La baisse du nombre de licenciés de tennis en Francepar Lucile Pothier INSEEC U. Chambéry - Master 2 2020 |
A. MUTATIONS DANS LA PRATIQUE SPORTIVE DES FRANÇAISDepuis quelques années, la demande et l'offre des pratiques sportives en France font face à des profondes mutations. En effet, les Français consomment le sport différemment. Ils sont davantage à la recherche de pratiques sportives pour préserver leur santé et bien-être. Ils ne pratiquent plus forcément en club, mais en pleine nature, chez soi ou même sur ordonnance1. Ces changements des modes de consommation dans la pratique sportive s'identifient sous plusieurs tendances. Tout d'abord, la première tendance concerne des modes de consommations du sport qui évoluent. Les pratiquants ne font plus de sport pour faire de la compétition mais plutôt en loisir. Dans une étude récente menée par le Centre de Droit et d'Économie du Sport (CDES) démontre "la demande de pratique en compétition diminue au profit d'autres types de pratiques plus conviviales. Environ 54 % des pratiquants sont amateurs, 24 % occasionnels, 11 % compétiteurs2». On remarque un éloignement de la pratique compétitive au profit d'une pratique loisir. Les pratiquants ne cherchent plus à faire du sport de manière intensive, mais pour rester en forme et préserver leur santé. Ce phénomène a notamment été accentué par l'arrivée du culte de la minceur où l'importance sanitaire de la pratique du sport a largement contribué à l'évolution de la demande des pratiquants. Par ailleurs, de plus en plus de sports se développent et deviennent accessibles au grand public. Cette évolution est notamment liée à la démocratisation du sport, mais aussi à plusieurs facteurs économique, social, politique et culturel. En effet, le sport n'est plus accessible uniquement 1 Gimbert, V. (2018). Activité physique et pratique sportive pour toutes et tous : France Stratégie. Consulté à l'adresse https://www.strategie.gouv.fr/publications/activite-physique-pratique-sportive-toutes 2 Centre de Droit et d'Economie du Sport. (2016). Diagnostic sur le décalage entre l'offre et la demande de pratique sportive en France. Consulté à l'adresse http://www.cdes.fr/expertise/economie-sport/nos-r-f-rences/diagnostic-sur-d-calage-entre-loffre-et-demande-pratique 23 aux groupes sociaux les plus aisés. Les seniors peuvent pratiquer du sport plus longtemps grâce à l'allongement de la durée de vie. Il faut également prendre en compte que la pratique sportive s'est amplement féminisée. On observe ainsi un véritable phénomène de massification des pratiques sportives qui se traduit par une augmentation du nombre de licences délivrées mais aussi par le nombre de Français qui déclarent pratiquer du sport3. Selon une étude menée en 2018 par l'Institut National de la Jeunesse et de l'Éducation Populaire, "66 % des Français de plus de 15 ans (soit un peu plus de 36 millions) ont eu une pratique sportive au cours des 12 derniers mois4". De plus, l'offre de pratique s'élargit et se diversifie davantage pour répondre à la demande des pratiquants. De nombreux sports se pratiquant en dehors des structures associatives ont émergé et se sont fortement développés. Il s'agit des sports de glisse tels que le surf, le roller, les sports en nature comme la randonnée ou la marche. Aujourd'hui, les sports les plus pratiqués en France sont la course et la marche (40 %), les activités de la forme et de gymnastique (22 %), les sports aquatiques et nautiques (20 %) et les sports de cycle ou motorisés (18 %) 3 Centre de Droit et d'Economie du Sport. (2016). Diagnostic sur le décalage entre l'offre et la demande de pratique sportive en France. Consulté à l'adresse http://www.cdes.fr/expertise/economie-sport/nos-r-f-rences/diagnostic-sur-d-calage-entre-loffre-et-demande-pratique 4 Croutte, Müller, & Hoibian. (2019). INJEP - Baromètre national des pratiques sportives 2018 (2019/01). Consulté à l'adresse https://injep.fr/publication/barometre-national-des-pratiques-sportives-2018/ 24 Les pratiquants s'éloignent des activités sportives qui se pratiquent dans un cadre fédéral. Ils ont tendance à privilégier des sports qui peuvent se pratiquer en autonomie, sans contraintes et sans encadrements. La notion du temps prend de l'ampleur dans notre société actuelle et se transpose dans le sport. La pratique en autonomie correspond mieux à ces nouveaux modes de vie, "près de la moitié des sportifs (49 %) pratiquent leur activité principale "seuls". Les pratiques autonomes sont privilégiées par rapport à celles qui s'exercent dans un club ou une structure commerciale. 24 % des pratiquants font du sport dans un club ou une association, 8 % dans une structure commerciale alors que 61% optent pour une pratique plus autonome". 25 La pratique en autonomie est privilégiée pour deux raisons : sa flexibilité et son coût. Le pratiquant autonome peut évoluer à son rythme et sans contrainte d'horaires, c'est-à-dire loin des entraînements encadrés. La pratique est également moins chère car aucunes licences ou cotisations n'a besoin d'être payées5. La demande évolue et se diversifie constamment au fil des années. L'offre se retrouve donc également impactée. Une autre tendance significative dans les mutations des pratiques sportives est que le contexte concurrentiel a fortement évolué et devient de plus en plus intense. Selon le Centre de Droit et d'Économie du Sport, il y a une concurrence intense entre les fédérations fédérales qui redoublent d'ingéniosité pour attirer des licenciés, mais aussi avec le secteur marchand. En effet, les salles de sport et les entraîneurs de fitness qui proposent des séances de coaching privées ne cessent d'accroître. L'apparition de ces salles de sport représente une vraie menace pour le secteur associatif. Elles proposent des équipements modernes avec des horaires extrêmement flexibles. Les associations sportives se retrouvent en difficulté avec des infrastructures vieillissantes qui dépendent des municipalités. D'autres sont en manque d'infrastructures, ce qui représente un frein pour leur développement. De plus, certaines structures n'ont pas les ressources humaines nécessaires pour être ouvertes toute la journée et tous les jours comme certaines salles de sport proposent à leurs membres. Par ailleurs, l'évolution des politiques publiques, notamment la diminution des financements publics pour les associations sportives, devient une difficulté réelle pour la pérennité de beaucoup de structures associatives6. L'émergence d'une concurrence directe et indirecte impacte fortement les associations sportives traditionnelles. Ces mutations des modes de consommation du sport obligent les fédérations à développer leurs pratiques. La diversification de leurs offres devient nécessaire pour faire face à la concurrence mais aussi pour éviter de creuser davantage le décalage entre ce que les fédérations proposent et les attentes des pratiquants. La demande sportive évolue vers une pratique sportive non-compétitive, axée sur la santé, et les offres d'activités sportives se diversifient en permanence. 5 Croutte P., Y., Müller J. (2018). Baromètre national des pratiques sportives. Baromètre réalisé pour l'INJEP et le ministère des sports. Consulté à l'adresse https://injep.fr/wp-content/uploads/2019/01/Rapport2019-01Barometresport2018.pdf 6 Centre de Droit et d'Économie du Sport. (2016). Diagnostic sur le décalage entre l'offre et la demande de pratique sportive en France. Consulté à l'adresse http://www.cdes.fr/expertise/economie-sport/nos-r-f-rences/diagnostic-sur-d-calage-entre-loffre-et-demande-pratique 26 |
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