7.2- MESURES
ADÉQUATES
La proposition des lieux de développement du
bâti à Gressier est formulée suivant un ensemble de
principes d'arbitrage et de critères.
7.2.1- Principes
d'arbitrage
Les principes d'arbitrage représentent un ensemble de
propositions qui sont appelées à régir l'affectation des
sols et qui servent de base à leur conversion vers un usage optimal. Ces
principes visent à :
· préserver les meilleurs sols agricoles de
l'envahissement du bâti ;
· protéger la mangrove du bâti ;
· Protéger le couvert boisé ;
· Epargner les fortes pentes de la construction du
bâti ;
· privilégier le développement bâti
dans les zones accessibles ;
· Structurer le bâti en bordure de la route
nationale ;
· orienter le nouveau bâti vers les zones les moins
vulnérables tant du point de vue topographique, hydrogéologique
que géotechnique.
Les actions corollaires de ces principes seraient de
déplacer les gens établis dans la zone de mangrove,
d'empêcher la construction du bâti dans les zones à forte
potentialité agricole pour réserver ainsi les meilleures terres
agricoles à l'agriculture, d'éviter les constructions dans les
zones de forte pente qui devraient être de préférence
couvertes d'arbres.
Concernant l'organisation de l'habitat, la logique de
l'habitat doit prédominer celle du logement. Le regroupement de la
population doit être vu comme un moyen de favoriser le
développement du milieu rural et non comme une fin.
En effet, les expériences en matière de
réinstallation de population ont montré que les programmes de
villagisation qui ont échoué sont ceux pour lesquels
l'insuffisance et la qualité des infrastructures dans les villages
étaient criantes. Gressier, situé à la
périphérie relativement lointaine de Port-au-Prince, dans le
cadre d'une volonté d'établissement d'un modèle de
hiérarchie urbaine du pays, ne pourra pas recevoir un niveau
élevé d'infrastructures et services, mais devra
bénéficier d'un niveau d'équipement infrastructurel et
d'investissement public suffisants qui garantiront le maintien sur place de sa
population.
La création d'emplois non agricole dans les villages
sera déterminante dans la perspective d'une diminution de la pression
sur l'environnement immédiat des villages d'une part et sur
l'environnement plus lointain d'autre part sous peine de retourner à la
situation de dispersion de l'habitat de départ.
Le regroupement de l'habitat à Gressier pourrait
être orienté dans un cadre normatif qui consisterait à
élaborer un plan de régulation foncière définissant
les lieux d'implantation admissibles ou non au bâti ou dans un cadre
incitatif qui consisterait à équiper les lieux adéquats
pour inciter les implantations.
7.2.2- Critères
Les critères pris en compte pour la proposition des
zones de développement du bâti sont la topographie (les pentes),
les potentialités agricoles des sols, les conditions
hydrogéologiques locales, l'accessibilité par les voiries et la
géotechnique.
· Topographie (aptitude topographique au bâti)
On considère généralement comme aptes
à recevoir le bâti les terres dont la pente ne dépasse pas
15 % mais aussi les terres de pente comprise entre 15 et 25 % (figure 20).
Cependant pour ces dernières, des précautions et des mesures de
conservation s'imposent telles des aménagements contre l'érosion,
l'amélioration des boisements ou la reforestation. Les terres de pente
dépassant 25 % sont à considérer comme inaptes à la
construction de logements compte tenu des conditions climatiques existant dans
un pays tropical comme Haïti.
Les terres comprises entre 0 et 15 % situées sur des
sols agricoles fertiles, bien qu'ils soient topographiquement aptes au
bâti, sont à considérer comme nécessitant des
mesures de protection contre le bâti. Le nouveau bâti devrait
être orienté hors de ces terres.
· Hydrogéologie (vulnérabilité des
aquifères face au bâti)
Il convient de considérer pour ce critère tant
la vulnérabilité des aquifères, leur productivité
et leur accessibilité. En effet, les aquifères les plus
productifs sont conjointement ceux qui sont les plus vulnérables (figure
9). La vulnérabilité est liée aux conditions
géologiques locales. Cette vulnérabilité représente
l'un des critères important à prendre en compte dans la
sélection des zones de bâti. Cependant, cette
vulnérabilité est considérée ici par rapport
à la densité du bâti. Les propriétés
physiques et hydrodynamiques du sol qui lui confèrent ou non son pouvoir
épurateur ne sont pas pris en compte ainsi que les
propriétés du sous-sol qui favorisent ou non le transfert
vertical des polluants en profondeur et la nature et la
perméabilité des aquifères qui atténuent ou
favorisent la propagation des polluants (NIJSKENS, 2004).
Les aquifères les plus vulnérables,
c'est-à-dire ceux à nappe libre, nécessitent des mesures
de protection contre la pollution et l'épuisement. Nous pensons qu'il
faudrait freiner la concentration d'habitat à ces endroits de
manière à contenir la densification de population et orienter le
nouveau bâti vers les zones d'aquifères les moins
vulnérables (figure 21). L'objectif n'est pas de d'empêcher
complètement la construction mais d'arrêter son
développement pour limiter son impact sur le milieu, en tout cas
d'éviter les zones les plus vulnérables, de créer
prioritairement la distribution d'eau dans ces zones et de les équiper
d'un système de collecte des eaux usées.
· Potentialités agricoles des terres (aptitude des
sols à l'agriculture)
Nous proposons de réserver pour l'agriculture les
terres les plus aptes, soit celles à potentialités agricoles
excellentes, très bonnes, bonnes et moyennes. Les terres à
potentialités limitées sont à considérer comme
aptes sous réserve de conservation et de bonification et inaptes
à l'agriculture, les terres de potentialités faibles,
médiocres et très limitées (figure 22). Pour nous, les
meilleures terres agricoles devraient être réservées
à l'agriculture et par conséquent l'implantation du nouveau
bâti devrait être freinée et orientée vers les zones
moins aptes.
· Accessibilité
Les zones d'implantation du nouveau bâti doivent
être accessibles. Le choix des zones est proposé en fonction de la
proximité des routes côtières déjà existantes
et des possibilités de construction de routes au niveau des montagnes.
Car, à part les zones côtières qui sont dotées de
routes voiturables (route asphaltée et en terre battue), les montagnes
ne comportent que des sentiers.
· Géotechnique : Ce critère a trait
à la qualité de portance constructive des sols. Une bonne partie
du territoire communal de Gressier est constituée de marnes et de
sables. Mais le potentiel et la pression de gonflement de ces matériaux
ne sont pas connus. On sait que les marnes, ayant des caractéristiques
mécaniques médiocres, donnent naissance à des sols
gonflants qui peuvent engendrer des dégradations des ouvrages suite
à la variation de la teneur en eau (DERRICHE et CHEIKH-LOUNIS, 2004).
Construire sur ce genre de formations consiste à concevoir des ouvrages
qui résistent aux mouvements du sol (ABOUBEKR et MAMOUNE, 2004).
La commune de Gressier faisant déjà l'objet
d'une forte pression urbanistique induite par la périurbanisation de
Port-au-Prince, l'inaptitude à un usage donné selon les
critères considérés n'exclut pas entièrement cet
usage ou n'entraîne pas le déplacement de la population dans les
endroits où les problèmes d'affectation existent. Cependant, dans
l'optique d'une vision prospective de l'aménagement communal, il
conviendrait de définir un ensemble d'outils réglementaires qui
pourrait orienter et freiner un usage ou processus donné
préjudiciable au milieu.
7.3- ZONES D'HABITAT ACTUELLES ET ZONES POTENTIELLES
DE DÉVELOPPEMENT DE L'HABITAT (ZH et ZPDH)
Considérant les critères (figure 23) et les
principes énoncés précédemment en première
analyse, on peut retenir les zones suivantes (figure 24) :
Ø Zone 1 : déjà moyennement
occupée par le bâti, c'est une zone de potentialité moyenne
du point de vue agricole. La partie la plus proche de Port-au-Prince subit une
forte urbanisation. Compte tenu de la vulnérabilité de la nappe
à cet endroit, il serait approprié de favoriser l'implantation du
nouveau bâti plutôt vers les plateaux (sud de cette zone) et
protéger la mangrove dans la partie nord afin de diminuer la
densité de la population dans cette dernière.
Ø Zone 2 : actuellement peu occupée par le
bâti, cette zone a une potentialité agricole à la fois
moyenne et limitée. La nappe au niveau de cette zone n'est pas
vulnérable. La majeure partie de cette zone est comprise entre 0 et 15
%. Cette zone semble appropriée pour recevoir le nouveau bâti.
Cependant cette zone est constituée du point de vue lithologique de
marnes et de sables. Pour réduire les risques d'instabilité sur
ces formations de mauvaise constructibilité, des techniques de
stabilisation devraient être appliquées dans la fondation des
ouvrages.
Ø Zone 3 : C'est la zone des meilleures terres
agricoles, mais c'est aussi au niveau de cette zone que se concentre l'habitat
sur la côte. Cette zone agricole devrait cependant être
protégée du bâti sous peine de consacrer l'urbanisation
entière de cette plaine côtière. A l'ouest de cette zone,
l'aquifère est sensible, il conviendrait de contenir la pression
urbanistique sur cette zone et la diriger vers les zones 2 et 3 à l'aide
d'outils plus ou moins flexible.
Ø Zone 4, 5 et 6 : Ce sont les zones
situées à plus de 500 m d'altitude (figure 25). Ces zones de
plateaux seraient appropriées pour le regroupement de la population des
montagnes. Ce sont des zones à potentiel agricole limité,
à l'exception de la zone 4 qui présente une partie à
potentialité agricole moyenne.
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