V.8. Différentes visions de l'agriculture urbaine et
ses espaces
Répondant à diverses pressions
spécifiques, chaque type de territoire se forme selon sa dynamique et
ses composantes sociales internes propres. Dans les faits, la réaction
du milieu (urbain et agricole) aux forces et pressions internes et externes
contribue à définir la trajectoire qui primera dans un territoire
agricole donné. Les interactions spécifiques entre les
systèmes agricoles urbains et l'environnement dans lequel ils se
déroulent créent des opportunités spécifiques
diverses au travers desquelles, on peut identifier trois types d'agriculture
(Janin et Perron, 2005): l'agriculture des grands espaces ; l'agriculture des
espaces confinés dans les espaces urbains denses et une agriculture
de reliance dans les espaces intermédiaires.
V.8.1. Agriculture des grands espaces
L'agriculture des grands espaces se trouve dans les
entités lui offrant de `'grands espaces» avec des potentiels
agronomiques et de relief favorable. Les recettes tirées de
l'activité agricole sont suffisamment importantes pour justifier le
maintien des terres dans le secteur, et il n'existe guère de pressions
en faveur d'une urbanisation. Les terres peuvent être mises hors
production par les exploitants agricoles, mais elles ne sont
généralement pas vendues et peuvent de nouveau être mises
en exploitation si les conditions économiques le justifient.
La gestion de ces terres peut également
être modifiée soit en raison de leur affectation à la
production de cultures différentes, soit en vue d'intensifier la
production d'un produit agricole donné. Elle est orientée vers la
production de masse et nécessite des ressources spatiales importantes
pour atteindre une dimension économique suffisante. Ces agricultures
sont sensibles aux disponibilités en ressources spatiales liées
à l'espace-support : foncier, degré de liberté des flux,
niveau d'indépendance par rapport au voisinage,...
V.8.2. Agriculture des espaces confinés
A l'intérieur de la zone urbaine, l'agriculture
urbaine se pratique dans les interstices du bâti à
l'intérieur du périmètre urbain. Il s'agit d'espaces
inconstructibles du fait de leur vocation agricole affirmée et
juridiquement consolidée, ou bien de terres en exploitation temporaire,
en attendant une valorisation suffisante pour réaliser la rente
foncière. En outre, en vue de leur
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développement ultérieur, les zones
urbaines comportent une "réserve de terres", dans laquelle on observe
souvent des activités agricoles, d'où la présence d'un
nombre significatif d'exploitations à l'intérieur des limites des
agglomérations.
En situation plus urbaine dominent des tissus
d'exploitation orientés vers des productions se satisfaisant d'espaces
plus confinés parce que moins gourmandes en ressources spatiales. Ces
agricultures d'espaces «confinés» dans l'urbain ont la
capacité d'inscrire plus facilement leur fonction de production dans les
tissus urbains. Souvent, la réaction des agriculteurs concernés
consiste à affirmer leur fonction économique dans une logique de
défense des ressources spatiales (foncier, lutte contre le
morcellement...).Cette stratégie est d'autant plus facilement reconnue
que ces formes d'agriculture sont une pièce du projet identitaire de la
collectivité. Ce sont essentiellement des productions à haute
valeur ajoutée telles que le maraîchage et
l'horticulture.
Au Nord comme au Sud, la culture en zones denses se
heurte au manque d'espaces : l'agriculture verticale prend alors le relais,
hors-sols, dans les centres-villes. Des cultures en sacs ont ainsi
été développées dans les bidonvilles de Nairobi
(Kenya) par l'ONG Solidarités et les expériences de potagers sur
les toits fleurissent au Canada. En version technologique et futuriste, des
prototypes de serre biologique verticale en ville laissent penser qu'il serait
possible de produire, pour une occupation au sol d'un hectare,
l'équivalent de 10 hectares cultivés. Des architectes planchent
très sérieusement sur l'idée de tours agricoles pour
cultiver dans les étages ( Grollier K., 2009)
Plusieurs facteurs sont en jeu. En premier lieu,
étant donné l'avantage que lui procure sa localisation, le
foncier coûte plus cher. Toutes les études foncières
montrent que la différence entre le prix de la terre à vocation
agricole et celle qui est promise, à court et moyen terme, à la
construction, est considérable. La valeur peut être
multipliée par un facteur qui varie de 20 à plus de 300
(Donadieu, 2004). D'autre part, la terre y est généralement de
meilleure qualité, de nombreux sites urbains s'étant initialement
développés dans les zones les plus favorables à
l'agriculture. En deuxième lieu, les types d'activité agricole
pratiqués sur ces espaces ont généralement une meilleure
productivité par hectare, mais demandent également une importante
main-d'oeuvre par hectare et atteignent un niveau d'efficience minimale sur une
superficie relativement faible. En troisième lieu, enfin, contrairement
à ce qui se passe pour les exploitations plus éloignées,
les ménages agricoles vivant à proximité immédiate
des zones urbaines sont largement en mesure d'allouer leur main-d'oeuvre
à des activités non
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agricoles. Autrement dit, les exploitations à
temps partiel sont plus fréquentes, et les ménages travaillant
à temps partiel ont généralement des exploitations de plus
petite taille du fait qu'ils disposent de moins de main-d'oeuvre pour
l'agriculture.
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