Contribution et analyse des conflits forestiers en milieu rural. cas de territoire de Bagata, province de Bandundu (RDC)( Télécharger le fichier original )par p. Basile SAKATA SELEBAY Université Catholique de Louvain - Master complementaire en Développement. environnement et société 2010 |
CHAPITRE 3. LES CONFLITS ASSOCIÉS À L'UTILISATION DES FORÊTS3.1. Les types des conflitsDes conflits de normes surgissent en effet des rapports entre les groupes sociaux qui s'efforcent d'élargir ou de maintenir leur accès aux ressources productives. En tous ce lieux, les acteurs qui s'organisent à cet effet rencontrent les multiples groupes d'appartenance sociale qui tente de maintenir leurs positions, leur légitimité, leurs réseaux d'obligation100(*). Ces conflits de normes peuvent traverser chaque acteur. L'espace forestier de la RDC se caractérise par des conflits à répétition opposant tantôt les communautés locales entre elles, tantôt les sociétés d'exploitation des ressources forestières et les communautés locales. Certains conflits opposent les villageois membres d'une même communauté entre eux. Il peut également survenir des conflits opposant les communautés locales à l'autorité politico administrative locale et/ou à l'administration locale chargée des forêts. Enfin, d'autres conflits évoqués opposent les communautés locales ayant des droits fonciers coutumiers aux populations d'allochtones, venues d'autres contrées, voisines ou lointaines. Le non-respect des limites des territoires voisins constitue la cause des conflits la plus mentionnée. De nombreuses plaintes des communautés font état des membres d'une communauté qui vont empiéter sur les forêts de la communauté voisine, en y prélevant des produits forestiers, sans l'accord du chef intéressé. De nombreuses autres situations conflictuelles opposant les communautés datent de l'époque coloniale, et ont été le fait du colonisateur qui a procédé au déplacement de certaines populations pour les réinstaller sur les terres relevant d'autres communautés, laissant des conflits latents entre les descendants des communautés concernées. On a dénombré aussi des conflits sur l'appartenance coutumière des portions de forêts entre deux communautés voisines. Au sein même des communautés, certains conflits opposent les chefs traditionnels aux membres de leur clan ou lignage, du fait des abus relevés dans l'affectation des redevances coutumières perçues par ceux-là au nom de la communauté. Parfois, les populations se plaignent de n'avoir pas d'accès aux concessions, pour y exercer leurs droits d'usage traditionnels. Parfois, ces conflits dégénèrent en soulèvements populaires et aboutissent à de situations tragiques. Nous distinguons plusieurs types de conflits dans le territoire de Bagata. 3.1.1. Conflits entre autorités étatiques et autorités coutumièresLes Etats étant le plus souvent en difficulté pour édicter et faire respecter les règles du jeu, c'est-à-dire des normes acceptées par tous, les acteurs sociaux adoptent des normes de fait qui se combinent ou s'opposent aux normes officielles, nationales et extérieures101(*). Étant donné que le chef coutumier considère que la terre et tout ce qu'elle comporte, forêts et autres ressources est un héritage laissé par leurs ancêtres, l'exploitant forestier qui va solliciter l'autorisation de coupe du bois auprès de l'administration publique compétente qui la lui accorde, sur le terrain est confronté aux chefs coutumiers, qui lui en refusent l'accès ; donc il ne peut exploiter paisiblement. Soit, l'exploitant forestier se résout à solliciter une autorisation verbale auprès du chef coutumier qui la lui accorde mais il ne peut exploiter paisiblement craignant le contrôle des inspecteurs et des gardes forestiers qui le mettraient à la disposition de la justice pour exploitation sans droit ni titre. Face à cette situation dramatique, se développent des systèmes de corruption généralisée en faveur à la fois des autorités publiques et des autorités coutumières au détriment de la protection de la forêt et du développement de la contrée, étant donné que les frais perçus auprès des exploitants servent davantage aux intérêts égoïstes et n'entrent pas dans le trésor public. Si l'exploitant refuse de se soumettre aux règles coutumières, il s'ensuit souvent des bagarres qui donnent lieu à des dégâts voire à mort d'hommes. Bien souvent, les matériels des exploitants seront saisis mettant ainsi en péril l'activité d'exploitation. Le cas le plus connu dans la zone étudiée est celui qui s'est passée en 2004. Le Chef de secteur de Manzasay, Monsieur Kumbi André, mettant en application une décision du Commissaire de territoire, a permis à la société LALEBI d'exploiter le bois dans la forêt de Ngalane, groupement de NDAM. Fort de son autorisation, l'exploitant a commencé l'exploitation. Mais cette société a rencontré la forte résistance du chef coutumier TAMUNDEL et des autres membres du clan cheffal qui estimait que le Commissaire de territoire n'était pas habilité à délivrer des permis sans leur aval102(*). * 100 Chauveau J P et consorts (in Winter). Inégalités et politiques publiques en Afrique. Pluralité des normes et jeux d'acteurs. Paris, Karthala et IRD. p 19 * 101 Idem p 21 * 102 Rapport de l'ONG MFINDA LUZINGU, 2004-2006, p.32. |
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