I.4. LES DIAGNOSTICS DIFFERENTIELS
[12,14]
-Pied en inversion appelé pied en varus global
réductible ou, pes supinatus qui se caractérise par la plante de
pied qui regarde en dedans ; la flexion dorsale de cheville est >
à 20° ; le varus de l'arrière-pied est facilement
réductible par manipulation ; le bord latéral et le bord
médial sont rectilignes. Il n'y a pas de sillon cutané. Les
muscles éverseurs sont faibles mais stimulables.
-Le métatarsus varus (MTV) ou métatarsus
adductus est une déformation dans l'articulation de Lis franc, entre le
médiotarse et les métatarsiens superposés (ni supination,
ni varus de l'arrière pied).
-Le pied calcanéus anciennement appelé pied
talus. Il s'agit d'une déformation secondaire à la position in
utero. Souvent, le foetus avant la naissance, est en triple flexion.
L'exagération de cette position en compression intra-utérine, est
responsable de la déformation en pied calcanéus. L'attitude du
pied est en flexion dorsale exagérée. On recherche une limitation
possible de la flexion plantaire. La plante du pied est orientée vers
l'avant. Le triceps sural est parfois un peu faible. Le muscle tibial
antérieur est souvent hypo-extensible responsable du défaut de
flexion plantaire.
-Le pied calcanéus valgus. L'arrière-pied est
une position comparable à celle retrouvée dans le pied
calcanéus simple. On retrouve une saillie médiale de la
tête du talus. L'avant-pied est en pronation abduction .La plante
est orientée vers l'extérieur. Les muscles fibulaires sont
hypo-extensibles.
-Le pied convexe congénital il s'agit d'une
malformation définie par une luxation permanente de l'articulation
talo-naviculaire dans le plan antéropostérieur. Le talus est
très vertical, en équin (vertical talus en anglais).La colonne
médiale est concave vers le haut. On retrouve des rétractions
simultanées du tibial antérieur et du triceps.
I.5. TRAITEMENT
«Le pied bot est curable dans la majorité des cas.
Le mieux est de traiter cette lésion le plus tôt possible avant
qu'il ne devienne une atrophie prononcée» disait Hippocrate[14].
Son traitement a connu une évolution
qualitative passant des bandages depuis Hippocrate à la correction
chirurgicale avant d'être révolutionné au début du
20è siècle par la méthode de Ponseti. Cette
méthode largement rependue, associe une série de 4 plâtres
suivie d'une ténotomie percutanée du tendon d'Achille, d'une
immobilisation plâtrée, puis enfin d'une posture du pied à
l'aide d'une attelle de Steenbeek, John Mitchell, Matthew Dobbs, Markel,
Jeffrey Kessler, Romanus[12 ,15].
Quelle que soit la stratégie
thérapeutique choisie, un pied bot est une affection au long cours, dont
le traitement, contraignant dans les premières
années de vie, s'allège par la suite pour devenir simple
surveillance jusqu'à la fin de la croissance au moins, ce qui exige
l'adhésion au traitement par le parent.
Le traitement doit être entrepris sans moindre
retard, dès les 2 premiers jours de vie après la naissance, il
s'agit d'une véritable urgence néonatale[2, 3, 8,11-19].
Chaque visite hebdomadaire, le pied de l'enfant est délicatement
manipulé afin d'étirer les ligaments et tendons courts et rigides
de la cheville et du pied. Le pied est ensuite immobilisé dans des
positions de correction progressive à l'aide d'un plâtre[13]. Le
traitement orthopédique mis en oeuvre (méthode de Ponseti) est
subdivisé en 3 étapes essentielles : d'abord la
réduction de la déformation, la consolidation du résultat
obtenu et enfin la gestion du risque de récidive.
La première étape : la
réduction de la déformation est la phase capitale, avec une
durée de 6-8 semaines .La réduction se fait respectivement
de la manière suivante : la correction de l'adduction, la
correction du cavus jamais de pronation ni d'éversion,
déverrouiller le pied en supination par dérotation progressive du
bloc calcanéo-pédieux (fig.1). La correction de l'équin
est progressive et douce. Avant et après chaque plâtre le pied bot
est évalué en utilisant la classification de Diméglio.
Après le cinquième plâtre une section
percutanée du tendon d'Achille (ténotomie) est
indiquée puis la pose d'un plâtre pour la correction de
l'équin.
Fig.1. Correction séquentielle par
plâtres hebdomadaires
La deuxième étape la
consolidation du résultat obtenu qui dure 4 mois consistant à la
rééducation et le maintien des postures par attelle (fig.2). La
mise en place de l'attelle de posture intervient après le dernier
plâtre (7è et 8è).
La troisième étape consiste en la
gestion du risque de récidive et le maintien de la correction, elle dure
3 ans. Il est très important de ne pas arrêter le traitement,
même en cas de bon résultat après les 2 premières
phases, et de faire suivre régulièrement son enfant par la
consultation d'orthopédie tous les 3 mois. La croissance du pied risque
de provoquer la récidive des déformations. Les principes de
traitement sont la contention de nuit par attelle (fig.2) et la
kinésithérapie[8, 13-17].
Fig.2. Attelle de Steenbeek
A la fin des plâtres, le pied est en forte
abduction, d'environ 60-70 degrés (axe cuisse-pied). Après la
ténotomie le plâtre final est laissé en place pendant 3
semaines. Le protocole Ponseti fait alors appel à une attelle
pédieuse en abduction maintenant le pied en abduction afin de garder
l'abduction du calcanéum et de l'avant-pied et afin de prévenir
les récidives.
Pour les formes unilatérales, l'attelle est
réglée à 60-70 degrés de rotation externe du
côté du pied bot et à 30-40 degrés normal. Pour les
formes bilatérales, l'attelle est réglée à 70
degrés de rotation externe sur chaque côté.
L'attelle doit être portée à
temps pleine (jour et nuit) pendant les 3 premiers mois après l'ablation
du plâtre. Après cela l'enfant portera l'attelle 12 heures la nuit
et 2-4 heures pendant la sieste, pour un total quotidien de 14-16 heures. Ce
protocole doit être poursuivi jusqu'à l'âge de 3-4 ans.
Parfois, l'enfant peut développer un excès de valgus de
l'arrière-pied et de torsion tibiale externe avec attelle. Dans ce cas,
il faut réduire la rotation externe des chaussures de 40-70
degrés[14].
Pour assurer un bon suivi, programmer une
consultation après 10-14 jours pour vérifier l'utilisation de
l'attelle. Si le port de l'attelle se passe bien, une consultation nouvelle est
de 4 mois après acquisition de la marche autonome et un bilan
radiographique précis est réalisé. Après
l'arrêt de l'utilisation de l'attelle vers l'âge de 3 ou 4 ans le
rythme de surveillance est de 2 contrôles par an. A partir de 6 ans, le
rythme de surveillance est d'un contrôle par an jusqu'à la fin de
la croissance[14].
Le risque des récidives est important en cas d'abandon
du port des sandales et de l'attelle dans les 2-4 mois qui suivent. La prise en
charge des récidives utilise la même méthode de traitement
fait d'une succession de plâtre (3-4 plâtres) soit par
manipulations et plâtres, mais elles demandent habituellement moins de
plâtres, installés à plus grands intervalles, le port de
l'attelle jour et nuit, plusieurs séances de
ténotomie[14 ,15].
Le traitement chirurgical est indiqué
lorsque le résultat, clinique et radiologique, est insuffisant
après une série de plâtres correctifs, appliqués
dès la naissance, à raison d'un plâtre par semaine, pendant
3-6 mois de préférence selon la méthode de Ponseti. Il
concerne également les pieds bots négligés qui n'ont pu
être pris en charge en période néonatale suite au manque de
ressources médicales. Ce traitement comprend trois phases : la
libération postérieure, la libération interne et la
réduction et fixation[22, 23].
La libération postérieure (fig.3)
permet de sectionner en toute sûreté la couche superficielle du
ligament latéral interne de l'articulation du cou-de-pied ou ligament
deltoïdien, en respectant sa couche profonde (intouchable).
La libération interne (fig.3): on
commence par enlever le tissus fibreux qui recouvre dans beaucoup de cas le
scaphoïde (os naviculaire), la tête de l'astragale, la petite
apophyse du calcanéum (sustentaculum tali) et la malléole
interne.
Fig.3. La libération
postéro-interne
La réduction et fixation : il est maintenant
possible de réduire le scaphoïde. Mais il est à proscrire de
faire une hypercorrection en plaçant le scaphoïde trop
latéralement sur la tête de l'astragale ceci provoque un pied plat
extrême. On monte une bronche de Kirchner sur une poignée en T ou
sur une chignole et on l'insère dans la tête de l'astragale pour
la faire sortir par l'aspect postérieur de l'astragale. En suite on
réduit le scaphoïde, le premier cunéiforme et la base du
premier métatarsiens pour faire sortir par la peau à la face
dorsale du premier métatarsien. Fermeture, plâtre et soins
postopératoires.
A partir de 5 ans on peut faire une
ostéotomie de la base des métatarsiens ou bien on raccourcit le
bord externe du pied. Entre 1.5 et 6 ans, on procède à une
décanillassions du cuboïde. Entre 3 et 10 ans :
ostéotomie en soustraction du calcanéum selon DWYER[22,23].
Pour le traitement orthopédique, le score de
Diméglio sert à l'évaluation de la déformation en
pré et post-traitement. Les résultats sont
considérés comme : bon, il ne persiste aucune
déformation ; moyen, persistance d'une déformation ;
mauvais, persistance d'au moins 2 déformations[9, 13,15].
|