Les stratégies de communication des concessionnaires automobiles dans l'environnement concurrentiel camerounais depuis 2000( Télécharger le fichier original )par Timothée Ndongue Epangue Université de Douala - Master 2 2008 |
Section 1. De la prospérité à la chute.La situation économique du Cameroun est allée décroissante de 1960 à nos jours. Cette situation a été à l'origine de la chute de plusieurs activités et des problèmes concessionnaires automobiles. 1960. Le Cameroun est indépendant. Au contraire de nombreux pays d'Afrique, subsaharienne, il a longtemps été considéré comme un modèle de prospérité économique. Dans les années 1970, bien que très dépendant de la production de produits primaires, son dynamisme se repose sur un tissu économique assez diversifié et une main d'oeuvre relativement bien adaptée. Au début des années 1980- voire dès la fin de la décennie précédente - alors que la plupart de ses pays voisins entrent en phase d'ajustement, le Cameroun connaît une prospérité forte et rapide qui s'interrompt brutalement au milieu de la décennie. Pour la bonne marche du pays, les dirigeants camerounais optent pour les plans quinquennaux60(*). C'est-à-dire que, après une période de cinq ans, ils se proposent de réaliser des choses pour le pays en mettant un accent particulier sur l'agriculture. Ce modèle agricole a assuré une progression lente mais continue de la majorité des ménages camerounais. Le Cameroun était alors devenu un pays rural, bondé de petites industries paysannes. Nous notons alors la présence des entreprises comme : la CDC, la SOCAPALM et la CAMSUCO. A cet instant là, le pays est en plein essor économique et la pauvreté n'a jamais été évoquée en tant que telle. La politique du gouvernement en place permet que les fonctionnaires vivent de manière décente. Les parkings des ministères sont bondés de véhicules tout neufs61(*). La population n'a pas vraiment de grandes raisons de se plaindre. L'économie du Cameroun ne souffre véritablement alors d'aucune entorse. La vie est paisible et on ne peut pas dire que le camerounais est miséreux sur le plan économique et financier. Aussi, durant les années 70, le Cameroun avait des sources de revenus et d'opportunités qui donnaient satisfaction à presque tous. Cette situation faisait le bonheur des concessionnaires automobiles. Nous pouvons dans ce cas citer la Socada et Cami Toyota qui, d'après la responsable du bureau des transports du littoral, sont les tous premiers concessionnaires automobiles à s'installer sur le marché camerounais. Le territoire camerounais s'apparentait alors pour eux à l'époque comme un « el dora do » où il faisait bon vivre. A en croire le numéro du quotidien national Cameroun tribune du 15 septembre 2002, la vente des véhicules neufs était plus facile à cette époque. A partir du milieu années 80 les choses ont basculé dans un sens négatif. Le Cameroun va mal sur le plan financier. D'après les déclarations de l'Etat, ce problème est dû à la baisse des produits62(*) exportés sur le marché international. Le gouvernement du Cameroun a perdu une partie des revenus et les déficits commerciaux ont été aussi encourus. Devant cette situation alambiquée, plusieurs pays du nord comme les états unis, la France, l'Allemagne, proposent leur aide. Le Cameroun refusera. Devant ce raté, les conséquences sont énormes et se répercutent sur le fonctionnement du pays. Le pouvoir d'achat des citoyens a été considérablement diminué. L'Etat lui-même se voit dans l'obligation de réduire son train de vie. Les fonctionnaires qui, avaient systématiquement droit aux véhicules neufs perdent ce privilège. Pour être plus précis, 1986 a été la dernière année de bonheur les concessionnaires automobiles au Cameroun. Plus de 10 000 véhicules neufs vendus63(*). En clair, la crise économique s'installe. Le Cameroun perd beaucoup dans les exportations. Les produits qui assuraient sa prospérité comme le cacao, le café etc. prennent un coup sur le marché international. Ce qui vient considérablement baisser le pouvoir d'achat des citoyens. Les concessionnaires automobiles se trouvent donc en difficulté. Le prix de leurs produits n'étant plus à la portée du premier venu, l'environnement camerounais se trouve désormais très difficile à gérer pour eux. 1.1. Description de la crise économique au Cameroun. La crise économique s'installe au Cameroun. Avec elle, la situation des citoyens devient vraiment alarmante. La vie s'apparente donc dès lors à un combat quotidien. Aussi, d'après Jean Joël Aerts64(*), pour comprendre le développement de cette crise, il faut d'abord noter que l'économie camerounaise est frappée en deux ans seulement par une baisse de près de 40% de ses termes de l'échange globaux, après cinq années de stabilité. La sévère contrainte financière qui en découle pour les finances publiques entraîne le pays dans une forte récession et elle révèle l'étendue du besoin d'ajustement structurel de l'économie camerounaise. Certes, compte tenu des règles de fonctionnement de la zone franc, l'absence de la flexibilité du taux de change constitue un handicap dans la gestion de la crise. Mais le retard pris par les autorités camerounaises à accepter les conséquences conjoncturelles et structurelles du retournement de l'environnement international apparaît également comme un facteur aggravant : en témoigne l'ampleur des ajustements budgétaires et fiscaux, d'autant plus difficiles à réaliser qu'ils ont été longtemps différés. Ainsi, se révèle au grand jour le dysfonctionnement d'une économie où la redistribution de la rente pétrolière jouait un rôle central mais excessif. Ceci menace tous les opérateurs économiques qui se trouvent dans le triangle national parce que, le pouvoir d'achat des citoyens sera touché. En effet, la moitié des années 1980 marque la fin de la période faste de l'économie camerounaise et le début d'une récession dont le pays n'a pas réussi à sortir jusqu'à nos jours65(*). Les prix du pétrole en aval enchaînent le processus, bientôt substitués par la chute des cours et principaux produits de rente. En monnaie nationale, les prix à l'exportation des produits pétroliers perdent 42% en 1985/86 et à nouveau 39% l'année suivante.66(*) Les avantages alloués aux cadres de l'Etat en prennent un coup. D'après le numéro du neuf septembre 2002 du quotidien national Cameroun Tribune, ce ne sont plus tous les directeurs des ministères qui bénéficient des véhicules neufs comme le voulait la pratique. Les salaires sont touchés et tout cela n'est pas pour arranger les affaires des concessionnaires automobiles qui évoluent d'ailleurs en situation de concurrence parfaite. Même dans le secteur privé, la vie n'est pas rose. On assiste à la dévaluation et l'introduction da la T.C.A (taxe sur le chiffre d'affaire). Du fait de la dévaluation, les véhicules de moyenne gamme qui coûtaient 6 millions, atteignent désormais 15 millions68(*). Une somme très difficile à rassembler quand on est un citoyen camerounais ordinaire. De ce fait, Le pays reste alors très secoué. Il n'y a pas une amélioration. Au contraire, les choses vont de mal en pire. Les salaires des fonctionnaires baissent de 30% en janvier 1993 ; et de 50% en novembre de la même année. Durant la même période, on assiste à un licenciement de plus de 50 000 sociétés publiques et parapubliques liquidées et privatisées69(*). Force est donc de constater que, pour seule solution, on appelle au secours le plan d'ajustement structurel. Une stratégie pour éviter que la goutte d'eau déborde le vase. Tout se passe alors comme si les plans d'ajustements structurels étaient « devenus une véritable tarte à la crème pour ne pas dire la nouvelle magie blanche que les pays en voie de développement devraient adopter à la suite de la crise économique qui les a secoués les uns après les autres70(*). » il faut dire que, ces opérations se sont déroulées sans succès. Parce que, la privatisation avait été mal gérée, aucune analyse rigoureuse n'a été menée dans plusieurs cas. Jusqu'à nos jours, des employés de certaines structures comme l'ex SOTUC (société des transports urbains du Cameroun) ; l'ex ONCPB (office national du cacao et du café) ainsi que d'autres que nous avons pas cités, n'ont pas été désintéressés. Par ailleurs, la situation économique du Cameroun est restée tendue. La condition des citoyens ne s'est guère améliorée. Les jeunes se livrent de plus en plus à des pratiques comme le vol, la prostitution, la « feymania » etc. même après les années 2000, la conjoncture économique est restée une réalité au Cameroun. L'environnement économique se caractérise par des incertitudes, à l'image de la sous région Afrique centrale. Malgré que le fait qu'en 2002, l'environnement macroéconomique des pays de l'Afrique centrale se soit assainit, la croissance de leurs P.I.B reste en dessous du seuil minimum pour que la pauvreté y soit réduite au moins de moitié, d'ici 201571(*). De ce fait, la population camerounaise est restée livrée à elle-même. Les slogans rébarbatifs comme « débrouiller n'est pas voler » voient le jour. C'est dans cette mouvance qu'est né le secteur informel. SECTION II. NAISSANCE DU SECTEUR INFORMEL ET ACCENTUATION DES PROBLEMES DES CONCESSIONNAIRES AUTOMOBILES. 2.1. L'informel : la bouée de sauvetage du citoyen camerounais. L'économie camerounaise est très mal en point. D'ailleurs, le pays se voit maintenant dirigé par le secteur informel qui ne garantit même pas une autosuffisance alimentaire aux populations. Parce que, par manque de moyens financiers, la majeure partie de la population ne peut aller au-delà d'un certain niveau d'études et c'est seulement le secteur informel, qui n'exige pas une grande qualification, qui peut les employer. Pour quel salaire ? Peuvent-ils être clients des concessionnaires automobiles même s'ils le veulent ? Assurément non. Louis Roger Kemayou72(*) a mené une enquête sur les populations exerçant dans l'informel 73(*) à Douala en 2005. Les résultats de sa recherche nous montrent que ces individus vivent dans des conditions qui frôlent la misère et ne pourraient en aucun cas être des clients des concessionnaires automobiles. Ce qui, réduit le nombre de clients de ces derniers parce que, d'après Camille Mindjouli74(*), reprenant les chiffres de l'institut national de la statistique lors d'une conférence sur les stratégies de survie des populations pauvres, 90% des travailleurs au Cameroun exercent dans le secteur informel et sont par ricochet dans l'incapacité réelle d'acheter un véhicule chez un concessionnaire automobile. Aussi, au Cameroun, le secteur informel fournit aujourd'hui du travail à de milliers d'individus par intégration pure et simple de main d'oeuvre sans qualification dans les activités subordonnées ( colportage, cirage de chaussure, pesage de personnes, gardiennage des maisons, lavage des voitures, vente d'eau glacée, écrasage des condiments, écumeur de poubelles) d'une part, et par création effective d'emploi exigeant une certaine qualification ou un minimum d'investissement d'autre part ( couture, coiffure, menuiserie, réparation automobile, photocopie négociée, plastification des cartes d'identité et des diplômes, fabrication des cachets et des sceaux, vitrerie, installation radioélectrique). En outre, il offre leur premier emploi aux migrants ruraux récemment arrivés dans les villes, leur permettant ainsi de s'intégrer progressivement dans la vie urbaine. De plus, à en croire les résultats de la recherche de Kengne Foudouop75(*), depuis l'avènement de la crise économique en cours, il est devenu un marché d'emploi de la dernière chance pour un grand nombre de déflatés du secteur d'économie moderne et de diplômés de l'enseignement secondaire et du supérieur. A la fin de 1997 par exemple, 8,5% de la main d'oeuvre du secteur informel au Cameroun était constituée d'individus ayant perdu leur emploi dans les secteurs public, parapublic et privé moderne. Parmi eux, 17,2% étaient des diplômés exerçant leur premier emploi76(*). Sur le plan social, la situation médiocre du pays est palpable par un chômage très poussé. C'est l'aspect qui constitue sans doute le premier indicateur de la difficulté d'insertion des camerounais sur le marché du travail. Il passe en l'espace de dix ans de 7,3% à 24,6% de la population active. A titre de comparaison, le chômage en France, considéré comme le phénomène majeur de la décennie écoulée, s'accroît de 8,9 % à 11% entre 1982 et 1990. A cette époque, le taux de chômage urbain au Cameroun est l'un des plus élevés d'Afrique, et il est très largement supérieur à ceux enregistrés en Amérique latine ou en Asie (Roubaud, 1994).77(*) Par exemple en 1983, la dynamique économique assure un ajustement offre/ demande de travail globalement satisfaisant. Le taux de chômage est faible et sans doute proche du taux de chômage naturel. Il y a dix ans et à l'instar de ce que l'on observe dans les pays développés, les catégories les plus vulnérables au chômage étaient les moins diplômées. A cette date le taux de chômage était une fonction décroissante du capital scolaire. Alors que le chômage touchait 9,4% de ceux qui n'avaient pas fréquenté l'école, seulement 1,5% des individus ayant suivi des études universitaires cherchaient un emploi. La demande d'emplois qualifiés, notamment dans le secteur public, était suffisante pour absorber les contingents croissants de diplômés. A cette époque, il était possible d'envisager une résorption progressive et mécanique du chômage, grâce au maintien de la croissance et l'effort de scolarisation. Cependant, dix ans plus tard, la logique du chômage est bouleversée. La loi économique entre taux de chômage et niveau scolaire, qui semblait s'observer auparavant, est totalement inversée. Aujourd'hui, le taux de chômage croit avec le diplôme. Ce dernier, qui jouait comme un passeport prémunissant contre le chômage, constitue au contraire un facteur aggravant. Près d'un tiers des actifs ayant atteint l'université recherche un emploi, tandis que « seulement » 6 ,4%78(*) des non scolarisés sont sans travail. Alors que le système scolaire a continué à intégrer de plus en plus de jeunes et à produire des cohortes de plus en plus diplômées, les sources d'emplois pour ces dernières se sont taries. Comme nous l'avons démontré ci-dessus, au Cameroun comme dans tous les autres pays du sud79(*), un grand nombre d'actifs trouvent aujourd'hui leur gagne pain dans ce secteur informel et l'écrasante majorité des citadins en dépendent pour leur approvisionnement en biens de services de première nécessité. Depuis 1980, les activités qui le composent n'y ont pas cessé de multiplier, faute de mieux, et de se diversifier. Elles attirent même de plus en plus des demandeurs d'emploi. Ce qui montre qu'au Cameroun, l'économie moderne n'est pas en mesure de donner de l'emploi à la population qui est désormais réduite à chercher à satisfaire ce que Abraham Maslow dans sa pyramide des besoins a appelé besoins physiologiques80(*). Cette situation de pauvreté rendue palpable et matérialisée par l'absence de l'emploi bien rémunéré, poussant les citoyens vers l'informel, serait pour Kengne Foudouop81(*) due à cinq facteurs : la mauvaise politique de l'Etat, les rémunérations insignifiantes du secteur formel, la facilité d'accès aux métiers du secteur informel, les insuffisances du secteur formel et les effets catastrophiques de la crise économique et de la mise en application du plan d'ajustement structurel. Nous avons voulu à travers un tableau, présenter une diachronie des revenus. Ceci en de montrer le processus de « phagocytose » de l'informel sur l'économie camerounaise. Tableau 1. Taux de salarisation et structure des emplois par branche : le secteur informel gagne tout le terrain.
Sources : EBC 83/ 84, Enquêtes 1-2-3 (93). La ventilation des « autres services » en « services aux ménages » et « services non marchands » n'est pas possible en 1983 faute d'informations82(*). A travers ce tableau, nous constatons que, dans les domaines importants de l'économie, le secteur informel s'est imposé tant faire se peut année après année. Nous regrettons de ne pas avoir eu les données qui nous donnent la réalité actuelle. Aussi, pour remédier à la situation, les citoyens camerounais qui veulent s'offrir un véhicule se penchent vers un nouveau marché : celui des congelés83(*). 2.2. La naissance du marché des voitures d'occasion. La libéralisation de l'économie aidant, les véhicules d'occasion, jusque-là soumis à un carcan administratif, se voient ouvrir les portes du pays. Et, comme ils correspondent au pouvoir d'achat des acheteurs potentiels, le marché va connaître une croissance folle. De quelques milliers en 1987, on atteint rapidement les 10 000, et enfin on dépasse la barre des vingt mille. Actuellement, on semble ne plus vouloir s'arrêter. Aujourd'hui, il est clair que, le rapport se penche en faveur des véhicules d'occasion. S'il faut qu'on s'en tienne aux prix pratiqués sur le marché, il est possible de s'offrir une voiture de cinq millions en option « occasion », quand la même voiture chez un concessionnaire à l'état neuf coûte dix fois plus cher84(*). Le réseau s'est même déjà élargi : ce ne sont plus des voitures d'occasion qu'on envoie au Cameroun, mais de véritables épaves roulantes. Même avec ces conditions, les clients se multiplient de jour en jour chez les vendeurs de « congelés ». Comme dans la plupart des pays africains, l'explosion des véhicules d'occasion est venue affecter les ventes des véhicules neufs depuis que la situation économique est devenue tendue. « Tout le monde aimerait avoir un véhicule neuf. C'est la pauvreté qui conduit à l'achat d'un véhicule d'occasion », nous a confié un propriétaire de véhicule que nous avons rencontré en face de la Bicec de Bonanjo. Ce faisant, les véhicules d'occasion sont devenus monnaie courante sur notre territoire national. Ils sont de tous calibres et de diverses marques. Par exemple, sur 1200085(*) véhicules que comptait le parc automobile camerounais, on pouvait voir que les marques asiatiques arrivaient largement en tête avec Toyota 35%, 9% pour Mitsubishi, 3, 6% pour Nissan, 4,6% pour Hyundai, et 2, 4% pour Suzuki. Depuis 1988, les marques françaises ont marqué un recul. De 12,5% pour Peugeot et 5,3% pour Renault, en 1994, les parts de marché sont tombées respectivement à 6,8% et 2,8% en 1998. Il faut relever que cette hausse est due pour une grande part aux véhicules d'occasion qui ont précipité la chute des véhicules neufs (3440 en 1998 contre 3905 huit ans plus tôt). Ces voitures d'occasion proviennent de différents pays comme : l'Allemagne, la Belgique, la France ou les Etats-Unis. Elles sont embarquées vers quelques ports d'Afrique comme: Tripoli, Beughazi, Tema, Conakry, Lomé, Douala, Cotonou, etc. Ces destinations sont des plaques tournantes de ce commerce de « vieilles » voitures. Au Cameroun, les « congelés » gagnent de plus en plus du terrain. D'après les statistiques de la direction générale des douanes86(*), le Cameroun importe plus de 80 000 voitures d'occasion par an ; soit 25 milliards de franc CFA. Les caisses de l'Etat reçoivent à peu près sept milliards au titre des droits de douane et de taxes diverses. Quant aux commerçants de ces véhicules, ils affirment qu'ils leur reviennent en moyenne à 2 000 000 de nos francs ; et ils revendent pour avoir un bénéfice d'au moins 300 000 francs par véhicule. De ce fait, les véhicules d'occasions prennent le pas sur les véhicules neufs dans le coeur des acheteurs camerounais. C'est donc dire que le « concessionnaire automobile » qui se porte le mieux au Cameroun c'est l'ensemble des vendeurs des voitures d'occasion. C'est ce qui fait en sorte que, les parkings que nous avons observés, sont pleins de véhicules d'occasion qui sont devenus une véritable bouée de sauvetage pour les moins nantis qui veulent réaliser leur rêve d'avoir un véhicule. Puisque, le pouvoir d'achat a été perturbé par la crise économique des années 80, ces vieilles voitures qui « sont en panne régulièrement » se trouvent comme la destination indiquée. Relevons que, en 2001 déjà, les concessionnaires automobiles installés au Cameroun ont vendu trois mille cent quatre vingt quinze véhicules neufs87(*). Cependant, près de vingt cinq mille véhicules d'occasion ont franchi les frontières du pays, ce qui est un peu plus de huit fois le cas des véhicules neufs. Cette tendance ne cesse de s'accroître d'année en année. D'après l'association des sociétés d'assurance du Cameroun, 3167 voitures neuves ont été vendues au Cameroun en 2007 contre 80 000 voitures d'occasion. Nous voyons donc combien de fois les concessionnaires automobiles implantés au Cameroun ont fort à faire. Nous nous demandons même ce qu'il en sera dans quelques décennies si la situation ne s'améliore pas. Parce que, d'après nos enquêtes88(*) de terrain même certaines organisations comme les écoles privées, se dirigent plutôt vers ces véhicules de seconde main pour servir leurs élèves. Ceci est à souligner parce que, si les organisations qui sont le coeur de cible des concessionnaires automobiles89(*) se dirigent vers les véhicules de seconde main, il y a lieu de s'inquiéter doublement pour les concessionnaires automobiles. Par ailleurs, il y a aussi un grand rôle joué par la diaspora camerounaise des pays du nord. Les camerounais qui sont à l'étranger s'enrichissent à travers les véhicules de seconde main qu'ils envoient au pays pour des fins mercantiles. Cette prolifération des véhicules d'occasion ne facilite pas la tâche à l'assainissement de notre environnement qui en prend certainement un coup. En outre, la forte présence au Cameroun de ces véhicules qui ne servent plus à rien au nord, vient encore soulever le problème de la protection de l'environnement parce que ces voitures pour la plupart, ne sont plus en très bon état. Dans ce cas de figure, le problème n'est pas qu'il y a des véhicules d'occasion ; mais le fait de l'installation des épaves roulantes qui remplissent déjà nos routes. Ajoutons ici que, depuis les années 2000, le Cameroun, ainsi que les autres pays de l'Afrique centrale, ont vu leur situation économique nettement s'améliorer. Le taux de croissance du PIB (produit intérieur brut), qui était évalué en 2001 à 5,2%, et plus proche de nous en 2009 à 4 %. Ce regain de croissance est concomitant à la crise des transports qu'on peut remonter à la fermeture de la SOTUC en 1994. C'est ce qui expliquerait le désir des citoyens Camerounais -qui en ont les moyens- de posséder un véhicule. Jusqu'ici le penchant est resté pour les congelés. Allant dans la même lancée, la cellule des études statistiques du ministère des transports, le parc automobile national au mois de juillet 2001, est de 210 275 véhicules, avec un taux de croissance moyen de 4% par an. Pour elle, 42 986 opérations annuelles d'immatriculation ont été réalisées dont 29 516 nouvelles entrées dans le parc et 13 470 ré immatriculations. Malgré cette croissance du parc automobile du Cameroun, il est à rappeler que, la majeure partie de la population ne peut pas se procurer un véhicule. La majorité de ces véhicules dont on parle sont « âgés de plus de dix ans. » Ce qui ne fait pas d'elles des voitures de très bonne qualité. Cette section avait pour objectif de mettre en exergue l'hégémonie du secteur informel et l'arrivée des véhicules d'occasion au Cameroun. Il en ressort que, cette pratique est devenue monnaie courante et le véhicule d'occasion est même le type d'automobile le plus acheté par les populations camerounaises, parce que, c'est cette catégorie d'automobile qui s'accommode le plus à leurs revenus financiers. Ceci se vérifie d'autant plus que, la réponse majoritaire des consommateurs des concessionnaires automobiles à la question : que pensez vous des prix que pratiquent votre concessionnaire automobile de notre guide d'entretien, est que : « les concessionnaires automobiles sont trop chers. » Ce qu'il faut retenir d'elle, c'est que les voitures de seconde main sont les bienvenues dans un environnement camerounais où, comme nous l'avons démontré dans la section précédente, l'économique et le financier traînent franchement le pas. Par ailleurs, la présentation de l'évolution du parc national automobile peut nous permettre d'avoir une idée plus objective de la question de l'automobile au Cameroun. Il est cependant à relever que, les voitures d'occasion sont plus à l'origine de cette croissance ; puisque ce sont elles qui correspondent plus au pouvoir d'achat des citoyens. Tableau 2. Évolution du par automobile national de 1998 à 2005.
Source : Mintrans (direction des transports terrestres)90(*) Nous avons eu le temps de constater à travers cette présentation historique des fluctuations de l'économie camerounaise qu'à l'aube des indépendances, le Cameroun se portait bien. Les concessionnaires automobiles n'avaient donc aucun souci. Mais, le sixième plan quinquennal charrié par d'autres évènements majeurs comme la dévalorisation des produits d'exportation tel que le café dans le marché mondial, est venu mettre le pays à genoux. Aussi, les concessionnaires automobiles se sont retrouvés dans une situation critique. Ceci parce que, le pouvoir d'achat des citoyens est devenu très limité ; et ce ne sont pas les véhicules neufs qui peuvent être au coeur de leurs préoccupations quand le besoin d'un véhicule se fait sentir. Ceci parce qu'il y a eu la libéralisation de la vente des véhicules d'occasion. Ce qui n'a pas beaucoup arrangé les affaires des concessionnaires automobiles implantés dans notre triangle national. A côté de cela, on note également l'arrivée de plusieurs autres concessionnaires automobiles91(*). Ce qui transforme le marché des concessionnaires automobiles en marché fortement concurrentiel. Ceci qui fera l'objet d'une des sections suivantes. Dans une situation de forte concurrence, la communication se trouve comme l'une des « armes » utilisées par les concessionnaires automobiles pour s'en sortir.
* 60 Http: /fr. maps of world. Com/Cameroon/ economy-and business/economic-crisis. Html. * 61 Ce qui démontre implicitement la situation favorable des concessionnaires automobiles. * 62 Http: /fr. maps of world. Com/Cameroon/ economy-and business/economic-crisis. Html op. cit. * 63 Cf. cameroon Tribune, du 9 septembre 2002. Entre les pages 15 et 18. * 64 Aerts Jean Joël, L'économie camerounaise, Editions Karthala, 2000. * 65 Jean Joël Aerts ; Op. Cit. * 66 67 Jean Joël Aerts ; Op. Cit. * 68 www.Google.fr Http: /fr. maps of world. Com/Cameroon/ economy-and business/economic-crisis. Html op cit. * 69 Touma Mama, L'économie camerounaise pour un nouveau départ, Editions Afredit, 2008. p. 339. * 70 Touma Mama, op. Cit. p. 279. * 71 Hakim Ben Hammouda, op. cit. * 72 Ici les résultats de la recherche de Louis Roger Kemayou sont présentés dans l'ouvrage de Kum'a Ndumbe III intitulé Stratégies de survie des populations africaines dans une économie mondialisée, éditions Afric'avenir, 2007. Page 143 à 153. * 73 Ici on parle précisément des métiers comme : vigiles, mécaniciens, bayam-sellam, chargeurs de cargos, menuisiers, bendskineurs etc. * 74 Camille Mindjouli est inspecteur des impôts à Bonabéri Douala. Il est ainsi cité par Kum'a Ndumbe à la page 138 Op. Cit. * 75 Professeur au département de Géographie, à la faculté des arts, lettres et sciences humaines à l'université de Yaoundé I ; ici il expose son point de vue sur la médiocrité du système économique camerounais. Dans notre cas ce propos est pertinent d'autant plus que, cela prouve que l'environnement marchand des concessionnaires automobiles est vraiment complexe puisque le pouvoir d'achat des citoyens est vraiment limité. Cf. Kum'a Ndumbe III, Stratégies de survie des populations africaines dans une économie mondialisée, Afric'avenir, 2007. Page 53 à 69 * 76 Cf. Kengne Foudouop op. Cit. * 77 Cf. L'économie camerounaise, Jean joel Aerts, op. Cit. * 78 Tous les chiffres que nous avons présentés dans ce travail sont les résultats de la recherche de Kengne Foudouop. Op. Cit. * 79 Entendre ici par pays du sud tous les pays du tiers monde dans le sens d'Alfred Sauvy. * 80 Cf. Demont et al, , op. Cit. Pour cette théorie de Maslow les besoins de l'homme sont hiérarchisés. Pour notre cas d'espèce la majorité des camerounais sont encore au niveau du manger et du boire. Ce qui fait que, la commercialisation des produits comme les véhicules neufs dans un tel environnement est une activité assez complexe. * 81 Kengne Foudouop, op. Cit. * 82 Nous avons tiré ce tableau de la page 99 de L'économie Camerounaise, de Jean Joel Aerts et al, op. Cit. * 83 Pseudonyme donné aux voitures d'occasion au Cameroun. * 84 Correspondance particulière de Blaise Pascal Dassié paru jeudi 06/11/08 à 24 :13. http:/www.camer.be./index1 php ? Art= 37088 rub= 12 :1 * 85 Informations recueillies dans le magazine : les marchés tropicaux et méditerranéens le 10 août 2009. Malheureusement, c'est dans un lot de documents relatifs aux concessionnaires automobiles que nous avons eu cette information au centre de documentation de la chambre de commerce à Bonanjo. Sous ce rapport, nous n'avons pas le numéro de ce magazine. * 86 Informations recueillies dans un article sur google et dont les références sont suivantes : http : // www.camer.be/ index 1 php ? art= 37088 rub= 12 : 1 * 87 Cf. cameroun tribune du 9 septembre 2002. p.15. * 88 Lors de notre entretien avec les vendeurs des véhicules d'occasion, ils nous ont fait comprendre que certaines écoles et associations font partie de leurs clients réguliers. * 89 Lors de nos entretiens avec les responsables de communication des concessionnaires automobiles, ils nous ont expliqué qu'ils communiquent prioritairement envers les entreprises privées et publiques. Si certaines entreprises commencent déjà à prendre la direction des congelés, cela va rendre la tâche encore plus compliquée aux concessionnaires automobiles. * 90 Au vrai, nous avons eu cette information au centre de documentation et d'information de la chambre de commerce de Bonanjo. C'est le document des statistiques de l'année 2005 que nous avons consulté qui possédait ces références. * 91 Voir page 49 pour plus d'éclaircis. |
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