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Institut d'études politiques de Lyon
Master 1 AlterEurope
Séminaire « Politique et environnement :
causes, controverses, mobilisations »
Guillaume LEMONNIER
Etat d'avancement portant sur :
Le renouvellement du journalisme environnemental au prisme de
la décroissance
Sous la direction de Stéphane CADIOU
2019-2020
Rappel du droit d'auteur
L'étudiant qui rédige un mémoire ou une
thèse en est considéré comme l'auteur unique par la
jurisprudence et par la loi (notamment le Code de propriété
intellectuelle, article L112-2). Il est donc totalement protégé
par le droit d'auteur. Il est donc indispensable d'obtenir de l'auteur du
mémoire une autorisation de diffusion.
Remerciements
Je tiens à remercier toutes les personnes qui m'ont
aider pour ce travail. J'aimerai remercier en premier lieu Monsieur
Stéphane Cadiou qui m'a guidé dans ma recherche durant cette
année universitaire. J'aimerai également remercier la revue
Silence et le journal La Décroissance de m'avoir
accordé un peu de leur temps. Enfin j'aimerai particulièrement
remercier ma mère pour les différentes relectures de ce travail
de recherche.
Déclaration anti-plagiat
1. Je déclare que ce travail ne peut être
suspecteì de plagiat. Il constitue l'aboutissement d'un travail
personnel.
2. A ce titre, les citations sont identifiables (utilisation
des guillemets lorsque la pensée d'un auteur autre que moi est reprise
de manière littérale).
3. L'ensemble des sources (écrits, images) qui ont
alimenteì ma réflexion sont clairement
référencées selon les règles bibliographiques
préconisées.
Nom : LEMONNIER
Prénom : GUILLAUME
Date : 19 juillet 2020
Table des matières
Introduction :
1
Cadre théorique :
7
Méthodologie :
11
I. La
décroissance, un courant « obus » qui frappe les
esprits mais qui peine à s'unifier
14
A) Un concept qui
s'impose progressivement dans le champ du militantisme écologique
14
B) Une critique
radicale pour peser sur l'écologie politique
16
C) Un courant qui
n'est autre qu'une galaxie hétérogène
18
II. Être
journaliste et militant décroissant : un dilemme ou une solution
pour la cause écologique ?
22
A) La construction
d'une légitimité alternative pour sortir de ce dilemme
22
1. Déconstruire le récit du
mythe journalistique
22
2. Le combat
« anti-pub », un référent symbolique et
légitimant dans le milieu écologique
24
B) Une tension plus
ou moins persistante en fonction des individus et des milieux
26
1. Journaliste professionnel, engagé,
militant ?
26
2. Quelques éléments de
comparaison avec le journalisme agricole
30
C) Un rapport aux
sources d'informations favorisant un modèle participatif et
pluraliste
31
Conclusion :
35
Bibliographie :
37
Annexes
44
Annexe entretiens
64
Abréviations :
ZAD : Zone à défendre
EELV : parti Europe Ecologie Les Verts
PPLD : Parti pour la décroissance
GPA : Gestation pour autrui
PMA : Procréation
médicalement assisté
OVNI : Objet volant non identifié
Introduction :
Né à partir de luttes écologiques
fondatrices dans les années 1970, le journalisme environnemental
connaît depuis quelques années un renouveau avec
l'avènement de nouveaux acteurs se revendiquant de la
décroissance et renouant avec des registres discursifs plus
politisés et militants.Ce regain de militantisme au sein du journalisme
environnemental fait suite à toute une période de digestion
institutionnelle de l'écologie. En effet, depuis la disparition de
journaux qui structuraient la lutte écologique comme La Gueule
Ouverte ou Sauvage, faute de ressources économiques et
d'audimat, nous avions assisté à deux processus. Un processus
d'institutionnalisation de l'écologie au sein du champ politique avec la
création du parti écologique Les Verts en 1984 et au sein du
champ journalistique. Cela se modélise notamment par la création
de l'Association des journalistes pour l'Environnement en 1994, avec comme
condition d'adhésion, de disposer d'une carte de presse. C'est à
partir de ce moment qu'on assiste à l'institutionnalisation de la cause
environnementale au sein du journalisme classique avec l'apparition des
premières rubriques « environnement » au sein des
grands quotidiens nationaux. Maiscette institutionnalisation a eu pour
conséquence un second processus, un processus de dépolitisation
du journalisme environnemental. En effet, selon Jean-Baptiste Comby1(*), cette
institutionnalisation« tend à gommer progressivement les
dispositions politiques ». L'écologie comme combat politique va
dès lors se transformer pendant un temps en « éco-conseil
» vis-à-vis du grand public.
Par ailleurs, bien que « le mouvement
écologiste ne désignait plus seulement un groupe de barbus
utopistes »2(*) et
que la crise écologique « n'existait plus seulement dans la
tête des écologistes »3(*), la sphère militante écologiste renoue
depuis une dizaine d'années avec une radicalité qui la
caractérisait autrefois. Cette radicalité s'exprime à la
fois dans des actions (la ZAD de Notre-Dame-des-Landes) et à la fois
dans des discours comme ceux des partisans de la décroissance. C'est sur
ce deuxième aspect que notre recherche va porter, car comme l'a
montré Damien Zavrsnik4(*), « le «mot obus« de
décroissance re-politise la question environnementale qui s'était
dernièrement banalisée et questionne les valeurs qui sous-tendent
un véritable projet de société
écologique ». L'enjeu de ce travail de recherche est donc
d'évaluer l'influence des discours décroissants dans
l'écologie politique et le journalisme environnemental mais aussi de
dresser un portrait des journalistes décroissants que j'ai pu
interroger.
Cadre
théorique :
Avant d'entamer la lecture de ce travail de recherche, il
convient de préciser de quoi nous parlons afin de ne pas faire
l'économie de définitions nécessaires pour borner le
sujet. Tout d'abord, il convient de définir ce qu'on entend par le terme
de décroissance. Le premier constat que l'on peut faire, c'est que ce
terme est l'antonyme du terme de croissance et que cette opposition s'effectue
en premier lieu dans le champ économique. La décroissance
apparaît en effet à partir d'une oeuvre d'un économiste
roumain, The Entropy Law and the EconomicProcess publiée en
1971 où il montre tout simplement à partir du deuxième
principe de la thermodynamique (l'entropie) que la croissance économique
est inéluctablement vouée à se ralentir puisque les
ressources énergétiques sur lesquelles se base notre
système économique sont limitées et finies. La
décroissance économique est donc inévitable. Ce livre va
être traduit en français par Jacques Grinevald et Ivo Rens en 1979
sous la forme suivante Demain la décroissance : Entropie,
écologie, économieet va être progressivement
récupéré par les militants et experts
écologistespour montrer qu'il faut rompre avec le paradigme
jusqu'au-boutiste de poursuite de la croissance économique dans nos
sociétés contemporaines. Cette première conceptualisation
du terme est l'une des premières sources de la décroissance.
En effet, selon Fabrice Flipo, il y aurait cinq sources de la
décroissance5(*). Il
y ala « source bioéconomiste » avec Nicholas
Georgescu-Roegen et le Club de Rome6(*). Ici, la décroissance n'est pas comprise comme
une politique à pratiquer ou une norme à imposer, c'est
un« fait dur et têtu avec lequel nous devrons tôt ou tard
composer »7(*),
nous ne pouvons que ralentir la décroissance économique mais pas
l'empêcher. Nous allons irrémédiablement vers un Etat
stationnaire (« steady state »).
Nous trouvons également la « source
écologiste »représentée pardes partisans
écologistes radicaux qui prônent et voudraient la
décroissanceimmédiatement pour empêcher le désastre
écologique en cours (réchauffement climatique, extinction de la
biodiversité, pollution des sols, de l'air et de l'eau, risques
technologiques et industriels, urbanisation illimitée, etc...). Ces
partisansdécroissants sont apparus en France à partir des
années 1970 avec certaines luttes écologiques
charnières(manifestations et mouvements contre l'installation de
centrales atomiques à Bugey en 1970 et contre l'extension du camp
militaire de Larzac en 1973 notamment). On retrouve ici des figures
pré-décroissantes fondatrices telles que Bernard Charbonneau ou
Pierre Fournier, fondateur du journal La Gueule Ouverte en 1972 mais
aussi toute l'oeuvre politique de René Dumont (candidat à
l'élection présidentielle de 1974) qui a posé les bases de
l'existence d'un parti écologiste en France.
Puis, nous trouvons la « source
anthropologique » qui pourrait se résumer à un seul nom
selon Fabrice Flipo : Serge Latouche. Pour modéliser de
manière concise la pensée de Serge Latouche, « la
croissance c'est un mode d'habiter le monde »8(*), une civilisation. Selon Serge
Latouche, les systèmes politiquesont fondu la croissance avec la
modernité et la rationalité. Par conséquent, toute notre
vie tournerait autour du concept de la croissance et le seul moyen de sortir du
paradigme de la croissance infinie serait de « décoloniser nos
imaginaires »9(*)
d'homo oeconomicus en premier lieu. Un exemple concret serait une forme de
retour à une société plus primitive (en opposition
à la modernité) pour revenir à une société
plus écologique, frugale et moins destructrice de l'environnement. Selon
Fabrice Flipo, « Serge Latouche estime que les modes de vie
non-modernes n'étaient pas moins rationnels, ils se fondaient simplement
sur d'autres rapports au monde »10(*). Pour Serge Latouche et ses partisans, la
rationalité économique n'est pas forcément une
rationalité écologique et c'est bel et bien le monde
« moderne » qui est irrationnel et qui fonce dans le mur de
la crise écologique.
La quatrième source est la « source
démocratique ». Dans ce cadre, nous retrouvons selon Fabrice
Flipo « les critiques de la société du spectacle comme
le journal La Décroissance »11(*). Selon lui, ces critiques
porteraient plus sur « l'idée de la dépossession des
besoins ». En d'autres termes, les êtres humains ne
maitriseraient plus leurs besoins à cause de
« l'industrialisation du manque »12(*). Cette
« industrialisation du manque »serait organisée par
le système publicitaire. La question centrale de ces acteurs selon
Fabrice Flipo serait « Qui construit les besoins ? ».
Empêcher la crise écologique passerait donc par le fait sortir des
dépendances construites artificiellement par le système,
jugées facultatives voire inutiles. Pour lutter contre ces
dépendances, le combat passe alors par la lutte anti-pub.
Enfin, la dernière source est la « source
spirituelle » symbolisée par toute l'oeuvre de Pierre Rahbi et
de son Mouvement Colibrisoù « le problème,
c'est le désir »13(*). Ici on se situe dans le cadre de la
« réappropriation des besoins à une échelle
individuelle ». L'enjeu se situe ici surla « maîtrise
des désirs » malgré la pression sociale qui nous pousse
à surconsommer et à ne pas se débrouiller seul. Ce courant
est celui de la « simplicité volontaire ». C'est une
démarche plus personnelle que la « source
démocratique » avec des principes cardinaux définis par
Pierre Rahbi tels que « la sobriété au sens d'un
ménage dans les objets et les attitudes » ; « l'autosuffisance
des actes : essayer de se réapproprier un maximum de choses »
; « révision des choix de consommation » ;
« relation à la terre » ; « la
non-violence »14(*).
D'une manière plus concise, Paul Ariès
définit la décroissance comme étant« une nouvelle
pensée philosophique et politique qui propose d'auto-limiter ses
besoins, de renouer avec la pensée de la finitude environnementale et
humaine, car elle seule peut nous permettre de sortir de la dictature de
l'économie »15(*).
Après avoir défini ce que l'on entendait par le
terme de décroissance, il convient maintenant de définir ce
qu'est le journalisme environnemental. Pour comprendre ce qu'est le journalisme
environnemental, il convient de revenir sur ce qu'est le journalisme. Pour
définir ce qu'est le journalisme, nous pouvons reprendre la
théorie des champs de Bourdieu. Selon Anne Catherine Wagner, un champ
« est un microcosme social relativement autonome à
l'intérieur du macrocosme social. Chaque champ (politique, religieux,
médical, journalistique, universitaire, juridique, footballistique...)
est régi par des règles qui lui sont propres et se
caractérise par la poursuite d'une fin spécifique. (...) La
logique d'un champ s'institue à l'état incorporé chez les
individus engagés dans le champ sous la forme d'un sens du jeu et d'un
habitus spécifique »16(*).Le journalisme est un champ dont l'habitus est
formé entre autres par les normes sociales et économiques en
vigueur (acceptation de la publicité, des contraintes de temps, etc...),
les critères professionnelsdu journalisme (déontologie,
vérification des sources, etc...) mais également par le mythe
intériorisé de l'objectivité et de la neutralité
des journalistes. J'entends par mythe « un signe qui se base sur les
valeurs (souvent idéologiques) d'une société et les fait
paraître naturels »17(*). Le récit du mythe journalistique serait que
la parole journalistique soit objective et neutre, et elle se doit de rester
ainsi, sous peine de se voir disqualifier par le corps majoritaire du champ
journalistique (qui adhère à ce mythe et le défend).
Par ailleurs, « les champs reposent sur une coupure
entre les professionnels (de la politique, de la religion, etc.) et les
profanes. La délimitation des frontières d'un champ est
elle-même objet de lutte »18(*).En d'autres termes, tout le monde ne peut
s'improviser journaliste ou alors ils risquent de se faire
délégitimer par le corps majoritaire du champ journalistique.
Dans la conception et la production d'un journal par exemple, qu'il soit
généraliste ou spécialisé, il faut reprendre un
minimum de critères journalistiques pour être reconnu
légitime. Dans le cas contraire,il faut se confronter aux normes
majoritaires du champ journalistique et tenter d'imposer les siennes (via des
stratégies de lutte plus ou moins symbolique) comme étant
également légitimes si ce n'est plus légitimes que les
normes majoritaires.
Comme tout autre champ, le champ journalistique est
une« configuration de positions qui se situent les unes par rapport
aux autres, est toujours un espace de conflits et de concurrence pour le
contrôle dudit champ. À l'intérieur de chaque champ, on
trouve des dominants et des dominés, des anciens et des nouveaux venus.
Ceux qui détiennent le plus de capital spécifique au champ sont
portés à adopter des positions conservatrices ; les
stratégies de subversion émaneront de groupes concurrents, moins
dotés en capital orthodoxe »19(*).
Le journalisme est donc un champ où une multitude
d'acteurs s'affrontent pour la captation de l'information et de l'audimat et
où les journalistes subissent des contraintes multiples (de
légitimation, d'espace, de temps, de normes, de moyens) dont certaines
sont issues d'autres champs qui dominent le champ journalistique (le champ
économique et politique)20(*).
Dans le champ journalistique, il y a des
« sous-champs spécialisés »21(*) qui correspondent aux
différents journalismes spécialisés (journalisme
économique, sportif, environnemental). Ces
« sous-champs » restent dépendants des structures et
de l'habitus du champ auquel ils appartiennent, c'est-à-dire le champ
journalistique, mais ils dépendent également du secteur
d'information et d'activité qu'ils couvrent. Le journalisme
environnemental traitera donc des questions qui se rapportent à
l'environnement de près ou de loin en fonction des définitions
choisies de l'« environnement » et ses limites. Pour
définir l'environnement, nous pouvons reprendre les termes de Dimitri
Crozet22(*), à
savoir, l'environnement « est défini comme «un patchwork
d'objets de questions très variées« par AkilaNedjar
(2000)23(*). On peut ainsi
y regrouper les questions globales liées au changement climatique, mais
aussi des questions scientifiques telles que la cultures des Organismes
génétiquement Modifiés (OGM) ou, dans le cas du barrage de
Sivens, des dossiers qui demandent une expertise scientifique. Cette
disparité est l'une des spécificités du journalisme
environnemental, qui gravite entre des questions politiques, sociales et
scientifiques ».
Dans le cadre de mon travail de recherche j'ai
décidé de me focaliser sur deux médias décroissants
faisant partie de ce sous-champ spécialisé qu'est le journalisme
environnemental, le journal La Décroissance et la revue
Silence. Toutefois, ces deux médias sont très clairement
les « dominés » dans le champ journalistique au sens
de Bourdieu, puisqu'ils rejettent le modèle économique du
journalisme classique ainsi que le mythe majoritaire du journalisme neutre et
objectif.Ils sont ou peuvent êtredonc considérés
commeillégitimes. Ils rejettent également radicalement le
paradigme politique du « développement durable » en
ce qui concerne l'écologie. Toutefois, ces « nouveaux
venus » bénéficient d'un soutien militant relativement
important et arrivent à parasiter le sous-champ du journalisme
environnemental enmettant en avant une autre légitimité, celle de
médias indépendants financièrement et se revendiquant
comme étant les seuls représentants de la « vraie
écologie », celle qui ne pourra jamais être
récupérée et tronquée pour faire du
« greenwashing » ou du capitalisme vert, la
décroissance.
Méthodologie :
Si j'ai choisi de traiter la question du journalisme
environnemental sous le prisme de la décroissance, c'est
particulièrement parce que la contestation de la croissance et du
progrès technologique était à la base des luttes
écologiques et du journalisme environnemental naissant des années
1970. Cependant, à la différence des années 1970, le
journalisme environnemental n'est plus le pré-carré d'une
poignée de militants, mais un vaste ensemble comprenant les quotidiens
nationaux et une toile de médias alternatifs indépendants plus ou
moins connus.Par ailleurs, il existe une certaine opposition de
légitimité entre les journalistes environnementaux officiant dans
les médias dits« mainstream » ou classiques et ceux
officiant dans les médias alternatifs.Cette opposition s'explique
notamment par la présenced'une tension vis-à-vis de la figure du
journalisteenvironnemental. On assiste régulièrement à des
procès d'intention vis-à-vis des journalistes environnementaux,
comme c'était le cas dans les années 1970. On leur reproche un
certain militantisme qui biaiserait donc leur parole et la restitution des
faits, en d'autres termes, qu'ils ne soient que le « porte-parole de
l'espace social dont ils parlent »24(*). On peut modéliser cela avec le départ
d'Hervé Kempf du journal Le Monde en 2013, suite à la censure
qu'il a subie lorsqu'il a voulu traiter de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes.
Néanmoins, cette tension n'est pas
réservée au seul champ du journalisme environnemental, mais
concerne toute la profession journalistique. Selon Sandrine
Lévêque, docteur en sciences politiques, « les
débats qui animent la profession aujourd'hui peuvent (...)
être considérés comme les indicateurs de l'exacerbation
(provisoire ?) de la lutte entre deux définitions du métier,
d'un côté celle qui cherche à imposer la
représentation d'un journaliste libre de toutes attaches, rapporteur des
faits bruts et de la réalité, et de l'autre un journalisme
auxiliaire de la démocratie, défendant un projet de
société, bref d'un journalisme de combat, chargé
d'éclairer le peuple y compris en défendant ses propres
idées »25(*). Néanmoins, ces deux figures n'ont pas le
même poids dans le paradigme journalistique actuel. Bien qu'il y ait un
certain renouveau du journalisme militant depuis quelques années, le
« mythe professionnel »26(*) du journalisme reste encore de nos jours, celui du
journaliste « neutre » et/ou
« objectif ».
Dès lors, je me suis demandé comment rendre
compte de ce renouvellement du journalisme environnemental autour de la
décroissance, et comment les journalistes environnementaux parviennent
à concilier rigueur journalistique et engagement militant ? Comment
arrivent-ils à influencer la société militante et
politique ? Comment arrivent-ils à promouvoir un journalisme
environnemental alternatif mais légitime ?
Pour ce faire, j'ai décidé de me focaliser sur
deux médias décroissants. Le premier est le journal La
Décroissance, qui est vanté par certains comme un journal
« dans le souvenir de La Gueule Ouverte »27(*) et jouissant d'une certaine
popularité puisqu'il est le premier mensuel d'écologie politique
en France. Il est tiré à 45 600 exemplaires chaque mois et
diffusé en France, en Allemagne, en Belgique, au Canada, au Gabon, en
Grèce, au Luxembourg, auMadagascar, au Portugal, au
Sénégal, en Suisse et en Tunisie. Le second est la revue
Silence, une revue beaucoup plus discrète (son tirage avoisine
les 5000 exemplaires) qui officie depuis 1982, soit le plus vieux mensuel
écologique encore présent, et dont le titre est
l'antithèse de La Gueule Ouverte.Cette revue a notamment la
particularité d'avoir été une rampe de lancement
début 2002 pour Vincent Cheynet et Bruno Clémentin, les
principaux fondateurs du journal La Décroissance.
Dans un premier temps, ma démarchea donc
été de compiler différents travaux de recherche autour du
journalisme environnemental, des décroissants et de leur influence sur
l'écologie politique. Puis, j'ai analysé quelques numéros
du journal La Décroissance et de la revue Silence afin
de saisir leurs particularités. Enfin, j'ai interrogé un
journaliste de chaque médium, Pierre Thiesset du journal La
Décroissance et Guillaume Gamblin de la revue Silence. Ma
démarche s'inscrit donc dans le cadre d'une sociologie qualitative avec
de l'analyse de contenu et la réalisation de deux entretiens
semi-directifs.
I. La décroissance, un courant
« obus » qui frappe les esprits mais qui peine à
s'unifier
A) Un concept qui s'impose progressivement
dans le champ du militantisme écologique
Bien que la décroissance soit un concept apparu
subtilement dès les années 1970 avec le « rapport
Meadows » et les travaux de Nicholas Georgescu-Roegen, sa
popularisation au sein du champ du militantisme écologique ne
débute qu'à partir des années 2000. Dans les travaux de
recherche portant sur la décroissance, on attribue souvent à
Vincent Cheynet et Bruno Clémentin l'entrée du terme
décroissance dans le militantisme écologique français. Ces
militants écologistes qui oeuvrent dans la contestation
« anti-pub » depuis 1999 via leur association Casseurs
de pubvont diriger deux numéros de la revue
écologiqueSilence, le numéro 280 de février 2002
et le numéro 281 de mars 2002. Ces deux numéros vont être
particulièrement populaires auprès des militants
écologistes et la décroissance va se diffuser petit à
petit. Un événement particulier va aussi permettre d'ouvrir une
fenêtre d'opportunité pour la militantisation de ce terme, il
s'agitdu colloque international réalisé par l'association La
ligne d'horizon de l'économiste François Partant, une
association critique du développement, etpar Le Monde
Diplomatique au palais de l'UNESCO en mars 2002. Le sujet de ce colloque
international portait sur
« l'après-développement » et consistait en la
discussion d'alternatives au développement. Ce colloque international a
connu un succès important au regard de la médiatisation qu'il a
suscité et par la présence de nombreux intellectuels, comme Ivan
Illich, intellectuel qui estconstamment cité par les écologistes
et les décroissants. Par ailleurs, ce colloque a débouché
sur la publication d'un livre intituléDéfaire le
développement, refaire le monde en 2003 avec un collectif d'auteurs
internationaux rassemblant des intellectuels comme Serge Latouche, Ivan Illich
mais également des hommes politiques comme José Bové. A
partir de 2004, le terme de décroissance commence à être
repris par différents projets comme la création du journal La
Décroissancepar Vincent Cheynet, Bruno Clémentin et Sophie
Divry ou encore du « Parti pour la Décroissance ».
La particularité de ce courant décroissant que l'on pourrait
croire marginal,est que,certains de ses penseursbénéficient assez
vite d'une visibilité internationalecomme l'économiste
français Serge Latouche. Ce dernier est régulièrement
cité dans les études anglo-saxonnes pour avoir
conceptualisé la décroissance (« leadingthinker on
degrowth »)28(*), bien que le terme existait déjà de
manière implicite auparavant. Les colloques internationaux vont
également se poursuivre : Paris en 2008, Berlin en 2011, Istanbul
en juin 2011, Vienne en avril 2012, Montréal en mai 2012 ou encore
Venise en septembre 201229(*). Pour en revenir à la sphère militante
française, il y aura également des actions structurantes comme
les multiples « marches pour la décroissance »dans
plusieurs villes de France ou encore le contre-grenelle de l'environnement en
2007, tout cela à l'appel de Vincent Cheynet, Serge Latouche ou Paul
Ariès.La popularisation de la décroissance dans le militantisme
écologique s'explique également par la radicalité que ce
mot est venu apporter. Il rompt avec la mollesse, voire l'oxymore de certains
concepts comme celui de « développement durable » et
redonne du sens à la lutte écologique. C'est notamment ce que
pensent Fabrice Flipo, Denis Bayon et François Schneider qui, selon eux,
« après la poussée des années 1970, le mouvement
écologiste s'est institutionnalisé, il a vieilli, s'est
«embourgeoisé« et peut paraître en manque d'inspiration.
Être écologiste renvoyait à l'imaginaire des années
hippies, des fumeurs de haschich sur les chemins de Katmandou, ce qui ne fait
pas davantage rêver que de devenir cadre dans une
«multinationale« écolo telle que Greenpeace ou le World
WildlifeFund, ou élu sans pouvoir dans une «gauche plurielle«
dont les relations avec le monde des affaires sont par tropévidentes.
Dans ce paysage, les mouvements de la décroissance ont
créé un clivage plus large, plus lisible. Et le
«mot-obus« offrait la radicalité souhaitée par
certains, notamment les plus jeunes des militants »30(*). Malgré la
radicalité de ce mot, la décroissance s'est inscrite durablement
dans la sphère militante écologiste.Une manière de
quantifier cela est tout simplement le fait que, comme l'évoque Mathieu
Arnaudet31(*), « la
décroissance s'incarne (...) dans un large répertoire d'actions
mais peine à se faire reconnaître comme telle ». En
d'autres termes, la décroissance peut être présente un peu
partout sans qu'on la revendique forcément, c'est notamment le cas des
expérimentations collectives d'agriculture locale (AMAP et circuit
court). Par ailleurs, une des particularités des militants
décroissants, c'est qu'ils disposent d'un capital culturel et social
relativement élevé, ce qui est utilepour faciliter la circulation
du « vocabulaire décroissant et des textes
références en la matière »32(*).
B) Une critique radicale pour peser sur
l'écologie politique
Après avoir évoqué l'influence des
idées décroissantes sur le champ militant non conventionnel, il
convient ici d'aborder le poids qu'a pu exercer ce nouveau courant
écologique sur le champ politique. Au-delà du fait que les
décroissants peuvent être très critiques à
l'égard du parti Europe Ecologie Les Verts (EELV), ils partagent en
commun l'antiproductivisme. C'est ce qui a été à la base
de la création du parti en 1984 et constitue selon Damien Zavrsnik, un
« invariant politique de long terme »33(*). Les décroissants ont
une stratégie de peser sur le débat public et sur le parti EELV.
La décroissance, bien que radicale, a également influencé
les débats politiques internesdu parti écologique. On peut
notamment évoquer la motion ponctuelle proposée à
l'automne 2004 au sein du parti EELV et intitulée « Pour une
décroissance sélection et équitable : concept
à apprivoiser (d'urgence), non à
écarter ! »34(*). Une motion adoptée par une majorité
d'adhérents (55%) et intégrant donc les fondements du parti
écologiste, malgré l'opposition de la plupart des hommes
politiques du parti. On retrouve également le dépôt, par
Franck Pupunat, d'une motion décroissante dénommée
« Utopia »35(*) lors du congrès du parti socialiste de 2005
mais qui ne sera pas soutenue par les adhérents et cadres du parti
(1,05% des voix). La mouvance décroissante n'a donc pas uniquement comme
but d'influencer culturellement les militants écologistes mais
également de trouver des relais sur la scène politique. La
pénétration des débats internes du parti écologique
a été un moyen de pression afin d'influencer les cadres du parti.
A cet égard, on retrouve plusieurs ténors du parti comme Yves
Cochet, Noël Mamère, Mireille Ferrin, Alain Liepietz et Denis
Baupinqui ont signé un tribune intitulée « Pour une
décroissance solidaire »36(*) à la veille de l'Université
d'été de 2009 du parti. Selon Damien Zvarsnik, le courant
décroissant oeuvre sous une double stratégie afin d'influencer le
jeu politique, « une stratégie de minorité
active » et une stratégie faisant le jeu des élections.
La première stratégie est un concept repris d'un livre de
psychologie sociale de Serge Moscovici37(*) qui désigne les actions d'une minorité
ayant pourfinalité d'imposer ses points de vue à la
majorité.Cette stratégie a notamment été
revendiquée par Serge Latouche, dans son livre Petit traité
de la décroissance sereine publié en 2007 où il
affirme que la principale ambition des objecteurs de croissance devrait
être de « peser dans le débat, d'infléchir les
positions des uns et des autres, de faire prendre en considération,
certains arguments, de contribuer à faire évoluer les
mentalités ».L'objectif ici est de tenter d'influencer le
débat public sans passer par le système partisan et
électif. Cette question divise chez les décroissants car il y a
un effectivement un sentiment « anti-parti » et une
critique de l'institutionnalisation du parti écologique qui aurait
modéré son discours pour maximiser les gains électoraux.
Par ailleurs, de par son influence au sein du parti écologique et de par
les critiques régulières qu'elle produit envers ce dernier - on
peut citer ici les multiples « éco-tartufes »
désignés par le journal La Décroissance comme
Dominique Voynet qui avait fait campagne sur le thème du
développement durable lors de l'élection présidentielle de
2007- le courant décroissant arrive à conserver
l'orientation du débat de l'écologie politique. A titre
d'exemple, le dernier « projet écologiste », issu de
multiples commissions thématiques, affiché sur le site du parti
EELV38(*), comporte une
partie entière dénommée « Vers une
société post-croissance » dans laquelle on retrouve
sous des termes plus nuancés les idées du courant
décroissant. En outre, il faut aussi concevoir le courant
décroissant dans un champ pris par des luttes symboliques avec d'autres
acteurs, qui sont les associations écologistes. Fabrice Flipo, Denis
Bayon et François Schneider soulignent notamment que « l'objection
de croissance met aussi en cause les associations
«écologistes«, que les partis écologistes
considèrent généralement comme leur vivier naturel. Il y a
un accord fort [au sein des décroissants] pour estimer que l'action de
ces associations reste dangereusement confinée à
l'«environnementalisme«, c'est-à-dire à un souci de la
protection des milieux naturels sans réelle prise en compte des
implications sociales et politiques »39(*). Enfin, l'autre stratégie du courant
décroissant est de faire le jeu du légalisme et de se
présenter à certaines élections. Toutefois, il serait vain
de penser que les décroissants sont unis politiquement et ne sont pas
traversés par des divergences idéologiques. En effet, il y a
mille et une façon d'être décroissant, certains penseurs
s'arriment volontiers à l'extrême gauche comme Paul Ariès
ou Serge Latouche, d'autres prônent le « ni gauche ni
droite » comme Vincent Cheynet y voyant là le même mal
productiviste, d'autres, comme Alain De Benoist sont d'extrême droite.
Toutefois, il y a eu des tentatives de rassemblement des décroissants au
sein d'un parti, le Parti pour la Décroissance (PPLD),
créé en avril 2006 par Vincent Cheynet et Bruno Clémentin
et qui présente huit candidats aux élections législatives
de 2007 dans le département du Rhône et de la Loire, obtenant des
scores symboliques. Cette tentative d'union ne serait que temporaire,
puisqu'une scission apparaîtra rapidement au sein de ce parti et une
autre structure verra le jour, le « Mouvement des Objecteurs de
Croissance » (MOC). Malgré cela, il y a quand même des
moments de convergence pour certaines élections comme les
élections européennes où les deux structures partisanes
principales, le PPLD et le MOC, se réunissent au sein de
« l'Association des Objecteurs de Croissance » pour
présenter une liste commune intitulée « Europe
Décroissance » dès les élections
européennes de 2009. De plus, les deux structures présentent
régulièrement, chacune de leur côté, des candidats
aux différentes élections, quel que soit l'échelon, comme
aux élections présidentielles de 2012,où le militant
écologiste Clément Wittmann avait été
désigné pour représenter le PPLD. En outre, l'utilisation
de la politique n'est pas tant de réaliser des bons scores que de
médiatiser la cause décroissante, de frapper les esprits. En
réalité, comme l'évoque Mathieu Arnaudet, « le
rapport au politique s'avère distancié et apparaît
seulement comme un levier supplémentaire pour la création
d'une éventuelle société de «décroissance
soutenable« »40(*). Il faut donc concevoir l'engagement politique, non
pas comme des tentations individualistes de récupérer un
mouvement (qui est tout sauf homogène idéologiquement), mais
comme un moyen, un outil complémentaire à la stratégie de
minorité active.
C) Un courant qui n'est autre qu'une
galaxie hétérogène
Si la décroissance est certes un courant de plus en
plus écouté et pris au sérieux dans le militantisme
écologique, il est tout sauf homogène. On peut définir ce
courant de « galaxie » comme le fait Fabrice Flipo41(*).En effet, s'il y a eu dans le
passé des tentatives d'union des décroissants avec certaines
structures comme le PPLD, il y a en réalité autant de
décroissances que de décroissants. De manière
générale, on met un peu ce que l'on veut derrière le terme
de « décroissance », à condition de ne pas
remettre en cause la volonté de décroissance économique
qui est un invariant de toute la galaxie décroissante.Pour
modéliser cette pluralité au sein de la galaxie
décroissante, nous nous devons d'évoquer la période
2011-2012 qui est particulièrement charnière dans la mise en
lumière des divergences politiques. En effet, c'est à cette
période que des chroniqueurs réguliers au sein du journal La
Décroissance comme Paul Ariès signent une lettre ouverte
(soutenue par Serge Latouche et Jean Gadrey notamment) en mai 2011 reprochant
un certain sectarisme au journal42(*). Il est par la suite exclu du journal, ce qui va
entraîner toute une bataille de mots entre Paul Ariès et Vincent
Cheynet. Le premier reprochant au second d'être de droite en se
proclamant « ni gauche ni droite » et le second reprochant
au premier une « rhétorique stalinienne » en voulant
arrimer à tout prix la décroissance à une (extrême)
gauche qu'il juge autant productiviste que la droite43(*). Nous assistons dès
lors à certaines implosions au sein de la galaxie décroissante,
modélisées par certains départs du journal La
Décroissance. Lorsque vient l'année 2012, nous assistons
à une condamnation (sous un titre assez violent symboliquement44(*)) du journal La
Décroissance par le PPLD, alors même que Vincent Cheynet
faisait partie des fondateurs clés de ce parti politique. Le PPLD lui
reproche une « posture autoritaire globale du
journal »45(*)
et l'exacerbation des conflits au sein de la galaxie décroissante par
Vincent Cheynet car il s'oppose aux mesures phares du PPLD comme le revenu
universel ou « l'extension de la sphère de la
gratuité ». Vincent Cheynet avait également
créé un autre parti, le Parti des Objecteurs de Croissance (POC)
en 2010, une initiative mal vue par le PPLD qui croyait encore à l'union
des décroissants.
En fait, nous pouvons observer la galaxie décroissante
en action lors des différentes élections politiques. Par exemple
en 2012, lors des élections législatives, il y a
« trois familles de décroissants »46(*) visibleset qui s'opposent dans
le Rhône. Nous trouvons « les indépendants très
à gauche » représentés par le Mouvement des
objecteurs de croissance (MOC) et le PPLD qui se revendiquent
« anticapitaliste, anti-productiviste, écologiste,
féministe, et internationaliste » avec comme mesure phare de
leur programme politique, le « revenu inconditionnel ».
Nous trouvons ensuite « les indépendants «ni gauche, ni
droite« » qui sont républicanistes, proches des
idées incarnées par Vincent Cheynet et qui estiment que la
décroissance ne peut être ni de gauche ni de droite car ces
derniers sont tous les deux productivistes. Enfin, il y a les
« objecteurs de croissance » s'affiliant au Front de
gauche. Ces derniers font clairement le jeu de la politique traditionnelle en
acceptant d'être au sein d'un parti politique classique. En 2012, ces
candidats « objecteurs de croissance » étaient par
exemple Anne Charmasson-Creus de la Gauche unitaire (candidate dans la
2ème circonscription du Rhône), Bernard Genin, le maire
PCF de Vaulx en Velin (candidat dans la 7ème circonscription
du Rhône) ou encore René Balme, le maire du Parti de Gauche
à Grigny (candidat dans la 11ème circonscription du
Rhône). En réalité, derrière ces divisions
politiques se cachent aussi des batailles de leadership politique, culturel
mais aussi des problèmes d'ordre plus personnel, des batailles
d'égo, c'est notamment ce que m'ont confié Pierre Thiesset et
Guillaume Gamblin lors des entretiens47(*).
Pour saisir de manière plus précise ces
divergences politiques au sein de la galaxie décroissante, nous pouvons
tout simplement analyser les différents discours au sein de la revue
Silence et du journal La Décroissance. En lisant ces
différents médias, nous pouvons nous rendre compte qu'il y a une
décroissance conservatrice représentée par le journal
La Décroissance et une autre qui se veut
« inclusive » et « intersectionnelle »,
c'est notamment ce que revendique la revue Silence. Sur chaque
numéro de leur revue, nous retrouvons dès la deuxième page
la ligne éditoriale affichée qui est la suivante :
« Silence porte un projet de transformation de la
société dans le sens de la décroissance et de
l'écologie sociale. La revue explore les alternatives concrètes
et cherche à aborder tout sujet non seulement sous l'angle
économique mais aussi au regard du féminisme, du
post-colonialisme, de la non-violence, etc. »48(*). On retrouve cet engagement
inclusif y compris dans la production écrite puisque la revue utilise
l'écriture inclusive car « le masculin universel est l'une des
formes de la domination patriarcale dans la langue
française »49(*). C'est pour cette raison qu'au sein de la revue
Silence, nous ne trouvons pas exclusivement des sujets qui traitent de
l'écologie ou de la décroissance, mais également des
sujets qui traitent de la domination néocoloniale ou
patriarcale50(*). A
contrario, Vincent Cheynet et le journal La Décroissance ont un
raisonnement très opposé à celui de la revue
Silence. Pour Vincent Cheynet, la croissance est un système
anthropologique total et n'est pas qu'un problème d'ordre
économique. La lutte doit se faire non seulement contre la croissance
économique mais aussi contre la société du désir,
que ce soit dans la consommation mais aussi dans les moeurs. Par exemple,
à la différence deSilence mais également d'autres
penseurs comme Paul Ariès ou Serge Latouche, Vincent Cheynet pense que
ce n'est pas en abolissant le patriarcat que nous irons vers une
société plus écologiste et égalitariste51(*).Au contraire, selon lui, il
peut y avoir un danger en voulant tuer le « père
symbolique ». Dans son livre Décroissance ou
décadence publié en 2014 et dont le raisonnement est souvent
repris dans le journal La Décroissance, notre époque
serait le règne du matriarcat et nous aurions rejeté le
rôle du père symbolique et aussi toute idée de limite qui
lui estassociée. Selon lui, « la société veut
ainsi nous faire régresser à l'état de nourrisson, mais
comme on ne redevient pas un petit enfant, elle fait des adultes malades, comme
ces légions d'obèses aux Etats-Unis »52(*). Pour Vincent Cheynet
« le père symbolique est le frein à la
société capitaliste, productiviste, matérialiste, de
croissance » et par conséquent « cette
dernière va donc tout mettre en oeuvre pour le
disqualifier »53(*). C'est pour cette raison que selon Vincent Cheynet,
la décroissance ne peut pas être de gauche car « on ne
peut pas réclamer la fin du «sans limites« dans le domaine
économique et être en même temps le plus ardent promoteur de
la destruction de toute limite, notamment dans le domaine des
moeurs »54(*).
Dans la pratique, nous retrouvons donc ces divergences. Lorsque nous
feuilletons la revue Silence, nous retrouvons des articles et des
brèves en faveur de l'écoféminisme, de la PMA pour les
couples lesbiens55(*). En
revanche, dans le journal La Décroissance nous retrouvons des
articles très à charge contre la théorie du genre, la GPA
mais aussi la PMA56(*). Ce
raisonnement particulier de La Décroissance leur a d'ailleurs
valu des menaces voire des destructions matérielles. En effet, lors de
la dernière édition du festival « les
Bure'lesques » en 2019 (un festival écolo qui rassemble
beaucoup d'acteurs de la galaxie décroissante), un kiosque du journal
qui était installé lors de cet évènement s'est fait
dégrader en raison d'une supposée ligne confusionniste, sexiste
et transphobe du journal57(*).
II. Être
journaliste et militant décroissant : un dilemme ou une solution
pour la cause écologique ?
A) La construction d'une
légitimité alternative pour sortir de ce dilemme
1. Déconstruire le récit du
mythe journalistique
Le mythe professionnel du journalisme neutre et apolitique
conduit à la marginalisation des journalistes qui sont
considérés comme engagés ou militants. Les journalistes
environnementaux qui souhaiteraient donc traiter la question écologique
- tout en étant engagés - verraient donc leur discours
discrédités ou censurés, comme je l'évoquaisau tout
début pour le cas d'Hervé Kempf. Néanmoins, les
problématiques autour de ce mythe professionnel ne concernent pas que
les journalistes environnementaux mais toute la profession journalistique.Il
convient donc d'évoquer quelques aspects historiques et sociologiques
qui ont structuré ce mythe.
Selon la sociologue Eugénie Saitta, ce mythe s'est
construit en partie grâce à des phases de dépolitisation du
journalisme. Elle identifie la première phase de dépolitisation
au début des années 1980. Cette première phase s'exprime
par « un désengagement militant et partisan ou, pour reprendre
le terme de Juhem58(*),
d'une «neutralisation« des quotidiens français de gauche qui
se désolidarisent des positionnements des partis qu'ils avaient soutenus
jusque-là ». Selon elle, « (...) jusqu'au tournant
des années quatre-vingt, la PQN française était
polarisée : «Une presse de gauche« comprenant le
Monde, Le nouvel Observateur, Le Canard Enchaîné,
Libération, L'Humanité (...) », qui
« s'opposait à une presse de «droite« incluant Le
Figaro, France Soir, L'Aurore, Le Point et l'Express »59(*). Les années 1980 sont
marquées par un désenchantement politique qui touchent toutes les
strates du système médiatique. Pour Eugénie Saitta, ce
désenchantement politique au sein des médias s'exprime à
travers plusieurs choses. Tout d'abord, il y a un effet
générationnel. Selon elle, « «l'ancienne«
génération de journalistes » issue du baby-boom
« a été socialisée à la politique dans un
contexte différent ».Un contexte où l'antagonisme
politique entre la gauche et la droite était fortement marqué.
Quant à la génération suivante, « (...) elle
entretient une familiarisation à la politique qu'elle considère
«négative« caractérisée par des alternances
successives, des dysfonctionnements (cohabitations, affaires
politico-financières impliquant d'ailleurs parfois des journalistes,
etc.) et un amenuisement du sentiment d'appartenance
partisan »60(*).
Si cette appartenance partisane est moindre, c'est également parce que
le recrutement des journalistes ne va plus se faire sur une base partisane,
comme c'était le cas auparavant. C'est également la fin des
journalistes spécialisés au sein des grands journaux, les
« rubricards » qui restaient des années sur un
même thème, une même rubrique. A partir des années
1980, on va avoir l'apparition de journalistes flexibles, qui touchent à
tout, avec pour effet, une certaine déconnexion avec le terrain
empirique, partisan.
Par ailleurs, les changements du modèle
économique du journalisme ont aussi participé à
l'avènement de ce mythe professionnel. On pourra ici évoquer la
place grandissante des acteurs privés dans le marché de
l'information. Pierre Bourdieu a notamment fait remarquer que le degré
d'autonomie d'un journaliste « (...) dépend d'abord du
degré de concentration de la presse (qui, en réduisant le nombre
d'employeurs potentiels, accroît l'insécurité de l'emploi)
(...) »61(*). Ce
nouveau modèle économique se modélise par une situation de
propriété oligopolistique (des journaux) et une place croissante
de la publicité en tant que manne financière. Cela conduit
à des effets structurels de neutralisation d'un journaliste militant, au
profit d'un journaliste « neutre »,
« objectif » et qui ne remet pas en cause les
intérêts économiques et politiques qui l'entourent dans son
champ.
Ce mythe professionnel ainsi que la place grandissante de la
publicité au sein du journalismeont été un point
d'accroche pour l'apparition de nombreux médias alternatifs
écologiques comme Reporterre, Silenceou La
Décroissance. Par exemple, avant de créer le journal La
Décroissance, Vincent Cheynet et Bruno Clémentin avaient
créé une association en 1999 dénommée Casseurs
de pub, puis une revue éponyme annuelle. La présentation
internet de l'association révèle cette critique du modèle
journalistique actuel mais également la critique de la figure du
journaliste « mainstream », aseptisé et
« cassé » par la publicité.
Voici par exemple quelques phrases que l'on peut trouver sur
le site internet de l'association62(*) en guise de présentation :
Sommes-nous des « casseurs », des gens
« pas bien dans leur tête », comme s'emploient à le
faire croire les publicitaires ? Non, bien sûr. Au contraire, nous
menons un combat non-violent fondé sur l'argumentation. Si nous sommes
des « Casseurs de pub », c'est parce que la pub est une machine
à casser.
Une machine à casser la nature, l'humain, la
société, la démocratie, la liberté de la presse, la
culture et les cultures, l'économie ou encore l'éducation.
La pub est une machine à casser la liberté de la
presse. Aujourd'hui, la presse, la radio, la télévision vivent de
la pub que payent les multinationales pour y montrer leurs produits.
Résultat : les journalistes ne critiquent que très
exceptionnellement la pub ou la logique des multinationales. Les journalistes
ou les intellectuels qui peuvent s'exprimer largement sont ceux qui collaborent
à cette logique. Ceux qui la refusent n'ont plus la parole que dans des
médias confidentiels. Pourquoi ne lit-on plus d'articles comme celui-ci
dans les journaux les plus connus ? Les journalistes des médias
dominants décrivent ceux qui contestent la pub comme des «
extrémistes ». Ainsi, la pub transforme la presse en catalogue
publicitaire qui noie la presse libre et indépendante.
On aperçoit donc les bases d'un cheminement
intellectuel qui les amènerait à se fondre dans un militantisme
plus large et plus radical qui est celui de la décroissance. Mais on
retrouve également, comme je l'évoquais, une critique très
forte à l'égard de la figure du journaliste mainstream. Les
termes utilisés sont lourds de symbolique, ils assimilent les
journalistes des médias dominants à des collaborateurs de l'ordre
établi, un ordre régi par la publicité. Et ceux qui
contesteraient cet ordre ou qui refuseraient de se fondre dans cette
« neutralité » supposée seraient
dépeints comme des « extrémistes » ayant
tribune dans des « médias confidentiels ».
2. Le combat
« anti-pub », un référent symbolique et
légitimant dans le milieu écologique
Cette critique radicale du journalisme mainstreamque l'on
vient d'évoquer n'est pas vaine. Elle vise à instaurer une autre
légitimité, mais également un autre modèle. Un
modèle alternatif où ces journalistes veulent montrer qu'on peut
être à la fois journaliste et militant et que cela n'est pas
dépréciatif mais au contraire « un gage
d'excellence ». C'est notamment ce qu'a étudié le
sociologue Benjamin Ferron, à travers une recherche sur les
différentes stratégies médiatiques de mouvements
altermondialistes lors du sommet de Cancun de l'OMC en 2003, un sommet unique
où toute une contre-société altermondialiste
s'était faite autour de l'événement, avec leurs propres
médias et journalistes. A travers l'étude de cet
événement et de ce qu'il a suscité, Benjamin Ferron s'est
notamment posé la question suivante : « Comment
cherchent-ils [les journalistes militants] à faire de leur engagement un
gage de leur excellence, rompant en cela avec les définitions
socialement dominantes de la profession journalistique, tout en maintenant un
rapport distinctif avec les discours et pratiques des (autres)
militants ? »63(*).Selon lui, les journalistes militants sont capables
de combiner rigueur journalistique et engagement, et ils savent très
bien jouer de ces deux aspects. Son étude amontré que ces
journalistes construisent une légitimité alternative, un gage
d'excellence via une « double stratégie
médiatique »64(*). Une stratégie à la fois de
« parasitage des médias de masse » et à la
fois d'une « constitution d'un réseau médiatique
propre ».
Si nous faisons le parallèle avec mon terrain
d'étude, le journal La Décroissancea constitué
son réseau médiatique propre et s'est pérennisé
financièrement avec un audimat stable et fidèle. Ce journal est
particulièrement apprécié pour la présence
d'articles de fond rédigés via la participation occasionnelle
d'intellectuels (décroissants ou non) connuscomme Serge Latouche ou Paul
Ariès dans les premières années du journal. On y retrouve
également des chroniqueurs réguliers qui sont des
personnalités connus comme François Brune, les sociologues Alain
Accardo et Alain Gras ou encore le militant anti-nucléaire
Stéphane Lhomme. Par ailleurs, avant le lancement du journal en 2004,
les deux fondateurs disposaient déjà d'un capital culturel et
social important de par leurs expériences professionnelles (Vincent
Cheynet est un ancien publicitaire de chez Publicis Lyon) et de par leur
association Casseurs de pub, qui avait déjà permis
d'ameuter un audimat, une certaine sphère militante via leurs actions
comme la « journée sans achat » (manifestations dans
toute la France).Comme l'a montré la chercheuse Justine Simon au sein
d'une étude consacrée à l'analyse
« sémio-discursive » de Casseurs de
pub65(*),Vincent
Cheynet a su réutiliser les codes de son ancien métier et son
capital relationnelpour promouvoir le combat
« anti-pub »66(*). Lorsque la transition s'opère entre son
premier combat « anti-pub » et son nouveau combat pour la
décroissance via la transformation de la revue Casseurs de pub
en journal La Décroissanceen 2004, il parvient à
préserver le petit lectorat et le capital militant qu'il avait
constitués en créant une rubrique dénommée
« Casseurs de pub » au sein du journalet dirigée par
l'écrivain et dessinateur Jean-Luc Coudray67(*). Il transforme
également son ancienne revue en dossier annuel joint au journal La
Décroissance.
En outre, lors de son apparition, le journal acontribué
à parasiter la scène médiatique, en premier lieu
grâce à son titre qui fait office de « mot
obus »68(*), sa
couverture polémique mensuelle69(*), la présence d'illustrateurs connus comme
Pierre Druilhe ou Andy Singermais aussi grâce à certaines de ses
rubriques. On peut citer ici des rubriques comme « la saloperie que
nous n'achèterons pas »70(*) qui est un objet ou une chose physique qu'il faut
boycotter ou encore l'« écotartufe du
mois »71(*) qui
met à l'honneur ironiquement (et de manière très critique)
certaines personnalités comme Nicolas Hulot ou Daniel Cohn Bendit. La
construction d'une légitimité alternative passe donc par la
(pré)disposition d'un certain capital relationnel et la construction de
cette rhétorique radicale et bien ficelée. Une rhétorique
qui rappelle à bien des égardsles discours de La Gueule
Ouverte, notamment sur la critique et le refus de la publicité
comme source de financement.
B) Une tension plus ou moins persistante
en fonction des individus et des milieux
1. Journaliste professionnel,
engagé, militant ?
Bien que les journalistes environnementaux alternatifs sachent
conjuguer rigueur journalistique et militantisme, mes recherches m'indiquent
néanmoins qu'il y a un certain refus du terme « journaliste
militant ». Lors du premier entretien que j'ai réalisé
avec le journaliste Pierre Thiesset du journal La
Décroissance,à la question « Au sein du journalLa
Décroissance, vous concevez-vous comme des militants, des
professionnels ou les deux à la fois ? », le journaliste Pierre
Thiesset répond :
« Oui alors justement, humm.... J'ai dû mal
à me consi... Enfin, moi je n'aime pas trop le terme de journaliste
militant... justement, parce que je pense qu'on fait vraiment un travail de
journaliste. Alors, certes, on a... on a un engagement et puis on revendique
notre subjectivité, on revendique... on revendique notre ligne
éditoriale très clairement. Humm, comparativement à des
médias qui se disent neutre, objectif, mais qui... mais qui en fait, ont
aussi un engagement. Et il y avait une lettre d'Hervé Kempf je crois,
quand il est... quand il a démissionné du Monde où... fait
intéressant là-dessus, où il disait que lui était
considéré comme un journaliste militant en gros, parce qu'il
défendait... enfin parce qu'il était écologiste tout
simplement. Et, humm... il disait «mais par contre on ne considère
jamais comme militant les journalistes... humm, spécialisés dans
la rubrique économie par exemple, qui, qui vont sans-cesse
défendre la croissance, le... le capitalisme mais qui, qui vont
paraître neutres, etc...« Et je trouvais ça... moi je me
reconnais pas mal dans ces propos-là.»
Un refus qui peut s'expliquer par le fait que, dans beaucoup
de médias alternatifs, il y a des journalistes qui ont fait des
études de journalisme et quiont travaillé dans la presse
quotidienne nationale, régionale ou locale. C'est notamment le cas de
Pierre Thiesset qui, avant d'intégrer La décroissance, a
fait un IUT de journalisme à Lannion. Puis, il a travaillé dans
la presse locale au seind'un journal intitulé Le Béret
Républicain, quotidien diffusé dans le département du
Cher. Il dirige également la collection « Le pas de
Côté » (qui était anciennement une maison
d'édition) au sein d'une maison d'édition indépendante
appelée L'échappée. Dès lors, il est
compréhensible qu'il y ait un refus de ce terme, surtout qu'il peut
être connoté négativement et utilisé à des
fins de discréditation de la parole donnée. Cette tension entre
la figure du journaliste et du militant, bien que persistante, n'est pour
certains comme Hervé Kempf, qu'un faux débat.Invité lors
d'une émission de France Culture sur le sujet « Peut-on
être journaliste environnemental sans être
militant »72(*),
Hervé Kempf était confronté au journaliste environnemental
Marc Cherki du Figaro.Durant leurs échanges, Hervé Kempf
évoque qu'il peut y avoir « 2 façons d'aborder et de traiter
(...) un sujet [écologique] qui est le même » sans pour
autant refuser la rigueur journalistique. Il peut y avoir une façon
factuelle et une façon plus indignée et engagée. De plus,
ilsouligne que Reporterre - l'ancien mensuel écologique qu'il a
créé en 1989, puis qu'il a relancé en format internet
depuis 2007 - utilise, comme les autres médias, « les instruments
journalistiques de vérification de l'information, de pertinence, de sens
de la contradiction, de vérification des faits, etc... ». Il en va
de même pour le journaliste Pierre Thiesset de La
Décroissance. A cet égard, voici la suite de sa
réponse concernant la question que j'ai déjà
évoquée plus haut.
« Et... quand je dis qu'on, qu'on.... qu'on... enfin
que je me considère avant tout comme journaliste, c'est que le travail,
c'est vraiment un travail de journaliste qui est basé sur une
énorme documentation notamment, sur... des recherches assez... assez...
enfin très longues, en fait on y passe énormément de temps
à faire notre journal, euh... Et c'est voilà, on n'est pas
seulement dans, dans l'affirmation de notre message... On a un soucis de
rechercher... de faire des recherches historiques, de faire... voilà,
d'alimenter toujours nos réflexions à partir de toute cette base
documentaire quoi. »
Cependant, il apparaît que la réfutation de
l'appellation « journaliste militant » est beaucoup plus
variable en fonction du parcours professionnel et personnel des individus. En
effet, lorsque j'ai entretenu le rédacteur de la revue Silence,
Guillaume Gamblin, il s'est avéré que l'appellation
« journaliste militant » n'est pas forcément
perçuede façon péjorative. Lorsque je lui ai posé
la même question que j'avais posée à Pierre Thiessetlors du
premier entretien, à savoir : « Au sein de la revue, vous
concevez-vous comme des militants, des professionnels ou les deux à la
fois ? », voici ce que Guillaume Gamblin m'a répondu :
« (Rires) Oui c'est toujours un peu la question qui
est (rires) pas évidente à dire. Est-ce qu'on est des militants,
des professionnels ou les deux à la fois ? Moi je dirai que oui, on est
un peu les deux à la fois. C'est-à-dire qu'à la fois on
est des militants car clairement euh... il faut être militant pour
être salarié et bien dans sa peau et bien dans le reste de
l'équipe et du projet. Une personne qui serait
à Silence juste pour ses attributions techniques
ça ne marcherait pas quoi. Euh... et euh... aussi on a envie de... notre
but c'est de transformer la société dans le sens de la
décroissance, de l'écologie sociale, etc... Et professionnel dans
le sens où on adopte quand même une éthique journalistique,
on a des compétences, que ce soit au niveau de la gestion
administrative, de la compta ou de... ou du journalisme. Euh... on a des
compétences assez strictes, assez professionnelles euh...
puis... et donc au niveau du journalisme on... on... bah
voilà on essaye... on a une éthique de dire,
de pas dire de choses fausses, de recouper les sources, de, de tant
que possible... qui se rapproche des autres pratiques journalistiques plus
classiques. Mais avec... ça n'empêche pas de le faire au service
d'un combat global. »
Cette conception différente des choses peut notamment
s'expliquer par le fait que les journalistes au sein de la revue
Silence n'ont pas suivi des études de journalisme mais se sont
formés sur le tas. En effet, lorsque je lui ai posé la question
suivante, « Est-ce que vous avez suivi des études de
journalisme ou pas du tout ? », voici ce que Guillaume Gamblin m'a
répondu :
« Euh non non, je n'ai pas du tout suivi des
études de journalisme et à Silence en fait,
personne n'a jamais suivi des études de journalisme depuis la
création de la revue en 1982 parmi les gens qui sont salariés ou
les gens qui sont permanents, permanentes de la rédaction. C'est
vraiment des personnes qui, qui se sont formées sur le tas, en tant
que personnes qui sont d'abord pour leur engagement
militant on va dire. »
Cela nous permet de comprendre pourquoi Guillaume Gamblin ne
réfute pas frontalement le terme de « journaliste
militant » puisqu'il n'a pas connu la même
intériorisation des normes journalistiques que peuvent le
connaître des personnes ayant eu un parcours journalistique classique
comme Pierre Thiesset ou Hervé Kempf. J'entends par « parcours
journalistique classique » un parcours dans lequel un individua suivi
des études de journalisme et a officié dans la presse
traditionnelle, qu'elle soit locale, départementale, régionale ou
nationale.
Le fait que les rédacteurs et journalistes de la revue
Silence n'aient pas suivi d'études de journalisme n'est pas
quelque chose de disqualifiant. Par ailleurs, en feuilletant les
différents numéros de la revue Silence, nous pouvons
nous apercevoir qu'il n'y a pas vraiment de différence dans la
reproduction des normes journalistiques. A titre d'exemple, nous retrouvons au
sein de la revue Silence un sommaire clair et précis contenant
quatre rubriques. Les rubriques ne sont pas classées par thèmes
comme dans le journal La Décroissance mais par façon de
traiter l'information73(*). Tout au long de la revue Silence, nous
retrouvons perpétuellement des sources qui sont citées avec de
nombreuses notes de bas de page, à la différence du journal
La Décroissance qui en compte moins. Cela est sûrement
dû au format du journal qui est plus contraignant que celui d'une revue,
mais également parce que la revue Silenceva davantage surle
terrain empirique (en relayant les alternatives écologiques dans les
différentes régions de France74(*)) que le journal La Décroissance qui
relève plus du journalisme de bureau, de combat des idées. C'est
notamment ce que confirme Pierre Thiesset lors de notre entretien où il
confie que le journal La Décroissance est davantage
« un journal d'analyse et de réflexion »qui se
consacre moins à des reportages de terrain que Reporterre par
exemple.
2. Quelques éléments de
comparaison avec le journalisme agricole
En outre, la question de la « formation sur le
tas » et de la neutralité journalistique ne se pose pas que
dans le cadre du journalisme environnemental. Dans d'autres
« sous-champs spécialisés » du journalisme,
comme le journalisme agricole, nous retrouvons beaucoup de personnes qui se
sont également formées sur le tas. Pour appuyer notre propos,
nous pouvons citer les travaux d'Ivan Chupin et Pierre Mayance qui ont
étudié l'échec de la création d'une filière
de journalisme agricole à l'Ecole Supérieure du Journalisme de
Lille75(*).Ils ont
notamment montré que les « bonnes pratiques » de la
presse généraliste, le mythe de l'objectivité et de la
distanciation vis-à-vis des sources est assez difficile à
exporter dans une presse agricole où les journalistes ont
eux-mêmes été des acteurs du champ agricole ou des
individus socialisés aux valeurs du monde agricole et qui se sont
formés journalistes sur le tas. Ils mettent en lumière que le
paradigme dominant dans la presse agricole est que « la formation sur
le tas est la seule formation légitime et largement
répandue ». Par ailleurs, même lorsque cette
filière à l'ESJ de Lille était opérationnelle,
« les directeurs de journauxcontinu[ai]ent d'avoir recours
principalement à des candidats diplômés de BTA (brevet de
technicien agricole) et BTS (brevet de technicien supérieur) ou à
des ingénieurs spécialisés dans des domaines agricoles
pour écrire dans leurs titres »76(*).
Si on compare avec le journalisme environnemental, ce n'est
pas la même configuration que dans la presse agricole. Si à un
certain moment, notamment dans les années 1970, il y a pu avoir une
sorte de pré-carré médiatique réservé aux
« militants écolos purs et durs », très vite
les journalistes classiques ont eu accèsau journalisme environnemental,
y compris dans La Gueule Ouverte(notamment après la mort de
Pierre Fournier) et surtout Sauvage.
Dorénavant, que ce soit dans les rubriques
« écologie » ou
« environnement » deLibération, Le
Mondeou Le Figaro, il s'agit avant tout de personnes ayant suivi
des études de journalisme classique. Si on s'intéresse au
modèle alternatif de Silence ou La
Décroissance, on retrouve aussi bien des parcours classiques comme
Pierre Thiesset que des militants formés journalistes sur le tas comme
Guillaume Gamblin. Il en va de même pour le premier site d'information
écologique alternatif de France,Reporterre, où leur
équipe est composée de parcours mixtes. Cette différence
entre ces deux sous-champs spécialisés (journalisme agricole et
journalisme environnemental) peut notamment s'expliquer par des parcours de
socialisation différents qui permettent une institutionnalisation
beaucoup plus simple de l'écologie, de l'environnement au sein du champ
journalistique que le « monde agricole ». Par ailleurs,
disposer en son sein de personnes ayant eu un pied dans le système
médiatique dominant (Vincent Cheynet) ou le journalisme traditionnel
(Pierre Thiesset) peut être une véritable ressource pour la
pérennité d'un journal, que ce soit en termes de capital
relationnel ou de connaissances du système pour mieux le parasiter avec
ses propres codes et capter des nouveaux lecteurs.
A la lumière de ces éléments, nous
pouvons avancer qu'il est tout à fait possible d'être un
journaliste alternatif et d'avoir les mêmes contraintes de rigueur et de
restitution des faits qu'un journaliste mainstream. Comme l'évoque
Benjamin Ferron, un journaliste alternatif est donc pris dans un
équilibre « entre engagement et distanciation »en
raison d'un double enjeu de légitimation, à la fois auprès
des militants et à la fois auprès du corps journalistique et du
grand public. De plus, les contraintes qui pèsent autant sur un journal
(contraintes financières, cohérence éditoriale,
éviter les critiques) que sur leurs journalistes (intériorisation
des normes grâce au passé étudiant et professionnel)
rendent difficile l'existence d'un discours entièrement militant visant
à manipuler l'opinion. Par ailleurs, face à la montée de
certains discours climato-sceptiques, des médias comme Silence,
La Décroissance ou Reporterre ne peuvent se permettre
de produire ou de relayer des fausses informations car cela pourrait d'autant
plus se retourner contre eux et ainsi décrédibiliser leur image.
C) Un rapport aux sources d'informations
favorisant un modèle participatif et pluraliste
La promotion d'un modèle
journalistique alternatif ne passe pas que par la déconstruction du
mythe majoritaire et le combat « anti-pub » mais
également par un renversement partiel du rapport aux sources
d'information. Selon les travaux du sociologue britannique Stuart Hall repris
par Phillip Schlesinger77(*), les médias s'appuient sur des sources dites
« autorisées ». Ces sources sont dites
« autorisées » car leur position apparaît
objective et faisant autorité auprès du médium
concerné. Ces sources autorisées peuvent être à la
fois des représentants d'institutions sociales, des représentants
du peuple, des représentants de groupes d'intérêts, mais
aussi l'expert qui serait vanté pour sa « recherche
«désintéressée« du savoir et non sa position ou
sa représentativité »78(*). Selon Stuart Hall qui adhère à une
conception marxiste des médias, tout le monde ne peut pas devenir une
source d'information mais uniquement des personnes accréditées
par le pouvoir ou la position qu'elles représentent,
généralement ce sont les puissants, les dominants.Stuart Hall
définit ces personnes comme les « premiers
définisseurs » des thèmes (du débat). Dès
lors, selon Philippe Schlesinger, le sociologue Stuart Hall pense que
« les contre-définitions ne peuvent jamais supplanter la
première définition, qui domine de manière
conséquente »79(*). Dans ce cadre de pensée structuraliste, les
médias seraient des complices des dominants lorsqu'ils élaborent
des informations puisqu'ils ne choisiraient que des sources
« autorisées » ou
« officielles ». Ils ne véhiculeraient donc que les
définitions dominantes des informations, des débats. Selon
Philippe Schlesinger, le sociologue Stuart Hall pense que « la
pratique journalistique favorise généralement les
intérêts des sources faisant autorité, notamment celles qui
se situent à l'intérieur de l'appareil gouvernemental et
étatique »80(*). Cependant, il convient de relativiser cette
théorie et ce, pour plusieurs raisons. Tout d'abord, la sociologie
empirique du journalisme a montré qu'il y avait, certes, un accès
structuré aux médias en fonction de notre position dans la
hiérarchie social, mais il n'y a pas pour autant un déterminisme
absolu et une impossibilité d'accès aux médias pour une
personne « lambda » ou une source « non
officielle ». De plus, cette théorie date des années
1970 et le régime médiatique a évolué depuis, les
médias peuvent être eux-mêmes les « premiers
définisseurs » et la fenêtre d'accession aux
médias pour les « sources non officielles » s'est
élargie.
En effet, selon Nicolas Kaciaf et Jérémie
Nollet, « le régime médiatique est profondément
bousculé » depuis les années 1990 « par un
ensemble de mutations techniques et industrielles (explosion du nombre de
chaînes de télévision, développement d'Internet) qui
multiplierait les sources d'information, renforcerait la concurrence entre
médias, rendrait possible de nouveaux usages (militants notamment) et
brouillerait la frontière entre producteurs et consommateurs de contenus
médiatiques »81(*). Il y a eu, selon Nicolas Kaciaf et
Jérémie Nollet, « une multiplication des points
d'entrée dans l'espace médiatique » qui « aurait
conduit à une diversification des acteurs qui participent aux luttes
pour façonner l'environnement discursif de la vie politique
»82(*). Toutefois, la
théorie structuraliste de Stuart Hall n'est pas obsolète pour
autant car ces différents changements ne signifient pas la fin de
l'hégémonie idéologique des élites politiques et
journalistiques traditionnelles et par conséquent de leur mythe
(d'objectivité, neutralité). De plus, il faut encore disposer
d'une des trois ressources suivantes pour être une source ayant un
accès aisé aux médias, « une ressource
institutionnelle (institutions étatiques, groupes
d'intérêts, etc...), financière (et organisationnelle) ou
culturelle (légitimité et autorité
sociale) »83(*).
Ce modèle journalistique classique est progressivement
remis en cause, d'autant plus au sein du journalisme alternatif qui donne
souvent la parole à des sources dites
« nonofficielles ». De plus, comme l'évoquent
Nicolas Kaciaf et Jérémie Nollet, Internet peut renouveler (en
termes de pratiques) certains sous-champs du journalisme, comme c'est le cas
avec Reporterre, premier site d'information écologique de
France (32 000 visites par jour), indépendant financièrement (pas
de publicités et site financé par ses lecteurs et
donateurs)84(*) et qui
fait beaucoup de reportages de terrain.
Concernant le journalLa Décroissance et la
revue Silence, nous retrouvons également des pratiques
différentes concernant leur rapport aux sources d'informations. Dans la
construction de leur journal ou revue, leurs sourcesd'informations principales
ne sont pas l'acteur étatique ou des acteurs organisationnels classiques
mais dans la majorité des cas des « experts »
écologistes, décroissants qui sont sollicités (qui sont
souvent des chercheurs académiques85(*))mais également des militants. En feuilletant
les différents numéros du journal La Décroissance
et la revue Silence, nous pouvonsvoir qu'ils ne choisissent pas
leurs sources en fonction de ressources institutionnelles ou financières
dont elles pourraient disposer mais surtout en fonction de la troisième
ressource, la ressource culturelle. Ainsi, nous retrouvons dans ces deux
médias la présence de nombreux chercheurs, intellectuels,
sociologues. C'est quelque chose qui est légitimant d'avoir des experts
« alliés » ayant une certaine
crédibilité et influence. On peut aussi concevoir le fait
d'ameuter au sein de son média des « sources
officielles » que sontles experts (disposant d'une certaine
aura)comme une stratégie afin de relayer la parole de sources
« non officielles » (initiatives de militants
écologistes, décroissants).
Concernant les « sources non
officielles », il faut savoir que le journal La
Décroissance mais surtout la revue Silence
concèdent une part non négligeable de leurs numéros aux
initiatives militantes. Ainsi, dans chaque numéro du journal La
Décroissance, nous retrouvons une rubrique intitulée
« Simplicité volontaire » où on met à
l'honneur des militants sous un format d'interview86(*). Quant à la revue
Silence, nous pouvons par exemple retrouver un numéro entier
consacré à la ZAD de Notre-Dame-des-Landes87(*)et dans lequel nous pouvons
retrouver un entretien de deux militants ayant installé un jardin
aromatique et médicinal88(*).
Cependant, bien que La Décroissance et
Silence se réclament de la décroissance, la couverture
médiatique du champ écologique qu'ils font au sein de leur
mensuel reflète aussi les divisions qui s'expriment au sein de la
galaxie décroissante. En effet, comme l'a montré Daniel Hallin
dans son étude de la couverture médiatique de la guerre du
Vietnam89(*), les
journalistes sont à la fois des « miroirs » du
terrain qu'ils couvrent mais aussi des
« gatekeepers »à savoir des individus
« qui filtre[nt] et élimine[nt] les informations
indésirables, inintéressantes ou insignifiantes et s'occupe[nt]
d'informations de plus ample importance »90(*).En d'autres termes, ils sélectionnent un
minimum l'information donnée par leurs sources (si ce n'est les sources
elles-mêmes) pour qu'elle soit adaptée un minimum aux
critères journalistiques, à leur idéologie et aux attentes
de leur lectorat. Toutefois, les deux médias étudiés
conçoivent surtout un modèle alternatif au gatekeeping du
journalisme traditionnel car ils donnent souvent la parole aux militants, aux
initiatives individuelles et ne cherchent pas l'information sensationnelle ou
à prendre un point de vue « neutre » ou
« objectif ». Leur souci principal est surtout la
véracité et la « newsworthiness »
(utilité et intérêt) de l'information choisie pour
conserver leur lectorat (il y a une certaine dépendance vis-à-vis
de leurs militants) et en capter davantage. Concernant l'analogie entre les
journalistes et le miroir,comme nous l'avons évoqué
précédemment, les décroissants sont une galaxie
traversée par certaines divisions insurmontables et à ce titre,
on verra davantage la revue Silence faire la promotion de combats
sociétaux et de luttes intersectionnelles que le journal La
Décroissance.
Conclusion :
Si la décroissance est un thème qui parle
à plus en plus de monde, que ce soit auprès des militants
écologistes ou auprès du grand public comme le
révèlentdeux récents sondages91(*), elle reste majoritairement un
OVNI, que ce soitdans le débat politique oumédiatique dominants.
Pour autant, une des choses intéressantes à souligner est que la
décroissance, malgré ou grâce à sa radicalité
sémantique (et intellectuelle) continue à faire parler d'elle et
gagne en crédibilité au fur et à mesure que la crise
écologique s'aggrave. Si la traduction politique de la
décroissance est un échec pour le moment, sa traduction au sein
du militantisme écologique et du journalisme environnemental est
plutôt une réussite. La revue Silence existe depuis 1982
et a réussi à faire un certain travail de fond idéologique
pour la décroissance au début des années 2000. Le journal
La Décroissance existe depuis 2004 et a réussi à
ameuter un lectorat conséquent et fidèle, ce qui est louable pour
un projet qui disposait de peu de moyens au départ, en comparaison
à d'autres initiatives dans le journalisme alternatif comme
Médiapart ou Reporterre. Nous pouvons également
citer l'agriculteur Pierre Rahbi, l'économiste Serge Latouche et le
politologue Paul Ariès qui sont trois piliers de la galaxie
décroissante qui jouissent d'une certaine popularité et qui ont
des entrées régulières au sein de médias dominants.
De plus, si la galaxie décroissante a trouvé quelques relais en
politique chez Les Verts, elle dispose surtout de puissants relais au sein du
monde académique avec des expertscomme Jean-Marc Jancovici ou
Aurélien Barrau et qui sont d'ailleurs très populaires sur les
réseaux sociaux.La décroissance a également pavé la
voie pour un courant encore plus radical, celui de la collapsologie avec
à sa tête le français Pablo Servigne qui cumule plus de 120
000 ventes pour son premier livre Comment tout peut s'effondrer,
publié en 2015. Nous pourrions également citer deux thinkthanks
importants de la décroissance comme l'Institut Momenthum fondé
par Agnès Sinaï (une ancienne du journal La
Décroissance) et présidé par Yves Cochet ou encore le
Comité Adrastia (fondé à Lyon) qui
réfléchissent à une sortie de la société
industrielle moderne et aux risques d'effondrement.
En outre, la survie des idées décroissantes au
sein du journalisme environnemental et du militantisme écologique peut
également s'expliquer par le fait que la décroissance renoue avec
une certaine forme de radicalité qui fascine et qui plaît face
à des politiques de « développement durable »
qui ont déçu. En ce sens, si nous reprenons les travaux dePhillip
Schlesinger et élargissons la focale, nous pourrions avancer que les
différentes organisations, associations ou médias
décroissants (comme le journal La Décroissance ou le
revue Silence) sont ou pourraient être des « forces de
contradiction, des collectifs bien organisées qui apportent des
contre-définitions » de ce que doit êtrele journalisme
environnemental et l'écologie politique. Un journalisme environnemental
indépendant, rigoureux et cohérent où la rubrique
écologie ne se trouve pas entre la publicité et la rubrique
économie où des positions pro-croissance s'affichent
clairement92(*). Une
écologie politique qui fait le pari de la décroissance pour
ralentir le réchauffement climatique et les destructions
environnementales. Mais, comme le souligne Phillip Schlesinger, la
portée des contre-définisseurs « dépend en
partie de leurs poids », s'ils représentent une
« majorité organisée » ou une
« minorité conséquente » et s'ils ont une
« légitimité à l'intérieur du
système » ou s'ils souhaitent renverser la table et mettre en
avant une autre légitimité93(*). Il est clair que la période de
pandémie mondiale que le monde a connu en cette année 2020 a
incontestablement permis de donner « un nouveau souffle au mouvement
décroissantiste »94(*) et a pu donner raison à certaines
prévisions de la galaxie décroissante. Néanmoins, le
paradigme de la croissance économique et du « capitalisme
vert » a encore de beaux jours devant lui.
S'il fallait approfondir cette étude qui comporte
certaines limites, il serait intéressant d'enquêter davantage sur
l'image de Lyon, qui est souvent considéré comme une, si ce n'est
la « terre décroissante » de France. Il serait
intéressant aussi d'analyser les idées et discours des
journalistes environnementaux officiant dans les médias traditionnels
pour tenter de saisir leur proximité ou leur distanciation par rapport
à la décroissance et aux journalistes environnementaux
alternatifs. Enfin, faire une analyse qualitative et quantitative des militants
d'EELV (encartés) peut être un angle de recherche
intéressant afin d'estimer de manière plus précise le
poids des idées décroissantes, les logiques internes du parti et
ses futures stratégies électorales.
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https://www.franceculture.fr/emissions/la-fabrique-mediatique/peut-etre-journaliste-environnemental-sans-etre-militant>
Sondage, enquête d'opinion :
Institut Viavoice, « Le baromètre politique
Viavoice - Libération. «Coronavirus : quel monde d'après
?«, publié en avril 2020. [En ligne]. [Consulté le 17
juillet 2020]. Disponible sur :
<
http://www.institut-viavoice.com/wp-content/uploads/2020/03/Barometre-Viavoice-Liberation-Avril2020-Coronavirus.pdf>
Odoxa « Les Français, plus
«écolos« que jamais », sondage pour Aviva Assurance,
BFM et Challenges, publié le 03/10/2019. [En ligne]. [Consulté le
17 juillet 2020]. Disponible sur :
<
http://www.odoxa.fr/sondage/barometre-economique-doctobre-francais-plus-ecolos-jamais/>
Annexes
Annexe 1 : ligne éditoriale de Silence
Source : revue Silence, n°483, novembre
2019, p.2
Annexe 2 : utilisation de l'écriture inclusive au
sein de la revue Silence
Source : revue Silence, n°483, novembre
2019, p.2
Annexe 3 : exemple d'article contre le patriarcat
Source : GILSON Martha, « La mode : une
industrie sexiste » avec la participation de la chercheuse
américaine Cynthia Enloe. Revue Silence, n°483, novembre
2019, p.36-37
Annexe 4 : exemple d'article en faveur de la PMA pour les
couples lesbiens
Source : GUERIN Coline, « PMA, maternité
et écologie, rencontre avec Gouines contre nature »,
revue Silence, n°487, mars 2020, p.25
Annexe 5 : exemple d'article à charge contre la GPA
et la PMA
Source : Pièces et main d'oeuvre, Resistenze al
nanomondo, « Contre l'eugénisme et l'anthropocide. Appel pour
l'abolition de toute reproduction artificielle de l'humain », journal
La Décroissance, n°163, octobre 2019, p.3-4
Annexe 6 : exemplaire du journal La
Décroissance brûlé lors du festival « les
Bure'lesques » en août 2019
Source : journal La Décroissance,
n°163, octobre 2019, p.2
Annexe 7 : exemple d'images satiriques
créées par Casseurs de pub
Sources : Figure 1, « Super
lessive », Casseurs de pub, 1999, p.40 ; Figure 2,
« Auchan », Casseurs de pub, 2002, p.15
Annexe 8 : rubrique « Casseurs de
pub » au sein du journal La Décroissance
Source : Jean-Luc Coudray pour la rubrique
« Casseurs de pub », Journal La
Décroissance, n°163, octobre 2019, p. 11
Annexe 9 : exemples de couverture mensuelle
Sources : Journal La Décroissance,
n°163, octobre 2019 ; journal La Décroissance,
n°166, février 2020.
Annexe 10 : rubrique « La saloperie que nous
n'achèterons pas »
Source : Vincent Cheynet pour la rubrique « La
saloperie que nous n'achèterons pas », Journal La
Décroissance, n°163, octobre 2019, p.6
Annexe 11 : exemple d'« écotartufe du
mois »
Source : Vincent Cheynet pour la rubrique
« L'écotartufe du mois », Journal La
Décroissance,n°166, février 2020, p. 6
Annexe 12 : sommaire de la revue Silence
Source : revue Silence, n°487, mars 2020,
p.3
Annexe 13 : brèves d'alternatives
écologiques
Source : revue Silence, n°487, mars 2020,
p.16-17
Annexe 14 : exemples de chercheuses alliées
Source : GILSON Martha, « La mode : une
industrie sexiste » avec la participation de la chercheuse
américaine Cynthia Enloe. Revue Silence, n°483, novembre
2019, p.36-37
Source : GAMBLIN Guillaume, « La ZAD et son
avenir en débats » avec la participation de Geneviève
Coiffard, Maud du Collectif de solidarité du Rhône, et
d'AnahitaGrisoni, chercheuse et membre du collectif GPII. Revue
Silence, n°483, p.11-15.
Annexe 15 : rubrique « simplicité
volontaire » mettant à l'honneur des militants
Source : rubrique « Simplicité
volontaire », journal La Décroissance, n°166,
février 2020, p.7
Annexe 16 : numéro de la revue Silence
dédié à la ZAD de Notre-Dame-des-Landes
Source : revue Silence, n°483, novembre
2019
Annexe 17 : un dossier consacré à une
alternative militante au sein de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes
Source : GILSON Martha, « Réussites et
échecs de l'autogestion dans la ZAD », revue Silence,
n°483, novembre 2019, p.8-10
Annexe entretiens
Pour des raisons de confidentialité des propos tenus,
les entretiens en intégralité ne sont pas disponibles à la
lecture.
* 1 COMBY Jean-Baptiste,
« Quand l'environnement devient
«médiatique« », Réseaux, n°
157-158, 2009, p. 157-190.
* 2 KEATING Juliette,
« Portrait d'Arthur, La Gueule Ouverte »,
Médiapart, 18 août 2015. [Cité le 17 mars 2020].
Disponible sur :
https://blogs.mediapart.fr/edition/je-me-souviens/article/180815/portrait-darthur-la-gueule-ouverte
* 3 BAYON Denis, FLIPO
Fabrice, SCHNEIDER François, La décroissance. La
Découverte, 2012, p. 62
* 4 ZAVRSNIK Damien, La
question de la décroissance chez les verts français,
Mémoire, Université Aix-Marseille : Institut d'Etudes
Politiques, 2012, 209 p.
* 5 FLIPO Fabrice
« Les cinq sources de la décroissance »,
Implications philosophiques, 16 janvier 2015. [Cité le 13juin
2020]. Disponible sur :
http://www.implications-philosophiques.org/actualite/une/les-cinq-sources-de-la-decroissance/#_ftn2
* 6 MEADOWS Dennis, MEADOWS
Donella, RANDER Jorgen, Halte à la croissance ?, Paris, Fayard,
1972
* 7 FLIPO Fabrice,
ibid.
* 8 Conférence de
FLIPO Fabrice à l'ENS de Lyon, « La solution de la
décroissance », publié le 20/02/2016. [Consulté
le 13juin 2020]. Disponible sur :
http://ses.ens-lyon.fr/articles/la-solution-de-la-decroissance
* 9 LATOUCHE Serge,
Décoloniser l'imaginaire : La pensée contre
l'économie de l'absurde, Parangon, 2011.
* 10 FLIPO Fabrice,
ibid.
* 11 Conférence de
Flipo Fabrice à l'ENS de Lyon, ibid.
* 12 ILLICH Ivan,La
Convivialité, in OEuvres complètes, Fayard, Paris, 2004,
p.479
* 13 Conférence de
FLIPO Fabrice à l'ENS de Lyon, ibid.
* 14 Conférence de
FLIPO Fabrice à l'ENS de Lyon, ibid.
* 15 ARIES Paul,
Décroissance ou barbarie, Editions Golias, Paris, 2005
* 16WAGNER Anne-Catherine,
« Champ », Sociologie, [en ligne], Les 100 mots de la
sociologie, publié le01/02/2016, consulté le 15 juin 2020.
Disponible sur :
http://journals.openedition.org/sociologie/3206
* 17 FRANLKIN Bob, Key
Concepts in Journalism Studies, London, Thousand Oaks, SAGE Publications,
2005., p.157
* 18 WAGNER Anne-Catherine,
ibid.
* 19 WAGNER Anne-Catherine,
ibid.
* 20 CHAMPAGNE Patrick,
« La vision médiatique » in BOURDIEU Pierre, La
misère du monde, Paris, Seuil, 1993, p 61-79
* 21MARCHETTI D.,
« Les sous-champs spécialisés du
journalisme », Réseaux, n°111, 2002, p.22-55
* 22 CROZET Dimitri, Le
journalisme environnemental face auxnouveaux conflits écologiques :
unespécialisation en mutation. L'exemple de Sivens. Mémoire
de Master professionnel journalisme, Université Stendhal Grenoble 3, UFR
LlasicDépartement journalisme, 2015, 61 p.
* 23 NEDJAR Akila. Le
thème de l'environnement dans les médias
généralistes. Thèse, école
normale supérieure lettres et sciences humaines, Lyon,
2000
* 24 MARCHETTI D.,
ibid.
* 25 LEVEQUE Sandrine,
« Introduction » in LEVEQUE Sandrine (dir.), RUELLAN Denis
(dir.), Journaliste engagés, Presses universitaires de Rennes,
« Res Publica », 2010, p. 10-11
* 26 LEVEQUE Sandrine,
ibid., p. 11
* 27 KEMPF Hervé,
« Vivre avec moins et mieux, car le pire est à
venir », Le Monde, 4 mars 2004. [Cité le 17 mars
2020]. Disponible sur :
https://www.lemonde.fr/archives/article/2004/03/04/vivre-avec-moins-et-mieux-car-le-pire-est-a-venir_355493_1819218.html
* 28ASSADOURIAN Erik,
« The Path to Degrowth in Overdeveloped Countries » in The
Worldwatch Institude, State of the World 2012, Moving toward sustainable
prosperity, 2012.
* 29 Le colloque de Paris
réalisé par l'association Recherche et
décroissance ; le colloque de Berlin réalisé par
ATTAC Allemagne ; le colloque d'Istanbul réalisé
par la European Society for Ecological Econoics ; le colloque de
Vienne réalisé par le Sustainable Europe Research
Institute ; la « Conférence internationale sur la
décroissance dans les Amériques » à
Montréal ; le colloque de Venise intitulé « La
grande transition, la décroissance comme changement de
civilisation ».
* 30 BAYON Denis, FLIPO
Fabrice, et SCHNEIDER François, ibid., p.62-63
* 31 ARNAUDET Mathieu,
Militer pour la décroissance. Enquête sur la genèse
d'un "mouvement politique" de la décroissance en France.
Mémoire de M1 Sciences Politiques, Université Rennes 1
* 32 ARNAUDET Mathieu,
ibid.
* 33 ZAVRSNIK Damien,
ibid.
* 34 LESNE Philippe,
« Décroissance », Le Monde Diplomatique,
août 2009. [Cité le 17 mars 2020]. Disponible sur :
https://www.monde-diplomatique.fr/2009/09/A/18185
* 35 BAYON Denis, FLIPO
Fabrice, et SCHNEIDER François, ibid., p.13
* 36COCHET Yves,MAMERE
Noël, FERRIN Mireille, LIPIETZ Alain et BAUPIN Denis, « Point de
vue : Pour une décroissance solidaire », le 20 août
2008. [Cité le 17 mars 2020]. Disponible sur :
https://www.lesechos.fr/2008/08/point-de-vue-pour-une-decroissance-solidaire-513490
* 37 MOSCOVICI Serge,
Psychologies des minorités actives. Presses Universitaire de
France, 19991
* 38 EELV, « Le
projet bien vivre ». [Internet]. [Cité le 17 mars 2020].
Disponible sur :
https://eelv.fr/bienvivre/
* 39 BAYON Denis, FLIPO
Fabrice, et SCHNEIDER François, ibid., p.71
* 40 ARNAUDET Mathieu,
ibid.
* 41 FLIPO Fabrice, «
Voyage dans la galaxie décroissante », Mouvements, vol.
50, no. 2, 2007, pp. 143-151.
* 42 Les OC parlent aux OC,
« Lettre ouverte à Vincent Cheynet et au journal la
décroissance », Bellaciao, 18 mai 2011. [Internet].
[Consulté le 17 juin 2020]. Disponible sur :
http://bellaciao.org/fr/spip.php?article117184
* 43 BURLET Laurent,
« L'écologie radicale se déchire :
«décroissance de gauche« contre «décroissance de
droite« », Rue89Lyon, 8 juin 2012. [Internet].
[Consulté le 17 juin 2020]. Disponible sur :
https://www.rue89lyon.fr/2012/06/08/ecologie-radicale-dechire-decroissance-gauche-contre-decroissance-droite%E2%80%A8%E2%80%A8/
* 44 Le PPLD reprend une des
rubriques phares du journal, « La saloperie que nous
n'achèterons pas » pour se désolidariser du journal.
* 45 Parti pour la
décroissance, « Des objecteurs de croissance critiquent le
journal «La Décroissance« », Reporterre, 6
janvier 2012. [Internet]. [Consultéle 17 juin 2020]. Disponible sur:
https://reporterre.net/Des-objecteurs-de-croissance
* 46 BURLET Laurent,
ibid.
* 47 Voir annexe partie
« entretiens »
* 48 Voir annexe 1
* 49 Voir annexe 2
* 50 Voir annexe 3
* 51 Cette idée
qu'une société plus écologique passera par l'abolition du
patriarcat est assez répandue auprès des militants
écologistes. C'est une idée qui se base sur les travaux de
certains intellectuels comme Erich Fromm ou Wilhelm Reich. Cette théorie
est souvent reprise par certains décroissants comme Serge Latouche qui
en parle dans un livre publié en 2011 et intitulé Vers une
société d'abondance frugale.
* 52 CHEYNET Vincent,
Décroissance ou décadence, Le Pas de côté,
2014, p.42
* 53 CHEYNET Vincent,
ibid, p.43
* 54 CHEYNET Vincent,
ibid, p.89
* 55 Voir annexe 4
* 56 Voir annexe 5
* 57 Voir annexe 6
* 58 JUHEM Philippe,
« Alternances politiques et transformation du champ de l'information
en France après 1981 », Politix, vol. 14, n°56,
2001, p. 185-208
* 59 SAITTA Eugénie,
« Les transformations des rapports entre journalisme et
politique » in LEVEQUE Sandrine (dir.), RUELLAN Denis (dir.),
Journaliste engagés, Presses universitaires de Rennes,
« Res Publica », 2010 p. 33.
* 60 SAITTA Eugénie,
ibid., p. 39
* 61 BOURDIEU Pierre,
« L'emprise du journalisme » in: Actes de la recherche
en sciences sociales. Vol. 101-102, mars 1994, p. 4.
* 62Casseurs de pub
[Internet]. [Cité le 17 mars 2020]. Disponible sur:
http://www.casseursdepub.org/index.php?menu=pourquoi
* 63 FERRON Benjamin,
« Le journalisme alternatif entre engagement et
distanciation » in LEVEQUE Sandrine (dir.), RUELLAN Denis (dir.),
Journaliste engagés, Presses universitaires de Rennes,
« Res Publica », 2010, p. 110
* 64 FERRON Benjamin,
ibid., p. 111
* 65 SIMON Justine, «
Les Casseurs de pub contre la société de consommation !
Stratégies de détournement pour convaincre », Mots. Les
langages du politique [en ligne], n°98, 2012. [Consulté le 16
juin 2020], disponible sur :
http://journals.openedition.org/mots/20602
* 66 Voir annexe 7
* 67 Voir annexe 8
* 68 ARIES Paul,
Décroissance ou barbarie, éd. Golias, 2005, 163 p.
* 69 Voir annexe 9
* 70 Voir annexe 10
* 71 Voir annexe 11
* 72 France Culture : «
Peut-on être journaliste environnemental sans être militant ?
», 9 juin 2018. [Cité le 17 mars 2020]. Disponible sur :
https://www.franceculture.fr/emissions/la-fabrique-mediatique/peut-etre-journaliste-environnemental-sans-etre-militant
* 73 Voir annexe 12
* 74 Voir annexe 13
* 75 CHUPIN Ivan, MAYANCE
Pierre. « Une formation hors de son champ. L'échec de la
filière journalisme agricole à l'ESJ », Études
rurales, vol. 198, no. 2, 2016, pp. 39-58.
* 76 CHUPIN Ivan, MAYANCE
Pierre, ibid.
* 77 SCHLESINGER Phillip.
Traducteurs : ZEITLIN Edith, RIZZI Suzanne. « Repenser la
sociologie du journalisme. Les stratégies de la source d'information et
les limites du média-centrisme » in Réseaux,
volume 10, n°51, 1992. Sociologie des journalistes. pp. 75-98
* 78 SCHLESINGER Phillip,
ZEITLIN Edith, RIZZI Suzanne, ibid.
* 79 SCHLESINGER
Phillip,ZEITLIN Edith, RIZZI Suzanne,ibid.
* 80 SCHLESINGER
Phillip,ZEITLIN Edith, RIZZI Suzanne,ibid.
* 81KACIAF Nicolas, NOLLET
Jérémie. « Présentation du dossier. Journalisme :
retour aux sources », Politiques de communication, vol. 1, no. 1,
2013, pp. 5-34.
* 82 KACIAF Nicolas, NOLLET
Jérémie, ibid.
* 83 KACIAF Nicolas, NOLLET
Jérémie, ibid.
* 84Reporterre [Internet].
[Cité le 17 juin 2020]. Disponible sur:
https://reporterre.net/
* 85 On retrouve par exemple
Anahita Grisoni, chercheuse à l'ENS de Lyon et membre du collectif
contre les Grands Projets Inutiles et Imposés (GPII) ou encore la
chercheuse américaine Cynthia Enloe sur le féminisme qui ont
participé au n°483 de la revue Silence, plus de
détails en annexe 14.
* 86 Voir annexe 15
* 87 Voir annexe 16
* 88 Voir annexe 17
* 89 HALLIN Daniel, The
Uncensored War: The Media and Vietnam, Oxford University Press, 1986
* 90 FRANKLIN Bob,
ibid, p.92.
* 91 En octobre 2019, un
sondage Odoxa montre que 54% des français préfèrent le
terme de décroissance à celui de croissance verte et pensent que
le moyen le plus efficace pour résoudre les problèmes
écologiques et climatiques actuels et futurs et de « changer
fondamentalement notre mode de vie, nos déplacements et réduire
drastiquement notre consommation ». En avril 2020, un sondage
réalisée par l'institut Viavoice montre que 69% des
français jugent nécessaire de « ralentir le
productivisme et la recherche perpétuelle de
rentabilité ».
* 92 Durant l'entretien avec
Pierre Thiesset, il a notamment reproché aux journalistes
environnementaux officiant dans les média traditionnels « le
manque de cohérence », avec d'un côté la
présence « d'articles qui peuvent aller dans notre sens en
décrivant la situation écologique de manière objective
comme dans le journal Le Monde », et de l'autre
côté la présence de « prises de position qui vont
être libérales et défendre l'intérêt des
propriétaires du Monde ». Selon lui,
« c'est pas vraiment avec eux qu'on pourrait construire une
société plus écologiste ».
* 93 SCHLESINGER Phillip,
ZEITLIN Edith, RIZZI Suzanne, ibid.
* 94 VAIRLET Florent,
« Le nouveau poids du lobby de la
«décroissance« », Les Echos Start, 25 juin
2020. [Internet]. [Consultéle 10 juillet 2020]. Disponible sur :
https://start.lesechos.fr/societe/environnement/le-nouveau-poids-du-lobby-de-la-decroissance-1218643
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