Contribution et analyse des conflits forestièrs
en milieu rural. Cas de territoire de Bagata, province de Bandundu
(RDC)
Mémoire présenté par :
Sakata Selebay Basile
En vue de l'obtention du Diplôme de Master
complémentaire
En Développement, Environnement et
Sociétés
Jury composé de :
Promoteur : Etienne VERHAEGEN,
UCL
Lecteurs : Philippe LEBAILLY,
ULG
Baudouin Michel, ULG
Année
académique 2010/2011
REMERCIEMENTS
Je tiens à remercier sincèrement Dieu qui m'a
donné le souffle de vie et qui m'a permis de réaliser ce travail
dans des conditions très, très difficiles.
Je ne serai jamais ingrat à l'égard du
professeur Etienne VERHAEGEN pour sa disponibilité tout au long de ce
travail. Sa rigueur scientifique a permis à ce travail de prendre sa
forme actuelle. Ces mots valent également pour les professeurs Philippe
LEBAILLY et Michel BAUDOUIN. Je n'oublierai jamais Mme Jacqueline DELWARTE et
Anne Marie LEFIN de l'Université des Ainés pour leurs
contribution à la correction de ce document et Marie Gilbert, Philippe
Collard, François Collard et Mme Dutry pour leur soutien.
A Jean Marie WAUTELET, professeur émérite, Mme
Margot VANDENBOSSCHE en retraite et Mme Chantal HERMAN pour leurs
conseils.
Je pense également à toutes les personnes qui
m'ont accompagné par leurs prières ainsi que par le soutien de
tout genre particulièrement au Fr Jaques LITU et Mme
Henriette SAKATA et tous ses enfants.
ABRÉVIATIONS
- AWF : Africain Wildlife Foundation
- BAT : British American Tabac
- CAEEC : Communauté des anciens
élèves des écoles catholique
- CARE : Cooperative for American Remittance to Europe
- CFAD : Concession forestier sous aménagement
durable
- CI : Conservation International
- DFPE : Domaine forestier permanant de l'Etat
- DFR : Domaine forestier rural
- DME : Diamètre minimum d'exploitation
- EIC : Etat indépendant du Congo
- FRM : Forêt ressources management
- GAC : Gestion alternative de conflit
- ITB : Société industrie de transformation
de bois
- IUCN : Union international pour la conservation de la
nature
- MIBA : Société Minière de
Bakwanga
- ONATRA : Office national de transport
- ONG : Organisation non gouvernementale
- PFA : Permis forestier associé
- PNB : Produit national brut
- PFNL : Produit forestier non ligneux
- RDC : République Démocratique du Congo
- RFA : Redevance forestier annuelle
- RRN : Réseau de ressources naturelles
- SAFBOIS : Société Africaine de bois
- SEDAF : Société d'exploitation de
développement agricole et forestière
- SIFORCO : Société industrielle et
forestière au Congo
- SIFORZAL : Société industrielle et
forestière au Zaïre
- SPIAF : Service permanent d'inventaire et
d'aménagement forestier
- WCS : Wildlife Conservation Society
- WWF : World Wildlife Fund (fond mondial pour la
nature).
RESUME
Dans l'état actuel du développement
économique et social de la RDC, la forêt occupe une place
très importante tant, il est vrai, qu'elle est considérée
comme la mère nourricière de la population rurale. Environ 40
millions, soit 70% de Congolais, vivent de l'exploitation forestière. A
part les activités agricoles, la chasse, la pêche et
l'exploitation du bois, ces forêts, présentent aussi une
impressionnante biodiversité et jouent un rôle essentiel dans la
protection du climat.
Bien que le secteur forestier joue un rôle
considérable dans le développement du pays, la gestion des
forêts constitue une grande problématique et une source de
plusieurs conflits. En effet, les liens juridiques sur la gestion
foncière, et principalement forestière, ne sont pas toujours
très clairs en RDC. Les forêts sont soumises à une double
législation conflictuelle dont l'une relève de la croyance
ancestrale, qui a sa propre manière d'agir et le droit écrit dont
la communauté locale n'a qu'une connaissance sommaire. Ce dualisme
juridique entraîne de multiples conflits au niveau du respect du code
forestier et du cahier des charges entre l'autorité étatique, les
exploitants forestiers et la communauté locale. En définitive, ce
dualisme juridique fait que les autorités étatiques et
coutumières se disputent la légitimité de gestion
forestière et les exploitants ont du mal à identifier
l'autorité à laquelle incombe cette légitimité, ce
qui entrave leurs activités.
En plus, les contrats d'exploitation se négocient entre
ces autorités et les populations locales ne bénéficient
pas toujours convenablement de ce patrimoine. Et pourtant, la terre et la
forêt peuvent servir de bases essentielles au développement local
et national si elles sont exploitées de manière durable, la
communauté locale étant nécessairement impliquée.
En pratique, ce mode souhaitable de gestion des forêts n'est pas
généralement en application aussi bien à l'échelle
nationale qu'au niveau de nombreux terroirs et villages de la
« RDC ».
Cette étude s'est donné pour but d'analyser et
d'expliquer les articulations des conflits que génère
l'exploitation de ces ressources forestières. Elle fait le constat que
le problème forestier pourrait être résolu par une
réponse efficace de l'autorité étatique congolaise en
associant la communauté locale à la délivrance de permis
d'exploitation.
ABSTRACT
In the current economic and social development of the DRC, the
forest plays a very important as it is true, it is considered the foster mother
of the rural population. About 40 million or 70% of Congolese live logging.
Apart from farming, hunting, fishing, logging that facilitates these forests,
they also have an impressive biodiversity and play a key role in climate
protection.
Although the forestry sector plays a significant role in
developing countries, forest management is a major problem and a source of
several conflicts. Indeed, the legal ties to the land management forest and
effectively, are not always very clear in the DRC. Forests are subjected to a
double law conflicted with the changing of the ancestral beliefs, which has its
own way of acting and the written law that the local community has only cursory
knowledge. This legal dualism causes of many conflicts in respect of the forest
code sides of specifications and between the State authority, forestry and the
local community. Ultimately, this legal dualism that state authorities and
customary dispute the legitimacy of forest management and operators are
struggling to identify the responsible authority to which this legitimacy,
which hinders their activities'. In addition, contracts operations are
negotiated between the authorities and local populations do not benefit
adequately from this heritage. And yet the earth and the forest can serve bases
essential to local and national development if exploited sustainably, the local
community is necessarily involved. In practice, this mode desirable forest
management is not generally applicable both at the national level that many
vineyards and villages of the "DRC"
This study based to analyze and to explain the articulations
of the conflicts that generate the exploitation of these forest resources. It
makes a report that the forest problem could be resolved by an effective answer
of the Congolese State authority by associating the local community with the
delivery of license of exploitation.
TABLE DES
MATIÈRES
REMERCIEMENTS
I
ABRÉVIATIONS
II
RESUME
I
ABSTRACT
II
TABLE DES MATIÈRES
III
LISTE DES FIGURES
VI
LISTE DES TABLEAUX
VII
LISTE DES PHOTOS
VIII
INTRODUCTION GENERALE
1
1. CONTEXTE GÉNÉRAL
1
2. PROBLÉMATIQUE
1
2.1. Les faits
2
2.2. Les questions principales
3
3. HYPOTHÈSE
3
4. OBJECTIFS
4
5. MÉTHODOLOGIE
5
6. SUBDIVISION DU TRAVAIL
5
NOTRE ÉTUDE A POUR CHAMP D'INVESTIGATION LE
TERRITOIRE DE BAGATA DANS LA PROVINCE DE BANDUNDU EN
« RDC ».
5
1.1. PRÉSENTATION DE LA RDC
6
1.1.1. Au niveau national
6
A. Situation géographique
6
B. Climat
7
C. Démographie
8
D. Agriculture
9
E. Mines
9
E. Hydrographie
10
G. Infrastructures de transport
10
1.1.2. Au niveau local : le territoire de
Bagata
11
A. Localisation
11
B. Les populations
12
C. Climat
15
D. Température
15
E. Pluviométrie
17
F. Hydrographie
17
G. Potentialités agricoles
18
H. Artisanat
19
1.2. RICHESSES DE LA FORÊT CONGOLAISE
19
1.3. Fonctions de la forêt
20
1.3.1. Fonction économique et
sociale
21
1.3.2. Fonction de pharmacopée
22
1.3.3. Fonction écologique
22
1.3.4. Fonction récréative et
touristique
23
1.3.5. Fonction morale et culturelle
23
CHAPITRE 2. EXPLOITATION FORESTIÈRE
EN MILIEU RURAL
25
2.1. BREF APERÇU SUR LE SYSTÈME
FONCIER CONGOLAIS
25
2.1.1. Le système étatique
institué par la loi foncière
26
2.1.2. Les pratiques en milieu rural : cas
du territoire de Bagata
30
2.2. Les systèmes locaux d'exploitation
des forêts
32
2.2.1. Durabilité des forêts en
Afrique centrale
32
Les forêts de l'Afrique centrale sont
depuis longtemps utilisées par l'homme.
32
A. Le Cameroun
34
B. Le Gabon
37
C. L'EXPLOITATION FORESTIÈRE AU CONGO
BELGE
40
2.3. La place des forêts pour les
communautés locales dans la nouvelle configuration du droit forestier
congolais
41
2.3.1. Les systèmes locaux d'appartenance de
forêts
41
2.3.2. Les modes locaux de gestion des forêts
par les communautés locales de Bagata.
44
2.3.3. Les systèmes locaux
d'exploitation des forêts
44
A. le prélèvement des ressources
ligneuses
45
B. Le prélèvement des ressources non
ligneuses
47
C. Autres formes d'exploitation des forêts
locales
48
2.3.4. L'affectation des
bénéfices tirés de l'exploitation des forêts
coutumières.
51
2.3.5. Les principales difficultés
mentionnées par les communautés locales à la suite de
l'exploitation forestière
52
2.4. La catégorisation des pratiques
d'exploitation.
52
2.4.1. Les pratiques favorables
52
2.4.2. Les pratiques défavorables
54
CHAPITRE 3. LES CONFLITS ASSOCIÉS
À L'UTILISATION DES FORÊTS
57
3.1. LES TYPES DES CONFLITS
57
3.1.1. Conflits entre autorités
étatiques et autorités coutumières
58
3.1.2. Conflits entre population locale et
exploitant
59
3.1.3. Entre exploitants
60
3.1.4. Entre communautés locales et
autorités étatiques
61
3.1.5. Communautés locales entre
elles
62
3.1.6. Les membres de la communauté
locale
63
3.1.7. Possibilité des conflits
futurs
64
3.2. LES SYSTÈMES LOCAUX DE
RÉSOLUTION DES CONFLITS
64
3.2.1. Les conflits inter ou
intracommunautaires
64
3.2.2. Les conflits entre les
communautés locales et les autres acteurs
65
3.2.3. Interface entre les communautés
locales et les autres acteurs locaux.
66
3.2.4. Rapports « communautés
locales » et secteur public
66
3.2.5. Rapports « communautés
locales » et organisations non gouvernementales congolaises
67
3.2.6. Rapports communautés
locales et exploitants forestiers
67
A. Rapports communautés
locales et exploitants privés artisanaux
67
B. Rapports communautés locales
et exploitants industriels des forêts
67
3.2.7. Rapports « communautés
locales » et organisations non gouvernementales internationales.
68
3.3. Cas concret pour d'autres provinces de la
RDC
69
3.3.1. Province de l'Equateur
69
A. Les modes locaux de gestion des forêts par
les communautés locales
69
B. Les genres des conflits
69
3.3.2. Province Orientale
72
A. Genres des conflits
72
CHAPITRE 4. CONCLUSION ET SUGGESTION
77
4.1. CONCLUSION
77
4.2. SUGGESTIONS
80
4.2.1. Suggestions aux autorités de
l'Etat congolais
80
A. L'insertion de l'autorité juridique
à l'instance coutumière
80
B. Insertion de droit médian dans le code
forestier et la loi foncière
81
C. Pistes pour sortir du dualisme juridique
82
D. L'enseignement tiré du dualisme
juridique
83
BIBLIOGRAPHIE
84
LISTE DES FIGURES
Figure
1 : Carte du territoire de Bagata
12
Figure
2 : Interrelation entre acteurs
82
LISTE DES TABLEAUX
Tableau
1 : Indications climatologiques de onze stations
météorologiques à Bandundu.
16
Tableau
2: Répartition des sols dans la province de Bandundu
18
Tableau
3: Codes forestiers actuellement en vigueur dans les pays du bassin du Congo
33
LISTE DES PHOTOS
Photo
1 : Ecole implantée à Ndana Scierie
60
Photo
2 : Ravitaillement de grumes vers le port de Makiri Mbiem
62
INTRODUCTION GENERALE
1. Contexte
général
L'homme est à la fois un être biologique et
social. Il a toujours entretenu des relations très étroites avec
son milieu naturel, pour garantir son existence et celle des
générations futures. Il a recours aux ressources
forestières pour se nourrir, se vêtir, se loger, se soigner mais
aussi pour accomplir certaines actions relevant de sa culture non
matérielle (rites médicaux-magiques et
magico-religieux...)1(*).
L'Afrique et l'Amérique Latine renferment encore
d'immenses étendues de forêts abritant des populations Bantu,
Pygmées et Indiens de diverses cultures qui dépendent directement
de la forêt. Les savoirs, les savoir-faire et les pratiques quotidiennes
de ces populations font partie d'un patrimoine culturel unique qu'il convient
de sauvegarder et de valoriser. Ils témoignent des relations intimes
développées entre les êtres humains et leur environnement.
Certaines de ces connaissances, favorables à un
prélèvement rationnel des ressources, peuvent être mises
à contribution dans le cadre de la gestion durable des
forêts2(*).
Il était donc nécessaire de relever dans une
étude les types d'exploitation susceptibles d'être
pratiquées par les populations locales, les conflits qui peuvent en
découler et la manière de les gérer.
2.
Problématique
Dans l'état actuel du développement
économique et social de la RDC, la forêt occupe une place
très importante tant il est vrai qu'elle est considérée
comme la mère nourricière de la population rurale. Par sa
multifonctionnalité, elle joue les rôles économique et
social, écologique, esthétique, récréatif,
éducatif et touristique, et même une fonction morale. Si les
fonctions de la forêt sont connues, son exploitation en milieu rural
congolais constitue un enjeu qui oppose l'Etat, les communautés locales
et les opérateurs privés. Cette recherche est consacrée
à l'exploitation forestière et au développement rural dans
le territoire de « Bagata ». La recherche vise
spécifiquement à démontrer que la
« cohabitation » entre la gestion de ressources
forestières et les populations locales n'est pas toujours pacifique. Et
lorsque ces tensions s'exacerbent, il naît des répercussions sur
le développement économique de la contrée. En d'autres
termes, l'étude se propose d'analyser les différents aspects des
ressources forestières à Bagata en mettant en exergue les
interventions des acteurs. L'étude cherche également à
comprendre pourquoi l'exploitation forestière par les acteurs
privés n'a pas permis le développement de la contrée.
2.1.
Les faits
Environ 40 millions de Congolais vivent et tirent leurs
ressources directement des forêts de la République
démocratique du Congo « RDC ». Ces forêts
présentent une impressionnante biodiversité et jouent un
rôle essentiel dans la protection du climat.
Elles occupent à elles seules 52 % du territoire
national soit une couverture forestière de 128 millions
d'hectares3(*) , le second
du monde pour les forêts tropicales (après l'Amazone) soit 47 % de
l'ensemble des forêts d'Afrique ou encore environ 7% des forêts de
la planète4(*).
La RDC est le premier pays d'Afrique, par l'étendue de
ses forêts, et le plus important pour la préservation de
l'environnement mondial. C'est le deuxième massif de forêt
tropicale dans le monde après le Brésil, et le moins
industrialisé5(*).
L'immensité exceptionnelle de cette forêt est
à l'image de sa diversité: la forêt équatoriale
située au niveau de la Cuvette Centrale (provinces de l'Equateur,
Orientale et Nord Bandundu ) occuperait 100 millions d'hectares ; la
forêt des montagnes, à plus de 1700 m d'altitude située
dans la province du Kivu, occuperait 500 mille hectares ; la forêt
de Mayumbe, située dans la province du Bas-Congo, la forêt
sèche dans la province du Katanga, la forêt-galerie et les autres
lambeaux forestiers situés dans les provinces du Kasaï et du Sud de
Bandundu) occuperaient près de 25 millions d'hectares.
Bien souvent, les études des forêts ne mettent en
exergue que les étendues continues des forêts comme la forêt
équatoriale ou celle du Mayumbe. Elles ignorent les lambeaux forestiers
disséminés à travers le pays et dont l'ensemble vaut
plusieurs milliers d'hectares. Les forêts du territoire de Bagata font
partie de ce qu'on doit appeler, au Congo, lambeau forestier bien qu'elles
représentent près de 300.000 hectares6(*).
2.2.
Les questions principales
Comment sont articulés les conflits autour des
ressources forestières en territoire de
« Bagata »?
Cette question principale de notre étude est
précisée par les sous- questions suivantes :
- Quels est le mode de gestion de la ressource
forestière (gestion coutumière ou gestion moderne) ;
- Comment ce mode de gestion se déploie-t-il sur le
terrain « processus d'application » ?
- Comment se fait la confrontation de ces modes de
régulation ?
3.
Hypothèse
Les liens juridiques entre la forêt et la terre ne sont
pas toujours très clairs en RDC de sorte qu'il en résulte des
conséquences parfois fâcheuses sur la gestion et le
développement du secteur forestier. Et pourtant, la terre et la
forêt peuvent servir de bases essentielles au développement local
et national si elles sont exploitées de manière durable et
participative par la communauté locale pour son intérêt et
le bien-être collectif. En pratique, ce mode souhaitable de gestion des
forêts n'est généralement pas en application aussi bien
à l'échelle nationale qu'au niveau de nombreux terroirs et
villages de la « RDC ».
PEEMANS estime que, depuis les années 1970 et 1980,
« l'accès à la terre est devenu l'objet de jeux de
pouvoir très complexes au niveau local entre anciens et nouveaux acteurs
de l'évolution urbaine ou rurale »7(*). On remarque par contre que la
terre et tout ce qu'elle comporte « forêts, savanes, eaux,
... », ainsi que les différentes ressources du sous-sol sont
souvent la source des conflits si elles sont mal gérées. La terre
est souvent source des différends majeurs au sein des communautés
rurales et entre les populations lorsqu'elle devient la propriété
privée d'un individu ou d'un groupe d'individus qui s'en accaparent en
écartant les autres membres de la communauté. Parfois cette
situation est confortée par la loi forestière et/ou
foncière elle-même.
A la suite de ces considérations théoriques et
du contexte particulier à la région de Bagata, l'hypothèse
de base de ce travail est la suivante : l'ambiguïté
créée par le dualisme juridique existant dans le secteur
forestier insécurise les exploitants. Ainsi, on aboutit à deux
situations : soit, l'exploitant forestier du territoire de Bagata
sollicite uniquement l'autorisation de coupe du bois auprès de
l'administration publique compétente qui la lui accorde mais sur
terrain, celui-ci est confronté à la résistance des chefs
coutumiers et paysans qui lui refusent l'accès ; et finalement il
ne peut exploiter paisiblement. Soit, l'exploitant forestier se résout
à solliciter une autorisation verbale auprès du chef coutumier
qui la lui accorde mais il ne peut exploiter paisiblement craignant le
contrôle des inspecteurs et des gardes forestiers qui le mettraient
à la disposition de la justice pour exploitation sans droit ni titre.
Face à cette situation dramatique, se développent des
systèmes de corruption généralisée en faveur
à la fois des autorités publiques et des autorités
coutumières au détriment de la protection de la forêt et du
développement de la contrée étant donné que les
frais perçus auprès des exploitants servent davantage aux
intérêts égoïstes et n'entrent pas dans le
trésor public.
4.
Objectifs
En menant cette recherche, l'objectif principal est d'analyser
et d'expliquer les articulations dans les conflits des ressources
forestières. Les objectifs spécifiques sont :
- L'identification des différents modes de gestion de
la ressource forestière ;
- La description des processus d'application de ces modes de
gestion ;
- La description de la mise en jeu des différents
acteurs avec leurs logiques et les effets qu'elles impliquent ;
- L'analyser des possibilités de rapprochement et leurs
effets sur le développement local.
L'État Congolais en matière des conflits
forestiers manifeste un double intérêt à la fois protecteur
juridique et social. Protecteur juridique parce qu'en tranchant correctement le
conflit forestier, il protège les biens des tiers. Protecteur social
dans la mesure où il maintient la paix sociale.
La protection sociale et juridique dont nous parlons ici,
consiste en la vulgarisation des lois et règlements qui
régissent le pays dans les domaines forestiers.
5.
Méthodologie
La méthodologie est l'ensemble ordonné, de
manière logique, de principes, de règles, d'étapes
permettant de parvenir à un résultat8(*).
La présente étude prépare à
l'améliorer le système d'arrangement de conflits pour sortir de
ce dualisme juridique. Elle est basée sur les données
secondaires retrouvées dans différents documents et les
données empiriques vécues et récoltées sur le
terrain à Bagata et dans le secteur de Manzasay. Nous nous sommes servi
des données d'une enquête effectuée entre 2004 et 2006 sur
les modes d'exploitation dans le territoire de Bagata menée par une
organisation non gouvernementale dénommée « Mfinda
Luzingu », la forêt c'est la vie. Nous avons été
occasionnellement l'un des membres de l'équipe d'enquête.
Ainsi, dans notre étude, nous avons utilisé une
démarche inducto-déductive. Celle-ci repose sur des connaissances
préalables et une expérience personnelle qui permettent l'analyse
et le dépassement de la simple description des faits
observés9(*).
6.
Subdivision du travail
Notre étude a pour
champ d'investigation le territoire de Bagata dans la province de Bandundu en
« RDC ».
- Ce travail est subdivisé en trois chapitres. Le
premier chapitre procède à la délimitation du cadre de
l'étude en y précisant la situation géographique et les
types des populations qui vivent dans le territoire de Bagata.
- Le deuxième chapitre analyse l'exploitation
forestière en milieu rural en prenant en exemple le cas du territoire de
Bagata.
- Le troisième chapitre étudie les types de
conflits et les modalités de leur résolution au niveau rural
à Bagata.
CHAPITRE 1. GÉNÉRALITÉS SUR LA
SITUATION FORESTIÈRE EN RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO
(RDC)
Ce chapitre traitera successivement de la présentation
de la RDC (section 1), des richesses de la forêt congolaise (section 2)
et de la multifonctionnalité de la forêt (section 3).
1.1.
Présentation de la RDC
1.1.1.
Au niveau national
A.
Situation géographique
La République démocratique du Congo est
située au coeur de l'Afrique avec une superficie de 2.345.000 Km².
Le Congo Kinshasa s'étend de l'océan Atlantique au plateau de
l'Est et couvre la majeure partie du bassin du fleuve Congo. Le Nord du
pays, notamment les provinces de l'Equateur et Orientale, est le plus
boisé avec près de 60 millions d'hectares10(*), l'Est du pays est
constitué de montagnes, de collines, de grands lacs mais aussi de
volcans. Le Sud et le Centre sont constitués de savanes arborées
qui forment un haut plateau riche en minerais. Dans cette vaste étendue
de terre, seule une quarantaine de kilomètres à l'extrême
Ouest s'ouvre sur l'Océan.
Le Congo partage 9.165 Km de frontières avec neuf pays
voisins : à l'Ouest, la République du Congo, à l'Est,
l'Ouganda, le Rwanda, le Burundi et la Tanzanie, au Nord, la RCA et le Soudan
et au Sud, la Zambie et l'Angola.
La RDC compte plus ou moins 60 millions d'habitants. Elle est
subdivisée en onze provinces11(*) à savoir la ville de Kinshasa, les provinces
de Bandundu, Bas-Congo, Equateur, Kasaï-Occidental, Kasaï-Oriental,
Katanga, Maniema, Nord-Kivu, Sud-Kivu, Orientale. Les provinces sont
subdivisées en districts, les districts en territoires (en milieu
rural) et en communes (en milieu urbain), les territoires en secteurs, les
communes en quartiers, les secteurs en groupements, les groupements en
villages. Il y a quatre langues nationales (kikongo, lingala, swahili,
tshiluba12(*)) et plus ou
moins 250 dialectes13(*).
Le pays est régi par une Constitution. Il existe actuellement au niveau
central un Président de la République, un Premier ministre, des
ministres. L'actuelle Constitution prône la décentralisation
administrative mais les mesures de mise en application devront, comme
d'ailleurs par le passé, attendre encore.
B.
Climat
La RDC possède une grande variété de
climats et de paysages. Les influences de l'océan Atlantique, de
l'océan Indien, de la zone équatoriale et des régions
montagneuses de l'est font bouger le paysage et le climat du pays.
La réputation du pays est celle d'avoir un climat chaud
et humide sur la plus grande étendue de son territoire et une
pluviosité abondante, en zone équatoriale et tropicale humide. En
effet, le pays s'étend de façon inégale à cheval
sur l'Equateur à peu près jusque 5° de latitude nord et
13° de latitude sud.
Au niveau de l'Equateur, le thermomètre ne descend
qu'exceptionnellement en dessous de 20°C. Sur le pourtour, au contraire,
les nuits sont plus froides. Dans le nord-est, l'est et le sud-est,
régions de plateaux et de montagnes, l'altitude modifie
considérablement les conditions climatiques. La température est
en moyenne de 25°C autour de la cuvette, de 26°C sur la côte,
de 18 à 20°C à l'altitude de 1 500 mètres, de 16
à 17°C à 2 000, de 11°C à 3 000
mètres et de 6°C à 4 000 mètres6.
La République démocratique du Congo
bénéficie, généralement, de deux saisons,
c'est-à-dire sèche et pluie. La répartition des saisons
n'est pas semblable dans tout le territoire et n'est pas égale en
durée. Dans la partie nord du pays, les saisons de pluies durent du mois
d'avril à la fin du mois de juin et du mois de septembre à la fin
du mois d'octobre. Les saisons sèches durent de début novembre
à fin mars « grande saison sèche » et de
début juillet à fin août « petite saison
sèche ». Au sud de l'Equateur, le rythme des saisons est
exactement inversé. Dans les régions montagneuses de l'est, les
deux saisons sèches ne durent qu'un mois, en janvier et en juillet. Dans
le sud et le sud-est du Katanga, la saison des pluies commence à la
mi-octobre et se prolonge jusqu'à la mi-mai. Dans le Nord-Katanga et le
Sud-Kasaï, les pluies commencent début octobre pour cesser fin
avril, mais une petite saison sèche s'intercale au mois de janvier.
Ce grand pays au coeur de l'Afrique comprend trois climats: le
climat équatorial, le climat tropical et le climat de montagne.
C.
Démographie
La RDC a une population d'environ 60 millions d'habitants,
avec une densité de 26 habitant/Km² dont plus de 70 % vivent en
milieu rural. La population congolaise a été estimée
à 39 millions d'habitants en 1936, 45 millions en 1991 et 50,5 millions
en 1999 dont plus d'un tiers habitent les grandes agglomérations
urbaines du pays comme Kinshasa, Lubumbashi, Mbuji-Mayi, Kananga, et Kisangani.
La croissance démographique est de 2,9%. En effet 59% de la population
congolaise a moins de 20 ans, 38% est âgée entre 20 et 59 ans et
4% a un âge supérieur à 60 ans, ce qui prouve que la RDC a
une population très jeune (Chasteland 1994), l'alphabétisation
est de 67,2% et son indicateur de développement humain est de 0,391. Les
différents rapports du Programme des Nations Unies pour le
développement classe la RDC à la 167ème
position sur 177 pays.
La République démocratique du Congo est l'un des
pays les plus pauvres du monde, avec des inégalités très
marquées malgré ses multiples et diverses richesses. Cette
situation s'explique surtout par les différents conflits aux effets
dévastateurs qu'a connus le pays.
Les violations des droits humains, - résultat des
conflits armés - en particulier des enfants et des femmes, ont eu des
répercussions très profondes au sein des populations. En 2002,
80 % de la population vivait en dessous du seuil de pauvreté
fixé à 2 dollars par jour. Près de 44 % des femmes et
environ 22 % des hommes n'ont aucun revenu.
D.
Agriculture
La RDC a des fortes potentialités agricoles. Ainsi
l'agriculture paysanne occupe 70% de la population active. Ce pays est l'un des
pays au monde qui dispose d'une terre hyper fertile où on peut cultiver
pendant toute l'année. Sur les 80 millions d'hectares de terres fertiles
dont elle dispose, seulement 10% sont actuellement exploités. Le
potentiel de ce secteur est impressionnant et devrait permettre d'assurer le
développement socio-économique du pays. Cependant, le pays
enregistre depuis plusieurs années une forte régression de ses
performances agricoles au point de ne plus être en mesure de
répondre à la demande alimentaire intérieure14(*).
E.
Mines
S'agissant des ressources minières, l'on doit
apprécier que « d'après leur part dans le monde, les
principales matières premières de la RDC sont, dans l'état
actuel des connaissances, le cobalt « 36 % », le tantale
« 25 - 65 % », l'étain « 7 % »,
le cuivre « 6 % »et les diamants « 25
% »15(*).
On trouve également de l'or, du zinc, du
manganèse, du charbon, du cadmium, de la cassitérite, mais les
ressources énergétiques sont faibles: bien que le barrage d'Inga
sur le fleuve Congo assure, avec le centrale hydro-électrique de Katanga
à Kinshasa, la presque totalité de l'approvisionnement du pays en
courant, il ne fonctionne qu'au quart de sa capacité. De plus, le
pétrole extrait depuis 1976 sur le plateau continental reste
sous-exploité.
De ce qui précède, il n y a point de doute que
la RDC possède un important potentiel de ressources naturelles et
minérales. Aussi, le gouvernement a entrepris une série de
reformes visant la restructuration des entreprises publiques dont celle du
secteur minier. Ces réformes se sont matérialisées par la
promulgation d'un nouveau code minier de 2002 ainsi que par la mise en place
des structures garantissant une bonne application de ce code
« cadastre minier, cellule de planification minière,
etc. ». La nouvelle loi se veut attractive pour de nouveaux
investissements en tenant compte de la conjoncture mondiale du secteur.
Les principales exploitations de cuivre et de cobalt sont
dominées par la Gécamines et ses partenaires. Le diamant
industriel est extrait par la Miba.
Mais dans un pays où les rebellions sont
récurrentes, une grande partie de l'exploitation du produit minier se
fait clandestinement.
E.
Hydrographie
La RDC dispose d'un réseau hydrographique très
dense. Le fleuve Congo a un débit de 75.000 m /s et constitue, sur
ce plan, le deuxième fleuve au monde après l'Amazone
« Brésil ». Par sa longueur « 4700
km », il est le deuxième fleuve en Afrique après le
Nil. Elle est traversée par d'innombrables rivières et lacs qui
rendent parfois inaccessibles de vastes étendues du territoire national.
A elle seule, la RDC détient 25 % des ressources en eaux
d'Afrique16(*). Il existe
d'autres richesses dans le domaine hydroélectrique notamment le barrage
d'Inga qui alimente plusieurs pays africains en courant électrique
d'origine naturelle. La liste n'est pas exhaustive dans le cadre de cette
recherche dont ce n'est pas l'objectif.
Contrairement à d'autres pays du continent africain qui
sont arides, désertiques et dont le sol et le sous-sol sont
généralement pauvres, il faut reconnaître que la nature a
été généreuse à l'égard de la RDC.
G.
Infrastructures de transport
Le pays souffre d'un manque de voies de communication fiables.
Le système de transport dont l'implantation remonte à
l'époque coloniale est constitué de plus de 15.000 Kms de voies
navigable sur le fleuve Congo, 5.033 kms de voies ferrées, 145.000 kms
de routes dont à peine 2.800 kms ont été
goudronnées et 284 plates-formes aéroportuaires. Actuellement,
les infrastructures et l'équipement du secteur des transports se
trouvent dans un très mauvais état, ce qui ne permet pas
d'assurer à l'économie nationale et au corps social les
facilités et la sécurité des déplacements.
La RDC se trouvant à cheval sur l'Equateur, cette
position permet au fleuve Congo d'avoir un régime régulier au
niveau de la capitale « Kinshasa » rendant possible la
navigation même en saison sèche. Le seul et l'unique moyen de
transport est la voie fluviale navigable de Banana à Matadi et de
Kinshasa à Kisangani via la province de l'Equateur. Plus de 70% du
tonnage des produits vivriers de la province de Bandundu, le principal
fournisseur de la ville de Kinshasa, arrivent par la voie fluviale. On estime
que plus de 30.000 tonnes de produits vivriers arrivent à Kinshasa
chaque mois au port privé de « l'ONTRA »,
jusqu'à Maluku.
Disons que c'est le secteur du transport fluvial qui
possède le coût de l'exploitation le plus bas en RDC par rapport
aux autres moyens (aérien, routier, et voie ferrée)
1.1.2.
Au niveau local : le territoire de Bagata
A.
Localisation
Le territoire de « Bagata » est
situé au centre-ouest de la République démocratique du
Congo. Il fait partie du district de Kwilu dans la province de Bandundu. Il a
pour entités limitrophes, la ville de Bandundu et les districts de
Mai-Ndombe et Plateau au Nord, le territoire d'Idiofa à l'Est et les
territoires de Bulungu et Masi-manimba au Sud.
Le territoire de « Bagata », comprend cinq
collectivités à savoir : Kizweme, Kwango-Kasaï, Kwilu
Ntobere, Manzasay et Wamba et deux cités Bagata et Fatundu. Les secteurs
sont subdivisés en groupements (un groupement comprend 1 à 7
villages).
Figure 1 : Carte du territoire de Bagata
B. Les
populations
Selon les statistiques officielles de l'Institut national des
Statistiques, organisme dépendant du Ministère du Plan et de
l'Administration du territoire, sur base du recensement scientifique intervenu
au mois de juillet 1984, le territoire de Bagata couvre une superficie de
16.898 km² et compte 214.231 habitants soit 13 habitants par km² dont
9.077 seulement habitent la cité de Bagata, chef-lieu du territoire, et
3.960, la cité de Fatundu17(*).
Le territoire de « Bagata », est
territorialement occupé par les Yanzi à près de 90%. Les
autres tribus sont les Teké et les Mbala. Le dialecte des Bayanzi est le
Kiyanzi. Ils appartiennent au groupe des usagers du kikongo, une des quatre
langues nationales que compte la RD Congo.
Pour comprendre comment et dans quelle mesure les cultures
humaines diffèrent entre elles, si ces différences s'annulent ou
se contredisent, ou si elles concourent à former un ensemble harmonieux,
il faut d'abord essayer d'en dresser l'inventaire. Mais c'est ici que les
difficultés commencent, car nous devons nous rendre compte que les
cultures humaines ne diffèrent pas entre elles de la même
façon, ni sur le même plan. Nous sommes d'abord en présence
de sociétés juxtaposées dans l'espace, les unes proches
des autres. Nous devons compter avec des formes de la vie sociale qui se sont
succédé dans le temps et que nous ne pouvons connaître par
expérience directe18(*).
En ce qui concerne la question de l'organisation sociale, les
Bayanzi19(*) sont
matrilinéaires c'est-à-dire que chaque individu est lié au
clan de sa mère. Basée sur la famille élargie, les
structures de la parenté se présentent comme suit :
Le « ndwo » est le clan. Il
regroupe les descendants d'un ancêtre supposé être unique.
Les membres d'un même « ndwo » ne se
connaissent pas forcément entre eux mais ils possèdent une
même devise et sont soumis aux mêmes interdits. Le mariage est
interdit entre membres du même « ndwo »
quand bien même ils ne sont pas de même famille.
Une autre subdivision est celle appelé le
« zum » le ventre. Le
« zum » correspond à la lignée et
regroupe tous les descendants en ligne maternelle d'un ancêtre
défunt. C'est une subdivision importante car chacun sait de quel
« zum » il dépend et les liens entre ses membres
sont très forts tant dans le monde présent que pour
l'au-delà. C'est pour cette raison qu'ils sont
généralement enterrés à une même place au
cimetière.
Enfin, vient le « nzo » la maison,
celui-ci rassemble toutes les personnes vivantes placées sous
l'autorité du membre le plus âgé du
« nzo ». Ce dernier s'appelle
« nganzo » qui signifie littéralement celui qui
possède la maison. Le « nganzo » est le responsable
de l'ordre social et religieux du clan. En cas de procès, c'est lui seul
qui a le droit de prendre la parole au nom des membres de son clan. Il est le
gérant des biens de la famille, les forêts, la rivière, les
plantations...
Sur le plan religieux, il garde les fétiches de la
famille et leur offre les sacrifices qu'il convient. Il incarne le contact que
le clan garde avec ses ancêtres défunts ainsi qu'avec tous les
membres décédés du clan.
Seuls les neveux de l'oncle peuvent succéder au
« nganzo ». Plus précisément, c'est le
garçon le plus âgé, parmi les enfants des soeurs de l'oncle
qui peut prétendre à la succession. Les neveux font partie de la
Cour de l'oncle.
Ce système matrilinéaire en matière de
succession trouve sa justification dans le postulat selon lequel le cordon
ombilical constitue l'argument le plus pertinent pour établir
l'appartenance de la personne à la lignée, et que d'autre part,
on est plus certain de la maternité de l'enfant que de sa
paternité.
Seuls les hommes peuvent devenir
« nganzo ». Le fardeau spirituel des charges à
assumer ne saurait permettre à la femme, pense-t-on, de cumuler ces
fonctions avec celles des incessants travaux des champs20(*).
Chez les Bayanzi traditionnels, le système
matrilinéaire décrit ne permet pas d'accorder une grande
importance à la famille restreinte composée du père,
mère et enfants. La solidarité se manifeste autour du nzo
« maison » tel que brièvement défini.
Certains traits particularisent cette tribu notamment le fait
que lorsqu'un « Muyanzi » meurt en ville, on lui coupe ses
ongles et ses cheveux qui sont rapatriés au village où un deuil
est organisé en grandes pompes. L'objectif poursuivi est d'assurer la
réintégration du mort dans la structure villageoise et
clanique.
La plus grande particularité est celle du
kétyul. En effet, lorsqu'un enfant, quel que soit le sexe, naît
avec ou sans défaut, brave ou non, existe déjà pour lui un
conjoint potentiel dans un groupe de personnes bien définies. G. De
Plaen le note plus clairement en ces termes : « le mariage
est réglementé par certaines règles qui désignent
à chacun un groupe de personnes au sein duquel il peut se marier. C'est
généralement en fonction d'une union antérieure
contractée par son clan que l'homme doit choisir son épouse dans
un clan défini et à une génération
précise.21(*)». S'agissant des religions, les Bayanzi sont
animistes.
Tous ces développements nous permettront de mieux
comprendre les interactions existant entre les populations de Bagata et la
gestion des forêts.
C.
Climat
Le climat dans le territoire étudié, comme dans
le reste du district de Kwilu, varie selon deux saisons 22(*) : la saison de pluie qui
va approximativement de la mi-août à la mi-mai et la saison
sèche de la mi-mai à la mi-août. La saison sèche est
caractérisée par une période plus ou moins longue de
sécheresse et par des nuits relativement fraîches. La durée
de cette saison augmente au fur et à mesure que l'on s'écarte de
la zone équatoriale.
D.
Température
Les températures moyennes annuelles observées
s'élèvent à 25°C pour l'ensemble de la province.
Elles sont de 30°C dans la zone de climat équatorial et elles
varient entre 20°C et 25°C dans la zone de climat tropical. La
température la plus basse de la province est observée à
Kahemba et varie entre 16 à 28°C.
Tableau 1 : Indications climatologiques de onze
stations météorologiques à Bandundu.
Stations
|
1
|
2
|
3
|
4
|
5
|
6
|
Région du Centre (B1)
Kenge callée (Kenge)
Kiyaka (Kikwit)
Idiofa
Kwamouth
Mushie entane(Bagata)
Lubue (Idiofa)
|
400
735
700
307
380
400
|
9
10
23
29
3
6
|
1.495
(1)
1.700
1.535
1.600
1.500
|
3
3
3
31/2
31/2
3
|
38%
35%
37%
39%
44%
41%
|
16,2
20
26
-
-
-
|
Region du Nord (B2)
Inongo
Taketa (Oshwe)
|
310
400
|
829
18
|
1.600
1.600
|
21/2
21/2
|
34%
39%
|
21,0
|
Région du Sud (B3)
KasongoLunda
Feshie
Kahemba
|
545
900
1.050
|
829
30
629
|
1.400
1.700
1.695 (1)
|
31/2
21/2
3
|
42%
37%
40%
|
14,1
13,8
13,3
|
Source: Stations
météorologiques/Bandundu
Légende (1) :
Altitude (2) Nombre d'années observation (3). Pluies annuelles
moyennes. (4) Nombre de mois à pluviométrie inférieure
à 50mm. (5) pourcentage de pluies totales tombant pendant 3 mois les
plus humides. (6) Température mensuelle moyenne la plus basse.
Dans la ville de Bandundu, la moyenne des températures
maximales journalières atteint 32°c en avril et mai, la moyenne des
températures minimales journalières observée est de
19°c au mois de juillet. L'humidité relative proche de la
saturation, est très élevée : 98 à 100°c
pendant la saison humide avec des pluies de 270 mm au mois d'avril. Les
données du territoire de Bagata correspondent à celle de la ville
de Bandundu avec laquelle il est contigu.
E.
Pluviométrie
Selon le ministère du plan 2005, la pluviométrie
est fonction du climat, de la température et des saisons observés
sur l'étendue de la Province pendant un an. Ainsi donc, dans la zone
équatoriale, les précipitations sont à hauteur de 1.500
à 2.000 mm/an. Tandis que dans la zone tropicale, les hauteurs des
précipitations sont comprises entre 800 et 1.500 mm/an. En effet, les
pluies sont abondantes de septembre à mai, avec des différences
peu importantes entre les zones du Nord (Inongo : 1.800mm) et Sud (Kahemba
1.660mm). Ces pluies sont plus abondantes en début de saison (septembre
à décembre).
On peut comptabiliser cette situation de la manière
suivante :
- Nombre de jours de la saison sèche : 90 jours
- Nombre de jours de la saison de pluie : 275 jours.
F.
Hydrographie
La nature a doté la Province du Bandundu d'un
réseau hydrographique très dense et varié. Ruisseaux,
rivières, lacs et fleuve s'y retrouvent. La localisation
géographique des principaux cours d'eau et lacs se présente de la
manière suivante :
- District de Mai-Ndombe : Lac Mai-Ndombe, les rivières
Lotoy, Lokoro, Lukeni et Mfimi - District des Plateaux : Le Fleuve Congo
et la rivière Kwa
- District du Kwango : Les Rivières Kwango, Wamba,
Bakali et Konzi
- District du Kwilu : Les Rivières Kasaï, Kwilu,
Inzia, Kwenge, Lutshima
- Lufuku, Bwele, Luie, Gobari, Nko, Kamutsha, Mbiem etc.
La principale caractéristique de ce réseau
montre que les eaux coulent du Sud au Nord et se déversent vers l'Ouest
constituant ainsi les principaux affluents du fleuve Congo. Enfin, outre les
rivières indiquées supra, il existe dans la Province des
centaines de petits lacs et rivières aussi importants que les
premières : et ce, en termes de navigation, de production halieutique,
énergétique, minière et autres.
G.
Potentialités agricoles
Le potentiel des sols de la Province du Bandundu est
extrêmement varié. Dans l'ensemble, ces sols sont
constitués d'une texture de sables limons-argileux et de limons sableux
et se répartissent comme suit à travers la Province :
Tableau 2: Répartition des sols dans la
province de Bandundu
Localisation
|
Type de sol
|
Observation
|
Mai-Ndombe
|
Limon argileux
|
Teneur élevée en limon argileux qui
environne le Lac Maindombe
|
District du Kwango
|
Sols sableux et sabloargileux
|
Texture et composition pauvre, sol de type Kalahari
|
District du Kwilu
|
Sol d'arenoferrals
|
Sol forestier médiocre à moyen. Bon sol de
savane, sol sablo-argileux sur les
pentes des vallées et fonds sableux sur les plateaux
|
Nord de la Province
|
Ferra sols et aréna
Ferrals
|
Voir extrême Nord la fertilité du sol va de
moyenne à médiocre
|
Sud de la Province
|
Aréno ferrals
|
Sol à prédominance et texture sablonneuse
|
Source : Fiche technique
Région du Bandundu MINIPLAN, 1988.
Le potentiel agricole de la Province dépend de la
nature de ces sols dont la fertilité est moyenne ou médiocre. Les
meilleures terres pour l'agriculture se rencontrent dans le nord de la
Province, particulièrement dans le Territoire de Kutu et dans le rayon
de Mushie Pentane dans le territoire de Bagata « +/- 33 kms de
Bandundu Ville ».
Dans le territoire de Bagata et dans d'autres territoires de
la province de Bandundu, les gens vivent de l'agriculture ce qui leur permet
de scolariser leurs enfants.
H.
Artisanat
L'artisanat existe chez les Bayanzi sous trois formes
principales : la poterie, la forge et le tissage. La poterie est une
activité essentiellement féminine et se pratique dans certains
villages en fonction de l'écologie : par exemple dans le
secteur de MANZASAY, groupement de KINSU où on fabrique des
cruches. Cette activité est individuelle et ne demande aucun outil. La
terre qui sert de base à la confection des divers objets est prise
à la saison sèche dans le lit de certaines rivières.
Celui qui va la chercher ne peut avoir eu des relations
sexuelles auparavant. Cette terre ne fait l'objet d'aucune restriction, elle
appartient à tous ; les poteries sont façonnées à
la main après qu'on les ait posées sur un fond de calebasse pour
en permettre la rotation, on les cuit ensuite en plein feu après les
avoir laissé sécher au soleil23(*).
Il existait auparavant des tisserands mais cette
activité a totalement disparu et on ne peut plus la connaitre
qu'à travers des souvenirs. Aujourd'hui, l'activité la plus
répandue est la menuiserie qui ne disparait pas parce qu'elle se
transmet de père en fils.
1.2.
Richesses de la forêt congolaise
Les écosystèmes forestiers de la
« RDC » recèlent un grand nombre d'espèces
animales et végétales qui la placent en bonne position sur le
plan mondial et africain. La RDC est cinquième dans le monde par sa
diversité animale et végétale. Elle est la première
à l'échelon africain en ce qui concerne la diversité des
mammifères et des oiseaux, et troisième pour la diversité
de sa flore, après Madagascar et l'Afrique du Sud. Elle compte notamment
409 espèces de mammifères, 1117 espèces d'oiseaux, 400
espèces de poissons, et plus de 10 000 espèces
végétales24(*).
La RDC compte cinq sites naturels du patrimoine mondial, plus
que tous les autres pays africains réunis. Ces sites abritent des
espèces rares et spectaculaires. Le taux d'endémicité
parmi les plantes et les petits mammifères est également
élevé: 6 % de ses mammifères et 10 % de ses plantes n'ont
été trouvés qu'en RDC. La RDC contient 12 parmi les 30
« centres d'endémisme végétal »
identifiés en Afrique par l'IUCN et le WWF. Elle contient aussi deux
« régions d'endémisme » d'oiseaux'
identifiées par Birdlife International.25(*)
1.3.
Fonctions de la forêt
Depuis les temps mémorables, la forêt joue
plusieurs fonctions bénéfiques pour l'homme et l'humanité.
Les forêts se trouvent ainsi au carrefour de nombreux problèmes
environnementaux. En Afrique, comme en RDC, M. Kamto note que, par rapport aux
autres législations du domaine de l'environnement, l'élaboration
des législations forestières suscite beaucoup de passions et sont
sans doute parmi les riches législations environnementales
nationales26(*).
A. Kiss aborde la question de la multifonctionnalité de
la forêt en ces termes : « ... elles ont des rapports
de dépendance souvent réciproques avec un grand nombre d'autres
éléments de la biosphère. D'une part, elles constituent
elles-mêmes des écosystèmes mais elles peuvent
dépendre des ressources en eaux du sol, de l'état de la faune et
de la flore sauvage et peuvent être menacées par des pollutions de
toutes sortes comme l'intrusion d'espèces étrangères.
D'autre part, elles contribuent à la
régularisation du régime des eaux, au renouvellement du sol et
à sa sauvegarde contre l'érosion et d'autres formes de
dégradation, elles jouent un important rôle d'atténuation
de l'effet de serre et assurent la sauvegarde de la diversité
biologique. Ainsi, la protection des forêts mène naturellement
à la protection intégrée de l'environnement, notamment par
des normes juridiques. (...). Enfin, par leur rôle économique et
social, ajouté à leur importance pour l'environnement, les
forêts peuvent être considérées non seulement comme
éléments essentiels, mais comme le symbole même du
développement durable »27(*). L'auteur présente globalement cinq fonctions
suivantes jouées par la forêt.
1.3.1.
Fonction économique et sociale
Approximativement, 35 à 40 millions de congolais, soit
70% de la population, vivent de manière quotidienne de la
forêt28(*). A lire
le rapport 2008 rédigé par le Ministère de l'Agriculture,
cette situation vaut encore aujourd'hui29(*). En 1997, le secteur forestier contribuait pour 10 %
du PNB30(*). En 1998, la
valeur totale du bois exporté en grumes et en sciage a atteint
près de 41 millions $ EU31(*). A cause de la guerre dont le terrain de
prédilection est la forêt, la contribution de ce secteur au PNB a
baissé atteignant en 2007 seulement 8%, à en croire les
données du ministère congolais de l'environnement publiées
en 2008.
Le bois et le charbon de bois procurent 80 % de
l'énergie domestique et servent à la construction des maisons
d'habitation, des bateaux comme la pirogue. Les exploitants artisanaux
produisent la plupart du bois vendu sur le marché local pour divers
besoins notamment pour l'ameublement, l'outillage, l'ornement et l'art. Donc,
Le bois de forêt est la principale source d'énergie
économiquement accessible et culturellement acceptée. Le gibier
est probablement le principal aliment forestier, avec une consommation
estimée à plus d'un million de tonnes par an32(*). En termes de valeur
économique, il a été estimé que le gibier extrait
de la forêt congolaise représente à l'heure actuelle une
valeur d'un ordre de grandeur supérieur à 1 milliard de dollars
par an33(*).
En 1990, 32 entreprises forestières étaient
enregistrées et employaient près de 9.000 personnes34(*). Ce nombre a chuté
depuis lors. Par exemple en 2002, ce secteur employait près de 6.000
personnes pour une masse salariale d'environ 6.5 millions de dollars35(*).
Quand la lueur d'une paix est apparue, s'est de nouveau
manifesté de l'engouement pour l'exploitation forestière. A titre
de preuve, le nombre de sociétés forestières
enregistrées s'élevait à près d'une soixantaine en
2006 et la Commission chargée de la conversion des anciens titres
forestiers a reçu 156 requêtes36(*). Ce qui prouve que le secteur demeure prometteur, et
pourrait devenir, selon certains, le principal employeur du pays après
la fonction publique37(*).
1.3.2.
Fonction de pharmacopée
Dans son livre « sauver la
planète », l'ancien vice-Président des Etats-Unis,
devenu depuis Prix Nobel de la Paix, AL Gore écrit : « si
le rythme de déforestation se maintient, c'est toutes les forêts
tropicales qui auront disparu au siècle prochain. Le monde entier aura
perdu la mine la plus riche d'informations génétiques de la
planète et par voie de conséquence les traitements possibles de
bien des maladies, car des centaines de médicaments proviennent des
animaux et des plantes des forêts tropicales »38(*). Il va de soi que les grandes
industries chimiques et pharmaceutiques les plus connues s'approvisionnent au
sein de la vaste étendue forestière tropicale de la RDC. De
même, un grand nombre de congolais vivant en milieu rural n'ont pas
accès aux soins de santé dans les hôpitaux, ils recourent
à la médecine traditionnelle basée sur les plantes. Il
n'existe cependant pas de statistiques fiables connues pour évaluer la
contribution de la forêt à la pharmacopée.
1.3.3.
Fonction écologique
Il existe un lien étroit entre la préservation
des forêts et les variations climatiques. L'ONG internationale Greenpeace
estime que jusqu'à un quart des émissions totales mondiales de
gaz à effet de serre est imputable à la déforestation
tropicale. Elle explique que 8% du carbone terrestre stocké dans les
forêts vivantes au niveau mondial se trouvent dans les forêts de la
RDC. C'est, poursuit-elle, plus que n'importe quel autre pays d'Afrique et on
estime que la RDC possède le quatrième plus grand
réservoir forestier de carbone du monde. Elle estime que d'ici à
2050, la déforestation en RDC pourrait libérer jusqu'à
34,4 milliards de tonnes de CO2, soit à peu près
l'équivalent des émissions de CO2 du Royaume-Uni au cours des
soixante dernières années39(*).
1.3.4.
Fonction récréative et touristique
Les écosystèmes forestiers avec leur physionomie
nous offrent des paysages à plusieurs facettes et d'une beauté
qui présente un intérêt pour le tourisme, l'industrie
cinématographique, et de manière générale, pour
toute activité compatible avec la préservation et la
quiétude en forêt. Jadis, les touristes s'y rendaient pour
observer les espèces exotiques comme Okapis, Bonobos. Cette
activité a été fortement ralentie aujourd'hui à
cause de la guerre. Cependant, la forêt n'a pas pour autant perdu sa
capacité attractive.
1.3.5.
Fonction morale et culturelle
En RDC comme dans beaucoup d'autres pays africains, la
forêt comporte une dimension hautement symbolique. En son sein, se
déroulent les cérémonies initiatiques et les rituels
magiques. Elle est source des mythes et légendes comme ceux qui
interdisent de parler haut et fort en forêt à la tombée de
la nuit, parce que, raconte-t-on, les ancêtres bienveillants se pressent
à cette heure, de prendre leur repas en vue de se rendre au village et y
assurer la protection des habitants pendant la nuit. Malheur aux bavards car
leurs toits ne seront pas protégés ! De même, il
existe plusieurs espaces forestiers qui sont frappés d'interdits
d'exploitation pour des raisons rituelles.
La fonction morale et culturelle de la forêt est
reconnue par plusieurs acteurs, y compris, non africains. Dans son discours
d'ouverture aux journées scientifiques organisées par le
Réseau « Droit de l'environnement », B. Devallois
explique que jadis les forêts jouaient un rôle de sanctuaire
à l'état pur40(*). Il poursuit : « L'arbre
représente un symbole de vie, véritable lien entre la Terre
où il plonge ses racines et la voûte du Ciel qu'il tente de
joindre par sa cime. La forêt symbolise l'inconscient par son
obscurité et son enracinement profond »41(*).
A. DE DECKER déclare dans son discours introductif
à la conférence internationale de Bruxelles :
« Dans les mythes fondateurs de toutes les civilisations, la
forêt apparaît comme un lieu légendaire et archaïque,
celui où vivaient les faunes et les nymphes, le domaine des sorciers et
des esprits, le jardin des origines, la source des savoirs, le lieu de la
profusion et de l'exubérance de la nature. La forêt, et l'immense
forêt tropicale en particulier, est dans l'inconscient collectif l'image
spatiale de l'inépuisable, de l'absence de lois, une figure du
désordre originel, le lieu aussi où se construit la
vérité. La forêt, les arbres et les fruits, les animaux et
les forces naturelles sont partout étroitement liées, et si c'est
bien dans la forêt d'Eden qu'Eve mangea le fruit défendu, c'est
dans cette même forêt des origines que grandit l'arbre de vie,
l'arbre de la science, de la connaissance, de la victoire sur la mort et sur le
mal »42(*).
Cette fonction conserve encore une grande emprise sur le monde rural et joue un
rôle équivalent à toutes les autres pour la protection de
la forêt.
CHAPITRE 2. EXPLOITATION FORESTIÈRE EN MILIEU RURAL
La forêt est la mère nourricière d'une
grande partie des populations rurales. L'exploitation de celle-ci constitue un
enjeu important et entraine souvent des conflits entre populations,
représentants coutumiers et autorités publiques.
L'exploitation forestière a un lien avec le droit
foncier. Il n'est pas concevable de parler de l'exploitation forestière
sans penser à la politique foncière.
Sur un plan plus général, le principal constat
qui se dégage de l'évolution des rapports fonciers contemporains
est la forte croissance démographique, la multiplication des conflits,
la montée des besoins monétaires et leurs conséquences sur
l'extension des défrichements et des cultures, provoquant ainsi la
dégradation des ressources forestières. La perspective d'une
privatisation des terres apparaît aux un comme une solution et aux autres
comme un repoussoir43(*).
En réalité, il faut reconnaître qu'en RDC,
la tendance à la privatisation des terres et des forêts
communautaires par des chefs coutumiers reste d'actualité au
mépris des codes foncier et forestier fixant le mode de gestion du
patrimoine foncier et forestier, et cela même au sein des populations se
réclamant d'un même ancêtre commun comme chez le peuple
Yanzi du Territoire de Bagata dans le Bandundu à l'Est de
Kinshasa44(*).
Ce chapitre permet de montrer l'écart existant entre le
prescrit légal, les attributions des autorités étatiques
et les prérogatives traditionnelles des chefs coutumiers. Pour y
parvenir, nous procéderons en deux temps : d'abord, circonscrire
les liens existants entre le foncier et le forestier et ensuite les modes
locaux d'exploitation forestière. On jettera aussi un coup d'oeil sur le
système forestier dans quelques pays de la région.
2.1.
Bref aperçu sur le système foncier congolais
Lors de son établissement au Congo, l'Etat
Indépendant adopta en matière foncière deux règles
essentielles : Le respect des occupations indigènes en vue du libre
exercice des droits coutumiers et le droit de l'Etat aux terres vacantes en
vertu du principe généralement admis que les biens sans maitre
appartiennent à l'Etat45(*)
La réglementation foncière congolaise
(Zaïroise) dans la période post-indépendante est
déterminée par les principaux textes législatifs
suivants:
- l'ordonnance-loi n°66-343 du 7 juin 1966, dite "la loi
Bakajika", par laquelle la République du Congo
« Zaïre » reprenait tous ses droits foncier,
forestier, et minier concédés ou cédés pendant la
colonisation;
- les lois n° 71-008 et n° 71-009 du 31
décembre 1971 portant modification de la constitution, qui affirme (art
10) que " le sol et le sous-sol zaïrois ainsi que leurs produits naturels
appartiennent à l'état46(*).
2.1.1.
Le système étatique institué par la loi
foncière
Les rapports fonciers sont, à ce jour, essentiellement
régis par la loi n° 073-021 du 20 juillet 1973 portant sur le
régime général des biens, les régimes foncier et
immobilier et le régime des sûretés, telle que
modifiée et complétée par la loi n° 80-008 du 18
juillet 1980. Cette loi est intervenue dans le contexte particulier de l'hyper
centralisme étatique et d'une volonté politique de maîtrise
des processus économiques47(*).
Ses origines remontent à l'ordonnance du
1er juillet 1885 relative à l'occupation des terres sur le
territoire de l'EIC et dont les grands traits du régime foncier furent
les suivants :
- toute concession des terres faites par les indigènes
est subordonnée à l'autorisation de l'État ;
- les terres présumées vacantes appartiennent
à l'État et ne peuvent être occupées sans titre
légal ;
- les terres occupées par les indigènes sous
l'autorité de leurs chefs sont régies par leurs coutumes et
usages et nul ne peut les en déposséder ;
- les droits privés existants ou qui seront acquis dans
l'avenir devront, pour être reconnus, être enregistrés par
un officier public48(*).
Ce texte marque la volonté claire du nouvel
État de contrôler toutes les transactions
foncières en définissant un cadre légal de
référence et lui permet de contourner les limites
résultant de la liberté de commerce consacrée par l'Acte
général de Berlin. La politique foncière mise en oeuvre
à travers l'activité législative du Roi Léopold II
aura pour objectif de lui procurer un maximum de ressources en vue de
poursuivre son entreprise financière.
Lorsque, le 15 novembre 1908, l'EIC devient officiellement le
Congo Belge, le domaine foncier privé de l'État, constitué
grâce à la théorie des terres vacantes, fera l'objet de
cessions ou concessions au bénéfice des sociétés
commerciales. Sans trop s'attarder sur la législation foncière
coloniale, indiquons simplement que l'article 15 de la Charte coloniale
modifié plus d'une fois constitua la source de toute la politique
foncière coloniale. De grandes concessions seront accordées non
pas seulement pour des raisons fiscales, mais surtout eu égard à
leur incidence sur le développement économique
général de la colonie. Des transactions se feront sous
réserve des droits des indigènes et après enquêtes
minutieuses de disponibilité. Toutefois, ce procédé ne
manquera pas de susciter certains conflits49(*).
Pendant la première décade de
l'indépendance, le régime foncier fut dominé par la
conception du droit colonial. La rupture sera consacrée en
dernière instance par la loi du 20 juillet 1973, elle-même faisant
suite à la loi Bakajika50(*) qui, visant à corriger les abus et lacunes
liés aux cessions et concessions antérieures au 30 juin 1960, fut
abrogée en 1971 à cause du désordre
occasionné. Une nouvelle proposition de loi d'avril 1972
débouchera plus tard sur la loi du 20 juillet 1973 telle que
modifiée et complétée par la loi du 18 juillet 1980. Base
de la législation foncière actuelle, elle s'inspire des
régimes précédents, mais se différencie de ceux-ci
par sa philosophie.
Trois grands traits caractérisent son économie
logique. Primo, le sol est la propriété exclusive,
inaliénable et imprescriptible de l'État. Secundo, les
particuliers peuvent exercer sur son domaine privé des droits
de jouissance sur le sol à travers les concessions qui sont des contrats
conférant des droits réels fonciers autonomes. Tertio, seul le
certificat d'enregistrement permet l'établissement et la transmission
des droits fonciers et immobiliers et constitue leur moyen de preuve.
Deux sortes de concessions sont organisées, à
savoir : les concessions perpétuelles et les concessions ordinaires. Les
premières sont réservées uniquement aux personnes
physiques congolaises, qui peuvent en jouir indéfiniment dans les
conditions de la loi. En revanche, les concessions ordinaires peuvent
être accordées aux personnes physiques ou morales congolaises ou
étrangères et ont une durée de 25 ans renouvelables. Il
s'agit de l'emphytéose, la superficie, l'usufruit et
l'usage51(*). La
domanialisassions des terres occupées par les communautés
locales a unifié le régime foncier et placé ces
terres dans le domaine privé de l'État, régi par la loi
foncière et ses mesures d'application. Nul ne peut donc se
prévaloir des droits fonciers ou immobiliers sur elles s'il n'est pas
détenteur d'un certificat d'enregistrement52(*).
Cette position de la loi pose deux problèmes. L'un est
conceptuel et tient au contenu à donner aux « communautés
locales » et au contour des « terres occupées par ces
communautés » et, l'autre, juridique, lié à
l'ambiguïté du statut des dites terres et de la nature des droits
sur elles.
Le concept de communautés locales n'apparaît pas
comme une catégorie juridique claire. Plusieurs expressions sont
utilisées par les auteurs pour les désigner. Ainsi, les citant
dans son étude consacrée à la gestion participative des
aires protégées, Busane Ruhana Mirindi dit « qu'on
recourt aux expressions : populations qui vivent à proximité des
ressources, les habitants de villages proches des forêts
contrôlées, la population locale, les intervenants locaux, les
groupes d'usagers, les villageois, les communautés villageoises, etc.
»53(*). Mafikiri
Tsongo, nous parle de la coexistence des règles de gestions
coutumières (par laquelle la terre est un bien collectif appartenant
à la communauté) et la loi foncière étatique (par
lesquelles l'état octroie un droit de jouissance sur les terres sous
forme de concession foncière individuelle)54(*).
Cependant, dans la pratique des transactions foncières,
force est de constater que les paysans recourent aux catégories
coutumières, alors que la coutume n'est plus formellement source des
droits fonciers depuis l'unification du régime foncier. En outre, alors
qu'ils ont été dépossédés de leur pouvoir
foncier par la loi du 20 juillet 1973, les autorités coutumières
continuent dans la pratique à jouer un rôle déterminant
dans l'attribution des terres. Cette situation est source de confusion des
droits et d'insécurité foncière.
De ce qui précède, une interrogation vient
à l'esprit : pourquoi le législateur, alors qu'il a
organisé les droits de jouissance sur son domaine foncier, a-t-il
postposé cette réglementation concernant les communautés
locales ?
Plusieurs explications peuvent être données pour
saisir cette position législative. On peut voir dans cette position une
manière pour l'État de vouloir éviter l'affrontement avec
les autorités coutumières dont le pouvoir politique et le
prestige sont fondés sur le pouvoir foncier. Organiser la maîtrise
foncière en reconnaissant des droits réels fonciers autonomes qui
confèrent aux paysans le pouvoir ultime d'aliéner librement leurs
droits pourrait menacer tout le système politique traditionnel que l'on
veut préserver et contrôler. La terre étant
considérée traditionnellement comme un support des relations
sociales de pouvoir et de fraternisation, il faut éviter une
réglementation qui menacerait la position sociale des chefs en
permettant aux paysans de s'affranchir vis-à-vis de leur
autorité. C'est pourquoi l'État observe un certain principe
d'équilibre dans la mise en oeuvre de la législation
foncière. Cela lui laisse dans la pratique une marge de manoeuvre pour
négocier le genre de rapports fonciers à développer avec
l'autorité coutumière. Cette attitude assure son autorité
sur l'espace paysan sans affronter le pouvoir coutumier.
D'autres parts, en postposant la réglementation des
droits de jouissance des communautés locales, l'État, investi par
des acteurs aux logiques patrimoniales et clientélistes, leur a ouvert
une brèche de spoliation et d'exploitation des espaces paysans. Dans ce
sens, le législateur, qui n'est autre que ces acteurs transformés
en producteurs des lois, a créé un espace d'accumulation.
Somme toute, il faut constater que pour la
sécurité juridique des utilisateurs du sol, le cadre juridique
foncier en milieu rural crée une discrimination entre, d'un
côté, les terres concédées
et assorties d'une protection légale
spéciale par un certificat d'enregistrement et, de l'autre, des terres
dont les utilisateurs ne bénéficient d'aucune protection
juridique péremptoire. Ainsi donc, « si aucune disposition n'est
prise rapidement, la question du développement rural, côté
population rurale, sera difficile à résoudre »55(*).
2.1.2.
Les pratiques en milieu rural : cas du territoire de Bagata
Dans les traditions congolaises, la terre est un bien
collectif et inaliénable dont la mise en valeur est liée au mode
d'organisation sociale et politique coutumière. D'une façon
générale, le sol congolais est réparti en plusieurs
propriétés claniques, héritage ancestral dont la
transmission de génération en génération se fait
suivant la lignée matrilinéaire ou patrilinéaire, selon le
cas.
En plus, dans la plupart des tribus du Congo, l'organisation
foncière est étroitement liée à la fonction
politique. Les terres appartiennent dans une certaine mesure aux chefs
coutumiers traditionnels dont le degré de hiérarchie varie d'une
tribu à l'autre, d'une province à l'autre. Ainsi par endroit, le
chef coutumier garant du système foncier traditionnel est soit un chef
de famille, de clan, de tribu, soit encore un monarque ou un prince d'une
entité administrative traditionnelle56(*).
Depuis l'époque coloniale, on a cherché à
« résumer », voir à codifier les
droit « indigènes » et notamment les droits
sur la terre à partir de quelque règles générales
censées s'imposer aux populations57(*).
Cette diversité de niveau de pouvoir qui
réglemente l'utilisation de la terre au besoin de l'habitat, de
l'agriculture ou de l'élevage, est à la base de nombreuses
difficultés à travers le territoire congolais pour la mise en
valeur des sols et l'utilisation du produit du travail de la terre. Nous
analyserons ici le cas de Yanzi de Bagata. Au sein même des
systèmes coutumiers, il est difficile de délimiter un domaine ou
une « logique foncière » autonome par rapport
à des logiques sociales multiple qui l'englobent58(*). La plupart des Etats Africain
ont affirmé leur monopole sur la propriété de la terre, se
posant à la foi comme les héritiers moderne des chefs de terre
anciens et comme les capitaines qui allaient mener le bateau
« modernisation » à bon port59(*).
Chez les Yanzi, l'espace foncier, sur lequel reposent bien
évidemment les éléments qui forment l'environnement, est
géré par quatre autorités en fonction du degré de
l'objet. Il y a le prêtre de la nature « ngalebui »,
le chef du clan « nganzo », le chef de terre
« mwél e bal », le chef coutumier ou chef de
groupement (Mwél). Chaque clan a son chef, ce qui indique qu'un village
compte plusieurs chefs de clans mais un seul prêtre de la nature et un
chef de terre. Le chef de groupement l'est pour plusieurs villages circonscrits
d'après la conquête de ce clan cheffal. S'il est possible pour un
chef de terre d'être un ngalebui ou prêtre de la nature, il n'est
pas possible pour le chef de groupement de le devenir. L'appartenance à son clan ne le permet pas.
Système foncier dans le Kivu60(*)
Dans la région montagneuse du Kivu, le système
foncier est influencé par une série des facteurs
démographiques, les éléments liés à la
commercialisation des produits agricoles qui accélèrent la
monétisation de l'économie traditionnelle et certains facteurs
institutionnels. Les indices archéologiques montrent que le peuplement
de cette région interlacustre serait fort ancien bien qu'on ne puisse
encore établir une ligne de continuité exacte entre des premiers
occupants et ses habitants actuels61(*). Mais on considère que le peuplement actuel
est très récent. Il est lié aux mouvements migratoires
déclenchés dans la zone Ougandaise suite à la
poussée des hamiteschwezi, des bito et de nyoro62(*).
Héritage des terres.
Selon la coutume, le système d'héritage des
terres dans la région montagneuses de Kivu est patrilinéaire
c'est-à-dire que la terre se transmet du père aux fils qui
doivent normalement, en tant qu'héritier de la partager63(*). Tandis qu'à Bagata, le
système d'héritage est matrilinéaire c'est-à-dire
que la terre de transmet de l'oncle aux neveux.
Les conflits fonciers sont en fait des
indicateurs révélateurs des évolutions effectuées
à la fois dans les systèmes fonciers traditionnels et les
réglementations formelles et suite à la coexistence de ces deux
derniers systèmes (Etatiques et Coutumiers)64(*). Dans les régions
montagneuses du Kivu, le régime de succession est patrilinéaire
c'est-à-dire la terre se transmette aux enfants du sexe masculin qui
doivent de partager équitablement le terrain du défunt. Les
descendants femelles n'ont droit à rien. Il arrive qu'à la mort
de l'exploitant, certains des enfants de sexe masculin son encore trop jeunes
pour hériter les terres. L'aîné peut ainsi s'occupé
une grande partie de la concession et souvent il ne remet plus tard à
ses frère de petit lopins de terres qui ne leurs permet pas de
satisfaire leurs besoin65(*).
2.2. Les systèmes locaux
d'exploitation des forêts
Il sera nécessaire d'expliquer comment les
communautés s'approprient les forêts avant d'analyser leurs
systèmes d'exploitation.
2.2.1. Durabilité des forêts en Afrique
centrale66(*)
Les forêts de l'Afrique
centrale sont depuis longtemps utilisées par l'homme.
En Afrique centrale des nombreuses conventions internationales
ont une incidence directe ou indirecte sur la gestion durable des forêts,
en particulier :
- CITES (Convention on international Trade in Endangered
Species);
- Convention sur la Diversité Biologique, PNUE, Rio
1992 ;
- Convention sur les changements climatiques ;
- Convention sur la lutte contre la désertification.
Tous les pays du Bassin du Congo sont dotés d'un cadre
juridique réglementant le secteur forêt-bois, comprenant :
- Un code forestier ;
- Des normes techniques.
Ces dernières années, on vit augmenter la place
de l'aménagement forestier dans les réglementations de tous les
pays du Bassin du Congo.
Cependant, ces pays ont atteint actuellement des niveaux
différents dans la normalisation des activités liées
à l'aménagement des forêts de production.
A cela il faut ajouter qu'il est indispensable d'appliquer les
décisions prises et de suivre leur application. Cela nécessite
des institutions fortes et disposant des moyens adéquats pour faire
respecter les règles du jeu par tous. Le niveau de mise en oeuvre des
politiques de gestion des forêts est, lui aussi, variable d'un pays
à l'autre.
Tableau 3: Codes
forestiers actuellement en vigueur dans les pays du bassin du Congo
Pays
|
Référence des textes législatifs
en matière de gestion forestière
|
Gabon
République Centrafricaine
Congo Brazzaville
République Démocratique du
Congo
Cameroun
Guinée Equatoriale
|
Loi n°16/01 portant code forestier (31 décembre
2001)
Loi 90/003 portant code forestier centrafricain (9 juin 1960)
Nouveau code prévu pour 2007
Loi 16-2000 portant code forestier (20 novembre 2000
Loi 011/2002 portant code forestier 29 août 2002
Loi n°94-01 portant régime de forêt, de la
faune et de la pêche (24 janvier 1994)
LEY 1/1997, sobre el Uso y Manejo de los Bosques (Ley
Forestal)
|
Source : Association
internationale de bois tropicaux, Paris Avril 2007.
A. Le Cameroun67(*)
Le Cameroun est un pays d'Afrique centrale, situé
au-dessus de l'équateur entre, d'une part les 4ème et 13
ème degrés de latitude Nord et, d'autre part, entre les
8ème et les 16 ème degrés de longitude Est. Sa
superficie est de 475.000 Km². Sa population est estimée à
15 millions d'habitants. Ce pays est caractérisé par une
très grande diversité biologique qui le fait souvent qualifier
d'Afrique en miniature. Sur le plan écologique, on trouve les
forêts tropicales denses et humides, les forêts montagnardes, les
savanes humides et sèches, les galeries forestières, les steppes
etc. ...
a) Le fondement de base de la gestion
forestière au Cameroun
Le cadre normatif de la gestion communautaire a
été influencé par plusieurs faits socio-économiques
et les revendications démocratiques des années 90 en Afrique. Le
mouvement de réforme et de décentralisation s'est amorcé
au Cameroun au début des années 90.
Ces réformes et la décentralisation se sont
traduites par un certain nombre de mesures parmi lesquelles le vote d'un
ensemble de lois sur les coopérations et les groupes d'initiative
commune 1992 et la modification de la constitution en 1996.
A côté de la vague de réformes et de
revendications des populations locales, le sommet de Rio 1992 qui
demeure pour plusieurs acteurs le socle du véritable engagement des
nations et du reste de la communauté internationale en faveur de la
préservation de la qualité de la vie sur la terre, a servi de
catalyseur et d'impulsion d'une nouvelle vision en faveur de la gestion
durable et participative des ressources forestières au Cameroun.
C'est ainsi que face aux logiques d'exploitation
illégale des forêts, de gestion anarchique des redevances
forestières, de corruption, de conflits récurrents dans les
zones d'exploitation forestière ainsi que de pressions exercées
par les populations locales et les organisations de la société
civile, l'Etat Camerounais a senti la nécessité de promouvoir une
gestion durable et participative des dites ressources en prenant d'importantes
mesures politiques, législatives et règlementaires parmi
lesquelles :
- La loi n° 94/01 du 20 janvier 1994 portant
régime des forêts, de la pêche
- Le décret N° 95/ PM du 23 Août 1995
portant modalités d'application du régime des forêts
- Le décret N° 95/466 PM du 20 juillet 1995
fixant les modalités d'application du régime de la faune.
- La nouvelle politique forestière adoptée en
1995.
Cet arsenal politique, législatif et
réglementaire constitue aujourd'hui le fondement d'un changement de
stratégie d'approche visant à favoriser une gestion durable des
ressources forestières et fauniques et à impliquer les
populations locales et les organisations de la société
civile68(*).
b) La gestion de redevances forestières
annuelles69(*)
Dans le cadre du programme de réformes
économiques à moyen terme, pour la période
1997/98-1999/2000, le gouvernement Camerounais a fait de la fiscalité
forestière un instrument au service de la gestion rationnelle et
durable des ressources forestières, de l'efficacité de
l'industrie de transformation, de création d'une forte valeur
ajoutée et de distribution équitable des revenus
générés. Cette réforme fiscale permet une
décentralisation d'une portion importante et significative à
l'échelle locale, représentant jusqu'à trois fois la
dotation annuelle des communes par habitant. La redevance forestière
annuelle(RFA) qui s'applique dans les concessions forestières et les
ventes de coupe est répartie au profit de trois principaux intervenants
selon la proportion suivante :
- 50% pour l'Etat
- 40% pour les collectivités territoriales
décentralisées
- 10% pour les communautés locales
En plus des 10% des communautés, la taxe dite
« des 1000 FCFA » instituée par une mesure
parafiscale pour les ventes de coupe est destinée à la
réalisation d'oeuvres sociales. L'arrêté conjoint N°
1222/MINEFI/MINAT du 29 avril 1998, précise les modalités de
gestion de la cote part de la RFA des communautés villageoises en les
astreignant à créer les comités de gestion.
c) Equité dans le partage des revenus
Les revenus issus des forêts sont essentiellement
destinés à la réalisation des oeuvres sociales pour les
communautés riveraines. Mais les dispositions légales sont peu
précises en matière de détermination des priorités
de développement. L'Etat camerounais se débarrasse de ses
missions régaliennes d'amélioration du bien-être social et
laisse les communautés villageoises abandonnées à
elles-mêmes avec les revenus insignifiants par rapport aux besoins en
infrastructures sociales de base. Afin de garantir une cohésion sociale,
prérequis à un développement socialement durable, les
organisations en charge de la gestion des revenus devraient définir des
priorités de développement en tenant compte de toutes les
composantes sociales de la communauté.
d) Les conflits forestiers au Cameroun70(*)
Au Cameroun on assiste à une intensification et
diversification des conflits liés à la gestion des forêts.
Entre 1990 et 1996, il y a eu une prédominance des conflits verticaux
et entre 1996 et 2000 des conflits horizontaux.
En effet, la forêt camerounaise est l'objet d'une
compétition ardue entre les différents utilisateurs :
conflits de valeur, de pouvoir, de répartition de revenus. Ces conflits
sont l'expression d'une confrontation de logiques : logique de
rentabilité financière contre la rentabilité sociale,
écologique (conservation), intérêt de l'humanité
contre l'intérêt national, centralisation contre
décentralisation de la gestion des bénéfices financiers
tirés de l'exploitation des forêts, problème
d'intégration des pratiques locales et coutumières dans la
législation nationale.
e) Résolutions des
conflits71(*)
La gestion de conflit se définit comme une
démarche de recherche et d'action qui amène des parties prenantes
à prendre ensemble les meilleures décisions, sur des sujets
difficile et de dispute. Elle prend en considération toutes les
façons de traiter un conflit sur les ressources naturelles. La gestion
alternative de conflits(GAC) n'exclut pas les voies officielles, mais elle ne
les utilise pas de façon prioritaire ou exclusive.
La GAC est une approche de gestion des conflits liés
à la gestion décentralisée des ressources
forestières. Le but est de parvenir à une résolution
mutuellement acceptable des problèmes liés aux conflits par le
biais d'un processus volontaire conçu comme une alternative aux
stratégies conflictuelles ou non consensuelles. Elle repose sur quatre
problèmes fondamentaux :
- Premièrement, le problème ne réside pas
dans le conflit lui- même, mais plutôt dans la manière de le
gérer ;
- Deuxièmement, une gestion alternative efficace et
réussie des conflits exige la participation de toutes les parties
prenantes et de toutes les parties légitime impliquées dans le
différend ;
- Troisièmement, une partie ne s'impliquera
généralement pas dans la gestion alternative des conflits
à moins que ce ne soit dans son plus grand
intérêt ;
- Quatrièmement, chaque partie en position de faiblesse
doit savoir qu'elle n'est jamais en face d'une partie monolithique plus forte
ou adverse.
Les outils utilisés dans le cadre de la gestion du
conflit sont :
- La conciliation : Tentative par une
tierce personne neutre de communiquer avec les parties en conflit pour baisser
la tension et accepter de trouver une solution ;
- La négociation : Processus
volontaire dans lequel les parties en conflit se rencontrent, mettent leurs
arguments sur la table pour tenter d'atteindre des solutions acceptable pour
tous (Alliance, Lobbying .....) ;
- La médiation : Implique
l'assistance d'une tierce personne (neutre) dans le processus de
négociation. Permet de rapprocher les positions, d'aider à
aboutir à un accord plutôt que de résoudre directement le
conflit.
Les modes classiques de gestion des conflits, à la fois
traditionnels et modernes, fondés essentiellement sur l'arbitrage
(sanction et parfois répression), ne sont plus suffisamment efficaces
pour faire face aux conflits liés à la gestion
décentraliser des ressources forestières.
Il s'avère nécessaire de promouvoir des
approches alternatives basées sur la communication, le dialogue et la
négociation entre les parties prenantes. C'est ainsi que l'approche
Gestion alternative des conflits (GAC), constituée d'une
variété de méthodes participatives, est utilisée
pour construire des solutions mutuellement acceptables par les parties en
conflit.
B. Le Gabon72(*)
Le Gabon est un pays de l'Afrique centrale, avec une
superficie d'environ 26,8 millions d'hectare, c'est le pays le moins
peuplé de l'Afrique centrale, avec 1.1 million d'habitant et une
densité moyenne de 4 personnes par kilomètre carré.
Situé de part et d'autre de l'Equateur sur la
côte ouest de l'Afrique, le Gabon jouxte la Guinée Equatoriale et
le Cameroun au nord, ainsi que le Congo à l'est et au sud. Suivant
l'origine des estimations, les forêts du Gabon couvrent entre 17 millions
et 21 millions d'hectares (60à 80 pour cent du pays. Abritant la plupart
des écosystèmes forestiers guinéo-congolais, qui sont
connus pour la richesse de leurs espèces et leurs niveaux
élevés d'endémisme, ces forêts constituent un
héritage national et culturel. Les forêts gabonaises sont aussi
un gigantesque réservoir de carbone entre (0,94 et 5,24 gigatonnes).
L'économie du Gabon repose largement sur des ressources
non renouvelables comme le pétrole, le manganèse et l'uranium, et
des ressources renouvelables dont beaucoup sont dérivées de ses
forêts.
a) Le fondement de base de la gestion
forestière au Gabon73(*)
Dans le cadre de la prise en compte des recommandations,
engagement et déclaration diverses contenues dans les traités,
conventions et déclarations internationales auxquels la
république gabonaise a souscrit depuis le sommet de Rio de Janeiro, les
autorités du Gabon ont entrepris d'importantes réformes
institutionnelles et réglementaires dans le secteur forêts et la
protection de la nature. Ces réformes s'appuient sur la
nécessité pour les autorités Gabonais d'améliorer
la gestion durable des ressources naturelles renouvelables, afin de diversifier
l'économie du pays en prévision de la période
d'après pétrole. Il s'agit pour le gouvernement de
répondre tout à la fois aux engagements internationaux, aux
besoins des populations et à l'impérative nécessité
de lutter contre la pauvreté, tout en assurant une augmentation
significative et une meilleure répartition des recettes
forestière entre l'Etat propriétaire des forêts (recettes
fiscales), les populations et les opérateurs économiques du
secteur. Entre 1993 et 2001, les textes législatifs majeurs
ci-après ont été votés par l'Assemblée
Nationale et promulgués par le gouvernement :
- La loi 16/93 du 26 Août 1993 portant sur la protection
et l'amélioration de l'environnement ;
- La loi 016/01 du 31 décembre 2001 portant code
forestier ;
- La loi 016 de 2001 portant le code forestière vise
la répartition di territoire forestier national en deux domaines
distincts :
o le domaine forestier permanant de l'Etat (DFPE) ;
o le domaine forestier rural (DFR).
Toutes les forêts faisant partie du DFPE doivent
être soumises à des aménagements forestiers. Ces
forêts comprennent :
- les forêts domaniales classées (c'est
-à- dire les aires protégées et les forêts
récréatives) ;
- les forêts domaniales productives (c'est-à-dire
les réserves de production et les concessions forestières).
Par ailleurs, les forêts communautaires, qui restent
à mettre en place, doivent être gérées sur la base
de plans de gestion simple. L'attribution des concessions forestières se
fera désormais par 2 types de permis forestiers :
- des concessions forestières sous Aménagement
durable (CFAD) dont la superficie unitaire varie entre 50.000 et 200.000
hectares, donc l'ensemble des superficies composant une CFAD ne peut
dépasser 600.000 ha. La durée de la concession sera
équivalente à la rotation fixée par le plan
d'aménagement. La loi Gabonais prévoit une rotation légale
entre 20 et 40 ans, renouvelable ;
- Des permis forestiers associés (PFA) d'une superficie
allant de 15.000 à 50.000ha. Ce type de permis est strictement
réservé aux opérateurs économiques nationaux. Un
PFA d'une superficie ne dépassant pas 15.000 ha est obligatoirement
rattaché à une CFAD pour être aménagée par le
titulaire de cette dernière.
b) Equité dans le partage des revenus
L'absence de clés de répartition des revenus
communautaires, enfin, aucun texte ne prévoit de clés de
répartition des revenus issus de la gestion communautaire. En
dépit de ces silences, il faut souligner que les forêts
communautaires constituent l'une de l'innovation sociale majeure de la loi
016/01. Dans cette optique, on peut penser que l'avènement de cette
nouvelle approche de la gestion des forêts, loin d'être une
contrainte, constitue plutôt une opportunité de
décentralisation de la gestion des ressources forestières au
profit des populations locales. Il revient
maintenant à l'Etat et aux partenaires au développement
de consentir les moyens nécessaires pour que les forêts
communautaires connaissent un réel engouement au Gabon74(*).
c) Les conflits forestières au Gabon75(*)
Au Gabon, les principaux problèmes auxquels sont
confrontées les forêts et les communautés qui en
dépendent sont de plusieurs ordres. L'exploitation forestière est
l'un des premiers problèmes car non seulement les communautés ne
profitent pas des retombées de cette exploitation, mais on note
également une forte part de sociétés forestières
qui ne respectent aucune norme technique d'exploitation, ils coupent parfois
en-dessous du diamètre minimum d'exploitation
« DME ». La forêt fait l'objet depuis quelques
années d'une compétition entre ses multiples utilisateurs,
perturbation de l'habitat, dispersion de pygmées sédentaires,
éloignement des sources d'approvisionnement en bois, profanation des
lieux sacrés....
D'une part il y a les populations qui vivent de et dans la
forêt et d'autre part y a l'Etat, les opérateurs
économiques, les braconniers etc. .., dont la forêt constitue
une importante source de revenus76(*).
d) Gestion des conflits77(*)
Les procédures de
résolution de conflits devraient couvrir les principaux domaines de
responsabilités de compagnies forestières vis-à-vis des
populations vivant dans la forêt. Ces procédures devraient
être développées en collaboration avec ces populations.
C. L'Exploitation forestière au Congo belge78(*)
L'exploitation forestière est la récolte de
produits de la forêt et leur préparation pour différents
usages. Elle comprend donc l'extraction des produits, leur transformation
et leur préparation comme matière première des industries
transformatrices du bois, soit : l'abattage, le débardage, le
transport jusqu'à l'usine et le débitage. L'exploitation
forestière congolaise a connu ses temps héroïques entre 1920
et 1930. Les premières scieries s'installèrent au Bas et au Moyen
Congo, pour la production des bois de construction à l'usage local.
En dehors de cette exploitation, nous n'avions que la coupe
de bois de chauffage à l'usage domestique, pour les bateaux et pour le
chemin de fer. Les premières exploitations se sont installées
là où il y avait des forêts riches en essences facilement
exploitables, le plus près possible des voies d'évacuation,
c.-à-d. au Mayumbe qui, a l'avantage incalculable de sa proximité
avec les ports de Boma et de Matadi. Installée en période
d'euphorie, l'industrie forestière du Mayumbe, du Kasaï et du Lac
Léopold II ne put commencer ses envois qu'en pleine dépression
économique et ce n'est qu'à partir de 1933 que les exportations
de bois du Congo progressèrent régulièrement. De 12.000
tonnes, elles passèrent à 50.000 tonnes en 1939.
Politique forestière avant
l'indépendance
La réglementation de l'exploitation prescrit des
règles ayant pour but de prévenir la dégradation de la
forêt et le gaspillage du bois. Comme l'attribution des coupes, elle
devrait être basée sur la prospection forestière.
L'exploitation peut donc et doit être une
opération culturale et la nécessité pour l'industrie
forestières d'exploiter plus d'arbres à l'hectare pour se
développer et assurer une production soutenue, garantit
l'amélioration de la forêt, à la condition que les
intérêts soient bien compris. Le gouvernement a pour rôle
d'aider les services de recherche, de définir les règles
d'exploitation propres à atteindre ce but. Les exploitants doivent
s'intéresser à la sylviculture ; les sylviculteurs ne
peuvent pas ignorer les moyens et les difficultés des exploitants.
Chacune des parties a intérêt à une meilleure
compréhension réciproque. La politique forestière du
Gouvernement du Congo fait l'objet du décret forestier du 11.4.49.
La nécessité de la protection de la forêt
était déjà reconnue par un décret de 1912. Les
règles d'exploitation de 1923 défendaient de couper plus des 2/3
du matériel sur pied.
2.3. La place des forêts
pour les communautés locales dans la nouvelle configuration du droit
forestier congolais
2.3.1.
Les systèmes locaux d'appartenance de forêts
La question de l'appartenance des forêts congolaises est
réglée par le code forestier actuel, en les attribuant à
l'Etat congolais et ce, qu'il s'agisse des forêts classées ou des
forêts de productions permanentes (articles 9 et suivants), y compris les
forêts couvertes par l'expression « forêts des
communautés locales », qui relèvent des forêts
protégées par l'Etat.
Le code s'est démarqué, sur cette question du
statut des forêts, du Décret de 1949 pour lequel, seules les
forêts domaniales appartenaient à l'Etat, à l'exclusion des
forêts privées et des forêts indigènes79(*).
Il a confirmé la suppression de la classification des
forêts domaniales et des forêts privées d'une part et des
forêts indigènes de l'autre80(*). Il a uniformisé le droit forestier en
domanialisant toutes les forêts y compris les forêts dites
« indigènes81(*) ». Dès lors, le patrimoine forestier
de l'Etat congolais comprend désormais un domaine forestier public et un
domaine forestier privé. Une nouvelle classification des forêts a
été ainsi introduite, en remplacement de celle du décret
d'avril 1949 : le domaine forestier est donc réparti comme
suit : d'une part, des forêts classées (qui relèvent
du domaine forestier public) et, d'autre part, des forêts
protégées et des forêts de productions permanentes,
« qui relèvent du domaine privé de
l'Etat »82(*).
Il faut observer que la domanialisations des forêts congolaises
décidée par le code forestier n'ignore pas les liens historiques
et culturels que les communautés locales ont avec leurs forêts, ni
les droits dont ces dernières se prévalent souvent sur ces
forêts83(*).
Au contraire, ce texte fait une large place aux
communautés locales, dont il essaie de concilier les modes de vie avec
les principes modernes admis par les Etats en matière de gestion des
forêts. D'abord, il y a lieu de relever que la notion de
« forêts des communautés locales », telle que
la notion de forestier, est issue de celles des forêts dites
indigènes84(*). Ce
qui change, en réalité, c'est la nature des droits que
détiennent désormais les communautés locales sur les
forêts locales. On est parti d'un droit de propriété
à un pouvoir de fait, il s'agit d'une possession sui generis, assortie
d'effets juridiques85(*).
Les forêts des communautés locales ne sont pas la
propriété de celles-ci, mais de l'Etat, et relèvent du
domaine forestier privé de l'Etat et de la catégorie dite des
forêts protégées.
De la sorte, sera reconnue titulaire d'une forêt, la
communauté qui, en vertu des coutumes locales, la possède
régulièrement. Le mot régulièrement suppose la
reconnaissance des autres communautés voisines. On en arrive donc au
constat que la détermination de la forêt de communauté
locale dépend d'abord des coutumes locales. Au demeurant, seule une
telle communauté peut prétendre à la concession
forestière communautaire, qui sera un titre écrit. C'est ce qui
ressort de l'énoncé de l'article 22 du code forestier.
De ce qui précède et en partant de
l'orientation donnée par le législateur au travers de
l'énoncé de l'article 22 susmentionné , on peut
arriver à définir une forêt de communauté locale
comme une forêt régulièrement possédée par
une communauté locale , en vertu de la coutume. Une telle forêt
ne devient une concession communautaire qu'à la suite de son attribution
aux communautés locales.
Les vérifications de terrain ont permis de confirmer
cette orientation du législateur congolais elles ont, en effet, mis en
évidence le fait que les terres ainsi que les forêts sont
réparties dans une majeure partie du territoire national et en vertu
des coutumes locales, en fonction des lignages, entendus comme des
systèmes sociaux regroupant deux ou plusieurs clans ou familles se
trouvant sous l'autorité d'un chef coutumier, descendant de la famille
régnante.
Il a également été relevé que,
même au sein des lignages, les terres et les forêts sont
réparties selon les clans, au sein des clans, selon les familles. En
réalité, sauf à quelques exceptions près, ce sont
en définitive les familles qui sont détentrices des droits
fonciers et forestiers, et donc de la possession coutumière des terres
et des forêts quand bien même elles continuent à relever, en
matière de gestion, de l'autorité coutumière du chef
traditionnel et des notables. Elles sont, à ce titre, des
« ayant droit » ; expression courante, qui renvoie
à toute personne ou entité titulaire des droits fonciers
coutumiers.
Les enquêtes de terrain ont aussi
révélé des cas où les terres et les forêts,
plutôt que de relever des familles, sont sous la maîtrise
coutumière des chefs traditionnels.
2.3.2.
Les modes locaux de gestion des forêts par les communautés locales
de Bagata86(*).
La question de la gestion locale des forêts n'est pas
clairement réglée ni même abordée par le code
forestier. Cependant, on peut penser, à l'analyse des dispositions de
l'article 22, que le législateur a renvoyé cette
problématique à l'autorité des coutumes locales.
Et en examinant les différentes coutumes des milieux
visités, nous avons relevé que, d'une manière
générale, la gestion locale des forêts suit le
système d'appartenance des terres et des forêts en vigueur dans le
milieu concerné.
En substance, il ressort que les forêts sont sous
gestion, active ou passive, du chef du lignage, qui associe constamment les
notables aux actes de sa gestion, hormis les cas d'abus de pouvoir
renseignés çà et là. Le rôle du chef en
matière de gestion locale des forêts est actif parce que c'est le
chef qui, au nom de la communauté, ou, selon le cas, en son nom
propre, négocie des accords et engage sa communauté.
2.3.3.
Les systèmes locaux d'exploitation des forêts
L'étude présentera d'abord les
différentes utilisations des forêts par les communautés
locales et les autres acteurs locaux. Elle permettra ainsi, en filigrane de
saisir l'importance des forêts dans le quotidien des communautés
villageoises.
Elle s'est ensuite intéressée aux
procédures et modalités par lesquelles passe l'exploitation des
forêts. L'exploitation des terres n'a jamais été
collective, au sens où elle impliquerait plusieurs unités de
production87(*)
De l'examen des résultats des enquêtes
menées, il se dégage que différents acteurs exploitent la
forêt pour en tirer les ressources ligneuses et non ligneuses.
La forêt leur sert également de terrain de chasse
pour la faune sauvage. A également été mentionnée,
l'utilisation de la forêt à des fins d'agriculture et de
pêche.
A. le
prélèvement des ressources ligneuses
a. Les villageois prélèvent dans la forêt
le bois du feu et de carbonisation. L'absence d'électrification dans les
milieux ruraux, son insuffisance dans les villes ainsi que l'accroissement
démographique constituent aujourd'hui les facteurs de pression sur la
ressource ligneuse.
b. Nous avons également noté le
prélèvement du bois pour la fabrication des pirogues en vue de la
pêche et du transport des personnes et des biens.
c. L'exploitation du bois d'oeuvre par les communautés
a été signalée comme négligeable à
Bagata.
d. Les bois prélevés dans la forêt servent
également pour la construction.
En tout état de cause, quelles que soient les raisons
du prélèvement des ressources ligneuses locales « bois
d'oeuvre, bois de feu et ou de carbonisation ou encore bois de
construction », l'accès à la ressource reste
coutumièrement libre lorsque ce prélèvement est le fait
des membres de la communauté intéressée. Ils n'ont pas
signalé de cas où un tel prélèvement fut assujetti
à des formalités particulières, coutumières ou
administratives. Ce constat contraste avec les termes de l'arrêté
relatif à l'exploitation forestière qui institue le
système de permis de coupe artisanale pour le bois d'oeuvre, et de
permis de coupe du bois de feu et de carbonisation pour la matière
ligneuse prélevée pour des raisons
énergétiques ; et ce, sans distinguer selon que l'exploitant
coupe dans la forêt de sa communauté ou hors de celle-ci. C'est
là une source des conflits. Nous y reviendrons.
Par contre, lorsque le prélèvement est le fait
des membres des communautés allochtones, voisines ou lointaines,
l'accès aux forêts locales répond aux usages et coutumes
entre les communautés concernées. Dans certains endroits, cet
accès est libre lorsqu'il ne vise que la cueillette ou le ramassage des
produits forestiers non ligneux ou le prélèvement du bois de feu
et de carbonisation, mais il devient assujetti au paiement de redevances
coutumières, lorsqu'il vise d'autres types d'utilisation de la
forêt, notamment lorsqu'il s'agit de la coupe artisanale, de la chasse,
d'agriculture ou de pêche ou encore lorsqu'il s'agit de la coupe
artisanale du bois exploitable. C'est la situation qui semble être
prédominante dans le territoire de Bagata.
Lorsqu'il s'agit d'autoriser l'accès des exploitants
artisanaux à leurs forêts88(*), l'attitude la plus prédominante dans le chef
des ayants droits « chefs ethniques ou des lignagers, clans familles
ou villages », est d'exiger, d'une part, le versement d'un droit
d'accès, généralement constitué d'un ou de quelques
sachets de sucre, de sel, de café et autre denrée semblable et,
d'autre part, le partage du produit de la coupe autorisée89(*). Le défaut de
réalisation de cette condition constitue également une source des
conflits.
Les conditions de ce partage varient d'un clan à un
autre. Mais d'un point de vue général, les ayants droit exigent
un pourcentage sur le volume de grumes ou des planches résultant de la
coupe. Dans certains villages de Bagata, les communautés ont reconnu
avoir exigé le versement préalable du prix de l'arbre sur pied,
variant entre 5.000 et 6.000 francs congolais (5 à 6 dollars).
Enfin, les communautés autorisent l'accès
à leurs forêts aux exploitants artisanaux, dès qu'elles ont
négocié le droit d'accès et le partage du produit de la
coupe. Elles n'exigent nullement à ceux-là d'être, en
outre, porteurs d'un permis ou d'un agrément comme le prévoient
le code forestier et l'arrêté susmentionné sur
l'exploitation forestière. C'est l'autre source de conflits.
L'accès des industriels aux forêts locales se
passe presque de la même manière que lorsqu'il s'agit des
exploitants artisanaux, à la seule différence que, lorsque le
requérant est un exploitant industriel, en outre, porteur d'un permis ou
d'un agrément comme le prévoient le code forestier et
l'arrêté susmentionné sur l'exploitation forestière,
il doit donner des garanties de constructions d'infrastructures
socio-économiques. Ce sont, au fait, ces accords que le code forestier a
formalisés, en exigeant qu'ils puissent figurer comme une des
principales clauses du cahier des charges de l'exploitant industriel (article
89).
Le constat général dans le territoire de Barata,
c'est que les communautés se plaignent du non-respect des engagements
pris ou de la mauvaise exécution des dits engagements par les
exploitants forestiers. Elles se plaignent de n'être pas assistées
ni techniquement accompagnées dans la négociation des accords et
dans le suivi de l'exécution des dits accords. De même, les
exploitants se plaignent aussi de n'avoir pas d'interlocuteur attitré et
de se retrouver souvent devant une multiplicité de personnes, toutes se
réclamant de la même communauté. C'est aussi une des
sources de conflits.
Notre hypothèse de travail trouve à se justifier
sur ce point parce que les autorités coutumières se
considérant comme vrais propriétaires se passent du prescrit
légal qui oblige tout exploitant de solliciter un permis avant toute
exploitation. L'exemple le plus récent dans le territoire de Bagata date
de 2005-2007. En 2005, Monsieur KIBU, Chef coutumier de NDANA a accordé
aux exploitants artisanaux (Towamba Gédéon et Tamfutu Ludovic)
l'autorisation de couper des arbres pour le fonctionnement de la scierie du
village NDANA Mbim. Au bout de deux années, l'administrateur du
territoire de Bagata (bourgmestre de la commune rurale) a ordonné
l'arrestation de ces deux exploitants estimant qu'ils coupaient les arbres sans
droit ni titre. Il s'en était suivi une bagarre entre les policiers
venus exécuter l'ordre du commissaire et la communauté locale.
L'ordre public a été largement troublé. Les agents de
l'ordre sont répartis en catastrophe sans réaliser la mission
pour laquelle ils avaient été envoyés.
B. Le
prélèvement des ressources non ligneuses
Les enquêtes menées montrent que le
prélèvement des ressources forestières non ligneuses,
telles que les écorces, les racines, les rameaux, les plantes
médicinales, les chenilles, les légumes et fruits, les
champignons, le miel, les résines, les escargots, etc., relève
des droits d'usage forestier (articles 36 et suivants du code forestier). Il
est libre, pour autant que le produit de ce prélèvement soit
destiné à la satisfaction des besoins domestiques, individuels ou
communautaires. Le code forestier interdit la commercialisation des produits
forestiers prélevés au titre des droits d'usage (article 37).
Au cas où le prélèvement des PFNL a pour
fin la commercialisation, un tel prélèvement cesse de relever des
droits d'usage et devient assujetti à l'obtention d'un permis de
récolte. Il donnera lieu à l'obtention d'un permis spécial
de récolte, si le PFNL dont le prélèvement est
envisagé est une espèce protégée. Ces
spécifications découlent de l'arrêté portant sur les
mesures relatives à l'exploitation forestière. Bien souvent, il y
a non-respect ce qui entraîne des conflits.
Cependant, les investigations de terrain ne confirment pas
l'orientation du législateur. En effet, l'analyse des données de
terrain révèle que les communautés locales
prélèvent toutes sortes de produits forestiers non ligneux, qui
servent soit à l'autoconsommation, soit à la commercialisation.
Le commerce le plus connu est celui des feuilles de « Gnetum
africanus », connu sous le nom de « Mfumbwa » qui
a fait émerger une filière pleine d'intermédiaires
à Kinshasa et dans les provinces de l'Equateur, de Bandundu et
Orientale. Dans le Bas-Congo, cette espèce est en voie de
disparition. Elle figure, du reste, à ce jour dans la liste B de la
convention CITES90(*).
Lorsqu'ils prélèvent le PFNL à des fins
de commercialisation, qu'ils les prélèvent dans leurs
forêts propres ou dans les forêts des autres communautés
voisines ou lointaines, les villageois le font librement et n'obtiennent aucun
permis. Et les administrations locales ne sont pas non plus informées de
leurs attributions de délivrance de permis pour ce genre de
prélèvement. On peut dès lors supposer toute la
difficulté qu'il pourrait y avoir à imposer aux populations
locales l'obtention d'un permis, pour une activité qu'elles ont
longtemps considérée comme relevant de leurs droits
naturels.
C.
Autres formes d'exploitation des forêts locales91(*)
Outre le prélèvement de la ressource ligneuse et
non ligneuse, il y a d'autres formes d'exploitation des forêts par les
ruraux. C'est, notamment, l'utilisation des forêts à des fins
d'agriculture, de chasse, d'élevage et de pêche.
a.
L'utilisation des forêts à des fins d'agriculture
L'agriculture est mentionnée dans tous les rapports
comme étant la principale activité et en même temps la
principale source de revenus pour les populations rurales des zones
forestières. Les cultures pratiquées sont en grande partie des
cultures vivrières, destinées à l'autoconsommation ou
à la vente à l'Etat. Les cultures pérennes (café,
cacao, quinquina, palmier à l'huile, etc.) sont devenues rares.
L'analyse documentaire révèle que le code
forestier limite les activités agricoles dans les milieux forestiers.
Toute personne désireuse de déboiser une portion de forêt
pour les besoins d'une activité agricole doit obtenir un permis de
déboisement, lorsque ce déboisement porte sur une superficie
égale ou supérieure à 2 hectares.
On a également noté que, dans la plupart des
cas, les deux techniques culturales (jachère et cultures
itinérantes sur brûlis) sont utilisées de manière
alternative.
Les cultures les plus répandues pratiquées dans
la forêt sont les arachides, les bananes plantains, le haricot, le
café, le thé, le palmier à huile, le soja, les aubergines,
les amarantes, la canne à sucre, les choux, le sorgho, la patate douce,
les pommes de terre, les concombres, les ignames, etc. l'association des
cultures reste le principal mode d'exploitation, et aucune autorisation n'est
nécessaire pour ces cultures.
b. La
chasse
La loi interdit d'exploiter la faune nationale par la chasse
ou par tout autre mode d'exploitation, sans être muni d'une autorisation
de l'autorité compétente ; laquelle autorisation est
accordée sous forme de permis92(*).
Dans les milieux ruraux, la loi délivre deux sortes de
permis : le permis rural de chasse et le permis collectif de chasse. Le
premier est accordé par l'administrateur du territoire, sur avis de
l'administration locale en charge de chasse, aux congolais,
propriétaires d'une arme à feu de chasse non perfectionnée
du type fusil à piston ou à silex. Ce permis n'est
délivré qu'aux congolais qui ont leur résidence dans la
zone où les animaux ne sont pas protégés et dont le
ministère en charge de faune établit la nomenclature.
Le permis collectif de chasse est accordé au chef de la
localité par l'administrateur du territoire, sur avis de
l'administration locale compétente. Il permet aux habitants de la
localité de chasser en groupe sous la responsabilité du chef de
la localité, suivant les coutumes locales et uniquement dans les
strictes limites de leurs besoins alimentaires. Toutefois, et dans certaines
conditions fixées par la loi, le chef de localité peut, sous sa
responsabilité et dans les conditions fixées, autoriser la chasse
individuelle.
Selon la même loi, l'aire de validité d'un permis
collectif de chasse ne peut dépasser les limites de terre sur lesquelles
les bénéficiaires du permis ont, d'après la coutume, la
faculté de chasser. Il peut être suspendu par l'autorité
qui le délivre si la communauté bénéficiaire
enfreint les dispositions de la loi ou de ses mesures d'exécution.
Les résultats des enquêtes de terrain
présentent plutôt un autre tableau. La chasse qui se pratique dans
les zones forestières se fait de manière
incontrôlée, et au mépris des dispositions
sus-rappelées. Non seulement elle s'opère en dehors de toute
autorisation de l'autorité et au-delà des périodes
autorisées, mais elle utilise aussi des instruments prohibés.
Certains villageois chassent individuellement, au moyen des fusils
communément appelés « Calibres 12 » ou encore
en recourant aux pièges. Le trafic des calibres 12 est
régulier93(*). Dans
d'autres provinces comme à l'Equateur et en province Orientale, les
rapports signalent des cas de chasse traditionnelle, au moyen des instruments
traditionnels de chasse, mais sans contrôle de l'autorité.
En ce qui concerne la chasse telle que pratiquée en
milieu rural, la communauté locale de Mulir qui dispose d'une
forêt « Ngalane » assez fournie en gibier ne sait pas
qu'il lui faut un permis de chasse et que la chasse doit s'opérer en des
périodes déterminées avec des instruments
légalement admis.
c.
L'utilisation des forêts à des fins d'élevage
Les proportions d'utilisation des forêts à des
fins d'élevage sont assez faibles. Les rares cas de déboisement
des forêts aux fins d'élevage recensés à Bagata le
sont pour des besoins de plantation du « Paspalum »,
au détriment des intérêts des communautés
locales. Enquête des terres agricoles. « Inspection de
l'Environnement, territoire de Bagata, rapport annuel 2006 ».
d.
L'utilisation des forêts à des fins de pêche
L'utilisation de la forêt aux fins de pêche est
signalée surtout dans les zones situées dans la cuvette centrale,
caractérisée par les marais et les marécages. C'est
là que les villageois vont prélever certaines espèces de
poissons.
Cette activité se fait davantage dans les eaux qui
bordent les forêts. Dans de nombreux villages forestiers riverains de
cours d'eau, la pêche constitue la principale activité
après l'agriculture. Dans l'ensemble des zones de l'étude, la
pêche pratiquée reste traditionnelle et artisanale. On a
malheureusement signalé à de nombreux endroits l'existence de
pratiques très désastreuses : l'empoisonnement des eaux
à l'aide de produits toxiques, extraits de racines, écorces,
feuilles ou fruits, en vue de faciliter le prélèvement des
poissons. Ces produits toxiques sont connus sous le nom de
« mbaka ». Ils sont utilisés par les clans
Kimbié, Kendal, Kimway, Kengom dans le village de Mulir, une des zones
de nos recherches. Le chef coutumier du groupement de NDAM, Monsieur TAMUNDEL
contacté à cet effet, confirme cette pratique et la justifie par
le fait de l'héritage colonial.
2.3.4.
L'affectation des bénéfices tirés de l'exploitation des
forêts coutumières.
En général, les bénéfices
tirés de l'exploitation reviennent individuellement au
propriétaire reconnu, hormis quelques cas, pas très
fréquents, où un lignage ou un clan s'est tellement bien
organisé qu'il parvient à exécuter autour d'une
forêt un projet d'exploitation à caractère
communautaire94(*). Cas
des villages de Mulir, Ngalane, Nter-bal, Mbalibi, Ntolonkubi et Mantiene
(1996-1997).
Les enquêtes ont aussi révélé que
lorsqu'une terre ou une forêt appartenant à un clan ou une famille
a généré des bénéfices quelconques (en
termes de droit d'accès ou de participation au produit de l'exploitation
consentie), la famille ou le clan ayant droit fait participer les autres
familles ou clans du lignage aux bénéfices ainsi
réalisés, très souvent de manière tout-à-
fait symbolique.
On observe la même attitude dans les
sociétés traditionnelles où c'est le chef coutumier qui se
trouve être l'ayant droit en matières foncières,
forestières et de pêche. Le chef assure ainsi le partage du
produit de sa gestion entre les clans et les familles relevant de son lignage.
C'est dans la province de Bandundu, que l'on a
dénoncé le plus grand nombre d'abus de la part des chefs des
terres, qui utilisent à leurs profits exclusifs le produit de leur
gestion.
2.3.5.
Les principales difficultés mentionnées par les
communautés locales à la suite de l'exploitation
forestière
Les difficultés d'évacuation des produits
agricoles récoltés et des produits forestiers
prélevés par les communautés locales ont été
mentionnées comme la principale contrainte qui affecte la vie des
villageois, dans les milieux ruraux et qui entrave la commercialisation de ces
produits.
Ces difficultés sont liées à
l'état de délabrement très avancé des
routes95(*), qui
entraîne quasiment l'enclavement des territoires villageois et, par
ricochet, la non évacuation des produits villageois.
Pour remédier à ce sombre tableau, les
populations se servent en définitive de leurs corps, soit directement
par la marche à pied avec la tête ou le dos bien chargés,
soit au moyen des vélos.
Le fleuve, les rivières et les ruisseaux servent
à l'évacuation, dans les sites qu'ils bordent, mais là
encore, les ruraux se servent une fois de plus de leurs muscles, en recourant
aux pirogues. Les tracasseries administratives et fiscales constituent aussi un
facteur de démotivation des élans villageois, quant à
l'évacuation de leurs produits. Des taxes imaginaires et multiples
frappent les produits villageois, davantage encore lorsque, par leurs efforts,
les populations doivent emprunter les voies publiques d'évacuation. Que
de barrières arbitraires ! Ces impositions sont souvent le fait des
agents administratifs et de police.
L'absence de marchés et d'entrepôts dans les
contrées de Bagata est l'une des difficultés de
commercialisation des produits forestiers et agricoles des populations
locales.
2.4.
La catégorisation des pratiques d'exploitation.
Il existe, au niveau de la zone d'étude, des pratiques
et des croyances qui favorisent la conservation des forêts et d'autres
qui sont défavorables à la conservation des forêts.
2.4.1.
Les pratiques favorables
Les enquêtes ont relevé, dans les
différents sites visités, un certain nombre de pratiques qui
concourent à la conservation de la biodiversité et
d'écosystèmes forestiers.
On a pu observer que certaines forêts servent à
conserver les objets et outils traditionnels et sont de ce fait,
érigées en forêts sacrées. D'autres servent aux
rites traditionnels et sont, à ce titre, interdites d'accès, de
droits d'usage et d'exploitations.
Une autre pratique observée dans cette zone est
l'interdiction de couper certaines espèces végétales
utilisées comme plantes médicales ou de consommer certaines
espèces animales « hibou, chauve-souris, serpents, poissons
comme le mpiak etc. ». L'on a également noté la
présence de bosquets de forêts, dénommés
« Musir » ou « Kisanga »,
réservés à l'intronisation ou à l'enterrement des
chefs traditionnels ou des notables.
Un îlot de forêts où pousse le
« Brachystegia sp » est protégé par
le groupement coutumier de NDAM et NGWEME « Kisanga
Bomba, Bojune » dans le secteur de Manzasay, parce qu'il favorise la
croissance des champignons comestibles.
Dans le territoire de Bagata, on observe le
développement de l'agroforesterie associant les arbres fruitiers et les
espèces du bois d'oeuvre. Des initiatives de reboisement communautaire
ont aussi été recensées dans ce territoire dont
le projet (Bankay et B.A.T.) British Américain Tabac.
On doit également signaler l'usage dirigé du feu
ou l'incendie autorisé de la végétation comme pratique
favorable en ce qu'il influe positivement sur la dynamique des formations
végétales. Les dates sont fixées par les chefs des
secteurs et se situent entre le 1er juillet et le 15 août,
soit pendant la saison sèche.
Enfin, s'agissant des croyances susmentionnées qui
semblent concourir à la préservation des forêts de la
biodiversité, il faut observer qu'elles sont de plus en plus
négligées dans de nombreuses zones visitées, par l'effet
de la prédication de l'Evangélisation par les églises
dites de réveil, celles-ci dénoncent ces croyances et les
considèrent comme des véhicules de malédictions sur les
familles villageoises. Il n'est pas moins évident que de telles
croyances disparaitront de ce fait dans les décennies à venir.
2.4.2.
Les pratiques défavorables
Il s'est dégagé de l'examen de différents
rapports aussi bien documentaires que des rapports de terrain que la
transformation insuffisamment planifiée des terres forestières en
terres agricoles ou de pâturages constitue la plus importance menace sur
les écosystèmes forestiers. La pratique de l'agriculture
itinérante sur brûlis96(*), les feux de brousse incontrôlés et non
autorisés ainsi que la carbonisation du bois constituent autant de
mauvaises pratiques que l'on dénonce dans toutes les provinces du
pays.
Les populations de Bagata déboisent chaque année
plusieurs hectares des forêts pour en faire des terres de culture. Par
conséquent, on enregistre des cas de destruction de la pédofaune
et de réduction des forêts entrainant des érosions, la
réduction des habitats des espèces rares et endémiques
(gorilles) ainsi que des perturbations climatiques (irrégularités
des pluies et augmentation de la chaleur). Les jachères de très
courte durée sont également signalées comme une pratique
négative, car elles ne favorisent pas la
régénération des forêts.
Les enquêtes ont aussi relevé l'abattage
incontrôlé des arbres pour recueillir du miel et des chenilles et
pour la fabrication des pirogues, et celui des palmiers pour tirer le vin et
faire l'huile de palme. On enregistre des cas d'abattage d'arbres, parfois de
grande valeur économique pour des raisons de production de charbon du
bois.
Une autre pratique défavorable consiste dans le
braconnage et la chasse au moyen des arcs de guerre. Cette manière de
chasser est très fréquente. La pêche par empoisonnement et
à l'aide de substances toxiques, telles les herbicides ou les
fongicides, est également citée comme une des pratiques
défavorables. Presque tous les rapports d'enquêteurs ont fait
état de ces pratiques dans les sites visités. Le non-respect des
calendriers de chasse et de pêche est également à
signaler.
2.4.3. Le système
agroforestier de Mampu un outil de développement97(*)
Le site de Mampu, situé sur le plateau des
Bateké et couvrant une superficie de 8 000 hectares accueille un
système agroforestier avec des cultures vivrières d'une part
(manioc et maïs) et des plantations d'acacias et d'eucalyptus d'autre
part. Malgré un sol peu propice à l'agriculture et à la
forêt, plus de 300 fermiers exploitent des parcelles de 25 hectares
chacune en effectuant une rotation entre des reboisements d'acacias
destinés à la production de charbon de bois et les cultures
vivrières. Au-delà de la production agroforestière, le
site de Mampu est une bonne illustration du potentiel que représente la
séquestration du carbone en Afrique.
Ce projet, financé par la Commission européenne
et géré par la Fondation Hanns Seidel en partenariat avec le
Centre d'Appui au Développement Intégral/Mbankana, n'a
jusqu'à présent jamais fait l'objet d'une évaluation
quant à son bilan carbone.
Le système agroforestier de Mampu est remarquable par
sa taille (80 km²) et sa forme régulière. Il se
détache très nettement du reste de la savane
dégradé.
Le projet agroforestier n'est pas renseigné comme puits
de carbone même s'il remplit parfaitement et sans rétribution ce
rôle.
Le système agroforestier de Mampu ne représente
qu'une toute petite partie de l'offre en charbon de bois sur les marchés
de Kinshasa. La grande différence, c'est que la production de charbon de
bois produit à partir du système agroforestier de Mampu est
durable. Et n'a pas arrêté la carbonisation sauvage
traditionnellement exercée sur les Plateaux Batékés. Le
développement d'une filière de commercialisation renforcée
en moyens de transport et la présence d'un plus grand nombre de
charbonniers pourraient même avoir eu un effet accélérateur
sur la dégradation des galeries forestières.
a) Impacts sur la faune98(*)
Le principal impact positif sur la faune passe par le
soulagement de la pression anthropique sur des formations naturelles qui sont
riches en habitats. Ces habitats sont situés en petite partie dans les
dernières galeries forestières des Batékés mais en
grande partie dans d'autres
Zones du pays. L'augmentation de la chasse associée
à la présence de nouveaux habitants à Mampu cause une
diminution de la faune sauvage. C'est un impact négatif, mais il
convient d'admettre que la destruction des galeries forestières pour le
renouvellement des champs et la
production de charbon de bois aurait de toute façon
causé la disparition de la faune par la destruction progressive de leurs
habitats. Par contre, les peuplements d'acacias constituent quant à eux
de nouveaux habitats pour la faune et la flore. Une parcelle
Agroforestière est biologiquement plus riche qu'une
savane herbeuse dégradée.
b) Impacts abiotiques99(*)
Un projet forestier a toujours un impact négligeable
sur le climat et un impact limité sur le microclimat. Le système
agroforestier de Mampu modifie localement des facteurs comme
l'évapotranspiration et la température au sol. Le visiteur qui
se prête à l'observation notera assez facilement le gradient de
température lorsqu'on passe de la savane au massif forestier. Cette
fraîcheur relative est encore plus perceptible au sein d'une galerie
forestière. Pourtant, l'humidité relative de l'air est localement
plus élevée sur les surfaces boisées que dans les savanes.
Un autre impact environnemental positif du massif forestier de Mampu est la
séquestration permanente de carbone, donc de dioxyde de carbone. Certes,
les arbres plantés séquestrent du carbone pendant leur croissance
et ensuite, ce dioxyde de carbone est rejeté dans l'atmosphère.
Une partie est rejetée assez rapidement lors de la fabrication du
charbon de bois et lors de l'utilisation de celui-ci par les ménages
kinois. Une autre partie est rejetée progressivement, notamment au cours
de la lente biodégradation des racines et des souches. Néanmoins,
en parallèle de ce cycle d'énergie renouvelable, le
système agroforestier fonctionne avec une biomasse ligneuse
présente en permanence.
CHAPITRE 3. LES CONFLITS
ASSOCIÉS À L'UTILISATION DES FORÊTS
3.1.
Les types des conflits
Des conflits de normes surgissent en effet des rapports entre
les groupes sociaux qui s'efforcent d'élargir ou de maintenir leur
accès aux ressources productives. En tous ce lieux, les acteurs qui
s'organisent à cet effet rencontrent les multiples groupes
d'appartenance sociale qui tente de maintenir leurs positions, leur
légitimité, leurs réseaux d'obligation100(*). Ces conflits de normes
peuvent traverser chaque acteur.
L'espace forestier de la RDC se caractérise par des
conflits à répétition opposant tantôt les
communautés locales entre elles, tantôt les sociétés
d'exploitation des ressources forestières et les communautés
locales. Certains conflits opposent les villageois membres d'une même
communauté entre eux. Il peut également survenir des conflits
opposant les communautés locales à l'autorité politico
administrative locale et/ou à l'administration locale chargée des
forêts. Enfin, d'autres conflits évoqués opposent les
communautés locales ayant des droits fonciers coutumiers aux
populations d'allochtones, venues d'autres contrées, voisines ou
lointaines.
Le non-respect des limites des territoires voisins constitue
la cause des conflits la plus mentionnée. De nombreuses plaintes des
communautés font état des membres d'une communauté qui
vont empiéter sur les forêts de la communauté voisine, en y
prélevant des produits forestiers, sans l'accord du chef
intéressé.
De nombreuses autres situations conflictuelles opposant les
communautés datent de l'époque coloniale, et ont
été le fait du colonisateur qui a procédé au
déplacement de certaines populations pour les réinstaller sur les
terres relevant d'autres communautés, laissant des conflits latents
entre les descendants des communautés concernées. On a
dénombré aussi des conflits sur l'appartenance coutumière
des portions de forêts entre deux communautés voisines.
Au sein même des communautés, certains conflits
opposent les chefs traditionnels aux membres de leur clan ou lignage, du fait
des abus relevés dans l'affectation des redevances coutumières
perçues par ceux-là au nom de la communauté.
Parfois, les populations se plaignent de n'avoir pas
d'accès aux concessions, pour y exercer leurs droits d'usage
traditionnels. Parfois, ces conflits dégénèrent en
soulèvements populaires et aboutissent à de situations
tragiques.
Nous distinguons plusieurs types de conflits dans le
territoire de Bagata.
3.1.1.
Conflits entre autorités étatiques et autorités
coutumières
Les Etats étant le plus souvent en difficulté
pour édicter et faire respecter les règles du jeu,
c'est-à-dire des normes acceptées par tous, les acteurs sociaux
adoptent des normes de fait qui se combinent ou s'opposent aux normes
officielles, nationales et extérieures101(*). Étant donné que le chef coutumier
considère que la terre et tout ce qu'elle comporte, forêts et
autres ressources est un héritage laissé par leurs
ancêtres, l'exploitant forestier qui va solliciter l'autorisation de
coupe du bois auprès de l'administration publique compétente qui
la lui accorde, sur le terrain est confronté aux chefs coutumiers, qui
lui en refusent l'accès ; donc il ne peut exploiter paisiblement.
Soit, l'exploitant forestier se résout à solliciter une
autorisation verbale auprès du chef coutumier qui la lui accorde mais il
ne peut exploiter paisiblement craignant le contrôle des inspecteurs et
des gardes forestiers qui le mettraient à la disposition de la justice
pour exploitation sans droit ni titre. Face à cette situation
dramatique, se développent des systèmes de corruption
généralisée en faveur à la fois des
autorités publiques et des autorités coutumières au
détriment de la protection de la forêt et du développement
de la contrée, étant donné que les frais perçus
auprès des exploitants servent davantage aux intérêts
égoïstes et n'entrent pas dans le trésor public. Si
l'exploitant refuse de se soumettre aux règles coutumières, il
s'ensuit souvent des bagarres qui donnent lieu à des dégâts
voire à mort d'hommes. Bien souvent, les matériels des
exploitants seront saisis mettant ainsi en péril l'activité
d'exploitation.
Le cas le plus connu dans la zone étudiée est
celui qui s'est passée en 2004. Le Chef de secteur de Manzasay,
Monsieur Kumbi André, mettant en application une décision
du Commissaire de territoire, a permis à la société LALEBI
d'exploiter le bois dans la forêt de Ngalane, groupement de NDAM. Fort de
son autorisation, l'exploitant a commencé l'exploitation. Mais cette
société a rencontré la forte résistance du chef
coutumier TAMUNDEL et des autres membres du clan cheffal qui estimait que le
Commissaire de territoire n'était pas habilité à
délivrer des permis sans leur aval102(*).
3.1.2.
Conflits entre population locale et exploitant
Les populations locales se demandent souvent ce que sera leur
sort ainsi que celui de leurs enfants si la forêt arrivait à se
dégrader à la suite de l'activité des exploitants
véreux. En effet, il apparaît que la proportion de territoire
forestier défrichée par les membres de la communauté
locale de manière traditionnelle et manuelle est de loin
inférieure par rapport à celle des exploitants. La raison en est
simple : les matériels utilisés par les membres de la
communauté locale sont souvent rudimentaires alors que ceux des
exploitants sont industriels. Ce qui fait qu'en un temps record, un exploitant
peut couper une très grande étendue du territoire forestier.
Cette situation inquiète les populations qui
considèrent que les forêts sont leur mère
nourricière. De là naissent parfois des conflits. Les populations
réclament alors auprès des exploitants davantage d'interventions
sociales comme la construction d'écoles et l'achat de matériels
scolaires, des dispensaires et des produits pharmaceutiques, la
réfection des routes, etc. Les exploitants rétorquent en disant
que cette compétence relève des autorités
politico-administratives établies étant donné qu'ils ont
payé au trésor public les taxes requises. Les
incompréhensions qui naissent donnent lieu à de nombreux
conflits. A titre d'exemple, les populations de NDANA, village où se
situent quelques scieries de la contrée, font souvent interrompre les
travaux d'exploitations des exploitants artisanaux parce qu'elles estiment
être flouées par le principal exploitant LALEBI à propos
des réalisations d'ordre social promis dans le cahier des
charges103(*).
Photo 1 : Ecole
implantée à Ndana Scierie
Ndana Scierie, 2008
3.1.3.
Entre exploitants
Les principaux conflits existant entre exploitants forestiers
sont soit le fait du tracé des limites des concessions soit ceux du
droit de passage.
S'agissant du tracé des limites des concessions, les
exploitants du territoire de Bagata se disputent souvent parce que les bornes
limitant les concessions respectives ont été
déplacées. Bien souvent, il s'agit de la mauvaise foi de la part
de l'un des concessionnaires qui, véreux, cherche à tout prix
à agrandir son espace d'exploitation. Les géomètres qui
sont fonctionnaires de l'Etat n'aident pas toujours à trouver une
solution juste et définitive. Tantôt, ils sont corrompus par l'un
des exploitants, tantôt ils s'abstiennent d'arbitrer parce que
impayés, ils refusent de descendre sur les lieux de la concession
arguant une surcharge de travail.
En 2006, la société LALEBI a porté une
affaire devant le tribunal de paix de Bagata contre les établissements
MFUMWAY à propos des limites de leurs concessions respectives dans les
limites des groupements NGUEME et NDAM. Après la descente sur les lieux
effectuée par le tribunal, il a été jugé que ce
sont les établissements MFUMWAY qui avaient empiété sur
les espaces accordés à la société LALEBI104(*).
En ce qui concerne le droit de passage, certains exploitants
sont en conflit parce que celui se trouvant en amont refuse d'accorder le droit
de passage à celui qui est en aval, malgré l'obligation faite par
le Code forestier « art. 103-106 ». Les causes de refus de
passage sont liées à des raisons d'ordre mystique. Dans la
croyance populaire, les exploitants estiment que le passage de l'autre sur son
territoire apporte des malédictions et réduit la valeur marchande
du bois. Il s'agit de croyances locales.
3.1.4.
Entre communautés locales et autorités étatiques
Le code forestier prévoit la rétrocession
à concurrence de 15% des taxes perçues auprès des
exploitants pour la réalisation des infrastructures sociales de base.
Dans le territoire de Bagata, les communautés locales ne voient pas
toujours la réalisation de ces infrastructures. Elles estiment que les
autorités détournent ces sommes d'argent et se révoltent
souvent contre l'autorité étatique établie.
L'illustration ci-dessous montre que l'exploitation
industrielle du bois dans le territoire détruit la qualité des
routes. Avec de gros camions comme ceux-ci, les routes sont davantage
abimées.
Photo 2 :
Ravitaillement de grumes vers le port de Makiri Mbiem
Ndana Scierie, 2008
3.1.5.
Communautés locales entre elles
Dans le territoire de Bagata, les communautés locales
sont en conflit à cause du tracé des limites des forêts de
leurs communautés respectives.
L'exemple le plus connu est celui qui s'est passé dans
le secteur de Manzasay. Deux groupements se sont bagarrés pour des
raisons de limites de forêt ; groupement : NGWEME et
groupement MPIMBIDI. En effet, les gens du village SHIE appartenant au premier
groupement se sont bagarrés avec ceux du village LUMFIMPA appartenant au
second groupement parce que ces derniers avaient tenté d'empiéter
sur les forêts appartenant aux premiers parce qu'ils n'en ont pas
suffisamment »105(*).
Toujours dans le même secteur, un autre groupement,
celui de NDANA a continué à percevoir les taxes des droits
coutumiers sur des exploitants artisanaux alors que ceux-ci, qui avaient certes
commencé l'exploitation sur ce groupement, avaient déjà
dépassé les limites de ce groupement. Il s'en est suivi des
conflits et des arrangements au niveau des tribunaux coutumiers, contre le
groupement MBAYA village NSAKANSHA
En 2001, les populations du groupement de NGUEME se sont
bagarrées contre celles de KIMBUMA parce que ces dernières
estimaient que les populations du village SHIE et MANZASAY qui fait
partie du groupement NGUEME avaient commencé à déboiser
sur leur groupement pour des raisons de champ.
Le désastre qui s'en était suivi fut total
parce que les maisons et les greniers furent brûlés. Il avait
fallu l'intervention de la police pour rétablir l'ordre public avant un
règlement traditionnel du litige. Ce genre de cas survient souvent entre
différentes communautés voisines106(*).
3.1.6.
Les membres de la communauté locale
Les conflits entre les membres de la communauté
surviennent quand un des membres se permet, sans respecter la procédure
coutumière ou légale prévue à cet effet, de vendre
un arbre provenant d'un champ ou d'une forêt qui ne lui appartient pas.
Il peut également s'agir de la vente d'arbres collectifs appartenant
à son propre clan. Cette situation engendre des conflits entre membres
d'une communauté locale. Il nous a été raconté dans
le village de MANTIENE que « Monsieur TALEBUY Belor, dans le village
TWANA Mr TAMUKIEY, dans le village KIMBUMA Mr MATUFAR, et dans le village
MANZASAY Mr JOUACHIN MUDIB étaient devenus tous fous parce qu'ils
avaient l'habitude de couper des arbres dans la forêt du clan et les
vendaient à la société LALEBI sans rien donner aux autres
membres de la communauté. Un maléfice les aurait alors
frappés.
3.1.7.
Possibilité des conflits futurs
La pacification du pays, le processus en cours de
réhabilitation des infrastructures ainsi que, d'une manière
générale, l'amélioration du climat des affaires dans le
pays ouvrent la voie à une sollicitation plus accrue des forêts
congolaises et particulièrement à Bagata, et donc à
l'accroissement et à la diversification des conflits entre
différents acteurs susmentionnés. Les cas ci-après
envisagés donnent un aperçu des conflits que l'on peut craindre
de voir se développer à l'occasion de la mise en oeuvre de la
foresterie communautaire en RDC.
-Le processus de vulgarisation du code forestier en cours
permettra certainement aux communautés locales de connaître leurs
droits et d'être un peu plus regardants pour l'accès à la
ressource forestière locale par les tiers et pour son exploitation. Cet
éveil peut générer dans le chef des exploitants forestiers
des réflexes et des attitudes tendant à favoriser la rupture de
l'équilibre social des villages, en opposant les villageois les uns aux
les autres, et même des communautés entre elles, comme on l'a vu
par le passé.
-La perspective de l'implantation des forêts
communautaires ouvertes par le code forestier peut être en
elle-même une source des conflits au sein des villages, lorsqu'il
s'agira, par exemple de déterminer les limites de ces forêts, ou
de déterminer l'affectation de chacune de ces forêts107(*) ou des
bénéfices à tirer éventuellement de l'exploitation
de ces forêts.
3.2.
Les systèmes locaux de résolution des conflits
Il faut distinguer ici deux types de situations : la
première est celle qui touche aux conflits que l'on qualifierait
d'intercommunautaires108(*). La seconde touche plutôt aux conflits
opposant les communautés et les autres groupes d'acteurs sociaux comme
l'autorité politico administrative, les exploitants forestiers ou les
concessionnaires fonciers.
3.2.1.
Les conflits inter ou intracommunautaires
Dans le territoire de Bagata, les conflits forestiers, et
même fonciers, opposant les communautés entre elles ou ceux
internes aux communautés se résolvent localement par les voies
coutumières, et généralement sans avoir recours aux
tribunaux de droit écrit.
On a pu répertorier l'existence au niveau local de
tribunaux coutumiers, présidés par les chefs des lignages et les
notables. Les appels contre les décisions rendues par ces tribunaux sont
portés devant le tribunal coutumier au niveau du groupement,
présidé par le Chef du groupement et ses notables ainsi que les
chefs des lignages concernés. Les informations recueillies indiquent que
la majorité des conflits tranchés au niveau du groupement se
terminent là. La partie perdante au premier degré devant le
tribunal du lignage et qui perd encore au niveau du groupement accepte
généralement et sportivement le verdict, craignant surtout la
réprobation sociale du milieu où il vit.
Il ressort de la situation à Bagata que la population
est satisfaite de la manière dont la justice est rendue par
l'autorité coutumière par rapport à la justice des cours
et tribunaux modernes qui leur coûte énormément
d'argent109(*). C'est
le cas de la résolution du conflit entre les populations du groupement
de NGUEME et de celle de KIMBUMA. Ici la population de KIMBUMA
était des migrants accueillis par le chef coutumier de NGWEME qui lui
accorde une concession. Des années plus tard, le chef migrant,
très fort, veut s'emparer de la forêt de NGWEME, le conflit
fut très bien géré par le tribunal coutumier grâce
à un témoin oculaire, Mr GASTON TAWABA SAKATA,
ancien enseignant et son ami
TANDI cultivateur qui connaissaient très
bien l'histoire et mirent fin à ce conflit en expliquant
l'originalité du migrant.
3.2.2.
Les conflits entre les communautés locales et les autres acteurs
Ici encore, il faut faire la part des choses, selon que les
conflits opposent les communautés locales aux exploitants industriels ou
artisanaux des forêts ou ceux qui opposent les communautés locales
aux autorités territoriales ou aux institutions travaillant pour la
conservation.
C'est dans la première hypothèse que l'on
retrouve le plus grand nombre des conflits portés devant les tribunaux.
Cette situation s'explique par le fait que, dans ce genre des conflits, la
compétence des autorités coutumières qui favorise la
cohésion sociale ne joue pas et ne saurait jouer, en raison de
l'implication des acteurs extérieurs aux communautés. Dans le
meilleur des cas, il est rare de voir des communautés locales
opposées à une société d'exploitation
forestière avoir gain de cause au tribunal ; soit elles
présentent mal leurs prétentions devant le juge (faute
d'assistance), soit elles se voient opposer une fin de non-recevoir
tirée du défaut de qualité ou d'intérêt
à se prévaloir devant un tribunal de la cause qu'elles
portent.
Dans les conflits qui opposent les communautés locales
aux institutions étatiques locales ou aux autorités en charge de
gestion des parcs nationaux et autres réserves, on s'est rendu compte
que les communautés se résignent et se plaignent. Elles
subissent. Excédées en définitive, elles ne savent plus
finalement à qui soumettre leur cause.
3.2.3.
Interface entre les communautés locales et les autres acteurs
locaux.
Le code forestier reconnaît la gestion participative des
forêts entre les parties prenantes, et encourage la consultation et
l'implication des communautés locales dans la gestion des forêts
et, notamment, dans le processus de classement et de déclassement des
forêts, dans celui d'allocation des concessions forestières, bref
dans les décisions importantes qui touchent aux forêts locales.
Aussi trouve-t-on, çà et là, des initiatives impliquant
activement les communautés locales. Cependant, cette implication n'est
toujours pas aisée et s'accompagne souvent d'incessants tumultes.
3.2.4.
Rapports « communautés locales » et secteur
public
Avec le secteur public, les communautés locales sont de
temps en temps approchées par l'administration locale ou provinciale
chargée des forêts, à l'occasion des enquêtes
préalables110(*)à l'octroi des concessions, pour
vérifier l'existence ou non des droits en leur faveur sur la superficie
à concéder.
Ces contacts se font également à l'occasion des
lotissements des terres forestières rurales se trouvant dans les limites
des villes et se soldent par le versement des droits traditionnels au profit de
la communauté.
On a vu aussi l'administration approcher les
communautés locales du groupement de NGUEME pour solliciter
des terres forestières à affecter au paysannat111(*).
3.2.5.
Rapports « communautés locales » et organisations
non gouvernementales congolaises
Les organisations non gouvernementales encadrent les
communautés locales par la sensibilisation sur les principes de gestion
durable des forêts. A Bagata, les communautés locales sont
encouragées à la gestion et à la conservation
communautaire des espaces ainsi qu'à la mise en place des
activités alternatives à l'exploitation
forestière, agriculture respectueuse de l'environnement,
l'économie de l'énergie bois, l'agroforesterie, etc.
« L'ONG MFINDA LUZINGU » a amorcé depuis quelques
années des actions de sensibilisation pour le reboisement des parties
savanicoles notamment près des villages de NTOLUKUBI, LUNKUNI et
NTER-BAL112(*).
3.2.6.
Rapports communautés locales et exploitants forestiers
Les communautés ont des rapports tantôt avec les
exploitants privés artisanaux, tantôt avec les exploitants
industriels.
A.
Rapports communautés locales et exploitants
privés artisanaux
Les communautés sont approchées par les
exploitants privés artisanaux, à l'occasion de l'exploitation
artisanale du bois. Le processus est généralement le
suivant :
Ces derniers, avant de déposer leurs dossiers de
demande de permis de coupe, viennent négocier avec les
communautés locales pour obtenir l'autorisation d'accéder
à leur forêt et de procéder à l'identification de la
forêt.
Ces types de convention se passent verbalement ou par
écrit suivant les groupements. Dans le groupement de NGUEME, il
existe plusieurs institutions d'enseignement et les populations sont plus ou
moins alphabètes. Les conventions sont souvent écrites. Par
contre, le groupement de NDAM, situé en forêt a peu
d'écoles et les populations sont analphabètes en grande
majorité. Les conventions sont souvent verbales.
B.
Rapports communautés locales et exploitants industriels des
forêts
Les exploitants industriels procèdent presque de la
même manière, mais avec quelques nuances :
- Lorsqu'ils viennent, ils ont des buts différents des
exploitants artisanaux. Les exploitants industriels viennent plutôt
négocier la renonciation, par les communautés locales, de
leurs droits fonciers et forestiers sur la superficie à
concéder113(*).
- Cette renonciation donne lieu à la conclusion d'un
accord entre l'exploitant et la communauté concernée, qui
détermine les droits de la communauté, en contrepartie de la
superficie consentie. A ce jour, la plupart des droits d'exploitation
forestière accordés l'ont été sans que les
communautés aient eu à bénéficier de l'assistance
de l'administration locale. On retrouve donc pour cette catégorie
d'allocations, des accords verbaux, que les communautés ont de la peine
à prouver.
Cette situation explique des rapports souvent tumultueux que
les exploitants industriels ont avec les communautés locales.
Les rapports entre exploitants industriels et
communauté locales se traduisent aussi par le recrutement de la
main-d'oeuvre au sein des communautés riveraines des superficies
allouées. Ces recrutements figurent souvent dans les clauses des accords
que ces exploitants concluent avec les communautés locales.
Cette procédure a été suivie par la
société LALEBI, principale société
d'exploitation du bois dans la contrée.
3.2.7.
Rapports « communautés locales » et organisations
non gouvernementales internationales.
Dans le territoire de Bagata, nous n'avons pas connaissance de
l'existence d'une organisation internationale qui opère dans le domaine
de l'environnement et particulièrement de la forêt.
A l'Est de la République, elles travaillent directement
avec les communautés locales à la conservation et à la
protection des parcs nationaux.
Et dans le cadre du partenariat pour les forêts du
bassin du Congo, quelques organisations internationales sont
opérationnelles et poursuivent, en impliquant les communautés
locales, la diminution de la destruction de l'habitat, une gestion durable des
ressources naturelles dans le bassin du Congo et la conservation du potentiel
de la biodiversité. Les principaux partenaires de ce programme
sont : « AWF, CARE, CI, WCS, WWF et IRM ».
3.3. ETUDE DE CAS
3.3.1. Province de l'Equateur114(*)
Situé au nord-est de la RDC la province de l'Equateur
s'étend sur 403.292Km², soit 17% du territoire national. Elle
occupe la troisième place en superficie, en 2005 elle comptait
près de 5.8 millions d'habitants soit 10,7% de la population nationale,
avec une densité faible « 14 hab/km² » par
rapport à la moyenne nationale « 24
hab/km² ».
La partie nord de la province est couverte d'une savane
secondaire tandis que la grande forêt ombrophile sempervirente et la
forêt édaphique couvrent près de 72% de la superficie de la
province. Avec cette couverture, la province de l'Equateur détient
à lui seul 25,7% des forêts de la RDC. Les forêts sont la
principale richesse de la province pour son développement et
créent pas mal de tension entre, le gouvernement central, les
autorités provinciales, les exploitants et la population locale qui
souvent considère, cette forêt comme étant la leur.
A. Les modes locaux de gestion des forêts par les
communautés locales
Dans certaines contrées de la province de l'Equateur,
notamment chez les Ekonda, les Ntomba et les Elanga, le rôle du chef
est passif en matière de gestion des terres et des forêts. Sa
fonction dans ces contrées se limite à la gestion politique de
lignage et à la régulation des conflits fonciers et forestiers
qui se poseraient au sein de l'entité115(*). Ce sont plutôt les familles qui gèrent
réellement les terres et les forêts, mais en tenant
régulièrement le chef informé de leur gestion.
B. Les genres des conflits116(*)
En RDC le genre des conflits est presque toujours le
même, depuis le début du processus de la mise en oeuvre de la loi
n° 011/2002 et loi n°007-2002 du 11/07/2002 portant code forestier et
minier, financer par la banque mondiale ; l'exploitation des ressources
naturelles de la RDC prend de l'ampleur de manière
désordonnée au grand dam des peuple autochtones Pygmées
qui vivent dans la forêt et de la forêt.
Par exemple, les communautés autochtones Pygmées
des villages des Yeimbo et Banga dans la province de l'Equateur au nord-ouest
de la RDC n'avaient pas été préalablement informées
que des concessions forestières seraient mises en exploitation sur leurs
terres par la SIFORCO (société industrielle et Forestière
du Congo) et SEDAF (société d'exploitation développement
agricole et forestière).
Un autre conflit est celui des quinze paysans du village
Yaewonge dans le secteur de Lueko, territoire de Bumba, dans la province de
l'Equateur arrêté sur l'ordre de la société
industrielle et forestière du Congo Siforco, en sigle. Selon des
activistes du « Réseau Ressources Naturelles, RRN »,
sur place ces paysans auraient barricadé la route pour exiger de Siforco
la renégociation du cahier de charge. Pour rappel, en novembre 2009,
Greenpeace, organisation oeuvrant dans la protection des ressources naturelles,
en collaboration avec la société civile de Bumba à
organiser un atelier sur l'avenir de forêts de la province de l'Equateur.
Et pour la première fois l'exploitant Siforco avait pris part à
cet atelier, au cours duquel certains villageois présents en
profitèrent pour présenter au public les stigmates des tortures
dont ils avaient fait l'objet de la part des agents de l'ordre sur instigation
de la Siforco117(*).
Les populations de « Bolomba et de
Bikoro » dans la province de l'Equateur sont aux abois. Ceci suite
aux pressions exercées sur les forêts de leurs territoires qui, si
l'on' y prend garde, pourraient perdre 2/3 de leur superficie,
conséquence de la mauvaise politique de reboisement. Le dernier conflit
qui défraie la chronique dans cette partie de la province est celui qui
oppose la communauté locale de Bikoro à l'entreprise ITB, conflit
qui a conduit à des tensions persistantes entre le représentant
de la communauté et l'entreprise. Sur place, un mouvement associatif,
dénommé communauté des anciens élèves des
écoles catholiques du doyenné de Bolomba, Caneec/Bolomba, dans
son rapport annuel déplorait le fait que l'exploitation
forestière à Bolomba ne profite même pas aux écoles
puisque la plupart des élèves étudient à même
le sol, faute de bancs, alors que le cahier de charge des exploitants
prévoit des investissements dans ce domaine précis. Voilà
un cas de non-respect du cahier de charge. Selon les mêmes ressortissants
de Bolomba, la désinvolture avec laquelle les exploitants forestiers se
comportent est à la base de l'aggravation de la pauvreté, de la
dégradation et de la déforestation118(*).
La Siforco entretient avec les communautés locales des
relations historiquement conflictuelles. Un article de presse que la direction
n'a apparemment jamais démenti, affirme qu'au début de
l'année 2005, la police, appelée pour réprimer une
manifestation anti-Siforco à Bumba dans la province de l'Equateur,
aurait ouvert le feu sur la foule, faisant quatre morts et 17
blessés119(*)
Dans une étude récente sur les entreprises
allemandes en RDC, le journaliste d'investigation Dominic Johnson cite un
document interne de la société du 29 mars 2007, décrivant
un incident survenu à MBA, au cours duquel des villageois, manifestant
pour dénoncer le non-respect de l'engagement de la
société à construire une école, auraient
temporairement séquestré plusieurs de ses collaborateurs. Selon
la source, l'incident se serait soldé par l'arrivée
d'autorités politiques et par la répression physique et
l'arrestation des manifestants villageois qui, selon le groupe Danzer, avaient
l'habitude d'exercer des pressions. En août 2007 suite à une
plainte des employés de Lisala dans la province de l'Equateur
auprès du directeur de SODEFOR concernant les « violations
systématiques du droit de travail » par la direction locale,
il apparut que les employés travaillaient depuis trois ans sans
contrat.
Lors d'une conférence sur la gestion des conflits
forestiers, Olivier KAFORO membre de la société civile estime que
les conflits forestiers sont devenus, depuis quelques années,
très fréquent en RDC. Et parmi les causes qui occasionnent ces
conflits, il a lieu de noter la faible implication des communautés
locales et autochtones dans les processus de prise de décisions
relatives à l'affectation et à la gestion des ressources
forestières ainsi que la marginalisation et la discrimination des
groupes minoritaires et vulnérables, notamment les pygmées tant
par l'Etat que par les autres acteurs. Le manque de vrais leaderships
autochtones constitue également l'une des causes de conflits
forestiers.
3.3.2. Province Orientale120(*)
La province Orientale est située au Nord-Est de la RDC.
Elle s'étend sur une superficie de 503.239Km2,
soit le 1/5 de la superficie totale du pays. Sur les 503.239Km2, la
forêt couvre une superficie de 370.000 Km2, soit 73% de la
superficie de la province, dont 43.569 hectares constitués en 35
réserves non gardées en voie de disparition
disséminé dans tous les districts, hormis le parc de
« GARAMBA et le réserve à OKAPI d'EPULU » qui
sont gardés.
La superficie des forêts concédées
s'élève à 3.012.434 hectares où sont
exploitées différentes catégories de bois.
A. Genres des conflits
Les conflits à répétition sont ceux qui
opposent la population locale et l'exploitant et cela est dû au
non-respect de cahier de charge.
A BASOKO dans la province Orientale, les conflits avec les
communautés locales ont été réamorcés depuis
le retour de l'entreprise SIFORCO après plusieurs années
d'absence. Sous le régime de Mobutu un proverbe populaire de la
région disait «Otumoli SIFORZAL, Otumoli Mobutu », ce
qui se traduit par « Toucher à SIFORZAL, c'est toucher
à Mobutu ». En mai 2008, après avoir découvert
que des consultants de « forêt Ressources
Management : FRM », un cabinet
français de conseil en gestion des forêts, préparaient un
plan de gestion de leurs forêts pour le compte de SIFORCO, des
villageois ont organisé une grève avec occupation des locaux
pendant cinq jours, à LOKUTU, pour dénoncer le fait qu'ils
n'avaient pas été consultés. Lors d'une réunion
avec les représentants locaux, « FRM » a
renvoyé la responsabilité de ce défaut d'information
à son client SIFORCO. En plus le compte rendu de cette réunion
n'a pas été rendu public121(*).
En 2008, environ deux mille villageois encerclèrent le
site de l'entreprise SAFBOIS à YAFUNGA revendiquant le paiement de
compensations financières pour l'utilisation du sol communautaire, la
construction d'une école et d'une infirmerie, la réfection de
routes et des recrutements parmi la main d'oeuvre locale. Devant le silence
de l'entreprise, ils auraient alors pénétré dans les
locaux et emporté certains équipements122(*). Cinq membres du
comité villageois furent arrêtés, mis en prison et battus.
Ces mêmes populations de YAFUNGA en 2005 avaient bloqué les routes
paralysant les activités de l'entreprise. Elles se plaignaient de
n'avoir pas été dédommagée par SAFBOIS pour
l'occupation de terrain communautaire ni pour la destruction par les bulldozers
d'arbres fruitiers, de récoltes et de tombes. Cinq manifestants furent
arrêtés, battus et condamnés à des amendes.
En 2006, un homme et deux jeunes filles ont été
frappés par un membre de la sécurité de SAFBOIS
alors qu'ils ramassaient des chenilles.
Un autre conflit est celui qui oppose à
l'autorité étatique et exploitante. En 2007 une mission de
terrain conjoint composée de représentants ministériels et
de membres de Global Witness mandatée par l'Union Européenne et
la Banque Mondiale découvraient des sites d'exploitation dans les
champs appartenant à des villageois à proximité de YAFUNGA
(Province Orientale), à 16 kilomètres de sa parcelle de coupe
annuelle autorisée, et sur lesquels la société utilisait
son marquage sur les grumes ainsi produits illégalement. Au total six
violations distinctes du code Forestier ont été
constatées : exploitation non autorisée, absence de marquage
des limites de parcelles annuelles de coupe, marquage de grumes non
réglementaire(ou absent), marquage des souches non
réglementaire(ou absent), stockage des grumes non marquées et
dont on ne retrouve pas de trace dans les journaux de chantier. Les
inspecteurs ont découvert que les employés n'avaient pas
été payés depuis trois mois.
Conflits entre les autorités étatiques et les
communautés locales. En 2007, un courrier du comité villageois
rappelait au président de l'assemblée provinciale les 1000
emplois promis par la dirigeante Françoise Van de Ven, lors de la
cérémonie inaugurale de septembre 2004. Le courrier regrettait
que SAFBOIS n'ait jusque-là engagé que 184 personnes, dont 150
journaliers gagnant 4000 FC par mois (environ 5 euros), pour 14 heures de
travail par jour.
3.3.3 Cas de conflit forestier /foncier au
Katanga123(*).
La communauté de Lubanda s'est trouvée
privée de son espace de vie par l'extension d'une part de 540.000 ha du
parc National de Kundelungu (lui laissant une zone d'accès le longue de
la route sur 2 km) et par l'octroi de plus de 10.000 ha par l'administration
foncière à un exploitant X pour la production agricole. Celui-ci
a délocalisé les paysan de l'espace acquis et a interdit aux
communautés de se rendre dans leurs champs et de pêcher dans leur
lac, alors il constitue l'unique source d'approvisionnement en eau et en
protéine.
Avec ses tracteurs, l'exploitant a déboisé et
détruit les plantations des paysans. Devant cette situation
délicate, les gardes de chasse s'arrangeraient avec les membres des
communautés qui voulaient pratiquer l'agriculture illégalement
dans le parc en leur versant des tributs en contrepartie et en se partageant le
fruit de la récolte. Lors de la récolte, l'équipe de garde
ayant changé, un paysan voulant visiter son champ se fera tirer dessus
dans le dos, sous prétexte qu'il était braconnier et qu'il avait
violé les règles d'accès au parc. Actions menées
une équipe de la vulgarisateurs du RRN qui était en mission dans
ledit village fut saisie de ce rapport. A l'issue de leur entretien avec les
membres de cette communauté elle rapporta à son tour au
comité d'orientation qui constitua une équipe pour la collecte de
données. Une cartographie participative fut ainsi réalisée
pour mener le plaidoyer. Le comité d'orientation organisa une table
ronde autour de laquelle furent conviées les parties prenantes.
Finalement, l'administration constitua à son tour une équipe pour
confirmer les informations, qui après vérification, changea les
limites de l'exploitant et réalisa une extension de la zone
d'accès dans le parc jusqu'à 5 km au profit des
communautés locales.
3.3.4. Cas de conflit forestier au Kasaï-
Occidental124(*)
Le contexte du conflit, la concession en cause est
située dans la commune de Lukonga, qui est une commune semi-rurale et
même agropastorale. Elle est plus précisément située
dans le groupement de Bena Mutshipay au village Tshumbe dans la
périphérie nord-est de la ville de Kananga. Lukonga est une des
cinq communes crées en 1958. Il faut signaler que le conflit dont il est
question est hybride, c'est-à-dire aussi bien forestier que foncier,
étant donnée la nature même du de la concession. Il s'agit
en effet de la vente d'une concession sur laquelle ne vivent pas moins de trois
villages. Sous prétexte de donner accès aux projets de
développement communautaire, en 2009 le chef de groupement de bena
Mutshipay a vendu la concession à un Honorable Sénateur
originaire du Kasaï Occidental. C'est dans ces conditions que lors de la
réalisation de travaux de construction, le Sénateur a fait
arrêter arbitrairement certains membres de la communauté locale
qui selon lui, bloquaient l'avancement des travaux. La population locale a
été inquiétée par la présence permanente de
policier pendant une semaine ; ce qui a créé un certaine
traumatisme et un arrêt de travaux champêtres et suivie. C'est
à ce moment-là que la société civile a
été saisie par les représentants de la communauté
locale de Bena Mutshipay et c'est une ONG qui s'est occupée de
l'accompagnement de ce dossier (arrestations arbitraires de certains membres
de la communauté concernée, arrêt des travaux
champêtres, risque de famine et délocalisation villageois). Action
menée par la société civile, SOANA une ONG de droit de
l'homme au Kasaï Occidental. Contact avec les autorités judiciaires
pour faire relaxer les personnes arrêtées, concertation avec la
communauté pour trouver une solution, récupération de
terre arable par les membres de la communauté locale, acceptation par le
Sénateur des erreurs de procédure dans l'acquisition de la
concession.
3.3.5. Cas de conflit entre la SODEFOR et la
population locale de Nioki à Bandundu125(*) .
Objet du conflit, la SODEFOR exploite le bois dans le
territoire d'Oshwe depuis 1994. Cette société se retrouve
aujourd'hui en conflit avec les communautés locales,
particulièrement avec celles du groupement Bokongo. Le chef de
groupement, l'Honorable Henri Bosama (86 ans) et 27 membres de la
communauté se sont rendus le 22 janvier 2010 sur le site du chantier
SODEFOR (Mike 12), situé à plus ou moins 15 kilomètres de
la cité d'Oshwe, pour négocier avec Monsieur Richard Garrigue,
chargé de la certification de la société SODEFOR,
dépêché sur le site pour la circonstance. Ils exigeaient la
suspension des activités d'exploitation forestière en attendant
l'issue du conflit relatif à la délimitation des forêts qui
les oppose au groupement Mbidjankamba. Le groupement Bokongo revendique en
effet des limites de terre différentes, estimant que la SODEFOR et le
comité de sécurité territorial d'Oshwe auraient
déplacé les bornes et attribué la partie Luna au
groupement Mbidjankamba. Le groupement Bokongo réclame principalement
les redevances coutumières jamais payées par la SODEFOR depuis
son installation dans le territoire d'Oshwe (Luna 1, Luna 2 et Lole). Celles-ci
équivaudraient, selon les plaignants et tel que repris dans la lettre du
Gouvernement du 22 janvier 2008, à 5.971.968 dollars US. Ils exigent
aussi la signature d'un cahier des charges et son exécution
conformément au Code forestier. Plusieurs correspondances entre les
autorités politico-administratives, la SODEFOR et l'Honorable Bosama
indiquent que ce conflit date de 1988. Plusieurs procès et
médiations initiés n'ont pas apporté les solutions
souhaitées par les parties en présence, selon les informations
disponibles.
« Les conflits en présence est dû
au souci des communautés locales de bénéficier des
retombées sociales de l'exploitation forestière de leur
éco-région, L'analyse de la situation et des actions
engagées par la société civile fait montre de la mauvaise
connaissance du Code Forestier et de ses mesures d'application notamment en
matière de cahiers de charges. On constate également que les
conflits de jouissance sont accompagnés d'autres infractions, ce qui met
très bien en évidence le besoin d'un accompagnement judiciaire
des populations affectées par l'exploitation
forestière »126(*). On comprend également que les actions
envisagées n'ont pas totalement résolu les problèmes
L'article 89 constitue le poumon socio-économique de la
réforme ayant abouti à l'adoption du Code forestier. Il sera
difficile d'atteindre les objectifs fixés dans la mesure où cette
disposition n'est pas pourvue des moyens de contraintes à l'endroit des
concessionnaires. Avec ses commentaires, l'auteur souligne qu'il faudrait
assortir cet article de sanctions administratives, comme le retrait de
l'autorisation de coupe en cas de non-réalisation des infrastructures
convenues127(*).
3.3.6. Les enseignements tirez de ces études
de cas par rapport à mon terrain
Comme je l'ai déjà mentionné ci-dessus,
nous sommes en présence des sociétés juxtaposées
dans l'espace, les unes proches des autres. Les études de cas m'ont
aidé à connaître certaines coutumes de diverse
région du pays. En outre, ces études m'ont permis d'approfondir
mes connaissances sur les différentes sources de conflits ainsi que sur
les espaces publiques utilisées pour leur résolution. J'ai
constaté qu'à Bagata se sont les petits entrepreneurs qui
épuisent des ressources forestières dans un souci d'assurer la
subsistance de leur famille, tandis que dans les autres provinces ce sont les
grandes sociétés qui exploitent les ressources forestière
dans un but lucrative sans se soucier des questions environnementales et
sociales.
Ces études ont aussi mis en évidence que
malgré une croissante perte de confiance de la population dans le
système traditionnel de résolution de conflit, les
communautés préfèrent les autorités
coutumières pour résoudre leurs différends plutôt
que les .institutions étatiques comme par exemple le tribunal. Celui-ci
est cependant le choix préférentiel des grandes
sociétés. Par conséquent, à Bagata, les
autorités coutumières se voient investi d'un pouvoir
considérable au sein de la communauté dont le chef coutumier
est parfois le porte-parole.
Ces études m'ont aussi éclairé sur la
défaillance dans la gouvernance foncière et forestière
ainsi que sur l'impact de celle-ci sur le développement locale et
communautaire. En effet, des phénomènes de corruption,
d'impunité, de trafic d'influence, de clientélisme, de
patrimonialisme et le non-respect des lois constituent de sérieux
obstacle au processus de développement et de bien-être de la
population locale et du pays en générale.
En analysant les conflits entre communautés locales et
les entreprises d'exploitation forestière, j'ai constaté que
les sources de ces conflits sont presque identiques et que le non-respect de
cahier de charge ainsi que l'exclusion de la population locale de tous
processus de concertation et de décision sont à la genèse
de plupart des conflits.
Bref, les renseignements que j'ai pu obtenir en analysant ces
études de cas m'ont été plus qu'utiles dans la formulation
des suggestions aux autorités de l'Etat Congolaise ainsi que dans
l'identification des pistes pour sortir du dualisme juridique et des
stratégies de gestion de conflits dans le secteur forestier.
Chapitre 4. CONCLUSION ET SUGGESTION
4.1. Conclusion
La présente recherche a porté sur la
contribution et analyse des conflits forestière en milieu rural. Cas de
territoire de Bagata, province de Bandundu (RDC)
Elle avait pour objectif principal d'expliquer les
articulations entre l'autorité étatique et l'autorité
coutumière dans les conflits des ressources forestières dans le
territoire de Bagata.
L'Etat Congolais en matière des conflits forestiers
manifeste un double intérêt à la fois protecteur juridique
et social. Protecteur juridique parce qu'en tranchant correctement les conflits
forestiers, il garde les biens des tiers. Protecteur social dans la mesure
où il maintient la paix sociale.
Pour atteindre notre objectif nous nous sommes servis des
différentes données secondaires retrouvées dans les
différents documents et quelques données empiriques vécues
et récoltées sur le terrain à Bagata principalement dans
le secteur de Manzasay. Nous avons également utilisé les
données d'une enquête effectuée entre 2004 et 2006 sur les
modes d'exploitation dans le territoire de Bagata par une organisation non
gouvernementale dénommée « Mfinda
Luzingu » La forêt c'est la vie. L'approche suivie est
inducto-deductive, elle consiste sur des connaissances préalables et
l'expérience personnelle, qui approuve l'analyse et le
dépassement de la simple description des faits observés.
Les liens juridiques entre la forêt et la terre ne sont
pas toujours très clairs en RDC de sorte qu'il en résulte des
conséquences parfois fâcheuses sur la gestion et le
développement du secteur forestier. Et pourtant, la terre et la
forêt peuvent servir de bases essentielles au développement local
et national si elles sont exploitées de manière durable et
participative par la communauté locale pour son intérêt et
le bien-être collectif. En pratique, ce mode souhaitable de gestion des
forêts n'est généralement pas d'application aussi bien
à l'échelle nationale qu'au niveau de nombreux terroirs et
villages de la « RDC ».
A la suite de ces considérations théoriques et
du contexte particulier à la région de Bagata, l'hypothèse
de base de ce travail est la suivante : l'ambiguïté
créée par le dualisme juridique existant dans le secteur
forestier insécurise les exploitants. Ainsi, on aboutit à deux
situations : soit, l'exploitant forestier du territoire de Bagata
sollicite uniquement l'autorisation de coupe du bois auprès de
l'administration publique compétente qui la lui accorde mais sur
terrain, celui-ci est confronté à la résistance des chefs
coutumiers et paysans qui lui refusent l'accès ; et finalement il
ne peut exploiter paisiblement. Soit, l'exploitant forestier se résout
à solliciter une autorisation verbale auprès du chef coutumier
qui la lui accorde, dès qu'elles ont négocié le droit
d'accès et le partage du produit de la coupe, mais il ne peut
exploiter paisiblement craignant le contrôle des inspecteurs et des
gardes forestiers qui le mettraient à la disposition de la justice pour
exploitation sans droit ni titre.
Face à cette situation dramatique, se
développent des systèmes de corruption
généralisée en faveur à la fois des
autorités publiques et des autorités coutumières au
détriment de la protection de la forêt et du développement
de la contrée, étant donné que les frais perçus
auprès des exploitants servent davantage aux intérêts
égoïstes et n'entrent pas dans le trésor public. Certes les
autorités étatiques sont très souvent corrompues pour
leurs propres avantages, sont capables de proposer à plusieurs
exploitants à la fois, la vente d'une forêt sans même
consulter ni informer les chefs coutumiers qui sont les notables terriens, ce
qui cause souvent des conflits.
Par contre, la gestion des conflits fonciers et forestiers par
le chef coutumier semble être bonne ; en ce sens que, toute palabre
qui a lieu au niveau de la coutume est tranchée de manière
équitable, la palabre étant une instance coutumière qui
traite d'une situation conflictuelle ou d'un problème de grande
importance concernant des personnes ou plusieurs groupes et ayant comme
objectif principal, non de condamner ou de donner raison à l'un ou
l'autre, mais de rétablir l'harmonie des rapports sociaux.
En effet, comme il a été dit, l'exploitation et
le règlement des conflits forestiers sont régis par le code
forestier avec un fondement de droit écrit qui n'accorde pas beaucoup de
place à la coutume et souvent les autorités elles- même
font respecter la loi en place dans leurs intérêts et au
détriment de la communauté locale.
Cette situation de dualismes juridiques forestiers opposant
les chefs coutumiers et l'autorité étatique pourrait être
résolue si l'Etat congolais reconnaissait à ces derniers le
droit de la gestion des forêts. Ainsi parfois des chefs coutumiers
s'opposent aux décisions de l'autorité d'attribuer des
forêts aux exploitants forestiers, parce qu'ils n'ont pas
été associés à la prise de décision.
Toutes ces manoeuvres expliquent la fragilité des
structures administratives de l'Etat congolais et augmentent
l'insécurité des exploitants forestiers. D'où il y a, la
nécessité de vulgariser le code forestier. Par exemple
l'ignorance de la communauté locale sur - les lois n° 71-008 et
n° 71-009 du 31 décembre 1971 portant modification de la
constitution, qui affirme (art 10) que " le sol et le sous-sol zaïrois
ainsi que leurs produits naturels appartiennent à l'état, et la
négligence de l'autorité étatique sur l'article 89 de code
forestier relative à la réalisation des infrastructures
(constructions des route, écoles et hôpital) aussi l'article 122
relative aux produit des taxes de redevance forestières. C'est alors
que j'ai proposé de piste pour sortir de ce dualisme entre autre
mettre en place une banque de données avec des informations
enrichissantes pour permettre à la population riveraine de bien
comprendre la loi, tels que le code forestier et ses mesures d'application
traduites dans les langues nationales du pays enfin de donner l'occasion aux
villageois de comprendre leurs droits. Dans ces situations, le
problème forestier pourrait être résolu par une
réponse efficace de l'autorité étatique congolaise
c'est-à-dire associer la communauté riveraine à la
délivrance de permis d'exploitation est un atout.
4.2. Suggestions
Les suggestions sont présentées comme des pistes
de solution ou de proposition capables d'aider les différents acteurs
à perfectionner l'efficacité des avis de la communauté
locale et d'autre part de permettre une grande participation de la population
riveraine dans l'exploitation forestière. Tous les acteurs devraient
être engagés dans la délivrance de permis d'exploitation.
La mise en oeuvre des suggestions proposées pourrait renforcer
l'amélioration de la gestion forestière et le
développement de la population et du pays en général.
Dans cette partie, nous suggérons quelques
recommandations à l'Etat, des pistes pour sortir du dualisme juridique
et l'enseignement qui en résulte.
4.2.1. Suggestions aux
autorités de l'Etat congolais
A. L'insertion de
l'autorité juridique à l'instance coutumière
Dans le cadre du territoire de Bagata le professeur Kalambay
Lumpungu a proposé d'avoir une personnalité juridique
coutumière, selon laquelle les droits des communautés locales
sont des droits collectifs limités aux seuls droits de jouissance
exercés par ses membres (droits individuels) du fait de la mise en
valeur. Plusieurs dispositions du code forestier garantissent le droit à
la consultation préalable des populations riveraines et locales, cette
consultation est l'éclairage même de leurs participations, alors
que le code forestier reste muet en ce qui concerne les caractéristiques
de cette consultation. En tout cas, des concessions forestières sont
accordées régulièrement sans que les communautés en
soient informées et même si elles vivent dans la zone de la dite
concession, nous pouvons dire que cette assertion se vérifie à
certains égards sur le territoire de Bagata. Dans le secteur de
Manzasay, le chef de secteur Mr KUMBI ANDRE, mettant en application une
décision de l'administrateur du territoire, a permis à la
société Lalebi d'exploiter le bois dans la forêt de
Ngalane, groupement de NDAM sans toutefois consulter, ni informer les chefs
coutumiers qui sont des notables terriens. Aucun soutien spécifique
n'est prévu pour assurer la participation réelle de la
communauté locale.
Le secteur est divisé en groupements, alors dans le
secteur de Manzasay il y a plusieurs groupements mais trois groupements
à une grande étendue de la forêt et chaque forêt a
son nom ; groupement de NDAM « forêt
Ngalane », groupement de NDANA « forêt
Mbieme », groupement de NGWEME « forêt
Mbeale Ngwem ».
Le constat est que la législation congolaise
reconnaît aux communautés locales le droit à la
consultation et à la participation mais ne le leur garantit pas. Autre
cas dans son article 122, le code forestier prévoit la
rétrocession à concurrence de 15 % des taxes perçues
auprès des exploitants pour la réalisation des infrastructures
sociales de base, alors que dans le territoire de Bagata, les
communautés locales ne voient pas toujours la réalisation de ces
infrastructures et estiment que les autorités détournent ces
sommes d'argent, alors elles se révoltent contre l'ordre établi.
Etant donné que la personnalité juridique est
titulaire de droits et soumise à des obligations, elle est très
importante aux yeux de la communauté locale, car elle aura pour but de
protéger et de défendre les intérêts de la
communauté locale.
B. Insertion de droit
médian dans le code forestier et la loi foncière
Le droit médian que nous proposons ici est un mode de
résolution des conflits très efficace, rapide et gratuit, mais le
code forestier congolais n'a pas pensé à l'articulation entre ces
deux concepts. Je m'explique : ce qui nous permet de dire cela c'est le
système coutumier de résolution des conflits la palabre :
avec ce système de palabre le jugement se fait plus aux moins deux jours
sans toutefois être définitif. Or avec le système de droit
moderne écrit, le jugement peut attendre de un à cinq ans sans
toutefois être définitif. Comme je l'ai déjà
signalé ci-dessus au point 3.2.1. En ce qui concerne le droit
médian, la médiation constitue en un processus de
négociation d'un conflit entre deux parties opposées, mais aussi
mettre tout en oeuvre pour trouver ensemble une solution, un accord qui
s'engage à respecter leur propre justice et détermine les
règles à suivre.
Comme le souligne Jacques Faget128(*), l'accès au droit et
à la médiation sont deux dynamiques qui se sont
développées parallèlement, portées par des forces
sociales différentes du fait de préoccupation différentes
, d'une part celles des professionnels de la justice tels qu'à Bagata le
procureur du tribunal de paix, désireux d'augmenter leur emprise sur le
marché de consultation, en ce qui concerne l'accès au droit et
d'autre part le combat social visant à remédier à la crise
des mécanismes traditionnels de régulation des conflits, pour ce
qui est de la médiation. Le médiateur a pour rôle
d'assurer que les deux parties consentent librement à la
médiation c.à.d. sans pression et de manière claire.
Très souvent lorsque les deux parties (exploitants
forestiers et communauté locale), sont confrontées les
équipes chargées de l'accès au droit (magistrats) ne
songent pas à envoyer les personnes pour lesquelles une médiation
serait utile. Cette conduite s'explique par le fait que les équipes
chargées de l'accès au droit méconnaissent
elles-mêmes la médiation et ne savent pas quand la conseiller.
Figure 2 :
Interrelation entre acteurs
Schéma 1 : Illustration de l'interrelation entre
la communauté locale, l'autorité juridique coutumière,
autorité étatique et les exploitants forestiers. (Source :
Adapté de Kalambay Lumpungu. et Jacques Faget).
C. Pistes pour sortir du
dualisme juridique
-Pour concilier les deux conceptions(le droit moderne
écrit et le droit coutumier oral) et échapper au dualisme
persistant, nous proposons l'insertion du droit médian qui alliera les
règles coutumières et les règles du droit écrit.
Actuellement, la plus grande difficulté liée à l'insertion
de ce droit médian est due à la rigidité du droit formel
écrit qui continue de rejeter tout ce qui est issu du droit coutumier
traditionnel oral. Or, aux yeux des communautés locales, ce droit
écrit forestier apparait comme un greffon sur un corps étranger
parce qu'il existe mais n'est pas appliqué par les communautés
locales qui le considèrent comme étranger à leurs modes de
vie. D'où la nécessité de prendre les côtés
positifs de chacun de ces deux systèmes. Actuellement, dans la
perspective de la création des forêts communautaires en
République démocratique du Congo, des commissions
interministérielles se penchent sérieusement sur la
possibilité d'insérer les modalités traditionnelles de
prise de décision (palabre par exemple) au sein des textes
réglementaires à prendre dans ce domaine. Associer les
communautés locales à la prise de décision
forestière constituera déjà un grand pas sur le long
chemin qui conduit à la formalisation du droit médian.
- Mettre en place une banque de données avec des
informations enrichissantes pour permettre à la population riveraine de
bien comprendre la loi, tels que le code forestier et ses mesures d'application
traduites dans les langues nationales du pays enfin de donner l'occasion aux
villageois de comprendre leurs droits.
D. L'enseignement
tiré du dualisme juridique
Dans ce dualisme juridique qui entraine les multiples conflits
dans le territoire de Bagata, nous avons tiré comme enseignement les
non-respects de la loi. L'autorité Etatique ne respecte pas le droit de
la communauté locale et la communauté locale à son tour
ignore la loi qui stipule que le sol et le sous-sol appartiennent à
l'Etat. Le code forestier prescrit le partage équitable des revenus de
l'exploitation forestière entre les organes qui les perçoivent
notamment l'Etat, les organes qui en dépendent et les communautés
locales comme précise l'article 122 du Code forestier. Mais la
communauté locale ne se retrouve pas dans ses droits. Bref le
non-respect du cahier des charges entre l'autorité étatique, les
exploitants et la communauté locale est la principale raison de ce
dualisme.
BIBLIOGRAPHIE
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LA FORET EN REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE
DU CONGO POST-CONFLIT
ANALYSE D'UN AGENDA PRIORITAIRE LA FORET EN REPUBLIQUE
DEMOCRATIREPUBLIQUE DEMOCRATIQUE
DU CONGO POST-CONFLIT
ANALYSE D'UN AGENDA PRIORITAIRE
DU CONGO POST-CONFLIT
ANALYSE D'UN AGENDA PRIORITAIR
* 1 B. DUPUY, Gestion durable
des forêts denses humides africaines. Série de documents
élaborés dans le cadre du projet Forafri (1996-1999), Cirad,
Montpellier, France (cédérom), 110 pp.
* 2 Ibidem.
* 3 Certains autres
organismes congolais comme « la Forêt, c'est la Vie »
estiment cette étendue à 178 millions d'hectares. Cette
différence résulte de l'absence d'une définition claire du
concept des forêts. Parfois, il y est inclus les espaces reboisés,
replantés et les bosquets de plus d'un hectare. C'est ce qui justifie
cette différence. Les documents officiels retiennent souvent le chiffre
de 128 millions qui sont livrés par la FAO et le Service Permanent
d'Inventaire et d'Aménagement Forestier (SPIAF).
* 4 Source Service Permanent
d'Inventaire et d'Aménagement Forestier (SPIAF), 1995, carte
forestière synthèse du Zaïre ; FAO, 2005. Global Forest
Resources Assessment. Food and Agriculture organisation, Rome,
http://www.fao.org/forestry/site:fra2005/fr
* 5 Rapport annuel du SPIAF,
2000, p. 10.
* 6 Rapport annuel du SPIAF,
carte forestière synthèse de la RDC, Kinshasa, 2000, p.15.
* 7 J. Ph. PEEMANS, Crise de
la modernisation et pratique populaire au Zaïre et en Afrique; Harmattan,
Paris, 1997 p. 139.
* 8 LAROUSSE, 1987.
* 9 J. GUIBERT et G. JUMEL
(1997), Méthodologie des pratiques de terrain en sciences humaines
et sociales, Paris, Armand Colin/Masson, p. 26.
* 10 Rapport annuel du
SPIAF, carte forestière synthèse de la RDC, Kinshasa, 1995,
p.30.
* 11 Selon les articles 2 et
226 de l'actuelle Constitution du 18 février 2006, la RDC comptera 26
provinces trois années après l'installation effective des
nouvelles institutions politiques. On ne sait pas dire s'il faudra compter
à partir de l'installation de la première institution ou des
dernières institutions qui ne sont même pas encore
installées puisque les élections locales sont encore
attendues.
* 12 Article 1er
de la Constitution.
* 13 I. NDAYWELL E-NZIEM,
Histoire générale du Congo. De l'héritage ancien
à la République démocratique, L'Harmattan, Paris, pp. 41-56.
* 14 Ministère de
l'Agriculture de la République démocratique du Congo, rapport,
2003, 92 pp.
* 15 Rapport dressé
par la Coopération allemande sous le titre « les ressources
naturelles en RDC - potentiel de développement ? » par
Kfw Entwickluncsbank et l'Institut fédéral allemand des sciences
de la terre et des matières premières (BGR), avril 2007, n°
50, p. 4.
* 16 A propos des ressources
en eaux en RDC, lire le rapport 2000 de l'Institut congolais de
Géographie. Egalement http//fr.wikipedia.org/wiki/congo,fleuve
* 17 Institut National de la
Statistique, Ministère du Plan et Aménagement du territoire,
Volume I, Kinshasa, Bas-Zaïre, Bandundu, Equateur et Haut-Zaïre,
Kinshasa, 1992, pp. 58 et ss. Nous faisons remarquer que depuis 1984, aucun
autre recensement officiel n'a eu lieu.
* 18 C. LEVI-STRAUSS,
Race et histoire, Denoel, Paris, p. 2.
* 19 G. De PLAEN, La
structure d' Les structures d'autorité des Bayanzi, Editions
universitaires, Paris,1974, 336 pp.
* 20 De PLAEN, G.,
idem, pp. 51-52.
* 21De PLAEN, G.
op.cit., p.63.
* 22 La saison de pluie est
marquée par de fortes pluies alternant avec de fortes chaleurs. C'est la
période de grande culture. Les arbres fleurissent et les cours d'eaux
sont en crue alors que, pendant la saison sèche, il ne pleut quasiment
pas, le soleil est clément parce que recouvert de la brume. Les feuilles
et les cours d'eaux sont asséchés. C'est la période de
grands déboisements, brûlis et pêche traditionnelle.
* 23 De PLAEN, G., op.cit.
pp. 229-230.
* 24 Cité par
DEBROUX, L.; HART, T.; KAIMOWITZ, D.; KARSENTY, A.; TOPA, G., (Eds), La
forêt en RDC post-conflit. Analyse d'un agenda prioritaire, Rapport
collectif des équipes de la Banque mondiale, du Center for international
Forestry Research (CIFOR, du Centre International pour la Recherche
Agronomique), 2007, p.13.
* 25 Ibidem.
* 26 KAMTO M., Droit de
l'environnement en Afrique, Edicef/Aupelf, Paris, 1996, p. 179.
* 27 KISS, A.
« Quelques idées sur la forêt et le développement
durable », in Le droit de la forêt au XXIème
siècle, L'Harmattan, 2004, p. 269.
* 28 TREFON, Th.
« Industrial logging in the Congo. Is a stakeholder approach
possible ? », South african journal of international
affairs, vol. 3, Issue 2, 2006, p. 103; également
www.greenpeace.org/belgium/fr/afrique
sous le titre: Cap sur la RDC.
* 29 Ministère
congolais de l'Agriculture, Rapport 2008, Kinshasa/Gombe, 275 pp.
* 30 Source :
Ministère de l'environnement de la RDC, in Rapport sur la
stratégie de développement rural, programme de relance du secteur
forestier. Note de cadrage, Mai 2000.
* 31 Idem.
* 32
htp://www.cifor.org/publications. « La forêt en
République Démocratique du Congo post conflit »
* 33 DEBROUX, L.; HART, T.;
KAIMOWITZ, D.; KARSENTY, A.; TOPA, G., op.cit., p. 22.
* 34 Source Ministère
de l'environnement de la RDC, in Rapport sur la stratégie de
développement rural, programme de relance du secteur forestier. Note de
cadrage, Mai 2000.
* 35 Rapport final du Fond
Fiduciaire pour le renforcement de la gouvernance dans le secteur forestier
dans la situation post-conflit en RDC, juin 2005, p. 5, point 8.
* 36 Lire
www.rdc-conversiontitresforestiers.org
* 37 Rapport final du Fond
Fiduciaire pour le renforcement de la gouvernance dans le secteur forestier
dans la situation post-conflit en RDC, ibidem.
* 38 Cité par PRIEUR,
M., « Conclusions générales », in Droit,
Forêts et développement durable, Bruylant, Bruxelles, 1996,
p. 506.
* 39 Toutes ces
données sont consultables sur le web de cette ONG,
www.greenpeace.org sous le titre
Le pillage des forêts du Congo. La destruction en chiffres. Des pistes
d'exploitations à la destruction du climat, avril 2007.
* 40 DEVALLOIS, B.,
« Discours d'ouverture », in Droit, Forêts et
développement durable, Bruylant, Bruxelles, 1996, p. 23.
* 41 Ibidem.
* 42 Discours introductif de
Monsieur Armand DE DECKER, ministre belge de la Coopération au
développement à la Conférence internationale de Bruxelles
portant sur la gestion durable des forêts en RDC, Palais d'Egmont, 26 et
27 février 2007.
* 43 Lavigne Delville Ph
(1998). Quelle politiques foncières pour l'Afrique rurale ?
Récincilier pratique, légitimité et légalité
KARTHALA et coopération française p.9
* 44 Lire sur le site,
www.atol.be/docs/ebib/Art_presse.doc,
consulté le 10 mars 2010.
* 45 FERDINAND,
L'exploitation forestière au Congo Belge, 1945, p. 109.
* 46
PALUKU KITAKIA, A. « Interactions entre la gestion
foncière et l'économie locale en région de Butembo, Nord
Kivu en République Démocratique du Congo »,
Thèse, UCL, 2007, p.107.
* 47 UTSHUDI ONA, I.
« La gestion domaniale des terres rurales et des aires
protégées au Sud-Kivu: Aspect juridiques et pratique
d'acteurs », in Annuaire des Grands Lacs, L'Harmattan, Paris, 2008,
pp. 415-442
* 48
www.atol.be/docs/ebib/Art_presse.doc,
consulté le 10 mars 2010.
* 49 UTSUDI ONA,I; op.cit.
p. 420-421
* 50
Htt//fr.wikipedia/loi_Bakajika
* 51
http/creation-pmewallonie.be/Demarche/batiment/BAT4/BATO4/htm
* 52 UTSHUDI ONA.I, op.cit.
p. 422.
* 53 UTSUDI ONA, I, op.cit,
p. 423.
* 54 PALUKU KITAKIA, A.
« Interactions entre la gestion foncière et l'économie
locale en région de Butembo, Nord Kivu en République
Démocratique du Congo », Thèse, UCL, 2007, p.
63.
* 55 Ibidem.
* 56 KIKA MAVUNDA, M.,
Propriétés foncières traditionnelles et modernes,
contraintes à l'exécution des politiques agricoles en
république démocratique du Congo, Cadicec, Kinshasa, p. 2.
* 57Lavigne Delville et
consorts, op cit p, 67
* 58 Lavigne Delville et
consorts, idem p70
* 59 Laurent P J. et Mathieu
P., Actions locales, Enjeux fonciers et Gestion de l'environnement au Sahel.
Cahier du Cidep 27, 1995 Academia Bruylant, p 50
* 60 Mafikiri Tsongo (1994).
Problèmatique d'accès à la terre dans les systèmes
d'exploitation agricole des région montagneuses du NORD-KIVU ,
Louvain-la-Neuve. P40
* 61 Bashizi, C.
cité par Mafikiri Tsongo. Op cit
* 62 Moeller, A. cité
par Mafikiri Tsongo. Op cit.
* 63 Mafikiri Tsongo. Op cit
p 93
* 64 Idem p 237
* 65 Idem p 238
* 66 ATIBT, Etude sur le
plan pratique d'Aménagement des forêts naturelles de production
tropicales Africaines, Paris Avril 2007, p17
* 67 J. OUM ELOMA, Analyse
économique comparée de la gestion forestière publique des
différentes stratégies de production ligneuse au Cameroun (2003)
p.40
* 68 J. KEMAJOU SYAPZE, la
durabilité sociale dans la gestion communautaire des ressources
forestières : le cas du Cameroun (2003) Yaoundé
p .4-5
* 69 Idem, P 7
* 70 E. MADINGU, les
conflits liés à la gestion décentralisée des
ressources forestières au Cameroun : état des lieux et
perspectives. Google.be consulté le 30 septembre 2010
* 71 Idem
* 72 World Resource
Institute Washington 2000,
www.wri.org
* 73 Rapport : Mission
Technique de diagnostic de la gestion durable des forêts en vue
d'atteindre l'objectif 2000 de l'OIBT en appui au gouvernement de la
République Gabonais, janvier- juin 2005
* 74 C. VERMEULEN et al, les
premières forêts communautaires du Gabon 2008 pp 100
* 75 WRM Bulletin 133 :
les problèmes auxquels se heurtent les forêts du Gabon et les
communautés
* 76
WWW.infosplusgabon.com/article.php?id_article=1180
* 77 R. ONDO NTSAME, les
enjeux du secteur forestier pour la réduction de la pauvreté au
Gabon
* 78 L.E EECKHOUT,
l'exploitation forestière au Congo belge (1953), 154 pp.
* 79 COUNSELL, S., La gouvernance
forestière en République démocratique du Congo, 2006, pp.
20-22.
* 80 Cette suppression
découlait déjà implicitement de l'ordonnance-loi
n°66-343 du 07 juin 1966, connue sous le nom de la « loi
Bakandjika », du nom du député qui en avait pris
l'initiative rédigé le projet initial. C'est cette loi qui
introduisit des réformes fondamentales dans le droit foncier et dans le
droit des ressources naturelles congolais. En date du 3 décembre 1971,
le Parlement congolais vota deux autres textes, qui confirmaient les
orientations de l'ordonnance-loi n°66-343 du 07 juin déjà
citée, à savoir la loi n°71-008 et n°71-009 du 31
décembre 1971.
* 81 Les forêts autrefois
dites indigènes sont le plus ou moins le correspondant de ce que le
nouveau code appelle « forêts des communautés
locales ».
* 82 COUNSELL, S., La gouvernance
forestière en République démocratique du Congo, 2006, p.
7.
* 83 Idem, pp. 11-12.
* 84 L'expression
« forêts des communauté locales » est,
à quelques nuances près, le correspondant de ce que l'on appelle
dans la sous-région « forêts
communautaires ».
* 85 Les effets juridiques dont
celle possession est assortie, c'est notamment que les communautés
locales peuvent s'en prévaloir pour obtenir un titre écrit (un
contrat de concession communautaire)ou pour exiger à l'exploitant
industriel la négociation et la mise en oeuvre du cahier des charges, et
trésor public la rétrocession des sommes dues au titre de
redevance de superficie ou encore pour revendiquer l'exercice des forêts
d'usage dans une forêt classée ou dans un concession
forestière, etc.
* 86 Les commentaires
contenus dans cette partie sont principalement tirés du Rapport de l'ONG
MFINDA LUZINGU oeuvrant sur le territoire de Bagata, 2004-2006, 75 pp.
* 87 Tiffen, cité par
Lavigne Delville Ph et consorts op, cit p220
* 88 On a pu observer que ceux qui
font profession d'exploitants artisanaux viennent généralement
des centres urbains, d'où ils se dotent du matériel
d'exploitation artisanale (tronçonneuse mécanique, une scie en
long ou une scierie mobile) et vont par la suite négocier l'accès
aux forêts coutumières auprès des ayant droits.
* 89 Ces accords ou conventions
entre exploitants artisanaux et ayant droits sont écrits (le cas de bas
Congo) soit verbaux dans la plupart des contrées.
* 90 Lire à ce propos les
annexes à la convention de CITES.
* 91 Les commentaires contenus
dans cette partie sont principalement tirés du Rapport de l'ONG MFINDA
LUZINGU oeuvrant sur le territoire de Bagata, 2004-2006, 75 pp.
* 92 Les différents permis
institués par cette loi sont les suivants ; le permis sportif de
petite chasse, le permis sportif de grande chasse, le petit permis de tourisme,
le permis rural de chasse, le permis collectif de chasse, le permis
de capture commerciale, le permis scientifique et le permis
administratif.
* 93 Cas du village Mulir dans la
collectivité de Manzasay.
* 94 En pareils cas,
les bénéfices tirés de l'exploitation sont affectés
à la satisfaction des besoins communautaires.
* 95 Cet état de
délabrement ne concerne pas que les routes de desserte agricole, mais
s'étend jusqu'aux routes d'intérêt national.
* 96 La technique culturale de
l'agriculture sur brûlis se trouve pratiquée dans la
quasi-totalité des zones d'étude. Dans les provinces de l'est,
cette technique consiste à constituer des tas de débris dans les
champs en vue de les brûler sur des souches. Le Katanga est encore plus
concerné par cette pratique, qui fait reculer aussi bien la faune
sauvage que leurs habitats.
* 97
Http//www.delcod.itstel.ec.europa.eu. Projet d'activité agroforestieres
de Mampu (RDC, Province de Kinshasa)
* 98
Http//www.delcod.itstel.ec.europa.eu. Op cit
* 99
Http//www.delcod.itstel.ec.europa.eu. Op cit.
* 100 Chauveau J P et
consorts (in Winter). Inégalités et politiques publiques en
Afrique. Pluralité des normes et jeux d'acteurs. Paris, Karthala et
IRD. p 19
* 101 Idem p 21
* 102 Rapport de l'ONG MFINDA
LUZINGU, 2004-2006, p.32.
* 103 Rapport de l'ONG
MFINDA LUZINGU, 2004-2006, p.44.
* 104 Rapport de l'ONG
MFINDA LUZINGU, 2004-2006, p. 22.
* 105 Rapport de l'ONG
MFINDA LUZINGU, 2004-2006, p. 37.
* 106 Rapport de l'ONG
MFINDA LUZINGU, 2004-2006, p. 14.
* 107 Le nouveau code permet
l'exploitation des forêts des communautés locales par
elles-mêmes ou par des exploitants privés artisanaux, mis il ouvre
également la voie à d'autres utilisations des forêts des
communautés locales, comme la bioprospection, la conservation ou la
recherche forestière. Il n'est pas exclu que les membres d'une
communauté, poussés par des groupes d'intérêts
opposés, soient divisés sur la question et en arrivent
probablement aux affrontements
* 108 Les conflits qui opposent
les communautés entre elles.
* 109 La justice des cours
et tribunaux modernes coûte cher de par son éloignement, les
villageois devant se déplacer et parcourir dans la plupart des cas de
très longues distances, à pied. Elle ne se termine pas sans
plusieurs reports fatigants, et souvent en présence des juges
très peu renseignés de la sociologie des villages, du droit
coutumier et des questions liées au statut des droits des
communautés locales.
* 110 La réalisation de
l'enquête préalable est nouvellement instituée par le code
forestier, mais bien avant ce texte, elle se faisait en vertu de la
législation foncière, sous l'appellation de l'enquête de
vacance de terre.
* 111 Le paysannat fut un
système qui consistait pour l'administration coloniale à
négocier des terres auprès des chefs traditionnels pour les
mettre à la disposition des allochtones qui vivaient dans une
contrée en vue de stimuler le développement de la production
agricole.
* 112 Voir Rapports de cette ONG
2004-2006 et 2007-2008.
* 113 Avec cette nuance que les
communautés conservent le droit d'accéder à la concession
et de prélever les produits forestiers non ligneux. L'exploitant
industriel n'aura sur la superficie concédée que
l'exclusivité de la coupe du bois.
* 114 Programme des nations
unies pour le Développement
* 115 G.AKWAH et A. YOKO,
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* 123 Greenpeace, (Octobre
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* 124 Greenpeace op cit pg
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* 125 Greenpeace , Op cit
pg 16
* 126 Greenpeace op cit pg
18
* 127 Garry,Sakata. (2010).
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* 128 Jacques, Faget.
Accès au droit et médiation deux concepts différents.
Google consulté 10 janvier 2011
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