VI.3.2. L'agriculture urbaine dans le projet de
territoire urbain VI.3.2.1. L'agriculture dans le master plan de la ville de
Kigali
D'après le master plan l'agriculture
sèche sera la première occupation dans les zones
réservées à l'agriculture sèche et les zones
résidentielles rurales. Les utilisations agricoles vont de l'agriculture
commerciale à des coopératives agricoles, aux petits jardins
potagers des ménages et aux zones de pâturage du
bétail.
Dans les zones urbaines, le pourcentage de terres
consacrées à l'agriculture va diminuer et les usages agricoles
seront moins fréquents. Les petits jardins potagers des ménages
continueront à exister dans la moyenne et basse densité. Dans les
zones à haute densité, l'agriculture sera quasi inexistante mais
des jardins sur les toits des maisons (rooftopgardens) seront possibles. Les
espaces ouverts seront utilisés plus pour des raisons
esthétiques, de loisirs et d'infrastructures que pour les utilisations
biologiques et écologiques.
51
Les zones humides et les forêts devront surtout
rester intactes. Ces zones ont une plus haute valeur environnementale,
écologique et biologique pour Kigali, et devront être
protégées contre l'urbanisation dans la mesure du
possible.
Le master plan a déterminé les zones
où seront installées et développées les
activités d'agriculture urbaine qui sera réservée
uniquement aux producteurs et n'aura pas une densité
élevée de population (10 personnes par hectares).Ce plan a
identifié 47 000 hectares soit 65% de la superficie de la Ville de
Kigali comme zones naturelles (natural features) classés et
répartis comme suit :
Tableau 4: Répartition des espaces ouverts de
la ville de Kigali
Zones à usage rural
|
Hectares
|
Pourcentage
|
Agriculture sèche
|
3,481
|
7.4%
|
Forêts existantes
|
3,123
|
6.6%
|
Parcs et espaces ouverts
|
3,277
|
7 %
|
Reforestation
|
16,996
|
36.2 %
|
Zones humides
|
10,108
|
21.5 %
|
Residentiel-Rural
|
10,021
|
21,3 %
|
Total
|
47,005
|
Source : Kigali conceptual master plan (2007, pp
70-72)
Ainsi, 45% des espaces verts ont été
désignés pour la reforestation, 20% pour l'agriculture et 6% pour
les parcs et espaces ouverts. La plupart de ces espaces est localisée
dans le district de Gasabo, le district le plus rural. Environ 30 000ha soit
70% de la superficie de ce district resteront rural (Kigali conceptual master
plan, p.72).
a) Objectifs assignés à l'agriculture
urbaine par le master plan
Les objectifs assignés à l'agriculture
selon le master plan (Kigali conceptual master plan,
2007, p. 120) sont les suivants:
- aider les résidents en transition de la
sphère rurale à la sphère urbaine;
- utiliser l'agriculture urbaine comme une technique
destinée à couvrir les besoins pratiques
des citadins tout en participant à
l'amélioration écologique et environnementale du
paysage;
- Valoriser les zones de Kigali qui ne peuvent pas
être densément développées ;
- Perpétuer l'héritage culturel et agricole
du Rwanda en l'utilisant comme un
élément structurant du paysage urbain
là où c'est possible.
52
b) Stratégies et actions prévues par le
master plan
· protéger les droits fonciers et
préserver le choix individuel dans l'exploitation agricole.
· Encourager l'utilisation rationnelle et durable
des exploitations agricoles en offrant des options pour l'agriculture
collective dans les cas où il peut être plus
productive.
· Mettre en oeuvre la régularisation
foncière.
· Protéger et promouvoir l'accès des
femmes aux ressources en terres et à leur utilisation en veillant
à leur participation à la réforme foncière dans les
lieux où ils peuvent facilement aller participer (non loin de leurs
domiciles ou à des moments inappropriés).
· Soutenir la croissance des possibilités
d'emploi hors ferme, l'approvisionnement et la distribution des
opportunités selon la localisation judicieuse de ces activités
par rapport à d'autres parties de la chaîne de valeur.
· créer "des centres d'innovation» au
niveau des secteurs et des districts qui regroupent l'ensemble des diverses
activités liées à l'intensification agricole en appui de
la politique nationale qui identifie l'agriculture comme un tremplin pour la
transition économique à l'appui de ce programme ;
· Mettre en évidence les possibilités
d'éducation et de renforcement des capacités pour la transition
agricole, une agriculture et un entrepreneuriat à forte
intensité, axé sur la valeur ajoutée et orienté
vers le marché ;
· Utiliser l'éducation publique et des
médias pour renforcer les capacités sur les techniques de
l'agriculture urbaine et les stratégies utilisées dans d'autres
villes en Afrique et dans d'autres parties du monde ;
· promouvoir et soutenir l'agriculture urbaine dans
des endroits appropriés en tant que stratégie urbaine moderne et
progressive pour la durabilité environnementale, économique et
sociale ;
· Utiliser l'agriculture urbaine dans la
planification urbaine.
· Mettre en oeuvre des outils de planification (SIG
et des études de potentiel des terres) et le renforcement des
capacités au niveau du district, du secteur et de la communauté
pour mettre en oeuvre les stratégies énumérées
ci-dessus ;
Plusieurs actions en appui à l'agriculture urbaine
et péri urbaine sont prévues (stratégie d'appui à
l'agriculture urbaine et périurbaine, 2009) :
1. La collecte et le recyclage des déchets
;
2. Le compostage ;
3.
53
L'agroforesterie et la sylviculture ;
4. La protection des marais et l'agriculture des marais
;
5. L'agriculture commerciale et la transformation (des
produits agricoles et d'élevage) C) Enjeux
- Risques associés à la diminution de la
production d'aliments locaux ou des cultures de subsistance et les
problèmes liés à la transition entre les cultures
vivrières de subsistance aux cultures de rente ;
- Coûts de démarrage élevés
associés à l'adoption de nouvelles pratiques agricoles ou de
nouvelles cultures ;
- Intégration des petits agriculteurs marginaux
dans des programmes agricoles plus efficaces et plus productifs ;
- Intégration des programmes d'éducation
et d'auto-assistance axée sur la transition des pratiques agricoles
;
- Marginalisation des femmes dans l'agriculture et la
reconnaissance de l'importance de leur rôle dans les pratiques agricoles
actuelles à travers le pays ;
- Manque de sécurité foncière, et
la nécessité de finaliser le programme de régularisation
foncière ;
- Manque de plans de gestion des ressources / cartes
pour aider les agriculteurs et les planificateurs à prendre des
décisions d'utilisation des terres et la gestion des
exploitations.
54
Tableau 5 : Infrastructures vertes de la zone rurale de
la ville de Kigali
|
Forêts existantes
|
Reforestation
|
Agriculture sèche
|
Zone résidentielle rurale
|
Zones humides (wetlands)
|
En résumé
|
Seront protégées.
|
De vastes zones seront
|
L'agriculture traditionnelle et
|
Cette zone n'est pas appropriée
|
Les zones rangées dans la catégorie
de
|
|
mises de côté pour être
|
commerciale sous forme de
|
au développement urbain suite
|
zones humides ou zone tampon des
|
Leurs exploitations
|
reboisées.
|
production végétale ou animale
|
au manque de routes et autres
|
zones humides (wetland buffers) seront
|
seront extrêmement
|
|
sera la première utilisation dans
|
infrastructures ainsi que sa
|
protégées.
|
limitées: récolte de bois
|
L'usage résidentiel n'y est
|
cette zone.
|
topographie arpentée.
|
Elles seront les principaux composants
|
de chauffage, collecte
|
pas permis
|
|
Une agriculture à petite
échelle
|
des zones de traitement
|
de plantes médicinales, chasse, etc
|
|
Aucun nouveau peuplement ne peut se faire dans cette
zone.
|
(small-scale agriculture) et une faible
densité de peuplement (autour de 10 habitants ou 2
|
environnementales et aideront dans
l'amélioration de la qualité de l'eau
ainsi que le traitement des eaux usées.
|
L'usage résidentiel y est
|
|
L'usage résidentiel sera limité
|
logements par ha) seront la
|
Economiquement, les zones humides
|
interdit
|
|
aux familles engagées dans la
|
première utilisation de cette
|
constituent une source de revenus en
|
|
|
production agricole.
|
zone.
L'agroforesterie et l'agriculture des zones humides
adjacentes sont encouragées.
|
supportant diverses formes d'agricultures humides
allant de la culture de canne à sucre à la culture de riz. Aucun
usage résidentiel n'est permis dans les 20m de cette zone.
|
Type
d'infrastructure verte
|
Réserves naturelles Peuplement
contrôlés Agroforesterie
|
Pâturage/élevage
Reforestation et agroforesterie
|
Agriculture commerciale Jardins de subsistance
Coopératives agricoles
|
|
Réserves naturelles, jardins
communautaires,
agriculture commerciale,
coopératives agricoles
|
Source : Kigali conceptual master plan (2007,
p.82)
55
Tableau 6 : Infrastructures vertes de la zone urbaine de
la ville de Kigali
|
ZONE DE FAIBLE DENSITE
|
ZONE DE DENSITE
MOYENNE
|
ZONE DE HAUTE DENSITE
|
CENTRE URBAIN
|
En résumé
|
-Densité moyenne : 40 habitants par
|
-Densité : 85 habitants ou 17
|
- Densité : 250 habitants/ha
|
Zone à usage mixte similaire à
la
|
ha ou
|
logements par hectares
|
- immeubles de plus de 4 étages
|
zone avec haute densité mais avec
|
10 logements par ha.
|
- Usage résidentiel avec des
|
avec appartements.
|
une concentration élevée
|
- usage résidentiel avec un peu de
|
immeubles de moins de 4 étages.
|
-Développement de copropriété
et
|
d'équipements culturels et publics
|
commerce et d'industries.
-Parcelle de 1000m2 en moyenne. - L'habitat
sera du haut standing au medium standing avec des centres commerciaux aux
intersections.
|
- parcelle moyen standing et bas standing de
500m2 en moyenne.
- centres commerciaux avec des
services sociaux comme pharmacies et écoles
maternelles
|
parcelle bas standing
- parcelle de 200m2 en moyenne
- usage résidentiel mais dominance de l'usage
commercial
avec des centres de services
|
régionaux: hôpitaux,
universités,
écoles secondaires et primaires,
bâtiments gouvernementaux,
départements de police, stades,
bureaux multi-étages, maisons de
|
-pente supérieure à 10%.
|
aux intersections
- pentes supérieures à 5%
|
sociaux comme centres de santé, écoles,
terrain de sports, ...
|
détail, centre de commerce en salle et en
ligne
|
|
|
-pente de moins de 5%
|
Cette zone sera installée au sommet des
collines sur des pentes de moins
|
|
|
|
de 5%
|
Type d'infrastructure
|
Drainage avec de la végétation
|
Jardins dans des conteneurs et
|
Parcs artificiels
|
Jardins sur les toits des maisons
|
verte
|
(vegetated drainage), potagers de
|
jardins communautaires
|
Vases sur les balcons
|
|
|
cuisine, terrains de loisir
|
|
Arbres de rues
|
Arbres de rue
|
Source : Kigali conceptual master plan (2007,
p.82)
56
VI.3.2.2. L'agriculture urbaine dans le plan
stratégique d'appui à l'agriculture urbaine et
périurbaine
a) Objectifs de la stratégie pour l'agriculture
urbaine et périurbaine
Le plan stratégique élaboré par
la mairie donne comme objectif global de l'agriculture urbaine et péri
urbaine de contribuer à la sécurité alimentaire et
nutritionnelle des populations urbaines par l'amélioration de la
disponibilité et de l'accessibilité durables des produits
agricoles de qualité, frais et diversifiés, tout au long de
l'année, tout en créant des emplois et des possibilités de
revenus en faveurs des producteurs et éleveurs urbains et péri
urbain à faibles ressources (Document de plan stratégique d'appui
à l'agriculture urbaine et périurbaine, p.10).
b) Actions envisagées
La stratégie d'appui à l'Agriculture
Urbaine et Périurbaine (AUP) repose sur 5 axes qui correspondent aux
principaux défis à relever, à savoir (idem, p.12)
:
Sécuriser la disponibilité en terre et
en eau (réserves d'espaces et d'eau de qualité pour
l'AUP)
Les interventions proposées consistent à
:
- Affiner les spécifications des espaces
disponibles et préciser leur vocation pour des activités
sélectives d'AUP
- Cartographier, borner et enregistrer au cadastre les
espaces, et terres qui pourront être réservées aux
activités de l'AUP : 15 000 ha selon le master plan
- Adopter des dispositions légales suffisantes
pour les réserver et les protéger pour les activités de
l'AUP
- Faire le bilan des ressources en eau disponibles
pour l'AUP (eau de surface, de nappe phréatique, de pluie)
- Développer l'irrigation avec un coefficient
élevé d'utilisation de l'eau (irrigation au goutte à
goutte) pour les cultures à haute valeur ajoutée.
Ainsi, après inventaire et appréciation
de la valeur agricole de ces terres, leur cartographie et bornage et leur
inscription au cadastre qui va délivrer un document d'enregistrement,
ces
57
terres seront données aux
associations/coopératives qui vont les exploiter. Les marais et les
zones de culture sèche seront aménagés, pourvus de
drainage et d'irrigation en fonction des besoins et des potentialités et
les groupements bénéficiaires formés à leur usage
et maintenance.
Sécuriser la qualité et
l'innocuité des produits et la protection de l'environnement Les
interventions proposées consistent à :
- Préciser les protocoles de production et de
distribution des produits de l'AUP afin d'assurer la conformité avec les
normes de qualité et d'innocuité et la préservation de
l'environnement
- Assurer la formation des encadreurs et des
producteurs ainsi que le suivi technique pour la mise en oeuvre de ces
protocoles,
- Renforcer la capacité pour le contrôle
de qualité.
- Prendre les dispositions pour éviter la
pollution des ressources en eau et vérifier que leur
qualité soit conforme aux normes pour les eaux
d'irrigation établies par la FAO et l'OMS - Assurer le recyclage des
déchets ménagers et urbains et les transformer en compost
de
qualité ou autres sous-produits utiles tels que
les briquettes d'énergie.
Les principes des Bonnes Pratiques Agricoles
-BPA7- et du Portail Phytosanitaire International -PPI8-
pour l'intensification et la diversification des productions agricoles de
qualité seront établis et mis en oeuvre. Les cadres techniques et
les producteurs seront formés tandis que les associations paysannes
seront formées et informées à l'approche de l'école
au champ.
Les déchets organiques de la ville et des
ménages seront récupérés et transformés en
compost ou en briquettes énergétiques. Des normes
d'hygiène et de qualité seront mises au point et
contrôlées.
Les zones vertes de la ville ainsi que les zones
forestières et agroforestières de la Ville de Kigali seront
maintenues et protégées (Urban Greening).
7 Les BPA est un ensemble de règles à
respecter pendant l'implantation et la gestion des cultures. Selon la FAO
(2002), le cadre pour de bonnes pratiques agricoles présente les
principes directeurs de bonne agriculture en regroupant dans 11
éléments de ressources (sol, eau, production
végétale et fourragère, protection des cultures,
production animale, santé animale, bien-être des animaux,
récolte et transformation sur l'exploitation, et entreposage, gestion de
l'énergie et des déchets, bien-être, santé et
sécurité des humains, faune sauvage et paysage) les
problèmes, les disciplines et les pratiques pertinents. Il est possible
d'élaborer, à l'aide du cadre proposé, des directives de
gestion détaillées pour les différents systèmes de
production au sein d'agro-écosystèmes
spécifiques.
8 Le PPI est le mécanisme électronique
mis en place par le Secrétariat de la Convention Internationale pour la
Protection des Végétaux (CIPV) dans le but de faciliter les
échanges d'informations phytosanitaires officielles (y compris les
communications sur les organismes nuisibles) entre Organisations Nationales de
Protection des Végétaux (ONPV), Organisations Régionales
de Protection des Végétaux (ORPV) et/ou le Secrétariat de
la CIPV
58
Sécuriser l'appropriation durable de l'agriculture
urbaine et périurbaine par les acteurs de la filière
Les interventions proposées consistent à
:
- Assurer la disponibilité et l'accès aux
intrants de qualité (semences et produits agro-chimiques selon les
principes des BPA)
- Assurer un mécanisme d'accès au micro
crédit adapté au contexte et aux spéculations de
l'AUP
- Faciliter et promouvoir l'organisation des producteurs
en groupements professionnels
- Mettre en place un système de gestion et de
capitalisation des connaissances y compris un système de suivi
évaluation susceptible d'appréhender l'impact du plan
stratégique.
Des activités productives de la filière AUP
seront mises en oeuvre et gérées par des
groupements, des familles individuelles ou des
institutions dans une logique de professionnalisation.
Sécuriser les débouchés
Les interventions proposées consistent à
:
- Conduire une démarche proactive pour
créer la demande basée sur une alimentation mieux
équilibrée incluant la consommation de fruits et légumes
pour la santé ;
- Développer les opportunités de
transformation en respectant les normes d'hygiène et de qualité
en la matière ;
- Explorer et favoriser les modalités de
commercialisation adaptées au contexte urbain et
notamment la vente directe et de proximité au
niveau des « Imidugudu » (villages) ;
- Négocier des accords avec des consommateurs
« institutionnels » et « commerciaux » ;
- Valoriser des opportunités à
l'exportation de produits à haute valeur (i.e. plantes
ornementales, condimentaires, médicinales,
aromatiques, à huiles essentielles)
Sécuriser le contexte politique, institutionnel
et opérationnel
Les interventions proposées consistent à
:
- Renforcer la place de l'AUP dans les documents
clé de politique à savoir dans le plan national de l'agriculture,
PSTA II, et autres documents de politiques sectorielles y compris la politique
nationale en matière de l'habitat.
- Mettre en place et opérationnaliser un
mécanisme de concertation et participation des acteurs et partenaires de
la filière AUP,
59
- Consolider le contexte institutionnel par le
renforcement du PAPUK, son ancrage au niveau de la Mairie avec des liens
multidisciplinaires avec les partenaires du secteur public et
privé.
- Activer un mécanisme de gestion et de
concertation de l'AUP pour la mise en oeuvre d'un plan d'actions en
intégrant les diverses initiatives (Conseil PAPUK).
60
|