnaire de poche Le grand Larousse
définie le capitalisme comme étant un régime à la
fois économique et politique fondé sur la primauté des
capitaux privés dont le pouvoir est dépendant18(*). C'est cette même
optique que se range Max Weber qui présente le capitalisme comme
étant la condition dans laquelle apparait l'invention de la
modernité économique. Car en son sein, la permanence est la
réinvention de certaines formes de réciprocité sociale au
coeur des processus de transition économique dont la Chine, l'Asie
centrale et l'Afrique sont de parfaites illustrations19(*). Dans ce travail de recherche,
cette doctrines'apparente un levier d'appui pour appréhender
l'élargissement du marché et l'extension de l'économie de
marché au Cameroun. En effet, la planétarisation du marché
capitaliste résulte essentiellement de la convergence de trois
mouvements, dont la libéralisation des échanges mondiaux, la
déréglementation des économies nationales et la
globalisation des grandes firmes industrielles et de services''20(*).
Pour ce qui est du libéralisme,il part des
revendications pour les libertés de l'individu contre l'absolutisme
politique, le dirigisme économique, et l'intolérance
philosophique politiques. Ses trois fort principes sont : la
liberté, la propriété et la responsabilité21(*). Sur le domaine
économique, il est considéré comme une doctrine
économique hostile à l'intervention de l'État dans la vie
économique et à son contrôle sur les moyens de production
comme le soutient les classiques comme Adam Smith et David Ricardo. Dans les
années 1970, il s'oppose à l'orthodoxie marxienne, mettant en
avant l'idée d'une nouvelle économie qui prétend au
dépassement de la forme néoclassique traditionnelle. Il
préconise une économie généralisée dans un
monde où tout est, par définition, rare22(*). Dans cette étude, le
libéralisme permet d'expliquer lespolitiques de
dérèglementation des marchéset de libéralisation
économique au Cameroun entre 1989 et 2006.
7. La revue de la
littérature
Conscient que la
coopération entre Cameroun et le FMI ne constitue pas une terra
incognita, il serait doncprétentieux de vouloir recenser de
manière exhaustive la littérature sur le Cameroun et le FMI. Par
ailleurs,on peut retracer quelques grands courants parmi ceux qui sont plus ou
moins liés à notre recherche.
J.-J. Aerts et Als23(*), mènent une étude
macroéconomique sur l'économie camerounaise. Sa question
centrale est celle de savoirpourquoi la régression
économique mondiale a affecté le Cameroun au milieu de la
décennie 1980 ? Dans cet ouvrage, une analyse historique,
permettant de cerner avec aisance les fondements de l'économie
camerounaise post indépendance, les mécanismes à l'origine
de l'impasse, ainsi que des perspectives pouvant relever cette économie,
est faite.
Jean Ngandjeu24(*),traite des stratégies de développement
post indépendances camerounaises et du contexte de crise des
années 1980 lorsqu'il examine les facteurs de la crise et ses effets sur
le Cameroun.
Touna Mama25(*), dresse des diagnostiques des politiques de
dérèglementation des institutions de Bretton Woods, puis
conclurepar la suite que ces politiques n'ont pas permis d'atteindre les
résultats escomptés, dans la mesure où elles aboutissent
à l'aggravation de la crise et à la paupérisation
croissante de la population, alors que des politiques alternatives auraient
été plus adéquates.
Fanny Pigeaud26(*), pour sa part traite de façon superficielle
les causes de la crise, le contexte et les circonstances dans lequel le
Cameroun intègre les institutions de Bretton Wood.
Edy-Claude Okala27(*), analyse les changements économique et sociale
que les PAS ont causé dans la société camerounaise pendant
les 12 premières années de leur application, notammententre 1988
à 2000. Il met en exergue les problèmes qui minent la
société camerounaise à cette époque, notamment une
crise économique sévère, une crise politique, et une crise
morale.
Sous la direction de Georges Courade28(*), un ouvrage très
documenté et très sérieux donne une vision réaliste
et poignante de l'impact des politiques d'ajustement structurel dans les
campagnes camerounaises. Il faut regretter malheureusement que leur
étude se soit limitée au milieu rural.
Il a fallu la réalisation des travaux de
KengneFodouop29(*) sur les
petits métiers derue pour combler avec parcimonie le vide laissé
par les travaux de Courade et de son équipe. Ces travauxrapportentqu'une
bonne partie de la population a trouvé dans le secteur informel un mode
de survie face à la crise et autres mesures d'austérité en
ville. Ils donnent en ce sens une meilleure lisibilité de l'incidence
des politiques d'ajustement structurel sur les couchent urbaines.
Par ailleurs, lerapport du Senat comptant pour la session
2001-200230(*),traite des
origines dela criseéconomique au Cameroun en 1985. Dans ce rapport, il
est également noté que depuis les élections
de 1997, l'immobilisme des autorités en matière de
réformes s'est traduit par la pauvreté liée à
l'action du FMI, la recrudescence de l'insécurité et le
développement de la corruption au Cameroun.
Juliènne Carine Elembe31(*),dans son mémoire traite du problème de
l'intégration de l'économie camerounaise dans la mondialisation.
Après le début de la fluctuation économique en 1985, le
Cameroun a dû adopter les programmes d'ajustement du FMI en 1988,ce qui a
permis aux autorités d'arborer une vision prospective de
développement et l'élaboration du DSCE'' devant stimuler la
croissance économique et l'insertion régionale et internationale
du pays.
Samuel Fambon32(*), dans son article, «Endettement du
Cameroun : problèmes et solutions'' fait une analyse sur la
situation d'endettement interne et externe du Cameroun, sans oublier les
perspectives de solution.
Yolande NjikeNyatchou33(*) pour sa part traite de l'évolution de la dette
extérieure du Cameroun entre 1960 et 2006.Selon elle n'a cessé
d'augmenter, passant d'environ 302,7 milliards de franc CFA en 1981 à
4934 milliards en 2000 après la mise en application des programmes du
FMI. Mais grâce l'initiative PPTE et l'Initiative d'Allègement de
la Dette Multilatérale, elle est réduite à hauteur de 1095
milliards en 2006.
Au vu de ce qui précède, force est de constater
qu'une littérature exhaustiveest déjà produite sur la
question, mais les avis des auteurs semblent limites à une analyse
idéologique précis à leur domaine. On peut alors se
demander si nous arriverons aux mêmes conclusions lorsque nous
problématisons la coopération entre le Cameroun et le FMI du
point de vue des journaux ?
8. Problématique
Après de fortes
réticences des instances politiques camerounaises à recourir aux
crédits conditionnels du FMI en 1987, dont la contrepartie signifie un
désengagement de l'État des secteurs clés de
l'économie, c'est finalement en septembre 1988 que le Cameroun signele
premier accord «stand-by'' avec le Fonds, soit 3 ans après le
début de la dégradation de la balance des paiements et des
finances publiques. Confirmés par le décaissement du 15 novembre
1988, les programmes approuvés par le gouvernement camerounais à
Washington avaient pour mission de stabiliser l'économie camerounaise.
Maisface à l'exubérance des déséquilibres
macroéconomiques, le Cameroun prolonge l'utilisation des ressources du
FMI jusqu'à l'adoption et l'achèvement de l'Initiative Pays
Pauvre Très Endetté (IPPTE) en avril 2006.Acculé par le
processus de libéralisation et de démocratisation sur la
décennie 1990,la question qui se pose ici est celle de savoir quelle a
été l'influence et l'opinion des journaux sur l'évolution
de la coopération Cameroun-FMI entre 1988 et 2006 ?De cette
problématique naissent les hypothèses de recherche ci-dessous.
9. Hypothèses de
recherche
Selon G. Mace et F. Petry, l'hypothèse se
présente comme une réponse anticipée à la question
spécifique de la recherche, un résultat à la formulation
du problème et le point de départ de toute
vérification34(*).
Dès lors, trois hypothèses sont formulées pour donner une
orientation à ce travail de recherche :
- Le Cameroun recourtà l'assistancedu FMI en 1988 sous
la pression des journaux, afin de stabiliser son déséquilibre
micro et macroéconomique ;
- La recrudescence de la crise entraine l'utilisation
prolongée des ressources du FMI jusqu'en 2006 ;
- Les politiques de dérèglementations du Fonds
permettent à l'État camerounais de stabiliser son économie
et de renouer avec la croissance.
10. Objectifs de la
recherche
Ce travail de recherche a un
objectif principal et quatre objectifs subsidiaires. L'objectif principal
consiste à évaluer les rapports de la coopération
Cameroun-FMI entre 1988 et 2006, du point de vue des journaux.Concernant les
objectifs subsidiaires, il s'agit dedonner les raisons qui
amènentle Cameroun à recourir au FMI en 1988,de
présenter la coopération effective entre les deux parties, de
faire un bilan des étapes franchies par le Cameroun,18 ans après,
et enfin de s'interroger sur l'avenir de cette collaboration après
l'atteinte du point d'achèvement de l'initiative PPTE.
11. Cadre
méthodologique
Dans tout travail de recherche, la
méthodologie renvoie à deux considérations majeures :
d'une part les techniques par lesquels les données sont
collectées, et d'autre part les méthodes par lesquelles lesdites
données sont analysées.
Concernant les sources, la collecte des données s'est
faite dans plusieurs centres de documentation où nous avons
exploité des Encyclopédies, des articles de journaux relatifs au
domaine d'étude, des ouvrages méthodologiques, des
mémoires, des thèses et des ouvrages en phase avec notre
thème. Il s'agit : des bibliothèques universitaires de
Yaoundé (Université de Yaoundé 1, Université de
Yaoundé 2 (SOA), et l'Institut des Relations Internationales du Cameroun
(IRIC)),des archives nationales de Yaoundé (ANY), des maisons
d'édition de journaux (Cameroontribune, Mutations), et les
bibliothèques privées tels que l'Institut français du
Cameroun (IFC) et bien d'autres.
À côté de cela, nous avons
procédéaux interrogations dans le but de recueillir des
informations auprès despersonnes sources. Il s'agit notamment des
professeurs, des personnels administratifs, de la société civile
et des journalistes. La procédure s'est faite par interrogations ou
procuration des questionnaires à récupérer plus tard.
Également, les données et informations obtenues grâce
à internet dans certains sites sérieux comme la fondation
Friedrich Ebert-Cameroun ou d'autres instituts de recherche à l'instar
du centre d'études et de recherches internationales (CERI) dont nous
avons pu consulter les travaux en ligne ont également contribué
à étayer notre argumentaire, à côté de la
revue Politique africaine portant sur le Cameroun.
Étant donné que cette étude
s'intéresse particulièrementà l'opinion des journaux,
l'apport de la presse aussi bien officielle que privée a
été une source d'information appréciable dans le cadre de
la réalisation de ce travail. Cameroon Tribune, le
Messager, Jeune Afrique, Mutations,etLe Monde
ont permis d'aborder la question de la coopération Cameroun-FMI
au-delà des données statistiques ne reflétant toujours pas
la réalité sociale des populations. Grâce à ces
journaux, l'analyse va au contact des faits sociaux afin de faire ressortir le
déphasage qui existe entre données économique
chiffrées et réalité sociale.
Pour mener à bien ce travail et surtout répondre
aux questions relatives à la problématique, la
méthodologie qui sied le mieux à notre étude est le
raisonnement inductivo-déductive, qui s'illustre comme une technique
adéquate préconisant plusieurs étapes. Notamment les
enquêtes, la soumission des hypothèses, l'interprétation et
l'analyse correspondent à ce que Jean de Bonville appelle
«l'analyse et l'interprétation des données''35(*).
L'analyse inductive se définit comme un ensemble de
procédures systémiques permettant de traiter des données
qualitatives. Elle permet de réduire les données brutes pour en
arriver à extraire le sens derrière ces données36(*). Pour François
Guillemette, elle est fondamentalement une ouverture à l'inédit,
une attention à ce qui peut être découvert à partir
du vécu37(*).
Raison pour laquelle elle s'intéresse aux expériences
subjectives, recueille des données auprès des témoins
privilégiés sélectionnés minutieusement pour la
recherche en tenant compte des contextes variés dans lesquels se
déploient ces expériences, comme le souligne Jennifer
Denis38(*).
Dans ce travail, elle permet de s'immerger dans le
phénomène pour en faire émerger les données et les
compréhensions pertinentes. Cette manière d'aborder un
phénomène permet de se poser des questions tant d'un point de vue
épistémologique que d'un point de vue méthodologique. Et
à partir de l'observation des situations empiriques où se
trouvent les phénomènes, elle rend compte de manière
approfondie des phénomènes processuels ou subjectifs tout aussi
complexes les uns que les autres.
La méthode déductive ou
hypothético-déductive est une méthode d'enracinement de
l'analyse dans les données de terrain39(*). Aussi appelée «déduction
logique'' ou «approche hypothético-déductive'', elle
consiste à formuler une hypothèse afin d'en déduire des
conséquences observables futures, mais également passées
afin de déterminer la validité40(*). C'est un processus qui permet de conclure une
affirmation à partir d'hypothèses, de prémisses ou d'un
cadre théorique. Elle est utilisée dans ce travail pour son
utilité à tester plusieurs hypothèses, développer
le sens critique, et de faire émerger de nouveaux éléments
susceptibles d'approfondir le sujet. Ainsi, la confirmation ou la non
confirmation des hypothèses de travail permettraitdonc de trouver une
explication au sujet étudié41(*).
12. Les difficultés
La finalisation de ce travail n'a
pas été sinécure.Les difficultés rencontrées
sont inhérentes à la collecte de l'information, compte tenu de la
confidentialité de certaines sources. À plusieurs reprises, nous
avons failli céder au découragement, car il s'est posé le
problème d'accès dans certains centres de recherche pourtant
essentiels pour la collecte de sources primaires. L'absence de moyens
financiers considérables a contribué non seulement à
ralentir notre travail, mais aussi à le rendre plus difficile à
élaborer. Par ailleurs, malgré les entraves propres à la
recherche scientifique, c'est avec un soulagement certain que le plan
ci-dessous a été adopté.
13. Plan de
travail
Le travail s'articulé
autour de quatre grands chapitres.Le premier chapitre, intitulé
«face aux défis de l'heure, le Cameroun recourt au FMI'', traite
des étapes de la lente récession de l'économie
jusqu'à l'intervention du FMI. Le second chapitre
intitulé,«vers une coopération effective entre le Cameroun
et le FMI'', traite des crédits conditionnelsdu FMI et de leur mise en
application concrète au Cameroun. Le troisième
chapitre traite des performances socio-politiques et économiques
des PAS, 18 ans après.Enfin, le chapitre quatre
intitulé «quel avenir pour les relations entre le Cameroun et
le FMI'', s'interroge sur la légitimité de ces relations tout en
insistant sur des recommandations de développement pour le Cameroun.
CHAPITRE I : FACE AUX DEFIS DE
L'HEURE, LE CAMEROUN RECOURT AU FMI
Après le vent des indépendances de 1960, le
continent africain est resté confronté à des
difficultés socio-politiques et économiques dans la
majorité des États. Mais à un moment donné, on a
l'impression que le Camerounsemblé s'en sortir.Plusieurs instances
internationales appréciaient l'évolution du pays. En septembre
1982, lors de la conférence des bailleurs de fonds des pays de
l'Occident à Toronto par exemple, un Brevet du pays africain le plus
dynamique est même attribué à cet État42(*). Mais au cours de l'exercice
budgétaire 1985/86, soit 2 ans plus tard, pourquoi l'économie
camerounaise s'effondre-t-elle, atteignant la catégorie de mauvais
élève classés par la Banque mondiale ?
I. UNE ECONOMIE ENTRE
RESILIENCE ET CONTROVERSE
Pendant que les économies africaines font face à
de rudes épreuves entre 1960 et 1980, celle du Cameroun semble en mesure
d'éviter la crise grâce à l'abondance des richesses du sol,
du sous-sol et du pragmatisme des dirigeants.Sous le choix du
libéralisme planifié, l'administration met progressivement en
place une parfaite ossature économique axée sur
l'agriculturedès 1961. Ce qui permetau Cameroun de maintenirsa
croissance économiqueà un taux moyen de 4% entre 1960 et
197643(*).
Mais en 1977 la découverte et l'exploitation des
gisements pétroliersdeKolé, Bavo, Bao Bakassi, Barombi, Inoua,
Ekoundou Sud et Nord, Asoma et Kombo Nord,font du
Cameroununeldoradopétrolier comme ses voisins le Gabon et le
Nigéria avec des réserves estimées à plus de 200
millions de barils en 198444(*).C'est ainsi que le pétrole devient
l'élément essentiel de l'économie et des devises de
l'État.Et après la substitution du libéralisme
planifié au développement autocentréexprimé,le PIB
du Cameroun serelèveà un taux moyen de 8% par an entre 1980 et
198445(*).
Par ailleurs, l'effondrement de l'activité
économique aux Etats-Unis fait surgir un durcissement de la politique
commerciale mondiale, soit un renforcement du protectionnisme dans les pays
capitalistes. Aux traditionnels droits de douanes portés à des
prix records s'ajoutent la hausse des taux d'intérêt, la
dévaluation volontaire du dollar américain à Plazza, la
réinstauration des taxes, des quotas, des normes sanitaires et d'autres
roueries administratives46(*). Ce qui a favorisé le repli des
économies sur elles-mêmes, laissant place à des
répercussions qui crée un contexte d'incertitude dans
l'économie camerounaise. Il s'agit notamment de la chute du cours des
hydrocarbures, de la contraction des pris de produits pérennes et dela
détérioration des termes de l'échange. Et selon
Cameroon tribune, un déséquilibre budgétaire se
créedonc dans cet État,changeantainsi le bel avenir du pays en un
sentiment de doute profond quia conforté les tenants
de l'afro-pessimisme47(*).
1.
L'économiecamerounaise : une brillante exception en
Afrique ?
C'est connu on le sait,après
l'indépendance,l'économie camerounaise comme dans la plupart des
pays du Sudest totalement dépendante de l'agriculture primitive. Mais
contrairement au Sénégal qui vit presque exclusivement de
l'arachide, ou du Gabon qui exporte exclusivement les bois tropicaux, le
Cameroun dispose de ressources très diversifiées, notamment le
cacao, le café, le coton, les produits du palmier à huile,la
banane, le mil, les ignames, l'arachide et le maïs48(*). Étant bien doté
sur le plan agricole, le président Ahidjo faitle choix du
libéralisme planifié dans le butde faire du Cameroun le grenier
de l'Afrique centrale,d'où la mise en place progressived'une parfaite
ossature économiqueentre 1960 et 1985. En effet, les résultats de
ce dur labeur n'ont pas tardé à combler les Camerounais et la
plupart des bailleurs de Fonds qui le rangent dans la liste de pays sûrs
du continent africain49(*).
1.1. Une parfaite synergie
entreabondance des ressources nationales et pragmatisme des
dirigeants
Au moment où tout semble mal parti pour les
économies du continent africain après les indépendances,
exactement comme le prédisait l'Agronome français René
Dumont, le Cameroun par contre marque des points. Le pays va connaitre une
phase de prospérité forte et rapide grâce aux initiatives
audacieuses de réforme entreprises par les autorités dans
lessecteurs agricoles, infrastructurel, commerciaux,et des hydrocarburesdans
l'optique de renforcer le potentiel économique et social du
pays50(*).
Sur le plan agricole,le gouvernement renforce
l'exécution des plans FIDES (Fonds d'Investissement pour le
Développement Économique et Social des territoires d'Outre-mer)
initié par la France coloniale en 1945 et 1953,
généralement connu sous la nomination de plans quinquennaux en
196051(*). Les principaux
objectifs visés étaient d'améliorer l'agriculture
extensive et de doubler le revenu national par tête entre 1960 et 1980.
Cela est confirmé par ces proposdu président Ahmadou Ahidjo
rapporté par Le Monde Diplomatique : «l'objectif
primordial a toujours été de consolider la nation camerounaise et
de promouvoir son développement généralisé,
concourant à l'épanouissement de l'homme camerounais''52(*). Ce qui explique doncla
mobilisation et l'orientation des capitaux de l'Étatdanslessecteurs de
l'agricultureet de l'infrastructure durant cette période.
Par ailleurs,du moment où les objectifs du
1er et 2ème plan ont été
partiellement atteints en 1971, le chef d'État décide de donner
du tonus à l'économie camerounaiseenlançant la
«révolution verte'' en mars 1973et en multipliant la
créationdes agro-industries dans le pays afin de développer une
agriculture extensive durant l'exécution de troisième
plan53(*). Et
dès 1974, la «révolution verte''devient le ferde lance de la
politique du gouvernement dans sa quête d'accroitre la production rurale
et animale,d'améliorerles revenus et les conditions de vie du paysan, et
de favoriser une participation plus active du paysan à l'effort national
du développement.
Dans le secteur agro-industriel, la Société de
Développement de l'Hévéa du Cameroun (HEVECAM)
démarre un projet de 15.000 hectares d'hévéa à
Kribi, la Société Sucrière du Cameroun (SOSUCAM) se fixe
un objectif de croisière d'une production de 100.000 tonnes de sucre par
an, la Cameroon Sugar Company (CASUCO) nait avec un objectif de
production de 2500 tonnes par an, tandis que la Société
Camerounaise de Tabac (SCT) décide d'encadrer efficacement 10.000
producteurs de tabac de cape dans la province de l'Est, selon les archives du
journal français Le Monde54(*).
Le 5 novembre 1974,le Cameroun signe avec la Belgique un
arrangement particulier relatif à l'application des sciences
nucléaires à l'agriculture à Yaoundé.Puis, suite
à une initiative conjointe entre le gouvernement camerounais et l'Agence
Internationale de l'Energie Atomique (AIEA), un laboratoire des radioisotopes
à l'agriculture est créé au sein de l'École
Nationale Supérieure Agronomique (ENSA) la même année.
Subventionné par le PNUD et aidé techniquement par l'agence
d'exécution de l'AIEA, ce projet apporte une aide complémentaire
pour la construction d'une serre annexe et pour l'extension de la fourniture
d'équipement scientifique et logistique afin de promouvoir
l'enseignement et la recherche universitaire dans le domaine du
développement agronomique au Cameroun55(*).
Concernant particulièrement
la culture du cacao au Cameroun, Cameroon
tribunerapporteégalementque dans le cadre du troisième plan
quinquennal, trois objectifs sont définis, notamment la mise en valeur
des terres, la modernisation de l'agriculture et une rentrée des
devises. Pour ce faire, le projet de production de 150 milles tonnes de cacao
soutenu par le STABEX est conçu, bénéficiant du soutien de
l'AFP qui octroie un prêt de 98,5 millions de FCFA à la Caisse
Centrale de Coopération Économiquedu Cameroun56(*). En 1976, l'Organisation
National de Commercialisation de Produit Brut (ONCPB) est ouverte pour
contrôler les opérations commerciales et assurer une
défense efficace des producteurs en soutenant les cours. En d'autres
termes, c'est elle qui assume une partie des frais d'évacuation du
produit des plantations jusqu'au port d'embarquement57(*).
Dans leSud du pays, de nouvelles plantations sont
créées, à l'instar des palmeraies villageoises autour des
plantations de la SOCAPALM. Il s'agit d'une initiative qui démarre au
cours de la campagne 1977-1978 et quiimplique un personnel formé et
spécialisé dans les techniques modernes de culture du palmier
à huile sélectionné58(*). Dans le Nord, l'évolution en dent de scie de
la production cotonnière durantl'exercice 1968/1969 amène la
SODECOTON à porter les superficies cultivées à 55 milles
hectares, auxquels s'ajouteront quelques milliers d'hectares de culture
traditionnelles. Le gouvernement subventionne cette culture d'une enveloppe de
3 milliards de FCFApour l'ensemencement et les protections. À
côté de cela s'ajoutent également l'introduction et la
distribution de variétés sélectionnées à
cycle court adaptées aux conditions climatiques de la province du Nord,
répondant aux exigences de l'évolution de la technologie59(*).
Selon Cameroon tribune, plusieurs banques agricoles
et commerciales s'installent au Cameroun dans le but oeuvrer pour
l'éclosion des Petits et Moyens Entreprises (PME).L'instruction
gouvernementale exige qu'elles consacrant un certain pourcentage de leurs
dépôts à long terme aux PME60(*).Le 22 février 1979, le vice-ministre des
finances camerounais, Hamadou Moustapha et M. Chawki Keidoudi,
Vice-Président de la banque africaine de développement (BAD)
signent à Abidjan, un accord de garantie dans lequel la BAD accorde un
prêt de 5 millions d'Unité de Compte (UC), soit 1.4288 milliards
de FCFA sous forme de linge de crédit à la Banque Camerounaise de
Développement (BCD) afin de financer le coût en devise des PME
pour lesquelles le gouvernement accorde une grande importance pour asseoir son
indépendance économique61(*).
En dehors des structures qui existaient déjà
telles que le Centre d'Assistance aux Petits et Moyen Entreprises (CAPME)
chargé des études de factibilités, le FONADER
chargé des prêts au monde rural et la Banque Camerounaise de
Développement (BCD) qui octroie des prêts aux PME ; le Fonds
de Garantie aux Petits et Moyen Entreprises (FOGAPE) se voit attribuer de
nouveau rôle. Par le décret présidentiel du 13 juin 1984,
il devientune nouvelle structure habilitée à prendre des
participations dans le capital social des PME ; à accorder des
prêts directs pour le financement, le renouvellement et l'acquisition des
immobilisations ;et à apporterune assistance technique en
matière de formation, d'information, de conseil et de tenue de
comptabilité62(*).
Le secteur de l'agriculture de subsistance
bénéficie de la Mission de Développement des cultures
vivrières (MIDEVIV) qui est une société publique dont la
mission est d'assurer les fonctions de commercialisation et d'assistance
à la production des cultures vivrières. Elle assure
également l'approvisionnement des planteurs en semences
améliorés.C'est dans le cadre de cette mission quele plan
national semencier est élaboré avec le concours de la FAO en
198063(*). Le dispositif
de la MIDEVIV devait également permettre d'assurer le transport des
produits vers les zones urbaines aux fins de commercialisation dans des centres
créés en centralisant l'offre et en veillant à la
qualité des produits proposés sur le marché de la
consommation64(*).
Dans le secteur infrastructurel,Cameroon tribune
rapporte la bataille énergétique engagé par le
gouvernement pour améliorerles infrastructures aériennes,
routières, ferroviaires et maritimes. Concernant le transport
aérien, les autorités gouvernantes décidentde rompre
avecAir Afrique, dont le Cameroun est le plus grand contribuable,dans le but de
créersa propre compagnie aérienne «laCameroon Airlines
corporation (Camair-co)''. Une initiative qui devient effective en 1974,
lorsqu'un avion avec un équipage 100% camerounais décolle de
l'aéroport de Yaoundé65(*).
Concernant les infrastructures maritimes et ferroviaires,le
3e plan quinquennal arrête deux grands projets,
dontl'aménagement du port de Douala et la rectification du chemin de fer
entre Douala et Yaoundé. Le 10 août 1977, le Ministre des
transports, M. John NkengongMonie, signe avec la Caisse Centrale de
Coopération Économique (CCCE) une convention de 1,5 milliards de
FCFA, associant investissement public et privé,pour les travaux
d'extension du port de Douala et de la rectification de certains
tronçons, selon Cameroon tribune66(*).La première phase des
travaux est caractérisée par la construction des postes de quais
et des ateliers de réparation navale dans le secteur maritime et de la
rectification du tronçon
Yaoundé-Otélé.Acculé par l'insuffisance
d'investissement, le projet s'appuieégalement sur les concours d'autres
bailleurs financiers tels quela République Fédérale
d'Allemagne et le Canada67(*).
Pour ce qui est des infrastructures routières,une
politique visant à maintenir en bon état le réseau
existant, à améliorer, et à étendre le
réseau bitumé est adoptée.Pour ce faire, un budget de 6.5
milliards de FCFA est accordé au ministère des transports en 1979
pendant la commission interministérielle de l'exercice budgétaire
1979/8068(*).En effet, ce
budget devaitpermettre de désenclaver la plupart des zones rurales par
la construction et l'entretien des pistes de production,la construction et
l'entretien des routes reliant chacune des provinces du pays à la
capitale, etd'embellir les routes de centres urbains69(*).
Sur le terrain, les résultats ne tardent pas à
combler les Camerounais qui voientle pays devenir un immense chantier
d'innovation. Dans le sud du Cameroun par exemple, les projets de construction
du pont sur la rivière Mborro etde la réfection de la route
à Ambam sont lancés, tout comme le projet BAC deNgoazik70(*).En 1980 le pays apparait dans
une situation plus solide du point de vue infrastructurel par rapport aux
quinze années précédentes.Sur l'étendue du
territoire national, plusieurs tronçons rail-route sont en cours de
réalisation, notamment les tronçons
Ngaoundéré-Garoua, Mora-Maroua, Douala-Tiko, Bafoussam-Bamenda,
Kumba-Memfé, Lobé-Ndian ou encore Melong-Dschang71(*).
Concernant les échanges commerciaux, le
Président Ahidjo décide derenforcer le contrôle des prix
etdes taxesd'un grand nombre de produits importés afin de rendre leur
prix abordable sur le marché local en 197472(*).Ce qui permetau pays de se
substituer de la «Stratégie d'Industrialisation par Substitution
aux Importations'' (SISI) adoptée depuis 1960, comme la plupart des pays
en voie de développement, au profit de la «promotion des
exportations'' (PE)73(*). En effet, contrairement à la SISI qui visait
à satisfaire la consommation locale par la production domestique, la
politique de PE introduite dès 1970 vaà la conquête des
marchés étrangers. Cette volonté exprimée dans le
3ème plan quinquennalsouhaiteaugmenter la production et
l'exportation des cultures pérennes, des produits manufacturés,
et du pétrole, d'où la multiplication des agro-industries,des
PME, et les petites et moyennes industries (PMI)74(*).
Dans le secteur des hydrocarbures,l'exploitation des gisements
est attribuée aux compagnies française (ELF-Serapca) et
Etats-Uniennes (Pecten, du groupe Shell) en 197775(*). Puis la Société
Nationale des Hydrocarbures (SNH) et la Caisse de Stabilisation des prix des
hydrocarbures sont crééesen 1980 dans l'optique de gérer
les intérêtscamerounais dans ce secteur.Ce qui va permettre au
Cameroun de connaitre uneprospérité économique forteet
rapide entre 1980 et 1985 avec des réserves pétrolières
estimées à plus de 200 millions de barils, selon Cameroon
tribune76(*). Le taux
de croissance triple pratiquement,passant d'environ4,5% en 1980 à
environ 13% en 1985 au moment où l'or noir devient le moteur de
l'économie camerounaise avec une participation aux recettes de plus de
60% sous le choix délibéré du développement
autocentré77(*).
Au-delà de tout ce qui précède, il est
également judicieux d'évoquerles efforts d'améliorationdu
fonctionnement de l'administration par les chefs d'États Ahidjo et
Biya.Pour rendre plus apte l'administration à affronter les tâches
de développement qui sont chaque jour plus complexes, un Comité
Technique d'Étude des Problèmes Administratifs (CTEPA) est mis
sur pied, et les missions qui lui sont assignées sont :examiner le
fonctionnement de tous les services publics tant au niveau central que
provincial, et proposer des réformes très pertinentes78(*). Cela explique donc les belles
performances de l'économie camerounaise sur la décennie
1975-1985.
1.2. Un bilan positif et
riche de promesse
Sur la décennie1975-1985, le Cameroun s'est
forgé une notoriété louable, soit celui d'un État
qui respecte et honore ses engagements. Grâce àses énormes
progrès socio-politique et économique, un «Brevet du pays
africain qui se porte le mieux'' est même attribué à cet
État en 1982, lors de la conférence des bailleurs de fonds des
pays de l'occident à Toronto, d'où le miracle
Camerounais79(*).SelonCameroon tribune, le Cameroun a eu
le mérite de recevoir ce prix à cause de sa performance
presqu'unique en Afrique sur le plan socio-politique et économique avec
un taux de croissance moyende8%, une balance de paiements
équilibrées, un endettement modéré et un service de
ladette raisonnable80(*).
Sur le plan social, le gouvernement camerounais fait
d'énormes progrèspour améliorerle niveau de vie de la
population.Les indicateurs mesurant plus largement le bien-être,notamment
l'espérance de vie et l'instruction s'améliorent nettement. En
effet, cela est le fruit de la construction et de l'amélioration des
hôpitaux et des écoles par le gouvernement, mais également
de la création des agro-industries telles que la SODECOTON, la SODECAO
et de l'instauration de l'ONCPB en 1976 qui favorisentl'augmentation du
revenudes planteurs, ce qui a permis aux parents de mieux soigner et scolariser
leurs enfants81(*). Le 2
novembre 1979, un décret portant augmentation du prix d'achat du
kilogramme du coton est signé par le président Ahidjo, au moment
où les cours mondiaux sont au plus bas, traduisant ainsi la
volonté du gouvernement d'encourager les paysans pour leur dur
labeur82(*).
Selon les données recueillies dans le quotidien
nationalCameroon tribune, la SOCAPALM distribue des primes non
remboursables, provenant d'une subvention que le gouvernement décide
d'allouer au projet «palmeraies villageoise'', aux planteurs en 1979.Pour
chaque hectare planté, le planteur reçoit gratuitement durant la
première année 6 milles FCFA pour le défrichement et
engrainage terminés, 4 milles FCFA pour piquetage et roulaison
terminés, 8 milles FCFA pour semis de couverture et deux entretiens. Et
pendant la deuxième année, 8 milles FCFA pour le premier et
deuxième entretien du champ, soit 4 milles FCFA par tour. Durant la
troisième année, les tarifs sont de 6 milles FCFA pour le premier
et deuxième entretien, soit 3 milles FCFA par tour83(*).Ce qui fait en sortequ'au
terme de la quatrième année, le planteur aurait reçu
gratuitement des primes d'encouragement pour un montant de 41 milles FCFA pour
ce cas de figure.
Dans le même sens, une somme de 6,936 millionsde prime
est distribuée à 149 planteursdans le département de la
Manoua pour l'arrachage et la replantation des cacaoyères et
caféiers84(*).Ce
qui a favorisé la hausse du PIB par habitantdes Camerounais qui passe de
160 dollars américains en 1961 à 980 dollars en 1986après
la valorisation des prix des produits de base d'exportation85(*).
Dans le secteur de la santé, un budget de 9 milliards
389.655 millions est alloué au ministère de la santé
publique durant l'exercice budgétaire de 1977/78 dans le but de vaincre
l'insuffisance quantitative et l'acheminement anarchique des produits
pharmaceutiques dans les hôpitaux et dans l'arrière-pays86(*). Ce qui a permis la
construction d'hôpitaux et descentres de santé dans plusieurs
provinces du Cameroun, soit au moins un par département, selon les
informations fournies parCameroon tribune87(*).Dans le Suddu Cameroun par
exemple, l'hôpital départemental d'Ebolowa, le centre
élémentaire de Tchangue, et le centre développé de
Ma'ansont construits.Celaafavorisé le recul du taux de mortalité
etla hausse de l'espérance de vie qui passe de de 39,4 ans à 45,9
ans chez les hommes et de 42,6 ans à 49,2 chez les femmes88(*).
Dans le secteur éducatif, la construction de nouvelles
infrastructures scolaires sur l'étendu national, à l'instar du
lycée mixte d'Ebolowa, du collège d'enseignement secondaire et lu
collège d'enseignement général d'Ambam dans le Sud
Cameroun par exemple ; l'achèvement du centre universitaire de Buea
à l'Ouest ; et l'extension de la faculté des sciences et la
cité universitaire de l'université de Yaoundé au centre,
aboutissent à :
- la moralisation de l'éducation qui s'est
concrétisée par une présence marquée des
enseignants à leurs postes de travail, et par une plus grande prise de
conscience de la noblesse de leur mission ;
- l'établissement d'une carte scolaire adaptée
aux conditions démographiques ;
- rapprocher les écoles des
élèves ;
- l'institution dans l'enseignement technique d'un
comité d'étude sur le développement de cet ordre
d'enseignement ;
- l'opérationnalisation de la décentralisation
universitaire ;
- l'adoption progressive des programmes scolaires
adaptés aux réalités nationales89(*).
Une véritable révolution s'est
opérée dans le système éducatif camerounais.
Dans le secteur administratif, des augmentations de salaires
sont faites afin d'améliorer le niveau de vie des Camerounais. Elles se
font d'un pourcentage de 8% à 10% selon les catégories dans le
secteur public, et de 12% pour les travailleurs de 1er zone, 14%
pour les travailleurs de 2e zones, et de 15% pour le travailleur 3e
zone dans le secteur privé, selon Cameroon tribune90(*). Pendant ce temps, les
domestiques et les employés de maison voient leur revenu augmenter de
10% pour les catégories 1 à 4, et de 8% pour les
catégories 5 à 891(*). En effet, ces conditions mélioratives
témoignent de la sollicitude particulière du gouvernement
à l'égard des Camerounais pour un partage équitable entre
différentes catégories d'agents économiques.
Sur le planpolitique,le dynamisme des dirigeants les
amène à pratiquer une diplomatie active et offensivesur fond de
non-alignement pour trouver des solutions aux problèmes mondiaux de
l'heure, notamment le déficit budgétaire, le problème
d'investissement et de l'endettement, rapporte Cameroon
tribune92(*). En
effet, la diversification despartenairespermet à cet Étatde se
distinguer en Afrique par ses relations diplomatiques que par les accords de
coopération qu'il établit avec les pays étrangers tant de
l'Ouest que de l'Est.Notamment avec l'Irak, le Gabon, etc. Seul en juin 1979
par exemple, l'Ambassadeur gabonais S.E. Hubert Okouma, et
l'Ambassadeurirakien, S.E. Abdul Karim Mohammed Najimsont
accrédités au Yaoundé93(*).
Cela se perpétuesur le règne du second chef
d'État Paul Biya, carlorsqu'il accède à la magistrature
suprêmele 6 novembre 1982, il recommande également une diplomatie
de participation active et positive. Ce qui explique donc le passage
régulierdes émissaires étrangers au Palais de
l'unité de Yaoundé recueillir l'avis du président ou
l'informer sur un quelconque problème donné94(*). En janvier 1985 par exemple,
plusieurs délégations étrangères foulent le sol
camerounais pour des problèmes d'intérêt mutuel. Il s'agit
de la délégation du congrès américain, sous le
patronage d'Howard E. Wolpe qui, devant assister à une conférence
à l'institut afro-américaine à Libreville, décide
de séjourner à Douala dans le but de discuter avec les
autorités nationales des problèmes d'intérêts
mutuel ; des Ministres ivoiriens ; et du ministre de la culture, de
la jeunesse et des sports de la Mauritanie M. Ba Mahmoud et sa
délégation, qui étaient tous porteurs d'un message de la
part de leur président, selon Cameroon tribune95(*).
À cette liste exhaustive s'ajoute la visite du
Président Equato-guinéenTheodoro Obiang NguemaMbazogo, qui arrive
au Cameroun pour remercier le Chef d'État de son appui moral et
économique pour l'adhésion de la Guinée à
l'UDEAC96(*). Par
ailleurs, ce rayonnement si puissant de l'État camerounais amène
certains médias internationaux afro-pessimistes, à l'instar de
Jeune Afrique et Le Mondediplomatiqueà braquer
irrésistiblement leurs projecteurs sur le Cameroun97(*).
Sur le terrain, cette diplomatie offensive pratiquée
par les chefs d'État permet au Cameroun d'être une terre d'accueil
pour les investissements étrangers essentiels à la
réalisation d'une infrastructure solide. Durant la réalisation du
chemin de fer Trans-camerounais destronçons
Yaoundé-Ngaoundéré, Yaoundé-Maloumé,
Douala-Edéa et l'extension du port autonome de Douala par exemple, le
Cameroun bénéficie des concours financiers de la France, de la
Communauté ÉconomiqueEuropéenne (CEE), des USA, de la
République Fédérale d'Allemagne, du Canada de la BM, de la
BAD et de la Banque Arabe pour le développement Économique de
l'Afrique (BADEA)98(*).
Dans le secteur de l'énergie, les travaux
d'aménagement des barrageshydroélectrique de Sonloulouet de Lagdo
sont menés grâce aux aides de l'Arabie Saoudite, la BADEA, la
Banque Islamique de Développement (BID), l'Organisation des Pays
Producteurs de Pétrole (OPPP), la Chine, du Koweït,duQatar ainsi
que de la France et la CEE par le biais de la Banque Européenne
d'Investissement (BEI)99(*).Cameroon tribune rapporte également
l'assistance del'Union Soviétique dans la construction de deux
écoles de formation des techniciens d'agriculture des eaux et
forêts au Cameroun.
Au-delà de ce qui précède,la politique
intérieure permetde raffermir l'unité nationale etde
réorganiserles grands services de l'Étatet des ministères
telsque le Ministère du Commerce et de l'Industrie (MINCI), le
Ministère de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche
scientifique, le Ministère de l'Information et du Marché public.
Ce qui a favorisé la réalisation de grands projets dans
l'agriculture, l'infrastructure, le commerce et une gestion
contrôlée de l'endettement.En 1979 par exemple, les
réformes entreprises dans le secteur agricole permettent une production
record de 95 milles tonnes de café contre 81 milles en 1977 etune
production cotonnière dépassant les 60 milles tonnes contre 41
milles en 1978, selonCameroon tribune100(*).
Ces bonnes performances place le Cameroun quatrième
producteur mondial de cacao derrière la Côte d'Ivoire en 1980.
Selon Etienne Ntsama, alors ministre camerounais des Finances, « le
Cameroun est un pays assez favorable'' disait-il lors de la deuxième
réunion des gouverneurs des banques centrales de la zone franc tenue
à Yaoundé en 1985101(*). Carpendantque de nombreux pays sont
confrontés à de sérieux problèmes alimentaires et
où la famine tend à devenir endémique, le Cameroun peut
s'enorgueillir d'avoir atteint une relative autosuffisance alimentaire
grâce à son tableau économique et financier, dont le comice
agro-pastoral de Bamenda de 1984 fait référence.
En effet, le Comice agro-pastoral de Bamenda qui se tientdu 13
au 15 décembre 1984 est, selon les journaux, le plus grand
évènement de la vie économique du pays depuis
l'indépendance. Ila donné l'occasion aux nombreux visiteurs,
hôtes de marque et observateurs présents d'apprécier de
manière objective la vitalité et le dynamisme de
l'économie camerounaise à travers les produits
exposés102(*). Le
premier à l'ère du Renouveau,ce comice tient toutes ses
promesses, aussi bien au niveau de la participation quede la quantité et
de la qualitédes produits grâce au dynamisme des Camerounais et au
pragmatisme des dirigeants.Hormisles représentants traditionnels du
monde rural, on y voit également la présence de grandes
sociétés, de banques, des maisons de commerce et de certains pays
amis et partenaires étrangers, tels que les USA, le Canada, les
Pays-Bas, la Grande-Bretagne et même le Nigéria à cet
évènement103(*).
Au-delà de cette représentation homogène
des États des quatre coins du monde, l'autre trait notoire du comice de
Bamenda est l'importance accordée aux réalisations techniques
agricoles et au développement communautaire à travers les essais
et démonstrations présentées au chef de l'État et
à sa suite. Il s'agit notammentd'une pépinière de 350000
plants des différentes cultures et essences forestières
camerounaises, d'un exemple de village modèle, d'un essai de labour
attelé, d'une démonstration de la production du biogaz et de ses
différentes applications, etd'une association entre la pisciculture et
l'élevage104(*).Grosso modo, ce comicea étéun
véritable baromètre d'une économie en bonne santé,
garante de l'autosuffisance alimentaire et de progrès substantiels dans
tous les secteurs d'activités de la nation.
Concernant le secteur des transports,le pays se dote et
améliore les infrastructures existantes.Dans l'aviation civile,la
Cameroon Airlines (CAMAIR) connait sa période de gloire avec
MouliomNjifendjou comme PDG malgré les difficultés tels que la
concurrence accrue des vieilles compagnies comme Air France et UTA, beaucoup
plus expérimentées ; la crise économique mondiale
prépondérante ; la gestion mafieuse des dirigeants ;et
la politique imposée par certains États et le non-paiement des
dettes contractées par les États membresd'Air Afrique105(*). Le pays construit
l'aéroport de Douala le 12 juin 1977, l'aéroport de Garoua en
1980 ettotalise environ trente-neuf aérodromes sur l'étendue du
territoire, notamment àKoutaba, Bafoussam et autres.
Concernant les infrastructures routières,Cameroon
tribune rapportele bitumage de plusieurs grands axes,notammentl'axe
Douala-Yaoundé, le tronçon Bafia-Bafoussam, la route
Yaoundé-Bafoussam, Bafang-Banganté, Limbé-Idenau et le
tronçon Bamenda-Nso de la Ring Road. Dans la banlieue de
Yaoundé, la nature fuit devant la gloutonnerie des Bulldozers, tandis
que Kumba renait du bitume par exemple106(*). Cela a favorisé les déplacements
confortables des Camerounais et l'intensification des échanges de biens
et services entre les provinces et milieux. Ainsi, pendant que les observateurs
dubitatifs rapportent que l'économie camerounaise se
détériore à l'oeil nu, le peuple camerounais
s'émerveille devant les réalisations infrastructurelles.
Pour ce qui est des infrastructures ferroviaires, plusieurs
réalisations, notamment l'expansion du réseau ferroviaire, la
modernisation des infrastructures, l'acquisition de nouveaux trains,
l'introduction de nouvelles technologies, et le renforcement de la
sécurité sont relevés par les journaux durant la
période 1970-1985. La ligne de
Yaoundé-Ngaoundéréest achevéeafin
d'améliorer la connectivité entre les différentes
régions et de faciliter les échanges commerciaux entre le Nord et
le Sud du pays. Pour moderniser ce secteur, le gouvernement investit dans
l'achat de nouveaux trains et wagons, ce qui a permis l'amélioration de
la capacité de transport et le confort des passagers.
Sur la ligneDouala-Yaoundé, les locomotives et
matériel ferroviaire roulant démodés sont
remplacés107(*).
Les systèmes de gestion informatisés sont introduites et la
sécurité du personnel renforcéeafin deprévenir les
accidents, et optimiser la planification et l'exploitation du réseau, ce
qui a permis l'amélioration de la ponctualité des trains et de
réduire les retards108(*).
Concernant les exportations, le commercedu pétrole et
des produits pérennes s'améliore graduellement. Entre 1981 et
1985, le Cameroun atteint une production record de plus de 10 millions de
tonnes decacao et café en 1985, ce qui a permis de combler le
déficit du solde extérieur des années 1970109(*).Et à
côté de cela,Jacques Tillier révèle également
que«le Cameroun, véritable oasis de l'Afrique, devient en
très peu de temps le grenier de l'Afrique centrale etcommence à
ravitailler les boucheries canadiennes, belges et états-uniennes en
1985''110(*). Cela a
permis d'améliorer le budget, les recettes d'exportation, les
dépenses et le taux de croissance économique du pays comme le
présente le tableau ci-dessous.
Tableau n°3 : Évolution du taux de
croissance, des recettes et des dépenses au Cameroun entre 1977 et
1985
Années
|
1977-1981
|
1982-1985
|
Taux de croissance en %
|
13
|
8
|
Recettes-en %
|
15
|
24
|
Dépenses-en %
|
14
|
22
|
Source :données recueillies dans,
L'économie camerounaise, un espoir évanoui, de J.J.
Aerts.
Source : Graphique réalisé
à partir des données du tableau ci-dessus.
Selon le tableau ci-dessus, l'abondance et le pragmatisme des
dirigeant propulse la croissance du PIB à un taux moyen de 13% en 1981,
les recettes de 15% et les dépenses de 14%. Mais faceaux défis
conjoncturels du début des années 1980, la croissance du PIB se
maintient à un rythme soutenu de 8% alors que les recettes augmentent de
24% et les dépenses de 22% en 1984,ce qui a permis de classer le
Cameroun dans la catégorie des pays à revenu intermédiaire
par la banque mondiale.
Concernant le niveau d'endettement,le gouvernementfait le
choix délibéré de réduire la dette
extérieure du pays et celui de maintenir une partie importante des
recettes pétroliers dans les comptes à l'extérieur. En
1980 l'endettement du Cameroun, dans la mesure où on la connait,
apparait moins élevé par rapport à ses voisins à la
ronde.Cet équilibre budgétairejustifie la volonté de
l'État d'amorcer le développement du pays, par le biais de
l'investissement autonome, destiné à combler les déficits
grandissants des entreprises publiques et parapubliques111(*).Après un tel bilan
aussi positif et riche de promesse, quel homme ne serait pas fier d'avoir
réussi une telle oeuvre dans ce Cameroun que chacun s'accorde à
reconnaitre le mérite d'une Afrique en miniature ?s'interrogeait
Cameroon tribune.
Par ailleurs, face à la chute du cours des
matières pérennes, la dévaluation du dollar
américain, la hausse des taux d'intérêts et le manque des
entreprises locales à atteindre les objectifs pour lesquels elles ont
été créées, le Cameroun entre finalement dans la
catégorie des mauvais élèves classé par la Banque
mondiale en 1987, soit 2 ans plus tard.
2. Le difficile destin de
l'économie camerounaise
La diversification de l'économie camerounaise
n'empêche pas à cet État de couler dans la crise en 1987
malgré les prédictions d'un avenir radieux. Après avoir
connu une prospérité forte et soutenue grâce à
l'abondance des ressources nationales et le pragmatisme des dirigeants entre
1977 et 1985,la vulnérabilité du Cameroun sur le marché
mondial face aux défis de l'heure entraine une involution des
indicateurs de performance économiqueen 1986112(*).
2.1. Les signaux
d'alerte : la stagnation des produits de base, la baisse de la manne
pétrolière et le recul de la production industrielle
L'involution économique du Cameroun à partir de
1985 est justifiée parle renforcement des politiques protectionnistes
aux USA, la sécheresse et la menace des criquets migrateurs quiaffecte
brutalement la santé économique du pays.
La dévaluation du dollar à la Conférence
de Plazza en 1984 rend très difficile et aléatoire toute
prévision économique. Concernant le Cameroun de façon
particulière,un exportateur camerounais qui vendait son cacao aux
Etats-Unis d'Amérique à cette période, ne pouvait
être sûr du montant de sa recette puisque le cours du dollar
pouvaitfluctuer entre la date du contrat et celle du paiement, ce qui
représentait un manque à gagner considérable pour ce
dernier113(*). Par
ailleurs, pour réduire ce risque de change, l'exportateur devait donc
réaliser en avance une opération de couverture en constituant des
prévisions l'obligeant à mettre en place un service de
trésorerie assez onéreux au détriment des efforts
financiers pour accroitre sa productivité, rapporte Cameroon
tribune114(*).
En effet, la dévaluation du dollaraméricain
conjuguée aux roueries protectionnistes progressivement renforcés
avait pour corolaire la pratique de l'import-substitution, soit la
réduction des importations et la hausse des exportations des produits
subventionnés sur le marché mondial. Ainsi, les pays de
l'occident qui encourageaientl'augmentation des productions agricoles diminuent
leurs importations en provenance de la zone Afrique centrale, ce qui
expliquedonc la baisse des recettes d'exportation du Cameroun et la chute du
cours de ces produits pérennes. Ses avoirs extérieurs nets se
ramollissent à 128 milliards de FCFA le 30 septembre 1986 contre 158
milliards de FCFA un an plus tôt, aprèsl'examen des membres du
comité monétaire camerounais115(*).Et dans un pays, quand les sources de recettes
tarissent, la situation devient difficile.
Au cours de l'année 1986, les exportations de cacao
rapportent74 milliards de FCFA contre 94 milliards de FCFA en 1985et les
exportationsdu café robusta et arabica82 milliards contre 110 milliards
de FCFAla même année116(*). Cette baisse des recettes aégalement eu un
impact significatif sur le prix du kilogramme de cacao et café,ce qui a
favorisé la conversion des planteurs vers l'agriculture de subsistance
et la pêche. «À l'Ouest du pays, les grandes plantations de
café se transforme progressivement engrands jardins de cultures
vivrières, notamment de pommes de terre, d'arachides et autres'', selon
Apollinaire Kaffo117(*).En 1987, les exportations de produits de base ne
représentent plus que 2,4% du PIB contre 8% sur le tableau en 1980. Il
était donc devenuillusoire pour le Cameroun de compter continuer de
compter, comme par le passé, sur les filières agro exports pour
stabilisation le déséquilibre macroéconomique.
En se spécialisant dans l'exportation des produits de
base et dans importation des produits manufacturé après
l'indépendance, le Cameroun est devenu dépendant de
l'extérieur que ce soit du côté de l'offre de de la
demande.Le pays s'est donc exposé aux fluctuations économiques
extérieures lui permettant de tirer avantage que des rares cycles de
hausse de la demande sur les marchés internationaux.La décennie
1980 est révélateur là-dessus parce qu'elle
démontre l'incapacité extrême de cet État à
faire face aux nouveaux défis économiques imposés par la
mondialisation à savoir : satisfaction des besoins dans un contexte
de concurrence accrue et âpre118(*).
De cette analyse, il ressort donc quele miracle camerounais ne
reposait que sur des bases fragilesdu boom pétrolier qui apeu
transféréla technologie dans l'économie nationale. Car
après la découverte et l'exploitation des gisements
pétroliers au milieu de la décennie 1970,la croissance lente et
peu intégrée de l'économie du pays s'est projetée
à un rythme de surchauffe économique artificielproduisant de
nombreux déséquilibres connussous la nomination de «boom
économique''119(*). Ainsi,face à la dévaluation du dollar
américain et aux désaccords qui règnent au sein de l'OPEP,
lebudget de l'État subit la foudre d'une contraction de 419 milliards de
FCFA au cours de l'exercice 1986/87, puis de 233 milliards l'exercice
suivant120(*).
Hormis la stagnation des produits de base sur le marché
mondiale,la dévaluation du dollar participe également à un
net recul de la productionindustrielle locale. Comment le comprendre ? En
effet, à côté des problèmes internes cité par
Cameroon tribune tels que la corruption, la bureaucratie excessive, le
manque d'infrastructures adéquats et la mauvaise gestion, la baisse de
la valeur du dollar américain favorise l'inondation du marché
international des produits américains au détriments des produits
des autres États à des prix défiant toute concurrence. Ce
quiexplique donc la faillite des entreprises de taille moyenne d'Europe et du
Tiers-monde comme ce fut le cas d'ALLUCAM, SEMERY et autres au Cameroun au
cause de la baisse de la demande de produits et une perte de confiance des
investisseurs locaux et étrangers121(*).
Pris en étau entre déficit budgétaire et
poids des pesanteurs extérieures, le gouvernement camerounais
élabore, avec l'appui financier de la France et de l'Allemagne, un plan
de rigueur en 1987 dans le but delimiter les irrégularités.
2.2. Le plan de rigueur et
les mesures préconisées pour limiter les
irrégularités
La chute drastique des recettes d'exportation conjugué
à la réticence du gouvernement à recourir au FMI
contraintle chef d'État Paul Biya à élaborer, avec l'appui
financier de la France et de l'Allemagne, un plande rigueur conciliant aspect
économique, institutionnelle et politiquedans le but de limiter les
irrégularités et le gaspillage : il s'agit du «plan
antilope'' de l'exercice budgétaire 1987/88122(*).
Sur le plan économique,le
budget implique une surveillance accrue des engagements de l'État,
la réduction du train de vie des administrations publiques,
l'assainissement de la gestion des finances publiques via l'application stricte
de l'orthodoxie budgétaire et la protection sans faille de la
trésorerie de l'État123(*).Carentre 1980 et 1986, des scandales autour des
fraudes douanières, des paiements de fonctionnaires fictifs et
l'attribution de logements auraient causé la volatilité d'environ
2000 milliards de FCFA dans les caisses de l'État,d'où
l'introduction de peines de prisons pour toute personne reconnue coupable de
fraude et la suppression de toute mission économique à
l'étranger estimée couteuse et non rentable124(*).
Sur le plan institutionnel, les textes accordant les avantages
aux personnels de la fonction publique, selon le Statut Générale
de la Fonction Publique (SGFP), sont révisés. Il s'agitnotamment
des textes sur la réception d'un salaire fixe et régulier,
l'assurance maladie et l'assurance retraite, le droit à certain nombre
de jours de congé payé chaque année, l'attribution de
logement ou la réception d'une allocation logement pour couvrir les
dépenses de logement,l'allocation de transport pour couvrir les frais de
déplacement domicile-travail ou de déplacement
professionnels,l'allocation pour aider à payer les frais de
scolarité, etc.125(*).
Selon le circulaire n°00027/MINFI/B du 1er
juillet 1987des archives du MINFI, les virements de crédits, de
dépenses du personnel et les dépenses de matériel
administratifs sur l'utilisation du téléphone, des
véhicules administratifs, de la gratuité de l'eau et de
l'électricité, des frais de relève, de l'ordonnancement
des pensions, des frais de déplacement, des dépenses de carburant
ou d'habillement sont interdits126(*). Une gestion stricte du patrimoine renvoyant au
contrôle de l'attribution des logements est adoptée.En dehors des
exceptions énumérées dans le décret
n°85/1284article 11 alinéa 2, tous les déplacements à
l'intérieur et à l'extérieur du pays s'effectuent en
classe économique, tandis que les engagements de dépense dans
l'alimentation des internats, des hôpitaux, des prisons et des
casernements de l'imputation 01-603-00 sont bloqué de 5%127(*).
Les répartitions des travaux de construction ou
d'aménagement des bâtiments et des routes, les bons d'engagement
sont appuyés d'un devis descriptif préalable accepté et
visé par les services techniques compétents. À cet effet,
une cellule de contrôle de prix est créée au sein de la
Direction du budget et des contrôles provinciaux des finances dans
l'optique de veiller au contrôle strict de la facturation des biens et
services fournis à l'État, tout en identifiant les fournisseurs
et leur existence juridique128(*).En cas de demande suffisamment motivée par un
ministère quelconque, les virements de crédits ne sont
autorisés que par le Ministre des finances sur proposition du
Ministère du Plan et de l'aménagement du territoire129(*).
Sur le plan politique, le ministre du commerce et de
l'industrie, M. NomoOngolo Edouard, fait appel à plus de
coopération dans la sous-région pour entraver les effets pervers
de la crise et pour réduire la portée sur les jeunes nations,
lorsdes travaux du Comité de commerce des douanes et de l'immigration
tenu à Yaoundé entrele 16 et le 21 janvier 1987130(*).Pour ce dernier, les
échanges commerciaux doivent constituer la base même des
coopérations économiques entre les État membres de la
sous-région afin de limiter l'extraversion des économies et la
dépendance sous-régionale vis-à-vis des marchés
extérieurs.Cela explique donc la limitation progressive de
barrières douanières par les instances politiques des État
membres131(*).
Par ailleurs, toutes ces mesures prises sur le plan local et
sous-régional n'ont pas permis de contenir l'évolution de la
crise au Cameroun, d'où le recours au soutien du FMI en septembre
1988.
II. LES RAISONS JUSTIFIANT
LE RECOURS AU FMI
Faceaux tentatives vaines d'auto ajustement et à la
pression des institutions extérieures, les autorités
camerounaises prennent le chemin de New York pour recourir au soutien
financieret aux conseils économiques du FMI.
1. Les raisons microéconomiques et
macroéconomiques
Face à l'échec de l'ajustement autonome,le
Cameroun entre dans une spirale de crise économique sévère
et d'instabilité politique et sociale.
1.1. Une crise économique
sévère
L'application des mesures de rigueur élaborées
par le gouvernement n'ont pas permis d'arrêter ou de contenir le
mouvement enclenché parla diminution des recettes d'exportation,la
détérioration de la balance des paiements, la gestion
économique jugée inefficace, et l'endettement excessifau
Cameroun.
En effet, les contraintes changeantes imposées par
l'économie mondiale caractérisées par l'effondrement de
40% à 65% des cours des matières premières, notamment du
cacao, du café, du coton, du caoutchouc et du pétrole en moins de
5 ans, entraine la baisse des recettes d'exportation et la
détérioration de la balance des paiements au Cameroun,
d'où la déclaration mémorable du président Biya
à la télévision nationale le 19 février 1987 :
«la crise est là et elle a atteint le Cameroun''132(*).Fortement dépendant
des cultures pérennes et des cultures vivrières, la
fluctuationmondiale de leurcours accroit la pression sur les ressources
financières du pays, d'où le déficit budgétaire et
le problème de balance de paiementrencontré au Cameroun en
1987133(*). C'est cela
qui a été à l'origine d'un endettement élevé
et de l'accumulation d'arriérés intérieurs et
extérieurs important. Le prix du kilogramme de cacao à
l'exportation chute de moitié, passant de 1102 FCFA en 1984/85 à
552 FCFA, tandis que les ressources financières du café chutent
de 11% en 1987134(*).
Concernant les cours de pétrole,il faut noter que le
Cameroun a su profiter de la hausse des prix du baril de pétrole par les
pays de l'OPEP entre 1978 et 1986. Maisaprès la chute du prix du
pétrole de manière significative sur le marché
international en raison d'une surabondance de l'offre sur le marché
mondial en 1984,larépercussion sefait ressentir sur les recettes
budgétairesdu Cameroun dont le pétrole contribue à hauteur
de 60% en moyenne135(*).Le pétrole perd 2/5 de sa valeur, ce qui
aggrave l'écart de la dette. Le prix du pétrole brut qui
était en moyen de 35 dollars en 1985 s'établit à moyen de
20 dollars 1987, engendranten filigrane la faillite des banques, l'explosion de
la dette et la fermeture d'entreprises136(*).
Au cours de l'exercicebudgétaire de1987/88, le secteur
bancaire, qui ne compte qu'une banque centrale (BEAC) et quelques banques
commerciales, notamment la Société Camerounaise de Banque (SCB),
la Banque Internationale pour le Commerce et Industrie au Cameroun (BICIC), la
Société Générale des Banques du Cameroun (SGBC),
rencontre des disfonctionnements. Notamment de graves pénuries de
liquidité, une crise de solvabilité, une crise de
rentabilité, une faible capitalisation et une mauvaise structure du
portefeuille avec une grande proportion des créances douteuses sans
garanties. Le déficit entre les dépôts et les
crédits croît de 100 à 326 milliards de FCFA entre 1985 et
1989137(*).
Plusieurs banques agricoles mettent la clé sous le
paillasson à l'instar de la BCD, le FONADER, et le FOGATE.Le peu de
banques qui survivent ne sont plus en mesures de prêter à des
entreprises en difficultés à cause de la contraction des recettes
d'exportation. Cela a favorisé la réticence des investisseurs
étrangers deviennent, le retrait des établissements financiers
étrangers du pays etl'augmentation des défauts de
paiement,d'oùles longs fils d'attentes devant les guichets.
Concernant la fermeture des entreprises, le manque de
performance de ces agro-industries, créées à des sommes
astronomiques et fortement dépendant des subventions l'État, font
d'elles de véritables hémorragies pour les finances publiques. La
SOCAME et la CELLUCAM, qui n'atteint pas les objectifs pour lesquels elles sont
créé avant de disparaitre, détériore le solde
budgétaire qui passe d'un déficit de 15 milliards durant 1985/86
à 464 milliards durant l'exercice 1986/87138(*). Par ailleurs, ces
évènements inédits dans l'histoire économique du
pays empêchent le Cameroun de continuer de solder sa dette
extérieurequi s'estime à plus de 302,7 milliards de FCFA en 1987.
Cette situation onéreuse creuse l'écart du niveau de vie entre
Camerounais, d'oùles bouillonnements politiques et sociaux au Cameroun
en 1988.
1.2. L'instabilité politique et
sociale
Au-delà de l'urgence financier qui accule le
gouvernement à cette époque, la presse nationale et
internationale couvreégalementle bouillonnement d'un Cameroun en
gestation des tensions qui s'aggravent entre l'État et la
société aboutissant à l'instabilité politique et
sociale. Parmi ces turbulences, on retientlamanifestation de la faim de
février 1988 marquée par des émeutes à travers le
pays et les élections présidentielles anticipées.
Selon les enquêtes menées sur le terrain, les
manifestations de la faim de février 1988 renvoie à une
série de protestation qui éclatent dans plusieurs villes du pays
en raison du difficile accèsaux produits de première
nécessité et de la détérioration des conditions de
vie de nombreux Camerounais. En effet, l'extension des agglomérations et
le faible niveau de revenu de la plupart des ménages font que seuls les
beaux quartiers et les groupes sociaux aisés soient correctement
desservis en eau, éducation, électricité et en soin de
santé, tandis que la masse des défavorisés est
délaissée dans un état élevé de
morbidité139(*).
Pour exprimer leur colère, les manifestants
descendentdans les rues et appellent à des réformes
économiques et politiques adéquates.Selon Cameroon
tribune, ces manifestations débutent dans la ville de
Ngaoundéré, région du Nord Cameroun, et se propagent
rapidement dans d'autres régions du pays afin que les autorités
gouvernantes prennent des mesures urgentes contre l'accès à
l'emploi et l'accès aux services sociaux de base140(*).
Concernant la problématique de l'emploi au Cameroun en
1988, les mesures de centrages affectent le marché du travail et
augmente le taux de chômage parmi les jeunes diplômés de
moins de 30 ans, soit 60% de la population. En effet,l'Étatcamerounais
réduitle budget public,réduitle personnel dans les entreprises
publiques, et suspendles recrutements, à l'exception des prises en
charge des élèves sortis des écoles de formation, selon
les archives riches consultés au MINEFI141(*).Ainsi, les jeunes
générations plus qualifiées se retrouvent de plus en plus
exclus du marché de l'emploi tandis que la main d'oeuvre vieillie baigne
dans le secteur moderne. Cela a plongé une grande partie de la
main-d'oeuvre dans le secteur informel sans accès à la protection
sociale ni à des conditions de travail
décentes,motivant beaucoup de gens à rentrer au
village142(*).
Durant l'exercice budgétaire de 1987/1988, le recul du
rôle de l'Étatentrainela réduction les budgets
alloués au ministère de la santé et de
l'éducationde 20% en 1987 puis de 29% en 1988, d'où la
balkanisation de l'organisation du système de soins de santé et
d'éducation dans le pays143(*). Dans les hôpitaux publics, on relève
une pénurie de personnel médical, d'équipements et de
médicaments, rendant ainsi difficile l'accès aux soins de
santé de base à bon nombre de Camerounais. Lacouverture
santé dont bénéficiaient bon nombre de Camerounais est
supprimée et la construction des centres médicaux
d'arrondissement sont arrêtés par le ministère de la
santé144(*).Pourtant, en dehorsdes fonctions sanitaires, ces
établissements jouaient également un rôle politique
important. Ils étaient la manifestation de la présence de
l'État, surtout de l'importance accordé à un
arrondissement donné.
Dans le secteur éducatif, la réduction
budgétaire confronte ce secteur à de nombreux défis durant
l'exercice 1987/1988.Après de progrès notables
réalisés au cours de la période 1980-1985, après la
mise en place des politiques visant à améliorer l'accès
à l'éducation pour tous les citoyens, la réduction
budgétaire dans le ministère de l'éducation confronte le
système éducatifà plusieurs défis. Notamment
l'inégale accès à l'éducation, le manque de
ressources financières et matérielles, la vétusté
des infrastructures scolaires,le manque d'enseignants qualifiés et le
surpeuplement des salles. Celaaentrainé dans les régions rurales
et les zones défavorisées un manque d'accès à une
éducation de qualité et une limite d'opportunités
d'apprentissage pour de nombreux enfants, selon Cameroon
tribune145(*).
Également, les infrastructures defourniture en eau potable eten
électricité sont insuffisantes ou inexistantes dans certaines
régions du pays.
Sur le plan politique, l'élection présidentielle
du 26 avril 1988a lieu après coup d'État manqué de 1984 et
l'avènement de la crise économique en 1985 où le
président sortant et unique candidat M. Paul Biya est assuré
d'être réélu, rapporte Le Monde146(*). Ces résultats
plébiscitaires à transparence contestée constituent une
rupture paradigmatique dans la trajectoire politique camerounaise. D'une
part,les Musulmans quiperdent beaucoup de leur pouvoir, non seulement à
Yaoundé mais aussi dans le Nord du pays, constituent un fief
d'opposition contre le RDPC de Paul Biya dont les répercussions ne sont
pas anodines après l'élection d'avril 1988. D'autre part, le
mauvais management de la crise économique par le régime du
président Biya met en rogne le bon nombre de Camerounais qui contestent
cette élection et de la légitimité du régime en
place, d'où les manifestations dans les grandes villes du pays147(*).
2. Le poids des pesanteurs
extérieures
L'involution économique du Cameroun au milieu de la
décennie 1980, fait sombrer le pays dans une léthargie qui pose
la question de la place et le rôle de ce pays pivot en
Afriquesubsaharienne et sur le plan international. Lorsque la France voit ses
intérêts et celui de ses alliés menacés dans ce
«pré carré'' après l'échec de l'ajustement
autonome, des mouvements conspirationnistes obligent le locataire
d'Étoudià recourirà l'assistance du FMI dont il a vivement
critiqué en 1987.
2.1. Selon les
considérations économiques
Le Cameroun est la chasse gardée du capital colonial
français à cause de son abondance en ressource du sol et du
sous-sol depuis 1922. Après l'indépendance de façade du
1er janvier 1960, c'est finalement le 13 janviers 1960, soit 10
jours après l'assassinat de Felix Moumié en Genève par
la«Main rouge'', que les accords bilatéraux régissant les
relations franco-camerounaises, jusqu'ici provisoires, sont signés de
manière définitive entre le gouvernement de De Gaulle et
celuid'Ahidjo148(*).Il
s'agit notamment de l'accord sur la dette coloniale pour remboursement des
bénéfices de la colonisation, de l'accord sur la confiscation
automatique des réserves financières nationales, de l'accord sur
le droit de premier refus sur toute ressource brute ou naturelle
découverte dans le pays,de l'accord sur la priorité aux
intérêts et aux entreprises françaises dans les
marchés publics et appels d'offres publics, et de l'accord sur
l'obligation d'envoyer en France, un bilan annuel et un rapport d'État
des réserves149(*). De part ces accords, Paris devait garder un
accès privilégié surles matières premières
du Cameroun au bénéficed'entreprises françaises, auquel se
joints certains groupes du marché commun CEE.
Ainsi, lorsque leCameroun devient
un El Doradopétrolieren 1977, plusieurs accords,jamais
révélés, sont conclus avecles compagnies
pétrolières française et allier telles Elf Aquitaine,
Shell, Total ou encore ExxonMobil, qui investissent massivement
dans le pays pour exploiterles vastes réserves de pétrole
offshore150(*).Tenace et exalté après la chute
des cours mondiaux de pétrole et de matières premières en
1985, créant une régression des recettes d'exportations dans le
pays, le gouvernement camerounais se démène à trouver des
soutiens diplomatiques, financiers et matérielsafin de combler le manque de recouvrement
d'intérêts des compagnies étrangère se
dévoile. Face à cette pression économique, le chef
d'État renégocieles accords avec l'Élysée et les
compagniesétrangères avant de prendre le chemin de New York en
1988.
A priori, le président Biya refuse dans un
premier temps de recourir aux programmes du FMI en 1987 et décide de
s'investir dans un ajustement local, mais cela tourne court à cause du
déficit budgétaire et la mauvaise gouvernance. Mais dans le but
de sauvegarderles nombreux et puissants intérêts des entreprises
françaises,notamment avec Total, et surtout le groupe Bolloré qui
contrôle l'exploitation du port de Douala et de la CAMRAIL,Paris va
mettre la pression sur les autorités de Yaoundé lorsqu'il impose
de lourdes taxes douanièresaux produits sortant du Cameroun, afin
qu'ilrecourt à l'assistance du FMI. À cela s'ajoute le retrait de
plusieurs filiales des banques occidentales du système bancaire
camerounais et la réductiondes volumes d'aide française nette qui
deviennent largement conditionnés151(*).
Ainsi, lorsque le gouvernement camerounais engage des
négociations avec le Club de Paris et de Londres
pourrééchelonner sa dette extérieure, la condition
sine qua nonequi lui est imposée par la Franceestcelle de
négocier un accord de prêt avec le FMI152(*).En fait, Paris exige que le
Cameroun soit engagé dans un programme appuyé par le Fonds pour
être habilité à bénéficier d'un accord de
rééchelonnement. Ce qui explique doncla signature du premier
accord de confirmationet du premier accord de rééchelonner de la
dette extérieure, d'un montant de 621 milliards, du Camerounen septembre
1988153(*).
2.2. Selon les
considérations politiques
Au-delà des considérations économiques,
le poids des pesanteurs politiques extérieuresont également
contraint le gouvernement camerounais à recourirau soutien financier et
aux conseils économiques du FMI en 1988. En1960,les scandales de
rétro-commission et les trafics d'influence permettent au
président De Gaulle via son homme de main Foccartd'instaurer une
realpolitik dans les sommets de l'administration camerounaise, ce qui
aconstitué un discret mais puissant lobby français au
Cameroun154(*).
En effet, la légende voudrait que la France,
«patrie des droits de l'homme'', ait généreusement offert
l'indépendance à ses anciennes colonies d'Afrique noire en 1960.
Mais les données dignes d'intérêts recueillies sur le
terrain racontent une toute autre histoire, soit celle d'une guerre brutale,
violente, meurtrière, qui a permis à Paris d'inventer un nouveau
système de domination qui est la Françafrique. Cette guerre
secrète se déroule au Cameroun entre 1950 et 1960.
Confrontées à un vaste mouvement social et politique porté
par l'UPC, les autorités françaises décident de passer en
force en utilisant, comme en Algérie,des tortures, bombardements de
masse, action psychologique, afin d'éradiquer militairement les
contestataires et à installer un gouvernement pro-français
à Yaoundé155(*).
Ainsi, lorsque le président camerounais critiques
l'action du FMI en 1987, et déclare «qu'avec ou sans le FMI, le
Cameroun sortira de la crise'', une note diplomatique, traduisant le
mécontentement de l'Élysée,parvient à
Étoudi. Aussitôt,le président Biya effectue une visite de
courtoisie àPariset rencontre son homologue français
François Mitterrand afin de«discuter de la manière dont la
France pourrait aider le Cameroun à faire face à ses
problèmes économiques''.Du retour de cette visite,les
décisions prises par le président de la République
camerounaise seront clairement opposées à sa position
antérieure vis-à-vis des IBW. Ce qui permet de conclure que ces
décisions ont été fonctions d'objectifs et de contraintes
politiques non directement observables, car en 1988le gouvernement
décide de prendre le chemin de New York pour recourir aux programmes du
FMI156(*).
Au-delà de cette manoeuvre diplomatique, l'ancienne
métropole avait également toutes les cartes en main pour
déjouer les plans de Yaoundéen ce qui concernait le recours au
FMI.À cette époque, et comme toujours, la politique
monétairedu Camerounest totalement dépendante des fluctuations de
la politique monétaire de la France, et étant le principal
partenaire économique du Cameroun, la France menace d'imposer des
sanctions sur les exportations camerounaises. À côté de
cela, il est également judicieux de noter que toutes les
autorités gouvernementales ou presquesont le produit des écoles
françaises, ce qui a représenté un moyen de pression sur
l'État Camerounais157(*). La forte admirationdes autorités
camerounaises envers leur bienfaiteur et pourfendeur la France dont le soutien
aux réalisations de projets est presque racheté depuis 1960
illustre à merveille cette maxime du président gabonais Omar
Bongo «l'Afrique sans la France, c'est une voiture sans
chauffeur''158(*).
Grâce à ces contraintes politiques
exercées par la France, l'élite en place, souvent formé en
France, s'estmême convaincue de son incapacité à prendre
des décisions nécessaires face à l'ancienne
métropole qui maintient et affirme une position forte et ouverte,
à la fois comme bailleur de fonds et référence culturelle
principale.Parmi cette élite formée en Francevient en tête
de liste le nom du natif de Mvomeka'a qui est de loin le meilleur
élève de la France à la fin des années 1980, et
«le meilleur élève de François Mitterrand'' selon
Jeune Afrique159(*).
Né le 13 février à Mvomeka'adans
l'arrondissement de Meyomessalale, département du Dja-et-Lobo, province
du Sud, Paul Biya effectue ses études primaires à l'école
de la Mission Catholique de Nden (Zoétélé) où il
obtient le CEPE en 1948, suit une formation au pré-séminaire
Saint Tharcissius d'Edéa de 1948 à 1950, puis une formation au
petit séminaire d'Akono de 1950 à 1954. En 1954, il
intègre le lycée général Leclercoù il
obtient un Baccalauréat 1ère partie en juin 1955, puis
un Baccalauréat 2e partie ensérie philosophie en juin
1956, après quoi s'envole pour France où il poursuivra ses
études en supérieures. À l'issue de ses études, il
obtient une Licence et un Diplôme d'Études Supérieures en
Droit Public à la Sorbonne, un Diplôme de l'Institut
d'Études Politiques de Paris, plus connu sous le nom de «Sciences
Po'', option Relations internationales, et un Diplôme de l'Institut des
Hautes Études d'Outre-Mer, section administrative160(*).Ce qui fait donc de lui le
meilleur élève de la France à la fin des années
1980,et «le meilleur élève de François Mitterrand''
selon l'avocat Yondo Black161(*).
III. AUX ORIGINES DU FMI
ET DES PROGRAMMES D'AJUSTEMENT STRUCTUREL (PAS)
Dans lebut de reconstruire l'Europe après la
Deuxième Guerre mondiale, d'éviter la répétition
des crises comme celle de 1929 et d'assurer le leadership des USA sur
le monde, 44 pays alliés sous l'initiative du gouvernement
américain planchent très tôt sur la création
d'institutions financières internationales fortes et capables d'imposer
des règles au secteur financier privé. C'est ainsi qu'en 1944
naitrons à Bretton Woods le FMI et la Banque mondiale,sous
l'administration de Franklin Roosevelt.
1. Aux origines du
FMI
C'est en pleine seconde guerre mondiale, soit en 1941 que
débute l'élaboration et la discussion sur les institutions
internationales à mettre en place une fois la guerre terminée
afin de répondre à la volonté des alliés
d'établir un système de change fixe.
1.1. Contexte et
circonstances de création du FMI
La profonde dépression économique
étasunienned'après première guerre mondiale a eu un effet
contagieux sur l'ensemble du capitalisme mondial.Comment le comprendre ?
Lorsque l'Allemagne interrompt le remboursement de sa dette de guerre envers la
France, la Belgique, l'Italie et la Grande Bretagne, ces pays cessent de
rembourser leur dette extérieure à l'égard des USA. C'est
la raison pour laquelle les Etats-Unis réduisent radicalement
l'exportations de leurs capitaux entre 1928 et en 1931162(*).Pendant que les pays
endettés ne disposent plus d'assez de dollars pour rembourser, les
Etats-Unis refusent de se faire rembourser en nature, ce qui expliquedonc la
multiplication des dévaluations par les pays dans le but de
conquérir des parts de marchés aux dépends des
autres163(*).
Pendant ce temps, les Etats-Unis créé en 1934
l'Export-Import Bank of Washington(Eximbank)afin de
protéger et de défavoriser les exportateurs américains,
eten contrepartie les exportations sont garanties par l'octroi des
crédits à long terme à des étrangers pour qu'ils
importent des produits des USA. C'est la raison pour laquelle
L'Eximbank ne déboursait de l'argent qu'après avoir
reçu la preuve que les produits sont embarqués vers
l'étranger, soit vers l'Amérique latine et Caraïbe, la Chine
et la Finlande164(*). Au
départ, la somme totale de prêts octroyé est de 60 millions
de dollars, mais lorsque le volume augmente, la somme atteint les 200 millions
en 1940. Par ailleurs, sous l'initiative des Etats-Unis, la Banque
interaméricaine, regroupant la Bolivie, le Brésil, la Colombie,
la République dominicaine, l'Équateur, le Mexique, le Nicaragua
et le Paraguay est créée en 1940. Selon E. Toussaint, quatre
raisons poussent l'administration de Roosevelt à la création de
cette banque.
Primo, le gouvernement comprend qu'il doit
prêter de l'argent pour qu'on lui achète ses produits, et doit
aussi acheter les exportations des pays à qui il veut vendre ses
marchandises. Secundo, Washington considère Wall
Street et les grandes banques privées comme responsables de la
crise de 1929 et de son prolongement. Il faut donc se doter d'un instrument
public pour agir sérieusement. Tertio, le gouvernement de
Roosevelt veut convaincre les gouvernements latino-américains d'entrer
activement dans le jeu de relations renforcées avec les USA. Et
quarto,une banque devait être créée pour s'assurer
que les emprunteurs remboursent leurs dettes165(*). Ce même principe sera également
appliqué au FMI et à la Banque mondiale. Ainsi, suite aux
résultats positifs qui s'en suivent, à l'instar d'une croissance
économique et d'un regagne d'une marge importante d'autonomie,
l'administration Roosevelt débute activement en 1942 les discutions sur
l'ordre économique et financier à établir dans
l'après-guerre, d'où la création du FMI et la Banque
mondiale à Bretton Woods en 1944.
Le FMI, ou Fonds de stabilisation, comme le Plan
white le dénommait, estcrééà Bretton Woods,
dans l'État du New Hampshire aux USA, le 22 juillet 1944 après la
signature des accords par des représentants de 44 pays réuni pour
discuter de la reconstruction de l'économie mondiale après
laSecond Guerre mondiale166(*).Mais bien avant cela, à l'entame de cette
Conférence monétaire et financière des Nations unies,
connue sous le nom de conférence de Bretton Woods,l'idéologie de
l'Économiste Britannique John Maynard Keynes s'oppose àcelle de
l'Américain Harry Dexter Whitelors des pourparlers. Notamment
leProposals for an International Clearing Union,qui propose une
facilitéd'accès au crédit,une compensationdes
créances et des dettes des pays, contreleProposal for a united
nations stabilizationfund qui limite plutôtles recours au
crédit et orientel'action de l'institution monétaire vers
l'équilibre des balances des paiements et la stabilisation des taux de
change167(*).
Après une longue phase de plaidoirie entre la
délégationdes USA menée par Henry Morgenthau et Harry
White, et la délégation britannique menée par Lord John
Maynard Keynes,c'est finalement le plande White instituant le FMI et la Banque
mondiale quiest ratifié par une large majorité du Congrès
en 1945, cela malgré l'hostilité de Wall Street et le
parti républicain face à plusieurs éléments
fondamentaux du projet White168(*). Malgré la dénaturation du projet
original par les concessions faites par Roosevelt sur la création d'une
monnaie propre à la banque, le recours à son propre capital pour
faire des prêts et la stabilisation du cours des matières
premières, ce n'est qu'en 1947 que Wall Street appuiera
vraiment la Banque et le Fonds.Seul Moscoune ratifie pas les
accordsfinaux et dénonce ces institutions (FMI et Banque mondiale)
comme étant subordonnées à des objectifs politiques d'une
seule grande puissance'', à l'assemblée générale de
l'ONU en 1947169(*). Dès lors, quels ont été les objectifs
et les missions attribuées aux FMI ?
1.2. Les objectifs et les
missions attribuées au FMI
Selon le mémorandum du Conseil des relation
étrangères du 1er avril 1942, le FMI devait être
créé pour
«réglementer les investissements internationaux de
capitaux privés en prévoyant des possibilités judiciaires
et d'arbitrage pour le règlement des différends entre
créanciers et débiteurs et pour écarter le danger de
l'utilisation par les pays créanciers de leurs revendications comme base
pour des exigences politiques, économiques ou
illégitimes.''170(*)
Ainsi, lorsque les accords instituant cette institution sont
ratifiés en 1945, l'article 1 de la charte des statuts stipule que les
principaux objectifs arrêté sont :
- la promotion de la coopération monétaire
internationale ;
- lafacilitation, l'expansion et l'accroissement harmonieux du
commerce international ;
- lapromotion de la stabilité des changes, le maintien,
entre les États membres, des régimes de change ordonnés et
d'éviter les dépréciations concurrentielles ;
- l'aide à établir un système
multilatéral de règlements des transactions courantes entre les
États membre et à éliminer les restrictions de change qui
entravent le développement du commerce international ;
- donner confiance aux États membres en mettant les
ressources générales du Fonds temporairement à leur
disposition moyennant des garanties adéquates, leur fournissant ainsi la
possibilité de corriger les déséquilibres de leurs
balances des paiement sans recourir à des mesures préjudiciables
à la prospérité nationale ou internationale171(*).
Ces objectifs ont permis au Fonds de se fixer trois types de
mission, notamment la mission de financement, la mission de régulation
et la mission de consultation. Concernantla mission de financement, le Fonds
prête auxÉtats membres ce qu'il possède à
l'équivalent de 200% de leur quote-part en monnaie
nationale,réparti en5 tranches de 25%172(*). Pour ce qui est dela mission de régulation,
il s'agit des obligations des membres en matière de régimes de
change, de surveillance des politiques de taux de change des pays membres et de
régulation de la finance via le mécanisme de la
conditionnalité173(*). Et lorsque les PAS sont mis en exécution, le
FMIeffectue également des missions de consultation, afin d'être
updatesur l'utilisation ressources empruntées et l'évolution
économique de l'État.
En effet, ces missions devaient permettre de maintenir un
contexte favorable à l'essor du commerce mondial et de reconstruire
l'Europe après la guerre. C'est donc dans ce sens qu'oeuvre le FMI
durant la période des «trente glorieuses'' européenne. Par
ailleurs, la circulation de 53 milliards de dollars dans le monde, soit un
montant 5 fois plus que les stocks d'or des Etats-Unis en août 1971,
entraine la perte de confiance envers le billet vert. C'est la raison pour
laquelle les USA mettent fin au système de change fixe, soit la
convertibilité du dollar en or, lors des accords de Jamaïque en
1976 et en contrepartie redéfinissent le rôle des programmes
d'ajustement dont l'exigence veut que,lorsqu'un pays est confronté
à des difficultés financières pouvant compromettre la
stabilité de son système, le FMI lui accorde des prêts pour
garantir sa solvabilité et empêcher l'éclatement d'une
crise économique174(*). Cette institution devient donc la « banque
centrale des banques centrales et trésors publics''.
2. Les visées des
PAS du FMI
À l'origine, les programmes d'ajustement structurel
sont conçus pour aider les pays en développement à manager
les problèmesrécurrents d'endettement et de mouvements de
capitaux. Mais face aux problèmes économiques pressants de
déséquilibres économiques, decorruption et de mauvaise
gouvernance, ces programmesse convertissent enun ensemble de mesures de
réduction des déséquilibres macro-économiques et de
libéralisation économique.
2.1. Le consensus de
Washington : le fondement théorique des PAS
Au moment où se déroule la Conférence
monétaire et financière des Nations unies, connue sous le nom de
conférence de Bretton Woods, du 1er au 22 juillet 1944, deux
idéologies d'Économistes de renom s'opposèrent, d'un
côté celle du Britannique Keynes et de l'autre celle de
l'américain Harry White.Et lorsque le plan américain est
préféré par la majorité du Congrès en 1945
au détriment des visées britanniques, les Etats-Unis, uniques
pays créditeurs, voulaientcontrôler le capital qu'il proposeraiten
imposant une formule de prêts conditionnés,mais l'opposition de la
Grande Bretagne, de l'URSS, du parti républicainet l'hostilité de
Wall Street obligent le choixd'une formule des «prêts
automatiques''175(*).
Cela explique donc l'absence des politiques d'ajustement dans la charte
initiale du FMI.
Mais face à l'insistance des problèmes
récurrents de mauvaise gouvernance, de corruption et d'endettement des
États africains, le FMI introduit dans sa chartedes règles et
procédures d'utilisation deses ressources en 1968 : c'est ce qui
constituera donc les premiers programmes d'ajustement176(*).En effet, ces
conditionsdevaient permettre aux Étatmembres de rembourser leurs dettes
auprès des banques privées dans lesquelles ils s'étaient
endettés pour financer leur développement. Maisalors en 1970, la
majorité des pays subsahariens sont confrontésaux
problèmesde dégradation des termes de l'échange,
d'endettement croissant, de choc pétrolier,decrise économique
etdedétournements de fonds. Ce qui permet donc l'interruptiondes
remboursementsdu capital et les intérêts des emprunts
contractéspar ces États durant toute la décennie 70. C'est
donc pour cette raison que le FMI décide d'impliquer la Banque mondiale
dans l'élaboration de ses nouveaux programmes d'ajustement en 1979 afin
de permettre un retour d'investissement177(*).
2.2. Le modèle
intégré FMI-Banque mondiale des PAS
Le régime de Bretton Woods implose durant la
décennie 1970 face aux problèmes croissants de crises
pétrolières, de fluctuation du dollar, de solvabilité des
PVD et du détachement du dollar de l'or178(*).Par ailleurs, pour
reconstruire un nouvel ordre économique mondial,la Francepropose le
retour à l'étalon d'or, chose que n'approuvent pas le
président Nixon qui veut supprimer toute référence
à l'or afin de résoudre le problème de fluctuation
monétaire que traverse les Etats-Unis à cette époque.
Néanmoins, après une longue période de controverses et de
rumeurs conspirationnistes,la Conférence de Jamaïque vient enfin
prononcer le verdict en faveur des USA en 1976. Les accords signés
à l'issu de cette conférence permettentdonc d'imposer la vision
américaine d'un nouveau système monétaire international
qui maintient la prééminence du dollar, démonétise
l'or et adopte le Droit de Tirage Spécial (DTS) comme principale monnaie
de réserve du FMI179(*). Du coup, le Fonds perd son rôle de gardien du
système de taux de change fixe et retrouve un nouveau rôle dans
les années 1980-1990 lorsqu'il fait dépendre son aide de
l'adoption de programme d'ajustement structurel élaboré avec la
BM.
Impuissant face à l'ampleur des
déséquilibres occasionnés par la crise de la dette, le FMI
fait évoluer son action qui ne peut plus se limiter à une simple
contraction de la demande extérieure pour rétablir
l'équilibreextérieur. Elle décide de se situer dans la
durée et d'impliquer une orientation plus prononcée vers la
restauration de l'offre et de la croissance dans l'économie. Pour ce
faire, le Fonds décide de combiner ses modèles monétaires
aux modèles réels de la Banque mondiale lors de la réforme
de ses statuts en 1979, ce qui confère à l'ajustement le
caractère qui lui faisait défaut dans le modèle
monétaire simple180(*). Lesdeux principaux objectifs poursuivis par ce
modèle intégré d'ajustement sontd'aider les PVD à
retrouver une situation économique plus saine d'une part et d'assurer la
survie du système bancaire international mis en péril par des
placements inconsidérés d'autre part181(*). Dans ces nouveaux
programmes sontincluentdes principes comme la libéralisation du
commerce, la privatisation des entreprises publiques, la réduction des
dépenses publiques et la réforme fiscale, dans le but de stimuler
la croissance économique,d'augmenter les investissements
étrangers et d'améliorer l'efficacité des
entreprises182(*).
Pour conclure ce chapitre, où il était question
de traiter des raisons ayant entrainé le recours du Cameroun au FMI, il
ressort qu'après avoir connu une prospérité
économiques forteet rapide entre 1977 et 1985 avec un PIB moyen de 8%,
grâce à l'abondance des ressources nationales et le pragmatisme
des dirigeants,la détériorations des termes de l'échange,
la chute du prix du baril de pétrole, la dévaluation du dollar
américain et l'échec de l'ajustement autonome entraine
l'arrêt de l'État providence au Cameroun. Ainsi, pris en
étau entre une sévère crise interne et poids des
pesanteurs extérieurs durant l'exercice budgétaire 1987/1988,les
autorités camerounaises se résolvent enfin à prendre le
chemin de New York pour recourir au soutien financier et aux conseils
économiques du FMI en 1988 selon les journaux.
CHAPITRE II : VERS UNE COOPERATION
EFFECTIVE ENTRE CAMEROUN ET FMI
Face à la réticence vaine du président
Biya, l'échec de l'ajustement autonome, et le poids des pesanteurs
extérieures, les autorités camerounaises vont solliciter
l'intervention du FMI, dans le cadre de programmes d'ajustement structurel en
1988. Créé à l'origine pour pallier à des
faiblesses temporaires dans les marché financiers, le Fonds s'est
transformé en champion du néo-libéralisme, exigeant pour
délivrer ses aides, que les pays en difficulté privatisent leurs
biens publics, éliminent les frais de douanes et les prix fixes, ouvrent
tous les marchés à la concurrence
étrangère183(*). En d'autres termes, son intervention au Cameroun
devait être une histoire de longue haleine.Dès lors, quelle est la
nature des accords conclus entre les deux parties et les conditions qui en
découléentre 1988 et 2006?
I. LA NATURE DES ACCORDS
CONCLUS ENTRE LE CAMEROUN ET LE FMI
Après la détérioration des termes de
l'échange,la chute du prix du pétrole et la dévaluation du
dollar américain, un déficit budgétaire et des tensions de
trésoreries'emparent des finances camerounaises dès l'exercice
budgétaire 1985/86.Ainsi, l'échec relatif des politiques
d'ajustement autonomes, mises en place à partir de 1987, conjugué
à la pression des bailleurs de fonds, notamment de la France, les
autorités camerounaises se résolvent donc à accepter le
principe d'une négociation avec le FMI,malgré la réticence
du président Biya en 1987 lorsqu'il affirme devant l'Assemblée
nationale que«le Cameroun n'ira pas au FMI'', rapporté par
Cameroon tribune184(*). Après des études ayant abouti
à la rédaction de la Déclaration de Stratégie et de
Relance Économique (DSRE) c'est finalement le 24 septembre 1988 que le
premier accord de confirmation est signé, après plusieurs mois de
laborieuses négociations.
1. Les accords de
confirmation ou Stand-by Arrangement
Selon NgoudjiTameko et Baye Menjo, un accord de confirmation
estune facilité de prêt créée en 1952 pour apporter
une aide financière sous conditions à un pays qui en fait la
demande, dans le but de corriger les déséquilibres
macroéconomiques et de restructurer l'économie en vue de la
rendre plus prospère185(*).Mais au-delà de ce point de vue,l'article
xxx, section b des statuts du FMI définit également un accord de
confirmation comme étant une décision par laquelle le Fonds donne
à un État membre l'assurance qu'il pourra, conformément
à ladite décision, effectuer des achats au compte de ressources
générales pendant une période spécifiée,
jusqu'à concurrence d'un montant spécifié. C'est
cesaccords qui posent les bases d'une coopération effective entre le
Cameroun et le FMI durant la période 1988-2006.
1.1. L'accord de
confirmation du 24 septembre 1988
Lorsque le Cameroun est confronté à une crise
économique sévère en 1987, les
autoritéscamerounaises définissent les premières mesures
d'ajustement, sous la pression de la banque mondialeafin delimiter les
irrégularités et les gaspillages. Les principaux objectifs
définis sont essentiellement économiques,notamment le
redressement des finances de l'État et des entreprises publiques, le
soutien des activités économiques, et la poursuite des efforts en
faveur des secteurs productifs de l'économie national186(*).Par ailleurs,
exécuté durantune période de contraction économique
mondiale et nationale sévère, ce budget subit la foudre des
méandres conjoncturelles. Ainsi, le Cameroun enregistredes pertes
colossales de recettes fiscales à hauteur de 150 milliards de FCFA en
valeur absolue,selon le Circulaire de l'exercice budgétaire
1987/1988187(*).Face
à cette situation onéreuse, conjuguépar les pressions
politiques, la haine alimentée par le nationalisme et les
velléités de la crise économique, le gouvernement
camerounais signe le premier accord de confirmation avec le FMIen
1988188(*).
En effet, c'est le 24 septembre 1988 que le ministre des
Finances camerounais, Sadou Hayatou189(*) et le Directeur général du FMI, Michel
Camdessus, français d'origine,concluent le premier stand-by
agreementd'un montant de69,525 millions de DTS pour une période de
2 ans.Additionnellement, le Cameroun demande un financement compensatoire de
46,35 millions de DTS, pour pallier la perte de recettes fiscales de l'exercice
1987/88190(*). Ce qui
fait un total de 115,875 millions de DTS répartis en 6 tranches.Les
objectifs fondamentaux de cet accordsont
essentiellement économiques, soit la réduction du solde du
compte courant à 4,3% du PIB en 1988/89 et à 3% en 1991/92, et la
stabilisation des finances publiques afin de résorber totalement le
déficit en 1991/92191(*).Sur le terrain, les programmes d'ajustement issu de
cet accord cherchentà rationaliser et restructurerles entreprises
publiques, à réhabiliterle système bancaire, et à
reformulerle système d'incitations, d'où le découpage par
tranches de financement afinde permettre aux autorités du Fonds de
suivre pas à pas l'état d'exécution du programme, et
éventuellement d'en négocier les termes192(*).
Maisaprès le bilan effectué en mai 1990 par les
administrateurs du Fonds au titre de l'article IV, le Fondsdécide
d'abrogerunilatéralement l'accord parce qu'iljuge que ses termes ne sont
pas respectés sur la durée au point de vue
macroéconomique. Ni les objectifs de recettes publiques, ni le programme
de restructuration des entreprises publiques ne sont atteints, selon le rapport
d'évaluation193(*). Cette convention est finalement mise en retrait en
juin 1990 sans avoir été réactivé et sans que soit
décaissés les 30,9 millions de DTS restants.
SelonLe Figaro,les lourdeurs relevées lors
del'exécution dece programme sont issues d'un sabotage de la part de
l'opposition qui estime que ce contrat n'est rien d'autre qu'un moyen pour le
Chef d'État de consolider son pouvoir et d'y rester indéfiniment,
d'où la forte opposition de la part de l'opposition et de la
société civile194(*). Au-delà de ce point de vue,Cameroon
tribune rapporte également des irrégularités
constantes comme les fraudes fiscales, la corruption, les repressions
gouvernementales, et les détournements de fonds publics comme les
causesde l'échec de ce programme195(*).Par ailleurs, pour corriger les distorsions qui
continuent de sévir, un second accord est négocié entre
les deux parties en 1991.
1.2. L'accord de
confirmation du 12 décembre 1991
Après l'échec du premier accord de confirmation,
le pays seconfrontée à une dégradation record du solde
budgétaire de -15% par rapport au PIB, d'un ratio d'endettement de 59%
par rapport au PIB et d'un taux de croissance de -3% en 1991, d'où la
montée de l'incivisme fiscale dans le pays à cette
période196(*).
Pour y remédier, le gouvernement camerounais négocie un second
accord de confirmation avec la direction du FMI. Il estconcluà
Washington le 12 décembre 1991 entre la délégation du
Premier ministre Camerounais Sadou Hayatou et le Directeur
général du FMI, Michel Camdessus pour un montant de 70 milliards
de FCFA répartis en deux tranches.Les objectifs visés dans ce
deuxième programme sont :la stabilisation du déficit
budgétaire à 210 milliards de FCFA, la restauration des
équilibres macroéconomiques, la stabilisation des comptes
extérieurs, la réalisation d'un taux de croissance moyen de 5%,
le rétablissement des équilibres externes et internes pour une
croissance durable,et le contrôle de l'encours à
l'endettement197(*).Le
premier décaissement d'un montant de 10 milliards de FCFA est effectifen
1992, dans le but de soutenir les programmes d'ajustement.
Mais après la mission d'évaluation
effectué par les administrateurs du Fonds en septembre 1992, le contrat
est une fois de plus résilié par le FMI qui juge que le Cameroun
est à nouveau sorti du cadre macroéconomique
négocié avec eux.Lesengagements de la deuxième tranche,
soit de 12,5 MECU, restantesont suspendus par l'ensemble des bailleurs de
fonds198(*).Selon les journaux, ce second échec aux
origines plurielles fait du Cameroun un mauvais élève aux yeux du
FMI.La Nouvelle Expressionévoquela paralysie
étatique,après les mouvements les villes mortes et les
revendications démocratiques,comme entrave majeur à la bonne
exécution de ce second programme199(*).
Ces bouillonnements entre État et
sociétéindisposedonc le FMI qui estime que les résultats
espérés ne pourraient être atteintspar le Cameroun,
d'où la rupture du dialogue entre les parties et le gel des
décaissements. Les USA, l'Allemagne et l'UE suspendent leur aide
sur la base d'un rapport faisant état de fraudes électorales lors
des élections présidentielles d'octobre 1992.Ce n'est
qu'après la dévaluation du franc CFA en 1994 et la
déclaration de politique économique et financière du
gouvernement la même année que le dialogue reprend avec les
bailleurs de fonds200(*).
1.3. L'accord de
confirmation du 25 mars 1994
Sans alternatives réelles pour contrecarrer les effets
pervers de la criseaprès la suspension du second accord de
confirmation,pour non-respect des exigences fixées avec les bailleurs et
le problème de fraude électorale,le chef du gouvernement
camerounais Simon AchidiAchu, et le Directeur général du
FMIMichel Camdessus conclut un nouvel accord de confirmation à
Washington le 25 mars 1994 pour une somme de 121 millions de dollars sur 1 an
et demi201(*). Les
objectifs fondamentaux de cette troisième convention sont à la
fois politiques et économiques.
Sur le plan politique, les objectifs visent à garantir
la paix et la stabilité dans le pays. Sur le terrain, le gouvernement
met en place un Gouvernement d'Union Nationale (GUN) pour inclure des
représentants de tous les partis politiques et différentes
régions du pays, créé une Commission Nationale de
Médiation (CNM) chargée de résoudre les conflits
politiques et sociaux, réforme le système électoral pour
garantir des élections libres et transparentes, met en place un
programme de désarmement, de démobilisation et de
réinsertion des anciens combattants, instaure l'amnistie pour tous les
prisonniers politiques et exilés, et promeut la diversité
culturelle et linguistique du pays202(*).Par ailleurs, malgréla réduction de la
violence politique et le favoritismed'une plus grande participation politique
des différents groupes au Cameroun sur la courte durée, des
défis tels que les tensions anglophones et francophones demeurent
d'actualité.
Sur le plan économique, lesobjectifsspécifiques
concernentle dégagementd'un excédent budgétaire au niveau
du solde primaire et l'organisation d'une meilleure répartition des
dépenses entre les dépenses courantes et les dépenses
d'investissement à travers la réduction de la masse salariale des
fonctionnaires203(*).Pour atteindre ces objectifs, les stratégies
sont portées sur l'élaborationdes politiques budgétaires,
monétaires, sociale, de l'endettement, et de réformes
structurelles.
Mais au mois de juin 1994,les administrateurs du Fonds
reprochent à l'Étatdu Cameroun des retards dans la mise en oeuvre
des réformes économiques, notamment en matière de recettes
budgétaires et de restructuration du secteur public, rapporteLes
Échos204(*).L'accord estabrogéen mai 1995.Mais seul le
financement de l'UEvia le STABEX permet à l'État camerounais de
donner des signes de bonne volonté en 1995 enredressantses recettes
fiscales,d'où laconclusiondu quatrième contratavec le Fonds en
juillet 1995.
1.4. L'accord de
confirmation du 27juillet 1995
Après de longues et difficiles
négociations,legouvernement de Yaoundé, représenté
par Simon AchidiAchusigne mercredi 27 juillet 1997 une lettre d'intention avec
le FMI, représenté par Michel Camdessus en vue d'obtenir de
nouveaux crédits d'un montant de 97 millions de dollars pour la mise en
oeuvre d'un PAS205(*).En
théorie, les objectifs fondamentaux concernent la réalisationd'un
taux de croissance réelle du PIB de 5%, laréductionde l'inflation
de 8%et lastabilisationdu déficit des transactions extérieures
courantes à environ 2,5% du PIB. Et pour atteindre ces objectifs,le
gouvernement renforce substantiellement la position deses finances publiques,
élabore une politique monétaire restrictive et réforme
lesecteur public, le secteur agricole et celui des transports206(*).
Maisaprès la mission d'évaluation du 2 mars 1996
effectuée par les administrateurs du Fonds, cet accord est abrogé
par le FMI à cause des lourdeurs observésdans son
exécution. Selon Jeune Afrique,ces lourdeurs sont
caractérisées parles retards dans la mise en oeuvre des
réformes structurelles, le non-respect des engagements pris par le
gouvernement, les problèmes de corruption, l'instabilité
politique, les tensions sociales, et la mauvaise gestion des ressources
publiques207(*). Compte
tenu de ces distorsions, le Fonds juge que l'atteinte des objectifs
fixés dans ce quatrième programme en matière de finances
publiques et d'ajustement structurel ne pourront être atteints.Ainsi,
face aux échecs répétés des accords de confirmation
et de la sévérité des effets néfastes de la crise
au Cameroun comme dans bien d'autres pays sous ajustement, le Fonds
décide d'adopter en 1996 des mesures de centrages de politique
économique afin de justifier sa légitimité.
2. Les accords
économiques et financiers triennaux
Face au ralentissement économique mondial et aux
difficultés sociales qui sévissent dans les États sous
ajustement, le Fonds réforme son mode d'intervention en 1996 lors de la
51e réunion du Comité intérimaire du Conseil
des gouvernements sur le système monétaire international.Il se
charge d'assurer le redressement de l'économie en s'attaquant
énergiquement aux faiblesses structurelles du secteur financier et
social, d'où l'adoption de la Facilité d'Ajustement Structurel
Renforcé (FASR) etla Facilité pour la Réduction de la
Pauvreté et pour la Croissance (FRPC) dans le cadre de l'Initiative Pays
Pauvre Très Endetté (IPPTE) proposé au Cameroun en
1997208(*).
2.1. La Facilité
d'ajustement structurel renforcé (FASR), 1997-2000
Il s'agit d'un type d'accord octroyé par le FMI au sein
de l'IPPTE dans le but d'aider les États en crise àmettre en
place des réformesstructurelles efficaces de lutte contre la
pauvreté sur une période de 3 ans. Lorsque le Cameroun devient
off Track en 1996, le premier ministre Peter MafanyMusongeconclut avec
Michel Camdessus une facilité de 529,42 millions d'Unité de
Compte (UC)le 1er juillet 1997209(*). Les objectifs fondamentaux
sont essentiellement économiques, soitla limitation du
déficit budgétaire courant du PIB, le maintien d'un taux de
croissance économique à 5%, et la baisse de l'inflation à
un seuil de 2% jusqu'en 2000.Pour atteindre ces objectifs, le gouvernement
élaboredes politiques de transparence financière,de rigueur
budgétaire etde privatisation d'entreprises publiques, selon Jeune
Afrique210(*).Cette
facilité fait recours à l'assistance de plusieurs bailleurs de
fonds comme indique le tableau ci-dessous :
Tableau n°4 :Les engagements
financières des bailleurs de fonds pour la FASRau Cameroun
Bailleurs de Fonds
|
FAD
|
FMI
|
BM
|
UE
|
France
|
Sommes allouées en millions d'ECU
|
13,02
|
157,1
|
206,2
|
19,04
|
134,06
|
Source : Fonds Africaine de
Développement 2001.
Selon le tableau ci-dessus, le FADavait un engagement de13,02
millions UC,le FMIde 157,10 millions UC, la BMde 206,20 millions UC,l'UEde
19,04 millions UC, et France de 134,06 millions UC.Mais selon les
données recueillies sur le terrain, seul 493,22 millions d'UC sont
déboursés et 170 millions bloqués par la Banque mondiale
pour retards de privatisationd'entreprises publiques211(*). Celaa perturbé le
bon déroulement du programme qui permet tant bien quemal au Cameroun
d'atteindre le point de décision en octobre 2000, d'où
l'annulation de sa dette extérieure d'environ 900 millions de dollars
par le Club de Paris etla signature d'une nouvelle facilité.
2.2. LaFacilité
pour la Réduction de la Pauvreté et pour la Croissance (FRPC),
octobre 2000
La presque bonne exécution de la FASR restaure la
crédibilité du Cameroun au sein de la communauté
financière internationale, d'où la signature de la FRPC au titre
de l'initiative PPTE renforcée entre Peter MafanyMusonge et Michel
Camdessus d'une somme de le 1er octobre 2000 dans le but de soutenir
les programmes destinés à renforcer de manière
substantielle et continue la position de la balance des paiements et de
contribuer à une croissance durable212(*). Les principaux objectifs consistent
àaugmenterletaux de croissance moyen de 5% en 2004, de porter les
recettes non pétrolières à 15,6% en 2002, de limiter le
déficit budgétaire de 3% par rapport au PIB,de limiterle
déficit extérieure courant du PIB, et decontenir l'inflation
mesurée par les prix à la consommation à 2%213(*).
Pour atteindre ces objectifs, le gouvernement élabore
des programmes pour acheverla privatisation des sociétés
publiques et parapubliques,pour renforcer la bonne gouvernance,pour lutter
contre la corruption, etpour renforcer l'intégration
régionale214(*).Mais en octobre 2002,le président Biya change
de cap et le torchon brûle entre Yaoundé et Washington.Le FMI
accuse le gouvernement camerounais de fournir des données
erronées surle fonctionnement ministériel, la privatisation
desentreprises et lagestion budgétaire, selon Jeune
Afrique215(*). Cela
débouche par la suite à la suspension de tous les programmes en
cours par le Fondset à l'absence du Cameroun sur la liste des pays qui
atteignent le point d'achèvement de l'IPPTER en 2004.
Après une longue période de rupture de
négociation, ce n'est qu'après la réélection du
président Biya en 2004 que le Cameroun et le FMI relancent le
partenariat économique et financier. Comment le comprendre ? En
effet, dès l'entame de son 4e mandat présidentiel,
monsieur Biyademande à son gouvernement de pratiquer une gestion
rigoureuse des finances publiques, de sécuriser les recettes de
l'État et de restructurer les entreprises publiques,ce qui a permis la
mise en place d'un arsenal de lutte contre la corruption et une agence
d'investigation financière. Le Cameroun redevient un «bon
élève'' aux yeux des IBW, et lui permet
debénéficier à nouveau de la FRPC avec à la
clé 14,5 milliards de FCFA sur 3 ans pour financer les réformes
engagées et 4,4 milliards de FCFA en annulation de dette.
Ainsi, après le rendez-vous manqué du G8 de
juillet 2004 ayant entériné l'annulation de la dette
multilatérale de 18 pays pauvres pour une somme de 40 milliards de
dollars, le Cameroun atteint le point d'achèvement de l'IPPTER le
1er mai 2006216(*). Par ailleurs, sachant que les décaissements
devant soutenir l'application des PAS se font après engagement de
respect de certaines conditions depuis le second amendement des statuts du
Fonds, quelles sont celles qui ont été convenues pour
l'État camerounais ?
II. LES CONDITINNALITES
D'EMPRUNT ET LEUR MISE EN APPLICATION CONCRETE AU CAMEROUN
Selon C. Samson, la conditionnalité est l'ensemble des
politiques que les pays utilisant les ressources du FMI doivent suivre pour
«résoudre'' leurs difficultés de balance des
paiements217(*).
Malgré leur absence dans les statuts initiaux du Fonds, elles
trouventleur assise légale dans la déclaration n°2603 du 20
septembre 1968 par laquelle les administrateurs du Fondsintègrent et
rendent obligatoires les conditions dans les accords de confirmationdu
FMI218(*).Ces conditions
consistaient à ouvrir les paysdu Sud aux investissements
étrangers, à accroitrela résilience et à
diversifierles économies. Dès lors, la question ici posée
est celle de savoir quelles sont celles qui ont été
approuvées par l'Étatcamerounais entre 1988 et 2006 ?
1. Les politiques de
réformeapprouvées par l'Étatscamerounais
En effet,lorsqu'un État signe un accord avec le FMI,
cela voudrait dire que cette État approuve l'ensemble de mesures
correctives ou politiques de réforme que lui impose cette
institution.Concernant le Cameroun de façon particulière, elles
ont été à la fois macroéconomiques et
structurelles.
1.1. Les
politiquesmacroéconomiques
Les politiquesmacroéconomiquessont celles qui
opèrent une rupture radicale avec les choix antérieurs de
l'Étatet impactent directement les conditions de vie des citoyens.Il
s'agit de la réduction des dépenses publiques et la
réduction de la masse monétaire en circulation.
Concernant la réduction des dépenses publiques,
elle consiste à appliquerdans le pays des politiques
d'austérité budgétaire, consistant à diminuer les
consommations des administrations publiques, les salaires, les subventions et
les transferts. Cela explique doncl'abandon des subventions, l'assainissentdu
budget et la réforme du systèmefiscale au Cameroun.La Loi des
Finances 88/89 relève la fiscalité par une augmentation de la
taxe spéciale sur les produits pétroliers, revalorise les tarifs
des services publics, institutionnalise une nouvelle taxe sur la
propriété foncière et le reversement par la SNH d'une
redevance pétrolière, et limiteégalementles
dépenses courantes, ainsi que les programme d'investissement
publics219(*).
Dans l'agriculture et les produits de première
nécessité, le gouvernement cesse brusquement les subventions,ce
qui entraine une la baisse de la production des cultures de café, de
cacao et de coton qui sont les principales bénéficiaires de ces
aides. Leur production passe de plus de 5% en moyenne annuelle entre 1961 et
1986 à moins de 1% entre 1987 et 2004, selon
L'Express220(*). Le Camerounsupprime les taxes à
l'exportation, réduit l'encadrement de la production par les
sociétés publiques, élimine le contrôle des prix et
la qualité des cultures, et libéralise la commercialisation de
ces produits ainsi que les intrants utilisés dans leur
production221(*).
Pour ce qui est de la réduction de la masse
monétaire en circulation, il s'agit du contrôle strict du
crédit par l'augmentation de son coût ou par la diminution de sa
quantité. Selon le FMI, ce contrôle permet de lutter efficacement
contre l'inflation et la perte de la compétitivité de
l'économie. Cela explique donc lacontractiondes sommes allouées
dans les secteurs de la santé et l'éducation,l'améliorela
collecte des impôts,la lutte contre la fraude fiscale et
ledésengagement progressifde l'Étatau profit du secteur
privé222(*).Au-delà de ce point de vue de Davalas
Aguilar, Cameroon tribune rapporte également qu'une redevance
informatique, les taxes minimums à l'importation,et le droit de
consommation sont introduits, tandis qu'un taux d'intérêt exact
est fixé afin de décourager les petits producteurs et entreprises
àfaible rentabilité qui continuentde drainer les ressources
financières de la communauté223(*).
1.2. Les
politiquesstructurelles
Contrairement aux mesures macroéconomiques, les mesures
structurelles concernent la privatisation des entreprises publiques, la
réforme du système financier, la réforme de la
fiscalité, la réforme industrielle, la libéralisation du
commerce extérieur et la dévaluation de la monnaie locale.
Concernant laprivatisation des entreprises publiques, elle
consiste en l'assainissement des sociétés publiques et
parapubliques dans le but d'améliorer la performance des
résultats médiocres des entreprises publiques. En effet, le
secteur privé devrait être le seul acteur capable de dynamiser ces
entreprises, ce qui confirme donc la caractère classique et capitaliste
des programmes d'ajustement structurel. Au Cameroun, la commission de
réhabilitation est créée avec pour mission d'identifier
celles qui doivent être liquidées, privatisées ou rester
sous contrôle public.En 1990, les résultats de l'audit des 75
entreprises publiques concluent que 15 devaient être liquidées, 12
privatisées et 30 restructurées224(*). En contrepartie, ces mesures entrainent la
cessation de l'État providence et la mise au chômage de plus de 14
milles Camerounais.
Pour ce qui est de la réforme du système
financier, elle se traduit dans la pratique par la liquidation des institutions
financière défaillantes, la restructuration des modalités
de fonctionnement du système financier, la modernisation du
système de paiement, la mise en place du dispositif prudentiel et d'un
cadre favorable à la finance directe. Notamment la
désintermédiation financière, la création des
marchés financiers et la dérèglementation
financière225(*).
La réforme de la fiscalité pour sa part consiste
en l'adoption d'un régime fiscale souple, soit la baisse du taux
d'imposition, pour promouvoir l'investissement privé et élargir
l'assiette fiscale. Par ailleurs, ces recettes fiscales devront permettre
à l'État camerounais de concrétiser des projets de
dépenses de fonctionnement et d'investissement sans compromettre
l'investissement privé. L'objectif fondamental est d'attirer les
Investissement Direct Étranger (IDE)226(*).
Concernant la réforme industrielle, il est question de
réduire les effets négatifs liés à la pratique des
prix administratifs, au système d'attribution des marchés
publics, et de simplifier les lourdeurs administratives.Le but est de donner au
secteur privé la confiance indispensable pour la réalisation
d'une croissance soutenue et durable. Et c'est pour cette raison que le
Cameroun créé des zones franches industrielles, et aménage
les codes d'investissement et de passation des marchés publics.
Concernant le développement du commerce
extérieur, il s'agit d'ouvrir l'économie nationale sur le
marché mondial, afin qu'elle puisse profiter des avantages comparatifs
et intégrer la mondialisation porteuse de nombreux bienfaits. Ce volet
des mesures échoit plus spécifiquement à la Banque
mondiale que le FMI, dans la mesure où il touche directement la
libéralisation de l'économie et le système d'incitation
à la production et à l'exportation. À l'intérieur
du pays, le contrôle des prix est démantelé pour favoriser
la concurrence, les salaires du secteur privé et des marges commerciales
sont désindexés par rapport aux salaires publics, la
mobilité professionnelle devient un facteur de réduction des
coûts du travail, et un nouveau code de travail est mis en
place227(*).
Sur le plan extérieur, le système de
restrictions quantitatives est remplacé par une politique de tarifs, un
certain nombre de quotas est éliminé sur les importations, et les
taxes à l'exportation disparaissent. Par ailleurs, une réforme
est entreprise au niveau de l'UDEAC pour harmoniser les droits de douane et le
niveau de protection228(*). Cette stratégie a également
été bénéfique pour les Dragons d'Asie, notamment le
Taiwan, la Corée du Sud, Le Singapour, Hong Kong, et la
Thaïlande.
Concernant la dévaluation monétaire, elle
renvoie à la décision délibérée et
officielle des autorités monétaires de modifier à la
baisse la parité de la monnaie nationale par rapport au
numéraire. Elle diffère de ce fait de la
dépréciation qui est la perte de la valeur de la monnaie sur le
marché de change du fait des spéculations. L'objectif principal
est de converger vers la relance économique via la réduction de
la tendance à trop importer à cause du renchérissement des
produits importés, et la stimulation des exportations à cause de
la baisse de leurs prix.
2. Mise en application
concrète des conditionnalitésapprouvées par le
gouvernementcamerounais
La mise en application concrètede ces conditionss'est
traduite sur le terrain par la mise en place d'un certain nombre d'instruments
sur le plan institutionnel, politique et économique entre 1988 et
2006.
2.1. Sur le
planinstitutionnel et politiques
En 1991, le gouvernementmet sur pied un nouveau code de
travail et établi un nouveau Taux Horaire de Salaire (THS).Cela
estparachevé en 1994 avec l'adoptiondes dispositions du décret
n°94/160 du 16 août 1994 réformant le Ministère de la
Fonction Publique et de la Réforme Administrative (MINFOPRA)229(*).Cette réforme
implique l'arrêt de recrutement dans la fonction publique et les
licenciements massifs du personnel administratif. Plusieurs Camerounais, dont
le seul employeur était l'État, sont donc mis hors service et
à la retraite anticipée entre 50 ou 55 ans à la force de
l'âge, au lieu de 55 ou 60 ans comme auparavant230(*).Pour ceux qui n'ont pas
perdu les emplois, les salaires sont revus à la baisse en 1993.
L'accès à l'emploi et la promotion des
fonctionnaires devient conditionné par certains
déterminants,notamment le versement de pots-de-vin ou le trafic
d'influence, selonLe Messager231(*). Les jeunes vivants dans les ménages
où les parents travaillent dans le secteur formel deviennentplus
favorisésà participer au marché du travailau
détriment des jeunes dont le chef de ménage travaille dans le
privé informel. Selon Gauthier, pour un jeune dont le chef de
ménage travaille dans le secteur public formel, ses chances de
participer au marché du travail sont de 34%, tandis que pourun jeune
dont le chef de ménage travaille dans le privé informel,ses
chances de participer au marché du travail sont de 9%
seulement232(*).
En effet, la libéralisation du marché du
travailpar le nouveau code fait l'objet de débats
télévisés.L'opinion nationale conteste vivement la
légitimité et la bonne foi du gouvernement en place et cela pour
plusieurs raisons. En 1991,seul le Fonds National de l'Emploi (FNE) compte11
milles demandeurs d'emploi eten 1993, l'indicateur
hautement significatif du taux de salaire horaire ouvrier (THS) établi
par le ministère du Travail subi une stagnation inférieure
à 0,8% à l'évolution des prix233(*).Pour les fonctionnaires
qui ne perdent pas d'emploi, les salaires sont ramenés à 2,6% en
1993, contre 4% en 1992 et 4,9% en 1991.Ainsi, un jeune cadre et un Commis qui
touchaient respectivement un salaire de 298916 FCFA et 53433 FCFA non
dévalués le 1er juillet 1987 gagnent 102000FCFA et
15676 FCFA dévalués en 1994234(*). Le pouvoir d'achat des ménages se ramollit
à hauteur de 0,2% contre 1,6% en 1992 et 1,7% en 1991235(*).
Sur le plan politique interne,le début des
années 1990 est symbolique dans la marche,loin d'être
sinécure, du Cameroun sur les sentiers de la démocratie. Alors
qu'en 1989 Le Messager évoquait encore le monolithisme dans sa
rubrique Takala et Munyenga, c'est en 1990 que le coup d'envoi non
officiel du processus démocratique camerounais est donné avec la
création d'une «Coordination Nationale pour la Démocratie et
le Multipartisme''. Cela a valu l'arrestation de Me Yondo Black, ancien
bâtonnier et de plusieurs autres personnes pour sédition,
subversion, affront au chef de l'État en février 1990236(*). Par ailleurs, malgré
le refus officiel du multipartisme, John FruNdi lance en mai 1990 à
Bamenda, le Social Democratic Front (SDF) lors d'une marche dont la
répression cause la mort de 6 personnes.Mais c'est finalement le 4
juillet 1990 que le président Biya accepte d'abandonner le monopole
politique du parti unique exercé depuis 1966 au profit du
multipartisme237(*).
En décembre 1990, l'Assemblée nationale adopte
une série de lois sur la liberté d'association et de
création de partis politiques. Mais c'est le 30 octobre 1991que le
Premier ministre Sadou Hayatouinitie une conférence tripartite
gouvernement-opposition-société civiledans le but de
définir le cadre électoral, l'accès aux médias
publics et la réforme constitutionnelle su 18 janvier 1996.Après
le boycotte de l'opposition, elle se tint finalement en mars 1992, et seul le
RDPC, l'Union Nationale pour la Démocratie et le Progrès (UNDP)
de Bello Bouba, le Mouvement pour la défense de la République
(MDR) et l'Union du Peuple Camerounais (UPC) deKodock se partagent les 180
sièges du parlement avec respectivement 88 pour le RDPC, 68 pour l'UNDP,
18 pour l'UPC et 6 pour le MRD238(*).
Le 11 octobre 1992, l'issu des élections
présidentielles donne la victoire auprésident sortant Paul Biya
avec 39,9% des voix contre 35,9% pour J. FruNdi et 19,21% pour B. Bouba, selon
Cameroun tribune239(*). Cette issue n'est pas partagée par tous les
millions des Camerounais, les observateurs et certains ONG. Caraprès la
publication des résultats, le pouvoir est accusé de fraude par le
National Democratic Institute qui est une ONG américaine de
scrutateurs par exemple, alors que des émeutes éclatent dans le
Nord-Ouest du pays où l'état d'urgence est proclamé et des
leaders de l'opposition arrêtés ou mis en résidence
surveillée, comme ce fut le cas de J. FruNdi. Par contre ni à
l'Assemblée nationale, ni dans la rue de Yaoundé, la panique du
pouvoir ne s'est muée240(*).
Le 18 janvier 1996, une nouvelle Constitutionfaisant du
Cameroun un États unitaire décentralisé est
promulguée par le chef d'État.Les objectifs visés dans
cette loi fondamentale sont :la modernisationdes institutions, la
démocratisation de la vie politique et l'assuranced'une
décentralisation effective, selonCameroon tribune241(*).Cette constitution
bannit les vestiges du parti unique contenus dans la précédente
loi fondamentale,instaure la liberté de communication, la liberté
d'expression, la liberté de presse, la liberté de réunion,
laliberté d'association, la liberté syndicale et garanti le droit
de grève242(*).
L'article 14 établit le Senat comme chambre Haute du parlement, tandis
que l'article 6 détermine la durée du mandat présidentiel
à 7 ans renouvelable une fois243(*).En effet, cet aménagement de l'espace
juridico-politique permet de constituer une opposition légale.
Concernant la politique extérieure,le Ministère
des relations extérieures est remanié en 1988afin d'instaurer une
diplomatie plus offensive dans le butde consolider les anciennes amitiés
et de chercher les nouveaux partenaires via une coopération suivie et
efficace.Dès 1990, on peut donc observer la récurrence des
voyages diplomatiqueset la multiplication des audiences dule Chef
d'Étatavec plusieurs personnalités étrangères dans
la capitale politique244(*). LeCamerounélargi le cercle de ses
partenaires à travers le monde grâce à la création
ou la réouverture de plusieurs missions diplomatiques et consulaires
à l'étranger. Cela a permis de traduire la volonté de
réaffirmer la présence et la participation du Cameroun sur la
scène internationale.Ainsi, sur la période de 1990 à 1995,
cet État signe plusieurs accordsstratégiques, de
coopération économique et technique avec les pays des quatre
coins du monde à l'instar de la Chine (1990), la Russie (1991), l'Inde
(1993) et le Brésil (1995).Celaa ouvert la voie à des projets de
développement dans les secteurs de l'agriculture, l'énergie et
les infrastructures par exemple245(*).
2.2. Sur le plan
économique
Le gouvernement assainit la gestion des entreprises publiques
et parapubliques par une triple action de restructuration, liquidation ou
privatisation, conformément à l'ordonnance n°90/004 du 22
juin 1990246(*). Ce
décret favorise la privatisation des entreprises publiques
telles quela SODECOTON, la SOCAPALM, la CDC, la CAMAIR, et la CAMRAILentre
1990 et 2005, et hissele groupe Bolloré, qui n'a pas
hésité à profiter de la situation,au rangd'acteur majeur
dans le tissu économique et la vie politique du Cameroun.Concessionnaire
de la société de chemin de fer CAMRAIL en 1999, il
obtientégalement la concession du terminal à conteneurs du port
de Douala en 2005. Ce qui lui permet de s'installer un peu partout au Cameroun,
notamment à Douala, Yaoundé et Garoua247(*).
En 2004 par exemple, l'État du Cameroun cède ses
parts dans plusieurs sociétés du secteur parapublic,ce qui
favorise l'éclosion d'un secteur privé dynamique qui contribue
à attirer les capitaux étrangers, participe au transfert de
technologie et à la formation de la main d'oeuvre qui acquiert un
savoir-faire, rapporte Bertin OnanadansJournal du Cameroun248(*).Par ailleurs,
l'accaparement de ces entreprises stratégiques par de lointains jeux
financiers des transnationales incite certains Camerounais à
considérer l'intrusion de ces entreprises comme un mouvement intense de
néocolonialisme249(*).
Concernant la restructuration des dépenses publiques,
le gouvernement adopte des mesures de réduction des subventions dans les
hôpitaux publics,et promeut des programmes de santé publiques
axés sur la prévention et la promotion de la santé,
notamment la lutte contre le VIH/SIDA, la tuberculose et le paludisme, dans le
secteur de la santé.La gratuité des soins disparait au profit
desdysfonctionnements techniques etl'absence de management de qualité et
vétusté des infrastructures.Au Cameroun, tandis que
l'hôpital public souffre de tous les maux, les usagers peinent à
se prendre en charge, selonJeune Afrique250(*).Ce point de vue de M. Cotinat est
confirmé parEdzimbiEmboloAngèle lors des enquêtes sur le
terrain, qui rapporte «qu'au Cameroun [à cette époque], si
tu es malade et que tu n'as pas d'argent, tu meurs,car le malade doit payer de
sa poche jusqu'au gants utilisés par les médecins et les
infirmières, soit 100 FCFA la paire''251(*).Cela confirme les dires du politologue
Jean-François Médard qui soulignait que «L'hôpital au
Cameroun n'est plus fait pour soigner ; mais il arrive qu'on y
soigne''252(*).
Les coûts de soins de santé augmentent, tandis
que les services de santé publics sont réduits en raison de la
diminution des subventions gouvernementales.Face à ces faiblesses,
auxquelles on peut ajouter l'absence d'éthique professionnelle et le peu
d'implication de certains acteurs du secteur, les hôpitaux montrent de
grands signes d'essoufflement et ne portent plus les marques d'excellence d'il
y a quelques années. Pour s'en sortir, certains se rendent dans les
centres de santés de quartiers où le coût des soins est
moins cher que dans les hôpitaux, tandis que d'autres personnes se
tournent vers des établissements clandestins où infirmiers et
laborantins se reconvertissent en spécialistes253(*).
Dans le secteur éducatif, le Cameroun entame la refonte
en 1993 dans le secteur à travers un processus de réforme qui
s'étale sur plus d'une décennie. Le désengagement de
l'État se traduit par la réduction des dépenses scolaires,
la fermeture de nombreux établissement,la suppression des bourses
d'étude et la promotion du secteur privé de
l'éducation.Cela cristallisele système
éducatifcamerounais, surtout supérieur,et favorisela culture de
la paresse254(*).
Pourtant lorsqu'on remonte au milieu de la décennie 1970, on constate
que l'une des filles du président A. Ahidjo a passé une session
de rattrapage après son échec au brevet d'études du
premier cycle (BEPC) comme 70% de cette génération. Cela
démontre donc à quel point le système
éducatifétait rigoureux, vertueux, impartial et ambitieux
d'excellence. Mais en 1990, un tel évènement est
inconcevable.L'enseignement devient comme un bien privé dans lequel les
individus investissent et escomptent un rendement tout aussi privé,
où l'éthique est mise sur le boisseau, et les compétences
en berne.
En 1996, les bourses accordées aux étudiants
sont supprimant,ce qui susciteune réaction négative de la part de
ces derniers et de leur famille. Selon l'opinion estudiantine, cette
décision est considérée comme mesure discriminatoire et
injuste parce qu'elle affecte principalement les étudiants africains qui
ne peuvent pas se permettre de payer les frais de scolarité
élevés dans les universités publiques du
Cameroun255(*). En
effet, cette période présente les sombres jours de
l'université au Cameroun, car beaucoup d'étudiants venant de
familles pauvres ont dû tout abandonner leur cursus.
Pour paraphraser PierreOnana, une victime du
système,cettegénération a été les brebis
galeuses parce que les bourses académiques sont supprimées et le
payement obligatoire des droits universitaires instauré. Ainsi,
malgré de bonnes notes à son actif, il a été
obligé de rentrer au village sans pouvoir obtenir sa licence256(*).Pourtant depuis 1973, les
étudiants recevaient une bourse mensuelle de 55 milles en plus des frais
de scolarité gratuits.Mais en 1996, les étudiants
étrangers qui étaient autrefois formés au Cameroun sont
contraints de chercher des opportunités de formation ailleurs,
d'où la perte de revenus pour les universités publiques du
Cameroun.
Concernant le secteur bancaire, le gouvernement camerounais
lance un programme de réforme porté essentiellement sur le
système d'intermédiation bancaire et limite sa participation dans
le capital des banques à 20% conformément à la loi
n°97/014 du 18 juillet 1997. Celase caractérise par une
redéfinition de la politique monétaire et une restructuration du
système bancaire par le biais des liquidations, de fusions, ou de
recapitalisation de certaines banques257(*). Pour conforter ces réformes, la Commission
Bancaire de l'Afrique Centrale (COBAC), dont l'objectif est d'assainirle
système bancaire par un contrôle régulier et une
supervision des établissements de crédit, est créé
en 1990258(*).
Cameroon tribune rapporte également la
privatisation et la fusion de plusieurs banques et sociétés
d'assurancesdans le but de renforcer leur position sur le marché. C'est
le cas par exemple de la BICIC qui devient BICEC le 14 mars 1997, puis une
filiale du groupe Banque populaire en 2000259(*). Par ailleurs, malgré certains quiproquos en
matière d'inclusion financière et de développement des
services financiers dans les zones rurales, ces réformespermettent de
consolider le secteur financier camerounais.
Concernant la libéralisation, elle se fait au Cameroun
de façon unilatérale et multilatérale.De façon
unilatérale, le gouvernement ouvrel'économie aux investissements
étrangersvia l'adoption de plusieurs décrets et mesures. Il
s'agit notamment dela loi n°89/011 du 28 juillet 1989 sur la restauration
d'une économie de marché et l'ordonnance n°90/001 du 29
janvier 1990 qui créent le régime de la zone franche industrielle
au Cameroun, la suppressiondes barrières commerciales,
laprivatisationdes entreprises publiques, du contrôlant de l'inflation,
la simplification des procédures administratives, la réduction
des formalités bureaucratiques, et de la dérèglementant
des marchés260(*).Ce point de vue d'Élisa Paulin converge avec
celui de Jeune Afrique qui rapporte en 1990 que le Cameroun met
progressivement sur pied des mesures de libéralisation économique
unilatérales dans le but de stimuler la croissance économique et
d'attirer des investissements étrangers261(*).
Par ailleurs, les entreprises installées dans les zones
franches industrielles bénéficient, pendant les dix
premières années de leur exploitation, de l'exonération
totale des impôts et taxes directes et/ou indirectes en vigueurs, dans le
but de rendre compétitif les productions pérennes,demaintenir le
pouvoir d'achat des travailleurs, de stabiliser les revenus des producteurs, et
de contrôler l'inflation.Ainsi, les prix des facteurs de production et
des biens et services cesse d'être déterminés par le
gouvernement, mais plutôt que par les forces du marché262(*). Les journaux n'ont pas
connaissance de ces soubresauts divers.
Pour faciliter les échanges commerciaux avec d'autres
pays, des mesures de restriction quantitative, les exemptions tarifaires,les
licences d'importations, et les avantages douaniers et fiscaux sont
supprimésouréduits. Après la dévaluation du franc
CFA le 12 janvier 1994, un nouveau PGE est adopté pour renforcerles
mesures de libéralisation et uniformiser la nouvelle politique
commerciale afinde mieux tirer profit de la dévaluation. Un cadre
juridique pour lutter contre les pratiques commerciales illicites et la
concurrence déloyale est également adopté263(*). Cela a permis d'instituer
des prélèvements sur l'exportation des produits de base (cacao,
café, coton, sucre, l'huile de palme, caoutchouc et les plantes
médicinales)et de maximiser les effets positifs de la
dévaluation.
Par ailleurs, cettelibéralisationa également
été un sujet de polémiquedansla presse.SelonLes
Échos,la libéralisation de la SODECOTON par exemple manque
in extremis de se traduire par un rachat en sous-main et vil prix
d'une bonne partie du capital par quelques investisseurs locaux en quête
de profits faciles. En 1995, près de la moitié du capital
estpresque rachetée par un groupe de notables du nord du pays, tous
proches du pouvoir et rassemblés autour de l'ancien Premier ministre
Sadou Hayatou, pour 15 millions de FCFA264(*). Or durant l'exercice 1984/85, cette entreprise
réalise une somme dérisoire de 50 millions de FCFA de
bénéfices, réalise un chiffre d'affaire de 650 millions de
FCFA et emploie 1500 personnes.Ainsi, lorsque cette opération hautement
secrète fini par se savoir,cela provoque la colère des
Camerounais, des dirigeant de la SODECOTON, de la CFDT, et de Justin Ndioro, le
ministre des Finances, qui voit là échapper une importante source
de recettes pour l'État265(*).Celaéclaire doncla lanterne sur la menace
affairiste qui pèse sur les entreprises camerounaises dans le cadre des
privatisations caractériséespar le manque de réalisme des
schémas libéraux de la BM.
Concernant la libéralisation multilatérale, elle
se fait dans le cadre de l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC) et de
plusieurs groupes de négociation auxquels appartient le Cameroun,
notamment le Groupe africain, le Groupe des pays ACP, le G-90, le Groupe de
Pays visés par le paragraphe 6 et le groupe «Auteur''
du«W52''266(*).Elle se traduit par la réduction des
barrières commerciales comme les droits de douane et les restrictions
quantitatives sur les importations.
Grâce à son statut de PVD, le Cameroun
bénéficie d'un certain nombre de préférences lui
permettant d'avoir accès au marché européen et
américains en franchise de droits de douane via les conventions de
Lomé, de Cotonou, etdel'AfricaGrowth and Opportunity Act (AGOA)
avec les Etats-Unis d'Amérique267(*).Après un cycle infructueux de
négociation dans le cadre de la CEMAC, le Cameroun négocie
unilatéralement avec l'UEl'Accord de Partenariat Économique
Bilatéral (APEB), encore appelé accord d'étape qui devient
le nouveau cadre de référence des relations commerciales entre
les deux parties268(*).
Ce choix que fait le Cameroun de conclure cet accord de
libre-échange avec l'UE est tout simplement stratégique et
correspond aux impératifs internes de restructuration et de
reconfiguration économique dans une perspective d'émergence
à moyen terme du pays269(*).Au-delà des démantèlement
tarifaires, l'APE étape prévoit également l'interdiction
des droits de douane à l'importation, l'interdiction de quotas
d'importation ou d'exportation, la suppression progressive des subventions
à l'exportation des produits agricoles issus de l'UE, l'interdiction des
pratiques commerciales déloyales, et la possibilité de mettre en
place des mesures de sauvegarde multilatérales temporaires270(*).
Au Cameroun, les lois des financessurl'exercice 1997/98 et
1999/00 suppriment de 10 à 13,5% les taxes à l'exportation, sauf
pour les agrumes, ce qui permet d'accorderune place de choixau produit
camerounais dans les échanges commerciaux au sein des blocs
économiques d'intégration centreafricaine, comme la
Communauté Économique et Monétaire de l'Afrique Centrale
(CEMAC) et la Communauté Économique des États de l'Afrique
Centrale (CEEAC)271(*).
III. LE DESACCORDSUR
L'APPLICATION DES PROGRAMMES D'AJUSTEMENT AU CAMEROUN
Sollicité en 1988 pour pallier aux effets
néfastes de la crise, les PAS du FMI ont fait partie de ceux qui ont
polarisé les opinionsdans la presse locale.Cellequi est «contre''
dénonce le Fonds comme un rouleau compresseur écrasant tout ce
qui entrave ses ambitions de créer une société multiforme,
notamment les législations protectrices, les traditions et les
spécificités à l'instar de Le Messageret
Cameroon tribune. Et à l'inverse, celle quiest «pour''
croit que cette institution apporte une certaine stabilité
économique et un développement quelconqueen édifiant des
mécanismes de bonne gouvernance, comme Mutations, Le Messager,
et Cameroon tribune.
1. Une mise en avant des limites des programmes
d'ajustement
«À qui profite la
globalisation ?Certainement pas au continent noir'', estime Aminata
Dramane Traoré, Ministre de la Culture et du Tourisme malien, lors d'un
entretien avec Melvin Akam, rapporté par Le Messager272(*). C'est dans cette
perspective qu'une franche partie de la population et observateurs se montrent
sceptique enversl'ajustement proposé par le FMI.Les limites qui sont
mises en avant sont : une vision dogmatique et statique du
développement, une négligence du volet social, une politique de
change incertaine, l'inefficacité d'une politique monétaire
sévère et l'ingérence dans les affaires internes.
1.1. La vision dogmatico-statique du
développement et la négligence du volet social
Comme dans bien d'autres pays auparavant, les PAS sont
appliqués au Cameroun sans tenir compte des spécificités
économiques propres de l'État. Les mêmes programmes
basés sur la fameuse trilogie «Stabilisation, Privatisation, et
Libéralisation'', communément appelée Consensus de
Washington sont imposés au Cameroun comme solution miracleà sa
crise économique. Obnubilés par le rétablissement des
grands équilibres, tels que l'équilibre budgétaire,
l'équilibre de la balance des paiements, ajustement des taux des
changes, et l'équilibre de l'offre et de la demande intérieure,
les PAS relèguent au second plan le bien-être social de la
population et ignorent la nécessité d'un réel
développement économique du Cameroun273(*).
Malgré la nature des difficultés
économiques, le FMI applique la fameuse conditionnalité qui
consiste à réduire les dépenses de l'État et
à augmenter les recettes fiscales, à réduire la demande
intérieure, à accroitre les exportations, et à
dévaluer la monnaie locale. En demandant au gouvernement camerounais de
réduire le budget, un ou deux choix draconiens se sont
imposés : soit cesser ou diminuer l'équipement du pays,
indispensable au développement du pays, ou celui de cesser ou de
diminuer l'éducation des enfants, le traitement des maladies, le
logement et la nourriture des citoyens274(*). Mais le gouvernement a été contraint
de réduire le bien-être de la population en compressant les
effectifs dans le secteur formel, en baissantles salaires des fonctionnaires,
en réduisant les budgets dans les secteurs sociaux et en supprimant les
subventions par exemple.
En effet,le gel des recrutements, la suppression d'emploi et
les licenciements massifs du personnel dans les entreprises,
conformément au nouveau code de travail voulu par le FMI, en
1991créent un cadre d'incertitude pourles Camerounais qui perdent foi au
gouvernement et pour les jeunes diplômés qui voient
s'éteindre en eux l'espoir d'exercer dans l'administrations275(*). Dans le secteur bancaire
par exemple, la liquidation de la Société Camerounaise de Banque
(SCB) met 1000 Camerounais au chômage, tandis que celle de l'ONCPB fait
près de de 1800 victimes. Et avant cela, la SODEBLE, la SODENKAM, et
l'OCB avaient déjà mis la clé sous le paillasson mettant
beaucoup de Camerounais au chômage276(*).
Après les mises hors service,nombreux sont ceux
quiutilisent les petites annonces, les médiasou comptent sur leur
réseau de connaissance pour trouver un emploi.Ce qui explique donc le
faible taux d'inscription des chômeurs au Fonds National de l'Emploi
(FNE)et la prolifération des petits métiers de rue dans les
centres urbains du pays qui concentre plus de 84% de la population en
1996,selon les enquêtes 1-2-3 de 1993 et ECAM 1 de 1996277(*). A priori, l'impact direct
de cette reconfiguration du secteur de l'emploi est la dégradation
duniveau de vie de la population,du moment qu'on sait qu'au Cameroun, un
salaire fait vivre plusieurs familles278(*).
En milieu rural, les agriculteurssubissent le châtiment
de la chute drastique du prix des principaux produits de base, notamment le
café, le cacao, et lecoton, causantune baisse
généralisée de revenus au sein desménages279(*).Les migrations de retour
cessent d'être une option pour les jeunes citadins,la
légitimité et l'image de marque que revêtait le
gouvernement camerounais depuis la décennie 1970 sont
détériorés,alors que sa gestion économique est mise
en cause. Cela explique doncles nombreux troubles socio-politiques de la
décennie 1990, notammentla manifestation estudiantine de 1991,
l'opérations villes mortes de 1991, les contestations électorales
de 1992 etl'appel de l'opposition à l'incivisme fiscalde 1992 pour ne
citer que celles-là.
Les chaussures abandonnées et les flaques de sang au
sol témoignant le théâtre des opérations, c'est le
04 mai 1991que les forces de l'ordre se heurtent au mouvement de plus de 10
milles étudiants de l'Université de Yaoundé
organisés en meeting pour protester contre le gouvernement et
réclamer le départ du président Paul Biya280(*).Et selon TeneSop, cette
confrontation se solde par la mort de plusieurs d'entre eux, 200 blessés
et plus de 300 arrestations. Après ce triste bilan établit par ce
dernier et son acolyte Jean Bosco Tagne, la contestation estudiantine se
transporta alors dans toutes les villes du grand Ouest, emballant les
populations autour de la revendication. C'est ainsi que le mois de mai 1991
s'est transformé en mois de contestations, grèves et
sit-in dans les villes de Douala, Bafoussam, Bamenda, Kumba, Buea,
etc.281(*)
Ainsi,ces manifestations vont faire partir d'un mouvement de
contestation plus large en Afrique et dans le monde entier, notamment en
Côte d'Ivoire, au Gabon, en RDC, contre les programmes du FMI, connues
sous la nomination de «mouvement anti-FMI/Banque mondiale''282(*). Le mouvement est soutenu
par des personnalités politiques opposées au régime en
place et des acteurs de la société civile, tels que les
syndicats, les associations de travailleurs et les organisations de
défense des droits de l'homme.
Concernant «l'opération ville morte'', c'est en
avril 1991 que la Coordination Nationale des Partis Politiques (CNPP) lance
depuis Bamenda dans plusieurs villes du pays l'opération ville morte de
désobéissance civile basée sur des manifestations, des
grèves, et le non-paiement des impôts et taxes. Cette action gagne
tout le pays dure jusqu'en juin 1991, et la répression fait plusieurs
morts283(*). En effet,
ces politiques d'ajustement au élaborées par des technocrates aux
Etats-Unis ont créé de vive tension entre le gouvernement et la
société civile.
1.2. Une politique monétaire
sévère inefficace et une ingérence dans les affaires
d'États
À l'évidence, la politique monétaire est
un instrument de politique économique générale susceptible
de concourir, cumulativement ou alternativement, à la réalisation
de trois objectifs majeurs à savoir : la stabilisation des prix, la
croissance économique et le plein emploi, et l'équilibre
extérieur. Et avoir d'effets positifs, cette augmentation de la masse
monétaire devrait s'accompagner d'une hausse de la production, au risque
de se traduire essentiellement en inflation284(*). Mais lorsque le FMI, la Banque mondiale et la
France s'accordent à dévaluer le FCFA le 12 janvier 1994, les
conditions de réussite qui vont avec ne sont pas garanties, notamment la
dépendance de l'économie nationale envers l'extérieur et
la capacité de réaction des structures productives face à
la hausse de la demande interne.
Ainsi, bien que constituant un corpus de solutions louables,
comme la réduction de la tendance à trop importer à cause
du renchérissement des prix des produits importés et la
stimulation des exportations du fait de la baisse des prix, force est de
constater que la dévaluation n'a pas véritablement produit les
résultats escomptés sur le terrain même si le bilan reste
mitigé dans les journaux. À contrario, l'indicateur
hautement significatif du taux de salaire horaire ouvrier (THS) établi
par le ministère du Travail subi un véritable coup de frein, soit
une stagnation inférieure à 0,8% à l'évolution des
prix. Les salaires des fonctionnaires qui ne perdent pas d'emploi, sont
ramenés à 2,6% en 1994, contre 4% en 1992 et 4,9% en
1991285(*).Ainsi, un
jeune cadrequi touchait un salaire de 298916 FCFAnon dévalués le
1er juillet 1987 se retrouve à toucher
102000FCFAdévalués en 1994286(*).Cela a entrainé la chute du pouvoir d'achat
des ménages à hauteur de 0,2% en 1994 contre 1,6% en 1992 et 1,7%
en 1991287(*).
À cela s'ajoute également l'inflation
causée par l'insuffisance de l'offre de biens et service par rapport
à la hausse de la demande. En effet, l'encadrement du crédit
conduit à la réduction du volume de crédit dans les
entreprises publiques, d'où la contraction de la production.Le
caractère embryonnaire des marchés monétaire et financier
camerounais fait en sorte que la baisse du volume de crédit
débouche inévitablement à la hausse des taux
d'intérêt288(*). Cela explique donc l'impasse dans lequel a
évolué le secteur financier camerounaisentre 1989 et 2006. Par
ailleurs, est-il légitime de juger l'application des programmes
d'ajustement en se basant sur ses limites et ses effets pervers ?
2. Le pragmatisme de
l'autorité nationaleface aux défis de l'heure
Face à l'échec relatif despolitiques
d'ajustement autonomeset à la pression des bailleurs de fonds, les
autorités nationales se résolvent à solliciter
l'intervention du FMI dans le cadre des programmes d'ajustement structurel.
Pour ceux qui sont pour,ces programmes proposés par le Fonds devraient
apporter une certaine stabilité économique et un
développement quelconque.
2.1. Ajustement structurel commebase solide de
lutte contre les déséquilibresmicroéconomiques et
macroéconomiques
Dans le souci de corriger les dysfonctionnements quiminent
l'économie camerounaise depuis 1985, le président
Biyadécide de mettre en place les programmes du FMI qui vise à
rétablir les équilibres internes et externes du pays.
Après la forte réticence du gouvernement à recourir aux
crédits conditionnels du fonds, dont la contrepartie signifie une perte
sensible d'autonomie dans la conduite de la politique économique de
l'État, c'est finalement en septembre 1988, soit près de 3 ans
après le début de la dégradation de la balance des
paiements et des finances publiques, qu'un premier accord stand-by est
passé avec le FMI après de difficiles
négociations289(*).Regroupés sous le sigle PAS, ils devaient
permettre de réaliser des progrès notables dans la
résolution des problèmes économiques du Cameroun comme ce
fut le cas dans les pays d'Europe de l'Ouest et aux Philippines dans les
années 1970290(*).
En effet, les programmes d'ajustement sont des réformes
économiques visant à modifier la structure fondamentale d'une
économie, souvent en modifiant les politiques gouvernementales, les
réglementations et les institutions. Lorsqu'ils sont bien conçus
et mis en oeuvre, ces ajustements peuvent contribuer à résoudre
les déséquilibres microéconomiques et
macroéconomiques291(*).
Au niveau microéconomique, les ajustements structurels
peuvent encourager la compétitivité des entreprises, stimuler
l'innovation, favoriser l'investissement et améliorer
l'efficacité des marchés. Cela peut aider à réduire
les déséquilibres au niveau des entreprises et des secteurs
spécifiques, comme ce fut le cas en France et en Angleterre pendant les
30 glorieuses. Par ailleurs, la récession que connait l'État du
Cameroun depuis 1985 contribue à créer jusqu'en 1988 des
déséquilibres dans son économie. La presse publique
camerounaise rapporte donc que la pression de l'opinion publique sur le
gouvernement contraint les autorités à penser que les
réformes structurelles sont adoptés immédiatement, elles
peuvent aider à résoudre les déséquilibres
existants en rendant la dette extérieure plus soutenable, en facilitant
la réaffectation des ressources entre secteurs, en contribuant à
éviter le chômage à long terme, en attirant les capitaux
étrangers, en améliorants les signaux donnés par les prix
et en facilitant l'ajustement des salaires et des prix292(*).
Au niveau macroéconomique, les ajustements structurels
peuvent contribuer à stabiliser les finances publiques, à
réduire l'inflation, à promouvoir la croissance économique
et à atténuer les déséquilibres commerciaux. En
favorisant une allocation plus efficace des ressources et en renforçant
la résilience de l'économie, ces ajustements peuvent aider
à atténuer les déséquilibres
macroéconomiques.C'est ainsi que le gouvernement camerounais pris
attache avec le FMI en septembre 1988, afin de mettre sur pied des programmes
d'ajustement macroéconomique et de réformes structurelles.
Selon B. Onana fleure l'optimisme dans Journal du
Cameroun, ces programmes du FMI arrivent à point nommé au
Cameroun et pourraient, s'ils sont bien exécutés, sortir le
Cameroun de ses problèmes économiques, comme celui de
l'endettement qui mine la société jusqu'à l'hypnose.
Car,depuis le début de la régression économique,les
sociétés publiquescontinuent de drainer des ressources dans les
caisses de l'Étatpar exemple. Ainsi,la suppression des subventions comme
le propose le FMI, dans le but d'orienter les structures publiques vers des
outils de financement de prêts non souverains telles que les banques
privées, s'avèrecapital pour la résolution du
déficit budgétaireau Cameroun293(*).SelonCameroon tribune, cette intervention
du Fonds devrait permettre au Cameroun d'acquérir les ressources
financières et les conseils économiques dont il a besoin pour
relancer son économie.
2.2. Ajustement structurel
comme plans d'actioncontre l'autoritarisme au Cameroun
Grâce au bon gite que promettaient les programmes
d'ajustement du FMI sur le plan politique, l'opposition politique a vite fait
de mettre la pression sur le gouvernement en place à leur
adoption.Euphorie ou pas, les orientations tracées, les décisions
prises, et les concepts introduits dans ces programmesavait pour but de faire
disparaitreles phénomènes depuis longtemps combattus tels que la
mal gouvernance et l'autoritarisme, rapporteLe Messager294(*).En effet, depuis 1966le
Cameroun est dirigé d'une «main de fer'' par le président
Amadou Ahidjo, où l'exercice des libertés fondamentales comme la
liberté d'expression, la liberté de penser, et la liberté
de manifester sont systématiquement réprimées295(*). Ainsi, le retour à
l'expérience du multipartisme, telqu'éprouvé au lendemain
de l'indépendance, avec le renouveau démocratique s'avère
donc une libération contre le régime autoritaire d'Etoudi.
Le trihebdomadaire Le Messagerqui ne cesse de subir
la foudre des humeurs du gouvernement depuis 1979, publie dans ses colonnes des
articles quisoutiennentmordicusl'importance d'une diversité politique et
d'une participation citoyenne dans le processus démocratique au
Cameroun.Puis. Njawé, Directeur du journal Le Messager,soutient
le «gouvernement du Renouveau'' dans cette réforme de paradigmes
politiques, et estime que les programmes du FMI devraient apporter un vent
nouveau du moment qu'ils mettent en échec toutes les manoeuvres divers
d'intimidation et les contradictions apparentes de certains hauts
placés, dont la démocratie «menace les rentes et
intérêts qu'ils ont accumulés illégitimement depuis
des années296(*).
Selon l'articlede l'Économiste Célestin
Monga«La démocratie truquée. Lette ouverte à Paul
Biya'', publié par Le Messager en 1990, les droits les plus
élémentaires de l'homme sont bafoués au Cameroun depuis
l'indépendance, et la majorité des gens n'ont pas de quoi vivre
alors qu'une petite poigné d'arrivistes se partagent impunément
les richesses du pays. En moyenne 98% de la population urbaine vit dans les
bidonvilles sans moyens de se soigner, de ne se nourrir correctement ni
même de revendiquer leurs droits, d'où le déphasage qui
existe entre des discours abstraits du premier magistrat de l'État du
Cameroun et les réalités du pays.297(*).Cela explique donc le coup
d'envoi non officiel du processus démocratique donné en 1990 avec
la création d'une «Coordination Nationale pour la Démocratie
et le Multipartisme'' en février 1990 et la création du Social
Democratic Front (SDF) de John FruNdi en mai 1990 ayant abouti à
l'arrestation de Me Yondo Black, ancien bâtonnier, et ses acolytes pour
sédition, subversion, affront au chef de l'État298(*).C'est dans cette mouvance
que le verrou du parti unique saute en décembre 1990 lorsque
l'Assemblée nationale adopte une série de lois sur la
liberté d'association et de création de partis
politiques299(*).
Le 30 octobre 1991, le Premier ministre Sadou Hayatoulance
l'appel à une conférence tripartite
gouvernement-opposition-société civile dans le but de
définir le cadre électoral et l'accès aux médias
publics, qui se tint finalement en mars 1992.Boycotté par le SDF, seuls
le RDPC, l'Union Nationale pour la Démocratie et le Progrès
(UNDP) de Bello Bouba, le Mouvement pour la défense de la
République (MDR) et l'Union du Peuple Camerounais (UPC) conduit par
Kodock se partagent les 180 sièges du parlement avec respectivement 88
pour le RDPC, 68 pour l'UNDP, 18 pour l'UPC et 6 pour le MRD300(*).
Le 11 octobre 1992 se déroule la première
élection présidentielle pluraliste de l'histoire du pays, avec
pour principaux candidats le président sortant Paul Biya du RDPC, Ni
John FruNdi du SDF et Maigari Bello Bouba, président de l'UNDP. Selon
les toutes premières indications fournies par les journaux le 12
octobre, N. J. FruNdi semble bien placé, la rumeur lui donne la
victoire301(*). Mais
grande sera la surprise de l'opinion publique lorsque la Cour suprême
annonce la réélection de Paul Biya avec 39,9% des suffrages
contre 35,9% pour N. J. FruNdi et 19,21% pour B. Bouba302(*).Suite à cette
nouvelle victoire du président sortant, le pouvoir est accusé de
fraude par le National Democratic Institute, une ONG américaine
de scrutateurs, ce qui occasionnepar la suite des émeutes dans les
grandes villes du pays par les partisans de Ni John FruNdi qui
considèrent sa défaite comme inconcevable.Considéré
comme le «candidat du changement'', les pauvres et les exclus estiment que
seule la fraude pourrait permettre à l'ancien chef d'État de
remporter cette élection présidentielle contre celui qu'ils
appellent «le Mandela du Cameroun303(*).
Le journal Le Monde, qui a observé de
prêt le déroulement de ces élections met en exergue une
mafia du régime en place lorsqu'il rapporte qu'enanticipant les
élections de sept mois et en imposant un scrutin à un tour, le
régime a manifestement eu l'intention de prendre à court
l'opposition et leurs partisansqui s'étaient lancés corps et
âme, passion et inquiétude pour ces élections304(*). Tout porte donc à
croire que cette élection du 11 octobre 1992 n'était rien d'autre
qu'une grotesque mise en scène, habillement baptisée
élection présidentielle, dans le but de maintenir au pouvoir le
locataire d'Etoudi305(*).
En effet, le 1er mars 1992,soit 6 mois auparavant,
le gouvernement avait déjà fait preuve de magouilles
durantlesélections législatives, dans le but de
déstabiliser l'opposition. D'abord prévues pour 1991, elles sont
repoussées à des dates ultérieurs, soit le 16
février 1992,puis le 1er mars 1992. Lorsque l'opposition
politiquedécide finalement de boycott les élections, le
président Biya met à leur disposition une somme de 500 millions
de FCFA,à partager entre chefs de partis politiques qui accepteront de
participer aux élections. Un acte que l'opinion publique nationale
avisée et internationale qualifie de corruption ouverte et
publique306(*). Cela
explique donc la présence d'une trentaine de partis politiques inscrit
aux listes électorales, où seuls quatre obtiennent des
sièges au parlement. Notamment du RDPC (88 sièges), l'UNDP (68
sièges), l'UPC (18 sièges) et le MDR (4 sièges)307(*). Selon les enquêtes
menées sur le terrain, il ressort également que le chef
d'État achète l'opposition dans de disposer d'une
Assemblée Nationale non monocolore, afin de mieux s'attaquer à la
crise économique dans laquelle le Cameroun est plongé.
Pris en étau entre dévaluation du franc CFA et
résilience de convention avec le FMI, le chef d'État Paul Biya
promulguela nouvelle Constitution le 18 janvier 1996 dans le but de consolider
son assise démocratique et d'assurer la décentralisation
effective du Cameroun, selonCameroon tribune308(*).Dans son
préambule, elle bannit les vestiges du parti unique contenus dans la
précédente loi fondamentale. «La liberté de
communication, la liberté d'expression, la liberté de presse, la
liberté de réunion, la liberté d'association, la
liberté syndicale et le droit de grève sont garantis dans les
conditions fixées par la loi''309(*). Selon l'article 6, la durée du mandat
présidentiel est établie à une durée de 7 ans
renouvelable une fois, tandis que l'article 14 établit le Senat comme
chambre Haute du parlement310(*). Par ailleurs, cet aménagement de l'espace
juridico-politique permet de constituer une opposition solide et
légale.
Ainsi, lors des élections législatives du 17 mai
1997, 34 partis politiques y figurent, avec en tête de liste le RDPC, le
SDF, l'UNDP, l'UPC, et le MDR. Par ailleurs, le théâtre est le
même que celui du 1er mars 1992. Car prévues pour mars
1997, c'est finalement en avril 1999 qu'elles ont lieu. Durant cette
période de traine en parallèle, plusieurs mesures sont prises par
le chef d'État, notamment la revalorisationde salaire des magistrats de
la Cour suprême chargés de proclamer les résultats des
élections, sans raison apparente, et le rejet de la candidature de Ndoh,
représentant de l'UPC, pour des raisons inconnues par les journaux.
Ainsi, le salaire du président de la cour suprême passe de 200
milles FCFA a 1,150 million, avec des avantages divers, notamment
l'accès gratuit à l'eau,
l'électricité,téléphone, etc.Et le jour du scrutin,
les dirigeants de l'UPC comme Mack-Kit et Moukokopriso sont
arrêtés et leurs bulletins retirés. Ainsi, avec un nombre
de 3844330 inscrits au scrutin, le RDPC seul recueille 1328550suffrages, soit
presque la moitié des votants311(*).C'est également dans cette atmosphère
de compromis que se tinrent les législatives du 30 juin 2002 et la
présidentielle du 11 octobre 2004.
Pour conclure ce chapitre qui traite de la collaboration
effective entre le Cameroun et le FMI, c'est l'échec relatifde
l'ajustement autonome et la pression desinstitutions françaises qui
contraintles autorités camerounaisesà solliciter l'intervention
du FMI, dans le cadre des programmes d'ajustement structurel, en 1988 ceci
malgré les fortes réticences des instances politiques nationales
à recourir à ces crédits conditionnés du Fonds,
dont la contrepartie signifie une perte d'autonomie dans la conduite de
politiques économique en 1987. Par ailleurs, après
l'élaboration de la «Déclaration de Stratégie et de
Relance Économique'' par la commission interministérielle, c'est
finalement le 24 septembre 1988 que le premier accord de confirmation est
signé, après de laborieuses négociations, ce qui a
débouché par la suiteà l'adoption des mesures de
libéralisation économique et de dérèglementation
des marchés. Dès lors, ces programmes ont-ils réussi leur
pari au Cameroun, 18 ans après?
CHAPITRE III : ANALYSE DES
PERFORMANCES ECONOMIQUES ET SOCIO-POLITIQUES DES PASAU CAMEROUN, 18 ANS
APRES
Après l'échec relatif des politiques
d'ajustement autonomes mises en place à partir de 1986, la pression des
bailleurs de fonds,et la réticence des autorités nationales en
1987, c'est finalement en septembre 1988 que le gouvernement acceptede signer
avec le FMI le premieraccord dans le cadre des programmes
d'ajustement312(*).Adoptées comme techniques innovatrices pour
canaliser l'activité économique au Cameroun,peut-on dire que les
programmes du Fonds ont réussi le pari qui était de permettre au
Cameroun d'améliorer ses performanceséconomiques, politiques et
sociales, 18 ans après ?
I. ANALYSE DES
PERFORMANCES ECONOMIQUES
La période qui s'étale de 1989 à 2006 est
une période cruciale pour l'économe camerounaise. Durant ces
années, le Cameroun connait une croissance économique
significative, marquée par une augmentation du produit intérieur
brut (PIB), de l'investissement et l'emploi.Cette dynamique est
étroitement liée à la mise en place de politiques de
dérèglementation visant à libéraliser
l'économie et à favoriser un environnement propice à
l'investissement. Dans cette partie, nous examinons l'impact de ces tendances
économiques sur le développement global du Cameroun, afin
d'offrir un éclairage précieux sur cette période
clé de son histoire.
1. La dérèglementation des politiques
économiques
La dérèglementation des politiques
économiques se traduit par la libéralisation du marché
camerounais et l'installation d'une concurrence dans le secteur
industrielle.
1.1. La libéralisation du marché
camerounais
En 1989 le gouvernement camerounais adopte des politiques
publiques consistant à réduire les barrières commerciales
et à promouvoir l'intégration du Cameroun dans l'économie
mondiale. Le désengagement progressif de l'État des
activités agricoles se traduit par la suppression des taxes à
l'exportation, la réduction substantielle de l'encadrement de la
production par des sociétés publiques, la libéralisation
de la commercialisation, et l'élimination du contrôle des prix et
de la qualité du café et du cacao par l'État313(*).
En 1990,le Cameroun supprime l'ONCPB et adhère à
la Communauté économique et monétaire de l'Afrique
centrale (CEMAC), et à la zone de libre-échange continentale
africaine (ZLECAF), ce qui a facilité la libre circulation des biens,
des services et des personnes. Les produits agricoles et le pétrole
prédomine dans la feuille des exportations du Cameroun. Le
pétrole représente plus de 50% des exportations totales du pays,
tandis que les autres produits comprennent le gaz naturel, les fèves de
cacao, le café, le coton, l'aluminium et l'or. Le principal partenaire
du Cameroun est l'UE qui représente 45% des exportations totales et les
autres incluant la Chine et les Etats-Unis le reste314(*).
En 1994, le gouvernement se dote d'un code d'investissement
accordant de larges avantages fiscaux et douaniers aux investisseurs
étrangers. Il s'agit d'une loi qui vient renforcer l'Ordonnance
présidentielle n°90/001 qui créée le régime de
la Zone Franche Industrielle (ZFI) dans la région portuaire de Douala.
Les principaux objectifs sont : la promotion de nouveaux investissements
productifs dans les secteurs clés comme l'agroalimentaire, les
technologies de l'information et les services ; l'augmentation des
exportations ; et la création d'emploi315(*). C'est cet instrument de
développement des échanges qui restaure la stratégie de
l'Industrialisation par Substitution aux Exportations (ISE) et crée
l'Office National des Zones Franches Industrielles (ONZFI) en 1991.
Par ailleurs, les importations et les exportations en zone
franche ne sont assujetties ni à une licence, ni à une
autorisation, et encore moins à une limitation de quotas. Aucun
contrôle de prix ou de marges bénéficiaires ne s'applique
aux produits et services des entreprises des ZFI. En effet, les avantages
fiscaux et douaniers se déclinent en termes d'exonérations
totales jusqu'en 2000,notamment pour tout droits d'enregistrement et de timbre
de toutes natures, tous les impôts et taxes en vigueur, et sur le
transfert de devises et la libre circulation des capitaux316(*). Cela a encouragé la
création de 48 entreprises sur la zone franche entre 1992 et 2000. En
outre, cette évolution industrielle est également dû
à la publication de la Loi n°94/01 du 20 janvier 1994 par le
ministère de l'Environnement et des Forêts, interdisant
l'exportation de certaines essences forestières à l'État
brut.
Sur le terrain, les sociétés sont donc
poussées à se convertir en sociétés de
transformation afin de survivre, ce qui a favorisél'augmentationdes
investissements cumulés en zone franche Cameroun. Ils passent de 13, 8
millions de FCFA en 1992/93 à 17,5 millions en 1999/00, puis à
77,4 millions en 2000/01317(*). En effet, 66% de ces investissements sont
essentiellement d'origine étrangère et principalement
européennes en provenance de la France, de la Belgique et de l'Italie.
Mais concernantles opportunités d'emplois, seuls 6096 emplois sont
permanents, avec environ 1786 emplois saisonniers, soit un taux relativement
faible lorsque l'Institut Nationale de la Statistique divulgue un chiffre de
800 milles chômeurs en 2000. Par ailleurs, les exportations
réalisées par les entreprises de la zone franche atteint
près de 100 milliards de FCFA en l'an 2000, représentant ainsi
70% des exportations totales du pays contribuant à améliorer la
balance des paiements du Cameroun qui passe d'un solde déficitaire de
123,760 milliards de FCFA en 1990 à un solde excédentaire de
205,694 milliards de FCFA en 2000318(*).
Lorsque ces performances régressent en 2001, le
gouvernement camerounais signe unilatéralement un accord de partenariat
économique avec l'Union européenne, ouvrant ainsi le
marché européen aux produits camerounais et encourageant
l'investissement européen dans le pays319(*). D'après les journaux, cela permet au
Cameroun d'être actif dans le commerce international entre 2001 et 2006.
Le flux d'exportation de pétrole, du bois, de cacao, et de café
augmente. Durant l'exercice 2004/05, le Cameroun produit et exporte près
de 180 milles tonnes de fèves de cacao, au moment où la
production baisse en Côte d'Ivoire et au Ghana à cause des
troubles politiques et sociaux qui interrompent les livraisons de
cacao320(*).
Concernant le cadre commercial, la SONARA réalise un
chiffre d'affaires d'environ 740 millions d'euros en 2005, grâce à
la multiplication des exportations en zone CEMAC et vers d'autres pays comme le
Nigéria. Seul 7% de pétrole sortant de cette usine est vendu
localement321(*). La
commercialisation du café et du coton connait également un boost
grâce à l'action du Conseil Interprofessionnel du Cacao et du
Café (CICC) et l'Office National du Café et du Cacao (ONCC) qui
supervisent la commercialisation d'environ 46,5 milles tonnes du café
robusta en 2005, plaçant ainsi le Cameroun au 6e rang des
producteurs mondiaux322(*). Pour ce qui est du coton, la SEDECOTON et la CICAM
transforment et exportent près de 260 milles tonnes de coton fibre,
tandisque les graines issues de la transformation servent à la
production d'environ 15 millions de litres d'huile et 51 milles tonnes de
tourteaux également destinées à 96% à
l'exportation323(*). Par
ailleurs, les contraintes rencontrées sur le marché mondial par
les produits camerounais feront du marché camerounais l'un des moins
ouvert du continent,avec pic en dessous de la moyenne de l'Afrique
subsaharienne et mondiale, soit de 46,1 en 2006 par la suite324(*).Comment le
comprendre ?
SelonCameroon tribune, le café camerounais par
exemple a fait face à la contrainte d'écoulement sur le
marché mondial entre 1990 et 2005 à cause de
l'hétérogénéité des lots qui a fait peser
une grande incertitude sur le produit.Après la libéralisation de
la filière café et la chute du prix aux agriculteurs, des soins
illégaux sont apportés aux caféières par les
planteurs. L'utilisation de l'engrais faiblie, l'entretien des plants diminue,
le lavage du café dans les marigots après la récolte pose
un problème sanitaire, et l'insuffisante fermentation et triage suite
à un mauvais dépulpage s'avère défavorable pour le
développement des arômes, diminuant ainsi l'astringence325(*). Or, sur le marché
mondial, les torréfacteurs ont besoin de connaitre parfaitement
legoût, le calibrage etl'arôme du produit pour que leur
café, qui mélange plusieurs origines et des qualités
différentes, soit le plus constant possible afin de réponde
fidèlement à leur clientèle.
Cette mauvaise qualité du produit a donc fait perdre la
crédibilité des exportateurs camerounais qui onteu du mal
à obtenir des crédits nécessaires pour préfinancer
leurs stocks et fournir une garantie bancaire à leurs partenaires
internationaux. Plus aucune banque ne voulait s'engager avec un exportateur qui
n'est pas sûr de récupérer sa mise le jour de la
livraison326(*).Mais
après l'amélioration des termes de l'échange et la hausse
des prix de produits de base sur le marché mondial en 2000, le Cameroun
s'enferme dans une logique d'économie de rente, traduisant ainsi sa
forte dépendance envers les cours mondiaux de matières
premières agricoles.Les secteurs pétrolier et agricole ont
constitué les principaux pôles d'exportation du pays avec 49% et
34% des produits exportés, contre 13% de produits manufacturier en
2006327(*).En outre,
cette dérèglementation des marchés entraine
également des répercussions sociales néfastes en termes
d'emplois perdus et la résilience de l'industrie locale face à la
concurrence étrangère.
1.2. L'instauration de la concurrence dans le secteur
industrielle
Après l'ouverture du marché camerounais au
transnationales étrangères, une rude concurrence s'installe dans
l'industrie locale, notamment pétrolière, sylvicole et
cacaoyère, stimulant l'innovation et encourageant les entreprises
à proposer de meilleurs produits et services.
Concernant l'industrie pétrolière,
l'avènement de la concurrence loyale, incite la SNH à
améliorer son efficacité, sa compétitivité, et la
diversification des produits pétroliers disponibles sur le
marché, rapporte Le Quotidien de l'Économie. En effet,
de la libéralisation commerciale débouche dans ce secteur une
cohorte de transfert d'investissements étrangers, un climat de pression
sur les prix, une nécessité d'innover, un accès à
de nouveaux marché, et des risques liés à la
volatilité des prix, après l'arrivée d'entreprises
internationales telles que Perenco, Addax Petroleum et
Victoria Oil& Gas, sur le marché camerounais328(*).
Ainsi, pour faire face à la concurrence, la SNH a
dû mettre en place des subterfuges efficaces, notamment de la maitrise
des ressources, l'établissement des partenariats, le
développement d'une expertise technique solide et la diversification de
ses activités, auxquels on ajoutele soutien du gouvernement camerounais
qui met en place des politiques favorables à cette
société. Ce qui a permis à cette dernière
d'accroitre ses opérations et activités, d'augmenter sa
production, de s'adapter, d'être à la hauteur des entreprises
étrangères disposant de ressources et de technologies plus
avancées, de se démarquer et de maintenir sa position sur le
marché malgré la concurrence étrangère. Pour
répondre à la demande nationale et internationale, en 2005 par
exemple, elle produit environ 23,5 millions de barils de pétrole brut
avec une production moyenne d'environ 64 milles 400 barils par jour329(*).
Dans le secteur du bois et les produits dérivés,
la réforme du secteur forêt-bois de 1990 permet une gestion
durable des forêts et le développement d'un secteur industriel
performant. Cela se renforce en 1997, avec l'adoption de deux mesures
fondamentales créant une industrie du bois pour chaque unité
forestière d'aménagement exploitée et interdisant
l'exportation en grume de la plupart des essences traditionnelles. Ce qui a eu
un impact fort sur le nombre d'usines et la capacité de transformation
dans le pays, soit 85 usines pour 3 millions de mètre cube par an en
2000330(*).
Durant cette période, l'industrie du bois se conforme
aux normes internationales et augmente les exportations. Mais il convient
également de souligner que ces performances se fragilisent par la suite
à cause de sa forte dépendance aux cours mondiaux du bois, son
manque d'assise financière nécessaire à
l'amélioration de la compétitivité, et du
déséquilibre entre l'offre et la demande qui se crée sur
le marché après le fort développement du secteur
industriel et du secteur informel.
Dans l'industrie cacaoyère, l'année 1994 rompt
la lassitude des planteurs et marque le point d'achèvement de la
libéralisation de la filière avec la suppression du
système de stabilisation des prix au producteur et des
prélèvements étatiques sur les filières. L'annonce
habituelle de la campagne cacaoyère, début août,
fixé par décret présidentiel depuis 1956 disparait au
profit des négociations libre de prix entre planteurs et
acheteurs331(*). Le
gouvernement adopte le système de prix flexible au producteur, sous le
poids des pesanteurs extérieurs, d'où la dissolution de la Caisse
de Stabilisation en 1991.
L'ONCPB est substituée par l'Office National du
café et du cacao (ONCC), et les principales fonctions qui lui sont
confiées sont : la gestion de la stabilisation annuelle des
coûts intermédiaires, le contrôle de la qualité du
cacao, la réalisation d'études liées aux filières
et l'établissement d'une liaison avec le ministère du
Développement industriel et du Commerce dans ses prises de
décision. En effet, cette nouvelle structure devait fournir des
informations à ce ministère grâce à son
système d'information sur les cours mondiaux du café et cacao
à la bourse de Londres (FOX LONDON). Et pour plus d'efficacité,
le Comité Interprofessionnel du Café et du Cacao (CICC) est
créé en 1992332(*).Il s'agit d'une cellule indépendante
d'information sur les prix de ces produits.
Selon Cameroon tribune, cette libéralisation
se fait de façon lente pour des raisons politiques.En effet, le
régime en place redoutait l'effet boomerang qu'une
accélération du processus de libéralisation pouvait avoir
au Cameroun où la situation est déjà pléthorique.
C'est la raison pour laquelle les structures dites de
«développement'' telles que l'ONCPB et la Caisse de stabilisation
ont été liquidé en douceur. Ce qui a permis aux
producteurs de vendre directement leur production aux acheteurs
internationaux333(*).
Malgré la mauvaise qualité du cacao camerounais à cause du
non-respect de bonnes pratiques agricoles par les producteurs, les acheteurs se
sont quand même livrés à la course au tonnage et parfois
à des pratiques illégales matérialisées par le
mélange des qualités comme l'achat du cacao humide et peu
fermenté.
2. Une croissance économique diversifiée
et soutenue
L'évolution de la croissance économique d'un
pays se réfère généralement à la
manière dont l'activité économique change au fil du temps
et se mesure par le taux de variation du produit intérieur brut (PIB)
réel sur une période donnée334(*). Après une tendance
relativement négative entre 1988 et 1993, c'est finalement en 1994,
après près d'une décennie de dégradation, que le
Cameroun convertit positivement son niveau de production intérieure.
2.1. Lahausse du niveau de production
intérieure
Le niveau de production d'un État renvoie
généralement à l'ensemble de richesses
dégagées par les différents secteurs et branches de
l'économie nationale. Après une période au rouge,
marquée par une involution économique entre 1987 et 1993, la
libéralisation des secteurs productifs et la dévaluation de la
monnaie locale en 1994 permettent au Cameroun de maintenir une croissance
moyenne de 3,5% jusqu'en 2005, comme le montre le tableau ci-dessous.
Tableau n°5 : Évolution du PIBde
l'État camerounais entre 1989 et 2005
Source :données recueillies dans les
journaux, rapport du FMI et de la Banque mondiale
Source : Graphisme réalisé
à base des données du tableau ci-dessus
Selon le graphisme ci-dessus, la production du Cameroun
connait une involution grave avec un PIB moyen de -3% entre 1989 et 1993, soit
le plus faible de l'Afrique, aggravant davantage la crise de la dette du
pays.Les multiples dérapagesobservés lors de l'exécution
de certains critères quantitatifs des PAS expliquent cette faible
production, selon les journaux.En 1993 le bilan économique est quasiment
négatif à quelques exceptions prêtes. Par ailleurs, la
cohésion qui débouche de la dévaluation du FCFA en janvier
1994, les moyens d'accompagnement de la dévaluation du FCFA
apportés par la France aux pays de la zone franc, et l'aide des
bailleurs de Fonds, permet à l'État camerounais de retrouver le
chemin du développement et de la croissance, avec un taux moyen de 3%
entre 1994 et 2005.
En 1995, la rigueur apportée dans la mise en oeuvre des
programmes d'ajustement au Cameroun, notamment dans la coordination des
politiques budgétaires, le transfert du poids de la dette et des
arriérés vers les institutions de Bretton Woods, la mise en place
d'un système de surveillance multilatérale des politiques
monétaires et budgétaires, permet à l'État
camerounais de connaitre un gage de stabilité économique
remarquable, favorisant l'accroissement du PIB à un taux de 2,89%, soit
une hausse de 1,13% par rapport à 1994335(*).
En 1996, l'aide apporté par les bailleurs de Fonds dans
le cadre des programmes d'ajustement favorise l'expansion de l'agriculture, de
l'industrie, et du dynamisme de l'activité exportatrice du
pétrole. Cela a permis le redressement des comptes budgétaires de
l'État et la balance de paiement. Le solde budgétaire primaire
passe à plus de 5% du PIB jusqu'en 1997, d'où le maintien d'un
taux de croissance moyen de 4,2% jusqu'en 1999,reflétant ainsi la
parfaite reprise de la production économique camerounaise dans le cadre
de l'initiative PPTE336(*).
Par ailleurs, face à l'exubérance des
difficultés économiques que traverse le pays en l'an 2000,
caractérisées par la sécheresse qui affecte le secteur
agricole et la chute du cours des matières premières sur le
marché mondial, le niveau de production intérieure du pays
régresse à 3,83%337(*). Selon Cameroon tribune, les cultures ont
gravement été touchées, entrainant des pénuries
alimentaires dans certaines région. Des sources d'eau potable ont
également été touchées, ce qui a eu un impact sur
la santé de la population locale. Cela amène les autorités
camerounaises à mettre en place des mesures d'urgence comme la
fourniture d'aide alimentaire, mais contribue également à
sensibiliser davantage aux défis du changement climatique.
Mais après la conclusion de la deuxième
facilité économique et financière triennale en 2000, dans
le cadre des programmes d'ajustement, cofinancé par le FMI, la BM, le
FAD, la BAD et la France, le Cameroun connait un afflux d'investissement
étranger dans les secteurs productifs de l'économie et une forte
demande intérieure. Cela a permis d'améliorer les conditions de
vie des Camerounais entre 2002 et 2003, ce qui explique donc le maintien d'une
croissance moyenne de 4,47% durant cette période338(*).
Pour consolider et stimuler davantage cette croissance, le
Document de Stratégie pour la Réduction de la Pauvreté
(DSRP) cofinancé par les bailleurs de Fonds est adopté par le
gouvernement en avril 2003. Mais les dérapages observés dans son
exécution en 2004 empêchent le Cameroun d'atteindre le point
d'achèvement, comme envisagé en octobre 2000339(*). En 2005le PIB chute
drastiquement à 19,51 milliards de dollar, soit un taux de 2,22%,
malgré l'améliorationsubstantielle de la politique
macroéconomique au cours de la première moitié de
l'exercice budgétaire 2005/06 et du bénéfice d'un nouveau
programme appuyé par la FRPC au cours de la seconde340(*).
Par ailleurs, il serait tout de même illusoire
d'analyser l'évolution niveau de production intérieure du
Cameroun sous une dette publique importante et dans un contexte où
l'accès au financement est limité à certains acteurs sans
toutefois évoquer l'apport des secteurs clés de son
économie.
2.2. L'amélioration du rendement des principaux
secteurs économiques
Après la libéralisation, les secteurs agricole,
minier, industriel et infrastructurel sont les principaux secteurs
économiques ayant favorisé la hausse du niveau de production au
Cameroun entre 1989 et 2006.
Concernant le secteur agricole, l'organisation des
filières d'exportation cacao-café est démantelée et
les politiques d'innovation, d'investissement et de changement structurel,
notamment le désengagement progressif de l'État, dans le cadre
des accords avec le FMI concentre les terres agricoles entre les mains de
grandes entreprises agro-industrielles, ce qui permet d'améliorer la
productivité de culture pérennes et vivrières
malgré de nombreuses lacunes341(*). Selon la presse locale Mutations, les
politiques libérales du FMI et le Projet d'Appui à l'Agriculture
Africaine (PAAA) dont la mission est d'aider les trois pays pilotes (Cameroun,
Ghana et Mali) améliorent la politique agricole et incitent le
développement d'une économie d'échelle dans la
productivité entre 1990 et 2005342(*).
La Caisse de stabilisation est dissoute en 1990, sous la
pression des instances internationales, au profit de l'adoption d'un
système de prix flexible au producteur basé sur les contrats de
vente déjà passés et des prévisions sur le
marché mondial. Mais cette lassitude est rompue en 1994 avec la
suppression du système de stabilisation des prix au producteurs, des
prélèvements étatiques sur les filières café
et cacao, et la dévaluation du FCFA le 11 janvier qui permettent de
doubler le prix du kilogramme et d'augmenter progressivement la demande des
produits vivriers sur les marchés urbains343(*). En effet, dès la
campagne cacaoyère du mois d'août, les planteurs se retrouvent
face aux acheteurs pour négocier le prix du cacao alors qu'il
était fixé par décret présidentiel depuis
1956344(*). Cela permet
donc d'améliorer sensiblement l'environnement socio-économique
des agriculteurs et d'instaurer une concurrence saine basé sur les
principes de la rentabilité économique et de la
compétitivité à l'exportation entre cultures
vivrières et cultures pérennes au sein des
micro-exploitations.
La production moyenne de cacao par exemple est de 18,8 sacs en
moyenne par exploitation entre 1993-1994 et de 20,3 sacs après la
dévaluation. Ainsi la commercialisation de ces cultures d'exportation
permet à l'État camerounais d'accroitre ses recettes
d'exportation et d'améliorer la santé budgétaire de
l'État. Cette hausse de production améliore également le
bien-être des citoyens qui voit augmenter leur revenu après le
doublement du prix du kilogramme. En outre, les enquêtes de terrain ont
également permis de desceller de nombreuses lacunes telles que
l'exclusion des petits agriculteurs locaux des marchés à cause
leur manque de compétitivité face aux produits importés,
l'augmentations du prix des intrants, et la pollution de l'environnement.
En mars 2004, Cameroon tribune met en exergue la
dégradation de l'environnement agraire due à une agriculture
intensive axée sur les cultures d'exportation au détriment des
cultures vivrières destinées à la consommation locale.
Après le doublement du prix des intrants sur les marchés, un
regain d'intérêt pour les cultures pérennes n'a pas
tardé à se faire ressentir. Dans l'ensemble de la zone
cacaoyère par exemple, les planteurs reprennent l'entretien des
cacaoyères en commençant par le débroussaillement des
plantations plus ou moins délaissées depuis la campagne
1988/89345(*). Cela
favorise par la suite la surexploitation des terres arables, l'augmentation de
la déforestation, et la perte de la biodiversité du pays. Car
pour maintenir une bonne production, les petits agriculteurs se sont
retrouvés obligés de recourir à des pratiques agricoles
non durables, telles que l'utilisation excessive d'engrais et de pesticides,
responsables d'une pollution massive des sols, et surtout une des causes
majeures de pollution des eaux souterraines346(*).
Concernant le secteur minier, ne disposant pas d'une industrie
minière capable d'assurer une exploitation endogène des mines
jusque-là, c'est au début des années 2000 que les plans
d'ajustement démembrent l'intervention de l'État et encourage
l'investissement étranger dans l'exploitation minière. En 2001,
un code minier, incité par les institutions de Bretton Woods, est
adopté dans le but de confier l'exploitation minière à des
compagnies privées étrangères. Cela permet au secteur
minier d'entrer dans une nouvelle ère caractérisée par un
afflux d'entreprises étrangères, notamment les
sociétés d'exploitation canadiennes, australiennes,
sud-africaines et autres qui favorisent l'augmentation significative de la
production minière au Cameroun, l'augmentation de la TVA et la
dégradation des conditions de vie de plusieurs Camerounais347(*).
Avant l'adoption du nouveau code minier qui favorise la
libéralisation du secteur minier en 2001, c'est la loi 64/LF/3 du
Conseil 1964 qui régissait l'exploitation minière au Cameroun. Et
durant cette période, le Cameroun ne produisait que la
cassitérite et l'or, tous deux exploités de manière
artisanale et semi-industrielle, respectivement dans le Mayo-Darlé et
l'Est du pays,excepté les hydrocarbure et l'aluminium, selon le rapport
des Nations Unies sur l'industrie minière de l'Afrique
centrale348(*). Mais
après la libéralisation du secteur minier en 2001, l'afflux
d'investissement étranger qui en résulte permet d'augmenter
l'exploitation des mines, ce qui a probablement haussé la production de
l'or (environ 300kg en 1989 à 4000kg en 2003), du diamant (300 milles
carats en 2005 contre 1000 en 1989), du fer (1,5 millions de tonnes en 2006
contre 50 milles tonnes en 1989), et de la bauxite (50 milles tonnes en 1989
à plus de 500 milles tonnes en 2006)349(*). Seule la production du cobalt et le nickel diminue
après l'effondrement des prix sur le marché mondial.
Mais en termes de conséquences socio-économiques
sur le plan national, les compagnies privées étrangères
contribuent peu à l'emploi des jeunes, aux caisses de l'État,
à l'économie nationale et à la délivrance de
services publiques à la population. Majoritairement stationnées
dans les enclaves sécurisées et bénéficiant de
conditions fiscales favorables, l'action des compagnies minières
étrangères permet certes d'ajouter de la valeur dans le PIB de
l'État camerounais, soit près de 4% en moyenne entre 2000 et
2005, mais ces exploitations les ont été plus
bénéfiques qu'à l'État Camerounais. Et cela
s'explique par le fait que certaines mines jugées non rentables sont
fermées par ces compagnies, privant ainsi plusieurs creuseurs de leur
principale source de revenus, selon Cameroon tribune350(*).
En 2002 la privatisation et la restructuration des entreprises
miniers telles que la CameroonDevelopment Corporation (CDC) et la
Société Camerounaise des Mines (SOCAMIN) a soit mis au
chômage plusieurs Camerounais ou détériore les conditions
de travail des Camerounais qui conservent leur emploi, d'où les actions
de protestation de la part des populations que certaines compagnies n'ont pas
hésité à réprimer violemment avec le soutien des
forces de police (confer privatisation de la CDC). Ces circonstances rendent
ainsi difficile l'accès aux services sociaux de base telles que
l'éducation et les soins de santé par manque de moyens pour les
couches les vulnérables, rapporte le quotidien national Le
Jour351(*).
Concernant le secteur industriel, la filière est
libéralisée en 1990 dans le but d'encourager les investissements
privés. Ce changement de paradigme met l'accent sur l'industrie du
pétrole, l'industrie du bois et l'industrie de cacao, et entraine une
relative multiplication par près de 4 le PIB du Cameroun. Dans
l'industrie pétrolière, la libéralisation permet au
pétrole de tenir une place structurante pour les finances publiques et
l'équilibre des comptes extérieurs jusqu'en 2006, compte tenu de
l'épuisement des réserves pétrolières,
malgré les perspectives de mise en place d'un régime de
croissance «post-pétrolier'' visant à diversifier
l'économie afin d'asseoir la croissance sur une trajectoire plus
soutenue352(*).
Grâce à la faible diversification de
l'économie camerounaise et la prépondérance des
exportations de biens primaires, le secteur pétrolier représente
7% du PIB en 1995 et atteint 10% en 2006, ce qui représente plus du
quart des recettes budgétaires sur la décennie 1990 et environ
45% des recettes d'exportations353(*). En effet les exportations des hydrocarbures sont
restées stables au Cameroun entre 1990 et 2006.
Concernant l'industrie du bois, la filière devient
l'une des activités économiques les plus importantes du Cameroun
durant la décennie 1990. Après les réformes
amorcées sur le secteur forestier, la filière industrielle du
bois évolue fortement dans la gestion durable des forêts et
constitue un secteur industriel de transformation du bois performant entre 1994
et 2000. La capacité de transformation augmente, tout comme
l'activité vers l'exportation. Cela permet à cette filière
de constituer, grâce aux recettes d'exportation engendrées par la
transformation et des grumes, la seconde source de devises du pays, soit 20%
des recettes d'exportation, derrière les produits pétroliers qui
comptent pour 50% en 2001354(*).
Pour ce qui est de l'industrie du cacao, la filière
connait une croissance soutenue après la décision de diversifier
et développer les secteurs hors pétrolier. C'est la raison pour
laquelle le Cameroun devient l'un des principaux producteurs de cacao en
Afrique et dans le monde avec une production moyenne de 115 milles tonnes de
fève par an. Cela est due à cause de la conjugaison de plusieurs
facteurs, notamment la stimulation des investissements dans ce secteur
grâce à la libéralisation, la mise en place des politiques
et programmes adéquats pour améliorer la productivité et
la qualité du cacao par le gouvernement, et la croissance de la demande
sur le marché mondial, ce qui permet d'augmenter la production et les
exportations du cacao355(*).
Selon Cameroon tribune, la culture du cacao est
également soutenue par les écoles paysannes conduites par le
projet SustainableTreeCrops Program (STCP) de l'International
Institute of Tropical Agriculture (IITA)qui favorisent des exploitations
de plus grande taille, une production plus intensive et des rendements trois
fois plus élevés que la période 1987-1994356(*). En effet, l'objectif de ce
projet était d'accroitre les rendements des paysans en encourageant une
bonne santé de l'exploitation, notamment l'élagage, la gestion de
l'ombre, le désherbage et la récolte phytosanitaire, afin de
réduire l'incidence de la pourriture brune et d'améliorer les
connaissances des paysans sur les maladies et les ravageurs357(*).
Quinze ans après le début du processus de
libéralisation du secteur agricole en générale et de la
filière cacao en particulier, la cacao culture est restée la
principale culture commerciale des exploitations agricoles du pays. Les revenus
issus de la vente de cacao contribuent de manière significative à
l'économie nationale du Cameroun, car elles représentent une
ressource importante pour les recettes de l'État et permettent aux
planteurs de réaliser la plupart des investissements (foncier, moyen de
locomotion, équipement agricole, etc.), de faire face aux multiples
dépenses du ménage (scolarité des enfants, frais
santé, etc.) et de supporter les dépenses sociales diverses
(paiement de la dot, deuil, etc.).
Concernant le secteur des infrastructures, l'impact de la
libéralisation sur le terrain reste mitigé malgré l'afflux
d'investissements étrangers dans le secteur. En 1989, Le
Messager met en lumière l'enclavement des routes, des
écoles, les hôpitaux et d'autres infrastructures essentielles au
Cameroun après la réduction des dépenses publiques de
l'État. Car dans le but de restructurer les finances du pays, certains
projets de construction et de rénovation sont retardés ou
annulés, laissant de nombreuses infrastructures dans un état de
délabrement358(*). Ce qui a accentué les défis auxquels
le pays est confronté sur le plan social, notamment des
difficultés d'accès aux services essentiels, tels que
l'éducation et la santé.
Au-delà de ce point de vue de Le Messager,
Cameroon tribune rapporte par contre que la crise économique a
certes stoppé le développement des infrastructures entamé
depuis l'indépendance et annihilé les efforts de maintenance,
mais les réformes entreprises par le gouvernement entre 1990 et 2005
dans les principaux secteurs infrastructurels permettent de ralentir la
dégradation du parc infrastructurel359(*). Ainsi, malgré leur insuffisance, le pays
améliore considérablement le taux d'accès aux
infrastructures en générant une offre qui anticipe la demande.
Les problèmes tels que le manque d'entretien des routes (route nationale
1 (RN1), route nationale 3 (RN3), route nationale 5 (RN5), etc.), les pannes
fréquentes d'électricité, les difficultés
d'accès à l'eau potable et les lacunes dans les infrastructures
de communication diminuent considérablement360(*).
Le nombre de kilomètre de routes bitumées pour
1000 habitants passe de 0,27 à 0,34 tandis que les réseaux
d'adduction d'eau potable, de puits, et des forages sont construits. Les
pénuries d'électricité qui ont perturbé la vie des
ménages et entrainé le ralentissement de la croissance
économique du pays depuis les années 1990 sont
atténuées avec la construction et la mise en service de plusieurs
centrales thermiques diesel et d'une centrale thermique au fioul lourd portant
le potentiel de production de l'AES-SONEL à 933 MW361(*).
Durant l'exercice budgétaire 2005/06, le
concessionnaire de service AES-SONEL engage un programme de
réhabilitation, de renforcement, et de rénovation des ouvrages de
production, de transport et de distribution d'électricité devant
aller jusqu'à 2012, pour un coût global de 250 milliards de FCFA.
En outre, l'accès des populations à l'éducation, à
la santé, et l'approvisionnement en eau s'améliore grâce au
Plan d'Action National Energie pour la Réduction de la Pauvreté
(PANERP) élaboré par le gouvernement362(*).
Concernant le secteur financier, les efforts de
libéralisation engagés durant la décennie 1990
débouchent à une relative évolution positive en 2005.
Après avoir signé des accords avec le FMI sous le cadre des
programmes d'ajustement, les autorités camerounaises mettent sur pied
des politiques de liquidation, de scission et de privatisation dans le but de
mettre fin à la crise bancaire, de promouvoir les investissements,
d'encourager les banques à accorder des prêts aux entreprises
privées, et d'améliorer leur responsabilité363(*).
Mais face à l'exubérance de la crise
financière, le chef d'État conjugue dans un premier temps les
liquidations à la signature d'un décret portant le minimum du
capital social des banques à 1 milliards de FCFA au lieu de 300 millions
en 1990. Dans un second temps, le retrait progressif de l'État est
amorcé dans la plupart des entreprises camerounaises, et la
privatisation des entreprises entamées. Dans le cadre sous
régional, la Commission Bancaire de l'Afrique Centrale (COBAC) est
créée le 16 octobre 1990 dans le but de réguler le
système bancaire camerounais comme dans tous les autres États de
la CEMAC364(*).
Par ailleurs, cette libéralisation du secteur financier
camerounais partage également les opinions au sein de la presse locale
qui estime d'une part que cela contribue à moderniser le secteur,
à réglementer et à améliorer la gouvernance
financière ; et d'autre part à augmenter la dette
extérieure du pays, et accroitre les inégalités sociales
et les défis tels que la faible inclusion financière et une
dépendance accrue à l'égard des bailleurs de fonds
internationaux365(*). Ce
point de vue de Le Messager est partagé par Le Quotidien de
l'Économie, qui rapporte que l'augmentation des taux
d'intérêt rend difficile l'accès au crédit pour de
nombreux camerounais. Car la réglementation et la supervision du secteur
financier entrainent une augmentation des risques liés aux
activités financières, aboutissant parfois à des cas de
fraude et de corruption dans le secteur financier camerounais366(*).
II. ANALYSEDES PERFORMANCES
SOCIO-POLITIQUES
Adoptés comme mesures innovatrices pour canaliser
l'activité économique du pays et améliorer le
bien-être des citoyens en 1988, les programmes d'ajustement du FMI
vonts'apparenter une expérience extraordinaire qui engendre des
coûts sociaux et politiques à la fois prévus et
imprévus selon l'opinion publique témoigné par les
journaux367(*).
1. L'impact des PAS sur le système politique
camerounais
Durant l'exécution des programmes d'ajustement,
notamment entre 1988 et 2006, les autorités camerounaises vont
entreprendre des réformes institutionnelles et redéfinirles
politiques publiques.
1.1. Les changements institutionnels
Ces changementsconcernent laréforme du code
électoral de 1990, la révision constitutionnelle de 1996,et la
réforme du code pénal de 2005.
En effet, la réforme du code électoral de 1990
introduitune démocratie pluraliste fondée sur la
souveraineté du peuple ; la pluralité des
partis ;l'organisation des élections libres, transparentes et
justes ; le respect des droits fondamentaux de la personne et
l'égalité des citoyens devant la loi conjuguéeavec des
valeurs de tolérance, de coopération et de compromis. Sur le
terrain, la Commission nationale de recensement général des votes
est créée, la double nationalité pour les candidats
à la présidence est supprimée,le scrutin à deux
tours pour les élections présidentielles est introduit,les
bulletins de vote sécurisés sont utilisés, et les
débats télévisés entre candidats sont
organisés368(*).
Présenté en un tout cohérent et facile
à consulter l'ensemble des règles gouvernant les questions
électorales au Cameroun, l'opposition, la société civile
et les observateurs internationaux,accueillent le nouveau code avec
enthousiasme et optimisme.Auparavant présenté par les partis
politique camerounais de l'opposition comme un instrument au service de l'ordre
dirigeant qui l'utilise pour se maintenir au pouvoir par le truchement de
l'ordre institutionnel acquis à sa cause, cette réforme
s'avère une avancéeimportante sur la scène politique
camerounaise, selon les opinions exprimées dans les journaux. Car ce
code apporte des dispositions novatrices dans la participation politique et des
améliorations dans la répartition des compétences entre
les organes, rapporteLe Messager369(*).
La hiérarchie d'autorité entre Conseil
électoral et Direction Générale, et l'objectivité,
la transparence et la sincérité des scrutins sont clairement
établies370(*).
Mais après les élections législatives de mars 1992 et les
élections présidentielles d'octobre 1992, ce texte va se
retrouver au coeur des controverses, et les acteurs politiques de l'opposition
vont pousser le pouvoir en place à créer un organe de gestion des
élections. C'est ainsi que l'Observatoire National des Élections
(ONEL) est créé en 2000 pour donner un peu plus de
crédibilité au processus électoral371(*).
Au-delà de ces dispositions novatrices, le nouveau Code
fera également l'objet d'une vive controverse sur l'arène
politiquecamerounaise à causedes insuffisances, des
ambiguïtés et des multiples discrédits observés
durant les campagnes électorales de 1992, 1997, 2002, 2004, etc. Fort
limités sur le plan pratique,cecode est très
vitecristallisé pour son impartialité.Car malgré la ruse
de l'histoire, cela conduit difficilement à un changement d'homme au
sommet de la pyramide, ce qui ne permet pas de mettre un terme aux tensions
d'autorité apparues depuis 1972 et qui affectent incontestablement la
nation372(*).Et pour
l'opposition politique nationale,ce code présente une entrave à
l'accès au palais d'Étoudiparce que ses dispositions
régulatrices du jeu politique permettent d'assurer
l'hégémonie quasi certaine du parti au pouvoir au
détriment des autres leaders sur la scène politique
nationale373(*).
À l'analyse, il convient de souligner que cette
réouverture démocratique au Cameroun dans un contexte de
misère expose les Camerounais à la débrouillardise et
à l'instrumentalisation politique. Ils s'agitent en prêtant le
flanc à l'opportunisme des intérêts égoïstes
personnels, claniques, tribaux ou ethniques des promoteurs du retour à
la démocratie. Cela étant dit, nombreux sont les Camerounais qui
décident également de créer des partis politiques
débouchant au libertinage politique qui est donc exploité
à bon escient par le gouvernement en place dans le cadre de la division
scientifique de l'électorat en faveur de son parti, le RDPC374(*). Ainsi donc,le nouveau Code
électoral ne saurait à lui tout seul justifier les échecs
et la fébrilité des partis de l'opposition dans leur recherche
effrénée de conquête du pouvoir d'État.
Concernant la révision constitutionnelle de 1996, elle
représente l'une des étapes majeures dans le processus de
démocratisation du Cameroun.Plusieurs réformessont mises en
avant, notamment la consolidation du multipartisme, la
bicaméralisassions du parlement et la reconnaissance des droits de
l'opposition. Cela permet de renforcer la stabilité politique au
Cameroun375(*).D'après ce texte de référence
incontournable dans le gouvernement du Cameroun dès 1996, la
durée du mandat présidentiel est limitée à 7 ans
renouvelables une seule fois. En d'autres termes, après son
élection en 1997, le président Biya pouvait se représenter
pour la toute dernière fois comme candidat aux élections
présidentielles qu'en 2004.
En effet,cette disposition impose l'alternance au pouvoir
à tous les citoyens Camerounais dans le contexte d'un État de
droit et s'oppose à l'éternisation du président en
exercice au pouvoir. Aussi, des nouvelles mesures, tels que la création
du Senat au sein du parlement, permetd'assurer une alternance pacifique au
pouvoir,d'éviter les dérives autoritaires, et de renforcer le
rôle du parlement dans le système politique camerounais, selon
La Nouvelle Expression376(*).
Par ailleurs, malgré les mesures novatrices pour
consolider la démocratie et la notion de pluralisme dans cette loi
fondamentale, elle était loin de donner satisfaction à tout le
peuple camerounais. Le Messager le reproche d'accorder au chef de
l'État des pouvoirs étendus, notamment en matière de
nomination et de révocation des gouverneurs de provinces, des juges et
des procureurs par exemple, ce qui a suscité des inquiétudes au
sein de la population publique sur l'équilibre des pouvoirs, de
l'indépendance de la justice et de l'impartialité de la
constitution377(*). Les
collectivités territoriales connaissent une plus forte dépendance
enversle pouvoir central, entravantainsi leur capacité à prendre
des décisions autonomes et à répondre aux besoins
spécifiques de leurs populations, favorisant par la suite la corruption
et le clientélisme au Cameroun378(*).
Concernant la réforme du code pénal de 2005,le
gouvernement modernise et adapte le code pénal
àl'évolution de la société camerounaise.
Après, plusieurs années de débats et de consultations
entre acteurs de la société civile et du système
judiciaire, c'est finalement en 2005 que le président Biya promulgue le
nouveau code pénal. Il supprime la peine de mort pour certains crimes,
comme le vol à main armée,et introduit des peines alternatives
à l'emprisonnement, telles que le travail d'intérêt
général, selonCameroon tribune379(*).
Par ailleurs,Le Messagerexprime son
dégoût contre la réduction des peines pour certains crimes,
tels que le viol et l'inceste, dénoncées comme étant trop
clémente et ne prenant pas suffisamment en compte les droits des
victimes380(*).
Au-delà de ce point de vue de Le Mesager, la presse privée tire
également la sonnette d'alarme surles entraves qu'encourent la
liberté d'expression et les droits de l'homme au Cameroun, si les
dispositions du nouveau code pénal étaient mises en oeuvre de
manière abusive par les autorités.
Cela étant dit, il n'est pas si difficile de trancher,
cette loi permetd'enrichir l'arsenal juridique camerounais à
traversl'abrogation du code d'instruction criminelle et d'un ensemble des
textes anciens jusqu'alors appliqués. Car le retrait des textes anciens
consacre la conciliation entre plusieurs pratiques différentes
liées au bi-juridisme camerounais sur le plan de la loi pénal de
forme381(*).Selon
Simon-Pierre HemleDjobSotong, «lesnormes du droit international des droits
de l'homme sontintégrées dans la procédure pénale
camerounaise dans les dispositions relatives à l'enquête
préliminaire''382(*). En effet, le nouveau Code pénal camerounais
s'est armé des mécanismes nécessaires pour faire face aux
défis de l'harmonisation de la loi pénale de forme au Cameroun,
et de l'intégration des aspects techniques novateurs.
1.2. La
redéfinition des politiques publiques
Les bouleversements intervenus au Cameroun au cours des
décennies 1980 et 1990, dans le cadre de l'ajustement structurel, se
traduisent par la mise en oeuvre de politiques publiques libérales et de
lutte contre la pauvreté.
En 1990, la loi n°90-031 du 10 août 1990
régissant l'activité commerciale au Camerounabroge les
dispositions antérieures et pose les bases de lalibéralisation
économique, assure le désengagement progressif de l'État,
favorise l'entrée en scène de nombreux opérateurs
privés sur le marché camerounais, et favorise le
développement d'une concurrence saine et loyale383(*). Au nom de cette loi, le
gouvernement initie des politiques incitatives aux investissements
étrangers et à la stimulation de la croissance.
Sur le terrain, le gouvernement supprimeles subventions sur
les produits de première nécessité,privatiseles
entreprises publiques, réduitles barrières douanières,
libéralisele secteur financier et adopte la dévaluation de la
monnaie locale.Cela a permis de matérialiser par la suite le
développement d'un entrepreneuriat privé et des coalitions
d'acteurs publics et privés384(*).
SelonCameroon tribune, ces politiques sont
bénéfiques pour l'économie camerounaise dans la mesure
oùelles permettent de stimuler les exportations, de renforcer la
compétitivité des entreprises camerounaises sur le marché
international, d'augmenter l'accès au crédit, et de diversifier
l'économienationale385(*).Cela explique donc la nette amélioration de
la gestion et de la rentabilité des ex entreprises publiques
privatisées,etla réductiondu fardeau de l'État en
matière de subventions.En contrepartie,Mutationsévoque
pour sa part la suppression des subventions sur les produits de première
nécessité,l'augmentation des prix et la baisse du pouvoir d'achat
des ménages par exemple comme conséquences néfastes de ces
nouvelles politiques386(*).Selon ApollinaireKaffo,les conditions de vie
deviennentdifficiles. «Le prix du verre de riz qui était à
25FCFA non dévalué au début des années 1980 passe
à 350f après la dévaluation de 1994''
rapporte-t-il387(*).
Concernant la réduction des barrières
douanières,elle favorise la concurrence étrangère au
détriment des entreprises locales.Les grandes entreprises
internationales inondent le marché avec leurs produits à des prix
compétitifs, rendant ainsi difficile la rivalité des petites
entreprises locales qui ont dûmettre la clé sous le
paillassoncomme des bibliothèques en faillite à cause de la
baisse des ventes et des revenus, rapporte Le Messager388(*).
Aussi, le manque de transparence dans le processus de
privatisation des entreprises publiques entraine la suppression de nombreux
emplois dans les entreprises et l'absence de protection sociale pour ceux qui
conservent leur emploi.Ce qui expose lestravailleursà une grande
vulnérabilité etune grande précarisation de l'emploi au
Cameroun.En effet,lorsque les entreprises privées commencent à
proposerdes CDD (Contrats à Durée Déterminée)et
desemplois temporaires, la planification d'un avenir devientdifficile pour les
travailleurs qui ne bénéficient plus d'une sécurité
financière à long terme. Le cas de la privatisation de la CDC est
assez révélateur.
Face à l'échec de l'ajustement en 1987, les
institutions de Bretton Woods vont faire pression sur le gouvernement, dans le
cadre des programmes d'ajustement, pour qu'il privatise les
sociétés d'État comme condition préalable pour
bénéficier des prêts. C'est ainsi que les plantations de
thé de la CameroonDevelopment Corporation (CDC) sont vendues au
consortium sud-africain BrodonFinex PTY Limited qui gérait le
secteur du thé sous le nom de Cameroun Tea Estate (CTE), en
2002389(*). Cette
action a des conséquences négatives sur les travailleurs et les
habitants des environs qui bénéficient grandement de la
société. Plus de 1700 de ses employés sont mis au
chômage technique390(*).
Concernant les politiques de lutte contre la pauvreté,
le retrait de l'État entraine l'injonction des partenariats
publics-privés d'où l'élaboration de la Dimension Sociale
de l'Ajustement (DSA) de la Banque mondiale etla Facilité d'ajustement
structurel (FAS) du FMI dans le butde réduire à tout prix les
effets négatifs des PAS sur les couches vulnérables que sont les
femmes, les enfants et les vieillards391(*). Sur le terrain,le gouvernement camerounais met en
place des programmes d'éducation et de formation professionnelle dans le
butd'améliorer les compétences et les opportunités
d'emploi. Il s'agit du Programme de Recherche Appliquée à la
Formation Professionnelle (PRAFP), de la création des centres de
formation professionnelleà l'Université de Douala et
l'Université de Dschang, et la mise en place des initiatives de
microcrédit et de coopération internationale392(*).
En 1992, le Ministère de l'Agriculture met sur pied un
dispositif d'accompagnement à la création et à la
légalisation des organisations de producteurs qui s'articule autour de
la Central Unit for Rural Organisation Reform (CUROR) et du Fonds d'Appui aux
Organisations Rurales (FONDAOR)393(*).À l'analyse, cela permet de responsabiliser
davantage les agriculteurs, de diversifier la production agricole, de valoriser
le potentiel de production et les possibilités de commercialisation
existantes, et de protéger la production nationale.
En 1994, le Cameroun adhère au Programme Spécial
pour la Sécurité Alimentaire (PSSA) initié par la FAO pour
faire face à la pauvreté dans les pays en développement
dans le butde lutter contre la faim et la sécurité alimentaire.
Les premiers décaissements devant soutenir l'exécution du
programme se font en janvier 2002, soit 8 ans plus tard. Mais malgré ce
retard, ce programme permetd'accroitrela production végétale,de
sécuriserles productions, d'améliorerle revenu monétaire
des producteurs, surtout ceux des femmes et des jeunes,d'améliorerle
système de stockage des céréales, en particulier dans les
zones à risques, et d'améliorer l'état nutritionnel des
populations au Cameroun394(*).
Par ailleurs,pour renforcer ces mesures, les autorités
camerounaises collaborent davantage avec les bailleurs de Fonds dans
l'élaborationle Document de stratégie pour la Réduction de
la Pauvreté (DSRP) en 2003. Il s'agit d'unprojet vêtu de 8
objectifs essentiels à savoir : réduirel'extrême
pauvreté et la faim, promouvoir l'éducation primaire pour tous,
l'égalité des sexes etl'autonomisation des
femmes,réduirela mortalité infantile, améliorer la
santé maternelle, promouvoir un développement
écologiquement viable, et enfin lamettreen place un partenariat mondiale
pour le développement395(*).Pour atteindre ces objectifs, le gouvernement
consolide le secteur agricole, qui redevientle moteur de développement
économique et social du pays, promeut l'organisation professionnelle et
interprofessionnelle des différents opérateurs
économiques, et améliore la sécurité alimentaire
des populations grâce à l'augmentation des productions et de
l'ensemble des revenus396(*).
Malgré laforte dépendancede ce document à
plusieurs facteurs internes et externescomme la bonne gouvernance, la
transparence et l'allocation efficace des ressources, l'évolution de
l'économie mondiale, les chocs externes et internes, ainsi que les
situations de conflit ou de crise qui influencent la lutte contre la
pauvreté, force est de reconnaitre en 2006 quel'impact réel du
DSRP sur la réduction de la pauvreté au Camerounest significatif,
malgré l'insuffisance des attentes.Cela explique donc
l'élaboration des stratégies plus cohérentes dans le cadre
du Document de Stratégie pour la Croissance et l'Emploi qui devient le
nouveau cadre national du développement économique et social en
2009.
2. Une nettereconfiguration
sociétale
Selon les données recueillies dans Cameroon
tribune, Le Messager et Mutations,les programmes
d'ajustement du FMI ont un impact mitigé sur les
inégalités sociales au Cameroun entre 1989-2006.
2.1. Le renforcement de l'écart du niveau de
vie entre Camerounais
L'application des programmes d'ajustement sur la
période1989 et 2006est lourde de conséquences sur les
inégalités sociales.En milieu rural, les fonds
spécialisés tels que la FONADER, l'ONCPB et la Caisse de
Stabilisation créés pour assurer l'octroi des prêts
subventionnés aux agriculteurslocaux, et d'assurer le financement du
développement rural et la stabilisation des prix à travers les
mécanismes de prélèvement sur les recettes des produits
d'exportations sont liquidés.
En août 1990, le Fonds National de Développement
Rural (FONADER), institution spécialisée pour assurer l'octroi
des prêts subventionnés aux paysans qui ne peuvent accéder
facilement aux autres institutions formelles de crédit, est dissout
selon la loi n°90/012 du 10 août 1990397(*).En juin 1991 c'est au tour
de l'ONCPB et de la Caisse de stabilisation camerounaise de tous les produits
d'exportations en culture familiale d'être dissoutes398(*). On assiste donc par la
suite à l'application direct de la libéralisation dans un secteur
stratégique qui a longtemps constitué une base d'accumulation
économique essentielle au Cameroun. Le planteur moyens'est ainsi
retrouvé dans un désidérata économique
sévère à cause de la multiplication des duperiesdes
acheteurs dans la négociation des prix du kilogramme de cacao ou du
café, rapporte Cameroon tribune399(*).
En outre,lorsque le gouvernementréforme le code de
travail et contracte le budget public d'environ 71%, les chefs de
ménages perdent leur emploi et leur source de revenue, ce qui ne
résout pas l'écart du niveau de vie entre riches et pauvres.Les
hôpitaux et les centres de santé se démunissent en
médicament essentiels et en matériel médical,entrainant
les temps d'attentes trop long, un mauvais accueil des patients et la mise en
place d'une politique de tarificationélevéeet difficile à
endosser pour les plus vulnérables, selon les journaux.
Cela expliquedonc la moindre utilisation des services de
santé modernes formels en faveurdesmicro-unités informelles,
destradipraticiens et des techniques d'ordre spirituel par les ménages
à faible revenu entre 1992 et 2006, malgré les initiatives prises
par le gouvernement pour instaurer un accès plus facile aux
médicaments et aux soins, pour éviter la fermeture des
hôpitaux et des centres de santé, et pour améliorer leur
gestion propre et la prise en charge des patients, conformément à
l'initiative de Bamako de 1992400(*).Carselon les journaux, la mal gouvernance favorise
l'imposition d'une«fiscalité informelle''aux ménages par
certains agents médicaux, rendant encore plus onéreux
l'accès aux soins de santé.
Dans le domaine de l'éducation, la baisse
régulière du budget et des revenus des ménages entraine la
détérioration des équipements, la perdition des
écoles, et la difficile scolarisation des enfants. Ceux issus dans
ménages plus vulnérables sontparfoisretirés des
écolesd'après les journaux. En milieu rural, le taux
d'analphabétisation des personnes âgées de 11 ans et plus
passe de 67% en 1990 à 73% en 1994 après la suppression des
subvention agricoles et la libéralisation des marché401(*).
Au sein des unités domestiques, un contexte nouveau
«d'économie domestique de pénurie'' s'installe, entrainant
une baisse de consommation par tête de 50%. Plusieurs agents du secteur
public et privé perdent leur emploi après la révision du
code de travail de 1990. Pour les salariés qui conservent leur emploi,
une double baisse de salaired'environ 75% intervient en 1993 et en 2002 dans
l'ensemble de la fonction publique. Ainsi, un jeune cadre qui touchait un
salaire de 300millesFCFA le 1er juillet 1987 gagne en janvier 1994,
102 millesFCFA, et un commis qui gagnait 53,5 millesFCFA en 1987 gagne 15,5
millesFCFA en 2002402(*). En conséquence, la pauvreté qui
touchait 1% des ménages à Douala et Yaoundé en 1983 passe
à 32% en 2001403(*).
Cette paupérisation de la population en milieu urbain
entraîne la hausse de la corruption, l'intensification des migrations de
retour et les changements d'habitudes citadines.La fréquence de
consommation de viande et de repas quotidien diminue.Les citadinsrecourent de
plus en plus à la friperie, aux chaussures en écailles, aux
mototaxis et au ligne de taxis clandestins404(*). La solidarité africaine s'adapte,la
réciprocité des dons et des aides s'installe entre personnes, et
les échanges entre campagnes et villes se rétrécissent.
Les liens familiaux sont mis en veilleuse à cause de la très
grande difficulté à assurer les obligations sociales dans une
situation de baisse des revenus. Par ailleurs, ces difficultés des
hommes avec leurs sources de revenus renforcent le poids des femmes dans les
ménages grâce à la vente des surplus vivriers405(*).
Selon Cameroon tribune, ce contexte de
paupérisation des ménages débouche à l'apparition
d'une corruption obligatoire au Cameroun. Paraphrasant le témoignage,M.
Ibrahim Ngou, Président du groupe des transports,les «taximen''
subissent une corruption obligatoire de la part des forces de l'ordre lors des
contrôles routiers, que l'on soit en règle ou non.Car«refuser
de payer signifie que votre dossier reste, et qu'au prochain control, c'est le
véhicule qui est retenu'' ajoute-t-il406(*).
Dans le Ministère des Postes et de
Télécommunication par exemple, le fonctionnement devient comme
celui d'un État dans un État avec un budget annexe où les
fonctionnaires et agents du département ne connaissent ni baisse des
salaires, ni retards grâce aux comptes hors circuits où est
déposé l'argent gagné par la corruption. Car lorsqu'une
zone rencontre des problèmes, il faut passer par des «tuyaux'' et
débourser une somme de 60 000 FCFA aux techniciens afin d'être
immédiatement servi et éviter les longues attentes sans
aboutissement, rapporte le quotidien national Cameroon
tribune407(*).
L'exode rural cesse d'être un phénomène
d'actualité en raison des difficultés d'insertion en ville par
manque d'emploi,ce qui adétruit l'imagerie traditionnelle de la ville au
Cameroun. Selonles enquêtes menées sur le terrain, M. O. F.
Ngono,a pu affirmer que :«i bongo
bengabeminkangambobengabedzamning à tsissuan''.Ce qui veut dire
dans la langue de Molière que «seuls les enfants
éveillés avaient la possibilité derésider en ville
à cette époque''408(*).Il faut de ce pas entendre par
«enfant éveillé'' celui-là qui pouvait faire preuve
de résilience faceà la baisse ou suppression de revenues, aux
licenciements massifs, au difficile accès aux médicaments,
à l'insuffisance des plateauxtechniques dans les hôpitaux
départementaux, et la quasi-inexistence du personnel médical dans
certains centres de santé nouvellement construits409(*).Dans les provinces
septentrionalesl'insuffisance des puits et forages débouche au partage
des quelques points d'eau entre populations et animaux, malgré les
risques de contamination.
Aussi, lacriminalité connait une marge de progression
importante tant en province qu'au sein des villes, aboutissant parfois à
de formes d'agressions violents.En effet,la participation des habitants au
développement et l'idéale de nouvelles gouvernance données
par les dirigeants du pays s'hypothèquentavec l'insécurité
qui règne en grand maître au Cameroun entre 1999 et 2005. Selon A.
Djimeli, la décennie2000débuteen cauchemar pour les habitants du
Camerounqui ont même pensé à un début d'apocalypse,
à cause des tueries en séries des enfants (4 enfants tués
le 25 décembre 1999),des ressortissants étrangers (Gabriel
Nourri, charcutier français résidant à Douala est
assassiné en janvier 2000), et des cadres du gouvernement(uncadre au
ministère de l'Économie et des Finances et un cadre au
ministère de la Justice en 2000)410(*).
En février 2000, l'ambassadeur des Etats-Unis et le
chargé d'affaires des Pays-Bas sont molestés par un groupe de
brigands au Cameroun,dégradant ainsi l'image de marque de ce pays en
matière de droit. Cela a attisé l'inquiétude de la
communauté internationale de façon générale et de
l'ambassadeur des Etats-Unis d'Amérique en particulier qui adresse une
lettre de80 exécutions sommaires au Président Paul Biya par la
suite. Ce qui explique donc la campagne de remaniementministérielle de
mars 2000, soit 1 mois plus tard, dans le but de renforcer la
sécurité nationale. De ce fait, un nouveau ministre de la
justiceest nommé, un commandement opérationnel unifié est
créé à Douala, les moyens des forces de
sécurités de Yaoundé sont renforcés, et un centre
régional des Droits de l'homme est installé à
Yaoundé en juin de la même année411(*).
2.2. La résilience de la populationet
l'émergence du secteur informel
Face à l'échec des politiques de relance du
développement rural, de la création d'emplois en milieu urbain et
des manifestations syndicales contre les mesures d'austérités,le
secteur informel, caractérisé par petits métiers de rue,se
développe en milieu urbain. Dans les zones rurales, les agriculteurs
abandonnent la culture du cacao, du café et du coton au profit des
cultures vivrières, de la pêche, de la chasse et du travail
à la tâche.
En effet, Le Messager et Cameroon tribune
nous renseignent que l'adoption de la Nouvelle Politique Agricole (NPA) en
1990et le lancement du programme de privatisation camerounais, sans
réunion de conditions fondamentales devant assurer le succès,
débouchent à la privatisation des poids lourds de
l'économie camerounaise à l'instar de la REGIFERCAM, la SODECAO,
le FONADER, la SOCAPALM, la CAMAIR, la CDC, et la CAMSHIP, conformément
à la loi n°89/030 du 29 décembre 1989 autorisant le
Président de la République à définir le
régime de laprivatisation et complété par le décret
n°90/1423 du 3 octobre 1990412(*).Plusieurs Camerounais sont mis au chômage,
pourtant ces salaires faisaient vivre plusieurs familles.Cela explique donc de
vives contestations syndicales dans les rues de Yaoundé et de Douala.
Les enseignants suspendenttemporairement les cours dans les
établissements, les conducteurs ramollissent les trafics routiers,etles
commerçants ferment leurs magasins en soutient aux protestations
sociales413(*).En effet,
ces grèvessontporteuses d'un message fort envoyé au gouvernement
et au FMI pour trouver des solutions alternatives à
l'austérité, afin de protéger les droits des travailleurs
et d'investir dans les programmes sociaux pour aider les plus
vulnérables.
Mais pour le gouvernement,ces mesures sont nécessaires
pour redresser l'économie du pays et rembourser la dette
extérieure. Car entre 1985 et 1993, des phénomènes
suivants sont observés : une baisse du revenu par tête de
40%, accompagnée d'une baisse drastique du taux d'épargne de 35%
du PIB à 10%, un déficit budgétaire non
résorbé de 12% du PIB, une conversion au libéralisme des
décideurs encore insuffisante, un système financier
défaillant malgré la restructuration financière des
banques commerciales et la liquidation des banques de
développement414(*). Cela malgrélaconclusion d'une
Facilité d'Ajustement Structurel (FAS) et l'adoption de la Dimension
Sociale d'Ajustement (DSA) proposées par le FMI et la Banque
mondiale.
Lesprincipales mesures qui y sont préconisées
dans ces programmes sont : la protection des groupes les plus
vulnérables (en accordant un accès aux fournitures, aux
alimentations et à la santé des milieux
défavorisés), et la mise en place des mesures compensatoires et
des dispositions transitoires, soit l'introductiondes primes de départ
des agents publics, d'appui financier, et la fourniture de formation aux
sortants des systèmes scolaires415(*). Cela explique donc la mise sur pied des
institutions telles que le Fonds National de l'Emploi (FNE), leProgramme de
Développement Communautaire (PRODEC), leProgramme «Femme et
Développement'' (PFD), le Programme «Santé et Population''
(PSP), et la maîtrise la croissance démographique, qui ne
parviennent pas à satisfaire les attentes des millions de
Camerounais416(*).
En 1991, les universités deviennent le
théâtre des mouvements de contestations estudiantines, qui se
déroule sur fond de grève.Elles s'intensifienten 1993
aprèslasuppressiondes bourses accordées aux étudiants et
l'augmentationdes frais d'inscription dans les universités, passant de
3300 FCFA à 50000 FCFA, soit une augmentation vertigineuse de
1415%417(*).Et cela dans
cette mouvance de contraction des finances de l'État. Les
étudiants vont exprimer leurs mécontentements dans toutes les
villes abritant une université publique, notammentà
Yaoundé, Douala, Buea, Ngaoundéré, etc.
Selon la presse locale tels que Le Messager,Cameroon
tribune et L'oeil du Sahel, les étudiantsde
l'université de Yaoundé organisent une marche pacifique et des
«sit-in'', violemment réprimé par les forces de l'ordre, le
17 mai 1994, faisant état de plusieurs blessés et nombreuses
incarcérations418(*). ÀDouala et Ngaoundéré, les
étudiantsarborententre 1999 et 2002 des comportements antisociaux :
incendies des véhiculent administratifs, destructions du matériel
de travail, barrage des routes avec des pneus incendiés, etc.419(*)Au Nord du pays,les
débordements estudiantins sont marqués par la mise au point des
barricades sur la nationale n°1, bloquant ainsi toute communication entre
les provinces du Nord, de l'Extrême Nord et du centre, empêchant la
libre circulation sous régionale420(*). Ce qui a constitué un obstacle majeur au bon
déroulement des cours et d'activités économiques durant
cette période.Au-delà de ce qui précède,L'oeil
du Sahel rapporte également des actes isolés de vandalisme
qui sont issus de ces contestations. Ils se soldent par des dégâts
matériels chiffrés à plus d'un milliard de FCFA selon les
autorités nationales421(*).
À l'analyse, cette situation d'insécurité
qui planedans les campus et les voies publiques s'avéré donc une
équation difficile à résoudre pour le gouvernementqui
décide de revenir sur sa décision concernant la suppression des
bourses d'études pour les étudiants les plus démunis,
même si la hausse des frais universitaires reste inchangée.
En 1995, une nouvelle vague de protestations éclate
dans le pays après l'augmentation du prix du carburant et du ticketdes
transports en commun. Toujours dans l'optique d'augmenter les recettes fiscales
du pays, le gouvernement procède à une hausse du prix d'essence
de 92 FCFA, passant de 178 FCFA le litre à 270 FCFA422(*). Ce qui débouche donc
d'une part à l'augmentation des tickets dans les transports en commun,
aggravant davantage le mécontentement des populations qui contestent
depuis lors la bonne foi des autorités en place, et d'autre part la
chute des ventes de la SONARA et l'entrée massive d'essence de
contrebande (le zouazoua) du Nigéria423(*).
Par ailleurs, grâce aux «opérations
daurade'' dans le Sud-Ouest et le conflit de Bakassi, le gouvernement
réussit à écouler techniquement tout l'essence
nigérian sur le territoire et à procéder à nouveau
à une hausse des prix de 20%.Le litred'essence et de gasoil atteint donc
respectivement 280 FCFA et 260 FCFA en février 1995424(*).Les usagersse retrouvent
donc à payer deux fois plus le prix des tickets de bus et de taxis.
Cette hausse du prix du carburant à la pompe provoque
une grogne généralisée, surtoutdes travailleurs et
étudiants qui dépendent fortement des transports en commun pour
se déplacer, rapporte Le Messager425(*).En réponse à
ces contestations, le gouvernement va mettre sur pied un Comité de suivi
pour évaluer l'impact de la hausse des prix sur les populations les plus
vulnérables et d'étudier d'éventuelles mesures
d'accompagnement par le gouvernement. Parmi les mesures prises, nous relevons
l'introduction du système de «solde-paie'',qui devait avoir pour
but d'assurer une gestion équitable des ressources financières du
pays selon les autorités gouvernantes426(*).
Mais sur le terrain, ce système de
rémunération des fonctionnairesentraine plutôtla diminution
significative des salaires des enseignants, allant jusqu'à 50% pour
certains d'entre eux427(*). Cela explique doncles multiples manifestations
organisées par les Enseignants devant le Ministère de
l'éducation et des Finances pour faire entendre leur
mécontentementdans l'espoird'amener le gouvernement à revoir
cette décision et à revaloriser leur statut.
Pour apaiser les tensions, une table ronde est
organisée entre gouvernement et syndicats des Enseignants, où des
mesures telles quel'augmentation des ressources allouées à
l'éducation, la promesse d'augmentation de salaire, la suspension
temporaire de certaines mesures d'austérité, le recrutement de
nouveaux enseignants, et le renforcement de la sécurité dans les
écoles sont décidés428(*). Ces mesures sont réaffirmées par le
chef d'État lors dutraditionnel discours de la veille de la fête
de la jeunesse de 2000, lorsquel'instauration de la gratuite de l'enseignement
primaire,dont l'effective est prévue pour cours de la rentrée
scolaire 2000/2001,conformément aux recommandations des états
généraux de l'éducation de 1995 et de celles de Dakar de
2000429(*).
Mais sur le terrain, toutes ces belles promesses de ne suivent
pas. Seule l'instauration de la gratuité de l'enseignement primaire est
annoncée en 2000 par le chef d'État,lors du traditionnel discours
de laveille de fête de la jeunesse. Cependant le budget
allouéà l'éducation public reste inférieur à
l'indice moyen fixé par le calendrier des Objectifs du Millénaire
pour le Développement (OMD). En 2001, le gouvernement n'accorde que
15,7% des recettes publiques à son système éducatif contre
19% pour la moyenne des pays africains de niveau de développement
comparable, et 20% selon les OMD430(*).
Concernant le problème de la revalorisation salariale
des enseignants,les données recueillies à la direction du MINEDUC
révèlent que les enseignant ont continué de subir les
humeurs des délégués et des responsables des services
extérieurs des Finances, ce qui explique les retards toujours
observés dans les paiements des salaires et la budgétisation
tardive des ressources allouées pour payer les instituteurs. C'est dans
ces conditions onéreuses que ces fonctionnaires ont continué
d'exercer431(*).Au-delà de toutes ces tentatives
vaines,nombreux Camerounais trouvent duréconfort dans les acteurs qui
étaient pourtant non-prioritaires auparavant.
En milieu urbain, les
licenciements massifs dans le secteur formel entrainent l'essor du secteur
informel, caractérisé par les petits métiers offrant des
débouchées aux personnes vouées au chômage en fin
d'étude ou aux licenciées.Parmi ces métiers, on
relève la création incontrôlée d'institutions micro
finance (IMF), conformément à la loi n°90/053 du 19
décembre 1990 et la loi n°92/006du 14 août 1992 par les
banquiers licenciés du secteur formel, la multiplication des petits
commerces dans la distribution des biens alimentaires, l'apparitiondes coupeurs
d'ongles, des «peseurs d'hommes'',et la multiplication des cireurs de
chaussures, de vendeurs de beignets, de laveur de voitures, etc.432(*)En effet,la pratique des
petits métiers de rue devientun éventail très large,
remplissant une fonction très vitale dans les villes du Cameroun avec
des revenus loin d'être négligeable. En 1992 par exemple, 70% des
intéressés gagneraient plus de 100 milles FCFA par
moisgrâce à l'auto-emploi dans le secteur informel selon K.
Fouadop433(*).
La presse locale encourage ces initiatives pour leur
importance dans la régulation de la crise économique et sociale
au Cameroun. L'un des auteurs ayant particulièrement abordé le
sujet est Jean-Paul Tchakounté, un journaliste spécialisé
dans les questions économiques et sociales. Dans ses articles, ce
dernier souligne le rôle crucial des petits métiers de rue dans la
création d'emplois informels, la résilience des populations face
à l'instabilité économique, la solidarité
communautaire et la contribution à l'économie locale. Il
metégalement en lumière la capacité des travailleurs de
rue à s'adapter aux conditions économiques difficiles et à
maintenir une certaine stabilité financière malgré les
défis rencontrés434(*).
En milieu rural, les agriculteurs opèrent une
reconversion.L'agriculture pérenne est progressivement remplacée
par l'agriculture vivrière, la pêche et le travail à la
tâche.Les associations et les tontines se développent au
détriment des banques formelles.Selon A. Kaffo, «les grands champs
de café à l'Ouest du pays, et précisément dans le
village de Babadjou, deviennent progressivement de grands jardins fruitiers et
d'agriculture vivrière''435(*). Au centre,«les vastes champs de cacaoyer
deviennent les lieux de rencontre des avocatiers, des orangers, des safoutiers,
des manguiers, etc.''436(*), nous rapporte sa majesté Ambassa durant
notre entretien.
En 1993 par exemple,la totalité des revenus
escomptés des cultures vivrières, fruitières ou
maraichères se rapproche de celles du café et du cacao dans les
revenus globaux du pays, soit 35,9% pour les premières contre 44% pour
les secondes437(*). Cela
s'explique par la reconversiondes planteurs, qui ne sont plus prêts
à jouer leur va-tout pour les cultures d'exportationau moment où
le kilogramme du cacaose vend à 200FCFA et celui du café robusta
à 150 FCFA en 1992-1993, alors quele prix de produits vivriers augmente
renchérit sur le marché local438(*). À cet effet, les femmes qui
contrôlaient la commercialisation des vivres ont pu avoir un rôle
économique crucial au sein des ménages.
Hormis l'agriculture vivrière, les populationsrurales
se convertissent égalementau travail à la tâche comme la
pêche,quioccupe progressivement une place importante dans l'emploi du
temps des ménages et les revenus annuels. Selon S. AngoMengue, les
paysans des deux sexes consacrent 64% de leur temps de travail à la
pêche, soit 650 heures par an sur un total de 1015 heures,
délaissant ainsi leur plantation qui ne rapporte plus assez439(*). Celadébouche
à l'effondrement de la qualité et la quantité de
production du cacao et du caféentre 1993 et 2005. ÀAyos par
exemple, la production de cacao de grade 1 passe de 274 à 12 tonnes,
tandis que celle de café passe de 204 à moins de 50 tonnes pour
les grades supérieurs440(*).
III. LES INDICATEURS DE
MESURE DU DEVELOPPEMENT AU CAMEROUN A L'ATTEINTE DU POINTD'ACHEVEMENT DE
L'IPPTE
Selon le quotidien nationalMutations, c'est par le
communiqué n°06/85 du 1er mai 2006 que le FMI et la
Banque mondiale font savoir que le Cameroun a atteint le point
d'achèvement de l'initiative PPTE, devenant ainsi le 19e pays
du genre441(*).Mais au
moment où ce pays décroche ce fameux sésame, il serait
donc illusoire de ne pas tenir compte des indicateurs économiques du
développement, afin d'évaluer la pertinence de ces programmes
d'ajustement qui ont longtemps polarisé les débats.
1. Les indicateurs économiques du
développement
Deux indicateurs permettent de mesurer concrètement le
développement d'un pays. Il s'agit du Produit Intérieure Brute
(PIB) et le PIB par Habitant.
1.1. Le Produit Intérieur Brut (PIB)
L'étude du PIB d'un pays durant une période
donnée permet d'évaluer sa production et son poids
économique durant cette période. Lorsque l'initiative PPTE est
conjointement proposéeaux États sous ajustement structurel en
septembre 1996 par le FMI et la BMà Lyon, le but était de
s'assurer qu'aucun pays ne soit confronté à une charge
d'endettement qu'il ne puisse gérer. En d'autres termes, cette
initiative s'inscrivait dans le cadre de la conversion de la dette dans les
pays fortement endetté, et aucun pays ne pouvait appliquer les
programmes du FMI sans être endetté. Cependant, après avoir
été déclaré off Track en 1996,c'est en
octobre 2000 que l'adhésion du Cameroun à ce programme est
approuvée par le FMI442(*).Cela permet aux autorités de mettre en place
une nouvelle dynamiquedans les politiques publiques de gestion
économique.
Après le rendez-vous manqué de 2004 et
l'obtention d'un moratoire auprès des IBW, c'est finalement à la
fin du premier trimestre 2006 que le Cameroun atteint le point
d'achèvement, après la mise en oeuvre satisfaisante des
réformes structurelles et macroéconomiques, conformément
au communiqué n°06/85 du 1er mai 2006 publié par
le FMI et la Banque mondiale, et rapporté par Mutations443(*). Au cours de la mise en
oeuvre du Document de Stratégie pour la Réduction de la
Pauvreté (2003-2006), le PIB enregistré au Cameroun est de 3,32%,
soit un taux en dessous des 5,8% des États africains au Sud du Sahara et
des 4,23% observée dans ce pays au cours de la période
2000-2002444(*). Cela
peut s'expliquer par l'absence d'une mise en application concrète d'un
programme formel du FMI au Cameroun.
Durant cette période, seule la demande
intérieure constitue le moteur exclusif de la croissance.Elle contribue
à hauteur de 3,54%, tandis que les exportations nettes s'illustrent par
leur contribution négative de -0,22%, et les dépenses de 0,44%
avec un taux d'investissement moyen de 17,8% du PIB entre 2003 et
2006445(*). Cela
explique donc le fait que la croissance économique soit restée
fragile au Cameroun. Les principaux phénomènes observés
durant cette période sont :un solde extérieur
déficitaire d'environ 44,1 milliards de FCFA et une balance commerciale
hors pétrolier également déficitaire d'une moyenne de -432
milliards de FCFA446(*).À l'analyse, seul le problème de
l'inflation est plutôt bien maitrisé avec un taux de 1,9%.
S'agissant de l'évolution monétaire, l'IPPTE
permet de résoudre les principaux problèmes liés à
la crise d'endettement et celui de la négociation de la dette
multilatérale du Cameroun.Après avoir
bénéficié d'un allègement de 144,7 milliards de
FCFA lors du point de décision en octobre 2000, le stock de la dette
publique du Cameroun passe de 4890,3 milliards de FCFA en 2005 à 1427,6
milliards en mai 2006, soit une réduction de 30% dans le cadre
multilatéral et d'un allègement de 75 milliards de FCFA dans le
cadre bilatéral sur une période de 10 ans447(*).
Selon les points de vue exprimés dans le
quotidienMutations,cela représente un nouveau départ,
une occasion unique pour l'État camerounais. Car grâce à ce
dégagement de ressources, le Cameroun devrait envisager sa nouvelle
voie,notamment celle susceptible de conduire une politique économique
plus autonome. En d'autres termes, cet allègement est un moyen
particulièrement efficace de financer le développement dans la
mesure où une fois acté, il libère des ressources
budgétaires considérable pour la mise en oeuvre de politique
économique de développement448(*).
1.2. Le Produit Intérieur Brut par habitant
(PIB/HBT)
Après la dévaluation de 1994 du Franc CFA, le
Cameroun se positionne sur une trajectoire de croissance molle avec un PIB par
habitant variant entre 646,2 et 686,6 dollars en moyenne jusqu'en 2003, soit
une stabilisation de 1,4% par an449(*). Cette croissance est en grande partie
dépendante à 90% de la consommation privée et
l'investissement privé. Car durant cette période, le
chômage est exprimé avec plus d'acuité, notamment de 21,5%
en 1996 et de 18,6% en 2001, suite aux fermetures d'entreprises publiques et
privées, aux licenciements dans la fonction publique et au gel des
recrutement dans les secteurs publics et privés450(*).
Mais entre 2004 et 2006, durant l'application du DSRP, le PIB
par habitant connait une relative hausse de 300 dollars. Ainsi, au moment
où le Cameroun atteint le point d'achèvement en avril 2006, son
PIB par habitant est de 984 dollars américains, notamment grâce
aux belles performances macroéconomiques dégagées par la
bonne exécution des programmes d'ajustement451(*).
Grâce à l'appui des programmes du FMI, le
gouvernement camerounais :
- prépare et met en oeuvre un DSRP
complet entériné par les conseils de l'IDA et du FMI ;
- maintient un cadre macroéconomique stable en
moyenne de 3,8% entre 2001 et 2005 grâce à la forte expansion
d'activités dans le secteur tertiaire et agricole qui permettent de
compenser l'importante baisse de la production
pétrolière ;
- utilise avec satisfaction les économies
dégagées par l'allègement
intérimaire conformément à l'accord conclu lors de
l'atteinte du point de décision qui permet au gouvernement d'adopter une
nomenclature permettant d'identifier les programmes et projets relatifs
à la lutte contre la pauvreté;
- exécute avec brio les réformes structurelles
appuyées par le troisième crédit d'ajustement structurel
(CASIII), notamment la privation de la SOCAPALM, la CAMSUCO, la SODECOTON, la
CDC et la CAMAIR, ainsi que la réforme des sous-secteurs maritime,
ferroviaire et routier ;
- fait preuve de bonne gouvernance et prend des mesures de
lutte contre la corruption regroupé autour du Programme National
Quinquennal de bonne gouvernance qui permet d'améliorer l'administration
et la justice ;
- et enfin conduit avec succès les réformes
sociales essentielles, notamment la réforme en 2000 du secteur
éducatif ayant abouti à la construction de 3768 nouvelles salles
de classe en novembre 2005 et la restructuration du Ministère de la
Santé qui aboutit à l'organisation de vastes consultations
à travers le pays dès 2002452(*).
C'est la raison pour laquelle la décision de faire du
Cameroun le 15e pays africain à atteindre le point
d'achèvement le 28 avril 2006 est prise à l'unanimité par
le Conseil d'administration du FMI après de nombreuses missions de revue
conduit à tour de rôle et à des époques
différentes par Menahem Katz, Edouard Maciejewski, Doris Ross et
DharneshwarGhura, au Cameroun453(*). Après examen du premier, deuxième et
troisième rapport soumis aux conseils de l'IDA et duFMI en mars 2004,
décembre 2005 et février 2006, le Conseil d'administration conclu
à cette date du 28 avril 2006 que toutes les conditions
étaientréunies pour permettre à l'État camerounais
de redevenir un pays à revenu intermédiaire sur le plan
économique454(*).
Les Camerounais des 4 coins du pays accueillent cette nouvelle
étape avec beaucoup d'enthousiasme et d'optimisme. Bien que
n'étant pas en réalité une fin en soi,la population y voit
une mise à la disposition de Yaoundé d'importants financements
destinés à sortir le pays du sous-développement, selon les
opinions recueillies parCameroon tribune455(*). Le Cameroun
bénéficie de l'annulation de sa dette multilatérale de 30%
et d'une baisse de sa dette bilatérale vis-à-vis de certains
partenaires comme la France qui conclut un contrat de
désendettement-développement (D) d'une valeur de 75 milliards de
FCFA sur une période de 10 ans par exemple. Ainsi,l'argent
dépensé pour le service de la dette estconverti en fonds
d'investissement dans des secteurs de développement prioritaires comme
l'éducation, la santé, les routes, ce qui a permis à
l'État camerounais de s'en sortir avec un PIB par habitant de 1100
dollars américain durant cette année de
référence456(*).
2. Les indicateurs sociaux du développement
à l'atteinte du point d'achèvement
Les indicateurs sociaux du développement, notamment
l'Indice de Développement Humain (IDH), l'Indice de Développement
Humain ajusté des Inégalité (IDHI) et l'Indice
d'Inégalité du Genre (IIG) se sont nettement
améliorés à partir de 2000, après une longue phase
de dégradation.
2.1. L'Indice du Développement Humain
(IDH)
L'IDH est un indicateur composite qui mesure le niveau de
développement humain d'un pays en prenant en compte des dimensions
telles que le revenu par habitant, l'espérance de vie et le niveau
d'éducation457(*).Selon le rapport national sur le suivi des Objectifs
du Millénaire pour le Développement (OMD), la proportion de la
population vivant en dessous du seuil de pauvreté national est quasiment
stable entre 2001 et 2007, passant de 40,2% à 39,9%.
D'aprèsCameroon tribune, seuls4 Camerounais sur 10 vivent en
dessous du seuil du revenu annuel de 232.547 FCFA, jugé
nécessaire pour permettre à un individu à Yaoundé
de s'offrir un «panier minimal'' de dépenses essentielles
alimentaires et non-alimentaires à l'atteinte du point
d'achèvement.Ces dépenses concernent généralement
la santé, l'éducation et le logement458(*).
Concernant l'espérance de vie à la naissance,
elle demeure relativement dégradée en mai 2006, malgré les
efforts consentis dans le domaine de la santépar le gouvernement.
Pendant que le taux de mortalité des moins de 5 ans se stabilise
à 144% entre 2004 et 2006, l'espérance de vie à la
naissance est d'environ57 ans chez les femmes et de 54 ans chez les hommes,
selon les données fournies par l'INS459(*).Ces chiffres peuvent varier légèrement
en fonction des sources et des méthodes de calcul utilisées.
Cependant, après l'annulation de la dette
extérieure du Cameroun entre 2000 et 2006, les conditions
économiques du pays s'améliorent, ce qui permet de renforcer les
investissements dans les secteurs clés tels que la santé et
l'éducation. Cela a contribué à
améliorerprogressivement l'espérance de vie au fil du temps
à cette époque. Pour l'ensemble des décès des
femmes en âge de procréation (15-49 ans) en 2004, seuls 19%
seraient dus à des causes maternelles contre 26% en moyenne entre 1991
et 1997460(*).
Pour ce qui est du niveau d'éducation à
l'atteinte du point d'achèvement de l'IPPTE, le Cameroun réalise
des progrès en la matière avec une augmentation du taux de
scolarisation et la qualité de l'enseignement. En effet, depuis 1997, le
gouvernement reprend le recrutement des enseignants formés et
jusque-là en chômage comme l'indique le tableau ci-après.
Tableau n°6 : Évolution des effectifs
des enseignants au Cameroun entre 1989 et 2006
Années scolaires
|
1989/90
|
1990/91
|
1996/97
|
1997/98
|
2006/07
|
Effectifs des enseignants
|
37804
|
38429
|
34386
|
37230
|
72827
|
Source : MINEDUC/DPRD/SDP
Entre 2001 et 2006, la situation éducative
s'améliore sensiblement. Les enseignants jusque-là formés
et en chômage sont contractualisés pour réduire le
déficit constaté dans l'encadrement des
élèves.Ainsi le taux net de scolarisation connait une
légère hausse de 0,3 point, au moment
oùl'alphabétisation des hommes de 15 à 24 ans passe de
82,3% à 83,1%, tandis que pour les femmes du même âge passe
de 0,79 à environ 0,88461(*). Au cours de l'année scolaire 2006/07, les
3120 357 élèves du primaire recensés sont
encadrés par 72827 enseignants, dont 1967 constitué d'enseignants
non permanents462(*).
2.2. L'Indice du Développement Humain
ajusté aux Inégalités (IDHI) et l'Indice
d'Inégalité du Genre (IIG)
Les préjudices dont sont victimes les femmes et les
filles au Cameroun lors de l'atteinte du point d'achèvement en avril
2006 sont une source majeure d'inégalités et l'un des obstacles
les plus important au progrès du développement humain dans cet
État durant cette période. Selon les indices rendant compte des
inégalités hommes-femmes, notamment l'IDHI qui permet
d'évaluer le niveau de développement humain en tenant compte des
inégalités et l'IIG qui reflète les
inégalités dont souffrent les femmes en termes de santé
reproductive, d'éducation, de représentation politique et sur le
marché du travail,le rapport garçons-filles et hommes-femmesest
élevé en 2006, soit de 0,89 contre 0,83 durant la décennie
1990 et 2006463(*).
Comment le comprendre ?
Ayant évolué de façon instable depuis
lors et connu une montée spectaculaire en 1987, le nombre de personnes
vivant dans l'extrême misère resteconsidérableau Cameroun
après l'atteinte du point d'achèvement, ceci malgré
l'augmentation de la richesse mondiale et la remise de la dette au début
des années 2000464(*). Cela s'explique par le fait que les richesses
soient essentiellement concentrées entre les mains de la haute
classe,aggravant ainsi les écarts considérables entre les plus
riches et les plus pauvres.
Sur le plan géographique, on observe une concentration
des activités, des revenus et des populations dans certaines
zonesprésentant un avantage comparatif (notamment Yaoundé et
Douala), indurant ainsi un phénomène d'exclusion des groupes
vulnérables ou marginalisés, dont les femmes, les personnes
âgées, les jeunes et les personnes vivant avec un
handicap465(*). Cela a
continué de menacer la cohésion sociale.Si le taux de
scolarisation dans le cycle primaire et secondaire semble indiquer l'estomption
dans les disparités entre sexes, les inégalités à
l'âge adulte restent très marquées. Le taux de
participation au marché du travail est plus faible. En 2006, seules 8%
environ des femmes exercent dans l'administration en 2006466(*).Ce qui explique donc leur
taux élevé de chômage et leur présence massive dans
le secteur informel.
Si les femmes vivent en moyenne plus longtemps que les hommes,
le pourcentage d'hommes bénéficiant d'une pension de retraite est
supérieur à celui des femmes. Ce qui témoigne de
l'inefficacité des systèmes de sécurité sociale. Ce
manque d'autonomisation des femmes et des filles permet de les rendre
vulnérable aux atteintes portées à leur
intégrité physique. En 2006 en moyenne 47% des femmes subissent
des violences au sein du couple selon l'Institut National de la
Statistique467(*). Et
à cela s'ajoute également le fléau de la corruption.
Au moment où le Cameroun atteint le point
d'achèvement de l'IPPTE, des pratiques illicites tellesRackets,
pot-de-vin et détournent de fonds publics font du Cameroun l'un des pays
les plus corrompus du monde, selon le magazine Jeune Afrique468(*). Développée au
Cameroun depuis le début des années 1980,la
corruptionbénéficie d'une tolérancede la part du
gouvernement qui a préféré baisser les salaires des
fonctionnaires pour combler les déficits plutôt que
d'éradiquer définitivement ce fléau. Cela
alégitimécette pratique au sein de l'administration et
favorisé l'avènement d'autres pratiques peu orthodoxes comme le
développement d'une comptabilité parallèles,
caractérisée par la non déclaration de certaines
ressources, soit le développement d'une économie mafieuse
parallèle469(*).Ainsi, le 28 avril 2006, le
Journal du Cameroun rapporte que la corruption atteint des proportions
nécessitant des mesures plus radicales que celles appliquées
jusque-là,ayant permis l'accumulation de fortunes subites au sein de la
haute et moyenne administration470(*).
Cette corruption s'estégalement
révéléesous la formede pratiques homosexuelsau sein de
l'administration selon les rumeurs. En 2006le bimensuel La
Météo, le journalLa Nouvelle Afrique, et
l'Anecdotequi publient une liste de 50 personnalités
supposées homosexuelles où on y trouve de hauts responsables
politiques, administratifs, et des chefs de cadre d'entreprises.Par la suite,
les principaux éditeurs de ces publications vont subir la foudre
duministre de la communication, M. Pierre MoukokoMboujo, qui pointe d'un doigt
accusateur les difficultés économiques de ces médias, le
chômage de la population et l'écart grandissant du niveau de vie
entre une minorité riche et une majorité pauvreté comme
responsables de ces allégations471(*).
Mais selonles opinionsexprimées à cette
époque,nombreux sont les Camerounais qui estiment que pour obtenir un
poste, une promotion, gagner un appel d'offre, ou décrocher un concours
administratif, il fallait se livrer aux appétits d'un homme, connue sous
la nomination de « promotion canapé''472(*). Le 25 décembre 2005
par exemple, l'Archevêque de Yaoundé, Mgr Victor TonyeBakot,
dénonçait les rapports charnels entre personnes du même
sexe au nom d'un emploi, ou d'octroi d'une prétendue promotion473(*).Le 30 janvier 2006, le
quotidien Mutationsdénonce le mal que cette pratique peut
engendrer au Camerounet invite la population à y mener un combat
féroce.
Au moment de clore ce chapitre oùil était
question de faire le bilan des performances des PAS entre 1988 et 2006, soit en
18 ans d'application, il ressort que les thérapies menées par le
FMI n'ont pas été à la hauteur des objectifs fixés
à quelques exceptions prêtes.Ce n'est après la
dévaluation du Franc CFA en 1994 et après l'intégration
à l'initiative PPTE en 2000 que le PIB du Cameroun connait une
croissance molle jusqu'en 2006 avec un taux moyen de 4%.Cependant, au moment
où le Cameroun atteint le point d'achèvement de l'initiative PPTE
en avril 2006, marquant symboliquement l'apogée de la crise
économique, on se demande donc quel avenir pourrait avoir cette
collaboration Cameroun-FMI ?
CHAPITRE IV : QUEL AVENIR POUR
LACOLLABORATION CAMEROUN-FMI ?
Après avoir passé 18 ans sous le joug de
l'ajustement économique,c'est finalement par le communiqué
n°06/85 du 1er mai 2006 que le Cameroun redevient un pays
à revenu intermédiaire lorsqu'il atteint le point
d'achèvement de l'initiative PPTE renforcé.Ildevientainsi le
15eÉtatafricain à franchir le cap474(*). Caractérisant
également la fin des périodes sombres et la preuve d'une reprise
économique prospère, signé par la fin d'une
décennie d'endettement aigu, pourquoi est-ce que le Cameroun doit-il
continuerde coopérer avec le FMI dans le cadre des programmes
d'ajustement structurel ?
I. LE FONDS
MONETAIRE INTERNATIONAL : UN INSTRUMENT
DEVANT PERMETTRE AUX POUVOIRS PUBLICS D'AMELIORER LES CONDITIONS
FINANCIERESDURANT LA DECENNIE 1990 ?
Sollicité en 1988 pour
pallier aux effets néfastes de la crise,le FMIa fait partie de ceux
quiont polarisé les opinions dans la presse locale.Celui qui est
«pour'' croit que cette institution apporte une certaine stabilité
économique et un développement quelconqueen édifiant des
mécanismes de bonne gouvernance. Mais à l'inverse, celui qui est
«contre'' dénonce le Fonds comme un rouleau compresseur
écrasant tout ce qui entrave ses ambitions de créer une
société multiforme, notamment leslégislations
protectrices, les traditions et les spécificités475(*).
1. Le
FMI,unepanacée contre les déséquilibres économiques
au Cameroun
Lorsquele FMI est
crééà Bretton Woods en juillet 1944,la mission qui lui est
assignée est celle de traiter des questions économiques et
financières dans le monde, y compris dans les pays en
développement.Cette démarche ne s'explique pas seulement par sa
Charte constitutive fondée sur la dichotomie tranchée entre champ
de l'économie et les considérations extra-économiques,
mais également par les dogmes de la théorie économique
servant à expulser les droits de l'homme476(*). C'est la raison pour
laquelle cette institution opère une avancée majeure à
l'encontre des jeunes États en 1960 lorsqu'elle modifieles structures
économiques internationales afin defaciliter la résolution des
problèmes d'industrialisation, de sous-développement,
d'endettement et de crise économiques dans cesanciennes
colonies477(*).
De ce point de vue et au regard de la structure
dérisoire de l'économie camerounaise en 1988, la
démonstration de l'échec de l'ajustement autonome contraint les
autorités camerounaises àprendre le chemin de New York afin
derecourir à l'assistance du FMI, ceci après la
rédactiond'une «Déclaration de Stratégie et de
Relance Économique (DSRE)''communément appelé «lettre
d'intention''. Après de laborieuses négociations, c'est
finalementen septembre 1988 que le premier accord sollicité par le
Cameroun est signé. Cela a permisde mettre en place des politiques de
stabilisationet d'ajustement structurel.
1.1. La logique d'une mise en place des politiques
d'ajustement et de stabilisation
Après la forte réticence des instances
politiques camerounaises à recourir aux crédits du FMI en 1987,
l'échec relatif de l'ajustement autonome et l'insistance des
institutions françaisesobligent les autorités nationales à
recourir aux PAS proposés par cette institution. Dès 1989 les
premières politiques d'ajustement destinées à
réduire le déficit public et à stabiliser les
déséquilibres sont mises en place478(*).
Il s'agit notamment de l'abandon des subventions aux produits
et services de premières nécessité (pain, riz, lait,
combustible, etc.), l'austérité budgétaire et
réduction des dépenses (baisse de budgets sociaux non productifs
(santé, éducation, subvention aux produits de base), la
dévaluation de la monnaie locale, l'élévation du taux
d'intérêt pour attirer les capitaux étrangers avec une
rémunération élevée, la production agricole tout
entière est tournée vers l'exportation pour faire rentrer les
devises, l'ouverture totale des marchés par la suppression des
barrières douanières, la libéralisation de
l'économie par l'abandon du contrôle des mouvements de capitaux et
la suppression du contrôle des changes, la privatisation massive des
entreprises publiques, et l'introduction d'une TVA pour préserver les
revenus du capital479(*).Ces mesures devaient permettre de surmonter sans
tarder les difficultés auxquelles se heurte déjà la
balance des paiements etd'empêcher que les difficultés ne
surgissent.
En laissant jouer les forces du marché dans toute la
mesure du possible, la main d'oeuvre et le capital se sont dirigés vers
les emplois les plus productifs avec un enjeu suffisamment clair :
«l'efficacité économique et une croissance non
inflationniste''.Grâce à son assistance technique, pas toujours
mentionné mais dont le but est de former les fonctionnaires de
l'État et de banques centrales, le FMI réussit à
transmettre aux autorités locales des connaissance sur la
fiscalité, l'administration, la gestion des dépenses, la
politique monétaire,et la politique macroéconomique480(*). Cela explique donc les
multiples réformes socio-politiques et économiques entreprises au
Cameroun entre 1988 et 2006, suivies desmissions de surveillance du Fonds dont
le but était de d'aider le Cameroun à mieux affronter les chocs
extérieurs dus à la récession générale, et
de créer des conditions propres à rétablir la croissance
économique.
Avec le volet financement qui est un appui
supplémentaire au profit de cet État dans le but de soutenir les
réformes dans les domaines socio-économiques, les programmes de
stabilisation et d'ajustement visaient surtout les institutions d'État,
notamment le Secrétariat général de la présidence
(SGP), le Ministère de l'Économie et desFinances (MINEFI), le
Ministère de la Planification et du Développement
(MINPAD) ;les partenaires du secteur privé ; et les
entreprises publiques afin de favoriser une plus grande efficacité des
marchés, et de réaménager l'ordre de priorité des
investissements, réduisant ainsi les dépenses dans les domaines
non productifs en y appliquant les lois de libre marché481(*).
1.2. Une évolution
riche de virtualitéset pleine de promesses
La crise économique au Cameroun s'est traduite par une
baisse tendancielle du PIB courant à partir de l'année 1985/86.
Cette baisse est allée jusqu'en 1992/93. Mais après 1994,
année de dévaluation du FCFA, dans le cadre l'ajustement
structurel, le Cameroun renoue avec une croissance d'environ 4,5% par an. La
production intérieurede cet État revient à son niveau d'il
y a 20 ans environ, bien que n'étant pas fabuleux482(*).
Depuis le tournant des années 2000, le Cameroun a
assisté à une amélioration des indicateurs
économiques et sociaux après le flirte plus ouvert du FMI avec
des thèmes qui s'inscrivent dans la problématique d'une prise en
compte des problèmes sociaux dans le développement
économique du pays.Ce qui explique donc l'adoption des stratégies
visant à réduire la pauvreté et à stimuler la
croissance économique au Cameroun,notamment la Facilité pour la
Réduction de la Pauvreté et pour la Croissance (FRPC), le
Document de Stratégie pour laRéduction de la Pauvreté
(DSRP), l'Initiative d'Allègement de la Dette Multilatérale
(IADM), et l'Instrument de Soutien à la Politique Économique
(ISPE)483(*).
Dans le cadre de la Facilité pour la Réduction
de la Pauvreté et pour la Croissance (FRPC), décidée au
Cameroun en 2000 après l'atteintedu point de décision de
l'initiative pays pauvre très endetté, le gouvernement
camerounais élabore avec l'aide des bailleurs de fonds et de la
société civile unDocument de Stratégie de Réduction
de la Pauvreté (DSRP) dont le but est de réduire la
pauvreté et recourir au financement extérieur.Cette
facilité permetau Cameroun d'améliorer l'accès aux
services de santé, d'éducation, et de développement rural
et économique d'une part. D'autre part, elle permetde renforcer
l'État de droit, les politiques de lutte contre la corruption, le fond
d'investissement des infrastructures, le soutienau développement du
secteur privé, et les l'espaceentrepreneurialau Cameroun484(*).
La FRPC favorise également une croissance
économique plus inclusive après la mise en place des politiques
de protection sociale, de renforcement des filets de sécurité
sociale, et de promotion de l'égalité des chances pour tous. En
2002 par exemple, le Cameroun représente la moitié du PIB de la
CEMAC avec un chiffreà hauteur de 8,8 milliards de dollars et un taux de
croissance de 5%. Ce qui a permis deplacer le Cameroun au 132e rang
mondiale des pays les plus performant et le 12e en Afrique
subsaharienne des pays en voie de développement,selon le rapport de la
session ordinaire du Sénat rapporté par M. J. Chaumont de
2002485(*).
Concernant leDSRP, il s'agitd'un document
élaboréen 2003 par les autorités gouvernantes, la
société civile et les bailleurs de Fondscombinant à la
fois les objectifs économiques et sociaux, conformément aux
objectifs du millénaire pour le développement (OMD).Selon les
rapports de 2004, 2005 etde 2006 dudit document, l'État camerounais
réussi à consolider les progrès réalisés
grâce à la FRPC surle plan économique et sociale. Notamment
sur laréductionde la pauvreté, la stimulationde la croissance
économique, lerenforcement de l'état de droit, la lutte contre la
corruption, la promotionde l'éducation et la formation professionnelle,
l'investissement dans les infrastructures, le soutiendu développement du
secteur privé, et l'encouragement de l'entreprenariat486(*).
Concernant l'Initiative d'Allègement de la Dette
Multilatérale (IADM) qui estdécidée en juin 2005 par le G8
dans le but de renforcer l'IPPTE, elle débiteune dette additionnelle de
229 millions de dollarsà l'Étatcamerounais à l'atteinte du
point d'achèvement, ce qui a constitué un réel soulagement
pour la santé financière de l'État487(*). Cependant,la
réduction de201 millions de dollars dans la dette du Cameroun pendant la
période intérimaire de 2000 à 2006permet de dégager
des fonds pour construireles infrastructures routières en milieu rural
et pour abonder les budgets des secteurs éducatif et sanitaire488(*).
Aussi, l'IADM permetde réduirela pression fiscale sur
les finances publiquesetd'améliorer la gestion des ressources du pays.Ce
qui explique donc la créationd'un environnement plus propice à
l'investissement privé et à d'emplois, réduisant ainsi la
pauvreté et contribuant à améliorerles conditions de vie
des Camerounais489(*).Par ailleurs,malgré le renforcement de
l'intervention du FMI en 1999 et les évolutions en matière de
traitement de la dette, des interrogations persistent quant à
l'appréciation des politiques et des logiques qui sous-tendent cette
institution internationale.
2.La
contre-facettedel'interventions du FMI au Cameroun
Le fait qu'une personne comme Joseph Stiglitz qui a
occupé une fonction clé dans «l'établissement de la
mondialisation'' adopte une posture résolument critique à
l'égard du FMI indique à quel point cette institution serait
devenue une énorme bureaucratie progressivement affranchie de
l'influence des Étatscapitalistes comme les USA, la France et la Grande
Bretagne. Né en 1944 à Bretton Woods, le FMI trouve sa
genèse doctrinale dans le plan de White qui incarnait le paradigme
américain envahissant durant la guerre froide. C'est la raison pour
laquelle au long de son histoire,les Etats-Unis ont été
l'actionnaire principal et le pays membre le plus influent, d'oùla
question sur la responsabilité internationale de cette
institution490(*). Le
cas de l'Argentine et du Brésil qui ont décidé fin 2005
d'anticiper leurs remboursements envers le FMI pour se libérer de sa
tutelle est assez révélateur.
2.1.Favoriser l'expansion des
entreprises occidentales
L'une des accusations portées contre le FMI se rapporte
à l'atteinte à la souveraineté de l'État et au
bien-être des peuplesà travers ses interventions. L'accusation se
baseen effet sur la méthode brutale utilisée par le Fonds pour
changer le régime économique du pays, soit une thérapie de
choc où l'injonction tient lieu des politiques de privatisation, de
dérèglementation, de libéralisation des changes et de
mouvement de capitaux, d'équilibre budgétaire et
d'inflation491(*). Il
s'agit là d'une méthode qui évoque plus le diktat que la
libre négociation entre partenaires égaux, comment le
comprendre ?
En effet, du moment où le Mexique a annoncé
qu'il n'est plus en mesure de rembourser sa dette extérieure en
août 1982, les bailleurs de fonds internationaux perdent ainsi confiance
et refusent désormais d'alimenter le flux de capitaux vers les pays
endettés, tel que le Cameroun à cette époque492(*). Or, après la
reconstruction de l'Europe dans les années 1960,de nouvelles
orientations politiques sont données aux missions du FMIpar les pays
occidentaux dans le but derestituer leur hégémonie et leur
sphère d'influence sur les anciennes colonies nouvellement
indépendantes. Ainsi, une aide pour les pays du Sud sur fond
d'intérêt général est créée, et la
supervision confiée au FMI et à la BM493(*). C'est donc ainsi que le FMI
devient le seul recours qui accepte de prêter l'argent nécessaire,
qui permet surtout de sauver les créanciers privésoccidentaux.
Arrivé en prêteur de dernier recours, au taux
fort bien sûr, ne pouvaient bénéficier de son assistance
financière que les pays qui acceptent les conditions et décident
de mener la politique décidée par ses experts : ce sont les
fameuses conditionnalités du FMI. En d'autres termes, la politique
économique de l'État endetté passe sous le contrôle
du Fonds et de ses experts multilatéraux494(*).Cela étant dit, il
était donc illusoire de penser que les politiques
d'ajustementimposées par le FMI devaient être suffisamment
outillées pour résoudre les problèmes économiques
et sociaux propre au Cameroun, et encore moins de soucier du respect de sa
souveraineté et son intégrité.
Lorsque les autorités camerounaises recourent au
soutien économique et financier du FMI en 1988, une cohorte de mesures
d'austérité lui sont imposées dans le but de mieux
préparer le pays satisfaireles intérêts étrangers au
détriment du développement économique et social du
Cameroun.Dans la presse locale et internationale,le débat partage les
opinions.Selon Le Messager, cette intervention du FMI setraduite par
l'accentuation des inégalités et l'accumulation sans limite de
richesses au bénéfice exclusif d'une infime minorité
tandis que l'écrasante majorité de la population vit dans des
conditions de plus en plus précaires.
En effet, la liquidation et la restructuration des entreprises
publiques,par exemple, réduitle contrôle qu'exerçait le
gouvernement sur l'acquisition d'entreprises nationales.Les mesures de
contrôle sur les mouvements de capitaux, le contrôle de changes
etla nationalisation des entreprises sont abandonnés et supprimés
au profit des transnationales occidentales495(*).Ce qui a entrainéune perte de contrôle
d'éléments stratégiques pour le développement etles
services d'intérêts publics par l'État, accentuant ainsi la
précarité du niveau de vie des Camerounais qui voient se
réduire les services auxquels ilsavaient accès, rapporte le
journal français Le Monde496(*).
Entre 1990 et 2002, une poignée d'entreprises
transnationales, à l'instar de Bolloré, contrôlaient la
majeure partie de la production nationale sur les secteurs bancaire,
infrastructurel, de la distribution, du tourisme, des moyens d'information,
etc. En 1995 par exemple, seulsles USA, le Japon, la France, l'Allemagne et le
Royaume-Uni se partageaient plus de 75% des entreprises installées au
Cameroun avec un chiffre d'affaired'environ 85,9% de l'État497(*).En effet, les PAS permettent
aux transnationales occidentales d'infiltrer toutes les couchesindustrielles de
l'État et de créer une concurrence déloyale sur le
marché camerounais498(*). Carles pratiques qui suivent ces privatisationsvont
généralement à l'encontre de toute rationalité et
bon sens économiquedes États en crise selon J. Stiglitz499(*).
Les programmes d'ajustement ne constaient pas seulement
à ajuster la balance de paiement au Cameroun, mais également
à ajuster le pays lui-même, la politique et la structure sociale
à un contexte mondial que, par définition, il ne contrôlait
pas. C'est ainsi que la notion d'ajustement structurel créé un
contexte nouveau de crise économique et de l'endettement. Car dans cet
État naissent un niveau de demande trop élevé, un niveau
de consommation et d'investissement reposant fortement sur les importations,
une baisse des prix réels d'exportation, un niveau d'efficacité
économique trop bas et une accumulation trop élevée du
volume de la dette500(*).
2.2.Renforcerle circuit infernal
d'argent-dette et d'aide-crédit concessionnel
Après le passage de l'utopie de l'État
développeur au mythe du marché autorégulateur, le
caractère conditionné des accords, et les droits
économiques et sociaux posent expressément une relation de
dépendance vis-à-vis des ressources financières
extérieurs. Cela se distingue autant par la continuité d'une aide
crédit concessionnel qui ne permet pas réellement au Cameroun de
se démarquer sur le plan économique et social, que par son
surendettement improductif501(*).
Lorsque le FMI intervient au Cameroun en 1988, il
décide quel'État recourt à l'endettement extérieur
pour se procurer des devises, pourtant ces endettements excessifs ont servi
uniquement à acheter des équipements et des biens de consommation
auprès des pays les plus industrialisés,notamment les pays de
l'OCDE et les pays du G7 qui font tout pour entretenir leur domination sur les
pays subsahariens avec l'appui du Comité d'aide au développement
de l'OCDE, du Club de Paris, du FMI, de la Banque mondiale, de leurs
institutions publiques spécialisées et de leurs Trésors
publics502(*).Cela a
permis de promouvoir l'aide-crédit concessionnel au Cameroun, comme
moyen adapté de financement de leur développement.
En effet, l'application des programmes d'ajustement structurel
au Cameroun entre novembre 1988 et avril 2006 étaient souvent
liés à des prêts et des aides financières
octroyés par des bailleurs de fonds, notamment le FMI, la Banque
mondiale, la BAD, le France, etc. En échange de ces prêts et
aides, le Cameroun était tenu de mettre en oeuvre des réformes
économiques et politiques, y compris des mesures
d'austérité, de libéralisation économique, de
privatisation et d'autre politiques visant à stabiliser son
économie et à réduire sa dette. Cependant, ces
réformes ont entrainé une augmentation de la dette
extérieure de cet État, car le pays devait emprunter davantage
pour financer ses besoins budgétaires et pour rembourser ses dettes
antérieures.De plus,l'assistance financière accordée par
les institutions internationales était souvent liée à des
conditions strictes, ce qui a créé un cercle vicieux de
dépendance à l'égard de l'argent-dette et de
l'aide-crédit concessionnel.
Les journaux tels que Le Quotidien,
Mutations, Cameroon tribune et les annalyses
économiques de l'époque confirme cela lorsqu'ils rapportent que
les programmes d'ajustements ont entrainé une augmentation de la dette
extérieure du Cameroun, une réduction des dépenses
publiques dans les secteurs de la santé et l'éducation, une
augmentation du chômage et la pauvreté, ainsi qu'une
dépendance accrue à l'égard des institutions
financières internationales.
Ainsi, pendant que cetÉtatpauvre et démuni en
termes de développement humain continue de transférer des sommes
considérables à «ses richescréanciers'' pour
rembourser sa dette extérieure en 2005, une grande partie de sa
population s'enfonçait dans la misère.En effet, lorsque le FMI
prête de l'argent avec intérêts, celapermet aux firmes
occidentales d'avoir une main mise sur les ressources naturelles nationales et
de piller l'État créancier sous couvert de
libéralisation.Cela adonc permis de maintenir le Cameroun dans le cercle
vicieux du sous-développement et du surendettement improductif,alors que
les membres de l'OCDE et les institutions qu'ils contrôlent se sont
enrichis notablement503(*).
Entre 1980 et 2004 par exemple, le total bilan du FMI s'est
accru de 407%, soit une augmentation de 43,86 milliards à 222,43
milliards de dollar américain et celui de la Banque mondiale de 320%,
soit de 85,1 milliards à 357,14 milliards de dollars, alors que la dette
de l'Afrique subsaharienne passait d'une moyenne de 22 milliards de dollar
à une moyenne de 208 milliards de dollar, soit un bond de 845% selon
Mutations504(*). Et selon J. Perkins, le FMI «[dit] venir en
aide aux pays à risque afin deles surendetteretimposer son diktat dans
le but d'exploiter leurs mines. Et après s'être suffisamment
servit, elles parlent d'annulation de la dette'', ajout-il505(*). Quel paradoxe ?
Cela étant dit,l'allègement de dette au Cameroun
ne seraitqu'utopique, d'oùle retour récurrent de thèmes
sur«l'endettement, l'aide publique au développement, les
stratégiques de lutte contre la pauvreté,l'éradication de
la corruption, etc.''506(*)
II. QUEL INTERET POUR LE
CAMEROUN A COLLABORER AVEC LE FMI ?
En 1988 c'est la crise économique et le poidsdes
pesanteurs extérieuresqui obligent les autorités camerounaises
à s'appuyer sur des leviers extérieurs capables de faire basculer
la donne, d'où le recours aux programmes d'ajustement le FMI. Mais en
avril 2006, lors de l'atteintedu point d'achèvement, le partenariat est
maintenupar la signature de nouveaux accords triennaux entre les deux parties,
comment le comprendre ?
1. Rétrospective
sur la banqueroute et le recours du FMI en 1988
Après près de 25 ans de prospérité
économique imposée par l'abondance des ressources naturelles et
le pragmatisme des dirigeants, le Cameroun entre dans une phase
d'involutionéconomique en 1986, caractérisée par un
déséquilibre de la balance de paiement et d'un endettement
sévère. Maisface à l'échec de l'ajustement autonome
et le poids des pesanteurs extérieurs en 1988, les autorités
gouvernantes concluent sur la décennie 1990 plusieurs accords avec le
FMI dans le cadre des programmes d'ajustement structurel.
1.1. Une
nécessité de rétablir les équilibres micro et
macroéconomiques
Lorsque les autorités camerounaises sollicitent
l'intervention du FMI en 1988, le but est de stabiliser, grâce aux
soutien financier et aux conseils économiques duFonds, les
déséquilibres macroéconomiqueset le problème dela
balance de paiement causés par la dévaluation du dollar
américain à la Conférence de Plazza, la chute mondiale des
cours de matières première et la hausse des taux
d'intérêtspar le Trésor américain en 1984507(*).
En effet, à la session budgétaire de juin 1987,
une situation particulière et inédite se produit à
l'Assemblée nationale lors du vote du budget de l'exercice qui devait
débuter en 1988 : le budget général est
réduit. Pour la première fois, le budget camerounais connait une
réduction globale de près de 150 milliards de FCFA, soit une
réduction de 19% par rapport à l'exercice
précédent. Il passe de 800 milliards durant l'exercice 1985/86
à 650 milliards en 1986/87508(*). Cette évolution en étroite relation
avec celle du PIB est la résultante d'un malaise constaté dans
les finances publiques quelques années plus tôt à cause des
sombres perspectives de l'évolution de l'activité
économique tant au niveau national qu'international.
De plus, du fait du ralentissement de l'activité
économique et de la baisse des cours des produits d'exportations sur les
marchés internationaux, le Cameroun subi un important manque à
gagner sur les recettes fiscales, et une augmentation des dépenses avec
les multiples sollicitations de l'État sur tous les secteurs de la vie
nationale. La conséquence directe est la création d'un
déficit important dans le trésor public. Face à
l'inefficacité des perspectives qui ne donnent aucune lueur d'espoir en
raison de la chute continue des cours de matières premières
d'exportation et du mouvement descendant du dollar américain, la
tendance à la baisse de l'économie engage le pays dans un cycle
récurrent de déficit extérieur et endettement, comme
l'indique le tableau ci-dessous.
Tableau n°7 : Évolution de la dette
publique du Cameroun entre 1980 et 1988
Années
|
1980
|
1985
|
1986
|
1987
|
1988
|
Dette à long terme
|
2183
|
2384
|
2898
|
3293
|
3354
|
Service de la dette
|
280
|
641
|
662
|
649
|
650
|
Dette publique/ Exportation en %
|
136,7
|
104,3
|
127,7
|
188,5
|
199,2
|
Dette publique/ PNB en %
|
36,8
|
38,5
|
36,3
|
34,8
|
38,2
|
Service de la dette/ Exportation en %
|
15,2
|
22,7
|
22,8
|
30,4
|
30,7
|
Source : Banque mondiale,«World
debt tables : External Finance for Developing Countries'',vol.2, 1993.
À l'analyse, le tableau ci-dessus indique en clair que
le Cameroun, en dépensant plus qu'il ne produisait, vivait largement
au-dessus de ses moyens durant l'exercice 1986/87 et 1987/88. Face à
l'échec de l'auto-ajustement, les indicateurs de l'économie
camerounaise deviennent typiques à ceux des pays candidats aux
programmes d'ajustement structurel.
Ainsi, lorsque le Cameroun conclut son premier accord avec le
FMIaprès de laborieuses négociations dans le cadre des programmes
d'ajustement en septembre 1988, l'objectif principal était de permettre
à cet État de réunir les conditions internes
nécessaires afin de faire face aux difficultés conjoncturelles
sur une période de 3 ans. Cela explique donc le processus en interne de
l'ajustement économique et financier entrepris par les autorités
camerounaises avec l'aide du Fonds monétaire international.Pour
résoudre le problème d'endettement, le gouvernement camerounais
négocie avec le FMI des accords de rééchelonnement de la
dette extérieure dans le but de dégager des ressources devant
stimuler les budgets et la croissance économique.
1.2. Pour
bénéficier du rééchelonnement de la dette
extérieure
En 1984,la dépréciation du dollar, la hausse des
taux d'intérêts par le Trésor américain et la
détérioration des termes de l'échange rendent le Cameroun
insolvable auprès des bailleurs de fonds et les banques
privées.Cela pousse donc les autorités nationales à
négocier un accord de rééchelonnement avec le Club de
Paris et de Londres509(*).Mais face à l'échec cuisant de
l'ajustement autonome, les groupes de lobbies français obligent les
autorités camerounaises à aller au FMIafin de
bénéficier du rééchelonnement de la dette et de
sauvegarderles nombreux et puissants intérêts des
sociétés étrangères, notamment de Total et surtout
le groupe Bolloré qui contrôle l'exploitation du port de Douala et
celle de chemin de fer CAMRAIL510(*).
En effet, le Club de Paris exige que le Cameroun soit
engagé dans un programme appuyé par le Fonds afinde
bénéficier d'un accord de rééchelonnement. Cela
explique donc la le contexte de signature du premier accord de confirmation et
celui dupremier accord relatif au rééchelonnement de 621
milliards de FCFAde septembre 1988511(*).Pour être totalement débité de
cette somme, le gouvernement national a dû adopter la supervision de
l'initiative de Dakar en 1989, le Plan Trinidad en 1990 et l'IAD et l'IADMen
1997 et 2005. C'est dans ce cadre que le Japonrééchelonne la
dette du Cameroun de 200 millions de FCFA en 1992,de 3,1 milliards le 30 mars
1995, de 1 milliard le 10 novembre 1997,et enfin de 3,2 milliards le 18 juin
1999512(*). En
contrepartie, le gouvernement camerounais devait mettre en oeuvre des
réformes économiques et structurelles visant à
améliorer la gestion des finances publiques, à promouvoir la
transparence et la bonne gouvernance, et à renforcer le secteur
financier. Cela a également permis à l'Étatcamerounais
d'attirer davantage les investissements étrangers et de stimuler la
croissance économique entre 2000 et 2005.
2. Pourquoi
coopérer avec le FMI après l'atteinte du point
d'achèvement del'IPPTE ?
Plusieurs raisons expliquent l'intérêt pour le
Cameroun à coopérer avec le FMIaprès l'atteintedu point
d'achèvement de l'IPPTE.D'une part, cet État devait
bénéficier pleinement des flux financiers d'allègement, et
d'autre part renforcer les politiques publiques post point d'achèvement
pour une croissance plus diversifiée et inclusive.
2.1. Pour
bénéficier pleinement des flux financiers
d'allègement
Selon la presse locale Mutations, le Cameroun
après le point d'achèvement de l'IPPTE compte
bénéficier de tous les flux financiers d'allègement ou
d'annulation de la dette extérieure de l'initiative bilatérale
française et l'IADM513(*). Et pour cela, il fallait conclure de nouveau
accords de partenariat avec le FMI qui estime que l'État camerounais ne
dispose pas encore d'un secteur financierrobuste et bien
réglementé. Carles politiques économiques
envisagées par le chef d'État ne seront pas pertinentes et
crédibles par rapport aux attentes des marchés, des citoyens et
des investisseurs nationaux et internationaux514(*).
Ainsiil fallait donc s'appuyer sur des leviers solides comme
le FMI qui est l'institution d'élaboration et de diffusion de nouvelles
normes internationales dans le but d'instiguer de la confianceauprès des
investisseurs, d'accroitre la transparence de la politique économique et
de permettre aux marchés financiers de mieux évaluer la
côte de crédit de l'emprunteur ainsi que les normes de bonne
conduite qui puissent servir de référence515(*).
Pour rendre crédible le Cameroun auprès des
investisseurs étrangers, le FMI devrait oeuvrer pour une plus grande
transparence et une meilleure communication des données, tant du secteur
public que du secteur privé.Ce qui explique donc la diffusion
fréquente des données mises à jour sur les positions des
réserves internationales et les engagements extérieurs du
Cameroun, notamment de la dette extérieure et des mouvements de capitaux
privés à court, moyen et à long terme516(*).Cela se matérialise
par une utilisation plus fréquente des Notes d'Information au Public
(NIP) et d'une diffusion plus large des lettres d'intention et des
documents-cadrés de politique économique qui sous-tendent les
programmes appuyés par le FMI517(*).
2.2. Pour une croissance
soutenue, plus inclusive et diversifiée
Le gouvernement camerounais, dans l'optique de renforcer et de
soutenir sa croissance économique après le point
d'achèvement s'allie avec le FMI qui se présente commele meilleur
refuge contre les crises financières après des innovations.
Depuis le début de la décennie 2000, le Fonds a su mettre en
oeuvre des programmes qui se sont avérés efficaces contre
l'exubérance de la crise économique et financière. Ce qui
a permis d'améliorer la santé économique de cette nation
et le bien-être des populations.Cela est passé par l'application
des politiques d'ajustement structurel, l'élaboration puis l'adoptiondu
Document de Stratégie pour la Réduction de la Pauvreté
etenfinl'adoption du Document de Stratégie pour la Croissance et
l'Emploi qui pose les bases d'une vision de l'émergence du Cameroun
à l'horizon 2035518(*).
En effet, le DSCEdevrait atténuer les
conséquences sanitaires, économiques et sociales du pays en
garantissant la stabilité macroéconomique ; en
renforçant la bonne gouvernance, les efforts de transparence et de lutte
contre la corruption ; en accélérant les réformes
budgétaires structurelles pour moderniser les administrations fiscales
et douanières, en mobilisant les recettes, en améliorant la
gestion des finances publiques, accroissant l'efficacité des
investissements et réduisant les risques budgétaires des
entreprises publiques ;enrenforçant la gestion de la dette et
réduisant les vulnérabilités de la dette ; et en
mettant en oeuvre des réformes structurelles pour
accélérer la diversification et la dynamisation de
l'économie tirée par le privé519(*).
Élaboré dans un contexte
caractérisé par le renchérissement du coût de la vie
etla recrudescence de la crise financière, alimentaire et
énergétiquemondial, le DSCEgrâce à l'appui financier
des bailleurs de Fonds se présente commeun cadre intégré
de développement, de cohérence financière, de coordination
de l'action gouvernementale et des appuis extérieurs, de consultation et
de concertation avec la société civile, le secteur privé
et les partenaires au développement, et un cadre d'orientation des
travaux analytiques pour éclairer la gestion du
développement520(*).
III. QUELQUES PERSPECTIVES
POUR TIRER PLEINEMENTPROFIT DE CETTE COLLABORATION
Dans une coopération comme celle du Cameroun et du FMI,
on n'est jamais aussi vainqueur ni aussi vaincu qu'on l'imagine. Au lieu de
toujours pointé d'un doigt accusateur les programmes d'ajustement du FMI
commeseuls responsables du marasme économique dans cet État, les
autorités nationales devraient plutôt améliorer la
gouvernance afin de mieux tirer profit de cette coopération pour un
développement durable et équitable du pays. Il s'agit de
rompreavec le pacte colonial etde mettre en place des stratégies de
développement durable plus inclusives par exemple.
1. Rompre avecle pacte
colonial
La rupture du pacte colonial tient compte de la qualité
de l'éducation et de l'adaptation à des situations diverses.
1.1. Renforcer le capital humain
Investir dans l'éducation et la formation
professionnelle est crucial pour assurer un développement
économique durable. Car cela permet aux individus de développer
leur esprit, de remettre en question les normes établies et de
contribuer activement à la construction d'une société plus
juste et équitable. Cela est parfaitement résumé par la
maxime
«le secret de la liberté réside dans l'éducation'',
soulignantainsi l'importance de l'éducation dans le processus de
libération et d'émancipation des peuples. Selon J. Poirot,
«l'accès à l'éducation est une des libertés
politiques et sociales qui, avec la liberté de participation ou
d'expression et le droit à la santé, sont des
éléments constitutifs du développement''521(*). En investissant donc dans
l'éducation, un pays comme le Cameroun peut former une population
instruite, critique et capable de prendre en main son propre destin. Pour
élucider le rôle crucial de l'éducation dans le
développement économique à long terme d'un pays,on se
réfère généralement à l'histoire de la
Chine.
C'est également dans cet ordre d'idée que se
rangeait Nelson Mandela lorsqu'il affirmait que l'éducation est l'arme
la plus puissante qu'on puisse utiliser pour changer le monde, car elle permet
de comprendre les valeurs et les principes fondamentaux qui guident la vie
humaine à prendre les décisions éclairées.Cela
explique donc la pertinence d'un bon système éducatif pour le
développement d'un pays tel que le Cameroun.Car lorsque nous analysons
le type d'éducationdans ce pays, force est de constater que
malgré le taux d'alphabétisation, des lacunes telles que la
mauvaise orientation dans la sphère du vivre, du survivre, et des
raisons de vivre est éminente, d'où le manque de
créativité et d'inventivité de la part des dirigeant dans
le secteur économique par exemple522(*).
En paraphrasant J. Ki-Zerbo, le Cameroun en est arrivé
là non seulement à cause de la perpétuité d'un
système éducatif colonial, mais également à cause
de la phase euphorique qui correspondait à une période de haute
conjoncture internationale, soit après l'indépendance quand
l'argent facile régnait en maître. L'époque où le
gouvernement recevait, distribuait et faisait des plans. Il y avait une sorte
de merveilleuse élasticité de la demande en matière de
ressources humaines523(*). Mais depuis l'avènement de la crise
économique jusqu'au point d'achèvement, c'est fini tout
ça, d'où la nécessité de rompre avec ce pacte et
investir dans le capital humain afin de permettre à
l'Étatcamerounais de réaliser son plein potentiel en tant que
nation souveraine et démocratique.
1.2. S'adapter aux
défis et aux opportunités
Après avoir atteint le point d'achèvement de
l'IPPTE en avril 2006, le Cameroun a bénéficié d'un
allègement de sa dette extérieure et a pu
bénéficier de ressources supplémentaires pour investir
dans le développement économique et social du pays. Cependant,
pour prospérer après cette étape importante, il est
crucial que le pays sache s'adapter aux défis et aux opportunités
qui se présentent. Il doit inventer son développement, et ne plus
penser que l'aide est la solution miracle. C'est la raison pour laquelle les
moments de crise doivent être les moments de remise en question et
d'adaptation524(*).Mais
au lieu de ça, le gouvernement cherche plutôt à maximiser
l'aide qu'il considère comme une source permanente, au lieu
d'élaborer et mettre en oeuvre des stratégies pour
accélérer la croissance et réduire les
inégalités.En effet, les pays qui ont connu un
développement important, que ce soit en Europe, en Amérique ou en
Asie, tels la France, la Chine et les USA, doivent leurs performances non pas
à l'aide extérieure, mais à leur capacité à
créer des richesses525(*).
Plusieurs grands auteurs ont abordé la question de
l'adaptation comme un élément clé du développement
économique et social. Par exemple, Joseph Schumpeter, économiste
autrichien, souligne l'importance de l'innovation et de la
créativité dans le processus de développement
économique. Selon lui, les entreprises et les pays qui sont capables de
s'adapter rapidement aux changements du marché sont ceux qui
prospèrent à long terme526(*). Le cas de la Chine est illustratif.
Il y a quelques années les pays africains à
l'instar du Burundi, Burkina Faso, Cameroun disposaient d'un revenu par
habitant supérieure à celui de la Chine,mais depuis la fin des
années 1990, la Chine connait une croissance soutenue grâce
à sa rapide capacitéed'adaptation aux changements du
marché mondial et deses investissements dans les secteurs
productifs527(*). Ce qui
n'est pas encore le cas du Cameroun, où les fonds assignés
officiellement aux secteurs sociaux et économiques vitaux sont souvent
utilisés pour financer des dépenses improductives et nourrir la
corruption. Le gouvernement doit se proposer un modèle assurant la
croissance économique et permettant une réduction significative
de la pauvreté du pays.
De même, Amartya Sen, lauréat du prix Nobel
d'économie en 1998, met en avant l'idée que le
développement économique ne se résume pas seulement
à la croissance du PIB, mais qu'il doit également prendre en
compte les dimensions sociales, politiques et environnementales528(*). Pour prospérer
après le point d'achèvement, le Cameroun doit donc s'adapter non
seulement sur le plan économique, mais aussi sur le plan social et
environnemental. Car, le développement, ce n'est pas seulement les
indicateurs de la croissance économique, surtout quand ils ne sont que
macro-économiques et fondés sur des moyennes. C'est la raison
pour laquelle il ne faut pas pousser l'extraversion jusqu'à vendre sa
propre histoire pour acheter le développement d'autrui529(*). Il faut dire oui à
l'argent du libéralisme, mais à certaines conditions qui ne sont
pas des conditionnalités ! En effet, le bien-être des Camerounais
doit demeurer la priorité, car l'argent est bon, mais l'homme est
meilleur, parce qu'il répond quand on l'appelle.
C'est dans ce sens que s'aligne également Jeffrey
Sachs, économiste américain et défenseur du
développement durable lorsqu'il souligne l'importance de
l'investissement dans les infrastructures et les technologies pour favoriser la
croissance économique et la réduction de la pauvreté dans
les pays en développement530(*). Ainsi, le Cameroun devrait donc investir dans ces
domaines tout en s'adaptant aux défis liés à la
mondialisation, aux changements climatiques et aux inégalités
sociales.
2. Mettre en place des
stratégies de développement durable
Après avoir atteint le point d'achèvement de
l'IPPTE, le Cameroun devrait mettre en place des stratégies efficaces
pour prospérer et assurer un développement économique et
social durable. Notamment la diversification économique et le
renforcement des infrastructures d'une part, et la promotion de
l'entrepreneuriat et l'intégration régionale et internationale
d'autre part.
2.1. Diversifierl'économie et
développerles infrastructures
Concernant la diversification économique, le Cameroun
devrait chercher à diversifier son économie au-delà de ses
secteurs traditionnels tels que l'agriculture, le pétrole et le
gaz ; et à penser à inclure le développement de
secteurs tels que le tourisme, les technologies de l'information et de la
communication, les énergies renouvelables, et la transformation des
ressources naturelles. Ce qui pourrait être essentiel pour permettre
à cet État de de tirer parti des opportunités offertes par
la mondialisation tout en préservant sa souveraineté et sa
cohésion sociale. En effet, la dépendance excessive à un
seul ou deux secteurs économiques peut rendre un rendre un pays
vulnérable aux chocs externes et limiter ses perspectives de croissance
à long terme, comme ce fut le cas du Cameroun au milieu des
années 1980.
Par ailleurs, plusieurs auteurs tels que René Dumont,
Adam Smith, Célestin Monga et Éric Toussaint ont également
abordé la question de la diversification économique dans le
contexte africain et ont souligné l'importance pour les pays comme le
Cameroun de diversifier leurs économies afin de réduire leur
dépendance à l'égard des matières premières,
d'encourager le développement d'autres secteurs tels que le tourisme,
l'industrie manufacturière, les services et de favoriser une croissance
économique plus stable et durable. En effet, la concentration excessive
sur les matières premières expose l'économie camerounaise
à des risques importants en raison de la volatilité des prix sur
les marchés mondiaux531(*).
Pour ce qui est du renforcement des infrastructures, le
Cameroun devrait renforcer ses infrastructures pour soutenir sa croissance
économique et promouvoir un développement durable. En effet,
l'atteinte du point d'achèvement en avril 2006 par cet État, dans
le cadre de l'IPPTE, a permis au pays de bénéficier d'un
allégement de sa dette extérieure et de ressources
supplémentaires pour investir dans le développement532(*). Ce qui devrait permettre de
renforcer les infrastructures.
A priori, les infrastructures de transport,
d'énergie, d'eau et d'assainissement sont essentielles pour favoriser le
développement économique et social du pays. En effet, des routes
en état de délabrement, un accès limité à
l'électricité et à l'eau potable, ainsi que des
infrastructures de santé et d'éducation insuffisantes entravent
la croissance économique et le bien-être des populations.
A fortiori, plusieurs auteurs ont souligné
l'importance des infrastructures dans le développement des pays en
développement. Paul Collier dans son ouvrage The Bottom Billion
par exemple met en avant le rôle crucial des infrastructures dans la
réduction de la pauvreté et la promotion de la croissance
économique. De même l'économiste Jeffrey Sachs, dans son
livre The End of Poverty, insiste sur la nécessité
d'investir massivement dans les infrastructures pour sortir les pays pauvres de
la pauvreté533(*).
Ainsi, renforcer les infrastructures au Cameroun permettrait
de stimuler l'investissement privé et d'attirer davantage de capitaux
étrangersdans les domaines clés pour un développement
durable534(*). En
améliorant les conditions de transport, d'énergie et de
communication, le pays pourrait augmenter sa compétitivité sur le
plan international et favoriser la création d'emplois et la
diversification de son économie.
2.2. Promouvoir l'entrepreneuriat, l'intégration
régionale et internationale
Il est crucial de promouvoir l'entrepreneuriat dans un pays
comme le Cameroun pour stimuler la croissance économique, créer
des emplois et favoriser le développement durable. L'économiste
Joseph Schumpeter développe le concept de «destruction
créatrice'' selon lequel l'innovation et l'entrepreneuriat sont des
moteurs essentiels du progrès économique535(*). En favorisant
l'émergence de start-ups et de petites entreprises innovantes par
exemple, le Cameroun pourrait dynamiser son économie et accroitre sa
compétitivité sur le plan international.
De plus, l'entrepreneuriat peut jouer un rôle clé
dans la diversification de l'économie camerounaise fortement
dépendante de matières premières et du secteur
pétrolier. En encourageant la création d'entreprises dans des
secteurs tels que l'agriculture, le tourisme, les technologies de l'information
et de la communication, le pays pourrait réduire sa
vulnérabilité aux chocs externes et stimuler une croissance plus
équilibrée et durable. Aussi, promouvoir l'entrepreneuriat au
Cameroun permettrait de renforcer le tissu économique local, de
favoriser l'innovation et de créer des emplois pour une population jeune
et dynamique. En investissant dans l'éducation entrepreneuriale, en
facilitant et en soutenant les initiatives locales, le pays pourrait
bâtir un écosystème entrepreneurial solide et contribuer
à son développement économique à long terme.
Concernant l'intégration régionale et
internationale, le Cameroun devrait promouvoir l'intégration
régionale et internationale afin de consolider les acquis en
matière de développement économique et social. En
s'engageant dans les accords de libre-échange avec ses voisins et des
organisation régionales telles que la CEMAC et la zone de Zone de
Libre-Échange Continentale Africaine (ZLECAF), le Cameroun pourrait
bénéficier de synergies économiques et renforcer sa
compétitivité sur les marchés internationaux.Cela
favoriserait le transfert de connaissance, de technologies et de bonnes
pratiques entre les pays membres, ce qui pourrait stimuler l'innovation,
renforcer les capacités productives et améliorer la
compétitivité des entreprises camerounaises.
Par ailleurs, en promouvant également une
intégration internationale progressive et équilibrée, le
Cameroun pourrait concilier le trilemme de la mondialisation selon lequel
«l'intégration économique, la démocratie et la
souveraineté nationale'', ce qui permettrait de renforcer sa position
sur la scène internationale tout en préservant ses
intérêts nationaux536(*). Car le Cameroun pourrait diversifier les ressources
de croissance, accroitre la résilience face aux chocs externe et
renforcer la coopération avec ses partenaires pour relever les
défis communs tels que le changement climatique, la
sécurité alimentaire et la santé publique.
Au terme de ce chapitre où il était question de
traiter de l'avenir des relations entre le FMI et le Cameroun,il ressort que
malgré le caractère quelque fois complexede cette collaboration,
lorsque les intérêts égoïstes sont pris en filature,il
y a du mérite à continuer cette coopération. Mais à
condition quele gouvernement camerounais prenne, d'une part des mesures
audacieuses contre les défis auxquels le pays fait face afin de
bénéficier pleinement desavantagesqui en
découlent,notamment l'accès aux financements, l'acquisition de
l'expertise, de la crédibilité, des conseils économiques
à contextualiser, etc. D'autre part, le gouvernement devrait mieux
orienter la mobilité des capitaux vers les secteurs essentiels et
stratégiques comme dans le capital humain par exemple.
CONCLUSION
GENERALE
Pour conclure ce projet de recherche où il était
question de s'appesantir surl'investitureet le point de vue des journaux
dansl'évolution de la coopération Camerounais-FMI entre 1988 et
2006, force est de reconnaitre que la presse, aussi bien locale
qu'internationale, a joué un rôle déterminant dans le
processus de régulation de la crise économique de 1985 et le
recours au FMI dans le cadre des programmes d'ajustement en 1998.
Alors qu'en 1960 la philosophie
économique du Cameroun s'alignait à la vision politique dont elle
se présente comme le versant grâce à l'abondance des
ressources nationales et le pragmatisme des autorités
gouvernantes,l'introductiond'une politique d'import-substitution en 1970permet
de remplacer les importations par la production locale, ce qui a
favorisél'assise d'une autosuffisance alimentaire et la sortiedu pays
d'une économie de traite.Et en 1980 de nouveaux objectifs à long
terme, devant diversifier l'appareil de production, réaliser un
développement endogène et faciliter l'accès de tous aux
équipements sociaux de basesont fixés pour l'an 2000.Mais en
1986, la crise économique oblige l'urgence d'un retour à la
stabilité macroéconomique, d'où la suspensiondes plans
quinquennaux.
Après l'avènement de cette crise, Cameroon
tribune, Le Messager et Mutations, vont apaiser la
panique sociale en informant le public sur les causes et les
conséquences de la crise, et vont mettre en lumière les
politiques économiques mises en place par le gouvernement pour y faire
face, tout en critiquant les mesures qui n'étaient pas efficaces. Ils
ont également donné une tribune aux experts économiques
pour analyser la situation et proposer des solutions.
En outre, les journaux étrangers tels que Jeune
Afrique et Le Monde ont apporté un regard extérieur
sur la crise économique au Cameroun, ce qui a permis de mettre en
perspective les politiques économiques du pays par rapport à
celles des autres pays et d'identifier les meilleurs pratiques à
suivre.Cette couverture de la crise a permis de sensibiliser l'opinion publique
camerounaise sur les enjeux économiques et de mobiliser la
société civile pour demander des réformes
économiques plus efficaces. Cela a mis la pression sur le gouvernement
camerounais à recourir aux programmes d'ajustement du FMI.
Après l'élaboration de la
«Déclaration de Stratégie et de Relance Économique''
par la Commission interministérielle camerounaise, c'est finalement le
24 septembre 1988 que le premier accord de confirmation est signé, dans
le cadre des programmes d'ajustement structurel, après de laborieuses
négociations. Ce qui a débouché à la mise en place
des mesures de réforme socio-politiques et économiques entre 1988
et 2006.Il s'agit de l'abandon des subventions aux produits et services de
premières nécessité, l'austérité
budgétaire et réduction des dépenses, la
dévaluation de la monnaie locale, l'élévation des taux
d'intérêt, la promotion d'une production agricole pérenne
pour faire rentrer les devises, la suppression des barrières
douanières, la libéralisation de l'économie, la
suppression du contrôle des changes, la privatisation massive des
entreprises publiques, et l'introduction d'une TVA.Ces mesures devaient
permettre de surmonter sans tarder les difficultés auxquelles se heurte
déjà la balance des paiements etd'empêcher que les
difficultés ne resurgissent.
Mais d'après les journaux, ce n'est qu'après la
dévaluation du FCFA en 1994 que l'économie camerounaise se
stabilise et réentame une croissance soutenue.Entre 1995 et 2006, la
production intérieure passe d'un déficit de -0,06% entre 1988 et
1994 àune croissance de 4% en moyenne entre 1995 et 2006.La situation
des finances publiques s'améliore nettement grâce à une
meilleure mobilisation des recettes propres, tandis que le taux de
chômage passe de 24,6% de la population active en 1993 à 7,5%, ce
qui a permis d'améliorer la cotation internationale du Cameroun.
Concernant le problème d'endettement qui n'a cessé d'accroitre
jusqu'en 1999,c'est sousl'achèvement de l'initiative PPTE que l'encours
de cet endettement excessif est réduit grâce à l'IADM
adopté en 2005 à Lyon.
Par ailleurs, à l'image des autres pays d'Afrique noire
comme la Côte d'Ivoire et le Sénégal, le Cameroun a
étéincapable de promouvoir une industrie locale solide à
cause de la concurrence étrangère dont la politique industrielle
accorde des avantages difficilement réversibles 18 ans après.
À l'atteinte de l'initiative PPTE renforcée en avril 2006, la
production économique camerounaise se limite aux matières
premières, aux activités dont les coûts de transport
à l'importation sont très élevés, aux petites
industries à faible économie d'échelle et aux
activités de bouts de filières.
Celaa amené certains journaux, tels queLe Messager,
Mutations et Jeune Afriqueà considérer les
programmes d'ajustement comme un fiasco au Cameroun. Car même si le FMI
permet de desserrer la contrainte financière grâce ses
conditionnalités, la contrepartie a été l'accroissement
des risques de ré endettement et de faiblesse de la coordination des
politiques d'aide, d'où le Cameroun dans les fourches caudines du
FMI.
Le gouvernement camerounais a également
été critiqué pour sa gestion de la coopération avec
le FMI, soulignant des problèmes de transparence et de corruption. Pour
y remédier les perspectives proposées sont : d'adopter des
dispositifs efficaces pour faire face à ces défis et orienter les
capitaux vers l'innovation des secteurs essentiels et stratégiques comme
l'éducation, la santé,les infrastructures, l'agriculture, etc.
ANNEXES
Annexe 1 : Interview exclusiveduprésident
de la République El Hadj Ahmadou Ahidjo accordé au journaliste
EngelbertNgog-Hoble 12 novembre 1974
Source : Cameroon tribune,
n°115.
Annexe 2 : Opération 150.000 t. de cacao
encouragé par la SODECAO pendant le 3e plan
quinquennal
Source : Cameroon tribune,
n°108.
Annexe 3 : Lois relatives au régime des
substances minérales, et fixant l'assiette, les taux et mode de
recouvrement des droits fixes, redevances et taxe minières en
1978
Source :Cameroon tribune,
n°1365.
Annexe 4: Bilan du Quatrième plan
quinquennal dans la région du Centre et du Sud du Cameroun
Source : Cameroon tribune,
n°1412.
Annexe 5: Message du Chef d'État, El Hadj
Ahmadou Ahidjo, adressé à la nation le 31 décembre
1979
Source : Cameroon tribune.
Annexe 6 : Discours de bonne année du Chef
de l'État, Paul Biya le 31 décembre 1984.
Source : Cameroon tribune,
n°3164.
Annexe 7 : Rétrospective sur le Comice
agro-pastorale de Bamenda en 1984
Source :Cameroon tribune,
n°3169.
Annexe 8 :Interviewdu président de la
République Paul Biya accordé au journaliste
ÉricChinje,février 1987
Source : Cameroon tribune,
n°3804.
Annexe 9 :Tableau canevas de
mise en application progressive des réformes du FMI au Cameroun sur 10
ans
Années de réformes et secteurs
|
1
|
2
|
3
|
4
|
5
|
6
|
7
|
8
|
9
|
10
|
Macro-économie
|
Stabiliser
|
Maintenir la stabilisation
|
Marché-prix
|
Libéraliser la plupart des prix
|
Libéraliser les prix de certains biens de
première nécessité
|
Commerce
|
Supprimer les restrictions quantitatives aux importations
|
Ramener les droits de douane à un niveau modeste
|
Distribution
|
Privatiser
|
Développer
|
Marché du travail
|
Dérèglementer l'embauche et licenciement
|
Libéraliser les négociation salariales
|
Marché des capitaux
|
Restructurer
|
Libéraliser et privatiser
|
Structure du capital
|
Petites entreprises
|
Développer et privatiser
|
Grande entreprises
|
Évaluer
|
Restructurer et privatiser
|
Investissement étranger
|
Réviser la réglementation
|
|
|
|
|
|
|
|
Pouvoirs publics
|
Cadre juridique
|
Réformer le droit commercial, de la
propriété et de la fiscalité
|
Étendre la réforme à tous les domaines
|
Cadre institutionnel
|
Réformer les institutions juridiques et la gestion
financière
|
Source : Rapports FMI et Banque
mondiale.
Annexe 10 : Indicateurs économiques du FMI
en 1996
Source :FMI, Rapport
annuel,1997, p.197.
Annexe 11: Conditionnalités structurelles
pour la FSRP
Source : archive du BRFMIC
Annexe 12: Lettre d'intention du Premier Ministre
camerounais Peter MafanyMusongue au Directeur Général du FMI en
1997
Source : MINFI.
Annexe 13: Rapport de la mission de consultation
du FMI au Cameroun, 16 juin 2001
Source : Archive du BRFMIC
Annexe 14: Bilan des programmes appuyés
par le FMI (2001-2005)
Source : Archive du BRFMIC.
Annexe 15: Lettre Ministérielle datant de
2001
SSSS
Source : MINFI
SOURCES ET REFERENCE
BIBLIOGRAPHIQUES
I. SOURCES
1. Orales
Noms et Prénoms
|
Age
|
Fonction
|
Lieu de l'entretien et jour
|
Anonyme
|
//
|
Archiviste
|
Yaoundé, 18 Août 2022 (SOPECAM)
|
Anonyme
|
//
|
Responsable Service courriel au MINEPAT
|
Yaoundé, le 6 juin 2023(MINEPAT)
|
Anonyme
|
//
|
Étudiant Université de Yaoundé 1
|
Yaoundé, le 27 juin 2023 (Campus Université de
Yaoundé 1)
|
Bekono Cyrille Aimard
|
//
|
Enseignant des Universités
|
Yaoundé, le 17 février 2023 (Département
d'Histoire)
|
EdzimbiEmbolo Angèle
|
68 ans
|
Cultivatrice
|
Ebom, le 16 août 2022 (Résidence)
|
Enouga Gaspard
|
35 ans
|
Chargé de cours à l'ISSEA
|
Yaoundé, le 28 novembre 2022 (Campus de l'ISSEA)
|
Kaffo Apollinaire
|
48 ans
|
Mécanicien
|
Yaoundé, 15 janvier 2023 (Résidence)
|
Majesté Ambasa
|
//
|
Chef de village
|
Nkolngok, 02 juin 2023 (Chefferie)
|
Mengue Me Ndongo Jean Paulin
|
53 ans
|
Historien, Enseignant et chercheur, Chargé de cours
|
Yaoundé, le 4 mai 2023 (Département d'Histoire
et Résidence)
|
Ngono Odile Flore
|
45 ans
|
//
|
Yaoundé, le 26 mai 2023 (Résidence)
|
Tchokote Du Prince
|
//
|
Économiste
|
Yaoundé, 12 avril 2023 (Bureau du FMI au Cameroun)
|
TsalaTsala Cristian
|
//
|
Professeur des Universités
|
Yaoundé, 13 avril 2023 (Département
d'Histoire)
|
ZapoueNgouanet Paulin
|
27 ans
|
Ingénieur statisticien Économiste
|
Yaoundé, le 13 juin 2022 (Résidence)
|
2. Archives
· MINEFI
Annuaire du Cameroun 1994, (une
publication de la Direction de la Statistique et de la Comptabilité
Nationale, Ministère de l'économie et des Finances).
Annuaire du Cameroun 1997, (une publication de la Direction de
la Statistique et de la Comptabilité Nationale, Ministère de
l'économie et des Finances).
Annuaire du Cameroun 1999, (une publication de la
Direction de la Statistique et de la Comptabilité Nationale,
Ministère de l'économie et des Finances).
Annuaire du Cameroun 2000, (une publication de la Direction de la
Statistique et de la Comptabilité Nationale, Ministère de
l'économie et des Finances).
Annuaire du Cameroun 2004, (une publication de la
Direction de la Statistique et de la Comptabilité Nationale,
Ministère de l'économie et des Finances).
Circulaire n°00199/MINFI/B du 3 juillet 1985 portant sur
l'exécution et au contrôle de l'exécution du budget de
l'État, des organismes subventionnés et du budget annexe pour
l'exercice 1985/1986, (Etienne Ntsama, le Ministre des Finances, à titre
de compte rendu).
Circulaire n°00027/MINFI/B du 1er juillet 1987
portant instruction relatives à l'exécution et au contrôle
de l'exécution du budget de l'État, des organismes
subventionnés et du budget annexe pour l'exercice 1987/1988,
(André Booto à Ngon, le Ministre des Finances, à titre de
compte rendu).
Circulaire n°396/MINFI/B du 12 juillet 1988 portant
instruction relatives à l'exécution et au contrôle de
l'exécution du budget de l'État, des organismes
subventionnés et du budget annexe pour l'exercice 1988/1989. (Sadou
Hayatou, Ministre des finances, ordonnateur principal du budget), fait à
Yaoundé, le 12 juillet 1988.
Circulaire n°0007/MINFI/B du 5 juillet 1989 portant
instructions relatives à l'exécution et au contrôle de
l'exécution du budget de l'État pour l'exercice 1990/1991, (Le
Ministre des finances, ordonnateur principal du budget), fait à
Yaoundé, le 5 juillet 1989.
Circulaire n°2985/MINFI/B du 6 juillet 1990 portant
instruction relatives à l'exécution et au contrôle de
l'exécution du budget de l'État pour l'exercice 1990/1991, (Sadou
Hayatou, le Ministre des finances, ordonnateur principal du budget).
Circulaire n°02926/MINFI/B du 11 juillet 1991 portant
instructions relatives à l'exécution et au contrôle de
l'exécution du budget de l'État pour l'exercice 1991/1992,
(Justin Ndiora, le Ministre des finances, ordonnateur principale du budget).
Circulaire n°0395/MINFI/B du 07 juillet 1994 portant
instructions relatives à l'exécution et au contrôle de
l'exécution du budget de l'État pour l'exercice 1994/1995,
(Antoine L. Tsimi, le Ministre des finances, ordonnateur principal du
budget).
Circulaire n°002/CAB/PR du 27 avril, 2001, relative au
devoir de solidarité gouvernementale (Paul Biya, le Président de
la République), fait à Yaoundé le 27 avril 2001.
Circulaire n°006/CAB/PM du 23 juillet 2001, relative
à l'acquisition des véhicules dans les administrations de
l'État, (Peter MafanyMusongue, le Premier Ministre, Chef du
gouvernement), fait à Yaoundé, le 23 juillet 2001.
Circulaire n°253/CF/MINEFI/B
du 05 juillet 2002 portant instructions relatives à l'exécution
et au contrôle de l'exécution du budget de l'État, des
organismes subventionnés pour la période transitoire du 01
juillet au 31 décembre 2002, (Michel Meva'a m'Eboutou, le Ministre de
l'économie et des Finances, ordonnateur principal du budget).
Circulaire n°003/MINEFI/B du 03 janvier 2005 portant
instructions relatives à l'exécution et au contrôle de
l'exécution du budget de l'État et des organismes
subventionnés pour l'exercice 2005(Polycarpe AbahAbah, Le ministre de
l'Économie et des Finances, ordonnateur principal du budget de
l'État).
Lettre d'intention du premier ministre, chef du gouvernement
à Monsieur le Directeur général du FMI, 24 février
1989.
Lettre ministérielle du 21 juin 2001, (Laurent Fabius,
Ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; Michel
Sapin, Ministre de la fonction publique et de la réforme de
l'État).
MINFI, «Aide-mémoire sur la politique
économique et financière du Gouvernement camerounais'',
Août 1988, 28p [1er PAS].
MINFI, Déclaration de stratégie et de relance
économique, 1988.
MINFI,«Aide-mémoire sur la politique
économique et financière du Gouvernement camerounais'',
Juillet 1991, 14p [2ème PAS].
MINFI, «Scénario d'un programme économique
à moyen terme pour leCameroun'', Septembre 1991, 42p + annexes
[2ème PAS].
MINFI, «Déclaration de politique économique
et financière du gouvernement camerounais'', datée du 17
février 1994.
MINEFI, «Document-cadre de politique économique et
financière à moyen terme 1997/98-1999/2000'', Juillet 1997, 24p +
annexes [5ème PAS].
Ordonnance n°90/001 du 29 janvier 1990.
Premier Ministère, «Déclaration de
politique économique et financière du Gouvernement camerounais'',
Février 1994, 41p [3ème PAS].
Premier Ministère, «Déclaration de
politiques économique et financière, Septembre 1995'', 23p +
annexes [4ème PAS].
· MINEPAT
C.T.S, Plan de stabilisation des Finances publiques et de la
relance économique, mars 1989.
Déclaration de Politique Économique et
Financière du Cameroun, juillet 1994.
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Pauvreté (DSRP), avril 2003.
EssombaD. et Als, «Cameroun Vision 2035'', Document
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pauvreté au Cameroun. Cadrage national, 2000.
Mémorandum sur les Politiques Économiques et
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MINEPAT, PNUD et Bureau des Services d'Appui des Projets,
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· Nationales
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Bulletin du FMI, édition spéciale de septembre
1987.
Décision n°6056-(79/38), Recueil de
décisions du Fonds Monétaire International, dixième
édition, Washington, Fonds Monétaire International, 1983.
Cameroon tribune, n°1391, samedi 3
février 1979.
Cameroon tribune, n°1412, jeudi, 1er
mars 1979.
Cameroon tribune, n°1487, samedi, 2 juin
1979.
Cameroon tribune, n°1488, dimanche 3 et lundi 4
juin 1979.
Cameroon tribune, n°1691, vendredi,
1er février 1980.
Cameroon tribune, n°3172, vendredi 11 janvier
1985.
Cameroon tribune, n°3179 du dimanche 19 janvier
1985.
Cameroon tribune, n°3763, jeudi 1er
et vendredi 2 janvier 1987.
Cameroun Tribune, n°3773, dimanche 11 et Lundi
12 janvier 1987.
Cameroon tribune, n°3775, vendredi 16 janvier
1987.
Cameroon tribune, n°3779, mercredi 21 janvier
1987.
Cameroon tribune, n°3810, jeudi 26
février 1987.
Cameroon tribune, n°4167, 18 février
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Charte du FMI, 1945.
Document «Stratégie sectorielle de santé
2001-2015'', 2001.
Kemayou Happi L., «Projet de loi n°15/PJL/AN portant
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MINADER et OCDE, «Analyse des interactions entre les
politiques macroéconomiques et le développement agricole'',
2006.
MINADER, «Répertoire des projets et programmes du
MINADER'', 2012.
Ordonnance n°90/004 du 22 juin 1990 relative à la
privatisation des entreprises publiques et parapubliques et les
différents décrets d'application.
3. Décrets et lois
Décret n°86/656 du 3 juin 1986 portant
création d'une Mission de réhabilitation du secteur public et
parapublic.
Décret n°90/1257 du 30 août 1990 portant
application de l'ordonnance n°90/004 du 22 juin 1990 relative à la
privatisation des entreprises publiques et parapubliques.
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privatisation de certaines entreprises du secteur et parapublic.
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l'économie du Cameroun : Approche historique
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de l'industrie manufacturière au Cameroun (1946-99)'',
Mémoire de DEA en Histoire, Université de Yaoundé 1,
2005.
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commerce extérieure du Cameroun 1945-2003'', Mémoire de
Maitrise en Histoire, Université de Yaoundé I,2008.
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farm de Ndonkal. 1987 à 2008 : Aperçu historique'',
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TABLE DES
MATIERES
SOMMAIRE
i
DEDICACE
iii
REMERCIEMENTS
ivv
LISTE DES ACRONYMES ET ABREVIATIONS
v
LISTE DES
ILLUSTRATIONS..............................................................................VIII
RESUME ix
ABSTRACT
x
INTRODUCTION GENERALE
1
1. Contexte général de
l'étude
2
2. Raisons de choix du sujet
3
3. Intérêts du sujet
3
4. Cadre spatio-temporel 4
5. Clarification conceptuelle 8
6. Cadre théorique 9
7. Revue critique de la
littérature 10
8. Problématique 12
9. Objectifs de la recherche 13
10. Hypothèses de recherche 13
11. Cadre méthodologique 14
12. Les difficultés 16
13. Plan de travail 16
CHAPITRE 1 : FACE AUX DEFIS DE
L'HEURE, LE CAMEROUN RECOURT AU FMI 17
I. UNE ECONOMIE ENTRE RESILIENCE ET
CONTROVERSE 17
1. L'économie camerounaise : une
brillante exception en Afrique ? 18
1.1. Une parfaite synergie entre
«abondance des ressources nationales et pragmatisme des
dirigeants'' 18
1.2. Un bilan positif et riche de
promesse 24
2. Le difficile destin de l'économie
camerounaise 32
2.1. Les signaux d'alerte : la
stagnation des produits de base, la baisse de la manne pétrolière
et le recul de la production industriel 32
2.2. Le plan de rigueur et les mesures
préconisées pour limiter les irrégularités
35
II. LES RAISONS JUSTIFIANT LE RECOURS AU
FMI 37
1. Les raisons microéconomiques et
macroéconomiques 37
1.1. Une crise
sévère.........................................................................................37
1.2. L'instabilité politique et
sociale 39
2. Le poids des pesanteurs
extérieures 41
2.1. Selon des considérations
économiques 41
2.2. Considérations politiques
43
III. AUX ORIGINES DU FMI ET DES PROGRAMMES
D'AJUSTEMENT STRUCTUREL (PAS).. 45
1. Aux origines du FMI 45
1.1. Contexte et circonstances de
création du FMI 45
1.2. Les objectifs et les missions
attribuées au FMI 47
2. Les visées des PAS du FMI
49
2.1. Le consensus de Washington :
fondement théorique des PAS 49
2.2. Le modèle intégré
FMI-Banque mondiale des PAS 50
CHAPITRE 2 : VERS UNE COOPERATION
EFFECTIVE ENTRE CAMEROUN ETET FMI 52
I. LA NATURE DES ACCORDS CONCLUS
52
1. Les accords de confirmation ou Stand-by
Arrangement 53
1.1. L'accord de confirmation du 24
septembre 1988 53
1.2. L'accord de confirmation du 20
décembre 1991 55
1.3. L'accord de confirmation du 25
mars 1994 56
1.4. L'accord de confirmation du 27 juillet
1995 57
2. Les accords économiques et
financiers triennaux 58
2.1. La Facilité d'ajustement
structurel renforcé (FASR), 1997-2000 58
2.2. La Facilité pour la
Réduction de la Pauvreté et pour la Croissance (FRPC), octobre
2000-2003............................................................................................................................................................58
II. LES CONDITIONNALITES D'EMPRUNT ET LEUR
MISE EN APPLICATION CONCRETE AU CAMEROUN 60
1. Les politiques de réformes
approuvées par l'Etat Camerounais 61
1.1. Les politiques
macroéconomiques 61
1.2. Les politiques structurelles
62
2. La mise en application concrète
des conditionnalités approuvées par le gouvernement
camerounais 64
2.1. Sur le plan institutionnels et
politiques 64
2.2. Sur le plan économique
67
III. LE DESACCORD SURL'APPLICATIONDES PAS AU
CAMEROUN 73
1. Une mise en avant des limites des PAS
73
1.1. La vision dogmatico-satique du
développement et la négligence du volet social
Erreur ! Signet non
défini.
1.2. La polituqe de change incertaine,
l'inefficacité d'une politique monétaire sévère et
l'ingérence dans les affaires des Etats 76
2. L'idéalisme des autorités
des autorités camerounaises face aux problèmes conjoncturels
77
2.1. LAjustement structurel comme base
solide de lutte contre les irrégularités microéconomiques
et macroéconomiques 78
2.2. Ajustement structurel comme plan
d'action contre l'autoritarisme au Cameroun 79
CHAPITRE 3 : ANALYSE DES PERFORMANCES
ECONOMIQUES ET SOCIO-POLITIQUES PAS AU CAMEROUN, 18 ANS APRES
84
I. ANALYSE DES PERFORMANCES ECONOMIQUES
84
1. La dérèglementation des
politiques économiques 84
1.1. La libéralisation du
marché camerounais 84
1.2. L'instauration de la concurrence dans
le secteur industriel 88
2. Une croissance économique diversifiée et
soutenue..................................................90
2.1. La hausse du niveau de la production
intérieure.....................................................93
2.2. L'amélioration du rendement des principaux
secteurs économiques..............................98
II. ANALYSE DES PERFORMANCES
SOCIO-POLITIQUES 100
1. L'impact des PAS sur le système
politique camerounais 100
1.1. Les changements institutionnels
100
1.2. La redéfinition des politiques
publiques 104
2. Une nette reconfiguration
sociétale 107
2.1. Le renforcement de l'écart du
niveau de vie entre Camerounais 108
2.2. La résilience de la population
et l'émergence du secteur informel 111
III. LES INDICATEURS DE MESURE DU
DEVELOPPEMENT AU CAMEROUN A L'ATTEINTE DU POINT D'ACHEVEMENT DE L'IPPTE
117
1. Les indicateurs économiques du
développement 118
1.1. Le Produit Intérieur Brut
(PIB) 118
1.2. Le PIB par habitant (PIB/hbt)
119
2. Les indicateurs sociaux du
développement 121
2.1. L'Indice du Développement Humain
(IDH) 122
2.2. L'Indice du Développement Humain
Ajusté des Inégalité (IDHI) et l'Indice
d'Inégalité du Genre (IIG) 123
CHAPITRE 4 : QUEL AVENIR POUR LA
COLLABORATION CAMEROUN-FMI ? 127
I.LE FONDS MONETAIRE
INTERNATIONAL : UN INSTRUMENT DEVANT PERMETTRE AUX POUVOIRS PUBLICS D'AMELIORER
LES CONDITIONS FINANCIERES DURANT LA DECENNIE 1990 ? 127
1. Le FMI, une panacée contre les
déséquilibres économiques au Cameroun 127
1.1. La logique d'une mise en application
des politiques d'ajustement et de stabilisation 128
1.2. Une évolution riche de
virtualitéset pleines de promesses 129
2. La coontre-facette de l'intervantion du
FMI au Cameroun 131
2.1. Favoriser l'expansion des entreprises
occidentales 132
2.2. Renforcerle circuit
infernald'argent-dette et d'aide-credit concessionnel 134
II. QUEL INTERET POUR LE CAMEROUN A
COLLABORER AVEC LE FMI ? 136
1. Rétrospective sur la banqueroute
etle recoursdu FMI en 1988 136
1.1. Une nécessité de
rétablir les équilibres micoéconomiques et
macroéconomiques 136
1.2. Pour bénéficier du
rééchelonnement de la dette extérieure 138
2. Pourquoi coopérer avec le FMI
après l'atteinte du point d'achèvement de l'IPPTE ?
139
2.1. Pour bénéficier
pleinement des flux financiers d'allègement 139
2.2. Pour une croissance soutenue, plus
inclusive et diversifiée 140
III. QUELQUES PERSPECTIVES POUR TIRER
PLEINEMENT PROFIT DE CETTE COLLABORATION 141
1. Rompre avecle pacte colonial
141
1.1. Renforcerle capital humain
141
1.2. S'adapter aux défis et
oppportunités 142
2. Mettre en place des stratégies de
développement durable 144
2.1. Diversifierl'économie et
développerles infrastructures 144
2.2. Promouvoir l'entrepreneuriat,
l'intégration régionale et internationale 146
CONCLUSION GENERALE 148
ANNEXES 151
SOURCES ET REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
186
TABLE DES MATIERES 219
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23 mai 2023 à 15h01.