CHAPITRE 9 : CONCLUSION GENERALE ET RECOMMANDATIONS
L'étude sur les impacts écologiques et
socioculturels de l'exploitation de Daniellia oliveri en rapport avec
la viabilité de ses peuplements, nous a offert l'occasion de
vérifier que les besoins relatifs à l'usage des produits de
D. oliveri sont les plus divers au sein des groupes socioculturels
Fon, Nago, Goun, Bariba, Peulh, Yoa et Berba. De la feuille à
la racine en passant par la tige et à la sève, toutes les parties
de l'espèce sont utiles à quelque chose.
Mais, les besoins socioculturels liés aux usages des
produits de l'espèce n'ont pas eu la même intensité au sein
de l'ensemble des groupes socioculturels. En observant l'existence d'une
meilleure connaissance des usages des organes de l'espèce dans le Sud et
le Centre du Bénin, une relation de cause à effet est
établie par rapport à l'impact écologique laissé
par l'exploitation intense de l'espèce dans cette partie du pays. En
effet, environ 8 % de la superficie du territoire du Bénin sont
actuellement soumis à cette exploitation qui se traduit par la
présence dans cette partie du pays, des jachères à D.
oliveri. L'exploitation intense du bois de l'espèce l'a
dégagée de son habitat naturel et l'a réduite à des
rejets de souche. Actuellement dans les zones de surexploitation, les
connaissances de l'espèce se limitent généralement
à sa vie buissonnante, tant les grands sujets ont disparu. La
surexploitation a évolué du Sud vers le Centre et le Nord oil la
pression est actuelle (entre 7°35' et 8°14' latitude Nord) (Fig. 27).
Plus au Nord entre les latitudes 9°40' et 12°30' Nord, en dehors des
Aires Protégées oil l'exploitation de l'espèce n'est pas
signalée, les Forêts Classées sont soumises à la
même pression anthropique que les terroirs villageois. A ce niveau,
l'absence d'une véritable politique de sécurisation du domaine
classé de l'Etat est indexée.
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L'EXPLOITATION DES PRODUITS DE DANIELLIA OLIVERI (ROLFE) HUTCH. &
DALZ. SUR LA VIABILITE DE SES PEUPLEMENTS AU BENIN
Les groupements végétaux à D.
oliveri, compte tenu du caractère pionnier de l'espèce,
devraient être plus présents dans les Forêts Classées
que dans les terroirs villageois livrés à l'exploitation
incontrôlée. L'Etat étant un propriétaire souvent
absent, les Forêts Classées sont plus illégalement
exploitées que les terroirs villageois Mieux, les sujets de gros
diamètre sont plus présents dans les terroirs villageois que dans
les Forêts Classées. L'indice de Shannon et
l'équitabilité de Pielou ont montré que les deux milieux
sont perturbés; mais la perturbation des groupements des forêts
classées est plus accentuée. La perturbation du milieu est
liée à la surexploitation des ressources forestières qui
le plus souvent, vise les qualités physiques, chimiques ou
technologiques des espèces.
Dans le cas de cette étude, la forme morphologique de
l'espèce (tronc cylindrique, gros diamètre, fût parfois
dégagé), les vertus thérapeutiques et spirituelles de
l'espèce, attirent les groupes socioculturels à en user.
Cependant, il est constaté que des sculpteurs sur bois, aux
tradithérapeutes en passant par les responsables de cultes, la prise de
conscience de la disparition de l'espèce ne soit pas une
préoccupation. Pourtant, certains artisans sont obligés
d'utiliser actuellement du bois immature pour fabriquer des mortiers qui sont
facilement attaqués et détruits par les insectes xylophages.
Heureusement, D. oliveri se reproduit par voies sexuée et
asexuée. Utiles dans le processus de multiplication
végétative, les graines de D. oliveri se conservent sans
soins particuliers pendant plusieurs mois. Le prétraitement germinatif
n'est pas nécessaire cependant, l'espèce se reproduit mieux par
graine et par bouture de racine. Mais, malgré le taux de germination
élevé des graines sans aucun prétraitement (plus de 90 %)
en pépinière, l'absence de régénération
naturelle sous les semenciers des terroirs ayant fait l'objet de notre
étude (IFN-DFSPBF2, 2007) serait due à la mort des graines de
l'espèce soumises au
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choc thermique des feux de végétation. En effet,
le traitement des graines par brûlage et par trempage dans de l'eau
chaude, a donné les taux de germination les plus bas. Le milieu
d'étude étant la savane assujettie aux feux de
végétation pendant la période de fructification de
l'espèce, les graines subissent le plus souvent le choc thermique. Sur
un autre plan, la conduite des rejets de souches et de racines a montré
que le développement de l'espèce n'est pas nécessairement
lié au type de sols mais, peut dépendre du traitement des
peuplements. Le désherbage des placettes et le traitement avec les feux
de végétation, ont servi de base à la définition
d'une stratégie visant à mieux exploiter les jachères
à D. oliveri en bois de feu. Avec le désherbage continu
sur deux ans, la densité des rejets émergents peut quadrupler
celle des placettes témoins passées aux feux de
végétation. Face aux pressions exercées sur
l'espèce par les groupes socioculturels, il urge de prendre des mesures
adéquates visant à freiner l'utilisation anarchique actuellement
observée chez les usagers des produits de D. oliveri. Ces
mesures seront surtout scientifiques, incitatives et règlementaires.
Sur le plan scientifique, il importe de :
n Poursuivre les recherches sur la
régénération assistée de l'espèce afin de
capitaliser les informations nécessaires à la maîtrise de
sa sylviculture.
n Approfondir les connaissances sur l'utilisation de la
résine de l'espèce afin de mieux valoriser l'encens de
l'espèce;
n Conduire des recherches sur les qualités de la
matière grasse `' huile de Daniellia `' contenue dans le bois
de l'espèce afin d'augmenter la liste des usages possibles de
l'espèce.
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Sur le plan de l'incitation, il importe de :
n Assurer la promotion des objets d'art issus du bois de
D. oliveri sur les marchés internationaux d'art. Les
expositions des produits artisanaux fabriqués à partir du bois de
D. oliveri serviront de base de publicité pour la valorisation
de l'espèce.
n Attribuer des prix aux meilleurs artisans
spécialisés dans l'utilisation du bois de l'espèce et qui
observent une exploitation respectueuse de l'environnement. Ces artisans seront
des modèles dans leur milieu oil le gaspillage des ressources
forestières est parfois très préoccupant.
Sur le plan réglementaire il est nécessaire de
:
n Retirer l'espèce de la liste des espèces du
troisième groupe pour la mettre au premier groupe de la loi des
finances. En effet, la taxation différentielle en répartissant
les espèces en quatre groupes, autorise le prélèvement des
taxes à l'exploitation de façon dégressive du groupe
supérieur au groupe inférieur. Le fait que l'espèce soit
classée dans les groupes inférieurs attire la pression de
l'exploitation ce qui ne favorise pas sa protection.
n Organiser la labellisation des produits issus de D.
oliveri afin de les valoriser et d'assurer à ses peuplements,
plus de protection.
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