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Problématique des valeurs culturelles lega face à  la modernité. mythe ou réalité. cas de l'idego de 1996 à  2020


par SABUKAKA DEROSE SABUNI
ISP- Kalima - Graduat 2020
  

Disponible en mode multipage

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AVANT-PROPOS

Au crépuscule de ce premier cycle de graduat en histoire et sciences sociales que sanctionne ce travail de fin de cycle, l'ingratitude serait de nôtre si nous nous proclamions en solo, auteur de ce travail. Déjà HEIDEGGER1(*)(*) affirmait : « le monde auquel je suis est toujours un monde que je partage avec les autres, parce que l'être au monde est un être au monde avec. Le monde de l'être là est un monde commun ». L'homme trouve sa raison d'être autour de ses semblables et par conséquent l'égoïsme et la solitude sont un culte occulte rendu à la coexistence humaine. Coéxistencielle aussi, aucune oeuvre humaine ne peut se vanter de son individualité : elle implique ainsi la gratitude.

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SABUNI SABUKAKA DEROSE

REMERCIEMENTS

Par gratitude, nos remerciements s'adressent a priori à Dieu, le Génie Créateur, Auteur du visible et de l'invisible, du mesurable et de l'incommensurable.

Que nos remerciements s'adressent également à nos autorités académiques de l'Institut Supérieur Pédagogique de Kalima, pour nous avoir façonné par tant de leçons jusqu'à nous conduire à la fin de ce premier cycle qui porte aujourd'hui son auréole. Nous songeons personnellement au Directeur général MUTUZA SENGI ZASS pour nous avoir soutenus matériellement, financièrement et moralement. Que le corps professoral, scientifique et administratif lise ici l'expression de notre gratitude, combien profonde.

Que grâces soient particulièrement rendues au Chef de travaux KikuniMuzombo qui, en dépit de ses nombreuses tâches, a bien voulu encadré ce travail. Ses conseils et observations ont donné une texture à ce travail.

Que le Chef de travauxEmmanuel LUSUNGU qui, en marge de ses occupations d'enseignant, de chercheur et de parent, n'a pas ménagé de son temps pour diriger volontiers ce travail. Nous lui sommes et lui resterons reconnaissant à jamais.

Qu'il nous soit permis de remercier également le chef de travaux Marien MwambaNgwabiLuende Looze pour ses conseils, encouragements et sollicitudes à notre égard. Ses critiques, conseils et débats nous ont permis de donner du tonus à cette étude.

;Que notre chère épouseAmunazoMobilimweni(Mama Elisa), trouve particulièrement l'expression de nos remerciements pour sesencouragements et soutiens à notre égard. Ses stimili quotidiens nous ont poussés à aborder les études universitaires

IN MEMORIAM

Que nos regrettés parents SabuniLukomba et KakasiMalibilo, auteurs, entreteneurs et orienteurs de notre vie, trouvent également la douceur de notre gratitude 

DEDICACE

Que nos fils et filles, les Sabukaka Le beau, Sefu, Mundyo, Lukabya, Cendric, Kakasi, Bernadette, Amunazo, celineLuzinga , Papy et Kyengi trouvent ici un modèle de ténacité à imiter. Nous pensées vont également à Etienne KiyungaTchandema, Lambert MulambaKwenga, René Kankenye et à tous nos jeunes frères putatifs qui n'ont cessé, tout le long de ce triennat académique, de nous prodiguer des conseils et de nous encourager.

Plaise au ciel que nos amis et complices de tous les temps découvrent non seulement le confort de notre amitié mais surtout le couronnement de nos peines. Nous songeons particulièrement à Sakilebwa, Nyangi, Freddy et Omoyi

A tous et à chacun, gratiasagamus.

PROBLEMATIQUE DES VALEURS CULTURELLES LEGA FACE A LA MODERNITE, MYTHE OU REALITE. CAS DE L' « IDEGO » DE 2015 à 2021 ;

INTRODUCTION GENERALE

1. PRESENTATION DU SUJET

Notre sujet s'intitule « problématique des valeurs culturelles lega face a la modernité, mythe ou réalité. Cas de l' « idego » de 1980 à 2021 ». Les lega sont une population forestière bantoue d'Afrique centrale, établie principalement en République démocratique du Congo, à l'Est du Lualaba (le fleuve Congo), jusqu'en altitude dans les monts Mitumba, dans les provinces du Nord-Kivu, du Sud-Kivu et du Maniema2(*).

Le Mulega ou le peuple lega dispose des valeurs culturelles riches et variées. Par sa tradition orale, ses oeuvres d'art, ses nombreuses activités culturelles telles que le Bwali3(*), le Bwami, les chants et la danse (Mokembe), ...ect, le Mulega est détenteur d'un patrimoine culturel étendu et adapté aux différentes circonstances autant festives que dramatiques.Ainsi par exemple, à l'accouchement d'une femme mariée, le conjoint dont la femme a accouché est soumis à l'obligation de payer à sa belle-famille une redevance appelée « Misululu ». Dans la famille polygamique de l'ancienne société « Lega » régnait une hiérarchie. La première épouse appelée « Mukikolomukulu » commandait à toutes les autres et celles-ci,appelées « petites femmes » lui devaient l'obéissance d'où ce proverbe « asongwag'isongakakwekyankumbatakakulukuguli », mot à mot : celle que tu trouves au foyer conjugal peut te faire porter son petit panier même si elle n'est pas plus âgée que toi4(*).De même, lorsqu'un homme s'empare d'une fille d'autrui et en fait sa femme sans au préalable avoir été chez ses parents pour demander officiellement sa main, il doit payer le « MpenezaKabenga ». Pour les travaux champêtres, le défrichage, l'abattage d'arbres, le brûlis et le semisexigent du propriétaire du champ de préparer le « Kelale » pour ceux qui l'aideraient à la réalisation de ces lourdes corvées.Autant pour les événements malheureux tels que le décès, la famille éplorée est soumise à l'obligation de payer certaines redevances dont le « Mibulobulo » et forcement, l' « Idego ».

Cependant, le Bulega offre un paradis terrestre de paix, de bonheur, d'hospitalité et de bénédictions tant, pour ses fils et filles, que pour leurs prochains qui viendraient de l'intérieur du pays ou de l'étranger afin de se mettre ensemble pour l'exploitation et la mise en valeur de ses nombreuses richesses naturelles. Ce cosmopolitisme lega traduit par la colonisation occidentale et le mixage avec les différentes tribus congolaises et des pays voisins du Congo a entrainé une mutation culturelle lega au point de confronter la tradition à la modernité. C'est ce choc de culture qui a inspiré cette thématique dont la formulation a été révéléeprécédemment. Cette étude se fonde sur l'éternelle question du rapport dialectique entre la tradition et la modernité, sur l'apport de la modernité dans la tradition et les survivances traditionnelles dans la modernité.

Le choix de ce sujet serait également motivé par le fait que nous sommes d'abord nous-mêmes membre de la communauté lega naviguant «  entre les eaux » au sens Mudimbien5(*) du terme.

2. ETAT DE LA QUESTION

L'objet d'étude de notre travail porte sur la « problématique des valeurs culturelles lega face à la modernité, mythe ou réalité. Cas de l' « idego ». Cette thématique n'est pas vierge. Elle a déjà fait l'objet de nombreuses recherches et publications aussi bien au Congo que sous d'autres cieux. La lecture de certains de ces travaux nous a permis, comme l'ont soutenu BOULANGER et BALLEYGUIER de « pénétrer les pensées des auteurs, d'apprécier les difficultés qu'ils ont rencontrées et les moyens qu'ils ont utilisés pour les surmonter, de saisir l'originalité de leur contribution et les lacunes qu'une autre recherche devra combler ; elle permet en outre d'utiliser les résultats déjà acquis afin que la recherche à entreprendre soit mieux faite »6(*).

Dans les lignes qui suivent, nous présentons le condensé des travaux auxquels nous avons eu accès.

Célestin Kaffo et aliiont mené une étude sur  les« cérémonies funéraires à l'ouest-Cameroun »7(*). En menant cette étude, les auteurs ont constaté que les cérémoniesfunéraires ont connu depuis plusieursannéesde profondes mutations au point d'être à la base du développement de la reconstruction des économies locales. Les différents acteurs développent de stratégies d'accumulation de revenus : on parle désormais d'une économie autour de la mort. Le volet économique de ces manifestations commémoratives fait l'objet d'une véritable polémique et des voix s'élèvent pour questionner leur signification et réclamer leur interdiction. Cette polémique est entretenue par les évolutions que connaissent ces manifestations dans leurs pratiques. Ils ont reconnu que les cérémonies funéraires sont devenues des « cérémonies dépensières ».

Jacques Barrou et Roger Navarrose sont penché sur les « Rites funéraires et figures de la mort en Afrique et en occident »8(*). Partant de la variété et de la plasticité des rites funéraires, les auteurs démontrent que les rituels sont des énoncés imagés des valeurs fondamentales d'une société. Les acteurs producteurs de rites, n'ont pas tous le même degré de connaissance de sa signification. Aussi, ont-ils constaté, le contenu et la forme des rites sont dépendants des sociétés qui les inventent à garder la mémoire de leurs expressions et la compréhension de leurs sens. Or ces capacités appartiennent à des catégories d'individus susceptibles de disparaitre, sans assurer la transmission de ce qu'ils savent. Le rite peut alors être progressivement abandonné ou ne survivre que sous une forme désuète, tout juste à même d'alimenter des manifestations folkloriques allant en s'essoufflant.Dans les pays industriels, ce fut le sort de tous les rituels saisonniers liés à des activités agricoles, profondément transformées par la mécanisation du travail et la réduction de la population rurale. Mais d'autres rites survivent. C'est le cas des rites funéraires qui sont, selon ces auteurs, des archétypes universels, une infrastructure permanente de l'inconscient collectif, qui, sous des formes diverses, exprimerait toujours les mêmes interrogations sur le devenir de l'homme à partir de son décès.

Jean Cuisenier9(*)montre la permanence de rites funéraires complexes, visant à maintenir un lien entre le monde des vivants et l'au-delà. S'ils sont restés régulièrement pratiqués dans certaines sociétés, ils semblent avoir connu un certain appauvrissement dans les pays occidentaux. Y sont-ils en voie de disparition ? Ne suivent-ils pas des transformations reflétant l'évolution des mentalités devant diverses contraintes et face à des nouvelles opportunités ?

De la lecture de ces travaux, il se dégage plusieurs grilles de lecture. Elles sont notamment relatives aux survivances culturelles, aux évolutions de la culture et la tradition confrontées à la modernité ainsi qu'à la substance de chaque tradition. Les travaux de nos prédécesseurs se rencontrent avec le nôtre dans son aspect de la collision entre la tradition et la modernité ainsi que sur la thématique de l'économie funéraire. Cependant, son authenticité réside dans son objet spécifique qu'est la redevance funérairede la culture lega, l'Idego. Le rituel traditionnel de l'idego lors des décès est une particularité axiale de notre sujet.

3. PROBLEMATIQUE.

L'homme, d'après le Mulega, né de la conjonction ou de la coalition de deux parties ou familles, est généalogiquement descendant d'une double parentèle. Celle de sa mère et de son père. Un dicton lega l'illustre clairement en ces termes : « Kebondakemoze ta bore » (une seule hanche ne peut engendrer). Bien que la culture lega soit patrilinéaire, lorsque l'enfant grandit et mûrit, les fruits et dividendes de son travail, bénéficient aux deux parties précitées. Cependant, au moment de son décès, la famille maternelle est préjudiciée dans la mesure où la partie paternelle hérite naturellement de tous les biens patrimoniaux du défunt ainsi que de sa femme sur laquelle le lévirat et/ou le sororat est d'application alors que du côté maternel, la mort du défunt est un vide béat et non compensatoire qui demeure. C'est pourquoi, pour récompenser la famille maternelle, la culture lega a institué le « Mesonga ou le Mibulobulo », c'est-à-dire, la ration ou la pitance à donner à tous ceux qui considéraient le défunt comme leur neveu.Un adage lega traduit bien cette pratique funéraire : « zamisongazikuliagabaringi na nzela », (le repas de deuil se mange meme par les passants). Le Mibulobulo est, en substance, constitué de l'ibangansinda, du mbembe, d'une chèvre, d'une corbeille d'arachides, d'un panier de paddy ou de farine de manioc, d'une bouteille d'huile, d'un paquet de sel, un régime de banane (mutengowigoma)

Au-delà du Mibulobulo, il a également été institué l' « IDEGO » ou le « MALIBA ». Il s'agit, en fait, des biens ou redevances que la famille paternelle du défunt paye à la famille maternelle. Son sens est de resserrer davantage les liens familiaux et de perpétuer le lien du mariage. L'Idego est généralement et invariablement constitué d'une chèvre (Kiburikyampene), du Musanga(cauris ou coquillage) ou Magana mabele ma mosanga(2000 FC), du byomamorobakamo, de l'Isuusi(piècede pagne en raphia).

Le Mibulobulo ainsi que l'Idego font partie des rites funéraires ou des rites de deuils dont les fonctions sont multiples. Ils s'adressent d'abord au mourant et au mort dans le but de l'apaiser, par le maternage au moment de mourir, et de le reconnaitre par le respect qu'on lui doit au moment de sa mort. Plus encore, le rite permet de « tuer le mort ». En effet, la mort étant vue comme un passage, il ne suffit pas de mourir pour que tout s'accomplisse. Il faut accepter de se séparer de notre proche décédé et, pour cela, on doit tuer tout ce qui reste vivant en lui en rompant les liens affectifs qui l'unissaient à la communauté. Par la suite, après une période que chaque culture définit, il faut prévoir les rites permettant de réintégrer le mort confirmant ainsi le défunt dans son nouveau destin et conférant à ses restes leur statut définitif. Le temps est alors venu de faire revivre le mort10(*)

Les rites funéraires sont, en deuxième lieu, centré sur la prise en charge des survivants. Les rassurer, les apaiser, leur offrir un garde-fou contre l'angoisse existentielle, mais également de permettre l'expression d'émotions intenses et destabilisatrices pour l'individu et pour le groupe, voilà les finalités des rites à leur égard. La période de deuil est une véritable zone de turbulences, une traversée du désert pour laquelle on ne veut pas abandonner celle ou celui qui s'y engage. En ce sens, encore une fois, les rites de deuil viennent compléter les rites funéraires pour faciliter et encadrer le travail de deuil et ainsi faciliter le rétablissement de l'ordre perturbé après expression codifiée de l'angoisse et après hommage au disparu.

Finalement, les rites funéraires tiennent compte de la fragilisation du groupe social à l'occasion du décès de l'un de ses membres. Les forces en présence qui font irruption dans la communauté, la mort, le numineux, doivent être absolument tenues en respect par le recours aux rituels et à ses possibilités de mise en scèneet de dramatisation contrôlée dans un cadre liturgique qui « font passer le drame du plan réel au plan de l'imaginaire »11(*), c'est-à-dire là où l'humain retrouve un pouvoir sur les choses qui autrement le débordent et le menacent à la fois la survie individuelle et celle du groupe. C'est là l'ultime pouvoir du rituel dans son affrontement symbolique avec une force, la mort, apparemment (invisible) : bien qu'elle réussisse à emporter l'un des nôtres et à priver la société de sa présence et de son apport, cette victoire apparente n'est que temporaire, parce qu'au bout de compte, à l'issue des rites funéraires et des rites de deuil, le mort ne sera plus un disparu ou un absent.

Cependant, les auteurs spécialisés dans les études sur la mort ont tous tenté d'expliquer les rapports de l'homme à la mort et aux rites en reliant ces phénomènes à un portrait d'ensemble dans l'évolutionrécente des sociétés. Pour ce faire, les sciences sociales utilisent généralement les notions de tradition, de modernité et plus récemment, de postmodernité. Louis-Vincent Thomas12(*)qui a probablement consacré le plus de place dans ses ouvrages à décrire ce qui est devenu des rites funéraires en Occident. Pour lui, on peut résumer ces changements en deux temps à l'aide de quelques mots clés : disparition, simplification, privatisation, technisation, professionnalisation, changement des lieux, dissimulation, réduction, désocialisation et désymbolisation, puis prise en charge du survivant, personnalisation, participation, invention des gestes expressifs, médicalisation du deuil contemporain et, finalement, laïcisation des funérailles.

Disparution, parce que, sur le plan des rites, plusieurs composantes ou étapes du rituel traditionnel n'existent tout simplement plus : accompagnement du mourant et veille à la maison, toilette funéraire accomplie par les membres de famille, cortègefunèbredu lieu du culte jusqu'au cimetière, rites de deuil-à peu près dans leur entièreté- et commémoration publique du décès dans les mois ou les années qui suivent. Simplification parce que, d'une manière générale, le caractère plus formel ou solennel des rites a été abandonné ou grandement simplifié, à preuve la disparition de tous les éléments prétendument cités et l'apparition d'un menu davantage de souplesse qu'auparavant. Il est donc dorénavant possible d'expédier en 24 heures l'ensemble du processus redéfini aux goûts et aux besoins du jour. Privatisation en deux sens. D'abord parce que les individus et familles ont de plus en plus d'occasion de personnaliser les rites funéraires pour tenir compte de l'individu visé par ces rites, de ses dernières volontés, de sa vie, de ses croyances ou de sa non croyance, des liens qu'il a établi avec son entourage et avec sa communauté. Mais privatisation également dans le sens où les rites sont moins qu'avant l'occasion d'un large rassemblement communautaire quasi obligatoire ou automatique. Technisation, bien sûr, en raison de l'apparition et de la généralisation des techniques de la thanatopraxie qui ont révolutionnéles pratiques- et la pratique quasi universelle toilette des morts qui était davantage un acte de purification et de respect qu'un acte hygiénique et de maquillage du corps mort-, mais probablement aussi toute la symbolique entourant la rencontre avec le cadavre. On ne présente pas le plus souvent un corps inanimé, diminué, amoindri ou méconnaissable en raison de la maladie ou brisé par un accident, mais un corps « revampé », plus digne et qui ne suscitera ni l'horreur ni la peur ni le rejet. Un corps qui n'a rien d'un cadavre mais qui a plutôt l'air de dormir ou de se reposer (un « beau mort »), tellement qu'il donne parfois l'impression d'être sur le point d'ouvrir les yeux et de se réveiller. Le travail de deuil peut ainsi commencer plus sereinement, dit-on. Technisation aussi par le biais de la crémation qui prend de plus en plus deplace- et dont on pourrait analyser les idéologies légitimatrices- et qui est à des lieux de la crémation en plein air, sur un bûcher, encore pratiqué à d'autres endroits de la planète ou en d'autres temps en Amérique même par certaines tribus amerindiennes. Crémation qui n'apparaissait pas alors comme un geste technique pratiqué par des employés utilisant une technologie de pointe qui en moins d'une heure réduira en cendres, c'est le cas de le dire, un corps humain, quitte à passer les résidus dans un broyeur pour obtenir un produit plus uniforme. L'absence totale non seulement de la richesse symbolique des crémations traditionnelles en lien avec les mythes fondateurs d'un groupe, mais même d'une quelconque préoccupation en ce sens, caractérise nos nouvelles pratiques. On mise sur l'efficacité, la rapidité d'exécution, la réduction des coûts et le caractère hygiénique et écologique de l'opération. Professionnalisation en lien avec l'apparition de l'entreprenariatfunéraire et de son équipe, de leurs contrats, de leurs produits et services, de leurs locaux pour les vivants comme pour les morts, de leur guichet et de leurs techniques modernes. Voilà combien d'atouts réels, mais au prix de la disparition ou de l'éclipse des rapports humains de proximité et d'intimité pour plusieurs moments du rite. Professionnalisation aussi, rappelons-le, par le biais du séjour à l'hôpital où malade et membres de son entourage se retrouvent « reçus » dans un lieu qui leur garantit un maximum d'efficacité et de sécurité par rapport à la maladie et à la mort devenus de plus en plus étrangères pour nos contemporains, mais qui se retrouvent  « invités » dans un lieu qui n'est pas le leur et qui possède ses propres normes et règles de conduite (horaires, places et traitements disponibles, aspects légaux des décisions à prendre, etc.). Changement des lieux justement avec l'hôpital et le complexe funéraire qui prennent le relais de la maison du mourant et de l'église elle-même pour un nombre grandissant de cas. Changement aussi des lieux parce que les convois funéraires collectifs n'existent plus pour déplacer le cadavre vers son lieu de sépulture. Changement des lieux finalement parce que la pratique de la dispersion des cendres multiplie tout autant qu'elle efface les lieux retenant les traces de notre passage. Dissimulation parce que tout est entrepris d'abord pour que le mort n'ait pas l'air d'un mort, mais d'un vivant endormi- si toutefois il est même exposé, auquel cas la dissimulation est alors totale-, et ensuite pour que les cimetières s'intègrent tellement bien au paysage de nos villes qu'on ne les connaisse plus comme tels : cimetières-parcs, cimetières-tours( le cimetière est tout simplement un édifice en hauteur où chaque étage voit s'aligner en feux et niches de columbarium un peu comme les tours de logement font que les voisins habitent des appartements adjacents) et cimetières forestiers( où les morts reposent au pied des arbres, en retrait , en retrait des villes et cachés au regard des passants). Réduction parce qu'on assiste à une logique où toutes les traces traditionnelles de la mort ou des morts sont ramenées à leur plus simple expression, en commençant par le cadavre réduit en cendres, aux inscriptions minuscules figurant sur les niches des columbariums et aux inscriptions à tendance minimaliste que certaines études ont permis d'observer de plus en plus sur les épitaphes : comme par exemple d'y inscrire tout simplement « Mère » sans plus. Désocialisation aussi des rites funéraires qui, on le voit à la lecture des paragraphes précédents, perdent progressivement leur capacité de rassemblement pour faire l'événement de la mort une occasion de renouer les liens sociaux devant ce mystère et son pouvoir de néantisation. C'est le contraire qu'on observe : simplification importante de ce qui subsiste des rites, funéraillesréunissant de faibles foules, endeuillés abandonnéssocialement au lendemain des funérailles. Luce Des Aulniers13(*) ajoute en renfort, à cette analyse, que lorsque l'on entend que tout en matière des funérailles est affaire de choix personnel, on a justement là le signe patent d'une désocialisation de ces pratiques.Désymbolisation alors que tout le pouvoir évocateur et guérisseur des rites repose théoriquement sur la pertinence, la justesse et la puissance des symboles utilisés et connectés en droite ligne avec nos mythes ou récits fondateurs, à peu près tout dans l'évolution récente des rites funéraires contribue à achever cette désymbolisation, en commençant par la crémation qui, dans nos cultures, est totalement dépourvue de ce recours aux symboles. L'exception à ce qui semble devenu une tendance lourdevers la désymbolisation repose sur l'expérience de « personnalisation » des funérailles, que ce soit dans les funérailles religieuses ou civiles. Toujours selon Thomas, après une longue période qui laissait croire à l'obsolescence progressive des rites funéraires, on assiste en même temps, au cours des trois dernières décennies, à une certaine renaissance des rites. On assiste à une tendance à l'innovation rituelle.

Loin de connaitre exactement la plénitude des variations décrites par Thomas, dans l'Espace culturel lega en général et dans le territoire de Pangi en particulier et précisément dans le groupement Ulimba, l'Idego qui est un rite conjuratoire, ostentatoire, transitoire et compensatoire de deuil destiné à la fois à la réintégration du mort à son nouveau destin, à l'assurance au défunt un passage apaisé entre le monde des vivants et des morts et à procurer au de cujus les hommages et honneurs visibles qu'il n'a pas pu avoir de son vivant et de resserrer les liens entre les membres de famille rompus par le vide créé par la mort14(*), les observations faites durant notre enquête ont révélé que la modernité, dans sa confrontation dialectique avec la tradition, apporte des modifications qui touchent substantiellement à l'essence de cette pratique d'indemnisation a capita du de cujus dans l'espace lega. Ainsi, a-t-on remarqué que depuis quelques décennies le christianisme érode progressivement l'Idego dans ce sens que certains défunts pratiquants laissent, en guise de testament ou de dernière volonté, une interdiction que leur mort fasse l'objet d'une indemnisation.

De même, il a été observé que le rite indemnisatoire (l'idego) est fragilisé du fait de la perte de son caractère obligatoire du fait de l'acculturation liée au mixage culturel et du relâchement des instances coutumières (non respect des recommandations des dépositaires coutumiers) face à l'imposition du droit positif.

La perte des valeurs monétaires anciennes (igama)a également imposée des substitutions qui touchent à la substance même de l'idego imposant ainsi un nouvel instrument de payement. De la sorte, face à l'omniprésence de la monnaie scripturale moderne, il est admis que lors du rite de l'Idego, les biens matériels tels les cauris(Musanga), le métal(le byoma), l'Isuusi (étoffes en raphia) ou même la chèvre(Mpene) soient remplacés par de l'argent et que par ce fait, la radicalité et la substance du rite soient touchées dans leur intégrité essentielle. Et enfin, eu égard à la nucléarisation de la famille liée à l'économie marchande, le rite indemnisatoire de l'Idego jadis, oeuvre de toute la famille élargie du défunt, connait une privatisation dans le sens où il devient une affaire personnelle dépendant de la volonté et du statut du défunt.Certains bénéficiaires sont aujourd'hui dérogatoirement exclus(le cas des mekolo). Face à ces changements rituels que l'urbanisation, l'industrialisation, le christianisme et le mixage culturel imposent aux traditions et rites funéraires lega, certaines questions ont traversé notre esprit. Nous les avons formulés en ces termes :

· Quels seraient les apports de la modernité face aux rites funéraires dont l'Idego dans le groupement Ulimba ?

· Quelles seraient les survivances traditionnelles dans les rites indemnisatoires de l'Idego dans le groupement Ulimba ?

· Quels seraient les mécanismes conservateurs des traditions funéraires face à la dynamique sociale moderne ?

4. HYPOTHESE.

Pour répondre à ces questions, nous avons formulénos hypothèses que nous appréhendons comme « une stratégie pour mener à bon port une étude en proposant des solutions aux questions qui se posent sur l'objet de la recherche »15(*) ou comme « proposition de réponse à la question à propos de l'objet de recherche formulée en des termes tels que l'observation et l'analyse puissent fournir une réponse »16(*). En termes d'hypothèses, nous présumons que :

- Loin de disparaitre, l'urbanisation, l'industrialisation et le métissage culturel auraient imposé la substitution, la fragilisation, la personnalisation, désymbolisation et la désocialisation au rite funéraire de l'Idego;

- Au delàdu changement de ses outils de payement et de sa fragilisation, l'Idego aurait gardé sa quiddité dont sa symbolique, ses parties et son caractère indémnisatoire ;

- Les mécanismes conservateurs de traditions funéraires seraient le renforcement de trois piliers culturels lega.

5. OBJECTIFS ET INTERETS DU SUJET.

Il faut admettre que cette étude ne pourra pas répondre à toutes les questions qui tournent autour du thème en examen. Toutefois, nous entendons d'une manière générale :

- Evaluer le niveau de l'influence de la modernité dans son rapport dialectique avec la tradition ;

- Identifier les indicateurs de résilience des traditions, rites et symboles culturels des sociétés exotiques face à la compression de la modernité ;

- Trouver la thérapeutique liée aux phénomènes de l'inculturation et de l'acculturation dans la dynamique sociale imposée aux sociétés traditionnelles et rurales ;

- Interroger le sens des déséquilibres entre la modernité et la tradition dans le contexte du choc des cultures ;

Quant à l'intérêt, ce travail revêt trois :

- Du point de vue personnel, en tant que chercheur en histoire et sciences sociales, ce travail est la résultante des leçons et préceptes accumulés dans différents cours (Science administrative, Théorie des organisations, Institutions administratives, ...) ;

- Sur le plan scientifique, ce travail est une quête d'établissement d'une corrélation entre la modernité et la tradition à l'ère de la mondialisation ;

- Quant à l'aspect pratique, ce travail est une évaluation de l'épineuse question de la viabilité des nos institutions culturelles traditionnelles ;

6. DELIMITATION DU SUJET.

Fondamentalement, le sujet du travail doit être limité dans le temps et dans l'espace. Dans le temps, ce travail s'étale entre 2015 et 2021. Dans l'espace, il couvre le groupement Ulimba dans le secteur desBeia dans le territoire de Pangi.

7. METHODE ET TECHNIQUES DE RECHERCHE.

Pour infirmer ou confirmer nos hypothèses, nous avons dû recourir à un arsenal méthodologique conséquent. Entendue comme « ensemble de procédés, des techniques perfectibles sur les types de données et d'analyses »17(*), la méthode dialectique telle que schématisée par POLITZER18(*) et VERAGHEN a été d'usage explicatif tout le long de cette étude. Plutôt que de reprendre le protocole descriptif dialecticien, voici comment nous l'avons appliqué dans notre étude :

1. La loi de la totalité et de l'interdépendance (réciprocité) cette loi postule que les faits naturels comme les faits sociaux sont liés les uns aux autres et agissent les uns sur les autres par voie de conséquence aucun phénomène ou fait social ne peut être facilement compris sans avoir été situé dans un contexte global.

La réalité sociale doit être appréhendée comme un tout faisant partie d'un tout qu'un sens, c'est-à-dire, le fait doit être compris à d'autres sujets liés.

En effet, l'usage de cette méthode doit nous amener à situer les innovations rituelles de l'Idego dans les effets immédiats de la modernité (urbanisation, industrialisation et métissage culturel)

2. La loi du mouvement et du changement.

Cette loi renseigne sur le fait que la réalité n'est pas figée, statique. Elle est en constante mutation, elle est donc dynamique, tout coule, tout bouge et tout change.

Pour la dialectique, toute chose a un passé, un présent et un avenir, elle n'est pas là une fois pour toute et que ce qu'elle est aujourd'hui n'est pas définitif. Dans le cas de l'accomplissement des attributions du Territoire de Kailo, il convient de noter que le passage d'un rite indemnisatoire en nature pour un Idego en liquide, personnel et facultatif est lié au changement apporté par la modernité dans les sociétés exotiques ;

3. La loi de la contradiction

La loi de la contradiction ou la lutte de contraire stipule qu'un tout ou un objet est une totalité qui ne nie pas les opposés ; elle insiste sur l'unité et la lutte contraire, la quelle lutte est source de progrès. Il s'agit ici de considérer ces conflits comme producteur des nouvelles perspectives de gestion rituelle mixte incluant les aspects traditionnels et modernes.

4. La loi du changement

Cette loi stipule que c'est par accumulation de changement qualitatif qu'on arrive au changement quantitatif. La dialectique considère comme une totalité mais qui change et évolue.

Il s'agit de partir sur des nouvelles bases de gestion rituelle de l'Idego.

Pour recueillir les données ou informations relatives à notre étude, nous avons recouru à plusieurs techniques entendues comme instruments de mise en oeuvre pratique et limités de la méthode»19(*) à savoir :

- La technique documentaire qui nous a permis d'accéder à certaines données glanées dans les documents officiels, sites web, ouvrages et archives ;

- L'observation directe : selon NgaNdongo20(*), recourir à l'observation directe, c'est procéder à l'« enregistrement, par notes descriptives ou analytiques, d'actions ou d'observations perçues sur le terrain, dans un contexte naturel». Concrètement, il était question au cours de la recherche d'accorder une attention particulière à toute entreprise ou activité, à tout fait ou événement en rapport avec les préoccupations de l'étude. Il s'agissait pour nous d'identifier les sens et la quiddité de l'Idego, d'éplucher les nombreuses innovations et survivances dans le rite funéraire de l'Idego.

Après avoir recueilli ces données, nous les avons traitées au moyen des techniques statistiques et de l'analyse de contenu :

- La technique statistique, quant à elle, nous a permis de quantifier les données par les formules de fréquence et pourcentage afin de dégager les inférences.

- L'analyse de contenu : elle est, d'après Quivy et Campenhoudt21(*), « un ensemble des techniques d'analyse des communications visant, par les procédures systématiques et objectives de description du contenu des messages, à obtenir des indicateurs (quantitatifs ou non) permettant l'inférence des connaissances relatives aux conditions de produit/réception des messages » ;

L'analyse de contenu porte sur des messages aussi variés que des oeuvres littéraires, des articles de journaux, des documents officiels, des programmes audiovisuels, des déclarations politiques, des rapports de réunions. Il s'agit de passer au crible de l'analyse en profondeur, les termes utilisés, leur fréquence et leur mode d'agencement, la construction du discours et son développement. C'est ainsi que dans ce travail, les données recueillies sur le terrain à travers les divers documents, ont été exploitées à l'aune de l'analyse de contenu. En fait, la problématique des valeurs culturelles lega face à la modernité, mythe ou réalité. Cas de l' « idego » de 2015 à 2021 s'inscrit dans une perspective cumulant à la fois les données qualitatives et quantitatives. Elles ont été obtenues à partir de trois outils : l'observation indirecte, les entretiens et comme dit plus haut, l'analyse de contenu.

8. DIFFICULTES RENCONTREES.

Cette étude ne pourrait se réaliser sans se buter aux écueils de tout ordre. Le premier a été d'ordre de documentation et des sources ; l'indisponibilité, la carence ou l'inaccessibilité des ouvrages et sources qui abondent dans le sens de notre objet d'étude a été un handicap majeur; le deuxième a été d'ordre financier ; la collecte des données ainsi que la matérialité de ce travail ont exigé de nous de l'argent que nous n'avions pas toujours en quantité suffisante. Le troisième est d'ordre de la texture : compte-tenu de la diversité des données, il nous a fallu des efforts énormes et des conseils pour rédiger le texte avec un enchainement logique. Seuls le courage et la détermination qui nous caractérisaient nous ont permis de contourner toutes ces difficultés.

9. SUBDIVISION DU TRAVAIL.

En fait de subdivision, ce travail ne comprend que trois chapitres. Le premier parle deconsidérations générales sur le groupement ulimba. Le deuxième se penche sur les règles traditionnelles de l'organisation de la société lega. Alors que le troisième porte sur les facteurs modernes érosifs de la culture lega.

CHAPITRE I. CONSIDERATIONS GENERALES SUR LE GROUPEMENT ULIMBA

Dans ce chapitre portant sur les considérations générales sur le groupement Ulimba, il est d'abord question de définir les concepts clés constitutifs de notre sujet de recherche. Il sera ensuite question de présenter, de façon synthétique notre univers d'étude qui est le groupement ulimba.

1.1. DEFINITION DES CONCEPTS

Pour rendre à la fois facile et souple la compréhension du contenu de ce travail, les concepts Culture lega, Problématique, Modernité et Ulimba seront clarifiés aux fins de préciser leur connotations et de les départir des dénotations plus générales et ambigües, sachant que les concepts sont assez polysémiques.

1.1.1. PROBLEMATIQUE

La problématique est l'aptitude de saisir les enjeux d'une situation.L'expression problématique de recherche se réfère généralement à l'ensemble d'éléments formant un problème. Elle donne le point de départ auquel découla toute recherche et constitue le sens à partir de celui-ci.22(*)

Georges DEFOUR, quant à lui, a défini la problématique comme une préoccupation majeure de la recherche qui se traduit par une série de question qu'il se propose en vue d'y trouver des réponses appropriés23(*)

Dans le cadre de ce travail, la problématique se définie comme l'ensemble des faits observés en contradiction avec la culture lega dont le groupement Ulimba ou l'écart observé entre ce qui est et ce qui devrait être.

1.1.2. CULTURE LEGA

Pour mieux cerner ce groupe nominal «  culture lega », il faille méthodiquement les définir séparément d'abord et appréhender leur acception globale par la suite. Ainsi nous allons définir le concept « Culture » et le concept « lega » ensuite.

La culture est l'ensemble des connaissances et pratiques acquises par plusieurs individus vivant en société et dont le but est d'assurer la spécificité ou l'identité, la stabilité et la permanence de comportement individuel et collectif.24(*)

Elle se définit comme un tout complexe qui inclut les connaissances, les croyances, les arts, les morales, les lois, les coutumes et toute autres dispositions et habitudes acquises par l'homme en tant que membre d'une société. C'est autrement dit l'ensemble des réalisations de l'homme dans une société.25(*)

Elle se conçoit donc comme l'ensemble des activités soumises à des normes socialement et historiquement différentiées, et des modèles de comportement transmissible par l'éducation propre à un groupe social donné.

Le peuple Lega est une population forestière bantoue d'Afrique centrale, établie principalement en République démocratique du Congo, à l'Est du Lualaba (le fleuve Congo), jusqu'en altitude dans les monts Mitumba, dans les provinces du Nord-Kivu, du Sud-Kivu et du Maniema.

La culture lega est donc à comprendre comme le modus vivendi comprenant la langue, les habitus alimentaires, la danse, l'agir, l'art et les connaissances et les croyances propres au peuple lega.

La culture se confond, dans ce sens, avec la tradition. Celle-ci peut être saisie d'abord en rapport avec le temps. Dans ce sens, elle désignerait ce qui est de l'ordre du passé, par opposition au présent et au futur. Il s'agirait de tout ce qui appartient à une époque révolue, et qui par conséquent, reflète une apparence dépassée.Par ailleurs, ce concept pourrait aussi être envisagé par rapport à la morale. Il aurait alors pour contenu, un ensemble des normes et des prescriptions destiné à la codification des attitudes et des comportements des individus dans une société donnée. Bien plus, l'usage du concept « tradition », on peut aussi entendre un état d'arriération qui se mesure au degré de la rusticité. On parlerait dans ce sens de l'état primitif pour ainsi dire, un état de développement encore rudimentaire. Lorsqu'elle est ainsi considérée, la tradition semble développer à l'égard de la modernité une relation pour le moins antinomique.

1.1.3. ULIMBA

Le mot « Ulimba » est un terme lega qui signifie « secret ». Étymologiquement parlant, « Ulimba » veut dire secret de la cohabitation, de la présence simultanée des communautés humaines d'origine familiale différente institution dans une entité par le pouvoir colonial pour être reconnue périodiquement et sociologiquement intégré.26(*)Ulimba est l'un des groupements du secteur de Beia dans le territoire de Pangi, dans la province du Maniema en République Démocratique du Congo.

1.1.4. LEGA

Le peule Lega est, comme dit précédemment,une population forestière bantoue d'Afrique centrale, établie principalement en République démocratique du Congo, à l'Est du Lualaba (le fleuve Congo), jusqu'en altitude dans les monts Mitumba, dans les provinces du Nord-Kivu, du Sud-Kivu et du Maniema.

C'est une communauté humaine située dans les territoires de Pangi, Shabunda, Mwenga et Walikale. Le terme lega, veut dire que « les hommes ».

1.1.5. MODERNITE

Caractère de ce qui est moderne.27(*)

Par le moderne, on comprend, ce qui convient au temps présent ou à une époque relativement récente ou ce qui est dans le goût moderne de notre temps ou époque. Du point de vue du temps, la modernité semble s'opposer au passé et au dépassé, pour s'identifier, au présent et à l'actuel. De plus, lorsqu'elle est envisagée du point de vue moral, elle s'opposerait à l'échelle des valeurs traditionnelles, généralement taxées d'obscurantisme. Du point de vue développement, la modernité correspondrait à un niveau de transformations scientifiques, marqué par une évolution technique très perfectionnée. C'est dire pourquoi au regard de ces trois critères, la modernité constituerait une rupture radicale par rapport à la tradition.

Pourtant, un regard plus attentif peut constater qu'entre ces deux notions, il existe également des points de convergences. Ce qui veut dire qu'au-delà des apparences, il n'est pas possible d'ériger entre elles une cloison étanche. Nous pouvons une fois de plus réaliser la complexité de ces deux notions à la lecture de cet ouvrage d'Antoine Compagnon : Les cinq paradoxes de la modernité28(*), dans lequel il entreprend de dénoncer entre autres la prétention de la nouveauté que revendique la modernité.

L'auteur parle notamment de la « superstition du nouveau », pour designer cette propension au changement qui caractérise la modernité et qui pousse très souvent au rejet de tout ce qui relève du passé pour ne considérer que l'actuel. Or l'expérience commune nous montre que ce qui est moderne aujourd'hui appartiendra au passé demain. De même, ce qui était relégué au passé peut ressurgir pour faire partie du présent. Aussi dans le domaine artistique, certains styles vestimentaires jadis dépassés reviennent-ils à la mode et sans aucune difficulté. Cet exemple montre à suffisance la légèreté d'une rupture radicale entre les termes tradition et modernité.

Actuellement la culture lega a tendance de tomber en désuétudes suite à son caractère contraignant à ses membres.Après avoir donné les définitions de concepts réformant notre sujet de recherche. Il est nécessaire de relever la présentation de notre milieu d'étude son cadre historique et géographique.

1.2. CADRE GEOGRAPHIQUE DU GROUPEMENT ULIMBA

a. Localisation et limite

Le groupement Ulimba est une entité politico-administrative située dans le secteur des BEIA en territoire de Pangi, dans la Province du Maniema en République démocratique du Congo. Il est limité :

v Au Nord par la rivière Lubilaza dans le Territoire de Kailo ;

v Au sud par la rivière Lutshurukuru dans le groupement Nsange;

v A l'Est par la rivière Songe en territoire de Shabunda ;

v A l'Ouest par la rivière Mili dans le groupement Jua.29(*)

b. Population

Le Groupement Ulimba est habité principalement par les balega. Mais cette population est devenue hétérogènes, c'est-à-dire elle comporte plusieurs tribus installées dans cette entité suite à la migration de travailleurs due à l'implantationdes sociétés SYMETAIN et COBELMIN dont la fusion avec d'autres sociétés dont la SOMINKI sur les ruines de laquelle d'autres sociétés comme la SOMICO et la SOMINKI ont vu le jour. De ce fait, dans ce groupement on trouve des populations d'origine rwandaise, burundaise, luba, Kusu, Songola, des Bangubangudont le mixage avec les autochtones lega a engendré un (fatras) culturel à l'origine d'une dynamique socioculturelle assez importante.

c. Economie et commerce

L'économie du groupement Ulimba est basée sur l'agriculture l'élevage, l'exploitation artisanale de minerais et commerce. Sur le plan agricole, on produit les riz, les maniocs, les arachides, les maïs, l'huile de palme,...

Pour ce quide l'élevage, les fermes domestiques des capucins, des porcins, des volailles font partie des activités zootechniques du groupement. Auxquelles, la pisciculture est aussi intensément pratiquée dans la quête des protéines animales.

Quant à l'exploitation artisanale des minerais, seuls la cassitérite et l'or en occupent le grand monopole

Le secteur du commerce subsiste tant bien que mal grâce au dynamisme des opérateurs économiques et à l'essor du secteur informel. A ce titre, nous trouvons des magasins, des boutiques et pharmacies, des comptoirs d'achats de minerais. En bref, le groupement Ulimba est le poumon économique du territoire de Pangi. Cependant, le gros des activités commerciales est tenu par les populations allochtones dont les shi, les yira, et les commerçants des produits vivriers en provenance de Kasongo et Kabambare.

Le groupement Ulimba dispose de plusieurs facteurs important pouvant relancer le secteur commercial.

En outre, les débouchés importants offrent des perspectives heureuses pour les activités économiques : la présence d'une route nationale reliant Kindu, Chef-lieu de la province du Maniema et Bukavu, chef-lieu de la province du Sud-Kivu ; deux Aérodromes abandonnés dont l'un à Kalima et l'autre à Moga (Ngongomeka), enfin pour le grand centre commercial érigé durant la période qui est situé à Kakutya chefferie dans la commune rurale de Kalima.

1.3. HISTORIQUE DU GROUPEMENT ULIMBA.

1.3.1. GENESE DES ENTITES TERRITORIALES EN RDC OU AU MANIEMA

La problématique des entités territoriales en RDC date de l'époque de l'Etat Indépendant du Congo (EIC). De 1888, précisément le décret Royal du IerAoût 1888 crée le district Stanley Falls.

A la suite de l'arrêté Royal du 25/09/1933 qui divisait le territoire Congolais en six provinces, le district du Maniema s'est vu détaché de la province orientale pour être annexé à la province du Kivu. Ainsi créé30(*), le district du Maniema comptait 7 territoires, Lubutu, Punia, Kibombo, Kasongo, Kabambare et Pangi. C'est la configuration actuelle de la Province du Maniema, l'une des 26 province de la RDC.

1.3.2. ORIGINE DU GROUPEMENT ULIMBA

L'histoire du Congo n'est pas forcement tributairede l'indépendance ni même de la colonisation Belge. Les groupes ethniques habitant dans les frontières de la République démocratique du Congoont une trajectoire bien remplie qu'ils trainent derrière eux d'autant plus que leurs ancêtres se sont installés sur cet espace, au début du premier millénaire de notre ère.

Pendant des siècles, ils ont assuré la maîtrise de l'environnement, façonné des grandes originalités et élaboré de systèmes politiques complexes qui ont produits des chefferies, des royaumes et Empire.31(*)

1.3.3. DENOMINATION DU GROUPEMENT ULIMBA

La dénomination du groupement Ulimba, en français, signifierait « Secret » cela veut dire que la conception du groupement Ulimba est tout à fait différentedecelle de ses voisins du groupement N'sange qui reconnaissent leur appartenance à un ancêtre commun. La répartition clanique du groupement Ulimba est établie selon l'origine des peuples :

· Le Clan Bausse, selon certaines sources, les Bausse seraient venus de secteur des Ikama dans le territoire de Pangi. Ses membresauraient fuit les conflits internes entre eux.

· Les peuples du Village KAKUTYA appartiennent au MEYA, d'origine SALU, l'un de groupement qui composent le secteur des Beia.

Ces peuples ont été chassés par leurs ancêtres à cause de l'inceste commise entre fille et garçon d'une même famille dans un contexte des familles à normes exogamiques.

· Le peuple du village formant le clan Gunga serait d'origine du territoire de Kailo.

Nous faisons remarquer que la forêt située entre Kankenge et la rivière Mili offre des garanties suffisantes pour la survie du groupement. L'on trouve de la sécurité alimentairesuffisante. Dans ces conditions, il s'y était produit au contraire une véritable explosion démographique avec ses voisins.

De 1908 à 1960, le Congo était une colonie Belge, il était subdivisé administrativement et placé sous les ordres des fonctionnaires Européens qui à leur tour le subdivisé en circonscription indigènes qui sont les chefferies. Les groupements et secteurs, avaient à leur tête de chefs reconnus et investies par eux pour le pouvoir colonial.

La notion de groupement est introduite par l'autorité coloniale Belge dont le but était le règlement des différentes révoltes politiques ou administratives entre les indigènes et les Belges.

Trois attributions réservées aux chefs furent le maintien de l'hygiène publique dans sa juridiction par des travaux d'entretien et nettoyage, la vie de miliciens et des militaires, fournitures de prestation imposée à la chefferie. C'est ainsi le groupement Ulimba sera créé par l'arrêté du 10 juin 1933 portant création des circonscriptions indigènes et dont ses actuelles limites géographiques.

Après les résistances de Nkenye, Milanga, chef Juwa et celle de Kangela, chef N'sange, l'administration coloniale avait réussi à créer, le groupement Ulimba, dont le peuple est composé en majorité de fuyards venus du groupement Nkumba Basoko, du secteur de Wasongola, dans le territoire de Kailo.

Le groupement comptera trois villages formant chacun sur un clan ; villages Bisamengo, comme le clan Bausse, village Koki, comme le clen Gunga et village Luzi Lukulu, comme le clan Meya.

1.4. CADRE JURIDIQUE ET ADMINISTRATIF

Comme nous l'avons souligné ci-dessus, le groupement Ulimba est une entité administrative créée par l'arrêté royale du 10 juin 1933, portant création des circonscriptions indigènes.

Dans sa structure, ce groupement était composé des trois clans : Bausse, Meya et Gungu, ces trois clans sont repartis en Village.

CHAPITRE II : REGLES ETABLIES DANS L'ORGANISATION DE LA SOCIETE LEGA

Dans le cadre de ce chapitre, nous tacherons d'élucider les points suivants : le mariage, le décès, la répartition des produits de chasse et l'élevage.

Les sages de la communauté lega avaient prévu un certain nombre de règles pour une bonne gestion de la société.

Très souvent, les oppositions sont visibles entre les individus, les groupes sur les points ci-hauts dans la société humaine.

C'est ainsi que, pour chaque cas, on observe les lois ou normes établies.

2.1. POUR LE MARIAGE

Selon Junior KyangulukaLumpempe32(*), Le mariage, chez les lega, est un acte social qui occupe une place de choix dans la société. Il est ressenti comme un devoir à remplir par tout parent envers sa progéniture. Car cet acte non seulement consacre à cette dernière le statut de responsable, mais ouvre la voie à une assurance sur la perpétuation de l'espèce familiale qui constitue le souci majeur pour les géniteurs. Le célibat est considéré comme une situation marginale. Chez les lega comme chez la plupart des peuples de la République démocratique du Congo, l'engagement des familles passe avant celui des individus appelés à s'unir. Le choix d'un futur conjoint opéré par une famille dans une autre famille s'appuie sur le critère de moralité et de fécondité. Il faut noter que la décision finale pour qu'un parent marie un fils est conditionnée par la capacité avérée de celui-ci à se prendre en charge. En général, un membre de famille (souvent le père ou l'oncle) du jeune homme que l'on veut marier se rend auprès de la familleciblée de la jeune fille pour demander la main de cette dernière. Une fois la demande acceptée, la période des fiançailles est ouverte. Le jeune pourra alors à sa guise se rendre au moment opportun en visite test auprès de la famille de sa fiancée. Cette visite est désignée sous le vocable « Itendia ». Tout se sera bien passé si la réception se termine par un repas comprenant un coq sur pied égorgé à cette occasion.

Le mariage dans la communauté lega est une institution très complexe, car elle a trop des règles et c'est la source de toutes les relations humaines sur la nature sociale.

Le mariage se définit comme étant une union légitime envisagée entre un homme et une femme ou plus d'une femme.33(*)

Cette institution couvrait assez de problèmes chez les Balega. Comme il a trop de problème, raison pour laquelle il a aussi trop de règles ou principes.

Les règles de la gestion de cette institution commence depuis la conception jusqu'au divorce. Pour le jeune garçon, avoir la capacité de construire une case, cultiver un champ, tuer les gibiers de la forêt moyennant les pièges et convaincre les parents de certaines capacités vitales à résoudre de situations survenues en rapport avec les épreuves de vie d'une société.34(*)

Dans la communauté lega le mariage est possible entre les membres des familles différentes cela revient à dire que le mariage endogamique est beaucoup plus préférentiel chez les Balega dans le but de consolider les liens claniques.

L'âge dans la communauté lega était facteur aléatoire, c'est-à-dire le facteur qui pouvait influencer ou définir le mariage.

2.1.2. DE LA VALEUR DOTALE

Comme institution, le mariage est un processus clairsemé de différentes étapes dont les principales sont décrites dans les pages qui suivent :

· La prédot (Kebengelela)

C'est une valeur variant selon la possibilité financière du groupement familial du jeune garçon. Mais la virginité de la jeune fille sévèrement observée, facteur influant la valeur dotale, d'une part lorsque la virginité est observée, la taxation de la valeur revient en deux parties une partie constituant les biens révolus à la maman et l'autre partie revient au père de la jeune fille vierge. D'autre part, elle donne la chance d'être plus valeureux que possible.

· La dot proprement dite (Kasala)

Dans la conception lega, la dot joue un rôle prépondérant dans la vie conjugale et aux membres de groupement et aussi aux enfants qui proviendront de ce mariage.

Lorsque le jeune garçon ou le groupement familial de celui-ci verse la dot à la famille de la jeune fille, plusieurs faits importants et symboles ressortiront.

D'abord ces deux groupements familiaux engagé dans le mariage, chacun gagnera la confiance de l'autre, cette confiance poussera la famille de la jeune fille de la remettre entre les mains de la famille du jeune garçon. Cette cérémonie est appelée accompagnement de la femme à son mariage.

Cérémonie qui s'en suit avec un certain nombre de matériel tels que casseroles, assiettes, paniers, voiles (bien de la cuisine) et une quantité de la nourriture cuite et non cuite y compris les poules et le coq, l'huile, le sel, bois,... comme signe symbolique visible marquant l'amour. Ensuite et en contrepartie de ces biens, le groupement familial du jeune garçon peut remettre à sa belle-famille des chèvres, ou boucs et la boisson.

Ensuitele respect mutuel devient contraignant entre les membres de ces deux groupements familiaux.35(*)

Dans la culture lega, la dot est une institution qui varie selon la possibilité financière des familles engagées et la circonstance à laquelle on se trouve, c'est-à-dire chez les Balega, la dot n'a pas de prix fixe et tout bien constitue la valeur dotale, parfois même des prestations entrent en ligne de compte.

Pour le mariage proprement dit, les deux familles se fixent un jour pour la cérémonie de la dot. La nomenclature des biens est communiquée à la belle famille et comprend obligatoirement :

1. Le « Musanga » : monnaie ancestrale constituée de pièces de coquilles d'escargot et d'huitres en forme rectangulaire ou circulaire percées de trous en leurs milieux et entassées autour d'un fils passant par ces trous.

2. Des billets de banque en monnaie nationale ;

3. Des caprinés (chèvres ou moutons sur pied) ;

4. Du matériel pour l'agriculture et la chasse : haches, machettes, houes, lances, fusil calibre 12 ;

5. Des habits : pagnes, foulards, pantalons, chemises, costumes.

Suivant la tradition, les lega se complaisent à n'établir aucune sorte de facture fixant le nombre des biens énumérés ci-dessus. Les quantités respectives à fournir constituent un test du degré d'amour du fiancé envers sa future conjointe. Ce degré est traduit par la hauteur des quantités de ces biens remis à la belle famille. Le jour choisi, la belle famille se rend auprès de la famille prétendante pour la cérémonie de mariage coutumier. Après un bref échange, la famille prétendanteétale et compte les biens. C'est en ce moment que la belle famille exprime sa satisfaction totale ou partielle sur la valeur de la dot. Dans ce dernier cas, la famille prétendantedéclare la quantité ou valeur minimale souhaitéepour un type bien donné et, généralement, si le prétendant ne peut y remédier, il recourt à l'expression : « Isongamuzinga, talikusilaga mu busibumozi ». C'est qui veut dire littéralement : « la dot est comparable à un trou béant à remblayer, on ne peut y parvenir en un jour ». Et, littéralement, «  la valeur significative de la dot est telle que qu'on ne peut s'en acquitter en une seule échéance ». En effet, au cours de sa vie professionnelle, l'époux est appelé à faire à ses beaux frères des dons à valoir sur la dot.

Aussitôt après, la belle famille emballe tous ces biens et rentre chez elle. Il n'y a aucune cérémonie de réjouissance organisée à cette occasion. La famille prétendante peut alors fixer le jour de sa convenance où la belle famille accompagnerait la jeune épouse au domicile de son mari.

2.2. POUR LE DEUIL ET LES RITES DE DEUIL

Tout homme est mortel. Le Mulega- peuple de l'Est de la RDC définit bien cette fatalité à travers un dicton traduit en français « personne ne vivra éternellement sur la terre ». Toutefois que la mort intervient, tout naturellement elle ne laisse pas indifférents les membres de la communauté dont faisait partie le défunt. Elle suscite sans nul doute la douleur, la souffrance ou l'angoisse chez les proches et les survivants. C'est la confirmation de l'origine du deuil, du latin « dol » signifiant souffrance, affliction. Comme Millet36(*) en fait état, le deuil se manifeste à la fois par les signes extérieurs de la souffrance ressentie, consacrés par l'usage (port de vêtements, normes de comportement), les pratiques et les rites accompagnant le décès (conduite de deuil) et la perte elle-même (deuil d'un membre de famille). Ngo NyembWisman37(*) écrit que les deuils sont des lieux d'expressions diverses, de rapports sociaux, de logiques de milieux et de représentations dont les deux moteurs sont les croyances et les pratiques locales séculaires. Le sens attribué au deuil décrit moins l'événementlui-même (dont le mot approprié est mort, décès, disparition ou perte) que la relation entre cette perte et une personne subissant le deuil, relation menant parfois à un véritable statut (être en deuil). Dans cette perspective, il est recommandable de lire notamment HanusBacque38(*) pour les termes utilisés en circonstance de deuil : grief au sens de tristesse douloureuse, mouning au sens de deuil social et Bereavment au sens de situation objective de deuil.

Il est vrai que l'organisation ou le déroulement du deuil varie selon les coutumes et les culturesdes peuples, comme le reconnait Ngo NyembWisman lorsqu'il écrit que les rites funéraires ne sont ni identiques, ni homogènes d'une société à l'autre et, d'autre part Millet qui souligne que l'état de deuil impose un comportement, des actes, des pratiques et rites selon des normes de la société et/ou du microcosme familial. Le Mulega, du reste comme tous les autres peuples, sont émus par le deuil. Ceci s'observe, se traduit ou s'exprime dans la symbolique, la sémiotique et les discours. Et, malgré le mixage culturel consécutif à la cohabitation et au voisinage avec les autres peuples ainsi que la modernité qui n'ont pas épargné l'édulcoration de la culture lega en matière de la mort et du deuil, il reste encore des éléments faisant la différence des rites de deuil et de mort chez les Lega.

Par rapport à la symbolique lega de la mort, la société lega fonde sa croyance cosmogonique sur une synergie des relations et des forces entre des êtres immortels, qui vivent dans un monde immatériel, invisible, et des êtres mortels, vivant dans un monde matériel, visible. Elle la fonde aussi sur une croyance que lega, chef de file du peuple Lega vivant dans le monde visible, vit pourtant à califourchon entre les deux mondes. Selon des récits mythiques Lega sur l'origine de la mort, la mort est un phénomène qui se vit comme un destin humain fixé par « Kalaga ou Kenkonga » en français « Dieu ». Ce dernier est, dans la cosmogonie Lega, reconnu comme la source de la vie et de la mort. Dans le monde invisible où vit Kalaga vivent également les esprits, donc des esprits divinisés, de dimension tribale. Ce sont de grands esprits et ils sont comme tels à cause de leur valeur historico-sociale. Ils continuent à être en relation avec leurs familles.

Ensuite dans le monde invisible se trouvent aussi les esprits claniques. Chaque clan a son esprit protecteur. Il s'agit des ancêtres de clans ou leurs fondateurs. Ils sont invoqués pour les besoins de chaque clan. Enfin, viennent les Mizimu. Il s'agit d'un ensemble des mânes des ancêtres de famille auréolés par Kenkonga : ils le sont en raison forcement des biens dominants qu'ils ont réalisés pendant leur séjour dans le monde visible. C'est dans cette perspective que les esprits, les Mizimu ne sont pas neutres. De temps à autre, ils viennent dans leurs familles humaines et partagent leurs repas, quoique de façon symbolique. Ils sont au courant des événements familiaux et y prennent intérêt. Lorsqu'ils apparaissent, en général aux personnes âgées, ils sont reconnus par leurs noms comme tel ; ils s'informent des affaires de la famille et parfois même avertissent un danger imminent ou réprimandent ceux qui n'ont pas obéi à leurs instructions. Ce sont eux les gardiens de la tradition, de l'éthique, de la coutumeet des activités familiales. Toute faute commise dans l'un de ces domaines est en fin de compte une faute commise contre les ancêtres qui, en cette qualité, agissent comme la police invisible de la famille et de la communauté. En revanche, les morts qui ont passé leur vie dans le monde visible à faire du mal sont déchus par Kalaga lorsqu'ils passent dans le monde invisible, se contentant de nuire aux humains dans le monde visible. Ces deux cas, celui d'élévation au rang d'ancêtres auréolés ou d'ancêtres déchus, laissent apparaitre au grand jour que, dans le monde invisible, les morts récoltent ce qu'ils ont semé comme bien ou mal pendant leur séjour terrestre. Les hommes vivent dans le monde visible et sont condamnés à mourir et personne ne peut y échapper. La mort est en tout cas la seule voie possible pour passer du monde visible au monde invisible. C'est ainsi que lorsque quelqu'un meurt, pour le Mulega c'est une continuité de la vie dans l'au-delà, car en mourant, seul le corps périt et disparait.

Les concepts de deuil et rite, quoiqu'apparemment familiers, ne signifient pas forcement et exactement ce que le commun des mortels en sait. Albert de Surgy39(*) rapporte : « le mot de deuil désigne aussi bien le douloureux désarroide celui qui vient de perdre un des ses proches que, de façon plus objective, l'ensemble des mesures par lesquelles la société en prend acte et dirige l'expression ». Pour Millet, le deuil n'est que la réaction des hommes devant la disparition d'un être cher ou d'un membre du groupe. Au regard de ces définitions, le deuil se présente à la fois comme un phénomène social, psychologique ou un état d'esprit et un événement social. Toutefois, la définition de Bourgeois40(*) semble plus précise. Pour lui, le « deuil désigne tout à la fois la perte d'un parent, d'un proche, d'un être cher et la tristesse profonde causée par ce malheur, ainsi que du temps de deuil, ses manifestations extérieures et ses rituels, et le processus psychologique évolutif consécutif ou au travail du deuil ».

Cette définition donne une idée sur les différentes manifestations du deuil. En fait, trois conditions s'imposent avant de parler véritablement du deuil. Primo, nous sommes en deuil, chaque fois qu'un parent proche disparait et les réactions qui s'en suivent en fonction des normes ou traditions sociales, devant cette perte. Secundo, « nous portons le deuil », dès l'instant que la perte de l'êtreprécieux est manifestée à travers quelques signes distinctifs diversifiés qui ont la particularité de se distinguer d'un groupe à un autre, voir d'un cadre culturel à un autre. Il peut s'agir d'un changement vestimentaire et stylistique catégorique (pour du noir, coiffure spéciale par exemple), du saupoudrage du visage et de la charpente corporelle, du silence imposé, d'une retraite momentanée. Tertio, « nous faisons le deuil » dès que nous reconnaissons le décès et décidons de mettre en oeuvre un ensemble des moyens matériels et symboliques nécessaires pour faciliter la rupture afin de retrouver le goûtde vivre.

C'est ce moment déterminant de la vie de l'individu appelé le jargon psychanalytique, et même anthropologique, « le travail de deuil »41(*).En effet, comme le plus souvent le deuil appelle à l'observance de certains rites, il est alors important de savoir également ce que c'est qu'un rite.Le rite (du latin ritus) est un terme qui, dans son acception originelle, signifie : forme légale, usage, habitude, coutume, moeurs, manière, usage sacré, formes religieuses, etc.

Il renvoie aussi à ritualis, adjectif et substantif masculin que l'on peut traduire par : qui concerne les rites et les rituels. Mais, en fait, pour avoir une idée exacte de l'action rituelle, il est nécessaire de se référer à l'anthropologie qui, plus que toute autre discipline des sciences humaines, s'est intéressée davantage au rite, au profane et/ou au sacré, ponctuant la vie de l'individu depuis la naissance jusqu'à la mort et même au-delà42(*).Thomas pense que « le rite invente la mise en scène qui déplace le centre de gravité des funérailles de la personne du mort et des deuilleurs affligés vers la collectivité rassemblée. L'attention est peu à peu détournée de la mort réelle, inacceptable dans sa dimension individuelle et affective, pour se hisser au plan symbolique où la mort annonce un surplus de vie qui va renforcer la cohésion du groupe ».

Pour le Mulega ordinaire, le rituel varie selon qu'il s'agit d'un homme marié, d'une femme mariée, d'un adulte célibataire ou d'un enfant. Pour toutes ces catégories, les rites s'étalent de l'annonce, la toilette du cadavre, l'enterrement, la levée de deuil, la purification et les indemnisations.

La mort comme un fait naturel à tout être humain. Dans la culture lega, toute mort aune cause, soit la sorcellerie qui s'explique par les accidents occasionnés, modification morphologique de membres ou longue maladie, l'imprudence des membres. Ce qui revient à dire que pendant la grossesse, le vagabondage sexuel est interdit entre la femme et son époux et certain aliments pour la protection de la femme et de l'enfant durant l'accouchement, une fois les règles sont violées, si la mort intervient un groupement familial sera inquiété.

Plusieurs cas de morts se présentent chez les Balega, à chaque cas convient sa manière de traitement lors d'indemnisation. En général, ce sont les oncles maternels qui sont bénéficiaires de l'indemnisation à l'occasion du décès de leur neveu. La remise des biens matériels et symboliques, est, en grande partie systématiquement prévus par la tradition Lega. Un éventail des cas se présente. Parmi ces cas on cite :

· Cas du décès situé entre la naissance jusqu'à l'apparition des dents (Kalenge), la coutume lega avait pris des dispositions suivantes :

- Pas de pleur

- L'indemnisation est nulle

- L'enterrement de la dépouille mortelle se fait par les sages-femmes

- Toutes les cérémonies de deuil ne sont pas obligatoires, d'autres cas de même espèce s'ajoutent et rentrent dans la catégorie des décès non indemnisables. Il s'agit :

- D'un albinos, militaire mort en guerre, épileptique,....

· Du premier mort survenu au sein de la famille, il peut être l'aîné, le premier né ou le puiné. Dans ce cas, la valeur de biens prévus pour l'indemnisation se donne en partie. Ce genre du traitement chez lesBalega est souvent comme cas exceptionnel ou particulier.

· Pour le cas général, c'est-à-dire qui respecte toutes les dispositions établies par la coutume lega, cas concernant les hommes et femmes adultes et valides, dotées de toutes les qualités physiques et mentales, la tradition et les rites funéraires lega ont prévu des étapes à suivre de l'annonce à l'enterrement de la dépouille mortelle jusqu'à l'étape des indemnisations.

· L'indemnisation d'une femme mariée : le bénéficier en titre principal est le groupement familial du père de la défunte, les autres membres attachés au cadavre sont des bénéficiaires secondaires.

D'après les informations en notre possession, la cérémonie d'indemnisation de cadavre se fait en deux grandes étapes que les balega intitulent MIBULOBULO (première partie) et IDEGO (la seconde partie). Cette dernière est plus spécifique et coûteuse que la première.

DU RITE DE DEUIL APPELE  « MIBULOBULO »

Le Mibulobulo est la ration ou la pitance à offrir à tous ceux qui considéraient le défunt comme leur neveu ou proche. Un adage lega traduit bien cette pratique funéraire : « zamisongazikuliagabaringi banzela», Parce que, selon Véronique MatemngoTonle43(*), la mort d'un individu suscite, chez ses proches, prioritairement ceux qui lui sont liés par la filiation, la collatéralité et l'affinité, un ensemble de cérémonies. Désigné par le terme deuil, cet ensemble de cérémonies se manifeste de façons diverses selon les cultures. Si en occident, le deuil tend à être comme un fait privé, en Afrique au sud du Sahara, il est perçu comme une entreprise collective mobilisant de nombreux individus en vue de sa réalisation.En plus des membres de la parenté, le deuil rassemble d'autres individus prévenus et disponibles, tels les voisins du lieu de résidencedu défunt comme ceux du lieu de l'enterrement, des membres des diverses associations auxquelles il adhérait, ses amis.

Le Mibulobulo est donc, selon SumailiDunia44(*), un repas d'adieu et de deuil. Il faut dire que le Mulega ne considère pas ce qui est servi à la fin des allocutions comme repas en raison, notamment, du fait que cette nourriture est un repas de deuil. Elle est prise non pas dans une circonstance heureuse, mais plutôt malheureuse. Toutefois, cette nourriture était servie traditionnellement en nature. Cette pitance alimentaire, assure, pensait-on, le bon voyage du défunt dans l'au-delà et permet de réconforter les différents liens entre les survivants. Au cours de ce repas, en particulier, et de toutes les cérémonies, en général, ce sont les gendres du clan éprouvé qui constituent la colonne vertébrale du service de protocole. De manière générale, les gens sont protocolairement rangés selon l'ordre de préséance suivant : les neveux(Bangubangu), les parentèles à blague (batani), les veilleurs, les gendres et les voisins (bilongo) et les autres citoyens. Le Mibulobulo est, en substance, constitué de l'ibangansinda, du mbembe, d'une chèvre, d'une corbeille d'arachides, d'un panier de paddy ou de farine de manioc, d'une bouteille d'huile, d'un paquet de sel, un régime de banane (mutengowigoma). Cette pitance se donne sans délai notamment après les trois jours de deuil.

LE RITE INDEMNISATOIRE D'IDEGO

Comme dit précédemment à l'introduction de cette étude, l'idegoest constitué, en fait, des biens ou redevances que la famille paternelle du défunt paye à la famille maternelle. Il peut s'agir d'un enfant qui meurt, dans ce cas son père est redevable de l'idego auprès des oncles de son fils (sa belle-famille). Il peut également s'agir d'une épouse et dans ce cas d'espèce, c'est son mari éploré qui doit verser l'indemnité funéraire de l'Idego. Ça concernerait également un homme adulte qui meurt. Dans ce cas, sa famille élargie doit verser son indemnité funéraire à ses oncles.

Son sens est de resserrer davantage les liens familiaux et de perpétuer le lien du mariage. L'Idego est généralement et invariablement constitué d'une chèvre (Kiburikyampene), du Musanga (100 unités de cauris ou coquillage) ou Magana mabele ma mosanga(2000 FC), du byomamorobakamo, de l'Isuusimwanakunina(pièce de pagne en raphia) et les redevances corporelles et les outils de travail jadis utilisés par le défunt.

Ordinairement, cette dernière partie de ces redevances compensatoires varie selon les sexes des défunts. Ainsi, pour l'homme adulte et valide, l'ensemble des biens suivants doivent également faire partie de la composition de l'Idego : le Minkwankete( deux ossements du dentier de la chèvre), le Munkinini( deux parties du tronc), le Buntonto( le cervelet ou la moelle épinière), l'Isumo( la lance), le Mugusu(la machette), le Mwene( couteau) et le nsago( le sacoche traditionnel). Par contre pour la femme, le byoma (métal), le luzi( panier ) et le Mwene.

La redevanceindemnisatoire de l'Idegobénéficie en premier lieu à la parentèle du défunt alors que la pitance alimentaire dite Mibulobulo est une manne collective bénéficiant à tous les deuilleurs présents ou aux neveux du défunt ainsi qu'à tous les passants. Les bénéficiaires de la pitance alimentaire dite « Mibulobulo » sont les petits-fils et arrières-petits fils du défunt. Ils sont appelés en dialecte lega « Basawakalanga ». Les neveux également en sont bénéficiaires ou les membres de certaines tribus qui ont un quelconque lien avec les Lega, comme les Bangubangu, considérés comme les descendants de la soeur des Lega, appeléeNgalia. A ceux-ci, le Mibulobulo est constituée d'une poule, d'une vanne de paddy ou de farine de manioc, d'une bouteille d'huile et un colis de sel. Le Bangubangu, par contre, payent aux Lega, en cas de décès d'un Mubangubangu les biens suivants : un bouc, unbassin de paddy ou de farine de manioc et un colis du sel.

La chèvre (Kiburikyampene) constitutive de la redevance de l'idego est d'une importance capitale. En fait, cette chèvre n'est pas destinée à la consommation mais plutôt à l'élevage de sorte que si elle parvient à avoir des chevreaux, ceux-ci serviront de dot pour le mariage d'un jeune, membre de la famille maternelle du défunt. Et, le nouveau marié à l'aide de la chèvre de Maliba, en cas de procréation, est soumis à l'obligation de donner au nouveau-né le nom du défunt pour assurer, croit-on, la perpétuation de ce dernier. C'est pourquoi un adage lega illustre bien cette croyance en ces termes : « Muntuntende, ikolo », c'est qui voudrait dire littéralement que l'homme ne meurt pas, c'est un rejet de l'igname. Il ne disparait pas complètement, il faut qu'il se réincarne au sein de la famille. Par ailleurs, le bouc du Misonga ou Mibulobulo est égorgé immédiatement alors que la chèvre de Maliba est élevée pour la pérennisation du nom du défunt.

L'idego joue également le rôle de resserrement des liens familiaux que le vide créé par la mort allait détruire ou affaiblir. Un proverbe lega l'illustre très bien en ces termes : « bukutibwamubuto » (révérence à la fraternité) ou « kubulunganiamubuto »(ne pas s'acquitter de l'idego équivaut à la destruction des liens familiaux). L'Idegorecèleégalement deux facettes (idegoenankundumabele) :

1. IBANGO (La manière dont vous mangez)

C'est la convention implicite de payement de l'Idego. Le barza lega a fixé le mode de payement pour le décès ordinaire.

2. KUBAKAMIA IBANGO

C'est en fait faire flamber les redevances de l'idego au-delà de la convention ordinaire du payement en tenant compte de la nature du décès survenu : décès survenu à la suite d'un assassinat à l'aide d'une lance ; mort survenu à la suite des coups et blessures ainsi qu'une mort subite due au gri-gri. La tristesse profonde provoquée par un tel décès modifie les modalités de payement de la redevance de l'Idego. C'est une mort volontairement provoquée qui angoisse toute la communauté. Le proverbe lega « witabubi, walegabusoga » (si tu tues mal, tu dois bien payer) traduit bien cette réalité.

A la fin du rite de l'Idego, le Ntendi(porte-parole) est payé au même titre que tous ceux qui ont un quelconque lien avec le défunt(Bilongo). Ces derniers sont payés car ils sont témoins et conseillers de la famille qui paye la redevance. Jadis, le non payement de l'Idego provoquait des affrontements à l'arme blanche débouchant au versement du sang. Certains décès dérogeaient exceptionnellement au rite de l'Idego : la mort d'un bébé (kazwa), mort par enflement du ventre, le décès d'un fou (musile), décès d'une femme enceinte (mpita, mpinde), mort par auto-pendaison (kwikama), mort d'épilepsie (luungu), la mort d'un soldat au front (wakwaku bita) et la mort d'un albinos (kyema). Ces derniers cas de décès ne font pas l'objet de l'Idego parce que les intéressés n'ont rien légué à la famille. Cependant, si un de ces cas de décès survient, un bouc doit être offert et égorgé pour le repas entre les deux familles éprouvées. Cette cérémonie s'appelle simplement « Kisabululu ». Si le destin a fait du défunt un homme riche, la valeur de sa redevance d'idego prend de l'ascenseur. Mais par contre, si c'était un indigent, sa redevance d'idego reste tout ordinaire. Comme le propose l'objet de cette étude, il sied de noter que les indemnisations funéraires ne sont plus versées ou payées comme elles l'étaient dans les temps immémoriaux. Des édulcorations de ces rites funéraires sont tangiblement observées. L'argent a remplacé les cauris dans le payement des Misonga. De même, la monnaie a remplacé certains biens matériels de l'Idego.

Pour terminer, chez le peuple Lega, l'Idego n'est pas une institution si vieille que ça. Les légendes de ce peuple le font remonter au deuil d'une épouse dont l'époux a été tellement rongé par le chagrin de la mort de sa femme bien aimée qu'il a jugé opportun de repartir son patrimoine en deux parties. Une partie a été offerte à sa belle-famille et l'autre partie, a été donnée à sa propre famille. Il a renoué et retissé les liens et l'amour avec sa belle-famille. Cette reprise des relations aurait incité sa belle-famille à lui donner la main d'une autre jeune femme. C'est pourquoi, il nous est convenable de déduire que la signification profonde de l'Idego est de consolider l'amour et combler le vide béat provoqué par la mort et recréer la paix dans les deux familles éprouvées. L'Idego est une communion entre les deux familles éplorées afin d'éviter et d'amortir le sentiment de haine.

2.3. POUR LE REGLEMENT DES CONFLITS INTER CLANIQUE

La résolution traditionnelle dans l'espace lega, depuis les siècles qui ont précédé la civilisation arabo-islamique et plus récemment malgré l'apport de la civilisation occidentale, s'est toujours effectuée sur les règles endogènes des traditions lega. Les valeurs qui s'attachent au dialogue, à la tolérance, l'hospitalité et à la non-violence sont les fondements des traditions lega. Les réunions des chefs des familles et les gardiens de coutume(Bami) dans le barza ou sous l'arbre à palabre, font encore aujourd'hui, office de tribunal local, dont souvent les décisions sont plus suivies que celles des autorités administratives et judiciaires. Ceci s'explique par le fait que les dites décisionsémanent des villageois eux-mêmes ; parce qu'au conseil du village, tout le monde occupe, selon son statut, le même rang. Sont généralement admis comme conflits dans les traditions lega, les conflits intrafamiliaux caractérisés par les irréductibles antagonismes entre les enfants d'un même père. D'autre part, de nos jours d'autres formes de conflits sont apparues : entre les particuliers et les villages. Ce sont des litiges concernant les contestations foncières, les litiges d'héritage et matrimoniaux qui sont les plus répandus dans les zones rurales.

Selon Squire Patton Boggs45(*), la tradition s'est plus appesantie sur la prévention que sur la résolution du conflit ouvert. Du coup la recherche de la paix reposait sur les principes suivants : on cherchait à prévenir les conflits par des canaux de régulation sociale ou par des actions de médiation ou de communication. En effet, il est constant que les traditions lega ont plutôt une approche dynamique, communautariste et humaniste, fondée sur la solidarité et, permettez-moi le barbarisme, l'  « unisme-humain », car ce sont les mots les plus appropriés pour rendre fidèlement les mécanismes et règles qui permettent à l'homme de considérer son prochain comme lui-même (alter ego) et est différent du concept d'égalité et de fraternité à l'occidentale. Du dit concept, découlent tous les mécanismes de prévention et de résolution de conflit dans l'espace lega, qui diffère selon la communauté ou les entités organisées dont voici les principaux. Dans les rapports au sein d'un village, le chef de village ainsi que les dépositaires de la coutume sont les autorités morales qui tranchent les litiges et conflits qui arrivent dans leurs limites territoriales. C'est seulement en cas de non-satisfaction que les populations font recours aux tribunaux. Lesdits litiges et conflits sont de tous genres (matrimonial, partage successoral, fonciers, réclamation de créances, vols, querelles, ...). Les sociétés Lega à la base sont claniques. Pour les parties, les alliances constituent l'espoir de prévenir les conflits et de maintenir l'entente sociale ; c'est une sorte de contrat social pour la paix.

· Le mariage inter clanique ou inter entités et la polygamie forment des liens de sang qui réduisent les risques de conflits ;

· Le « cousinage à plaisanterie », « alliance à plaisanterie » ou même « fraternité à plaisanterie vexatoire ».

Ici, on utilise des plaisanteries ou dérisions entre alliés, très souvent injurieuses et ridiculisantes, permettant de décrisper les rapports. La méthode donne à l'allié tous les pouvoirs de dire sans détour ni ménagements à l'autre allié tout ce que bon lui semble. En cas de conflit le « frère à plaisanterie » peut user du pacte qui le lie à son frère pour lui faire entendre raison et le pacifier. La fraternité à plaisanterie peut contribuer à prévenir et à endiguer un conflit dans les sociétés traditionnelles. La médiation est dévolue aux anciens car nous sommes dans les sociétés gérontocratiques où les plus vieux bénéficient d'une immunité et sont entendus en toutes situations et cela est encore d'actualité dans l'Urega. Dans les rapports inter communautés, nous retrouvons également les alliances matrimoniales.

Comme nous l'avons signifié au point précèdent, le mariage est une institution très importante, source à la fois de relation et des problèmes. Ceci revient à dire que, le mariage de par son caractère unificateur, la coutume lega est très sévère pour faire respecter cette union.D'où entre les membres de deux groupements familiaux engagés au mariage, c'est la relation d'évitement qui doit être observée, c'est-à-dire tout membre de la famille du groupement familial du garçon doit éviter tout cas de manquement à la belle-famille. Tout geste de manque de respect est appelée « Tabou » (Kitampo), simple ou complexe, sa réparation exige un bouc ou son équivalent au bénéfice de la belle-famille. Les manquements réparables de cette façon sont du genre d'injure, coups et blessures,... et le non-respect peut être la cause de divorce. D'autre part, pour le côté de la famille ou groupement familial du garçon comme bénéficiaire ou prévue d'être réparée.On prévoit la poule ou le coq ou son équivalent. La remise se fait sans délais.

Pour le cas de l'oncle et son neveu, si l'oncle a manqué son neveu, l'oeuf, la poule ou le coq peut réparer le préjudice.

Bref, le produit d'élevage chez les balega est principalement prévu pour les règlements de différents conflits de toute nature et genre qu'ils soient de façon secondaire. La viande de bétail est consommée à des grandes circonstances ou cérémonies telles que la fête de naissance, de nouvel an ainsi que l'arrivée d'un visiteur de marque.

2.4. POUR LES PRODUITS D'ELEVAGE ET DE LA CHASSE

Les produits d'élevage, pour les balega, est consacré au règlement des conflits survenus entre les membres vivant en société. La chèvre ou le bouc est d'une valeur très considérable au même titre que l'homme. Dans le langage lega « mpenemonto », c'est-à-dire « la chèvre a une même valeur que l'homme ou la personne ».La présence de la chèvre devant n' importe quel problème ou conflit donne solution à ce propos.46(*)

La chèvre de son vivant les particules de son corps sont bien réparties entre les membres de la famille et même pour tout autre animal.

Lorsqu'on égorge une chèvre, la répartition de la viande se fait de la manière suivante

- La tête est réservée pour les enfants de l'âge de la préadolescence ;

- Les entrailles pour le père, grand père

- Les reins pour les neveux (Mpigo) ;

- La hanche pour les oncles maternels ou la maman.

Quand il s'agit d'une bête sauvage, la première bête attrapée aux pièges, le piégeur n'a pas droit de consommer cet animal. Cet animal est considéré comme sacrilège, même les femmes n'ont pas droit d'y consommer, sous prétexte de biaiser l'évolution de l'activité.

Il y a une série de bêtes dont son traitement et sa consommation est spéciale telles que :

- Le serpent

- La tortue

- Le clairon

- La salamandre

- Les pangolins, surtout le grand pangolin qui exige de rituel coutumier très particulier.

2.5. QUELQUES PROVERBES EDUCATIFS CHEZ LES BALEGA

Par manque d'expérience sur l'intervention de l'écriture afin d'écrire pour informer la génération future, le mulega a conservé toute sa sagesse dans la tradition orale à travers laquelle, il a édicté des règles éducatives.

Voici quelques proverbes lega couramment utilisés :

v BwakwisongaBwakwitantiukolola, c'est-à-dire le gendre ne peut pas reprocher aucun membre de la belle-famille.

v Mwanabwatowabubazabukakaluga, c'est-à-dire l'enfant est comparable à une pirogue, vous l'avez enfanté, il vous viendra en aide ou assistance

v Kamukazinsagazakikuko na molongontakajajelamugo ; qui signifie, la femme est comparable à un balai qui nettoien'importe où.

v Bwana zobe misakontanambanibwe, c'est-à-dire à chacun convient son comportement, très souvent il faut éviter d'imiter les mauvais comportements.

v Ute na mokoloekampumbantizikazima, c'est-à-dire, quand on n'a pas de conseiller, on réussit dans la vie difficilement.

Dans ce deuxième chapitre qui a porté sur les règles sociales d'usage dans l'espace lega, il a été question de passer en revue les prescrits en vigueur lors du mariage, du règlement des conflits, des rites d'indemnisation funéraire et de répartition des produits d'élevage ou de chasse. Les différents témoignages nous livrés par des personnes-ressources ont révélé de véritables mines d'informations qui font la richesse et la complexité de la culture et des traditions Lega dans les différents secteurs de la vie du peuple Lega.

CHAPITRE III :FACTEURS MODERNES A PROBLEME AVEC LA CULTURE LEGA

Dans ce troisième chapitre, nous allons analyser les facteurs modernes tels que l'église, l'institution juridique, la Musique et danses, le mariage, le barza et la morale comme éléments de la culture lega en opposition avec la modernité. Mais avant de toucher le vif du sujet, il est important d'aborder la socio-dynamique subie par le rite funéraire d'Idego.

En fait, actuellement, la modernité traduite par l'industrialisation, l'urbanisation, le christianisme, le mixage culturel et la mondialisation ont affecté tous les secteurs de la vie des sociétés exotiques. Le changement des mentalitésest devenu une nouvelle donne sociale en opposition avec la coutume traditionnelle en place.

Comme la modernité constitue une force sociale, le groupement Ulimba, la culture lega est édulcorée par elle. Cettesocio-dynamique fait à ce que la culture lega soit déséquilibrée.

La modernité est le véhicule de la mondialisation. D'après ce nouveau concept forgé et valorisé par les chercheurs du moment, les valeurs traditionnelles de la société Lega sont remises en question sous différentes formes. Cette nouvelle idéologie a embrassé tous les facteurs de la vie d'une société. Elle soulève l'épineuse question de l'antagonisme entre la tradition et la modernité : ruptures et continuités.

III.1. LA SOCIO-DYNAMIQUE SUBIE PAR LES RITES FUNERAIRES D'IDEGO

Dans cette section, nous décortiquons les ruptures imposées à la tradition funéraire d'Idego par la modernité. Mais avant nous y présentons le processus méthodologique que nous avons emprunté pour aboutir aux résultats.

III.1. PROCESSUS METHODOLOGIQUE

La population d'enquête, l'échantillon ainsi que les instruments de récolte des données sont décrits dans cette section.

III.1.1 Population et échantillon.

De la population d'étude, mentionnons qu'elle est constituée de l'ensemble des populations du groupement ulimba, membres des différents villages qui composent ce groupement ainsi que de certains témoins privilégiés (Tendi et Bami) au cours des années 2016-2020.

En effet, tenant compte de la nature quelque peu délicate de la question que nous nous sommes proposé de débattre à savoir, le phénomène de la confrontation entre les valeurs culturelles Lega et la modernité, il s'est révélé difficile d'asseoir notre enquête sur une base de sondage, particulièrement pour deux raisons. D'abord, les familles au sein desquelles notre enquête a été menée disposent plus des listes de membres de famille non exhaustives - du reste moins détaillées et incomplètes - que celles nominales. Ensuite, la carence des listes de membres transfuges nous a entraînés à une enquête sélective personnelle des transfuges parmi les membres des différentes familles.

C'est pourquoi, nous avons dû adopter un échantillonnage à choix raisonné, c'est-à-dire du type non probabiliste de soixante unités. Deux caractéristiques ont été retenues à savoir, le sexe et la profession.

Tableau 1. Répartition de l'échantillon d'après le sexe.

Sexes

F

%

Masculin

45

75

Féminin

15

25

TOTAL

60

100

Source:notreenquête.

Légende:

F:Fréquences

%:Pourcentage

A la lumière de ce tableau, il se dégage que notre échantillon comprend 45 sujets sur 60 soit 75% des sujets de sexe masculin contre 15 sujets sur 60 soit 25% de sexe féminin.

Cet écart, s'explique notamment par une participation accrue des hommes par rapport aux femmes aux enquêtes scientifiques et par une réticence des femmes auxenquêtes scientifiques.

Tableau 2 : Répartition de l'échantillon d'après la profession.

EMPLOIS

F

%

Employés

19

31,6

Indépendants

02

3,4

Sans emplois

39

65

TOTAL

60

100

Source : notre enquête.

Légende :

F : Fréquences

% :Pourcentage

Employés :

Dans cette catégorie, figurent notamment ceux qui travaillent sous statut ou sous contrat : les salariés privés ou de l'Etat.

Indépendants :

Cette catégorie rassemble ceux qui exercent des professions qui ne les lient à un tiers ni par un statut ni par un contrat (commerçants, artistes, artisans)

Sans emplois :

Cette catégorie réunit en son sein, tous nos enquêtés qui n'ont pas d'emploi spécifique. C'est la tranche des chômeurs, des débrouillards, paysans et d'étudiants.

Comme l'indique le tableau 2, notre échantillon comprend sur soixante unités, trente neuf sans emploi soit 65%, deux indépendants sur 60 soit 3,4 % et 19 employés soit 31,6 %.

Cet écart est justifié par le taux de chômage élevé au sein de la population à l'âge de travailler et par le faible taux des travailleurs indépendants

III.1.2. Instruments de récolte et de traitement des données.

Outre les données puisées de la documentation disponible relative à notre objet d'étude, il sied de faire remarquer le rôle combien important joué par la technique d'entretien structuré dans la récolte des données portant sur les opinions relatives aux socio-dynamiques causéespar la modernité sur les traditions lega.

En effet, notre guide d'entretien comporte sept questions dont quatre sont ouvertes et trois à éventail des réponses.

Quant au traitement des données, nous nous sommes bornés à faire usage de la statistique élémentaire, tenant compte de nos limites en ce domaine.

Concrètement, notre effort a consisté en la quantification des opinions en termes des fréquences et en la transformation de ces derniers en pourcentages. Ceux-ci ont reçu la dénomination générique de taux qui nous servirons pour désigner telle ou telle autre opinion qualifiée.

Ceci dit, passons à présent à la seconde section consacrée à l'analyse des résultats sur la confrontation entre les valeurs culturelles lega confrontées a la modernité

III.2. VALEURS CULTURELLES LEGA CONFRONTEES A LA MODERNITE

Sous cette section, nous étalons et examinons les différents changements apportés par les éléments de la modernité sur les traditions lega en général et les indemnités funéraires en particulier.

L'analyse nous a cependant été rendue aisée par les questions que nous avons posées au cours de notre enquête. Ces questions dégagent les différents thèmes d'analyse des critères d'adhésion. Il s'agit des thèmes ci-après:

- Le phénomène d'idego dans le groupement Ulimba ;

- Les continuités et ruptures de l'indemnité funéraire d'Idego

Tableau 3 : spécification des thèmes d'analyse et questions y relatives

THEMES

QUESTIONS

NOMBRES

01

Le phénomèned'idego

01

01

02

Les ruptures et continuités d'Idego

3 et 4

02

Source : notre enquête.

Le tableau ci-dessus présente de façon synoptique les différents thèmes autour desquels s'articule la deuxième section de ce chapitre et les questions y correspondantes respectivement et le nombre de celles-ci.

En effet, le premier thème est la certification du phénomène d'Idego dans le groupement Ulimba. L'appréhension de ce thème est rendue possible par les réponses des enquêtés à la question n° 1.

Le deuxième thème se rapporte aux ruptures et continuités d'Idego dans le groupement Ulimba. L'appréhension de ces fait est rendue possible grâce aux réponses de nos enquêtés aux questions 3 et 4.

III.2.1. L'INDEMNISATION FUNERAIRE DE L'IDEGO

L'Idego est une rédevabilité traditionnelle lega liée à celle dela mort. Cherchant à nous enquérir de la nouménalité de ce devoir d'indemnisation, il nous a fallu tout d'abord démontrer la réalité de ceux-ci. Ainsi, nous avons dû poser la question suivante : vous êtes du groupement Ulimba ? De quel village ? Avez-vous déjà connu un décès dans votre famille ? Vous vous êtes soumis au payement d'Idego ?

Tableau 4 : Réponses des enquêtés par village d'origine.

Villages

F

%

Kakutyachefferie.

12

20

Kalema.

12

20

Mungembe

12

20

Kimbiambia

12

20

Luzilukulu

12

20

TOTAL

60

100

Source : notre enquête.

A la lecture de ce tableau, il ressort que tous nos enquêtés appartiennent aux différents villages du groupement Ulimba en raison de 12 par village sur 60 soit 20 % pour chaque village repris dans le tableau.

Au-delà de la péréquation des sujets par village et de la démonstration de la consubstantialité d'idego et de la mort, ce tableau révèle aussi que l'idego existe bel et bien dans ce groupement et que les membres de ces villages en ont déjà été soit bénéficiaires soit redevables d'Idego, directement ou indirectement.

La réalité de l'existence d'Idego dans le groupement Ulimba introduit son revers : ses ruptures. Plus nombreux sont les originaires du groupement Ulimba qui ont déjà vécu l'Idego, moins sont ceux qui saventles changements que celui-ci a subi au fil des ans. Ceux qui ne le savent pas constituent la catégorie des conservateurs négationnistes qui, évitent la reconnaissance des changements des coutumes. Par contre, les adhérents aux changements culturels sont ouverts et acceptent les innovations. Ils veulent proclamer au grand jour leurs identités culturelles hybrides et mixées.

Les activités funéraires et notamment celles d'indemnisationd'Idegoles sont parce que « tous ont besoin de croire à une cause simple et de vibrer en écoutant aux valeurs. Tous ont un goût extrême pour une vision du monde »47(*)

Au fait, les valeurs culturelles sontla vision du monde auxquels croient les membres d'une communauté constituent, comme nous allons le constater, les causes et les facteurs de l'adhésibilitéaux rites.

III.2.2. les ruptures et continuités du rite indemnisatoire d'Idego

A travers ce point, sont décrits les changements que les traditions pourtant séculaires subissent quand elles se confrontent à la modernité.

Ainsi, nous avons posé la question suivante : quelles sont les évolutions que le rite d'Idego a subies dans votre milieu de vie ?

Tableau 5 : Opinions des enquêtés sur les évolutions de l'Idego

REPONSES

Kakutyachefferie.

Kalema

Mungembe

Kimbiambia

Luzilukulu

TOTAL

F

%

F

%

F

%

F

%

F

%

F

%

1) la disparution

1

8,3

-

-

2

16,7

-

-

1

8,3

4

6.6

2) la privatisation

2

16,7

3

25

3

25

1

8,3

1

8,3

10

16.7

3la desymbolisation

1

8,3

1

8,3

-

-

-

-

2

16,7

4

6.7

4) la desocialisation

1

8,3

1

8,3

2

16,6

3

25

-

-

7

11.7

5) la fragilisation

3

25

3

25

2

16,7

4

33,3

3

25

15

25

6) les substitutions

4

33,4

4

33,4

3

25

4

33,4

5

41,7

20

33.3

TOTAL

12

100

12

100

12

100

12

100

12

100

60

100

Source: notre enquête.

Comme l'indique ce tableau, les modifications subies par le rite funéraire de l'Idego dans le groupement ulimba sont les substitutions, la fragilisation, la privatisation, la desymbolisation, la desocialisation ainsi que le risque de disparition.

A la lumière de ce tableau, il ressort que les enquêtés reconnaissent que l'Idego a subi des nombreuses substitutions: 20 sujets sur 60 soit 33,3 % ; D'autres ont certifié qu'il a été fragilisé : 15 sujets sur 60 soit 25% de nos enquêtés ; une autre catégorie d'enquêtés estime que l'Idego a été privatisé : 10 sujets sur 60 soit 16,7 % de nos enquêtés.

Une autre frange affirme que ce rite d'indemnisation funéraire a connu une desocialisation : 7 sujets sur 60 soit 11,7%. D'autres enfin, attestent que l'idego a été desymbolisé : 4 sujets sur 60 soit 6,6% de nos enquêtés.

III.2.2.1. les substitutions de l'idego face à la modernité.

Comme dit dans les lignes précédentes, l'Idego est en fait payé en nature.L'Idego est généralement et invariablement constitué d'une chèvre (Kiburikyampene), du Musanga (100 unités de cauris ou coquillage) ou Magana mabele ma mosanga(2000 FC), du byomamorobakamo, de l'Isuusimwanakunina(pièce de pagne en raphia) et les redevances corporelles et les outils de travail jadis utilisés par le défunt. Cependant, avec l'apparition de la monnaie en pièce ou en billet de banque, l'idego est également soumis à l'obole de Charon. En effet, selon Katerina Chryssanthaki-Nagle48(*), le placement de la monnaie dans la bouche dudefunt49(*) pour l'accompagner lors de son voyage vers le royaume d'Hadès figure parmi les rites funéraires les plus connus du monde grec. Cette pratique monétaire dans le contexte funéraire a été mise en rapport avec le mythe de Charon. Le vieux Nocher avait pour mission de transporter sur sa barque les âmes qu'Hermès lui amenait. Pour les conduire au monde des morts, Charon leur faisait traverser soit le fleuve Styx ou Achéron, soit le lac Archérousia, pour la somme d'une obole. Ainsi, l'utilisation de la monnaie pour remplacer le troc dans les transactions commerciales et sociales a rendu obsolètes les anciennes et traditionnelles unités monétaires de l'espace Lega. Subséquemment, le Musanga, le mbembe, le byoma et l'Isuusi ont été carrément remplacés par de la valeur monétaire. Donc, si la substance de l'Idego n'est pas encore ici touchée mais ses artifices et supports matériels ont été touchés dans leur intégrité.

III.2.2.2. La fragilisation de l'Idego dans le groupement Ulimba

La conservation et la sécularisation de la tradition à laquelle fait partie le rite funéraire de l'Idegotient également à l'existence des institutions traditionnelles de préservation comme le barza tenue par les dépositaires de la coutume Lega ainsi qu'à la résilience du droit coutumier en concurrence avec le droit positif moderne. Or, depuis quelques années, suite à l'envahissement des chefferies traditionnelles par les superstructures modernes (c'est le cas notamment du groupement Ulimba qui est supplanté par la commune rurale de Kalima), les institutions traditionnelles chargées de la conservation des cultures des sociétés exotiques sont, si pas remplacées par les institutions modernes mais écornées par elles. Ainsi par exemple, les tribunaux coutumiers devant lesquels un insolvable de l'idego devait être déféré ont été supprimés et remplacés par les tribunaux de paix, matériellement incompétents pour connaitre des litiges coutumiers. Il en est de même des barza traditionnels qui n'ont pas d'imperium coercitif pour faire appliquer les résolutions arrêtées par les dépositaires de la coutume. Ainsi, l'Idego dont le payement fut obligatoire il y a quelques années, est laissé au bon vouloir et aux sottes humeurs des individus. Le respect des délais impartis pour le payement de l'Idego en pâtissentégalement. Le payement de l'Idego n'est plus sûr aujourd'hui à cause de l'obsolescence des institutions d'application. L'Idego est instabilisé.

III.2.2.3. Les desocialisation et privatisation de l'Idego face à la modernité.

Le rite indemnisatoire et funéraire de l'Idego a été privatisé. D'abord parce que les individus et familles ont de plus en plus d'occasion de personnaliser l'IDEGO pour tenir compte de l'individu visé par ces rites, de ses dernières volontés, de sa vie, de ses croyances ou de sa non croyance, des liens qu'il a établi avec son entourage et avec sa communauté. Mais privatisation également dans le sens où les rites sont moins qu'avant l'occasion d'un large rassemblement communautaire quasi obligatoire ou automatique. Ces rites dépendent plutôt de la volonté personnelle de l'individu que du principe selon lequel les faits sociaux seraient totaux, globaux et impératifs. Nombreux sont aujourd'hui les testaments ou les dernières volontés des de cujus qui refusent que leur mort fasse l'objet de l'Idego, le considérant comme un rite paganiste et rétrograde.

L'idego a été également désocialisé aussi dans la mesure où ce rite funéraire qui, on le voit à la lecture des paragraphes précédents, perdent progressivement leur capacité de rassemblement pour faire l'événement de la mort une occasion de renouer les liens sociaux devant ce mystère et son pouvoir de néantisation. C'est le contraire qu'on observe : simplification importante de ce qui subsiste des rites, funérailles réunissant de faibles foules, endeuillés abandonnés socialement au lendemain des funérailles. L'Idego est devenu une affaire de groupuscule, une cérémonie non flamboyante concernant la lignée directe du défunt et excluant des grands pans des descendants et frères lointains à cause de la nucléarisation de la famille imposée par l'urbanisation et l'individualisme occidental. Jadis affaire de la famille élargie, l'Idego est devenue la charge de la famille restreinte et du statut du défunt.

III. 2.2.4. Le risque de disparition de l'idego

Jadis, nous avions des rites réparateurs de séparation et de deuil : les parents, amis, voisins, venaient veiller le mort et lui dire au revoir. Il y avait les vêtements noirs, les fleurs et les couronnes, des cérémonies de tout genre, les prières, les adieux, l'enterrement. On faisait l'éloge du défunt. Il y avait les visites, les lettres de condoléances et de remerciements, la sortie du deuil et la messe d'anniversaire. Il y avait aussi, juste après la cérémonie mortuaire, des repas conviviaux au cours desquels la vie sociale reprenait. Boire et manger ensemble étaient un rite d'union, quelle qu'en soit l'occasion. On parlait du disparu, on se souvenait des bons moments passés ensemble. Ce temps de convivialité pouvait être un repas en famille, une simple collation chez soi, dans un restaurant ou café, près du cimetière. C'était un moment important, ressourçant, afin de ne pas repartir seul avec des tristes pensées. La convivialité, le fait d'être ensemble, entourée d'êtres qui nous aiment, peut soulager la tension de l'adieu et apporter un certain réconfort. Dans l'ensemble, ces rites que l'on retrouvait dans les sociétés traditionnelles, ne sont plus intégralement pratiqués de nos jours. Il y a de plus en plus des deuils non faits qui se sont accumulés au fil du temps. De même, certains rites consubstantiels à la mort et au deuil courent le risque de disparaitre. C'est le cas de l'Idego qui de plus en plus est considéré d'anabaptiste par certaines religions et inutilement onéreux dans une société où la théorie de la rationalité (coût-avantage) forge les comportements des individus et des sociétés.

III.3. FACTEURS DE RUPTURE DE L'IDEGO FACE A LA MODERNITE

Loin de disparaitre complètement, le rite funéraire de l'idego connait des variations, de l'usure, des amputations, bref des ruptures qui, même si elles ne touchent pas à sa substance mais modifient progressivement ses artifices. Ces modifications sont liées à certains facteurs comme les églises chrétiennes, les institutions judiciaires, la musique et la danse, le mariage et le barza.

3.3.1. LE CHRISTIANISME ET SES EGLISES

Comme une société religieuse fondée par Jésus Christ, l'église chrétienne se targue d'avoir reçu la mission évangélique d'amener les hommes à la vie éternelle, par la recherche de vie, les familles se divisent. Certaines doctrines et prédications de l'église chrétienne sont en contradiction flagrante avec les cultures et les cosmogonies des sociétés exotiques qu'elles jugent de satanistes et paganistes.

D'après nos observations sur le terrain, nous constatons, nous avons constaté que la solidarité clanique diminue et que la cohabitation entre les membres du même clan jadis cimentée par les pratiques et les croyances magico religieuses, devient très difficile. Les prophéties comme mode opératoire pour exorciser les communautés traditionnelles dont les membres seraient des sorciers jeteurs des mauvais sorts, les méthodes de conversion et de conviction basée sur les guérisons-miracles impactent négativement la tradition lega.

3.3.2. LES INSTITUTIONS JUDICIAIRES

Parler des institutions juridiques et judiciaires, revient à désigner l'ensemble des lois édictées par l'Etat qui renvoient en seconde zone les traditions, la coutume lega, les us et coutumes lega dans le groupement Ulimba. Des pratiques coutumières telles la circoncision, les cérémonies sont presque attaquées par la loi comme on le dit souvent « toute coutume contraire à la loi doit être abrogée », alors que la coutume devrait être parmi les premières sources de la loi écrite50(*)Dans cette philosophie le droit positif devrait respecter l'institution car c'est d'elle qu'elle a eu son essence. L'exemple du conflit entre la coutume et la loi se trouve dans le code de la famille congolaise. Alors que le mariage est soumis au consentement de deux familles dans la coutume, la loi congolaise le fonde sur le consentement des conjoints. Même si les parents n'y ont pas consenti, les tourtereaux peuvent sur décision du juge, contourner le refus des parents.

La coutume lega dans le groupement Ulimba est prise en otage par les institutions juridiques modernes. Tous les biens traditionnels relevant de la faune et de la flore, du relief et de l'hydrographie tels que les rivières, les forêts, les espèces animales et végétales sont soit domanialisés soit répertoriés dans la catégorie d'espèce en voie de disparition faisant partie soit du patrimoine national ou mondial échappant aux populations riveraines à tel point que les ayants droits ne bénéficient d'aucun avantage. Alors que les autres groupements des secteurs gardent encore leur valeur traditionnelle.

3.3.3. MUSIQUE ET DANSE

La musique et la danse, dans la tradition lega,sont les arts expressifs et ludiques qui se pratiquent selon les circonstances heureuses ou dramatiques.Les instruments musicaux utilisés servaient à la fois comme des outils artistiques mais aussi parfois comme moyens de communication.

Le Mokembe qui se jouait lors des circonstances sociales telles que lors du contrat de mariage, ou des manifestations festives ou funéraires est aujourd'hui pris de vitesse par les musiques urbaines comme le rap, le slow, le rock, le reggae, le swing et les variétés musicales étrangères.La musique et la danse traditionnelles lega sont remplacées par des cantiques religieuses, de râpes qui se chantent à des langues très diverses.Ces différentes langues utilisées concourent au dépérissement du dialecte lega.

3.4. LE MARIAGE

Le mariage est un fait social qui est universel, quelle que soit la pluralité des peuples et des cultures, il a toujours gardé sa nature de la communauté humaine qui le pratique suivant plusieurs objectifs, entre autres :

ð La solidification des relations traditionnelles ;

ð Le soutien à la famille,

ð l'entraide mutuelle entre les familles de deux conjoints,

ð la procréation ;

ð l'intégrité morale et psychologique

Le mariage comme une institution socioculturelle varie d'une société à l'autre. Dans la communauté des Balega du groupement Ulimba, plusieurs mimétismes modifient lesétapes traditionnelles du mariage. Ces mimétismes dénaturent l'institution traditionnelle du mariage.Mais aujourd'hui confronté à la multi culturalité des sociétés modernes porteuses des crises d'adaptation et de mutation diverses, le mariage culturel chez les Balega est sujet de controverses provoquant plusieurs conséquences ;

On peut signaler ;

- difficile accès à la demande de la valeur dotale fixée par la famille de la jeune fille, cela est à la base d'instabilité dans la vie conjugale, qui précipite le divorce.

- Le manque de respect entre les partenaires à l'égard de leurs familles ;

- L'infidélité à outrance de deux partenaires encouragés par les parents qui en tirent profit,

- Les enfants sacrifiés suite aux désaccords des parents.

Le matérialisme capitaliste a pris le pas sur l'amour, l'affection et le dénuement sur lesquels étaient bâtis les mariages traditionnels qui, adossés sur des fondements immatériels, étaient cachés à l'abri des convoitises et le consumérisme qu'imposent l'urbanisation et la modernité.

3.5. LE BARZA

Le barza constituait également chez balega :

ð Le lieu de la transmission de la culture ;

ð Le lieu de protection des orphelins et vieillards ;

ð Le lieu de prise de repos,

ð Le lieu de rassemblement de famille

Tous les éléments cités ci-haut ont tendance à disparaitre chez les balega du groupement Ulimba et surtout que ces peuples s'accommodent à toute influence culturelle étrangère.

Dans ce troisième chapitre relatif aux facteurs modernes à problème avec la culture lega, il a d'abord été question de présenter le processus méthodologique de collecte et de traitement des données. Il s'est ensuite agi d'aborder la socio dynamique de l'Idego dans le groupement Ulimba et enfin, il a été décortiqué les facteurs à la base des modifications de l'institution Idego.

CONCLUSION GENERALE

Nous voici au terme de notre recherche dont le sujet a porté sur la « problématique de la culture lega face à la modernité dans le groupement Ulimba, mythe ou réalité. Cas de l'Idego de 2015 à 2021 ». Le sujet est né du perpétuel constat de la confrontation entre la tradition et la modernité : rupture ou continuité. Eu égard à ce dualisme apparemment contradictoire, nous nous sommes posé les questions suivantes, en guise de problématique :

· Quels seraient les apports de la modernité face aux rites funéraires dont l'Idego dans le groupement Ulimba ?

· Quelles seraient les survivances traditionnelles dans les rites indemnisatoires de l'Idego dans le groupement de l'Ulimba ?

· Quels seraient les mécanismes conservateurs des traditions funéraires face à la dynamique sociale moderne ?

Pour repodre provisoirement à ces questions, en termes d'hypothèses, nous avons présumé que :

- Loin de disparaitre, l'urbanisation, l'industrialisation et le métissage culturel auraient imposé la substitution, la fragilisation, la personnalisation, désymbolisation et la désocialisation au rite funéraire de l'Idego;

- Au delà du changement de ses outils de payement et de sa fragilisation, l'Idego aurait gardé sa quiddité dont sa symbolique, ses parties et son caractère indémnisatoire ;

- Les mécanismes conservateurs de traditions funéraires seraient le renforcement de trois piliers culturels lega.

Pour vérifier ces hypothèses, nous avons fait recours à la fois aux méthodes dialectique, historique et comparative, lesquelles ont été appuyées par les techniques d'observation, d'interview, documentaire et statistique.Après nos enquêtes sur terrain, nous sommes aboutis aux résultats suivants :

· l'Idego a subi des nombreuses substitutions: 20 sujets sur 60 soit 33,3 % ;

· D'autres ont certifié qu'il a été fragilisé : 15 sujets sur 60 soit 25% de nos enquêtés ;

· une autre catégorie d'enquêtés estime que l'Idego a été privatisé : 10 sujets sur 60 soit 16,7 % de nos enquêtés.

· Une autre frange affirme que ce rite d'indemnisation funéraire a connu une desocialisation : 7 sujets sur 60 soit 11,7%.

· D'autres enfin, attestent que l'idego a été desymbolisé : 4 sujets sur 60 soit 6,6% de nos enquêtés. Eu égard à tous ces résultats, nous osons affirmer que nos hypothèses ont été confirmées, toute proportion gardée.

Par rapport aux mécanismes de perpétuation des traditions positives lega, il nous a été donné de suggérer ce qui suit :

Q Aux autorités politico-administratives de faire appliquer et respecter la culture lega aux cérémonies qui mettent en scène la coutume ;

Q A la jeunesse lega du groupement Ulimba de revivre de nouveau la culture par sa mise en pratique et d'éviter toutes valeurs modernes en contradiction avec la culture lega,

Nous n'avons pas la prétention d'avoir épuisé toutes connaissances sur la culture lega. C'est pourquoi, nous exhortons d'autres chercheurs de nous compléter en orientant cette recherche sur d'autres pistes de recherche scientifique.

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ANNEXES

1. LISTE DES PERSONNES ENQUETES

NOM ET POST-NOM

SEXE

EMPLOI

OBSERVATION

1

KikuniSumaili

M

Cultivateur

 

2

SalumuKalokwa

M

Historien

 

3

KisambalaKakusenywa

M

cultivateur

 

4

Thomas Muloba

M

Cultivateur

 

5

KitanguIbonga

M

sculpteur

 

6

Mampetawabasa

M

Sociologue(Professeur)

 

7

Kakutya Jacques

M

Cultivateur

 

8

Kisanga Joseph

M

Cultivateur

 

9

Munyangi Jérôme

M

Cultivateur

 

10

KisombaMulonga

M

Cultivateur

 

11

Kalobya Donatien

M

Cultivateur

 

12

Masangu Joseph

M

Cultivateur

 

13

NguwaConstatin

M

Cultivateur

 

14

Shindano Justin

M

Cultivateur

 

15

Fataki Justin

M

Cultivateur

 

16

Mukengwa Pascal

M

Cultivateur

 

17

Kilomba Jacques

M

Cultivateur

 

18

Kataleka Gilbert

M

Cultivateur

 

19

Mambo Jean

M

Cultivateur

 

20

Kikomba Charles

M

Cultivateur

 

21

Yaye Justin

M

Cultivateur

 

22

Lukusa Manda

M

Cultivateur

 

23

Mulala Jérôme

M

Cultivateur

 

24

Kindingili Jean

M

Cultivateur

 

25

Kasangania Marc

M

Cultivateur

 

26

Lusolo Jean

M

Cultivateur

 

27

Moise Kilali

M

Cultivateur

 

28

Musimbi Dieu

M

Cultivateur

 

29

Kalumba Jean

M

Cultivateur

 

30

Masandi Jean

M

Cultivateur

 

31

Ngoma Christophe

M

Cultivateur

 

32

Salumu Norbert

M

Cultivateur

 

33

Mandombela Jules

M

Cultivateur

 

34

Kulwakusangila Roger

M

Cultivateur

 

35

Mobenga Jean

M

Cultivateur

 

36

Lutongo Jean

M

Cultivateur

 

37

Wakengela Moise

M

Cultivateur

 

38

Wamora Damas

M

Cultivateur

 

39

Kilegalega Evariste

M

Avocat

 

40

FatumaByanumba

F

Commerçante

 

41

Salubezya Marie

F

Femme de ménage

 

43

Nyota Lubango

F

Paysanne

 

44

Mapenzilohata Esther

F

Infirmière

 

45

BilemboNyabigano

F

Enseignante

 

46

AnyasiFeza

F

Paysanne

 

47

Kakutya Bernard

M

Orpailleur

 

48

Kalema

M

Chef coutumier

 

49

Masumbuko Benoit

M

Cultivateur

 

50

Kilolo Doudou

M

Cultivateur

 

51

Maloani Jean

M

Cultivateur

 

52

Mamboleo Kita

M

Creuseur artisanal

 

53

KikuniDalas

M

Cultivateur

 

54

Wangabo Yuma

M

Négociant

 

55

Masumbuko Benoit

M

Cultivateur

 

56

MauwaKatimba

F

Commerçante

 

57

MwayumaBilembo

F

Institutrice

 

58

Yohalisiti

F

Couturière

 

59

Wabigwajosée

F

Commerçante

 

60

Samaju joseph

M

Chasseur

 
 
 
 
 
 

2. Carte administrative du groupement Ulimba

* 1 Martin HEIDEGGERS, Etre et temps, Paris, Gallimard, 1964, pp. 459-160

* 2 Le peuple Lega, in fr.wikipedia.org

* 3Le Bwali ou Bwale est l'initiation chez les Balega pour lesquels la circoncision de la chair n'avait aucune valeur juridique. Il crée encore une hiérarchie sociale exclusive entre le Mukuli(Maitre d'initiation chez Kimbilikiti, le Mutende(l'initié), le Mugunda(profane) et le Musuli(incirconcis ou non initié)

* 4 Charles Bilembo, Praeterrerumordinem. Regard sur ma vie, Editions du Pangolin, Kinshasa, 2013, p. 14

* 5 Dans son roman « entre les eaux », Yves Valentin Mudimbe démontre l'ambigüité de l'Africain. Un prêtre (Abbé Nlandu), un intellectuel occidentalisé découvre l'ambigüité de sa situation. Si par fidélité au message évangélique, il renie l'église, son adhésion aux thèses marxiste-léninistes n'est encore qu'une fuite, un tourment et un terrible échec.

* 6 BOULANGER et BALLEGUIER, cités par A. MULUMBATI NGASHA, Manuel de sociologie générale, Lubumbashi, Edition Africa, 1980, pp. 20-21.

* 7 Célestin Kaffo, ChapgangNoubactep, Judith Cynthia AkambaBekono et Hervé Tchekote, «  Les cérémonies funéraires à l'Ouest-Cameroun », Géographie et cultures, 110/1, 13-32

* 8 Jacques Barrou et Roger Navarro, Rites funéraires et figures de la mort en Afrique et en Occident, in « Ethnologie française », 2007/HS (vol. 37), pp. 83-87 ;

* 9 Jean Cuisenier, Mémoire des Carpates. La Roumanie millénaire, un regard intérieur, Plon, Terre humaine, 2000, p.48

* 10 Luc Bussieres, Rites funèbres et sciences humaines : synthèse et hypothèses, Nouvelles perspectives en sciences sociales, vol.3, n°3, 2007, pp 161- 139

* 11Louis-Vincent Thomas, Les chairs de la mort, Paris, Institut d'édition Sanofi-Synthélabo, 2000, p. 161 ;

* 12Louis-Vincent Thomas, La Mort, Paris, PUF, 2003, pp 102-106 ; Rites de mort. Pour la paix des vivants

* 13Luce Des Aulniers, « Rites d'aujourd'hui et de toujours », Frontières, Variations sur le rite, vol.10, n°2, hiver 1998, pp. 3-6 ;

* 14 Kouassi Kouakou, la mort en Afrique. Entre tradition et modernité, dans Etudes sur la mort, 2005/2, (n° 120), pp. 145-149

* 15 T. RONGERE cite par TABEZI PENEMAGU, Méthodologies en sciences sociales, cours inédit, ISP/Kalima, 2003.

* 16 PINTO et GRAWITZ, Méthodes de recherche en sciences sociales, Dalloz, 4eme Edition, Paris, 1971, p.10.

* 17 PINTO et GRAWITZ, op.cit.

* 18POLITZER ;Principes élémentaires de philosophie, paris, éd, sociale, 1975 p.156.

* 19 J. MASUDI, Méthodes de recherche en sciences sociales, cours inédits, G2 DECO, UML/Kalima, 2014-2015

* 20 NGA NDONGO V., l'opinion camerounaise, Tome I, Problématique de l'opinion en Afrique noire, Thèse de doctorat d'Etat en sociologie, Université de Paris X-Nanterre, 1999.

* 21Quivy et Campenhoudt, Manuel de recherche en sciences sociales, Dalloz, Paris, 1988, p. 85

* 22VARHAEGEN B, sources et méthodes de l'histoire immédiate, cahier d'actualité, juillet 195, pp 30-31

* 23 GEORGES DEFOUR, Méthodes de recherche en sciences sociales BANA BUKAVU, 1994. P.34

* 24MAMPETA WABASA, Etude des cultures et sociétés Africaines cours inédit G2 HSS, ISP-Kalima 2017-2018

* 25 Idem

* 26KITANGU IBONGA JEAN BATISTE Alias Acheké, informateur interrogé à Kalima

* 27 ANONYME, petit la rousse illustré, edlarousse, paris 2009 P, 666

* 28Antoine Compagnon, Les cinq paradoxes de la modernité, Paris, Edition du Seuil, 1990

* 29 Rapport annuel du groupement Ulimba 2016, 2017 p3

* 30 Jean-OMASOMBO TSHOMBA etalii, Maniema, espace et vie. Éd. le cri Tervuren 2011 p 59

* 31 NDAYWELL, la rébellion de 1964 au Congo, Dalloz, Paris, 1967

* 32Junior KyangulukaLumpempe, les rites d'investitures d'un chef coutumier comme espace communicationnel chez les lega du territoire de Shabunda en RDC, TFC, UPN, 2011-2012.

* 33SALUMU KALOKWA, Droit coutumier, cours inédit en G3 HSS, ISP-Kalima, 2021

* 34KIKUNI SUMAILI, Informateur Interrogé à Kakutya le 10/07/2021

* 35KISAMBALA, Informateur interrogé à Kakutya chefferie le 15/07/2021.

* 36 P. Millet, « Le deuil », Université de Franche-Comté, Québec, 2006, p.14

* 37 M-C Ngo NyembWisman, les rites funéraires dans la tribu Bassa au Cameroun: entre tradition et modernité, Université Catholique de Louvain La Neuve, Faculté des sciences économiques et politiques, unité de sciences politiques et sociales (sd)

* 38 M. Hanus et M-F Bacque, cités par Millet, Ed Laroche, Paris, 1998

* 39Albert de Surgy(1989) cité par C-A Angoué, « le retrait de deuil : déconstruction du système de don et contre-don dans les patrilignages du Nord et Nord-est du Gabon, in Annales de l'Université Omar Bongo, n°11, 2005, p. 266

* 40 M. L Bourgeois, Le deuil, clinique et pathologie, Paris, PUF, 1996 ;

* 41 L-V. Thomas, Rites de mort, Paris, Fayard, 1985, p.71

* 42L-V. Thomas, La mort africaine, Paris, Payot, 1982, p. 248

* 43Véronique MatemngoTonle, Gestion des conflits dans le deuil au prisme des négociations, transactions sociales et compromis : le cas du deuil d'un roturier chez les Bamileké de l'Ouest du Cameroun, Thèse doctorale, Sociologie et Ethnologie, Université de Strasbourg, 2017.

* 44SumailiDunia, la mort et le deuil chez les bavira,  in Etudes africaines, n° 212, 2015, p. 24

* 45 Squire Patton Boggs, Afrique : Résolution traditionnelle des conflits au Mali, Droit international et comparé-droit communautaire, Juin 2008, p. 20

* 46THOMAS MULOBA, informateur intérrogé à Kakutya chefferie le 15/07/2021.

* 47 Alain DUHAMEL, le complexe d'Astérix, le monde actuel, Gallimard, Paris, 1985, p. 21

* 48 Katerina Chryssanthaki-Nagle, l'obole de Charon. Les données archéologiques de la Grèce du Nord, Archéologie et systèmes d'information

* 49 Selon Aristophane(Les guêpes : 608-609 : l'assemblée des femmes : 817-819), la pratique de placer de la menue monnaie dans la bouche pour la transporter était également utilisée par les Grecs de leur vivant.

* 50KALOKWA A, droit civil des biens et des personnes, cours inédit en G2 HSS, ISP-Kalima, 2019-2020






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