2.3. DESEQUILIBRE DE LA STRUCTURE DES
INVESTISSEMENTS
Les entreprises constituent une machine uniquement
destinée à produire des biens et services. Ils jouent un
rôle fondamental et croissant dans la production des richesses, le profit
constitue son oxygène indispensable.18 Les entrepreneurs,
Auteurs essentiels de l'activité économique, disposent d'un
certain nombre de caractéristiques communes, notamment, le goût du
risque, la prise d'initiative, l'esprit de compétition. En effet, la
création d'activité commence par une prise d'initiative, une
volonté de relever un défi, et cela nécessite que
d'incitations appropriées émanant des pouvoirs publics.
Joseph Schumpeter a le mérite de mettre en
lumière la relation qui existe entre l'entrepreneuriat et la croissance
économique, par l'intermédiaire du processus de destruction
créatrice de l'innovation. Sous sa plume, on peut lire que :
« La croissance est le fait d'innovation, de la
diffusion et de l'assimilation de nouvelles conditions du progrès
technique [...J ».
Précisant sa pensée, l'auteur explique que :
17Lire pour ce faire le document de
stratégie de croissance et de réduction de la pauvreté
(DSCRP), MINISTERE DU PLAN, p.63.
18 Voir Philippe MERLANT, René PASSET et
Jacques ROBBIN : « SORTIR DE L'ECONOMISME : une
alternative au capitalisme néolibéral » Op.
p.94.
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« L'entrepreneur innovateur, par son innovation
permet ainsi une transformation dans le processus de production et
d'organisation du travail entraînant dans son sillage des imitateurs et
donnant un signal aux possibilités des profits. Les innovations qui se
diffusent dans l'économie vont ainsi bouleverser les modes de
consommation en suscitant de nouveaux besoins, et les marchés en seront
alors profondément modifiés. L'environnement économique
serait en perpétuel changement par le déclin et l'ascension sans
cesse renouvelés des besoins à travers le processus
d'imitation-innovation [...J ».
Malheureusement, le contexte national congolais ne favorise
pas l'activité entrepreneuriale, en particulier dans le secteur
agricole. La structure des investissements au Congo est
caractérisée par la prépondérance des
investissements directs étrangers et la quasi-absence des
investissements locaux. La croissance économique de la RDC repose sur
une base dont les propriétés n'appartiennent pas à un
congolais. Gardons à l'esprit que les investissements qui viennent
alimenter notre croissance étant étrangère. En 2010, le
taux d'investissement représentait 23.5% du PIB alors que les IDE
représentaient 13.3%, soit près de la moitié de ces
investissements. Ce qui fait que lorsqu'il y a croissance, les entrepreneurs
étrangers commencent d'abord par rapatrier leurs bénéfices
vers leurs pays d'origine.
Tableau 4 : évolution de transferts des
bénéfices de l'investissement de 2007 à 2013 (en millions
CDF)
Années
Revenus des investissements
De l'extérieur vers l'économie
De l'économie vers l'extérieur
Source : banque centrale du Congo, 2013.
2007
|
2008
|
2009
|
2010
|
2011
|
2012
|
2013
|
|
|
|
|
|
|
|
886
|
1719
|
5281
|
29530,7
|
49282
|
5573,3
|
148811,1
|
341590,8
|
504113,9
|
624254
|
939675,3
|
1127694
|
929009
|
2621966
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Voilà toutes les richesses créer au sein du
territoire national sont évaporé vers l'extérieur avec
toute célérité en témoignent le tableau ci-dessus.
A ce propos, la banque mondiale est sur la même longueur d'onde, elle
nous informe que 131 millions de dollars de bénéfices tiré
des investissements directs étrangers ont été
rapatrié en 2010. Ne sont-ce pas là des bénéfices
évidents qui, une fois réinvesti dans l'acquisition de la
technologie de pointe, peuvent générer d'importantes recettes
fiscales, booster la croissance du PIB et amorcer le processus de la
diversification de l'économie congolaise ? Mais ces
bénéfices sont rapatriés en toute précipitation et
sans aucun prélèvement. D'où la
détérioration de la balance des paiements. Il sied de signaler
que les investissements direct étrangers (IDE) au Congo ne viennent pas
investir dans le secteur agricole, ils sont restés concentré dans
les secteurs des ressources naturelles (les mines, le pétrole) et le
secteur tertiaire (banques, télécommunications et commerce),
quand on sait que huit sur dix congolais sont des paysans et dépend
essentiellement de l'activité l'agricole.
*
* *
L'Etat congolais doit mettre en place de politiques
appropriées susceptible d'encourager les afflux massif d'investissement
direct étrangers dans l'agrobusiness congolais en raison de leur
engagement de faire prospérer l'économie nationale et faire
sortir la population de l'état de misère dans lequel elle
croupit, car un encadrement judicieux des IDE débouchera sur un
transfert de technologies profitable, à long terme, aux entreprises
locales détenues par des nationaux. Tout compte fait, le manque criant
des grandes entreprises détenues par les autochtones créent le
divorce entre la croissance économique et le niveau de vie de la
population. Une économie contrôlée par les étrangers
ne peut pas être prospère et dynamique.
L'investissement local et l'investissement direct
étranger doivent être considérés comme deux aspects
complémentaires d'une même problématique. Intensifier
l'émergence des PME et des champions nationaux dans l'agrobusiness va
créer la valeur ajoutée locale, générer la richesse
et sédentariser les populations dans les centres de production. Chaque
effet d'investissement est appelé à devenir à son tour la
cause d'autres effets : effets d'entraînement. Nos populations jouiront
à la fois, d'abord des premiers effets, ensuite des effets secondaires
provenant des causes invisibles situées à l'arrière-plan
des effets visibles.
On aura compris que la qualité de la croissance fait le
point de départ entre une nation résignée vivant dans une
économie appauvrissante et une société entreprenante se
mouvant dans une économie qui satisfait amplement les besoins de ses
membres, la divergence des structures économiques demeure le support de
cette différence. Seule une croissance inclusive pourra permettre
à la RDC de bondir d'un coup en le faisant sauter du Moyen Age au
XXIème siècle, en moins d'une décennie. Et qui dit
croissance inclusive, dit changement de la structure économique
actuelle.
*
* *
En matière de croissance, la première borne
kilométrique sur le très long itinéraire qui conduit de la
pauvreté à la prospérité passe par le changement de
la structure économique actuelle : modification de la
structure de production, en renforçant la corrélation entre les
secteurs primaire et secondaire, élément déclencheur des
effets d'entrainement à impact visible ; et refonte de la structure des
circuits de distribution, en privilégiant la consommation
intérieure et le marché régional. C'est
n'est pas du tout sorcier.
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