La CEDEAO et les crises socio-politiques dans les pays membres: cas du Liberia et de la Côte d'Ivoire( Télécharger le fichier original )par Winnie TSHILOBO MATANDA Université officielle de Bukavu - Licence en relations internationales 2011 |
G. Gestion de la crise post-électoralePlusieurs fois reportée depuis la fin du premier mandat de Gbagbo, en 2005, l'élection présidentielle finit par avoir lieu le 31 octobre 2010. Les résultats du premier tour donnent Laurent Gbagbo en tête avec environ 38 %, suivi par Alassane Ouattara avec 32 % et Henri Konan Bédié avec 25 %. Le second tour oppose, le 28 novembre, Gbagbo à Ouattara. Le 2 décembre 2010 la Commission Electorale Indépendante proclame la victoire d'Alassane Ouattara avec 54,1 % des voix contre 45,9 % pour Laurent Gbagbo122(*). [ Le Conseil constitutionnel juge les résultats de la CEI non valables et déclare, le 3 décembre 2010, Gbagbo vainqueur 51,45 % contre 48,55 % pour Alassane Ouatara.123(*) Certes, la CEDEAO, seule ou en partenariat avec les autres organisations internationales, sous-régionales et les Etats, a déblayé le terrain pour un retour à la paix en Côte d'Ivoire. Elle a choisi l'option diplomatique même si l'option militaire a été à maintes reprises brandie. Néanmoins, malgré les différentes interventions et mécanismes par elle mis sur pieds, la Côte d'Ivoire a sombré dans une autre crise post-électorale. Elle a, avec les autres organisations internationales et pays notamment l'ONU, l'Union africaine, la Communauté des États d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), l'Union européenne, les États-Unis, la France et la Grande-Bretagne, pour ne citer qu'eux, a appelé Laurent Gbagbo à quitter le pouvoir.124(*) En effet, aux yeux de la CEDEAO et de l'UA, il est important de s'assurer que le cas ivoirien ne constitue pas un précédent qui ouvrirait la voie à la contestation des résultats électoraux par les candidats vaincus, dès lors que ceux-ci peuvent se prévaloir d'un soutien militaire.125(*) Ainsi, la CEDEAO, en étroite collaboration avec l'UA, va de nouveau entreprendre des actions dans le cadre de la médiation pour faire accepter Laurent Gbagbo le départ en douceur du pouvoir. Cette fois, la possibilité de recourt aux armes semble écartée. Le 24 décembre 2010, elle organise un sommet extraordinaire à Abuja. Face à l'intransigeance de Gbagbo à demeurer à la tête du pays, l'organisation sous-régionale menace d'utiliser « une force légitime » en recourant à l'ECOMOG pour le forcer de céder le fauteuil présidentiel. Elle mandate les présidents Boni Yayi du Bénin, Ernest Koroma de Sierra Leone, et Pedro Pires du Cap-Vert pour régler cette crise. Ils rencontreront MM. Gbagbo et Ouattara le 28 décembre et le 3 janvier où Raila Odinga, Premier ministre kényan et envoyé de l'UA les accompagnera126(*). Cette nouvelle médiation de la CEDEAO se solde par un échec. La force militaire est désormais la seule à faire entendre sa voie sur le terrain. Déjà, des affrontements opposant le « Commando Invisible » d'Ibrahim Coulibaly aux troupes loyales à Laurent Gbagbo depuis le 12 janvier[] 2011 se sont généralisés sur l'ensemble du pays. Avec la généralisation de cette guerre, une grande partie des troupes de l'armée abandonnent leurs postes127(*). Les FRCI restées fideles à Gbagbo se repositionnent autour du palais présidentiel, aux plateaux et la résidence présidentielle à Cocody. Conformément à la résolution 1975 du Conseil de sécurité qui vise à protéger les populations civiles et la force de l'ONU128(*), l'ONUCI ainsi que la force Licorne de l'armée française en Côte d'Ivoire tirent sur des positions pro-Gbagbo dans le but de neutraliser leurs armes lourdes. Le 11 avril 2011, après dix jours d'intenses combats, l'assaut est lancé contre la résidence présidentielle. Laurent Gbagbo est fait prisonnier par les forces d'Alassane Ouattara, soutenues indirectement par l'ONU et la force Licorne. Au regard de la manière dont s'est résolu la crise ivoirienne, comparativement aux conflits libériens, il sied de se poser les questions suivantes : pourquoi la gestion et la résolution de la crise ivoirienne a-t-elle échappé aux mécanismes mis en place par la CEDEAO ? Qu'est-ce qui a le plus concouru la réussite de la médiation ouest-africaine au Libéria et à son échec en Côte d'Ivoire ? Quelles mesures pourrait-on envisager en vue d'éviter de telles défaites à l'avenir ? Le chapitre qui suit tente de donner de réponses à ces préoccupations. * 122 Jeune Afrique, « présidentielle ivoirienne : Ouattara, vainqueur avec 54,1% contre 45,9% pour Gbagbo, selon la CEI », 2 décembre 2010, www.jeuneafrique.com consulté le 4 Mai 2012 * 123 BBC news, «Ivory Coast poll overturned: Gbagbo declared winner», 3 December 2010, www.bbc.co.uk consulté le 10 Mai 2012 et Le figaro, « côte d'Ivoire : Gbagbo déclaré vainqueur », 3 décembre 2010, www.lefigaro.fr consulté le 4 Mai 2012 * 124 CATHELIN, M., op.cit., p.3. * 125 Idem, p.4. * 126 Le monde, « La Côte d'Ivoire est toujours dans "l'impasse" », 4 janvier 2011, www.lemonde.fr consulté le 4 Mai 2012 * 127 Dans la nuit du 30 au 31 mars Philippe Mangou, chef d'état-major de Gbagbo, se réfugie avec sa famille à l'ambassade de l'Afrique du Sud [] * 128 Notons que l' ambassade de France a subi une attaque dont les auteurs ont été neutralisés, trois gendarmes français ont été blessés. CF, Tanguy J-M, « L'ambassade d'Abidjan a été envahie »in Le Mamouth, 27 avril 2011 |
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