Accès au financement par les micros, petites et moyennes entreprises à Goma.( Télécharger le fichier original )par Wassy Tshikama Musorongi Université de Goma - Licence 2014 |
§2.2. Secteur non bancaire et stabilité financièreLe secteur de la microfinance a progressé rapidement depuis 2011 mais il reste sous-développé49(*). À fin septembre 2013, le bilan du secteur de la microfinance était proche de 222 millions de dollars US pour plus d'un million de comptes ouverts, répartis à 60 % dans les coopératives d'épargne et de crédit et à 40 % pour les IMF. La plupart des opérations primaires des coopératives d'épargne et de crédit (COOPEC) et des IMF se concentraient dans la partie orientale du pays. Elles suivent la réglementation de la BCC, les agréments étant accordés par la BCC et les normes réglementaires et prudentielles étant également fixées par la Banque Centrale. Le modèle économique du secteur de la microfinance se concentre grandement sur les services d'épargne et de crédit. Entre fin juin 2009 et juin 2013, les dépôts et les prêts ont subi une significative croissance (pour atteindre 144 millions de dollars US pour les dépôts et 113 millions de dollars US pour les prêts), une tendance semblable à celle des banques. Les dépôts et les prêts sont surtout libellés en dollars. Le secteur de la microfinance a beaucoup de potentiel pour soutenir l'inclusion financière, mais sa performance est insuffisante. La rentabilité du secteur est très faible et seulement deux institutions, qui représentent 3 % des actifs, étaient opérationnellement autosuffisantes à la fin du mois de juin 2013. Les difficultés opérationnelles et financières qui touchent certaines COOPEC sont liées à de graves lacunes en matière de gouvernance, de gestion financière et d'audit interne. En outre, à la fin mars 2013, 37 institutions, majoritairement inactives, ont été placées sous statut de liquidation involontaire (34 COOPEC et 3 IMF) et, à la fin août 2013, 63 agréments avaient été retirés. À la fin décembre 2013, huit des 23 IMF ont connu des difficultés pour porter leurs fonds propres au niveau des obligations minimales. L'analyse du secteur montre qu'une consolidation et un renforcement du contrôle sont nécessaires. En outre, le fonds national de la microfinance, une initiative de l'État visant à intégrer la population vulnérable dans le secteur financier et dotée d'un budget de 2,5 millions de dollars US, n'avait jusque là pas démarré son activité jusque fin 2013. La seule société publique d'assurance-dommages, la SONAS, et l'Institut national de sécurité sociale (INSS) sont tous deux dans une situation financière précaire : o La SONAS [Société Nationale d'Assurance] exerce un monopole public sur l'assurance-dommages et possède un large réseau de 2.165 salariés. Elle n'est actuellement pas en mesure de respecter les obligations fixées par l'État en matière d'assurance (responsabilité civile automobile, transport maritime, fluvial et aérien et assurance incendie pour certains bâtiments)50(*). La société ne produit pas d'états financiers fiables; un audit entrepris par un cabinet international en 2012 a identifié une insuffisance de fonds propres d'environ 211 millions de dollars US, ainsi que de nombreuses lacunes opérationnelles. La loi devrait néanmoins ouvrir le marché de l'assurance aux sociétés étrangères et locales. L'avenir de la SONAS et le coût budgétaire qui résulterait de sa liquidation ou de sa restructuration demeurent encore à évaluer. o L'INSS [Institut National de Sécurité Sociale] offre une couverture très limitée (moins de 1,6 % de la population active), les frais de gestion absorbent la majorité des cotisations de sécurité sociale, qui sont parmi les plus élevées en Afrique (7 % du salaire pour la retraite). L'INSS fonctionne selon un modèle décentralisé basé sur 45 centres, dont les lacunes en matière d'organisation, d'informatisation et de capacités de contrôle sont importantes. Des estimations à la fin juin 2013 laissent entrevoir de grandes fragilités à moyen terme, le déficit de cotisations face aux engagements étant de 23,8 milliards de CDF en 2015 (environ 0,1 % du PIB de 2013) et de 229 milliards de CDF en 2060 (1,4 % du PIB de 2013). Le passif actuariel51(*) du système de sécurité sociale est estimé à 28,3 % du PIB de 2013. Pour renforcer le système actuel, il serait nécessaire d'agir rapidement pour rationaliser les coûts et augmenter les cotisations de façon significative. L'efficacité de la CADECO [Caisse Générale D'épargne du Congo], de la SOFIDE [Société Financière de Développement] et du FPI [Fonds pour la Promotion de l'Industrie] est limitée et ces entités représentent des risques budgétaires significatifs, à cause principalement des lacunes en matière de gouvernance, soulignant le besoin urgent de les restructurer (ou de les liquider). o La CADECO est une entreprise d'État qui fournit des services financiers dans les zones rurales. Elle gère le paiement de 146 milliards de CDF de salaires et de 47 milliards de CDF d'impôts pour les salariés des entreprises publiques (chiffres de 2012)52(*). La société est en cours de restructuration mais les risques subsistent et des progrès se font attendre. Les états financiers de la CADECO ne sont pas fiables, les dépôts restent inaccessibles et elle n'a pas accès à la chambre de compensation de la BCC depuis 1996. o La SOFIDE est la société financière de développement dont l'État détient une grande part et dont le mandat est de promouvoir le financement à moyen et à long terme des petites et moyennes entreprises (PME)53(*). Dans le cadre de ses efforts pour améliorer le financement des PME en 2012, l'État a injecté 22 millions de dollars US en capital et l'on prévoit 40 millions de dollars US supplémentaires dans un avenir proche. À la fin septembre 2013, la SOFIDE avait financé environ 63 projets de PME pour un montant de 20 millions de dollars US sous forme de prêts garantis de trois mois à trois ans et demi à 15 % d'intérêt54(*). Les mécanismes de surveillance sont fragiles et la SOFIDE ne dispose pas des contrôles adéquats en matière de gestion du risque; une analyse indépendante de sa situation financière s'impose. Une certaine forme de collaboration avec le système bancaire pour renforcer le financement des PME pourrait aussi en augmenter l'efficacité. o Le FPI est le fonds créé en 1989 pour promouvoir et financer les projets industriels. Il tire ses ressources des taxes à l'importation (environ 72 millions de dollars US par an pour une taxe sur les importations de 3 %). Il accorde des prêts à l'agro-industrie, surtout à des échéances de trois à cinq ans à 8-10 % d'intérêt et avec une période de grâce de 12 mois. Le fonds n'est pas contrôlé par la BCC et ne dispose pas d'outils de gestion du risque ou d'audit. Une commission interne, créée en 2010 pour restructurer le portefeuille, n'a pas encore été en mesure de terminer sa revue de la qualité des actifs; mais déjà les premières estimations indiquent que plus de 40 % des encours de prêts à la fin 2012 (233 millions de dollars US) sont restés en souffrance. * 49Les coopératives d'épargne et de crédit existent depuis longtemps en République démocratique du Congo; toutefois, nombre d'entre elles ont fait faillite pendant les années de crise (années 90). Les plus résistantes ont dû attendre les 15 premières années des années 2000 pour chuter et engloutir ainsi les épargnes des privées. * 50 Un certain nombre d'entreprises a souscrit des services d'assurance à l'étranger après s'être acquitté des primes obligatoires à cause des capacités limitées de la SONAS. Ça s'appelle la `réassurance'. * 51 Se dit d'un capital dont les intérêts et le remboursement sont échelonnés dans le temps. * 52 Elle fonctionne grâce à ses 93 centres d'exploitation dans le pays et à ses 669 salariés. Elle offre des avances sur salaires à ses clients (4,8 milliards de CDF fin 2012) à des taux mensuels de 5-10 % pendant 6 mois maximum. En 2012, les prêts improductifs de l'État ont atteint 46 millions de dollars EU et les résultats de l'année ne se sont améliorés que grâce à une reprise discutable de provisions pour un montant de 29 millions de dollars EU. * 53 Ses activités ont été suspendues entre 1990 et 2012 après la fin de l'aide internationale; ses seules recettes étaient tirées de la location de ses actifs immobiliers et de l'octroi de prêts de 3 à 6 mois pour un portefeuille de 1,5 millions de dollars US. * 54 Un taux d'intérêt suffisamment élevé pour attirer les PME bien qu'en besoin de financement. |
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