Les auditeurs de Skyrock face à
l'intolérance
Fonctionnement, valeurs et portée du discours de
l'émission Radio libre dans le traitement des problèmes
d'intolérance vécus par ses auditeurs
Mathieu Sicard sous la direction de Monsieur le Professeur
Jacques Gonnet Mémoire de Master 2 recherche en sciences de
l'information et communication Université de Paris III - Sorbonne
Nouvelle - UFR Information communication Soutenu le 4 juillet 2006
Remerciements
Des recherches sont toujours le fruit de la collaboration de
plusieurs intervenants, plusieurs savoir-faire, plusieurs subjectivités.
Reconnaissons le partage de la paternité de ce qui va suivre.
En premier lieu, à Jacques Gonnet, mon
papa de l'université, directeur de ce mémoire et
personnalité influente de ce qui suivra.
A Laure Dasinieres, camarade bienveillante,
méthodique, à l'aide précieuse, et qui a le don de me
rendre loquace.
A Anne-Caroline Fiévet qui m'a ouvert les
portes du groupe Radio où j'ai notamment pu rencontrer Laurent Gago et
Nicolas Béqueret.
A David Roizen, responsable de la
communication et des relations institutionnelles de Skyrock pour le respect
d'un pacte confortable de la recherche universitaire en entreprise.
A Anaïs, à Sarah, pour leur relecture.
A mes parents pour leur confiance et leur soutien.
A toutes celles et tous ceux, auditeurs, qui sont la
matière même de ce mémoire.
Sommaire
Introduction - Entrée en matière 5
Première partie - Préliminaires . 9
Un chemin de longue date 11
Itinéraire d'une recherche universitaire en entreprise
12
Des radios libres à Radio libre 18
De Cité Future à Skyrock, d'une radio libre
à une radio commerciale 1 9
La libre antenne 21
Un slogan comme promesse : « Total respect, zéro
limite » 21
Parcours théorique et méthodologique 28
Classification des interventions dans Radio libre
29
Une définition de l'intolérance comme sujet 30
Analyses quantitatives du premier corpus 34
Premiers traitements : contextualisation de notre sujet 36
L'analyse du discours 41
Seconde partie - Ecouter et écrire le discours
radiophonique 44
Analyser des séquences radiophoniques 45
L'analyse conversationnelle 45
Ecrire l'oral 47
Le processus de skysolidarité 48
Retranscriptions des trois grandes séquences du corpus
51
Le racisme 51
L'homophobie ou l'intolérance à l'égard de
l'identité sexuelle 69
L'intolérance du fait de la religion, de la tradition
88
Troisième partie - Un regard sur Radio libre et
les séquences retranscrites 106
Architecture de la skysolidarité 107
Résonances et valeurs d'un discours 110
Développements de la skysolidarité 110
Caractères linguistiques 118
Respect et diversité 121
L'espace radiophonique comme acteur social 127
Je, ils -* nous 128
Le « grand frère », repère
légitime 130
Radio libre comme figure du « grand frère
» 132
Construction d'un nouvel idéal du lien social 133
Conclusion - Bilan du parcours et de l'expérience de la
recherche 137 Bibliographie / Webographie - Eléments de
repères de références et d'ouvertures . .. 1 42
Introduction
--- Entrée en matière
Les radios libres épanouies au cours de années
1980 sont souvent aujourd'hui érigées en légende d'un
souffle de liberté sur des ondes jusque-là réduites
à quelques grandes stations généralistes. Un vent de
cultures musicales et de libres antennes imposa une nouvelle donne pour un
nouveau paysage radiophonique dont la jeunesse est incontestablement une grande
bénéficiaire. Les petites antennes éparses sont parfois
devenues de grandes stations nationales. Dès la fin des années
1980, trois d'entre elles, principalement, se partagent le public jeune,
très courtisé des annonceurs. NRJ, Skyrock et Fun Radio se
mènent une guerre depuis lors autour de la cible des 15-25 ans en
développant leurs identités par leurs programmations musicales et
un foisonnement d'émissions originales -encore peu
étudiées- auxquelles un public de plus en plus fidèle
s'identifie.
Le concept de libre antenne a toujours été
présent dans ces années où de nombreuses émissions
lui ont fait prendre différentes formes. Celle qui remporte la mise,
tant en terme d'audience que d'image, est aujourd'hui Radio libre
diffusée chaque soir depuis huit ans sur Skyrock de 21 heures
à minuit et dans laquelle l'animateur Difool et ses acolytes s'occupent
des problèmes quotidiens des auditeurs qui viennent y partager leurs
expériences, leurs joies, leurs peurs, leurs tracas. Souvent amoureux,
parfois sexuels, familiaux ou scolaires... ils ne sont pas toujours dans la
futilité de l'image réductrice que l'on se fait souvent des
libres antennes. Après tout, il ne s'agit là que d'un ref let des
préoccupations de jeunes adultes, en émancipation, parfois
tourmentés par les angoisses d'un âge, d'une époque, de
mutations personnelles et sociétales, au milieu de confrontations de
différentes cultures, dans une société où
l'itinéraire de l'épanouissement est souvent semé
d'obstacles.
Chez Difool à la radio, on s'y confesse, on
espère y être aidé. On y joue, on y blague aussi, mais
l'essence même de la libre antenne, l'ouverture de l'antenne aux appels
à l'aide, ne se prête pas toujours à la gaudriole. Et la
solidarité gouvernant le contrat de communication est parfois mise
à rude épreuve.
C'est ce à quoi nous allons nous intéresser :
comment fonctionne, dans Radio libre, la solidarité entre
auditeurs (et avec l'équipe) pour des sujets aussi graves que le
racisme, l'homophobie ou les intolérances que connaissent parfois ces
jeunes adultes. Souvent de la part de leur propre famille, qui plus est, et a
l'égard de celui ou celle qu'ils aiment, de leur propre identité
ou de leurs choix de vie en inadéquation avec des esprits très
traditionnels.
Nous essaierons de comprendre comment se construit le discours
de l'émission sur ces sujets lourds, quelles sont les valeurs qui
semblent le gouverner.
Les auditeurs de Skyrock, comme plus largement la
génération actuelle d'adolescents et de jeunes adultes,
s'inscrivent dans différentes cultures, origines sociales ou ethniques,
religions... Ils ou elles sont lycéen(ne)s, étudiant(e)s,
actif(ve)s. A l'image de notre société, ils ont un point commun,
l'insatiable besoin de se sentir libre, le refus de se laisser dicter leurs
comportements. A l'image de notre société, et même souvent
en première ligne, ils sont parfois dans l'étau que serrent les
tensions issues de ce multiculturalisme et des communautarismes. La plupart du
temps vivant sous le toit de leurs parents, ils sont confrontés à
leur regard et leur jugement alors qu'ils quittent l'adolescence pour devenir
des ad u ltes.
Au croisement du brassage des cultures et de la phase
d'émancipation et d'affirmation de l'identité du jeune adulte,
ils se confrontent à de nombreuses préoccupations quotidiennes,
et sont touchés par le racisme, l'homophobie, par l'intolérance
au sens large. Victimes parfois de celle de leurs propres parents.
Quand le dialogue est difficile alors que le besoin de parler
est grand, quand le lien social est corrompu alors que l'obsession de la
liberté individuelle ne saurait s'affranchir du besoin des autres,
Radio libre est un refuge de dialogue où se construit un
discours par des animateurs enclins à la confidence et des auditeurs qui
y trouvent un espace social alternatif pour y déverser leurs
états d'âme et faire appel à l'aide des autres. Parfois
à propos de problèmes difficiles comme cela sera le cas de ceux
traités dans cette étude.
Nous allons ainsi porter notre regard sur la façon dont se
construit le discours de l'émission Radio libre pour les sujets
graves ayant trait à l'intolérance.
Dans un premier temps, nous contextualiserons notre propos en
nous attardant notamment sur la situation et le fonctionnement de
l'émission, sur l'opportunité du sujet pour le jeune chercheur.
Nous exposerons les outils et les notions que nous aborderons pour notre
étude tout en délimitant, peu à peu, notre corpus, plus
précisément vers les questions liées à
l'intolérance en justifiant une pertinence dans un itinéraire qui
légitimera les choix d'analyse.
Puis, nous procéderons au traitement méthodique
des données des retranscriptions écrites du corpus pour en
dégager enfin les résultats du regard que nous y aurons
porté.
Notre étude pour appréhender le discours
développé dans l'émission Radio libre empruntera
à différentes approches : linguistique, lexicologique,
sémiotique, ethnométhodologie, l'analyse du discours, l'analyse
de contenu... pour s'ouvrir ensuite à des considérations
sociologiques.
Il va s'agir de s'appuyer sur l'écoute et les
retranscriptions des séquences sélectionnées pour
élaborer un matériel de travail rigoureux qui permettra
d'interroger le corpus, tout d'abord pour développer le processus de
solidarité qui s'établit à l'antenne selon les termes du
contrat de communication, pour ensuite impliquer notre étude dans le
champ social. Et découvrir au-delà du fonctionnement d'un
discours radiophonique quelles sont les valeurs qu'il déploie et quelle
peut alors être sa portée.
Première Partie
--- Préliminaires
Comment aborder un domaine de recherche, justifier la
pertinence de ses choix, de son propos... La route qui guide des recherches est
sinueuse, subit parfois des déviations, se divise, se rejoint. Le
parcours emprunté par le chercheur précise son objet, questionne
son approche, le choix de ses outils scientifiques, la méthodologie
qu'il préfèrera adopter.
Nous débuterons ici par cela.
Cette première partie veut rendre compte non seulement
des choix et précisions théoriques de la méthodologie
adoptée, de mes préoccupations pour les présentes
recherches, de la pertinence du propos qui suivra, mais aussi, dans sa forme,
de l'itinéraire vers le travail qui est aujourd'hui ce mémoire,
du chemin luimême qui a été emprunté. Des
éléments déclencheurs aux doutes.
Il en résulte pour le lecteur une immersion dans ce
qu'il pourra percevoir à certains égards comme une sorte de
carnet de bord du chercheur, le partage d'une certaine proximité avec
cette expérience particulière de recherches sur la radio et plus
particulièrement la libre antenne, une entrée en matière
qui suit l'aventure de l'auteur de ces lignes et ce « fil de laine »
que l'on tire, sans fin, cher à l'appréhension de Jacques
Gonnet.
Un chemin de longue date
Avant d'aborder cette première partie et de
découvrir les outils scientifiques, méthodologiques et l'angle
d'attaque des interrogations auxquels soumettre le corpus, il me paraît
important d'expliquer les liens qui m'unissent à l'émission
Radio libre depuis trois ans. Le récit de l'aventure qui suit
permet, je le pense, de comprendre le processus de justification du choix de
mon sujet.
En 2003, intégrant après quelques errances en
économie un cursus en communication, l'université d'Avignon et
des Pays de Vaucluse me demandait d'effectuer un stage dans le cadre d'un Deug.
Loin des préoccupations de mes camarades pour la communication
d'entreprise, je souhaitais connaître une expérience dans un
média, avec une préférence pour la radio. Pour y faire
quoi ? peu importait alors. Une première approche, quelques contacts
à se faire... un si peu de choses pouvait alors éveiller mon
enthousiasme.
Merci aux amis, et amis d'amis, l'étudiant du Sud monta
à Paris, accueilli par la station Skyrock avec pour mission d'effectuer
des « piges précises » de l'émission Radio libre,
première en audience chaque soir de 21 h à minuit.
Précise n'était pas la consigne et libre fut donc mon
appréciation de rendre compte de l'activité de la
solidarité de l'équipe et entre auditeurs -que nous
définirons comme « skysolidarité » - qui est
censée se mettre en branle dans l'émission.
J'établis alors un format de prise de notes qui a
trouvé sa cohérence en un tableau1. Jour après
jour, chaque sujet sollicitant la skysolidarité est
consigné, sobrement intitulé, avec ses références
précisément datées et complété d'un court
résumé des interventions de l'équipe et/ou des
auditeurs.
Cette prise de note est personnelle et appelle d'autres travaux.
Qui peuvent être divers. En elle-même, sa portée est
limitée.
1 Voir annexe
Depuis deux ans Skyrock m'emploie pour continuer cette
mission, je crois savoir que la station l'utilise comme historique pour
renseignement du contenu de l'émission notamment dans ses sempiternelles
argumentations avec le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA).
Dans une optique totalement différente, ces notes sont
très précieuses pour l'appréhension d'un sujet de
recherche, sa justification dans un tout, et comme répertoire
référentiel pour sélectionner des occurrences pertinentes
à développer ensuite par l'écoute et l'analyse des
extraits.
La posture de la recherche universitaire combinée au
travail en entreprise ne s'avère ainsi aucunement gênante, bien au
contraire, comme je tentais de l'expliquer, du point de vue de
l'expérience personnelle, à Laurent Gago1 qui m'avait
demandé ce regard afin de renseigner un de ses articles.
Je lui écrivis ce qui suit.
Itinéraire d'une recherche universitaire en
entreprise
A la rentrée 2002/03, venant de valider mon Deug
d'Administration économique et sociale (AES), j'intègre la
deuxième année de Deug Médiation culturelle et
communication (MCC) de l'Université d'Avignon et des Pays de Vaucluse
(UAPV). Ce cursus prévoit la validation d'un stage.
1 Laurent Gago est ATER à l'Université de Marne la
Vallée, UFR Arts et Technologies, enseignant à
l'Université Paris 3 - Sorbonne Nouvelle à l'UFR Communication,
chercheur au CREDAM, Centre de Recherches sur l'Education aux Médias.
Plus attiré par les médias que la communication
d'entreprise, et particulièrement par la radio, j'entame des
démarches pour faire quelques recherches au sein d'une station
nationale, sans préférence particulière pour l'une d'elle.
Si le statut de stagiaire en Deug 2 se prête peu pour la plupart des
dirigeants de stations à proposer à un étudiant de
travailler sur son antenne, mon réseau de connaissance m'a amené,
de façon inattendue, à rencontrer David Roizen, responsable de la
communication et des relations institutionnelles de Skyrock.
Les problématiques qui concernent son service
s'inscrivent en grande partie dans une stratégie de défense de
l'antenne, notamment dans la lutte qui l'oppose au Conseil supérieur de
l'audiovisuel (CSA), particulièrement attentif au contenu de
l'émission Radio libre, présentée chaque soir de
la semaine de 21 heures à minuit par Difool (David Massart, par ailleurs
directeur de l'antenne).
La mission que me propose David Roizen est de procéder
à une veille de cette émission, en élaborant des piges
précises de son contenu s'agissant des interventions des auditeurs au
sujet de problèmes qu'ils connaissent, des réactions de
l'équipes et des autres auditeurs.
Mon travail a donc été au mois de mai 2003
d'écouter les émissions des mois de janvier et février
précédents et d'élaborer un document de travail
précisant quelles étaient chacune de ces interventions et de
quels effets (réponses) étaient-elles suivies (cf annexe).
Le tableau Excel ainsi obtenu au prix de longues heures
d'écoutes attentives est une synthèse de tous les thèmes
de la « skysolidarité » pendant cette période.
Je le considère alors plus comme une prise de note, assez personnelle au
sens où elle appelle beaucoup de souvenirs plus précis dans ma
mémoire. Mon intérêt était alors de tenter,
grâce à cet outil de référence et de traitement
statistique, de présenter les aspects positifs contenus dans
l'émission autour de cette thématique de
skysolidarité.
Ce travail ne se destinait qu'à être
l'aboutissement de mes écoutes dans une perspective de première
approche de la recherche af in de compléter de façon aboutie mon
rapport de stage. Si mon appréciation de la dimension de
solidarité dans l'émission, objet de mes écoutes, m'est
apparue comme un aspect positif de l'émission -je ne me suis par
ailleurs alors exprimé sur rien d'autre- les outils que j'ai
utilisé étaient très personnels et ne relevaient
évidemment pas d'une méthodologie universitaire pour un
mémoire en sciences de l'information et de la communication (je rappelle
en outre que je n'étais alors qu'en seconde année de Deug MCC...
sans avoir fait la première année !)
David Roizen ne m'avait pas demandé ce travail, mais il
l'a apprécié et l'a largement diffusé comme un outil
supplémentaire de promotion de l'émission phare, à une
époque où le CSA était déjà vigilant
à son égard et où le rapport de Blandine Kriegel allait
affecter son appréciation et justifier un peu plus ses mises en garde
sur le caractère cru de certains propos tenus dans l'émission.
La station avait tous les droits de disposer de ce travail
comme une étude réalisée en interne par un étudiant
stagiaire et, à ma connaissance, il a trouvé un certain
écho dans le milieu de la radio et une partie du monde politique de la
culture comme au cabinet de Jack Lang. Michel Meyer l'a repris dans Paroles
d'auditeurs1, reproduisant les dix-huit pages de mon
tableau de notes et citant de façon référencée deux
pages de mon rapport. Je pense que cette citation est pour beaucoup dans
l'admission de ma candidature à l'Université de Paris 3 -
Sorbonne Nouvelle à la rentrée 2003. J'ai appris au Salon Radio
2006, en rencontrant Nicolas Becqueret, que le docteur en science de
l'information et communication avait aussi fait référence
à ce rapport dans sa thèse.
Si la citation de Meyer est flatteuse en recevant mes
observations comme seul contre argumentaire cité dans son ouvrage
largement à charge contre la tonalité du moment des
émissions de libre antenne, Nicolas Becqueret a été
largement plus critique sur mon travail. S'il valorise certains aspects de
l'antenne, il n'est
1 Parole d'auditeur, Michel Meyer, Paris, Syrtes, 2003,
345 pages.
pas une étude rigoureuse de tous les aspects de la
communauté d'auditeurs créée par l'émission.
Nicolas Becqueret précise notamment le caractère excluant de
cette communauté à l'égard de ceux qui n'en sont pas.
La concision et la visée de mon rapport, nous l'aurons
compris, laissait seulement la place à la valorisation de
l'émission selon mon appréciation de la solidarité qui
figure dans le contrat qui la lie à ses auditeurs. En aucun cas, il ne
s'agissait là du résultat de recherches au sens universitaire, ne
serait-ce que dans la construction de la réflexion et dans le format de
la chose.
La question de l'ambiguïté de la recherche
universitaire en entreprise se pose logiquement à moi aujourd'hui, alors
que je travaille sur le discours développé dans la
skysolidarité pour mon mémoire de Master 2 recherche et
que je suis, par ailleurs... salarié par Skyrock !
La station m'emploie en effet depuis un an et demi, à
la place des stagiaires successifs qu'elle recrutait jusque-là (dont
j'ai donc fait partie en mai 2003), à « piger » les
interventions de Radio libre autour de la thématique de la
skysolidarité. C'est-à-dire à continuer la prise
de note que nous avons précédemment définie selon
l'écoute de toutes les émissions depuis la rentrée
2004.
Dans la mesure où cette prise de note n'est que la
retranscription du contenu de l'émission et que l'usage qui peut en
être fait par la station m'est étranger (ou plutôt que j'y
suis étranger), je ne fais pas un cas moral troublant de partager ce
travail dans le cadre de mes recherches. Bien au contraire ! Aurais-je pu
bénéficier d'un tel corpus dans la seule année de
recherche de mon Master 2 ? Certainement pas. C'est parce ce traitement de
l'émission est aussi mon activité professionnelle, qui paie mon
loyer et me nourrit, que j'ai pu y consacrer le temps que nul n'aurait pu
consacrer dans une année universitaire dans le cadre de ses recherches.
Cela au bénéfice d'un corpus de référence plus
étendu, permettant de dégager des statistiques préalables
pour contextualiser l'objet particulier de mes recherches, permettant
d'éviter les erreurs d'appréciation liées à la
représentativité des éléments qui
seront traités, permettant de dégager des perspectives en
respectant leur cadre dans la skysolidarité et sans jamais
perdre de vue la part des recherches de mon mémoire dans le tout que
forme l'émission.
Et la station met à ma disposition un disque dur qui
peut se connecter à mon ordinateur personnel et qui regroupe toutes les
émissions de la saison, économisant au chercheur le travail
fastidieux d'enregistrement ou de consultation à l'Inathèque de
France, et permettant une consultation à courtoisie, à domicile,
sans contrainte d'horaires ou de coûts techniques, avec la meilleure
flexibilité dans l'organisation des recherches.
David Roizen n'est pour moi pas tout à fait un patron
ni tout à fait un ami. Nous entretenons de bonnes relations mais nous
nous voyons très peu et s'il voit je crois d'un bon oeil mes recherches
sur la matière qui nous lie par contrat de travail, il ne
s'intéresse pas à l'avancée de mes travaux ni même
à l'intitulé de mes recherches, à leur angle, à ma
problématique. Il découvrira mes résultats une fois mon
mémoire soutenu et j'accueillerais volontiers ses observations.
Je sais que s'il m'était utile pour ce mémoire
d'effectuer par exemple des entretiens, il me faciliterait largement la
tâche ; alors que si je lui étais étranger, il me serait
ardu, je n'en doute pas, de le rencontrer lui, Difool ou le directeur de la
station Pierre Bellanger, ou d'obtenir certaines informations que seule
détient la station.
Pour ces raisons, je trouve pertinent et même utile la
recherche universitaire en entreprise. J'imagine qu'il doit y avoir des cas de
conscience éthiques ou loyaux pour certains chercheurs dans cette
situation. J'ai la chance d'en être à l'abri.
Ce sont ces quelques mots avec les interpellations de Jacques
Gonnet et d'autres chercheurs qui ont déclenché la maturation du
projet de l'écriture de ce mémoire.
Des radios libres à Radio libre
Revenir sur la libéralisation des ondes du début
du septennat de François Mitterrand... l'histoire aura retenu que sans
doute avant que le politique ne soit dépassé par
l'évidence de l'émergence d'une nébuleuse de médias
radiophoniques dussent-ils être « pirates », il fallait bien se
résoudre à jouer la carte de la garantie de la liberté et
du pluralisme... quitte à canaliser ces jaillissements en les
introduisant dans une légalité qui permettent de les
contrôler. L'appareil législatif créa ainsi un cadre dans
lequel faire évoluer le projet (qui faisait partie des `'110
propositions pour la France''). La loi Fillioud du 29 juillet 1982
prévoit ainsi, dans son article premier, que « les citoyens ont
droit à une communication audiovisuelle libre et pluraliste ». Mais
si le monopole public est aboli -dans une France où les rapports entre
politique et médias s'entrelacent- l'usage des fréquences de
diffusion est soumis à autorisation, et une haute autorité de
régulation est créée. Elle prendra d'ailleurs
différents noms et s'attribuera ses compétences légitimes
au fur et à mesure des évolutions techniques et des gouvernements
successifs.
Fini donc le temps d'un paysage radiophonique comptant trois
radios publiques (France inter, France culture et France musique) et quatre
périphérique (Europe N°1, Radio Luxembourg, Radio
Monte-Carlo et Radio Andorre) émettant de l'étranger1.
Les radios qui s'étaient développées clandestinement
post-1968 peuvent prétendre à pignon sur rue et arrêter les
parties de cache-cache de leurs émetteurs. Leur développement
serait néanmoins freiné par leur obligation d'un statut local et
de type associatif. « Serait », car les réseaux se
développent et dans cette mouvance -où la France traîne
plutôt en Europe2- il ne saurait tarder de voir s'affirmer de
véritables industries radiophoniques.
L'interdiction de la publicité, dans un premier temps
soutenue par les socialistes contre la proposition du ministre de la
communication Georges Fillioud -ancien
1 Jean-Noël Jeanneney, Une histoire des médias,
Paris, Points-Seuil, 2001, p256.
2 Jean-Noël Jeanneney, idem, p255.
journaliste d'Europe N°1- qui en serait garante est
vécue par certains protagonistes et aujourd'hui au regard de nombreux
historiens comme une parfaite hypocrisie1. Comment subsister sans un
budget de fonctionnement auquel l'Etat ne peut subvenir ? Le président
Mitterrand changera brusquement d'avis, sous la pression de l'école
privée qui aboutit à une manifestation à Paris le 24 juin
19842. La France digère la libéralisation de ses
ondes.
Parmi cette multitude de radios devenues commerciales, NRJ se
distingue. Son patron Max Guazzini désavoue la Haute autorité,
qui avait suspendu la station pour son niveau sonore de diffusion largement
abusif, en orchestrant six mois plus tard une grande manifestation d'auditeurs
et d'artistes pour sauver « leur » radio. La réaction
politique sera de laisser défiler et NRJ re-émettra.
De Cité Future à Skyrock, d'une radio
libre à une radio commerciale
Le parcours de la radio qui nous intéresse ici, durant
ces « folles années », sera principalement incarné par
un homme. Passionné de radio et reconnu par ses pairs comme instinctif
et visionnaire, Pierre Bellanger « biberonnait » déjà
en 1979 aux micros de l'université de Paris VIII-Vincennes où il
étudiait la biologie. En 1981, il fonde, en association avec le journal
Le Monde, Cité Future, qui prendra le nom de Radio Lézard, loi
Fillioud en vigueur, deux ans plus tard. Pierre Bellanger développe ses
réseaux et a pour objectif de faire devenir sa radio une grande radio
nationale. En 1986, Skyrock s'assume comme radio commerciale.
Autre dimension, autres rapports au public et surtout autres
moyens financiers, mais pas de regrets pour le bourlingueur de la bande FM :
« La Voix du Lézard n'aurait pas pu devenir un réseau. Elle
était trop " fermée ", c'était la radio de 400.000
personnes, confie Pierre Bellanger. À la différence de beaucoup
d'autres
1 Annick Cojean et Franck Eskenazi, FM, la folle histoire des
radios libres, Paris, Grasset, 1986, 333 pages.
2 Jean-Noël Jeanneney, op cit, p259.
radios libres, au lieu de disparaître ou de s'enfermer
dans une sorte de cocon tribal malheureux et plein de ressentiment à
l'égard de l'extérieur, on a évolué. Aujourd'hui,
on touche 2 millions de personnes »1. Bellanger justifie sa
cohérence dans un paysage radiophonique dont l'évolution lui
donnera raison.
Quid de l'identité de la station ? L'esprit rock
fondateur du réseau est conservé durant les années 1980.
Mais le discours change. Bellanger veut rester en phase avec une cible 15-24
ans qui évolue constamment. Les années 90 verront Skyrock
véhiculer des valeurs anti-racistes pour une génération
multiculturelle et « multicolore »2. Si la libre antenne
conserve une place de choix, la station est clairement musicale et diffuse
« Aïcha » du chanteur Khaled. Puis, un oeil sur les Etats-Unis,
Skyrock captera l'émergence rap qui deviendra le genre musical
préféré de sa cible dans la deuxième moitié
des années 90. Pour d'anciens auditeurs, souvent nostalgiques, Skyrock a
perdu l'âme de ses débuts, libre antenne et rock. Il
apparaît évident que la station commerciale ne s'est pas
encombré de l'opinion de ses premiers fidèles et a voulu
évoluer avec son coeur de cible.
Une génération c'est deux ans pour Bellanger, et
Skyrock veut conserver sa cible -au fort pouvoir d'achat- et non ses auditeurs.
La nuance est primordiale dans la stratégie commerciale et
l'identité de la station commerciale. Skyrock mise sur la
stratégie de l'identification à sa cible, jeune
génération sur un « strapontin social »3,
isolée, aux codes propres4, qu'elle veut partager. Quitte
à jouer la victimisation lorsque l'attribution de nouvelles
fréquences tourne plus l'avantage aux groupes NRJ, Lagardère et
Bertelsmann, en lançant des pétitions bientôt
signées par de nombreux élus et en faisant circuler un camion
à ses couleurs dans les villes « privées » de Skyrock
pour créer le buzz médiatique autour de jeunes
gagnés à sa cause.
1 Article paru sur le site
http://www.bric-a-brac.org/radio/fiches/skyrock.php
2 Plaquette de presse de Skyrock, Sky rock expliquée
à mes parents, 2003.
3 Plaquette de presse de Skyrock, idem.
4 Cf le travail d'Anne-Caroline Fiévet sur l'argot et le
parler nouveau des banlieues sur l'antenne des radios Skyrock, NRJ et Fun
Radio.
La libre antenne
Le format de la libre antenne est vieux comme les radios
libres. Le principe est simple, ouvrir l'antenne aux auditeurs qui, par
téléphone, prennent la parole pour une simple dédicace ou
pour former des émissions entièrement construites sur leurs
récits. De la vie quotidienne aux jeux et canulars. On se rappelle de
Lovin' fun sur Fun radio, qui parlait de sexe sans complexes en
mélangeant blagues et discours psychologiques (sous la caution du «
Doc » Christian Spitz, pédopsychiatre) et responsabilisants
à propos de prévention.
Un slogan comme promesse : « Total respect,
zéro limite »
La symbiose que Skyrock revendique avec la nouvelle
génération, ou du moins une partie de la nouvelle
génération suffisante pour la placer première radio de
France de sa cible1, s'exprime par l'affirmation d'une
identité forte. Musicalement, il ne s'agit pas du rap. Hier, Sky
était rock, puis le rap et le raï sont apparus, aujourd'hui la
programmation est aussi empreinte de Rn'B... La couleur est celle du moment,
celle qui correspondra à la culture lycéenne. Ou du moins une
certaine culture lycéenne. NRJ séduit une grande partie du public
jeune par sa programmation pop, mais il s'agit pour Skyrock de viser une cible
plus précise, plus restreinte, et qui en s'y reconnaissant sera d'autant
plus attachée. Couplée au travail qui est fait dans la libre
antenne du soir dont il va être question ici et à son
succès d'audience, la fidélité à la station est
acquise. On peut ainsi plus facilement parler d'une « communauté
» dans l'auditorat de Skyrock que pour une autre radio musicale. Cette
proximité est ancrée dans la continuité de la grille. On
se lève avec Difool, qui accompagne jusqu'au lycée, la
journée est musicale et ouverte aux « dédicaces », on
retrouve Difool et sa petite équipe pour s'endormir. Les voix des
animateurs, les jingles sont travaillés pour donner une tonalité
cohérente, une couleur d'antenne en continu, s'adressant toujours
à un
1 Source : Médiamétrie Enquête 75 000+
novembre-décembre 2001, cible 15-24 ans, du lundi au vendredi, de 5h
à 24h, audience cumulée et part d'audience.
public type que l'on pourrait dans un premier temps rapidement
définir comme lycéen et « rebelle », par opposition
à la cible de NRJ, plus large et plus « sage ». La libre
antenne est propice à l'expression des jeunes auditeurs sur leurs
problèmes quotidiens, voire en lien avec certains sujets de
société.
La station se plait d'ailleurs à revendiquer la
liberté du discours sur son antenne, en direct (nous savons
néanmoins qu'un premier filtre est opéré au standard pour
éviter à la fois les interventions qui ne passionneraient pas
l'auditoire comme d'éventuels débordements). L'illustration la
plus flagrante est évidemment l'émission Radio Libre,
animée chaque soir par Difool, Marie et Romano de 21 h à
minuit. La plaquette de presse1 de Skyrock prétend que la
parole des auditeurs s'y exerce « sans censures, avec leurs mots, leurs
points de vue, leur discours, leurs excès, leur sincérité
».
Serait-ce la formule gagnante de l'émission
première en audience chaque soir ? Un message crypté, où
pour parler de morale on pourrait user de mots obscènes, pour
recommander la modération user l'outrance verbale. Un mélange de
rire, de grave, de cocasse, d'utile, d'insulte, d'émotion2
qui aurait créé ses propres codes, son propre fonctionnement, son
propre langage.
Le « moment radiophonique adolescent » décrit
par Hervé Glévarec3 était né sur Europe
1 avec Salut les copains, il s'ancre dans la libre antenne depuis les
années 1990, dans une culture de la chambre, comme espace privé
du jeune en tant qu'individu, à la fois isolé et relié aux
acteurs sociaux, de la connivence au conf lit.
Le succès de l'émission phare sur laquelle
portera notre propos est lié en partie à la popularité et
le savoir-faire de l'animateur. Difool était l'enfant terrible qui
apportait le « fun » à l'émission co-animée avec
le Doc (Christian Spitz) sur l'antenne de Fun Radio dans le milieu des
années 90. Lovin' Fun, devenue culte
1 Plaquette de presse de Skyrock, op cit.
2
Plaquette de presse de Skyrock, idem, page 12.
3 Hervé Glévarec, Libre antenne, Paris,
Ina-Armand Colin, coll. Médiacultures, 2005, p.1 11 et suivantes
pour toute une génération, s'est imposée
naturellement au moment où la jeunesse a eu besoin de parler et
d'entendre parler de sexe, notamment du fait de la problématique
nouvelle du sida et de la vague de prise de conscience de la
nécessité de développer un discours responsable.
Mais le succès d'audience de Radio Libre,
confirmé depuis plusieurs années par les chiffres de
Médiamétrie la situant première radio de France sur la
plage horaire 21 heures/minuit, est avant tout le résultat d'une
adéquation que nous avons commencé à décrire et la
pérennisation d'un pacte de confiance avec les auditeurs sur un
contrat.
Radio libre est présente sur la grille de
Skyrock du lundi au vendredi, de 21 heures à minuit, de la
rentrée d'août/septembre aux vacances d'été de fin
juin/début juillet. L'émission dure donc trois heures chaque
soir, durant lesquelles l'antenne est ouverte aux appels des auditeurs, comme
nous l'avons vu, pour évoquer un problème et faire appel à
la solidarité des auditeurs et des animateurs ou pour apporter un
soutien, une réponse. Si ceci constitue le fondement du concept de
l'émission et qu'il s'agira ici de le questionner, ne nous privons pas
en quelques mots de retranscrire les autres composantes de Radio libre,
notamment à l'attention de celles et ceux qui n'auraient jamais
écouté l'émission, afin de l'envisager comme un
ensemble.
Différentes séquences régulières
viennent ponctuer le programme. La publicité et la musique,
évidemment, deux fois par heure, couplées, durant cinq minutes
à chaque heure 20 et chaque heure 50 environ. La programmation musicale
est alors fidèle à l'ensemble de la programmation de la station,
rap et Rn'B ; et les publicités s'adressent, sans surprise à un
public jeune (téléphonie, produits culturels... mais aussi lignes
téléphoniques de service, de prévention du sida comme des
chats de rencontres, hétérosexuels comme gays). Des chroniques
ponctuent l'émission : canulars téléphoniques, «
questions express - réponses express » où il s'agit de
répondre très rapidement à des questions très
diverses des auditeurs reçues par internet ou messages textos, le jeu du
« lotofoot », la « skyroulette » qui fait gagner des
cadeaux en fin d'émission, ou encore -il mérite
qu'on s'y arrête- le très écouté
« problème du mois » dont sont friands les auditeurs comme les
oreilles attentives du Gonseil supérieur de l'audiovisuel (GSA) qui y
attend chaque jeudi les propos estimés les plus choquants par
l'autorité, notamment s'agissant de la descriptions de pratiques
sexuelles comme la fellation, la sodomie, le sado-masochisme... le principe est
de tourner en dérision les problèmes que rencontrent certains
lecteurs de magazines ou sites internet adultes qui écrivent à
ces médias pour leur demander conseil. Propos rapportés dans
l'émission dont les auditeurs sont souvent plus jeunes que les cibles
légales de ces médias, parfois mineurs. Nous retiendrons
toutefois à la décharge de Radio libre que lorsqu'il
s'agit des propos les plus crus, ils sont énoncés après
22h30, heure raisonnable reculée récemment par le GSA suite aux
conclusions du rapport Kriegel. La station semble en effet tout de même
se conformer avec les exigences de l'autorité qui a aussi pouvoir de
sanction.
Galquée sur le temps scolaire de ses jeunes auditeurs,
l'émission ne prend toutefois que deux semaines de vacances,
généralement pour Noël et au printemps. Nous noterons la
continuité qu'assurent les personnalités qui animent l'antenne
avec leurs auditeurs, à la fois parce qu'ils sont là chaque matin
et chaque soir (avant et après les activités sociales en semaine
des jeunes ordinaires, école, famille...) mais aussi parce que,
même lors des vacances d'hiver et de printemps de l'équipe, on
rediffuse le temps d'une semaine les meilleurs moments de l'émission, au
même créneau horaire, et introduits par quelques mots (qui
paraissent en direct) pour expliquer la rediffusion (« tous les soirs en
direct et même pendant cette semaine de vacances » ; « toute la
semaine, on a prévu plein de choses que vous nous avez demandées,
qui ont déchiré »), ponctué d'indicateurs temporels,
souvent au présent pour une annonce de rediffusions (« à
l'instant le live de la fouine » ; « bon anniversaire [...] quel
âge aujourd'hui ? » ; « Merci d'avoir été
là ce soir » ; « tu reviens demain » ; « à la
fin de l'émission » ; « tout de suite, pour démarrer
»)1. Nonobstant, il ne s'agit pas d'une dissimulation. On ne
cherche pas à donner l'illusion du direct, les propos introductifs
annoncent et valorisent une rediffusion
1 Ces expressions ont été tirées de
l'émission du lundi 26 décembre 2005, propos introductifs d'une
semaine de « best of », entendus de 21h01 à 21h07.
des meilleurs moments mais l'équipe présente
à l'antenne pour le préciser garde un lien quotidien avec les
auditeurs (même si l'on peut volontiers supposer que ces séquences
ont été elles-mêmes enregistrées en une seule fois
pour laisser une semaine de répit à une équipe qui,
reconnaissons-le, l'a bien mérité après avoir tenu
l'antenne durant quatre mois).
Le « moment » phare de la station, se
présente donc comme régulier et continu, assurant la
continuité du pacte qu'elle a établi avec ses auditeurs, ou un
contrat1 qu'elle ne saurait être coupable de rompre, tant la
régularité est primordiale à la fidélité.
Mais si la notion de quotidienneté semble nécessaire à la
réalisation des meilleures conditions d'un « suivi2
» crédible et confiant des membres d'une communauté
d'auditeurs.
Le contrat, justement, quel serait-il ? Nous allons
réutiliser cette notion à de nombreuses reprises,
arrêtons-nous y un instant.
Comme la notion de dispositif, celle de contrat a
été avancée dans un premier temps intuitivement et par
commodité. Par Benveniste, puis notamment en sémiotique par
Greimas et Courtés3, se remplissant peu à peu de sens
par des éclairages divers. Nous considérerons dans un premier
temps que le contrat de communication est la condition nécessaire
à un minimum de compréhension mutuelle des partenaires d'une
co-construction d'un discours par des actes de langage. Dans le cas qui nous
intéresse, ces partenaires sont pléthore. Animateurs, auditeurs
au téléphone, mais aussi tous les autres auditeurs,
potentiellement in the record, ou a tout le moins réactifs dans
leur chambre, même dans la situation de passivité à
écouter des représentants comme Grands Auditeurs. Si dans la
co-construction, un élément est en rupture dans ce que l'on est
habitué à écouter a de fondamental, sans que la
justification apparaisse comme légitime par chacun, le contrat est
rompu. Appliqué à notre cas,
1 Guy Lochard et Henri Boyer, La communication
médiatique, Paris, Seuil, coll. Mémo, 1998, p11.
2 Entendons évidemment au sens stratégique,
marketing plus que psychanalytique. Même si le lien affectif et
psychologique est, nous le verrons, primordial dans la relation des auditeurs
aux membres de l'équipe. 3 Algirdas-Julien Greimas et Joseph
Courtés, Dictionnaire raisonné de la théorie du
langage, Paris, Hachette, 1979, 454 pages.
l'émission risque de perdre des auditeurs. S'il s'agit
d'un repositionnement stratégique, elle peut le faire sciemment en
espérant en gagner d'autres. Mais la stratégie affichée de
Skyrock, selon le principe de son patron Pierre Bellanger selon lequel une
génération se définit comme une classe d'âge
d'amplitude 2 ans, est de viser une cible d'âge (plutôt celui du
lycée) et non un public avec lequel vieillir. En résulte une
évolution en mouvement perpétuel, en phase avec les
préoccupations, les codes sociaux et verbaux du moment.
En psychologie sociale du langage, Rodolphe Ghiglione
précise que « pour que le contrat de communication soit effectif et
donne lieu à un dialogue régulier, il faut que [les
interlocuteurs valident mutuellement leurs énonciations]
»1. La logique de mouvement évolutif perpétuel
que nous venons d'énoncer est en ce sens nécessaire pour
être en cohérence avec l'idée d'un coeur de cible
fixé selon une tranche d'âge. La pérennité du
succès de l'émission réside ainsi pour une part
conséquente dans les capacités d'adaptation des animateurs aux
codes mouvants de leur cible.
Dans un domaine qui sera plus encore celui de nos recherches,
Patrick Charaudeau2 définit pour l'analyse du discours le
contrat comme l'ensemble des conditions dans lesquelles se réalise tout
acte de communication. Le contrat de communication est pour lui ce qui permet
aux partenaires d'un échange langagier de se reconnaître avec les
traits identitaires qui les définissent en tant que sujet de cet acte de
langage. La connivence que l'on peut relever parfois entre auditeurs et/ou
animateurs et l'évocation fréquente de certains traits de
caractère des animateurs révèlent en ce sens l'importance
de la question des identités, où chacun trouve son (ses)
rôle(s) à jouer : Difool la figure du « Grand frère
» raisonnable et responsabilisant, Marie le regard féminin, Romano
l'amuseur tout en (auto) dérision, Momo et Samy, plus jeunes, supporters
du Paris Saint-Germain et de l'Olympique de Marseille. Si l'on pouvait
s'attarder plus longuement sur les profils de l'équipe, nous
retiendrions déjà qu'ils sont divers,
1 Rodolphe Ghiglione, Situations potentiellement
communicatives et contrats de communication effectifs, Verbum, Presses
universitaires de Nancy, 1984, p187.
2 Patrick Charaudeau, Langage et discours,
éléments de sémiolinguistique, Paris, Hachette, 1983,
p50 et 93.
chacun à son rôle particulier, participant en
cohabitation à la construction d'un discours dont les autres
participants, auditeurs, ne semble pas moins différents les uns des
autres. Nous verrons ce qui les réunit ici.
En outre, Difool l'animateur est aussi David Massard directeur
de l'antenne, Romano Romain Galand le réalisateur de l'émission,
Marie Tartois, Cédric, Momo sont aussi les standardistes.
Une équipe plus élargie tient à jour un
dispositif de ressources particulièrement en matière de
santé et de soutien scolaire, qui nourrit Radio libre et se
matérialise aussi par les sites
www.tasanté.com et
www.yazata.com.
Parcours théorique et méthodologique
L'analyse que nous allons suivre se veut un « regard »
posé sur le fonctionnement d'une partie d'une émission à
considérer comme un tout.
La construction de ce regard empruntera à l'analyse du
discours, à la sémiotique, à la psychologie sociale,
l'ethnométhodologie, la lexicologie... transdisciplinaire, il sera en
quelque sorte construit opportunément avec divers outils des sciences de
l'information et de la communication (SIC). Nous ne pourrons évidemment
espérer exhaustivité dans l'utilisation des outils que les SIC
peuvent mettre à notre disposition ; c'est pour cela qu'il s'agira d'un
regard, comme il pourrait y en avoir d'autres. Il s'agira ici d'espérer
comprendre le fonctionnement d'une composante du contrat de communication liant
Radio libre à ses auditeurs (la solidarité) par
l'entrée où elle est a priori le plus rudement mise
à l'épreuve (les questions d'intolérance).
Comme signalé plus haut, je suis donc assidu depuis
plus de deux ans à Radio libre. L'émission est
axée sur les appels des auditeurs évoquant un problème et
les interventions de l'équipe et de la communauté d'auditeurs.
Notre propos portera sur ces interventions et les réactions qu'elles
inspirent. Nous excluons donc de notre analyse les séquences «
rubriques » de l'émission (football, jeux...) ainsi que les
coupures musicales et publicitaires.
Soit un auditeur exposant un problème à
l'antenne. Nous répertorions les réponses apportées par
l'équipe et les auditeurs, ce que nous appelons la
skysolidarité (cf annexe).
Le tableau de prise de note que je tiens quotidiennement
à jour depuis le mois de septembre 2004 (cf annexe) rend compte de
chacune de ces interventions, répertorie sa thématique, un court
intitulé du problème de l'auditeur, ainsi que les
principales réactions de l'équipe de
l'émission et des auditeurs qui passent à l'antenne.
Ce tableau n'est qu'une prise de note, très personnelle,
qui a pour principal mérite de recenser et de résumer.
Il n'exprime en aucun cas une synthèse de la
skysolidarité, il doit seulement être
considéré comme référent à des
séquences à re-écouter, selon ce que le curieux voudra
chercher, peut-être guidé, interpellé, orienté par
le recensement de ces séquences.
J'ai rendu quelques rares notes et rapports à Skyrock,
à propos de thématiques particulières, pour
répondre à des alertes ponctuelles... Il n'a donc jamais
été que très rarement question que je travaille cette
prise de note et je crois que ces tableaux que je rends chaque mois à la
station n'ont d'autre valeur que ce que serait un conducteur
complété en cours d'émission. Néanmoins, en
disposant à ma guise pour d'éventuelles recherches, j'ai
constaté sa préciosité lorsque j'ai envisagé de
rendre utile pour des recherches des mois (des années même) de
travail à écouter Radio libre. Peu à peu, il
s'avère possible de regrouper des thèmes, en trouver une
classification, créer un agencement significatif des logiques
d'interactions.
Classification des interventions dans Radio libre
Il serait souhaitable, pour une première
appréhension scientifique du contenu de l'émission Radio
libre, d'effectuer une classification.
La subjectivité du chercheur peut lui faire envisager de
nombreuses façons d ifférentes cette catégorisation.
L'analyse de contenu doit toutefois obéir à des
règles. Comme le définit Laurence Bardin, l'analyse de contenu
répond à un désir de rigueur et un besoin de
découvrir1. L'analyse
quantitative/catégorielle contre intuition nous permettra, dans un
premier temps, de traiter le tableau de prise de note de chaque séquence
de l'émission concernant un sujet (cf. annexe). Nous ferons ainsi
apparaître, par un enregistrement systématique des
séquences, un catalogue qui nous permettra de trouver une logique de
classement catégoriel et pourrons définir un corpus plus
restreint selon des termes de pertinence, de légitimité et de
représentativité de notre sujet.
Nous nous référerons donc dans un premier temps
à l'enregistrement de toutes les séquences concernant les
problèmes des auditeurs dans Radio libre. Puis, après en
avoir dégagé des statistiques, nous concentrerons notre corpus
sur notre sujet, qu'il nous faut bien commencer par définir.
Une définition de l'intolérance comme
sujet
Tout d'abord, pourquoi s'intéresser à
l'intolérance comme thématique d'entrée pour questionner
la solidarité qui s'organiserait dans l'émission Radio libre
?
S'il s'avère, à la première écoute
de l'ensemble des émissions d'une saison que la promesse de
solidarité avec les auditeurs semble respectée (parfois
très concrètement, en proposant, par exemple, un abri à un
auditeur qui s'est retrouvé, pour une raison ou une autre, à la
rue), comment en découvrir le fonctionnement, les valeurs, en
évaluer le sérieux, en révéler la fiabilité
du discours...
Certains problèmes d'auditeurs s'avèrent
objectivement plus grave que d'autres, lorsque par exemple il s'agit de
certains cas de maternité non souhaitée, de problèmes de
justice, de violence, de santé... mais comment leur trouver un trait
commun, une cohérence à étudier ? Le degré de
gravité d'un même thème (la contraception par exemple) peut
être plus ou moins lourd ; la variété des thèmes
1 Laurence Bardin, L'analyse de contenu, Paris, Puf,
2003, p31.
est très large (du problème de couple, de
première fois, à la santé, l'école... toute la vie
sociale d'un jeune public en définitive).
En réfléchissant à la façon
d'interroger l'énorme corpus dont je disposais, j'ai pensé tout
d'abord nécessaire de dresser une classification des sujets pour ensuite
en dégager les questionnements qui permettraient de trouver une
entrée pertinente pour le travail de ce mémoire.
Le regroupement des sujets par thème ne s'avère
pas globalement pertinent. Les contraintes de l'analyse de contenu visent
notamment à rassembler les données en de grands groupes
homogènes sans laisser d'orphelins. A classer par thèmes (par
exemple « santé », « justice », « sexe »,
« examens », « amour », « couple », «
maternité », « dispute », « adultère
»...), il y aurait soit trop de thèmes orphelins, soit trop
d'approximation dans les regroupements (les amours et le couple, le sexe et
l'amour ou le sexe et la contraception...) Et quid des sujets multiples ?
S'il apparaît globalement que les sujets environnent
souvent l'amour et ses interrogations, la jungle des thématiques que ces
questionnements arrosent est, à la lecture des intitulés des
sujets (colonne 5 de l'annexe), bien trop vaste et riche pour pouvoir
définir des catégories pertinentes par thèmes.
Le schéma d'une autre réflexion est
nécessaire pour envisager des questionnements plus clairement, plus
sereinement, avec fiabilité et pertinence.
Comme nous pouvons le constater des intitulés des
problèmes, l'auditeur est toujours placé en tant qu'individu au
centre d'une galaxie d'interlocuteurs. La vision que nous pouvons adopter, en
hypothèse, pour appréhender ces recherches découle de ce
simple constat. En voici le schéma qui veut présenter l'individu
auditeur appelant au centre, tout en présentant une globalité
simple des sujets abordés dans l'émission.
(Voir schéma 1 page suivante)
SCHEMA 1 / l'auditeur-individu au centre d'une galaxie
d'acteurs sociaux
Administrations
Famille
(Ecole, police, entreprise...)
Amitiés
Individu
Amours
Les quatre groupes d'agents sociaux ici distingués
entrent tour à tour, ou parfois ensemble en relation avec l'individu
(l'auditeur). On peut ainsi se figurer chacun des sujets pour lesquels ce
dernier en appelle à la solidarité à l'antenne comme une
rupture dans le contrat social adopté implicitement par l'individu.
Quelle solidarité ? Une communauté d'auditeurs
et des animateurs plus expérimentés possèdent des
réponses à ces ruptures vécues comme des crises par
l'auditeur appelant. On téléphone au standard de Skyrock pour y
faire appel. Moins isolé, on en attend des réponses qui
pourraient aider à faire en sorte de rétablir les liens
sociaux.
Le choix de cette conception permet donc non seulement la
figuration d'un système global clair, mais propose aussi une vision en
relation avec la « vie réelle », au delà du temps de la
radio, pour se préoccuper de l'auditeur en tant qu'individu et
créer des ponts entre l'analyse du discours et les préoccupations
d'une jeunesse dans une société.
Les questions d'identités donneront saveur à
cette vision, en développant des figures et en s'interrogant sur leur
légitimité et celle de leurs conseils, avis, recommandations,
basées pour l'essentiel, nous le verrons, sur les expériences
individuelles qui sont partagées dans cette entreprise collective. Une
tentative d'entraide que nous avons appelé skysolidarité,
empruntant ce terme de l'usage qui en est largement fait dans Radio
libre.
Alors pourquoi s'intéresser à l'intolérance
comme cela était notre interrogation en début de ce chapitre ?
Parce que l'intolérance en tant qu'angle
d'interrogation dans le schéma que nous avons défini peut
s'avérer être la mise à l'épreuve la plus
périlleuse -et donc révélatrice- pour l'analyse du
fonctionnement d'une certaine solidarité.
Quelle(s) intolérance(s) dans l'intervention d'un
auditeur qui semble la vivre ? Victime ou -pourquoi pas- bourreau, il ou elle
en souffrirait assez pour avoir la démarche de faire appel à
l'aide proposée par le dispositif de l'émission Radio libre.
Il ne s'agira donc pas de considérer les querelles de couple ou
autres sujets dans lesquels un manque de compréhension, de respect ou de
tolérance pourrait prendre place, mais bel et bien de considérer
les seuls sujets où l'intolérance est la raison de la crise que
connaît l'auditeur appelant.
« Les institutions permettaient en principe la
discussion et la négociation [... ] Une société globale de
plus en plus diversifiée et en même temps de plus en plus
condamnée à la solidarité par l'expansion industrielle
opte pour une idéologie de la tolérance. Idéologie de la
douceur ou idéologie doucereuse ? » questionne Bernard
Guillemain dans l'Encyclopedia universalis (édition 2005).
Si l'individu apparaît souvent isolé, la
solidarité semble être une valeur dont il a, à tout le
moins, parfois besoin.
Les sujets qui nous concerneront et qui feront donc l'objet d'un
second corpus sont quelquefois individuels (au sens où ils ne prennent
pas une dimension plus
large que celle exposée par l'auditeur. Exemple :
« une fille s'incruste dans notre groupe et nous saoule »), et la
plupart du temps plus lourds, prenant très souvent une dimension
politique. Il s'agit des sujets concernant l'intolérance religieuse,
ethnique, le racisme purement et simplement, ou encore l'homophobie.
Quelles seront les réponses des acteurs de la
skysolidarité à chacune de ces questions ? Quel discours
est construit et comment ? C'est ce que nous verrons.
Quant à pourquoi ne pas se focaliser sur un seul de ces
sujets (comme l'homophobie ou le racisme seulement), j'argumenterais qu'outre
le peu d'intérêt que je porterai à une étude de
genre ou communautaire, le traitement de plusieurs sujets différents
permet ici de se focaliser non sur l'un d'entre eux mais sur le fonctionnement
de la skysolidarité qui les transcende. Et c'est
précisément ici notre propos.
Le corpus peut se réduire autrement.
Analyses quantitatives du premier corpus
Par souci de représentativité, et pour maximiser
l'utilité des notes (cf. annexe) à des fins de recherches, nous
procèderons tout d'abord à une première étape
où nous considérerons l'ensemble des émissions d'une
saison entière afin de dégager les statistiques
nécessaires à la bonne signification et la pertinence de notre
propos.
Nous considérerons donc dans un premier temps la saison
2004/05 pour dégager des statistiques qui situeront notre sujet
-l'intolérance face à la skysolidarité dans la
globalité de l'émission.
Ce travail permettra notamment de dessiner un squelette des
grands axes de l'expression à l'antenne des interventions des auditeurs
et d'imaginer une représentation graphique qui figurera le
positionnement de l'auditeur-individu
dans la galaxie des rapports sociaux qu'on le voit entretenir
selon les thèmes récurrents à l'antenne.
Nous justifierons la pertinence de notre sujet dans -ou
plutôt selon- ce schéma, en situant ses champs d'action.
L'annexe recense les thèmes abordés par les
auditeurs dans l'émission Radio libre, soit les soucis auxquels
ils sont confrontés, et résume les réponses
apportées par l'équipe et les auditeurs eux-mêmes.
Elle se lit comme suit :
- La première colonne date le jour de diffusion ;
- la seconde et la troisième les heures de début
et de fin de la séquence (le traitement du problème de
l'auditeur) ;
- la quatrième jette une idée large de la
thématique (sans ambition catégorielle dans sa rédaction
a priori) ;
- la cinquième libelle un intitulé du
problème de l'auditeur ;
- la sixième énumère les principales
interventions de l'équipe de l'émission pour résoudre le
problème de l'auditeur primo appelant ;
- la septième résume les principales interventions
des auditeurs à propos du problème de l'auditeur primo
appelant.
Un second corpus sera restreint à une période
plus courte et à une sélection de séquences concernant
notre sujet. Cette sélection se fera sur des critères de
représentativité selon nos statistiques ainsi que,
qualitativement, selon des critères d'appréciation de
l'importance du traitement du problème de l'auditeur. C'est de ce corpus
restreint que nous allons analyser le contenu et sur lequel il va s'agir de
théoriser sur le fonctionnement de l'émission.
Premiers traitements : contextualisation de notre
sujet
D'après les notes prises sur le conducteur des
thématiques de la skysolidarité, sur l'année
2004/2005, nous pouvons relever le traitement de 798 cas. 29 cas ont pour sujet
l'intolérance (tableau 1).
Si nous réduisons notre corpus à la période
septembre/décembre 2004, nous dénombrons 326 cas traités
et 12 thématiques ayant pour sujet l'intolérance.
La proportion est respectée (environ 4% de l'ensemble
des cas traités dans l'année sur la période
septembre/décembre 2004) et le tableau ci-après nous apprend que
la variété des cas recensés s'agissant des sujets qui nous
intéressent reste représentative si l'on se limite à
travailler sur le corpus restreint de septembre à décembre
2004.
Le tableau qui suit, mieux que de longues explications, donne
une vision générale du sujet « intolérance »
dans l'émission sur la saison 2004/05 et répertorie leurs
intitulés.
(Voir tableau 1 page suivante)
TABLEAU 1 / Occurrences mensuelles et intitulés
des sujets " intolérance »1
Exemple de lecture : " Au mois de septembre 2004, 2 sujets sur
70 portaient sur l'intolérance : `'mon père n'aime pas mon copain
parce qu'il est noir'' et `'mes parents ref usent mon homosexualité et
veulent que je devienne hétérosexuel'' ».
Mois
|
|
|
|
|
Intitulés des sujets " intolérance »
(d'après les libellés de la prise de note en
annexe)
|
Septembre 2004
|
|
70
|
|
2
|
" Mon père n'aime pas mon copain car il est noir »
" Mes parents refusent mon homosexualité et veulent que je
devienne hétérosexuel »
|
Octobre 2004
|
|
79
|
|
4
|
" Je suis handicapé, je ne comprends pas que l'on puisse
m'aimer »
" Je suis moqué pour mon look banlieue et ma petite taille
» " La famille de mon copain ne m'accepte pas car je le vois chez moi
» (motif religieux, Islam)
" Je suis homosexuel, mes parents sont homophobes »
|
Novembre 2004
|
|
1 02
|
|
4
|
" Les parents n'acceptent pas le petit ami maghrébin
» " Vexé que ce soit un transsexuel, j'ai été violent
»
" Je suis tombé amoureux de ma cousine, problème
pour la famille »
" Une fille s'incruste dans notre groupe et nous saoule »
|
Dé cembre 2004
|
|
75
|
|
2
|
" Ma famille (musulmane) n'accepte pas que je sois enceinte, je
me retrouve à la rue »
" Ma mère ne supporte pas que je sorte avec un Kabyle
»
|
Janvier 2005
|
|
99
|
|
3
|
" Ma famille est gênée que je sorte avec ma cousine
éloignée »
" Bisexuelle, j'ai tenté des caresses sur ma meilleure
amie, qui n'a pas supporté »
" Mon lycée (catholique) m'a réprimé pour
avoir un CD de Marilyn Manson »
|
Fé vrier 2005
|
|
81
|
|
3
|
" Ma copine est retenue par sa famille musulmane qui me rejette
et qui a trouvé une lettre de moi »
" Mon prof de philosophie me saque après que je suis sorti
avec sa fille »
" Mes parents ne me laissent pas sortir »
|
Mars 2005
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87
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3
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" J'ai 18 ans, lui 43, comment annoncer à ma mère
que nous allons vivre ensemble ? »
" J'ai fait mon coming-out, j'aimerais que mon mec le fasse aussi
»
" Le mec de mon meilleur ami serait écarté de la
gendarmerie à cause de son homosexualité »
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Avril 2005
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64
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2
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" Je n'aime pas que mon pote s'effémine et se mette
à me draguer »
" La mère de ma copine ne veut plus que je la vois depuis
que sa petite soeur s'est jetée sur moi »
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Mai 2005
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79
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5
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" Mes parents musulmans n'accepteront jamais mon amour pour un
chrétien »
" J'ai dormi avec mon pote homo qui m'a dit que, saouls, nous
avions fait l'amour »
" Mon père n'accepte pas mon homosexualité
»
" Jalouse de moi, la mère de mon ex m'insulte, elle l'a
pris en otage en Algérie en prenant ses papiers »
" Le père de ma copine ne m'accepte pas »
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Juin 2005
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62
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1
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" Ma famille n'aime pas ma copine »
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Saison 2004/05
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=
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798
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=
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29
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1 Les lignes bleutées délimitent ce qui sera notre
corpus restreint
Nous retenons donc, à cette étape de
l'étude, les intitulés suivants, entendus sur la période
septembre/décembre 2004, qui apparaissent en surbrillance dans le
tableau 1 :
« Mon père n'aime pas mon copain car il est noir
»
« Mes parents refusent mon homosexualité et veulent
que je devienne hétérosexuel »
« Je suis handicapé, je ne comprends pas que l'on
puisse m'aimer » « Je suis moqué pour mon look banlieue et ma
petite taille »
« La famille de mon copain ne m'accepte pas car je le vois
chez moi » (motif religieux, Islam)
« Je suis homosexuel, mes parents sont homophobes »
« Les parents n'acceptent pas le petit ami maghrébin
»
« Vexé que ce soit un transsexuel, j'ai
été violent »
« Je suis tombé amoureux de ma cousine,
problème pour la famille » « Une fille s'incruste dans notre
groupe et nous saoule »
« Ma famille (musulmane) n'accepte pas que je sois enceinte,
je me retrouve à la rue »
« Ma mère ne supporte pas que je sorte avec un Kabyle
»
Appliquée à notre schéma 1, cette
sélection peut révéler la place de chaque acteur social en
tant que vecteur d'intolérance. En répertoriant pour chacun
d'entre eux une occurrence à chaque implication, on obtient les
résultats suivants :
(Voir schéma 2 page suivante)
SCHEMA 2 / dispersion, par acteur social, de l'origine des
intolérance ressenties par les auditeurs, dans notre corpus restreint
(septembre/décembre 2004)
Exemple de lecture : « Dans notre corpus restreint, la
famille est l'origine la plus fréquente de l'intolérance
ressentie par les auditeurs (9 occurrences) ».
Administrations
(Ecole, police, entreprise...)
0
Amitiés 2
Individu 2
Amours 0
Famille 8
Ce schéma a pour principal mérite de situer les
acteurs au départ du sentiment d'intolérance de l'auditeur.
Ainsi, on voit que, dans notre corpus, la famille est le lieu où
l'auditeur est le plus victime d'intolérance.
D'autres catégorisations de cette sélection sont
possibles. Ainsi, on peut, par exemple, opérer un enregistrement par
thèmes selon un classement par « familles », ou types
d'intolérance. Dans ce cas, nous relèverons l'apparition
évidente de catégories importantes :
1/ racisme
? « Mon père n'aime pas mon copain car il est noir
»
? « Les parents n'acceptent pas le petit ami
maghrébin »
? « Ma mère ne supporte pas que je sorte avec un
Kabyle »
2/ homophobie
> « Mes parents refusent mon homosexualité et
veulent que je devienne hétérosexuel »
> « Je suis homosexuel, mes parents sont homophobes
»
> et par proximité « vexé que ce soit un
transsexuel, j'ai été violent »
3/ intolérance du fait de la religion, de la tradition
> « La famille de mon copain ne m'accepte pas car je le
vois chez moi » (motif religieux, Islam)
> « Ma famille (musulmane) n'accepte pas que je sois
enceinte, je me retrouve à la rue »
Selon les principes d'exhaustivité exposés par
Laurence Bardin1, nous nous trouvons, dans ce cas avec une case
« divers », où figurent les sujets isolés tels que
« Je suis moqué pour mon look et ma petite taille » ; «
Une fille s'incruste dans notre groupe et nous saoule » ...
Nous ajouterons toutefois qu'il s'agit là des sujets
les moins lourds (voire de sujets accessoires) de notre corpus. La redondance
des trois grands types d'intolérance que nous venons de définir
signifie donc certainement quelque chose et nous concentrer sur celles-ci
rendra notre propos plus pertinent en évitant la dispersion et la
généralisation de matières trop différentes. Les
graves intolérances que nous retenons ont pour point commun de
déclancher des malaises véritablement profonds, portant atteinte
à l'identité de l'individu (le plus souvent, nous le verrons, en
opposition aux acceptions des parents). En portant notre étude sur ces
huit sujets regroupés en trois grandes catégories (racisme,
homophobie, intolérance du fait de la religion/tradition) notre analyse
trouvera une cohérence.
1 Laurence Bardin, op cit.
Il peut ainsi être intéressant de travailler
selon une entrée par « identités ». On notera alors des
figures vectrices et/ou destinataires d'intolérance (identités
ethnique, religieuse, sexuelle) : la famille semble être la
première source de malaise pour certains auditeurs quand à leur
identité ou leurs choix amoureux.
Nous analyserons ainsi le discours qui se crée sur
l'antenne de Skyrock, chaque soir dans Radio libre, selon les
significations des propos traitant le malaise d'auditeurs dont les parents
n'acceptent la situation (identité ethnique de l'amoureux(se),
identité sexuelle du fils ou de la fille, situation contraire à
des principes ou des idées très traditionalistes).
Une séquence atypique, celle où l'auditeur
s'expose non en tant que victime mais en agresseur (« vexé que ce
soit un transsexuel, j'ai été violent », homophobie, sujet
3) nous permettra d'éprouver notre analyse dans une situation
différente - l'auditeur appelant est cette fois-ci l'«
intolérant ». Si cette séquence est une intolérance
du fait de l'identité sexuelle (même si elle s'éloigne
quelque peu de l'intitulé « homophobie »), elle reste à
la marge de la cohérence apportée par le reste du corpus, et en
restera à la marge. Le processus de construction du discours se
différencie de la cohérence formée par les autres. Ce
sujet sera complémentaire pour confronter, dans une sorte de situation
inverse, les valeurs qui gouvernent le discours.
L'analyse du discours
L'analyse du discours ne résulte pas d'un acte
fondateur mais d'une convergence de courants récents et du
renouvellement de pratique d'étude de textes -parfois très
anciens1. Selon Charaudeau et Maingueneau, c'est dans les
années 60 que l'analyse du discours établira son champ,
façonnée par des disciplines comme l'ethnographie de la
communication, l'ethnométhodologie, l'analyse
1 Patrick Charaudeau et Dominique Maingueneau (dir.),
Dictionnaire de l'analyse du discours, Paris, Seuil, 2002, p.41.
conversationnelle et des courants pragmatiques, théories
de l'énonciation et linguistique textuelle.
L'analyse du discours opérera des relations entre texte
et contexte, en étudiant le langage, l'interaction conversationnelle
dans un cadre social particulier. Dominique Maingueneau définit ainsi
l'analyse du discours comme discipline proposant de « penser le dispositif
d'énonciation qui lie une organisation textuelle et un lieu social
déterminés »1. Notre étude visera ainsi
à réfléchir sur le discours établi dans Radio
libre en conscience du média (une radio jeune « multicolore
» très écoutée dans les banlieues), du lieu et du
moment d'écoute de ses auditeurs (le soir, isolé, « sur
l'oreiller » selon le terme de Glévarec)2 et des
sphères sociales dans lesquelles évoluent ces derniers, en
relation avec leurs préoccupations.
Nous allons ainsi porter notre analyse sur le traitement, par
la solidarité promise dans Radio libre, de l'intolérance
telle que nous l'avons définie précédemment. Il s'agira de
regarder comment s'exerce la solidarité à l'antenne, selon des
données précises. La retranscription à l'écrit de
nombreux passages des 12 sujets que nous avons retenus en sera une base solide.
Qu'est-ce qui est dit ? Quel est le ton ? Comment apprécier la
réception ? Peut-on trouver des valeurs qui lieraient les auditeurs
à l'émission ou plutôt ses animateurs ?
Notre analyse, largement inspirée par les notions
théoriques et apportées par le travail d'amont que nous venons
d'exposer, proposera dans un premier temps de décortiquer le discours
dans les séquences sélectionnées, selon les entrées
que nous venons de proposer. Puis, nous regarderons globalement les
résultats que nous en aurons ressortis, nous les croiserons, en nous
arrêtant notamment sur les rôles de chaque interlocuteur et la
pertinence du discours.
1 Dominique Maingueneau, L'analyse du discours, Paris,
Hachette, 1997, p.13.
2 Hervé Glévarec, Libre antenne, Paris,
Ina-Armand Colin, coll. Médiacultures, 2005, 301 pages.
Nous ne manquerons pas de faire appel aux différents
outils des sciences de l'information et de la communication que nous avons
rappelés, ainsi que d'autres concepts ou figures que nous jugerons
opportuns.
En outre, nous nous attacherons à mettre en perspective
nos observations dans les problématiques sociétales dont il sera
question.
Seconde Partie
--- Ecouter et écrire le discours
radiophonique
Analyser des séquences radiophoniques
Il ne faut pas perdre de vue le caractère fondamental
de notre corpus : l'oralité. Nous nous intéressons ici à
des conversations radiophoniques entre les animateurs d'une émission et
certains de ses auditeurs, qui endossent pour l'occasion la
responsabilité de co-constructeurs directs du discours
élaboré à l'antenne.
L'analyse conversationnelle à laquelle nous allons
procéder demande que nous en proposions ici quelques fondements que nous
compléterons de caractéristiques de notre approche pratique.
L'analyse conversationnelle
Les informations échangées dans la conversation
sont, pour Christian Baylon1, de trois natures :
- cognitive (contenu des signes linguistiques
échangés) ;
- indicielle (qui portent sur le locuteur dans le but de
définir et de contrôler le rôle qu'il joue durant la
conversation) ;
- injonctive (échangée par les participants pour
faire progresser la conversation, varier les locuteurs, aboutir à un
résultat).
Les moyens de communication de la conversation orale (ou
comportements) sont à considérer dans leur ensemble.
Appliqué à notre cas, nous distinguerons ainsi :
- les moyens linguistiques à proprement
parler (manifestation vocale : expressions singulières...) ;
1 Christian Baylon, Sociolinguistique,
société, langue et discours, Paris, Nathan
Université, 1996, p. 201 et suivantes.
- les moyens paralinguistiques (non-verbal :
ton de la voix, intonation, rythme... plus ou moins conscients, compris par les
membres d'une même culture1, et, il est vrai, peu perceptibles
dans une retranscription écrite) ;
- les moyens extralinguistiques (qui
échappent au contrôle du locuteur dans la conversation (ici
nécessairement vocal : la qualité de la voix, apporte des
renseignements biologiques, psychologiques ou sociaux sur le locuteur).
Nous devrons garder à l'esprit le contexte de la
conversation, soit ce que nous avons défini comme une libre antenne sur
une radio jeune de culture multicolore, largement écoutée dans
les grandes villes et leurs périphéries. Un contexte qui est
aussi du côté de l'auditeur lui-même (potentiellement
participant) celui qu'a peint Hervé Glévarec2, une
radio écoutée essentiellement seul, sur l'oreiller, par un
auditorat en demande de partage des expériences adolescentes.
La conversation est également à mettre en
relation avec un projet d'interaction sociale. Outre l'évidente et
nécessaire coordination de la langue, George Herbert Mead3
pointe du doigt que l'identité est construite par et à travers
l'interaction sociale. Plus que l'influence du langage, il s'agit donc aussi de
celle des codes et des comportements. Un concept d'interaction que nous
retrouverons chez Goffman, il n'est pas de « moi » mais des sois
différents selon nos interactions avec nos amis, y compris ceux qui sont
de passage, à la radio. L'image que l'on (se) donne, le comportement que
l'on adopte, les codes que nous utilisons (syntaxiques, lexicaux,
intonatifs...) dépendent des interactions que nous formons avec
l'ensemble des interlocuteurs avec qui l'on co-construit non seulement un
discours, mais aussi sa propre opinion, son imaginaire, son personnage, sa
personnalité, son identité.
1 Christian Baylon, op. cit., p. 203
2 Hervé Glévarec, op cit, 2005.
3 George Herbert, Mead, Mind, self and society,
University of Chicago press, 1962.
Ecrire l'oral
Partant de ces observations et de nos premières analyses,
comment envisager une analyse conversationnelle ?
A proprement parler, les retranscriptions que nous allons
présenter, n'ont qu'une représentativité limitée de
la conversation radiophonique. Elle est dépouillée des signes non
verbaux, même si nous tacherons d'en laisser apparaître certains.
Ainsi, des didascalies peuvent donner un indice du ton de la...
réplique. Ailleurs, des points de suspension, lorsqu'ils ne sont pas
entre crochets, ne signifient pas une coupure dans la retranscription mais
marquent les hésitations présentes dans l'oralité
originelle. En outre, les « euh », « t'as vu », « tu
sais », « tu vois » ou autres coupures de parole
matérialisées par les points de suspension d'une phrase non finie
sont des marqueurs d'un langage oral exprimant ses codes, ses significations
sociales, les propriétés de l'espace radiophonique dans lequel il
évolue. Ils ont une fonction phatique, ils servent à entretenir
le contact interlocutif, selon Jakobson.
Le passage de l'oral à l'écrit, s'il est
commode, demeure toujours approximatif et suppose parfois des
subjectivités infidèles tant le projet de retranscrire les signes
non verbaux en ponctuation est ardu, et lui-même empreint de la
subjectivité et de la capacité du dactylographe. Nous n'abuserons
donc pas avec certitude de la perception des tonalités dans la
conversation et le lecteur pourra confronter à ce propos le regard de
l'auteur avec le sien à l'écoute des bandes (disons plutôt
des mp3) des séquences qui nous intéressent ici.
Enfin, combinée aux différentes sciences de
l'information et de la communication que nous avons appréhendées
en première partie, l'ethnométhodologie sera un dernier
allié à superposer sur notre approche. Notre projet est
d'accorder un intérêt à la construction locale du discours,
sur l'antenne que nous avons définie, dans un cadre d'échange
singulier, pour comprendre pas à pas, les détails constitutifs de
la conversation, intentions des locuteurs et normes sociales, pour
comprendre la distribution de la parole, les statuts des
co-constructeurs, la pertinence du discours ainsi élaboré.
Notre propos portant sur l'analyse de la
skysolidarité en tant que tel, nous nous emploierons à
distinguer des phases dans la conversation, afin d'en tirer quelques
conclusions. Nous porterons ensuite notre regard sur les échanges
conversationnels pour en décortiquer le discours notamment afin de
déterminer les valeurs qui gouvernent cette
skysolidarité.
Le processus de skysolidarité
Vouloir comprendre le fonctionnement d'un processus discursif
nécessite pour notre tâche une retranscription écrite des
séquences sur lesquelles nous voulons travailler.
Ce travail, s'il est fastidieux, permettra néanmoins,
à l'inverse des séquences audio, un témoignage de
l'interrogation que nous voulons faire du corpus. Il sera un outil plus
maniable pour le travail d'étude, de prise de note, et manié pour
laisser apparaître les traces d'une première analyse (où
nous noterons au fur et à mesure nos observations de découpage
des grandes phases du processus, par exemple : « exposé et
évaluation du problème de l'auditeur », «
témoignage d'un auditeur »...) ; et qui, dans un second temps,
servira de corpus référentiel complémentaire, plus commode
pour l'occurrence, que les bandes son.
Il va s'agir de retranscrire à l'écrit les
conversations des séquences de notre corpus. Nous procèderons en
nommant tout d'abord chacune des séquences et en
référençant son jour et son heure de diffusion. Puis, nous
retranscrirons le dialogue à proprement parler en
précédant chaque intervention du nom de son auteur. Certains
passages, hors sujets, seront coupés, matérialisés par des
points de suspension ou une brève exposition de ce qui vient couper la
séquence, toujours entre crochets. L'usage des points de suspension,
sans crochets, dans la retranscription de la conversation ne signifie ainsi pas
une
interruption mais veut matérialiser une intonation de
la voix (hésitation...) ou le fait que la parole a été
coupée par l'interlocuteur suivant. D'autres signes de l'oralité
seront matérialisés, notamment par des didascalies, entre
parenthèses après le nom de l'interlocuteur, par exemple pour
exprimer son ton ou son attitude. Le souhait de ces procédés est
de conserver une proximité des plus fidèles avec la conversation
et son caractère oral dont tous les paramètres ne peuvent pas
apparaître à l'écrit. Nous devrons ainsi parfois avoir un
second recours à l'écoute des bandes son pour préciser un
propos. Par ailleurs, lorsque besoin sera, nous pourrons aussi contextualiser
les séquences en quelques lignes.
Afin de rendre possible la citation et la
référence, nous aurons ainsi pris soin de numéroter chaque
intervention de chaque séquence, afin de pouvoir y faire
référence selon le découpage à suivre (par exemple
: « à l'intervention 108 du cas 1 des sujets concernant le racisme,
nous pouvons noter... »). La référence citationnelle oblige
à cet exercice af in de rendre compte de façon rigoureuse et
vérifiable de l'exactitude du propos qui suivra dans l'étude. La
numérotation s'appliquera pour chaque intervention et non chaque ligne
pour rendre plus pertinents et commodes l'usage et la lecture de la
citation.
Ainsi, voici ces retranscriptions, pour les trois
catégories des huit sujets de notre corpus, séquences
après séquences, annotées de titres (en majuscule et en
gras) pour mettre en évidence les grandes phases communes à
chacune d'elles. Leurs libellés sont ceux-ci :
- exposé et évaluation du problème de
l'auditeur (ou de l'auditrice) appelant ;
- témoignage d'un, d'une ou de plusieurs membres de
l'équipe ;
- témoignage fictionnel1 d'un, d'une ou de
plusieurs membres de l'équipe ;
- témoignages d'auditeurs ou d'auditrices par messages
(SMS et internet) et points de vue de l'équipe ;
1 Par << fictionnel >>, on entendra << qui
s'imagine en situation sans l'avoir connue >>.
- témoignages d'auditeurs ou d'auditrices à
l'antenne1 et points de vue de l'équipe ;
- conclusions (et éventuellement perspectives)
Chaque intervention a été
numérotée (en marge gauche) de 1 à XXX pour chacune des
séquences. En repartant de zéro à chaque séquence
pour rendre compte du volume de chacune d'elle, respecter leurs
caractères propres et permettre leur utilisation individuelle.
Nous commencerons par les séquences ayant trait au
racisme, puis à l'homophobie et enfin, les intolérances du fait
de la religion/tradition. Cette disposition permet de respecter l'ordre de la
dominance de ces catégories, en commençant par la plus importante
(3 sujets).
1 C'est à dire par téléphone, en direct.
Retranscriptions des séquences des trois grandes
catégories du corpus
Le racisme
Trois sujets de notre corpus de huit concernent directement la
forme la plus flagrante d'intolérance : le racisme. Comme nous le ferons
pour l'homophobie et l'intolérance du fait de la religion/tradition,
nous allons analyser le dialogue diffusé à l'antenne
d'après la retranscription des séquences.
Racisme / cas N°1 / 03 septembre 2004 « Mon père
n'aime pas mon copain car il est noir » / séquence diffusée
entre 22h26 et 23h26 :
EXPOSE ET EVALUATION DU PROBLEME DE L'AUDITRICE
APPELLANT
1. Difool : Alors, qu'est-ce qui t'arrive, Séréna,
toi ?
2. Séréna : Ben, en fait, j'ai un gros souci avec
mon père...
3. Difool : Hum.
4. Séréna : ...entre mon père et mon
copain, en fait.
5. Difool : Ah, ils s'aiment pas ?
6. Séréna : Ben, c'est que mon copain, il est
renoi, tu vois...
7. Difool (imitant le père) : << Oui, j'aime pas,
oui, alors là... >>
8. Marie (imitant le père) : << Ah, bah il est
bronzé, hein... ah, bah oui, il est trop cramé, hein...
>>
9. Difool : C'est ça, non ? Il est raciste, un peu, ton
père ?
10. Séréna : C'est un peu ça, ouais.
11. Difool (dégoût) : Oh...
12. Séréna : Je suis désolé, je
parle doucement, là, parce que il y a ma belle-mère à
côté, là, et si elle m' entend...
13. Difool : Et elle, elle en pense quoi, la belle-mère
?
14. Séréna : Ben, c'est un peu le même
genre, en fait.
15. Difool : Mais pourquoi ils réagissent comme ça
? Parce qu'on est en 2004, ça va, tu vois...
16. Séréna : J'en ai absolument aucune
idée, quoi, je sais pas, j'ai appris ça depuis que je sortais
avec lui, tu vois...
17. Difool : Mais t'avais jamais remarqué avant qu'ils
étaient un peu ?
18. Séréna : Mais non, j'avais jamais
remarqué avant, c'est ça le pire.
19. Difool : Ah oui, ils avaient pas des discours un peu, genre
tu vois ils regardent la télé...
20. Séréna : Mais non, pas du tout, c'est
ça le pire, jamais.
21. Marie : Mais comment t'es sûre que c'est sa couleur et
que c'est pas par exemple ce qu'il fait, genre il fous rien, il aime pas son
attitude, ou tu vois...
22. Difool : Oui ?
23. Séréna : Non, je pense pas tu vois parce
que...
24. Marie : Non mais tu sais pas, il te l'as pas dit
directement, donc tu sais pas, t'es pas sûre que ce soit ça. 25.
Séréna : Non, il me l'a pas dit directement, t'as vu, mais
franchement, tu vois, j'te dis, bon, mon mec il est venu manger à la
maison. Et euh... et mon père il s'est cassé au milieu du repas,
tu vois.
26. Marie : Ah, sympa... (rires)
27. Séréna : Non, mais tu vois...
28. Romano (ironie) : Ton copain, il a dû être bien
à l'aise...
29. Difool (ironie) : Ah, oui, génial... tu vas manger
chez ta meuf, t'as le père qui se barre sans rien dire (rires de
Marie).
30. Marie : C'est horrible !
31. Séréna : J'étais trop mal à
l'aise et puis après, mon mec, il savait pas trop où se mettre,
quoi.
32. Romano : Bah, tu m'étonnes, moi je serai parti, je
pense.
33. Marie : Ohhh...
34. Difool : Non, et puis là, Séréna elle
fait une déprime, quoi... le père qui se barre, le copain qui
part en courant, tu reste toute seule à table... (imitant l'auditrice)
<< Bah oui, bah je vais manger le gigot >>.
35. Romano : Voilà, le bon repas.
36. Séréna : Non mais c'était un grand
moment de solitude, là, quand-même.
37. Difool : Mais elle a peut être raison, la Marie, tu
vois, s'il a jamais eu de propos...
38. Séréna : Ben, en fait, il m'a... en fait il
est parti, et il est revenu le lendemain matin et j 'ai piqué ma crise,
quoi.
39. Difool : Tu leur as dit ?
40. Séréna : Je leur ai dit, franchement,
c'était trop important pour moi, qu'est-ce que t'as foutu, tout
ça... Il m' a fait << franchement, j 'ai vu sa tête et j
'avais pas envie de le connaître et tout >>. Je lui fais <<
ça veut dire quoi ça ? >>, et voilà...
41. Marie : Il se sape comment ton mec, déjà ?
42. Séréna : Ben, c'est genre, je sais pas, il
était habillé classe, là, en plus, il avait un jean...
43. Difool (imitant le père) : << Oui, mais je veux
qu'il vienne en costume >> (rires Marie). << Oui, quand il vient
à ma table, en costume >>.
44. Romano (imitant le père) : << Il n'avait pas la
cravate ! >>
45. Marie : Parce que tu vois, ça peut être aussi
la dégaine, quoi, s'il se tenait mal ou machin... ça peut
être ça aussi, quoi.
46. Séréna : Non, non, pas du tout, au contraire,
il était hyper clean, tu vois, franchement il a bien assuré.
47. Romano : Ouais, et puis franchement, la première fois
que tu vas dîner chez les parents de ta meuf, t'essaies de pas roter
à table, des trucs comme ça.
TEMOIGNAGE D'UN MEMBRE DE L'EQUIPE
48. Difool (à Romano) : Même toi ?
49. Romano : Bah j'essaie de me retenir...
50. Difool : Est-ce que tu as déjà
été mal à l'aise quand tu étais en repas avec...
51. Marie : Tes beaux-parents ?
52. Difool : Ouais, enfin ceux-ci ou d'autres avant, hein ?
53. Romano : Mal à l'aise ? Non, bah, non, hein... Moi
ça se passait...
54. Difool : Même avec tes ex ?
55. Romano : Bah si, moi ça se passait, bon (rires
Marie)
56. Difool : Romano a une vie sentimentale un petit peu
agitée, il a connu des personnes diverses et variées, je vous
parlais régulièrement de cette Marseillaise qu'il a
rencontrée...
57. Romano : Ouais, mais c'est pas... Les parents, je les ai pas
connus.
58. Marie : T'as pas eu le temps ?
59. Romano : J'ai pas eu le temps. Non mais par contre, je suis
tombé avec une meuf, et bon, la mère, elle avait des
problèmes psychologiques aggravés (rires Marie) et par contre par
moments j'assistais aux scènes de ménage des parents, c'est
horrible, tu vois, moi je me barrais de table...
60. Difool : Ah, ouis, une scène de ménage des
beaux parents...
61. Séréna : Ah, c'est chaud...
62. Romano : [Il raconte l'anecdote, sa gêne]
63. Séréna : Moi je m'imaginais à la place
de mon mec, il a dû se sentir trop mal. On n'en a pas trop parlé
après, en fait...
64. Romano : Non, mais il a dû être mal aussi pour
toi, il a dû se dire << ouais, vas-y... >>
65. Séréna : J'avais trop honte, franchement j
`avais trop honte, je me suis sentie trop mal, c'était horrible,
c'était vraiment horrible. En plus c'était vachement important
pour moi...
66. Difool : Bah oui ! C'est la première fois que tu
présentais ton mec que t'aimes à tes parents que t'aimes aussi,
donc...
67. Séréna : Mais ouais ! voilà.
68. Romano : Et le daron, il se barre (imitant le père)
<< oui, finalement, j'ai plus faim >> (rires)
69. Séréna : Surtout qu'il s'est cassé
comme ça, quoi, sans... le dire, quoi.
TEMOIGNAGES D'AUDITEURS PAR MESSAGES (SMS ET INTERNET) ET
POINTS DE VUE DE L'EQUIPE
70. Difool : Alors, il y a des messages, pour toi : Titus qui
dit << mon père est pareil, rappelez-moi >> on va te
rappeler, Titus. Euh... sinon, on a Yann qui nous dit << dis à ton
père que c'est un bâtard >> (rires) on peut pas dire
ça à son père il va mal le prendre.
71. Romano : Oui, et puis ça va pas arranger la
situation.
72. Séréna : Ca va pas m'aider.
73. Difool : Je pense que ça peut même empirer,
là, un petit peu.
74. Séréna : Oui, il y a des chances, là,
j'avoue...
75. Difool : Sinon, OCB59, là 19 ans, dans le Nord, qui
dit << il faut en parler avec tes parents, tranquillement, et il te
comprendront >>. Non, t'es moins convaincue, Séréna...
76. Séréna : Non, là, franchement pas du
tout !
77. Romano : Mais t'es persuadée que c'est parce qu'il
est black, parce que tu vois...
78. Séréna : Ouais, je vois vraiment pas ce que
ça pourrait être d'autre, en fait.
79. Romano : A la limite, demandes-lui...
80. Difool : << T'es raciste >>...
81. Séréna : Oh, là...
82. Difool : Tu vas voir sa réaction au moins,
voilà. Si tu penses que c'est ça, ça veut dire qu'il y a
une pointe de racisme quand même, quand tu réagis comme
ça.
83. Séréna : Ouais, ouais...
84. Difool : Pose-lui la question, tu verras : << Le Pen,
c'est ton pote ? >> (rires)
85. Séréna : Non, non, mais mon père il le
connaissait pas mon copain, c'était un bon pote à moi avant
mais...
86. Romano : Tu leur en avais parlé avant que tu sortais
avec lui, tout ça...
87. Séréna : Ouais, ouais, je leur en avais
parlé, tu vois, mais...
88. Romano : Et à ce moment là, ils avaient rien
dit ?
89. Séréna : Non, ils avaient rien dit parce
qu'ils savaient pas qu'il était black.
90. Difool : Ah ouais, donc toi tu penses vraiment que c'est
quand ils l'ont vu que ça a posé un problème. Eh bien
c'est bien triste, ça. << Alors moi c'était pareil, en plus
le père était gendarme... >>, c'est quelqu'un qui a
vécu la situation de ton mec, là, c'est Puccini qui vient de nous
laisser un message. Bon si ça vous est déjà arrivé,
pour des raisons...
91. Séréna : Franchement, aidez-moi ! C'est tendu
en ce moment.
92. Difool : ...pour n'importe quelle raison [...] si votre
copine vous a présenté à ses parents et que ça
s'est passé moyen
93. Romano : Voire mal.
94. Difool : Voire très mal.
95. Séréna : Je fais appel à tous les
auditeurs parce qu'il faut vraiment que je trouve une solution...
96. Difool : Et ton gars, comment il a réagi, parce que
pour lui, ça devait être abominable ?
97. Séréna : Ouais... franchement ouais, mais on
en a pas trop parlé...
98. Romano : Mais il veut plus remettre les pieds chez toi, non
?
99. Séréna : Ben non, là c'est...
100. Difool : Il a raison.
101. Romano : Oui, c'est normal aussi.
102. Séréna : Il a plus trop envie, quoi.
103. Difool : Oui, on va éviter. Et du côté
de ses parents à lui, il n'y a pas de soucis ?
104. Séréna : Ben, en fait, je les ai pas encore
rencontrés, eux.
105. Difool : Ah !
106. Séréna : Mais apparemment, il n'y a pas de
problème. Il leur a dit que j'étais pas black, et apparemment, il
n'y a pas de soucis.
107. Difool : Tiens, regarde, il y a Ganéa, 16 ans du
côté de Rennes, qui nous dit << mon père est raciste,
j'ai été obligé de quitter ma copine sinon il me foutait
à la porte >>
108. Séréna : Oh, c'est horrible...
109. Difool : Dans ces cas-là, tu as qu'à sortir
avec la meuf et tu lui dis rien.
1 10. Séréna : Ouais, mais franchement, t'as la
pression derrière.
111. Difool : Oui, mais bon, tu vis ta vie.
1 12. Séréna : Ah ouais ouais ouais, mais quand tu
es encore chez tes parents, je peux te dire, c'est chaud, quoi, moi je vois
franchement, avec mes parents, c'est tendu, quoi, c'est chaud, et choisir entre
son mec et ses parents, c'est...
1 13. Difool : Non mais pour des raisons comme ça, tu
vois, tu as aussi le droit de faire la gueule à ton père, parce
que c'est vraiment... si c'est la réaction que tu imagines...
114. Romano : C'est débile...
1 15. Difool : Même si c'est ton père, c'est mieux
pour lui d'être un petit peu plus tolérant parce qu'autrement, il
va être malheureux, le gars, là.
116. Séréna : Bah ouais ouais...
1 17. Difool : Et puis il passe à côté de
plein de trucs, il se rend pas compte.
118. Séréna : Ouais (rires).
1 19. Difool : Mais c'est vrai, il se prive de plein de trucs, il
se prive de potes, de cultures différentes, d'ouverture sur le monde,
de...
120. Séréna : Ouais, mais franchement, j'te dis,
j'ai toujours pas compris pourquoi il a réagi comme ça, ça
m'a... ah, je suis restée sur le cul, là...
121. Difool : << J'ai eu le même problème
avec ma copine... >>, ben tu vois, il y en a plein là qui nous ont
laissé des messages...
122. Séréna : Je me sens moins seule.
123. Difool : C'est un peu dommage, ce serait mieux que
ça arrive un peu moins souvent, mais enfin bon, on va te filer un coup
de main. Merci à vous toutes et à vous tous, là, hein,
laissez vos numéros, appeleznous, et puis on vous retrouve en direct sur
Skyrock. Je vous donne le numéro, hein, si vous découvrez, c'est
le 01.53.40.30.20, voilà, et ça marche tous les soirs. <<
Putain, il se la pète trop son père, de quel droit il fait
ça ? >> Chidi, là, qui nous laisse un message de Paris.
[Passage sur l'anecdote sur Romano et son ex marseillaise]
124. Difool : On attend vos témoignages pour filer un
coup de main à Séréna...
125. Séréna : Ah, oui, aidez-moi, parce que
là... j'ai parlé à trop de gens, j'ai été
parler à l'assistante sociale...
126. Difool : Qu'est-ce qu'elle t'as dit, l'assistante sociale
?
127. Séréna : Elle m'a rien dit, franchement, elle
m'a pas aidée, elle a servi à rien, elle m'a dit << oui, il
faut favoriser le dialogue avec les parents... >> (rires)
128. Romano (ironique) : Ouais, c'est super comme conseil,
ça.
129. Difool : C'est ta vie privée, ta vie privée
tu la vies, t'es pas obligée de la partager avec tes parents, hein...
130. Séréna : Ouais, c'est sûr, mais c'est
mieux, quoi...
131. Difool : Je sais pas si c'est mieux...
132. Séréna : Moi je pense que si...
133. Romano : De toute façon, maintenant, tu l'as
présenté...
134. Séréna : Oui, de toute façon, c'est
fait. Quoique mon père il le connaît pas très
très...
135. Romano : Bah oui, en se barrant au milieu du repas... Mais
il se sont même pas parlé, en fait, quoi ?
136. Séréna : Ah, non, ils se sont serrés
la main, bonjour, et puis...
137. Romano : Pendant tout le repas, c'était silence,
genre t'entends les mouches voler...
138. Séréna : Ouais, en fait je parlais toute
seule...
139. Difool (dégoût) : Oh, quelle attitude de
con...
140. Romano : Ouais, ouais, débile...
141. Difool : Il faut se mettre à sa place, quand il
avait 18 ans et qu'il allait draguer ta mère (rires). Bouges pas. Allez,
vous tous en direct, on se passe la pub en speed...
[Coupure publicitaire et musicale]
[Retour antenne, annonce jeu]
142. Difool : Plein de réactions par rapport à
toi, Séréna, donc on y revient tout de suite, après les
nouvelles footballistiques, bah, écoute, il y a Moïse qui va
arriver dans un instant, il y a des messages sur le net de partout, hein, et
c'est arrivé à plein de monde ces histoires là, hein !
<< Il faut que tu poses des questions piège à ton
père pour savoir s'il est raciste >> mais quelles questions, c'est
Lasmana qui nous propose cette solution. << Demande à ta
mère >>, << Essaie de lui faire connaître ton pote
>>, ça va pas être facile s'il se barre à chaque
fois, hein... En résumé si vous venez d'arriver, tu as
présenté ton copain à tes parents, enfin à ta
belle-mère et à ton père, et ton père a eu une
réaction bizarre dans le repas, il s'est levé et a disparu.
143. Romano : Voilà et est revenu le lendemain matin.
144. Difool : En faisant la gueule.
145. Romano : Mais vous en avez reparlé depuis de cette
affaire, là ?
146. Séréna : Ben non, justement, c'est un peu le
sujet tabou en ce moment à la maison.
147. Difool : Et en fait, toi tu penses que c'est parce que ton
copain et renoi et que ton père aime pas trop ça, c'est ça
?
148. Séréna : Ouais, mais franchement,
j'espère que c'est pas ça, quoi, parce que...
149. Difool : Ca doit être horrible de découvrir
ses parents comme ça, hein ?
150. Séréna : Horrible, horrible !
151. Difool : Oui, surtout que toi, tu as pas eu de trucs qui
prévenaient...
152. Séréna : Ah, non, pas du tout...
153. Romano : Ouais, jamais de réflexions à la con
et tout ça... du genre à la télé (imitant un
téléspectateur raciste avec Difool) : << Regardes, ah, mais
regarde, on est envahi, hein ! >>.
154. Difool : Il a pas des tracts du Front national à la
maison, il a pas...
155. Séréna : Non, non non non non, ça,
non. C'est pour ça que ça m'a...
TEMOIGNAGE D'UN MEMBRE DE L'EQUIPE
156. Difool : C'est vrai, c'est bizarre. Bon alors, reste
là, Moïse arrive, Momo, tu as quelque chose à dire à
ce propos avant de passer aux nouvelles journalistiques ?
157. Momo : Je la soutiens à mort !
158. Séréna : Merci Momo.
159. Difool : Ca t'es déjà arrivé, Momo
?
160. Momo : Moi c'est pire, genre comme t'as dit il y a deux
minutes.
161. Difool : Ils disent ça, les parents de ta meuf ?
162. Momo : Ils croient que je m'appelle Maurice, parce que Momo
égal Maurice pour lui, quoi.
163. Romano : Oh, Maurice !
164. Difool : Ah ouais...
165. Séréna : Oh, mais quelle horreur !
166. Romano : Ouais, en fait t'es obligé de te cacher,
quoi.
167. Difool : Il y a un truc qui est génial dans
l'histoire, c'est que la fille est avec toi, c'est plutôt sympa, quoi.
168. Momo : Ca va, je m'entends bien avec elle, quoi, mais en
gros, il lui a dit carrément une fois << si tu me ramènes
un Arabe, je me suicide >>, en gros.
169. Difool (sur le ton de la blague) : Vas te montrer, Momo :
<< Ouh-ouh, je suis le copain, c'est moi ! Je m'appelle Mohamed !
>>
170. Momo : Là c'est fini...
171. Difool : Et comme ça, plus de problèmes.
172. Momo : Non sérieux, c'est vraiment casse-couilles de
chez casse-couilles.
173. Romano : Et ta copine, en fait elle t'appelle Maurice ?
174. Momo : Ouais, voilà (éclats de rire)
175. Difool : Ah ouais, ça doit être horrible,
c'est... ça doit être difficile à vivre. A la limite,
quelque part, ça te montre qu'elle t'aime très fort, tout
ça...
176. Momo : Ouais, voilà.
[Rubrique football]
TEMOIGNAGES D'AUDITEURS A L'ANTENNE ET POINTS DE VUE DE
L'EQUIPE
177. Difool : Bon, allez, on va s'occuper de
Séréna, là tout de suite, il y a Moïse qui est avec
nous, il est de La Roche-sur-Yon, Salut Moïse.
178. Moïse : Salut Difool, salut toute
l'équipe...
179. Difool : Ca va Moïse, bien ?
180. Moïse : Ouais, ça va, tranquille.
181. Difool : Ben écoutes, tranquille aussi, hein. Alors,
Moïse, t'appelais pour Séréna.
182. Moïse : Ouais j'appelle pour Séréna,
parce qu'il m'est arrivé la même chose...
183. Difool : Bon alors, bouge pas, il y a Sophie aussi, on va
la prendre en même temps, comme ça... Sophie, 18 ans t'habites
à Chantilly, t'es là Sophie ?
184. Sophie : Oui, je suis là. Salut à tous !
185. Marie, Momo, Romano : Salut !
186. Difool : T'appelles pour Séréna.
187. Sophie : Ouais, j'appelle pour elle parce qu'il m'est
arrivé la même chose...
188. Difool : Ben écoutez, c'est triste, mais merci
d'appeler pour Séréna. Merci pour tous les messages, regarde, il
y a Titou du 94 qui nous fait << mon père est pareil -donc un
peu... raciste, on va dire- laisse couler et vis ta vie >>. C'est vrai,
t'es pas obligée de partager ça avec tout le monde. << Ton
père est raciste, ça craint vraiment, ça doit être
dur à vivre >>, << Ou ton père est jaloux ? >>
Jaloux de ton mec, il est taré... Alors qu'est-ce qui t'es arrivé
Sophie, puisque toi, tu es une fille et que Séréna... aussi.
189. Sophie : Ben, je suis sortie avec un renoi pendant huit
mois, au début ça se passait bien, tout ça... et ma
mère elle l'a su, bon elle m'a rien dit quoi, et enfin, elle avait
plutôt peur de la réaction de mon père en fait quand il
allait apprendre que je sortais avec un renoi...
190. Difool : Oui, et elle avait raison, malheureusement.
191. Sophie : Donc voilà, elle a flippé, et puis
bon, on en a parlé, tout ça, et je lui ai dit, que bon, pour
l'instant, je sors avec lui et si vous êtes pas content, c'est pareil,
quoi. Et bon, là, elle l'a pas trop bien pris, mais bon.
192. Difool : Ouais, je trouve que c'est une bonne...
193. Romano : Ouais, c'est pas mal comme réaction.
194. Difool : Ouais, c'est pas mal, ouais.
195. Sophie : Ben voilà, quoi, et après ma
relation avec lui, elle a continué, tout ça, et puis mon
père, il l'a su peut être deux mois avant que ça se termine
avec lui, et puis en clair il m'a dit << écoute, tant mieux, c'est
bien pour toi, mais je veux pas en entendre parler, quoi >>...
196. Difool : Rhô !
197. Sophie : Donc voilà, quoi, quand je lui disais
<< je vais voir mon copain >>, c'était des réflexions
du genre << ouais, je t'ai dit de rentrer à 9h, tu rentres
à 9h >>...
198. Difool : En fait il faisait tout pour te...
199. Sophie : Ouais, il faisait tout pour me faire chier, donc
voilà.
200. Difool : Mais tu lui as dit ouvertement que tu trouvais son
attitude un peu... raciste ?
201. Sophie : Ouais, ouais, je lui ai dit.
202. Difool : Et alors, il réagit comment quand tu lui
dis ça ?
203. Sophie : Ben, je lui ai dit << je vois pas ce que
ça peut te faire, c'est ma vie >> et puis voilà, et si
ça allait pas, ça durerait pas depuis huit mois, et il m'a dit
<< ben ouais, mais bon, c'est comme ça, pas autrement >>. En
fait, je crois que c'est plutôt son père, en fait, si... enfin,
c'est bien chez les autres, mais chez soi, il vaut mieux pas, quoi.
204. Difool : T'as l'impression que c'est ça,
Séréna, toi ?
205. Séréna : Ouais, je pense, parce que moi mon
père c'était la même chose quoi, ma cousine elle sortait
avec un rebeu, il a rien dit...
206. Romano (imitant le père) : << Ah, oui,
ça me dérange pas, tant que c'est pas dans la famille !
>>
207. Difool : Ah, ouais, c'est ça...
208. Séréna : Si c'est sa fille, c'est mort,
quoi.
209. Difool : C'est terrible. Et toi, Moïse, ta story,
c'est quoi, Moïse ?
210. Moïse : Ben moi, c'est la même, sauf que moi
avant, j'avais dit à ma meuf que mes parents étaient trop cools,
trop ouverts d'esprit... sincèrement c'est ce que je pensais...
211. Difool : Toi aussi, comme Séréna, tu as
été surpris par la réaction de la famille en fait.
212. Moïse : Ah, ouais, mais grave quoi. Mais en fait
ça gênait pas ma mère, elle est trop cool, mais c'est mon
daron, tu vois, il disait pas un mot...
213. Difool : Eh, ça fait trois fois les darons, quand
même, hein...
214. Moïse : non, mais par contre, il est pas sorti de
table et tout...
215. Difool : Et ça s'est passé comment, tu
sortais avec une nana depuis combien de temps, comment ça s'est
passé, raconte-nous un peu ?
216. Moïse : Ben en fait ça faisait pas
très longtemps, ça faisait 4 ou 5 mois qu'on était
ensemble, je voyais que ça devenait sérieux, donc je me suis dit,
voilà, présentation des parents... la totale et tout, et je lui
ai dit que mes parents étaient super cools, et mon daron, pas un
mot...il faisait la gueule... Et en fait, c'est pas mon daron qui est parti,
c'est ma nana qui m'a pris à part et qui m'a dit << voilà,
je peux pas rester là... >>
217. Difool : Ah ouais, trop mal à l'aise, mais elle a
raison.
218. Moïse : J'avais compris, tu vois... pas de
malaise...
219. Difool : Tu devais être super mal à l'aise,
toi aussi, non ?
220. Moïse : Bah ouais, surtout qu'en fait après, on
s'est embrouillé avec la meuf, parce que elle, elle pensait que
j'étais le reflet de mon père, quoi, tu vois...
221. Difool : On n'a pas forcément les mêmes
idées que son père, même si on l'aime et tout ça,
parfois on n'est pas d'accord.
222. Moïse : Là, franchement, il m'a cassé
tout le truc quoi, et ce qui fait que je me suis embrouillé avec la
meuf, et je me suis embrouillé avec mon daron, et puis... voilà,
je vois plus mon daron et je vois plus ma meuf, quoi.
223. Difool : Ah ouais, donc en fait toi tu t'es... toi
ça t'as foutu la vie en l'air. C'est débile ton père,
comme réaction, ce qu'il a eu.
224. Moïse : Ben ouais, c'est pour ça, si je peux
donner un conseil à Séréna, tu vois, je veux pas trop
l'embrouiller, mais si je peux lui donner un conseil, c'est surtout de calmer
le jeu, et de pas trop se prendre la tête et de laisser faire le temps,
parce que...
225. Difool : Ouais, vis ta vie avec ta meuf, et...
226. Moïse : Ouais, voilà, si elle commence à
essayer de convaincre son père, tu vois, ça va être
l'embrouille, ça va finir très mal donc...
227. Difool : Moi, je sais pas, j'aurais plutôt envie de
le convaincre, parce que je le trouverais con de réagir comme
ça.
228. Moïse : Ouais, mais...
229. Difool : T'as pas envie que ton père sois con, tu
vois, t'as pas envie qu'il ressemble aux vieux beaufs...
230. Moïse : En fait moi ce que je pense, c'est pas que mon
père sois raciste, tu vois, mon père il est pas raciste, mais ce
que je pense, c'est que nos parents, ils sont pas encore assez dans le
mélange des cultures.
231. Sophie : Ils sont vieille France encore, en fait.
232. Difool : Avec les nouvelles émissions de M6,
ça va pas les aider, tiens.
233. Marie : Non, mais tu vois, il y a des limites, t'es vieille
France, il faut pas exagérer, tu vois... Mes grands-parents, ils sont
vieille France aussi, ils sont ouvert à toutes les cultures, quoi. Donc,
je suis pas sûre que ce soit lié à ça.
234. Moïse : Mais non, mais c'est pas les cultures, si tu
veux, c'est le mélange des cultures.
235. Marie : Ah ben ouais, mais il y a pas de problèmes.
Enfin, tu vois, dans ma famille, il y a aucun souci.
236. Difool (imitant -blague récurrente- Marie) :
<< Ah oui, la bière... >>
237. Marie : Non mais tu vois, à la base, on est tous
métissés...
238. Difool : Ouais, on a tous des...
239. Marie : ...à des degrés différents, on
n'est pas 100% Français...
240. Difool : Je tiens à vous dire qu'avant nous, nos
ancêtres ont baisé dans tous les sens et...
241. Marie : Exactement ! Et c'était colonisé,
enfin, quand tu remontes un peu, c'est débile de dire ça, tu
vois. [...]
242. Difool : C'est vrai, on est tout un peu métis,
quoi...
243. Marie : Voilà, donc il faut pas s'arrêter
là, quoi, il faut... C'est juste qu'ils sont un petit peu
bloqués.
244. Difool : Et puis quand tu voyages un peu, en fait, je
sais pas, moi, j'ai des potes renoi en Italie, ils se comportent comme des
ritals, hein. Ils ont rien à voir avec mes potes renoi français
qui... tu vois. Ils écoutent pas la même musique...
245. Marie : Regarde, quand t'es rebeu, que t'es né ici
et que tu vis en France, t'es pas... quand tu vas au Bled, t'es pas pareil que
tes cousins, quoi, qui vivent au Bled. Il y a une différence, c'est
normal.
246. Difool : Et comment t'as géré l'affaire,
alors, maintenant tu te retrouves sans meuf, tu te retrouves sans... enfin t'as
plus de contact avec ton père.
247. Marie : Oh...
248. Difool : Ca date de quand cette histoire, là ?
249. Moïse : Ben ça fait six ans maintenant.
250. Marie : Oh !
251. Difool : Ah ouais, six ans. T'as l'impression que c'est
mort, toi ?
252. Moïse : Pour mon daron ?
253. Difool : Ouais.
254. Moïse : Ah ouais, non mais c'est moi, je veux plus le
voir, franchement, je lui pardonnerai jamais une attitude pareille, tu vois, en
fait.
255. Difool : Et lui, il a essayé de te revoir ou pas
?
256. Moïse : Non, du tout.
257. Marie : Ah ouais, donc vous avez jamais essayé
d'avoir un dialogue posé...
258. Moïse : Non, ben en fait, on a essayé pendant
les trois jours qui ont suivi le repas, quoi, mais au bout de trois jours,
c'était de pire en pire et puis bon au final, il m'a dit << c'est
moi qui décide, tant que tu vivras sous mon toit, tu respecteras mes
règles >> donc il m'a dit << si t'es pas content avec mes
règles, tu t' arraches >> donc j 'ai pris mon petit balluchon et
je suis parti...
259. Difool : Toi, tu t'es barré, oui.
260. Moïse : Sauf que je me suis barré et je pensais
récupérer la meuf, tu vois, et en fait, que dalle...
261. Difool : Ouais, c'est un peu triste... et t'as une meuf,
là, maintenant ?
262. Marie : Bah, au moins, t'es fixé.
263. Moïse : Ouais, ouais, maintenant je suis papa et
tout...
264. Difool : Ah ouais, donc t'es heureux ?
265. Moïse : Ouais, ouais, ça va, tout va bien...
266. Difool : Bon. Et t'as pas envie de présenter ton
fils à ton père ?
267. Moïse : Non.
268. Marie : Ah, ouais, c'est bizarre, ça fait une cassure
tellement...
269. Romano : Et ton père, il a jamais essayé de
reprendre le contact sachant qu'il était grand-père et tout
ça ?
270. Moïse : Non, non, non...
271. Cédric : Il le sait au moins ?
272. Moïse : Ouais, il le sait mais il valait mieux pas
qu'il vienne...
273. Difool : Ah ouais, toi, tu l'aurais mal accueilli.
274. Moïse : Ouais.
275. Romano : Mais ta mère, tu continues de la voir ?
276. Moïse : Ouais, je la vois. Ben, je vais la voir quand
je sais qu'il est pas là...
277. Difool : Et pour elle ça doit pas être facile
parce que entre les deux...
278. Moïse : Ouais, elle le vit mal aussi.
279. Marie : Ouais, c'est normal.
280. Romano : Ca doit la faire chier.
281. Difool : Tout ça à cause d'une attitude de
ton père à la base.
282. Moïse : Ouais, et puis après il y a eu mes
frangins qui ont pris ma défense, et puis après, bon, il s'est
embrouillé avec mes frangins et puis mes frangins ne vont plus le voir
non plus...
283. Difool : Séréna, j'espère que
ça se passera pas comme ça pour toi...
284. Séréna : Ah ben oui, franchement,
j'espère pas, parce que lui, là, alors, le pauvre !
285. Moïse : Comme je t'ai dit, il faut que tu te dises que
c'est ton daron et que de toute manière, respectele, même si lui
t'a manqué de respect ce jour-là, mais...
286. Séréna : Ouais, ouais
287. Moïse : il faut que tu te dises que c'est ton daron,
et puis fais pas ce que j'ai fait. Moi j'ai voulu prendre le dessus sur lui et
puis au final...
288. Séréna : Oui, mais franchement ça,
j'ai pas essayé, tu vois, on en a pas reparlé depuis et...
289. Moïse : Ouais, non, mais je pense que, tu sais, avec
le temps, il va s'y faire et puis c'est tout, quoi...
290. Difool : Et si au lieu d'aller bouffer chez tes parents,
vous alliez bouffer dehors ?
291. Marie : (rires) Bonne idée, ouais.
292. Difool : Même à la limite un McDo c'est plus
sympa, hein ?
293. Séréna : Ouais, ben je sais pas,
c'était...
294. Difool : Ouais, ben c'était l'occasion de
présenter ton mec à tes parents, quoi.
295. Séréna : Ouais, voilà.
296. Difool : Comment tu vas, après avoir
écouté le témoignage de Moïse, celui de Sophie,
là, et puis les diverses réactions qu'on t'a lues sur le net et
les SMS, je sais pas, comment tu vas gérer l'histoire, toi ?
297. Séréna : Bah, franchement, j'en sais rien non
plus, quoi... Je suis pas plus rassurée, quoi, j'ai toujours l'angoisse,
quoi. Là, bon, je vais voir mon mec lundi, je crois que je vais en
parler avec lui...
298. Difool : Ouais, mais que ça devienne pas un
problème pour... tu vois, qu'il ait pas l'impression d'être un
problème, c'est pas lui le problème, c'est ton père.
299. Séréna : Ah, ben non...
300. Marie : Ouais, tu vis ta vie avec ton mec et puis
voilà, tu fais une section entre les deux et puis c'est tout hein.
301. Difool : Ce qu'il faut que tu dises à ton mec c'est
que sur ce plan là, ton père il te prend un peu la tête
donc voilà, vous allez vivre tous les deux et puis... enfin, tous les
deux votre histoire sans forcément la partager avec tout le monde.
302. Marie : Et puis ça peut peut-être
évoluer, hein, il est peut-être pas forcément
braqué...
303. Séréna : Ouais, bien sûr !
[Coupure pub et musicale]
CONCLUSION ET PERSPECTIVES
304. Difool : ...Il y a eu plein de messages pour
Séréna, qui vont tous on petit peu dans le même sens, c'est
<< vis ta vie >>, hein Séréna, la majorité des
messages. Ou alors << essaie de convaincre ton père et d'avoir une
discussion face à face avec lui >>, ça c'est l'autre
tendance parmi les messages qu'on nous a laissés.
305. Séréna : Ben ouais, mais ça, je
crois que c'est mort.
306. Difool : Ouais, je crois que tu vas vivre ta vie toute
seule ?
307. Séréna : Oui, je pense.
308. Romano : Ouais, tu vis ton truc, tu leur en parles pas,
voilà, hein...
309. Difool : Hmm, bon c'est vrai que c'est toujours un petit
peu balourd de...
310. Romano : Ouais, mais bon.
311. Difool : ...d'être obligé de se cacher parce
qu'on aime quelqu'un...
3 12. Romano : Si le daron il veut rien comprendre, aussi, t'as
pas trop le choix, quoi.
313. Séréna : Il est un peu buté, mon
père...
314. Difool : Oui, on a vu.
315. Séréna : ...il est à fond dans son
truc et...
3 16. Difool : Ouais, ouais. Bon, ben écoutes
Séréna, ne quittes pas parce qu'on a eu beaucoup de messages et
on a peut-être des numéros à te donner, des auditeurs de
Sky, des auditrices aussi, qui veulent rentrer en contact avec toi donc...
voilà.
317. Séréna : Ben je les remercie tous, hein,
ça fait plaisir.
318. Difool : A nous aussi ça fait plaisir ! On t'envoie
l'album de la semaine, Séréna, et puis pareil pour tous ceux qui
sont passés, il y a eu Moïse, Sophie... Bisous !
319. Séréna : Bisous, bonne soirée.
320. Difool : Et puis on prendra des nouvelles si tu veux bien,
Séréna.
321. Séréna : Et puis je voudrais dire à
tous ceux qui sont dans cette situation, franchement, il faut... Courage, quoi,
parce que c'est lourd à porter.
322. Difool : Ok, on te rappellera, de toute façon, et
puis si t'as besoin de nous, tu nous appelle sans problème.
Racisme / cas N°2 / 02 novembre 2004 « Les parents
n'acceptent pas le petit ami maghrébin » / séquence
diffusée entre 23h26 et 23h45 :
Contexte : suite à l'appel d'un auditeur qui ne
comprend pas pourquoi il n'a pas de nouvelle de sa copine (même s'il sait
que les parents de celle-là n'aiment pas trop les Maghrébins -et
il l'est- une auditrice apporte son témoignage, à savoir que ses
parents n'acceptaient pas son copain maghrébin. L'équipe et des
auditeurs apporteront des réponses à ce sujet. On traite le sujet
à partir de ce moment où il s'agit proprement d'une
thématique d'intolérance liée au racisme.
EXPOSE ET EVALUATION DU PROBLEME DE L'AUDITEUR
APPELLANT
1. Difool : On est avec Moos, d'Agen, alors Moos, toi ça
fait trois semaines que t'as pas de nouvelles de ta meuf, depuis quatre mois tu
es avec elle, et tu te poses des questions. On va y revenir, il y a plein de
témoignages par rapport à toi, et toi tu te poses la question de
savoir si ça vient pas de l'influence des parents, c'est ça, hein
?
2. Moos : Ouais, ok, ouais.
3. Difool : Parce que c'est vrai qu'elle a 17 ans, toi t'en as
20, t'es rebeu et les parents sont plutôt... enfin sont fachos, t'es
sûr de ça, ou...
4. Moos : Non, non, c'est certain, ouais.
5. Difool : Tu les as vu, toi ?
6. Moos : On a déjà eu une petite altercation, on
va dire.
7. Difool : Mais comment ça s'est manifesté, parce
que ça m'a toujours fait halluciner, ça, ils ont quel âge
les parents, 40 berges ?
8. Moos : 40/45, ouais, par là, ouais, 40/45
9. Difool : Et ils sont... et comment ils ont réagi par
rapport à toi ?
10. Moos : Ben, en fait, ma copine au début elle leur a
pas dit parce que... Moi, elle me l'a dit bien après, ma copine. Elle
m'a dit, << mes parents, bon, voilà, ils aiment pas trop les rebeu
>>.
11. Difool (imitant les parents) : << Oui, tu t'appelleras
Moustiquaire, d'accord ? >> (rires)
12. Moos : Et en fait une fois j'ai croisé sa mère
parce que c'était elle qui venait la chercher au lycée, et
voilà, quoi... Et ça c'est pas trop bien passé parce que
quand je l'ai embrassée pour lui dire au revoir et tout, sa mère
elle lui a dit << tu peux éviter de faire ça devant moi
parce que ça me plait pas >>.
13. Difool : C'était le fait qu'elle embrasse un gars ou
alors c'est le fait qu'elle t'embrasse toi, un rebeu ?
14. Moos : Non, je lui ai dit << si ça se
trouve, ta mère elle a dit ça par rapport à un gars, par
rapport au respect >>, elle m'a fait << Non, non, je sais comment
elle est ma mère >>, elle m'a dit << tu sais avec mon
père, et tout, des fois je les entends parler, les Arabes, les Arabes,
les Arabes... >>
15. Difool : Quels pauvres gens, quand même. C'est
quand même triste d'en être là aujourd'hui, quoi.
16. Moos : Ouais, ouais, carrément, ouais.
17. Difool : Eh oui, et ils doivent être malheureux, en
plus, hein... Parce que... bah, je sais pas, de réagir comme ça,
de se fermer... Bon, c'est surtout chiant pour toi si ta meuf t'a laissé
à cause de ça. Donc on va y revenir tout de suite là,
juste après qu'on ait pris, ah ben non, tiens, il y a Linda qui nous
appelle. T'es en direct de Troyes, c'est ça, Linda ?
TEMOIGNAGES D'AUDITEURS A L'ANTENNE ET POINTS DE VUE DE
L'EQUIPE
18. Linda : Voilà, exactement.
19. Difool : Tu nous as laissé un message sur les SMS, le
net ou t'as appelé au téléphone, comment t'as fait ?
20. Linda : Non, j'ai appelé directement.
21. Difool : Direct. Bon, alors, Linda, t'appelais pour Moos, toi
?
22. Linda : Voilà, exactement.
23. Difool : Bon, il t'es arrivé la même chose
à peu près ?
24. Linda : Ben en fait, pareil, j'étais avec mon copain
depuis 3/4 mois et en fait, euh, à chaque fois que je rentrais chez mes
parents, pendant une semaine, il m'appelait pas...
25. Difool : Il faisait le mort.
26. Linda : Voilà, il faisait le mort, exactement. Et il
m'a appelé il y a 2/3 jours, et il m'a expliqué qu'il faisait
cocu sa copine, parce qu'il avait une copine depuis 3 ans...
27. Difool : Et tu savais qu'il avait une copine, toi ?
28. Linda : Non, non, je savais pas.
29. Difool : Ah donc tu as découvert que tu étais
la maîtresse de ton mec.
30. Linda : Exactement !
31. Difool : Ca fait plaisir ?
32. Linda : Oui, ça fait hyper plaisir (rires) !
33. Difool : C'est génial, tu crois que t'as un mec, et
en fait le mec il te fait « non, non, tu es ma maîtresse!>>
34. Romano : « ... oui, tu es ma deuxième, en fait
>>
35. Difool : Bien sûr ! Tu découvres non seulement
qu'il y en a une autre, mais qu'en plus t'es pas la première, quoi.
36. Romano : Ca faisait combien de temps que t'étais avec
lui ?
37. Linda : Trois mois et demi
38. Difool : Ah ouais, quand même !
39. Linda : Ouais
[... ]
[Nous avons donc une explication possible au manque de
nouvelles de la copine l'auditeur. Une autre auditrice va annoncer une autre
explication possible, c'est celle-ci qui constitue la pertinence du sujet dans
le corpus]
40. Difool : On a Miou, tiens une meuf qui s'appelle Milou, donc
toi t'as 17 ans et tu appelles pour Moos.
41. Miou : Ouais, exactement, j 'appelle pour Moos, parce qu' en
fait j 'étais dans la même situation que sa copine.
42. Difool : C'est-à-dire ? Toi aussi t'avais des parents
qui étaient... très tolérants ?
43. Milou : Oui, exactement, super tolérants, c'est pour
ça que j'ai du couper tout contact, en fait.
44. Difool : Et toi, tu es de quelle origine ? J'aime pas
demander ces question, parce qu'on est à la radio, on s'en fout...
45. Milou : Italienne.
46. Difool : T'es Italienne, toi ?
47. Milou : Ouais.
48. Difool : Il y a plein d'Italiens à Grenoble.
[...]
49. Difool : Et donc, toi, explique-nous un peu ton histoire par
rapport à Moos.
50. Miou : Ben, j'étais dans la même situation que
sa copine, c'est-à-dire que j'ai commencé une histoire d'amour
avec un mec sui s'appelait Michael. Ça se passait très bien, on a
passé un mois d'enfer, en fait...
51. Difool : Oui, mais ma mère n'aimait pas les
Michael...
52. Miou : Exactement.
53. Difool : Non, il a eu quoi, le problème ?
54. Miou : Le problème c'est que mes parents s'en sont
rendus compte, lors d'un repas de famille, d'ailleurs, où ma soeur m'a
balancée.
55. Difool : Sympa, la soeur.
56. Miou : Ouais, super, et du coup, ben ma mère s'en est
mêlée, et e, plus c'est un ami, plus ou moins, de la famille, donc
j'ai du couper tout contact, enfin, c'était une merde pas possible.
57. Difool : Mais pourquoi ça dérangeait que tu
sortes avec un gars qui s'appelle Michael, qui soit un ami de la famille,
c'était quoi le problème ?
58. Miou : Il était rebeu !
59. Difool : Ah, il était rebeu, Michael ?
60. Miou : Voilà.
Difool : Et tes parents, ils sont racistes aussi ?
61. Miou : Ouais.
62. Difool : C'est terrible, parce que eux qui sont Italiens,
ils devraient se souvenir qu'il y a, je sais pas, 80 ans, les Italiens, ils
étaient... enfin, il y avait des réactions qui étaient
particulièrement racistes envers eux aussi, qu'ils ont subi aussi, quand
ils sont arrivés en France. Nos grands parents, tout ça, et
maintenant, ils font la même chose 80 ans après à d'autres
gars, ça c'est... ça m'a toujours fait halluciner, ça. Tu
devrais leur expliquer à tes parents, parce qu'ils ont du vivre
ça.
63. Milou : Ouais, mais le problème, c'est qu'on essaie
une fois, deux fois, trois fois et puis après on lâche
l'affaire.
64. Difool : Non, mais c'est fou, ça. Ils ont quel
âge tes parents ? En plus, ils sont pas vieux, tu vois, ils ont la
quarantaine ?
65. Milou : 47 !
66. Difool : 47, bah c'est pas super vieux ! Tu vois, ils sont
pas... c'est pas des dinosaures ! Ils doivent comprendre. Et en plus, c'est
vrai ce que je te dis, les familles italiennes... moi-même qui suis un
pur Siciien puisque j'ai fait partie de la mafia, mes ancêtres, bien
sûr... Non mais c'est vrai, tous les Italiens, ils ont vécu
ça. T'avais des gens qui, quand les Italiens arrivaient disaient que la
bouffe italienne ça sentait mauvais, qu'ils étaient pas comme les
autres, que...
67. Romano : Des réactions de merde.
68. Difool : Ouais, des réactions racistes de base.
Enfin, ridicules et de base, comme... Donc maintenant, ils réagissent
comme ça par rapport à toi.
69. Miou : Ouais, exactement. Mais tu sais, ils me disent c'est
plutôt du côté, ouais, ils ont peur, machin... on sait
jamais, s'il veut repartir là bas, et tout...
70. Difool (dubitatif) : Ouais. Mais c'était la
même chose à l'époque, tu sais, c'est toujours... Tu vas
peut-être essayer de discuter avec eux, non, ça marche pas ?
71. Miou : Non, mais j'ai essayé, et puis moi de toute
façon, il y a que les Arabes qui m'attirent physiquement, donc...
72. Difool : Ouais, mais justement, je pense que...
73. Samy : C'est à cause de ça, ouais.
74. Difool : C'est parce que tes parents...
75. Miou : Non, pas du tout, ben j 'ai essayé aussi avec
des Français, Italiens, et ça marche pas du tout, j'ai plus un
tempérament on va dire Musulmane, quoi, on va dire plus soumise.
76. Difool : Ouais, mais là, tu sais, tu fais des
généralités comme tes parents mais dans l'autre sens, tu
vois.
77. Samy : C'est pas parce que tu vas sortir avec un rebeu que
tu vas être soumise aussi...
78. Difool : Bah, oui. C'est un cliché, ça, tu
fais les mêmes clichés que tes parents mais dans le sens inverse.
En fait, tu réagis par révolte...
79. Milou : Pas du tout, parce que franchement je suis vachement
ouverte, j 'ai essayé plein de trucs et tu vois, je m'entends
mieux...
80. Difool : Bah tu peux avoir un type de gars aussi, quoi. Tu
peux préférer les gars... c'est pas un souci, mais de
réagir en disant << je préfère parce qu'ils sont
comme ça >>, tu vois, c'est...
81. Romano : Ouais, ils sont pas tous comme ça, quoi.
82. Difool : C'est aussi des clichés à deux
balles, que tu nous fais, là. Donc, ça doit être par
révolte envers tes parents, je pense. Tu dois avoir envie de les faire
chier.
83. Romano : Ouais, pour un peu les emmerder.
84. Difool : Mais bon, ça peut se comprendre aussi, vu
comment ils réagissent, mais à mon avis, il doit y avoir un peu
un truc comme ça dans cette histoire.
85. Miou : Ouais, sûrement, sûrement...
86. Romano : Et depuis cette histoire, ils ont pas
évolué d'un pet tes parents, toi, ils ont...
87. Miou : Ben non, ça fait trois semaines, quoi
donc...
88. Romano : Ah, ouais, donc...
89. Difool : Et t'as coupé les ponts, toi, avec le gars
ou pas ?
90. Miou : Ouais, complètement.
91. Difool : Mais pourquoi t'as coupé les ponts avec lui
?
92. Miou : Ben parce que je peux pas, et en plus c'est une
pression immense, moi ma famille ils sont tous ici, tout le monde le
connaît, donc forcément, si je le vois, ça va
être...
93. Difool : Mais ce qui est hallucinant, c'est qu'ils acceptent
que ce soit un ami de la famille, par contre, dès qu'il sort avec toi,
ça pose un problème.
94. Romano (imitant le père) : << Ah oui, mais
c'est pas pareil >>.
95. Miou : Non, mais c'est compliqué, en fait, parce que
c'est un ami de la famille à ma mère, et en fait, j'ai une
demi-soeur, et ma demi-soeur s'entend absolument pas avec mon père. Donc
mon père est encore plus révolté.
96. Romano : Ah oui, c'est un gros bordel, quoi.
97. Miou : Oui, c'est un gros bordel.
98. Difool : Oh, je sais pas. Je pense que personne n'est encore
perdu, donc essaie de discuter avec tes parents, quoi.
99. Miou : Ouais. Non, mais c'était juste pour Moos,
quoi, pour qu'il lâche pas l'affaire, parce que moi je sais que Michael
il m'appelle vachement souvent et que je sais très bien que je vais
finir par décrocher, quoi.
100. Difool : Bah oui décroche, et puis le laisse pas
comme ça, le gars.
101. Miou : Ouais, c'est clair, mais tu sais, ça me fait
mal au coeur aussi mais...
102. Difool : Ben justement, la meilleure manière
d'être révoltée contre tes parents, c'est pas de... enfin
tu vois t'as un mec que t'aime, ben reste avec lui. Enfin je sais pas.
Qu'est-ce que t'en penses, toi, Moos ?
103. Moos : Moi, je sais pas, parce que là, ça
va faire trois semaines, franchement, je... à un moment donné,
voilà, tu sais, j'ai envie d'arrêter d'appeler parce que
même si je me suis grave attaché à elle, mais bon, trois
semaines, tu es bien d'accord, il y a bien quelque chose...
104. Difool : Non, mais toi en plus elle te raccroche au
nez... toi tu essaies de la joindre...
105. Moos : Ouais, elle m'a raccroché au nez,
après je sais pas, tu vois, j'ai essayé de l'appeler en appel
masqué, et tout, même en appel masqué, elle doit se douter,
sûrement que c'est moi.
106. Difool : Bon, ben si elle nous écoute, parce que tu
nous as dit qu'elle écoutait souvent Sky, parce que en plus, là,
c'est les vacances donc... ça se couche tard actuellement. Donc, je sais
pas comment elle s'appelle, c'est quoi son prénom, tu veux le dire ?
107. Moos : Non, mais elle se reconnaîtra.
108. Difool : Bon, ben si elle se reconnaît, on la salue,
l'anonyme...
109. Moos : Parce que sinon...
1 10. Difool : Et puis quoi qu'il te sois arrivé, passe au
moins un coup de fil...
111. Romano : Dis-lui ce qu'il en est, quoi.
1 12. Difool : Bah oui, il se rend malade, il t'aime... donc, au
moins donner des nouvelles, même si c'est pas des bonnes nouvelles,
quoi.
1 13. Moos : Ouais, et franchement j'espère pas que c'est
par rapport à ses parents, quoi, parce que moi, ça me mettrait
encore plus la rage. Parce que déjà qu'on s'était bien
accroché la première fois à cause de ça, avec ses
parents et avec elle aussi, tu vois, parce que je lui disais... parce que la
première fois, elle m'avait lâché, mais bon elle m'avait
dit, quoi. Elle m'avait dit que c'était à cause de ses parents
parce que elle avait trop de pression par rapport à ses parents et
qu'elle pouvait pas continuer.
TEMOIGNAGES D'AUDITEURS PAR MESSAGES (SMS ET INTERNET) ET
POINTS DE VUE DE L'EQUIPE
1 14. Difool : Mais c'est vrai qu'il y a plein de messages,
ça doit être particulièrement dur à supporter,
regarde, il y a Romanette, là, qui est déjà un pseudo dur
à vivre, de Paris 13 : << j'avais un mec rebeu, ma mère est
raciste, j'ai du le quitter tellement elle m'a mis la pression >>. Quand
tu aimes quelqu'un, moi je pense qu'il faut résister, c'est pas... c'est
pas manquer de respect à tes parents que de sortir avec un gars que
t'aimes, hein. Enfin, je pense.
1 15. Moos : Ouais, carrément. Mais bon, je lui ai dit,
tes parents, ils ont fait leur vie et tout... 116. Difool : Bah oui.
1 17. Moos : ... c'est à toi de réfléchir.
Et moi, à un moment donné, j'étais tellement
énervé que je lui ai posé un ultimatum quoi, je lui ai dit
<< ou tu assumes de sortir avec moi, ou c'est bon, c'est fini. Mais bon,
elle avait dit << non, ça marche bien, je vois pas pourquoi
j'arrêterais et tout >>, mais elle avait jamais osé le dire
à sa mère, quoi. Et bon, là, j 'ai peur que sa mère
ait découvert parce que je lui ai envoyé des petites lettres,
vite fait. Et j 'ai peur qu'elle soit tombée sur une des lettres ou sur
un mail...
1 18. Difool : Ouais, ça aurait foutu le bordel dans la
famille.
1 19. Moos : Ouais. Et bon, vu que dans la famille, ils sont tous
comme ça, s'il y a eu un repas de famille dans le truc ou quoi, il
suffit juste que le message circule et tout le monde lui tombe dessus et je
sais que c'est une fille assez fragile, donc forcément, c'est...
120. Difool : Enfin, qu'elle passe au moins un coup de fil,
c'est le message qu'on peut lui faire passer, si elle nous écoute,
qu'elle te donnes au moins des nouvelles. Envoyer un SMS, c'est pas
compliqué. D'ailleurs je comprend pas pourquoi elle l'a pas fait parce
qu'il y a toujours le moyen de prendre le portable d'une copine, regarde,
Romano prend régulièrement les portables des membres de
l'équipe.
121. Romano : Ben oui, pour envoyer des SMS pas chers.
122. Difool : Exactement ! (rires)
123. Romano : C'est clair que si elle veut te joindre, elle
peut. D'une manière ou d'une autre.
124. Difool : Non, mais faut leur expliquer, si elle nous
écoute, qu'elle leur explique que t'es un mec bien... t'as pas l'air
d'être un mec... t'es un mec bien...
125. Romano : C'est un bon gars, Moos.
126. Difool : Bah oui !
127. Moos : En plus, Romano, moi je suis pas trop une pince,
moi, t'as vu.
128. Difool : En plus, il est généreux.
129. Moos : En quatre mois, je lui ai fait je sais pas combien
de cadeaux et tout...
[Variations sur la pingrerie de Romano]
130. Difool : Ca marche aussi dans le sens inverse, il y a une
nana qui dit << je suis rebeu, moi c'est le même problème,
ils veulent pas que je sorte avec des Français >>. Enfin, t'es
Français sans doute toi aussi, mais...
131. Romano : Ouais, ça marche dans tous les sens,
malheureusement.
132. Moos : C'est clair, ouais.
133. Difool : Bah oui, c'est ma foi bien triste tout ça,
parce que quand on s'aime... au contraire, c'est plutôt rigolo de
découvrir quelqu'un qui n'a pas la même culture, c'est quand
même plue intéressant.
134. Romano : Ouais, c'est bien, ça ouvre.
135. Difool : Moi je trouve ça marrant, t'as le gars qui
fait le ramadan, ou la meuf qui fait le ramadan, et l'autre partie du couple
qui vit sa vie, enfin c'est plutôt rigolo...
136. Moos : Tu crois que ce serait à cause de ça,
que ce serait à cause que c'est le ramadan et tout ?
137. Difool : Non, j'y avais pas pensé, j'en sais rien,
tu sais s'ils sont racistes, ils comprennent rien, donc peut-être que
c'est...
138. Moos : Parce que ma copine, je lui avais dit que ça
allait être le ramadan, que pendant un mois, on allait peut-être
moins se voir, et qu'on va s'abstenir à faire quelque chose ou quoi
parce que le ramadan...
139. Romano : De là à plus se voir du tout, c'est
quand même...
140. Moos : Non, je lui ai pas dit on allait moins se voir et en
tout cas au niveau sexe, on n'allait plus rien faire pendant un mois parce que
voilà.
141. Difool : Tu peux, la nuit, pourtant, non ?
142. Moos : En fait c'est pas autorisé. [...] Chacun
arrange la religion comme ça lui va.
143. Difool : Ouais, en fait, c'est personnel, et vous faites le
ramadan un peu comme vous le sentez quoi, l'essentiel c'est...
144. Moos : Ouais, alors que normalement, il faudrait pas.
145. Romano : Normalement, c'est abstinence totale.
[Rappel << question express >> sur le ramadan]
CONCLUSION ET PERSPECTIVES
146. Difool : En tout cas, si elle nous écoute,
j'espère qu'elle aura entendu le message et qu'elle te passera un coup
de fil, elle t'aura reconnu de toute façon, là.
147. Moos : Franchement, je pense qu'elle m'a reconnu, tu
sais.
148. Difool : Reste là, Moos, parce qu'on va
peut-être en reparler si on a d'autres réactions là dessus,
on te fait signe. Et puis surtout merci à toi Linda pour le coup de fil,
on te fait un gros bisous Linda.
149. Moos : ouais, merci à Linda.
150. Difool : Et puis Merci à Milou aussi. On va t'envoyer
l'album de K-Maro et puis j'espère que tu auras des nouvelles de ton
Michael. Et puis essaie de parler avec tes parents, de les débloquer.
Racisme / cas N°3 / 21 décembre 2004 « Ma
mère ne supporte pas que je sorte avec un Kabyle » /
séquence diffusée entre 21 h1 6 et 21 h38 :
Contexte : une auditrice se bat avec sa mère à
coup de pieds, de poing, car la mère ne la supporte plus, notamment
affectée par le fait que sa fille sorte avec un Kabyle.
EXPOSE ET EVALUATION DU PROBLEME DE L'AUDITRICE
APPELLANT
1. Difool : Oui, Shirley ?
2. Shirley : Oui, en fait, je vous appelle pour avoir des
conseils.
3. Difool : Oui.
4. Shirley : Avec ma mère, ça va pas du tout, mais
quand je dis pas du tout, c'est qu'on se tape dessus.
5. Difool : Ah ? Mais physiquement ?
6. Shirley : Ouais. Insultes et tout, quoi
7. Difool : [...] Mais vous faites quoi ?
8. Shirley : On se tape dessus, à coups de poing,
à coups de pieds, on se tire les cheveux,
9. Difool : Et c'est quoi la raison pour laquelle vous vous
tapez dessus, il y a forcément un démarrage...
10. Shirley : Ben, en fait, elle me supporte plus, et le
problème, c'est que ça fait un an que je suis avec quelqu'un et
ma mère elle est raciste, elle l'accepte pas du tout, quoi.
11. Difool : Ah, elle aime pas ton mec ?
12. Shirley : Ah, non pas du tout quoi, et ça fait un an
que je suis avec...
13. Difool : Pourquoi toi t'es de quelle origine, et lui de
quelle origine ?
14. Shirley : Lui, c'est un Kabyle, et moi je suis
Française, mais bon...
15. Difool : Shirley, tu n'es pas Américaine ? (rires)
16. Marie : C'est bizarre.
17. Shirley : C'est bizarre, c'est compliqué...
18. Difool : Et les embrouilles avec ta mère, ça a
vraiment démarré à ce moment là ?
19. Shirley : Ah, non, ça va faire depuis que j'ai 16 ans
que ça a commencé avec ma mère.
20. Difool : Ouais, bon, qu'il y ait des embrouilles avec la
famille, qu'on soit pas d'accord sur tout, bon, ça c'est normal.
21. Shirley : Ouais, c'est normal, mais là, elle cherche
vraiment à me faire péter les plombs, et moi, avant de
péter les plombs je veux partir et je sais pas du tout comment faire,
quoi.
22. Difool : Et par exemple quand vous vous tapez dessus,
ça se passe comment ? C'est quoi au départ qui... qui
créé l'embrouille ?
23. Shirley : Ben c'est un mot qui commence, style...
24. Difool : << Enculé >>. Oui, alors
ça...
25. Romano : << Connasse >> (rires)
26. Shirley : Ouais, voilà, elle me traite de connasse,
<< vas voir ton bougnoule >>, des trucs comme ça...
Stupeur générale de l'équipe .Blanc.
27. Marie : Ah, ouais, quand même !
28. Difool (grave) : Ouais
29. Marie : C'est horrible.
30. Shirley : J'apprécie plus du tout...
31. Romano : Elle braque un petit peu.
32. Difool : Et t'as tout essayé pour...
33. Shirley : Ah, oui, oui, oui. J'ai tout essayé pour
calmer le jeu, hein, euh... Franchement, il est jamais venu chez moi parce
qu'il habite pas à Saint-Étienne, il habite...
34. Difool : Tu sais, je pense que ça fait partie des...
enfin ta mère elle est tout le temps enfermée chez elle,
elle...
35. Shirley : Ouais, ouais.
36. Difool : Elle connaît personne, donc elle regarde la
télé...
37. Shirley : Si, elle connaît plein de monde...
38. Marie : Oui, mais ils sont blancs.
39. Romano (imitant la mère) : << Oui, c'est pas
pareil ! >>
40. Difool : Oui, c'est ça, ça vient souvent d'une
méconnaissance, elle est pas...
41. Shirley : Mais bon, ma soeur, elle est avec un Portugais,
elle l'accepte pas non plus, et ça fait 17 ans qu'ils sont ensemble.
42. Difool : Elle est avec un Portugais, elle accepte pas le
Portugais ?
43. Shirley : Ah, non, quand c'est les fêtes ou des trucs
comme ça, lui il vient pas, il rentre pas à la maison.
44. Difool : Ah ouais, donc elle est raciste, quoi.
45. Marie : Oh, là là là là...
46. Difool : C'est triste pour elle, hein. C'est une pauvre...
enfin c'est une pauvre femme, quoi.
47. Shirley : Et je peux plus vivre ça, quoi.
48. Marie : Ben c'est sûr.
49. Difool : Je comprends que tu peux plus vivre ça,
c'est normal. Parce qu'en fait, c'est de la bêtise parce que... Marie :
Ouais, de la bêtise
50. Difool : Ouais, elle est bête, quoi.
51. Shirley : Ouais, parce que moi, je suis carrément
heureuse avec lui. L'amour que j'ai pas par ma mère, c'est lui qui me le
donne.
52. Difool : Ouais, enfin, il pourra jamais t'offrir ce que
t'offre ta mère, mais...
53. Shirley : Enfin, il compense un peu, quoi.
TEMOIGNAGES D'AUDITEURS PAR MESSAGES (SMS ET INTERNET)
ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE
54. Difool : À partir d'un certain moment, tu peux couper
les ponts, hein ? C'est ce qu'on nous dit, là, sur les SMS, il y a PEM,
là, du 37 qui nous dit << il faut couper les ponts, y a pas moyen
>>. Elle respecte pas la personne que tu aimes le plus au monde, donc...
à part elle.
55. Shirley : C'est pour ça, je voudrais trouver quelque
chose pour partir au plus vite...
56. Marie : Pour partir, ouais, t'as 18 ans...
57. Difool : Mais tu fais quoi, t'es au bahut, encore ?
58. Shirley : Eh ben moi, en fait, ouais, je suis encore
à l'école, quoi. Mais je me suis renseignée, tu sais,
à droite à gauche, à l'école et tout. J'essaie de
travailler entre deux pour avoir un peu d'argent. Je sais que j'ai droit
à la bourse, aux aides étudiants et tout ça mais euh...
59. Difool : Aaah !
60. Romano : Ouais. T'as le droit à des aides, ouais,
t'as droit aux APL et tout ça, là. [Anecdote sur la pingrerie de
Romano] Ouais, mais c'est vrai, quand tu es étudiant, par exemple t'a
plein d'aides quand t'es jeune et que t'as pas trop de sous, quoi.
61. Difool : Et ton gars, il en pense quoi ?
62. Shirley : Ah, ben lui, il veut que je parte au plus vite,
hein.
63. Difool : Et lui, il veut être avec toi, il veut faire
quoi ?
64. Shirley : Ah ouais ouais, il veut être avec moi, il
m'a présenté à toute sa famille, ça va faire un an,
là, qu'on est ensemble. Et il veut vraiment qu'on reste ensemble. Il m'a
dit << c'est pas parce que ta mère est là, elle va pas
foutre la merde entre nous, quoi >>.
65. Difool : Ah oui. Y a Chelou qui nous laisse un message,
là, il nous dit << pas cool, la daronne, facho. Je suis noir il
m'est arrivé pire, appelez-moi >>, on va te passer un coup de fil,
c'est Chelou qui laisse le message. Ben nous dit << c'est que t
mère ne t'aime pas sincèrement >>. Ah, ouais, c'est ce que
je te disais tout à l'heure, si elle déteste la personne que tu
aimes le plus, alors ou c'est de la jalousie, ou c'est euh... enfin de la
jalousie, elle est tarée si elle est jalouse de ton mec, parce que...
66. Romano : Oui, rien à voir.
67. Marie : Oui, oui, ça n'a rien à voir.
68. Romano : c'est qu'elle a deux trois soucis.
69. Difool : Ca peut arriver, hein, parfois, je pense, hein ?
70. Marie : Oui, elle peut être jalouse de l'amour que tu
lui portes alors que vous vous entendez pas bien, mais en même temps,
c'est elle qui allume la mèche.
71. Shirley : Pourtant j 'ai essayé de faire des efforts,
hein.
72. Difool : Bah ouais. Bon, alors dites-nous ce que vous en
pensez, tu voulais savoir quoi, toi, tu voulais déjà avoir des
réactions là-dessus ?
73. Shirley : Ouais, déjà des réactions,
savoir ce que les gens ont fait soit pour que ça aille mieux avec leurs
parents, ou ce qu'il faut que je fasse pour avoir des papiers, pour avoir des
aides et tout ça.
74. Difool : Bon, ben reste là Shirley, on va revenir
avec toi, avec vous toutes et vous tous, allez-y, hein...
[... ]
75. Difool : Shirley, on va revenir à toi tout de suite,
Shirley. Shirley, en direct avec nous, de Saint Etienne du Rouvray dans le 76.
Tu t'entends pas très bien avec ta mère, surtout depuis que tu
sors avec un gars qui est Kabyle et donc ta mère est raciste.
76. Shirley : Ouais, à fond, ouais.
77. Difool : Voilà, pour résumer un petit peu le
truc. Non, on essayer d'imaginer mais... il faudrait la filmer et lui montrer
comme elle est bête.
78. Romano : Ouais, c'est ridicule.
79. Difool : Non, mais c'est vrai, quand elle te dit ce qu'elle
t'as dit tout à l'heure.
80. Marie : Ouais, c'est débile
81. Difool (imitant la mère) : « Oui, vas voir
ton... » J'imagine la tête qu'elle doit avoir quand elle dit
ça...
82. Romano : Ah, ouais, elle doit être au taquet, elle
doit être sur les nerfs...
83. Marie : Tu m'étonnes que tu aies envie de lui en
foutre une.
84. Shirley : Ah, non, mais y a pas que ça, parce qu'en
fait, il sort de prison, et là-dessus, je m'en prends plein.
85. Difool : Oui, bah, on a le droit de faire une connerie et
après de se rendre compte que...
86. Romano : Mais c'est bon, il a payé, hein...
87. Shirley : Ah, mais oui, il a compris, hein.
88. Difool : Bon, et sinon, entre vous deux, comment ça
se passe ? Bien, pas bien ?
89. Shirley : Ah, c'est top nickel.
90. Difool : Et quand ta mère fout un peu le bordel,
comment ça se passe ? Vous êtes d'accord tous les deux, vous lui
chiez dessus tous les deux, donc...
91. Shirley : Voilà.
92. Difool : Mais il faudrait pas que ce soit ta mère qui
soit le principal point d'accord entre vous. J'espère qu'il y a d'autres
trucs, quoi.
93. Shirley : Ouais, mais là-dessus, ça se passe
super bien, quoi, c'est que moi quand je vais chez ma soeur, des fois on en
parle parce que des fois j'ai les nerfs par rapport à ça.
94. Difool : Ah, oui, ta soeur qui sort avec un Portugais que ta
mère n'a pas accepté.
95. Romano : Et ça fait 17 ans qu'ils sont ensemble.
96. Shirley : Ouais.
97. Difool : Elle est vieille, ta soeur, t'as 18 ans, toi ?
98. Shirley : Ouais, en fait on est 7 frères et
soeurs.
99. Difool : Ah d'accord.
100. Marie : Oh, la vache !
101. Shirley : Et ouais, et moi, je suis
l'avant-dernière.
102. Romano : Et il y a que vous deux, là, qui posent des
problèmes à cause du couple dans la famille ?
103. Difool : Eh, ce qui serait cool, ça serait qu'il y
en ait un qui ramène une asiatique ou un asiatique, il manque un kebla
dans la famille, qu'est-ce qui manque encore ?
104. Shirley : Mon grand frère sort avec une
Guadeloupéenne et elle l'accepte, c'est ça que je comprend
pas.
105. Difool : Bah, je sais pas, c'est bizarre, hein, c'est
tellement bête que c'est impossible à expliquer, c'est bête,
donc...
106. Shirley : Ah, ouais, non, mais il y a deux jours, on s'est
tapé dessus, moi j'étais en larme, j'ai appelé une copine,
Caroline, qui doit sûrement écouter, je lui fais un gros
bisou...
107. Difool : Mais il ne faut pas en arriver à ces
extrémité, tu vois, c'est...
108. Shirley : Ah, ouais, mais depuis l'âge de 9 ans, elle
me tape dessus. Pour tout, moi je sais que quand j'étais gamine, elle
m'empêchait de voir mon père, elle veut qu'on soit qu'à
elle, quoi, mais il y a un âge...
TEMOIGNAGES D'AUDITEURS A L'ANTENNE ET POINTS DE VUE DE
L'EQUIPE
109. Difool : Ouais, mais enfin, maintenant tu es majeure, a
priori t'as le choix, hein. Attends, bouge pas, il y a Dado, là...
Dado ?
110. Marie : Dado.
[Séquence football]
11 1. Difool : Sois la bienvenue Dado !
1 12. Dado : Ben, moi, en fait, j'appelle pour Shirley, parce
qu'il m'est arrivé exactement la même chose.
1 13. Difool : Alors comment t'as géré l'affaire,
toi, t'avais tes parents qui étaient racistes aussi ? 1 14. Dado :
Ouais, voilà. Moi je suis Kabyle.
1 15. Difool : Ah, ça marche dans tous les sens, le
racisme, c'est tellement international.
1 16. Marie : Ah, ben oui, ça, on sait, hein, que
ça marche dans tous les sens, Malheureusement. 1 17. Difool : Et alors
?
1 18. Dado : Donc moi je suis Kabyle, et en fait mon copain c'est
un Antilais, c'est un Guadeloupéen, ça fait deux ans, là,
que je suis avec...
1 19. Difool : Ca va faire un beau bébé, enfin, si
vous en faites un un jour.
120. Dado : Ouais, ben d'ailleurs, je suis enceinte.
121. Difool : Ah, ben vous vous êtes déjà
entraînés, alors.
122. Dado : Et donc, ce qui s'est passé, c'est que au
début, notre relation, mes parents l'ont su, quoi. Bon je suis pas trop
discrète à ce niveau là et pourtant les parents, ils sont
assez fermés d'esprit.
123. Difool : << Oui, ma chambre est à
côté de la leur >>
124. Romano : << Ca va, la nuit, ils entendaient,
là ? >>
125. Dado : Non, non, du tout, il est jamais venu chez moi, et
ce qu'il s'est passé, c'est que... bon au début, ils ont trop
rien dit, et ils se sont aperçu que ça continuait et que bon,
ben, je sortais souvent, je partais souvent en week-end, bon, ils savaient que
c'était avec lui mais ils disaient trop rien, quoi.
126. Difool : Ouais. Genre ils faisaient semblant de pas savoir,
quoi.
127. Dado : Voilà. Et ce qui s'est passé, en fait,
bon déjà, c'est que l'année dernière c'était
de pire en pire, exactement les mêmes insultes. On se tapait pas dessus,
mais bon, c'était limite, quand même. Et donc il arrêtait
pas de l'insulter du matin jusqu'au soir, c'était intenable, quoi. Et
donc, je suis partie l'année dernière de chez moi.
128. Difool : Alors t'es partie comment, t'es partie à
l'aventure ?
129. Dado : Ah ouais, non, je suis partie du jour au lendemain.
J'étais au taff et mon père m'a appelé.
130. Romano : Ouais t'es pas rentrée.
131. Dado : Ah non, même pas, mon père m'a
appelé, et puis j'ai commencé à parler avec lui et puis
une première fois, il me dit << écoute, tu fais un choix
>>
132. Difool : Donc toi, le choix, ça a été
de te barrer. T'es partie où ?
133. Dado : Ben, je suis partie chez lui.
134. Romano : Pas cher l'appartement, bien pratique.
135. Dado : Mais bon, c'était pas super, quoi, c'est
vrai qu'il n'y avait pas grande intimité, et puis c'est vrai que les
premier temps j'étais chez lui mais bon après ça me
saoulait. Donc on avait l'intention de prendre un appartement, mais bon,
c'était pas super facile, donc j'ai vécu à
l'hôtel.
136. Romano : Ah, plus cher l'hôtel.
137. Difool : Ah, Romano !
13 8. Dado : Ouais, c' est vrai. Mais bon, j 'étais
tranquille et j 'avais personne qui me prenait la tête, quoi, et puis
bon, j'étais assez motivée pour trouver un appartement, donc je
suis partie pendant trois mois. Et après bon... il y a eu quelques
problèmes dans la famille. Donc, j'ai du y retourner. J'avais un peu de
bon sens quand même parce que ma mère était malade. Et bon
je suis revenue, les parents ils m'ont toujours pas acceptée. Bon, ben
là, il y a trois mois, c'était vraiment l'apocalypse, quoi,
c'était vraiment le summum, et donc je suis partie de chez moi,
ça fait trois mois.
139. Difool : Et donc, là aujourd'hui, comment ça
se passe ?
140. Dado : Ben écoutes aujourd'hui, ça y est,
là, je viens d'avoir mon appartement, là, il y a quelques
jours.
CONCLUSION ET PERSPECTIVES
141. Difool : 22 ans, c'est aussi un âge où on peut
bouger, quoi.
142. Marie : Ouais, on peut devenir indépendant.
143. Difool : Mais si tu décides de bouger, Shirley,
tu bouges, mais tu bouges en prévoyant un petit peu avant, c'est
toujours... C'est peut être ce qu'il faudra faire et puis, après,
derrière, peut être que ça se remettra un peu mieux avec ta
mère.
144. Romano : Elle peut peut-être s'habituer, oui.
145. Shirley : Je crois pas. De toute façon, si je mets
une croix dessus, je mets une croix dessus, quoi, c'est pas la peine.
146. Difool : Ouais, enfin, tu dis ça aujourd'hui...
tu verras. Bon, Ne quitte pas Shirley, s'il y a d'autres réactions
dessus. Merci Dado pour ton coup de fil. On peut même vous mettre en
contact toutes les deux, les filles si vous voulez.
147. Shirley : Ouais, il y a pas de souci, ouais.
L'homophobie ou l'intolérance à
l'égard de l'identité sexuelle
Trois sujets de notre corpus de huit concernent les questions
d'intolérance à l'égard de la sexualité. Deux
sujets sur l'homophobie des parents subie par des auditeurs homosexuels et un
sujet plaçant l'auditeur en bourreau, ou en victime de sa propre
intolérance à l'égard d'un transsexuel qu'il avait pris
pour une « vraie » fille. Comme nous l'avons fait pour le racisme,
analysons l'intolérance à l'égard de la sexualité,
sous des éclairages différents, d'après notre rapport des
dialogues diffusés à l'antenne dans les séquences
sélectionnées dans notre corpus.
Homophobie / cas N°1 / 07 et 08 septembre 2004 « Mes
parents refusent mon homosexualité et veulent que je devienne
hétérosexuel » / séquence diffusée entre 23h42
et minuit le 07 septembre et entre 21 h41 et 22h05 le 08 septembre 2004 :
EXPOSE ET EVALUATION DU PROBLEME DE L'AUDITEUR
APPELLANT
1. Difool : T'appelais pour quoi, toi, d'abord ?
2. André : En fait, mes parents, ils ont appris que
j'étais homo...
3. Difool : Tes parents ils ont appris que t'étais homo
?
4. André : Ouais, voilà, depuis ce temps, ils font
des histoires et ils veulent que je devienne hétéro.
5. Difool : Ah, oui, mais ça, à mon avis, on
choisit pas, hein.
6. André : Voilà, c'est ça.
7. Marie : Si, si, ils pensent que ça se commande,
peut-être.
8. Romano (imitant le père) : << D'abord, tu vas
devenir hétéro, hein, ça suffit, tout de suite
>>.
9. Marie (imitant le père) : << T'arrêtes de
jouer, hein ! >>
10. Difool : Et toi, les files, pas du tout, hein ?
11. André : Non, pas du tout, non.
12. Difool : T'as déjà essayé ?
13. André : Ouais, mais ça me dit pas trop,
non.
14. Marie : Ouais, il faut pas se forcer.
15. Difool : Mais t'es déjà sorti avec une nana,
tu t'es retrouvé au lit et t'as pas aimé ça ?
16. André : Ouais.
17. Difool : D'accord, et puis avec les gars ?
18. André : J'ai déjà essayé et
ça m'a plu, quoi.
19. Difool : Et là, actuellement, t'as un copain ?
20. André : Euh... j'en avais un mais j'ai
été obligé de casser, quoi.
21. Difool : A cause de tes parents ? mais ils l'ont appris
comment tes parents ?
22. André : Ben en fait, ils m'ont dit que c'est une
personne qui leur a appris, je sais pas du tout qui c'est, donc voilà,
quoi.
23. Difool : D'accord, il y a beaucoup de gens qui sont au
courant, non ?
24. André : Ben...
25. Difool : A part tes mecs, j'imagine parce que bon...
26. André : Ben j'ai mes cousins qui sont en Suisse et
une amie qui est au Portugal, donc...
27. Difool : Ca vient de quelqu'un. Les deux l'ont mal pris, le
père, la mère ?
28. André : Voilà, ils l'ont mal pris, ouais.
29. Difool : Bon, ben écoute, ne quittes pas.
Appelez-nous pour André et puis on va revenir avec toi André,
là, tout de suite.
30. André : Ok.
31. Difool : Tu te prépares.
32. André : Ok, merci.
33. Difool : Bon, allez, on va mettre les pubs, tiens, au fait,
comme ça on va être tranquilles. On fait les << questions
express >>, André pour la suite et puis à minuit, on vous
offre la << Skyroulette >> [Coupure publicitaire et musicale]
34. Difool : T'es là André ?
35. André : Ouais, je suis là, ouais.
36. Difool : Bon, donc toi, André, tu
préfères les garçons, tes parents l'ont appris, ils ne
sont pas contents.
37. André : Voilà.
38. Difool : Qu'est-ce qu'ils t'ont dit ?
39. Romano (imitant les parents) : << Deviens
hétéro ! >>
40. Difool : Ouais, mais qu'est-ce qu'ils t'ont dit ?
41. André : Donc, en fait, déjà, ma
mère a été très malade.
42. Difool : Oui. A cause de ça ?
43. André : Oui.
44. Difool : Elle s'est rendue malade parce que tu
préfères les garçons ?
45. André : Voilà.
46. Difool : Oh, c'est dingue, ça.
47. André : Et mon père, sur la colère, qui
m'a dit que j'étais plus son fils, que je l'appelais plus papa.
48. Difool : Ah.
49. André : Et le pire, c'est que mes grands parents ont
été au courant.
50. Difool : Et, euh, ils réagissent pareil ?
51. André : Euh, donc, oui, mon grand-père a
été à l'hôpital parce qu'il a fait une crise de
nerfs.
52. Difool : Il a fait une crise de nerfs ? Ah, ouais, donc ils
ont vraiment un problème par rapport à ça, eux.
53. Marie : T'es fils unique ?
54. André : Euh, non, j'ai deux petits frères.
55. Marie : Ah, ben dis donc...
56. Difool : Bon, il va falloir leur dire qu'ils se rattrapent
sur les autres, et puis bon, que c'est pas une tare.
57. Marie : Il y a rien de grave.
58. Romano : Ah, il y a tout le monde qui s'est mis dans un
état... ta mère qui va à l'hôpital, ton
grand-père qui fait la crise de nerfs...
59. Difool : Non, c'est l'inverse : le grand-père fait
une crise de nerfs et va à l'hôpital et ta mère, elle fait
une dépression, c'est ça ?
60. André : Ouais, c'est ça.
61. Difool : Rhô !
62. Romano : Ben, faut pas se mettre dans ces états,
c'est pas grave, hein.
63. Marie : Et ça fait combien de temps qu'ils l'ont
appris ?
64. André : Ben, il y a peut-être une semaine de
ça...
65. Marie : Ah, ouais, donc c'est vraiment tout neuf, quoi.
66. Romano : Mais tu sais pas du tout qui aurait pu dire, parce
que, bon, l'autre il est pas malin non plus...
67. Difool : Oui, il aurait pu fermer sa gueule.
68. Samy : De toute façon, maintenant voilà...
69. André : Je sais pas qui c'est
70. Difool : C'est fou, ça.
71. Marie : Non, mais ils s'en sont peut-être rendu compte
tout seuls, hein.
72. Difool : Ouais, peut-être qu'ils t'ont dit ça
parce qu'ils s'en doutaient, non ?
73. André : Non, ils s'en doutaient pas, non, parce que
bon...
74. Difool : Ouais, ça se voit pas.
75. André : Ouais.
76. Marie : Ah, la vache !
77. Difool : Hmm. Et toi, tu veux faire quoi dans cette
histoire, là ? Parce que être rejeté par toute la famille,
tout ça...
78. André : Mes parents, ils veulent... pas tout à
fait m'obliger à être hétérosexuel, mais moi je veux
pas trop, quoi.
79. Difool : Mais être obligé à être
hétérosexuel, si t'es homo, t'es homo, il y a pas de... tu vas
pas te forcer à faire un truc que t'aimes pas.
80. Romano : Il y a pas à choisir de toute
façon.
81. André : Ouais, voilà, donc j'ai
été obligé de leur dire, que bon, voilà,
c'était fini... TEMOIGNAGE FICTIONNEL D'UN MEMBRE DE
L'EQUIPE
82. Difool : T'imagines, Cédric, on te dis : <<
deviens homosexuel >> ?
83. Cédric : Oh, là, pas possible.
84. Difool : Voilà, ben c'est la même chose.
85. Marie : Ouais, ça se commande pas, ça.
86. Difool : Bah oui, t'as choisi ton truc, enfin t'as choisi,
je sais même pas si t'as choisi...
87. Marie : Non, c'est naturel.
88. Cédric : Tu vas pas te forcer à kiffer une
meuf, quoi, tu vois.
89. Difool : Non, et puis ça doit suffisamment être
difficile à vivre pour toi parce que bon, c'est pas forcément,
t'es pas comme la majorité, on va dire...
90. Marie : Le truc, c'est que tu dois te planquer de tes
parents...
91. Difool : ...si en plus il y a tes parents qui
réagissent comme ça, pff...
92. Romano : Mais depuis que tu leur as dit, là, tu
re-communiques avec eux ? Tu parles un peu ou plus du tout, là ?
93. André : Euh, ouais, on recommence un peu, parce que
j'ai été obligé de leur dire que bon, j'avais
arrêté mes conneries, bon, voilà, quoi.
94. Romano : T'es obligé de leur mentir, quoi. T'es
obligé de mener une double vie, quoi. TEMOIGNAGES D'AUDITEURS
PAR MESSAGES (SMS ET INTERNET) ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE
95. Difool : C'est ce qu'on nous disait sur les SMS, il y avait
un SMS... c'était qui qui disait ça, je sais même plus,
<< t'as qu'à faire croire que tu sors avec une meuf et tu te tapes
son frère >>, c'était ça, en gros, le... Enfin bon,
t'as qu'à faire croire que tu sors avec une meuf et puis... enfin, t'as
qu'à faire croire rien du tout à la limite. Enfin, tu vois, c'est
pas une honte, hein, le truc. Et toi, t'as honte d'être homo ?
96. André : Non, pas du tout, je suis fier d'ailleurs,
donc...
97. Difool : Oui, il y a pas en être fier non plus, mais
bon.
98. Cédric : Enfin, tu te caches pas, quoi, t'es pas...
t'as pas honte de toi, quoi.
99. André : Non.
100. Cédric : Faut pas te forcer pour tes parents, moi,
je pense, hein.
101. Marie : Et t'es avec un mec, là ?
102. Difool : Enfin t'as 20 ans en plus...
103. André : Euh, ouais, avant j'étais avec un
mec, mais dès que mes parents ils l'ont su, quoi, euh, ils m'ont dit
<< casse avec lui, sinon je l'appelle et je le traite de tous les noms
>>, donc, euh...
104. Marie (stupéfaite) : Oh !
105. Cédric : Ils sont bloqués
là-dessus.
106. Marie : Quelle horreur !
107. Difool : Ben déjà, tu peux appeler ton mec et
lui expliquer un peu cette histoire, parce que tu vois...
108. André : Ben ouais, entre temps je l'ai
rappelé...
109. Difool : Il a compris ou pas ?
110. André : Ben oui, il a compris.
11 1. Marie : Ben c'est sûr, il est passé,
j'imagine, par une phase similaire.
112. Difool : Ouais.
1 13. Marie : Donc je comprend.
114. Romano : En même temps, c'est assez
extrême...
1 15. Marie : C'est horrible, là.
1 16. Romano : ...tout le monde pète les plombs dans la
famille.
1 17. Difool : Oui, tu vois, il faut pas qu'ils se mettent dans
cet état...
118. Romano : Ouais, ça va...
1 19. Difool : Je veux bien que, bon, à la limite, s'ils
s'en doutaient pas, ça leur a fait un petit peut bizarre, mais, il y a
pas...
120. Romano : Ouais, au final, c'est pas grave, tu vois, t'es
pas malade, t'as rien, quoi...
121. Difool : Bah oui, et puis l'essentiel pour eux c'est que tu
sois heureux, si t'es heureux avec un gars, bon...
122. Marie : Bien sûr !
123. Difool : Autant que tu sois heureux avec un gars que
malheureux avec une fille.
124. André : Oui.
125. Difool : Ben oui.
126. Romano : À la limite, tu leur dis plus rien, quoi,
tu vois, ils te demandent, tu restes vague...
127. André : Oui.
128. Difool : Bah oui.
129. Romano : Ouais, mais voilà, quoi, parce que si tu
leur en parles et que ça les traumatise, ça sert à rien
non plus, s'ils sont vraiment bloqués, bon... Enfin, je sais pas, moi je
vois pas d'autres... Non, mais c'est vrai, moi je pense que je ferais
ça, si mes parents étaient vraiment bloqués, tu vois, ils
me poseraient des questions, je resterais vague...
130. Difool : Non, André ?
131. André : Ouais, mais voilà, quoi.
132. Romano : Si à chaque fois, ils te la remettent dans
la gueule, si tu leur dis que t'as un mec, que c'est la crise de nerfs et
compagnie, ça sert à rien non plus, quoi.
133. Difool : Il y a El Brigant qui dit << essaie de
regarder les photos de la Marie, mates-la bien, et après, tu
redeviendras hétéro >>.
134. Marie : C'est mignon... Non, mais tu devrais
peut-être, si t'arrives pas à discuter avec eux, écrire une
lettre avec tout ce que tu ressens, vis-à-vis d'eux, vis-à-vis de
toi...
135. Difool : Par rapport à leur réaction,
ça va être difficile, mais au moins tu auras rien à te
reprocher.
136. Marie : Bien sûr, mais au moins une lettre, tu
expliques bien ce que tu penses, ce que tu ressens, tout ça, même
sur le moment s'ils le prennent pas bien, la lettre ils la gardent, et avec un
petit peu de recul, tu vois, peut-être ils peuvent comprendre. Même
si c'est dans un an, j'en sais rien, mais ça peut peut-être
apporter quelque chose, quoi. De l'eau au moulin, en tout cas.
137. Romano : Ben, il faut espérer que ça
évolue un peu, parce que de toute façon, ça peut
difficilement être pire, quoi.
138. Difool : Bon, quitte pas, André. Si vous avez deux
trois témoignages pour André, appelez-nous vite, là,
allez-y sur le 41SKY,
skyrock.com si c'est occupé sur
le standard, sinon, 01.53.40.30.20. Tu restes là, André ?
139. André : Ok, pas de problème.
140. Difool : Et tu vas le revoir, ton gars ?
141. André : Ouais, si tu veux, je le revois de temps en
temps, mais...
142. Difool : Bon, ben ça va, t'as pas rompu ton histoire
d'amour à cause de cette histoire, tu vois, c'est pas tes parents qui
vont décider avec qui tu vas vivre, hein ?
143. André : Bah, ouais.
144. Difool : Et puis c'est pas eux qui vont vivre avec surtout,
tu vois, il vaut mieux que ce soit toi qui choisisse. Bon, reste là,
André, bouges pas. Allez-y hein, là, tout le monde pour
André... Euh, << Questions express >>
[Session << Question express >>, fin de
l'émission]
[Reprise le lendemain, à 21h41]
145. Difool : Alors, André, ses parents ont
découvert qu'il était homosexuel, et...
146. Romano (imitant les parents) : << Oui, et tu vas
devenir hétéro, c'est moi qui te le dis ! >>
147. Difool : Et puis ça c'est mal passé, parce
que le père, la mère, les grands parents, enfin tout le monde
dans la famille...
148. Romano : Ah oui, ça a été crises de
nerfs et compagnie, quoi.
149. Difool : Alors en gros, pour résumer, le
grand-père a fait une crise de nerfs et s'est retrouvé à
l'hôpital, la mère est sous cachetons...
150. Romano : Ouais, plus ou moins dépressive.
151. Difool : Plutôt plus que moins d'ailleurs. Et
André, au milieu de tout ça, ils lui ont demandé <<
deviens hétéro >>.
152. Romano : Oui, alors que bon, on choisit pas trop, quoi.
153. Difool : J'imagine qu'on ne choisit pas trop, oui.
154. Marie : Ca, non, ça ne se commande pas.
155. Romano : Oui, et puis André, il aime pas du tout les
filles, quoi, il nous a dit hier... c'est pas son truc, quoi.
156. Marie : Il va pas se forcer.
TEMOIGNAGES FICTIONNELS DES MEMBRES DE
L'EQUIPE
157. Difool : Il a essayé, ça l'a pas trop fait
kiffer. Donc, si vous avez des réactions, là, par rapport
à André, déjà, votre réaction à vous,
et puis, je serais curieux de savoir, si vous aviez un enfant et qu'il vous
annonçait qu'il était homo, comment vous le prendriez ? Donc,
projetez-vous quelques années plus tard, pour nous dire, hein, et Romano
?
158. Romano : Déjà, il faut que je me mette en
tête d'avoir un enfant. (rires de Marie)
159. Difool : D'accord. Commence par ça. Et la Marie ?
160. Marie : Oui, ben moi je peux me projeter, hein, puisque
j'en ai déjà un.
161. Difool : Alors, ça te ferait quoi, la Marie ?
162. Marie : Je sais pas. Non, je crois que j'aurais pas trop de
problème vis-à-vis de ça. Non, vraiment, quoi, si mon fils
est heureux, il n'y a pas de problème.
163. Difool : Bon, ben écoutez, on va reparler avec
André. Comment il doit se comporter avec ses parents, en gros qui ont
l'air bien, bien bloqués.
164. Marie : Ouais, grave.
165. Difool : On vous retrouve tout à l'heure.
[Coupure publicitaire et musicale, et un autre cas est
traité]
RAPPEL ET POINT SUR LE PROBLEME DE L'AUDITEUR
166. Difool : Bonjour, André, d'abord.
167. André : Ca va, tout le monde ?
168. Difool : Ouais, écoute, ça va pas mal,
André. Je racontais un peu ton histoire André, donc toi t'es
homo, t'es parents l'ont découvert, ils ont, comment dire, mal pris la
chose, et donc ils t'ont explique en gros que ou te devenais
hétéro -je reprends leurs termes, hein- ou tu partais de la
maison, c'est ça ?
169. André : Ouais, c'est ça, ouais.
170. Difool : Voilà, et toi, t'as pas envie de casser
avec tes parents, tout ça, et tu voudrais savoir comment réagir,
et on précise que c'est l'ensemble de la famille qui est
contaminé puisque le grand-père a fait une crise de nerfs, il
s'est retrouvé à l'hosto, ta mère est sous cachetons parce
qu'elle est en dépression...
171. Romano : Et ton père ?
172. Difool : ...et ton père, ça va parce que bon,
comme tu lui as dit que t'allais devenir hétéro, bon... il croit
que c'est possible.
173. André : Euh... Oui, enfin, bon....
174. Difool : Oui, en fait, en gros, c'est un peu le bordel dans
la famille, c'est ça ?
175. André : Ouais.
176. Difool : Et toi, tu voulais des témoignages de gens
qui ont un peu vécu la même chose.
177. André : Ouais.
TEMOIGNAGE D'UNE AUDITRICE A L'ANTENNE ET POINTS DE VUE
DE L'EQUIPE
178. Difool : Bon alors, Emilie ?
179. Emilie : Ben, en fait j 'ai l'impression de voir ma
famille.
180. Difool : Ah, c'est sympa. Toi t'es hétéro,
t'es homo, t'es bi, t'es quoi ?
181. Emilie : Moi, je suis hétéro.
182. Difool : D'accord.
183. Emilie : Et en fait, à la base, on est trois
frères, donc on est des triplés.
184. Difool : Des triplés ? C'est dément,
ça ! [...] Deux garçons et une fille, c'est ça ?
185. Emilie : C'est ça, et en fait c'est mon grand
frère qui est homosexuel.
186. Difool : Donc, c'est marrant, il y a deux garçons,
une fille, deux frères un qui est hétéro et l'autre homo
?
187. Emilie : Ouais, c'est ça.
188. Difool : Et pourtant ils ont été
éduqués par les même parents, ils ont les mêmes
gènes... donc c'est vraiment un truc...
189. Emilie : Voilà, et en fait, on est vraiment trois
personnes complètement différentes et euh... on se comporte comme
trois personnes différentes, comment dire, on n'a pas du tout le
même caractère. Et donc, euh... moi et mon autre frère, on
se doutait qu'il allait devenir homosexuel parce que bon...
190. Difool : Il était un petit peu bizarre, dans sa
chambre, il y avait des posters de Steevy, et quand il sortait, il mettait...
non, mais comment il était, il était maniéré, il
était...
191. Emilie : Il était maniéré et assez
efféminé.
192. Difool : Ouais, donc, ça se voyait plus.
193. Emilie : Ouais voilà, donc mon père
pensait qu'il était attiré plus par la mode... et donc un jour,
on devait à notre anniversaire inviter des copains. Et donc on a tous
invité nos petit(e)s ami(e)s et lui il a invité son copain.
194. Difool : Ah ouais, donc lui il y a été cash,
il a jamais rien dit à tes parents, il les a juste mis devant le fait
accompli avec son mec.
195. Emilie : À la base, ils devaient pas être
là-bas. Mais de fil en aiguille, c'est arrivé aux oreilles de mes
parents qu'il était homosexuel. Donc il y a eu une petite discussion
devant tout le monde, ils l'ont pris, il lui ont dit << oui, si tu reste
à la maison, tu suis nos consignes, si tu veux rester avec ton mec, on
te met à la porte >>.
196. Difool : C'est fou, ça, hein ?
197. Emilie : Ouais, et donc à 18 ans, il a choisi de
prendre la porte parce que bon, il a dit qu'il l'aimait...
198. Difool : Ouais, et puis c'est aussi une question de
respect, tu vois...
199. Emilie : Voilà, et moi et mon frère, on
s'est un petit peu manifesté contre ça parce qu'on trouvait
ça complètement stupide et entre guillemets un petit peu raciste
de pas connaître la personne, de juste rester à l'aspect physique
de la personne.
200. Difool : Ouais, ou alors juste d'accepter son truc, ils
sont pas obligés de connaître la personne, au moins d'accepter la
vie de ton frère, de ton jumeau. De ton triplé.
201. Emilie : Et donc nous on s'est un petit peu
manifestés, on s'est dit que de toute façon, s'ils
réfléchissent bien, ils ont une chance sur deux que ça
marche. Que dans deux trois ans, peut-être une semaine, peut-être
que ça marchera plus, peut-être qu'il sera attiré par les
femmes et que...
202. Difool : Ouais, enfin tel que tu m'as décrit ton
frère, s'il a décidé de partir à 18 ans, il a a
priori choisi sa voie.
203. Emilie : Ouais, mais on voulait un peu rattraper...
204. Difool : Sa voie anale, Romano...
205. Romano : Ouais, c'est ça, oui... (rires)
TEMOIGNAGES D'AUDITEURS PAR MESSAGES (SMS ET INTERNET)
ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE
206. Difool : Evidemment, ouais. Non, mais il y a pas mal de
messages, hein, depuis tout à l'heure, làdessus, regarde, il y a
Raph, du Puy-de-Dôme, qui dit << moi si je dis à ma
mère que je suis homo, je suis mort, elle me jette de chez moi >>.
Ca j'arrive pas à comprendre parce que ça reste ton fils, quoi.
<< Si mon enfant était homo, je l'accepterais, car après
tout, c'est notre enfant, tant qu'il est heureux >>. Ouais, ça
c'est une réaction assez sage, c'est Marie qui nous dit ça. Il y
avait Abdel qui nous disait ça aussi, un message du même style
<< mon fils c'est mon fils, il fait ce qu'il veut >>. Et il y en a
d'autres qui sont beaucoup plus québlo, quand même, hein. Ya
Blakos, là, qui aurait du mal à accepter, y a Le Boss, du 18 qui
dit << c'est sa vie, il faut le laisser faire >>, y a Strange 974
qui nous dit << Chacun ses envies, je pense que c'est un choix, je
respecterai son choix tant qu'il le veut >> [message à propos d'un
autre sujet] Bon, ben écoute, il y a plein de messages... William qui a
la même chose que toi, regarde << appelez-moi car mon frère
est homo, mes parents l'ont mis à la porte parce qu'il était homo
>>.
207. Emilie : C'est mon frère.
208. Difool : Ah, c'est toi, William, alors ?
209. Emilie : Non, c'est mon autre frère.
210. Difool : Ah, pardon, je suis un peu en retard sur les
messages, moi.
211. Emilie : C'est pas grave. Ah, oui, tu l'as envoyé
à 21h43 [il est 22h01].
212. Difool : Ah, oui, donc il y a plein de messages. Vos
messages vont arriver.
213. Romano : Ne vous inquiétez pas, ils vont passer,
hein.
TEMOIGNAGE D'UNE AUDITRICE A L'ANTENNE ET POINTS DE VUE
DE L'EQUIPE
214. Difool : Ne vous inquiétez pas, il y a beaucoup de
monde. Et tu conseillerais quoi, toi, à André, dans cette
histoire ?
215. Emilie : En fait, ça fait cinq ans qu'il est
parti...
216. Difool : Qu'il y a eu le drame, oui.
217. Emilie : ... mes parents ont eu le temps de méditer
dessus, ils ont vu qu'ils sont toujours ensemble, et là, c'est eux qui
refont une approche vers nous.
218. Difool : Ah ouais, ils reviennent vers vous, ils reviennent
vers ton frère pour essayer de re-tisser les liens.
219. Romano : Ben c'est pas mal.
220. Difool : Oui.
221. Emilie : Voilà. Donc ils commencent à
apprendre, mais c'est lui maintenant qui repousse un petit peu, mais là,
cinq ans après, il reviennent un petit peu essayer de lier, quoi.
222. Difool : Avec tout le respect qu'on doit aux parents, tout
ça, moi je pense qu'il faut vivre sa vie en fonction de ses envies, tu
vois, toi tu... Il va pas se forcer...
223. Romano : ...d'être avec une meuf s'il aime pas
ça.
224. Difool : Ouais, d'être avec une meuf, ou vice-versa,
si...
225. Romano : Qu'il la laisse plutôt aux autre, hein.
226. Difool : Exactement, Romano, c'est pas con, ça
tiens. Non, mais c'est vrai, tu vois, c'est pas la peine de... Et bon, si tes
parents font une approche, c'est plutôt pas mal, c'est qu'ils ont un peu
compris, non ?
227. Romano : Ouais, ça progresse, quoi.
228. Emilie : Ouais, moi je pense qu'au début, ils
réagissent... parce que dans leur tête, c'est toujours fille avec
garçon, garçon avec fille, donc c'est pas compatible fille-fille
et garçon-garçon. Donc c'est clair et net, après un
moment, avoir médité à la question, et surtout
après que la vague guerre, honte famille, tout ça est
passé, ils réfléchissent qu'en fait du coup c'est encore
beaucoup plus pire que s'ils n'acceptaient pas de toujours faire la guerre
à leur enfant.
229. Difool : Ok.
230. Emilie : C'est pour ça qu'après, ils
méditent.
231 . Difool : Ben écoute, j 'espère que ça
va se passer comme ça pour André.
232. Emilie : Je lui souhaite.
233. Difool : Bah, écoute, je lui souhaite aussi. Merci
en tout cas de ton coup de fil. T'as un copain, toi Emilie, actuellement,
comment ça se passe ?
234. Emilie : Oui, et c'est encore le désastre pour mes
parents, enfin bon.
235. Difool : Pourquoi, parce qu'ils voudraient que tu sortes
avec une fille, maintenant ?
236. Emilie : Non, non...
237. Difool (imitant les parents) : « Oui, tu es
hétérosexuelle, ma fille, on a vu avec notre fils ça se
passe très bien...
238. Romano : ... oui, alors tu vas devenir gouine ».
(rires)
[Autre sujet]
239. Difool : Si vous avez des témoignages, vous nous
passez un coup de fil. Il y a plein de mecs qui laissent des messages, qui ont
peur de passer... enfin qui ont peur de passer à l'antenne, à la
limite, on prend un pseudo, vous inquiétez pas, hein. Si vous voulez
débarquer ici, laissez bien votre numéro de
téléphone sur le 41SKY, le
skyrock.com.
[Nouvelles footballistiques]
Homophobie / cas N°2 / 27 octobre 2004 « Je suis
homosexuel, mes parents sont homophobes » / séquence
diffusée entre 23h00 et 23h54 :
EXPOSE ET EVALUATION DU PROBLEME DE L'AUDITEUR
APPELLANT
1. Difool : Alors, qu'est-ce qui t'arrive ?
2. Brian : Ben, en fait, tu vois, le problème c'est que
je suis gay.
3. Difool : T'es gay ?
4. Marie : Enfin, c'est pas un problème.
5. Difool : Tu n'es pas joyeux, tu es homo (rires). C'est
à la page 45 des blagues du Belge.
6. Marie : Evidemment.
7. Brian : Et donc, je te disais, j'en ai parlé à
tous mes potes, et tout, tu vois, ça se passe super bien, tu vois. Mais
en fait...
8. Difool : Donc, tu le vis pas trop comme un problème,
en fait ?
9. Brian : Le seul problème c'est que j'en ai
parlé avec mes parents, et ils sont grave homophobes, tu vois, un truc
de malade.
10. Difool : C'est quoi, c'est dès qu'il y a un film
à la télé (imitant le père) << regarde-moi
ces pédés >>...
11. Romano (imitant le père) : << Et ils se roulent
des pelles ! >>
12. Marie (imitant le père) : << C'est pas normal,
hein ! >>
13. Brian : Mais grave. Et genre, tu vois, la pub pour Pink TV
ou un truc comme ça,
14. Difool : Oui, et c'est hallucinant, Pink TV, t'as 10.000
abonnés, un quart d'heure dans les JT, quand même.
15. Marie : Ouais, un truc de fou.
16. Difool : Des cars podiums qui étaient envoyés
dans le truc, des reportages en direct, LCI s'est déplacée, c'est
quand même hallucinant. 5000 personnes invitées à la
fête, le tout-Paris, le show business...
17. Romano : Le show business réuni autour de Pink TV
18. Difool : Ouais, donc j'ai vu, et quand ils voyaient
ça, ils réagissaient comment ?
19. Brian : Ben, ils ont dit << ouais, c'est quoi ce
bordel ? >> et tout, << c'est ouf, les gens >>...
20. Difool : Mais ça les dérange pas, ils ont
qu'à pas regarder s'ils aiment pas.
21. Brian : Ah, non, mais c'est des malades, ils font <<
ouais, de toute façon, les pédés c'est comme les
pédophiles, c'est pas normal >> et tout...
22. Difool : Ah ouais, ils sont vraiment...
23. Romano : Ils sont bien québlo.
24. Difool : Ah ouais, ils sont bien québlo.
25. Brian : Un truc de malade.
26. Difool : Tes parents ils réagissent comme ça
et tes potes ils ont réagi... tu l'as dit à tous tes potes ou tu
l'as dit à certains potes ?
27. Brian : Je l'ai dit à tous mes potes, en fait.
28. Difool : Et ils ont réagi comment quand ils l'ont
appris ? Ils savaient déjà ? Ils s'en doutaient ?
29. Brian : Non, parce que je fais pas du tout, tu vois.
30. Difool : Ouais, ok, ouais. Et donc ils ont été
étonnés, comment ils ont réagi ?
31. Brian : Grave ! Le truc, je leur racontais, ils me disaient
<< attends, tu te fous de ma gueule et tout >>
32. Difool : Et comment tu l'as dit, t'es allé vers eux,
tu... ?
33. Marie : Tu t'es lancé vis-à-vis de tout le
monde, ou c'est...
34. Difool : Tu les as pris un par un, t'as fait comment ?
35. Brian : Tu vois, c'était, je voyais le film entre
guillemets, tu vois. Je voyais ceux avec qui ça marcherait mieux, tu
vois, j'en ai parlé petit à petit, tu vois.
36. Difool : Tu les as mis
37. Brian : Je tâtais le terrain, tu vois, je disais
<< tu penses quoi... >>, ouais, ils font << ouais,
franchement, je m'en bas les couilles et tout... du moment que tu es heureux...
>>
38. Difool : bah oui, c'est vrai, hein. Heureusement que c'est
de plus en plus comme ça, tu vois, l'attitude de tes parents, elle est
de moins en moins répandue.
39. Brian : Mais à cause de mes parents, ça me
créé un blocage, tu vois, j'arrive pas à aller vers les
gars.
40. Difool : Ah ouais, parce que tu as peur que tes parents un
jour l'apprennent.
41. Brian : Voilà, c'est exactement ça.
42. Difool : t'as des frères, des soeurs, t'es tout seul
?
43. Brian : Non, je suis fils unique.
44. Difool : T'es fils unique, en plus.
45. Marie : Oh, en plus.
46. Difool : Ouais, donc tu peux pas en parler à un grand
frère...
47. Brian : Ouais, donc tu vois c'est super chaud, donc c'est
pour ça que je te dis, c'est un truc de malade.
48. Cédric : Mais tes parents ils t'ont
déjà vu avec des meufs ?
49. Brian : Ouais.
50. Difool : Donc ils imaginent que t'as une vie classique et
tout ça, c'est ça ?
51. Brian : Mais en plus, tu vois, comme je te disais, tu vois,
ça se voit trop pas, tu vois.
52. Difool : Mais ça après tu vis... tu vois, il y
en a plein ça se voit pas...
53. Marie : Oh, bah oui.
54. Difool : Chacun vit comme il veut.
55. Marie : Et il y en a un paquet, hein.
56. Difool : Et, euh... Alors, qu'est-ce qu'on nous dit,
là, sur... Si vous avez deux trois trucs à dire à
Brian...
57. Romano : Tu t'es jamais... tapé de mecs encore ?
58. Brian : Non, parce que ça me québlo grave,
quoi.
59. Romano : À cause de tes parents.
60. Difool : À cause de ça, en fait ?
61. Brian : Non, parce que tu vois, je me dis, ouais, je me
prends la tête, quoi.
62. Difool : Ouais, ben tu peux très bien avoir un gars
sans forcément... sans forcément le dire à tes parents,
hein.
63. Brian : Ouais, ouais...
64. Marie : C'est peut-être pas facile aussi.
65. Romano : Mais t'as peur de te faire griller, t'as peur de
quoi, en fait ?
66. Brian : Ouais, c'est ça, en fait... et en fait, tu
vois, on va dire que j'ai pas trop eu l'occasion, tu vois.
67. Difool : C'est marrant tu l'as dit avant d'avoir fait un
truc avec un garçon, tu l'as déjà dit à tes potes
que t'étais homo alors que t'as jamais rien fait...
68. Brian : Ouais, non mais, tu vois, j'sais pas.
TEMOIGNAGES D'AUDITEURS PAR MESSAGES (SMS ET INTERNET)
ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE
69. Difool : C'est marrant. Et tiens regarde, on nous dit
<< c'est pas une tare >>, ouais, mais tes parents... Enfin pour toi
c'est pas une tare, c'est clair, mais tes parents ils ont...
70. Romano : Ah ouais, ils sont bien bloqués, hein.
71. Difool : Ouais, ils sont bien bloqués par rapport
à ça. Il y a Aphrodisiac du 79 qui nous dit, c'est drôle,
<< t'as qu'à leur dire que ça vient d'eux si t'es homo
>>.
72. Marie : Oh non, arrêtes...
73. Difool : << Ca vient de tes parents, ils ont
été contre, donc tu le deviens, c'est la rébellion.
>>
74. Brian : Ils ont été punis (rires).
75. Difool : C'est Aphrodisiac qui nous dit ça. Oui, tu
leur dis ça, oui c'est de votre faute. Non, en plus ça vient
de... bah t'es comme ça t'es comme ça, c'est la vie, hein.
76. Romano : On choisit pas.
77. Difool : Bah, oui, hein.
78. Marie : Non, mais justement, t'as pas besoin de leur dire
à tes parents, tu vois, si t'as une relation avec un mec, euh... et que
t'arrives avec un pote à la maison, pour eux c'est naturel.
79. Brian : Hmm.
80. Marie : Tu vois, s'ils savent pas. Je pense que tu as des
copines, tu viens avec à la maison, ils les connaissent et tout
ça, non ?
81. Brian : Ouais, c'est trop chaud. C'est chaud, quand
même.
82. Difool : Ouais, t'amène pas grand monde à la
maison...
83. Marie : Ah ouais, t'as peur.
84. Brian : Non, mais tu vois j 'emmène vite fait deux
trois potes tu vois, et j 'emmène des copines tu vois...
85. Difool : Ouais, mais de toute façon t'as jamais eu de
mecs, donc t'as jamais pu ramener de mecs à la maison, hein. Bon,
<< Moi mon pote est gay, ses parents l'ont jeté de chez lui, il
habite maintenant chez son mec >>, c'est qui, Boys, dans le 93. Euh...
<< Vas-y Brian, on est tous avec toi... même si t'es gay >>
(rires) c'est gentil, hein ? Oziel, du 93 aussi, 19 ans. Bon, et qu'est-ce
qu'on a... Ben je sais pas ce qu'on peut faire pour toi, hein, Brian ?
86. Brian : Ben, moi en fait, j'aurais aimé avoir des
témoignages et si je pouvais avoir des numéros de gars aussi, si
c'est possible.
87. Difool : Hmm. Donc tu veux des gars qui seraient un peu
passés par le même... Mais pourquoi t'as vraiment envie d'en
parler à tes parents, c'est ça que je comprends pas. Parce que tu
vois, s'ils sont vraiment bloqués... tu vas pas pouvoir...
88. Brian : Ben en fait parce que ça me, on va dire
ça me gène, tu vois, d'un côté, tu vois.
89. Difool : Hmm.
90. Brian : Je me dis c'est chaud, tu vois, avant avec mes
parents, avec mes reups, je parlais de tout, tu vois. Et, tu vois, ça
me, j'sais pas, ça fait chelou.
91. Cédric : C'est le fait de leur cacher quelque chose,
quoi, qui te... met mal à l'aise.
92. Brian : Ouais, d'un côté, ouais, c'est vrai
que...
93. Marie : Mais t'as conscience que ça va mettre une
barrière énorme entre tes parents et toi, même s'il y en a
déjà une, t'es conscient que ça va...
94. Cédric : Bah écoute, ça dépend
comment c'est amené aussi...
95. Marie : Bah écoute, vu la mentalité de ses
parents...
96. Romano : Oui, ça va être compliqué.
97. Marie : Ca va être difficile.
98. Brian : Moi aussi, je me disais d'attendre que je sois
posé avec un gars et tout, et après...
99. Romano : C'est ce que j'allais dire, pourquoi tu commences
pas, déjà, tu essaies une relation avec un mec quoi...
100. Marie : Bah bien sûr !
101. Romano : Et après, à ce moment-là,
t'aviseras, quoi.
102. Difool : Bah, oui.
Marie : Quand tu seras amoureux et que tu auras envie d'assumer
ton mec et tout ça, quoi...
103. Romano : Tu te casses trop la tête, hein.
104. Difool : Toi, c'est déjà bien, t'en as
déjà parlé à tes potes alors que c'est vrai, t'as
jamais rien fait pour l'instant. Pour l'instant, t'es ni homo ni pas homo,
t'es... t'es vierge. Donc...
105. Romano : Tes parents, tu leur dis rien, vis ton truc,
voilà, commence déjà par trouver un mec, et à ce
moment-là, tu verras comment ça ce passe.
106. Difool : Regardes, on nous dit << Si t'es parents
t'aiment vraiment, ils l'accepteront >>...
107. Brian : Mois je suis sûr, ils me mettent dehors un
truc de ouf, hein.
108. Difool : Ils te mettent dehors, toi, tu penses ?
109. Brian : Ah ouais...
1 10. Difool : Il y en a plein qui disent << moi aussi, je
pense que mes parents m'accepteraient si j'étais comme ça
>>
11 1. Marie : Vu les idées, en plus t'es fils unique, ta
mère, je pense qu'elle va faire une attaque cardiaque, là. Quand
je dis fils unique c'est parce que les mères, elles sont toujours
là, ouais, je veux être grand-mère, et si t'es fils unique,
elle va mal le prendre, hein.
1 12. Difool : Et quand ils voient des films comme << La
cage aux folles >> par exemple... 113. Brian : Alors là, ils
pètent un câble.
1 14. Romano (imitant le père) : << Regardes-moi
ça, les pédés ! >> (rires)
1 15. Marie : Est-ce qu'ils regardent les << Queers
>> le samedi ?
1 16. Difool : Ouais, ou quand ils voient les << Queers
>> le samedi, ouais ?
1 17. Brian : Non, parce que mes parents ils disent que c'est
des émissions qui servent à rien en fait. Parce que mes
parents, on va le dire vulgairement, ils sont un petit peu cons, tu vois, ils
font
<< ouais, ils veulent nous envahir, et tout, nah nah nah...
>>. Ils racontent... mais des fois ils disent... mais...
1 18. Difool : << Ils vont nous envahir >>, ils
disent ? Non mais ils sont, ils sont... il faut qu'ils se calment, hein.
1 19. Marie : Ils sont partis, hein.
120. Cédric : Ah, ouais, ouais, ouais...
121. Romano : Ah, oui, il faut qu'ils se détendent, un
peu...
122. Difool : Qu'il regardent la vie du bon
côté.
123. Cédric : Dans leur entourage, ils ont pas...
124. Romano (imitant le père) : << Oui, c'est les
envahisseurs (rires). Ils arrivent (rires). Ils ont leur chaîne de
télé. >> (fou rire)
125. Difool : Faut pas être parano, et puis c'est pas
grave, hein.
126. Romano : Ah ouais, ouais, ouais.
127. Marie : Ah, non, loin de là, hein, c'est de l'amour
à la base, donc...
128. Difool : Bah ouais, tu vois.
129. Romano : Faut pas qu'ils s'inquiètent tes parents,
il va rien leur arriver, hein.
130. Difool : Regarde, ça arrive aussi aux filles, il y a
Billy qui nous dit...
131. Brian : En fait tu vois, je pète un câble.
132. Difool : Il y a Billy qui nous dit << Je suis bi, et
j'ose même pas en parler à mes copines >>. Ben t'es pas
obligée, c'est ta vie à toi, aussi, hein.
133. Marie : Mais bien sûr !
134. Difool : Donc que tu aies quelqu'un à qui en parler,
quelqu'un qui soit au courant, parce que c'est vrai que c'est quand même
bien de pouvoir se...
135. Cédric : Se confier.
136. Romano : C'est bien que tes potes soient au courant, tes
parents, machin, de toute façon, hein...
137. Difool : T'as au moins tes potes pour te confier, mais bon.
Et tes parents, tes potes étant au courant, tes parents, ils vont
peut-être le savoir un jour ou l'autre, j'en sais rien.
138. Marie : Ouais, ça c'est possible.
139. Brian : Ah, mais c'est chaud, hein.
140. Difool : Bah oui.
141. Romano : Vas pas les voir aujourd'hui en leur disant, tu
vois...
142. Marie : Ah, non, non, non, ça servirait à
rien, hein.
143. Romano : Pour le moment, c'est pas la peine, quoi.
144. Marie : Attends déjà de plus vivre chez eux,
d'avoir une relation posée, et...
145. Cédric : Non, mais peut-être qu'un jour,
peut-être quand ils vont apprendre que t'es homo, ils vont changer
d'idée, tu vois.
146. Romano : Ouais, pas sûr, hein.
147. Brian : Ouais, peut-être, ouais.
148. Cédric : Imagines, t'a un bon ami...
149. Difool : Oui, personne n'est bloqué,
j'espère, définitivement. Allez-y laissez nous des messages
41SKY,
skyrock.com et puis 01.53.40.30.20.
Reste-là Brian, on va revenir.
150. Brian : Bon, ben je vous remercie, à tout à
l'heure.
[Autre sujet]
151. Difool : Et puis on a des réactions
déjà pour Brian, on nous dit << faut assumer, afin
d'être bien dans sa peau >>, c'est Féminine. Ouais, mais
assumer quand tu as des parents homophobes et que toi t'es homo, c'est chaud
quand même, hein. Si tes parents tu les aime, tout ça, t'as
plutôt envie qu'ils t'aiment, et si... si t'entends un discours
homophobe. T'entends un discours homophobe depuis que t'es tout petit, toi, en
fait, à la maison, Brian ?
152. Brian : Ouais, ils ont toujours été comme
ça, ouais.
153. Difool : Ben ça se passe pas toujours pareil, et
heureusement, regarde, on nous dit << j'ai deux super potes homo, et les
parents s'en foutent, chacun sa sexualité, les barrières, c'est
n'importe quoi, au contraire >>, tout ça... Donc tu vois, c'est
ouvert dans certains coins, c'est pas trop ouvert dans d'autres. Et puis toi tu
es tombé, bon tes parents, ils sont...
154. Romano : Ouais, ils sont bien bien bloqués.
155. Difool : Ouais, ils sont un peu extrémistes,
là dessus
156. Brian : C'est des malades
157. Romano : Non, en plus, ils font des comparaisons immondes,
quoi, tu sais...
158. Difool : Il y a Farid aussi qui disait qu'il
était à peu près dans la même situation que toi.
Laisse ton numéro, Farid, même si tu veux pas passer à
l'antenne, même si tu flippes un peu, euh... laisse ton numéro au
moins, qu'on vous mette en contact, là. Bon, reste là, Brian, on
va y revenir.
159. Brian : Ok, ça marche, à toute à
l'heure.
[Autre sujet]
TEMOIGNAGE D'UN AUDITEUR A L'ANTENNE ET POINTS DE VUE DE
L'EQUIPE
160. Difool : Allez, on va prendre Yannick, là, au
téléphone, avec nous. Yannick à Grenoble, Salut
Grenoblois.
161. Yannick : Salut Difool !
162. Difool : Comment ça va?
163. Yannick : Alors, Yannick, ouais, t'appelles pour Brian.
T'es là, Brian, aussi ?
164. Brian : Ouais, je suis là.
165. Difool : Alors toi, Brian, t'es gay, comme tu nous as dit
tout à l'heure. Tu, euh, bon, tu l'assumes plutôt bien puisque
t'en as parlé à tes potes. Enfin, t'es gay, pour l'instant tu
préfères les garçons, mais t'as jamais eu de relations
avec qui que ce soit. Ni fille, ni garçon ? T'as jamais embrassé
quelqu'un sur la bouche ?
166. Brian : Si, ah, quand même, si !
167. Difool : Des filles ou des garçons ?
168. Brian : Ah, bah, des filles.
169. Difool : Jamais des garçons ?
170. Brian : Non.
171. Difool : Et, euh... donc il y a eu pas mal de messages pour
toi, il y avait aussi pas mal de coups de fil. Donc toi tu voudrais en parler
à tes parents et tes parents sont particulièrement homophobes.
172. Brian : Ouais, c'est ça.
173. Difool : Et t'en as parlé à tes potes et
c'est passé et tes parents, t'es sûr que ça passera pas,
quoi.
174. Brian : Ah, ben c'est pas la peine d'en parler, c'est
clair, ça passera pas.
175. Difool : Ca passera pas. Aïe... bah, si ça
passera pas, nous on disait pourquoi tu veux leur en parler ? Parce que t'as
peur qu'ils le découvrent comme ça ?
176. Brian : Ouais, c'est ça, ouais.
177. Difool : Bon. Alors ce qu'on va faire, on va prendre
Yannick. T'es là, Yannick ?
178. Yannick : Je suis là.
179. Difool : Tu es là. Bordelais, 20 ans. Non,
Grenoblois, 20 ans, excuse-moi, oui.
180. Yannick : Attention, ne pas confondre.
181. Difool : Excuse-moi, Yannick. (rires) Alors, Yannick,
dis-nous.
182. Yannick : J'appelais parce que j'étais un peu dans
le même cas que Brian. Moi, j'ai commencé à dire à
mes amis tout ça que j'étais gay quand j'avais... quand j'allais
en première. Donc ça remonte. Et en fait je l'ai dit à mes
parents parce qu'on se sent beaucoup mieux quand on le dit à ses
parents. Enfin, je sais pas, c'est...
183. Difool : Mouais. Ils sont comment, tes parents, toi ?
184. Yannick : Franchement contre.
185. Difool : Mais contre... enfin << contre
>>...
186. Marie : Oui, << contre >>, ça veut rien
dire.
187. Difool : Contre au point des parents de Brian, ou... quand
même pas ?
188. Yannick : Non, quand même pas parce que... Quand je
l'ai dit à ma mère, bon, c'est sûr que quand je lui ai dit,
elle s'est mise à chialer, pour elle c'était une maladie...
189. Difool (imitant la mère) : << Ah, mon fils, tu
es malade... >>
190. Yannick : Ah, carrément.
191. Difool : Ah, ouais, à ce point, ouais.
192. Yannick : c'était << t'inquiètes pas,
ça va passer, t'es encore jeune >>
[Quelques secondes de problèmes de communication]
TEMOIGNAGES D'AUDITEURS PAR MESSAGES (SMS ET INTERNET)
ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE
193. Difool : Et toi, donc, ouais, toi, ça s'est bien
passé. Mais c'est pas pour tout le monde pareil, regarde, il y a des
messages, là... << moi j'en ai parlé à mes parents,
je regrette, j'ai plus de contact avec eux. >> Donc t'as un peu peur
qu'il t'arrive ça, Brian, toi ?
194. Brian : Ouais, c'est ça, exactement, ouais.
195. Difool : Hmm. << Je suis pas homo, mais il serait
temps que les préjugés sur les homos disparaissent. >> Oui.
Ben, les préjugés, ils sont pas près de disparaître
parce que quand tu vois des homos à la télé, je sais pas
si... en général, ils sont toujours très caricaturaux,
quoi.
196. Romano : Ouais, c'est des caricatures, c'est clair.
197. Difool : C'est la représentation à la
télé qui pose un problème à tes parents, c'est
ça ?
198. Brian : C'est exactement ça.
199. Romano : Ouais, en fait, tes parents, ils connaissent pas
d'autres homos que ceux qu'ils voient à la télé, quoi.
200. Brian : Ouais, franchement, parce que quand tu vois ceux
qui sont à la télé...
201. Difool : Bah, à la télé ils montrent
que les caricatures, enfin, les caricatures, les gens ils font ce qu'ils
veulent, mais...
202. Romano : Ouais, mais tous les homos ne sont pas comme
ça.
203. Brian : Exactement, ouais.
204. Difool : Il n'y a qu'un type d'homo, ouais, qu'on voit
à la télé.
205. Brian : Parce que franchement, à la
télé, quand tu vois, un homo, tu fais, ouais, c'est une folle, ou
quelque chose comme ça, tu vois. Et franchement tout le monde est pas
comme ça.
206. Difool : Oh, ils ont le droit de faire comme ça,
hein...
207. Brian : Ouais, ouais, ils ont le droit de faire ça,
je veux dire, j'ai rien contre eux, tu vois...
208. Difool : Toi, t'aimerais bien être
représenté aussi quoi, c'est-à-dire qu'on voie un homo qui
est pas forcément caricatural.
209. Brian : Mes parents, ils ont l'image des homos comme...
210. Difool : La cage aux folles.
21 1. Brian : Exactement.
212. Romano : Comme des Queers.
213. Marie : Non, mais il y a forcément des mecs connus,
ils savent pas que c'est des... qu'ils sont homos, hein.
214. Difool : Ils ont sans doute des amis, ou des gars dans la
famille qui...
215. Romano : Ouais, qui sont homos...
216. Marie : Sans le savoir.
217. Difool : Bah, oui. Donc, c'est vrai. << Mets-toi une
moustache >>
218. Marie (ironique) : Bien sûr !
219. Difool : Merci du message, Bradpitt << ça fait
viril >>.
220. Marie : Oui...
221. Difool : Je suis pas sûr que ça arrange les
choses, ça peut aussi faire village people, et ça c'est pas
dément.
222. Romano : Ouais.
223. Marie : Ah, c'est horrible.
224. Romano : Après tu mets le costume de policier,
là. (rires)
225. Difool : Et là, c'est vrai, c'est horrible.
<< Tu devrais pas leur en parler, à tes parents >>, regarde,
il y a des messages, alors c'est pas moi qui dit ça, c'est les messages.
. << Tu devrais pas leur en parler, à tes parents. Ils le
découvriront suffisamment tôt >> et il y a des messages
inverses : << plus tôt ils le découvriront, mieux ce sera
pour toi >>, ça c'est Strasbourgeois qui nous laisse le SMS,
là.
226. Brian : D'un côté, mes potes ils me disent
ça, ils me disent << ouais, attends d'être posé avec
un gars et après tu leur parleras >>.
227. Difool : Bah oui. Et puis t'as des gens,
déjà, à qui te confier, tu vois, il y a des messages tout
à l'heure : << moi je peux en parler à personne, ni
à mes potes, ni à mes parents >>. Donc, tu vois, toi tu as
au moins tes...
228. Romano : T'as au moins tes potes, ouais.
229. Difool : Bah, oui, tu peux en parler avec eux, hein.
230. Brian : Ouais, c'est clair.
231. Difool : Hmm. Et les filles, vraiment, ça
t'intéresse pas du tout ?
232. Brian : Ah, non, pas du tout.
233. Difool : Pas du tout.
234. Brian : J'ai eu, entre guillemets, l'expérience,
mais ça m'intéresse pas du tout.
235. Difool : Ouais, c'est pas ton kif, quoi.
236. Brian : Ah, non, pas du tout.
237. Romano : Mais quand tu penses à une fille, tu bandes
pas, quoi ?
238. Brian : Non.
239. Difool : << Comment tu t'es rendu compte que
t'étais gay ? >> nous demande Minette, là.
240. Brian : Parce que en fait, euh, je suis
déjà sorti avec des meufs et j'ai déjà fais des
trucs, tu vois, et j'ai vu que ça me plaisait pas autant que ça,
tu vois. Et, tu sais, dès que je voyais un gars, tu vois, je me
disais...
241. Difool : Ouais, un gars, en fait ça t'excite
alors qu'une meuf ça t'excite pas.
242. Brian : Exactement.
243. Difool : << J'ai des amis qui étaient homos,
et ses parents l'ont bien vécu, pourtant au début c'était
pas gagné >>. Bon.
244. Romano : Il faut espérer que tes parents ils
évoluent un peu, quoi. Même pour eux, parce que c'est chaud.
245. Difool : Il faut qu'ils se détendent un peu, oui.
246. Romano : Mais sinon, tu sais, comme genre de vedette de la
télé ou de je sais pas quoi, c'est qui qui te plairait comme mec
?
247. Brian : Mon style de gars ?
248. Difool : Ouais, c'est quoi ton style de gars, ouais ?
249. Brian : Bonne question, euh... franchement, moi...
250. Difool : Tu peux également prendre des exemples dans
l'équipe, hein. Tu as Romano, Cédric...
251. Brian : (rires) Romano, Romano !
252. Difool : Parce qu'il est très anal, c'est ça
? (rires)
253. Brian : Non, mais c'est plutôt, tu vois, bien foutu,
blond aux yeux clairs, tu vois.
254. Difool : D'accord, le style Norvégien.
255. Brian : Ouais, on va dire ça comme ça.
256. Difool : Un peu comme... comment, l'autre, de Nice People,
le Suédois...
257. Romano : Nale.
258. Difool : Voilà, Nale.
259. Romano : Ah, il faut s'en souvenir de lui, hein, il faut
aller chercher loin.
260. Difool : Bah oui, mais rappelez-vous.
261. Brian : Je vois trop pas c'est qui. Je vois pas trop...
262. Romano : Non, mais c'était un grand blond qui
était dans une émission de TF1 << Nice people >>,
là.
263. Difool : Je te rassure, c'est pas très grave
(rires). Bon, reste avec nous Brian. C'est le même problème aussi
pour les nans, hein. Je lisais le message de Méli tout à l'heure,
là, j'ai le message de Sonia qui a le même souci, qui dit <<
si j'en parle à mes soeurs, c'est l'horreur, alors ne même pas
penser aux parents >>. Ah, ouais. << N'en parle pas à tes
parents >> pour Ben, du Loiret, là. << Vis ta vie,
trouves-toi un mec, et après t'en parleras peut-être à tes
parents si tu en sens le besoin >>, c'est le message du Polac, salut
à toi le Polac. Bon, ben reste dans le coin, Brian. Ne bouges pas. On va
prendre Audrey, là, au téléphone, et puis vous tous, hein,
allez-y : 01.53.40.30.20. Audrey, t'es Marseillaise ?
TEMOIGNAGES D'AUDITEURS A L'ANTENNE ET POINTS DE VUE DE
L'EQUIPE
264. Audrey : Oui.
265. Difool : Bonjour Audrey. Tu ferais quoi, toi, si
t'étais à la place de Brian ? [Audrey appelle pour un autre
sujet]
266. Audrey : Euh...
267. Difool : T'en parlerais à tes parents, tu le dirais
? Tu ferais quoi ?
268. Audrey : Euh, non, j'en parlerais pas à mes parents,
j'attendrais d'avoir une relation sérieuse avant d'en parler.
269. Difool : Ouais, je pense que c'est pas plus mal, hein.
Comme dirait Romano, mettre la charrue avant les boeufs.
270. Romano : Oui, c'est pas bon de vendre la peau de l'ours
avant de l'avoir tué.
271. Difool : Aussi, oui.
[Autre sujet]
272. Difool : Merci à Yannick qui nous a appelé
pour Brian tout à l'heure. Même si on entendait mal, merci du
conseil. Brian en fait, il est gay, il sait pas comment le dire à ses
parents, ses parents sont super méga bloqués.
273. Romano (imitant les parents) : << Regarde-moi
ça, ça se roule des pelles ! >>
274. Difool : Voilà, c'est un peu ça.
Voilà. Donc, Brian, la majeure parie des messages, je reprends juste
là pour... La majeure partie des messages dit qu'il faut euh... ouais
t'attends, hein. T'attends d'avoir une relation avec un gars et puis...
275. Romano : Moi, je serais dans ton cas, c'est ce que je
ferais en tout cas, moi, hein.
276. Difool : Bah oui. C'est vrai, hein.
277. Romano : T'attends, pour le moment, de toute façon,
il se passe rien au final, quoi. TEMOIGNAGES D'AUDITEURS PAR MESSAGES
(SMS ET INTERNET) ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE
278. Difool : Tu excites des femmes, Brian, depuis tout à
l'heure. Regarde, il y a Senty, une nana du 59, qui dit << la voix de
Brian me fait grave kiffer, je suis toute chose. Il est sûr qu'il aime
que les hommes ? >> (rires)
279. Romano : Il y a Jarod aussi, mais là c'est un mec,
<< La voix de Brian me fait kiffer, mettez-moi en contact avec lui
>>.
280. Difool : Ah, ben voilà, tiens, tu vois ? (Rire
timide de Brian, << Ah, ah ? >> de l'équipe)
281. Romano : Ah, là, tout de suite, on sent.
282. Difool : Regarde << moi j'étais gay, mes
parents quand ils l'ont su, ils m'ont viré de la maison >>, c'est
Popol du 94 qui nous dit ça, il a 19 ans. Ça c'est chaud quand
même.
283. Brian : Putain !
284. Difool : Ouais, mais c'est euh... Ah, voilà,
c'était pour faire un petit point avec toi, donc je sais pas trop quoi
te... quoi te dire Brian, là-dessus.
CONCLUSION ET PERSPECTIVES
285. Brian : Ben en tout cas, je vous remercie,
déjà, c'est super sympa, tu vois. Et franchement, vous
déchirez...
286. Difool : On a bien retenu le message sur les caricatures,
tout ça...
287. Brian : ... parce que dès qu'il y a un
problème, c'est bien, tu vois, il y a quelqu'un pour parler,
franchement, vous déchirez.
288. Difool : Non, et puis sois heureux, et si le être
heureux ça passe par le fait d'être avec un gars, ben vas-y,
éclates-toi, hein.
289. Romano : Ouais, et t'empêches pas de sortir avec un
mec même si tes parents le savent pas, quoi.
290. Difool : Bah oui.
291. Romano : Vis ta vie quoi.
292. Brian : Je vais pas me prendre la tête
293. Difool : Ouais, et puis parles-en à tes potes, t'as
des potes qui sont plutôt ouvert, c'est plutôt pas mal, quoi.
294. Brian : Ouais, c'est clair.
295. Difool : Et il leur arrive de faire des blagues sur les
homos, non, j'imagine, tes potes ?
296. Brian : Ah, ben ouais...
297. Difool : Bon, tu le prends bien ?
298. Brian : Ouais, ouais !
299. Difool : Bah oui, puisque tu sais qu'ils le font pas
méchamment puisque c'est tes potes, quoi.
300. Brian : Ouais, c'est clair, ouais.
301. Difool : Ok, ben ça roule, Brian. Ben de toute
façon, si t'as besoin de quoi que ce soit, on est dans le coin et puis
on te passera un coup de fil.
302. Brian : Ok.
303. Difool : Et puis il y en a, il y a aussi des messages
qui nous disent le contraire, tu vois, je te faisais un petit
résumé tout à l'heure, tu vois, il y a Anarchie qui dit
<< eh, il faut assumer ! oh, ça fait rien d'être homo
>>, je lis le message tel qu'il est écrit, là, avec le
<< eh >> et le << oh >>. Donc tu vois il y a aussi
ça. Mais c'est vrai que pour toi, avec les parents, c'est pas
évident.
304. Brian : Hmm.
305. Difool : Bon, bah, écoute, bon courage, hein.
306. Brian : Ben, je vous remercie.
307. Difool : Tchao ! Et puis il y a Abdel qui nous dit <<
pour Brian, j'ai 18 ans, je suis rebeu, c'est hyper difficile, j 'ai
décidé de ne pas le dire et je suis très épanoui,
je le vis bien comme ça, c'est un milieu dur, Brian doit pas le dire,
moi je le vis bien >>. Ok, ben c'est noté pour le message, Abdel.
Ben merci à vous en tout cas, pour les messages.
Homophobie / cas N°3 / 10 novembre 2004 « Vexé
que ce soit un transsexuel, j'ai été violent » /
séquence diffusée entre 22h05 et 22h1 3 :
Ce qui fait joindre cet extrait dans ce thème est la plus
grande catégorie de l'intolérance du fait de la sexualité,
de l'orientation sexuelle.
EXPOSE ET EVALUATION DU PROBLEME DE L'AUDITEUR
APPELLANT
1. Difool : Sois le bienvenu, t'as 22 ans, c'est ça ?
[...]
2. Jérôme : En fait, il m'est arrivé trop un
truc de fou, tu vois ?
3. Difool : Oui... enfin, non, je sais pas.
4. Jérôme : En fait, t'as vu, je suis allé
dans un cabaret.
5. Difool : Un cabaret. Le Moulin rouge...
6. Romano : Le Lido... le Paradis latin...
7. Jérôme : Pas des cabarets en France, tu vois. En
fait, t'arrives là bas, tu choisis ta meuf...
8. Romano : Ah, oui, c'est pas un cabaret, en fait, c'est un
bordel ?
9. Jérôme : Voilà, enfin, genre...
10. Difool : Ah... parce que, oui, au Lido, la nana qui danse
avec des fanfreluches et de plumes de partout...
11. Romano : Avec des plumes dans les fesses.
12. Difool : ... elle est juste là pour danser.
13. Romano : Oui, c'est ça.
14. Marie : Tu peux pas la toucher, hein.
15. Romano : Oui, d'ailleurs, je pense que si t'essaies de la
toucher, tu te fais corriger assez rapidement.
16. Marie : C'est clair !
17. Difool : Et très très rapidement, quelqu'un
arrive vers toi et te dis « bonjour monsieur » [bruit de torgnole]
18. Romano : Désolé, on ne touche pas.
19. Jérôme : Ben justement, le quelqu'un qui est
arrivé, là, la personne que j'ai vue, laisse tomber.
20. Difool : Et c'était quoi alors, c'...
21. Jérôme : Ca ressemblait trop à une
meuf.
22. Difool : Ah, donc c'était pas une meuf. Mais
ça c'est passé comment, c'est un cabaret où t'as...
comment ça se passe ?
23. Jérôme : Ben tu vois t'arrives, tu prends un
verre, après t'as des aguicheuses, là, tu sais, qui viennent vers
toi, tu leur paies un verre et après si le courant passe avec toi, tu
montes avec elle, tu paies la bouteille de champagne, tu montes avec elle et tu
fais ce que t'as à faire avec elle, tu comprends ?
24. Romano : Oui, c'est un bar à prostituées,
quoi.
25. Jérôme : Ouais, c'est un bar à putes.
26. Difool : Ah ouais, donc c'est pas un cabaret.
27. Romano : C'est pas du tout un cabaret, en fait (rires). En
fait, rien à voir.
28. Marie : C'est le nom officiel, quoi.
29. Jérôme : Voilà, c'est le nom
officiel.
30. Difool : Et c'est où, ça ?
31. Jérôme : Au Luxembourg.
32. Difool : Ah, alors non seulement il y a des banques partout
au Luxembourg...
33. Romano : Oui, de l'argent sale...
34. Difool : Mais en plus il y a des cabarets. Ben
écoutes... il faut bien dépenser l'argent des banques, hein. Et
il y avait beaucoup de monde dans ce truc quand tu es arrivé ?
35. Jérôme : Franchement, tu sais quoi, il y a que
des mecs avec des grosses Mercos, tu sais, que des mecs qui doivent tromper
leur femme et tout ça...
36. Difool : Et toi, c'est la première fois que tu vas
là bas ?
37. Jérôme : Franchement, c'est la deuxième
fois que j'y vais. La première fois, j'ai rien fait, tu vois.
38. Difool : Donc tu as vu une personne très très
belle, qui...
39. Jérôme : Eh, franchement, tu sais quoi,
crois-moi, du 95, 95B minimum, une belle tête, charmante et tout.
Charmante ou charmant, je te dirais ça après. Et franchement,
elle m'aguiche, tu vois, elle me dit « monte avec moi », tu paies
mais tu montes. Et j 'ai dit ok.
40. Romano : Mais tu paies combien ?
41. Jérôme : 250 euros.
42. Romano : Oh... oh, non de dieu.
43. Difool : Cher...
44. Marie : Ah, ça fait mal au cul, quand même,
hein...
45. Romano : Bah ouais.
46. Difool : Ah bon... A Jérôme... ça t'a
fait mal au cul ? (rires)
47. Romano : Non mais 250 euros, c'est quoi, c'est une
bouteille de champagne, que tu paies ?
48. Jérôme : Ouais, tu paies la bouteille de
champagne et la gadjie avec qui tu es.
49. Difool : Et après, tu montes où, dans une
chambre ?
50. Jérôme : Ouais, tu sais, c'est une petite
chambre et tout, et tu montes avec elle, et, tu sais, c'est à huis clos
y a que toi et elle, et personne qui regarde, t'es tranquille, tu vois, tu fais
ce que tu veux. Et moi, tu sais, je commence un petit peu à, tu vois,
à avoir des rapports avec elle et tout.
51. Difool : Hmm. Vous avez fait quoi, t'as commencé
à la caresser, tout ça ?
52. Jérôme : Ouais, je commence à la
caresser. Elle avait une bonne paire de tétés alors j'en ai
profité, tu vois. Et par contre, quand j 'ai commencé à la
pénétrer, et je voyais que mon sexe, il rentrait même pas
de moitié, tu vois.
53. Difool : Oh, étroite, hein.
54. Romano : Oh, mais qu'est ce qui se passe la dedans ?
55. Marie : Elle était pas profonde en fait ?
56. Jérôme : Non, elle était...
57. Difool : Mais, t'étais où, exactement...
58. Romano : Dans son trou du cul. (rires)
59. Jérôme : Non non non non non, j'étais
bien dans le trou, pas le trou du cul, dans l'autre trou.
60. Difool : Au début, tu nous as dit, on sait pas si
c'est un homme ou une femme, en fait.
61. Jérôme : Attends, mais laisse-moi terminer.
62. Difool : Si c'est un homme, il a forcément une
bite.
63. Romano : Oui, au dessus du trou, il y avait une paire de
couilles.
64. Jérôme : Non, il avait pas de bite, je te
promet, il avait pas de bite.
65. Difool : Bah, c'est une femme.
66. Romano : Non, c'est un trans.
67. Jérôme : Ouais, il avait été
transformé...
68. Difool : Ah, d'accord, un transsexuel.
69. Romano : Oui, il s'était fait opérer.
70. Jérôme : Voilà, ouais. Et tu sais quoi,
moi j'étais pas au courant, alors du coup, je l'ai
pénétré, et au moment où j'ai vu que c'était
un trans, ça m'a...
71. Marie : Attends, mais tu t'en es rendu compte parce que tu
rentrais pas entièrement ?
72. Jérôme : Tu sais, le gars, il mouillait pas, la
meuf, je préfère dire la meuf...
73. Marie : Ah, ouais, c'est vrai, il y a pas de mouille quand
tu te fais opérer.
74. Jérôme : Et non, y avait rien...
75. Romano : Normalement, ils mettent du gel.
76. Marie : C'est logique.
77. Jérôme : Et tu sais, je trouvais ça trop
bizarre...
78. Difool : Achète du gel, la prochaine fois,
Jérôme (rires de Marie).
79. Jérôme : Non, non, non, il n'y aura pas de
prochaine fois.
80. Difool : Toi aussi, ça t'a calmé, c'est comme
les plans à trois pour Karim, là.
81. Marie : Terminé.
82. Difool : Eh bien pareil pour les cabarets,
Jérôme.
83. Jérôme : Laisse tomber.
84. Difool : Et t'as discuté avec la personne ?
85. Jérôme : Eh, tu sais, elle parlait
Tchèque ou je sais pas quoi, alors...
86. Difool : Ah ouais, donc vous avez pas pu...
87. Jérôme : On communique pas, non.
88. Marie : T'entends le son de sa voix, quand même ?
89. Difool (d'une grosse voix grave) : << oui, bonjour
>>
90. Jérôme : Il était vachement
efféminé, même toi, Difool, tu la vois dans la rue, tu
t'arrêtes sur elle, tu sais.
91. Romano : Non, mais pour le coup, il s'est fait opérer
des cordes vocales et tout ça, c'est possible.
92. Marie : Ah ouais, c'est possible
93. Jérôme : Attends, mais j'hallucinais, je te
promets, c'est une femme. Je te promet, pour moi, c'était une femme.
TEMOIGNAGES D'AUDITEURS PAR MESSAGES (SMS ET INTERNET)
ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE
94. Difool : << Ah, quel con, il s'est bien fait niquer
>>, je lis les messages, là, sur SMS depuis tout à l'heure.
<< Le pauvre >>, regarde, << il a fait un truc de ouf
>>, << ça lui apprendra >>, c'est qui qui nous dis
ça, c'est Chidra de l'Essonne, qui a 16 ans qui nous laisse le message
sur les SMS, là.
95. Jérôme : Eh, oui, bien sûr, ça
m'apprendra, qu'est-ce que tu crois.
96. Romano : Et même au niveau des jambes et tout
ça...
97. Jérôme, des jambes nickel, je te jure...
98. Difool : Est-ce que t'es sûr que c'était un
homme au départ ?
99. Jérôme : Non. Attends, je suis sûr
à la fin que c'était un homme, là j'en suis sûr.
100. Difool : Et t'as fini, t'as fait quoi ?
101. Jérôme : Eh, non, qu'est-ce que tu crois ?
102. Difool : T'es parti ?
103. Jérôme : Eh, oui, je suis parti, je l'ai
giflée.
104. Difool : Oh, non, c'est pas bien ça ! C'est pas
bien, ça, Jérôme, c'est toi qui est...
105. Jérôme : Attends, mais attends, moi je savais
pas...
106. Difool : Bah oui, mais tu gifles pas, tu gifles pas
quelqu'un, t'es un con. Tu vas pas gifler...
107. Marie : Bah non, c'est débile de gifler.
108. Difool : C'est toi qui y est allé, tu sais.
109. Jérôme : Non, mais qu'est ce que tu veux que je
fasse, je suis vénère...
1 10. Difool (le coupe) : C'est pas lui ou elle qui...
111. Jérôme : Comment tu veux que je sache, moi que
c'est un trans ?
112. Marie : Non, mais c'est...
1 13. Difool : C'est pas lui ou elle qui t'a forcé, hein
?
1 14. Romano : Bah, t'imagines, il va pas arriver toi et dire
<< je suis transsexuel >>
115. Marie : Ouais.
1 16. Jérôme : Attends, t'imagines, je paie 250
euros pour niquer une meuf et je tombe sur un type. 1 17. Difool : Bah ouais,
mais c'est les risques du métier, mon gars...
1 18. Marie : Une gifle, ça arrangera rien et au
contraire, c'est plutôt violent, quoi.
1 19. Jérôme : Ca a rien arrangé, parce que
j'ai ni récupéré mon fric ni rien du tout, tu vois, et en
plus de ça, je suis traumatisé, tu sais.
120. Marie : Ca t'apprendra.
121. Difool : Ah, ça c'est la réponse de la Marie,
là.
122. Marie : Oui, en me touchant les seins, je te dis ça
(rires). je remettais juste mon soutien-gorge en place, c'est pour ça.
Mais, non, mais tu vois, il faut pas la gifler, tu vois, c'est
débile.
123. Jérôme : C'est débile, mais c'est
sur les nerfs, tu vois, je t'ai pas dit que je regrettais pas de l'avoir
giflée, tu vois, parce que voilà, je suis pas du genre à
taper les femmes, mais les mecs plutôt. Et là, c'était
moitié femme, moitié mec....
124. Difool : Mais les mecs non plus, Jérôme.
125. Romano : Oui, ça sert à rien.
126. Jérôme : Non, mais laisse tomber...
127. Difool : << Bien cher pour niquer un homme >>,
en effet Timal, tu as raison, Timal du Pas-de-Calais, là, qui nous
laisse un message, 20 ans, là, Timal.
128. Jérôme : Ah, putain, très cher
pour...
129. Romano : Ouais, mais voilà, aujourd'hui c'est une
femme, quoi.
130. Difool : Hm.
131. Marie : Bah oui.
132. Jérôme : Ouais, bah vas-y, vas la niquer...
133. Romano : Non, mais je te dis pas que j'aurais envie de la
niquer, mais...
134. Difool : Trop cher pour Romano, 250 euros...
135. Marie : Non, mais tu vois, pour arriver à faire une
opération comme ça et devenir une femme, c'est que
profondément, il se sent femme dans son corps, quoi, parce que pour
changer totalement de corps...
136. Jérôme : Ouais, je suis d'accord.
137. Marie : Non mais tu vois, il comprend pas forcément
ta réaction.
138. Difool : Hm.
139. Jérôme : Ouais, je suis d'accord.
140. Marie : Tu peux te mettre à sa place aussi, quoi.
141. Jérôme : Il y a peut-être des gens qui
ont fait pire que moi...
142. Romano : T'as joué au con, parce qu'en plus, dans
les trucs comme ça, je pense que ça doit être
surveillé, tu vois, t'aurais pu te faire défoncer la gueule par
un...
143. Jérôme : Le videur, je me suis un peu
engueuler avec lui mais sans plus, quoi.
144. Romano : Ah, ouais, mais normal.
145. Jérôme : Je me suis fait virer du cabaret,
c'est normal.
CONCLUSION
146. Difool : De toute façon, tu n'y retourneras plus,
j'imagine.
147. Jérôme : Ouh, là là...
(rires)
148. Romano : Ah ouais, ça t'a passé l'envie,
quoi.
149. Jérôme : Non, mais y a pas que ça, en
plus, que ça m'a passé. Moi j'étais trop plans baise,
toujours à l'affût de... Je suis trop un chaud gars, tu vois.
150. Difool : Et t'as souvent payé pour baiser, toi ?
151. Jérôme : Non, non, je te jure, c'est la
deuxième ou la troisième fois grand maximum.
152. Difool : Et peut-être même la
dernière.
153. Jérôme : C'est pas peut-être, c'est
sûr.
154. Romano : Ah, oui, c'est bon, c'est fini maintenant.
155. Difool : Bon, ben ne quittes pas Jérôme, on va
faire un tour sur le stade, là, c'est reparti pour le
Marseille/PSG...
[Séquence foot]
L'intolérance du fait de la religion/tradition
Un troisième groupe de deux sujets se dégage de
notre corpus : l'intolérance du fait de la religion/tradition.
Religion/tradition / cas N°1 / 18 octobre 2004 « La
famille de mon copain ne m'accepte pas car je le vois chez moi » /
séquence diffusée entre 21 h41 et 22h44 :
EXPOSE ET EVALUATION DU PROBLEME DE L'AUDITRICE
APPELLANT
1. Bon, alors, Isis, qu'est-ce qui t'arrive ?
2. Ben en fait, moi je vous appelle parce que ça fait
deux ans que je suis avec mon copain.
3. Difool : Hm.
4. Isis : Et en fait on est tous les deux d'origine
Algérienne et en fait ses parents s'obstine à pas vouloir
comprendre et...
5. Difool : (imitant le père) : << Oui, je veux que
tu sortes avec un Suédois, je t'ai dis >>.
6. Romano (imitant le père) : << Oui, tu as compris
ce que je t'ai dis >>.
7. Difool : (imitant le père) : << Oui, avec un
tennisman >>. Pourquoi, c'est quoi le problème, ils l'aiment pas
?
8. Isis : Non, sa mère elle me connaissait pas
jusqu'à très très peu de temps. Pourtant ça fait
deux ans qu'on est ensemble et en fait elle s'est toujours obstinée
à dire non, elle a jamais voulu me connaître et en fait elle pense
qu'il passe son temps chez nous et que chez nous, ça se fait pas de
faire rentrer un garçon chez soi.
9. Difool : En fait, tu lui aurais présenté
n'importe quel gars, elle aurait réagi pareil, non ? Tu penses pas ?
10. Isis : Non, c'est ses parents à lui qui sont pas
d'accord...
11. Difool : Ah, d'accord, j'avais pas compris. Tes parents
à toi, il y a pas de souci ?
12. Romano : Ouais, ils ont l'ai cool.
13. Isis : Non, mes parents à moi il y a pas de souci,
c'est ses parents à lui.
14. Difool : Ah, ouais, j'avais pas comp... j'avais pas
pigé. Et ses parents à lui, ils te trouvent...
15. Isis : En fait, ils acceptent pas que je fasse monter un
garçon chez moi en tant qu'Algérienne, ça se fait pas,
enfin que des trucs...
16. Difool : Ouais, que des trucs à deux balles
17. Isis : Voilà, ouais, hyper arriérés et
tout.
18. Difool : Ouais, c'est ça.
19. Isis : Et donc en fait, ça fait un moment que
ça durait...
20. Difool : Et donc en fait, ils te reprochent d'être
trop facile, quoi.
21. Isis : Ouais, voilà, et puis en fait ils me
reprochent pratiquement de sortir avec leur fils et en fait ça les
gêne...
22. Difool : En gros, il serait sorti avec n'importe quelle
meuf, ça aurait été pareil.
23. Isis : Ouais, je pense que le problème, c'est pareil,
ils sortiraient tout et n'importe quoi comme argument pour qu'on arrête
de sortir ensemble et...
24. Difool : Mais c'est bizarre parce qu'en
général c'est plutôt, tu vois, moi au début, je
croyais que c'est toi qui avait un problème avec tes parents, c'est
plutôt les parents de la nana quand il y a des problèmes
moyenâgeux comme ça, c'est plutôt les parents de la nana
qui...
25. Marie : Ouais, grave.
26. Isis : Ouais, non, moi j 'avais jamais
présenté de garçon avant et tout, et puis là je
vois que c'est sérieux et puis je veux qu'elle me laisse sortir comme je
veux et puis elle préfère le voir et savoir plutôt que
faire semblant, elle sait très bien que...
27. Difool : C'est bien !
28. Marie : Ouais, bien sûr, c'est mieux.
29. Difool : Bah, elle à raison, comme ça elle
sait au moins parce que si elle était toute rigide, tu lui dirais
rien.
30. Isis : Alors que sa mère à lui, il passe son
temps dehors et elle sait pas avec qui il est en réalité
derrière ses airs de... enfin en fait ça faisait un moment que
ça durait et ça empirait et nous on continuait de se voir et
tout, parce qu'elle me connaissait pas et donc... Et on s'est dit que si ma
mère l'appelait ça allait peut être arranger les choses.
Que ma mère lui parle, qu'elle lui dise ce qu'il se passe
réellement parce que peut être qu'elle se fait du souci pour son
fils et tout enfin ce qui est normal vu qu'il a raté une année de
fac pendant qu'on était ensemble. Elle a du se dire...
31. Difool (imitant la mère) : << Oui, mauvaise
fréquentation, c'est elle >>.
32. Romano (imitant la mère) : << c'est de sa
faute, elle l'empêche de travailler >>.
33. Marie (imitant la mère) : << Méchante
>>
34. Difool (imitant la mère) : << Je lui avais dit
de sortir avec une Suédoise >>.
35. Isis : Et donc ma mère l'a appelé, et au
téléphone elle a été très courtoise, enfin
elle lui a dit << oui, je veux pas que mon fils sorte avec des filles
>>
36. Difool (imitant la mère) : << Oui, je veux
uniquement qu'il sorte avec des hommes ou des animaux >>.
37. Isis : Non, mais si elle pouvait le faire castrer, je pense
qu'elle le ferait.
38. Difool (imitant la mère) : << Oui, d'ailleurs,
je vais lui, oui, on va l'amener chez le vétérinaire >>
(rires).
39. Romano (imitant la mère) : << Oui, c'est
ça, nous allons lui enlever les testicules >>.
40. Isis : Et donc ma mère l'a appelé, et tout,
j'en avais parlé avec lui, on pensait que ça allait arranger les
chose, etc... et en réalité, quand elle a raccroché, elle
a dit << je vais bien me faire comprendre, ça marchera jamais, je
l'accepterais jamais >>...
41. Difool : Voilà, ben maintenant c'est entre les mains
de... Moi je sais pas, quand les parents réagissent comme ça, il
a quel âge ton copain, 18 ans ?
42. Isis : 20
43. Marie : Il a 20 ans !
44. Difool : Il est amoureux de toi depuis deux ans, c'est une
histoire sérieuse, tu oublies la mère et puis un jour elle se
calmera...
45. Isis : Il a essayé de partir, elle est venue chez
moi...
46. Difool : Non, mais c'est pas essayer de partir, c'est juste
que vous vivez votre histoire, ça fait deux ans que vous la vivez en
plus...
47. Isis : Mais maintenant, elle le laisse plus sortir, elle le
laisse plus aller à la fac...
48. Marie : Il a 20 ans...
49. Difool : Il faut...
50. Isis : Elle lui a enlevé son portable, mais c'est de
la folie. Il a 20 ans mais... et en plus, ils sont hyper nombreux dans la
famille et ses frères et soeurs c'est tous des balances, ils vont lui
répéter, enfin c'est de la folie.
51. Marie : Mais c'est une prison ?
52. Difool : Non, mais dans ces cas-là, il faut... quand
on respecte pas ta liberté, il faut la prendre ta liberté. Donc
il faut qu'il trouve un pote chez lequel il peut aller squatter...
53. Marie : Exactement. Il faut trouver le moyen de...
54. Isis : Ben, le problème, c'est qu'elle a dit
<< si jamais il part, et tout, tu vas voir, c'est ta famille qui va avoir
des problèmes >>... enfin c'est devenu une histoire, enfin quand
je regarde en bas de chez moi, je vois ses frères qui surveillent chez
moi ce qui se passe pour voir s'il y est pas en regardant par le
fenêtre...
55. Romano : Sympa, des vigiles.
56. Difool : Pas chère, la boite de gardiennage.
57. Romano : Oui, pas chère, la
sécurité.
58. Difool : T'es protégée au moins chez
toi.
59. Isis : Ah ouais, enfin c'est... maintenant je me retourne
sans arrêt dans la rue, j'ai l'impression d'être... c'est un truc
de fou, quoi.
60. Romano : Ouais, tu deviens parano.
61. Difool : Bah oui. Alors...
62. Isis : Elle est persuadée, elle m'a dit <<
ouais, de toute façon, s'il lâche pas l'affaire, c'est parce que
tu couches avec >> alors que c'est pas vrai, enfin des trucs...
TEMOIGNAGES D'AUDITEURS PAR MESSAGES (SMS ET INTERNET) ET
POINTS DE VUE DE L'EQUIPE
63. Difool : Y a Jimky, la qui nous dit, non, ouais,
là c'est Jmiky qui nous fait, 23 ans, là, 23 ans, Valde-Marne
dans le 94 qui nous dit << faut pas te plaindre, moi ma mère c'est
elle qui veut choisir ma femme, elle va la ramener du bled, j'ai pas le droit
de choisir ma femme >>.
64. Isis : Ouais, mais elle, elle fera pareil, hein.
65. Difool : Non mais ça, ça existe beaucoup
?
66. Momo : Mais ça existe beaucoup,
t'inquiètes.
67. Isis : Ouais, ça existe, enfin elle c'est comme
ça qu'elle pense, enfin ses enfants.
68. Difool : Non, ça existe pas beaucoup.
69. Momo : Ouais, mais ça existe.
70. Difool : Ca doit être super rare.
71. Momo : Ouais, ouais, ouais.
72. Marie : T'accepte ça simplement pour faire plaisir
à tes parents...
73. Momo : Ouais, c'est juste pour faire plaisir aux
parents.
74. Marie : Ah ouais, t'imagines ?
75. Difool : Tu ramènes une bombe, c'est tes parents
qui draguent à ta place...
76. Momo : Ouais, en général, moi j'explique
vite fait.
77. Difool (imitant Momo) : << Oui, alors, maman, tu me
la prends, alors >> (rires).
78. Momo : Non, non, non, non...
79. Romano : (imitant Momo) : << J'aimerais bien
qu'elle soit super bonne >>.
80. Difool (imitant Momo) : << Et qu'elle aime le cul,
hein >>
81. Momo : Non, mais en général, il ramène
des femmes du bled, ils nous disent de choisir, voilà, ils parlent si
ça s'entend bien, voilà, ça se marie.
82. Marie : C'est particulier, hein.
83. Difool : Bah, oui, c'est un petit peu. Tu voulais qu'on
fasse...
84. Isis : Non, elle lui a dit << je vais t'envoyer en
Algérie et tu reviendras plus, comme ça on sera
débarrassé, tu la verras plus... >>
85. Difool : Sympa !
86. Momo : C'est sympa.
87. Difool : Enfin, c'est n'importe quoi, quand même.
88. Romano : C'est un peu des réactions à la
con.
89. Difool : Bon, tu voudrais qu'on fasse quoi pour toi, tu
voudrais des témoignages là-dessus ?
90. Isis : Ben, des témoignages de filles qui auraient
connu la même chose...
91. Difool : Ben, de gars aussi, qui auraient connu la
même chose.
92. Isis : Ouais, ouais, mais c'est que j'ai plus l'habitude
chez nous en tout cas, on emmerde plus les filles pour des trucs comme
ça que les garçons.
93. Difool : Ouais, c'est ce que je te disais tout à
l'heure.
94. Marie : T'es d'où, toi ?
95. Difool : Algérienne.
96. Marie : Ah, t'es algérienne aussi, en plus.
97. Difool : Enfin t'es d'origine algérienne.
98. Isis : Ouais, ouais, enfin je suis pas de la même
ville alors ça va pas.
99. Difool (imitant la mère) : << Ah, bah, oui,
hein, faut te marier avec un type qui habite dans ta rue, hein. Non, de ta
maison, nous allons prendre quelqu'un de ta famille >>.
100. Marie : Ban, oui, ton cousin, souvent, c'est ça.
101. Momo : Tu viens de quelle ville ?
102. Isis : [inaudible]
103. Momo : Et ton copain, il est d'où ?
104. Isis : Constantine. En plus, on est du même
côté, quoi.
105. Momo : Eh, ouais, en général...
106. Difool : C'est comme Paris-Marseille. Allez Constantine
!
107. Marie : Ah, mais c'est l'hallu !
108. Difool : Bon, ne quittes pas, Isis. T'hallucines,
là, Marie ?
109. Marie : Ah non, mais j'hallucine totalement. Non, mais je
sais qu'il se passe se genre de choses, mais là en plus...
1 10. Isis : Elle est arrivée dessus avec un couteau,
enfin...
11 1. Difool : Oh, là, avec un couteau en plus... Bon, ben
ne quitte pas Isis. Dites-nous, hein, 41SKY,
Skyrock.com... << Faut pas
qu'elle se décourage >>, << Bon courage à elle
>>, Dernier round qui nous
dit... Y a plein de messages, tiens. Bon, on va regarder tout
ça et puis on va vous rappeler. Si vous voulez qu'on vous rappelle, vous
laissez des messages. Là, on va balancer la pub et puis on revient avec
vous tous en direct. 01.53.40.30.20, le 41SKY, le
Skyrock.com, la pub en speed, y aura
même Cyril qui va arriver avec nous dans un instant.
[Coupure pub et musicale]
112. Difool : Isis, toi, t'es avec un gars, il a 20 ans, toi tu
as 18 ans. Tu nous as appelés en fait parce que les parents de ton gars
veulent choisir la copine...
1 13. Romano : Ouais, t'es pas assez bien pour lui, quoi.
1 14. Difool : Ouais, en gros, c'est ça. Et c'est pas un
problème de racisme tout ça, parce que... 1 15. Romano : Ouais,
ce serait n'importe qui, ce serait pareil.
TEMOIGNAGES D'AUDITEURS PAR MESSAGES (SMS ET INTERNET) ET
POINTS DE VUE DE L'EQUIPE
1 16. Difool : Vous êtes tous les deux Algériens et
donc voilà. Donc, voilà le souci, donc. J'ai plein de messages,
là : << Franchement, c'est n'importe quoi, dans tous les cas, il
devra se marier et trouver sa femme lui-même donc autant se barrer tout
de suite >> message du Pharaon, message de Hakim aussi, qui vient
d'arriver ici. << C'est des parents fous, moi je supporterais pas
>>, c'est Clark, en gros qui nous dit ça, Clark de
Meurthe-et-Moselle. Euh... << Vive la tolérance, c'est n'importe
quoi de ne pas être tolérant comme ça avec son enfant
>>. Bon, ça fait partie de certaines traditions, mais bon, il y a
des trucs qu'il faut oublier, quand même. Non, qu'est-ce que t'en...
comment il réagit, lui, par rapport à ses parents, Isis ?
1 17. Isis : Euh... lui il a envie de partir et enfin, on a
pensé à tout, quoi, enfin on s'est même mariés
religieusement. Enfin ça c'était pour lui dire et
pour qu'elle claque l'affaire. Lui, il a essayé de
partir, mais bon toujours pareil, et après quand il part,
c'est à moi qu'elle fait des menaces et... 118. Difool : Mais elle a pas
le droit de faire ça.
1 19. Marie : Mais attends, comment vous avez pu vous marier
religieusement sans les parents ?
120. Isis : En fait, les mariages religieux, il faut un
témoin, quelqu'un qui représente la fille...
121. Difool : Ah ouais, vous avez fait un petit truc juste
pour...
122. Isis : Voilà, quoi, le minimum...
123. Marie : Ah ouais, donc il y a pas eu de
fiançailles...
124. Isis : En basquets, on a pas fait de fêtes ni rien du
tout quoi, c'était juste vraiment histoire de le faire.
125. Difool : Bon, alors il y en a plein qui nous disent,
là, regarde : << mais il a 20 ans, il est majeur, moi je me casse
dans une autre ville, je me cache chez des amis... >>
126. Marie : c'est peut-être pour ça qu'elle
bloque, parce qu'elle a su que vous vous étiez mariés
religieusement sans son accord.
127. Isis : Non, non, ça elle le sait pas, c'est vraiment
récent, en plus ça fait deux semaines ou trois semaines quelque
chose comme ça...
128. Marie : Ah ouais, donc ça vient pas de là.
129. Isis : Et en plus, enfin moi, pendant un moment
j'espérais, enfin quand je la connaissais pas je me disais c'est pas
possible d'avoir un coeur comme ça. Je sais pas, elle a eu notre
âge, elle peut très bien comprendre, enfin qu'on s'aime et que...
c'est pas comme ça que ça se finira. Et puis je sais pas, je
serais mère, je me dirais c'est des gamins, ils vont finir par se
disputer, enfin c'est une histoire qui finira d'elle-même, mais... Alors
que plus elle s'interpose et plus nous, ça...
130. Marie : Ca vous renforce.
131. Isis : Ouais, voilà, c'est...
132. Marie : C'est logique.
133. Isis : Et c'est...
134. Isis : Ouais, voilà, et en fait y a rien à
faire, et voilà et maintenant je l'ai vue et...
135. Difool : C'est marrant parce que tu parles que de la
mère. Tu parles pas du père. T'as parlé des frères,
des soeurs et...
136. Isis : Bah oui, en fait parce que les frères et
soeurs ils sont tous pareils, j'ai vu sa soeur, elle est venue chez moi quand
il était parti et elle m'a tenu les même propos que sa
mère.
137. Difool : Oui, mais elle, ça va se passer comment,
quand elle va choisir son mec...
138. Isis : Elle m'a dit << oui, nous on
fréquente pas chez nous >>, elle m'a dit << nous on est pas
des filles qui fréquentons >>, enfin, je suis
désolée, la grande soeur elle va se marier, il est pas
tombé du ciel le gars avec qui elle va se marier.
139. Difool : Bah oui. Et puis même chacun vit comme il
veut, si eux ils ont envie de vivre comme ça et de laisser le choix de
la personne avec qui tu vas vivre toute ta vie aux parents, pourquoi pas,
mais
si toi t'as pas envie de le vivre comme ça, je veux dire,
t'as 20 ans, t'es majeur, tu vois. On est dans un pays... chacun peut vivre sa
sexualité...
140. Marie : Ouais, on est dans un pays libre, quand même,
surtout à ce niveau-là.
141. Difool : Oui, donc toi, je sais pas... Les messages qu'on
nous laisse depuis tout à l'heure, c'est... << Pourquoi il se
barre pas ? >> Regarde, Helena des Bouches-du-Rhône dans le 13
<< Il faut qu'il se barre de chez lui, les parents ils craignent trop, il
a 20 ans, il est majeur, il fait ce qu'il veut >>, c'est le message de
Helena de Marseille.
142. Isis : Avant, il me disait << je vais partir >>
et moi je lui disais << tu peux pas partir comme ça >>,
enfin je veux dire c'est pas des bonnes conditions pour partir.
143. Difool : Ah non, c'est clair, mais bon...
144. Isis : Mais là, il y a plus de solutions. Je crois
plus à rien... enfin, en même temps, j'ai pas envie de laisser
tomber, ça fait deux ans et entre nous, ça se passe super
bien.
145. Marie : Bah oui, c'est ton amoureux.
146. Isis : Et je me vois pas sans lui et je vois personne
à sa place, enfin c'est horrible quoi...
147. Difool : De toute façon, il faut jamais casser
à cause des parents, hein. Jamais.
148. Marie : Ben non, certainement pas.
149. Isis : Voilà, et puis les regrets qu'on a quand
ça s'est pas fini comme on voulait et...
150. Difool : Ah ouais, il va être malheureux, tu vas
être malheureuse, enfon c'est débile. Vous êtes amoureux,
autant rester...
151. Isis : Mais je me dis, en ce moment je suis pas heureuse
non plus, est-ce que ce sera pire ? C'est peut-être un mauvais moment
à passer, enfin, je sais plus quoi penser, quoi, j'ai pas envie de tout
laisser tomber et j 'ai pas envie de continuer.
152. Marie : Non mais en plus c'est l'hallu, parce que souvent
l'excuse des parents, c'est << bah, oui, elle est pas rebeu, elle est pas
musulmane >> et là...
153. Isis : Ouais, et là y en a pas, et là ils
prétendent que je suis pas musulmane...
154. Difool : Ouais, enfin c'est malgré tout une excuse
à deux balles aussi.
155. Marie : Oui, on est d'accord, mais enfin, c'est souvent les
excuses qui reviennent...
156. Isis : Ouais, au départ, déjà, c'est
pas valable, mais alors, là, il y en a aucune quoi, là...
157. Marie : Mais là, il y en a pas.
158. Difool : Tiens, il y a Roya qui nous dit ça, salut
Roya, qui nous fait << Les parents sont ancrés dans leur culture,
mais il suffit de discuter, de négocier, ce sera peut-être long,
tu pourras peut-être les changer >>.
159. Isis : Mais là, c'est pas quelqu'un avec qui on
peut discuter, déjà quand je lui parle, elle se met à
hurler, il y a qu'elle qui parle et elle sait tout, quoi, quoi qu'on lui dise,
elle me dit << non mais je sais qu'il passe souvent chez toi...
>>
160. Difool : Non, mais c'est possible aussi qu'il y ait des
gens qui ont parfois de problèmes psychologiques. C'est arrivé
à d'autres, hein. Romano, par exemple, tu as connu de nombreuses
personnes qui avaient des problèmes psychologiques dans leur famille.
[Anecdote d'une ex belle mère de Romano]
161. Momo : Non, mais voilà, c'est chaud, en plus t'es
Algérienne...
TEMOIGNAGE FICTIONNEL D'UN MEMBRE DE
L'EQUIPE
162. Difool : Non, mais toi qui es d'origine Algérienne
aussi Momo, comment tu réagirais si ta mère te disait << je
choisis ta femme, et d'ailleurs, tu vas prendre Romano >>
163. Romano : Oh, oui, nous allons nous marier, Momo.
164. Difool : Non mais moi il y a des meufs qui me
dégoûtent autant que des mecs, voire même plus parfois. Donc
t'imagines si on te choisit une meuf qui est pas du tout à ton
goût...
165. Momo : Non mais en plus j'en ai parlé tout à
l'heure à ma mère, je lui ai dit << y a même pas
moyen, tu me fais jamais ça, hein >>.
166. Difool : Ah, tu lui en as parlé tout à
l'heure en plus ? Ta mère, elle a jamais eu l'idée de te faire
ça ?
167. Momo : Euh... on va dire non, j'ai essayé
d'expliquer les choses...
168. Difool : Même toi, pourtant...
169. Momo : Ah non non non, moi je veux pas. C'est moi qui la
choisis.
[On se moque de Marie qui a un problème de micro]
170. Marie : Non, j'allais dire, Momo, il a quand même la
chance d'avoir une mère qui est super ouverte, quoi.
171. Difool : Oui, c'est vrai, bon, c'est euh...
172. Marie : A la limite...
173. Momo : Non mais voilà, moi je lui ai dit clairement,
c'est moi qui choisirais ma femme...
174. Romano : Momo, tu me présentes, alors ? (rires)
175. Momo : Non, non, mais elle t'a écouté une
fois, elle a peur de toi, Romano.
176. Difool : Alors, il y a Gorac, là, qui nous dit
<< les traditions, ça tue l'amour, mais il reste les parents
>>. Oui, il faut quand même essayer de garder un contact, essayer
de faire ça de manière pas trop trop brutale, quoi, tu vois.
177. Marie : Bah oui.
178. Romano : Oui, non mais bon, au bout d'un moment, s'ils
veulent rien comprendre non plus...
179. Difool : Ouais, c'est vrai que c'est pas super simple.
Bon...
180. Marie : Ben t'es obligé d'être radical au bout
d'un moment.
181. Romano : Oui, parce que la mère, elle a l'ai bien
bloquée, quand même, hein.
182. Marie : Ah, mais grave.
TEMOIGNAGES D'AUDITEURS PAR MESSAGES (SMS ET INTERNET)
ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE
183. Difool : ce qu'on va faire, Isis, alors si vous avez des
réactions là-dessus -il y en a plein- donc pour compléter
ce qu'on nous dit, vous nous passez un coup de fil, vous nous laissez des
messages sur le 41SKY. << L'amour est plus fort que tout >>,
ça c'est beau, ça c'est Alex, là, du 10, qui nous dit
ça. Euh... << Faut pas délirer avec ses parents >>...
Ecoutez, on va vous rappeler, on en reparle dans un instant, tu bouges pas,
Isis, tu reste avec nous ?
184. Isis : Ok, pas de problème.
185. Difool : A tout de suite, la Lyonnaise.
[Coupure pub et musicale]
[Autres sujets]
186. Difool : On va y revenir dans un instant. Sinon, il y a pas
mal de coups de fil pour Isis. Isis, on va te retrouver dans un instant, on va
prendre un petit peu tout le monde. Il y a Jo, là, qui nous attend, il y
a Abdel. Toi t'appelles parce que les parents de ton copain, ils t'acceptent
pas. Et en fait, ils voudraient choisir pour ton copain, qui a 20 ans, quand
même, hein. Lui choisir sa femme.
187. Isis : Oui. Et ils voudraient m'éliminer aussi.
188. Difool : Ils voudraient t'éliminer.
189. Romano (imitant les parents) : << Oui, nous voudrions
la faire disparaître >>.
190. Difool (imitant les parents) : << Oui, physiquement,
oui >>. Non, mais ils t'ont quand même fait des menaces de... enfin
des menaces, quand même.
191. Isis : Ouais. Enfin, je sais pas si je peux
considérer...
192. Romano : Ouais, ils surveillent en bas de chez toi...
193. Difool : C'est quand le même chose, t'as des
gars...
194. Isis : Ouais, je fais gaffe quand même.
195. Romano : Ouais, c'est abusé, quoi. T'es pas
tranquille.
196. Isis : Ils ont dit aussi que leur fils allait finir dans
une tombe s'il continuait.
197. Difool : De toute façon, on finit tous dans une
tombe, hein...
198. Romano : C'est sympa, le...
199. Difool : Non, mais ils sont pas... je pense que dans ces
cas-là, quand on en est à ce point-là, il vaut mieux
couper les liens, parce que ça sert à rien de continuer.
200. Isis : Oui, c'est clair.
201. Romano : Non, parce qu'ils ont des soucis.
202. Isis : Non, mais il faut qu'il y en ai un dans les deux
camps qui cède, quoi, mais...
203. Difool : C'est même pas céder, c'est qua
chacun respecte l'autre, donc les parents, ils doivent respecter l'amour que
leur fils te porte, c'est pas à eux de choisir. C'est déjà
tellement rare de trouver quelqu'un qui t'aime, quelqu'un qui va avec ta
personnalité, que si en plus tu dois trouver quelqu'un qui plaise
à ta mère, qui plaise à ton père, aux
frères, au soeurs...
204. Isis : Oui, c'est clair que ça se finit pas parce
que nous on a voulu que ça se finisse, que par la force des choses, se
séparer c'est quand même horrible, quoi, quand on est avec
quelqu'un qu'on aime et...
TEMOIGNAGES D'AUDITEURS A L'ANTENNE ET POINTS DE VUE DE
L'EQUIPE
205. Difool : Surtout à cause de ça. Bon il y a Jo
qui va arriver avec nous, là, dans quelques instants, t'es là,
déjà, Jo ?
206. Jo : Ouais, je suis là, ouais.
207. Difool : Bienvenu à toi, Jo, Juvisy, 91.
208. Jo : Ouais.
209. Difool : Eh bien reste avec nous, il y a Abdel aussi, qui
va arriver pour toi Isis. Allo Abdel ? 210. Abdel : Ouais.
211. Difool : T'appelles pour Isis, c'est ça ?
212. Abdel : Ouais, c'est ça, ouais.
213. Difool : Eh ben, quittes pas, Abdel, on va revenir avec
vous tous. Et il t'es déjà arrivé ce genre de truc, Abdel,
toi ?
214. Abdel : Ben moi, il m'est arrivé la même
chose.
215. Difool : Ah, chaud, hein !
216. Abdel : Sauf que c'est moi qui étais la victime.
217. Difool : D'accord, ben, ne bouges pas, Abdel, reste avec
nous. Et puis si vous voulez témoigner làdessus et sur tout le
reste, allez-y.
[Coupure pub et musicale]
218. Difool : Bon, allez, on va s'occuper d'Isis, maintenant, il
y a pas mal de messages, pour Isis. Alors c'est vrai que quand on se met
à la place de ton mec, c'est pas forcément facile à
gérer, t'as les parents qui disent que ta meuf, elle est pas faite pour
toi, et qu'il faut plus la voir, et que même si t'es amoureux, ils s'en
foutent, c'est à eux de choisir ta nana. C'est ça en gros, hein
?
219. Isis : Ouais, c'est clair.
220. Difool : Alors, plein de réactions et notamment,
celle d'Abdel, qui était là, avec nous, en direct de Metz, t'es
là, Abdel : Ouais, je suis là.
221. Difool : T'es là.
222. Abdel : Bonjour à tout le monde, bonjour Sky.
223. Difool : Salut à toi, Abdel. Et puis il y a Jo,
aussi, dans le coin, de Juvisy, t'es là, Jo ?
224. Jo : Ouais.
225. Difool : Bien ?
226. Jo : Ouais.
227. Difool : Eh ben écoute, bien aussi, hein. Bon il
vous est arrivé la même chose aussi, les gars ?
228. Jo : Ouais.
229. Difool : Et toi, Abdel ?
230. Abdel : Ouais.
231. Difool : La même chose, ouais. Alors, c'est deux cas
différents, toi c'est... Ben explique-nous Abdel, dis-nous.
232. Abdel : Ben moi ce qui s'est passé, c'est que
voilà, j'ai 25 ans, je suis Marocain. Je suis resté avec une
fille ça faisait trois ans, une Marocaine aussi.
233. Difool : Donc vous étiez amoureux tous les deux.
234. Abdel : Ouais, franchement, c'était nickel.
235. Difool : Donc un peu comme Isis, quoi.
236. Abdel : Et ce qui s'est passé, c'est que pendant que
mes parents ils étaient au bled, cette année, ce que je faisais,
c'est que je ramenais ma copine chez moi et tout, bon ça faisait quand
même trois ans, je commençais à...
237. Difool : Et tes parents, ils étaient pas du tout au
courant du fait que tu sortais avec une nana ?
238. Abdel : Bah, sûrement ils étaient au courant,
mais spécialement elle, non, quoi.
239. Difool : Mais pourquoi ça posait un problème
elle, spécialement ? Parce que...
240. Abdel : Ben, ce qu'il s'est passé, c'est que je l'ai
présentée, j'ai commencé à la présenter
à ma mère et tout, elle voyait que déjà, elle
l'aimait pas trop...
241. Difool (imitant la mère) : << Oui, je ne
l'aime pas, elle >>.
242. Abdel : Ce qui s'est passé tout bêtement c'est
qu'elle me sortait des vieux trucs tout bidon, et le truc qu'elle m'a
trouvé à me dire, c'est qu'elle était pas bien pour moi
parce qu'elle était boulangère, quoi.
243. Difool : Ah ouais. Et il fallait qu'elle fasse quoi comme
métier ?
244. Abdel : Ben, j'en ai aucune idée.
245. Difool (imitant la mère) : << Bah
pâtissière, et oui, évidemment >> (rires).
246. Abdel : Je sais pas, ce qu'elle voulait, c'est la personne
elle soit mieux placée
247. Difool : Oui, ça, ça arrive dans certaines
familles, alors c'est pas une question de tradition, tout ça, mais t'as
certaines familles, il faut pas que tu sortes avec un mec parce qu'il est... je
sais pas, parce qu'il bosse...
248. Marie : Au niveau social, tu veux dire ?
249. Difool : Ouais, alors ça c'est...
250. Jo : Ouais, ben c'est ce qui m'est arrivé avec
les a priori que j'ai eu, quoi.
251. Difool : Qu'est-ce que t'a eu, toi, Jo ?
252. Jo : Moi, je suis dans le cas contraire de la meuf.
253. Difool : Toi t'as 20 ans et t'es à Juvisy, c'est
ça ?
254. Jo : Ouais.
255. Difool : Alors le cas contraire, c'est les parents de ta
copine qui t'acceptent pas toi.
256. Jo : Voilà
257. Difool : D'accord.
258. Jo : Je suis resté un an et demi avec ma copine,
elle s'appelait Charlotte et tout.
[Dans le cas de Jo, les parents de sa copine le refusaient parce
qu'il est noir. La réponse n'est pas au motif de la
religion/tradition]
259. Difool : Et toi, Abdel, je t'ai pas demandé,
là, tout à l'heure, vous êtes toujours ensemble ou pas ?
260. Abdel : Bah, officiellement, non, mais officieusement,
oui.
261. Difool : Oui, donc vous êtes toujours ensemble.
262. Abdel : Ouais.
263. Difool : Oui, voilà, mais vous continuez de
vivre...
264. Marie : Vous avez continué une histoire.
265. Abdel : Mais à 25 ans, c'est un peu désolant
de...
266. Difool : Ah ouais, toi t'as 25 ans !
267. Romano : Ouais, c'est clair, vous devez vous cacher et
toit, ça doit être casse-couilles.
268. Difool : Mais tu penses pas que tes parents, ils vont un
jour...
269. Romano : ...se débloquer un peu ?
270. Abdel : Moi, personnellement, voilà, quoi, ce que je
cherche en ce moment, c'est un appartement et j'ai qu'un envie, c'est de
partir. Quitte à me marier d'accord avec ma mère, je le ferais,
quoi.
271. Difool : Ouais, parce que au bout d'un moment, tu vis pour
toi, tu vis pas pour ta famille, quoi.
272. Abdel : Surtout que maintenant, je l'ai connu, ça
fait trois ans qu'on est ensemble, voilà, quoi. Moi je sais que c'est
une fille bien. Elle l'a vue quoi, peut-être une demi-heure, trois quart
d'heures, comment elle a pu se donner une image de la personne...
273. Difool : Ouais, t'aurais amené n'importe qui, elle
aurait réagi comme ça, quoi. Mais elle veut quoi, elle veut te la
choisir, ta meuf ? Elle veut qu'il se passe quoi ?
274. Abdel : Ben franchement, ce qui me trotte dans la
tête, c'est que depuis tout jeune, tout le temps, elle me parlait d'une
fille au bled...
275. Difool : Ouais, donc elle a déjà prévu
avec qui tu vas te marier, tout ça, quoi.
276. Abdel : Bah, a priori, ça serait son
idéal, quoi. Ça serait que je me marie avec elle ou que
voilà, quoi.
277. Romano : Et finalement, il va y avoir un petit changement
de programme...
278. Difool : Ouais, elle avait pas prévu, mais bon. Et
tu conseillerais quoi, toi, à Isis ? Qui vit un peu la même chose
que toi, enfin son mec vit exactement ce que toi tu vis.
279. Abdel : Ben, déjà qu'elle coupe pas les ponts
avec le gars, si elle est déjà depuis deux ans avec lui, qu'elle
reste tout le temps avec lui, quoi. Et... elle a quel âge,
déjà ?
280. Difool : Elle a 18 ans, je crois que t'as 18 ans, Isis,
c'est ça ?
281. Isis : J'ai 18 ans.
282. Difool : Ouais.
283. Abdel : Et il a quel âge, le gars ?
284. Difool : 20 ans. Le gars, il a ton âge, tu vois, il
vit la même chose que toi, t'imagines. Sauf que toi, c'est pas un
problème de religion, c'est un problème de...
285. Abdel : Bah, moi, je suis dans le même cas de figure
qu'elle, sauf que elle c'est Algérien et Algérienne, quoi, alors
que moi, c'est Marocain et Marocaine, quoi, donc, il y a pas de souci de
religion, ou de...
286. Marie : Ouais, c'est la même chose, quoi.
287. Abdel : Ouais, c'est exactement la même chose. Mais
moi au moins, c'est clair et net, depuis que j'ai 18 ans, tout le temps, elle
me parlait de cette fille au Maroc. Moi franchement, ça fait deux ans
que j'ai pas été au Maroc à cause de ça, quoi.
288. Difool : Ouais, parce que t'as peur d'être
coincé là-bas, qu'on te marie d'office...
289. Abdel : Ouais, exactement. Exactement. Ce qui s'est
passé, c'est que il y a deux ans, ben la dernière fois que ai
été au bled, il y a eu un mariage d'un cousin et elle me disait,
« ouais, tu seras le prochain, avec elle, tu verras, elle est gentille...
»
290. Difool : Elle est gentille !
291. Marie : Sympa, super !
292. Romano : Putain, horrible.
293. Marie : Et tu es rentré vite vite en France, non
?
TEMOIGNAGES D'AUDITEURS PAR MESSAGES (SMS ET INTERNET) ET
POINTS DE VUE DE L'EQUIPE
294. Difool : Eh, il y en a plein qui nous disent, je vais lire
ce message parce que bon, c'est plutôt optimiste et ça fait un peu
de bien, elle dit << je suis marocaine et je te comprend, les parents
sont durs mais ils accepteront au fil du temps, ta copine, ne la lâches
pas, l'amour est plus fort que tout >>. Bon, il y en a plein qui nous
laisse des messages l'amour est plus fort que tout, mais il y en a aussi, les
parents, au bout d'un moment, bon, ils vont comprendre, ils vont accepter, ils
vont voir que t'es heureux et puis voilà, quoi.
295. Marie : Ils vont pas avoir le choix.
296. Abdel : Ouais. Ça c'est sûr...
297. Difool : << L'important c'est que tu sois heureux
>>, bah oui, ça c'est...
298. Abdel : ce que je dis, c'est de pas couper les ponts avec,
franchement, ça serait bête, parce que franchement, de rompre les
contacts avec...
299. Marie : Enfin, c'est quand même dommage d'être
en guerre avec tes parents et de te planquer pour avoir une histoire d'amour,
quoi.
300. Abdel : J'évite les conflits avec les parents, je
leur cache, quoi.
301. Marie : bah oui, bien sûr.
302. Abdel : Il y aura bien un moment donné où,
voilà, quoi...
303. Difool : << Moi non plus, je veux pas me marier avec
une fille du bled >>, ouais toi tu veux la choisir aussi, ta meuf,
pareil.
TEMOIGNAGES D'AUDITEURS A L'ANTENNE ET POINTS DE VUE DE
L'EQUIPE
304. Abdel : Bah, c'est normal, c'est moi qui vais vivre avec
elle.
305. Difool : Ouais, et toi, Jo, tu conseillerais quoi à
Isis ? Pareil ?
306. Jo : Non, mais moi, déjà, je suis dans la
merde, parce que je suis plus avec elle.
307. Difool : Ah oui.
308. Jo : Donc je suis plus avec elle, on a stoppé,
et...
309. Romano : A cause de ça ?
310. Jo : Ouais, j'ai appelé, quoi, j'ai appelé la
semaine dernière, j'ai essayé de la recontacter et à
chaque fois que j'essaie de la recontacter, elle me passe ses parents,
c'est-à-dire qu'elle aussi...
311. Difool : Ah ouais, ça c'est sympa, oui. Ouais, donc
en fait elle a fait le choix... elle a fait son choix, elle.
312. Jo : Voilà, elle a fait son choix. Et en plus...
ça m'énerve, quoi...
313. Difool : Bah oui, je comprends.
314. Jo : Donc voilà, je...
315. Difool : Ecoutez, merci, merci du témoignage quand
même, hein, Jo. Jo ?
316. Jo : Ouais ?
317. Difool : Ah, non, je croyais que t'étais parti. Non,
je te disais merci du témoignage pour Isis, parce que ça va
peut-être l'aider à avance, Isis.
[...]
318. Difool : Isis ? Après tout ça, je sais pas,
ça t'a fait avancer un petit peu, tu vas en parler à ton mec, tu
vas faire quoi ?
319. Isis : Euh... ben en fait, moi
320. Difool : T'as plein de soutien, hein, de tout le monde.
321. Isis : Je voudrais le voir, au moins pour savoir ce qu'il
se passe chez lui et tout, mais le problème, c'est que sa mère
lui a enlevé son portable, elle le laisse plus aller à la
fac...
322. Difool : Non, mais elle le laisse plus aller à la
fac, il a 20 ans...
323. Isis : Ouais, je sais,...
324. Difool : ...il prépare son futur, il faut qu'il
aille à la fac s'il a envie d'aller à la fac.
325. Isis : Et le pire, c'est qu'elle dit que c'est moi qui lui
gâche son avenir. Entre nous deux, c'est pas moi qui l'empêche de
faire ses études.
326. Difool : Ah, ouais, il faut qu'il bouge, hein.
327. Isis : Ouais, c'est clair. Mais ses parents à Abdel,
ils l'ont pas empêché... enfin sa mère elle lui a juste dit
qu'elle l'aimait pas, mais elle l'a pas empêché de sortir ou
de...
328. Difool : Ouais, c'était pas à ce point,
Abdel, toi ?
329. Abdel : Bah, moi, ce qu'il s'est passé, c'est
qu'elle faisait la même chose que lui et la même chose qu'elle,
d'éviter de la voir et << de toute façon, je veux pas la
voir >> et ainsi de suite. De toute façon, ce que j'ai fait, c'est
que je suis rentré dans le délire de ma mère, je lui ai
dit << ouais, ok, pas de souci >>, moi ce que j'ai fait, c'est que
j'ai évité le dialogue avec ça...
330. Difool : T'as continué à vivre et tu lui as
menti.
331. Abdel : Ouais, voilà, je sais très bien que
si je lui dis << non, non >>, ben elle va encore plus me
saoûler, quoi, alors j'ai préféré faire le mort sur
le moment, et lui dire << ouais, comme tu veux, il y a pas de...
>>
332. Difool : << Les parents qui font des fixations, il
faut les soigner, c'est pas gagné >>.
333. Abdel : Bah, au moins, voilà, quoi, je suis un peu
tranquille parce que elle est pas toujours derrière moi et je peux un
peu la voir quoi, mais voilà, quoi.
334. Difool : Ouais, enfin t'es pas tranquille non plus quoi.
335. Abdel : Peut-être que c'est ce qu'il aurait du faire,
tout bêtement dire ok, et voilà, quoi, elle aurait du plus
vivre.
336. Difool : Ben merci, Abdel. Merci pour le conseil, en tout
cas, hein.
337. Abdel : Bah de rien.
338. Difool : ne quittes pas Abdel, et puis Isis, si on a
d'autres coups de fil, on va te garder avec nous, hein ?
339. Isis : D'accord, ok.
340. Difool : D'accord Isis ? Et puis ton mec s'il nous
écoute pas, s'il nous écoute, on le salue, hein, mais s'il nous
écoute pas, on lui souhaite bon courage, et puis il y a plein de
messages de soutien, je lisais, sur le net, sur les SMS, tout ça.
341. Isis : Ouais, ben c'est super sympa, merci.
342. Difool : Donc, euh, bah ouais, parce qu'on se met tous un
petit peu à la place de ton gars, on s'imagine à sa place
à lui, c'est vrai que c'est pas évident de choisir entre les
parents...
343. Isis : Ouais, c'est ça, parce que moi je me plains
parce que je le vois pas, je sais pas ce qu'il fait, c'est horrible, mais bon,
d'un autre côté je culpabiise parce que je me dis que pour lui,
c'est encore pire.
344. Difool : Mais toi, il faut que tu gardes la pêche,
hein.
345. Romano : Il doit bien avoir la pression de toute la famille
et tout, là.
346. Isis : Ouais, ouais, c'est clair, je me dis pour lui c'est
encore pire, parce que moi personne m'empêche de sortir si je veux, lui
je le vois pas, mais j'ai quand même le droit de voir ailleurs que ma
chambre mais lui, c'est grave, enfin à son âge...
347. Difool : Mais il est comment, enfin, il a un
caractère, enfin, je sais pas, il...
348. Isis : Ouais, le pire, c'est qu'il a un fort
caractère et tout, mais quand on voit sa mère, c'est vrai qu'elle
fait peur, quoi, enfin moi je l'ai vue...
349. Difool : Oui, c'est Schreck !
350. Romano : Oui, c'est une sorcière.
351. Difool : Quoique Schreck, il est sympa, Skreck.
352. Isis : Non, mais elle est venue chez moi, elle a
fouillé chez moi, parce que...
353. Difool : Non, mais elle, je pense qu'elle à des...
parce que sans vouloir... en restant correct, hein...
354. Romano : Ouais, elle a des soucis.
355. Difool : Elle a quand même deux trois petits
problèmes. Non, mais c'est vrai, t'imagines, la mère qui va
fouiller chez toi, non mais moi je...
356. Isis : Ouais, ouais, c'est clair.
TEMOIGNAGE FICTIONNEL D'UN MEMBRE DE
L'EQUIPE
357. Difool : Romano, que ferais-tu si la mère de ta
copine venait fouiller chez toi ?
358. Romano : Oh, mais je la fous dehors, hein. Sérieux,
non mais de quel droit...
359. Difool : Ah, moi aussi, je la dégage, moi.
360. Romano : Non, mais déjà, ouais, ça lui
viendrait pas à l'idée, je pense, quoi, mais...
361. Isis : Ouais, ouais, elle me dit que je vais lui voler son
fils, en fait.
362. Difool : Voilà.
363. Romano : Oui, mais tu l'as pas caché dans le tiroir,
hein. (rires)
CONCLUSION
364. Difool : Bon, ben ne quitte pas Isis, reste avec nous.
365. Isis : Ok, ben c'est gentil.
366. Difool : Et puis merci à vous tous et vous toutes,
là, pour les messages.
Religion/tradition / cas N°2 / 8 décembre 2004
« Ma famille (musulmane) n'accepte pas que je sois enceinte, je me
retrouve à la rue » / séquence diffusée entre 22h32
et 23h22 :
EXPOSE ET EVALUATION DU PROBLEME DE L'AUDITRICE
APPELLANT
1. Difool : Bon, alors, je vous parlais de Karine, là,
qui nous a passé un coup de fil, il faudrait un coup de main, tu parlais
de skysolidarité, Momo, juste un petit message à vous tous qui
habitez Paris, on va la prendre en speed parce qu'on l'entend super mal,
Karine, donc ça va être assez compliqué. Je sais pas, on va
peut-être essayer, là. T'es là, Karine ?
2. Karine : Oui.
3. Difool : Oui, bah écoute, on t'entend pas si mal
que ça, Karine. 22 ans à Paris. Je racontais un petit peu ton
histoire et puis je demandais un petit peu qu'on nous rende un petit service,
t'es à la rue, là, c'est ça ?
4. Karine : Ouais, c'est ça.
5. Difool : Et t'es partie de chez toi, t'es partie pourquoi
?
6. Karine : Parce que... je suis enceinte.
7. Difool : D'accord, mais c'est pas une raison pour partir de
chez soi. C'est parce que tu es chez tes parents et que tes parents acceptent
mal ça, non ?
8. Karine : Non, en fait mes parents, ils l'ont su que depuis
que je suis partie, je suis d'origine maghrébine, et chez moi c'est
très très mal...
9. Difool : Enfin, les maghrébines tombent enceinte comme
les autres, donc...
10. Marie : Oui.
11. Difool : Et ça se passe en général pour
tout le monde de la même manière, par relation sexuelle, donc
frottage d'organes génitaux. (rires)
12. Marie : Oui. Par pénétration, oui.
13. Difool : Non, mais tes parents, ils ont pas accepté
que tu sois enceinte avant d'être mariée, c'est ça ?
14. Karine : Voilà.
15. Difool : Et toi, tu t'es sentie obligée de partir
?
16. Karine : J'étais obligée parce que sinon,
ça allait se passer très mal pour moi. On va dire que non
seulement mes parents n'auraient pas accepté mais dans tous les cas
dehors. Donc j'ai préféré partir avant d'être dehors
et euh...
17. Difool : T'as des frères, des soeurs, non ? De la
famille, j'imagine.
18. Karine : J'ai trois grands frères et deux soeurs.
19. Difool : Et alors, ils sont au courant aussi ?
20. Karine : Non. Enfin, j'ai que mes petites soeurs, mais bon,
elles sont petites, sinon, mes trois grands frères, mais eux, ça
serait pire que mes parents.
21. Difool : Ouais, bah ils feraient mieux de se mêler de
ce qui les regarde, d'abord, et puis de filer un coup de main à leur
soeur s'ils l'aiment.
22. Marie : Bah oui.
23. Difool : Donc, t'es enceinte, si ça te pose un
problème, il vaut mieux être bien dans sa tête pour faire
ton bébé. Ça fait combien de temps que t'es enceinte, toi
?
24. Karine : Ca fait six mois maintenant.
25. Difool : Six mois !
26. Marie : Ah oui, donc ça se voit bien, quoi !
27. Difool : Et t'es partie quand ?
28. Karine : Je suis partie, ça fait deux semaines au
moins.
29. Difool : Et ils s'étaient rendu compte de rien ?
30. Karine : Qui ?
31. Difool : Ben, je sais pas, dans la famille, parce que si
t'es partie il y a deux semaines...
32. Karine : Ben non, parce que mes parents, mes trois grands
frères ils habitent pas chez moi, ils sont tous les trois
mariés.
33. Romano : Et tes parents, ils ont bien vu que tu avais du
ventre.
34. Karine : Oui, mais je vous explique, mes parents, ils
étaient à l'étranger. Ils sont revenus depuis, là,
ça fait trois semaines et quand ils sont revenus, sitôt je suis
partie, en fait.
35. Difool : Ah ouais, tu as été obligée
de...
36. Marie : T'as eu peur.
37. Difool : T'as été obligée de... t'a
été obligée de bouger, oui. Et t'as personne dans la
famille, tu vas pas me dire, il y a bien...
38. Karine : Je vous entends plus, là, en fait. Moi
à la base, je suis pas de Paris, je suis de Poitiers.
39. Difool : D'accord.
40. Karine : Et donc euh... je suis pas restée dans la
ville de Poitiers parce que je serais retrouvée par mon père ou
par mes frères.
41. Difool : Mais t'as personne à qui en parler, quand je
dis t'as pas de famille, t'as personne à qui en parler, personne qui
peut te filer un coup de main, non ?
42. Karine : Euh... enfin sur Poitiers, j'ai des amis, mais je
pouvais pas rester sur la ville de Poitiers donc je suis venue sur Paris, j'ai
un ami...
43. Difool : Non, mais pour être clair, en gros, t'as bien
des gens dans ton entourage qui sont, qui sont...
44. Karine : oui, mais en parler, oui, mais...
45. Difool : ... qui sont rebeu ou musulmans ou de ta famille
à toi et qui ont une ouverture d'esprit et qui peuvent essayer de faire
comprendre à tes parents que c'est pas comme ça qu'on se
comporte, tu vois, donc euh...
46. Karine : Ah non, mes parents c'est même pas la peine
de leur faire comprendre quoi que ce soit, mes parents ils sont
incompréhensifs...
47. Difool : À tes parents ou à tes frères
ou à quelqu'un de ta famille, tu vois. Tu vas pas me faire croire que
tout le monde est bloqué. Non, t'as personne ?
48. Karine : Chez moi, en tout cas, ils sont comme ça.
Pour eux, c'est l'erreur qu'il faut pas faire. Tu peux faire n'importe quelle
erreur que tu veux, encore déjà la virginité pour eux,
c'était déjà impossible, donc en plus de ça,
être enceinte, c'est... Vraiment, pour eux...
49. Difool : Non, mais c'est fait. Ce que je veux dire, c'est
qu'on peut juger, on peut trouver ça bien, pas bien, après
ça dépend des traditions, de ce qu'on a dans la tête, tout
ça, bon, c'est respectable si euh... si ça empiète pas sur
ta vie à toi, le problème c'est que t'es enceinte depuis six
mois, qu'il y a pas grand-chose à faire à part attendre le
bébé et puis être heureux d'avoir un bébé,
c'est plutôt pas mal, t'as 21 ans, 22 ans, c'est ça ?
50. Karine : Oui, 22 ans.
51. Difool : Ben écoute, c'est déjà...
c'est un âge pour faire un bébé aussi, hein ?
52. Marie : Oui.
53. Difool : Donc euh... et puis maintenant il y a plus le
choix, donc tes parents, ils sont pas... tu vois, ils ont quand même un
coeur, non ?
54. Romano : T'est leur fille, ils peuvent pas...
55. Difool : Bah oui.
56. Marie : Ils peuvent pas te laisser dans la merde, comme
ça.
57. Difool : Tu vois, qu'ils te disent << c'est pas comme
ça qu'on fait >>, ou << on aurait aimé que tu te
comportes différemment >>, ou << on aurait aimé que
tu te maries avant >>...
58. Karine : Non, j'ai compris, mais ils veulent rien savoir,
c'est << t'es plus ma fille, on se connais plus, on se voit plus
>>... et même pas << t'es plus ma fille >>, mais
<< si je t'attrapes, je te tue >>.
59. Marie : Oh, là là.
60. Karine : Pour eux, c'est comme ça qu'ils
réagissent.
61. Difool : Ouais.
62. Marie : Et le père du bébé, il est
où ?
63. Karine : Je suis plus avec.
64. Marie : Ah ouais, donc là, t'es vraiment toute seule,
face à te grossesse, tes parents, tout ça.
65. Difool : Et toi, tu cherchais en fait...
66. Romano : Et là, depuis que t'es à Paris, tu
dors où, là ?
67. Karine : Mais c'est ce que je vous explique, en fait moi je
suis pas de Paris, je suis de Poitiers, et je suis partie de Poitiers parce que
si ça arrive à ma famille, à mes frères, ça
va mal se passer pour moi.
68. Difool : Ah, tu flippes à ce point là, quand
même, ouais.
69. Karine : Ah, oui, c'est pour ça que... C'est
même pas, même s'ils sont pas compréhensifs je reste dans la
ville, tu vois. C'est vraiment extrême, donc je suis partie, et à
Paris, j'avais un ami à moi
qui m'avait hébergé et là, il m'a dit que
c'est pas possible parce que je voulais pas coucher avec lui, alors, il m'a
mise à la rue.
70. Difool : Et là, t'es où, dans un hall
d'immeuble ?
71. Karine : Je suis dans un hall d'immeuble, oui.
72. Difool : Ce que tu vas faire, Karine, tu vas pas bouger.
Trouver un endroit pour dormir, c'est le plus urgent, si on peut trouver
quelque chose pour que tu puisses pioncer, c'est pas mal. Par contre il
faudrait trouver un truc à long terme pour toi, il peut y avoir
forcément des endroits, des centres...
73. Marie : Et puis là, t'es pas suivie, en plus, il te
faut un gynéco.
74. Karine : Non.
75. Difool : Tu vois, il faut pas dormir dehors quand on est
enceinte de six mois.
76. Marie : Non mais déjà, je sais pas par quoi il
faut commencer, déjà, te trouver un toit, c'est sûr. Mais
il faudrait aussi que tu ailles à l'hôpital, que tu te fasses
suivre par un gynéco et tout. T'es à six mois, hein.
77. Difool : Bah, oui, hein.
78. Karine : Oui, je sais.
79. Marie : C'est important parce que...
TEMOIGNAGES D'AUDITEURS PAR MESSAGES (SMS ET INTERNET)
ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE
80. Difool : Alors, il y a pas mal de message, il y a Jasma qui
dit << moi mes parents, ils m'auraient égorgés à la
place du mouton >>, Jasma, Paris. C'est ce que tu penses ? On a
déjà eu... On a parlé de ce problème, on a
déjà eu des témoignages où les parents sont aigris
au début, et puis ils comprennent au bout d'un moment...
81. Romano : Ouais, une fois que le bébé...
82. Difool : Vous les pensez peut-être un petit peu plus
bloqués qu'ils le sont de temps à autres, quoi. Même si il
y a un blocage au début. << Il faut absolument aider Karine
>> on nous dit. << Sinon elle est dans la merde >>. <<
Moi je suis pas de Paris, sinon, je l'aurais aidée >>. Mais on va
avoir des messages, là, allez-y, hein, sur le 41759, le 41SKY et puis le
Skyrock.com. Tu t'es renseignée,
Karine, pas du tout ?
83. Karine : Renseignée sur quoi ?
84. Difool : Ben sur les droits que tu... enfin les droits pour
une nana qui est dans ta galère, en fait.
85. Romano : Ouais, parce que t'as rien, tu travailles pas...
86. Difool : T'as pas de thunes, t'as pas de maison, t'attends
un bébé de six mois, depuis six mois, donc forcément, on
n'est pas dans un pays de dingue, il doit y avoir...
87. Marie : Ouais, il faudrait que tu ailles voir une assistante
sociale, en fait.
88. Difool : Bon si vous savez, aiguillez-nous un petit peu,
nous on va se renseigner, on va regarder un petit peu dans euh... dans tous les
dossiers qu'on a là, on va trouver de toute façon, Karine, on va
se démerder, hein. On compte sur vous, allez-y hein, vous tous et vous
toutes. Euh... Ben il y a des messages qui arrivent, là. Sur le 41SKY,
le
Skyrock.com et puis vous appelez au
01.53.40.30.20. Tu penses qu'il y a aucun dialogue possible, toi ? On nous dit
<< je connais ça, c'est difficile le dialogue >>, tout
ça... c'est Sophia du Havre qui nous laisse le message. Avec tes
parents, non, c'est pas possible ?
89. Karine : Non, avec mes parents, c'est pas possible. Mes
parents, mes frères, pour eux, le fait que je sorte avec un
garçon, s'ils apprennent ça, pour eux, c'est dramatique, c'est
pas possible.
90. Difool : Ouais.
91. Romano : Ah, ouais, ils sont bien bien bloqués,
hein.
92. Karine : C'est vraiment... pour eux...
93. Difool : Bon, ben reste là, ne bouges pas Karine. On
va y revenir, là, tout à l'heure. [Séquence football]
94. Difool : << Il existe des associations pour les
jeunes, il faut l'aider grave ! >>, pas de problème, Manu.
95. Marie : Ouais, il y a des foyers, ouais.
96. Difool : Ouais, on nous dit << je bosse au 75, il y a
des solutions pour les femmes enceinte >>, c'est Marie qui nous laisse le
message. << C'est dégueulasse de laisser sa fille comme ça
>>. Ouais, il y a pas eu de dialogue non plus et a priori le
dialogue a l'air d'être très... ouais, pas facile ton histoire.
Bon, << Il existe des organismes qui hébergent les futures
mères >>. On nous dit << je peux l'héberger, une ou
deux nuits >>, donnes nous ton numéro, laissez bien vos
numéros si vous allez sur le net ou les SMS. Euh, qu'est ce qu'on nous
dit... << C'est dur le dialogue, ils sont durs, parfois, nos parents
>>, c'est qui, c'est le Rennais qui nous laisse le message, 21 ans, en
Ille-et-Vilaine. Au final,
ouais, on verra, quoi, je vais pas dire qu'au final, ça
va bien se passer. J'espère en tout cas, pour Karine. << Je veux
bien l'héberger, mais je suis sur Toulouse >>. T'es loin, Samy,
mais c'est gentil quand même. << Il caille dehors, c'est la nuit la
plus froide depuis longtemps, il va faire zéro à
Paris >>, c'est Shitman qui nous laisse le message. Mais
bon, ça va pas se finir dehors, cette histoire, hein. << J'ai un
appartement dispo dans le 78 jusqu'à la fin février >>
Audrey, 22 ans, à Rambouillet, c'est gentil, Audrey.
97. Marie : Laisse ton numéro, Audrey.
98. Difool : Laisses-nous juste ton numéro. Tu vois, il y
a plein de messages pour toi, Karine. On va revenir avec Karine, dans un
instant. Euh... elle est au standard, là, on va la reprendre. [Autre
sujet]
[Coupure pub et musicale]
99. Difool : Merci surtout pour les messages que vous nous
laissez depuis tout à l'heure, là, sur le 41SKY, le
Skyrock.com pour Karine. Des messages
qu'on est en train de noter, il y en a plein. Karine nous a appelé il y
a quoi, il y a 20 minutes parce qu'elle est dehors, elle s'est barrée de
chez elle parce que ses parents vont pas supporter le fait qu'elle soit
enceinte depuis six mois. Et donc on cherchait des endroits, des solutions pour
qu'elle puisse dormir ce soir et que ça puisse être à plus
long terme parce qu'elle est enceinte de six mois, donc euh... il y a trois
mois pendant lesquels il va bien falloir qu'elle se repose, quand
même.
100. Romano : Ben ouais parce que le bébé
arrive.
TEMOIGNAGES D'AUDITEURS PAR MESSAGES (SMS ET INTERNET)
ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE
101. Difool : Ouais, alors << il existe plein de foyers
pour mères seules >>, il y a plein de messages qui nous disent
ça, << pour Karine, il faut se renseigner sur Paris, bon courage
à elle, bise à toute l'équipe >>. On a du monde,
là, qui propose de l'héberger, on va rappeler tout le monde. Euh,
Mick, qui nous fait << pour Karine, il y a des centres pour l'aider, je
crois qu'il y a des aides pour les jeunes mères >> tout ça,
Karine, il y a plein de messages pour toi, ça fait plaisir en tout cas
de voir que vous êtres tout le temps, tout le temps dans le coin pour
filer un coup de main. Donc on va trouver quelque chose pour ce soir, Karine,
et puis on va surtout t'expliquer ce que tu vas pouvoir faire pendant trois
mois. D'accord ?
102. Karine : D'accord.
103. Difool : Mais il y a forcément... Il faut se
renseigner, Karine, tu sais, y a des trucs où t'aurais pu aller
aujourd'hui, hein.
104. Romano : T'as les mairies, déjà...
105. Difool : Tu peux aller dans une mairie...
106. Romano : Là-bas, ils te renseignent.
107. Difool : Qu'ils te filent un coup de main. On nous dit que
si t'étais allée dans une mairie aujourd'hui, t'aurais pu
trouver...
108. Romano : Ouais, ils t'auraient orientée vers un truc
direct.
109. Difool : T'aurais pu trouver un truc sans problème,
et euh... et bon, au pire, on va te trouver quelque chose, t'en fais pas.
<< Il m'est arrivé la même chose, je suis tombée
enceinte à 17 ans, appelez-moi >>, on a même des... des
nanas qui veulent... qui veulent te parler, qui veulent parler avec toi,
là. << J'ai ma cousine à qui il est arrivé la
même histoire, il a fallu que toute la famille supplie mon oncle pour
qu'il accepte >>, Ben tu vois, au bout d'un moment, ça s'est bien
passé, là, c'est Dams qui nous a laissé un message,
là. Il existe des centres d'hébergement, il y a Skip93 qui y est
allée, elle avait 19 ans, elle, pareil. << Si elle est dehors, je
peux bien la prendre chez moi >>, c'est Sarah de Cichy, qui vient de nous
laisser un message, qu'on va rappeler. Tu vois, il y a plein de messages pour
toi, donc t'inquiètes pas pour ce soir...
1 10. Karine : Merci beaucoup.
11 1. Difool : ... par contre, pour la suite de ta vie, bas toi,
un peu, tu vois.
1 12. Romano : Ouais, il faut te bouger.
1 13. Difool : t'as des droits, tu dois te renseigner, tu dois
aller...
1 14. Romano : Ouais, de toute façon, normalement t'as des
aides, du genre de l'argent, quoi.
1 15. Difool : Ouais, et puis faut que tu sois fière
d'avoir un bébé, quoi. C'est pas parce que tes parents,
ils... C'est pas dans leur délire à eux... dans
leur tête à eux d'avoir un bébé comme tu vas
l'avoir
toi, tu dois être fière d'avoir un
bébé, c'est bien, t'as 22 ans, tu vas avoir un
bébé... 1 16. Romano : Ouais, ça doit te rendre heureuse,
hein.
1 17. Difool : Voilà, construis-lui une vie démente
et commence maintenant, hein. Donc reste dans le coin, Karine.
118. Karine : D'accord.
1 19. Difool : C'était pour te dire que ça va bien
se passer, t'inquiètes. Et merci à vous tous et à vous
toutes, pour les messages, ça fait plaisir.
[Autres sujets]
120. Difool : Très bonnes nouvelles, là,
maintenant. On va reprendre Karine, là, au téléphone, en
direct de Paris, hein, Karine.
121. Marie : Ouais, c'est ça, ouais.
PROPOSITION D'AIDE D'AUDITRICES A L'ANTENNE ET POINTS DE
VUE DE L'EQUIPE
122. Difool : T'as bougé de Poitiers. Bon, j'ai de bonnes
nouvelles pour toi au téléphone, on va te mettre en contact avec
Adjira, t'es là, Karine, hein ?
123. Karine : Oui, je suis là.
124. Difool : Oui. Alors, Adjira, qui a 22 ans, qui est à
Trappes, si c'est pas bien loin, si tu connais pas bien la région
parisienne, c'est dans le 78, c'est à l'est de Paris, Trappes.
125. Marie : Ouais, c'est ça, ouais.
126. Difool : C'est quoi, c'est à 30 bornes de Paris.
T'es là, Adjira ?
127. Adjira : Oui, je suis là.
128. Difool : Bonjour, mademoiselle.
129. Adjila : Bonsoir !
130. Difool : 22 ans, Trappiste, Trappeuse...
131. Adjila : Oui, Trappeuse. Depuis peu, mais Trappeuse quand
même, hein.
132. Difool : Alors, ben peut-être merci pour le coup de
fil. Merci à vous toutes et à vous tous, hein, pour les messages
pour Karine depuis tout à l'heure.
133. Marie : Oui, plein de messages.
134. Adjila : Ben, je vous en prie, c'est normal.
135. Difool : Et on n'a même pas rappelé tout le
monde parce que pour l'instant, on n'a pas eu le temps, encore, mais on a...
136. Adjila : (Rires) Je suis avec ma colocataire, hein,
Louisa.
137. Difool : Bonjour la coloc Louisa.
138. Louisa : Salut !
139. Difool : Ca va, Louisa ?
140. Louisa : Très bien. Salut Karine !
141. Difool : Ben, y a Karine, aussi, qui est là. Dans
sa, dans son hall d'immeuble pour l'instant.
142. Adjila : Dans ton hall d'imm... Mais elle est où
à Paris ?
143. Difool : T'es où, à Paris ?
144. Karine : Vers Gare du Nord.
145. Difool : Vers la gare du Nord, ok.
146. Adjila (probablement à l'adresse de sa colocataire
Louisa) : Comment elle fait de Gare du Nord ?
147. Cédric : Sinon, il y a David, un ambulancier, qui se
propose de t'amener où tu veux, Karine.
148. Difool : On va se démerder.
149. Romano : Pas cher !
150. Difool : Je vous avais dit, vous avez été
super efficaces et ça fait plaisir, encore. Donc...
151. Adjila : Ben, c'est normal.
152. Marie : Ah, ben c'est bien, elle va être bien avec
vous deux, là.
153. Adjila : Bah oui, elle va être bien !
154. Marie : Vous avez l'air joyeuses.
155. Romano : Non, non, on sera pas trois parce que Louisa, je
la mets dehors, pour prendre Karine (rires).
156. Adjila : Et, t'as bien raison, Louisa, on la vire, y'en a
marre (rires).
157. Louisa : Eh, arrêtez, moi je vous casse la gueule,
hein (rires).
158. Difool : Oh, là, Louisa, attention (rires)!
159. Marie : C'est une caillera, hein.
160. Difool (voix d'imitation, CSA) : << Oui, la promotion
de la violence sur Skyrock ! >> (rires)
161. Romano (voix d'imitation, CSA) : << Vous entendez,
elles se tapent >> (rires)
162. Difool (voix d'imitation, CSA) : << Oui, ce sont des
cailleras, les deux trappistes, elles habitent en banlieue. Elles habitent en
banlieue ! >>
163. Louisa : Eh, mais c'est gratuit, les coups, pas cher Romano
!
164. Romano : Ouais, pas cher !
165. Difool : Pas cher, les coups, ouais (rires). Bon, eh bien
c'est gentil, en tout cas, t'as... En tout cas, c'est bien d'arriver chez deux
nanas qui ont la pêche, ça...
166. Marie : Ah, oui, c'est clair !
167. Adjira : Elle risque pas de s'ennuyer.
CONCLUSION ET PERSPECTIVES
168. Difool : Bon, ça fait plaisir. C'est gentil, hormis
ce côté rigolade, tout ça, ça fait plaisir,
Adjila.
169. Adjila : Ben, c'est normal, ça nous a touché
ce qui lui arrive.
170. Romano (imitant Adjila) : « Alors, la facture, on fait
comment, je l'envoie à Skyrock ou... » (rires)
171. Difool : Par contre, ce qu'il va falloir faire pour toi
Karine, c'est vraiment t'occuper de toi, aller voir demain des...
172. Cédric : Des assistantes sociales.
173. Romano : Ouais, à la mairie, tout ça.
174. Difool : Tu vois, la mairie de Trappes, vous l'emmenez
à la Mairie de Trappes et puis elle se démerde, t'es grande,
hein, Karine.
175. Karine : Oui.
176. Cédric : Parce que même ton accouchement, t'es
au courant, il faut aller voir euh...
177. Difool : Il faut aller voir une gynéco, faut,
euh...
178. Marie : Non, mais il faut que tu t'inscrives dans un
hôpital, bien sûr, et que tu voies un gynéco parce que
à six moi, il faut vraiment...
179. Cédric : Les hôpitaux, c'est blindé
pour ça, hein.
180. Marie : Mais bien sûr.
181. Difool : D'accord, Karine ?
182. Karine : D'accord
183. Marie : En même temps, si elle arrive aux
urgences...
184. Difool : Tu vas gérer tout ça, ça nous
fait plaisir, et puis en tout cas, tu seras mieux... en plus, avec vous deux,
c'est parfait, les filles, vous êtes...
185. Cédric : C'est un bon départ, là.
186. Adjila : Merci.
187. Romano : Ouais, c'est bien, vous allez lui remonter le
moral et tout.
188. Adjila : On va essayer un petit peu de lui changer les
idées.
189. Cédric : Ca à l'air bonne ambiance.
190. Difool : Oui, c'est sympa, chez vous, là.
191. Adjila et Louisa : Oui, ça va !
192. Cédric : C'est festif.
193. Difool : Oh, je crois que je suis enceint... (rires)
194. Cédric : Moi aussi, on peut pas venir, les filles ?
(rires)
195. Adjila : Oh, ben non, il y a plus de place. (rires)
196. Difool : Ah, merde. (rires) Bon, ben écoutez, merci
beaucoup, Adjila, Louisa, on vous rappelle demain pour prendre des nouvelles,
voir comment ça s'est passé ?
197. Adjila : Il y a pas de problèmes.
198. Difool : et merci à tous les autres qui ont
laissé des messages. Ce qu'on va faire aussi, euh... Karine, on va
garder ton numéro et puis on va te rappeler, bon, on va te suivre
jusqu'à ce soir, on va te laisser le numéro de
l'ambulancier...
199. Cédric : Ouais, David, ouais.
200. Difool : On va vous mettre en contact avec David, merci
l'ambulance, là. Et puis on te rappellera pour te laisser les
numéros, te donner des numéros d'organismes que tu peux appeler,
des gens qui peuvent t'aide, te donner des conseils si t'as besoin pour ton
bébé, tout ça. D'accord ?
201. Karine : D'accord.
202. Difool : Bon, ben merci en tout cas, Adjila et Louisa,
là, les filles.
203. Adjila : Ouais, on vous en prie, c'est normal.
204. Difool : Eh ben, c'est, oui, mais ça fait toujours
plaisir de l'entendre et puis de... Ben merci d'avoir appelé, en tout
cas. Bon, salut, les filles !
205. Adjila et Louisa : Salut !
206. Difool : Bon, et puis Karine, merci de nous avoir
appelé et puis euh...
207. Karine : Merci à vous.
208. Difool : Ben, euh, non, mais, et puis voilà. Bon,
prends soin de toi, fais un beau bébé et tout ça, et puis
on prend des nouvelles demain soir.
209. Karine : D'accord.
210. Difool : Et raccroche pas, on va te prendre, là,
tout de suite, là.
211. Karine : Ok.
212. Difool : Ok, on va tout t'expliquer. Et euh... si vous
arrivez avant minuit, on vous rappelle... Si t'arrives avant minuit, ça
m'étonnerait, cela dit, mais bon, si t'arrives avant minuit à
trappes, on te fais signe et sinon, demain, on prendra des nouvelles.
213. Karine : D'accord.
214. Difool : Bisous, les filles, toutes les trois, là.
Salut !
215. Romano : Salut !
216. Difool : Salut Karine.
Au regard de ces retranscriptions, nous allons pouvoir
interroger le fonctionnement du discours de la skysolidarité :
comment se structure-t-il, quelles valeurs peut-on définir comme
constitutives de sa logique de fonctionnement ?
Il va s'agir en premier lieu de décortiquer son
architecture en tant que dispositif médiatique de libre antenne
organisé autour d'un projet d'entraide par appel à la
solidarité, au partage des expériences. Nous aurons ensuite le
champ libre pour l'analyse des valeurs sur lesquelles il fonde son propos, sa
parole.
Nous devrons alors procéder à un enregistrement
précis des contenus des grandes orientations, des grandes articulations,
ainsi que de certaines thématiques redondantes que nous pourrons estimer
opportunes. La méthode aura consisté, séquence
après séquence, à l'enregistrement des articulations des
grandes phases du discours communes à chaque sujet, mais aussi des
thèmes réguliers (universalité des intolérances, du
racisme ; primordialité de la liberté individuelle ; importance
du lien familial...) Nous en illustrerons régulièrement l'analyse
afin de la rendre cohérente et de la justifier.
Puis, nous essaierons, appuyés par différents
travaux de recherches notamment en sociologie, de comprendre la place de
Radio libre dans l'espace social dans lequel évoluent ses
auditeurs.
Troisième Partie
--- Un regard sur Radio libre et les
séquences retranscrites
Architecture de la skysolidarité
D'un peu plus près, techniquement, comment ça
marche, la skysolidarité ?
A l'écoute des séquences et au regard de ces
retranscriptions, nous pouvons noter d'ores et déjà une
première logique fonctionnelle.
Une première phase de chaque cas traités dans
l'émission consiste à l'exposé du problème
de l'auditeur appelant, selon une injonction simple de l'animateur
principal (interventions N°1 dans chaque séquence : pour les sujets
ayant trait au racisme « Alors, qu'est-ce qui t'arrive,
Séréna, toi ? », « [...] toi tu te poses la question de
savoir si ça vient pas de l'influence des parents, c'est ça, hein
? », « Oui, Shirley ? » ; pour ceux concernant l'homophobie
« T'appelais pour quoi, toi, d'abord ? », « Alors, qu'est-ce qui
t'arrives ? », « Sois le bienvenu, t'as 22 ans, c'est ça ?
» ; et s'agissant de l'intolérance du fait de la religion/tradition
« Bon, alors, Isis, Qu'est-ce qui t'arrives ? » et « Bon, alors,
je vous parlais de Karine, là, qui nous a passé un coup de fil,
il faudrait un coup de main[...] »). Il est clairement rappelé,
dès le début et ponctuellement par la suite, que les auditeurs
sont là, avec l'équipe de l'émission, pour que soit
sollicitée leur aide.
Vient ensuite le temps de partager les expériences, en
faisant appel aux témoignages des auditeurs qui peuvent
appeler un numéro téléphone (01.53.40.30.20) ou laisser
des messages sur la partie consacrée à l'émission en bonne
place sur la page d'accueil du site de la station (
www.skyrock.com) ou encore envoyer
des SMS au 41759 (plus souvent nommé à l'antenne « 41 SKY
» du fait de la combinaison des lettres sur un clavier de
téléphone portable). La plupart des adolescents ont leur propre
portable voire une connexion à internet dans leur chambre et peuvent
donc entrer en contact depuis leur espace propre, leur chambre. Certains
auditeurs, sélectionnés par les standardistes, sont
rappelés pour discuter à l'antenne et une sélection de
messages de nombreux autres est distillée par Difool pour
développer la conversation. L'appel aux témoignages est
très fréquemment relancé par Difool à l'antenne et
rythme le
temps de la radio : entre chaque sujet (d'autant plus qu'ils se
chevauchent bien souvent), avant et après les séquences
publicitaires, footballistiques ou les jeux...
Avec les points de vue de l'équipe de
l'émission Radio libre (Difool, Marie, Romano le
réalisateur, Cédric, Momo et Samy les standardistes) auxquels
Difool fait appel opportunément, les témoignages des
auditeurs, à l'antenne ou par messages, s'imbriquent pour
construire une conversation entre des émetteurs variés.
Il en ressortira une construction qui, si elle est
médiée (on peut penser notamment que certains messages ne sont
pas lus car ils ne rentreraient pas dans la couleur de l'antenne ou
s'opposeraient violemment aux valeurs fondamentales du discours que nous
interrogerons plus loin, notamment précisément s'agissant de la
tolérance), n'en est pas moins le résultat de la participation
des membres d'une équipe et des auditeurs.
Difool fait la plupart du temps, en conclusion, une
synthèse des expériences et des conseils, et
n'oublie jamais de remercier les auditeurs pour leurs messages. Nous noterons
que pour beaucoup des cas que nous étudions, souvent graves, Difool
promet de « prendre des nouvelles » (« Et puis on prendra des
nouvelles si tu veux bien, Séréna », « Ok, on te
rappellera, de toute façon, et puis si t'as besoin de nous, tu nous
appelle sans problème », racisme, sujet 1, interventions 320 et
322). Promesse d'un suivi, dont on a parfois « in » quelques jours
plus tard, des traces de sa réalité « off ». Il s'agit
aussi de donner (hors antenne aussi) le relais aux acteurs sociaux qui peuvent
venir en aide, vers lesquels l'équipe de Radio libre oriente
les auditeurs après avoir finalement assuré un rôle de
transition entre des auditeurs et des institutions qui existent mais qui leur
sont parfois inconnues, du planning familial au centre pour jeune mère
sans abri, en passant par des lignes téléphoniques de soutien,
des services sociaux administratifs... On retiendra particulièrement le
dernier sujet de notre corpus où une jeune femme se trouvait à la
rue, enceinte de six mois, après avoir quitté sa famille qui
n'aurait pas accepté sa grossesse. La consigne a été
donnée aux auditrices qui l'hébergeront dans l'urgence de lui
indiquer les services sociaux
auxquels elle pouvait s'adresser. Il arrive aussi que des
auditeurs soient mis en relation entre eux (« On peut même vous
mettre en contact toutes les deux, les filles, si vous voulez », racisme,
sujet 3, intervention 146 »)
Il s'agit donc pour le dispositif de la
skysolidarité d'apprécier le soutien que l'auditeur peut
trouver dans son entourage de la vie dite réelle ou l'isolement qu'il y
connaît, et se positionner ensuite en alternative à la gestion de
la crise. Avant qu'il ne s'agisse d'une médiation (on notera que
l'équipe s'interdit d'appeler les parents ou les amis de l'auditeur), le
principe est de parler, de faire parler l'auditeur, de l'écouter alors
qu'il ne trouvait pas nécessairement d'oreilles confidentes, ni à
plus forte raison complices (nous allons le voir, le discours de la
skysolidarité bannit toute forme de racisme ou d'autres
intolérances et accepte sans jugement l'homosexualité). Il va
être confronté à d'autres jeunes gens qui lui manifesterons
leur simple soutien ou qui partageront leur expérience similaire, de
différents points de vue (celui, identique, de la victime, ou celui d'un
frère, d'une soeur, d'un ami...) et des différentes attitudes
qu'ils ont pu adopter. Partager et confronter les expériences pour
proposer des solutions et, à tout le moins, dédramatiser une
situation vécue comme tragique pour l'auditeur.
Résonances et valeurs d'un discours
Développement de la skysolidarité
Dès la première phase que nous avons
distingué, il ne s'agit pas seulement de laisser l'auditeur expliquer
« ce qui [lui] arrive ", mais aussi d'évaluer le
problème dont il va être question. Difool et ses acolytes
demandent des précisions, de divers ordres : factuels, situationnels...
Très vite, bien souvent, il s'agit de questionner l'auditeur appelant
sur les soutiens qu'il ou elle pourrait trouver autour de lui ou d'elle. Un(e)
parent(e), un(e) ami(e)... Ainsi on peut entendre de Difool demander «
Et elle, elle en pense quoi, la belle-mère ? " (racisme, sujet 1,
intervention 13), une autre fois un auditeur propose par message lu à
l'antenne par Difool « demande à ta mère » du soutien
à propos du sujet où le père n'accepte pas le copain noir
de l'auditrice (racisme, sujet 2, intervention 142), attitude qu'avait eue avec
succès Moïse qui témoigne plus loin dans la même
séquence (intervention 212). Ailleurs, on demande à l'auditeur
auprès de qui il aurait fait son coming out (sujet homophobie 1,
intervention 23 à 26) et qui pourrait le soulager (Difool : «
T'as au moins tes potes pour te confier ", homophobie, sujet 2,
intervention 137). Dans les sujets de notre corpus concernant
l'intolérance du fait de la religion/tradition, il en est de même.
Difool s'inquiète dans le premier de savoir pourquoi l'auditrice ne
parle pas du père se son copain (intervention 135), et dans le second,
où l'auditrice à quitté sa famille du fait de sa
grossesse, le premier réflexe est aussi de savoir si quelqu'un dans la
famille peut être un allié pour l'auditrice (intervention 17).
La famille apparaît ainsi comme le premier refuge
naturel dans le dispositif d'appel à la solidarité de
l'émission, même si dans l'immense majorité des cas que
nous traitons, le racisme, l'homophobie ou l'intolérance du fait de la
religion/tradition, elle en est à l'origine. Les amis se
présentent aussi dans ce cadre comme un cercle privilégié,
possible alternative à l'épanouissement. Par exemple, si les
parents ont du mal à accepter la relation homosexuelle de leur
enfant, celui-ci, d'après les conseils de la
skysolidarité, peut substituer à leur approbation le
refuge qu'il pourra trouver auprès d'amis qui seraient plus
réceptif à l'épanouissement de sa sexualité (Difool
: « T'as au moins tes potes pour te confier, mais bon ",
homophobie sujet 2, intervention 137), sans nécessairement se
priver de se réaffirmer plus tard. Comme ce fut la cas pour le
frère jumeau d'Emilie, une auditrice que l'on a entendue à
l'antenne dans le premier sujet de notre corpus concernant l'homophobie
(« ...mes parents ont eu le temps de méditer dessus,
ils ont vu qu'ils sont toujours ensemble [le frère et le copain de
l'auditrice], et là, c'est eux qui refont une approche vers nous ",
homophobie, sujet 1, intervention 217).
Ainsi, s'il ne s'agit pas pour les intervenants à
l'antenne, bien au contraire, de se substituer à l'entourage de
l'auditeur concerné par son problème, le dispositif
skysolidarité se positionne comme celui du recours alternatif,
plus ouvert d'esprit, et prône le dialogue avec les parents, les amis...
à la condition qu'une évidente intransigeance ne contrevienne pas
à l'épanouissement de l'identité de l'auditeur ou de ses
choix amoureux. C'est ce que nous allons voir maintenant.
Quels sont les conseils donnés aux auditeurs, quel
discours est construit dans la skysolidarité ?
Le premier réflexe, face au racisme, à
l'homophobie ou à l'intolérance du fait de la religion/tradition
dont sont victimes les auditeurs de la part de leurs parents ou ceux de leur
copain(ines) est de prôner le dialogue avec ceux-ci, que le message
vienne :
- de l'équipe de l'émission (Difool :
« Moi, je sais pas, j'aurais plutôt envie de le con vaincre,
parce que je le trouverais con de réagir comme ça ",
racisme, sujet 1, intervention 227 ; Difool : « [...] Tu vas
peut-être essayer de discuter avec eux, non, ça marche pas ? ",
racisme, sujet 2, intervention 70)
- des auditeurs à l'antenne (le témoignage de
Sophie, racisme, sujet 1, interventions 191 et 203 : « Donc
voilà, elle a flippé, et puis bon, on en a parlé, tout
ça, et je lui ai dit, que bon, pour l'instant, je sors avec lui et
si
vous êtes pas content, c'est pareil, quoi. Et bon,
là, elle l'a pas trop bien pris, mais bon ", « je lui ai dit `je
vois pas ce que ça peut te faire, c'est ma vie'' et puis voilà,
et si ça allait pas, ça durerait pas depuis huit mois, et il m'a
dit `'ben ouais, mais bon, c'est comme ça, pas autrement' ' ")
- des auditeurs ayant laissé un SMS ou un
mail (Difool : « Sinon, OCB59, là 19 ans, dans le Nord, qui dit
`'il faut en parler avec tes parents, tranquillement, et il te comprendront''
", racisme, sujet 1, intervention 75).
Il s'agit aussi, comme nous l'avons vu, de trouver du soutien
auprès des amis (Difool : « Ouais, et puis parles-en à
tes potes, t'as des potes qui sont plutôt ouvert, c'est plutôt pas
mal, quoi ", homophobie, sujet 2, intervention 293). Un soutien que l'on
trouve déjà à l'écoute de l'émission, en
partageant des expériences dans un cadre de discussion empathique et
tolérant. Sans doute un aspect à considérer en tant que
tel dans le processus de la skysolidarité. Les auditeur sont
à ce propos reconnaissant à l'antenne, comme Brian, par exemple,
dont les parents n'acceptent pas l'homosexualité : « Ben en
tout cas, je vous remercie, déjà, c'est super sympa, tu vois
[...] dès qu'il y a un problème, c'est bien, tu vois, il y a
quelqu'un pour parler, franchement, vous déchirez " (homophobie,
sujet 2, intervention 285 et 287).
Les soutiens que les auditeurs sont appelés à
trouver autour d'eux peuvent non seulement jouer un rôle dans leur
épanouissement mais aussi servir de relais pour une argumentation plus
solide face à la personne réticente. Une auditrice pensait ainsi
faire jouer le rôle d'intermédiaire à sa mère, qui
pourrait avoir meilleure autorité pour convaincre la mère de son
copain de laisser son fils la fréquenter (intolérance du fait de
la religion/tradition 1, intervention 30). Même si la raison de leur
appel est souvent l'isolement extrême.
Le dialogue est, dans le discours développé par
la skysolidarité, valorisé non seulement pour
l'identité sociale de l'individu, mais aussi pour l'identité pour
soi, comme on peut le lire, par exemple, dans le second sujet sur l'homophobie,
avec le témoignage d'un auditeur sur les bienfaits du coming out :
« J'appelais parce que j'étais un peu dans le même cas
que Brian. Moi, j'ai commencé à dire à mes
amis tout ça que j'étais gay quand
j'avais... quand j'allais en première. Donc ça remonte. Et en
fait je l'ai dit à mes parents parce qu'on se sent beaucoup mieux quand
on le dit à ses parents. Enfin, je sais pas, c'est... "
(intervention 182).
Le dialogue veut présenter également une
dimension préventive et pédagogique. Par exemple dans le
témoignage de Momo, un membre de l'équipe, au sujet du choix
amoureux qui ne concerne que l'individu (en l'occurrence lui, comme exemple
à l'adresse de l'auditrice du sujet 1, intolérance du fait de la
religion/tradition) et pas ses parents : « Non mais en plus j'en ai
parlé tout à l'heure à ma mère, je lui ai dit `'y a
même pas moyen, tu me fais jamais ça, hein'' ", « [...] j'ai
essayé d'expliquer les choses... ", « Ah non non non, moi je veux
pas. C'est moi qui la choisis ". Get exemple est révélateur
du positionnement de la skysolidarité.
La fermeté est de rigueur lorsqu'il s'agit de
défendre une valeur centrale dans le discours de la
skysolidarité : le respect de la liberté de chacun, face
à l'intolérance. Les auditeurs qui laissent des messages lus
à l'antenne ne négligent pas non plus le lien parental et sont
même souvent plus rigoureux que les membres de l'équipe s'agissant
de préserver le dialogue coûte que coûte avec les parents :
« Les parents sont ancrés dans leur culture, mais il suffit de
discuter, de négocier, ce sera peut-être long, tu pourras
peut-être les changer " (intolérance du fait de la
religion/tradition, sujet 1, intervention 158).
Mais la situation évaluée (première
phase d'évaluation), faute de dialogue possible, comme cela est le cas
dans la plupart des sujets de notre corpus qui sont parmi les plus lourds dans
Radio libre, le dispositif de la skysolidarité
développe des propositions d'autonomisation de l'individu. Son
épanouissement sentimental prévaut dans le dispositif et s'il est
impossible de le partager avec les parents, autant exclure ces derniers.
Ainsi, quand les parents n'acceptent pas le petit ami noir,
maghrébin ou kabyle, lorsqu'ils ont du mal à accepter le choix
amoureux de leur enfant ou son identité sexuelle, les animateurs de
Radio libre, après avoir proposé le dialogue et
constaté celui-ci difficile, proposent, souvent rejoints
par des auditeurs, de vivre son amour sans le faire partager aux parents,
quitte à le déplorer.
Ainsi, Romano suggère de ne pas imposer ce qui est
vécu comme un traumatisme par des parents à cheval sur les
orientations sexuelles : « Ouais, mais voilà, quoi, parce que
si tu leur en parles et que ça les traumatise, ça sert à
rien non plus, s'ils sont vraiment bloqués, bon... Enfin, je sais pas,
moi je vois pas d'autres... Non, mais c'est vrai, moi je pense que je ferais
ça, si mes parents étaient vraiment bloqués, tu vois, ils
me poseraient des questions, je resterais vague... » (homophobie,
sujet 1, intervention 129). Et Difool d'enfoncer le clou : « C'est ta
vie privée, ta vie privée tu la vies, t'es pas obligée de
la partager avec tes parents, hein... », « Ben écoutez, c'est
triste, mais merci d'appeler pour Séréna. Merci pour tous les
messages, regarde, il y a Titou du 94 qui nous fait `'mon père est
pareil -donc un peu... raciste, on va dire- laisse couler et vis ta vie''.
C'est vrai, t'es pas obligée de partager ça avec tout le monde
» (racisme, sujet 1, interventions 128 et 188). « Il y a
Billy qui nous dit `'Je suis bi, et j'ose même pas en parler à mes
copines' ' Ben t'es pas obligée, c'est ta vie à toi, aussi, hein
» (homophobie, sujet 2, intervention 132). Les parents
intolérants sont alors envisagés comme « tout le monde
», pas nécessairement concernés par les amours de leurs
enfants. « Ta vie à toi » ne concerne que toi. Le
choix d'en partager certains éléments avec certaines personnes
doit se faire dans un but d'épanouissement, soit avec ceux qui
prêteraient une oreille bienveillante dans la tolérance d'une
identité « différente ».
Ces conseils en direction d'une démarche
d'autonomisation du jeune adulte (majeur dans chacun de nos sujets) sont
souvent confirmés par les propositions des auditeurs à l'antenne.
Ainsi, pour ce même sujet, Moïse ajoute à son
expérience un ultime conseil pour Séréna, dont les parents
n'acceptent pas le copain noir : « [...] si je peux donner un conseil
à Séréna, tu vois, je veux pas trop l'embrouiller, mais si
je peux lui donner un conseil, c'est surtout de calmer le jeu, et de pas trop
se prendre la tête et de laisser faire le temps, parce que... »
(racisme, sujet 1, intervention 224).
Difool donne très directement son point de vue sur
l'attitude d'autonomisation lorsqu'il paraît impossible de faire
évoluer le point de vue des parents : en réaction au message
d'une auditrice qui avait quitté son copain maghrébin à
cause de l'intolérance de ses parents, il précise «
Quand tu aimes quelqu'un, moi je pense qu'il faut résister, c'est pas...
c'est pas manquer de respect à tes parents que de sortir avec un gars
que t'aimes, hein. Enfin, je pense » (racisme, sujet 2, intervention
114). Le respect, une notion fondamentale sur laquelle nous aurons l'occasion
de revenir.
La liberté de chacun doit être respectée
et il faut faire respecter la sienne. Même dans la configuration
difficile de dépendance aux parents. En cloisonnant les relations
familiales des relations amoureuses, voire en prenant son indépendance
si les conditions peuvent être réunies pour les jeunes adultes en
grande détresse, voire menacés comme c'est le cas dans les deux
dernières séquences de notre corpus (Difool : « [...]
quand on respecte pas ta liberté, il faut la prendre ta liberté.
Donc il faut qu'il trouve un pote chez lequel il peut aller squatter... »,
religion/tradition, sujet 1, intervention 52). La skysolidarité
se matérialisera dans ce cas de façon très
concrète, par exemple en mobilisant une chaîne d'entraide : un
auditeur ambulancier servira de chauffeur dans la nuit pour conduire Karine
dans une joyeuse colocation de jeunes femmes qui hébergeront dans
l'urgence l'auditrice, enceinte de six mois, rejetée par sa famille et
par celui sur qui elle croyait pouvoir compter, et qui se retrouve à la
rue. Au-delà des informations qui ont pu être
échangées à l'antenne et hors antenne sur les services
sociaux qui pourront aider Karine, il s'est agit ici de pallier l'urgence et de
ne pas laisser une jeune femme enceinte dehors en hiver. Si la chose est
plutôt exceptionnelle dans l'émission, elle confirme
majestueusement, par la mise à l'épreuve la plus concrète,
la solidarité qui lie les auditeurs dans l'émission.
Ainsi, lorsque le dialogue avec les parents semble sans
promesse d'évolution vers l'acceptation de l'identité ou des
choix de leur enfant, le discours que l'on voit se construire développe
l'idée de l'autonomisation des jeunes adultes. Si des parents sont
indéfectiblement racistes, ce n'est pas une raison pour choisir un
compagnon ou une compagne qui leur plairait mieux que l'être aimé.
Ne pas se
« prendre la tête " dans une situation
pénible et qui semble inéluctable, séparer les relations,
voilà ce qui résulte des propositions des auditeurs et de
l'équipe de Radio libre pour faire cohabiter dans sa vie de
jeune adulte un amour et des parents qui ne le cautionnent pas du fait de son
appartenance ethnique ou de sa sexualité.
Il est parfois même question, comme nous l'avons vu, de
proclamer sa liberté en prenant son autonomie, lorsque cela est
matériellement possible. Difool n'est pas seul à aller dans ce
sens. Comme cela est le cas la plupart du temps, les auditeurs laissent des
messages en phase avec les points de vue de l'équipe : « mais
il a 20 ans, il est majeur, moi je me casse dans une autre ville, je me cache
chez des amis... ", « Il faut qu'il se barre de chez lui, les parents ils
craignent trop, il a 20 ans, il est majeur, il fait ce quil veut "
(intolérance du fait de la religion/tradition, sujet 1,
interventions 125 et 141)
La question d'une normalité est affirmée au
sens de la tolérance. On ne choisit pas son identité ethnique ou
sexuelle. Un auditeur dont les parents veulent qu'il devienne
hétérosexuel s'entend répondre par Difool et Romano :
« Mais être obligé à être
hétérosexuel, si t'es homo, t'es homo, il y a pas de... tu vas
pas te forcer à faire un truc que t'aimes pas. ", « Il y a pas
à choisir de toute façon " (homophobie, sujet 1
interventions 79 et 80)
« Il n'y a pas à choisir ". Dans le
discours construit par la skysolidarité, ce qui est anormal
n'est pas de préférer les filles ou les garçons, c'est de
ne pas le respecter. Ce qui est anormal n'est pas d'avoir une couleur de peau
différente, c'est de ne pas le tolérer. Cet échange
synthétise d'une traite (sans coupures dans la citation) les phases de
l'expression de la skysolidarité en cas de dialogue difficile
:
[Expression du malaise de l'auditrice]
Séréna : Bah, franchement, j'en sais rien
non plus, quoi... Je suis pas plus rassurée, quoi, j'ai toujours
l'angoisse, quoi. Là, bon, je vais voir mon mec lundi, je crois que je
vais en parler avec lui...
[Défatalisation et affirmation des valeurs]
Difool : Ouais, mais que ça devienne pas un
problème pour... tu vois, qu'il ait pas l'impression d'être un
problème, c'est pas lui le problème, c'est ton père.
Séréna : Ah, ben non...
[Dédramatisation et recommandation]
Marie : Ouais, tu vis ta vie avec ton mec et puis
voilà, tu fais une section entre les deux et puis c'est tout
hein.
Difool : Ce qu'il faut que tu dises à ton mec c'est
que sur ce plan là, ton père il te prend un peu la tête
donc voilà, vous allez vivre tous les deux et puis... enfin, tous les
deux votre histoire sans forcément la partager avec tout le monde.
[Perspectives d'avenir quand à l'affirmation devant les parents]
Marie : Et puis ça peut peut-être
évoluer, hein, il est peut-être pas forcément
braqué... » (racisme, sujet 1, interventions 297 à
302).
Le choix de la clandestinité au regard des parents
peut s'avérer, somme toute, provisoire dans les espoirs que
développe la skysolidarité. Dans le discours que nous
voyons se construire, tout peut changer, avec le temps. Et l'amour de ses
enfants, le respect, finalement qu'inspirerait le sérieux de leur
relation amoureuse peut faire évoluer la mentalité de parents un
peu « québlos ». Les choix d'une vie de jeune adulte,
ses amours, doivent primer sur l'intolérance, le racisme, l'homophobie
de certains parents, et leur montrer exemplairement que l'épanouissement
personnel qui en est la conséquence peut être la voie pour plus de
confiance de leur part.
Rien n'est rédhibitoire, si le discours de la
skysolidarité prône l'apaisement, ce n'est pas dans
l'optique d'un repli. Au sens, nous l'avons vu qu'il s'agit de trouver de
meilleurs espaces d'épanouissement personnel, mais le rapport de soi aux
parents peut resurgir dans des conditions plus sereines, comme le proposent
certains messages lus par Difool : « `'Vis ta vie, trouves-toi un mec,
et après t'en parleras peut-être à tes parents si tu en
sens le besoin'', c'est le message du Polac », (homophobie, sujet 2,
intervention 263), messages qui rejoignent le point de vue de l'équipe
de Radio libre (« T'attends d'avoir une relation
avec un gars et puis... », homophobie, sujet 2, intervention 274).
On entend parfois dans Radio libre des solutions
originales. Comme quand Marie propose d'écrire une lettre, dans le
premier sujet sur l'homophobie : « Non, mais tu devrais
peut-être, si t'arrives pas à discuter avec eux, écrire une
lettre avec tout ce que tu ressens, vis-à-vis d'eux, vis-à-vis de
toi... », « tu expliques bien ce que tu penses, ce que tu ressens,
tout ça, même sur le moment s 'ils le prennent pas bien, la lettre
ils la gardent, et avec un petit peu de recul, tu vois, peut-être ils
peuvent comprendre. Même si c'est dans un an, j'en sais rien, mais
ça peut peutêtre apporter quelque chose, quoi. De l'eau au moulin,
en tout cas » (homophobie, sujet 1, interventions 134 et 136)
Primauté de la liberté.
La notion primordiale de respect (terme souvent
employé de façon a priori bien galvaudée et
hyperbolique dans le parler nouveau des banlieues mais ici érigée
en véritable valeur) est, dans le discours développé par
la skysolidarité, à considérer tant à
attendre de la part des autres (sur la liberté de ses choix, la
tolérance des autres à la couleur de peau différente)
qu'à s'imposer à soi. Pour soi, se respecter c'est respecter sa
liberté en jeune adulte. Et pour les autres : respecter
l'autorité parentale, les appréhensions des parents, leurs peurs,
même, en essayant de les faire évoluer.
Caractères linguistiques
Si l'on veut porter un regard sur la construction d'un
discours comme constitutive d'un projet commun, la coordination de la langue
est évidemment le premier élément préalable
nécessaire que nous devons interroger. C'est ce que nous avons vu,
d'après le travail Georges Mead1, dans la
seconde partie de notre exposé.
1 George Herbert, Mead, Mind, self and society,
University of Chicago press, 1962.
La communauté de la langue n'est pourtant pas, du
simple premier point de vue de l'analyse langagière, un caractère
pleinement satisfaisant. Le langage doit partager d'autres codes plus informels
: un lexique commun, une grammaire, une ponctuation verbale, des expressions
communes. Un « parler commun », en définitive. On ne peut
s'empêcher de penser au travail d'Anne-Caroline Fiévet sur les
codes langagiers entendus dans les émissions de NRJ, Fun radio et
Skyrock1. On n'obéit pas aux mêmes codes sur ces trois
grandes radios jeunes dont les cibles (et les publics) sont très
différents. Pour Anne-Caroline Fiévet, le parler nouveau des
banlieues dominant sur l'antenne de Skyrock est un métissages de
différents argots (anciens remis au goût du jour ou simplement
empruntés, nouveaux argots) ainsi que de nouveaux lexiques dont fait
partie, par exemple, le verlan. Ce vocabulaire n'est donc pas un simple langage
commun, nous pourrons voir ici la marque d'une appartenance identitaire
forte2.
Mais il ne s'agit pas seulement d'un vocabulaire collectif.
Il y a aussi une grammaire, une syntaxe partagée par les auditeurs et
les animateurs sur l'antenne. L'expression orale est, en outre, la plus
révélatrice de ces codes. On peut ainsi constater des
constructions syntaxiques communes. D'une part s'agissant de la ponctuation
elle-même au sens strict (comme par exemple le recours à des
phrases tronquées que nous décelons dans les retranscriptions par
la matérialisation écrite des points de suspensions). Mais aussi,
d'autre part, en envisageant l'emploi d'expressions comme « t'as vu ",
« tu vois ", « et tout ", « franchement ", « quoi "
(et tant d'autres que l'on retrouve tout au long des retranscriptions)
comme véritables marqueurs de ponctuation, établissant un code
syntaxique singulier tout autant qu'un socle de marqueurs langagiers
identifiants : comme le fait observer Anne-Caroline Fiévet, ne dite pas
« tu vois " à un animateur de Fun radio, il se moquerait
gentiment de vous en vous expliquant que non, à la radio, on ne voit
rien (en déplaçant ainsi la valeur de l'expression dans un
univers langagier où elle ne signifierait rien d'autre que la
1 Anne-Caroline Fiévet, sujet de thèse, sous la
direction de M. Jean-Pierre Goudaillier : Langue des jeunes et
stratégies des animateurs dans les émissions de libre-antenne de
trois radios nationale. Anne-Caroline Fiévet appartient au groupe
Radio (rencontres-ateliers doctoraux interdisciplinaires sur la radio, proche
du GRER (groupe de recherche et d'études sur la radio) de Jean-Jacques
Cheval, maître de conférences à
l'Université Michel de Montaigne de Bordeaux 3.
2 Françoise Gadet, Le Français populaire,
Paris, Puf, Coll. Que sais-je, 1997, 194 pages.
conjugaison de l'activité permise par nos yeux) voire
exprimerait franchement son agacement en vous envoyant promener.
Dans ses travaux, Anne-Caroline Fiévet montre ainsi le
caractère identitaire des langages propres aux auditeurs et aux
animateurs des différentes libres antennes du soir sur Skyrock, NRJ et
Fun radio et leur imperméabilité.
Partager le même langage co-élaboré dans
une émission par les différents auditeurs et animateurs
s'avère ainsi un élément fondamental du contrat de
communication radiophonique pour chacune des émissions de libre antenne.
Mais si ces langages sont propres à chacune de ses émissions, ils
n'en sont pas pour le moins rigides. Au contraire, ils sont très
vivants. Ils évoluent selon les vagues d'emprunts de mots ou
d'expressions dans la langue des cités (qui concerne tout
particulièrement Skyrock) et enrichissent en permanence un vocabulaire
coloré. On remarque ainsi à de nombreuses reprises les
répétitions de la même phrase par un auditeur ou un
animateur qui remplace une expression par un synonyme pour se l'approprier ou
la rendre plus accessible selon les fluctuations populaires ou plus excluantes
de certaines d'entre elles.
Le parler nouveau des banlieues vit et forge
l'identité langagière commune sur l'antenne de Skyrock. Les
mêmes langages et les mêmes codes partagés, le contrat de
communication en est renforcé par l'adhésion à une
identité langagière commune.
Le langage n'est cependant pas la seule condition du contrat
de communication pour l'élaboration d'un discours constitutif d'un
projet commun. Si nous avons vu plus haut qu'un certain nombre de valeurs sont
partagées à l'antenne, notamment s'agissant des attitudes des
auditeurs et de l'équipe prononcées à l'antenne à
propos des questions d'intolérance, il va s'agir de déceler plus
profondément quelles sont les valeurs qui gouvernent ces attitudes et
qui forgent le discours de l'émission.
Respect et diversité
Le respect, il en est toujours question. Dans un
schéma où l'individu est isolé, particulièrement
face aux questions d'intolérance, de discrimination, l'entreprise
collective n'est possible qu'en respectant les autres, la diversité.
Face à l'ensemble des sujets d'intolérance, on
prône le respect, sur l'antenne de Radio libre, en exaltant la
beauté des différences. Au fil des séquences dont les
conversations sont retranscrites plus haut, on procède à ce que
l'on pourrait appeler une apologie de la diversité. Comprenons qu'en
réponse à l'intolérance, au racisme ou à
l'homophobie, on célèbre la diversité, le
métissage.
Ainsi, on peut entendre cet échange dans le premier sujet
de notre corpus (« mon père n'accepte pas mon copain car il est
noir ») :
Marie : Non mais tu vois, à la base, on est tous
métissés...
Difool : Ouais, on a tous des...
Marie : ... à des degrés différents, on
n 'est pas 100% Français...
Difool : Je tiens à vous dire qu'avant nous, nos
ancêtres ont baisé dans tous les sens et...
Marie : Exactement ! Et c'était colonisé,
enfin, quand tu remontes un peu, c'est débile de dire ça, tu
vois. [...]
Difool : C'est vrai, on est tout un peu métis,
quoi...
Marie : Voilà, donc il faut pas s'arrêter
là, quoi, il faut... C'est juste quils sont un petit peu
bloqués.
Difool : Et puis quand tu voyages un peu, en fait, je sais
pas, moi, j'ai des potes renoi en Italie, ils se comportent comme des ritals,
hein. Ils ont rien à voir avec mes potes renoi français qui... tu
vois. Ils écoutent pas la même musique... Marie : Regarde, quand
t'es rebeu, que t'es né ici et que tu vis en France, t'es pas... quand
tu vas au Bled, t'es pas pareil que tes cousins, quoi, qui vivent au Bled. Il y
a une différence, c'est normal.
(Racisme, sujet 1, interventions 237 à 245).
Dans cet extrait, on généralise les
métissages, on mélange diversité ethnique,
géographique, histoire et cultures pour finalement valoriser une
unité française culturelle et sociétale et non ethnique ou
nationale.
Le parallèle avec la diversité des auditeurs de
Radio libre, génération « blackblanc-beur »,
est aisé.
Selon Eric Macé, le miroir télévisuel
dans lequel se ref lète la société française est
déformant (il avance notamment le peu de représentation des
« minorités », à commencer par les maghrébins,
quasiment absent de son corpus). Radio libre est un miroir plus
fidèle de la jeune génération.
Face au racisme, les animateurs se complètent toujours
pour faire tinter le diapason de la couleur donnée à l'antenne en
la matière en exaltant avec simplicité une beauté du
métissage culturel :
Difool : Bah oui, c'est ma foi bien triste tout
ça, parce que quand on s'aime... au contraire, c'est plutôt rigolo
de découvrir quelqu'un qui n'a pas la même culture, c'est quand
même plue intéressant.
Romano : Ouais, c'est bien, ça ouvre.
Difool : Moi je trouve ça marrant, t'as le gars qui
fait le ramadan, ou la meuf qui fait le ramadan, et l'autre partie du couple
qui vit sa vie, enfin c'est plutôt rigolo... (Racisme, sujet 2,
interventions 133 à 135).
« C'est rigolo ", « ça ouvre "...
autant d'expression plus ou moins désuètes qui contribuent
au processus de normalisation des diversités. La simplicité du
discours est ici à considérer comme élément de
normalisation, au sens de faire comprendre une chose comme spontanée,
évidente. Naturelle, en somme.
En alternative à la tristesse de la réaction
des parents kabyles d'une auditrice dont le copain est Antillais Difool apporte
une conception positive selon la vision « multicolore » du discours
de la skysolidarité telle que nous l'avons
appréhendée plus haut : « ça va faire un beau
bébé, enfin, si vous en faites un un jour " (racisme, sujet
3, intervention 119)
Ainsi, dans le discours de la skysolidarité,
si les parents n'ont pas tiré les mêmes conclusions que
celles défendues à l'antenne que nous venons d'exposer, les
enfants peuvent s'en affranchir, voire faire réviser les points de vue
de leurs parents. Comme l'explique Difool, qui a des origines italiennes,
à un auditeur dont les parents n'acceptent pas le copain d'origine
maghrébine : « c'est terrible, parce que eux qui sont Italiens,
ils devraient se souvenir qu'il y a, je sais pas, 80 ans, les Italiens, ils
étaient... enfin, il y avait des réactions qui étaient
particulièrement racistes envers eux aussi, qu'ils ont subi aussi, quand
ils sont arrivés en France. Nos grands parents, tout ça, et
maintenant, ils font la même chose 80 ans après à d'autres
gars, ça c'est... ça m'a toujours fait halluciner, ça. Tu
devrais leur expliquer à tes parents, parce qu'ils ont du vivre
ça » (racisme, sujet 2, intervention 62).
Et la direction des discriminations traitées dans les
sujets de notre corpus n'est pas stigmatisée, généralisant
ainsi le comportement intolérant en opposition à celui,
multiculturel et multicolore défendu par le discours
développé à l'antenne, appuyant même parfois cette
vision comme l'identité de la France :
- s'agissant du racisme : Difool : « Ah, ça
marche dans tous les sens, le racisme, c'est tellement international »
(racisme, sujet 3, intervention 115), Difool : « Ca marche aussi
dans le sens inverse, il y a une nana qui dit `'je suis rebeu, moi c'est le
même problème, ils veulent pas que je sorte avec des
Français''. Enfin, t'es Français sans doute toi aussi, mais...
» Romano : « Ouais, ça marche dans tous les sens,
malheureusement » (racisme, sujet 2, interventions 130 et 131) ;
- s'agissant de l'homophobie : Difool : « C'est le
même problème aussi pour les nans, hein. Je lisais le message de
Méli tout à l'heure, là, j'ai le message de Sonia qui a le
même souci, qui dit `'si j'en parle à mes soeurs, c'est l'horreur,
alors ne même pas penser aux parents'' » (homophobie, sujet 2,
intervention 263).
- et lorsqu'il s'agit, pour les deux derniers sujets, de ref
us de parents de laisser un libre choix d'union à leurs enfants,
préférant une personne choisie par leurs soins « au bled
», on explique que ce n'est pas une
intolérance pour une religion, puisque les amoureux en
question sont de la même confession (c'est, par ailleurs pour ce motif
que nous avons appelé cette troisième catégorie
intolérance du fait de la religion/tradition, ne s'agissant pas
d'intolérance entre religion ou de fondamentalisme, mais plus un ancrage
archaïque qui s'inscrit dans une certaine tradition culturelle
religieuse).
Contre la généralisation de ce qui est
étranger, le discours est d'opposer une France riche de toute ces
diversités à ceux qui y sont réfractaires.
L'homosexualité n'est « pas un problème "
(homophobie, sujet 2, intervention 4), ni une maladie :
Romano : Ouais, au final, c'est pas grave, tu vois, t'es pas
malade, t'as rien, quoi...
Difool : Bah oui, et puis l'essentiel pour eux c'est que tu
sois heureux, si t'es heureux avec un gars, bon...
Marie : Bien sûr !
Difool : Autant que tu sois heureux avec un gars que
malheureux avec une fille (homophobie, sujet 1, interventions 120 à
123).
On a d'ailleurs pu constater plus haut que l'on pouvait souvent
entendre que ce n'était pas une question de choix.
Dans les messages des auditeurs, on retiendra que Difool lit
de nombreux messages une nouvelle fois en direction de la liberté
individuelle et de l'indifférence comme « j'ai deux super potes
homo, et les parents s'en foutent, chacun sa sexualité, les
barrières, c'est n'importe quoi, au contraire " (homophobie, sujet
3, intervention 153) , « tant quil est heureux " (homophobie,
sujet 1, intervention 206), mais synthétise avec pudeur celui d'un
auditeur plus « québlo " en le rapportant indirectement
d'une façon que l'on peut imaginer édulcorée : «
il aurait du mal à accepter ".
Si les auditeurs victimes de l'homophobie de leurs parents ont
une identité où leur homosexualité « ne se voit
pas ", lorsque Difool parle des « caricatures " que l'on
« voit à la télé ", il n'oublie pas non plus
de se reprendre et de préciser
que « les gens font ce qu'ils veulent »
(homophobie, sujet 2, intervention 201), et échappe au
dérapage en évitant, une nouvelle fois, tout jugement sur un
comportement personnel.
Dans le sujet 3 homophobie, où l'auditeur est
l'agresseur d'un transsexuel, on condamne très vivement et unanimement
son geste -une gifle- mais Romano précise par ailleurs, qu' «
aujourd'hui, c'est une femme » (intervention 129).
Enfin, devant l'extrême rigueur des parents d'Isis
envers les traditions, si le discours vise à condamner ce type de
comportement pour plus d'ouverture d'esprit, il ne s'agit pas non plus, pour
Difool en l'occurrence, de juger les parents : Difool : « Bah oui. Et
puis même chacun vit comme il veut, si eux ils ont en vie de vivre comme
ça et de laisser le choix de la personne avec qui tu vas vivre toute ta
vie aux parents, pourquoi pas, mais si toi t'as pas en vie de le vivre comme
ça, je veux dire, t'as 20 ans, t'es majeur, tu vois. On est dans un
pays... chacun peut vivre sa sexualité... »
(religion/tradition, sujet 1, intervention 139)
Si l'on condamne des attitudes extrêmes, racistes ou
homophobes, émanant particulièrement des parents dans notre
corpus, cela n'empêche pas de respecter toutes les individualités.
Chacun est libre de la manière dont il mène sa vie, et cela
quelle qu'elle soit. Le principe est de la respecter. Et puis des parents
restent des parents, la divergence n'est synonyme ni de condamnation
rédhibitoire -comme nous l'avons vu- ni de désamour à leur
égard, bien au contraire.
De la part des auditeurs : « Comme je t'ai dit, il
faut que tu te dises que c'est ton daron et que de toute manière,
respecte-le, même si lui t'a manqué de respect ce jour-là,
mais... » (racisme, sujet 1, intervention 284), « il faut
que tu te dises que c'est ton daron, et puis fais pas ce que j'ai fait. Moi
j'ai voulu prendre le dessus sur lui et puis au final... » (racisme,
sujet 1, intervention 286).
De la part des animateurs : « Ouais, enfin, il pourra
jamais t'offrir [l'amour] que t'offre ta mère, mais... »
(racisme, sujet 3, intervention 52), « il y a Raph, du
Puyde-Dôme, qui dit `'moi si je dis à ma mère que je suis
homo, je suis mort, elle me jette de chez moi''. Ça j'arrive pas
à comprendre parce que ça reste ton fils,
quoi " (homophobie, sujet 1, intervention 206),
« Avec tout le respect qu'on doit aux parents, tout ça, moi je
pense qu'il faut vivre sa vie en fonction de ses envies, tu vois, toi tu... Il
va pas se forcer... " (homophobie, sujet 1, intervention 222), «
Donc euh... et puis maintenant il y a plus le choix, donc tes parents, ils sont
pas... tu vois, ils ont quand même un coeur, non ? ", « T'est leur
fille, ils peuvent pas... ", « Ils peuvent pas te laisser dans la merde,
comme ça " (religion/tradition, sujet 2, interventions successives
de Difool, Romano et Marie 53, 54 et 56).
L'espace radiophonique comme acteur social
Même dans les cas les plus extrêmes -par exemple
celui où à cause de l'intolérance de ses parents une jeune
femme enceinte se retrouve à la rue dans le froid- au-delà du
caractère non définitif de l'évolution de la relation avec
les parents que nous avions défini plus haut, le lien social familial
reste primordial dans le discours de la skysolidarité. Nous
avions, par ailleurs, observé, en début d'analyse, que la famille
était le premier recours proposé par l'équipe de Radio
libre pour trouver de l'aide dans la phase d'évaluation du
problème et de la situation de l'auditeur. Le père, la
mère, un grand frère ou une grande soeur... si le problème
vient souvent de l'intolérance de la famille ou d'un de ses membres,
d'une part rien n'est définitivement figé, la situation peut
évoluer, comme nous l'avons vu, mais d'autre part, un père, une
mère, on ne peut pas ne pas les aimer, les respecter. Nous pourrions
écrire que les liens filiaux apparaissent être
considérés comme quasi-sacrés, si l'expression ne faisait
pas référence à la chose religieuse, qui, elle, n'est pas
une valeur primordiale dans le discours, loin s'en faut. Même fautive
d'intolérance, de racisme ou d'homophobie, la famille, pour l'espace de
discussion skysolidarité, c'est l'inverse de la France de
Nicolas Sarkozy : en crise ou en désaccord profond, on peut la quitter
un temps, mais on ne cesse de l'aimer.
Le lien interindividuel est le recours aux situations de crise
et le credo de la skysolidarité, et la famille en est le
premier pilier... après l'amour bien sûr qui est
considéré comme le lieu d'épanouissement
privilégié, choisi par l'individu. Ensuite viennent les amis,
comme cercle de refuge, plus ouvert à l'acceptation des choix ou de
l'identité.
Les institutions ont un rôle à jouer, bien
sûr, et leur accès est médié par une plateforme
d'interaction interindividuelle.
Je, ils -+ nous
Sur l'antenne, on partage les expériences. Il y a une
communauté d'intérêts, d'esprit, bien sûr, mais plus
encore un sentiment d'appartenance à un groupe. Pour rompre l'isolement,
mais aussi pour faire profiter une communauté de son expérience.
Une communauté choisie, des amis virtuels, sur les ondes, comme cette
génération d'auditeurs en a tant d'autres sur des chats, des
forums... La logique de ces jeunes gens est essentiellement centrée sur
le « je », mais ce « je » entretien des relations sociales
qu'il choisit par affinité. Sacre de l'individualisme, il ne s'agit plus
de subir un entourage immédiat (comme on subissait naguère un
mariage arrangé) mais de choisir ses amis, dans la vie réelle
comme dans différentes communautés qu'ont organisées les
modes de consommation des nouvelles technologies de la communication,
particulièrement internet. Le blog, journal personnel publié sur
internet en est une parfaite expression : centré sur soi, on partage ce
que l'on choisit avec ceux avec qui on trouve un ou des point(s) commun(s)
fédérateur(s). Une passion, une aventure, un bout d'histoire,
l'internet a permis la gestion d'un lien social dont chacun est le maître
de la pérennité. Les premiers blogs qui ont explosé en
France sont ceux dérivés des sites internet de Skyrock.
Essentiellement crées par des auditeurs, certains skyblogs sont aussi le
résultat de tentatives de pénétration d'une large
communauté jeune de la part de politiques notamment. Julien Dray,
porte-parole du Parti socialiste et en charge des questions de la jeunesse au
conseil régional d'Île-de-France a été le premier
à flairer l'occasion d'y tenter le dialogue. Et s'il eût de
nombreux messages peu confiants quand à la sincérité de
son intrusion dans la sphère des skyblogs (nous reviendrons sur la
question de la légitimité), d'autres suivront, bienveillants,
lorsque, exposant l'horreur de ce qu'il a vu de la prison de sa
circonscription, il interpelle : « Je me demande vraiment comment
ça se fait que la prison ne fait plus peur à certains
délinquants. Est-ce que vous auriez une explication ?
»1. Et des blogueurs continuent chaque semaine à
échanger avec le politicien.
1 Skyblog de Julien Dray :
http:iiledefrance.skyblog.com/8.html
La radio, anonyme elle aussi, où l'on dévoile ce
que l'on souhaite, avec en l'occurrence entre autres promesses de
l'émission celle d'y trouver soutien en cas de crise, n'échappe
pas, bien au contraire, à la captation par les jeunes de se saisir d'une
communauté virtuelle. Le contenu de l'émission y est
varié, diverses gaudrioles parsèment la plateforme
d'échanges solidaires où l'on peut s'exprimer sans crainte de ses
tracas, en préservant son identité, où l'on peut
satisfaire ce besoin naturel d'être utile, d'aider (et peut-être
aussi parfois de connaître son quart d'heure de gloire). Un lien social
se crée entre des auditeurs de différents horizons, cultures et
milieux sociaux, qui forment une communauté d'affinités, choisie
(sans quoi le contrat de communication se rompt) et qui donne expression
à des malaises, des joies, des coups de gueule. S'agissant de notre
sujet, nous relèverons particulièrement l'intérêt du
lien qui se crée dans l'espace radiophonique et son caractère de
vecteur de socialisation : écoute, partage, soutien, aide.
Dans un monde réel rempli de tabous, de tensions,
d'incompréhensions... ce n'est finalement pas un si gros paradoxe que
viennent s'exprimer dans le moment adolescent de l'espace radiophonique et sous
forme de confidences « sur l'oreiller » -pour reprendre les
expressions de Glévarec- les malaises d'une génération, et
peut-être particulièrement d'une partie sensible en
porte-à-faux entre plusieurs cultures, en quête de repères
pour se construire une identité.
Le caractère « multicolore » ne
confère pas à cette communauté une dimension
communautariste. Au contraire, on prône le mélange des cultures,
une société multiethnique.
Le discours de la skysolidarité
développe un cadre normatif des attitudes sociales dans un paysage
multiculturel où coexistent des individualités exacerbées
et très divisées. Les expressions de la crise du lien social que
nous avons pu observer ne viennent pas moins de la difficulté de faire
coexister un héritage avec une société contrastée,
métissée à tout points de vue, que du choc des cultures,
de la rencontre, parfois frontale, de différentes traditions.
Dans le pacte social proposé, le jeune adulte est
présenté comme le citoyen de demain -voire d'aujourd'hui- qui
doit participer à créer et à solidifier un lien social
d'un nouveau type pour préserver un pacte républicain
tiraillé par l'exacerbation de l'individualisme et les communautarismes.
Il s'agira de renouer des liens entre des individus qui n'appartiennent plus
à l'ancien grand idéal universaliste que fut l'idée de
république uniforme, qui sont libres de leurs choix d'affiliation et
désaffiliation, et pour qui le « je » prime sur le « nous
». Un équilibre à trouver entre la liberté de chacun
et le respect mutuel, en évitant le communautarisme, excluant, opposant,
source de tensions. « Un lien qui sache unir, sans trop serrer » pour
François de Singly1.
La diversité, le mélange, la liberté et
le respect apparaissent ainsi présentés comme des forces et la
condition à la réalisation d'un équilibre. Un pacte social
nouveau se constitue dans le discours radiophonique d'une communauté
d'auditeurs échantillon de la jeune génération.
Mais quelle est alors la position, le statut de Radio
libre et de ses animateurs ? L'émission de Difool est une
émission commerciale diffusée sur une radio commerciale (par
ailleurs avec un certain succès d'audience). Il n'en demeure pas moins
que nos observations tendent à lui conférer une dimension
supplémentai re.
Le « grand frère », repère
légitime
Si Radio libre trouve son succès dans sa forme
comme nous l'avons, en partie, décrite, le rôle qu'y jouent les
animateurs, à développer le discours tel que nous l'avons
observé, est singulier. Nous pouvons l'appréhender par la figure
du « grand frère », à la fois au dessus et à
l'intérieur du schéma social que nous avions dressé en
partie préliminaire. Dans les cités notamment -c'est ici que
notre observation trouvera tout son propos et sa pertinence- comme plus
1 François de Singly, Les uns avec les autres, quand
l'individualisme crée du lien, Paris, Armand Colin, 2003, 268
pages.
largement dans le vocabulaire jeune (et par ailleurs repris
avec un autre regard dans certains cabinets ministériels), le «
grand frère » est une figure -et concrètement un individu-
qui sert de repère. Il est celui à qui l'on reconnaît une
légitimité pour être un guide bienveillant.
Mais si le grand frère peut être influant, c'est
seulement au prix d'une légitimité acquise auprès des
jeunes, des « petits frères ». Sa démarche
peut-être pédagogique et connaître des effets seulement si
son autorité est reconnue par ceux qui peuvent la recevoir. Son
existence est naturelle (un grand frère biologique, un voisin fort d'une
certaine réussite sociale qui montre l'exemple, écoute, comprend
et éclaire) ou fabriquée, comme cela a été le cas
dans certaines tentatives plus ou moins heureuses émanant du politique.
La reconnaissance de sa légitimité est d'autant plus aisée
que le grand frère est un pair, qui connaît et a connu les
réalités d'un espace social similaire à celles de ses
« petits frères ».
Les considérant plus proche de l'autorité
administrative (politique, police...) que d'eux, les jeunes ne donnent pas
aisément leur pleine confiance aux éducateurs que certains
dispositifs ont voulu mettre en place. Le grand frère doit être un
pair, exemplaire. Un pair avant tout, pour que lui soit conférée
la légitimité de montrer la bonne voie.
Abel El Quandili, ancien champion de boxe, a connu la
précarité des bidonvilles de Nanterre, et le relatif confort de
la cité, sa vie quotidienne, sa précarité sociale.
Champion, il n'a jamais quitté sa barre de béton en banlieue.
Retraité sportif, il continue d'y animer un association dont le sport
est plus un prétexte à la conception d'un espace de
création et d'entretien d'un lien social qu'une fin en soi. Il a
publié à une quarantaine d'année son expérience de
« grand frère des banlieues » en 2005 chez Fayard1.
Il a connu les mêmes « galères » que ses « petits
frères » et le succès grâce au sport. Dans le
quotidien de la vie associative culturelle, sociale et sportive qu'il fait
vivre dans son quartier, il a créé
1 Abel El Quandili avec Hafid Hamdani, Le grand frère
des banlieues, Paris, Fayard, 2005, 294 pages.
une communauté d'échanges aux valeurs de la
république (liberté, égalité, fraternité)
dont l'extrémisme religieux est à son sens le pire ennemi. Il a
la légitimité d'être un pair dans son quartier, de
connaître le même quotidien, et son exemplarité est
magnifiée par son statut de champion du monde.
Avec une jeunesse tiraillée entre différentes
cultures, en manque de repères, le lien social s'établit ainsi
plus légitimement en dehors des institutions, de la famille, des
représentations de l'Etat. Institutions avec lesquelles le lien
s'effectue ensuite, par répercussion, autour des valeurs qui y ont
été partagées.
L'initiative associative, à l'image de celle dont El
Quandili narre l'expérience, s'avère ainsi une alternative pour
recréer le lien entre jeunes et pouvoirs publics, entre jeunes et
parents, par des rencontres, des débats, des animations sportives et
culturelles.
Radio libre comme figure du grand frère
La communauté radiophonique sur laquelle nous avons
porté notre regard participe du même processus. Dans une
superposition au schéma que nous avions décrit en partie
préliminaire, une figure de « grand frère » vient
déterminer et affirmer les valeurs d'un espace de dialogue alternatif
pour recoller aux valeurs de la république. Les entreprises associative
et radiophonique ont pour trait commun leur positionnement et le projet de la
construction de leur discours. Radio libre justifie de cette
façon sa place dans le schéma social de la jeune
génération qui est son public et trouve une
légitimité renforcée par le choix dont elle a
été l'objet.
On peut ainsi parler d'un caractère supplétif au
sujet de la fonction sociale de Radio libre. Mais pas substitutif. Il
ne s'agit pas de remplacer les parents, la famille, les amis ou l'assistante
sociale mais de créer un espace social supplémentaire pour
favoriser le lien social auquel contribuent ces acteurs, alternatif à
l'impasse dans laquelle l'auditeur se voit être.
Parfois enfermé dans l'isolement consécutif de
l'exacerbation de la liberté individuelle, il est possible pour les
jeunes auditeurs -particulièrement en âge d'autonomisation-
d'ouvrir une voie de dialogue dans une communauté multiculturelle mais
qui affiche une identité commune par l'affirmation de certaines valeurs
et à laquelle le positionnement supra-institutionnel et alternatif aux
partenaires du modèle en crise confère une
légitimité de connivence, d'autant plus propice au dialogue
qu'elle préserve l'anonymat (on reste seul dans sa chambre à
l'écoute comme à l'antenne) et ainsi respecte, encore une fois,
la liberté individuelle.
Construction d'un nouvel idéal du lien social
Si l'on se réfère aux analyses de Georges Mead
que nous avons avancées plus haut selon lesquelles la conversation est
à mettre en relation avec un projet d'interaction sociale et qu'outre
l'évidente et nécessaire coordination de la langue,
l'identité est construite par et à travers l'interaction sociale,
les valeurs que nous avons pu voir défendues dans le discours de
Radio libre (liberté, tolérance, respect, dialogue...)
déteignent logiquement sur les auditeurs qui l'écoutent. La
question de degré d'influence qui se pose comme variable
aléatoire à l'appréciation des effets de cette analyse
trouve une réponse dans la notion de légitimité de
l'interlocuteur que nous venons d'appliquer à notre étude. La
légitimité semble ainsi plus facilement accordée par des
jeunes gens en perte de repères à un tuteur choisi, la figure du
grand frère, qu'à des institutions sociales en crise... d'autant
plus que dans les sujets que nous avons analysés, ce sont souvent
celles-ci qui sont à l'origine du mal-être des individus.
Dans Les uns avec les autres1,
François de Singly déplore l'inefficacité des
discours fatalistes sur la crise du lien social (repères, transmission,
identités). Le retour à l'âge d'or de la République
lui semble impossible du fait de la montée de
1 François de Singly, Les uns avec les autres, quand
l'individualisme crée du lien, Paris, Armand Colin, 2003, 268
pages.
l'individualisme. Il veut, dans son ouvrage, proposer une
autre voie que le communautarisme pour un « nouvel idéal du lien
social ». Comme dans son analyse, nous avons vu que le discours de
Radio libre veut éloigner ses propositions des regroupement par
similitude d'identités (ethniques, religieuses, sexuelles...). Le
communautarisme comme modèle ne permet pas d'envisager sereinement un
nouvel idéal du lien social, notamment du fait de ses caractères
excluant, opposant et privatif de la liberté individuelle d'affiliation
et désaffiliation. Pour reprendre l'expression de Singly, «
Narcisse ne peut pas se réaliser s'il vit comme Robinson ».
Les auditeurs de Radio libre sont empreints de
cultures différentes, d'héritages sociaux, religieux,
épars. Ils se retrouvent dans une communauté riche de
l'accumulation de ces héritages au même titre qu'elle s'enrichit
des expériences narrées à l'antenne dans un schéma
global des itinéraires de jeunes vies en quête de liberté
mais aussi en besoin de repères pour se forger une identité.
La liberté individuelle comme socle de la construction
de l'identité ne peut affranchir cette dernière d'un lien social.
Nous avons vu la nécessité de considérer la
primauté des pleines libertés individuelles pour envisager un
nouveau type de lien social, respectueux des choix de chacun. Face à la
solitude dans laquelle peuvent se trouver des jeunes adultes tels que nous
avons pu le voir lorsque la famille, par exemple, ne respecte pas ces
libertés, un espace social de refuge s'avère à tout le
moins apaisant s'il ne peut pas toujours être le lieux de
l'élaboration d'un remède miracle. Le dialogue qui s'instaure
dans l'espace radiophonique skysolidarité chaque soir sur
Skyrock rappelle au respect des libertés de choix, d'identité et
d'action de chacun. Les siennes mais aussi celles des autres, en prônant
un certain idéal du métissage (culturel, ethnique...) Sur les
sujets qui nous concernent ici, parmi les plus lourds de l'émission, le
discours tend vers l'idée d'autonomisation des jeunes adultes majeurs
dans le
cas où les grandes réticences de leurs parents,
notamment à propos de leurs choix amoureux ou de leur identité
sexuelle, freineraient leur épanouissement dans la construction de leur
individualité. Du racisme à l'intolérance du fait de la
religion/tradition, en passant par l'homophobie, il s'agit de défendre
non seulement le droit de chacun de disposer de sa vie et de l'organiser
librement, mais aussi, par extension, de défendre certaines valeurs.
C'est-à-dire condamner les intolérances comme atteinte à
la liberté individuelle et déplorer qu'elles privent leurs
auteurs d'expériences profitables, prôner une
société multicolore dans l'idée de la richesse des
diversités, mais aussi ce faisant, reconsidérer le lien
familial.
Le discours de la skysolidarité invite
l'auditeur à modérer ses relations avec ses parents (à ne
pas partager ce qui corromprait le lien qui les unit en se définissant
un espace d'intimité aux frontières variables) ou à s'en
affranchir en cas de crise lourde. Mais l'importance de ce lien est toujours
réaffirmée : même en cas de choix de rupture, la famille
reste un repère nécessaire à l'individu et le respect et
l'amour doivent y demeurer.
Difool, l'animateur principal, est le maître du
discours. A défendre les valeurs que nous avons rappelées, le
discours se reproduit, les points de vue des grands frères sont
prescripteurs. Si la discussion est une co-construction avec les auditeurs,
ceux-ci sont sélectionnés, le standard faisant office de filtre.
Comme nous l'avons vu, leurs propos sont parfois repris, corrigés,
lorsqu'ils s'éloignent du discours général et dominant.
Formellement, le processus du discours développé
dans la skysolidarité emprunte un itinéraire type :
évaluation du problème, appel à la solidarité,
partage des expériences, construction entre l'équipe de
l'émission et les auditeurs d'un discours qui défend les valeurs
de tolérance et de multiculturalisme et organise
généralement un schéma d'épanouissement du jeune
adulte sous forme de cercles représentants chacun un espace social en
mouvement (famille, amis...) où l'individu cherche l'équilibre
pour en être le centre de gravité (schéma 3 page
suivante).
L'espace radiophonique y est superposé comme recours en
cas de crise pour les auditeurs qui lui font appel. Sa fonction est d'aider ces
derniers à rééquilibrer les espaces sociaux autour d'eux
pour en rester le centre de gravité dont l'équilibre est la
visée de l'épanouissement personnel.
Après l'analyse, nous nous devons de redessiner le
schéma nous avions posé en hypothèse (voir schéma
1, page32).
SCHEMA 3 / Epanouissement de l'individu par la
maximisation de ses rapports sociaux : l'auditeur-individu centre de
gravité des espaces sociaux dans lesquels il évolue
collègues
S
individu
amis
amours
école
famille
L'auditeur-individu travaille l'ampleur et la qualité
de ses relations interpersonnelles au sein des différentes
sphères sociales dans lesquelles il évolue, au gré de ses
attentes, de ses besoins, au fil d'un itinéraire vers son
équilibre.
Comme les ondes se confrontent pour équilibrer le chaos
produit par la chute de cailloux dans les eaux du lac. A cela près (et
c'est déterminant) que ce serait l'origine qui maîtriserait la
propagation.
Conclusion
--- Bilan du parcours et de l'expérience de
la recherche
Notre corpus, en s'affinant peu à peu, nous a conduit
à retenir des sujets parmi les plus éprouvants pour ce que nous
avons défini, en l'empruntant au vocabulaire de Radio libre,
comme skysolidarité. Nous n'avons pas arrêté
notre choix au seul traitement des sujets concernant le racisme, l'homophobie,
ou la raideur traditionnelle-religieuse : le projet était d'interroger
la skysolidarité ellemême, son fonctionnement à
rude épreuve, non faire une étude de genre ou sur un thème
de société ciblé. Face au racisme, à l'homophobie
et aux intolérances qui touchent à l'identité des
auditeurs comme jeunes adultes en construction ou à leurs choix de vie,
comment s'organise l'entraide à la base du contrat de communication de
l'émission, quelles valeurs gouvernent les conseils prodigués
à l'antenne ?
Nous avons parcouru l'itinéraire de ces jeunes qui ont
recours chaque soir à la solidarité proposée dans un
espace radiophonique pour résoudre leurs problèmes. Comme une
grande partie de la génération actuelle d'adolescents et de
jeunes adultes, ces jeunes s'inscrivent dans différentes cultures, ont
des origines sociales ou ethniques diverses, des religions différentes.
En quête de liberté, ils subissent parfois les tensions issues de
ce multiculturalisme, des communautarismes et celles que connaissent tous les
adolescents avec leurs parents. La plupart du temps vivant sous leur toit, ils
sont confrontés à leur regard et leur jugement alors qu'ils
s'émancipent pour entrer dans l'âge adulte.
Pour y parvenir, ils ont besoin de repères, d'adultes
à qui ils reconnaissent une véritable légitimité.
Le rôle est devenu malaisé pour leurs parents qui parviennent
difficilement à créer ce lien électif avec leur
progéniture qui construit son identité propre, autonome, en
obéissant à d'autres codes. En outre, dans les sujets que nous
avons retenus, ce sont les parents eux même qui sont à l'origine
du mal-être des auditeurs. C'est donc ailleurs, vers d'autres, qu'ils
vont se tourner pour tenter de créer un lien social nécessaire
à leur épanouissement. Naturellement vers de la famille, un
frère, une soeur, ou des amis. Mais que se passe-t-il lorsque personne
ne sait partager avec eux leurs identités qui peuvent paraître
singulières ou leurs choix de vie qui ne correspond pas à
l'idéal familial ?
Ils sont trois millions chaque soir à écouter
Radio libre, à s'inscrire dans une communauté où
l'on vient se confier pour essayer de trouver une solution à ses
problèmes, dans un espace où s'est construite, en huit
années, une légitimité propre à la confidence. Nous
avons défini cette légitimité par la figure du grand
frère, incarné par Difool. Un personnage reconnu comme un pair,
qui parle le même langage, qui affiche partager des préoccupations
communes.
Nous avons dessiné une architecture des grandes phases
du processus de skysolidarité. Après l'exposé du
problème, l'équipe de l'émission évalue la
situation de l'auditeur. Le dialogue est-il encore possible, un proche peut-il
l'aider, quelles alternatives peuvent, à ce moment, se proposer à
lui ? Vient ensuite le temps du partage des expériences, au centre du
dispositif de l'émission. Les animateurs -certains encore au
lycée- expriment leurs points de vue sur la situation de l'auditeur et
les réactions, les attitudes qu'ils ont eues s'ils l'ont connue. Les
auditeurs aussi participent à cette construction : par SMS, par mails
dont Difool lit une sélection, ou directement à l'antenne, par
téléphone. On tente enf in une synthèse.
Cette grande structuration permet de faire apparaître
une logique fonctionnelle mais l'analyse voulait que l'on s'intéresse
aussi au contenu du discours, aux valeurs qui gouvernent la conversation qui
s'établit dans l'émission. Si sur d'autres sujets, la position de
l'équipe, suivie par l'ensemble de la communauté, peut être
plus modérée, elle ne transige pas sur les questions
d'intolérance. Le racisme et l'homophobie sont combattus, comme tout ce
qui freinerait la liberté individuelle en portant atteinte à la
construction de l'individu : son identité profonde, le choix de la
personne qu'il aime.
S'il est une chose primordiale dans le processus de la
skysolidarité, c'est la revendication d'un « total respect
», promesse de l'émission érigée en slogan et
définitivement installé en première ligne du contrat de
communication. Il s'agit alors, pour les sujets que nous avons traités,
de ne pas transiger sur le respect des identités de chacun ou de la
liberté de ses choix amoureux.
Si la couleur de la peau du petit ami déplait aux
parents, c'est à eux de changer, pas à l'auditeur. « En 2004
», l'homosexualité n'est plus depuis longtemps une
marginalité ni un comportement déviant, même si cela peut
encore « choquer » certains de ceux qui appartiennent à une
autre génération, le dialogue est en premier lieu
prôné pour résoudre tous les conflits. Le sérieux
d'une relation peut donner raison à un argumentaire.
Mais en cas de frilosité aggravée des parents
à certains sujets, rien n'oblige à partager avec eux certains
points de sa vie privée s'il n'est pas possible d'espérer un
équilibre nécessaire à l'épanouissement et la bonne
pérennité du lien familial dont l'importance, si elle se place
après les choix de l'individu, est sans cesse rappelée. Que ce
soit en restant discret ou en prenant le large et en marquant une rupture pour
s'émanciper seul ou en couple si la cellule familiale ne sait pas
s'adapter au choix d'un enfant devenu jeune adulte, la distanciation est
envisagée comme l'alternative à l'affrontement permanent et
stérile, pour respecter un équilibre personnel. Il existe des
moyens pour permettre de s'assumer en jeune majeur libre, pour lesquels
certains auditeurs ont opté. Sans que le lien social familial ne soit
jamais rompu de façon rédhibitoire.
On partage alors les expériences de chacun, et lorsque
la situation est des plus précaire, comme ce fut le cas de cette jeune
auditrice enceinte et à la rue par grand froid (dernier sujet du corpus,
retranscriptions de la page 98 à la page 104), on étale des
solutions très concrètes auxquelles les auditeurs seront partie
prenante : un ambulancier à l'écoute de l'émission la
conduira chez deux pétillantes colocataires qui l'hébergeront et
l'assisteront dans ses démarches administratives pour lesquelles
l'animatrice a élaboré un plan opérationnel.
Au-delà de l'entraide, le discours érige
certaines valeurs : le dialogue, la condamnation de toute discrimination, la
défense d'un lien social qui respecte la liberté de
l'individu.
Le discours développé par la
skysolidarité construit une norme dont le respect de chaque
individualité est à la base. Nous avons défini comme
apologie du
métissage culturel l'obstination à exalter la
beauté de la cohabitation et du mélange des différences en
opposition aux réactions de peur, voire d'hostilité.
Le moment radiophonique constitué par Radio libre
peut se définir ainsi comme un espace social alternatif
superposé à ceux de la vie « réelle » pour les
suppléer un temps en tentant d'aider à renouer les liens qu'ils
entretiennent avec un individu (jeune adulte auditeur) résolument
placé au centre du schéma social et qui doit selon le discours de
la skysolidarité commencer par s'assumer lui-même en ne
laissant pas le racisme ou l'homophobie porter atteinte à sa
liberté. L'animateur de l'émission jouit à cet effet de la
légitimité de la reconnaissance d'un pair, d'un grand
frère.
Skyrock est une radio commerciale qui a trouvé comme
positionnement avantageux pour son émission Radio libre
d'assumer une mission d'entraide et de solidarité autour des
thèmes qui préoccupent la jeunesse ciblée. Ou la
construction d'un vivre ensemble dans le respect des individualités pour
ses auditeurs, entre eux, et avec le monde.
Comme j'avais pu penser que la recherche universitaire avec un
pied en entreprise pouvait se conjuguer en apportant à l'une comme
à l'autre, on peut, selon un certain regard, exprimer que Skyrock fait
d'une mission de service public une réussite commerciale.
Bibliographie / Webographie
--- Eléments et repères de
références et d'ouverture
Radio et médias en
général
Annick Cojean et Franck Eskenazi, FM, la folle histoire des
radios libres, Paris, Grasset, 1986, 333 pages.
Jean-Noël Jeanneney, Une histoire des médias des
origines à nos jours, Paris, Points Seuil, 2001, 393 pages.
Méthodologie
Laurence Bardin, L'analyse de contenu, Paris, Puf, 2003,
291 pages.
Patrick Charaudeau (directeur), Aspects du discours
radiophonique, Paris, Didier Erudition, 1984, 162 pages.
Patrick Charaudeau, Langage et discours,
éléments de sémiolinguistique, Paris, Hachette, 1983,
196 pages.
Patrick Charaudeau et Dominique Maingueneau (directeurs),
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Rodolphe Ghiglione, Situations potentiellement communicatives
et contrats de communication effectifs, Verbum, Presses universitaires de
Nancy, 1984. Algirdas-Julien Greimas et Joseph Courtés, Dictionnaire
raisonné de la théorie du langage, Paris, Hachette, 1979,
454 pages.
Repères d'analyse
Christian Bachmann, Jacqueline Lindenfeld et Jacky Simonin,
Langage et communications sociales, Paris, Hatier/Didier, 1993, 223
pages.
Christian Baylon, Sociolinguistique, société,
langage et discours, Paris, Nathan Université, 1996, 304 pages.
Claire Blanche-Benveniste, Approche de la langue
parlée en Français, Gap, Ophrys, 1997, 164 pages.
Françoise Gadet, Le Français populaire,
Paris, Puf, coll. Que sais-je, 1997, 128 pages.
Guy Lochard et Henry Boyer, La communication
médiatique, Paris, Mémo Seuil, 1998, 96 pages.
François de Singly, Les uns avec les autres, quand
l'individualisme crée du lien, Paris, Armand Colin, 2003, 268
pages.
Travaux appliqués au sujet
Abel El Quandili et Hafid Hamdani, Le grand frère des
banlieues, Paris, Fayard, 2005, 294 pages.
Hervé Glévarec, Libre antenne, la
réception de la radio par les adolescents, Paris, Ina/Armand Colin,
2005, 301 pages.
Michel Meyer, Paroles d'auditeurs, Paris, Syrtes, 2003,
345 pages.
Autre référence bibliographique
Plaquette de presse de Skyrock, Skyrock expliquée
à mes parents, 2003.
Sur internet
http://www.skyrock.com
http://www.tasante.com
http://www.yazata.com
http://iledefrance.skyblog.com/8.html
http://www.bric-a-brac.org/radio/fiches/skyrock.php
Les auditeurs de Skyrock face à
l'intolérance
|
es radios libres nées dans la fin des années
1970 naquirent, après la libéralisation du paysage audiovisuel,
quelques unes des grandes radios musicales que nous connaissons aujourd'hui.
|
NRJ, Skyrock et Fun radio sont sans conteste celles qui ont su
s'imposer en se construisant chacune une identité spécifique pour
se partager la majeure partie du jeune public par des programmations musicales
singulières et des émissions dont certaines ont marqué les
esprits pour leur originalité ou leur provocation.
Dans ce paysage radiophonique, les émissions de libre
antenne ont toujours tenu une place importante dans les grilles des stations.
Celle présentée depuis huit années par Difool et
diffusée chaque soir de 21 heures à minuit sur Skyrock est
aujourd'hui la plus écoutée de France. Elle rassemble des
adolescents et jeunes adultes essentiellement âgés de 15 à
25 ans autour d'un concept de partage des expériences pour
répondre à l'antenne aux problèmes de certains
auditeurs.
Les auditeurs de Skyrock, comme plus largement la
génération actuelle d'adolescents et de jeunes adultes,
s'inscrivent dans différentes cultures, origines sociales ou ethniques,
religions... A l'image de notre société, ils ont un point commun,
l'insatiable besoin de se sentir libre. Ils sont parfois dans l'étau que
serrent les tensions issues du multiculturalisme et des communautarismes. La
plupart du temps vivant sous le toit de leurs parents, ils sont
confrontés à leur regard et leur jugement alors qu'ils quittent
l'adolescence pour devenir des adultes.
Au croisement du brassage des cultures et de la phase
d'émancipation et d'affirmation de l'identité du jeune adulte,
ils se confrontent à de nombreuses préoccupations quotidiennes,
et sont parfois touchés par le racisme, l'homophobie, par
l'intolérance au sens large. L'étude consiste à traiter
ces questions que les auditeurs viennent partager sur l'antenne de Radio
libre d'après un corpus sélectionné sur la saison
2004/2005 de l'émission de Skyrock.
Mots-clés
Libre antenne Grand frère
Radio libre Banlieue
Skyrock Identité
Difool Solidarité
Radio libre Dialogue
Skysolidarité Lien social
Intolérance Vivre-ensemble
Racisme Amour(s)
Homophobie Famille
Individualisme Discours
Multiculturalisme Conversation
Communautarisme Langage
Quand le dialogue est difficile alors que le besoin de parler
est grand, quand le lien social est corrompu alors que l'obsession de la
liberté individuelle ne saurait s'affranchir du besoin des autres,
Radio libre est un espace de dialogue alternatif où se
construit un discours qui fait l'apologie de la tolérance et du
métissage culturel en exaltant le lien social amoureux et celui de
l'amitié, sans exclure la famille de l'épanouissement de
l'individu même si elle s'oppose à ses choix ou à son
identité.
Il s'agit ici de poser un regard sur le fonctionnement, les
valeurs et la portée du discours développé par la «
skysolidarité ».
Mathieu Sicard sous la direction de Jacques Gonnet
Université de Paris III - Sorbonne Nouvelle - UFR
communication Mémoire de master 2 recherche, Guy Lochard
Président de Jury, Juillet 2006
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