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Jeux, enjeux et contraintes des grandes puissances au cours du printemps arabe. Le cas des membres du CSNU.

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par Ange Joachim MENZEPO
Université de Dschang-Cameroun - Master en Sciences politiques 2015
  

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SECTION II : LES JEUX DISSEMBLABLES

Les jeux dissemblables sont la marque de ce que les grandes puissances agissent par concurrence. La similitude de leurs actions n'est qu'une coïncidence, chacune aurait souhaité être seule à poser tous les actes afin de bénéficier seule des retombées du printemps arabe. Ces actions sont spécifiques aux puissances en fonction de leur engagement selon qu'elles sont très actives (paragraphe 1) ou moins actives (paragraphe 2).

PARAGRAPHE I : LES CONDUITES SPECIFIQUES DES GRANDES PUISSANCES TRES ACTIVES

Les conduites spécifiques des grandes puissances très actives ne sont pas très nombreuses. Elles s'articulent autour des actions pour le changement par l'apport de soutiens aux rebelles (A) et des actions allant dans le sens du maintien en poste des dirigeants en place (B).

A. Les actions visant le changement par le soutien aux rebelles

Des actions propres à chaque puissance caractéristiques de leur image et visant le changement par le soutien aux rebelles ont été posées par la Grande-Bretagne (1) et les Etats-Unis (2).

1- Les jeux spécifiques de la Grande-Bretagne

La Grande-Bretagne, au travers de ses autorités, a effectué une visite en Tunisie et en Egypte (a) et appelé à la mobilisation internationale pour une intervention en Libye (b).

a- Les visites des autorités anglaises en Tunisie et en Egypte : signe de l'approbation des manifestations.

Comme dans toute politique étrangère, les images et les perceptions jouent un rôle dans la façon dont les décideurs définissent l'intérêt national et choisissent les stratégies. Les autorités britanniques se sont précipitées afin d'être les premiers à se rendre en Egypte et en Tunisie au cours de la crise, exprimant ainsi leur sympathie aux peuples tunisien et égyptien. Les hauts responsables du gouvernement britannique David CAMERON et William HAGUE ont été les premiers membres de gouvernements étrangers à se rendre dans ces pays après la chute de Ben ALI et d'Hosni MOUBARAK289(*) mais avant toute traçabilité sur les transitions.

On a assisté là à une véritable course contre la montre dans un esprit de concurrence, pour mieux se positionner. Nous y reviendrons dans la deuxième partie de notre étude. La diplomatie britannique a tenu à être la première à se rendre dans ces pays afin certainement de contrôler le processus de consolidation des acquis du printemps arabe. Les autorités anglaises n'ont pas attendu que les gouvernements de transition soient mis en place. Le ministre des Affaires étrangères britannique, William HAGUE s'est rendu en Tunisie le 11 février 2011, tandis que David CAMERON était en Egypte le 21 février 2011 pour rencontrer le premier ministre Ahmed SHAFIK, grillant ainsi la priorité à sa compatriote, la Haute représentante pour les affaires étrangères de l'Union Européenne, Catherine ASHTON, qui est arrivée en visite au Caire le 22 février 2011290(*).

Par cette attitude unilatérale, la Grande-Bretagne a pris de cours tous ses partenaires européens et même internationaux. C'est au cours de cette visite, qu'afin de marquer leur appui aux manifestants, William HAGUE a apporté la contribution britannique au soutien des révolutions en annonçant la création du partenariat « the Arab Partnership Initiative » sus évoqué. Pour la crise en Libye, la Grande-Bretagne appelle à la mobilisation internationale.

b- L'appel à la mobilisation internationale pour résoudre la crise libyenne

Sur la crise libyenne, la Grande-Bretagne appelle à une mobilisation internationale291(*). Par mobilisation292(*) internationale, nous entendons l'action de mettre la communauté internationale293(*) sur le pied de guerre. Elle indique par là sa position favorable aux revendications de la population et à la nécessité d'une intervention internationale. Elle accroît la pression militaire sur Tripoli294(*).

Londres a renoncé à son duo avec Paris et se tourne vers l'OTAN295(*) qui implique les Etats-Unis car les alliés ont des manques criants qui rendent les Etats-Unis toujours indispensables296(*). Contrairement à la France, elle est favorable à l'intervention de l'OTAN et avance des arguments qui donnent accès à son approche au détriment de celle de la France297(*). David CAMERON pense par exemple que l'OTAN est mieux équipée que toute autre structure pour assurer la coordination de cette intervention298(*). Il existe une absence d'autonomie politique et stratégique européenne vis-à-vis des Etats-Unis299(*). Le déficit en logistique militaire de la France et de la Grande-Bretagne a été à l'origine de la nécessité pour eux de se faire assister par les Etats-Unis dans la conduite des opérations en Libye au travers de l'OTAN300(*), au grand désarroi de la France qui cherchait à s'affirmer au travers de l'UE.

La Grande-Bretagne s'inscrit dans le sillage de sa perception lors de la crise de Bosnie en 1993 où contrairement à des Etats comme la France et l'Allemagne, qui souhaitaient une intervention européenne ou internationale, elle ne jurait que par l'OTAN301(*). A la tribune de l'ONU, D. CAMERON plaide pour une action collective en Libye. Il procède par l' « agir communicationnel »302(*) qui permet une intercompréhension langagière et déclenche une interaction entre les puissances. Il déclare : « la Libye et le Printemps arabe montrent que l'ONU a besoin d'une nouvelle façon de travailler. Le Printemps arabe offre une grande opportunité pour diffuser la paix, la prospérité, la démocratie et la sécurité, mais seulement si nous la saisissons »303(*). Il entend par ce discours toucher psychologiquement la communauté internationale. Il vise un impact psychologique pour une adhésion spontanée. Il poursuit son propos en invitant l'ONU à une véritable action : « l'ONU doit montrer ce que nous pouvons faire, pas seulement être unis dans la condamnation mais être unis dans l'action, agissant d'une manière qui soit à la hauteur des principes fondateurs de l'ONU et réponde aux besoins des gens partout »304(*). Par là, il indique le chemin à suivre à savoir l'action commune et concrète non limitée aux condamnations verbales.

Dans son propos, il relève aussi des limites à l'action internationale, des bornes à ne pas franchir. Il encadre l'action internationale. Ce faisant, il déclare : « nous ne devrions pas imposer des valeurs occidentales ou un modèle unique à la région »305(*). David CAMERON souligne en outre que « le processus sera différent dans chaque pays. Et ce n'est pas à nous de dicter comment les nations arabes répondent à ces défis. Ou à leur faire la leçon sur comment le faire. Mais nous avons devant nous une occasion d'apporter notre aide, et nous devons la saisir. Il y a d'importantes leçons à tirer»306(*). Selon le Premier ministre britannique, « ici à l'ONU, nous avons la responsabilité de nous dresser contre les régimes qui persécutent leur peuple »307(*). Ainsi, pour D. CAMERON, l'heure n'est plus à la réflexion (faut-il agir ou pas ?), elle est à l'action. En d'autres termes, les pays membres de l'ONU ont rendez-vous avec l'histoire et il est impératif selon le Premier Ministre britannique que ce rendez-vous soit ponctué d'un résultat positif. Il faut faire comme les Etats-Unis dont le président a choisi de mettre l'Amérique du bon côté de l'Histoire308(*), président qui encourage les dissidents égyptiens.

c- L'expression discursive de l'encouragement des dissidents égyptiens par les Etats-Unis.

Barack OBAMA a tenu plusieurs discours visant à encourager, féliciter les dissidents égyptiens. Le 11 février 2011, parlant de l'Egypte, il déclare : « cette transition doit rassembler toutes les voix car l'esprit de la protestation pacifique et la persévérance dont a fait montre le peuple égyptien peuvent être un vent puissant qui facilitera le changement »309(*). Par ce discours il entend faire passer pour modèle les manifestants égyptiens car il poursuit « les Egyptiens nous ont inspirés, et ils l'ont fait en infligeant un démenti à l'idée que la violence est le plus sûr moyen d'obtenir justice ; car en Egypte, c'est la force morale de la non-violence, non pas le terrorisme, non pas la tuerie aveugle, mais la non-violence, la force morale, qui a fait ployer l'arc de l'histoire vers la justice, une fois de plus. Et bien que les vues et les sons qui nous sont parvenus aient été entièrement égyptiens, nous ne pouvons nous empêcher d'ouïr les échos de l'histoire : ceux d'Allemands abattant un mur, d'étudiants indonésiens descendant dans la rue, de Gandhi conduisant son peuple vers la justice »310(*).

Faisant de l'histoire, OBAMA encourage les révolutionnaires égyptiens. «Depuis six mois, nous sommes témoins des changements extraordinaires qui se produisent au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Place après place, ville après ville, pays après pays, les citoyens se sont dressés pour revendiquer leurs droits fondamentaux». Ces quelques lignes ont servi de préambule à un autre discours du président américain311(*). En effet, il avait déjà précisé le 10 février 2011, soit un jour avant la démission de MOUBARAK : « nous regardons l'histoire. Le peuple égyptien attend des changements irréversibles et les Etats-Unis vont le soutenir »312(*).

Le président B. OBAMA a appelé les militaires à conserver une attitude de neutralité et à poursuivre leurs efforts pour s'assurer que cette période de changement se déroule sans violence. Il s'est ensuite directement adressé aux manifestants dont il dit avoir entendu les demandes. « Je veux me montrer clair à l'égard du peuple d'Egypte et en particulier à l'égard de sa jeunesse : nous avons entendu votre voix. J'ai la conviction indéfectible que vous déterminerez votre propre destin et que vous saisirez la promesse d'un avenir meilleur pour vos enfants et vos petits-enfants »313(*). Face à l'incertitude qui règne justement autour de cet avenir, il a rappelé que les Etats-Unis se tenaient prêts à fournir toute l'aide nécessaire au peuple égyptien une fois terminée la vague de contestation actuelle, de quoi réconforter les dissidents.

Aussi, le président OBAMA a affirmé son soutien aux rebelles. Il rassure: « en fin de compte, la liberté doit être gagnée par les peuples eux-mêmes, pas imposée de l'extérieur. Mais nous pouvons et nous devons nous tenir aux côtés de ceux qui luttent »314(*).

Il est opportun de relever que les jeux des grandes puissances n'ont pas toujours été à la faveur des rebelles. La France a eu des conduites visant à maintenir le statu quo.

* 289 « Royaume-Uni-révolutions arabes ... », op.cit.

* 290Ibid.

* 291 Lire le décryptage des enjeux du printemps arabe fait par Hasni ABIDI dans AFRICA24 MAGAZINE N°3.juillet-septembre 2011, p. 016-017.

* 292 « Ensemble des opérations mettant un pays sur un pied de guerre. », DEBBASCH (C.), et al. op.cit., p. 268.

* 293 « L'ensemble des Etats, Organisations Internationales, Organisations Non Gouvernementales et Individus, qui en agissant sur la scène internationale adhèrent aux valeurs communes » SMOUTS (M.C.), et al. op.cit., p. 67 ou encore « l'ensemble des Etats membres des Nations Unies. La diversité des acteurs publics et privés présents sur la scène internationale », NAY Olivier, Lexique de Science politique, Vie et institutions politique, Paris, Dalloz, 2008, p.78.

* 294 Voir Cameroon Tribune du 27 mai 2011, p. 30.

* 295 JAUVERT (V.), « Libye, les ratés d'une guerre française », op. cit.

* 296 GROS Philippe, « De Odyssey Dawn à Unified Protector : bilan transitoire, perspectives et premiers enseignements de l'engagement en Libye », Fondation pour la Recherche Stratégique, Note n° 04/11, mai 2011.

* 297 Voir entretien de Louis GAUTIER op.cit.

* 298 Ibid.

* 299 COURMONT (B.), et al., op.cit., p. 74.

* 300 Les Etats-Unis ont fourni 75% des heures de vol en matière d'ISR et 80% des heures de vol effectuées par les ravitailleurs de la coalition. Des données qui mettent en évidence les lacunes européennes. Source : MAYA Kandel, « OBAMA et la Libye, aux origines du leading from behind », publié sur Froggy Bottom, le 12 février 2014, consulté le 15 mars 2014.

* 301VEDRINE Hubert, Les Mondes de François Mitterrand, Paris, Fayard, 1996, p. 611.

* 302 «  L'agir communicationnel » est un procédé qui, médiatisé par des actes de langage, repose sur l'intercompréhension langagière et constitue l'interaction des participants. Pour plus de détails, lire, HABERMAS Jürgen, Théorie de l'agir Communicationnel, Paris, Fayard, 1987.

* 303 Discours de David CAMERON à l'ONU, 22 septembre 2011.

* 304 Discours de David CAMERON à l'ONU, op. cit.

* 305 Ibid.

* 306 Ibid.

* 307 Ibid.

* 308 RAZOUX (P.), op. cit., p. 28.

* 309 Voir Le Nouvel Observateur, 11 février 2011.

* 310 Le Nouvel Observateur, 11 février 2011.

* 311 Discours de Barack OBAMA, le 19 mai à Washington sur le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord.

* 312 Source : BAUMANN (N) et MAHANTA (S) op.cit.

* 313 Source : Le Point.fr publié le 02 février 2011.

* 314 Discours de Barack OBAMA devant le parlement britannique le 25 mai 2011.

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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon