5. GESTION DES IMPACTS ET PERSPECTIVES
5.1. Recommandations et améliorations des
pratiques industrielles
Alors que les politiques gouvernementales et les
systèmes de planification ont pris du retard, la croissance du
développement des sables bitumineux se poursuit actuellement à un
rythme effréné. Le gouvernement manque cruellement de
systèmes de gestion environnementale pour assurer un
développement industriel pétrolier responsable et respectueux de
l'environnement. L'allocation de terrains aux industries et l'approbation de
projets par le gouvernement, en l'absence de connaissances des risques et de la
faisabilité de certaines opérations, constituent un comportement
inconscient, qui peut conduire à s'interroger sur la
légitimité du processus actuellement en cours. La direction que
prend le développement doit être révisée si le
gouvernement veut respecter ses engagements en matière de gestion
durable des écosystèmes et de conservation de la
biodiversité. Plusieurs organisations environnementales non
gouvernementales, dont le Pembina Institue, ont
régulièrement publié des rapports détaillés
sur les impacts générés par les sables bitumineux et
proposent des recommandations afin que le développement industriel ne se
réalise pas au détriment de l'environnement. Ces recommandations
reposent aussi bien sur l'instauration de politiques et de cadres de
planification par le gouvernement, que l'amélioration des pratiques
industrielles. Ces dernières n'étant pas suffisantes, seules,
pour diminuer significativement les impacts environnementaux, elles devraient
toutefois constituer une norme minimale exigée.
5.1.1. Principales recommandations
1 L'é tablissement d'aires .
protégéesAfin de préserver
un échantillon complet des espèces natives de la région,
des parcelles de territoire devraient être protégées comme
réserves naturelles. Cette mesure peut être vue comme une action
pour compenser les pertes écologiques résultant de l'intense
activité industrielle. Pour que ces aires protégées
puissent remplir leur rôle de réservoirs de la
biodiversité, il est impératif que certains critères
soient remplis. D'abord, les terrains devront être complètement
protégés de l'utilisation industrielle (développement
pétrolier et exploitation forestière), ensuite, il est
indispensable qu'ils constituent un échantillon représentatif des
écosystèmes de la forêt boréale, et enfin ils
devront être de taille suffisante pour supporter une population viable et
maintenir les processus écologiques (Schneider and Dyer,
2006).
1 cLa réation d'un plan d'aménagement
du .
territoireIl n'existe actuellement pas de plan
régional qui permette de définir comment le développement
futur de l'exploitation des sables bitumineux sera intégré avec
la protection de l'environnement. Afin que les efforts individuels des
compagnies et du gouvernement soient coordonnés, un plan
d'aménagement du territoire devrait être constitué. Il
prendrait en considération les caractéristiques environnementales
de référence (antérieures au développement
industriel) pour établir des objectifs quantitatifs et qualitatifs de
gestion et d'utilisation du sol, tels que le choix du terrain alloué
pour l'exploitation pétrolière, l'intensité et la
durée de l'exploitation, ou le niveau de perturbation (densité de
route, par exemple) autorisé (Schneider and Dyer, 2006).
1 L'instauration de seuils d'impacts cumulatifs
à un niveau régional, par l'introduction de limites strictes de
l'intensité de développement sur une aire donnée. Cette
mesure permettrait de réduire les effets cumulatifs sur une
région sujette à des impacts issus de divers types d'exploitation
industrielle (pétrole conventionnel, sables bitumineux, exploitation
forestière).
1 L'exigence de la restauration d'une forêt
boréale autonome et l'établissement de critères
transparents de remise en .
étatLa remise en état
basée sur le Land Capability Classification for Forest et
l'objectif de « l'equivalent land and capability », en vertu de
l'Environmental Protection and Enhancement Act (EPEA), est
fondamentalement inadéquate pour les raisons expliquées
précédemment. Le gouvernement de l'Alberta devrait exiger qu'au
terme de l'exploitation, les industries restaurent le terrain en un
écosystème autonome et rétablissent ses
caractéristiques dans des proportions approximativement identiques
à celles qui existaient avant la perturbation. En outre, des
critères de restauration qui respectent les valeurs aquatiques et
terrestres, biotiques et abiotique originales devraient être
établis et intégrés dans l'EPEA (Grant et al.,
2008).
1 L'interdiction des EPLs. Le gouvernement de
l'Alberta devrait interdire les projets d'exploitation minière qui
prévoient la création d' « end pit lakes» comme moyen
de gestion des résidus liquides.
5.1.2. Principales améliorations des pratiques
industriellesproposées
1 Réduction de l'utilisation d'eau et gestion
des .
résidusLes prélèvements
d'eau et particulièrement ceux effectués à partir de la
rivière Athabasca devraient être réduits et les
procédés de recyclage de l'eau des résidus aqueux
devraient être améliorés. Récemment, pour
réguler les résidus et réduire le volume des
résidus liquides, une directive69 a été
émise par l'ERCB. Elle impose aux industries l'établissement de
délais pour la consolidation des résidus et leur disposition dans
des zones d'élimination spécifiques planifiées, en vue de
la remise en état (Simieritsch et al., 2009).
1 Exploration .
sismiqueLes lignes sismiques nécessaires
aux activités d'exploration génèrent une fragmentation
importante du paysage et forment des espaces vides longtemps après la
fin des opérations d'exploitation. Leur largeur devrait être
réduite et des barrières devraient être installées
pour éviter qu'elles ne soient utilisées comme voie
d'accès à travers la forêt (Schneider and Dyer,
2006).
1 Alternatives au procédé SGSIV.
Il existe actuellement deux alternatives à ce procédé
d'extraction in situ: VAPEX et THAI70. Ces deux technologies sont en
phase d'essai, mais semblent prometteuses. Grâce à une
consommation moindre en eau et en énergie, ainsi qu'à une
intensité des émissions réduite, elles devraient
être privilégiées dans les opérations de production
in situ.
69 Directive 074: Tailings Performance Criteria
and Requirements for Oil Sands Mining Scheme.
70 cf. chapitre 2.3.2. Récupération in
situ, p.18.
1 Reforestation des plateformes de .
forageLe Nord-est de l'Alberta est
ponctué de milliers de sites de forage abandonnés,
déclaré remis en état, mais qui n'ont pas
été restaurés en un écosystème forestier. Il
faudrait réduire la surface de la zone affectée, le nombre de
puits forés et la densité de l'infrastructure associée.
Les procédés de revégétalisation devraient
commencer rapidement et les espèces végétales invasives
devraient être évitées (Schneider and Dyer,
2006).
5.2. La gestion des effets cumulatifs sur
l'environnement
Entre 1999 et 2009, la production des sables
bitumineux est passée de 300'000 bbl/par jour à environ 1.5
millions de bbl/j. Selon les estimations, elle devrait atteindre 3 millions de
bbl/jour en 2015 et 5 millions de bbl/jour en 2030 (Levi, 2009). Au vu des
effets importants sur l'environnement exercés par la production
actuelle, il est légitime de s'interroger sur les impacts potentiels qui
découleront de la croissance du secteur.
Chaque projet approuvé et mis en application
par les industries s'accompagne d'impacts additionnels sur la qualité de
l'air, les forêts, la biodiversité et les ressources en eau.
L'accumulation progressive d'impacts environnementaux qui,
considérés individuellement, peuvent paraître
insignifiants, conduit à des effets cumulatifs pouvant causer des
dommages irréversibles sur la forêt boréale. Le seuil de
résilience ou limite environnementale, qui représente la
capacité d'un écosystème à résister à
des changements avant de subir des transformations irréversibles
(disparitions d'espèces, modifications profondes des sols et du
réseau hydrologique), pourrait ainsi être dépassé si
aucune mesure adéquate n'est entreprise (Severson-Baker et al.,
2008).
Le CEMA (Cumulative Environmental Management
Association) a été créé, en 2000, dans le but de
collecter des informations scientifiques et de proposer des recommandations aux
gouvernements de l'Alberta et du Canada pour élaborer une meilleure
gestion des impacts cumulatifs sur l'environnement par le développement
industriel de la région. Le CEMA a été fondé comme
association multipartite basée sur le consensus, comprenant divers
représentants de l'industrie des sables bitumineux, des gouvernements de
l'Alberta et du Canada, de la Municipalité régionale de Wood
Buffalo, des communautés Aborigènes et Métis, ainsi que
d'organisations environnementales non gouvernementales71. La
stratégie quinquennale adoptée par le CEMA visait à
traiter 34 problèmes environnementaux majeurs, par le
développement et l'application de seuils, de directives, d'objectifs
environnementaux et d'outils de gestion de l'utilisation des
ressources.
Après plusieurs années de vains efforts
et de non-respect des délais pour l'introduction d'un système de
protection de l'environnement, le CEMA a perdu sa crédibilité et
sa légitimité et le processus semble ne pas être
suffisamment efficace face à la croissance du développement des
sables bitumineux. Parmi les principales lacunes du processus, les plus
flagrantes comprennent (Severson-Baker et al., 2008) :
1 L'absence d'un plan d'utilisation du sol pour
protéger les écosystèmes régionaux.
1 L'absence d'une limite inférieure du
débit de la rivière Athabasca, en-dessous de laquelle les
prélèvements par l'industrie pétrolière seraient
interdits.
1 L'absence d'un plan de gestion environnemental pour le
maintien de l'intégrité des bassins versants.
71 cf. CEMA, http://www.cemaonline.ca/
1 L'absence de directives pour la remise en état
et la restauration écologique des tourbières. 1 L'absence de
normes de certification pour la remise en état.
Les raisons qui ont été invoquées
pour expliquer cette absence de progrès se réfèrent
à la complexité des questions environnementales et à la
difficulté d'arriver à un consensus dans le processus de
partenariat, aggravés par l'accélération du
développement et par le nombre de projets. En d'autres termes, en
continuant à autoriser les nouveaux projets à passer par le
processus d'approbation réglementaire, le gouvernement de l'Alberta a
donné une plus grande priorité à l'approbation de nouveaux
projets de développement qu'à l'établissement de limites
et de systèmes de gestion environnementale (Severson-Baker et al.,
2008). Ce comportement paradoxal a abouti à des situations dans
lesquelles, après avoir mandaté le CEMA pour étudier la
faisabilité d'un projet et mesurer les impacts potentiels de celui-ci,
le gouvernement de l'Alberta a déjà alloué les terrains
avant d'obtenir les résultats du CEMA, et a continué de les
allouer même après que le rapport, enfin publié, recommande
la protection d'une partie du territoire en question (Raoul, 2010).
L'approbation d'un projet d'exploitation avant qu'une
évaluation environnementale ou qu'une demande d'atténuation ne
soit émise constitue un avantage certain pour les sociétés
pétrolières. Il n'est pas dans l'intérêt des
industries d'encourager le développement de plans de gestion
environnementale, susceptibles d'augmenter les coûts ou de rendre plus
difficile l'approbation pour un nouveau projet ou pour un projet d'expansion.
Une fois que l'approbation a été octroyée, il est moins
facile pour le gouvernement de l'Alberta, tant politiquement qu'au niveau
procédural, d'exiger des mesures environnementales plus strictes. Par
conséquent, il existe une certaine tentation pour les compagnies des
sables bitumineux membres du CEMA de retarder les progrès de
développement de systèmes de gestion environnementale
(Severson-Baker et al., 2008).
Progressivement, certains groupes écologistes
et aborigènes ont décidé de quitter l'association. Les
raisons émises pour justifier leur retrait consistaient en : une
préoccupation que les parties prenantes ne participaient que pour
défendre l'intérêt de leur organisation et non les causes
environnementales, un manque de résultats par rapport à ce qui
était envisagé, une perception d'inégalité de
pouvoir parmi les membres du groupe (les industries semblaient dominer
numériquement et avoir un certain contrôle
supplémentaire).
Certaines associations environnementales (Pembina
Institute, Toxics Watch Society ofAlberta et Fort McMurray
Environmental Association) affirment néanmoins qu'un système
de gestion environnemental est urgent et qu'une gestion adaptative de ces
systèmes est nécessaire. Les problèmes survenus ces
dernières années doivent être utilisés pour tirer
des leçons pour l'avenir. Afin de restaurer la crédibilité
et la légitimité du CEMA, son actuelle organisation doit
être dissoute et le gouvernement de l'Alberta doit reconnaître que
l'approche actuelle est fondamentalement inadaptée (Toxic Watch Society
of Alberta, 2008).
Selon ces associations, une nouvelle organisation
devrait être bâtie, basée sur la structure du CEMA. La
nouvelle organisation devrait inclure la participation du Département de
l'Energie de l'Alberta et des gouvernements des Premières Nations,
absents du CEMA, et le rôle des gouvernements de l'Alberta et du Canada,
à l'intérieur de l'association, devrait être
renforcé. L'organisation devrait servir également de forum de
dialogue afin d'identifier les priorités et de fournir un avis
stratégique sur les solutions proposées. Les financements
devraient provenir du gouvernement et de l'industrie. De plus, le soutien de
l'industrie ne se ferait plus sur base volontaire, mais comme une obligation
intégrée dans les processus d'approbation des licences. Et
par-dessus tout, un plan régional d'utilisation du sol, qui
considère de manière équitable les implications sociales,
environnementales et économiques du développement, devrait
être intégré.
Cela afin de fixer des objectifs et des délais
clairs, publiquement disponibles par la diffusion régulière de
rapports (Severson-Baker et al., 2008).
Quelque soit le système de planification
choisi, il est toutefois urgent qu'un moratoire sur l'approbation de nouveaux
projets et l'allocation des terrains soit mis en place, jusqu'à ce que
les règles environnementales soient introduites.
5.3. Le rôle des pouvoirs publics
Selon les termes de la Constitution, les provinces
sont propriétaires des ressources naturelles situées sur leur
territoire. Dans le cas de l'Alberta, les droits miniers - qui
s'étendent au pétrole, au gaz naturel, aux sables bitumineux et
aux autres minéraux 1 ont été cédés par le
gouvernement du Canada en vertu de la Loi des ressources naturelles de
1930. La province possède 97% des droits miniers relatifs aux sables
bitumineux, les 3% restant sont entre les mains des propriétaires
exclusifs. Le gouvernement de l'Alberta a donc compétence sur cette
ressource et l'administre pour le compte de ses citoyens. La province
cède par bail aux entreprises privées le droit d'extraire et de
produire à partir des sables bitumineux, et perçoit en retour des
bénéfices par l'intermédiaire de paiement de location, de
redevances et de taxes. Le gouvernement de l'Alberta octroie le droit de forer
pour amasser, travailler, récupérer et déplacer les sables
bitumineux (Governement of Alberta, 2009a). Le régime foncier pour leur
développement est engagé lorsqu'une compagnie soumet une demande
au Département de l'Énergie pour une parcelle de terrain
affecté à une offre publique. Les droits sur les sables
bitumineux sont ensuite vendus au plus offrant. Toutefois, le système du
régime foncier actuel limite la capacité du gouvernement à
gérer efficacement le développement. L'extraction en Alberta se
poursuit à un rythme supérieur à la capacité des
organismes gouvernementaux de réglementation et des gestionnaires des
terres à comprendre et prévenir à long terme les dommages
environnementaux irréversibles. La vitesse à laquelle les droits
sur les sables bitumineux sont délivrés détermine le
rythme des activités d'exploration et de développement futurs.
Par conséquent, les décisions quant à savoir si et dans
quelles conditions les droits seront octroyés représentent la
première et la plus importante occasion pour le gouvernement d'examiner
et de réguler cette exploitation afin de ne pas excéder les
limites supportables par l'environnement. Cependant, l'absence d'un plan
d'utilisation du sol et le manque d'objectifs environnementaux ne permettent
pas au gouvernement de prendre des décisions qui tiennent compte des
impacts environnementaux et sociaux, ceux-ci étant trop souvent
négligés au profit d'une volonté de stimuler la production
(Holroyd et al., 2007). Depuis le début des années 1990, les
gouvernements de l'Alberta et du Canada ont joué un rôle important
dans le renforcement de l'industrie en créant de fortes incitations aux
investissements72 et en délivrant les droits sur les sables
bitumineux aussi vite que possible (Woynillowicz et al., 2005).
Le rôle du gouvernement du Canada relativement
aux sables bitumineux concerne essentiellement la protection de
l'environnement, la protection des cours d'eau et la protection des terres
appartenant aux indigènes. L'environnement fait l'objet d'une
compétence partagée entre le gouvernement fédéral
et le gouvernement des provinces. La compétence partagée est une
situation complexe qui exige une étroite collaboration entre les
gouvernements concernés. Toutefois, si le gouvernement du Canada est
habilité à effectuer des évaluations environnementales
générales des projets en question, en vertu du Environmental
Protection and Enhancement Act, il n'a jamais
72 cf. chapitre 3.2.1. Effet de l'allègement du
régime fiscal, p.25.
exigé, ni participé à une
évaluation environnementale portant sur les répercussions de
l'exploitation des sables bitumineux, y compris, la pollution
atmosphérique, les émissions de gaz à effet de serre et
les dommages causés aux cours d'eau (Comité permanent des
ressources naturelles, 2007).
Dans ses recommandations (Holroyd et al., 2007),
The Pembina Institute défend qu'un moratoire sur les nouveaux
accords sur les sables bitumineux est essentiel jusqu'à ce que le
système de régime foncier actuel soit revu et
révisé, qu'un cadre politique tel qu'un plan d'affectation du sol
soit établi et que des objectifs environnementaux soient
intégrés. Le taux de croissance de l'exploitation des sables
bitumineux devrait être reconsidéré en rapport avec les
perturbations occasionnées sur l'environnement, l'infrastructure et
l'économie de la région, ainsi que sur les systèmes
sociaux. L'allocation des droits devraient prendre en considérations les
impacts négatifs potentiels tout en optimisant les
bénéfices pour les citoyens albertains. Actuellement 33% de la
surface des dépôts de sables bitumineux a déjà
été octroyée. Les 67% restants, sont une
opportunité non négligeable d'améliorer la gestion de
l'allocation du sol.
5.4. Le gouvernement fédéral
Le gouvernement du Canada est
régulièrement la cible de critiques virulentes concernant
l'exploitation des sables bitumineux. Depuis la victoire du Parti conservateur
du Canada, aux élections fédérales de 2006, et
l'élection de Stephen Harper en tant que Premier ministre, le pays
semble avoir confirmé sa volonté de tirer profit de leur mise en
valeur. Le parti conservateur au pouvoir est en effet largement favorable au
développement de l'exploitation des sables bitumineux dans le but de
faire du pays une « superpuissance » énergétique, au
profit des grandes multinationales et du voisin américain (Raoul, 2010 ;
Talbot, 2009). Avec la réduction du budget consacré au plan
canadien de lutte contre les changements climatiques et le prolongement de
l'allègement fiscal consenti aux promoteurs de l'industrie bitumineuse,
le gouvernement est considéré comme allant à l'encontre de
la protection de l'environnement.
En mars 2009, la publication, par le National
Geographic, d'un reportage accablant sur les effets de l'exploitation des
sables bitumineux a fait réagir la classe politique à Ottawa et
à Edmonton. Le journal compte plus de 50 millions de lecteurs et est
traduit en 32 langues. Conscients de l'effet dévastateur que pouvait
avoir l'article sur la réputation du pays, les gouvernements
fédéral et provincial, et l'Association Canadienne des
Producteurs de Pétrole se sont empressés de se défendre
face aux accusations de l'article qui qualifie les usines de traitement de
pétrole de « sombres » et « sataniques » (Kunzig and
Essick, 2009 ; Colyer, 2009). Les chefs des partis de l'opposition en ont
profités pour accuser publiquement le gouvernement conservateur de
n'avoir rien fait pour améliorer la performance environnementale des
sables bitumineux.
Soutenu par le gouvernement de la province de
l'Alberta, de tradition conservatrice, le Premier ministre, qui s'est toujours
montré sceptique sur les résultats scientifiques relatifs au
réchauffement climatique (Francoeur, 2004), a engagé le pays dans
une économie basée sur les énergies non-renouvelables et
dans un laxisme environnemental manifeste (Nature, 2008). En outre, il semble
ignorer l'opposition croissante de l'opinion publique, mondiale, nationale et
même de la province de l'Alberta, où selon un sondage
publié par le Pembina Institue, 71% de la population
interrogée estiment qu'un moratoire sur les approbations des nouveaux
projets est nécessaire jusqu'à ce que les problèmes
environnementaux soient résolus (Dyer, 2007).
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