EPIGRAPHE
« L'Afrique ne pourra rattraper les autres
continents sur le chemin du progrès que si elle jouit de la paix, paix
à l'intérieur, paix avec le monde
extérieur ».
Félix Houphouët BOIGNY, Propos extrait du
discours à la conférence de l'O.U.A. à Addis-Abeba, mai
1963.
IN MEMORIAM
A notre cher père SULA K. MATANDA envers lequel la
nature a été injuste en l'arrachant de cette terre alors que nous
avions encore besoin de ses conseils et de son affection.
DEDICACE
A notre très chère mère, CIRUNGU ZIRIMANI
Christiance, pour le travail abattu afin de réussir notre
éducation et notre formation et pour le grand amour et la
considération à notre égard.
TSHILOBO MATANDA Winnie
REMERCIEMENTS
Nul ne saurait se suffire pour arriver
à rédiger une oeuvre, à en donner un sens et en attribuer
une valeur s'il n'est pas assisté. A ce titre, il serait ingrat pour
nous de garder silence devant tout ceux-là qui ont, en amont ou en aval,
contribué à l'aboutissement de ce travail.
De prime à bord, qu'il nous soit
permis de remercier le professeur NGUWAY KPALAINGU KADONY pour avoir
accepté de diriger ce travail en dépit de ses multiples
tâches. Nos remerciements s'adressent aussi au Chef de Travaux Dominique
KAMWANGA KILIYA pour son encadrement dans la rédaction du travail. Nous
rendons également les hommages les plus déférents au corps
professoral et aux autorités académiques de l'Université
Officielle de Bukavu pour la formation sans commune mesure.
Que nos sentiments de gratitude
parviennent à notre bien-aimée mère CIRUNGU ZIRIMANI
Christiance, elle qui a toujours été là pour nous soutenir
tout le temps qu'a pris notre formation, patiente et prête à se
battre pour notre réussite. Grand merci à Papa Bonaventure
KULIMUSHI pour son assistance aussi bien matérielle que morale envers
nous pour que nous atteignons le seuil de nos études universitaires.
A vous nos frères et soeurs
Gabin, Freddy, Dieu le veut, Steve, Violette, Melissa, Noé, Gloire,
Floriane, merci aussi pour votre soutien ainsi que patience dont vous avez fait
preuve lors de la rédaction de cet ouvrage. Nous n'oublions pas de
remercier nos amis, compagnons de lutte et tous les nôtres,
Dieudonné SHAMAMBA, Ghislaine BALAGIZI, BYAMUNGU Belinda, Pascaline
MBILIZI, RIZIKI Carine, NSIMIRE Marie-Laure, CAMUNANI Solange, KAVIRA Germaine,
AKONKWA Auxance, Fabrice MILENGE, BINJA Steve, SWEDY Arsène, NGILA
KIKUNI Ibrahim, NGOMA Espoir, IGUGU Olivier, MWENYEMALI François, ILUNGA
Florrhy, MWEZE Pascal, BATENDE Rodrigue.
TSHILOBO MATANDA Winnie
SIGLES ET ABREVIATIONS
ACS : Société Américaine de
Colonisation
AFL : Alliance des Forces Libériennes
AIP : Agence Internationale pour la Paix
ALPC : Armes légères et de Petits Calibres
AOF : Afrique Occidentale Française
APWE : Alliance des Patriotes Wê
BANUL : Bureau des Nations Unies pour la consolidation de la
paix au Liberia
BCEAO : Banque Centrale des Etats de l'Afrique de l'Ouest
C.à.d. : C'est-à-dire
CCI : Centre de Commandement Intégré
CEAO : Communauté Economique des Etats de l'Afrique de
l'Ouest
CEDEAO : Communauté Economique des Etats d'Afrique de
l'Ouest
CEE : Communauté Economique Européenne
CEEAC : Communauté Economique des Etats d'Afrique
Centrale
CFA : Communauté Financière Africaine
CPCC : Cadre de Prévention des Conflits de la
CEDEAO
ECOMIL : ECOWAS Mission in Liberia
ECOMOG : ECOWAS Monitoring Group
Etc. : Etcheteri-etchetera
FANCI : Forces Armées Nationales de la Côte
d'Ivoire
FLGO : Front de Libération du Grand Ouest
FOSCAO : Forum des Organisations de la Société
Civile d'Afrique de l'Ouest
FPI : Front Populaire Ivoirien
FREGO : Front de Résistance du Grand Ouest
INPFL : Independent National Patriotic Front of Liberia
LURD : Libériens Unis pour la Réconciliation et
la Démocratie
MICECI : Mission de la CEDEAO en Côte d'ivoire
MINUL : Mission de Nations Unies au Liberia
MJP : Mouvement pour la justice et la Paix
MODEL : Mouvement pour la Démocratie au Liberia
MONUL : Mission d'Observation des Nations Unies au Liberia
MPCI : Mouvement patriotique de Côte d'Ivoire
MPIGO : Mouvement Patriotique Ivoirien du Grand Ouest
MRU : Mano River Union
NPFL : Front National Patriotique du Liberia
OIF : Organisation Internationale de la Francophonie
ONG : Organisation Non Gouvernementale
ONU : Organisation des Nations Unies
ONUCI : Opération des Nations Unies en Côte
d'Ivoire
OUA : Organisation de l'Unité Africaine
PDCI : Parti Démocratique de Côte d'Ivoire
RDC : République Démocratique du Congo
RDR : Rassemblement Des Républicains
RUF : Front Révolutionnaire Uni
SADEC : Southern African Development
Community
TWP : True Whigs Party
UA : Union Africaine
UDAO : Union Douanière de l'Afrique de l'Ouest
UDEAO : Union Douanière des Etats de l'Afrique de
l'Ouest
UEMOA : Union Economique et Monétaire Ouest
Africaine
ULIMO : Mouvement Uni de Libération pour la
Démocratie
UPRGO : Union Patriotique de la Résistance du Grand
Ouest
INTRODUCTION
1. CHOIX, OBJET ET INTERET DU SUJET
L'Afrique d'aujourd'hui est menacée par des conflits
meurtriers caractérisés par une implosion interne des Etats et
des nations. Des guerres ont permis de découvrir, avec horreur et
stupéfaction, les moyens barbares d'extermination massive des
populations. Parmi ces moyens, on peut citer les massacres des populations
civiles, les génocides, les viols et violences à l'égard
des femmes et des enfants, les tueries à grande échelle,
etc. Un tel engrenage conflictuel n'a pas
épargné les différentes sous-régions du continent,
notamment la région ouest-africaine.
Nonobstant, cette conflictualité persistante, les
questions de paix, de sécurité et de stabilité n'ont perdu
ni de leur actualité ni de leur acuité, encore moins de leur
urgence dans cette partie du continent. Avec la prise de conscience de la
dangerosité de cette situation de crise qui prévaut dans cette
partie du continent, la CEDEAO, un regroupement des Etats de la région
afin d'assurer une coopération intégrative, a mis au centre de
ses intérêts, la promotion de la paix, de la
sécurité et de la stabilité, condition sine qua
non du développement régional durable. Mais il convient de
s'interroger sur l'efficacité des politiques envisagées par cette
organisation pour effectivement résorber les conflits armés dans
les Etats membres dont la manifestation, compromet tout espoir
d'effectivité de ce développement durable tant recherché
dans la sous- région.
Ce constat a ainsi motivé le choix de la
présente réflexion sur la CEDEAO et les crises
socio-politiques dans les pays membres : cas du Liberia et de la Cote
d'ivoire. Elle consiste à faire une analyse critique des actions de
la CEDEAO dans la gestion et la résolution des conflits dans cette
partie du continent en prenant comme modèle le Liberia et la Côte
d'Ivoire dont les conflits sont considérés comme les plus
meurtriers dans l'histoire de la sous-région. Ainsi, son objet est
d'examiner les actions et les réalisations de la CEDEAO dans la gestion
des conflits armés dans les pays membres, à savoir, les conflits
libériens et ivoiriens. Cet examen permettra de mesurer
l'efficacité de cette organisation du point de vue de ses interventions
dans les conflits, d'en identifier les insuffisances et de proposer des
solutions pouvant combler ces insuffisances pour éviter que de tels
résultats se reproduisent en cas d'éventuels et ultérieurs
conflits au sein de la région.
Le choix de ce sujet est dicté par un triple
intérêt. Du point de vue personnel, la
réflexion sur ce thème est à la fois essentielle et
urgente. Elle est essentielle, parce que la persistance des conflits
armés et la difficulté des Etats ouest-africains, des
organisations internationales et de divers acteurs à y apporter une
solution satisfaisante invitent à réfléchir en vue
d'envisager des moyens efficaces pour y faire face. Elle est urgente dans la
mesure où dans cette zone, les crises, les guerres, les massacres, les
rebellions, les putschs sont nombreux et actuellement ce sont les
problèmes relatifs à la paix qui occupent plus que jamais
l'agenda de tout pays, de toute organisation. Cette actualité commande
de dégager les pistes de compréhension du mécanisme CEDEAO
pour permettre l'anticipation d'ultérieures crises qui séviraient
dans d'autres Etats de la région où des tensions de tous genres
sont visibles (le problème religieux du Nigéria, par exemple).
Sur le plan scientifique, cette étude conduit à
l'application de certaines théories acquises durant notre formation,
notamment sur les bienfaits de l'intégration régionale et de
l'assistance mutuelle. En plus, ce travail offre aux étudiants, aux
chercheurs qui voudraient mener des études similaires, un cadre de
référence et une source d'inspiration. Quant à
l'intérêt lié à la pratique
internationale, il se justifie par le fait que ce travail offre
l'occasion de découvrir certaines conventions et certains protocoles qui
assurent la paix et la sécurité dans la zone CEDEAO.
2. PROBLEMATIQUE ET HYPOTHESES
La question relative à la paix, à la
sécurité et à la stabilité constitue l'une des
priorités majeures des Etats africains car ce continent est souvent
ébranlé par les conflits les plus meurtriers et les plus
dévastateurs. Ces conflits et guerres ne cessent de livrer au monde un
spectacle d'horreurs, d'atrocités et de barbarie que la
communauté internationale observe médusée. Les conflits du
Liberia, de la RDC, de la Somalie, du Soudan, de la Sierra Léone, de la
Cote d'Ivoire, etc. et surtout du Rwanda en sont des illustrations
poignantes1(*).
En effet, l'accession à l'indépendance de la
plupart des pays africains dans les années 1960 ayant favorisé la
mise en place des gouvernements qui n'intégraient pas le principe de la
séparation des pouvoirs, l'analyse du contexte politique
général de l'Afrique de l'Ouest en particulier
révèle un tableau géopolitique troublant et dramatique.
Justement, cette situation chaotique trouve en grande partie ses causes dans
les difficultés et les réticences des gouvernants à
accepter les principes de partage du pouvoir et de démocratie. Cela a eu
pour conséquences des revendications syndicales et politiques qui se
sont soldées par des coups de force et la prise du pouvoir par les
juntes militaires dans plus de 13 pays sur les 15 qui constituent aujourd'hui
la CEDEAO.2(*)
La recrudescence des conflits dans cette partie du continent
témoigne que l'Afrique est la victime de ses propres impuissances.
L'observation de la pratique sociale en Afrique, après un
demi-siècle des indépendances, semble confirmer la thèse
centrale de René Dumont selon laquelle « l'Afrique n'est
toujours pas partie »3(*). Cette observation révèle aussi que
l'individu au pouvoir incarne l'Etat dont la survie dépend finalement de
son humeur, de son vouloir. A titre exemplatif, la Libye était
traitée d'« Etat-Kadhafi » parce que la vie de ce
pays dépendait de l'humeur du « Guide de la
révolution ». De même, l'Etat togolais était
qualifié d'« Etat-Eyadema » et la Côte
d'Ivoire d'« Etat-Gbagbo », etc.4(*)
Considérant tous ces maux, la dernière
génération des africains à fait de la lutte politique un
idéal. Pour elle, cette lutte devrait bâtir un nouveau continent,
asseoir son économie, développer son potentiel. C'est à
cela que l'on proclame que la lutte pour le développement est toujours
allée de pair avec le combat pour l'intégration5(*). Une telle vision a conduit
à la création des organisations sous régionales comme la
CEEAC en Afrique Centrale, la CEDEAO en Afrique de l'Ouest, la SADEC en Afrique
Australe, etc. Ces organisations ont pour but principal, le
développement des Etats membres par la signature des traités de
libre-échange.6(*)
Malgré ces efforts d'intégration, la plupart
des pays membres de ces organisations demeurent confrontés à des
conflits. Une telle situation ne pouvant laisser indifférentes leurs
structures organisationnelles. La plupart d'entre elles, si pas toutes, se sont
senties obligées, dans le souci de solidarité, d'intégrer
dans leurs objectifs le maintien de la paix et la gestion des conflits dans et
entre les Etats membres. C'est dans ce cadre que la CEDEAO s'est vue
dotée d'autres priorités : le maintien de la paix dans la
région qui est toujours confrontée à de nombreux conflits
internes aux et entre pays membres. Elle était amenée à
créer une force de maintien de la paix qui, avec l'appui financier des
Nations-Unies et celui logistique des pays membres, a mis fin à la
guerre civile au Liberia, en Sierra Leone et en Guinée-Bissau. Les
élections libres et transparentes y ont été tenues, ce qui
a ainsi donné espoir pour un redémarrage économique de
toute la sous-région ouest-africaine.7(*) Il s'agit là d'un pari gagné par les
pays cités certes, mais de courte durée car quelques mois plus
tard, la région sera de nouveau secouée par une crise de longue
durée dans un autre pays membre, la Côte d'Ivoire. Malgré
les bonnes intentions affichées par les dirigeants de la CEDEAO, aucune
solution durable n'a été trouvée pour la résolution
de la crise dans ce pays.
Au regard de ce qui précède et pour expliquer
le bien-fondé de cette étude, nous nous sommes
intéressés à la théorie du
libéralisme institutionnel8(*) d'après lequel ce sont
les institutions internationales qui sont dotées d'un pouvoir
stabilisateur. Elles consolident, en l'institutionnalisant, la
coopération entre les Etats jusqu'à la rendre, dans les cas les
plus avancées comme l'UE, irréversible. Elles dissuadent, par des
mécanismes de sanctions, les Etats de rechercher des gains
unilatéraux. Elles développent la communication entre ces Etats
et limitent ainsi les risques d'incompréhension et de conflit. Elles
encouragent la paix en réunissant différents domaines de
coopération (technique, économique, politique, etc.). Le
libéralisme institutionnel comprend divers auteurs comme David Mitrany,
Joseph Nye et Robert Keohane, Inis Claude, etc. Il distingue deux propositions
principales, à savoir, les différends entre les individus,
les conflits entre les Etats peuvent d'abord être résolus par des
procédures juridiques mises en oeuvre par les organisations
internationales et, ensuite par la « sécurité
collective », c'est-à-dire par l'opposition d'un ensemble
d'Etats contre tout agresseur qui aurait déclenché un
conflit.9(*)
Appliquée à la présente étude,
les initiatives de la CEDEAO revêtent les principes cités
supra. Dans les traités ainsi que des rapports et discours de
cette institution, il est question chaque fois de revivifier les liens de
coopération et d'intégration dans la zone CEDEAO. Partant, la
CEDEAO, par le biais de son organe de dissuasion et en utilisant des
mécanismes de sanction, oblige les Etats qui cherchent des gains
unilatéraux et développe la communication, encourage la paix en
réunissant différents domaines de coopérations entre les
Etats membres entre eux mais aussi entre les Etats membres et
l'extérieur. Ainsi, les différends qui touchent les Etats membres
de la CEDEAO ou qui opposent certains d'entre eux sont souvent résolus
par des procédures mises en oeuvre par cette dernière. Celles-ci
peuvent même prendre des proportions souvent rigoureuses, l'intervention
militaire par exemple (ce qui a été d'ailleurs employé au
Libéria sans toutefois l'être en Côte d'Ivoire), pour des
Etats qui provoque l'instabilité du système.
Certains chercheurs ont étudiés la
problématique sous différents angles. Ainsi, il est de notre
devoir de faire mention de la quintessence de certains d'entre eux pour ne pas
forcer une porte déjà ouverte. Dans un premier temps, Salamane
Yameogo10(*) a
démontré que la consécration d'un protocole relatif au
mécanisme de prévention, de gestion, de règlement des
conflits, de maintien de la paix et de la sécurité, est un cadre
juridico-politique général de recherche d'une « pax
ouest Africana ». Ce document traduit la prise de conscience
collective de l'interdépendance entre la paix et le
développement. Il a été souligné dans un premier
temps que le mécanisme CEDEAO est, du point de vue architectural,
renforcé tant au niveau de son contenu que dans le cadre
juridico-institutionnel. Cependant, il a constaté que cette ouverture
encadrée et organisée a très vite été
atrophiée étant donné que la réglementation de
l'application du mécanisme est quelque peu rigide. L'auteur a donc fait
un bilan de la mise en oeuvre du mécanisme. Cet examen a
révélé des difficultés qui entravent l'amorce d'une
véritable sécurité commune. Pour y parvenir, il a
essayé de proposer différentes pistes de solutions.
Ensuite, Papa Lafatime Sène11(*) démontre
qu'actuellement l'intégration régionale est au centre de la
préoccupation sur le développement du continent africain. Pour
cela, il est important de renforcer les organisations qui ont ce projet en
charge. En tant qu'Etats souverains, les Etats africains ont accomplis des
progrès considérables dans la voie de l'intégration
régionale. Certains objectifs importants sont atteints, notamment, la
création des zones de libre-échange dans la plupart des
communautés économiques régionales. Certaines
communautés économiques régionales plus avancées
que les autres ont pu mettre en place la libre circulation des personnes et un
tarif extérieur commun notamment la CEDEAO.
Enfin, Daniel BACH et Luc SIND JOUN12(*) ont mis l'accent sur le
triomphe de la résolution hobbesienne des conflits en Afrique. Selon
eux, l'ordre en cours dans la plupart de pays africains ayant abrité des
conflits est dans une large mesure « un ordre
réaliste », plus précisément « un
ordre de la puissance ». D'où
l'expression « résolution hobbesienne des
conflits » qui vise à traduire l'importance des rapports de
force dans les relations internationales africaines : importance
camouflée par les mythes de la palabre africaine et du discours
diplomatique sur la fraternité. Dans la réalité, la
« kalachnikov » semble plus présente que le baobab
ou arbre à palabre. La résolution des conflits peut être
considérée comme une politique publique en ce sens qu'elle marque
la prise en charge par le système international (universel ou
régional), par des acteurs étatiques des ajustements par rapport
à la paix considérée comme norme de vie publique
internationale. Sa mise en oeuvre récente semble l'affirmer comme un
lieu privilégié d'expression de politique de puissance sur le
plan interne et régional. Sur le plan interne, la résolution
hobbesienne des conflits renvoie à la victoire d'une des parties au
conflit. Cependant, la solution militaire des conflits africains n'est pas
exclusive. Il arrive qu'elle cohabite avec l'établissement de la paix
sous les auspices d'une organisation internationale. C'est le cas du Liberia
où l'action de la CEDEAO a été importante au point de
permettre la tenue des élections générales le 19 janvier
1997. D'autres voies de résolution des conflits sont aussi
utilisées, notamment l'établissement d'un compromis comme en
Centrafrique ou au Niger. Néanmoins, il demeure que la politique de
puissance constitue le fait marquant des processus de sortie de conflits dans
les années 1990 en Afrique. De cette politique de puissance, les
belligérants n'ont pas le monopole.
Notre travail se démarque des
précédents en ce sens qu'il se propose de faire une étude
analytique de deux conflits qui ont eu lieu dans la partie ouest du continent
africain. Il va procéder par l'évaluation de l'impact concret des
actions de la CEDEAO et son intervention dans l'un par rapport à l'autre
en vue de ressortir les forces et les faiblesses faces aux
spécificités des deux conflits. D'où, en prenant pour
modèles de comparaison les opérations de maintien de la paix de
la CEDEAO au Libéria et en Côte d'Ivoire, la question qui
constitue la préoccupation majeure ou la problématique du
présent travail est la suivante : Malgré les multiples
interventions et médiations de la CEDEAO, qu'est-ce qui justifierait
l'échec de sa médiation en Côte d'ivoire alors qu'elle a
semblé réussir au Liberia et comment éviter que de tels
résultats se reproduisent en cas d'éventuels conflits
ultérieurs au sein de la région ?
En guise d'hypothèses, l'on présume que
l'échec de la médiation ouest-africaine en Côte d'ivoire se
justifie d'abord par le non-respect des accords signés par les
différentes parties en conflit sous la houlette de la CEDEAO. Ensuite,
les divergences qui se sont manifestés entre les chefs d'Etats de la
CEDEAO lors des négociations de Lomé auraient affaibli les
chances d'aboutissement des négociations. Par ailleurs, la
non-application des clauses résultant des différentes
médiations et des décisions de la CEDEAO qui, en principe, ne
revêtent pas souvent un caractère obligatoire par les
belligérants ne facilitait pas la conciliation des vues. Par contre, au
Liberia, la CEDEAO avait convaincu les parties à trouver un terrain
d'entente, à accepter la mise en place d'une véritable force
militaire d'imposition de la paix dans ce pays. La souplesse des forces en
présence dans le respect des décisions prises lors des
négociations et des accords signés a constitué un atout
majeur pour la réussite de la mission assignée à
l'organisation sous-régionale. A l'avenir, pour éviter les
résultats négatifs, la CEDEAO devrait être en mesure de se
prendre réellement en charge, de convaincre toutes les partie en conflit
sur la nécessité d'instauration d'une paix durable en recourant,
s'il échouait, aux autres puissances ou organisations ayant en charge le
maintien de la paix et de la sécurité. Elle devrait, en outre,
envisager la révision de certaines dispositions de son protocole pour
rendre ses décisions contraignantes et ses interventions plus
efficaces.
3. METHODE ET TECHNIQUES DE RECHERCHE
La réalisation de ce travail, a induit à
l'usage de la méthode systémique dont
l'analyse est axée sur la notion de système que Jean-William
LAPIERE13(*)
définit comme « un ensemble d'éléments
interdépendants, c'est-à-dire liés entre eux par des
relations telles que si l'une d'elles est modifiée, les autres le sont
aussi et, par conséquent, tout l'ensemble est
transformé ». La CEDEAO étant, en effet, un
système organisationnel des Etats, elle a pour fonction, entre autres,
de contribuer au rétablissement de la paix, la sécurité et
de la stabilité dans la région ouest-africaine, objectifs qui,
s'ils ne sont pas assurés, entraineraient l'instabilité de la
région. Pour ce faire, les Etats qui en sont ses éléments,
sont contraints d'adopter un certain nombre de mesures et de stratégies
qui tiennent compte de l'importance de chaque objectif arrêté par
la CEDEAO afin d'assurer sa stabilité et la sécurité de
chacun, donc leur pérennité à tous.
Selon Talcott Parsons14(*), tout système doit faire face à quatre
problèmes fondamentaux d'ajustement. Ce sont ces quatre problèmes
que l'auteur appelle « les impératifs
fonctionnels » qui doivent permanemment être
réglés pour que le système existe et se maintienne. Ces
facteurs sont : la stabilité normative, l'intégration des
membres dans le système social, l'adaptation dans le système
social et la poursuite du but. La stabilité
normative consiste à s'assurer que les normes et les valeurs de
la société sont connues des membres et que ceux-ci sont
motivés à les accepter, à se plier à leurs
exigences pour une meilleure stabilité du système. Ainsi, les
Etats, en adhérant et en adoptant le traité et les protocoles de
la CEDEAO, acceptent et cherchent à s'assurer des valeurs qui
garantissent la paix, la stabilité, le respect ainsi que le
développement de la sous-région et à les faire respecter.
Pour sa part, la fonction d'intégration sert à assurer
la coordination nécessaire entre les unités ou parties du
système. Elle permet à la présente étude de
comprendre que les Etats ne sont pas limités dans leur fonction. A
travers la notion d'intégration, les Etats de la CEDEAO motivent ceux
qui sont en conflits à s'imprégner de leur vision afin de
préserver la paix et la sécurité et ainsi la
stabilité de la sous-région. Quant à la fonction
d'adaptation, elle porte sur l'ensemble des moyens auxquels le
système et ses membres doivent recourir dans la poursuite des buts. Les
Etats sont liés entre eux par les liens conventionnels (traité,
protocoles, etc.). Ils sont gérés au niveau interne par les
textes législatifs obligatoires. Ces conventions et lois internationales
comportent des dispositions que tous les Etats qui y ont adhéré
ou qui les ont édictées, doivent respecter. Cela constitue donc
un des moyens utilisés par ces Etats de la zone CEDEAO pour lutter
contre les conflits tant au niveau interne qu'au niveau international. Enfin,
la fonction de poursuite de but concerne les définitions et
l'obtention d'objectifs pour le système tout entier et/ou ses
différentes unités constituantes. En effet, les Etats de la
CEDEAO poursuivent un but qui est celui de lutter contre
l'insécurité en Afrique de l'Ouest. A cet effet, ils s'engagent
à coopérer avec la communauté en vue de créer et de
renforcer les mécanismes appropriés pour assurer la
prévention et la résolution, à temps, des conflits au sein
et entre les Etats. L'important est de savoir, tout au long de cette
étude, si les buts poursuivis par les uns et les autres et les
mécanismes ou stratégies mis en oeuvre, contribuent
réellement à lutter contre l'insécurité et
l'instabilité tant interne qu'internationale des Etats de la CEDEAO.
Quelques techniques nous ont également permis de
récolter et d'analyser les données de cette étude. En
effet, d'abord, la technique documentaire ou la documentation
nous a aidé à exploiter non seulement les différents
documents présents dans certaines bibliothèques de la place mais
aussi consulter les documents de l'internet (rapports, articles,
mémoires, etc.) afin de bien dresser notre état de la question et
de donner un appui théorique aux données empiriques. Ensuite,
l'analyse de contenu nous a permis d'exploiter le fond des
données récoltées tout au long de nos recherches et
investigations. Nous les avons analysés et interprétés en
y appliquant une critique raisonnable pour donner un sens scientifiquement
acceptable à notre réflexion.
4. DELIMITATION DU SUJET ET SUBDIVISON
SOMMAIRE DU TRAVAIL
Pour ne pas éparpiller les énergies en
abordant un sujet trop général, notre travail se délimite
dans le triptyque espace-temps-institution. En effet, nos investigations
couvrent la période allant de 1989 en 2011 (temps). Le terminus a
quo est caractérisé par l'existence du conflit au
Libéria (espace 1) dont l'ampleur exigea l'intervention de la CEDEAO
(institution) qui lutte pour la promotion de la paix et de la
sécurité dans la sous-région. Quant au terminus ad
quem, il marque le règlement définitif du conflit de la
Côte d'Ivoire (espace 2) par l'assaut lancé par les troupes
rebelles fidèles au président élu (Alassane Dramane
Ouattara) sur la résidence de l'ancien président de la
République (Laurent Gbagbo).
Dans sa structure, outre l'introduction et
la conclusion, la présente étude s'étend sur trois
chapitres. Le 1er chapitre est consacré
à l'étude de l'architecture de paix et de sécurité
ouest-africaine. Le 2e chapitre est axé sur les conflits
« libero- ivoiriens » et la nécessité de leur
résolution par la CEDEAO. Le 3e chapitre évalue
l'efficacité de la CEDEAO dans la résolution des conflits dans la
sous-région. Il s'agit ici de faire une analyse critique de ces actions
en passant au crible les forces et faiblesses de la CEDEAO et en signalant son
attitude face à la gestion de ces conflits et enfin, dégager des
perspectives des initiatives de la CEDEAO en matière de gestion et de
réglementation des crises et conflits dans cette partie du continent.
CHAPITRE I. ARCHITECTURE DE LA
PAIX ET DE LA SECURITE DANS LA ZONE OUEST-AFRICAINE
L'Afrique de l'Ouest est une région très
instable. Dans le but d'une intégration régionale, il a
été créé dans cette zone une organisation qui, au
départ, avait pour but de promouvoir le développement
économique de la région. Très vite, elle était
obligée de faire de la sécurité et de la promotion de la
paix l'une de ses priorités. A cet effet, elle a mis en place des
mécanismes et des structures de prévention en vue de mieux
gérer les conflits et assurer la sécurité de la
sous-région. C'est bien l'étude de ces structures,
mécanismes et de leur organisation qui fait l'objet de cette partie du
travail.
SECTION I. LA CEDEAO COMME
ORGANISATION DE MAINTIEN DE LA PAIX
Après la seconde Guerre Mondiale, on assiste à
la création des organisations internationales et à une
intensification des relations bilatérales et multilatérales. Cet
accroissement des accords de coopération s'explique par l'augmentation
des échanges économiques et culturels résultant du
phénomène de mondialisation. Ainsi, outre l'Europe, il n'est pas
aujourd'hui une région du monde qui ne se trouve pas prise dans un ou
plusieurs processus d'intégration.15(*) Vers la fin des années 1980, tout le
système international se trouve alors modelé par des dynamiques
d'intégration actives - action d'entrer dans un tout -sur tous les
continents. Ces dynamiques rassemblent des éléments épars
divers en un ensemble cohérent en vue de leur harmonisation.
En effet, le continent africain n'est pas resté en
marge de cette dynamique. Son processus d'intégration remonte au
lendemain de l'accession à l'indépendance des anciens territoires
colonisés qui, en raison des handicaps liés à la faible
démographie, à l'impréparation politique et à la
faiblesse économique, ne parvenaient pas à assumer pleinement les
obligations découlant de leur statut d'Etats. Pour relever ces
défis, la réalisation de l'unité à travers
l'intégration régionale apparaissait comme la réponse la
plus adéquate. Ainsi, après avoir réussi à
créer une organisation regroupant la quasi-totalité des Etats du
continent, plusieurs initiatives de regroupement beaucoup plus restreints ont
vu le jour. 16(*)
L'Afrique de l'Ouest n'est pas restée en marge de ce
phénomène. Les Etats de cette région se sont
retrouvés en vue de réaliser une union économique et
monétaire ouest-africaine. Leurs Chefs d'Etats et de gouvernements,
voyant la nécessité d'une intégration des trois
communautés : francophone, anglophone et lusophone, ont
pensé créer la communauté des Etats de l'Afrique de
l'Ouest en 1975. Ainsi, dans le développement de cette section, nous
essayons de circonscrire le contexte historique de la création de la
CEDEAO, de présenter ses objectifs, ses missions et ses principes.
§1. DE LA NAISSANCE DE LA
CEDEAO : UN PROCESSUS D'INTEGRATION EN PLUSIEURS ETAPES
Selon le caractère plus ou moins ambitieux d'une
organisation internationale, c'est-à-dire en fonction de l'ampleur des
transferts de souveraineté consentis par les Etats, on peut se trouver
en face d'organisation de coopération ou d'organisation
d'intégration, d'organisation interétatique ou d'organisation
supranationale. A ce niveau, une brève clarification terminologique
s'impose.
En effet, selon la théorie des organisations
internationales, une organisation de coopération désigne une
entreprise concertée entre deux ou plusieurs partenaires dont les
intérêts convergents sur une question donnée. De ce fait,
elle ne peut concerner qu'un dossier ou un secteur en particulier. La
coopération est contractuelle, et donc limitée temporellement.
Elle n'implique pas forcément un rapport d'égalité entre
les partenaires.17(*) Par
contre, pour ROCHE, une organisation d'intégration résulte d'une
démarche volontaire de deux ou plusieurs ensembles de partenaires
appartenant à des Etats différents en vue d'une mise en commun
d'une partie de leurs ressources. Ce processus a pour finalité
l'émergence et le renforcement des relations techniques et
économiques d'interdépendance structurelle à effets
d'entrainement positif sur les revenus.18(*) La création de la CEDEAO, partie de la CEAO, a
le plus répondu à cette dernière forme d'organisation au
niveau régional.
En règle générale, toute organisation
internationale se fixe des buts et s'assigne des objectifs. Le traité
constitutif de la CEAO créée en 1973 qui, plus tard, deviendra la
CEDEAO (1975), visait beaucoup plus à réaliser une
coopération économique entre les Etats de l'Afrique de l'Ouest.
L'option de la coopération économique s'est traduite à
travers l'adoption de deux principales conventions visant à renforcer
les échanges économiques entre les Etats ouest-africains :
la convention de 1959 et celle de 1966.
A. UDAO et UDEAO : une union
douanière prometteuse ?
L'histoire de l'intégration régionale en
Afrique de l'Ouest remonte à l'époque coloniale notamment
à la dislocation de l'Afrique Occidentale Française (AOF). La fin
de la domination coloniale et l'accession à la souveraineté
internationale des Etats de cette partie du continent consacre la lutte pour
l'autonomie par rapport aux mécanismes commerciaux organisés par
l'ancienne puissance de tutelle. C'est dans ce contexte que la Convention de
1959 et celle de 1966 inaugurant les initiatives de regroupement entre les
Etats de l'Afrique de l'Ouest ont mis un accent particulier sur l'option de la
coopération. La volonté politique de s'orienter vers la
coopération s'est matérialisée par la naissance de
nombreuses organisations coopératives dans cette partie du continent.
Cette option de la coopération se
traduisait d'abord par la création de deux unions douanières. La
première, l'Union Douanière de l'Afrique de l'Ouest (UDAO) a
été créée déjà avant les
indépendances. Par son traité constitutif, signé le 9 juin
1959 à Paris, elle regroupait la Côte d'Ivoire, le Bénin,
le Burkina Faso, la Mauritanie, le Niger et la Fédération du Mali
(République du Mali et le Sénégal) 19(*). Dans ses sept articles, elle
énonçait sommairement le principe de la liberté totale de
circulation des produits entre les Etats membres de l'Union ainsi que le
principe d'un tarif unique à l'entrée des produits dans l'Union.
Quoiqu'ayant constitué une initiative louable dans la politique de
coopération économique entre les territoires membres, les
mécanismes mis en place n'ont pas effectivement été
appliqués parce que les conditions nécessaires à une
union douanière totale n'étaient pas requises dans une
région où les pays étaient encore en
construction.20(*)
Ainsi, sept années après les tentatives de
fonctionnement de l'UDAO, les Etats membres décidèrent, le 6 juin
1966 à Abidjan, de remplacer la convention de 1959 par une autre.
Celle-ci créa l'UDEAO qui innove par la mise en place d'un
système de préférence tarifaire21(*).Malgré le changement de
principe, la convention du 6 juin 1966 ne réussit pas à raffermir
l'union.22(*) Au
début des années 1970, les Etats signataires de la convention de
1966 vont une fois de plus, en collaboration avec la Communauté
Economique Européenne (CEE), entreprendre la création d'une
nouvelle organisation qui prenne en compte aussi bien les aspects commerciaux
de la coopération que les aspects relatifs au développement
économique régional. C'est ce qui explique la
naissance et l'émergence de la CEAO qui, au bout de deux ans, sera
remplacée à son tour par la CEDEAO.
B. De la CEAO à la CEDEAO : un encrage du
processus d'intégration régionale ouest-africain
Créée par traité du 17 Avril 1973 -
entré en vigueur le 1er Janvier 1974 -, la CEAO regroupe six
Etats de l'Afrique de l'Ouest liés par l'histoire, la géographie,
la langue officielle, la monnaie, à savoir, la Côte d'Ivoire, le
Burkina Faso, le Mali, la Mauritanie, le Niger et le Sénégal.
Elle est fondée, d'une part, sur une « volonté des chefs
d'Etats de s'engager dans une solidarité de destin et, d'autre part, une
organisation bien structurée, caractérisée par des
instances bien fonctionnelles et permanentes ». Ses objectifs sont
clairement énoncés à l'article 3 du traité
constitutif qui dispose : « La communauté a pour mission de
favoriser le développement harmonisé et équilibré
des activités économiques des Etats membres en vue de parvenir
à une amélioration aussi rapide que possible du niveau de vie de
leur population ».23(*)
Alors qu'elle n'a pas encore pris le temps de bien mettre en
oeuvre son idéal, la CEAO sera très vite concurrencée dans
ses domaines de compétences par une autre organisation régionale,
la Mano River Union (MRU), créée en 1974 par le Libéria,
la Sierra Léone et la Guinée. Cette dernière avait pour
but non seulement la gestion du fleuve Mano que partageaient ses Etats membres
et à promouvoir le développement économique de ceux-ci.
Dès lors, le chevauchement et la coexistence de ces deux organisations
dans la même région engendrent des difficultés dans le
développement des échanges entre les pays de la région
ouest africaine. C'est dans ce contexte qu'une nouvelle organisation
économique africaine, la Communauté Economique des Etats de
l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) se crée par le Traité du 28 Mai
1975 à Lagos au Nigéria. Cette création constitua une
avancée importante dans le processus d'intégration des Etats de
l'Afrique de l'Ouest.24(*)
La CEDEAO est venue renforcer cette volonté d'union
dans la sous-région. L'idée de création d'une
communauté de l'Afrique de l'Ouest remonte, en effet, à 1964 avec
le président libérien William Tubman. Elle permit la signature,
en février 1965, d'un accord entre le Liberia, la Côte d'Ivoire,
la Guinée et la Sierra Leone qui, malheureusement, ne produit aucun
résultat concret. En 1972, les présidents Yakubu Gowon du Nigeria
et Gnassingbé Eyadema du Togo relancent le projet. Après avoir
convaincu leurs homologues de douze autre pays de la région, une
réunion s'organise à Lomé en vue d'étudier une
proposition de traité. Elle sera suivie, en janvier 1975 à Accra,
d'une réunion d'experts et des juristes. Ces deux conférences ont
examiné soigneusement la proposition du traité. Finalement,
quinze pays - Benin, Burkina Faso, Cote d'Ivoire, Guinée, Mali, Niger,
Togo, Sénégal, Gambie, Ghana, Liberia, Nigeria, Sierra Leone,
Cap-Vert et Guinée Bissau - acceptent de signer le traité pour la
création d'une Communauté Economique des Etats de l'Afrique de
l'Ouest le 28 mai 1975 à Lagos. Les protocoles établissant la
CEDEAO ont été signés à Lomé, le 5 novembre
1976.25(*) Elle s'est
attribué un certain nombre d'objectifs et de missions que nous
présentons ci-après.
§2. MISSIONS, OBJECTIFS ET
PRINCIPES DE LA CEDEAO
Les buts et les objectifs de la CEDEAO tels que
définis par le traité de 1975 sont essentiellement d'ordre de
coopération. En effet, la Communauté promeut la
coopération et le développement dans tous les domaines de
l'activité économique, spécialement dans les domaines de
l'histoire, des transports, des télécommunications, de
l'énergie, de l'agriculture, des ressources naturelles, du commerce, des
questions monétaires et financières et dans le domaine des
affaires sociales et culturelles. Dans tous ces domaines, ses objectifs sont
d'élever le niveau de vie de ses peuples, d'accroître et de
maintenir la stabilité économique, de renforcer les relations
entre les membres et de contribuer au progrès et au développement
du continent africain.26(*)
A travers ces objectifs, il se dégage plusieurs
missions qu'elle est appelée à assumer. Il s'agit notamment
de :
- l'élimination entre les Etats membres des droits de
douanes et toutes autres taxes d'effet équivalent à l'importation
et à l'exportation des marchandises ;
- l'abolition des restrictions quantitatives et
administratives au commerce entre les Etats membres ;
- l'établissement d'un Tarif douanier commun et d'une
politique commerciale commune à l'égard des pays tiers ;
- la suppression, entre les Etats membres, des obstacles
à la libre circulation des personnes, des services et des capitaux;
- l'harmonisation des politiques agricoles et la promotion des
objets communautaires des Etats membres notamment dans les domaines de la
commercialisation, de la recherche et dans celui des entreprises
agro-industrielles ;
- la réalisation de programmes concernant le
développement commun en matière de transports, de communications,
d'énergie et d'autres équipements d'infrastructure ainsi que
l'élaboration d'une politique commune dans ces domaines;
- l'harmonisation des politiques économiques et
industrielles des Etats membres et la suppression des disparités du
niveau de développement des Etats membres;
- l'harmonisation nécessaire au bon fonctionnement de
la Communauté des politiques monétaires des Etats membres;
- la création d'un Fonds de coopération, de
compensation et de développement;
- toutes autres activités visant à atteindre les
objectifs communautaires que les Etats membres peuvent entreprendre en commun
à tout moment.
Dans la poursuite de ces objectifs, les Etats membres
déclarent solennellement leur adhésion aux principes fondamentaux
de l'organisation qui sont : l'égalité et
l'indépendance des Etats membres ; la solidarité et
l'autosuffisance collective ; la coopération inter-Etats,
l'harmonisation des politiques et l'intégration des programmes ; la
non-agression entre les Etats membres. Le maintien de la paix, de la
sécurité et de la stabilité régionale par la
promotion et le renforcement des relations de bon voisinage, objet de la
présente étude, n'a pas été négligé.
Il fait également partie des principes fondamentaux.27(*) A ce titre, la vision
stratégique 2020 de la CEDEAO, adoptée le 15 juin 2007,
définit trois chantiers principaux : la construction d'une
véritable union économique, monétaire et commerciale ; la
promotion du développement durable et l'éradication de la
pauvreté ; la paix, la sécurité régionale, la
consolidation de la paix et de la démocratie. Cette dernière est
plus prioritaire par rapport aux deux premiers.28(*) Elle se réalise grâce à la mise
en place d'un certain nombre de mécanismes que voici dans les lignes qui
suivent.
SECTION 2. DU MECANISME DE
PREVENTION, DE GESTION ET DE REGLEMENT DES CONFLITS, DE MAINTIEN DE LA PAIX ET
DE LA SECURITE
La région ouest-africaine a été
affectée par les instabilités politiques et la mauvaise
gouvernance dues, pour la plupart d'entre elles, à la fréquence
des coups d'États militaires dans certains pays, au cours des deux
dernières décennies. La CEDEAO a été dès
lors obligée de s'intéresser de façon plus soutenue aux
questions de la sécurité, de la gestion des conflits et du
maintien de la paix. Ainsi, son Traité constitutif, révisé
le 24 juillet 1993, a introduit parmi ses innovations majeures la
coopération politique, la paix et la sécurité
régionales qui devrait concourir à la réalisation d'un
système sous-régional efficace. Le maintien de la paix est ainsi
affiché dans le Traité, non pas à titre de l'objectif
global, mais plutôt à titre de principe fondamental devant
permettre à la CEDEAO d'atteindre ses objectifs en vue d'une
prospérité économique durable.29(*)
Pour mener à bien cette mission qui, du reste, est
délicate, le Protocole relatif au mécanisme de prévention,
de gestion, de règlement des conflits, de maintien de la paix et de la
sécurité de la CEDEAO fut signé à Abuja le 10
décembre 1999 par les chefs d'Etats et de gouvernements membres.
Considéré comme la colonne vertébrale de l'ambition de
sécurité collective, ce mécanisme permet à la
CEDEAO d'intervenir en cas de risques importants de désastre
humanitaire, de menaces à la paix, à la sécurité de
la sous-région et de tentatives de renversement d'un régime
démocratiquement élu dans un Etat membre. Nous nous proposons
alors de circonscrire les principes et objectifs du mécanisme, sa mise
en oeuvre et ses modes d'intervention.
§1. PRINCIPES ET OBJECTIFS
DU MECANISME
A travers ce mécanisme, les Etats membres ont
réaffirmés leur attachement aux principes contenus dans les
chartes de l'organisation des Nations Unies et de l'UA, dans la
Déclaration Universelle des Droits de l'Homme ainsi que ceux de la
Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples. Ces principes
fondamentaux sont notamment le développement économique et
social, la sécurité des peuples et des Etats (ces deux
dernières sont intimement liées) ; la promotion et le
renforcement de la libre circulation des personnes, le droit de
résidence et d'établissement qui contribuent au renforcement des
liens de bon voisinage ; la promotion et la consolidation d'un
gouvernement et d'institutions démocratiques dans chaque Etat
membre ; la protection des droits humains fondamentaux, des
libertés et des règles du droit international humanitaire ;
l'égalité des Etats souverains et l'intégrité
territoriale et l'indépendance politique des Etats membres.30(*)
Pour cela, les Etats membres se sont fixé comme
objectifs la prévention, la gestion et le règlement des conflits
internes et interétatiques ; le renforcement de la coopération
dans les domaines de la prévention, de l'alerte précoce, des
opérations de maintien de la paix, de la lutte contre la
criminalité transfrontalière, le terrorisme international, la
prolifération des armes légères et les mines anti
personnelles ; le maintien et la consolidation de la paix, de la
sécurité et de la stabilité au sein de la
Communauté ; L'application des dispositions pertinentes des protocoles
relatifs à la non-agression, à l'assistance mutuelle en
matière de défense, à la libre circulation des personnes,
au droit de résidence et d'établissement; la constitution et le
déploiement, chaque fois que de besoin, d'une force civile et militaire
pour maintenir ou rétablir la paix dans la sous-région ; la
promotion d'une coopération étroite entre les États
membres dans les domaines de la diplomatie préventive et du maintien de
la paix ; la sauvegarde du patrimoine culturel des États membres ; la
création d'institutions et la mise en oeuvre de politiques
appropriées pouvant permettre la coordination des missions humanitaires
et de sauvetage ; la création d'un cadre approprié pour la
gestion rationnelle et équitable des ressources naturelles appartenant
en commun à des États membres partageant des frontières
communes, et qui pourraient constituer des causes de conflits
interétatiques fréquents ; la protection de l'environnement et
l'adoption de mesures visant à restaurer l'environnement
dégradé ; la formulation et la mise en oeuvre de politiques de
lutte contre la corruption, le blanchiment d'argent et la circulation
illégale des armes légères31(*).
En ce qui concerne la force civile et militaire pour le
maintien de la paix dans la sous-région, qui n'est autre que le groupe
du contrôle du cessez-le-feu de la CEDEAO (ECOMOG), c'est une structure
composée de plusieurs modules polyvalents (civils et militaires) en
attente dans leurs pays d'origine et prêts à être
déployés dans les meilleurs délais. Elle conduit d'abord
des missions d'observation et de suivi de la paix, d'appui aux actions
humanitaires, de vérification de l'application de sanctions y compris
des embargos et des déploiements préventifs ,ensuite des
opérations de maintien et rétablissement de la paix, de
consolidation de la paix, de désarmement et de démobilisation,
enfin, des activités de police relevant notamment de la lutte contre la
fraude et le crime organisé
Il est pertinent de noter que le protocole précise,
dans son article 25, les conditions qui doivent être prises en compte
pour la mise en oeuvre de ce mécanisme par l'organisation.
§2. MISE EN OEUVRE DU
MECANISME ET SAISINE DE L'ORGANISATION
Le protocole relatif au mécanisme de
prévention, de gestion et de règlement des conflits, de maintien
de la paix et de la sécurité prévoit le
déclenchement du mécanisme dans les situations
ci-après :
- Agression ou conflit armé intervenu dans un
État membre, ou de menace d'un tel conflit ;
- Conflit interne qui menace de déclencher un
désastre humanitaire ou constitue une menace grave à la paix et
à la sécurité dans la sous-région ;
- Violations graves et massives des droits de l'homme ou
remise en cause de l'État de droit ;
- Conflit entre deux ou plusieurs Etats-membres ;
- Renversement ou tentative de renversement d'un gouvernement
démocratiquement élu ou toute autre situation
déterminée par le conseil de Médiation et de
Sécurité.32(*)
Notons également que le mécanisme n'est
déclenché que sur décisions de la conférence des
Chefs d'Etats et des gouvernements33(*) ; du conseil de Médiation et de
Sécurité ; à la demande d'un Etat-membre ; à
l'initiative du Secrétaire exécutif34(*) ou à la demande de l'UA
ou des Nations Unies.35(*)
Cette mise en oeuvre est faite conformément à l'une ou l'autre
des procédures ci-après36(*) :
- En concertation avec le Président en exercice, le
Secrétaire Exécutif prend toutes mesures d'urgence après
avoir informé les Etats-membres du Conseil de Médiation et de
Sécurité.
- Le Conseil de Médiation et de Sécurité
envisage plusieurs options, et décide de celle la plus appropriée
en matière d'intervention. Ces options peuvent porter sur le recours au
Conseil des Sages37(*),
sur l'envoi de mission d'enquête, de missions politiques et de
médiation ou sur l'intervention de l'ECOMOG.
- Le Conseil de Médiation et de Sécurité
délivre un mandat autorisant le Secrétaire Exécutif
à mettre sur pied la mission, et définit les termes de
référence de celle-ci.
- Le Conseil de Médiation et de Sécurité
nomme en cas de besoin les principaux responsables, à savoir, le
Représentant Spécial du Secrétaire
Exécutif38(*) et le
Commandant de la Force de l'ECOMOG39(*).
- Le Président du Conseil de Médiation et de
Sécurité adresse á l'OUA(UA) et aux Nations unies, un
rapport sur la situation.
- Le Secrétariat Exécutif mobilise les
ressources nécessaires aux opérations.
§3. MODES D'INTERVENTION
Il convient de noter que pour ce qui concerne la gestion des
conflits dans la sous-région ouest-africaine, les Etats-membres ont
convenu de mettre à la disposition de l'ECOMOG des unités
dotées de moyens adéquats, des armées de terre et de
l'air, de la marine, de la gendarmerie, de la police, ou de toutes autres
formations militaires, para-militaires ou civiles pour l'accomplissement des
missions assignées. Ainsi, chaque Etat membre fournit à 1'ECOMOG
une unité dont la taille est déterminée en concertation
avec les autorités de la CEDEAO.40(*)
Le Secrétariat Exécutif, par
l'intermédiaire des départements concernés, et en
concertation avec les Etats-membres, contribue à la formation des
personnels civils et militaires susceptibles de faire partie des unités
en attente dans les différents domaines, notamment en droit
international humanitaire, et en droit de l'Homme. Par ailleurs, le personnel
civil et militaire non armé fourni par les Etats-membres peut être
déployé séparément du personnel armé ou
conjointement avec lui. Il est chargé, entre autres, de la supervision
et du contrôle des cessez-1e-feu, du désarmement, de la
démobilisation, des élections, du respect des droits humains et
des activités humanitaires et examine les plaintes qui lui sont soumises
et entreprend toutes autres activités conformément aux termes de
référence déterminés par le Conseil de
Médiation et de Sécurité41(*).
En ce qui concerne les interventions humanitaires, la
CEDEAO prend une part active dans la coordination et la conduite de
l'assistance humanitaire. Elle intervient pour soulager les populations et
restaurer le cours normal de la vie dans des situations de crise, de conflit et
de catastrophe. A cet égard, elle développe ses propres
capacités en vue d'entreprendre efficacement des actions humanitaires
tant par mesure de prévention que pour la gestion des conflits. Dans le
cas où l'environnement d'un Etat membre est sérieusement
dégradé, des mesures appropriées sont prises pour le
réhabiliter42(*).
Pour la réalisation de toutes ces missions, la CEDEAO peut collaborer
avec d'autres institutions et organisations pour la gestion des crises,
à savoir, les ONG nationales, régionales et les organisations
religieuses ; l'UA, l'ONU et ses agences ainsi que toutes les autres
organisations internationales intervenant dans le domaine humanitaire43(*).
Etant donné que le protocole relatif au
mécanisme de prévention, de gestion, de règlement des
conflits, de maintien de la paix et de la sécurité
privilégie plus l'approche curative qui fait qu'il est
déclenché qu'après l'existence d'un conflit, la CEDEAO
avec une vision anticipative, a été contrainte, le 21
décembre2001, d'adopter un protocole sur la Démocratie et la
Bonne Gouvernance, additionnel au protocole relatif au mécanisme de
prévention, de gestion, de règlement des conflits, de maintien de
la paix et de la sécurité qui privilégie l'approche
préventive et a pour objectif de prendre en compte les causes politiques
profondes des conflits, de l'instabilité et de
l'insécurité.
§4. PROMOTION DE LA
DÉMOCRATIE ET DE LA BONNE GOUVERNANCE
L'adoption du Protocole sur la démocratie et la
bonne gouvernance est une des grandes réalisations de la CEDEAO en
faveur de la paix et la sécurité ouest-africaine. Ce protocole
est une référence juridique contraignante et fondamentale pour
les Etats-membres. Par ce protocole et à la demande de tout Etat-membre,
la CEDEAO peut directement apporter aide et assistance à l'organisation
et au déroulement des élections et peut envoyer une mission de
supervision ou d'observation des élections dans le pays concerné
(article 12). Elle peut prononcer des sanctions à l'encontre d'un Etat
en cas de rupture de la démocratie ou de violation massive des droits de
l'homme dans cet Etat. Ces sanctions n'impliquent toutefois pas de sanctions
militaires.
Ce protocole établit donc un lien clair et direct
entre le respect des normes démocratiques et de bonne gouvernance dans
les Etats membres et les perspectives de paix et de sécurité dans
l'espace communautaire ouest-africain. Il définit des principes
constitutionnels communs à tous les Etats membres de la CEDEAO. Ces
principes incluent, entre autres, la séparation des pouvoirs
exécutifs, législatifs et judiciaires, la valorisation et le
renforcement des parlements ; l'indépendance de la justice ;
et l'interdiction de tout changement anticonstitutionnel ainsi que tout mode
non démocratique d'accession ou de maintien au pouvoir44(*). Le protocole définit
également une série de principes concernant les élections
dans les pays membres et le rôle d'observation et d'assistance de la
CEDEAO en la matière mais aussi le champ d'action de cette
dernière. Il prévoit par exemple qu'« aucune réforme
substantielle de la loi électorale ne doit intervenir dans les six mois
précédant les élections, sans le consentement d'une large
majorité des acteurs politiques » ; et que « les organes
chargés des élections doivent être indépendants
et/ou neutres et avoir la confiance des acteurs et protagonistes de la vie
politique »45(*).
Le président de la commission de la CEDEAO peut
envoyer dans le pays concerné une mission de supervision ou
d'observation des élections. A l'approche d'une élection devant
se tenir dans un Etat-membre, il envoie dans le pays concerné une
mission exploratoire destinée à collecter tous les textes devant
régir les élections concernées, toutes informations et
tous éléments caractérisant le cadre et les conditions
dans lesquelles devront se dérouler les élections ; réunir
toutes les informations utiles relatives aux candidats ou aux partis politiques
en compétition ; rencontrer tous les candidats, les responsables des
partis politiques et autorités gouvernementales et autres responsables
compétents ; évaluer l'état des préparatifs ;
recueillir tous éléments utiles à une exacte
appréciation de la situation.46(*) Ces missions d'observation visent avant tout à
empêcher que les tensions habituelles en période électorale
ne dégénèrent en conflits violents.
Le protocole additionnel vise également à
fixer des normes communautaires en matière de rôle de
l'armée et des forces de sécurité dans un cadre
démocratique. Il affirme notamment que « l'armée et les
forces de sécurité publique sont soumises aux autorités
civiles régulièrement constituées », interdit
« l'usage des armes pour la dispersion des réunions ou des
manifestations non violentes », n'autorise que « le
recours à l'usage de la force minimale et/ou proportionnée en cas
de manifestations violentes » et interdit « en tout
état de cause le recours à des traitements cruels, inhumains et
dégradants ».47(*) Il indique que les personnels des forces
armées et ceux des forces de sécurité publique doivent
recevoir dans le cadre de leur formation une éducation à la
constitution de leur pays, aux principes et règles de la CEDEAO, aux
droits de la personne, au droit humanitaire et aux principes de la
démocratie.48(*) Il
inclut, enfin, un dispositif de sanctions que la conférence des Chefs
d'états et des gouvernements peut prendre à l'encontre d'un Etat
membre en cas de rupture de la démocratie par quelque
procédé que ce soit et en cas de violation massive des droits de
la personne.49(*)
Sur proposition du conseil de médiation et de
sécurité, il peut être décidé à un
moment approprié de prendre des sanctions qui peuvent aller par
graduation du refus de soutenir les candidatures présentées par
l'Etat membre concerné à des postes électifs dans les
organisations internationales à la suspension de l'Etat concerné
de toutes les instances de la CEDEAO en passant par le refus de tenir toute
réunion de la CEDEAO dans l'Etat concerné. En cas de suspension,
le protocole prévoit que la CEDEAO continuera « de suivre,
d'encourager et de soutenir tout effort mené par l'Etat membre suspendu
aux fins de retour à la vie institutionnelle démocratique
normale ».50(*)
Suite aux différents conflits dans la sous
région la CEDEAO a été contraint d'adopter un
règlement définissant le cadre de prévention des conflits
qui vise à clarifier la stratégie mise en oeuvre des principes
contenus dans les deux protocoles de 1999 et 2001.
§5. STRATÉGIES DE
PRÉVENTION DES CONFLITS DE LA CEDEAO
La CEDEAO, au niveau de la conférence des Chefs
d'Etats et des gouvernements mais aussi au niveau du secrétariat
exécutif, a été amenée à se prononcer sur la
qualité des processus électoraux dans un certain nombre de pays
membres ainsi que sur les modes anticonstitutionnels d'accession au pouvoir
à l'instar de la situation du Togo au lendemain du décès
du président Gnassingbé Eyadema(2005). L'éclatement d'un
conflit armé en Cote d'Ivoire, la 2ème puissance
économique de la communauté (septembre 2002), le retour de la
guerre au Liberia avant l'exil de Charles Taylor en Aout 2003, la poursuite de
la stabilisation de la Sierre Leone, la détérioration de la
situation politique et économique de la Guinée, les
élections de 2005 en Guinée-Bissau et la permanence des tensions
politico-militaires dans ce pays sur fond de développement d'un trafic
international de drogue, ont donné peu de répit aux organes de la
CEDEAO et mis immédiatement à l'épreuve des faits les
ambitions du mécanisme.51(*)
Au terme d'une série de consultations et des
réunions d'experts, le Conseil de Médiation et de
Sécurité a adopté le 16 janvier 2008 un règlement
définissant le cadre de prévention des conflits de la CEDEAO
(CPCC), un document qui vise à clarifier la stratégie de mise en
oeuvre des principes contenus dans les deux protocoles de 1999 et 2001. Selon
ce document, la CEDEAO a, obtenu un succès remarquable dans
l'accomplissement de son mandat en réussissant à contenir des
conflits violents au sein de la région et en menant des
opérations de prévention des conflits à travers des
initiatives de diplomatie préventive telles que : missions
d'information, la diplomatie d'apaisement, pressions diplomatiques et
médiation52(*). Il
est aussi indiqué que la CEDEAO a mis en place plusieurs organes
prometteurs en matière de prévention des conflits en vue de
soutenir son mandat notamment le système d'alerte
précoce53(*), le
conseil de médiation et de sécurité, le conseil des sages
et des médiateurs spéciaux ; mais que la mise en oeuvre de
ces aspects préventifs a parfois souffert de l'absence d'une approche
stratégique qui se caractérise par une faible coordination
interne, une sous-utilisation et une mauvaise canalisation des capacités
humaines existantes ainsi que le déploiement d'instruments
limités.54(*) On
peut également y lire que la distribution des rôles et les partage
des responsabilités entre la CEDEAO et les membres, entre les Etats
membres et la société civile et entre la CEDEAO et les
partenaires externes est faible, ce qui a pour conséquence l'utilisation
d'instruments limités, des opérations fragmentaires et des
interventions tardives par rapport aux crises.55(*)
Le CPCC a été alors conçu pour
être « une stratégie complète et
opérationnelle de prévention des conflits et d'édification
de la paix permettant au système de la CEDEAO et aux Etats membres de
mobiliser les ressources humaines et financières à
l'échelle régionale (y compris la société civile et
le secteur privé) et internationale dans leurs efforts orientés
vers la transformation créative des conflits », « un
canevas pour l'accroissement de la cohésion et de la synergie entre les
départements compétents de la CEDEAO sur les initiatives de
prévention des conflits » et « une
référence pour le développement basé sur le
processus avec les parties prenantes régionales et internationales, y
compris le secteur privé, la société civile, les
communautés économiques régionales africaines, les
systèmes de l'UA et des nations unies, ainsi que les partenaires aux
développement en vue d'assurer la prévention des conflits et les
interventions concrètes de construction de la paix ».56(*)
Décliné en quatorze composantes, à
commencer par l'alerte précoce57(*), la diplomatie préventive58(*) ; la démocratie et la
gouvernance politique ; droits de l'homme et règle de droit ;
Médias ; Gouvernance des Ressources Naturelles ; Initiatives
Transfrontalières ; Gouvernance Sécuritaire ; Désarmement
Pratique ; Femmes, Paix et Sécurité ; Promotion de la Jeunesse ;
Force de Maintien de la Paix de la CEDEAO ; Assistance Humanitaire ;
éducation à la Paix (Culture de la paix), le CPCC est
désormais le document de base sur lequel s'appuie la commission de la
CEDEAO pour mobiliser l'assistance de ses partenaires extérieurs dans le
domaine de la paix et de la sécurité.
Compte tenue de l'ampleur des conflits dans la
région, notre second chapitre va s'appesantir sur la
nécessité de gestion de ces conflits tout en faisant une analyse
minutieuse des conflits libériens et ivoiriens et leurs
résolutions par la CEDEAO.
CHAPITRE II : DES CONFLITS
« LIBERO-IVOIRIENS » ET LA NECESSITE DE LEUR RESOLUTION PAR
LA CEDEAO
La fin de la guerre froide n'a pas marqué le terme ni
des guerres interétatiques ni des guerres civiles en Afrique. Dans bien
des cas, ces guerres inter ou transétatiques sont intimement
liées à des conflits civils, avec lesquels elles forment un
système. Si elle n'en était pas épargnée et
l'insécurité n'y constitue pas un phénomène
nouveau, l'Afrique de l'Ouest n'a pas toutefois connu de guerres
interétatiques d'une réelle gravité. Au niveau interne par
contre, le Liberia et la Côte d'Ivoire, deux pays de la
sous-région, ont connus des troubles très graves avec des
violations graves et massives de droits humains. Ces dernières ont
entrainé des déplacements des populations à
l'intérieur comme à l'extérieur de leurs pays respectifs
et ont déstabilisé l'ensemble de la région.
Dans cette partie, nous nous proposons de faire une
étude des conflits armés qui se sont déroulés dans
ces deux pays en dégageant les stratégies mises sur pied par la
CEDEAO pour leur résolution.
Section I. DES CONFLITS
« LIBERO-IVOIRIENS »
Les conflits « libéro-ivoiriens »
ont été considérés par beaucoup comme les plus
meurtriers dans la zone ouest-africaine. Nous nous proposons de faire au
travers de cette section, une analyse succincte de ces deux cas de conflits.
§1. DES CONFLITS
LIBERIENS
Le Liberia a été secoué par des conflits
considérés comme faisant partie des plus meurtriers de la
sous-région. En effet, fondé en 1822 par la Société
Américaine de Colonisation (ACS), organisation philanthropique dont la
mission était d'aider les esclaves américains victimes de la
traite transatlantique à revenir sur leur continent d'origine, le
Libéria est d'abord gouverné par les colons
Américano-Libériens et leur descendance. Cette gouvernance
l'était au détriment de la majorité autochtone. Une fois
l'indépendance déclarée en 1847, les
Américano-Libériens conservent le pouvoir pendant plus d'un
siècle, jusqu'en 1980, notamment à travers le True Whigs party
(TWP). La majorité autochtone n'obtiendra le statut de citoyen qu'en
1904, et la politique menée envers les autochtones tout au long de cette
période est caractérisée par leur asservissement à
un régime de travail obligatoire, notamment dans les grandes
plantations. Il ressort alors que les conflits
libériens ont principalement pour origine profonde l'histoire complexe
des relations entre la communauté des descendants des colons
(américano-libériens) et la communauté autochtone
(native). A cela s'ajoutent le faible taux d'alphabétisation de cette
dernière, la pauvreté massive qui existe dans les régions
rurales et le sentiment que les fruits du labeur national vont essentiellement
à la population de Monrovia.59(*)
La première guerre civile (1989-1997) est le
résultat de l'accumulation d'un certain nombre d'injustices et de
malversations créées et entretenues par les divers régimes
qui se sont succédé à la tête de l'Etat depuis sa
création par les esclaves afro-américains affranchis. Ces
différentes pratiques sont contenues dans la constitution du 26 juillet
1847 qui instaure officiellement un système
ségrégationniste appelé « apartheid
libérien »60(*). Ce système a favorisé la
suprématie des afro-américains, pourtant très minoritaires
(1% de la population libérienne), dans tous les domaines (secteurs
économiques et socio-politiques).61(*) Sur le plan socio-politique, en effet, la
constitution n'a réservé la citoyenneté libérienne
qu'aux « seuls noirs et descendants de noirs ».62(*) Ceux-ci deviennent, du coup,
les seuls bénéficiaires des différents avantages en
découlant socialement. Ils sont les seuls à avoir droit à
la prospérité, à l'habitation, à la
propriété qui subordonne le droit de vote ou celui de participer
à toutes activités politique ou administratives.63(*)
Dans le domaine économique, les afro-américains
détiennent aussi tous les leviers du pouvoir et grâce à
leur mainmise sur les terres, le commerce et sur les autres secteurs
clés de l'économie, ils se sont constitués en haute
bourgeoisie et effectuaient leurs échanges dans les centres urbains avec
le dollar américain étant la monnaie locale. Les autochtones, de
leur coté, sont encore à l'étape primitive
caractérisée par la vie sauvage qu'ils mènent à
l'intérieur du pays. Le troc étant leur mode
d'échange.64(*) Les
conséquences de ces discriminations créent des fossés
énormes dans le chef de ces deux communautés qui composent le
Libéria et, face à ces injustices, la majorité autochtone
a multiplié des contestations et des révoltes de toutes sortes
pour sortir du joug afro-américain.
En 1980, le sergent Samuel Doe, issu de l'ethnie Krahn,
mène un coup d'État contre le régime de William Tolbert
à la suite des émeutes contre la hausse du prix de la nourriture.
M. Tolbert est exécuté avec 13 de ses ministres. Il s'en suit dix
années d'un régime autoritaire sous lequel la situation
économique et démocratique du pays se détériore
significativement.65(*)
Pourtant, à l'accession au pouvoir, les nouvelles autorités se
sont fixé une mission de « rédemption » qui
consistait, dans un premier temps, à réduire le fossé qui
existait entre les afro-américains et les autochtones et, dans un second
temps, à lutter contre la corruption qui minait les 19
précédents régimes. Malheureusement, la mise en
application de ce programme s'est soldée par une fureur vengeresse
doublée d'une chasse aux afro-américains. L'espoir suscité
par l'arrivée au pouvoir d'un Krhan chez les autochtones n'a pas
duré longtemps. Le désenchantement est devenu total en ce sens
que le président a privilégié les siens en les nommant
à des postes clés dans tous les secteurs. La corruption est
devenue le fondement même du pouvoir.66(*) L'opposition n'existe plus pour critiquer et
contrebalancer le pouvoir. Le pays va alors connaitre une instabilité
totale avec toutes les formes de violations des droits de l'homme. Le bilan
socio-politique voire économique des dix années de règne
du régime de Samuel Doe est comparable à celui d'un siècle
des afro-américains. En fait, le Liberia est devenu
« tributaire de background ».67(*) Il est
devenu « Etat-individu ». Le président se
confond désormais à l'Etat. On assiste à une impossible
dissociation de la puissance publique du rôle - émanant de la
volonté de la collectivité principalement autochtone -, du mode
de vie individuel du Chef de l'Etat. Tout cela a causé le
désastre libérien qui conduit au premier conflit ouvert en
1989.
En effet, le conflit commence lorsqu'un commando armé
inconnu attaque, le 24 décembre 1989, un poste de douane à Buato,
un petit village situé dans le comté de Nimba, région
minière, au Nord près de la frontière avec la Côte
d'Ivoire68(*). La guerre
civile oppose les soldats gouvernementaux, composés de Khrans, ethnie de
Doe, installés dans la région, aux combattants du NPFL de Charles
Taylor69(*) estimés
à quelques 5000 hommes, tous des Manos et des Ghios. Très vite,
elle a pris une tournure ethnique avec pour conséquences beaucoup
d'exactions commises dans les deux camps.70(*) Le conflit évolue à l'avantage des
freedoms fighters (les combattants de la liberté), les hommes de Charles
Taylor, qui contrôlent 90 % du territoire en dehors de la capitale
Monrovia, après six mois de combat.
La capitale est sauvée par le déploiement, sous
impulsion du Nigéria, d'une force d'interposition de la CEDEAO
dénommée Groupe d'Observation de la CEDEAO (ECOMOG). Si elle
empêche le NPFL de prendre la capitale, cette intervention crée
une division entre pays anglophones et francophones au sein de l'organisation.
En conséquence, on assiste à un prolongement du conflit71(*). Il faut noter
également que les troupes rebelles n'étaient pas en mesure de
prendre la capitale malgré la supériorité de la
capacité militaire du NPFL par rapport à l'armée nationale
(AFL) à cause de la dispute entre Taylor et le Prince Johnson, un ancien
membre de l'AFL, qui forma l'INPFL. Cette dissension fut couteuse pour le NPFL
puisque Johnson entraina avec lui une grande partie des membres de
l'unité des forces spéciales qu'il dirigeait. Toutefois, ce sont
les rebelles du NPFL qui occupent la quasi-totalité du territoire
libérien et assurent le contrôle des différents secteurs
économiques clés du pays. La persistance du conflit est une
occasion pour les différentes factions de tirer le maximum de profit des
ressources minières. Chacune d'elles n'hésite pas à «
s'associer avec une ou plusieurs multinationales pour exploiter les richesses
naturelles que recèle son territoire ».72(*) Pour Taylor, cette guerre est
un moyen de parvenir au pouvoir alors que pour le régime Doe, une
occasion pour réprimer à jamais les opposants de la région
de Nimba afin d'assurer la sécurité du régime. La
satisfaction des objectifs contradictoires de ces deux antagonistes sera
à la base des massacres, pillages et atrocités de tous genres.
L'on comptait, du jour au lendemain, des dizaines de milliers des victimes
déplacées internes et des refugiés73(*).
En août 1990, lors d'une réunion en Gambie -
boycottée par le NPFL -, la CEDEAO facilite la nomination d'Amos Sawyer
à la tête d'un gouvernement d'union nationale. M. Taylor et
plusieurs autres factions refusent de collaborer avec ce gouvernement
transitoire et les combats entre les forces armées du Libéria et
l'INPFL continuent. Samuel Doe est finalement capturé, torturé
puis exécuté en septembre 1990 par Prince Yormie Johnson, qui
s'auto-déclare par la suite Chef d'État. En novembre de la
même année, lors d'une réunion des chefs d'États de
la CEDEAO, l'accord de cessez-le-feu de Bamako est tout de même
signé entre les forces armées du Libéria, l'INPFL et le
NPFL. Le gouvernement d'union nationale d'Amos Sawyer est formellement mis en
place à Monrovia. La période qui suit cet accord est
ponctuée de plusieurs accords de cessez-le-feu aussitôt
violés par l'une ou l'autre partie. Un autre groupe, l'ULIMO, apparait
en 1991 en Sierra Leone et combat dans le nord-ouest du Libéria contre
le NPFL de Taylor. Un accord de paix signé en octobre 1991 à
Yamoussoukro amène toutefois à la reddition de l'INPFL, qui sera
dissout en septembre 199274(*).
Les mêmes enjeux furent à la base de la seconde
guerre civile qui a secoué le pays de 2000 à 2003. Malgré
les efforts de consolidation de la paix du BANUL75(*), le gouvernement et les
dirigeants de l'opposition se révèlent incapables de surmonter
leurs différends. Les efforts de réconciliation nationale sont
sapés par des violations systématiques des droits humains, le non
respect des droits de l'opposition et l'absence de réformes dans le
secteur de la sécurité. En outre, plutôt que de s'atteler
à la tâche de reconstruire le pays, le président Taylor
appuie la rébellion du RUF au Sierra Leone. En effet,
éclaté en 2000 dans le comté de Loffa suite aux attaques
du « Libériens Unis pour la Réconciliation et la
Démocratie » (LURD), le conflit a véritablement pris de
l'ampleur en 2002 et surtout en 2003 avec la naissance du Mouvement pour la
Démocratie au Liberia (MODEL). Ces deux se battaient contre les troupes
gouvernementales de Charles Taylor.76(*) Comme pour la première guerre, le but
poursuivi par les deux parties sont précis. Pour les rebelles du LURD et
du MODEL, Charles Taylor doit quitter le pouvoir. Pour les troupes
gouvernementales, le régime de Taylor doit être sauvé
à tout prix. L'intransigeance des uns et des autres a donné lieu
à d'intenses combats dans la capitale toujours épargnée
par les actes de violences jusqu'à la signature le 17 juin 2003 par les
protagonistes, sous l'égide de la CEDEAO, d'un accord de cessez-le-feu
à Akossombo, au Ghana. Cet accord a été aussitôt
violé et le LURD et le MODEL qui ont poursuivi leur avancée dans
la capitale jusqu'au mois d'août avec toutes les conséquences qui
en découlent.
En terme des conséquences, les deux conflits qui ont
secoué le Liberia de par leurs ampleurs, ont occasionné beaucoup
de dégâts sur le plan humanitaire avec des nombreuses victimes
(estimées à 150000 pour seulement la première guerre
civile77(*)) et ont pris
des dimensions sous-régionales avec parfois des tensions dans les Etats
frontaliers.
Pour le cas de la Guinée Conakry par exemple, les
villages frontaliers subissent régulièrement les assauts des
combattants qui n'hésitent pas à y établir leurs bases.
Selon une enquête d'Amnesty International publiée en 1995, «
les combattants de l'ULIMO ont massacré en janvier 1995, vingt huit
civils lors d'une double attaque contre des villes situées du
côté guinéen de la frontière ».78(*) En ce qui concerne la
Côte d'Ivoire, la force ouest africaine ECOMOG, voulant frapper les
positions des hommes de Charles Taylor, a à deux reprises (le 27
février et le 27 mai 1993) bombardé des villages ivoiriens
situés près de la frontière libérienne. En juin
1995, des affrontements avaient eu lieu entre réfugiés
libériens et autochtones ivoiriens toujours en Côte d'Ivoire. Le
bilan de ces violences faisait état de trente personnes tuées
dont une vingtaine d'Ivoiriens.79(*)
Outre les armes qui circulent facilement et de façon
très illicite dans la sous-région ouest africaine du fait de la
guerre civile libérienne, la partie occidentale du continent est aussi
confrontée à d'autres trafics notamment, le trafic d'enfants et
de la drogue. Plusieurs enfants sont soit enlevés soit trafiqués
par les parties en conflit. Tous drogués, ils sont envoyés sur
les différents fronts pour combattre. D'autres par contre, notamment les
jeunes filles sont utilisées comme des objets sexuels. 80(*)
Du côté ivoirien, le conflit a connu plusieurs
phases entre autre, celle de 2002 et de 2010.
§2. DU CONFLIT IVOIRIEN
La Côte d'Ivoire est considérée comme la
seconde puissance économique de la sous-région ouest-africaine.
Elle a aussi connu une période des conflits plus meurtriers qui ont
perturbé toute la sous-région. Ils se sont étendus sur une
période assez longue avec des moments de rebondissements très
remarquables dont les effets marquent encore les mémoires à ce
jour. Le premier président ivoirien, Félix Houphouët Boigny,
prônait une politique d'ouverture qui favorisa l'immigration. Cette
dernière était plus facile pour les ressortissants de la
sous-région ouest-africaine. A sa mort, le 7 décembre 1993, le
pays entra dans une crise multiforme. Une lutte de succession se
déclenche entre le Premier Ministre Alassane Ouattara et le
président de l'Assemblée nationale M. Henri Konan
Bédié. Celle-ci sera finalement remportée par le second en
vertu de la disposition constitutionnelle qui prévoyait que ne peut
accéder à un poste politique qu'un ivoirien d'origine.81(*)
En
décembre
1994, sous un climat
déjà tendu, le Code électoral est révisé.
Dans la révision, il est imposé aux candidats à la
présidence de prouver leur ascendance ivoirienne, garante de leur
citoyenneté. D'où, l'introduction d'un nouveau concept :
« l'ivoirité » élaboré et
théorisé par l'entourage de Bédié.82(*) Cette notion a
été interprétée par nombre de politiques et
d'analystes comme poursuivant avant tout un but politique, celui de justifier
l'exclusion de certains opposants de la course électorale, La preuve de
la négation de cette nationalité ivoirienne était pourtant
difficile à établir parce que sous la présidence de
Félix Houphouët-Boigny, pour des fins électoralistes, les
cartes d'identité avaient été largement distribuées
à un grand nombre d'immigrants vivant sur le territoire
ivoirien.83(*) Le scrutin
présidentiel du 22 octobre 1995 est organisé sous de fortes
tensions et soulèvements populaires. Boycotté par l'opposition,
il consacra la victoire de Bédié avec 95,25 % des voix. Le chef
d'Etat-major de l'armée, le général Robert
Guéï, est limogé suite à son refus d'étouffer
de manière énergique les manifestations de protestation qui
entourent l'échéance électorale. 84(*)
Sur fond de préparation de la nouvelle
échéance électorale et de tensions sociales croissantes,
accentuées par la suspension de l'aide internationale en 1998 à
la suite d'un scandale financier, la question de l'ivoirité s'amplifie,
menant à des dérives xénophobes. Les accrochages entre les
différentes communautés présentes sur le territoire
national se multiplient et prennent des tournures parfois violentes.85(*) Des opposants au régime
en place, le plus visé étant ici l'ancien premier ministre et
concurrent à la succession de Félix Houphouët Boigny,
Alassane Dramane Ouattara. Il était question d'émettre des doutes
quant à sa réelle nationalité ivoirienne étant
entendu qu'il avait poursuivi ses études au Burkina Faso, a
été envoyé occuper de hautes fonctions sous la houlette
Burkinabé.
L'histoire de la Côte-d'Ivoire bascule le 24
décembre 1999. Le pays plonge dans une spirale de violence à la
suite d'une mutinerie au sein de l'armée86(*). Un coup d'Etat porte au pouvoir le
général Robert Guéï et contraint le président
Bédié à l'exil en France. Le général
Robert
Guéï reste au pouvoir jusqu'à la tenue de nouvelles
élections. Malgré le coup d'Etat, la question de
l'ivoirité ne faiblit pas. Elle reste utilisée dans la
politique du pays pour limiter la vie sociale des Ivoiriens qualifiés
« d'origine douteuse ».
Une nouvelle Constitution est adoptée par
référendum le 23 juillet 2000. Elle stipule que seul les
Ivoiriens nés de parents ivoiriens peuvent se présenter à
une élection présidentielle. Le débat se focalise
notamment sur la mention « et » de
l'article 35 qui dispose : « Le candidat à
l'élection présidentielle [...] doit être ivoirien
d'origine, né de père et de mère
eux-mêmes ivoiriens d'origine ». Une fois de plus, Alassane
Ouattara se sent visé. Il se déclare toutefois candidat à
la présidentielle nonobstant la conjonction
« et » ou
« ou » retenue dans la nouvelle loi
fondamentale.
L'élection présidentielle du 22 octobre 2000 se
déroule dans des conditions particulièrement tendues.87(*) Elle est remportée par
Laurent Gbagbo. Quant aux élections législatives de
décembre 2000, elles sont boycottées par le RDR à la suite
à l'écartement de Ouattara. Une tentative de coup d'Etat est
déjouée dans la nuit du 8 au 9 janvier 2001 et l'implication de
ressortissants étrangers et de certains pays voisins est
dénoncée par le gouvernement. Une nouvelle vague d'affrontements
éclate entre civils dont certains bénéficient de la
complicité des forces de l'ordre. La campagne xénophobe
menée dans le camp des différents hommes politiques à
renfort médiatique et le besoin accru des populations musulmanes du nord
de se sentir ivoiriennes à part entière par l'obtention de papier
d'identité ont préparé le terrain à la mutinerie du
19 septembre 2002.88(*) Un
véritable conflit éclate alors en Côte d'Ivoire. Le pays
est coupé en deux : le nord sous le contrôle de la
rébellion et le sud entre les mains du gouvernement.
Considérée comme la résultante d'une
certaine injustice accumulée depuis des années, la guerre civile
trouve ses racines dans le déséquilibre socio-politique et
surtout économique qui a toujours caractérisé la
Côte d'Ivoire. Profitant d'une visite officielle à Rome du
président Laurent Gbagbo, un soulèvement d'une partie de
l'armée a eu lieu dans la nuit entre le 18 et le 19 septembre 2002. Les
mutins ont lancé l'offensive dans les villes de Korhogo (chef-lieu du
nord du pays, à une centaine de kilomètres de la frontière
ivoiro-burkinabé), de Bouaké (principal carrefour au centre du
pays) et d'Abidjan (capitale économique du pays, située sur la
côte).89(*) La
mutinerie se solde par l'élimination, dans la nuit du 19 au 20
septembre, du général Robert Guéï et du ministre de
l'intérieur, Emile Boga Doudou. Alassane Ouattara, Henri Konan
Bédié, Mathias Doué, chef d'Etat major des armées
ivoiriennes et Moise Lida Kouassi ministre de la défense s'en sont
sortis malgré la visite des tueurs.90(*) Les affrontements continuèrent essentiellement
dans le nord et l'ouest du territoire menant, dans les jours suivants, à
des combats d'envergure, notamment dans les régions de Bouaké et
de Daloa, ville d'importance stratégique pour le contrôle de
l'activité de production du cacao.91(*)
Dans les semaines qui ont suivi la tentative de coup de force
du 19 septembre, plusieurs villes ont été le théâtre
d'affrontements armés entre les Forces armées nationales de
Côte-d'Ivoire (FANCI) et les forces rebelles du Mouvement patriotique de
Côte-d'Ivoire (MPCI), appellation apparue officiellement en début
du mois d'octobre. Alors que les efforts de médiation entre le
gouvernement et les rebelles du MPCI avaient déjà obtenu les
premiers résultats, deux nouveaux groupes armés ont fait leur
apparition. Ils déclenchent des combats contre l'armée loyaliste
à Man, dans l'ouest du pays, le 28 novembre. Ces deux mouvements
rebelles, le Mouvement populaire ivoirien du Grand Nord (MPIGO) dirigé
par le sergent N'Dri N'Guessan (alias Félix Doh) et le Mouvement pour la
justice et la paix (MPJ) guidé par le commandant Gaspard Déli,
étaient constitués principalement de troupes libériennes
commandées par des éléments de la rébellion du MPCI
(Kass, Adam's) et des militaires partisans de Gueï. Ils se sont
affrontés aux FANCI à plusieurs reprises et ont pris le
contrôle d'une partie du territoire occidental ivoirien, notamment les
villes de Man, Grabo, Dadané et Touba92(*). Bien que les rebelles des trois mouvements aient
toujours revendiqué une autonomie totale des uns par rapport aux autres,
leurs délégations politiques ont systématiquement
parlé d'une seule voix lors des négociations menées au
cours des différentes étapes de la crise. Ayant pris
l'appellation de « Forces nouvelles », elles ont consacré la
scission du pays en deux zones administratives.93(*)
À partir de septembre 2002, la Côte d'Ivoire se
trouve coupée en deux de part et d'autre d'un axe nord/sud. De 2002
à 2007, plusieurs accords de paix sont signés entre les
belligérants, mais sans parvenir à véritablement
régler le conflit ivoirien. L'accord dit « accord politique de
Ouagadougou » signé en 2007 par Laurent Gbagbo et les Forces
nouvelles fait renaitre l'espoir d'une sortie de crise heureuse dans le pays
n'a pas empêché que le pays, marqué par des crises de
légitimité, de sombré dans un autre grand conflit à
savoir, celui de 2010. [
La communauté internationale, notamment la
représentante de la diplomatie de l'
UE et le
secrétaire général de l'
ONU, au vu de la certification
des résultats de vote par le représentant spécial de l'ONU
en Côte d'Ivoire, confirment que le vainqueur de l'élection
présidentielle est Alassane Ouattara.94(*) Une telle prise de position de la communauté
internationale incite le Premier ministre et ancien chef des
Forces
nouvelles, Guillaume à soutenir la victoire de Ouattara. Il
démissionne ainsi de son poste et est reconduit à ces fonctions
par le président considéré élu
démocratiquement, peu de temps après sa prestation de serment. Le
4 décembre, Gbagbo est tout de même[...
]investi par la Cour constitutionnelle malgré les
contestations du camp Ouatara. Le pays a désormais deux
présidents et deux gouvernements. Dans l'entre-temps, l'on annonce des
tirs et des violences en différentes parties du pays. Les
élections de novembre 2010, au lieu de prouver la pacification du pays,
ont ravivé les divisions intercommunautaires entre le nord et le sud de
l'époque transitionnelle.95(*)
Au chapitre des conséquences, l'embrasement de la
Côte d'Ivoire a constitué une véritable catastrophe non
seulement pour le pays tout entier, mais aussi et surtout pour toute la partie
occidentale de l'Afrique. En effet, depuis l'éclatement de la guerre, le
tissu politique, économique et social est détruit sur fond
d'insécurité et de méfiance ambiantes. Sur le plan social,
l'ampleur de la crise s'est mesurée par le nombre de personnes
déplacées - près de 1.300.000 selon les chiffres des
organismes spécialisés.96(*) Les communautés les plus touchées ont
été celles d'origine étrangère, bien qu'un grand
nombre d'Ivoiriens a également dû abandonner les régions
d'intenses affrontements.97(*) Parmi ces populations figurent aussi plusieurs
centaines d'habitants d'Abidjan dépossédés de leurs
logements sur ordre du gouvernement de détruire certains quartiers
précaires.98(*)
Quant au point de vue politique, la classe politique s'est retrouvée
complètement divisée. Une crise de confiance s'est
installée entre, d'un côté, les Houphouétistes
incarnés par Alassane Ouattara du RDR (Rassemblement Des
Républicains), Henri Konan Bédié du PDCI (Parti
Démocratique de Côte d'Ivoire) etc. et, de l'autre
côté, le camp de la patrie représenté par Laurent
Gbagbo du FPI (Front Populaire Ivoirien). Les premiers sont accusés
d'être à la solde des étrangers tandis que les seconds sont
accusés d'être à l'origine des discours xénophobes
et de haine. Ces divergences de vue persistantes ont expliqué les
violences et autres tueries aveugles qui ont accompagné la mutinerie du
19 septembre 2002. On a assisté à l'apparition des escadrons de
la mort qui ont semé la terreur dans les principales villes, notamment
à Abidjan.99(*) En
outre, les événements ont pris une dimension
régionale : flux de populations vers les pays voisins,
rivalités de puissances au sein de la CEDEAO, remise en cause de
l'avenir du franc CFA, débâcle économique et
financière de la sous-région, circulation intense des armes,
interactions multiples entre la Côte d'Ivoire et les autres conflits
ouverts ou mal éteints de la région.100(*)
Au regard de ce qui précède, la CEDEAO a, en
tant qu'organe de maintien de la paix dans la sous-région, tenté
de résoudre tant soit peu ce conflit.
Section II. DES ACTIONS DE LA
CEDEAO DANS LA RESOLUTION DES CONFLITS
« LIBERO-IVOIRIENS »
Face à ces situations de conflits, la CEDEAO a
utilisé deux mécanismes fondamentaux pour intervenir dans les
crises et conflits qui secouent certains Etats membres. Il s'agit de la
diplomatie et de la force avec toutes les conséquences qui en
découlent. Ces mécanismes ont permis aux dirigeants ouest
africains de faire face à la conflictualité au Liberia et en
Côte d'Ivoire.
§1. DE LA RESOLUTION DU
CONFLIT LIBERIEN PAR LA CEDEAO
Pour mieux gérer les différents conflits au
Libéria, la CEDEAO, en dehors de la diplomatie, a fait usage de la
force. Elle a dû envoyer son « bras armé » dans ce pays
en proie à la violence. Par plusieurs ballets diplomatiques, la CEDEAO a
pu ramener la paix au Liberia.
A. Comité permanent de médiation et
création de l'ECOMOG
En juillet 1990, soit huit mois après le
déclenchement de la crise, la CEDEAO a entamé de réelles
négociations visant à mettre un terme aux violences
sévissant dans ce pays membre. Au début, comme les principaux
acteurs ne voulaient pas céder, les contacts n'avaient pas abouti aux
résultats positifs. Face à cette difficulté, la
13e conférence des chefs d'Etats et de gouvernements de la
CEDEAO tenue à Banjul, en Gambie, du 28 au 30 mai 1990 a alors
décidé de la création d'un comité permanent de
médiation sur la crise libérienne. Composé de quatre
membres et placé sous la houlette du président en exercice de la
CEDEAO, le comité tint sa première réunion les 6 et 7
août 1990.101(*)
Au terme de celle-ci, il invita les parties au cessez-le-feu
et décida de mettre sur pied un groupe de contrôle dudit
cessez-le-feu - ECOMOG (Ecowas Monitoring Group).102(*) Cette force ouest-africaine
ainsi créée est composée des contingents du Nigeria, du
Ghana, de la Sierra Leone, de la Gambie, de la Guinée Conakry et,
pendant quelques temps, du Sénégal. D'un effectif de 12.000
hommes, le premier contingent de L'ECOMOG est arrivé dans la capitale
libérienne le 24 août 1990 sous le commandement du
Général ghanéen Arnold Quainoo103(*).
B. L'accord de Yamoussoukro (30 juin 1991)
Plusieurs autres rencontres ont été
organisées par la suite pour tenter de trouver de solutions durables
à ces crises. Parmi elles, l'on peut citer celle tenue le 30 juin 1991
à Yamoussoukro sous l'égide de la Côte d'Ivoire. Elle est
la première réunion qui a mis en place un comité de cinq
membres (Gambie, Togo, Sénégal, Guinée Bissau et la
Côte d'Ivoire) chargé de « veiller au respect scrupuleux du
cessez-le-feu ». Ce comité a aussi tenu trois réunions,
respectivement les 29 juillet 1991, les 16 et 17 septembre 1991 et les 29 et 30
octobre 1991104(*). Par
ailleurs, il a facilité la conclusion d'au moins quatorze accords qui,
malheureusement, sont restés sans effet.
C. L'accord de paix de Cotonou (25 juillet 1993)
Après la conclusion de pas moins de quatorze accords
qui restent sans effet, l'Accord de paix de Cotonou est finalement,
arraché par la CEDEAO et l'ONU le 25 juillet 1993 et signé entre
le gouvernement d'union nationale, l'ULIMO et le NPFL prévoyait le
désarmement, la démobilisation, la composition et la structure du
gouvernement de transition, l'amnistie générale, le retour des
réfugiés et surtout les modalités des futures
élections105(*).
Par cet accord, M. Taylor accepta de siéger au sein du gouvernement de
transition. Un sommaire programme de désarmement et de
démobilisation fut effectivement réalisé.
Pour soutenir les actions entreprises par l'organisation sous
régionale, en septembre 1993, le Conseil de sécurité de
l'ONU adopte alors la résolution 886 dans laquelle il crée la
Mission d'observation des Nations Unies au Libéria (MONUL). Cette
dernière a notamment pour mandat, le contrôle de la mise en oeuvre
de l'accord de paix par toutes les parties. Il s'agit de la première
mission de maintien de la paix que l'ONU entreprend en coopération avec
une mission de maintien de la paix déjà mise sur pied par une
autre organisation, en l'occurrence la CEDEAO.106(*) Avec l'appui des Nations
Unies, elle a conduit le processus jusqu'à la tenue des élections
générales conduisant à la victoire de Charles Taylor en
juillet 1997. Cependant, des retards dans l'application de cet accord et la
reprise des combats entre factions libériennes empêchent la tenue
des élections qui devaient avoir lieu en février/mars 1994. Au
cours des mois suivants, plusieurs accords supplémentaires, amendant et
précisant certaines dispositions de l'accord de Cotonou, sont
négociés, mettent fin à 7 ans des guerres civiles et
conduisent aux élections multipartites en juillet 1997 remportées
par Charles Taylor avec 75% de voix.
Presque la même démarche a été
utilisée lors de la seconde guerre civile (celle de 2003).
D. L'accord de cessez-le-feu d'Accra (17 juin 2003) et le
déploiement de l'ECOMIL (4 août 2003)
En effet face à l'avancée des rebelles du LURD
et du MODEL, la CEDEAO a multiplié les initiatives diplomatiques ayant
permis les négociations qui ont démarré le 4 juin 2003 au
Ghana. En juin 2003, alors qu'il est déjà sous le coup d'un
mandat d'arrêt du tribunal spécial pour son rôle dans la
guerre sierra-léonaise et que les deux groupes rebelles contrôlent
les deux tiers du pays, le président Charles Taylor annonce son
intention de quitter ses fonctions si cela peut ramener la paix au
Libéria et à condition du déploiement d'une force de
maintien de la paix.107(*) Quelques jours plus tard, le 17 juin, un accord de
cessez-le-feu est signé à Accra entre le gouvernement, le MODEL
et le LURD. Ce document définit les modalités de l'arrêt
des combats. Selon le texte de l'accord, les belligérants devaient
chercher à conclure, dans les trente jours, un accord de paix
intégral (...) concernant, entre autres, la formation d'un gouvernement
de transition qui n'inclurait pas le président en exercice.108(*) Mais ce dernier se refusa de
céder le pouvoir et affirma son « intention d'occuper [son] poste
de président jusqu'à son terme », c'est-à-dire
jusqu'à janvier 2004.
Le 22 juillet, le Conseil de médiation et de
sécurité de la CEDEAO crée une force d'avant-garde, la
Mission de la CEDEAO au Liberia (ECOMIL). Devant être
déployée au plus tard le 4 août 2003, sa mission est
d'assurer le respect du cessez-le feu conclu en juin, d'aider le gouvernement
de transition à mettre en oeuvre l'Accord, de créer une zone de
séparation entre les forces belligérantes et d'établir un
couloir de sécurité pour l'acheminement de l'aide humanitaire. Le
1er août 2003, dans la résolution 1497, le Conseil de
sécurité des Nations Unies se déclare disposé
à mettre en place une force internationale de stabilisation à
déployer au plus tard le 1er octobre 2003. En attendant cette
date, il est autorisé le déploiement de l'ECOMIL dont les
premiers éléments devraient théoriquement être
composés de 750 Nigérians, 250 Maliens et de 250 Ghanéens.
M. Taylor est poussé à la démission le 11 août 2003.
Il quitte le pays et cherche refuge au Nigeria.
E. L'accord de paix global d'Accra (18 août 2003) et la
création de la MINUL
(19 septembre 2003)
Le 18 août, le MODEL, le LURD et le gouvernement,
dirigé désormais par le vice-président Moses Blah devenu
président par intérim le 11 août 2003, signent un Accord de
paix global à Accra. C'est cet accord qui mit fin à la seconde
guerre civile libérienne. Il prévoyait la mise sur pied pour le
14 octobre d'un Gouvernement national de transition, la tenue des
élections nationales en 2005 et la demande de déploiement, sur la
base du Chapitre VII de la Charte de l'ONU, d'une force de stabilisation
chargée d'appuyer le Gouvernement transitoire national du Libéria
et de faciliter l'application de l'accord. Le 14 octobre 2003, Gyude Bryant est
désigné comme le nouveau chef du gouvernement national de
transition sous les bons offices de la CEDEAO.109(*)
Depuis lors, la situation au Libéria a
évolué rapidement. Pour sécuriser la capitale Monrovia et
ses environs, avec l'appui des Etats-Unis, le Bénin, la Gambie, la
Guinée Bissau, le Sénégal et le Togo
décidèrent aussi de renforcer les troupes déjà
présentes dans le pays avec un effectif de 3500 hommes. Cela facilita
ainsi le déploiement de 15000 casques bleus onusiens, 1115 officiers de
police civils et une composante civile pour une période initiale de 12
mois en vertu de la Résolution 1509 adoptée par le Conseil de
Sécurité le 19 septembre 2003.
Grâce à ce déploiement effectué
d'abord en renfort puis en remplacement des forces de la Mission de la
Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest au
Libéria (ECOMIL) arrivées fin mandat le 1er octobre
2003, la situation en matière de sécurité dans le pays
s'est nettement améliorée. Les quelques 3500 soldats
ouest-africains qui faisaient partie des troupes avancées de l'ECOMIL se
sont automatiquement transformés en premiers éléments
déployés de la MINUL. Comme préconisé dans l'Accord
de paix, son mandat a principalement consisté à la surveillance
de l'Accord de cessez-le-feu, à la préparation d'un programme de
désarmement et de démobilisation, à la fourniture d'une
assistance à l'aide humanitaire et à la réforme du secteur
de la sécurité.
Malgré le remplacement de la mission de maintien de
la paix de la CEDEAO par celle de l'ONU, les dirigeants ouest-africains
n'avaient pas cessé de se prononcer seuls ou conjointement avec les
Nations Unies sur le volet politique du processus de paix au Liberia. Ce
processus que l'on peut, à ce stade, qualifier de réussite
aboutit à l'organisation des élections générales le
11 octobre 2005. L'élection présidentielle fut remportée
par Ellen Johnson Sirleaf et marqua la fin définitive du conflit et
l'ouverture démocratique dans ce pays membre de la CEDEAO. Il sied de
signaler enfin que la sous-région ouest-africaine n'a pas seulement
été secouée par les conflits libériens. Un autre
cas qui intéresse ce travail est celui du conflit ivoirien dont les
péripéties sont ci-après présentées.
§2. DE LA RESOLUTION DU
CONFLIT IVOIRIEN PAR LA CEDEAO
Pour rappel, le maintien de la paix et la
sécurité constitue la condition sine qua non pour un
développement durable de la sous-région. Or, au regard de ce qui
est développé supra, le constat fait est que le conflit ivoirien
a eu des répercussions non négligeables sur l'intégration
de la sous-région. Ainsi, la CEDEAO s'est, comme pour le Libéria,
vue obligée d'intervenir en vue d'aider les protagonistes à
trouver de solutions durables à la crise. Pour ce faire, la
procédure n'a pas tellement changé.
A. Signature du cessez-le-feu du 17 octobre 2002
Déjà, une semaine après la mutinerie de
septembre 2002, soit le 26 septembre, la CEDEAO a demandé à ses
membres de se tenir prêts pour aider la Côte d'Ivoire et proposa de
tenir un sommet extraordinaire le 5 octobre 2002 à Abidjan même,
en Côte d'Ivoire. Le Sénégal, assurant la présidence
tournante, annonça un autre sommet pour le 27 septembre à Accra,
au Ghana. Onze chefs d'Etats et de gouvernements, sur les quinze que compte
l'organisation, y prirent part, avec la participation du chef de l'Etat
sud-africain, Thabo Mbeki, président en exercice de l'UA. Au terme de ce
sommet élargi à l'UA, les dirigeants ouest-africains ont mis en
place un groupe de contact sur la Côte d'Ivoire110(*). Ils ont même
décidé de l'envoi d'une force de l'ECOMOG composée d'un
effectif de 3000 à 4000 hommes.111(*)
Le 30 septembre 2002, une délégation
composée de ministres des Affaires étrangères des pays du
groupe de contact se rend à Abidjan. Elle se rend également
à Bouaké le 3 octobre 2002 pour négocier un accord de
cessation des hostilités. Cet accord est signé par les mutins,
représentés par le MPCI (Mouvement Patriotique de Côte
d'Ivoire), le 17 octobre 2002 et son entrée en vigueur est fixée
dès le lendemain.112(*)
Le 23 octobre les représentants du groupe de contact
se réunissent à Abidjan pour définir les modalités
du déploiement d'une force ouest africaine. Ils ont
désigné le chef de l'Etat togolais comme coordonnateur des
négociations inter-ivoiriennes. Le 25 octobre, les chefs d'Etat major de
la CEDEAO se réunissent à nouveau à Abidjan pour
préparer le terrain au déploiement de ladite force. La veille
déjà, ils ont rencontré les mutins dans ce sens à
Bouaké.113(*)
B. Les négociations de Lomé (12 décembre
2002) et déploiement de la MICECI (18 décembre 2002)
Les bases ayant déjà été bien
posées par la CEDEAO, les véritables négociations entre
les rebelles et le camp présidentiel (le gouvernement ivoirien)
démarrent à Lomé en novembre de la même
année, sous l'égide du président togolais. En marge de
cette rencontre, les deux autres mouvements - le MPIGO et le MJP - ont
signé un accord de cessez-le-feu avec le pouvoir en place. Les
négociations ont duré presque deux mois et ont abouti à la
signature par les deux parties, le 12 décembre 2002, d'un accord dit
« significatif ». Ce dernier prend en compte le volet politique - la
fixation des modalités devant aboutir à la tenue
d'élections libres et transparentes avec la participation de tous les
leaders politiques en Côte d'Ivoire - des revendications des rebelles.
Dans le volet militaire, par contre, le désarmement préalable
à la mise en place du volet militaire exigé par le camp
présidentiel n'a pas pu trouver de terrain d'entente entre les
protagonistes. En effet, pour les rebelles, c'est bien l'application du volet
politique qui subordonne le dépôt des armes et non le contraire.
Par ailleurs, tout au long des pourparlers, ces derniers revendiquent la
démission de Gbagbo, la reprise d'élections ouvertes à
tous et l'ouverture de trois commissions d'enquête internationales sur
les décès du général Robert Guéï, de
Balla Kéïta et de Boga Doudou comme préalable à toute
concession de leur part114(*). L'accord sera tout de même signé
malgré ces divergences de vue.
Le 18 décembre 2002, la CEDEAO tient un nouveau
sommet extraordinaire sur la Côte d'Ivoire à Dakar. Ce sommet
entérine la décision d'envoi d'une force ouest-africaine en
Côte d'Ivoire au plus tard le 31 décembre 2002. Le
général Papa Khalilou Fall du Sénégal est
nommé commandant en chef de cette force de maintien de la paix
baptisée « Mission de la CEDEAO en Côte
d'Ivoire » (MICECI). Son mandat consistait à « garantir
la sécurité et la liberté de mouvement du personnel, des
observateurs et des agences humanitaires afin d'assurer, sans préjudice
aux responsabilités du gouvernement de réconciliation nationale,
la protection de la population civile menacée directement de violence
physique dans les zones d'opération par tous les moyens mis à
leur disposition ; superviser la cessation des hostilités,
faciliter la libre circulation des personnes, biens et services et aussi
participer au processus de Désarmement, de Démobilisation, et de
Réintégration ».115(*)
Le déploiement de la force ouest-africaine de maintien
de la paix est validée par les Nations Unies à travers la
résolution 1464 du Conseil de sécurité du 4 février
2003. Un contingent de 1369 hommes composé du Bénin, du Ghana, du
Niger, du Sénégal et du Togo met effectivement pieds sur le
territoire ivoirien le 23 mai 2003. Malgré la présence de ces
forces sur le terrain, l'on enregistre encore des combats sporadiques,
insécurité grandissante doublée de la multiplicité
de milices et de mouvements rebelles.116(*)
C. L'accord de Linas-Marcoussis
C'est dans un climat très tendu que, sur initiative de
la présidence française, la Table ronde de Linas-Marcoussis et la
Conférence des chefs d'Etats africains de Paris (appelée aussi la
Conférence de la rue Kléber) ont eu lieu respectivement du 15 au
24 et du 25 au 26 janvier 2003. L'Accord qui en découle fixe les termes
d'un « consensus » politique sur le règlement du conflit. Ce
consensus est fondé sur les principes suivants : confirmation de la
cessation des hostilités ; libération des prisonniers politiques
; préservation de l'intégrité territoriale de la
Côte d'Ivoire ; restauration de l'autorité de l'Etat et respect
des institutions ; régime démocratique; mise en place d'un
gouvernement de réconciliation nationale disposant, pour
l'accomplissement de sa mission, des prérogatives de l'exécutif
en application des délégations prévues par la Constitution
jusqu'à l'élection présidentielle prévue pour
octobre 2005. Le gouvernement devait être dirigé par un Premier
ministre de consensus chargé du renforcement de l'indépendance de
la justice, de la restauration de l'administration et des services publics et
du redressement du pays, de la préparation et de l'organisation
d'élections crédibles et transparentes ; de la refondation d'une
armée attachée aux valeurs d'intégrité et de
moralité républicaine ; du regroupement et du désarmement
des forces en présence ; de la libération et l'amnistie des
militaires détenus pour atteinte à la sûreté de
l'Etat.117(*)
Pour faciliter le respect des accords, un Comité de
suivi de leur application composé d'une dizaine de représentants
de pays ou d'organisations internationales (Union européenne, Commission
de l'Union africaine, Secrétariat exécutif de la CEDEAO,
représentant spécial du Secrétaire général
de l'ONU, Organisation internationale de la Francophonie, FMI, Banque mondiale,
pays du G8 et France) devant siéger à Abidjan est mis en
place.118(*)
D. Accord d'Accra II
Après Marcoussis dont l'application est mise, une
fois de plus, à mal par les parties au conflit, les dirigeants
ouest-africains se rencontrent les 6 et 7 mars 2003 à Accra en vue de la
relance du processus. Grâce à nouvel Accord qualifié
d'Accra II, signé en présence des représentants de la
CEDEAO, de l'ONU et de l'OIF par les parties au conflit, le Premier ministre
Seydou Diarra, nommé à Paris dans la foulée des accords de
Marcoussis, prend ses fonctions le 10 mars 2003. Le gouvernement est
formé le 20 mars 2003 sans les portefeuilles de la défense et de
la sécurité car l'accord recommande la mise en place d'un Conseil
National de Sécurité composé du chef de l'Etat, du Premier
ministre et d'un représentant de chacune des Forces armées
nationales de Côte d'Ivoire (FANCI), de la gendarmerie nationale et de la
police. Ce sont ces représentants qui devaient participer à la
mise en oeuvre des fonctions du ministère de la défense et de la
sécurité intérieure.
Pendant ce temps, la MICECI s'implique dans le processus aux
côtés des forces françaises « Licorne »
pour ramener la paix sur le champ de bataille. Le 5 avril 2004, elle passe les
charges militaires aux casques bleus de L'ONUCI mise en place
conformément à la résolution 1528 du Conseil de
sécurité de l'ONU du 27 février 2004. C'est à ce
stade que prend alors fin à la mission militaire de la CEDEAO en
Côte d'Ivoire. Dorénavant l'organisation sous-régionale se
contente de concentrer ses efforts sur le dénouement politique de la
crise en participant à toutes les initiatives prises dans ce sens par
tous les partenaires du pays de Laurent Gbagbo. De ces initiatives, l'on peut
citer, entre autres, la rencontre initiée par l'ONU à Accra les
28-29 et 30 juillet 2004 qui a débouché sur les accords d'Accra
III fixant un échéancier au programme de Désarmement,
Démobilisation Réinsertion (DDR) et l'accord de Pretoria du 6
avril 2005 où les parties s'engagèrent à la «
cessation immédiate et définitive de toutes les hostilités
».
E. Sommet d'Abuja (6 octobre 2005)
Au cours de ce sommet, les dirigeants ouest-africains ont
décidé de proroger pour un an le mandat du président de
Côte d'Ivoire après la fin officielle de son mandat. La
décision a été entérinée par l'UA et l'ONU
(résolution 1633). En application à cette décision,
Charles Konan Banny, l'ancien gouverneur de la BCEAO (Banque Centrale des Etats
de l'Afrique de l'Ouest) est nommé Premier ministre avec tous les
pouvoirs le 4 décembre 2005.119(*) Le même schéma a été
retenu en octobre 2006 et entériné, une fois de plus par l'UA et
l'ONU (résolution 1721 du 1er novembre 2006) à la suite du retard
observé dans l'application des autres volets des différents
accords.
F. Accord de Ouagadougou (4 mars 2007) et
démantèlement de la zone de confiance
En dépit de tous ces efforts, la Côte d'Ivoire,
toujours coupée en deux, vit une situation qualifiée ni de paix,
ni de guerre. C'est dans ce climat que, le 19 décembre 2006, Laurent
Gbagbo revient sur l'idée de « dialogue direct » avec
l'ex-rébellion. Après de nombreux ballets diplomatiques, son
projet fait l'objet de débat lors du sommet de la CEDEAO et de l'UEMOA
(Union Monétaire et Economique Ouest Africaine) des 19 et 20 janvier
2007 à Ouagadougou. Le sommet choisi le chef de l'Etat burkinabé,
Blaise Compaoré, président en exercice de la CEDEAO, comme
facilitateur de ce dialogue direct. Les négociations démarrent
effectivement le 5 février 2007 et aboutissent à la signature, le
4 mars 2007, d'un accord dit « Accord politique de Ouagadougou » par
les forces nouvelles et le camp présidentiel. Le document a
prévu, d'abord, la création d'un Centre de Commandement
Intégré (CCI) au plus tard le 18 mars 2007. Ce centre devait
avoir pour mission d'unifier les forces combattantes en présence et de
mettre en oeuvre les mesures de restructuration des forces de défense et
de sécurité. Ensuite, il fallait penser à la constitution,
au plus tard le 1er avril 2007, d'un cadre institutionnel
d'exécution composé des deux parties et chargé de mettre
en oeuvre l'intégralité de l'accord. Enfin, un nouveau
gouvernement devait être formé entre le 1er et le 8
avril 2007, suivi, dans la semaine après, de la suppression de la zone
de confiance, de son remplacement par des unités mixtes et du
début du démantèlement, du 15 au 22 avril 2007, des
milices, du regroupement des ex-combattants, du redéploiement de
l'administration et du déclanchement des audiences foraines
jusqu'à la troisième semaine de juillet 2007. L'identification et
les inscriptions sur les listes électorales devaient avoir lieu du 15 au
22 mai 2007. Toutefois, aucune date n'a été fixée pour les
élections générales. Mais, ce dernier processus semble
cette fois incontournable120(*).
Le 29 mars 2007, le président Gbagbo nomme Guillaume
Soro, chef des ex-rebelles, au poste de Premier ministre. Le
démantèlement de la zone de confiance commence effectivement le
16 avril 2007.121(*)
G. Gestion de la crise post-électorale
Plusieurs fois reportée depuis la fin du premier
mandat de Gbagbo, en 2005, l'élection présidentielle finit par
avoir lieu le 31 octobre 2010. Les résultats du premier tour donnent
Laurent Gbagbo en tête avec environ 38 %, suivi par Alassane
Ouattara avec 32 % et Henri Konan Bédié avec 25 %. Le
second tour oppose, le 28 novembre, Gbagbo à Ouattara. Le 2
décembre 2010 la Commission Electorale Indépendante proclame la
victoire d'Alassane Ouattara avec 54,1 % des voix contre 45,9 % pour
Laurent Gbagbo122(*).
[ Le
Conseil
constitutionnel juge les résultats de la CEI non valables et
déclare, le 3 décembre 2010, Gbagbo vainqueur 51,45 % contre
48,55 % pour Alassane Ouatara.123(*)
Certes, la CEDEAO, seule ou en partenariat avec les autres
organisations internationales, sous-régionales et les Etats, a
déblayé le terrain pour un retour à la paix en Côte
d'Ivoire. Elle a choisi l'option diplomatique même si l'option militaire
a été à maintes reprises brandie. Néanmoins,
malgré les différentes interventions et mécanismes par
elle mis sur pieds, la Côte d'Ivoire a sombré dans une autre crise
post-électorale. Elle a, avec les autres organisations internationales
et pays notamment l'ONU, l'Union africaine, la Communauté des
États d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), l'Union européenne, les
États-Unis, la France et la Grande-Bretagne, pour ne citer qu'eux, a
appelé Laurent Gbagbo à quitter le pouvoir.124(*) En effet, aux yeux de la
CEDEAO et de l'UA, il est important de s'assurer que le cas ivoirien ne
constitue pas un précédent qui ouvrirait la voie à la
contestation des résultats électoraux par les candidats vaincus,
dès lors que ceux-ci peuvent se prévaloir d'un soutien
militaire.125(*)
Ainsi, la CEDEAO, en étroite collaboration avec l'UA,
va de nouveau entreprendre des actions dans le cadre de la médiation
pour faire accepter Laurent Gbagbo le départ en douceur du pouvoir.
Cette fois, la possibilité de recourt aux armes semble
écartée. Le 24 décembre 2010, elle organise un sommet
extraordinaire à Abuja. Face à l'intransigeance de Gbagbo
à demeurer à la tête du pays, l'organisation
sous-régionale menace d'utiliser « une force
légitime » en recourant à l'ECOMOG pour le forcer de
céder le fauteuil présidentiel. Elle mandate les
présidents Boni Yayi du Bénin, Ernest Koroma de Sierra Leone, et
Pedro Pires du Cap-Vert pour régler cette crise. Ils rencontreront MM.
Gbagbo et Ouattara le 28 décembre et le 3 janvier où Raila
Odinga, Premier ministre kényan et envoyé de l'UA les
accompagnera126(*).
Cette nouvelle médiation de la CEDEAO se solde par un
échec. La force militaire est désormais la seule à faire
entendre sa voie sur le terrain. Déjà, des affrontements opposant
le « Commando Invisible » d'Ibrahim Coulibaly aux troupes
loyales à Laurent Gbagbo depuis le 12 janvier[] 2011 se sont
généralisés sur l'ensemble du pays. Avec la
généralisation de cette guerre, une grande partie des troupes de
l'armée abandonnent leurs postes127(*). Les FRCI restées fideles à Gbagbo se
repositionnent autour du palais présidentiel, aux plateaux et la
résidence présidentielle à Cocody. Conformément
à la résolution 1975 du Conseil de sécurité qui
vise à protéger les populations civiles et la force de
l'ONU128(*), l'ONUCI
ainsi que la force Licorne de l'armée française en Côte
d'Ivoire tirent sur des positions pro-Gbagbo dans le but de neutraliser leurs
armes lourdes. Le 11 avril 2011, après dix jours d'intenses combats,
l'assaut est lancé contre la résidence présidentielle.
Laurent Gbagbo est fait prisonnier par les forces d'Alassane Ouattara,
soutenues indirectement par l'ONU et la force Licorne.
Au regard de la manière dont s'est résolu la
crise ivoirienne, comparativement aux conflits libériens, il sied de se
poser les questions suivantes : pourquoi la gestion et la
résolution de la crise ivoirienne a-t-elle échappé aux
mécanismes mis en place par la CEDEAO ? Qu'est-ce qui a le plus
concouru la réussite de la médiation ouest-africaine au
Libéria et à son échec en Côte d'Ivoire ?
Quelles mesures pourrait-on envisager en vue d'éviter de telles
défaites à l'avenir ? Le chapitre qui suit tente de donner
de réponses à ces préoccupations.
CHAPITRE III. LA CEDEAO ET LES
CRISES « LIBERO-IVOIRIENS » : DES ACTIONS AUX
RESULTATS MITIGES
Comme on a eu à le signaler dans les parties qui
précèdent, la CEDEAO fut fondée dans le but de
l'intégration économique de la sous-région. Elle
sous-entend le développement intégral et intégré de
cette région. Toutefois, puisque tout développement n'est
envisageable que dans un contexte de paix et de stabilité et la
sous-région vit de façon presque récurrente des situations
de crises socio-politiques conduisant parfois à des affrontements
armés de longues durées, l'organisation s'est vite vue
obligée d'intégrer cette question de paix et de
sécurité, conditions sine qua none d'un développement
durable, dans ses principes fondamentaux, ses objectifs et ses missions. C'est
à la suite de cette adaptation institutionnelle qu'elle a dû
intervenir dans différents conflits touchant certains de ses Etats
membres, notamment le Libéria et la Côte d'Ivoire.
Après avoir fait mention des actions concrètes
en faveur de la paix que l'organisation a pu entreprendre dans ces deux pays,
actions qui ont eu des résultats divergents, il sied, dans ce chapitre
du travail, de nous pencher sur la critique de leur efficacité. Ainsi,
dans un premier temps, nous essayons de dégager les raisons à la
base des insuffisances dans ses capacités à bien influencer le
développement politique et sécuritaire dans la région.
Dans un second temps, nous allons tenter de proposer des pistes de solutions
pour contrecarrer si pas éradiquer les germes des crises qui
gangrènent la sous-région ouest-africaine.
Section I. UNE EFFICACITE RELATIVE
AUX CAUSES MULTIPLES ET DIVERSIFIEES
Analyser les actions de la CEDEAO au Liberia et en Côte
d'Ivoire dans le domaine de la paix et de la sécurité revient
à s'interroger sur la capacité de l'organisation à
transformer en initiatives concrètes ses ambitions en matière de
prévention de conflits dans ces pays. Comme nombre de conflits
politiques dans des pays africains depuis 1990, ces conflits (libériens
et ivoiriens) sont avant tout les manifestations d'un processus laborieux,
douloureux et non linéaire de construction d'un Etat qui soit à
la fois légitime et capable d'assurer la sécurité de ses
populations.
En effet, au Liberia comme en Côte d'Ivoire, les
responsables de la CEDEAO ont montré une volonté réelle de
s'appuyer sur les différents textes de l'organisation pour influencer le
développement politique et sécuritaire. Ces responsables ont
incontestablement entrepris de jouer leur rôle conformément aux
mécanismes de prévention, de gestion, de règlement de
conflits, de maintien de la paix et de sécurité. Ils ont su
incarner les nouvelles valeurs de l'organisation, celles d'agir et/ou
d'appliquer strictement les sanctions prévues par ses protocoles en cas
de rupture de l'ordre constitutionnel au sein des Etats membres. Il faut donc
reconnaitre que le chemin parcouru par la CEDEAO au cours des premiers mois de
la crise ivoirienne aura été laborieux et aléatoire. Le
premier aspect positif de ses actions est, sans conteste, la rapidité de
sa mobilisation politique en dépit des réticences des parties au
conflit et de la complexité de la situation - combinaison d'acteurs
politiques et militaires internes et externes vis-à-vis desquels les
autorités des autres pays membres ne pouvaient aisément se
positionner de façon neutre et distanciée. Le second aspect est
celui du consensus entre des pays membres en vue de mettre à la
disposition des Etats en crise des unités combattantes de la force
militaire régionale pour faciliter leur résolution. Le
troisième est le soutien que l'organisation sous-régionale a pu
recevoir dans la matérialisation de ses actions. En effet, les pays
occidentaux, les autres partenaires non gouvernementaux,
particulièrement la France, l'Union Européenne, les Nations Unies
et l'UA, à l'unanimité, lui ont prêté main forte
pour que ses interventions politiques et militaires deviennent un
élément central du dispositif de gestion et de sortie des
crises.
Toutefois, ce processus, surtout pour la Côte d'Ivoire,
s'est transformé en un cercle vicieux où les échecs
politiques, économiques et sociaux pendant des périodes
successives créent au fil du temps des conditions de plus en plus
défavorables, voire rédhibitoires, à une rectification de
la trajectoire. Chaque fois que l'opportunité d'un nouveau départ
s'est présentée, au Liberia comme en Côte d'Ivoire, elle a
été manquée. En effet, prévenir la
résurgence des conflits dans un tel contexte représente pour
n'importe quelle organisation un défi extraordinaire. Il ne suffit pas
d'envoyer de centaines de soldats surveiller le respect d'un cessez-le-feu mais
surtout aider un pays membre de l'organisation régionale à
reformer son administration publique, à créer de bonnes
conditions de vie dans le cadre d'un système politique
démocratique qui exige de la classe politique une aptitude minimale
à respecter les règles et à faire prévaloir
l'intérêt supérieur du pays sur les antagonismes personnels
et communautaires. Une telle relativisation des succès
enregistrés par l'organisation ouest-africaine se serait
expliquée par plusieurs motivations. L'on peut notamment citer parmi
elles, le manque d'esprit de compromis et de discernement des acteurs
politiques en conflit, la peur de la perte de l'influence politique des
factions en présence, la propension des acteurs politiques et militaires
à se régler des comptes personnels et leur moindre volonté
de voir se stabiliser la situation socio-politique de leurs pays respectifs,
l'insuffisance des moyens.
§1. LA FRAGILITE DES
ETATS-MEMBRES ET LE REJET DES PRINCIPES DEMOCRATIQUES
La CEDEAO est largement une communauté d'Etats
fragiles. Ceux-ci sont, en effet, jeunes. La plupart de leurs systèmes
politiques formellement démocratiques ne datent que de moins d'une
vingtaine d'années. En effet, l'on devra signaler que le Liberia et la
Côte d'Ivoire (deuxième puissance économique de la
région) n'étaient pas les seuls Etats de la région
à subir des crises politiques. La mobilisation de toutes les ressources
disponibles pour leur résolution pouvait être
interprétée, pour la CEDEAO, un moyen de dédouanement
d'une charge par elle insupportable. Ces deux crises lui ont ainsi permis de
reprendre la voix de cité dans une région où, les
violences post-électorales (Togo en 2005), les contestations en
matière d'organisation des scrutins électoraux et des violences
intercommunautaires (Nigéria de 2007 à ce jour), le
dépassement de mandats présidentiels et renversement des
régimes en place (Niger en 2009, Guinée Conakry) demeurent
monnaie courante.129(*)
Face à ces situations, malgré la volonté
de la CEDEAO à consolider la paix et la sécurité sous
régionale, le respect des principes constitutionnels inscrits dans le
Protocole additionnel sur la démocratie et la bonne gouvernance par la
plupart de pays membres, aussi stables soient-ils, comme le Burkina Faso ou la
Gambie est toujours très discutable. Les pays qui semblent relativement
avancés dans la consolidation de leurs institutions et de la culture
démocratique, à l'instar du Cap-Vert, du Ghana, du Bénin,
du Sénégal, ne sont ni suffisamment nombreux, ni suffisamment
influents à l'échelle régionale pour peser de
manière décisive sur les orientations de la CEDEAO. Aucun parmi
eux n'est, par ailleurs, définitivement à l'abri d'une
régression démocratique.130(*)
§2. L'INADEQUATION ENTRE LES
PRIORITES DES ACTEURS DANS LEURS ETATS RESPECTIFS ET LES OBJECTIFS SECURITAIRES
DE L'ORGANISATION SOUS- REGIONALE
Il est essentiel de ne pas perdre de vue les
réalités politiques et économiques des Etats qui composent
la CEDEAO lorsqu'on porte un regard critique sur les actions de l'organisation.
D'une part, en effet et dans la majorité des cas, alors que les
pratiques politiques dans nombre d'Etats membres tardent à
épouser les principes édictés dans les textes, le
rôle de garde-fou joué par la CEDEAO n'a jamais été
aussi à la fois précieux et fragile. La conservation et la
consolidation de ce rôle passent par la promotion d'une culture
pragmatique axée sur les résultats et par celle d'une audace dans
l'approche stratégique qui permette de contourner les obstacles majeurs
que peuvent représenter les décideurs politiques des Etats
membres lorsque leurs intérêts particuliers ne correspondent pas
à l'intérêt général de leurs pays et de la
Communauté.
Les Etats membres de la CEDEAO ont chacun des
caractéristiques politiques, économiques, démographiques
et sociales distincts des autres. Ils connaissent des changements rapides qui
les exposent souvent à des crises potentiellement violentes mais
à des degrés différents. Il y a lieu de mentionner
également que, dans la partie sahélienne ouest-africaine, des
nids de tensions subsistent et l'on assiste aussi à l'émergence
de nouvelles formes de violences, plus meurtrières et plus destructrices
comme le terrorisme. L'insécurité et la pauvreté y
constituent les deux principaux problèmes dont la percée
s'avère difficile. Lorsqu'elles se nourrissent mutuellement, elles
transforment la zone en une forteresse où se combinent rébellions
armées, putschs militaires, bases arrières de groupes terroristes
tels que la branche nord-africaine d'Al-Qaïda.131(*) Tel est par exemple le cas
des crises qui sévissent en Casamance, au sud du Sénégal,
dans la région pétrolière du Delta du Niger au
Nigéria, dans la région d'Agadez au nord du Niger et dans le
septentrion malien, plus précisément dans les régions de
Kidal, Gao et Tombouctou. 132(*) Cette zone est devenue la plus dangereuse de la
sous-région par le fait qu'elle est caractérisée par la
circulation illégale des armes légères et de petits
calibres, le trafic de drogue, la disponibilité et la mobilité de
mercenaires et la perpétration d'actes terroristes. A cet égard,
elle menace la sécurité de toute l'Afrique de l'Ouest et la
CEDEAO assiste impuissante à cette débâcle.
§3. L'ANTAGONISME DANS LES
RAPPORTS ET L'INFLUENCE GRANDISSANTE DES « RELATIONS
HORIZONTALES » ENTRE ETATS-MEMBRES
Les autres pièges auxquels est exposée la
« Pax Ouest Africana » sont liés entre autres,
à la complexité de l'environnement sous-régional. En
effet, ce dernier est constitué de pays, quoique siégeant au sein
d'un même organe communautaire, aux rapports divergents et parfois
même antagonistes tel a été le cas de la division au sein
de la Communauté concernant l'envoi des troupes au Liberia si bien
que les Etats francophones reprochaient au Nigeria l'utilisation de l'ECOMOG
comme un outil de sa politique étrangère et ne voulaient d'une
intervention militaire au Liberia . Par conséquent, étant entendu
que les Etat doivent traiter d'égal à égal, au travers des
relations obligatoirement horizontales, ce sont les efforts
déployés en faveur d'une sécurité commune qui sont
souvent pris en otage. On assiste dès lors à la paralyse du
mécanisme de gestion des conflits mis en place par l'organisation sous
régionale. En tout état de cause, les résultats des
actions de l'organisation en faveur de la paix ne peuvent être que
mitigés si bien que l'on doute de sa capacité à
édifier la paix. Cela a poussé l'A.I.P. à dire :
« Les points forts et les points faibles de la CEDEAO et de l'ECOMOG sont
que ces organes reflètent, en dernier ressort, les problèmes de
gouvernements et d'instabilité de leurs Etats
constitutifs ».133(*)
Ainsi, dans presque toutes les crises, la tendance
générale est à la rivalité de personnalités
étatiques. Des conflits larvés opposent certains chefs d'Etat et
de gouvernement qui, chacun de son côté, déclenchent un
mécanisme pour les résoudre, tel par exemple la rivalité
de Charles Taylor, président du Liberia et Joseph Momoh,
président de la Sierra Leone. Charles Taylor voulait se venger du
soutien qu'octroyait le président sierra-léonais, Joseph Momoh,
à la force d'intervention régionale et qui rendait une victoire
plus difficile qui s'est soldé par son soutien matériel et
financier à Foday Sankoh, l'un de ses vieux compagnons qu'il a
chargé de constituer début 1991, un mouvement de lutte
armée, le Front Uni Révolutionnaire (RUF) en vue de
déstabiliser le régime de Joseph Momoh134(*). Ces conflits atteignent
leur paroxysme lorsque des soutiens - internes ou externes - sont
apportés aux parties. Dans ces conditions, leur résolution
devient complexe et les opérations de l'ECOMOG se révèlent
également minées.135(*)
§4. LA MULTITUDE
D'ORGANISATIONS INTERGOUVERNEMENTALES AUX OBJECTIFS CONCURRENTS
Une autre caractéristique de la sous-région
ouest-africaine est qu'elle est une zone regorgeant une multitude
d'organisations intergouvernementales. Celles-ci entravent parfois la
résolution des conflits en ce sens que, selon M. Daniel BACH,
« l'existence de près d'une quarantaine d'entre elles dont
beaucoup poursuivent des objectifs similaires gène les initiatives en
faveur de l'unité »136(*). On assiste, à cause de cela, à la
naissance de plus en plus croissante de l'opposition entre les Etats
francophones et anglophones. Celle-ci est ressentie clairement dans la mesure
où, par exemple, la nation nigériane est critiquée
sévèrement dans ses interventions en faveur de la paix. Elle est
perçue parfois comme un fauteur de trouble. A ces problèmes
s'ajoutent ceux relatifs au financement, à la mobilisation du personnel,
de la logistique et bien d'autres qui conduisent à la quasi-paralysie de
la CEDEAO qui, pourtant, devrait jour le rôle d'organe
fédérateur.
§5. L'INADEQUATION DE LA
CONFIGURATION INSTITUTIONNELLE ET NORMATIVE CUMULEES AUX ECUEILS FINANCIERS,
DEFICIT DE PERSONNEL ET MANQUE DE MOYENS LOGISTIQUES
S'il est vrai que les institutions prévues pour le
fonctionnement de la CEDEAO offrent une large et précise
répartition des missions, il n'en demeure pas moins que cette
architecture occasionne des handicaps. En effet, son architecture est d'abord
caractérisée par la pléthore d'organes qui rend le
processus de mise en oeuvre du mécanisme lourd à cause de
nombreux couloirs administratifs. Cette pluralité d'organes ne peut
être financée par la CEDEAO composée de pays à
faible performance économique, contribuant difficilement aux
activités de l'organisation surtout celle relative à la
paix137(*). Ce manque de
moyens a des incidences sérieuses sur les apports en hommes et en
logistiques lorsque les opérations de maintien, de rétablissement
et de consolidation de la paix sont lancées. Ensuite, le quorum
exigé pour la prise de décision étant l'unanimité,
il confère à chaque Etat un droit de veto. Cet état de
fait n'est pas de nature à faciliter la prise d'engagements
supranationaux notamment en matière d'intervention pour la
résolution des conflits ou toutes autres crises qui menacent les Etats
membres. Le cumul de toutes ces insuffisances rend difficile la poursuite de la
paix.
Cette même quête connaît également
des obstacles liés à l'environnement international,
c'est-à-dire dans le cadre général des
relations internationales qui sont tantôt pacifiques tantôt
belliqueuses. Celles-ci influencent énormément les voies de
recherche de la paix en Afrique de l'ouest et sacrifient le mécanisme
sur l'autel des oppositions d'intérêts. On peut citer notamment le
poids sans cesse croissant des « relations verticales ».
§6. LE POIDS SANS CESSE
CROISSANT DES « RELATIONS VERTICALES » ENTRE LES ETATS
OUEST-AFRICAINS ET LES « GRANDES PUISSANCES »
Les relations verticales sont d'ordre économique,
politique et sécuritaire. Pour les questions d'ordre économique,
la mondialisation néolibérale a créé des
réseaux de trafics et des espaces extra-territoriaux qui
échappent aux Etats ou aux institutions. Ces trafics concernent surtout
le commerce des armes légères, difficilement maîtrisables.
A ce sujet, en effet, M. Vincent ZAKANE remarque qu'en Afrique, le commerce des
armes est un domaine qui échappe le plus souvent allègrement
à la maîtrise des pouvoirs publics. Celui-ci est plutôt
dominé, sur le plan international, par de grandes puissances
industrielles. Il est conduit au plan local par des marchands d'armes peu
soucieux de la sécurité des Etats et apparaît comme un des
facteurs majeurs de fragilisation des jeunes Etats africains.138(*)
En ce qui concerne les problèmes sécuritaires,
ils sont liés à la géostratégie internationale.
Celle-ci rétrécie souvent les voies de recherche de la
sécurité commune. En effet, les pays ouest-africains ont
signé des accords de défense et de coopération avec les
puissances du nord qui, pour la plupart d'entre eux, ont miné les
initiatives communautaires en faveur de la paix. Quant aux questions politiques
consécutives à la géopolitique internationale, elles ne
manquent pas de produire aussi des effets néfastes sur les efforts de
paix. Par exemple, les incursions permanentes de la France dans ses anciennes
colonies ont toujours été à la base de différends
latents. D'ailleurs, la création de certaines organisations
répond à ces affrontements politico-idéologiques. Face
à tous ces problèmes, peut-on réussir à
matérialiser une paix véritable dans la sous-région ?
La question reste fraichement posée.
Enfin, la course après les bénéfices
économiques engloutit les efforts de mise en place d'une réelle
stabilité ouest-africaine. L'Afrique de l'ouest, comme le reste du
continent, demeure sujette à de convoitises de la part des puissances du
Nord. Chacune de celles-ci voudrait à tout prix se frayer un chemin pour
asseoir son emprise. En effet, les informations diffusées
martèlent souvent que la France tente de s'y maintenir par
l'intermédiaire des pays francophones. Pendant ce temps, les Etats-Unis,
la Grande Bretagne, la Chine et les autres puissances veulent instaurer des
relations étroites avec les Etats membres de la même
communauté ouest-africaine. Ces rapprochements aux intérêts
divergents parfois antagonistes ruinent souvent une réelle intervention
dans les opérations de maintien de la paix en cas de crise parce que la
poursuite des intérêts économiques divergents a
pratiquement été institutionnalisée jusqu'à
atteindre le sommet de l'organe intégrative qui, pourtant, devrait
être considéré comme l'interlocuteur
privilégié en cas de crise dans les Etats qui le
composent.139(*)
Au terme de cette section, il convient de noter que la CEDEAO
a déployé beaucoup d'efforts pour la gestion des conflits dans sa
région malgré les différents obstacles auxquels elle
était soumise. Ainsi, nous nous proposons, dans la section qui suit,
d'émettre des perspectives d'avenir pour qu'elle puisse sortir de la
situation de conflictualité à laquelle elle fait face dans ses
objectifs de résolutions des crises socio-politiques enregistrées
au sein de la région.
Section II : LA REFORME DU
SYSTEME DE PREVENTION, DE GESTION ET DE REGLEMENT DES CRISES POUR PLUS
D'EFFICACITE DE LA CEDEAO
En tant que garante de la sécurité et de la
stabilité sous-régionale, il est impératif que la CEDEAO
s'implique de façon totale dans la résolution des conflits des
pays ouest-africains. Pour y arriver, elle doit entreprendre des actions qui
vont dans le sens d'une réforme du secteur de sécurité
dans le contexte sous-régional ouest-africain pour que ses
priorités puissent ressortir et concourants ainsi à renforcer le
mécanisme.
§1. UNE MEILLEURE
COORDINATION DES STRATEGIES SECURITAIRES NATIONALES ET SOUS-REGIONALES
Le développement d'un nouveau système de
sécurité nécessite des transformations volontaires au
niveau de la vision, de l'organisation et des capacités en
matière de sécurité aussi bien au niveau national qu'au
niveau sous-régional. Dans le contexte actuel de l'Afrique de l'ouest,
la réforme du système de sécurité vise
déjà à inscrire la sécurité dans une
nouvelle vision. Celle-ci devrait être fondée sur la
sécurité humaine et sur le socle de la démocratie. Cela
implique que la réforme signifie d'abord une nouvelle gouvernance dans
laquelle le peuple souverain ne doit plus être victime mais plutôt
bénéficiaire de sécurité. A ce titre, la
sécurité ne réussit que si la souveraineté s'exerce
à travers un contrôle constitutionnellement garanti et
politiquement effectif. La réforme du secteur de sécurité
contribuera, ainsi à « améliorer les capacités
institutionnelles et humaines pour que la politique de sécurité
fonctionne efficacement et que la justice soit rendue équitablement.
Massaër DIALLO140(*) démontre que le système
régional de sécurité est bâti sur le double principe
de la complémentarité et de la solidarité. La mise en
oeuvre de ces principes trouve son fondement et sa légitimité
dans le mandat ouvert par les Protocoles et conventions adoptées au
niveau communautaire. Ainsi, le processus de réforme accordera une
importance à la conceptualisation et à l'appropriation des
stratégies et méthodes. Dans cette perspective, la CEDEAO devrait
assumer son rôle de pôle d'organisation de la cohérence, de
la complémentarité, de coordination des stratégies
nationales, sous-régionales et régionales de réponses aux
défis et menaces qui font obstacle à l'intégration, la
paix et le développement. Pour une bonne coordination des actions des
organes qui la composent, le Conseil de médiation et de
sécurité pourrait éventuellement changer de
dénomination et réajuster ses attributions dans le nouveau cadre
stratégique pour devenir « Conseil communautaire de paix et de
sécurité », détenteur de plus de
responsabilités dans la transformation du système
sous-régional de sécurité.
§2. UNE REDEFINITION DES
ROLES DES ACTEURS EXTERIEURS PARTENAIRES EN MATIERE DE PAIX ET DE SECURITE
Les partenaires de la CEDEAO sont nombreux. Le rôle
de chacun d'entre n'est toutefois pas bien défini par les
mécanismes de prévention et de gestion des crises de
l'organisation. Il appert donc opportun que leurs rôles et statut
relativement à une stratégie régionale de
sécurité soient bien définis afin d'éviter la
confusion dans la mise en oeuvre des stratégies existantes. En effet,
par exemple, l'Union Européenne est l'acteur extérieur le plus
impliqué dans le processus de construction d'une architecture africaine
de sécurité. Elle se positionne comme grand donateur et
partenaire stratégique. La doctrine africaine et sous-régionale
devra être très précise sur ses partenariats, leurs
objectifs et leurs atouts et leurs contraintes.
Tout cela ne peut réussir que grâce au
renforcement de la coopération bilatérale et à la
diversification des partenaires et donateurs. Un mapping et une revue
pourraient permettre une meilleure prise en compte stratégique. Pour
cela, le partenariat à définir avec les acteurs extérieurs
doit tenir compte des enjeux et des intérêts fondamentaux de la
région à court et long terme. Il nécessiterait alors la
conceptualisation de la sécurité et la politique de
réforme, notamment l'identification non seulement des capacités
et des atouts mais aussi et surtout des contraintes et défis, l'analyse
des risques, évaluation des besoins, la fixation des priorités et
précision des moyens pour atteindre les résultats
intermédiaires et ultimes.
§3. LA MISE EN PLACE D'UN NOUVEAU CADRE STRATEGIQUE
FONDE SUR UNE GOUVERNANCE PARTICIPATIVE
Après une étude des problèmes et des
défis auxquels la sous-région ouest-africaine fait face,
Massaër DIALLO, s'est posé la question de
savoir « Comment répondre aux nombreux
défis ». Ainsi, il a proposé l'adoption d'un cadre
stratégique de réforme du système de
sécurité qui doit permettre de combler les gaps en matière
de capacités à produire des réponses et à les
opérationnaliser et qui contribue à définir la
modalité de réponse aux défis à travers la mise en
place et l'opérationnalisation d'un système de
sécurité adapté au contexte et tirant son
efficacité de l'implication des acteurs et des populations à
travers leurs organisations et représentants dans un dispositif de
gouvernance inclusive et participative. Le cadre définit des objectifs
stratégiques qui seront déclinés en actions politiques
à travers un plan d'action réalisé dans une synergie
concrétisant la complémentarité des acteurs. En ce sens,
l'on doit :
1. Créer un environnement favorable à la
reforme du système de sécurité et susciter
l'adhésion des acteurs-clefs : Ceci consiste à
consolider l'engagement des États membres et impliquer les acteurs de
sécurité dans la perspective de mettre la gouvernance du secteur
de sécurité en phase avec les principes, normes et règles
démocratiques ;
2. Promouvoir la sécurité humaine et la
gouvernance démocratique du secteur de sécurité :
assurer un service de sécurité de qualité aux
populations et au pays et l'inscrire dans un cadre de sécurité
régionale, relier politiques sécuritaire et lutte contre la
pauvreté ainsi qu'inscrire la sécurité alimentaire,
l'accès à l'eau, la lutte et le respect des droits humains comme
des composantes permanentes et prioritaires de la sécurité
humaine ;
3. Prévenir et contrer les menaces hybrides
connectant terrorisme, trafics et rebellions : s'appuyer sur les
mécanismes existant, sans préjudice pour une transformation du
système , en assumer, intégrer et actualiser les objectifs
assignés par le Mécanisme de 1999,
à mettre en oeuvre des plans d'action
conjoints, mais aussi, à articuler la stratégie régionale
avec les stratégies internationales multilatérales et
bilatérales pour amoindrir très sensiblement la menace
hybride ;
4. Développer des politiques visant la
réduction de la violence armée : elle vise à
sortir durablement des conflits par une politique active de prévention
et d'action systémique qui adresse aussi les causes profondes et les
facteurs de diffusion sous-régionale ;
5. Dissoudre et/ou disperser, avec poursuite et
punition, les groupes armés relevant des forces
conventionnelles et fauteurs de violence illégale et de crime : En
évaluant et renforçant les initiatives conjointes État/
société civile et CEDEAO en matière de lutte contre la
circulation des armes.
A cet effet, les acteurs qui interviennent dans la
stabilité doivent redéfinir leurs rôles à jouer dans
cette stabilité si bien que la Commission de la CEDEAO doit jouer
le rôle central d'impulsion et de coordination du processus
d'édification sous-régionale d'un système fondé sur
la gouvernance démocratique, relié à l'architecture
africaine de sécurité et aux systèmes nationaux de
sécurité des pays membres. La CEDEAO aura un rôle de
mobilisation des ressources et de l'expertise ; elle est en charge de la
coordination, de la mise en cohérence et en
complémentarité du système sous-régional avec le
système national et celui du continent. Ses États membres doivent
assurer le développement de Programmes nationaux de réforme du
système de sécurité
Dans le même ordre d'idée, Juliette Khady
SOW141(*) - juriste
diplomate -, faisant une étude sur « le
développement d'un cadre conceptuel et plan d'action pour la
gouvernance », propose des pistes des solutions sur comment rendre
effective une gouvernance démocratique du secteur de
sécurité en Afrique de l'ouest. Elle souligne qu'il est important
de :
- Promouvoir un environnement politique sain pour
redéfinir une nouvelle légitimité de l'Etat : Adopter une
approche holistique et mettre en dialogue l'Etat, les organisations de la
société civile ;
- Concilier la sécurité avec le respect des lois
et des droits humains ;
- Associer la Société civile, les médias
et les populations dans la définition des besoins et des
politiques ;
- Renforcer le devoir de protéger les individus et les
populations et améliorer la pratique de la justice équitable et
efficiente à travers une harmonisation des normes juridiques nationales
avec celles adoptées sur le plan international ;
- Créer un cadre de concertation et de dialogue entre
l'Etat, les populations et les acteurs de la société civile en
s'appuyant sur les organisations sous régionales existantes comme le
Forum des organisations de la société civile d'Afrique de l'ouest
(FOSCAO), les organisations sous régionales de femmes actrices dans la
résolution des conflits ;
- Vulgariser par des campagnes les textes adoptés parce
que la plupart des textes internationaux (protocole sur le mécanisme de
prévention, de gestion, de règlements des conflits, de maintien
de la paix et de la sécurité créé par la CEDEAO et
le protocole additionnel sur la démocratie et la bonne gouvernance)
même quand ils sont adoptés restent ignorés par les
populations qu'ils sont censées protéger ;
- Développer le plaidoyer sur une gouvernance
démocratique et instaurer un contrôle démocratique du
secteur et l'obligation de rendre compte : le contrôle
démocratique et l'obligation de rendre compte des institutions
sécuritaires et judiciaires sont fondés sur les principes de la
transparence, de la responsabilité, de la participation. Les
représentants des institutions sécuritaires et judiciaires sont
responsables de leurs actions. Ils doivent se conformer aux exigences d'un Etat
de droit. Le contrôle devra s'exercer à tous les niveaux (au
niveau interne avec les forces de sécurité, les fournisseurs
de services de justice ; au niveau de l'exécutif ; au niveau du pouvoir
législatif avec les parlementaires ; au niveau judiciaire avec les cours
et tribunaux civils, pénaux et militaires ; au niveau des organismes
indépendants avec les médiateurs, les organisations de
défense des droits de l'homme ; au niveau de la société
civile avec les médias et les organisations non gouvernementales).
§4. LE RENFORCEMENT
STRUCTUREL ET LA LUTTE CONTRE LA CRIMINALITE TRANSFRONTALIERE
Souvent, les organisations sous-régionales
créent des mécanismes sans se préoccuper réellement
des capacités nécessaires à leur fonctionnement. Ainsi, le
« Département » des affaires juridiques du Secrétariat
de la CEDEAO, qui est également chargé de soutenir les
initiatives prises en matière de paix et de sécurité par
la CEDEAO, ne se compose que d'un directeur et d'un directeur adjoint.
L'organisation devrait recruter et former le personnel qualifié pour
répondre aux exigences croissantes attendues du secrétariat. Les
membres de la CEDEAO seraient bien avisés de reporter la mise en oeuvre
de certains plans et de se concentrer d'abord sur le développement
d'autres aspects du Mécanisme, en particulier la proposition de Conseil
de médiation et de sécurité et plusieurs réformes
destinées à renforcer le Secrétariat.
Par ailleurs, la question de la criminalité
transfrontalière demeure préoccupante et complexe. Cet
état de chose se justifie par le développement de nouvelles
formes de criminalités dans l'espace CEDEAO. Ces nouveaux crimes sont le
trafic de drogue, le trafic des êtres humains, le trafic de
véhicules volés, de cigarettes, d'armes légères, le
terrorisme, la piraterie... etc. Cela fait de cet espace un point de transit
pour les narcotrafiquants après la fermeture de l'ancienne route des
Caraïbes. Aussi, les actes de terrorisme dans l'espace CEDEAO
deviennent-ils récurrents. Le croisement de tous ces crimes a pour
conséquence le recul des investissements, la fuite des capitaux, le
manque de développement des communautés locales, etc. Et plus
grave, la criminalité transfrontalière constitue un frein
à la libre circulation des personnes, des biens et des capitaux qui
constitue le principe fondamental de la politique d'intégration de la
CEDEAO. En somme, elle est devenue une menace pour la stabilité
politique et institutionnelle des Etats membres.
Ainsi, dans une étude faite à ce sujet,
KARAMOKO DIAKITE142(*) -
Secrétaire General Par Intérim du Réseau d'actions sur les
armes légères en Afrique de l'Ouest, section Côte d'Ivoire
-, a suggéré la mise en place d'un cadre légal et
institutionnel pour lutter contre ce fléau. Il appert donc
impérieux de rendre plus opérationnelle la collaboration entre
les services de sécurité des Etats membres de la CEDEAO. Cela
passe par l'établissement et l'adoption d'un manuel de formation
sous-régionale commune sur la lutte contre ces nouvelles formes de
criminalité. Aussi, faut-il doter la Division sécurité de
ressources humaines et de logistiques adéquates pour mener à bien
sa mission tout en créant un cadre spécifique pour chaque type de
crime à l'image de la Convention sur les ALPC (Armes
légères et de Petit Calibre). Ce processus vise à
créer un cadre spécifique pour chaque crime selon les
priorités déterminées.
C'est à ce prix que l'espace CEDEAO pourrait devenir
un espace paisible et sécurisé propice à l'investissement,
au développement et apte à rendre effective la libre circulation
des personnes, des biens et des capitaux comme souhaité par les
pères fondateurs. La vision des chefs d'État et de gouvernement
de « passer d'une CEDEAO des États à une CEDEAO des peuples
» d'ici 2020 en dépend. Pour ce faire, à notre sens, la
CEDEAO devra :
- valoriser davantage son système d'alerte
précoce pour faire bénéficier l'ensemble de ses Etats d'un
tel outil ;
- impliquer davantage le Conseil de médiation et de
sécurité afin d'engager une diplomatie préventive dans
toutes les zones de tension à l'image de la bande
sahélo-sahélienne ;
- associer les organisations internationales et
régionales dans une possible intervention pour bénéficier
de la légitimité de la communauté internationale ;
- associer et renforcer l'engagement des organisations de la
société civile ouest-africaine sur les questions relatives
à la sécurité des personnes étant donné
qu'elles jouent un rôle majeur pour la sauvegarde des acquis en
matière de démocratie et de la promotion des droits humains dans
les Etats membres. Cela passerait, par exemple, par la révision des
processus d'accréditation de la société civile par la
CEDEAO ; la création d'un bureau de la société civile
qui ferait partie du secrétariat exécutif de la CEDEAO ; la
création d'un secrétariat de la société civile
indépendant pour faciliter les rapports entre les organisations de la
société civile de l'Afrique de l'Ouest et les institutions de la
CEDEAO ; la création d'un groupe de travail commun
CEDEAO-société civile chargé de développer un
projet stratégique visant à garantir la sécurité en
Afrique de l'Ouest et un projet de mobilisation opérationnel et des
ressources pour exécuter cette stratégie ;
- renforcer les capacités humaines en matière de
sécurité de la Communauté pour mieux répondre
aux questions relatives aux crises éventuelles qui surviendraient au
sein d'un Etat membre ;
- mettre en place un système de coopération,
renseignements, assistance militaire et technique en vue de préparer les
forces armées mises à disposition de l'organisation à une
opération régionale efficace ;
- Promouvoir la dynamique d'une citoyenneté
communautaire en vue de faciliter la résolution collective et
coordonnée des crises ultérieures.
CONCLUSION
La CEDEAO et les crises socio-politiques dans les pays
membres : cas du Liberia et de la Côte d'Ivoire, a été
l'objet à la base de notre étude. Le choix de ce sujet est partie
d'un constat fait dans les pays qui constituent la Communauté Economique
des Etats de l'Afrique de l'Ouest où l'on assiste à une
recrudescence des conflits armés, des crises politiques et des
manifestations de la violence de tous genres qui, si pas nuisent, mais freinent
le développement de cette région.
Face à ce constat, une préoccupation a retenu
notre attention. Elle a été formulée comme suit :
Malgré les multiples interventions et médiations de la CEDEAO,
qu'est-ce qui justifierait l'échec de sa médiation en Côte
d'ivoire alors qu'elle a semblé réussir au Liberia et comment
éviter que de tels résultats se reproduisent en cas
d'éventuels conflits ultérieurs au sein de la
région ? A titre d'hypothèse, nous avons
présumé que malgré la présence de la CEDEAO, organe
de maintien de la paix et de la sécurité sous-régionale
gage du développement de la région, l'insécurité et
les violences continuent à donner du fil à retordre à
l'organisation. L'échec de la médiation ouest-africaine en
Côte d'ivoire se serait justifié par le non-respect des accords
signés par les différentes parties en conflit sous la houlette de
la CEDEAO, les divergences qui se sont manifestés entre les chefs
d'Etats de la CEDEAO lors des négociations de Lomé qui ont
certainement affaibli les chances d'aboutissement des négociations, mais
aussi par la non-application des clauses résultantes des
différentes médiations ainsi que les décisions de la
CEDEAO qui ne revêtent pas souvent le caractère autoritaire et qui
fait que les belligérants n'en prennent pas compte. Contrairement a ce
qui s'est passé en Côte d'ivoire, au Liberia, la CEDEAO a
entrepris des actions dans le cadre diplomatique pour convaincre les parties
à trouver un terrain d'entente mais aussi la force qui ont aboutis
à l'envoi d'une force d'intervention dans ce pays et qui a fait que les
décisions prises lors des négociations ainsi que les accords pris
ont été respectés par les parties en présence. Pour
éviter que de tels résultats se reproduisent, la CEDEAO devrait
être capable de se prendre en charge elle-même en ayant pas
toujours tendance à recourir aux autres puissances, elle doit
également revoir certaines dispositions de son protocole pour que son
intervention dans ses Etats membres puisse être effectives et aussi
redéfinir ses priorités et son champ d'action.
Grâce à des procédés
théorique et méthodologique (la théorie du
libéralisme institutionnel, la méthode systémique et les
techniques documentaire et d'analyse de contenu) nous sommes parvenues à
analyser l'architecture de la paix et de la sécurité
ouest-africaine dans un premier chapitre. Ici, nous avons circonscris le cadre
de notre étude tout en exposant les différents mécanismes
dont dispose la CEDEAO pour garantir la paix et la sécurité dans
la sous-région et qui conduit au développement de la
sous-région. Dans le deuxième chapitre, nous nous sommes
appesanties sur les crises « libero-ivoiriens » et de la
nécessité de leur résolution par la CEDEAO. Il y
était plus question de faire un examen minutieux des conflits
libériens et ivoiriens et l'apport de la CEDEAO dans la gestion et la
résolution de ces conflits. Quant au troisième chapitre, il a
porté finalement sur l'évaluation des actions entreprises par
cette organisation sous régionale en rapport avec les crises sous
analyse. Le constat final est, en effet, que les résultats sont
mitigés du fait de certaines faiblesses enregistrées par
l'organisation. Nous avons noté par exemple le manque d'esprit de
compromis et de discernement des acteurs politiques en conflit ; la peur
de la perte de l'influence politique des factions en présence ; la
propension des acteurs politiques et militaires à se régler des
comptes personnels et leur moindre volonté de voir se stabiliser la
situation socio-politique de leurs pays respectifs ; l'insuffisance des
moyens ; la fragilité des Etats-membres et le rejet des principes
démocratiques ; l'inadéquation entre les priorités
des acteurs dans leurs Etats respectifs et les objectifs sécuritaires de
l'organisation sous-régionale ; etc. Pour améliorer son
rendement, nous avons proposé des pistes de solution en termes de la
reforme du système de prévention, de gestion et de
règlement des crises, notamment une meilleure coordination des
stratégies sécuritaires nationales et
sous-régionales ; une redéfinition des rôles des
acteurs extérieurs partenaires en matière de paix et de
sécurité ; la mise en place d'un nouveau cadre
stratégique fondé sur une gouvernance participative ainsi que le
renforcement structurel et la lutte contre la criminalité
transfrontalière.
Au regard de ces résultats, il ressort que notre
hypothèse de départ est confirmée. Toutefois, comme le
champ de la recherche scientifique ne se ferme jamais complètement avec
l'analyse d'un problème dont les contours demeurent très
nombreux, l'élargissement ou l'approfondissement de la question de la
gestion des crises socio-politiques dans la sous-région ouest-africaine
nous hante dans les recherches ultérieures.
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TABLE DES MATIERES
EPIGRAPHE
I
IN MEMORIAM
II
DEDICACE
III
REMERCIEMENTS
IV
SIGLES ET ABREVIATIONS
V
INTRODUCTION
1
1. CHOIX, OBJET ET INTERET DU SUJET
1
2. PROBLEMATIQUE ET HYPOTHESES
2
3. METHODE ET TECHNIQUES DE RECHERCHE
7
4. DELIMITATION DU SUJET ET SUBDIVISON
SOMMAIRE DU TRAVAIL
9
CHAPITRE I. ARCHITECTURE DE LA PAIX ET DE LA
SECURITE DANS LA ZONE OUEST-AFRICAINE
10
SECTION I. LA CEDEAO COMME ORGANISATION DE MAINTIEN
DE LA PAIX
10
§1. DE LA NAISSANCE DE LA CEDEAO : UN
PROCESSUS D'INTEGRATION EN PLUSIEURS ETAPES
11
§2. MISSIONS, OBJECTIFS ET PRINCIPES DE LA
CEDEAO
14
SECTION 2. DU MECANISME DE PREVENTION, DE GESTION
ET DE REGLEMENT DES CONFLITS, DE MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SECURITE
16
§1. PRINCIPES ET OBJECTIFS
DU MECANISME
17
§2. MISE EN OEUVRE DU MECANISME ET SAISINE DE
L'ORGANISATION
18
§3. MODES D'INTERVENTION
20
§4. PROMOTION DE LA DÉMOCRATIE ET DE LA
BONNE GOUVERNANCE
21
§5. STRATÉGIES DE PRÉVENTION DES
CONFLITS DE LA CEDEAO
23
CHAPITRE II : DES CONFLITS
« LIBERO-IVOIRIENS » ET LA NECESSITE DE LEUR RESOLUTION PAR
LA CEDEAO
26
Section I. DES CONFLITS
« LIBERO-IVOIRIENS »
26
§1. DES CONFLITS LIBERIENS
26
§2. DU CONFLIT IVOIRIEN
32
Section II. DES ACTIONS DE LA CEDEAO DANS LA
RESOLUTION DES CONFLITS « LIBERO-IVOIRIENS »
37
§1. DE LA RESOLUTION DU CONFLIT
LIBERIEN PAR LA CEDEAO
37
§2. DE LA RESOLUTION DU CONFLIT
IVOIRIEN PAR LA CEDEAO
41
CHAPITRE III. LA CEDEAO ET LES CRISES
« LIBERO-IVOIRIENS » : DES ACTIONS AUX RESULTATS
MITIGES
49
Section I. UNE EFFICACITE RELATIVE AUX CAUSES
MULTIPLES ET DIVERSIFIEES
49
§1. LA FRAGILITE DES ETATS-MEMBRES ET LE REJET
DES PRINCIPES DEMOCRATIQUES
51
§2. L'INADEQUATION ENTRE LES PRIORITES DES
ACTEURS DANS LEURS ETATS RESPECTIFS ET LES OBJECTIFS SECURITAIRES DE
L'ORGANISATION SOUS- REGIONALE
52
§3. L'ANTAGONISME DANS LES RAPPORTS ET
L'INFLUENCE GRANDISSANTE DES « RELATIONS HORIZONTALES »
ENTRE ETATS-MEMBRES
53
§4. LA MULTITUDE D'ORGANISATIONS
INTERGOUVERNEMENTALES AUX OBJECTIFS CONCURRENTS
54
§5. L'INADEQUATION DE LA CONFIGURATION
INSTITUTIONNELLE ET NORMATIVE CUMULEES AUX ECUEILS FINANCIERS, DEFICIT DE
PERSONNEL ET MANQUE DE MOYENS LOGISTIQUES
54
§6. LE POIDS SANS CESSE CROISSANT DES
« RELATIONS VERTICALES » ENTRE LES ETATS OUEST-AFRICAINS ET
LES « GRANDES PUISSANCES »
55
Section II : LA REFORME DU SYSTEME DE
PREVENTION, DE GESTION ET DE REGLEMENT DES CRISES POUR PLUS D'EFFICACITE DE LA
CEDEAO
57
§1. UNE MEILLEURE COORDINATION DES STRATEGIES
SECURITAIRES NATIONALES ET SOUS-REGIONALES
57
§2. UNE REDEFINITION DES ROLES DES ACTEURS
EXTERIEURS PARTENAIRES EN MATIERE DE PAIX ET DE SECURITE
58
§4. LE RENFORCEMENT STRUCTUREL ET LA LUTTE
CONTRE LA CRIMINALITE TRANSFRONTALIERE
61
CONCLUSION
64
BIBLIOGRAPHIE
66
TABLE DES MATIERES
70
* 1HARERIMANA, J.D.,
L'organisation des Nations-Unies face aux conflits armés en
Afrique : contribution à une culture de prévention,
Université de Liège- DEA en relations internationales
et intégration européenne, 2007.
* 2MONZALA, W., Les
initiatives d'intégration régionale en Afrique de l'ouest :
analyse du cadre institutionnel de la CEDEAO, Université Africaine
de Technologie et de Management UATM-GASA-Licence en Droit Public, 2009.
* 3DUMONT, R., cité
par KADONY N.K., Une introduction aux relations internationales
africaines, collection « Compte Rendu », Paris,
l'Harmattan, 2007, p. 7.
* 4 Idem, p. 20.
* 5DOUKA, A.M., Le
rôle des acteurs sous-régionaux dans l'intégration
économique et politique : l'étude de cas de la CEDEAO,
institut d'études politiques de Toulouse - Master 2 recherche
de Géopolitique et Relations Internationales 2006.
* 6 KADONY, N.K., op.
cit., p.20.
* 7HARSCH, E., l'Afrique
se dote de force de maintien de la paix : face au désengagement des
grandes puissances, l'Afrique renforce ses capacités, Afrique
Relance, vol.17, Oct. 2003
* 8BLOM, A. et Cie,
Théories et concepts de Relations internationales, Paris, Ed.
Hachette, 2001, p. 32
* 9 Ibidem
* 10YAMEOGO, S., La
prévention, la gestion et le règlement des conflits armés
en Afrique de l'Ouest, Université de Ouagadougou, Maîtrise de
droit, 2004.
* 11LAFATIME SENE, P.,
Les initiatives d'intégration en Afrique, Université Pierre
Mendes-France, GRENOBLE II, 2005-2006.
* 12 BACH, D. et SINDJOUN,
L. Cie, Introduction générale : ordre et désordre en
Afrique, SL, janvier 2011
* 13LAPIERE, J., Cité
par MULUMBATI NGASHA, Introduction à la science politique,
2ème éd., Lubumbashi, Africa, 2006, p. 36.
* 14 PARSONS, T.,
Cité par ROCHER, G., Introduction à la sociologie et
organisation sociale, Vol. 2, S.l., éd. AMH, 1962, p. 205.
* 15 MONZALA Wenceslas,
S. C., op. cit.
* 16 DAGO LEGBRE, A.,
Intégration sous-régionale CEDEAO : structures et
obstacles, CERAP- INADES- DESS 2010.
* 17 LAVERGNE, R.,
Intégration et Coopération régionales en Afrique de
l'Ouest, Paris, Karthala et CRDI, 1996, p 40.
* 18 ROCHE, J.M.,
Théorie des Organisations Internationales, cité
par MONZALA W. C., op. cit.
* 19 Selon l'article
1er de cette convention, celle-ci avait pour objectif «
d'instituer entre les Etats signataires une union douanière totale qui
s'étend aux droits d'entrée et de sortie perçus sur les
produits et marchandises en provenance ou à destination desdits Etats
».
* 20 SANA AZIZ, A., Les
entraves au développement du commerce entre les Etats membres de la
CEDEAO, Ecole nationale des régies financières -
Administrateur des services financiers Mars 2008.
* 21 Les produits et
marchandises originaires de l'UDEAO ne sont taxés qu'à
concurrence de 50% du taux global de la fiscalité la plus favorable
appliquée à un produit similaire importé d'un pays
tiers.
* 22 Les Etats ont
commencé à manipuler de manière autonome leurs tarifs
douaniers et leurs législations fiscales. La conséquence en a
été qu'en 1969, le commerce entre les Etats de l'UDEAO,
évalué à 22 milliards de francs CFA ne représente
qu'à peine 10% du commerce extérieur de ces Etats estimé
à 233,6 milliards. CF. SANA AZIZ, A., op.cit.
* 23 MONZALA Wenceslas,
S.C., op. cit.
* 24 MONZALA Wenceslas,
S.C., op. cit.
* 25 Ibidem
* 26 Enoncés des
articles 2 et 3 du traité constitutif de la CEDEAO
* 27Article 4 du
traité
* 28ODZOLO MODO, M.,
Fiche d'information de l'organisation : CEDEAO,
Université de Grenoble II-Doctorante en droit international public, 21
juin 2010.
* 29 Ibidem
* 30 Article 2 du
protocole
* 31 Article 3 du protocole
* 32 Ce Conseil de
Médiation et de Sécurité (CMS) se compose de neuf Etats
membres dont sept sont élus par la Conférence, les deux autres
membres étant celui qui exerce la présidence tournante de la
Conférence et celui qui exerça la présidence
immédiatement précédente. Les membres du CMS sont
élus pour deux ans renouvelables. Selon le Protocole, le CMS
décide et met en oeuvre les politiques de prévention, de gestion,
de règlement des conflits, de maintien de la paix et de la
sécurité; autorise toutes les formes d'intervention et
décide notamment du déploiement des missions politiques et
militaires ; approuve les mandats et les termes de référence de
ces missions; révise périodiquement ces mandats et termes de
référence en fonction de l'évolution de la situation ; et
sur recommandation du Secrétaire exécutif de la CEDEAO, nomme le
Représentant spécial du Secrétaire exécutif et le
Commandant de la Force (en cas de déploiement d'une mission militaire
dans un Etat membre).
* 33 Selon le Protocole,
« la Conférence des chefs d'Etat et de gouvernement est la plus
haute instance de décision dans le cadre des questions se rapportant
à la prévention, à la gestion et au règlement des
conflits, au maintien de la paix et de la sécurité, à
l'assistance humanitaire, à la consolidation de la paix, à la
lutte contre la criminalité transfrontalière et la
prolifération des armes légères, ainsi que toutes les
autres questions couvertes par les dispositions du Mécanisme ».
Mais la Conférence délègue au Conseil de Médiation
et de Sécurité le pouvoir de prendre en son nom des
décisions pour la mise en oeuvre appropriée des dispositions
dudit Mécanisme
* 34 Selon le Protocole, le
Secrétaire exécutif de la CEDEAO est habilité à
prendre des mesures « qui peuvent prendre la forme de missions
d'enquête, de médiation, de facilitation, de négociation et
de réconciliation des parties en conflit ». Il recommande notamment
la nomination du Représentant spécial et du Commandant de la
Force au CMS ; nomme les membres du Conseil des sages ; supervise les
activités politiques, administratives, opérationnelles et assure
la logistique des missions ; élabore à l'intention du CMS et des
Etats membres des rapports périodiques sur les activités du
Mécanisme ; envoie sur le terrain, sur la base de son évaluation
de la situation, des missions d'enquête et de médiation ;
convoque, en consultation avec le Président de la Conférence (des
chefs d'Etat et de gouvernement), toutes les réunions du CMS, du Conseil
des sages et de la Commission de Défense et de Sécurité ;
et met en oeuvre toutes les décisions du CMS
* 35 Article 26 du
protocole
* 36 Article 27 du
protocole
* 37 Le Conseil des sages
est composé d'éminentes personnalités qui peuvent, au nom
de la CEDEAO, user de leurs bons offices et de leurs compétences pour
jouer le rôle de médiateur, de conciliateur, et d'arbitre. Ces
personnalités « provenant de diverses couches sociales y compris
les femmes, les responsables politiques, les chefs traditionnels et religieux
», sont proposées par le Secrétaire exécutif sur une
liste ensuite approuvée par le Conseil de Médiation et de
Sécurité au niveau des chefs d'Etat et de gouvernement. Ces
personnalités sont sollicitées chaque fois que de besoin par le
Secrétaire exécutif ou par le CMS pour traiter d'une situation de
conflit donnée.
* 38 En tant que Chef de
Mission, il est chargé de l'orientation politique de la mission, il
dirige les activités de maintien de la paix et prend l'initiative des
négociations politiques et diplomatiques à engager entre les
parties, les Etats voisins et les autres Gouvernements impliqués dans le
règlement du conflit. Il coordonne l'action des organisations
sous-régionales et internationales, y compris les ONG engagées
dans les activités de secours, d'assistance humanitaire et de
consolidation de la paix dans la zone de la mission.
* 39 Il est responsable
auprès du Secrétaire Exécutif de l'efficacité de la
mission sur le plan opérationnel, administratif et logistique. Il donne
des instructions aux commandants des contingents pour la mise en oeuvre des
activités opérationnelles, assure la sécurité du
personnel et des matériels des organisations humanitaires dans la zone
de la mission et rend compte au Secrétaire Exécutif par
l'intermédiaire du Représentant Spécial.
* 40 Article 28 du
protocole
* 41 Enoncé des
articles 30 et 31 du protocole
* 42 Article 40 du
protocole
* 43 Article 41 du
protocole
* 44 Ce dernier principe qui
va au-delà du rejet des seuls coups d'Etat, inscrit dans les textes de
l'Union Africaine permettra notamment à la CEDEAO de se saisir pour la
1ère fois en 2009, avec le Niger, de la question des
manipulations de la constitution par des Chefs d'Etats souhaitant se maintenir
au pouvoir par des voies pouvant être qualifiées de non
démocratiques. Le président Mamadou Tandja avait fait prolonger
son 2ème mandat de trois ans supplémentaires contre
l'avis de toutes les institutions nationales, notamment l'Assemblée
nationale et la cour constitutionnelle qui seront toutes les deux dissoutes, et
contre l'avis de la CEDEAO qui prononça la suspension du Niger. La
durée de vie de la nouvelle constitution voulue par le président
Tandja et le mandat prolongé de ce dernier ont été
écourtés par un coup d'état militaire réussi en
février 2010. OLAKOUNLE G., le rôle de la CEDEAO dans la
gestion des crises politiques et des conflits : cas de la Guinée et
de la Guinée Bissau, Abuja, Nigeria, FES, septembre 2010.
* 45 Articles 2 et 3 du
Protocole additionnel
* 46 Article 13 du protocole
additionnel
* 47 Section IV du protocole
additionnel
* 48 Ibidem.
* 49 Article 45 du protocole
additionnel
* 50 Ibidem.
* 51 OLAKOUNLE YABI, G.,
op.cit., p. 13.
* 52 CEDEAO, Cadre
de Prévention des Conflits de la CEDEAO, Règlement MSC/
REG. 1/01/08, commission de la CEDEAO, janvier 2008, p.4.
* 53 Ce système
comporte un centre d'observation et de suivi basé au siège de la
CEDEAO et des zones d'observation et de suivi. C'est l'outil d'observation et
de suivi prévu pour la prévention des conflits et l'aide à
la décision de la Communauté. Il est constitué par, d'une
part, un Centre d'observation et de suivi chargé de la collecte et du
traitement des informations, situé à Abuja, et d'autre part,
quatre bureaux d'observation et de suivi sur lesquels s'appuient le Centre,
couvrant quatre zones établies à Banjul, Cotonou, Monrovia et
Ouagadougou. Chaque bureau rassemble les données collectées dans
chaque État et élabore un rapport qu'il transmet au Centre.
* 54 CEDEAO, op.
cit., p. 4.
* 55 Section II du Cadre de
Prévention des Conflits de la CEDEAO
* 56 Article 7 du CPCC
* 57 Elle a pour objectif de
fournir aux décideurs de la CEDEAO des rapports sur les incidents et les
tendances de paix et de sécurité, ainsi que les options
d'interventions en temps réel, afin d'assurer la
prévisibilité et de faciliter les interventions visant à
détourner, atténuer ou transformer de manière
créative des situations de conflits, d'instabilité, de
perturbations et de catastrophes graves
* 58 Elle vise l'apaisement
des tensions et assurer la résolution pacifique des conflits au sein et
entre les Etats membres, à travers les bons offices, la
médiation, la conciliation et la facilitation sur la base du dialogue,
de la négociation et de l'arbitrage. Généralement
appliquée face à une crise imminente, la diplomatie
préventive doit également s'appliquer dans la gestion, la
résolution des conflits et les phases du conflit concernant
l'édification de la paix.
* 59DOUKA, A.M., Le
rôle des acteurs sous-régionaux dans l'intégration
économique et politique : l'étude de cas de la CEDEAO,
institut d'études politiques de Toulouse, 2006.
* 60 Ce système
d'apartheid est considéré comme une colonisation
des « noirs sur noirs » et parait très
difficile du fait que la minorité organisée en classe
dirigeante , exploite la majorité en utilisant tous les appareils
idéologiques, militaires, juridiques et religieux et les dispositifs de
contrôle à sa disposition. Et n'a qu'un seul objectif :
traiter les autochtones comme des colonies ou plus précisément
comme des sous-hommes. Lire à ce sujet NYONGO, P.A., Afrique :
la longue marche vers la démocratie, éd. Publisud- FTM-ONUP,
1988, p. 62.
* 61 MAHOUNON, M., la
CEDEAO dans les crises et conflits ouest africain, Sans Papier, Cornell
university, Thèse de doctorat en sciences politiques soutenue à
l'IRERIE (Institut de Recherches et d'Etudes en Relations Internationales et
Européennes), Avril 2009, p.12
* 62 Article 5 section 13 de
la constitution de juillet 1847
* 63 NYONGO, P.A.,
op.cit., p. 62.
* 64 Ibidem
* 65 BARGUES, J-G.,
« Historique sur l'opération de la MINUL »,
Réseau Francophone de recherche sur les Opérations de Paix(ROP),
Université de Montréal, 30 septembre 2011, p.1.
* 66 Pendant ses dix
années de pouvoir, il avait reçu « un demi milliard de
dollars des Etats-Unis qu'il avait en grande partie détourné
à son profit et cinquante deux millions en aide militaires »
CF BRITTAIN V., le Libéria, de l'implosion au chaos, in Monde
Diplomatique, 1990, p.21.
* 67 KADONY, N.K., op.
cit., p.20.
* 68 FOREST, D., causes
et motivations de la guerre civile au Liberia (1989-1997), Institut
québécois des hautes études internationales,
Université Laval, Avril 2004, p.29.
* 69 Chef du groupe rebelle
qui occupa le poste de directeur de l'Agence des services
généraux du gouvernement de Samuel Doe entre 1980 et 1983.
Toutefois à la suite des accusations de détournement de fonds
portées contre lui, Charles Taylor s'exila aux Etats Unis où il
fut tout de même emprisonné par les autorités
américaines. Il réussit cependant à s'échapper
d'une maison de détention située à Boston en 1985. Il
retourna ensuite en Afrique et s'installa en Sierra Leone afin de
récolter des appuis nécessaires à la création du
NPFL.
* 70 BALENCIE, J M.et DE LA
GRANGE, A., Mondes rebelles, version réactualisée,
éd. MICHALON PAIS, 1999, p.21.
* 71 MAHOUNON M., op.
cit., p.16.
* 72 BALENCIE, J M.et DE LA
GRANGE, A., op. cit., p.21.
* 73 Ibidem
* 74 BARGUES, J-G., op.
cit., p.2.
* 75 Bureau d'appui des
Nations unies pour la consolidation de la paix au Liberia créé en
septembre 1997 par l'ONU avec comme principale tache d'aider le gouvernement
à consolider la paix après la victoire de Charles Taylor aux
élections de 1997.
* 76 BARGUES, J-G., op.
cit., p.2.
* 77 Human Rights Watch
(HRW), Youth, Poverty and Blood: The Lethal Legacy of West Africa's
Regional Warriors, mars 2005.
* 78 AMNESTY INTERNATIONAL,
Rapports annuels de 1999 et 2000, Editions francophones EFAI
* 79 MAHOUNON, M.,
op. cit., p.18.
* 80 Ibidem
* 81 GRAMIZZI, C. et DAMIAN,
M., La crise ivoirienne : De la tentative de coup d'état au
gouvernement de réconciliation nationale, Bruxelles, GRIP, 2003,
p.8.
* 82Jean-Noël Loukou,
historien et directeur du cabinet de Bédié, fonda une cellule
universitaire chargée de codifier le concept identitaire de
l'ivoirité.
* 83 BRAECKMAN, C., Aux
sources de la crise ivoirienne, Manière de voir, n° 79,
février-mars 2005, ISSN 1241 6290, p. 81.
* 84 GRAMIZZI, C. et DAMIAN,
M., op. cit., p.8
* 85 L'épisode le
plus grave eut lieu en décembre 1999 dans la sous-préfecture de
Tabou, lorsque suite à des conflits à propos de la
propriété des terres, quelque 5.000 Burkinabé furent
expulsés par la force. CF RAPPORT DU GRIP 2003/2 8
* 86 Le 23 décembre,
des soldats ayant participé à une mission d'intervention et de
surveillance des Accords de Bangui descendirent dans les rues pour
réclamer leurs primes de mission. CF RAPPORT DU GRIP 2003/28
* 87 Un faux coup d'Etat est
orchestré dans la nuit du 17 au 18 septembre 2000 et servira de
prétexte pour épurer l'armée d'une grande partie de ses
membres originaires du Nord et susceptibles de soutenir le RDR. De plus,
quatorze candidatures sur un total de dix-neuf (dont celles des
représentants du RDR et du PDCI) sont rejetées.
* 88 GRAMIZZI, C. et DAMIAN,
M., op. cit., p.9.
* 89 ONUCI,
Côte
d'Ivoire : La chronologie des événements depuis le 19
septembre 2002,
www.onuci.org
* 90 MAHOUNON, M., op.
cit., p.25.
* 91 GRAMIZZI, C. et DAMIAN,
M., op. cit., p. 10.
* 92 Ibidem
* 93 « Ces chiffres qui
parlent », Jeune Afrique l'Intelligent n°2195, du 2 au 8
février 2003.
* 94 Jeune Afrique,
« Ouattara vainqueur de l'élection présidentielle
selon l'ONU, l'UE et Guillaume Soro », 3 décembre 2010,
www.Jeuneafrique.com
consulté le 20 Avril 2012
* 95CATHELIN, M., la
Côte d'Ivoire entre divisions internes et stratégies
internationales, institut d'études de sécurité de
l'Union Européenne, Mars 2011, p.1 ; VIDAL C, « La
brutalisation du champ politique ivoirien, 1990-2003 », Revue
africaine de sociologie, n°7, vol. 2, 2003.
* 96GRAMIZZI, C. et DAMIAN,
M., op.cit., p. 13
* 97 Selon les Nations
unies, environ 500.000 personnes ont quitté le pays depuis le
début de la crise. Parmi ceux-ci, on compte environ 150.000
Burkinabé, 60.000 Guinéens, quelque 40.000 Maliens, plusieurs
centaines de Nigérians et environ 45.000 Libériens. 40.000
Ivoiriens auraient également traversé la frontière pour
chercher refuge à l'étranger, surtout au Libéria et en
Guinée.
* 98 GRAMIZZI, C et DAMIAN,
M., op. cit., p.13.
* 99 MAHOUNON, M., op.
cit., p..27.
* 100 SOUDAN,
F., « Côte d'Ivoire, onde de choc sur l'Afrique de
l'ouest » Jeune Afrique l'Intelligent N°2187 du 8 au 14
décembre 2002 p 23. ; Lire aussi « L'Eléphant
d'Afrique va mal ! » In Jeune Afrique l'Intelligent
hors-série N°6 l'Etat de l'Afrique 2004, pp. 167-168.
* 101Décision :
A/DEC. 9/5/90 du 30 mai 1990 relative à la création d'un
Comité permanent de médiation.
* 102Décision,
A/DEC.1/8/90
* 103 BARGUES, J-G.,
op.cit., p.3.
* 104MAHOUNON, M.,
op.cit., p. 66.
* 105 BARGUES, J-G.,
op.cit., p.3.
* 106 Ibidem
* 107 BARGUES, J-G.,
op.cit, p. 4.
* 108 Ibidem
* 109 BARGUES, J-G,
op.cit, p.5.
* 110 Il est composé
du Togo, du Ghana, du Niger, de la Guinée Bissau, du Nigeria et de
l'Afrique du sud.
* 111 MAHOUNON, M.,
op.cit., p.71.
* 112 MAHOUNON, M.,
op.cit., p.72.
* 113 Ibidem
* 114 GRAMIZZI, C. et
DAMIAN, M., op.cit., p.21.
* 115 ECOMICI New Edition
spéciale de juillet septembre, p. 9.
* 116 Par exemple pour
répliquer à la naissance du MPIGO (Mouvement Patriotique Ivoirien
du Grand Ouest) et du MJP (Mouvement pour la Justice et la Paix), le pouvoir
ivoirien a initié et encouragé la création de plusieurs
milices toujours dans cette région. On peut citer : le MILOCI (Mouvement
Ivoirien de Libération de l'Ouest de la Côte d'Ivoire) avec pour
responsable le « pasteur » Gammi, le FLGO (Front de Libération
du Grand Ouest) avec 7 000 combattants, l'UPRGO (Union Patriotique pour la
Résistance du Grand Ouest) composée de 1800 hommes, l'APWÊ
(Alliance des Patriotes Wê) de 1200 hommes et dirigée par le
Lieutenant « Colombo » et enfin le FREGO (Front de Résistance
du Grand Ouest)
* 117 L'annexe de l'accord
de Linas-Marcoussis précise dans son point VII 5) que « la loi
d'amnistie n'exonérera en aucun cas les auteurs d'infractions
économiques graves et de violations graves des droits de l'homme et du
droit international humanitaire »
* 118 WEISS, P.,
« L'opération Licorne en Côte d'ivoire : Banc
d'essai de la nouvelle politique française de sécurité en
Afrique », Université de Reims, France, s.d.,
pp.316-317.
* 119 MAHOUNON, M.,
op.cit., p.72.
* 120 MAHOUNON, M.,
op.cit., pp.74-75.
* 121 Ibidem
* 122 Jeune
Afrique, « présidentielle ivoirienne : Ouattara,
vainqueur avec 54,1% contre 45,9% pour Gbagbo, selon la CEI », 2
décembre 2010,
www.jeuneafrique.com
consulté le 4 Mai 2012
* 123 BBC news,
«Ivory Coast poll overturned: Gbagbo declared winner», 3
December 2010,
www.bbc.co.uk consulté le 10
Mai 2012 et Le figaro, « côte d'Ivoire : Gbagbo
déclaré vainqueur », 3 décembre 2010,
www.lefigaro.fr consulté le
4 Mai 2012
* 124 CATHELIN, M.,
op.cit., p.3.
* 125 Idem, p.4.
* 126 Le monde,
«
La
Côte d'Ivoire est toujours dans "l'impasse" », 4
janvier 2011,
www.lemonde.fr consulté le 4
Mai 2012
* 127 Dans la nuit du 30 au
31 mars
Philippe Mangou,
chef d'état-major de Gbagbo, se réfugie avec sa famille à
l'ambassade de l'Afrique du Sud []
* 128 Notons que l'
ambassade de
France a subi une attaque dont les auteurs ont été
neutralisés, trois
gendarmes
français ont été blessés. CF, Tanguy J-M,
«
L'ambassade
d'Abidjan a été envahie »in Le Mamouth, 27
avril 2011
* 129 YABI OLANKOUNLE, G.,
op.cit., p.59.
* 130 Ibidem
* 131 KONADJE,
J-J., « les initiatives de la CEDEAO en matière de
sécurité, de prévention des conflits et de maintien de la
paix dans la zone Sahélienne ouest-africaine »,
Réseau francophone des opérations de paix, Université du
Québec, Montréal, s.d., p.3.
* 132 Ibidem
* 133 Rapport A.I.P. /
C.E.D.E.A.O., septembre 2001, p.14.
* 134 MAHOUNON, M.,
op.cit., p.18
* 135 MUSILA,
C., « Les facteurs d'instabilité et
d'insécurité », conférence donnée
lors du 4ème forum de l'Institut des Hautes Etudes de
Défense Nationale sur le continent africain, du 12 au 27 juin 2003.
* 136 BACH, D., «
ECOWAS : Trade, Security and Regionalization in West Africa,
Supranationalisme Hegemony and Multilateralism. », communication
présentée au séminaire AIP/CEDEAO, Abuja, 27-29 septembre
2001.
* 137 YAMEOGO, P., «
Le mécanisme de prévention, de gestion, de règlement
des conflits de maintien de la paix », Echo des armées n 11,
p. 26.
* 138 ZAKANE, V.,
« Contrôle du commerce des armes et maintien de la paix en
Afrique », S.A.D.I.C., Actes du 10ème
congrès annuel, Addis Abeba, 3-5 août 1998, p.309.
* 139 Par exemple, avant le
déploiement de la MUNCI en Côte d'Ivoire les USA avaient
menacé de poser leur veto face à
« l'entêtement »de la France à favoriser
l'envoi de cette force. Il a fallu un ballet diplomatique pour finalement
aboutir à l'adoption de la résolution 1464 le 3 février
2003. Pendant ce temps, les Etats-Unis présidaient la réunion des
bailleurs de fonds à New York pour rassembler environ cinq cent millions
de dollars US (500.000.000 $ US) pour la reconstruction du Liberia. CF YAMEOGO,
S., op.cit.
* 140 DIALLO, M.,
«
la
reforme du système de sécurité en Afrique de
l'ouest », institut d'Etudes stratégiques,
SL, 2011.
* 141 SOW Khady, J.,
« développement d'un cadre conceptuel et plan d'action
pour la gouvernance », Institut d'Etudes stratégiques,
SL, 2011.
* 142KARAMOKO, D., la
politique de sécurité de la CEDEAO dans la lutte contre la
criminalité transfrontalière in « a
la découverte de la CEDEAO paix et sécurité dans une
CEDEAO des peuples », FES, Abuja, 05-13 octobre 2010,
pp.78-82
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