UNIVERSITE OMAR BONGO C E R G E P
Faculté des Lettres et Sciences
Humaines Département de Géographie
MASTER RECHERCHE EN GÉOSCIENCES
POLITIQUES
Mémoire de Master II
LES INSTRUMENTS DU COPAX FACE AUX ENJEUX SECURITAIRES EN
AFRIQUE CENTRALE
Présenté par :
Cyr Revelli MBA ABESSOLO
Sous le direction de:
Pr. Jean François OWAYE
Dr en Histoire militaire et Etude de Défense
(Montpellier III)
Maître de Conférences d'Histoire
contemporaine, Département d'Histoire et Archéologie
Libreville, Août 2014
1
DÉDICACE
Je dédie ce travail,
A mon regretté père Jean de Dieu ABESSOLO
NDONG,
A ma mère Marie Claire MBANG OVONO, à ma
fiancée Emmanuelle Conny NTONGONE BEKALE,
A mes frères Martial EYI AKWE et Jean Daniel AKWE
ABESSOLO
A mes soeurs, Justine Lila MENGUE M'AKWE, Edith Josiane
OKOME ABESSOLO, Charlène Flore MEDZA M'ABESSOLO.
Je n'oublie pas mes neveux et mes nièces, vous
êtes tellement nombreux que je ne peux vous citer tous.
2
REMERCIEMENTS
Nous tenons à adresser nos sincères
remerciements au Professeur Marc-Louis ROPIVIA et au Docteur Serge LOUNGOU qui
nous ont conseillé et recadré tout au long de cette formation.
Nous remercions le Professeur Jean-François OWAYE, notre directeur de
recherche, pour sa patience et son ouverture d'esprit mais surtout pour le
regard très attentif porté sur ce travail. Nous n'oublions pas le
Colonel Pierre ATTOMO NDONG, M. Daniel ELONO, le Lieutenant Colonel Guy-Georges
NGAMAMBA, le Colonel Bellarmin NDONGUI et M. Jean Claude MBASSY qui ont fait
preuve de disponibilité, ils nous ont guidés tout au long de nos
recherches au sein de la CEEAC, cela malgré leurs emplois du temps
très chargés.
Nos remerciements vont aussi à l'endroit du Dr
Emmanuel ONDO ASSOUMOU et M. Elvis METHOGO ME NDONG pour leur soutien moral et
matériel. A tous les enseignants du Département de
Géographie qui dirigent nos pas depuis la 1ère
année. A ces enseignants, nous associons tous les étudiants du
département et plus précisément à ceux du Master
Géosciences Politiques.
3
DÉDICACE
Je dédie ce travail,
A mon regretté père Jean de Dieu ABESSOLO
NDONG,
A ma mère Marie Claire MBANG OVONO, à ma
fiancée Emmanuelle Conny NTONGONE BEKALE,
A mes frères Martial EYI AKWE et Jean Daniel AKWE
ABESSOLO
A mes soeurs, Justine Lila MENGUE M'AKWE, Edith Josiane
OKOME ABESSOLO, Charlène Flore MEDZA M'ABESSOLO.
Je n'oublie pas mes neveux et mes nièces, vous
êtes tellement nombreux que je ne peux vous citer tous.
4
REMERCIEMENTS
Nous tenons à adresser nos sincères
remerciements au Professeur Marc-Louis ROPIVIA et au Docteur Serge LOUNGOU qui
nous ont conseillé et recadré tout au long de cette formation.
Nous remercions le Professeur Jean-François OWAYE, notre directeur de
recherche, pour sa patience et son ouverture d'esprit mais surtout pour le
regard très attentif porté sur ce travail. Nous n'oublions pas le
Colonel Pierre ATTOMO NDONG, M. Daniel ELONO, le Lieutenant Colonel Guy-Georges
NGAMAMBA, le Colonel Bellarmin NDONGUI et M. Jean Claude MBASSY qui ont fait
preuve de disponibilité, ils nous ont guidés tout au long de nos
recherches au sein de la CEEAC, cela malgré leurs emplois du temps
très chargés.
Nos remerciements vont aussi à l'endroit du Dr
Emmanuel ONDO ASSOUMOU et M. Elvis METHOGO ME NDONG pour leur soutien moral et
matériel. A tous les enseignants du Département de
Géographie qui dirigent nos pas depuis la licence 1. A ces enseignants,
nous associons tous les étudiants du département et plus
précisément à ceux du Master Géosciences
Politiques.
5
Sigles et acronymes utilisés
ACP : Afrique, Caraïbes, Pacifique
ACRI : African Crisis Response Initiative
AEF : Afrique équatoriale
française
ALPC : Armes légères et de petit
calibre
ANAD : Accord de non agression et d'assistance en
matière de défense
CBLT : Commission du bassin du lac Tchad
CEPGL : Communauté économique des pays
des grands lacs
CCPNUQSAC : Comité consultatif permanent des
Nations sur les questions de sécurité en
Afrique centrale
CCPAC : Comité des Chefs de Police d'Afrique
centrale
CEDEAO : Communauté économique des Etats
de l'Afrique de l'ouest
CEEAC : Communauté économique des Etats
de l'Afrique
Centrale
CEMAC : Communauté Economique et
monétaire de l'Afrique centrale
CER's : Communauté économique
régionale
CPS/UA : Conseil de paix et sécurité de
l'Union africaine
DDRRR Désarmement, démobilisation,
réhabilitation, réintégration,
réinstallation
FMI : Fonds monétaire international
GSS Gouvernance du secteur de la
sécurité
FOMAC : Force multinationale d'Afrique
centrale
GRIP : Groupe de recherche et d'information sur la
paix et la sécurité
MARAC : Mécanisme d'alerte rapide de l'Afrique
centrale
MISAB : Mission interafricaine de surveillance des
accords de Bangui
MDCS : Mesures de confiance et de
sécurité
MONUC : Mission d'observation des Nations unies au
Congo
NEPAD : Nouveau partenariat pour le
développement de l'Afrique
OCDE : Organisation de coopération et de
développement Economique
ONG : Organisation non-gouvernementale
ONU : Organisation des Nations unies
OUA : Organisation de l'unité
africaine
6
PAL : Plan d'action de Lagos
PAM : Pacte d'assistance mutuelle
RCA : République Centrafricaine
RDC : République Démocratique du
Congo
RECAMP : Renforcement des capacités africaines
de maintien de la paix
UDEAC : Union douanière et économique de
l'Afrique centrale
UA : Union africaine
UE : Union européenne
UNICEF : Fonds des Nations unies pour
l'enfance
7
SOMMAIRE
INTRODUCTION GENERALE
PREMIERE PARTIE : LES ENJEUX SECURITAIRE EN AFRIQUE
CENTRALE
Chapitre I : L'INSECURITE EN AFRIQUE CENTRALE, UN
PROBLEME AVANT TOUT DE
GOUVERNANCE 22
I. Les principales sources de
l'insécurité en Afrique centrale 22
II. Les manifestations de l'insécurité
en Afrique centrale 36
Chapitre II : LES LOGIQUES ET LES ACTEURS DE L'IRENISME
EN AFRIQUE
CENTRALE 42
I. La recherche de la paix et la
sécurité sous-régionale 42
II. La CEEAC, maître d'oeuvre de l'architecture
de la paix et de la sécurité en Afrique
centrale 45
DEUXIEME PARTIE : LES INSTRUMENTS DU COPAX : ENTRE
THEORIE ET PRATIQUE
Chapitre III : LES PRINCIPAUX INSTRUMENTS DU COPAX:
FONCTIONNEMENT ET
DIFFICULTES 53
I. Le Conseil de paix et de sécurité de
l'Afrique centrale (COPAX) 53
II. Le Mécanisme d'Alerte Rapide et la Force
multinationale de l'Afrique centrale en théorie 56
III. Les moyens de mise en oeuvre du COPAX à
l'épreuve des faits 65
Chapitre IV : L'ADAPTATION DU COPAX AUX DEFIS
SECURITAIRES EN AFRIQUE
CENTRALE
|
|
78
|
I. Les réformes de la CEEAC dans le domaine de
la paix et la sécurité
|
|
78
|
II. Vers une réforme et une redynamisation du
COPAX
|
|
90
|
|
CONCLUSION GENERALE
|
....102
|
SOURCES & BIBLIOGRAPHIE
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|
106
|
TABLE DES ILLUSTRATIONS
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|
109
|
ANNEXES
|
110
|
|
8
INTRODUCTION GÉNÉRALE
9
I. JUSTIFICATION DU SUJET
Dans cette sous section de notre introduction nous
nous préoccupons du choix du sujet, de l'intérêt du sujet
et de l'objet d'étude.
I.1. Choix du sujet
Le choix de notre sujet «Les instruments du
COPAX face aux enjeux sécuritaires en Afrique centrale »
découle de plusieurs constats. D'abord, l'Afrique centrale continue
d'être une zone extrêmement affectée par les conflits
armés et la criminalité sous toutes ces formes et que la
récurrence des conflits et de l'insécurité aussi bien sur
la mer que dans l'hinterland freine toute dynamique d'intégration dans
la sous région et remet en cause toute perspective de
développement dans cette partie du continent africain
Aussi, l'Afrique depuis la disparition des
rivalités est-ouest a-t-elle perdu son statut
d'enjeux stratégique. Face à cette
situation, les grandes puissances ce sont
quasiment désengagées, dans les missions de maintient de la
paix et ce via la réduction de la taille des armées1.
Elles résistent désormais à envoyer leurs troupes en
maintien de la paix sur le continent. Les Nations Unies, qui ne peuvent
être sur tous les fronts, encourage la contribution des organisations
régionales et sous-régionales à l'effort de paix
mondial2. Les priorités nationales devenant ainsi
obsolètes dans l'approche des problèmes globaux. Les orientations
universalistes, régionales sont les plus pertinentes. Au fil des ans,
l'Afrique centrale a accumulé un large éventail de
décisions et résolutions qui sont autant de promesses de paix et
de sécurité : Pacte de non-agression, Conseil de paix, forces en
attentes, etc. Judicieusement mises en oeuvres, nombre de ces décisions
peuvent sauver l'Afrique centrale de l'enfer de la guerre et de
l'insécurité. Aujourd'hui, malgré son rôle de
pionnier dans le domaine de la diplomatie préventive3,
l'Afrique centrale continue de s'enfoncer dans la violence armée.
Comparativement à d'autres sous-régions du continent - Afrique
australe, Afrique de l'ouest ou Corne de l'Afrique - l'Afrique centrale peine
à se bâtir une dynamique
1 E. Mvie Meka,
L'architecture de la sécurité et gouvernance
démocratique dans la CEEAC. Friedrich Ebert Stiftung
(FES)
2 Charte des Nations Unies, chapitre VIII, paragraphes
1, 2, 3
3 Voir la préface d'A. Ayissi dans l'ouvrage de
Moutoy Mubiala, « Coopérer pour la paix en Afrique centrale »,
UNIDIR 2003.
endogène de paix4. Il ne saurait en
être autrement tant que l'essentiel des importantes décisions
prises depuis des décennies attendent toujours d'être
effectivement appliquées.
Enfin, l'architecture de paix de la CEEAC s'articule
autour d'un mécanisme devisant à la promotion de la paix, de la
sécurité et de la stabilité : le Conseil de paix et de
sécurité de l'Afrique centrale, COPAX, créé par un
Protocole du 24 février 2000 (Protocole relatif à
l'établissement du COPAX). Le COPAX est l'organe de concertation
politique et sécuritaire des Etats membres. Entré en vigueur en
janvier 2004, il est compétent pour traiter tant des conflits
interétatiques que des conflits internes ; mais aussi de lutter contre
la criminalité sous toutes ses formes. Le conseil s'appuie sur deux
organes techniques (MARAC, FOMAC) pour la réalisation de ses
objectifs.5
10
4 A. Ayissi, op., cit.
5 Protocole relatif au Conseil de Paix et de
Sécurité de L'Afrique Centrale (COPAX), Chapitre III, section I,
article 21 le MARAC , section II, article 23 pour la FOMAC.
11
Carte 1 : Localisation de l'espace CEEAC
12
L'espace CEEAC est peuplé d'environ 125, 6
millions d'habitant6 sur une superficie de 6 millions de
km2. Le cadre spatial de la CEEAC englobe les anciens territoires de
l'Afrique équatoriale française (AEF) - Congo-Brazzaville, Gabon,
Tchad, Oubangui- les anciennes possessions belges (Burundi, Rwanda, Congo)
portugaises (Angola avec le Cabinda, Sao Tomé & Principé), et
l'ex-colonie espagnole de la Guinée équatoriale. L'espace CEEAC
intègre à son sein le cadre géopolitique de la
Communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale
(CEMAC). Certains de ses Etats membres appartiennent à d'autres
communautés économiques régionales (CERs). Le Tchad fait
partie de la Communauté des Etats sahéliens. Le Cameroun, la
Centrafrique, le Tchad font partie de la Commission du bassin du lac Tchad
(CBLT). L'Angola, la RDC sont les partenaires de ceux de la Communauté
de développement de l'Afrique australe (SADC). Le cadre spatial de la
CEEAC est une voie stratégique directe partant du pôle nord en
direction de l'Atlantique Sud. Le Tchad, le Cameroun, le Congo-Brazzaville, la
République démocratique du Congo, qui sont sur cet
itinéraire direct vers l'Atlantique Sud, revêtent,
individuellement et en groupe, un intérêt
géostratégique qui suscite des convoitises multiples des grandes
puissances7.
Cet espace - carrefour est aussi l'une des zones les
plus riches en ressources naturelles variées. Rappelons
brièvement que tous ces Etats, excepté encore le Rwanda et le
Burundi sont des Etats pétroliers. La Côte atlantique,
principalement le golfe de Guinée, la baie du Biafra, s'annoncent comme
le terminal pétrolier africain le plus important et probable point
d'exportation du brut soudanais, tchadien, centrafricain, nord-camerounais dans
un avenir proche. L'Angola, la Guinée équatoriale, le Congo
Brazzaville, sont producteurs de pétrole après le Nigeria avec
lequel ils partagent comme le Cameroun, Sao Tomé & Principe, les
aspirations pour une même sphère de co-prospérité et
de paix dessinée par la Commission du golfe de Guinée. Les
ressources forestières d'une part et les ressources minières
d'autre part, de la zone CEEAC sont les plus importantes de toute l'Afrique
médiane. La RDC et le Gabon, l'Angola et le Cabinda sont de
véritables «scandales géologiques8.
6 Selon Human Development Report 2007/2008, Voir
COMMISSION ECONOMIQUE DES NATION UNIS POUR L'AFRIQUE, BUREAU SOUS-REGIONALE
AFRIQUE CENTRALE, 2008, Les économie de l'Afrique
centrale, Maison neuve & Larose
7 E. Mvie Meka, L'architecture de la
sécurité et gouvernance démocratique dans la CEEAC.
Friedrich Ebert Stiftung (FES)
8 Ibid.
13
I.2 Intérêt du sujet
La recherche de la paix et de la
sécurité dans l'espace CEEAC fait l'objet de plusieurs travaux
scientifiques actuellement. Nous pouvons citer entre autre, les travaux d'Elie
Mvié Meka « Architecture de la sécurité
et gouvernance démocratique en Afrique »,
d'Angéla Meyer « L'intégration régionale
et son influence sur la structure, la sécurité et la
stabilité des Etats faibles : l'exemple de quatre Etats centrafricains
», d'Emmanuel Ela Ela « Mécanisme et
prévention des conflits en Afrique centrale ». Mutoy
MUBIALA « Coopérer pour la paix en Afrique centrale
» pour ne citer que ceux là. C'est dans cette logique
que notre travail s'inscrit, c'est-à-dire, nous voulons via cette
étude apporter une contribution dans le domaine de la recherche de la
paix et la sécurité en Afrique centrale.
I.3 Objectifs de l'étude
Notre étude a pour objectifs de faire une
analyse des différents instruments du COPAX à savoir, le
mécanisme d'alerte rapide (MARAC), la force multinationale d'Afrique
centrale (FOMAC), leurs champs et surtout mesurer leur efficacité dans
la prévention , la gestion et la résolution des conflits
sous-régionaux et la lutte contre la criminalité sous toutes ses
formes. Nous voulons à cet effet nous démarquer des simples
descriptions faites sur ces composantes du COPAX pour comprendre leur
organisation, leur fonctionnement, leurs modes opératoires, enfin les
résultats sur le terrain depuis leur mise en place
effective.
Notre intention étant, plus
précisément, de permettre une meilleure visibilité de ces
instruments du COPAX et surtout présenter de manière
concrète à travers une étude minutieuse, le travail
effectué par ceux-ci.
I.4 Objet et champs d'étude
L'objet de notre travail n'est d'autre que
l'étude des instruments du COPAX (MARAC et FOMAC) et la
problématique des conflits et de l'insécurité au sein de
l'espace CEEAC. Comme nous l'avons souligné précédemment,
en Afrique centrale, l'engagement dans les processus de démocratisation
n'a pas empêché la situation politique de se dégrader et
d'aboutir à des situations conflictuelles. Plusieurs pays de la CEEAC
traversent cette situation néfaste à l'intégration
économique. Outre les destructions, les conflits s'accompagnent de
déplacements internes et externes de populations, de trafics d'armes, de
drogues et d'une grande insécurité. L'impact économique et
social désastreux des conflits est unanimement reconnu par les Etats
membres qui décident de régler le problème en
créant le conseil de paix et
de sécurité de l' Afrique centrale
(COPAX) dont les deux instruments cités ci-dessus jouent un rôle
fondamental dans l'accomplissement des missions du COPAX.
Ainsi, notre sujet s'inscrit-il dans le champ de la
géopolitique dans la mesure où nous aurons à faire une
analyse de la situation sécuritaire en Afrique centrale et du jeu des
relations entre Etats membres dans la compréhension et la conception de
la paix et la sécurité dans la sous région. Comme nous le
dit Paul Claval :
La géopolitique prend en compte l'ensemble des
préoccupations des acteurs sur la scène internationale, qu'ils
s'agissent des hommes d'Etat, de la diplomatie, de l'armée, des
organisations non gouvernementales ou de l'opinion publique. Elle s'interroge
sur les calculs des uns et des autres et sur ce qui les pousse à agir.
Elle se montre sensible à ce qui dans les plans que forment les
protagonistes reflète l'érogénéité de
l'espace et de : conditions naturelles, histoire, religion, la diversité
ethnique. Elle s'intéresse au objectifs de coopération ou de
détente tout au tant qu'à l'usage de la force ou de la
ruse9 .
De plus, nous aurons à étudier les modes
opératoires de ces deux instruments dans la recherche de la paix et de
lutte contre la criminalité sur toutes ses formes au sein de la
sous-région. De ce fait, notre sujet s'inscrit également dans le
champ de la géostratégie. La géostratégie est
l'étude, la préparation ou l'exécution d'opérations
militaires à l'échelle macro géographique,
c'est-à-dire à une dimension spatiale suffisante pour exclure la
constitution d'un théâtre unique. Son paradigme spécifique
est la coordination stratégique et logistique des différents
théâtres, envisagée dans sa relation aux divers milieux
physiques comme aux configurations spatiales. La coordination
stratégique envisage l'effet produit par les opérations d'un
théâtre donné sur les autres théâtres ; la
coordination logistique porte sur le transfert des forces entre
théâtres10.
14
9 P. Claval, 1991, Géopolitique et
géostratégie, Nathan, Paris, p. 6.
10 M. Motte,
Une définition de la
Géostratégie, Institut de Stratégie
Comparée, Commission Française d'Histoire Militaire, Institut
d'Histoire des Conflits Contemporains [En ligne]
www.stratisc.org,
consulté le 20 févier 2012.
15
II- PROBLEMATIQUE ET ENONCIATION DES HYPOTHESES
Cette sous section porte sur la problématique et
lé énonciation des hypothèses de notre étude.
II.1. Problématique
Originellement confinées à la mission
d'intégration économique, les organisations
sous-régionales ont progressivement pris en compte le lien étroit
existant entre la paix et le développement et se sont en
conséquence investies dans le domaine de la prévention, de la
gestion et du règlement des conflits et de la lutte contre
l'insécurité sous toutes ces formes11. En Afrique
centrale, la CEEAC a emboîté le pas à cette nouvelle
dynamique en s'engageant résolument dans la promotion des mesures de
confiance en vue de la prévention des conflits et du maintien de la
paix. La conférence au sommet du Conseil de
sécurité permanent pour les questions de sécurité
en Afrique australe qui a eu lieu à Yaoundé les 25 et 26
février 1999, les états membres ont proposé la
création d'une organisation chargée de la promotion, de la
maintient et de la consolidation de la paix et de la sécurité en
Afrique centrale : le Conseil pour la Paix et la Sécurité en
Afrique Centrale (COPAX), disposant deux instruments ou moyens de mise en
oeuvre : le MARAC et la FOMAC qui ont la charge d'assister les instance du
COPAX12. Le premier rassemble et analyse les informations pour une
alerte avancée et la prévention de crises, le second est la force
non permanente constituée de contingents militaires des états
membres dont le but est de mettre en place et d'assurer les missions pour la
paix, la sécurité et l'aide humanitaire. Seulement, on constate
que l'Afrique centrale continue d'être une zone conflictogène (RCA
et RDC) et insécuritogène (développement des actes de
piraterie maritimes dans le golfe de Guinée, développement de la
criminalité transfrontalière, trafic de drogue, circulation
d'armes légères et de petits calibres etc.)
De ce fait, les instruments du COPAX que sont le MARAC
et la FOMAC remplissent-ils pleinement les missions qui leur sont
assignées ? En d'autres termes, ces instruments sont-ils efficaces dans
la lutte contre la conflictualité et la criminalité sous toutes
ses formes en Afrique centrale ?
11 Anatole Ayissi
(éd.), Coopération pour la paix en Afrique de
l'Ouest : Agenda pour le 21ème siècle, UNIDIR,
Genève: Nations -Unies, 2001, pp. 12-13.
12 Protocole relatif au Conseil de Paix et de
Sécurité de L'Afrique Centrale (COPAX), article 20.
16
II.2. Enonciation des hypothèses
Au vu du questionnement qui précède,
quelques hypothèses peuvent être émises :
> Les instruments du COPAX sont inefficaces, car
ceux-ci souffrent d'un manque véritablement de moyens financiers,
humains et surtout logistiques ; ce qui favorise la non maîtrise des
espaces continentaux et maritimes et ne permet pas à ces Etats en
général et ces instruments en particulier de faire face à
toutes formes de criminalités qui s'opèrent dans cette partie du
continent et qui peuvent être des sources d'instabilité et de
menaces pour la paix sous-régionales.
> La perception commune de la menace est le point
de départ obligé pour l'élaboration d'une politique de
sécurité et de défense commune13. Or, cela ne
semble pas être le cas des Etats membres de la CEEAC. Car, tous les
membres de cette institution ne semblent pas avoir la même perception des
menaces qui pèsent sur leur espace. Ce qui peut justifier l'engagement
partiel de ces Etats en termes de financement et expliquer
l'inefficacité de ces deux instruments.
> Le COPAX en général et ses moyens
de mise en oeuvre en particulier dépendent dans leur
quasi-totalité du soutient extérieur. Tant que la CEEAC sera
incapable de faire face de façon autonome à ses besoins, son
efficacité en termes de capacité opérationnelle sera
toujours sujette à caution. Car le jour où elle ne recevra plus
aucune aide de l'extérieur alors qu'elle n'aura aucun moyen de se
prendre en charge, ses activités risqueront de prendre un
coup.
> Une reforme du COPAX s'avère urgente car
au regard des nouveaux enjeux sécuritaires, la CEEAC devrait songer
à inclure dans les textes du COPAX d'autres instruments qui prendront en
compte ces différentes formes de criminalité, car, les
instruments traditionnels que sont le MARAC et la FOMAC ne sont
focalisés que sur la conflictualité.
13 André Dumoulin (1997), Perception
de la sécurité et de la défense des pays européens:
vers l'adoption d'un Livre blanc européen de la
défense, Rapport final, Affaires universitaires,
Bruxelles.
17
III- CADRE METHODOLOGIQUE
Dans le cadre méthodologique nous insistons sur
le cadre théorique, la méthodologie, les limites de notre
recherche.
III.1. Cadre théorique
Nous allons nous appuyer sur les travaux de Barry
Buzan14 pour mieux comprendre cette inefficacité des
instruments du COPAX.
Barry Buzan est le chercheur qui a le plus
contribué à une réflexion en profondeur sur le concept de
sécurité et qui a ouvert de nouvelles pistes de recherche dans ce
domaine. D'abord par le fait qu'il opère une distinction entre les Etats
selon leurs régimes et l'effectivité de leur pouvoir et prend en
considération des éléments relevant de la politique
intérieure. La sécurité est alors envisagée
différemment selon les types d'Etat, la nature des relations entre
l'Etat et la nation, les institutions et les idéologies (sa distinction
entre Etat fort et Etat faible). Il opère une distinction entre les
types d'anarchie (mature ou immature) en fonction de la disponibilité
des Etats à coopérer ou pas, à accepter ou pas des
règles et des institutions permettant de réguler leurs relations.
Selon Barry Buzan, dans l'anarchie immature « les
unités sont tenues ensemble seulement par la force du leadership, chaque
État ne respectant pas d'autre légitimité que la sienne et
les relations entre les Etats prennent la forme d'une lutte permanente pour la
domination »15. Dans l'état d'«
anarchie mature », la souveraineté des
États tient compte des « demandes légitimes
» des autres États, ce qui ne peut avoir pleinement de
sens qu'au sein d'un système international
homogène16.
il reconnait qu'il existe une tension permanente entre
sécurité individuelle et sécurité collective et que
cette situation renvoyant au dilemme central de la sécurité et
rappelle le caractère éminemment subjectif de la menace qui,
selon lui, dépend avant tout d'un choix politique.
Ainsi, au regard de la géopolitique
sous-régionale, on comprend aisément que l'espace CEEAC est dans
une anarchie immature. Celle-ci s'illustre par le
fait que l'Afrique centrale ne dispose pas de leadership affirmé capable
d'insuffler la dynamique d'intégration ou faire office
14 Barry Buzan, People, States and
Fear. An Agenda for International Security Studies in the
Post-Cold War Era, Lynne Rienner Publisher, Boulder, Colorado, 2e
édition, 1991.
15 Ibid.
16 Ibid.
18
de force motrice dans la
sous-région17. Cette situation est une opportunité
pour certains Etats d'agir à leur guise dans la sous-région et ce
selon leurs intérêts. C'est ainsi que l'héritage de
décennies de conflit ayant fait du territoire mal contrôlé
du voisin la base arrière d'une opposition armée active ou en
sommeil (RCA pour le Tchad et la RDC ; RDC pour le Burundi ; Congo pour la
RDC), etc. L'élément cependant le plus préjudiciable
à une action de sécurité collective fondée sur la
confiance mutuelle, tient au différentiel de puissance qui instaure une
dépendance entre « consommateurs » et « fournisseurs
» de sécurité parmi les États de la région:
RDC à l'égard de l'Angola (et du Rwanda), RCA par rapport au
Tchad. Incapables d'assurer de manière autonome leur propre survie, et
l'unité de leur territoire, les États faibles n'ont d'autre choix
que de s'en remettre aux forts qui pourront alors leur imposer
unilatéralement leurs conditions (accès aux ressources
naturelles, incursions militaires contre les mouvements armés
repliés au-delà de la frontière). Naturellement, cette
méfiance mutuelle se reflètera au niveau technique dans
l'attitude des services de sécurité : surtout axés sur la
protection des régimes, ceux-ci ne seront pas portés vers des
actions de sécurité transfrontalière fondées sur
une analyse conjointe des menaces et la reconnaissance d'un
intérêt commun à les contrer. Elle aura aussi pour
corollaire un souverainisme marqué, interdisant le minimum de
délégation de pouvoir à l'institution régionale qui
conditionne la possibilité de toute action collective18. De
plus, l'Afrique centrale définit en tant qu'espace CEEAC manque
d'identité et cela s'explique par la multi-appartenance de ces membres
dans d'autres communautés économiques régionales (voir
page 9). Cette approche théorique du concept de sécurité
émise par Barry Buzan, nous permet non pas de savoir si celle-ci est
applicable au cas d'étude choisi. Mais, de mieux comprendre dans quelle
mesure les relations entre les Etats membres de la CEEAC influencent le
fonctionnement de l'intégration et rendent difficile le fonctionnement
du COPAX et plus particulièrement ces instruments de mise en
oeuvre.
Pour l'étude fonctionnelle des instruments du
COPAX, nous nous appuyons sur le fonctionnalisme de Malinowki. Celui-ci
développe l'idée que « dans une culture chaque
élément a une fonction, comparable à celle d'un organe
dans un corps vivant, et répond à un besoin »19.
La culture est vue comme un tout indivisible où entrent des
institutions qui sont
17 International Crisis
Group, 2011, Mettre en oeuvre l'architecture de paix et de
sécurité(I) : l'Afrique centrale, Rapport Afrique N°181 - 7
novembre 2011.
18 C. Guicherd, 2012,
L'investissement de l'UE dans la sécurité collective
en Afrique centrale : un pari risqué ? Institut d'Etudes de
Sécurité (IESUE), Paris.
19 Voir le fonctionnalisme de Malinowski [en ligne]
www.google.fr,
consulté le, 23 mars 2013.
19
autonomes et qui communiquent, ces institutions qui
sont des accords naturels sur un ensemble de valeurs traditionnelles qui
rassemblent les êtres humains.
II.2. Méthodologie
Dans notre travail, nous examinerons
l'insécurité non pas comme un problème militaire mais
plutôt comme un problème de gouvernance. En conséquence
nous ne mettons pas l'accent sur la conflictualité armée et que
l'approche de notre mémoire est à classer dans les recherche
irénique et les efforts proactifs des institutions
sous-régionales.
La démarche que nous avons pour mener ce
travail n'est rien d'autre que la démarche
hypothético-déductive. Car notre raisonnement est basé sur
la formulation des hypothèses dont le contenu peut être
modifié ou reformuler après avoir été
prouvé.
Les données, sur lesquelles se fonde notre
étude, proviennent des sources différentes. Elles sont issues de
profondes recherches littéraires, qui incluent l'étude. Pour ce
travail nous sommes allés les chercher dans certains centre de recherche
tels que le Centre de Recherche en Géopolitique et Prospective (CERGEP)
, le Laboratoire de Graphique et de Cartographie (LAGRAC), du
département de géographie de l'Université Omar Bongo
(UOB), le bibliothèque du département Histoire et
Archéologie de l'UOB, le centre de documentation de la CEEAC, sans
oublier internet qui nous a été jusque là d'un apport
fondamentale. Nous avons également eu des entretiens avec des cadres du
MARAC et de l'Etat Major Régional.
II.3. Limites de la recherche
Tout au long de l'élaboration de ce travail,
nous étions confrontés à deux difficultés. Primo,
la réponse très tardive du Secrétaire
Générale de la CEEAC quant à notre demande de mener des
investigations au sein des organes qui font l'objet de notre travail de
recherche. Celle-ci nous est parvenue quatre mois après l'envoi de cette
demande. Deusio, le caractère très instable des cadres qui nous
ont été recommandés. Car, compte tenu du la situation
actuelle de la sous-région ces derniers étaient amenés
à voyager toutes les deux ou trois semaines environs.
20
II.4. Annonce du plan
Pour mieux traiter notre sujet, nous avons pensé
organiser notre travail en deux parties.
La première partie qui s'intitule, «
La situation sécuritaire en Afrique centrale »
se compose de deux chapitres. Elle vise d'une part à
présenter la situation sécuritaire de l'Afrique centrale et de
l'autre l'organisation de la CEEAC en matière de promotion de la paix et
de la stabilité sous-régionale. Le chapitre 1qui a pour titre
« L'insécurité en Afrique centrale : un
problème avant tout de gouvernance » nous
présente tout d'abord les caractères conflictogène et
insécuritogène de l'Afrique centrale. D'où l'urgence pour
ces Etats de la sous-région de mettre en place des mécanismes qui
permettraient d'asseoir une véritable paix sous-régionale. C'est
dans cette logique que le chapitre 2 « Les logiques et les
acteurs de l'irénisme en Afrique centrale » vient nous
montrer comment ces Etats vont s'organiser via les institutions
sous-régionale que sont la CEMAC d'abord, et la CEEAC après pour
mieux prévenir, gérer et résoudre ces problèmes de
conflictualité et d'insécurité en Afrique
centrale.
La deuxième partie quant à elle porte
sur Les instruments du COPAX : entre théorie et pratique
fait le rapport existant entre les missions de ceux-ci et les
réalités du terrain. Dans le chapitre3 « Les
principaux instruments du COPAX : fonctionnement et difficultés
» nous faisons une analyse du fonctionnement, de
l'organisation et des modes opératoire du MARAC et de la FOMAC, puis
nous mesurons leur efficacité. Enfin, le chapitre 4 «
Les reformes du COPAX et les défis sécuritaires en
Afrique centrale », nous montre comment l'institution
sous-régionale tente d'apporter des réponses aux nouvelles formes
de menaces que connait la sous-région. De par ces reformes, nous
proposons une nouvelles architecture du COPAX et quelques solutions pour une
redynamisation du COPAX.
21
PREMIERE PARTIE
LA SITUATION SECURITAIRE EN AFRIQUE
CENTRALE
Commencé entre la fin des années 1950 et
le début des années 1960, les indépendances ont
été précédées en Afrique en
général et en Afrique centrale en particulier par des luttes
politiques meurtrières. La transplantation dans cette partie du
continent des rivalités Est-Ouest n'a fait que renforcer cet état
d'insécurité. La victoire du camp libéral sur le
communisme survenu en 1983 à la suite de l'effondrement de l'URSS n'a
cependant permis aux Etats de l'Afrique centrale de rompre avec la violence et
notamment avec celle d'origine politique qui est génératrice
d'instabilité. Presque tous les Etats - à quelques exceptions
près- ont été traversés par des violences
politiques voire des conflits politiques au cours de la conduite de leur
processus démocratique engagé dans les années 1990. Dans
cette zone en effet la guerre est devenue l'élément structurant
de tous les autres aspects de la de la vie sociale. Elle fini par transformer
tout effort de développement en mythe de
Sysiphe20. La violence qui règne dans nombre
d'Etats de la CEEAC est structurelle, elle est liée à la nature
même des Etats et des régimes politiques au pouvoir dans ces
Etats. Dans cette première partie, nous saisirons tout d'abord les
enjeux sécuritaires en Afrique centrale, en d'autres termes les menaces
de la paix et de la sécurité sous-régionales (I), puis,
nous verrons les mécanismes mis en place en Afrique centrale pour lutter
contre la conflictualité et l'insécurité,
mécanismes mis en place d'abord par la CEMAC et ensuite par la CEEAC qui
est notre cadre d'étude (II).
22
20 Voir introduction
Paix et sécurité dans la CEEAC, acte du colloque
international, Friedrich Ebert Stifung 2007
23
Chapitre I : L'INSECURITE EN AFRIQUE CENTRALE, UN
PROBLEME AVANT TOUT DF GOUVERNANCE
La sous région d'Afrique Centrale a
été ces dernières décennies non seulement le
théâtre des conflits armés, les violences politiques, les
déplacements massifs des populations, mais aussi et surtout le terrain
des rivalités et convoitises des puissances extérieures.
Aujourd'hui, la dimension géopolitique et stratégique de
l'Afrique Centrale est au centre des contraintes sécuritaires. La sous
région fait face à plusieurs menaces sur le plan
sécuritaire. Nous n'allons pas énumérer de manière
exhaustive l'ensemble des menaces qui pèsent sur la stabilité de
la sous-région, mais nous évoquerons celles qui selon nous
semblent plus importantes afin de dresser un tableau de la situation
sécuritaire de cette partie du continent.
I. Les principales sources de l'insécurité en
Afrique centrale
La conflictualité qui hante les Etats de
l'Afrique centrale depuis leur accession à l'indépendance est le
résultat de plusieurs facteurs. Toutefois pour mieux cerner l'importance
du COPAX il faut insister sur les facteurs directement liés à
l'insécurité notamment la mauvaise gouvernance (1) qui est
l'origine de la fragilité de l'Etat (2).
I.1. La mauvaise gouvernance comme source de conflit en
Afrique centrale
La mauvaise gouvernance qui est à l'origine des
conflits en Afrique centrale est le fait des classes politiques dirigeantes qui
centralise le pouvoir, cherche à s'y éterniser et satisfaire
seulement les besoins d'une minorité. Cela entraîne une situation
de fragilité et représente un obstacle important à
l'émancipation tant politique qu'économique d'un pays
I.1.1. La centralisation du pouvoir politique
L'insécurité en Afrique centrale a le
plus souvent pris la forme de conflits entre différents groupes
ethniques pour le contrôle de l'Etat. La décolonisation a produit
des régimes à la fois faibles et très centralisés,
peu désireux ou incapables de remporter le soutien d'une population
politiquement, socialement et culturellement peu soudée autour d'un
projet commun de construction d'un Etat-nation. Beaucoup de dirigeants ont
concentré le pouvoir et les ressources de l'Etat entre les mains de leur
propre groupe tandis que des opposants prenaient les armes.
Les conflits internes sont les plus récurrents
et sont ceux qui ont le plus marqué l'histoire de la violence en Afrique
centrale. Ces conflits sont le plus souvent des guerres
24
civiles opposant des gouvernements à des
groupes d'opposants dont l'unique ambition est le contrôle du pouvoir.
L'Afrique centrale presque dans son entièreté s'était
plongée après les indépendances dans une forme de
compétition politique entre les partis politiques ou les classes
sociales qui privilégiaient la force comme principal moyen
opératoire. Ainsi, plusieurs foyers de tensions se sont
déclarés il s'agit de l'Angola, du Burundi, de la Centrafrique,
du Congo Brazzaville, de la RDC, du Rwanda, Tchad. Le génocide rwandais
du 6 avril 1994- qui a coûté la vie à 800 000 Tutsi et Hutu
modérés, massacrés par une milice hutu et par
l'armée, est la pire tragédie de la seconde moitié du
vingtième siècle, dont les métastases se
développent encore en RDC. La RCA qui vient de connaitre une nouvelle
crise qui a vu le départ de son président BOZIZE. Le tableau
suivant illustre les changements violents de pouvoirs en Afrique centrale de
1960 à 2013. Ces changements sont aussi bien l'oeuvre des militaires que
des civils.
Tableau 1 : Changements violents de pouvoir en Afrique
centrale depuis 1960
Pays
|
Années
|
Tchad
|
1970, 1979, 1982, 1990
|
République Centrafricaine
|
1965, 1979, 1981, 2003, 2013
|
Congo Brazzaville
|
1963, 1968, 1979, 1997
|
République Démocratique du
Congo
|
1965, 1997
|
Guinée Équatoriale
|
1979
|
Burundi
|
1960, 1966, 1976, 1987, 1996
|
Rwanda
|
1973, 1994
|
Angola
|
Guerre civile de 1975 à 2002
|
Source :
www.
cahiers.cerium.ca
Cette récurrence des conflits due à la
course au pouvoir peut s'expliquer à travers les propos de Koffi Annan
:
L'Etat postcolonial, n'a pas renoncé aux
mécanismes d'asservissement mis en place par l'Etat colonial : mise en
place de classes prédatrices qui aggravent la lutte pour le
contrôle des moyens de l'Etat.
22.
21 Voir l'article de «
Comprendre la causalité de la conflictualité post
Guerre froide en Afrique » [ En ligne]
www.
cahiers.cerium.ca, consulté le 16 avril 2013.
Ce tableau a été réactualisé par Cyr
Revelli Mba Abessolo.
25
Le Professeur M.L. Ropivia nous l'explique lui aussi en
ces termes :
C'est la première élite africaine issue
de la colonisation qui a été plus liberticide en forgeant le
parti unique et en se muant en bourgeoisie bureaucratique plus soucieuse de ses
intérêts égoïstes que d'intérêt
général23.
Dans cette logique, il va utiliser le concept d'«
Etat-gaspilleur » pour illustrer le fonctionnement de l'Etat africain
postcolonial. A travers un tableau (voir tableau 2), il va s'inspirer des
travaux de l'économiste jamaïcain Arthur Lewis dans son ouvrage
the theory of economic growth cité par F.
Perroux24 qui recense les maux et les comportements néfastes
par lesquels les bourgeoisies bureaucratiques paralysent le bon fonctionnement
de l'Etat et se transforment en oligarchie gaspilleuses.
Tableau 2 Action et exactions du gouvernement public
selon Arthur Lewis
Fonctions du pouvoir
|
Voies sur lesquelles le pouvoir conduit à la
stagnation
|
1.
|
Maintenir le fonctionnement des services
|
1.
|
Tolérer le désordre
|
publics
|
|
|
|
2.
|
Influencer les attitudes des individus
|
2.
|
Piller les citoyens
|
3.
|
Donner formes aux institutions
|
3.
|
Susciter l'exploitation d'une classe par
|
|
économiques
|
|
une autre
|
4.
|
Influencer l'emploi aux ressources
|
4.
|
Faire obstacles aux échanges
extérieurs
|
5.
|
Influencer la distribution des ressources et
|
5.
|
Négliger les services publics
|
du revenu
|
|
|
|
|
6.
|
Pratiquer le laisser faire excessif
|
6.
|
Contrôler la quantité de monnaie
|
|
|
|
|
7.
|
Exercer une contrainte excessive
|
7.
|
Contrôler les fluctuations
|
|
|
|
|
8.
|
Pratiquer des dépenses excessives
|
8.
|
Assurer le plein emploi
|
|
|
|
|
9.
|
S'engager dans des guerres coûteuses
|
9.
|
Influencer le niveau des investissements
|
|
|
Source : ML. Ropivia, 1994,
Géopolitique de l'intégration en Afrique
noire, Paris, L'Harmattan, p.138.
22 Koffi Annan,
les causes des conflits et la promotion d'une paix et d'un
développement durable en Afrique , Rapport ONU, New York,
mai 1998.
23 M-L. Ropivia 1994, Géopolitique de
l'intégration en Afrique noire, Paris,
L'Harmattan.
24 François Perroux, Pour une
philosophie du nouveau développement. Paris, Aubier/Les
presse de l'UNESCO, 1981, cité par Ropivia (ML), 1994,
Géopolitique de l'intégration en Afrique
noire, L'Harmattan, Paris.
26
On constate que c'est le coté droit du tableau
qui dévoile un rôle spoliateur car on y retrouve les
éléments qui constituent le lot quotidien des pratiques et des
exactions des classes dirigeantes en Afrique noire. A cet effet, il est
maintenant bien connu que la raison d'Etat dans les pays africains, beaucoup
plus qu'ailleurs se confond la raison des classes ou avec la raison
d'être des élites gouvernantes25 . Ainsi, le Pr
Marc-Louis Ropivia continu en nous disant :
Dès lors que l'Etat cesse d'assumer le
développement de la collectivité (coté gauche) pour se
consacrer à ses seuls intérêts égoïstes de
classe, étant entendu que de bureaucratique, la classe-Etat voudrait se
donner une légitimité économique. Elle fait donc fi des
préceptes de bon gouvernement. 26
Nous pouvons comprendre que la centralisation du
pouvoir peut engendrer l'asservissement d'une classe par une autre. La classe
dirigeante adoptera des pratiques non seulement pour s'enrichir en spoliant une
grande partie de la population, et se maintenir au pouvoir en bloquant le
processus démocratique ce qui peut fragiliser l'Etat et être
source de conflit ou de violence. Comment un Etat fragile peut être
source de conflit ?
I.1.2. La fragilité de l'Etat, facteur de conflit en
Afrique centrale
Les situations de fragilité représentent
un obstacle important à l'émancipation tant politique
qu'économique d'un pays. Evaluer la fragilité des Etats est une
tâche qui s'avère de plus en plus importante non seulement pour
les pays en question mais aussi pour la communauté internationale non
seulement pour estimer le degré d'effort à fournir pour
créer les mécanismes d'alerte rapide.
Il existe plusieurs définitions de la notion
d'Etat fragile à ne pas confondre avec les concepts d'Etat failli ou
d'Etat effondré. Nous allons définir ici cette notion sous une
approche fonctionnelle. Selon Eizenstat & al. (2005)27
cité par B. Bounoung Fouda, la fragilité peut être saisie
à travers trois critères fonctionnels.
- La sécurité nationale,
- La fourniture des services de bases (éducation,
santé, etc.),
25 ML Ropivia, op. cit.
26 Ibid.
27 Bounoung Fouda (B). « De la fragilité des
Etats en Afrique centrale à une pensée reconstructive des Etats
en déconstruction : essai d'analyse ». In
Enjeux, n°38 , Janvier Mars 2003.
FPAE.
- La protection et la garantie essentielle des
libertés.
Le premier critère qui renvoie à la
sécurité nationale traduit le fait que l'une des tâches
essentielles d'un Etat, c'est le monopole de l'usage de la force pour se
protéger contre les menaces intérieures et extérieures et
préserver son intégrité territoriale. Si un gouvernement
ne peut garantir son intégrité territoriale ou la
sécurité de ses populations, le territoire devient le terreau
propice au développement de la criminalité et/ou des groupes
armé. Le deuxième critère signifie qu'un gouvernement a le
devoir sinon l'obligation de satisfaire les besoins essentiels de sa population
tels que l'éducation, la santé etc. Une incapacité
à assurer ces besoins crée dans le pays un « écart
d'aptitude ou écart de capacité » qui entraine une perte de
confiance envers le gouvernement en place.28 Le troisième
critère est lié à la légitimité des
gouvernements. Pour S. Eizenstat & al. (2008)29, un gouvernement
doit protéger les libertés individuelles de sa population,
garantir la démocratie et l'Etat de droit. Le non respect de ces
éléments crée un « écart de
légitimité » qui peut, en cas de contestation, conduire
à l'instabilité politique, source successive de l' «
écart sécuritaire » et de l' « écart d'aptitude
». Ces auteurs pensent que l' « écart sécuritaire
» est entretenu par des gouvernements autocratiques et « politicides
». Tout en reconnaissant l'importance de ces trois écarts dans la
systématisation de la notion d'Etat fragile, S. Rice pense que la
pauvreté est la caractéristique principale d'un Etat
fragile30. Pour elle il existe une relation symétrique entre
la pauvreté et les différents écarts ci-dessous
évoqués (figure1)
27
28 Ibid.
29 Ibid.
30 Ibid.
28
Figure 1 : Caractéristiques d'un Etat fragile
selon S. Rice
Ecart de légitimité Faible
gouvernance
Conflits ou tensions
Ecart de sécurité
Pauvreté
Non satisfaction des besoins humains
essentiels
Ecart de performance ou de capacité
Source : B. Bounoung Fouda. « De la
fragilité des Etats en Afrique centrale à une pensée
reconstructive des Etats en déconstruction : essai d'analyse ». In
Enjeux, n°38, Janvier-Mars 2003.
FPAE.
Une définition nous parait plus exhaustive
c'est celle de P. Stewart31 . Selon lui, l'Etat fragile na pas la
capacité de fournir à sa population des services publics suivants
qui lui incombent de manière naturelle : la sécurité
nationale, les institutions politiques légitimes, le bien être
économique et social. Pour lui, un tel Etat se caractérise par
son incapacité : à maintenir le principe du monopole de l'usage
de la force, à assurer le contrôle de son territoire et de ses
frontières, à maintenir l'ordre public et la
sécurité des populations. Sur le plan politico institutionnel, la
fragilité se manifeste par : un gouvernement qui s'appuie sur une
administration inefficace, l'absence et le non respect de la démocratie
et des libertés individuelles, l'absence de justice sociale, la
confiscation du pouvoir . Sur le plan économique, l'Etat fragile se
détermine : par des politiques économiques (fiscalité
etc.) hasardeuse, qui détériorent l'environnement des affaires,
une gestion opaque des ressources naturelle et une faible attractivité
au niveau des investissements directs à l'étranger (IDE). Sur le
plan social, dans ce type d'Etat il ya une absence ou une insuffisance
significative d'investissements dans les secteurs sociaux liés à
l'éducation, à la santé ainsi qu'à tous les autres
secteurs sociaux annexes (fourniture de l'électricité, de l'eau,
etc.). Ces définitions semblent se cristalliser autour du triptyque
« sécurité-démocratie-développement
»
31 Ibid.
29
C'est ainsi que tout en restant dans cette logique, B.
Bounoung Fouda a fait une étude d'évaluation de la
fragilité des Etats de l'Afrique centrale à travers la
problématique de sécurité, des questions de
démocratie et de développement32. Il a pris pour
échantillon six pays à savoir le Cameroun, la Centrafrique, le
Congo-Brazzaville, Le Gabon, la Guinée Equatoriale et le
Tchad.
Par rapport à l'évaluation de la
fragilité à travers la problématique de
sécurité, il a utilisé l'indicateur de stabilité
politique et d'absence de violence et/ou de terrorisme développé
par D. Kaufman, A. Kraay et M. Mastruzzi (2008). Selon lui, il en ressort que
le Gabon, mais surtout la Guinée Equatoriale et le Congo-Brazzaville,
ont connu une baisse de l'insécurité entre en 2007 par rapport
à 2005. A contrario, durant la même période,
l'insécurité a augmenté au Cameroun au Tchad et en RCA.
Sur ce plan il affirme que le Tchad et la RCA font partie des pays les plus
instables et donc avec un niveau d'insécurité
particulièrement élevée. Le Cameroun aussi présente
un niveau d'insécurité préoccupant.
La carence démocratique est le plus souvent
corollaire de la carence de la gouvernance, elle-même se manifestant par
la conservation de tous les avantages par une minorité. Le peuple est
exclu du processus d'acquisition du pouvoir du fait du non respect des droits
et des libertés des citoyens. L'écart de légitimité
qui en résulte est certainement lié à la base d'une autre
caractéristique des Etats fragiles qui est le niveau élevé
de corruption. Pour évaluer la fragilité des Etats de l'Afrique
centrale à travers la question de démocratie, B. Bounoung Fouda,
a retenu deux autres indicateurs de gouvernance parmi par ceux
développés par D. Kaufman, A. Kraay et M. Mastruzzi (2007) : le
degré d'implication des citoyens dans le processus démocratique
et le niveau de corruption. Le degré d'implication des citoyens dans le
processus démocratique mesure entre autre, le niveau d'implication des
citoyens dans la sélection des dirigeants et le degré de respect
des liberté des média, des liberté d'associations et plus
largement des libertés d'expression. Les données fournies par D.
Kaufman, A. Kraay et M. Mastruzzi (2008) montrent que l'expression du citoyen a
le plus de considération au Gabon. Mais ce résultat montre aussi
que la situation démocratique se détériore d'une
année à une autre. Il convient donc de relever que cet indicateur
s'est amélioré au Cameroun, ce qui traduit une hausse de
l'implication des citoyens dans le processus démocratique. On observe
aussi une telle amélioration en RCA. En revanche la dégradation
de cet indicateur au Congo, mais surtout au Tchad et en Guinée
Equatoriale indiquent que ces pays ont viré dans une forme d'Etat que S.
Rice (2008) appelle « autocratie répressive ». De
manière générale, la situation des
libertés
32 Ibid.
30
individuelles et le niveau de participation des
citoyens d'Afrique centrale dans le processus de sélection des
gouvernements sont largement en deçà de ce qui est
pratiqué dans plus de la moitié des pays du monde33.
Quant à l'indicateur du niveau de corruption, il mesure le degré
d'exercice du pouvoir à des fins personnel tels qu'effectués par
les détenteurs du pouvoir et par d'autres groupes
d'intérêt. Ainsi, l'analyse de l'Etat de la corruption en Afrique
centrale montre que le Gabon est le moins corrompu de la région
malgré une inversion de la tendance en 2005. Par contre ce fléau
atteint des proportions inquiétantes en Guinée Equatoriale et au
Tchad. En revanche, au Cameroun, l'évolution du niveau de corruption a
significativement fléchi depuis 2005. En revanche, en RCA, la tendance
baissière qui a commencé depuis 2000 se poursuit ce qui fait de
ce pays depuis 2007, le deuxième pays le moins corrompu de la
sous-région après le Gabon.
Enfin, concernant l'évaluation de la
fragilité à travers les questions de démocratie, l'auteur
a retenu deux critères le taux d'immunisation et la qualité de
régulation. Selon lui cet indicateur est un bon proxy de l'effort de
l'Etat à assumer ses responsabilités. Ainsi, le taux
d'immunisation de la population est plus élevé au Cameroun soit
73%. Il est suivi par le Congo 50%, le Tchad, 47%, et la RCA 40%. Le Gabon et
la Guinée Equatoriale ont des taux d'immunisation les plus faibles de la
région malgré le fait qu'ils aient des le PIB par tête
d'habitant les plus élevés. Au Gabon, ce taux était de 38
% alors qu'il était de 33% en Guinée Equatoriale. Au terme de son
étude, B. Bounoung Fouda, propose que quatre des six pays pris pour
échantillon sont fragile à savoir : le Congo, la RCA, le Tchad,
la guinée Equatoriale sont des Etats fragiles. Par contre la
fragilité du Cameroun et du Gabon n'est pas relevée.
Au regard de ce qui précède on comprend
aisément que la centralisation du pouvoir par une classe constitue un
problème majeur dans la sous-région et cette dernière
biaise souvent le processus électorale pour se maintenir au pouvoir.
C'est pourquoi, l'organisation des élections générale dans
chaque Etat membre peut être considérée comme un moment
déterminant pour promouvoir la paix, la sécurité dans la
sous-région. La fragilité des Etats constitue aussi un fait
important qui menace la stabilité de la sous-région, compromet le
développement et freine le processus d'intégration à tous
les niveaux en générale et au niveau sécuritaire en
particulier. D'autres facteurs menacent la paix et la sécurité
dans la sous région à savoir l'exploitation illégale de
ressources naturelles.
33 Ibid.
31
I.2. L'exploitation illégale des ressources
naturelles
Depuis 1990, au moins dix-huit conflits violents ont
été alimentés par l'exploitation des ressources
naturelles. En fait, des recherches récentes suggèrent que 40% au
moins des conflits internes survenus au cours de ces soixante dernières
années ont un lien avec les ressources naturelles. Des guerres civiles
comme celles du Libéria, de l'Angola et de la République
Démocratique du Congo ont eu pour enjeu des ressources de « grande
valeur », telles que le bois, les diamants, l'or, les minéraux et
le pétrole34. Les facteurs environnementaux sont rarement,
voire jamais, la seule cause d'un conflit violent. L'appartenance ethnique, une
conjoncture défavorable, un faible niveau de commerce international et
des conflits dans les pays voisins sont autant de facteurs qui alimentent la
violence. Toutefois, l'exploitation des ressources naturelles et les
contraintes environnementales qui en découlent peuvent jouer un
rôle à tous les stades du cycle d'un conflit, du
déclanchement et de la perpétuation de la violence, à la
fragilisation des perspectives de paix.
I.2.1. Contribution au déclanchement des
conflits
La paix et la sécurité internationales
sous-tendent la Charte des Nations Unies, qui engage la communauté
internationale à « préserver les générations
futures du fléau de la guerre.»35 Le rôle
essentiel de la paix et de la sécurité pour le
développement durable est également souligné dans la
Déclaration de Rio, qui demande aux Etats de « respecter le droit
international relatif à la protection de l'environnement en
période de conflit armé et de participer à son
développement, selon que de besoin.»36. Elle
reconnaît explicitement aussi que la paix, le développement et la
protection de l'environnement sont « interdépendants et
indivisibles. » Enfin, l'Assemblée générale des
Nations Unies a récemment établi un lien entre conflits
armés et ressources naturelles dans plusieurs résolutions
importantes, en particulier en désignant l'exploitation des ressources
comme une source de conflit et une menace à la paix et au
développement durable en Afrique en général en Afrique
centrale en particulier. La relation entre « environnement » et
« conflit » continue toutefois à alimenter la controverse sur
la scène politique internationale. Le rapport de 2004 du Groupe de
personnalités de haut niveau sur les
34 Programme des Nations Unies pour l'environnement,
2009, « Du conflit à la consolidation de la paix : le
rôle des ressources naturelles et de l'environnement »
PNUE, Nairobi, KENYA.
35 Ibid.
36 Ibid.
32
menaces, les défis et le changement a fait
ressortir les liens déterminants qui existent entre l'environnement, la
sécurité et le développement économique et social
dans la quête de la paix mondiale au 21e siècle37,
tandis qu'un débat historique qui a eu lieu en juin 2007 au Conseil de
sécurité des Nations Unies arrivait à la conclusion qu'une
mauvaise gestion des ressources de « grande valeur » constituait une
menace à la paix38. Ainsi, aucune discussion sérieuse
sur les menaces actuelles ou émergeantes pesant sur la
sécurité ne saurait avoir lieu sans tenir compte du rôle
des ressources naturelles et de l'environnement.
Nombre de pays connaissent actuellement des
problèmes de développement liés à l'utilisation non
durable des ressources naturelles et à la répartition des
richesses naturelles. En général, les tensions sont
créées par des pressions concurrentes sur les ressources
naturelles existantes. Dans certains cas, c'est l'incapacité de la
gouvernance (institutions, politiques, lois) à résoudre
équitablement ces tensions qui conduit certains groupes à
être défavorisés et qui, en définitive, engendre des
conflits. Il arrive aussi que les problèmes viennent de l'exploitation
illégale des ressources. Des recherches et des observations sur le
terrain ont montré que les ressources naturelles et l'environnement
contribuent au déclanchement d'un conflit de trois manières
principales. Tout d'abord, un conflit peut survenir à propos de la juste
répartition des richesses tirées de l'extraction de ressources de
« grande valeur, » comme les minéraux, les métaux, les
pierres, les hydrocarbures et le bois. L'abondance locale de ressources
précieuses, combinée à la grande pauvreté ou
à la difficulté à trouver d'autres formes de revenus,
incite des groupes à s'emparer de ces ressources en prenant le
contrôle des territoires où elles abondent, ou en expropriant
sauvagement l'Etat. Le risque que des ressources naturelles de « grande
valeur » contribuent à un conflit est en fonction de la demande
mondiale, et largement tributaire des prix du marché. Aussi, les pays
dont l'économie est tributaire de l'exportation d'un nombre restreint de
produits primaires sont plus susceptibles d'être politiquement fragiles.
Leur situation économique est à la merci des fluctuations de prix
de ces denrées sur les marchés internationaux, et lorsqu'il
s'agit de pays en développement, il leur est souvent difficile
d'augmenter la valeur ajoutée de ces produits ou de créer des
emplois à grande échelle à partir de telles exportations.
En outre, les gouvernements dont le budget est alimenté davantage
par
37 Groupe de personnalités de haut niveau du
Secrétaire général des Nations Unies sur les menaces, les
défis et le changement. (2004). A more secure world: our
shared responsibility: Rapport du Groupe de personnalités de haut niveau
du Secrétaire général des Nations Unies sur les menaces,
les défis et le changement. Assemblée
générale des Nations Unies. New York.
38 Conseil de sécurité des Nations
Unies. (25 juin 2007). Déclaration 2007/22 du Président du
Conseil de sécurité. Conseil de sécurité des
Nations Unies. New York.
33
l'exportation de produits de base que par les recettes
fiscales tendent à être coupés des besoins de leurs
électeurs. La combinaison des problèmes d'appréciation de
la monnaie et de gestion opaque des revenus et de corruption qui se sont
développés dans nombre de pays riches en ressources est
appelée la « malédiction des ressources. » En Afrique
centrale, la RDC et la République Centrafricaine (RCA) abritent de
vastes zones diamantifères qui ont été l'enjeu de conflits
et d'activités criminelles. Le Rwanda a notamment été
cité39 dans le contexte du trafic illicite de diamants en
provenance de la région, et notamment de RDC.
I.2.2. Le financement, l'entretien des conflits et les
Obstacle au rétablissement de
la paix
Qu'il existe ou non une relation de cause à
effet entre le déclenchement des conflits et les ressources naturelles,
celles-ci peuvent contribuer à entretenir et à alimenter la
violence. Les ressources de « grande valeur » peuvent notamment
être utilisées pour générer des revenus servant
à financer les forces armées et à acquérir des
armes. S'emparer de ces ressources devient alors un objectif stratégique
pour les campagnes militaires, ce qui prolonge leur durée. Au cours des
vingt dernières années, non moins de dix-huit guerres civiles ont
été alimentées par des ressources naturelles. La
présence de ressources naturelles faciles à obtenir et à
exploiter peut en effet non seulement rendre une insurrection
économiquement viable40 (et partant, la guerre plus
probable), mais aussi modifier la dynamique même du conflit en
encourageant les combattants à tout faire pour obtenir des biens leur
permettant de poursuivre leur lutte. Les revenus et les richesses peuvent donc
modifier l'Etat d'esprit des belligérants, transformer une guerre et une
insurrection en une activité non pas purement politique mais aussi
économique, la violence étant alors engendrée moins par
des griefs que par la cupidité.
Aussi, les incitations économiques liées
à la présence de ressources naturelles précieuses peuvent
empêcher la résolution d'un conflit et nuire aux efforts de paix.
Plus la perspective d'un accord de paix semble proche, plus les personnes ou
les groupes dissidents susceptibles de perdre l'accès aux revenus
tirés de l'exploitation des ressources risquent d'agir pour
empêcher la restauration de la paix. Autre obstacle majeur : le risque
perçu ou réel que la paix modifie l'accès aux ressources
naturelles et leur réglementation, et nuise aux intérêts
de
39 Office des Nations Unies contre la Drogue
et le Crime.
40 I. Smillie, L. Gberie, & R. Hazleton, (2000).
« Le coeur du problème. La Sierra Leone. Les diamants
et la sécurité humaine.» Partenariat Afrique
Canada. Ottawa.
34
certains acteurs. En créant des incitations
économiques qui tendent à renforcer les divisions politiques, les
ressources naturelles peuvent également empêcher une
réintégration politique et une réconciliation
véritable, même une fois l'accord de paix
signé.41 Enfin, selon les conclusions préliminaires
d'une analyse rétrospective des conflits internes survenus au cours de
ces soixante dernières années, les conflits liés aux
ressources naturelles ont deux fois plus de chances de resurgir durant les cinq
premières années après la signature d'un accord de
paix.42
I.2.3. L'instabilité permanente de l'Est de la
RDC, une situation préoccupante pour la sécurité de la
sous-région.
La crise en RDC est un problème majeur en
Afrique centrale et un défi sécuritaire non négligeable
pour les Etats de la Communauté économique des Etats de l'Afrique
centrale (CEEAC).
Les activités criminelles susceptibles
d'attiser la violence en Afrique centrale ne manquent pas, mais ce sont bien
les ressources minérales qui sont au coeur du conflit. La RDC regorge de
richesses minérales (voir tableau 3), et tout porte à croire
qu'elles n'ont été explorées qu'en partie. Le pays
possède certaines des réserves de cobalt, de cuivre et de
diamants les plus vastes du monde, de même que d'importants gisements
d'or et de pétrole. Les richesses minérales du pays sont
réparties sur l'ensemble du territoire, mais c'est l'est du pays qui
renferme la majeure partie des ressources connues, et plus
particulièrement les provinces du Katanga et du Kasaï occidental et
oriental, la province Orientale et les Kivu43. En volume, c'est le
cuivre qui arrive en tête des exportations officielles de la RDC : les
réserves de la ceinture de cuivre du Katanga sont estimées
à 70 millions de tonnes et sont les plus riches du monde après
celles du Chili44. En 2008, la RDC aurait exporté 335 000
tonnes de cuivre. Si la production de cuivre est de première importance
pour l'économie nationale, la RDC reste cependant un producteur mineur
à l'échelle mondiale : en 2007, les exportations congolaises de
cuivre ne représentaient que 2 % des approvisionnements
mondiaux.
41 Programme des Nations Unies pour l'environnement.
« Du conflit à la consolidation de la paix : le
rôle des ressources naturelles et de l'environnement »
PNUE, Nairobi, KENYA.
42 Ibid.
43 Banque mondiale.
République démocratique du Congo : la bonne gouvernance dans le
secteur minier comme facteur de croissance. Rapport N° 43402- ZR
(Washington, Banque mondiale, mai 2008).
44
35
Tableau 3 : Richesses minières par province en
RDC
Province
|
Minéraux
|
Bandundu
|
Diamants, or, pétrole
|
Bas-Congo
|
Bauxite, schistes bitumineux, calcaire, phosphate,
vanadium,
diamants, or
|
Équateur
|
Fer, cuivre et associés, or, diamants
|
Kasaï Occidental
|
Diamant, or, manganèse, chrome, nickel
|
Kasaï Oriental
|
Diamant, fer, argent, nickel,
cassitérite
|
Katanga
|
Cuivre et associés, cobalt, manganèse,
calcaire, uranium, charbon
|
Maniema
|
Cassitérite, diamants, coltan
|
Nord-Kivu
|
Or, niobium, tantalite, cassitérite, béryl,
tungstène, monzonite
|
P. orientale
|
Or, diamant, fer
|
Sud-Kivu
|
Or, niobium, tantalite, cassitérite,
saphir
|
Source: Banque Mondiale, Growth with
Governance in the Mining Sector, 2010
Les activités criminelles transnationales
menées dans l'est de la RDC génèreraient chaque
année quelque 200 millions de dollars US de revenus bruts. On peut
partir du principe que la moitié de ces profits, soit 100 millions de
dollars US, va aux groupes armés, y compris aux renégats des
FARDC. Selon les estimations disponibles les plus fiables, il y a actuellement
entre 6 500 et 13 000 membres actifs de groupes armés dans la
région, et un nombre indéterminé de militaires corrompus.
Si le marché était divisé à parts égales
entre l'armée régulière et les groupes armés
rebelles, il en résulterait un revenu moyen par membre de groupes
armés de 5 000 dollars US45. Quand bien même ces
profits ne seraient pas répartis de manière équitable, le
revenu national brut par habitant de la RDC n'était que de 160 dollars
US en 200946. Quel que soit le montant réservé
à l'achat d'armes et de munitions, ces profits représentent donc
une source de revenus importante pour les combattants. En fait, ces hommes
gagnent leur vie et subviennent aux besoins de leur famille grâce
à des marchés criminels qui n'existeraient pas si la
région n'était pas en proie à la violence et à
l'impunité.
45 Office des Nations Unies contre la Drogue et le Crime.
2011, Criminalité organisée et instabilité en
Afrique centrale, Une évaluation des menaces.
UNODC.
46 Ibid.
36
Les groupes armés présents dans l'est de
la RDC compteraient actuellement entre 6 500 et 13 000 membres
actifs47. Le plus important de ces groupes est la milice hutu des
Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), forte de 2
400 à 4 000 hommes48. Son équivalent tutsi, le
Congrès national pour la défense du peuple (CNDP), a
été largement intégré aux forces armées de
la RDC (FARDC) ces dernières années, bien qu'une administration
parallèle continue de contrôler bon nombre de ses membres. Il
compterait actuellement entre 1 000 et 2 000 membres non
intégrés49. On recense par ailleurs de nombreuses
milices locales, généralement appelées «
Maï-Maï», qui ne visent pour la plupart aucun objectif politique
cohérent mais qui ont été impliquées dans
activités criminelles de diverses natures. Ces groupes armés
tirent directement profit de ce climat d'instabilité et ont donc
intérêt à ce que le conflit perdure. On distingue deux
grandes catégories de groupes : ceux dont les origines remontent au
génocide rwandais, comme les FDLR et le CNDP, et ceux qui se sont
constitués à des fins d'autodéfense, avant de se
transformer en gangs se livrant au pillage, comme les milices
Maï-Maï. Pour ces deux types de groupes, le contrôle d'un
territoire est à la fois une fin en soi et un moyen de financer leurs
activités. Aujourd'hui, il est devenu difficile de dire s'ils cherchent
à se procurer des fonds dans le but d'étendre leur territoire ou
si, au contraire, ils cherchent à contrôler un territoire dans le
but de se procurer des fonds. Ont-ils besoin d'argent pour pouvoir poursuivre
le combat, ou doivent-ils se battre pour continuer à gagner de l'argent?
Les rapports du Groupe d'experts des Nations Unies sur la RDC
établissent clairement que ces groupes sont impliqués dans la
contrebande de minéraux et utilisent les revenus qu'ils en tirent pour
se procurer des armes. Il est en revanche plus difficile de déterminer
si les profits tirés de ces activités l'emportent sur les
ambitions politiques des rebelles et s'ils constituent désormais leur
principale motivation sur le terrain.
L'Afrique centrale malgré les différents
facteurs de conflit reste une sous-région conflictogène au regard
des différents conflits armées observés jusqu'à nos
jours notamment en RDC et en RCA et même au Tchad ou la situation entre
le gouvernement et les rebelles reste tendue. Aussi signalons les conflits que
connait la sous-région sont le plus souvent à
l'origine
47 Code minier de la RDC, loi
007/2002, article 27 : Des personnes non éligibles ? Cité par
Office des Nations Unies contre la Drogue et le Crime, op
cit
48 Rapport final du Groupe d'experts sur la
République démocratique du Congo(publication des Nations Unies,
29 novembre 2010, S/2010/596), para. 181.
49 Ibid.
37
de la criminalité et de
l'insécurité que doivent faire face les Etats de cette partie du
continent africain.
II. Les manifestations de l'insécurité en
Afrique centrale
Le spectre d'autres facteurs déstabilisateurs
et crisogènes se combinant selon des logiques et des schémas
extrêmement complexes caractérise cet espace. Certains facteurs
peuvent être considérés comme à forte incidence sur
la stabilité et la paix sous régionale les activités
criminelles autour des frontières, la prolifération des armes
légères et petits calibres (ALPC) et la piraterie maritime dans
le Golfe de Guinée.
II.1. La criminalité transfrontalière
L'insécurité transfrontalière en
Afrique centrale peut être appréhendée à travers
plusieurs modalités : les pratiques, les facteurs explicatifs, les
motivations et les incidences. Du point de vue des pratiques, il faudrait
commencer par les usages des coupeurs de route50. C'est un
phénomène récurrent dans cette zone qui se manifeste en
embuscades et raids sur des campements isolés et en vol de troupeaux.
Une autre pratique consiste en des prises d'otages. Le kidnapping de personnes
et personnalité s'exerce généralement sur des individus
issus de familles rurales, en vue du paiement d'une rançon sous peine de
l'assassinat des otages51. Une troisième pratique consiste en
la transmigration des groupes politico-militaires localisés aux
alentours du Lac Tchad, au Darfour ou au Nord-Ouest de la RCA. Par ailleurs, on
observe un banditisme militaire transfrontalier, pratiqué par des
éléments des forces régulières et des combattants
affiliés ou non à des mouvements armés.
En outre, on note l'itinérance de bandes
armées, qui consiste en la segmentation des groupes, à partir de
leur lieu de départ, pour se reconstituer à des centaines de
kilomètres, souvent hors de leur pays d'origine. Une autre pratique se
manifeste par un mercenariat et une solidarité militaire intra-ethnique
transfrontalière. On note des pratiques de transhumance et de trafic du
bétail. C'est l'un des maillons de l'économie régionale,
expliquant la récurrence de l'insécurité dans les zones de
pâturages; l'interdiction momentanée de sortie du bétail
tchadien
50 Djimtoloum Rangar, « La
prolilifération des ALPC et le phénomène des coupeurs de
route en Afrique centrale :quel rôle pour la société civile
? Lutte contre la circulation des armes légère et le
phénomène des coupeurs de route en Afrique centrale : quel
rôle pour la société civile ?, Friedrich Ebert
Stiftung, Yaoundé, 2006.
51 Saibou Issa, « La prise d'otages aux
confins du Cameroun, de la Centrafrique et du Tchad : une nouvelle
modalité du banditisme transfrontalier », in Polis,
RCSP, Vol. 1-2, 2006.
38
du fait de son impact sur le coût de la viande
et de ses liens présumés avec le financement des groupes
armés non étatiques. Il y a également des trafics d'armes
légères, de véhicules volés et des pierres
précieuses52.
En ce qui concerne l'Afrique centrale, deux zones
transfrontalières présentent des facettes d'une
insécurité chronique : Cameroun, Tchad et Centrafrique,
qualifiée de « triangle de la mort », en opposition à
l'autre « triangle de l'opulence » (Cameroun, Gabon et Guinée
Equatoriale), que s'est beaucoup développée cette forme de
criminalité. Le triangle frontalier Cameroun-Centrafrique et Congo est
aussi une zone de libre circulation des armes légères. Cette zone
est entourée de foyers de tensions de toutes natures, à savoir la
partie sud du Congo, le Tchad, la RCA, le Darfour, les Grands
Lacs53.
II.2. La prolifération des armes
légères et de petits calibres
Déchirée depuis longtemps par des
conflits armés meurtriers, mettant face à face les forces
irrégulières (bandes armées, milices, mouvements
rebelles...) et les forces gouvernementales, l'Afrique Centrale est devenue le
terrain de prédilection des trafiquants d'armes. L'estimation porte
aujourd'hui à plus de 875 millions54 le nombre d'armes
légères en circulation dans le monde, et de 8 à 10
millions d'armes s'ajoutent à cet arsenal chaque année. Ce qui
veut dire que d'ici 2015, 869 millions à 975 millions d'armes
légères seront en circulation à travers la planète.
Environ 5 à 6% de cet arsenal dangereux se retrouveraient en Afrique
Centrale55 et alimente les conflits armés tout en aggravant
l'insécurité. Cette situation alarmiste est le résultat de
la combinaison de plusieurs facteurs, allant de la production
incontrôlée de ces armes jusqu'à leur exportation ou leur
importation excessives en passant par la corruption d'Etat. Tous ces facteurs
amènent à l'étude du phénomène de la
circulation illicite des ALPC dans la sous-région.
52 Ntuda Ebodé Joseph Vincent, «
Criminalité transfrontalière : forces et faiblesse de
l'initiative tripartite Cameroun-Centrafrique-Tchad », in FPAE et IRIC,
Atelier, Les armes légères et de petit calibre en Afrique
Centrale : base et ressources d'une politique régionale, 3, 4 et 5
février 2009.
53 Claude ABE, «
Pratiques et productivité de la criminalité
transfrontalière en Afrique centrale : l'exemple des Zarguina », in
Bulletin de l'APAD, n° 25.
54 Selon la rapport 2007 sur
le armes légères émanant du Graduate Institute Studies de
Genève ; il y a 5 ans, ce même rapport répertoriait 640
millions d'armes dans le monde.
55 Ibid.
39
On pourrait penser que les flux d'armes à feu
viendraient en tête des trafics clandestins ayant une incidence sur les
conflits. Bien que le génocide au Rwanda ait montré que des
violences à grande échelle peuvent être
perpétrées sans armes sophistiquées, la
prolifération d'armes à feu est sans aucun doute à
l'origine d'une augmentation du nombre de morts. Par ailleurs, sans armes ni
munitions, les groupes armés seraient rapidement débordés
par les forces nationales. Il semblerait toutefois que les groupes armés
n'aient pas besoin de faire appel à des trafiquants internationaux pour
se procurer des armes. Au fil des années, la région a
été submergée par les armes à feu, et il en reste
encore de nombreux stocks aujourd'hui. En 2005 déjà, les chefs de
groupes armés indiquaient qu'ils n'avaient pas besoin d'acheter des
armes, car les stocks laissés dans la région suite aux
différentes guerres étaient bien suffisants56. Les
munitions ont une durée de vie déterminée, mais un AK-47
bien entretenu peut servir indéfiniment, comme le dira Antonio Maria
Costa Directeur exécutif de l'Office des Nations Unies contre la drogue
et le crime (ONUDC) « Le problème des armes
légères c'est qu'elles sont durables, a-t-il ajouté,
rendant encore plus complexe la régulation du trafic. Le stock d'armes
accumulé par l'ex Union Soviétique a alimenté au
début des années 1990 presque tous les conflits,
particulièrement en Afrique, de A à Z, de l'Angola au Zimbabwe
»57
. D'après une récente enquête
réalisée auprès de 10 000 ménages dans cinq zones
différentes de l'est de la RDC, jusqu'à 300 000 armes
légères seraient encore entre les mains de civils.58
De plus, dans d'autres régions d'Afrique, les rebelles et les
malfaiteurs se procurent souvent leurs armes et leurs munitions auprès
de ceux-là mêmes qui sont censés les combattre : les
militaires et les forces de police59. Cela peut parfois s'expliquer
par la sympathie de ces derniers à l'égard de la cause des
rebelles, ou encore parce que les obligations personnelles prennent le pas sur
les responsabilités professionnelles60. Dans certains cas,
les armes peuvent
56 Rapport du Groupe
d'experts présenté en application de la Résolution 1552
(2004) (publication des Nations Unies, 25 janvier 2005, S/2005/30),
para.137.
57 ANONYME, Le trafic d'armes continue
d'aggraver l'instabilité en Afrique centrale,
http://www.un.org/apps/newsFr/storyF.asp?NewsID=21501#.RFVqk5hK0Zc,
consulté le 27 août 2013.
58 Zeebroek, X., W. Paes, G. Berghezan et L. Guesnet,
Étude sur la prolifération des armes légères en
République démocratique du Congo. Groupe de recherche et
d'information sur la paix et la sécurité, et Bonn International
Center for Conversion, avril 2010.
59 Les FDLR, les FRF et les autres groupes
Maï-Maï ont tous reçu des armes d l'armée congolaise.
Voir le Rapport final du Groupe d'experts sur la République
démocratique du Congo, S/2009/603, Annexe 14.
60 Le Groupe d'experts a
par exemple découvert que le Maï-Maï Sheka avait obtenu des
armes par les militaires, en faisant jouer les connexions familiales. Voir le
Rapport final du Groupe d'experts sur la République démocratique
du Congo, S/2010/596. p. 37. Op cit
40
être mises à disposition par des
autorités ou des mouvements politiques de pays voisins qui soutiennent
leur propre ethnie au-delà des frontières ou se servent des
groupes rebelles pour fragiliser les régimes qui ne sont pas à
leur goût. Dans d'autres cas, les armes sont simplement vendues ou
louées par des membres des forces de sécurité qui, faute
de salaire, cherchent d'autres moyens de payer leurs factures. Si rien d'autre
ne marche, les armes sont volées dans des stocks militaires ou lors de
raids61. En Afrique centrale, « la demande locale
continue d'être importante, spécifiquement de la part de milices
ou groupes rebelles », a expliqué Mme Migiro. «
Les faibles capacités nationales et régionales, la
porosité des frontières et la propagation des conflits dans la
région entravent la régulation efficace des armes
légères »,62 a-t-elle
souligné.
II.3. Terrorisme et piraterie maritime
Le Golfe de Guinée, situé entre les eaux
maritimes du Nigeria et de l'Angola, est parsemé de myriades
d'îles et de presqu'îles, grouillant de gisements pétroliers
en haute mer et sur la terre ferme. Cette région concentre de nombreuses
cités portuaires densément peuplées, comme Lagos, Douala,
Malabo, Sao Tomé et Libreville, Pointe Noire, etc. Les pays du golfe de
Guinée ont des économies peu diversifiées et donc
très dépendant de l'or noir. Cette forte concentration des
réserves pétrolières et cette forte présence
humaine entraînent des activités commerciales très intenses
en voies de communication : maritime (ports), aérienne
(aéroports) et routière mais aussi une forte immigration des
populations des pays limitrophes, entraînant avec elles des tensions
inter-ethniques et des conflits entre les Etats, des exclusions de populations
et de la misère des peuples, non sans ignorer le jeu des puissances, la
corruption, les actes de piraterie liés à la criminalité
et parfois au terrorisme. La piraterie tend à devenir un « un job
d'appoint » dans lequel les « loups des mers » trouvent une
opportunité pécuniaire qui leur permet d'arrondir leurs fins de
mois. Les amateurs, qui connaissent bien la géographie de la
région, s'attaquent principalement aux embarcations de transport ou de
pêche, et des villages littoraux ou insulaires, tandis que les
professionnels qui sont des pirates de la haute mer s'intéressent aux
activités plus lucratives : trafics d'armes et les prises d'otages
offshores.
61 Ibid.
62 Voir le site
http://www.un.org/apps/newsFr/storyF.asp?NewsID=21501#.RFVqk5hK0Zc.
Loc. cit.
)64
41
L'Afrique centrale qui détient la palme d'or
des actes de piraterie maritime entre 2008 et 2009 comme en témoignent
les actes commis aux larges des cotes camerounaises et
équato-guinéennes63. En septembre 2008, environ
cinquante « gangsters des mers » lourdement armés ont
débarqué à Limbé, ville camerounaise avec leurs
embarcations rapides, pris d'assaut six banques du centre-ville, causé
un mort durant leurs braquages puis repris le large sans demander leur reste.
Au même titre que la prise des otages aux larges de Bakassi en octobre
2008 (10 otages dont 7 Français, 2 Camerounais et un Tunisien),
l'attaque avec mort d'homme survenue aux larges camerounaises, le 29 avril
2009,( à Douala). Puis le braquage de plusieurs établissements
bancaires dans la capitale équato-guinéenne (17 février
2009, ile de Bioko...
est autant de signes qui indiquent que la piraterie ne
peut plus être considérée comme un
épiphénomène en Afrique Centrale. Cette situation est
d'autant plus préoccupante que de nombreux actes de pirateries fluviales
et lacustres sont également régulièrement
perpétrés en Afrique centrale, que ce soit dans les lacs (Tchad,
Tanganyika, Albert, Mweru...) ou le long des fleuves (Oubangui, Sangha, Chari,
Wouri, Bénoué, Congo, Ogooué...)65. La
géographie de l'insécurité maritime s'étend
désormais à l'ensemble de la région, c'est-à-dire
de la « Côte d'Ivoire à l'Angola » selon les propos du
secrétaire général de la CEEAC.
63 Etanislas Ngodi, « L'Afrique centrale face aux
nouveaux enjeux sécuritaires du XXIe siècle », In :
L'Afrique et les défis du XXI ème siècle,
13ème Assemblée générale,
CODESRIA, 5-9 décembre 2011, Rabat-Maroc.
64 Ibid.
65 Ntuda Ebode Joseph Vincent, Terrorisme et
piraterie. De nouveaux enjeux sécuritaires en Afrique
Centrale, Presses Universitaires d'Afrique, 2010
42
Carte 2. Situation sécuritaire en Afrique
centrale
L'analyse de ce chapitre aura permis de comprendre que
la situation sécuritaire en Afrique centrale n'est pas reluisante. Cette
sous-région connait plusieurs menaces qui freinent sont
développement. D'abord, les conflits armés qui ont affecté
et continuent d'affecter certains pays de cet espace géographique. Ces
conflits sont le résultat de la mauvaise gouvernance elle-même
source de fragilité des Etats, c'est-à-dire leur
incapacité à assurer la sécurité nationale, la
fourniture des services de bases (éducation, santé, etc.), la
protection et la garantie essentielle des libertés. A la mauvaise
gouvernance s'ajoutent l'exploitation illégale des ressources naturelles
qui créent des économies parallèles qui alimente aussi
certains conflits dans la sous-région. En dehors
43
des conflits armés, la sous-région
connait désormais d'autres menaces à savoir la criminalité
transfrontalière et la montée du terrorisme et de la piraterie
maritime.
44
Chapitre II : Les logiques et les acteurs de
l'irénisme en Afrique centrale
En dépit ou plutôt à cause des
conflits, le rôle de la CEMAC et de la CEEAC dans leur gestion s'est
précisé au fil des années. Le 25 octobre 2002 a
été lancée la première mission régionale de
maintien de la paix avec la Force multinationale en Centrafrique (FOMUC) et la
CEEAC a progressivement mis sur pied son dispositif institutionnel de paix et
de sécurité dans le cadre de l'architecture continentale
dessinée par l'Union africaine (UA). Ce chapitre a donc pour objectif de
nous montrer les origines de la coopération sous régionale en
matière de paix et de sécurité partant de la CEMAC,
jusqu'à nos jour ce qui nous permettra de comprendre comment on est
arrivé à la mise en place de nos deux instruments qui sont au
coeur de nos préoccupation.
I. La recherche de la paix et la sécurité
sous-régionale
L'instabilité persistante de la RCA a
été le leitmotiv de la coopération sous-régionale
en matière de paix et de sécurité. Cela s'est
matérialisé d'abord par la création de la Mission
interafricaine de surveillance des accords de Bangui (MISAB), puis par
création de la Force multinationale Centrafrique (FOMUC), qui prit le
relais pour maintenir la paix dans ce pays.
I.1. La création de la Mission interafricaine de
surveillance des accords de Bangui (MISAB)
Les pays d'Afrique centrale ont joint pour la
première fois leurs efforts multilatéraux de maintien de la paix
au milieu des années 1990 et une nouvelle fois au début des
années 2000, lors de l'envoi de deux missions multinationales de
maintien de la paix en RCA. Les crises récurrentes et la faiblesse
étatique chronique du pays en avaient fait un terrain d'essai
idéal pour la coopération sécuritaire. Suite à son
élection à la tête de la RCA en 1993, le président
centrafricain Ange-Félix Patassé a très vite
commencé à se servir de l'appareil d'Etat à son profit,
s'aliénant ceux qui n'appartenaient pas à son ethnie. En avril
1996, les doléances sociales généralisées ont
donné lieu à des violences, quand l'armée,
réclamant le paiement de trois mois d'arriérés de salaire,
a affronté la garde présidentielle. Deux autres mutineries en mai
et en novembre ont causé des dizaines de morts et conduit à la
création d'un gouvernement d'unité nationale. En novembre,
l'armée française, déployée pour prévenir
une escalade, a perdu deux soldats. Les représailles contre les mutins
ont valu à la France d'être clouée au
45
pilori médiatique, ce qui l'a incité par
la suite à rechercher des moyens de maintien de la paix politiquement
moins coûteux dans son ancienne colonie66.
En décembre 1996, la France a convié un
sommet franco-africain à Ouagadougou, au Burkina Faso, où six
pays (Gabon, Tchad, Burkina Faso, Mali, Sénégal et Togo) se sont
mis d'accord pour mettre des troupes à disposition de la Mission
interafricaine de surveillance des accords de Bangui (MISAB),
créée à l'occasion. Bénéficiant du soutien
financier et logistique de la France, et ultérieurement d'un mandat des
Nations unies, la force de 750 hommes a été rapidement
déployée après le sommet afin de veiller au respect de
l'accord de paix entre le gouvernement et les rebelles et de superviser le
processus de désarmement. Suite à la mort de certains de leurs
soldats, les troupes de la MISAB se sont livrées à des
représailles, dont la violence a de loin surpassé celle des
troupes françaises. En juin 1997 ils ont pilonné les banlieues
sud de Bangui à l'arme lourde. La mort d'innocentes victimes et les
dommages matériels ont fait perdre à la MISAB son image de
neutralité aux yeux des civils. Ses troupes se sont retirées en
avril 1998, le gouvernement français n'étant plus disposé
à financer cet instrument trop imprévisible. Cette
première mission multilatérale a constitué un essai ayant
clairement besoin d'être repensé, mais également un
précédent pour les pays africains participant à des
opérations de maintien de la paix et au déploiement de telles
missions en Afrique centrale.
I.2. Création de la Force multinationale
Centrafrique (FOMUC)
En 1999, Patassé a remporté les
élections présidentielles, mais une tentative de coup en mai 2001
a déclenché de nouveaux affrontements, sur fond ethnique, avec
les forces de sécurité à Bangui. Le président en a
imputé la responsabilité au chef d'état-major des
armées, le général François Bozizé, qui a
alors pris la fuite au Tchad pour former son propre groupe rebelle avec le
soutien du voisin tchadien. Craignant pour sa sécurité,
Patassé a fait appel à la Communauté des Etats
sahélo-sahariens (CEN-SAD)67, une initiative de l'ancien
président libyen Mouammar Kadhafi, qui a déployé environ
300 soldats de Libye, du Soudan et de Djibouti en décembre 2001 pour
sécuriser Bangui. En octobre 2002, les chefs d'Etat des six membres de
la CEMAC ont décidé d'envoyer une force régionale de
maintien de la paix à Bangui pour remplacer celle de la CEN-SAD. La paix
et la sécurité ne font alors pas partie du mandat
strictement
66 Voir le Rapport Afrique de Crisis Group N°136,
République centrafricaine : anatomie d'un Etat
fantôme, 13 décembre 2007, p. 9-11.
67 La CEN-SAD a été créée en
1998.
46
économique de la CEMAC, mais la CEEAC, alors en
construction pour devenir la structure régionale de promotion de la paix
et de la sécurité, n'est ni politiquement ni institutionnellement
prête à assumer ce rôle. Omar Bongo a pris la tête de
cette initiative, désireux d'investir des ressources politiques et
financières dans une mission en RCA afin de renforcer son statut de chef
de file régional et de réaffirmer son influence en RCA face
à celle de Kadhafi. Pour Patassé assiégé, cette
force mandatée par les dirigeants de la CEMAC pour protéger les
institutions étatiques était une reconnaissance bienvenue de sa
légitimité. Trois semaines plus tard, les soldats loyaux à
Bozizé ont tenté un autre coup à Bangui. Ils ont
été repoussés par les combattants étrangers
défendant Patassé, mais la détérioration de la
situation sécuritaire a motivé à juste titre l'envoi d'une
force de maintien de la paix68.
En décembre 2002, la Force multinationale en
Centrafrique (FOMUC) s'est déployée à Bangui, pour y
rester jusqu'en juillet 2008. Au plus fort de sa présence, la mission
militaire a atteint 380 soldats du Gabon, de la République du Congo, du
Tchad et du Cameroun. Affirmant son leadership politique, Omar Bongo s'est
assuré que les deux commandants à la tête de la force
pendant ses six années de mission étaient gabonais. La France, de
nouveau, a fourni un soutien financier et logistique conséquent, mais
l'Union européenne a porté la majorité du fardeau
financier à partir de 2004. L'Allemagne a aussi financé
l'équipement. Le mandat de la FOMUC était de protéger
Patassé et de sécuriser Bangui69. Cependant, le fait
qu'elle n'ait pas tenté de prévenir le second coup réussi
de Bozizé le 15 mars 2003 démontre clairement que le mandat
approuvé par une institution régionale pèse moins lourd
que la volonté des présidents de la région. Les relations
entre Patassé et Idriss Déby, le président tchadien,
s'étaient en effet sérieusement détériorées
après qu'ils s'étaient accusés mutuellement de soutenir
leurs opposants réciproques. Déby, Joseph Kabila,
président de la RDC, Denis Sassou Nguesso, président de la
République du Congo et Omar Bongo, doyen régional, avaient tous
donné à Bozizé leur aval et avaient dit à la FOMUC
de ne pas intervenir.43 Le 3 juin, les chefs d'Etat de la CEMAC ont reconnu
collectivement le nouveau gouvernement de Bozizé.
En réponse à cette nouvelle donne, la
CEMAC a chargé la FOMUC de superviser le processus de transition et de
réconciliation et d'assister la préparation des élections
de mai 2005. Quand les rébellions ont éclaté dans le Nord
en 2005- 2006, des troupes furent déployées
68 En plus des troupes de la CEN-SAD, Kadhafi avait
envoyé des troupes libyennes, dans un cadre bilatéral, afin de
protéger Patassé. A la demande de ce dernier, Jean-Pierre Bemba,
le chef du Mouvement pour la libération du Congo (MLC), un groupe
rebelle en RDC opposé à Laurent-Désiré Kabila,
avait également envoyé ses hommes en RCA afin de se battre pour
Patassé.
69 Les chefs d'Etat approuvent le statut de la force
multinationale en RCA », Agence France-Presse, 15 février
2003.
47
dans les villes provinciales de Bozoum et Paoua dans
le Nord-Ouest pour sécuriser la frontière tchadienne et Bria
à l'Est. Le principal mandat de la force est demeuré la
défense des institutions de l'Etat et son domaine d'action est
resté limité aux questions militaires. Les résultats
à long terme de la mission dans le pays restent, en conséquence,
limités. La présence anodine de la FOMUC en RCA a aplani le
terrain pour une coopération sécuritaire plus approfondie en
démontrant aux bailleurs qu'une force multinationale africaine peut
être déployée à un coût
considérablement moins élevé que celui d'une mission
internationale, et sans menacer les civils, comme cela a été le
cas avec la MISAB. La non-interférence de la mission dans le
renversement de Patassé a également rassuré les dirigeants
d'Afrique centrale sur le fait que le déploiement d'une force
régionale ne les empêcherait pas de réaliser leurs
objectifs politiques dans d'autres pays. A l'opposé, la présence
de la force a conféré à cette transition non
démocratique une plus grande légitimité régionale.
C'est donc avec un enthousiasme prudent que la poursuite d'une
coopération sécuritaire régionale plus approfondie a
été envisagée en Afrique centrale.
L'expérience de cette coopération
sécuritaire en RCA, a conduit les chefs d'Etats de cette partie du
continent à mettre progressivement en place tout un système
sous-régional de sécurité et de défense dont le
maître d'oeuvre sera la CEEAC. Celle-ci a été choisie par
l'Union Africaine pour traduire en actes dans la sous-région le projet
continental de paix et de sécurité.
II. La CEEAC, maître d'oeuvre de l'architecture de la
paix et de la sécurité en Afrique centrale
Alors que la plupart des pays africains fêtent
leurs 50 ans d'indépendance nationale, la promotion d'une unité
du continent reste d'actualité. L'Union africaine (UA), qui s'est
emparée en 2002 de l'héritage du panafricanisme, tente de faire
ses preuves en s'attelant à relever les nombreux défis
laissés en friche par l'Organisation de l'Unité africaine (OUA)
avait échoué. Avec la création de l'Architecture africaine
de paix et de sécurité (AAPS), l'un de ceux-ci reste à
présent la redéfinition de la coopération entre l'UA et
les Communautés économiques régionales (CER). En effet,
traditionnellement reconnues comme de simples piliers de la Communauté
économique africaine (CEA), les CER sont devenues des acteurs à
part entière en matière de paix et de sécurité. La
CEEAC s'est donc engagée dans la prévention, la gestion et la
résolution des conflits en Afrique centrale.
48
II.1. Les Prémices de la promotion de la paix
et de la sécurité au sein de la CEEAC : la création du
Comité consultatif permanent des Nations unies sur les questions de
sécurité en Afrique centrale (CCPNUQSAC)
En décembre 1981 les dirigeants de l'Union
Douanière et Économique de l'Afrique Centrale (UDEAC) ont
donné leur accord de principe pour élargir la Communauté
Économiques d'États de l'Afrique Centrale. La CEEAC à
été créée, le 18 octobre 1983 par les membres de
l'UDEAC et les membres de la Communauté Économique des Pays des
Grands Lacs (CEPGL) (Burundi, Ruanda et le Zaïre - ainsi nommé
à l'époque), ainsi que Sao Tomé et Principe. L'Angola a
conservé un rôle d'observateur jusqu'en 1999, date à
laquelle le pays est devenu membre. La CEEAC fonctionne dès 1985, mais
est restée inactive pendant une grande partie des années
quatre-vingt dix.
En 1986, Paul Biya, alors président en fonction
de la CEEAC, demande à l'ONU d'aider l'organisation à restaurer
la confiance entre les Etats afin de réduire le risque de conflit. Huit
ans plus tard70, le Secrétaire général de
l'ONU, Boutros Boutros-Ghali, créait le Comité consultatif
permanent des Nations unies sur les questions de sécurité en
Afrique centrale (CCPNUQSAC). Au sein de ce comité, les ministres des
Affaires étrangères, de l'Intérieur et de la
Défense de la région se rencontraient pour aborder les questions
de paix et de sécurité et rédiger des recommandations
devant être ratifiées par les chefs d'Etat. Le Comité s'est
révélé utile ; il a amélioré progressivement
la communication entre les gouvernements d'Afrique centrale sur les questions
de sécurité, alors que la CEEAC se trouvait dans un coma
prolongé. A la fin de la cinquième réunion à
Yaoundé, le 9 septembre 1994, la RCA, la République du Congo, le
Cameroun, la Guinée Equatoriale, le Gabon et Sao Tomé-et-Principe
ont adopté un pacte de non-agression posant ainsi les jalons de la
signature par l'ensemble des membres de la CEEAC, d'un pacte identique. Ce
dernier, signé le 8 juillet 1996 a été peu suivi d'effet.
La première guerre du Congo a éclaté en novembre pour
continuer presque sans interruption pendant sept années.
Entre temps, la mort de dix-huit soldats
américains en Somalie en octobre 1993 et de dix casques bleus belges au
Rwanda en avril 1994 avait entamé l'appétit des puissances
occidentales pour les interventions de maintien de la paix en Afrique. La
France, le Royaume-
70 En février 1988, le Centre régional
des Nations unies pour la paix et le désarmement en Afrique (UNREC) a
organisé à Lomé, au Togo, une conférence sur la
promotion de la confiance, de la sécurité et du
développement dans le cadre de la CEEAC. Un séminaire a suivi en
juin 1991 à Yaoundé, sur la résolution de conflits, la
prévention et la gestion de crises et le renforcement de confiance entre
les Etats membres de la CEEAC. Mutoy Mubiala, « Coopérer pour la
paix en Afrique centrale », Institut des Nations unies pour la recherche
sur le désarmement (UNIDIR), 2003.
49
Uni et les Etats-Unis ont lancé des programmes
de renforcement des capacités des forces africaines et encouragé
les institutions régionales et continentales à établir des
structures leur permettant de résoudre leurs conflits. En 1994, la
France commença à mettre en place son programme de renforcement
des capacités africaines de maintien de la paix (RECAMP). En 1996, les
Britanniques lancèrent leur programme de soutien à la formation
en maintien de la paix (Peacekeeping Training Support Programme),
intégré au sein de l'Instrument pour la prévention des
conflits en 2001. En 1997, les Américains mirent sur pied l'initiative
de réponse aux crises africaines (African Crisis Response Initiative,
ACRI), remplacée par le programme d'assistance et de formation aux
opérations de secours en Afrique (African Contingency Operations
Training and Assistance) Ce virage politique a contribué à mener
à terme le remplacement de l'Organisation de l'unité africaine
par l'Union africaine (UA) en 2002. Contrairement à ceux de son
ainée, les principes fondateurs de l'UA mettent l'accent sur la
sécurité collective et intègrent les organisations
régionales dans le schéma continental en les incitant à
créer leurs propres structures et mécanismes de
sécurité collective L'architecture africaine de paix et de
sécurité (AAPS) de l'UA, lancée au même moment que
cette dernière, comprend un certain nombre de mécanismes pour la
prévention, la gestion et le règlement des conflits (le
système continental d'alerte précoce, le Conseil des sages, les
Forces africaines en attente, etc.). L'UA a prévu que les
communautés économiques régionales prendraient la
tête de la sécurité en reproduisant ses mécanismes
pour la prévention, la gestion et le règlement de conflits au
niveau régional. La CEEAC, parce qu'elle avait plus de membres que la
CEMAC, fut jugée plus à même de jouer ce rôle en
Afrique centrale71. Si à la fin des années 1990 l'UA
n'était pas encore sur pied, l'UE et la Commission économique de
l'ONU pour l'Afrique se sont révélées d'influents avocats
de la renaissance de la CEEAC. Une des conditions de l'UE pour la signature des
accords de partenariat économique avec les pays ACP (Afrique,
Caraïbes et Pacifique) en 1995 à Lomé, et pour ceux de
Cotonou en 2000, était qu'ils s'engagent pour l'intégration
régionale72.
71 Voir le « Protocole relatif à la
création du Conseil de paix et de sécurité de l'Union
africaine », session ordinaire de l'Assemblée de l'Union africaine,
9 juillet 2002.
72 Bruno Békolo-Ebé, «
L'intégration régionale en Afrique : caractéristiques,
contraintes et perspectives », Mondes en
développement, n°. 115-116 (2001/3), cité dans
le rapport de Crisis Group n°1981, op. cit. p.
4.
50
II.2. La CEEAC et son nouveau rôle de promoteur
de paix et de sécurité
Le 6 février 1998, à Libreville, les dix
chefs d'Etat de la CEEAC ont tenu leur deuxième sommet extraordinaire
qui s'est conclu par la décision de réactiver l'organisation
sous-régionale et d'élargir ses attributions au-delà du
champ économique originel pour inclure la promotion de la paix et de la
sécurité. Cette nouvelle orientation devait devenir la raison
d'être de l'organisation alors que ses fonctions économiques se
présentaient de plus en plus comme marginales, la CEMAC couvrant
à peu près le même domaine, pour un groupe d'Etats plus
restreint. L'idée était de créer une structure
institutionnelle par le biais de laquelle les Etats membres pourraient
élaborer des réponses politiques et militaires promptes et
efficaces face à l'émergence d'une nouvelle crise et contribuer
à prévenir les conflits, protégeant ainsi le
développement économique de la région. De par sa taille,
les décisions de la CEEAC et ses interventions
bénéficieraient d'une impartialité et d'une
légitimité essentielle aux yeux des parties au conflit et des
observateurs internationaux73.
Au moment de sa renaissance, la CEEAC s'est
trouvée confrontée à la fois à la méfiance
de nombreux dirigeants d'Afrique centrale, hésitants à s'engager
dans un projet d'intégration potentiellement contraignant, et à
un contexte politique peu favorable dans plusieurs pays. La République
du Congo, la RDC, le Tchad, le Burundi, le Rwanda et l'Angola sortaient tout
juste de guerres civiles et s'acheminaient vers une consolidation
intérieure incertaine. Au Cameroun, le caractère
réservé de Paul Biya constituait un frein à son engagement
plus visible dans ce nouveau projet. De son côté, la Guinée
Equatoriale n'avait pas les moyens de ses ambitions. Seul le Gabon paraissait
actif sur la scène régionale. Les talents politiques du
président Omar Bongo ainsi que ses soutiens extérieurs ont
compensé les moyens économiques et militaires plutôt
limités du pays et lui ont conféré un rôle
central74. Omar Bongo et Denis Sassou Nguesso tenaient
particulièrement à la renaissance de la CEEAC. Le premier
cherchait à rehausser son profil régional et international par
des moyens convenant à son statut de doyen des présidents
d'Afrique centrale. Sassou Nguesso, de son côté, venait de sortir
victorieux d'une sanglante guerre civile en 1997, qui avait laissé
Brazzaville en ruines75.
73 Voir Rapport de Crisis
Group, n°18.1, op cit. , p.9.
74 Sur la conjoncture politique régionale au
moment de la relance de la CEEAC, voir Hakim Ben Hammouda,
L'intégration régionale en Afrique centrale. Bilan
et perspectives (Paris, 2003) et Angela Meyer, « Regional
integration and securityin Central Africa - Assessment and perspectives 10
years after the revival », Egmont - The Royal Institute for International
Relations, Paper 25, décembre 2008.
51
Il a donc pris un rôle de premier plan dans la
renaissance de la CEEAC pour légitimer son régime et redorer son
image ternie. La réserve de Laurent-Désiré Kabila à
l'égard de la CEEAC a joué en sa faveur. Kabila venant tout juste
de remporter la première guerre du Congo, la consolidation de son
pouvoir constituait un défi plus urgent76. En l'absence
d'autres prétendants, Sassou Nguesso s'est assuré que la fonction
de secrétaire général incombe à l'un de ses
compatriotes, Louis-Sylvain Goma77.
En janvier 1999, la demande de l'Angola, qui avait
jusqu' alors un statut d'observateur, de devenir membre permanent de la CEEAC a
été acceptée. Bien que le commerce extérieur du
pays soit principalement tourné vers le Sud de l'Afrique, l'implication
historique de la RDC dans les conflits internes à l'Angola constituait
un motif légitime pour le président José Eduardo Dos
Santos de rechercher une plus grande influence en Afrique centrale. En
reconnaissance de la richesse pétrolière de l'Angola et de sa
supériorité militaire, le poste de secrétaire
général adjoint chargé des questions de paix et de
sécurité lui a été
attribué78.
75 « Trois guerres civiles en dix ans »,
Libération, 19 juin 2002. Sassou Nguesso
aurait aussi financé le premier immeuble de la CEEAC à
Libreville. Entretien de Crisis Group, cadre de la CEEAC, Bangui, RCA, 24
janvier 2004.
76 Entretien réalisé par Crisis Group,
diplomate d'Afrique centrale, Libreville, Gabon, 24 mars 2011.
77 Louis Sylvain-Goma est de Pointe-Noire, en
République du Congo. Il a suivi une formation militaire en France et
s'est élevé au rang de chef des forces armées en 1974. Il
fut Premier ministre du 18 décembre 1975 au 7 août 1984, sous
trois présidents, le dernier étant Sassou Nguesso. Il a par la
suite occupé une série de positions politiques avant de rejoindre
la compagnie pétrolière Agip Congo de 1992 à
1998.
78 Sur la structure interne de la CEEAC, voir le chapitre
III. B du rapport de Crisis Group n°181.
52
Photo : Siège de la CEEAC à Libreville
(Gabon)
Cliché : Cyr Revelli Mba Abessolo, 3 mars
2013.
Pour l'essentiel de ce deuxième chapitre,
retenons que la coopération sécuritaire en Afrique centrale est
à l'origine le fait d'une mission interafricaine dénommée
MISAB. Après l'échec de la MISAB, la CEMAC a pris le relais en
2002 en envoyant une force sous-régionale de maintient de la paix qui
avait pour objectif de remplacer celle de la CEN-SAD appelée en renfort
par le président Patassé. La CEEAC qui avait été
choisi par l'Union Africaine lors de son initiative de rationalisation des CERs
en Afrique, deviendra le maître d'oeuvre de l'architecture de paix et de
sécurité en Afrique centrale.
53
CONCLUSION PARTIELLE
L'Afrique centrale est considérée
aujourd'hui de manière unanime comme une des régions les plus
instables du monde79. Cette instabilité se caractérise
par la récurrence des conflits armés et désormais la
montée de la criminalité transfrontalière, du terrorisme
et de la piraterie maritime dans le Golfe de guinée. La première
préoccupation des chefs d'Etats de la sous-région était
d'éradiquer le phénomène de la conflictualité qui
sévissait la quasi-totalité de la sous-région durant les
années 90. C'est ainsi que la première coopération
sécuritaire en Afrique centrale aura lieu en RCA en 1996 avec la
création de la Mission interafricaine de surveillance des accords de
Bangui (MISAB) qui regroupait six pays africains à savoir le Gabon, le
Tchad, le Burkina Faso, le Mali, le Sénégal et le Togo.
L'échec de cette mission a permis aux Etats de l'Afrique centrale d'unir
pour la première fois leur force en envoyant des troupes en RCA. C'est
ainsi que fut crée en 2002 la Force multinationale de l'Afrique centrale
(FOMUC). L'expérience d'une coopération militaire exclusivement
centrafricaine va amener les dirigeants de cette sous région à
mettre en place de manière progressive tout un système
continental de sécurité et de défense dont le maître
d'oeuvre sera la CEEAC qui a été choisi par l'Union Africaine
dans le cadre de son projet de rationalisation de CERs et qui est
désormais en charge des questions de paix et de sécurité.
C'est sous l'ère de la CEEAC en tant que maître d'oeuvre de
l'architecture de paix et de sécurité que va se mettre en place
le Comité consultatifs et permanent de Nations Unies sur les questions
de paix et de sécurité en Afrique centrale(CCPNUQSAC) en 1986,
puis de la signature du Pacte de non-agression en 1994, suivi du Pacte
d'assistance mutuelle qui a été signé en même temps
que le protocole relatif au Conseil de paix et de sécurité de
l'Afrique centrale (COPAX) en 2000. Le COPAX qui est la pierre angulaire des
mécanismes de paix et de sécurité en Afrique centrale
dispose de deux instruments de mise en oeuvre qui sont le MARAC et la FOMAC et
qui font l'objet d'une analyse dans la partie qui va suivre.
79 Selon une étude réalisée en 2010
par le Fonds pour la paix
54
DEUXIEME PARTIE
LES INSTRUMENTS DU COPAX :
ENTRE THEORIE ET PRATIQUE
55
En théorie, le COPAX vise la réalisation
d'une paix durable et englobe des éléments de réponse aux
causes profondes des conflits dans cette sous-région. Parmi ces causes
profondes, on trouve, entre autres, les violations des droits de l'homme, le
déficit de démocratie, le refus de l'alternance au pouvoir,
l'utilisation des ethnies à des fins de conquête du pouvoir
politique et du contrôle des ressources économiques, la mauvaise
gouvernance et les inégalités sociales. Sa création en
1999, montre la volonté manifeste des Etats de l'Afrique centrale de
faire face à la conflictualité qui hante la sous-région et
affecte son processus de développement. En dépit de cette
volonté, depuis près de quinze ans, on assiste à une
récurrence des conflits et à une montée grandissante de la
criminalité sous toutes ses formes. Pour mesurer la capacité de
ces instruments à faire face aux menaces situations conflictuelles, nous
commencerons par présenter Le COPAX dans sa globalité, ses
instruments que sont le MARAC et la FOMAC (chapitre III) puis nous les
analyserons à l'épreuve des faits et Enfin montrer comment la
CEEAC cherche à adapter ses politiques sécuritaires aux nouvelles
formes de menaces (chapitre IV).
56
Chapitre III : Les principaux instruments du COPAX:
fonctionnement et difficultés
Les instruments du COPAX que sont le Mécanisme
d'Alerte Rapide de l'Afrique centrale et la Force Multinationale de l'Afrique
centrale sont des mécanismes civilo-militaires qui permettent au COPAX
de mettre en pratique ses objectifs qui sont à titre de rappel, celle
est de prévenir, de gérer et de régler les conflits. Nous
allons dans le cadre de ce chapitre présenter ceux-ci, notamment, leurs
missions, leur organisation et leur fonctionnement selon les
textes.
I. Le Conseil de paix et de sécurité de
l'Afrique centrale (COPAX)
Le conseil de paix et de sécurité de
l'Afrique centrale (COPAX) est un forum de dialogue sur les questions de paix
et de sécurité et un organe de décision pour les
Etats-membres de l'espace CEEAC. La structure du COPAX avait été
inspirée du mécanisme pour la prévention, la gestion et le
règlement des conflits et le maintien de la paix et de la
sécurité de la Communauté économique des Etats
d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO)80.
I.1. La création du COPAX
La Conférence des Chefs d'État de la
CEEAC lors de sa réunion de février 2000 à Malabo
(Guinée équatoriale) a adopté le Protocole relatif au
Conseil de paix et de sécurité de l'Afrique centrale (COPAX). Aux
termes de l'article 3 du Protocole au Traité de la CEEAC relatif au
COPAX, la création et le fonctionnement de celui-ci sont fondés
sur le respect des objectifs, idéaux et principes fondamentaux des
Nations Unies, de l'OUA et de la CEEAC qui portent sur l'égalité
souveraine des États ; la non ingérence dans les affaires
intérieures des autres États ; le non recours à la force
pour le règlement des différends ;le respect de la
souveraineté, de l'intégrité territoriale et de
l'unité nationale des États ; le respect de la
prééminence du droit dans leurs rapports mutuels ;
l'intangibilité des frontières héritées de la
colonisation ; la protection des droits et libertés fondamentales de la
personne ; la promotion et la consolidation des institutions
démocratiques et de la légalité constitutionnelle dans
chaque État ; l'engagement d'oeuvrer pour la création d'un climat
de bon voisinage entre les États et de rechercher en toute circonstance
les mesures nécessaires pour améliorer leurs
relations
80 MutoY Mubiala, op. cit. p.
16.
57
fraternelles et enfin , la volonté
d'ériger les dispositions pertinentes du présent protocole comme
référence politique essentielle à laquelle chaque
État membre peut recourir pour prévenir ou pour faire cesser les
crises et les conflits dans la sous- région. Le Protocole relatif au
COPAX a été signé en même temps que le Pacte
d'assistance mutuelle (PAM). Le Pacte constitue le véritable maillon de
la diplomatie de défense institutionnalisée par les membres de
CEEAC à Malabo, le 24 février 2000. Les Etats-parties, se
proposent, dans la limite de leurs possibilités, de prêter main
forte à l'un d'eux victime d'une agression armée, et à
mettre des contingents de leurs armées nationales à la
disposition de la FOMAC, conformément au protocole relatif au COPAX. Le
protocole relatif au COPAX et le pacte de non-agression constituent un
dispositif politico-militaire nécessaire, né au moment où
l'Afrique centrale semble devenir une poudrière.
I.2. La structuration du COPAX
Structurellement, le COPAX comporte quatre organes
principaux, dont les pouvoirs sont définis aux articles 7 à 19 du
Protocole. Il s'agit de : la Conférence de Chefs d'Etat, du Conseil des
ministres, de la Commission de défense et de sécurité et
du Secrétariat Général de la CEEAC.
La conférence des Chefs d'Etat est
l'instance suprême et l'organe de décision du COPAX. Selon
l'article 8 du Protocole, la Conférence des Chefs d'État
décide des mesures appropriées de prévention, de gestion
et de règlement des conflits, et notamment de l'opportunité d'une
action militaire ; de la constitution d'une force sous-régionale de
maintien de la paix appelée Force multinationale d'Afrique centrale
(FOMAC), composée d'unités civiles et d'unités militaires
et/ou des polices issues des armées nationales et mobilisables en tant
que de besoin. Elle veille au bon fonctionnement du Mécanisme d'alerte
rapide de l'Afrique centrale (MARAC) ; nomme le Représentant
spécial pour chaque opération et détermine son mandat ;
Elle nomme le commandant de la Force, son adjoint et le Chef d'Etat-major pour
une mission et une durée déterminées ; prend toutes les
initiatives conformes aux missions du COPAX et décide des mesures
d'assistance humanitaire en cas de crise ou de conflits ouverts.
Le Conseil des ministres est Composé
des ministres des affaires étrangères, des forces armées
et de la sécurité intérieure, le Conseil est l'organe
d'exécution et de suivi des décisions de la
Conférence81.
81 Protocole relatif au conseil de paix et de
sécurité, art.8
La Commission de défense et de
sécurité est composée des Chefs
d'État-major des forces armées, des Chefs de police et d'experts
des ministères participant aux travaux du Conseil des ministres. La
Commission est l'organe consultatif chargé notamment de
l'évaluation, de la coordination et du suivi des opérations de
maintien et/ ou de consolidation de la paix82.
Le Secrétariat qui comprend un
Secrétaire général adjoint chargé des questions de
paix et de sécurité, est l'organe administratif du
COPAX83.
La mission générale du COPAX est de
prévenir, de gérer et de régler les conflits84.
Dans ce cadre, il peut procéder au déploiement de missions
civiles et militaires d'observation destinées à maintenir ou
à rétablir la paix dans la sous-région (article 3). Il
dispose, à cet effet, de deux organes subsidiaires : le Mécanisme
d'alerte rapide de l'Afrique centrale (MARAC) et la Force multinationale
d'Afrique centrale (FOMAC).
Figure 2 : L'Architecture du COPAX
58
S
Source : Communauté Economique des Etats de
l'Afrique Centrale, Le rôle des organisations
régionales dans le maintien de la paix « expérience de la
CEEAC », 2010.
82Idem. art. 11
83 Idem. art.
13
84 Idem. art. 19
59
II. Le Mécanisme d'Alerte Rapide et la Force
multinationale de l'Afrique centrale en théorie
Le MARAC et la FOMAC, sont des organes techniques de
mise en oeuvre du COPAX. Le premier est un organe de surveillance de la
sous-région Quant au second, il chargé d'intervenir dans les OMP
aussi bien dans la sous-région que sur l'ensemble du
continent.
II.1. Le Mécanisme d'alerte rapide de l'Afrique
centrale
L'alerte rapide est la « première
composante de la prévention des conflits»85. C'est dans
cette logique que l'Afrique centrale s'est dotée d'un mécanisme
l'alerte rapide qui fait partie intégrante du Système Continental
d'Alerte Rapide (SCAR).
II.1.1 Les missions et l'organisation du
MARAC
Les missions, l'organisation et le fonctionnement du
MARAC sont définis dans son règlement intérieur. Nous
allons, pour l'essentiel, faire la synthèse de ce texte.
II.1.1.1 Les missions du MARAC
Le Mécanisme d'Alerte Rapide de l'Afrique
Centrale est un mécanisme de surveillance, de prévention des
crises et des conflits au sein de la CEEAC. Il est chargé de la collecte
de données aux fins de la prévention des crises et des
conflits86. En d'autres termes, le MARAC, se veut un organe
d'observation des paramètres qui montrent les risques ou
l'évolution d'un conflit. Il analyse les risques, leurs causes ainsi que
la recherche des solutions techniques à y apporter.
II.1.1.2. L'organisation du MARAC
Selon les textes le MARAC devrait être
composé d'une structure centrale basée au siège de la
CEEAC au sein de laquelle nous avons trois bureaux
Le premier bureau est chargé de la veille
permanente et de la collecte des informations relatives à la situation
sécuritaire de la sous-région auprès des réseaux
nationaux et internationaux, de l'ONU et de l'UA et d'autres organisations et
institution publiques, privées, nationales et internationales. Le second
s'occupe de l'analyse et de l'évaluation de
85L'Institut italien des
Affaires Internationales, dans son Rapport rédigé en 2001 «
Early Warning and Conflict Prevention in the Euro-Med Area. A Research
Report.
86 Règlement intérieur du Mécanisme
d'Alerte Rapide (MARAC), art.1.
l'information, dont la mission est d'identifier les
situations susceptibles de constituer une menace pour la paix et la
sécurité d'un Etat ou d'un groupe d'Etats de la
sous-région. Le troisième est responsable de la banque des
données de l'Afrique centrale dont la mission est de stocker,
d'archiver, de conserver et de diffuser l'information sur tous support
appropriés, notamment écrits, imprimés, photographiques,
vidéo phonique, audio phoniques, optiques électroniques,
mécaniques et magnétiques et numériques du
MARAC87.
Aussi le MARAC dispose-t-il dans chaque Etat-membre
des structures décentralisées dénommées burgaux
nationaux. Chaque bureau national est constitué d'organes
gouvernementaux, législatifs, des agences des organisations
internationales, des ONG, de la société civile, des institutions
académiques et de recherche88. Les bureaux nationaux de
collecte et d'analyse de l'information forment les zones d'observation et de
surveillance89. La structure centrale du MARAC est animée par
un coordonnateur nommé par le Secrétaire Général de
la CEEAC90.
60
87 Ibid. art 2.
88 Ibid.
89 Ibid.
90 Ibid. art 3.
61
Figure 3: Organigramme du MARAC
M A R A C
Secrétariat
Bureaux nationaux, Zones d'observations
Bureau
d'observation et
de la collecte
Réalisation : Cyr Revelli MBA ABESSOLO,
à partir du Règlement intérieur du MARAC
Bureau d'analyse et Évaluation
Bureau banque des données
II.1.1.3 Le fonctionnement du MARAC
Selon le règlement intérieur, le MARAC,
dans le cadre de ses activités, assure la collecte et la gestion des
informations fournies spontanément ou sur sa demande par les
Etats-membres, les organisations internationales, les organisations non
gouvernementales, les experts indépendants, les institutions,
académiques et les instituts de recherche91. La plus grande
facilité est accordée au MARAC pour accéder au sources
d'informations disponibles dans les Etats membres.
Les bureaux collectent des données
consignées sur un état journalier des indicateurs qui produisent
un impact sur la paix et la stabilité de la sécurité de la
zone d'observation et de surveillance de la sous-région92.
Sous la supervision du Secrétaire Général adjoint charger
des questions de paix, de sécurité et de stabilité de la
CEEAC, le MARAC prépare à l'attention du président en
exercice, des rapports mensuels et circonstanciés sur la situation
politique, sociale, militaire, économique, sanitaire, climatique
susceptible d'avoir un impact direct ou indirect sur la stabilité de la
communauté.93
91 Idem, art.10.
92 Idem, art 11.
93 Idem, art 12.
62
II.2. La Force multinationale de l'Afrique centrale
Pour permettre au COPAX d'assumer sa fonction d'organe
de concertation politique et militaire des Etats membres de la CEEAC, en
matière de promotion de maintien et de consolidation de la paix et de la
sécurité (article 2 du traité), est crée la Force
multinationale de l'Afrique centrale conformément à la l'article
20 chapitre III du protocole. Notons que la Force, selon le l'article 6 du
protocole relatif à la création du Conseil de Paix et de
Sécurité de l'Union Africaine, fait partie de la Force Africaine
en Attente. Cette Force a des missions et un champ d'engagement définis
conformément au protocole relatif au COPAX et au règlement de
fonctionnement de la FOMAC.
II.2.1. Les missions et le champ d'engagement de la
Force
La FOMAC est une force de soutien et/ou d'appui
à la paix, à la sécurité et d'exécution des
opérations d'aide humanitaire, elle est donc le bras armé du
COPAX.94 La FOMAC est une force, non permanente, constituée
par des contingents nationaux interarmes, des polices et des modules civils,
des Etats membres de la Communauté, en vue d'accomplir des missions de
paix, de sécurité et d'assistance humanitaire. Le protocole
précise qu'elle est chargée des missions d'observation et de
surveillance, de maintien et de rétablissement de la paix. Elle assure
également, à ce titre, les interventions humanitaires lors des
catastrophes, et un appui à l'application des sanctions prévues
par les textes en vigueur95.
En ce qui concerne son champ d'engagement, La FOMAC se
déploie, à titre préventif, dans le cadre de
l'établissement de la paix, du désarmement et de la
démobilisation. Quand les circonstances l'exigent, la FOMAC peut
s'investir dans les activités de maintien de l'ordre, de la lutte contre
la fraude et les crimes organisés, les activités de police, y
compris la lutte contre la drogue et la grande criminalité. Par
décision de la conférence, la FOMAC peut être, une force
d'interposition entre les Etats-parties au présent
pacte96.
II.2.2. La composition et l'organisation de la
FOMAC
Conformément au document cadre sur la Brigade
Régionale (BRA) en Attente de l'Afrique centrale adopté par le
conseil des ministres du COPAX en décembre 2004 à
94 Protocole relatif au conseil de paix et de
sécurité de l'Afrique centrale, art. 23.
95 Ibid.
96 Ibid., art. 10 (2) et 8 (2),
63
Brazzaville, après analyse, il a
été confirmé les principes de multinationalité et
de modularité dans la composition de cette Brigade97. Elle
tient compte de l'incapacité des Etats à ne pas pourvoir à
la norme modulaire de niveau de bataillon à celui de la compagnie. De ce
fait, les capacités recensées des Etats membres permettent
d'armer la brigade de la FOMAC selon un catalogue préalable.
Tableau 4: Catalogue de la FOMAC
Dispositif Humain
|
Désignation
|
nombre
|
Nature des composantes
|
Capacités disponibles
|
Unités
|
10
|
Compagnies d'infanterie
|
1080
|
02
|
Bataillons d'infanterie
|
1130
|
01
|
Bataillon d'appui
|
326
|
01
|
Groupement blindé
|
327
|
CIVPOL / MILOB
|
01
|
Policiers civils
|
55
|
01
|
Observateurs Militaires
|
110
|
C S L
|
01
|
Section Commandement
|
23
|
01
|
Section technique
|
37
|
01
|
Poste Médical de Secours
|
25
|
01
|
Section intendance
|
25
|
01
|
Section de protection
|
34
|
Santé
|
01
|
H M C C
|
56
|
T O T A L
|
3 665 hommes
|
Moyens aériens disponibles
|
Désignation
|
Type
|
Nombre
|
Avions
|
Hercule c 130
|
03
|
Iliouchine 76
|
02
|
|
|
Hélicoptères
|
ML 17
|
02
|
Source: Document cadre sur la
Brigade Régionale en Attente de l'Afrique centrale, 2004.
Selon le tableau ci-dessus, la FOMAC devrait disposer
de en terme de contingents 10 Compagnies d'infanterie de 1080 hommes (soit 2 de
240 hommes pour le Burundi, 2 de 240 hommes pour le Gabon, 1 de 120 hommes pour
la Guinée Equatoriale,
97 Document cadre sur la Brigade Régionale en
Attente de l'Afrique centrale
64
2 de 240 hommes pour la RCA et 2 de 240
également pour le Tchad), Bataillons d'infanterie de 1130 soit 565
hommes chacune (fournis par la RDC et l'Angola), 1 Bataillon d'appui de 326
hommes (provenant du Congo). Un composante Police Civile de 55
éléments soit 5 éléments par pays a
été prévue par les textes de même qu'une composante
de 110 observateurs militaires et chaque Etat devrait mettre à la
disposition de la Brigade 10 observateurs, ce qui donne un total de 3665
hommes
En terme de matériel et de logistique, la FOMAC
devrait avoir 2 hélicoptères de transport (que devrait fournir
l'Angola), 6 avions, soit 3 avions Hercules de type c130 (fournis
respectivement par le Cameroun, le Gabon et le Tchad) et 1 avion de type DC8
(fourni par la RDC), 2 avions de type Iliouchine 76 et 1 Hôpital
Médical Chirurgical de Campagne de 56 éléments (HMCC)
fourni par le Gabon. Selon les mêmes textes une Compagnie de Soutient
Logistique (CSL) de 141 éléments a été
prévue. Elle se compose d'une Section de Commandement de 23
éléments que devrait fournir l'Angola, une Section technique de
37 éléments fournie par le Tchad, un Poste médical de
secours de 25 éléments fourni par le Cameroun, une Section
intendance de 25 éléments et une section de protection de 34
éléments fournis par le Congo. 98
Notons également que la Force,
conformément au règlement de fonctionnement dans son article 19,
a des unités spéciales composées d'unités
antiterroristes, les sapeurs pompiers, de spécialistes de combat marin
(nageurs de combat...) et toute autre unité de définition
spéciales. Ces unités spéciales de la FOMAC ont les
missions d'environnement, d'assistance militaire, d'actions psychologiques, de
liaison et de combat contre les factions armées, de contre terrorisme,
de recherche et de sauvetage au combat et d'actions spécifiques en zones
urbaines99.
A partir de ces capacité validées par
les chefs d'Etats-Majors Généraux, l'Etat-Major Régionale
(EMR) a la mission de veiller à la multinationalité en
intégrant, à chaque fois les bataillons d'infanterie ou dans des
structures à homogénéité nationale, les compagnies
ou les éléments des autres Etats
membres100.
98 Document cadre sur la Brigade
Régionale en Attente de l'Afrique centrale, 2004
99 Ibid.
100 Ibid.
II.2.3. L'Etat-Major Régional (EMR) de la
FOMAC
Selon son règlement intérieur,
l'Etat-Major Régional est un organe technique multinational de
planification stratégique au sein du Secrétariat
Général de la CEEAC. Cet organe est chargé d'assurer la
planification du niveau stratégique militaire des opérations
d'appui ou de soutient à la paix, de participer non seulement à
la formulation du mandat de la Force en opération, mais aussi aux
missions d'évaluation organisées par le Secrétariat
Général de la CEEAC. Il participe également à
l'édification de la Force Multinationale de l'Afrique centrale
(structure et composition, mise en place des dépôts logistiques,
création des centres d'excellence, règlement des questions de
rites traditions et autres valeurs à développer dans la FOMAC).
L'EMR assure l'instruction, l'entraînement et la formation de la FOMAC.
Il élabore et met à jour les arrangements juridiques et
opérationnels, veille à assurer le commandement, le
contrôle et le retour d'expériences au niveau de la FOMAC. Enfin,
il participe au développement de la cohésion et de la
coopération entre le Forces Armées, les Gendarmeries, et les
Polices des Etats membres de la CEEAC d'une part, de la coopération
multiformes et multidimensionnelle avec les Etats et les organisations
donateurs d'autre part101. L'Etat-Major Régional est
composé selon l'organigramme ci-dessous.
65
101 Règlement intérieur de l'Etat-Major
Régional, art. 1.
66
Figure 4 : Organigramme de l'Etat-Major
Régional
Cabinet
> Conseiller santé
> Conseiller relation publique
> Conseiller Police civile et
prévôté
> Conseiller Air
> Conseiller juridique
|
|
|
Chef d'Etat-Major Régional
|
|
|
Cellule de
renseignements
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Chef d'Etat Major Régional
Adjoint
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
S/ CEM
Plan, OPS, Form,
S/CEMR Logistique
S/CEMR Budget Finances
S/CEMR SIC
Bureau OPS,
|
|
|
Bureau Mvt
|
|
|
Bureau
|
|
|
Bureau
|
Plan
|
|
|
& Transit
|
|
|
Personnel
|
|
|
Informations
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Bureau Finances
|
Bureau Matériel
|
Bureau Transmission
|
Bureau Emploi Formation
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Bureau
|
|
|
Bureau
|
|
|
Budget
|
|
Entraînement
|
|
|
|
Source: Document cadre sur la
Brigade Régionale en Attente de l'Afrique centrale
A suivre, l'organigramme ci-dessus, l'EMR est
composé du Cabinet du Chef d'Etat-Major (C/EMR) et de quatre
départements dirigés par des Sous chefs d'Etat-Major
Régionaux (S/CEMR), il s'agit du Service Plan, Opérations et
Formation (Plan, OPS, Form), Service Logistique, Service Budget-Finances,
Service SIC.
Le Chef d'Etat-Major Régional (C/EMR) exerce
son autorité sur toutes les parties du service de l'Etat-Major
Régional. Il a pour rôle le maintien au bon niveau moral du
personnel et du patrimoine physique, matériel, et technique mis à
sa disposition.102Son cabinet est composé d'un Conseiller
santé, d'un Conseiller en relations publique, d'un Conseiller police
civile et Prévôté, d'un Conseiller air et d'un Conseiller
juridique. On retrouve aussi au sein de ce cabinet une Cellule de
renseignements. Il a bien évidemment un secrétaire
particulière. Le
102 Règlement intérieur de l'Etat-Major
Régional, art.5 op cit.
67
C/EMR est secondé par le Chef d'Etat-Major
Adjoint (C/EMR adjoint) qui assure l'intérim en l'absence du C/EMR
lui-même.
Comme nous l'avons mentionné plus haut, les
départements de l'EMR sont dirigés par des les Sous Chefs
d'Etat-Major Régionaux ou S/CEMR. Ces derniers constituent ce que l'on
appelle au sein de cette institution : les Grandes fonctions de l'Etat-Major
Régional. Nous avons, comme nous le montre l'organigramme, le Sous Chef
d'Etat-Major Régional Plan-Opérations-Formation (S/CEMR Plan,
OPS, Form) qui est responsable des domaines de la planification, des
opérations de la formation et de la doctrine. Il est également
chargé de la conception et de l'exécution de politiques de la
FOMAC dans les domaines précités103. Son
département est composé d'un Bureau opérations et
planification, d'un Bureau emploi et formation et d'un Bureau
entraînement. Ensuite, il ya le Sous Chef d'Etat-Major Logistique,
(S/CEMR Logistique) qui est un expert dans le domaine de la logistique ; il
travaille en collaboration avec le Sous Chef d'Etat-Major Régional Plan,
OPS et Form. Son département dispose de deux bureau : les Bureau
mouvement et transit, et le Bureau matériel104. Puis, il ya
le Sous Chef d'Etat-Major Budget-Finance et Administration (S/CEMR Budget,
Finance), ce dernier est un expert un matière administrative et
financière son département est composé d'un Bureau du
personnel, d'un Bureau des finances et d'un Bureau budget.105Enfin,
le Sous Chef d'Etat-Major Régional SIC (S/CEMR SIC), expert en
matière de systèmes d'information et de communication, il
conçoit et exécute les politiques SIC de la FOMAC. Son
département dispose également de deux bureau : le Bureau
informations et le Bureau transmissions.
Au regard de ce qui précède, on comprend
la volonté des Etats de l'espace CEEAC à créer un
environnement de paix et de sécurité via le COPAX en
général et ses moyens de mise en oeuvre, en particulier. Comment
ces mécanismes civilo-militaires se sont comportés à
l'épreuve sur le terrain.
III. Les moyens de mise en oeuvre du COPAX à
l'épreuve des faits
Depuis leur mise en place, les instruments du COPAX
fonctionnent à demi-teinte. Nous postulons un décollage par
rapport à la réalité.
103Idem, art. 13.
104 Idem art, 14.
105 Idem. art.15.
68
III.1. Le MARAC, un système d'alerte rapide en
difficulté opérationnelle
Crée en 2000 par les chefs d'Etat et de
gouvernements de la CEEAC, la mise en oeuvre du MARAC a débuté
courant 2007 et se poursuit en vue d'une opérationnalisation totale en
2015.
III.1.1.1. Le MARAC et la surveillance de la
sous-région : inadéquation entre les textes et la
réalité sur le plan structurel
Si l'on se réfère aux textes, d'abord
à celui relatif au Conseil de paix et de sécurité (COPAX),
dans son article 22, le MARAC est composé d' un centre d'observation et
de surveillance chargé d'alimenter une banque de données sur
l'Afrique centrale, des zones d'observation et de surveillance de la
sous-région106. Dans son règlement intérieur,
l'article 2, prévoit un bureau chargé de la veille permanente et
de la collecte des informations, un bureau chargé de l'analyse et de
l'évaluation de l'information, un bureau chargé de la banque des
données, et des bureaux nationaux.107 Seulement, treize ans
après sa création cet ensemble de structures prévues ne
sont toujours pas mises en place. Le centre d'observation et de surveillance
n'est pas encore opérationnel ; seul le bureau d'observation et de
collecte des informations est en activité. Les zones d'observations et
de surveillance qui ont été prévues dans les textes ne
sont pas encore délimitées. Selon le Chef du Bureau d'analyse et
de l'évaluation du MARAC, il y a des zones ciblées de
manière provisoire à cause de la récurrence des conflits
et la présence d'une forte criminalité. C'est notamment : l'Est
de la RDC, le triangle transfrontalier, Cameroun, Tchad et RCA108.
Le MARAC dispose des correspondants décentralisés dans chaque
pays (3 par pays, seule la RDC a 4 correspondants en raison de la superficie
trop vaste du territoire). Cette situation n'est qu'une préfiguration
des bureaux de nationaux qui sont prévus dans les textes109.
Un des correspondants décentralisés est choisi par le
gouvernement et le reste est désigné parmi les membres de la
société civile. Comme nous le montre la carte ci-dessous
:
106 Protocole relatif au conseil de paix et de
sécurité de l'Afrique centrale, 2004
107 Règlement intérieur du Mécanisme
d'Alerte Rapide (MARAC), op. cit.
108 Daniel Pascal Elono Interview réalisée
le, 12 novembre 2013, à Libreville
109 Ibid.
69
Carte 3 : Répartition des Correspondants
décentralisés au sein de la CEEAC
Dans la collecte des données, la salle de
veille (voir figure ci-dessous) devait assurer une surveillance permanente de
la sous-région en collectant à chaque heure des informations
issues tout d'abord des rapports envoyés par les correspondants
décentralisés (CD) qui sont au nombre de trente un , soit
soixante deux rapports par semaine, puis des autres sources ouvertes (presse
audio-visuelle et écrite, internet), et enfin des informations issues
des réseaux informels c'est-à-dire des informateurs anonymes se
trouvant dans toutes les sphères de la
société.
70
Figure 5 : Configuration de la salle de
veille
Source : MARAC/Réalisation :
Cyr Revelli MBA ABESSOLO, Dpt de Géographie-MR GPMC-2013
Les informations ainsi collectées sont
transmises au bureau d'analyse et évaluation (voir figure 6) qui les
traite puis élabore des produits relatifs à la paix et la gestion
des conflits qui sont assortis des recommandations.
71
Figure 6: Configuration du bureau analyse et
évaluation
Source : MARAC/Réalisation
: Cyr Revelli MBA ABESSOLO, Dpt de Géographie-MR GPMC-2013
Les produits relatifs à la paix et à la
sécurité sont destinés soit aux instances
sous-régionales ou qui font l'objet d'une large publication (voir
tableau 5). Ils sont de natures différentes, leur
périodicité et les destinataires varient d'un produit à un
autre. Le tableau 5 nous présente de manière plus claire les
différents produits, leur périodicité et leur
destinataire.
72
Tableau 5 : Produits du MARAC
Série
|
Nature du produit
|
Périodicité
|
Destinataire
|
01
|
Monitoring
|
Quotidien
|
Large publication
|
02
|
Synthèse de sécurité
|
Hebdomadaire
|
SG, SGAs...
|
03
|
Rapport de sécurité
|
Mensuel
|
SG,SGA/IHPSS, Prés, CCEG
|
04
|
Note de conjoncture
|
Circonstanciel
|
SG
|
05
|
Alerte info
|
Circonstanciel
|
Large publication
|
06
|
Rapport de situation
|
Situation de crise
|
SG
|
07
|
Revue géopolitique
|
Semestriel
|
SG, CCPNUQSAC Réunion du COPAX
|
Source : MARAC, 2013
Légende
SG : Secrétaire Général
SGAs : Secrétaire Généraux
Adjoints
SGA/ IHPS : Secrétaire Générale
chargé de l'intégration humaine, de la paix, la
sécurité et la stabilité
CCEG : Comité des chefs d'Etat et des
gouvernements
CCPNUQSAC : Comité consultatif et permanent de
Nation-Unies chargé des questions de sécurité en Afrique
centrale
Les figures ci-dessus sont l'illustration de ce que
doit être le fonctionnement du MARAC si les choses étaient faites
dans les normes. Malheureusement, la réalité est autre. La salle
de veille est inexistante, le bureau d'analyse et évaluation ne compte
qu'en seul expert. Le MARAC fait face à un réel déficit en
termes de matériels et de personnels.
II.1.1.2. Le déficit matériel et humain
du MARAC : facteur de son
inopérationnalisation
Le MARAC connait un dysfonctionnement criard. En
raison de nombre de difficultés qui ne le permettent pas de remplir de
façon plus régulière ses missions. A ce jour, le MARAC ne
dispose d'aucune licence logicielle valide. Toutes les sous-régions du
continent font partie intégrante du Systèmes continental alerte
rapide (SCAR), ce qui permet à l'Union Africaine
73
d'avoir un regard sur ce qui se passe dans ces
différentes sous-régions en matière de paix et de
sécurité. Or la liaison VSAT qui assure la connexion directe avec
l'UA n'est plus valide depuis 2010. Sa connexion Internet via la ligne ADSL de
l'opérateur Gabon Télécom est coupée depuis plus de
huit ans environ. Pour remédier au problème, le MARAC est
astreint d'utiliser un box de l'opérateur IPI9 store de technologie
WIMAX. Or vu le grand travail qui doit s'effectuer et qui s'effectue dans la
sous-région cette structure mérite une connexion Internet
à très haut débit. De plus les serveurs de messagerie et
de téléphone IP sont hors d'usage depuis plus de trois ans
environ. Aussi, tous les documents de travail du MARAC passent actuellement par
des serveurs publics et les adresses e-mails privés des employés,
ce qui pose un problème de confidentialité et de
sécurité des données qu'il faudra résoudre. Tout ce
panel de problèmes rend inopérationnelle.
Outre ce problème de matériel, le MARAC
connait aussi un sérieux problème de personnel. Il a
été prévu au total 17 agents au niveau du MARAC, soit un
chef de service, trois chefs de bureau, deux experts observation et collecte,
quatre assistants salle de veille, cinq analystes et deux experts banque des
données. Mais à ce jour, il n'y a aucun chef de bureau, aucun
chef de service. Sur les deux experts observation et collecte, le MARAC n'a
qu'un seul. Il n'y a aucun assistant de salle de veille. Sur les cinq analystes
il n'ya qu'un seul en poste et actuellement trois sont en voie de recrutement,
il manquera donc un seul à recruter. Enfin, sur les deux experts en
banque des données un seul est en voie de recrutement. Le tableau
ci-dessous nous montre de manière plus claire ce déficit du MARAC
en termes de personnel.
74
Tableau 6: Etat des lieux du personnel du MARAC en
2013
Poste
|
Prévu
|
Existant
|
Besoins
|
Observations
|
Chef de service
|
1
|
0
|
1
|
A recruter
|
Chef de bureau
|
3
|
0
|
3
|
A recruter
|
Expert observation/collecte
|
2
|
1
|
1
|
1 en voie de recrutement
|
Assistant salle de veille
|
4
|
0
|
4
|
A recruter
|
Analyste
|
5
|
1
|
4
|
3 en voie de recrutement
|
Expert banque des données
|
2
|
0
|
2
|
1 en voie de recrutement
|
Source : MARAC, 2013.
II.2. La FOMAC et le maintien de la paix et la
sécurité dans la sous-région
Pendant longtemps, les activités de la CEEAC en
faveur de la paix se sont limitées principalement à la formation,
avec l'organisation de manoeuvres sous-régionales visant à
augmenter les capacités sous-régionales de maintien de la paix,
sans oublier les missions de consolidation de la paix en RCA (MICOPAX 1et
2).
II.2.1 Les exercices d'opérationnalisation et de
certification de la FOMAC
La phase d'expérimentation de la force en
attente s'est déroulé autour de deux manoeuvres militaires
organisés à «Bahr-el-ghazel» en République du
Tchad en novembre 2007, «Kwanza 2010» en République d'Angola.
«Kwanza» a été la phase opérationnelle qui a
permis à l'Union africaine de procéder à la Certification
de la Fomac en tant qu'élément de la Force africaine en
attente.
II.2.1.1. L'exercice BARH-EL GAZEL 2005
Afin de rendre opérationnels le COPAX et ses
organes, l'exercice multinational BARH-EL GAZEL a été
planifié en 2005, il a eu lieu du 10 au 17 novembre 2007 à
Moussoro au Tchad : exercice multinational interarmées de maintien de la
paix auquel ont participé les forces armées des pays de la CEEAC
et du Togo, invité par le Tchad, BARH-EL-GAZEL 2007
75
est venu clôturer le cycle des manoeuvres
militaires du même nom commencées en 2005110. Il visait
à identifier les capacités opérationnelles de la CEEAC et
à évaluer la capacité de maintien de la paix et
d'assistance humanitaire des commandements nationaux dans le cadre de la
Brigade régionale en attente. Il devait permettre d'évaluer et de
valider les procédures opérationnelles, ainsi que
l'opérabilité de la Brigade régionale en attente. Cet
exercice a constitué une innovation quant à la capacité de
mobilisation et de projection des forces à brève
échéance dans un cadre conjoint interafricain. Il a mis en action
une brigade légère de 1 600 hommes placés sous le
commandement d'un état-major intégré des Etats
participants. Il a été l'occasion pour la brigade de la CEEAC de
se mettre en phase avec les autres brigades régionales constituant la
Force africaine en attente111.
D'autres exercices ont suivi depuis lors, rentrant
dans le cadre de la certification de la brigade sous-régionale, en vue
de l'opérationnalisation de la force africaine en attente, c'est le cas
de l'exercice SAWA en 2006 au Cameroun. L'exercice SAWA est une manoeuvre
multinationale sous-régionale, bien que s'inscrivant dans le cadre du
programme français RECAMP (renforcement des capacités africaines
pour le maintient de la paix) dont il constituait la cinquième
édition cet exercice112.
II.2.1.2 L'exercice KWANZA 2010
Depuis le 8 octobre 2008 à Luanda, la CEEAC
s'est engagée dans un cycle de planification d'exercice de maintien de
la paix dénommé «Kwanza 2010», du nom du fleuve
emblématique de l'Angola situé dans la région sud de
Luanda qui avait en son temps abrité la phase de manoeuvre militaire sur
le terrain. KWANZA 2010 a été précédé d'un
séminaire de cinq jours, organisé en juillet 2009 à
Yaoundé au Cameroun et visant à simuler la prise de
décision d'engagement de la FOMUC dans une opération de paix. La
manoeuvre de 2010 a été supervisée par l'Union africaine,
l'Union européenne et l'ONU113. Ce cycle a permis à la
région d'organiser quatre conférences de planification, trois
séminaires, trois réunions
110 ODZOLO MODO (M), Fiche d'information de
l'organisation de la CEEAC,
www.rop.com,
consulté le 23 mars 2013
111 Ibid.
112 Ibid.
113 N.F. Massala, Afrique Centrale La Force
africaine en attente prend position
http://www.lesafriques.com/focus/afrique-centrale-la-force-africaine-en-attente-prend-position-2.html?Itemid=308?articleid=38015,
Consulté le 11 avril 2013.
76
opérationnelles et de nombreuses formations
tactiques et techniques qui se sont déroulés successivement dans
tous les Etats de la sous-région. Tous ces travaux ont été
validés par les différentes instances décisionnelles du
Conseil de Paix et de Sécurité de l'Afrique Centrale
(COPAX)114.
En effet, dans le cadre d'un scénario
illustratif des problématiques des crises et conflits observés
dans la Région de l'Afrique Centrale, théâtre, dans un
passé proche, de guerres fratricides (Angola, Congo Brazza, RDC,
Burundi, Tchad, RCA ...) «Kwanza 2010» a eu à évaluer :
la pertinence du processus décisionnel du COPAX, le niveau
d'opérationnalité des unités et des postes de
commandements , le niveau de conformité des structures et
procédures aux normes de la Force africaine en attente. La force
d'interposition et de maintien de la paix de la CEEAC constitue un cas unique
pour la Force africaine en attente, «Kwanza 2010» qui marqua le point
de départ de la constitution et de l'opérationnalisation de la
force en attente de l'Afrique centrale. Elle avait réalisé un
déploiement de grande dimension : 4 000 hommes issus des trois
unités (terre, marine, air) et des policiers des pays de la
CEEAC115 et un budget d'environ 4 milliards de francs CFA,
très largement financés par les contributions de tous les Etats
membres de la CEEAC116. Elle a été
matérialisée lors du débarquement des unités de
cette force en RCA lors de la MICOPAX 2, en vue de s'interposer et de stopper
l'avancée des rebelles de la coalition Seleka qui était
arrivée aux portes de Bangui. La FOMAC outre les exercices de
d'opérationnalisation, a déployé au total deux missions de
maintien de la paix en RCA : la MICOPAX 1 et 2.
II.2.2. La FOMAC et l'expérience des MICOPAX 1 et
2
En dehors des exercices d'entrainement, la FOMAC
depuis sa création n'a effectué que deux missions de maintien de
la paix : les Missions de consolidation de la paix en Centrafrique
(MICOPAX)
114 Ibid.
115 M. Odzolo Modo , op cit, p.
3.
116 R.F. Massala, op cit,
p.71.
77
II.2.2.1. La MICOPAX 1
La MICOPAX est jusqu'ici la plus importante
réalisation de la CEEAC dans le domaine de la paix et de la
sécurité. La décision de transférer le maintien de
la paix est prise en octobre 2007, lors du sommet des chefs d'État de la
CEEAC à Brazzaville en République du Congo. Après une
période de planification de plus de six mois, la FOMUC se transforme en
MICOPAX en juillet 2008. Première mission sous l'autorité de la
COPAX, la MICOPAX s'inscrit dans la nouvelle architecture de maintien de la
paix de la CEEAC. Le mandat de la MICOPAX courait jusqu'à l'année
2013117 et ambitionnait de réaliser les objectifs suivants
:
y' consolider le climat de paix et de stabilité
; notamment à travers l'aide aux gouvernements pour le
désarmement, la démobilisation et la réinsertion (DDR) des
rebelles, la réforme du secteur de la sécurité (RSS) et le
soutien aux forces nationales en matière d'ordre public, ainsi que la
protection du personnel de l'ONU et des civils ;
y' aider au développement du processus
politique ; ceci inclut le soutien aux efforts du gouvernement pour le
dialogue et la réconciliation, et à l'organisation des
élections ;
y' soutenir les efforts des gouvernements et des ONG
pour assurer le respect des droits de l'homme ; et
y' coordonner l'aide humanitaire et prendre part
à la lutte contre les maladies, en particulier le
VIH/SIDA.118
Après le décès d'Omar Bongo en
juin 2009, Ali Bongo, son successeur, a hérité de la
responsabilité de la mission. En conséquence, elle est toujours
officiellement dirigée par un représentant spécial
gabonais. La mission comporte en théorie plusieurs dimensions. En
réalité, son personnel est presque intégralement
militaire. Le représentant spécial a une petite équipe
civile de moins de dix personnes, alors que la MICOPAX représente une
force de 521 soldats de maintien de la paix et de 31 observateurs militaires et
une composante policière de 125 hommes. En permanence, quatre compagnies
(environ 120 soldats) sont déléguées, chacune par un Etat
membre, et sont censées être relevées par d'autres, venant
chacune d'un pays différent, tous les six mois. A la mi-2011, le Gabon,
la RDC, la République du Congo et le Tchad ont chacun
déployé une compagnie de soldats et le Cameroun une unité
de police. La MICOPAX
117 Ibid.
118 Ibid.
78
maintient une présence à Bangui et dans
trois villes provinciales : Paoua dans le Nord-Ouest, Kaga Bandoro dans le
Centre-Nord, et Ndélé dans le Nord-Est119.
La contribution de la MICOPAX est restée
limitée. Néanmoins, grâce à sa neutralité,
elle a été capable de jouer un rôle d'intermédiaire
entre les rebelles ayant signé des accords de paix, l'armée
centrafricaine et les autorités locales pour éviter que de petits
incidents ne dégénèrent en violence de plus grande
échelle. Par exemple, la MICOPAX a aidé à résoudre
le conflit opposant, en novembre 2010, les bergers tchadiens aux combattants de
l'Armée populaire pour la restauration de la démocratie (APRD),
un groupe rebelle du Nord-Ouest, les premiers accusant les seconds de tuer
leurs vaches120. Les observateurs militaires ont été
impliqués dans les toutes premières étapes du processus de
DDR, jusqu'à ce qu'il se soit essoufflé. La MICOPAX était
également censée former chaque année deux compagnies de
l'armée centrafricaine, mais ces dernières ont été
relevées pour être redéployées ailleurs. Pendant les
élections de janvier 2010 en RCA, la MICOPAX a apporté son
soutien logistique, sans lequel le vote n'aurait pas pu se dérouler dans
certains endroits.
II.2.2.2. La MICOPAX 2 et l'échec de la CEEAC dans
le maintien de la paix en RCA
La MICOPAX 2 était pas une autre mission
à part entière mais elle était un prolongement de la
première, en ce sens qu'elle a été juste un renforcement
du mandat et des effectifs déjà présents sur le terrain,
du fait de la situation qui s'était une fois de plus
dégradée et avait pris d'autres proportions inquiétantes
en 2010 et surtout avec la prise des armes du mouvement rebelle de la
Séléka le 10 décembre 2010. Ainsi, on est passé de
650 hommes lors de la MICOPAX 1 à environ 2390 militaires et 380 hommes
pour l'unité de police constituée lors de la MICOPAX
2121. Mais seulement, ces missions ce sont montrées
inefficace face à la récurrence et à la persistance du
conflit en RCA.
Le mandat de la MICOPAX n'a pas pu aller à son
terme, car l'année où ce mandat devait prendre fin est
l'année où le conflit s'est de plus en plus intensifié.
Cet échec se matérialise par l'intervention de la
communauté internationale qui s'est saisi du dossier centrafricain.
D'abord, l'Union Africaine, qui a voulu engager une nouvelle
génération de
119 ICG, Mettre en oeuvre l'architecture de
paix et de sécurité : l'Afrique centrale, Rapport
Afrique N°181 - 7 novembre 2011
120 Entretien réalisé par Crisis Group,
travailleur humanitaire, Paoua, RCA, 28 janvier 2011.
121 Entretien avec Lieutenant Colonel Ngamamba, 29
novembre 2013, à Libreville.
79
forces issue des Etats hors CEEAC (Ouganda, Afrique du
Sud par exemple) et dont la mission a été baptisée MISCA
(Mission internationale de soutien de paix à la Centrafrique). Lors du
sommet des chefs d'Etat du 21 octobre 2013, les Etats membres de la CEEAC ont
catégoriquement refusé cette proposition de l'UA et ont
décidé de garder la nomination de MISCA mais que cette mission
sera essentiellement « ceeacienne »122. C'est ainsi que
l'UA a demandé aux Etats de la CEEAC de fournir au total 3 652 hommes,
soit 2500 militaires, 1000 gendarmes et policiers et 152 civils123.
Ce que les Etats membres de la CEEAC ont accepté, car selon eux, en
dehors des 2390 militaires et 380 gendarme et policiers de la MICOPAX 2
présents en RCA, il fallait juste ajouter 1050 militaires (soit, 450
militaires fournis par le Burundi, 300 fournis par le Congo et 300 autres par
le Cameroun) et 480 gendarmes et policiers ( soit 140 pour la RDC, 140 pour le
Gabon et 200 pour le Tchad) ce qui donne un total de 4300 hommes et qui
dépasse largement le quota imposé par l'Union Africaine.
L'intervention de la France dans cette phase du conflit, montre les limites des
forces de la sous-région de maintenir la paix en RCA ; la France a
envoyé au total 16000 hommes pour renforcer la MISCA déjà
présente sur le terrain.124 Les Etats Unis ont octroyé
100 millions de dollars US pour renforcer les capacités de la MISCA.
Quant à la France elle a sollicité l'aide de l'UE pour renforcer
les troupes françaises.125Le Maroc quant à lui, vu
l'ampleur de la situation, a décidé d'envoyer 600 homme pour le
compte de la MISCA bien que ne faisant pas parti de l'UA.126 Cet
apport illustre une fois de plus l'incapacité de la CEEAC de
gérer la situation en République centrafricaine et de maintenir
la paix et la sécurité à l'échelle de la
sous-région.
Il ressort de ce qui précède que les
instruments du COPAX que sont le MARAC et la
FOMAC ne remplissent pas leurs missions originelles.
De plus, avec des nouveaux défis sécuritaires (criminalité
transfrontalière, trafic des ALPC, piraterie maritime etc.) les
instruments de mise en oeuvre du COPAX s'avèrent inadéquats,
autrement dit non adaptés à ces nouveaux enjeux. 127
122 Ibid.
123 Ibid.
124 Radio France internationale, Journal de 9h du 12
décembre 2013.
125 Radio France internationale Journal de 11 h, 18
décembre2013.
126 TV5 Afrique Journal télévisé de
20 h du 26 décembre 2013.
127 Voir le Protocole relatif au conseil de paix et de
sécurité de l'Afrique centrale, op,
cit. , p.6.
80
.
II.3. L'inadéquation opérationnelle entre
les instruments du COPAX et les défis sécuritaires de la
sous-région
Le MARAC et la FOMAC ne sont pas en adéquation
avec les défis sécuritaires de la sous-région. Car, ils
sont beaucoup plus concentrés sur les questions relatives à la
conflictualité armée, alors que dans les textes, la FOMAC a aussi
pour rôle de lutter contre la criminalité sous toutes ses formes.
Cela peut s'expliquer car le protocole du COPAX dans sa
généralité et ses moyens de mise en oeuvre ont
été mis en place dans un contexte où le spectre de la
guerre hantait la sous-région et qu'il fallait impérativement
trouver des solutions pour la stabiliser. Le plus important pour les chefs
d'Etat de la sous-région était de trouver des mesures curatives
au problème. Ce qui fait que la problématique des conflits a
été le plus souvent réglée en aval et non en amont,
c'est-à-dire sans analyser les causes profondes afin d'anticiper ou
mieux d'éviter le déclenchement d'un conflit. Cela peut aussi
justifier en partie la récurrence des conflits dans la
sous-région. Sinon, comment expliquer l'ampleur du conflit en RCA,
sachant que la FOMAC avait déjà des unités sur place ? Les
proportions que prend le conflit en RCA semblent surprendre les chefs d'Etats
de la sous-région malgré les pourparlers de Libreville au
début de l'année 2013.
Or, les défis sécuritaires
évoqués dans la première partie de ce travail sont autant
de menaces pour la paix et la stabilité de la sous -région. C'est
la raison pour laquelle certaine reformes ont été
apportées au sein de la CEEAC dans le but de faire face à
l'ensemble des phénomènes qui menacent la paix et la
sécurité sous-régionale.
Le MARAC et la FOMAC dont les rôles et les
missions sont précisés dans le protocole du COPAX fonctionnent
à demi-teinte depuis leur mise en place effective. Car, tout ce qui a
été prévu dans les textes n'a pas été mis en
pratique. Depuis près de quatorze ans, ces deux organes connaissent
toujours de graves déficits, humain, matériel et financier. En
outre, ces instruments ne sont pas adaptés aux nouveaux enjeux
sécuritaires de l'heure. D'où la nécessité de
revoir les textes du COPAX afin de l'adapter aux nouveaux défis
sécuritaire de la sous-région.
81
Chapitre IV : L'ADAPTATION DU COPAX AUX DEFIS
SECURITAIRES EN AFRIQUE CENTRALE
La prise en compte des nouveaux défis
sécuritaires en Afrique centrale a poussé les Etats membres de
prendre des mesures permettant à l'institution sous-régionale de
ne plus simplement régler le problème de
l'insécurité en amont. Il s'agissait de mettre l'accent sur la
prévention. De ce fait, elle a procédé à des
reformes sur les plans institutionnel, juridiques et
opérationnel.
II. Les reformes de la CEEAC dans le domaine de la paix et
la sécurité
La CEEAC a mis place des reformes dans le but de
prendre l'ensemble des facteurs qui menacent la sécurité de
l'espace sous-régional.
I.1. Les reformes institutionnelles
Les reformes institutionnelles ont consisté
à la mise en place de nouvelles structures dans le but de pouvoir lutter
contre la criminalité sous ses formes. Deux directions retiennent
l'attention : la Direction des actions politiques et diplomatiques et la
Direction de la sécurité humaine.
I.1.1. La Direction des actions politiques et
diplomatiques et du MARAC (DAP-MARAC)
Le MARAC a été renforcé en 2010
par l'absorption de la Direction des actions politiques et diplomatiques, et a
conséquemment étendu son champ d'action à l'organisation
de missions d'observation électorale dans les États
membres128. Cette direction est focalisée sur la protection
de la souveraineté et la protection des Etats membre de la CEEAC,
à travers des missions génériques : l'observation des
paramètres montrant les risques ou l'évolution d'un conflit ;
l'analyse des risques et des causes ainsi que la recherche des solutions
techniques ; la proposition des actions préventives (politiques ou
diplomatiques) permettant d'anticiper ou de gérer des conflits ; le
développement de diverses collaborations, de la CEEAC avec les
organismes ou les institutions intéressées dans la
prévention (Société Civile, Communauté
Internationale, etc.).
128 Entretien avec Daniel Pascal Elono, Chef d'analyse et
de l'évaluation du MARAC, 13 octobre 2013, à
Libreville.
82
La Direction d'actions politiques et du MARAC, a pour
objectifs spécifiques de développer la capacité
nécessaire permettant à la CEEAC de remplir sa mission de
prévention des conflits et de consolidation de la paix en Afrique
centrale. Elle vise également à accroitre la visibilité
politique de la CEEAC et l'implication des Etats membres et de la
Société civile dans le domaine de gestion des crises. Enfin,
favoriser un climat de paix propice au développement des Etats - membres
de la sous-région.129 La composition du service du MARAC
reste conforme aux textes en vigueur. Quant au service diplomatie
préventive et médiation, il est composé d'un chef de
service, d'un expert en médiation, d'un expert en diplomatie
préventive et d'une unité de médiation. Seulement ce
service reste juste qu'à ce jour une coquille vide, car tout comme le
service du MARAC, il souffre d'un déficit en personnel. Nous n'y avons
recensé qu'un seul agent exerçant dans ce service.
I.1.2. La Direction de la sécurité
humaine
Le département de l'intégration humaine,
de la paix, de la sécurité et de la stabilité (DIHPSS) a
lui aussi subi des reformes avec la création de la Direction de la
Sécurité Humaine (DSH). Cette direction est composée d'un
Service d'Election et de Bonne Gouvernance, d'un Service de Justice et de Droit
de l'Homme, d'un Service de lutte contre la criminalité et enfin, d'un
Service de libre circulation des personnes. Cette direction, comme le
démontre le nombre de ses services, est chargée du contrôle
des élections et de la bonne gouvernance dans les différents
Etats-membres. Elle s'occupe de la justice et des droits de l'Homme, elle se
charge du contrôle de la libre circulation des personnes. La DSH via son
service de lutte contre la criminalité s'occupe du programme
désarmement, démobilisation réinsertion et rapatriement
(DDR), planifie le programme de reforme du secteur de sécurité
(RSS), la reforme des armée d'où l'élaboration d'un code
de conduite des armées de la sous-région. Elle lutte contre le
trafic des armes légères et de petits calibres (ALPC) et contre
la criminalité transfrontalière et maritime sous toutes ses
formes130. Enfin, elle suit le respect des accords internationaux
signés par les Etats-membres
On comprend aisément qu'avec cet ensemble de
missions, la DSH est une structure majeure et centrale dans les
mécanismes de paix et de sécurité de la CEEAC. Elle
s'occupe en effet, de la politique transversale et thématique et la
FOMAC ne peut agir sans l'appui de la
129 Ibid.
130 Entretient avec le Colonel Pierre Attomo Ndong, le 23
novembre 2013.
83
sécurité humaine131. A
l'analyse, cette direction reste quasi dysfonctionnelle, seul le Service de
lutte contre la criminalité fonctionne avec seulement un
expert.
D'autres initiatives sont en cours, la création
d'un comité des ambassadeurs qui jouerait un rôle d'interface
permanent entre le Secrétariat général de la CEEAC et les
hautes autorités politiques des Etats membres. Ces quelques
avancées et actions en cours traduisent bien l'engagement des Etats dans
le processus d'édification d'un espace de paix et de
sécurité en Afrique centrale. D'autres reformes majeures se sont
faites sur le plan juridique et opérationnel avec notamment la
convention de Kinshasa et le programme frontière sur le plan juridique
et la sécurisation de l'espace maritime avec le plan SECMAR sur le plan
opérationnel.
I.2. Les réformes juridiques et
opérationnelles
Les réformes juridiques renvoient à
l'adoption d'un ensemble de nouveaux textes normatifs de base qui viennent
s'ajouter aux précédents, notamment le Pacte de non-agression et
le Pacte d'assistance mutuelle. Il s'agit du Programme frontière et la
Convention de Kinshasa sur les ALPC. Sur le plan opérationnel, nous
avons le Plan Secmar qui permet de surveiller l'espace maritime de la CEEAC,
plus précisément la zone D, plus en proie aux exactions des
groupes criminels.
I.2.1. Le Programme Frontière de la
CEEAC
La problématique transfrontalière qui
préoccupe l'Union africaine est également présente en
Afrique Centrale, mais elle y prend un relief particulier en raison de
l'insécurité qui règne aux frontières de la
sous-région. Soucieux de contribuer à lever ce handicap
sérieux à l'intégration régionale, le
Secrétariat général de la CEEAC a organisé en
septembre 2007 à Yaoundé (Cameroun) une conférence
ministérielle précédée d'une réunion
d'experts qui a permis d'analyser les principales manifestations et causes de
l'insécurité régionale et de dégager des pistes
d'action pour y remédier132.
Ayant constaté la gravité et la
diversité des problèmes transfrontaliers de
sécurité (activités criminelles armées, circulation
des armes légères et de petit calibre -ALPC-, exploitation
illicite des ressources naturelles, traite de personnes, etc.), les ministres
se sont engagés à mettre en oeuvre une série de mesures
incluant une action déterminée de lutte contre
131 Ibid.
132 Projet de Programme frontière de la CEEAC,
21-23 mai 2009, chapitre III, alinéa 10.
84
la prolifération des ALPC, le renforcement de
la coopération entre les services particulièrement de police et
de douanes afin de mettre fin aux activités criminelles aux
frontières. Elle vise également la promotion des dynamiques de
coopération transfrontalière portées par les acteurs
locaux. La mise en place de modes de gestion coopérative des ressources
naturelles situées aux frontières souligne l'importance de mener
ces actions en coopération avec les CER voisines de la CEEAC et les
grandes initiatives et projets sous-régionaux. 133 Bien que
la dimension frontalière soit mise en avant, l'on constate dans ce
Programme Frontière de la CEEAC (PF-CEEAC), que ce document, dans sa
globalité, porte sur les stratégies de lutte contre la
conflictualité et la criminalité sous toute ses formes au niveau
des espaces frontaliers des Etats membres (voir figure 4) l'état des
lieux de l'insécurité dans la sous-région (voir figure
5).
Figure 7 : Arbre à Problème
Source : Projet de Programme
Frontière de la CEEAC, 21-23 mai 2009
133 Projet de Programme frontière de la CEEAC,
Alinéa 11.
85
Ainsi, comme le montre la figure ci-dessus, concernant
l'état des lieux fait par le PF-CEEAC sur l'insécurité, on
observe qu'à partir des résultats des missions de terrain, la
méthode d'analyse du cadre logique permet d'identifier un
problème central : de nombreuses zones frontalières de l'Afrique
centrale sont le théâtre d'une insécurité et de
conflits récurrents (voir figure 4). Cette insécurité et
ces conflits sont eux-mêmes la conséquence de deux faits majeurs :
la plupart des frontières de l'Afrique Centrale sont mal définies
et mal délimitées, et les pays de la région ne
coopèrent que difficilement en matière de gestion et de
sécurisation des frontières (causes du problème central
dans la figure 4).
Il en résulte des conséquences telles
que l'exploitation anarchique et illicite des ressources naturelles, qui
entraîne la dégradation de la base de ressources
nécessaires au développement, la multiplication des
contrôles et tracasseries administratives, avec des
phénomènes importants de corruption des agents des services
frontaliers, lesquels entravent la libre circulation des personnes, des
violences récurrentes sur les populations frontalières aggravant
les mouvements de réfugiés et de personnes
déplacées, la prolifération des ALPC et des trafics divers
(ceux-ci bourgeonnent progressivement en une grande criminalité
transfrontalière). Deux conséquences globales en dérivent
: l'absence d'intégration socio-économique sous-régionale
et l'absence d'un climat de paix, de sécurité et de
stabilité dans la sous-région (partie supérieure de la
figure 5). Si l'on se penche sur l'analyse des causes, on découvre que
les pays de l'Afrique centrale ne disposent pas de capacités techniques
et financières suffisantes pour démarquer et délimiter
leurs frontières, qu'un certain nombre de frontières ne sont pas
identifiées et matérialisées sur le terrain, que les
structures étatiques chargées de la gestion des frontières
sont désorganisées et affaiblies, que la CEEAC ne dispose pas
d'une politique communautaire de gestion et de sécurisation des
frontières, et que les dispositions applicables aux frontières
sont méconnues de la plupart des agents et des acteurs transfrontaliers
(partie inférieure de la figure 5).
86
Figure 8: Arbre à objectifs
Source : Projet de Programme
Frontière de la CEEAC, 21-23 mai 2009
Ce PF-CEEAC vise les objectifs globaux qui
répondent aux grandes missions de l'institution. Pour ces auteurs, le
programme devrait contribuer à l'instauration d'un climat de paix, de
sécurité et de stabilité entre les Etats membres, ainsi
qu'au renforcement de l'intégration socio-économique en Afrique
Centrale. Quant ses objectifs spécifiques, il vise à
réduire de manière significative et durable les conflits et
l`insécurité qui apparaissent comme des obstacles majeurs
à la coopération transfrontalière et à
l'intégration régionale134. De ces objectifs, deux
principaux résultats sont attendus. D'abord, la délimitation et
la démarcation de la totalité des frontières de la CEEAC
afin qu'elles cessent d'être des zones potentielles de
134 Ibid.
87
conflits et d'insécurité, ensuite
permettre aux pays de la CEEAC de disposer d'un cadre de fonctionnel en
matière de gestion et de sécurisation de leurs zones
frontalières 135.
La réalisation de ces grands objectifs et
résultats pourrait se donne à lire à travers un certain
nombre d'indicateurs, qui seraient en même temps les
bénéfices attendus à long terme du Programme : «
la diminution sensible du nombre d'incidents armés aux
frontières, la décroissance significative du taux de
criminalité transfrontalière sous-régionale, la
réduction de la circulation des ALPC à travers les
frontières de la sous-région, la réduction du nombre de
réfugiés et de personnes déplacées, la
réduction, voire la disparition des tracasseries administratives
imposées aux commerçants et aux voyageurs aux frontières,
l'accroissement du taux de franchissement pacifique des frontières
mutuelles par les ressortissants des Etats membres, propice aux échanges
économiques et sociaux ; le nombre de projets de gestion commune des
infrastructures transfrontalières ; le nombre de postes
frontières communs ; un développement significatif du nombre de
projets concertés de gestion des ressources naturelles dans les zones
frontalières»136.
Au regard de ce qui précède on comprend
que le PF-CEEAC est une reforme ou mieux une innovation importante et majeure
dans les politiques de la CEEAC en matière de paix et de
sécurité de la sous-région. Dans la mesure où la
criminalité sous toutes ses formes est prise en compte et que les
stratégies pour lutter contre celle y sont également
évoquées. La seconde reforme juridique sur laquelle ils convient
de s'appesantir est la Convention de Kinshasa.
I.2.2. La Convention de Kinshasa
La Convention de l'Afrique centrale pour le
contrôle des armes légères et de petit calibre, de leurs
munitions et de toutes pièces et composantes pouvant servir à
leur fabrication, réparation et assemblage, connue sous l'appellation
générique de « Convention de Kinshasa » a
été négociée dans le cadre du Comité
consultatif permanent des Nations Unies chargé des questions de
sécurité en Afrique centrale (CCPNUQSAC) et adoptée
à l'unanimité le 30 avril 2010 à Kinshasa, en
République Démocratique du Congo, au cours de la 30e
réunion ministérielle du Comité. À la date du 22
septembre 2011, les onze États membres du Comité, l'Angola, le
Burundi, le Cameroun, la République centrafricaine, le Gabon, la
Guinée
135 Ibid.
136Ibid.
88
équatoriale, la République du Congo, la
République démocratique du Congo, le Rwanda, Sao
Tomé-et-Principe et le Tchad ; ces États ont depuis engagé
les processus de ratification.
Convention de Kinshasa, selon les termes de son article
1, a pour objet
de prévenir, combattre et éliminer, en
Afrique centrale, le commerce et le trafic illicites des armes
légères et de petit calibre, de leurs munitions et de toutes
pièces et composantes pouvant servir à leur fabrication,
réparation et assemblage; de renforcer le contrôle, en Afrique
centrale, de la fabrication, du commerce, de la circulation, des transferts, de
la détention et de l'usage des armes légères et de petit
calibre, de leurs munitions et de toutes pièces et composantes pouvant
servir à leur fabrication, réparation et assemblage; lutter
contre la violence armée et soulager les souffrances humaines
causées, en Afrique centrale, par le commerce et le trafic illicites des
armes légères et de petit calibre, de leurs munitions et de
toutes pièces et composantes pouvant servir à leur fabrication,
réparation et assemblage; de promouvoir la coopération et la
confiance entre les États Parties, de même que la
coopération et le dialogue entre les gouvernements et les
137
organisations de la société
civile.
La Convention est le plus récent des
instruments juridiques de contrôle des armes légères et de
petit calibre conclus dans le cadre des Nations Unies. Elle a la
particularité de prendre en compte les spécificités
sécuritaires, juridiques, institutionnelles et culturelles de l'Afrique
centrale. Ce processus diplomatique illustre la volonté des onze
États membres du Comité à mettre en place une
stratégie sous-régionale cohérente pour combattre
collectivement le trafic d'armes légères et de petit calibre et
de leurs munitions. La mobilisation des onze États-membres du
Comité pour négocier et conclure cette Convention constitue en
elle-même une mesure de renforcement de la confiance et du dialogue entre
ces pays dont la plupart ont été en guerre les uns contre les
autres.
Cette convention est suivie d'un Plan de mise en
oeuvre qui a été élaboré par le Centre
régional des Nations Unies pour la paix et le désarmement en
Afrique. Le Plan s'articule autour des chapitres et articles stipulés
dans la Convention, il s'agit des transferts, de la détention des armes
légères et de petit calibre par les civils, de la fabrication, de
la réparation et de la distribution, des mécanismes
opérationnels, de la transparence et échange d'informations, de
l'harmonisation des législations nationales, des arrangements
institutionnels et des dispositions générales et finales. Chaque
chapitre et article sera mis en oeuvre selon trois types de mesures
:
137 Convention de Kinshasa, art. 1.
89
des mesures d'ordre institutionnel, des mesures
d'ordre normatif et des mesures d'ordre opérationnel. L'exécution
de ce texte se fera au niveau sous-régional et
national138.
I.2.3. Les Plans Secmar
En mai 2009, les principaux pays concernés ont
signé un accord relatif à la surveillance maritime de cette zone.
Cet accord a été suivi du démarrage de patrouilles
conjointes et de l'adoption d'un premier plan de sécurisation maritime
dénommé Plan Secmar1, suivi d'un deuxième plan de
sécurisation maritime dénommé Plan Secmar 2. En effet, en
raison de l'immensité de la mer à protéger, la CEEAC a
divisé son espace en trois zones géographiques, A, B et D, allant
de l'Angola au domaine maritime camerounais frontalier du Nigéria (voir
la carte 4). La zone D, qui couvre le Cameroun, le Gabon, la Guinée
équatoriale et São Tomé-et-Principe, est la plus en proie
à l'insécurité maritime. Les Plan Secmar forment
l'ossature de la reforme opérationnelle. Ils visent la piraterie et
l'insécurité maritime qui constituent des défis majeurs
pour les Etats de l'Afrique centrale.
138 Plan de mise en oeuvre de la Convention de
l'Afrique centrale pour le contrôle des armes légères et de
petit calibre, de leurs munitions et de toutes pièces et composantes
pouvant servir à leur fabrication, réparation et
assemblage.
90
Carte 4 : Zones maritimes de la CEEAC
Selon la CEEAC, les plans Secmar ont permis de
procéder à un inventaire des moyens navals des Etats membres,
mais surtout à la mise en place d'un centre multinational de
91
coordination (CMC) à Douala qui fait la liaison
entre les stations de radars des pays impliqués et leurs centres
opérationnels de marine139. A long terme, les plans Secmar
visent l'ouverture des eaux territoriales aux navires (mouillage, droit de
poursuite ou d'usage d'armes contre les pirates) des pays participants ainsi
que la mise en oeuvre d'opérations conjointes impliquant des partenaires
internationaux. Les opérations prévues dans le cadre de la
sécurisation de la zone D prévoient également la
collaboration entre les marines. Cependant, les capacités d'action de
celles-ci restent encore très limitées. L'ensemble des quatre
pays de la zone D ne disposent que de quatre patrouilleurs140 alors
que la mission Corymbe déployée par la France dispose à
elle seule d'un nombre équivalent de bâtiments. Depuis 1990, la
France maintient une présence permanente dans le golfe de Guinée,
dans le cadre d'une mission baptisée Corymbe et dont l'objectif est
double : entretenir une coopération avec les pays de la région,
notamment ceux avec lesquels Paris a signé des accords de
défense, et défendre les intérêts économiques
de la France (notamment à travers ses compagnies
pétrolières). 141. Les patrouilles conjointes, la
surveillance et le droit de poursuite entre les Etats-membres impliquent
également une plus grande complémentarité des moyens
navals et aériens de contrôle dans le golfe de Guinée et la
création d'une école de formation régionale.
Conformément à son mandat en
matière de paix et de sécurité, la CEEAC a initié
en octobre 2009 une stratégie de sécurisation du golfe de
Guinée. Celle-ci s'articule autour de deux éléments : la
création d'un Centre de coordination régionale pour la
sécurité maritime de l'Afrique centrale (CRESMAC) dont le
rôle est de mettre en commun les compétences militaires et civiles
des pays membres, et la mise en place d'une « synergie » avec la
Commission du golfe de Guinée et la CEDEAO142. La
stratégie de la CEEAC vise six objectifs : échange et gestion de
l'information, surveillance commune de l'espace maritime ; harmonisation des
actions en mer, institution d'une taxe maritime régionale, acquisition
d'équipements communs et institutionnalisation d'une conférence
maritime périodique.
La ville de Pointe-Noire en République du Congo
a été choisie pour abriter le CRESMAC et son financement doit
provenir d'une taxe maritime régionale dont les modalités restent
encore à déterminer ainsi que des contributions
budgétaires des pays-membres.
139 International Crisis Group, op
cit, p.72. 140Ibid.
141 Ibid.
142 Voir le « Protocole sur la gestion de la
stratégie de sécurisation des intérêts vitaux en mer
articulée autour du COPAX et favorisant une synergie avec la Commission
du Golfe de Guinée et la Communauté économique des Etats
de l'Afrique occidentale», CEEAC, Kinshasa, 24 octobre 2009.
92
Seulement force est de constater que le CRESMAC est en
phase de projet et n'a pas encore vu le jour.
III. Vers une reforme et une redynamisation du COPAX
Les reformes du COPAX que nous venons d'énoncer
apparaissent insuffisantes, il est important de mettre un accent particulier
sur les mécanismes sous-régionaux de paix et de
sécurité afin que ceux-ci fonctionnent et remplissent leurs
missions.
III.1. La nécessité d'une
redéfinition des instruments du COPAX
La réforme du COPAX nécessite une
redéfinition de ces instruments de mise en oeuvre et par
conséquent une nouvelle architecture du COPAX.
II.1.1. Proposition d'une nouvelle architecture du
COPAX
Le COPAX a été mis en place dans un
contexte où l'Afrique centrale était une poudrière. Il
semble, selon l'ossature de cet organe de concertation
politico-sécuritaire, que depuis les prémices de la
coopération régionale, les régimes d'Afrique centrale ont
préféré traiter l'insécurité comme un
problème militaire plutôt que comme un problème de
gouvernance qui sous-tend l'insécurité. La CEEAC a alors
hérité d'une approche militaire et réactive plutôt
que politique et préventive. Ayant compris que le plus important
n'étant plus de prendre des mesure curatives, la CEEAC a
désormais mis l'accent sur le préventif. C'est ainsi qu'en dehors
des instruments traditionnels que sont le MARAC et la FOMAC, d'autres
innovations ont été apportées dans l'architecture de paix
et de sécurité de l'Afrique centrale à savoir : la
Direction de la sécurité humaine, la Direction des affaires
politique et diplomatiques. Ces directions dans leurs missions et leur
composition sont en adéquation avec les différents défis
sécuritaires auxquels l'Afrique centrale dans sa conception ceeacienne
doit faire face.
Pour notre part, nous pensons que ces apports ne
doivent pas être en marge du protocole du COPAX, qui est la pierre
angulaire des mécanismes de paix et de sécurité en Afrique
centrale. C'est la raison pour laquelle une révision des textes du COPAX
et une modification de son architecture s'avèrent nécessaires.
Ainsi, Le COPAX ne disposerait plus de deux instruments mais de quatre
instruments de mise en oeuvre : le MARAC, EMR/FOMAC, la Direction des Affaires
politiques et diplomatiques (DAPD) et la Direction de la sécurité
humaine (DSH). Les quatre instances dont les rôles et les pouvoir sont
définis dans les articles 7 à 19 du protocole, ne devraient subir
d'aucune modification, il s'agit de la Conférence des Chefs d'Etat, le
Conseil des ministres, la Commission de sécurité et de
Défense et le Secrétariat
93
Général, auxquels s'ajoutera le
Comité des ambassadeurs. Celui-ci a été crée en
octobre 2009 par les chefs d'Etat dans le but d'accélérer la
discussion des problèmes sécuritaires au niveau politique et
accroître la communication à la fois entre les gouvernements et
entre ces derniers et la CEEAC. Le Secrétariat général de
la CEEAC est l'instance de gestion permanente du COPAX. Le Secrétariat
du COPAX devrait être assuré par le Secrétaire
général adjoint chargé des questions de
sécurité et de paix (SGA/DIHPSS).
En outre, il faudrait favoriser la participation des
Sociétés civiles et organiser des campagnes de communication
conjointes entre le Secrétariat général de la CEEAC et les
autorités nationales à destination du grand public pour expliquer
le rôle et l'intérêt de la CEEAC dans la sous-région.
En d'autres termes, les Etats membres devraient prendre la décision
d'ouvrir l'organisation à la Société civile. Une meilleure
participation de cette dernière devrait accroître la
légitimité et la visibilité de l'institution. Plus le
rôle de la Communauté sera compris et assimilé au sein de
son espace, plus elle bénéficiera d'un soutien réel dans
les pays concernés. Actuellement, elle reste largement une affaire de
chefs d'Etat sans l'implication d'autres acteurs nationaux (parlementaires,
corporations professionnelles, etc.) puisque jusqu'à présent, les
politiques communautaires n'ont pas fait l'objet de référendums
ou de débats publics susceptibles de mieux définir les
priorités de chaque pays. Les organisations de la société
civile doivent mener des activités visant à promouvoir des
processus électoraux et de gouvernance crédibles et transparents,
notamment à travers la sensibilisation, les ateliers de formation
à l'intention des partis politiques, des organes de gestion
électorale, des médias, des services de sécurité,
des moniteurs et observateurs électoraux. Aussi doivent-elles apporter
une assistance aux Etats membres en vue de mettre en place des
mécanismes visant à renforcer les capacités des
médias, des services de sécurité et du système
judiciaire dans le but d'assurer efficacement le contrôle
électoral, la sécurité et l'arbitrage.
94
Figure 9 : Proposition d'une nouvelle architecture du
COPAX
Conférence des chefs d'Etats
Comité des Ambassadeurs
Conseil des Ministres
Commission de Défense et de
Sécurité
Pacte d'assistance mutuelle
Pacte de non agression
Programme Frontière
Convention de Kinshasa
Secrétariat
COPAX
Organisation de la société
civile
SGA / DIHPSS
M A R A C Direction des Affaires
Politiques et Diplomatiques
Direction de la sécurité
humaine
EMR / FOMAC
Zone d'observation et de surveillance de la
sous-région
Centre d'observation et de surveillance
Diplomatie préventive
Unité de médiation
Election et Bonne Gouvernance
Service Justice et Droits de l'Homme
Service de lutte contre la criminalité
Service de libre circulation des personnes
Module interarmées
Module Police
Module Gendarmerie
Module civil
Secrétariat Général de la
CEEAC
Légende
Instances du COPAX Secrétariat du COPAX
Organisation de la société civile
Textes normatifs de base Instruments du COPAX
Réalisation : Cyr Revelli MBA
ABESSOLO , 2013
95
II.1.2. Le MARAC et la Direction des Affaires Politiques
et diplomatiques
Le MARAC aujourd'hui est couplé à la
Direction des Affaires politiques et Diplomatiques. La CEEAC devrait donc les
rendre autonomes. Le MARAC est une structure dont le fonctionnement est
complexe et demande d'être juste renforcer en matériel et en
ressources humaines.
II.1.2. Le MARAC et la Direction des Affaires Politiques
et diplomatiques
L'objet du MARAC est l'alerte rapide que l'on peut
mieux cerner à partir des travaux de l'Institut italien des Affaires
Internationales «Early Warning and Conflict Prevention in the Euro-Med
Area. A Research Report »143, ou des travaux de FEWER Pour qui
l'alerte rapide est « la collecte et l'analyse
systématique des informations provenant des zones de crise afin : (1)
d'anticiper l'escalade des conflits violents , · (2) de
développer une réponse stratégique à ces crises et
(3) de présenter des options aux acteurs clés (nationaux,
régionaux et internationaux) aux fins de prise de décision et
d'action préventive. »144 A suivre cet
organisme l'alerte rapide suppose tout un dispositif qui doit en principe
fonctionner de manière autonome. Au niveau de l'ONU par exemple, au sein
du Secrétariat, c'est le Département des Affaires Politiques qui
est chargé d'identifier « les zones de crises éventuelles et
d'alerter le Secrétaire Général sur les évolutions
et les situations affectant la paix et la sécurité ». En
1998, au sein de ce département a été créé
une équipe de prévention qui chaque mois étudie des cas
choisis pour lesquels des mesures préventives seraient
nécessaires à prendre. Les six divisions régionales qui
composent le département fournissent chacune des «prevention papers
», avec des cas à étudier. Il y a donc une sorte de «
dispersion des responsabilités » entre
les différentes structures onusiennes en ce qui concerne la veille et
l'alerte145. Afin de mettre fin à la dispersion des
responsabilités, certains ont proposé la création d'un
seul organe responsable de la veille et de l'alerte146. La
responsabilité de cet organe serait engagée aussi bien en cas de
non vigilance qu'en cas de
143 Voir l'Organisation Internationale de la
Francophonie, Mécanismes des Systèmes d'Alerte :
Contribution à une Comparaison Internationale,
Réunion du 5-7 Avril 2004, Centre de Recherche sur la Paix, Institut
Catholique de Paris
144 FEWER 1999. Conflict and Peace Analysis
and Response Manual. 2nd ed., London: FEWER
Secretariat.
145 Organisation Internationale de la
Francophonie, Mécanismes des Systèmes d'Alerte :
Contribution à une Comparaison Internationale,
Réunion du 5-7 Avril 2004, Centre de Recherche sur la Paix, Institut
Catholique de Paris
146 Ibid.
96
fausse alerte, mais tiendrait compte de la
difficulté de la tâche. Ce Rapport, commandé par les
Nations Unies et publié en 2000, met l'accent sur le renforcement des
moyens des Nations Unies pour assurer sa mission. Entre autres, il propose la
création d'un système centralisé d'alerte et
d'information. On peut y lire : « Le Secrétaire
général devrait créer un organe, dénommé
ci-après le Secrétariat à l'information et à
l'analyse stratégique (S.I.A.S.), pour répondre aux besoins des
membres du Comité exécutif pour la paix et la
sécurité en matière d'analyse et d'information; le SIAS
serait administré conjointement par le Département des affaires
politiques et le Département des opérations de maintien de la
paix, auxquels il rendrait compte »147 A la suite
du Rapport Brahimi, les organes de l'O.N.U. ont commencé leurs
réformes.
Pour nombres de spécialistes, l'organe en
charge du système d'alerte ne doit pas avoir en même temps
l'obligation de proposer des options d'intervention, mais seulement la
faculté de le faire148. De cette façon, le
système d'alerte s'assure une meilleure rapidité tout en gardant
la possibilité de fournir des propositions pour la prévention des
conflits tout au long du processus. Cela s'observe par exemple au niveau de la
méthodologie adoptée par CEWARN (Mécanisme d'alerte rapide
et de réaction aux conflits) de l'Autorité intergouvernementale
pour le développement (IGAD). Celle-ci implique la collecte
d'informations, l'analyse, la formulation des meilleures/pires/plus
vraisemblables scenarii et moyens d'action, et la communication de ces
données aux décideurs149.
Ces dispositions peuvent servir à revisiter le
fonctionnement du MARAC devrait privilégier une collaboration effective
avec le Département des Affaires Politiques et Diplomatiques et la
Direction de la Sécurité Humaine en tant que de besoin, dans
l'analyse des données et la préparation des rapports et
compte-rendu destinés aux décideurs. Le MARAC doit assurer la
coordination de la circulation de l'information sur les crises auxquelles sont
confrontées les missions de la CEEAC sur le terrain.
II.1.2.2. Direction des affaires politiques et
diplomatiques
C'est cette direction qui a la charge de la diplomatie
préventive et de la médiation au sein de la sous-région.
C'est dire l'importance de cette structure car la diplomatie préventive
doit apaiser les tensions et assurer la résolution pacifique des
conflits au sein et entre les Etats
147Ibid.
148 Ibid.
149 Union Africaine: Système continental d'alerte
rapide (SCAR), Manuel du SCAR, 5 mai 2008, p.8.
97
membres, à travers les bons offices, la
médiation, la conciliation et la facilitation sur la base du dialogue,
de la négociation et de l'arbitrage. Généralement
appliquée face à une crise imminente, la diplomatie
préventive doit également s'appliquer dans la gestion, la
résolution des conflits et les phases du conflit concernant
l'édification de la paix150. Cette édification de la
paix, par ailleurs, décrit le développement des capacités
institutionnelles nécessaires aux multiples acteurs pour la conception,
la mise en oeuvre et le contrôle des initiatives visant à
vérifier la détérioration des conditions sociales et
économiques pendant les hostilités, et le renforcement de la paix
dans les pays post-conflit sur une longue période en vue de
prévenir une rechute dans un conflit violent151. La
diplomatie préventive correspond donc à des actions à
court terme, cherchant à exercer une influence sur les acteurs
potentiels d'un conflit à la veille de son
déclenchement152.
A ce titre, cette direction elle aussi doit être
une direction à part entière et non un service. La Direction
d'actions Politiques et Diplomatiques doit avoir un service en charge de la
diplomatie préventive, une unité médiation et un service
d'élection et bonne gouvernance que l'on doit détacher de la
Direction de la Sécurité Humaine. Les problèmes de
gouvernance et d'élections sont pour une grande part responsables des
conflits et des crises en Afrique centrale. Cette direction à travers
ses missions de prévention et de médiation, doit pouvoir envoyer
des observateurs pendant les périodes électorale et
post-électorale qui sont des moments cruciaux pour la paix et
stabilité dans les pays de la sous-région.
Jumeler les deux structures n'est pas une solution car
cela matérialise une fois de plus le manque de volonté de la
CEEAC à pouvoir recruter des cadres compétents pour mieux faire
fonctionner ces deux structures.
II.2. Pour une efficacité du COPAX et de ses
instruments
La résurgence des conflits (RCA, RDC,) dans la
sous-région et la montée de la criminalité sous toutes ses
formes (criminalité transfrontalière, piraterie maritime etc.)
illustrent l'échec des politiques communautaires de
sécurité et de défense. La caducité des textes du
COPAX exige l'urgente reforme de ceux-ci, mais aussi et surtout une prise de
conscience de la
150 Cadre de prévention des conflits de la CEDEAO,
p.35. 151Ibid.
152 M. Bertrand. 1997 Vers une stratégie de
prévention des conflits ? In: Politique
étrangère, N°1-62e année, pp.
111-123.
98
part des Etats membres qui composent l'institution en
charge des question de paix et de sécurité à savoir la
CEEAC.
II.2.1. Rendre fonctionnel les nouvelles directions et
le mécanisme d'alerte rapide
Les instruments du COPAX souffrent d'un grave
déficit en matière de ressources humaines et de matériel.
Vue l'importance des enjeux et de la gravité de la situation, il est
urgent de rendre fonctionnel ces instruments en recrutant. Une vague de
recrutements avec des procédures transparentes tenant compte de la
représentativité des Etats membres au sein du personnel doit
être lancée. Une nouvelle grille salariale doit être
adoptée pour attirer les compétences. Car, les salaires ne sont
pas équitables au sein de ces structures, pour la bonne et simple raison
que certains de ces cadres et agents ne sont tous pas
rémunérés par la CEEAC. Il y en a qui sont
rémunérés par l'Union Européenne et ces derniers
ont des salaires plus élevés que ceux
rémunérés par la CEEAC153. Le jumelage du MARAC
et de la DAPD montre que la CEEAC hésite de recruter car il faut le dire
les moyens ne suivent pas. La plupart des CER ont apparemment de petits
secrétariats aux effectifs insuffisants. La faiblesse des salaires
pourrait expliquer les difficultés de recrutement du personnel
spécialisé. 40% des cadres gagnent plus de 20 000 dollars US. par
an et 40% gagnent entre 10 000 et 20 000 dollars US154. Et la CEEAC
n'est pas en marge de cette triste réalité.
En outre, il faudrait que le MARAC travail à
plein temps, pour ce faire il faut lui doter de matériel adéquat
et performant afin que l'on puisse en tout temps avoir des informations sur la
situation sécuritaire de la sous-région. Toutes les composantes
du MARAC-Bureau de collecte et d'observation, Bureau d'évaluation,
Bureaux nationaux, service banque de données- doivent désormais
être opérationnelles. Car, l'importance de l'information n'est
plus à démontrer. De plus cette structure doit travailler
librement sans influence aucune sur les analyses des experts, car la diffusion
de certains rapports mensuels plus analytiques que les revues
journalières et hebdomadaires étaient limitées de peur des
critiques des Etats membres155 .
153 Entretient avec Daniel Pascal Elono, Chef du bureau
d'analyse d'évaluation du MARAC, Libreville, 12 octobre 2013
154 Etat de l'intégration régionale en
Afrique II : rationalisation des Communautés économiques
régionales,
155 International Crisis Group, op. cit, p35.
II.2.2. Redynamiser la Force multinationale d'Afrique
centrale (FOMAC)
La redynamisation de la FOMAC passe d'abord par la
restructuration des armées nationales. En effet, la
quasi-totalité des armées d'Afrique centrale sont aujourd'hui
incapables d'assurer la défense de leurs espaces nationaux. Dans la
sous-région, la politique de défense est tributaire des
puissances extérieures, de la France notamment. Les forces armées
d'Afrique centrale sont marquées par l'influence de ceux qui leur
fournissent assistance technique et la totalité de l'équipement.
C'est le cas de la France qui exerce une influence importante sur les forces
composant la FOMAC à travers le programme de Renforcement des
capacités africaines en matière de maintien de la paix (RECAMP),
qui vise à apporter aux organisations régionales africaines un
soutien financier et logistique pour les exercices d'entraînement au
maintien de la paix. Il a peu à peu été
inséré dans le partenariat stratégique UA/UE. Mais la
coopération militaire française est surtout
opérationnalisée dans la région par les Forces
françaises au Gabon (FFG) et la mission logistique de Douala, dont le
rôle est de « servir de point d'appui » pour la mise en place
d'une force aéroterrestre en cas d'intervention de première
urgence en Afrique centrale ou en Afrique de l'Ouest.156 De plus,
ces armées ne sont point préparées à la guerre et,
faute d'expérience pratique, sont peu aptes à assurer la
défense de leur pays respectifs et de la sous-région en
général. Dans certains domaines, l'équipement militaire
des pays de la sous-région est faible et doit tout à
l'importation.
Il est difficile d'évaluer les capacités
de la FOMAC étant donné que les troupes désignées
restent dans leur propre pays tant qu'elles ne sont pas appelées
à effectuer un exercice de formation ou à répondre
à une crise. Cependant, un catalogue des forces approuvé par le
Conseil des ministres en février 2008 compte plus de 5 000 hommes et
femmes. Ce chiffre inclut 4 300 soldats au sol, 1 000 policiers et 60 civils
venant de tous les Etats membres157.
Il est donc nécessaire que les Etats de la
sous-région forment au sein de leurs armées des forces
professionnalisées qui seront en tout ou en partie, bien
entraînées et aptes à réagir rapidement. Ces forces
professionnalisées constitueront ce que nous appelons la Brigade
d'Intervention Rapide de la FOMAC (BIR-FOMAC). Le degré de
disponibilité est important et l'équipement devrait faire l'objet
d'une priorité d'investissement. Le caractère professionnel, le
degré d'efficacité, de souplesse et de mobilité sont mis
en oeuvre par ce premier niveau qui est
156 Voir « Projet de loi autorisant l'approbation
d'un accord de défense entre le gouvernement de la République
française et le gouvernement de la République centrafricaine
impliquant un partenariat de défense »,
Rapport no. 245 (2010-2011), de M. Philippe Paul, fait au nom de
la Commission des affaires étrangères du Sénat
français, 19 janvier 2011.
99
157 Internationale Crisis Group, op.
cit., p. 17.
100
censé pouvoir jouer un rôle de dissuasion
et de projection rapide en cas de conflit. La recherche d'une plus grande
flexibilité des forces armées devient aujourd'hui, et plus encore
demain, impérative dès le moment où les types de crises
sont de moins en moins prévisibles et perceptibles, tout en étant
de plus en plus complexes à gérer. Les modèles
stéréotypés d'unités de forces en fonctions de
menaces clairement établies ne peuvent plus être appliqués.
Cette flexibilité extrême à laquelle les
états-majors doivent dès lors s'attacher passe désormais
par le principe de modularité. Selon les situations et les besoins,
l'autorité militaire est dans l'obligation d'organiser des forces
composites associant différents modules choisis à la carte et au
cas par cas dans les unités composant ses forces armées.
(Unités logistiques, unités antichars etc.) . Les
différents modules retenus sont alors réunis ou associés
progressivement afin de créer les conditions permettant la mise en
oeuvre de forces d'intervention en grandes parties autonomes, aptes à
répondre aux missions qui leur ont été assignées
spécifiquement. Sous la pression des événements, le plus
souvent inattendu et exigeant des opérations militaires allant selon les
cas de la simple police jusqu'à l'affrontement violent, les
états-majors sont aujourd'hui dans l'obligation de travailler sur des
scénarios en étudiant ce que chaque unité peut fournir en
modules élémentaires pour répondre à chaque
situation type.
Il serait aussi nécessaire de restructurer
l'Etat-Major Régional, car celui-ci est trop militarisé. Au total
l'EMR à Libreville compte 22 employés, dont dix-huit militaires,
deux policiers et deux civils158. Compte-tenu du caractère
multidimensionnel des OMP, il est important que tous les modules qui font
partie de la force sous-régionale soient représentés au
sein de l'EMR, tout en respectant bien évidemment le principe de
multinationalité. Un bon état-major est la première
condition de la puissance militaire. C'est en quelque sorte le
«cerveau» d'une armée, pour reprendre le titre d'un ouvrage
d'un théoricien militaire britannique de la fin du XIXe siècle,
Spencer William159. le passage d'une perception géographique
de la sécurité à une perception fonctionnelle de la
sécurité (opérations de maintien de la paix ou de
rétablissement de la paix par exemple), impliquant la projection de
forces, dans un cadre généralement multinational, sur un
théâtre d'opération lointain a également
contribué à un réaménagement des structures
d'état-major.
158Ibid.
159 Boyer (Y) , Les opérations en
coalition : mode d'organisation et dangers cachés [En
ligne]
www.frs.fr,
consulté le 06 juin 2013
101
II.2.3. Les quelques défis à relever
pour un fonctionnement effectif et complet du COPAX et ses instruments de mise
en oeuvre
II.2.3.1. L indépendance financière de
l'institution sous-régionale
La majeure partie des programmes de la CEEAC sont
financées par des partenaires étrangers à la
région, à savoir par ordre décroissant de contribution :
l'Union Européenne, la France et les Etats-Unis. Ce soutien financier
est indispensable au volet paix et sécurité de la
Communauté. En 2011, lors de la MICOPAX I, l'Union Européenne et
la France ont déboursé près de 79% du budget de la mission
soit 48% pour la première et 31% pour la deuxième.160
L'Union Européenne a initier le programme d'appui en matière e
paix et de sécurité (PAPS) afin de contribuer à
réduire les conflits et l'insécurité en l'Afrique Centrale
en aidant la CEEAC à se doter des capacités humaines et
techniques nécessaires à la prévention des conflits,
à la gestion des crises et à la consolidation de la paix. Il est
actif dans quatre domaines principaux : le renforcement général
des capacités conceptuelles, méthodologiques et techniques du
Département de l'Intégration humaine, Paix,
Sécurité et Stabilité (DIHPSS); le développement du
Mécanisme d'alerte rapide de l'Afrique centrale (MARAC) ; le
développement de capacités propres à prévenir les
conflits à long terme en Afrique Centrale, notamment en
renforçant la bonne gouvernance; la promotion de la synergie entre la
CEEAC et les organisations de la société civile et le
renforcement des capacités de celles-ci. Le PAPS I qui avait pour budget
4,8 millions € a été remplacé par le PAPS II dont le
budget a été renforcé et s'élève à 15
millions €. Les Etats-Unis à travers Africom sont aussi
présents dans la sous-région dans le but de sécuriser le
Golfe de Guinée où ils ont des intérêts
pétroliers. Les Etats-Unis ont déjà financé
l'opération Obangame en mars 2011, un exercice de formation
d'unités militaires en matière de communication, qui a
constitué la première opération conjointe CEEAC/Nigeria. A
noter également que les Etats-Unis ont prévu de financer une
conférence conjointe CEEAC/CEDEAO sur la sécurité
maritime161.
160 L'Union Européenne a 19 500 000 €, la
France 9 555 534 €, l a CEEAC 7 129 295 € et la RCA 294
000€
161 Internationale Crisis Group, op. cit,
p.14.
102
Il faudrait résoudre le problème de la
dépendance l'aide vis-à-vis de l'extérieur. Car la
multiplication des partenariats de la CEEAC génère des effets
pervers162. Elle conduit les pays membres à faire peu
d'efforts pour pérenniser l'organisation régionale et peut
même se traduire par un sentiment de désappropriation, le
financement et le suivi des programmes étant laissés aux
partenaires extérieurs. Ces partenariats se traduisent aussi par un
transfert des systèmes militaires (doctrine d'emploi, organisation,
interopérabilité des équipements, etc.) de l'aidant
à l'aidé et ils posent la question des tentatives
d'instrumentalisation. Ainsi, en mettant sur pied la MICOPAX, les dirigeants de
la CEEAC n'ont fait que suivre les suggestions de Paris qui cherchait à
se désengager militairement et était alors disposée
à appuyer financièrement une force régionale de
substitution.163 A long terme, se posera inévitablement entre
les pays d'Afrique centrale et les bailleurs de fonds, la question du
rôle et des objectifs du financement extérieur pour
déterminer les conditions de sa cohérence et d'un
véritable partenariat bénéfique pour tous.
II.2.3.2. Une non perception commune de la
menace
Les dirigeants n'ont pas tous une perception commune
de la menace. Selon Barry Buzan « il existe une tension
permanente entre sécurité individuelle et sécurité
collective et que cette situation renvoyant au dilemme central de la
sécurité et rappelle le caractère éminemment
subjectif de la menace qui, selon lui, dépend avant tout d'un choix
politique »164. Cette perception non commune de la
menace se matérialise par les systèmes d'alliances
bilatérales privilégiées par les Etats-membres et la
multi-appartenance des Etats de la sous-région à d'autres
CER.
De nombreux partenariats de sécurité
concurrencent la Communauté, le Rwanda et la RDC en 2008, le Tchad et la
RCA,165 Le Burundi, quant à lui, conçoit sa politique
de sécurité dans l'espace de la CIRGL et surtout de la CEPGL bien
plus que dans l'espace de la CEEAC166. La plupart des Etats-membres
se sont assurés un filet de sécurité grâce à
des
162 La CEEAC et l'Organisation internationale de la
francophonie ont signé un accord en vue d'intensifier leurs
consultations de haut niveau et leur coopération en faveur de la paix,
de la démocratie, du développement durable et des
négociations commerciales en Afrique centrale. « Coopération
renforcée avec la Communauté Economique des Etats de l'Afrique
centrale », communiqué de l'Organisation internationale de la
francophonie, 12 septembre 2011. Voir ICG, op cit. ,
p. 12.
163 Lire le Rapport de Crisis Group,
République centrafricaine, op. cit.
164 Barry Buzan op cit
165 International Crisis Group, , Op
cit., p. 19. 166Ibid.
103
accords de coopération ou d'assistance
militaire avec la France (Tchad, Gabon, Cameroun, Congo-Brazzaville,
Centrafrique), le Maroc (Guinée équatoriale) et l'Afrique du Sud
(Centrafrique)167. La Chine et Israël jouent un rôle
aussi discret qu'important en matière de formation et de renseignement
militaire168 - sans oublier les pourvoyeurs de
sécurité privée qui oeuvrent à la formation des
gardes présidentielles, des garde-côtes et/ou fournissent des
éléments opérationnels dans le cas de la Guinée
équatoriale.169L'engagement des pays membres dans la CEEAC
reste secondaire dans leur politique de sécurité qui ressemble
parfois à une quête d'assistance militaire partout dans le monde
sans souci de cohérence170.
Au-delà du manque de ressources, les bons
rapports de voisinage, le traitement commun des questions de
sécurité et les considérations politiques influent donc
sur la capacité des CER à mener à bien leurs projets
régionaux. . Plus les Etats s'investissent, plus il existe une
maturation politique des CER171. L'interdépendance croissante
entre les Etats et l'établissement de contacts politiques
périodiques peuvent aussi renforcer la confiance et faciliter la
coopération. Le niveau d'engagement et la solidarité des chefs
d'Etat restent des atouts indéniables pour l'intégration de la
sous-région dont le développement reste entravé par la
prolifération des conflits.
167 Sur ces différents accords, lire André
Guichaoua, « Les nouvelles politiques africaines de la France et des
Etats-Unis vis-à-vis de l'Afrique centrale »,
Polis, vol. 4, no. 2 (1997).
168 Au Cameroun, des conseillers et experts militaires
israéliens ont ainsi mis sur pied la brigade d'intervention rapide et la
garde présidentielle qui constituent actuellement les principales
troupes d'élites. Quant à la Chine, elle forme des militaires de
presque tous les pays d'Afrique centrale et ses fournitures d'armes à la
RDC ont fait l'objet d'un rapport d'Amnesty International publié en 2006
(« China : Sustaining conflict and human rights abuses »). Voir
également, « Congo/Chine : une coopération active »,
Journal de Brazza, 12 juillet 2011.
169 Lire le rapport « Well oiled. Oil and human
rights in Equatorial Guinea », Human Rights
Watch, 9 juillet 2009.
170 La RDC illustre parfaitement ce
phénomène de multiplication désordonnée des
coopérations militaires. Les Etats-Unis (Kisangani), la Belgique (Kindu
et Kananga), la Chine (Kamina), l'Angola (Kitona), l'Afrique du Sud (Mura), la
France (Mbanza- Ngungu) forment et ont formé des militaires congolais -
chaque pays ayant une base dédié à cet effet en
RDC.
171 A. Gnanguenon, 2010, Le rôle des
Communautés économiques régionales dans la mise en oeuvre
de l'Architecture africaine de paix et de sécurité,
Sous-direction Politique et Prospective de défense, 14 rue St Dominique
75700 Paris SP 07.
104
II.2.3.3. La multi-appartenance des membres à
d'autres communautés économiques régionales
(CER)
L'Afrique centrale compte trois Communautés
économiques régionales (CEMAC, CEEAC et CEPGL). Alors que la
CEEAC comprend tous les pays d'Afrique centrale, la CEMAC regroupe six de ses
pays membres appartenant à la zone CFA (Communauté
financière africaine) d'Afrique centrale. A l'exception de Sao
Tomé et Principe, qui n'est membre que d'une CER, tous les pays
d'Afrique centrale appartiennent à au moins deux Communautés. La
République Démocratique du Congo détient le record en
faisant partie de quatre CER qui ne sont pas toutes géographiquement
limitées à l'Afrique centrale (CEEAC, CEPGL, COMESA et
SADC).
Les Etats qui appartiennent à plusieurs CER
n'ont pas toujours la possibilité, ou la volonté, de remplir
leurs obligations financières. En raison de ce manque de financement et
d'engagement politique, les CER n'apportent que peu de bénéfice
à leurs Etats membres et sont moins décidés à
s'investir politiquement et financièrement. Quels que soient les
régions considérées, les Etats sont à la recherche
d'une rentabilité immédiate de l'intégration sans qu'ils
en aient pour autant une vision stratégique réelle172.
Selon l'UNECA, en moyenne, un tiers des pays membres ne s'acquittent pas de
leurs obligations statutaires et cette proportion peut atteindre la
moitié des membres dans certaines Communautés173. La
multi-appartenance favorise la dispersion des ressources déjà
insuffisantes des Etats membres. Ce qui fait que la CEEAC soit
dépendante de l'aide extérieure en matière de financement
des politiques de sécurité. Les dirigeants africains sont
largement conscients que l'appartenance à plusieurs CER va à
l'encontre des aspirations des Etats à l'intégration.
Ce dernier chapitre nous a permis de voir les
différentes reformes que la CEEAC a apporté pour faire face aux
nouveaux défis sécuritaires de la sous-région. Ces
nouvelle reformes sont donc à inclure dans le COPAX ce qui devrait
amener à une révision des textes de celui-ci. En outre, il
faudrait donc une redynamisation du COPAX et pour ce faire certains
défis majeurs seront donc à relever.
172 A. Gnanguenon, 2010, op cit, p.5.
173 Ibid.
105
CONCLUSION PARTIELLE
La deuxième partie de notre étude nous a
permis de faire une analyse des instruments du COPAX. Le COPAX a
été crée dans un contexte où la spirale de conflits
hantaient la quasi-totalité des pays de la sous-région. Le MARAC
et la FOMAC qui sont les deux instruments de mise en oeuvre ce COPAX ont pour
objectif de régler le problème de la conflictualité en
Afrique centrale. Mais depuis leur mise en place effective, ces deux organes
fonctionnent à demi-teinte du fait des grosses difficultés qu'ils
connaissent et qui ne leur permet pas de jouer pleinement leur rôle. La
résurgence des conflits en RCA et en RDC nous montre l'incapacité
de la CEEAC d'asseoir une paix durable dans la sous-région. Outre cette
problématique de conflits, la sous-région fait face à
d'autres menaces qui sont un danger majeur pour la paix et la
sécurité sous-régionale. Les instruments traditionnels du
COPAX ne sont pas en adéquation avec ces nouveaux enjeux
sécuritaires. C'est la raison pour laquelle la CEEAC a crée
d'autre institutions afin de lutter contre la criminalité sous toutes
ces formes. Mais seulement, ces autres institutions ne sont pas partie
intégrante du COPAX. C'est pourquoi il est important de revoir les
textes du COPAX afin d'inclure ces autres organes qui seront
considérés de nouveaux instruments de mise en oeuvre du COPAX.
Enfin pour rendre le COPAX efficace il faudrait que le Etats membres puissent
relever certains défis : l'indépendance financière
vis-à-vis des partenaires étrangers, avoir une perception commune
de la menace, et régler le problème de la multi appartenance
à plusieurs communautés économiques et
régionales.
106
CONCLUSION GÉNÉRALE
107
Au terme de ce travail sur «Les
instruments du COPAX face aux enjeux sécuritaires en Afrique centrale
» nous pouvons retenir pour l'essentiel que depuis les
indépendances, la dimension régionale de
l'insécurité en Afrique centrale n'a eu de cesse de rappeler la
nécessité pour les gouvernements de coopérer en
matière de sécurité et d'élaborer les institutions
à même de soutenir et faciliter une telle entreprise commune.
Cependant, la confiance entre Etats a été continuellement
érodée par les conflits récurrents et par la concurrence
entre eux. Dans un vaste mouvement amorcé à l'orée des
années 1990, une redynamisation des organisations d'intégration
régionale a eu lieu en Afrique. Elle s'est traduite par la relance
formelle d'un certain nombre d'organisations régionales jusque-là
en sommeil afin d'en faire les instruments stratégiques au service du
développement et de la stabilité. Pour atteindre cet objectif, le
credo en vigueur consiste à ne pas dissocier l'économique et le
politique en assignant à des organisations régionales qui avaient
historiquement une finalité économique un rôle dans la
prévention, la gestion et le règlement des conflits. L'Afrique
centrale a suivi ce mouvement d'ensemble en procédant à la
réforme de ses deux principales organisations d'intégration.
L'Union douanière et économique de l'Afrique centrale (UDEAC) qui
regroupait six de ses Etats a été dissoute en 1994 pour donner
naissance à la Communauté économique et monétaire
d'Afrique centrale (CEMAC). Créée en 1983, la Communauté
économique des Etats de l'Afrique Centrale (CEEAC) regroupant les six
Etats de la CEMAC plus cinq autres pays a été sortie de sa
léthargie en 1998. Avec la mise en place, en février 1999, du
Conseil de paix et de sécurité en Afrique centrale (COPAX), la
CEEAC s'est muée en forum politique et sécuritaire sans
abandonner son mandat d'origine, l'intégration économique. Cette
organisation a été choisie pour être le maître
d'oeuvre de l'architecture de paix et de sécurité en Afrique
centrale au moment où la région était le
théâtre d'une guerre continentale.
Le Conseil de paix et de sécurité en
Afrique centrale (COPAX), crée le 25 février 1999, est l'organe
de concertation politique et militaire de la CEEAC en matière de
promotion, de maintien et de consolidation de la paix et la
sécurité. En effet, la réunion de Yaoundé, des 25
et 26 février 1999, met en chantier une étude en vue de la
création d'un « organe chargé de la prévention et du
règlement des conflits dans la sous-région »
dénommé conseil de paix et de sécurité de l'Afrique
centrale en abrégé « COPAX ». Son objectif est de
contribuer à la prévention et au traitement des conflits dans la
sous-région. Celui-ci dispose de deux instruments de mise en oeuvre : le
MARAC et la FOMAC.
108
Le MARAC, créé en 2000 est censé
conseiller le COPAX sur la situation sécuritaire de la
sous-région. Mais cette structure souffre d'un réel manque de
personnel et de matériel ce qui rend difficile la surveillance de la
sous-région. Mieux encore, de 2000 à 2014 soit 14 ans plus tard,
les structures devant composer le MARAC à savoir le bureau chargé
de la veille permanente et de la collecte des informations, le bureau
chargé de l'analyse et de l'évaluation de l'information et le
bureau chargé de la banque de données, les zones d'observation
sont inexistantes et ce qui existe ne fonctionne pas parfaitement..
En ce qui concerne la FOMAC, il est difficile
d'évaluer ses capacités étant donné que les troupes
désignées restent dans leur propre pays tant qu'elles ne sont pas
appelées à effectuer un exercice de formation ou à
répondre à une crise. Mais depuis que la CEEAC s'occupe des
problèmes de paix et de sécurité dans la
sous-région, la FOMAC a mené une opération de maintien de
la paix (OMP) en République centrafricaine, opération
dénommées MICOPAX. La MICOPAX est jusqu'ici la plus importante
réalisation de la CEEAC dans le domaine de la paix et de la
sécurité, mais l'organisation ne peut se prévaloir de
l'avoir initiée étant donné qu'il s'agit d'un
héritage des précédentes missions multinationales en RCA :
la MISAB et la FOMUC. A la différence de ses
prédécesseurs, la mission comporte en théorie plusieurs
dimensions. En réalité, son personnel est presque
intégralement militaire. Le représentant spécial a une
petite équipe civile de moins de dix personnes, alors que la MICOPAX
représente une force de 521 soldats de maintien de la paix et de 31
observateurs militaires et une composante policière de 125 hommes. En
permanence, quatre compagnies (environ 120 soldats) sont
déléguées, chacune par un Etat membre, et sont
censées être relevées par d'autres, venant chacune d'un
pays différent, tous les six mois. Là aussi, plusieurs
difficultés sont observées, la force n'a pas suffisamment de
véhicules et de personnel pour assurer la protection des civils dans le
Nord, où les rebelles, les bandits et les bergers armés menacent
les villageois. De plus, la France a fourni toute la logistique et même
les vêtements pour les armées. Malgré la MICOPAX II, les
OMP en RCA sont un échec car le pays a sombré dans des violences
sans précédent à tel enseigne que la communauté
internationale, plus précisément l'Union Africaine et la France
se sont saisies du dossier. Un Etat-Major Régional a été
crée Son rôle premier est de superviser la création, la
formation et les opérations de la FOMAC. l'EMR organise celle des
officiers supérieurs à Libreville pour développer une
compréhension commune du rôle de la FOMAC et pour uniformiser les
structures de commandement et de contrôle et les procédures. L'EMR
a aussi organisé des exercices de formation de terrain dans les
Etats
109
membres d'abord Bar El-Ghazel au Tchad en 2007, puis,
Kwanza en Angola en 2010 pour tester l'aptitude de la Force à
déployer.
On comprend aisément que depuis les
débuts de la coopération sous-régionale en matière
de sécurité, les Etats de la sous-région ont le plus mis
l'accent sur le curatif. Or l'espace CEEAC, connait désormais des
nouvelles menaces qui sont sources d'instabilité pour la
sous-région et pour lutter contre l'insécurité et la
criminalité sous toutes ses formes, certaines reformes vont être
apportées. D'abord sur le plan institutionnel nous aurons la
création de la Direction de la Sécurité humaine, la
Direction d'Actions Politique et Diplomatiques couplée au MARAC. Sur le
plan juridique, nous avons l'adoption de la Convention de Kinshasa qui porte
sur les armes légères et de petits calibres et
l'élaboration du Programme Frontière et enfin sur le plan
opérationnel, les Plans Secmar 1 et 2. En dehors des Plans Secmar dont
le travail s'effectue au sein de l'EMR, il est nécessaire d'introduire
ces directions dans les textes du COPAX sans oublier de faire également
participer les Organisations des sociétés Civiles dont le
rôle est aussi très important dans la lutte contre
l'insécurité et la conflictualité. D'où une reforme
des textes du COPAX que nous avons présentée dans ce
mémoire. Au-delà de l'introduction de ces reformes dans les
textes du COPAX, nous pensons que le MARAC doit fonctionner de façon
autonome tout comme la Direction des affaires politiques et diplomatiques afin
d'éviter une dispersion des responsabilités. Les Etats de la
CEEAC doivent oeuvrer pour rendre efficaces le COPAX et ses instruments de mise
en oeuvre. Pour ce faire ils doivent rendre fonctionnelles nouvelles directions
et le mécanisme d'alerte rapide en les dotant des ressources à la
fois humaines, matérielles et financières. De plus, il faudra
redynamiser la FOMAC pour que celle-ci soit plus efficace dans les OMP au
niveau sous-régional.
Dans l'ensemble, les initiatives en matière de
paix et de sécurité en Afrique sont très riches mais
pauvres et décevant en résultats. Car, à l'instar des deux
traditionnels instruments du COPAX, la Directions Actions Politique et
Diplomatique et la Direction de la Sécurité Humaine sont quasi
sinon inopérationnelles, le Programme Frontière reste une simple
formule incantatoire car son application reste au point mort. Nous
l»expliquons par le fait que la volonté politique ne suit pas. Car
les Etats n'ont pas une même perception de la menace. Cela s'illustre
tout d'abord par les alliances bilatérales qui se nouent entre eux mais
aussi la multiple appartenance à d'autres institutions sous
régionales. De plus, les Etats ne contribuent presque pas sur le plan
financier, ce qui rend le volet sécuritaire de la CEEAC dépendant
de l'aide extérieure. Les crises en RDC et en RCA doivent interpeller
les chefs d'Etats de la sous-région puisque la relation
sécurité/développement n'est plus à
démontrer.
110
Si les efforts ne sont pas faits, l'Afrique centrale
restera toujours dans cette spirale de conflits et d'insécurité.
Il est donc nécessaire que les choses bougent que les Etats
s'investissent pleinement afin de rendre fonctionnel ces instruments de mise en
oeuvre du COPAX.
111
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NDONG EFERA (T.), 2006, Les instruments et
mécanisme de paix en Afrique centrale de 1991à 2004,
Mémoire de maîtrise, Département d'histoire et
archéologie-UOB, Libreville.
POSSIO (T.S.), 2003, La France et la
sécurité collective en Afrique subsaharienne,
mémoire de DEA, Institut d'Etudes Politiques,
Université Lumière Lyon 2.
REMBEYO MOKETOU (D.E.), 2007, Le
mécanisme de prévention de gestion et de règlements des
conflits de l'OUA, et la sécurité collective en Afrique de 1993
à 2003, Mémoire de maîtrise,
Département d'histoire et archéologie-UOB,
Libreville.
117
TABLE DES ILLUSTRATIONS
Liste des cartes
Carte 1 : Localisation de l'espace CEEAC 3
Carte 2. Situation sécuritaire en Afrique
centrale 34
Carte 3 : Répartition des Correspondants
décentralisés au sein de la CEEAC 61
Carte 4 : Zones maritimes de la CEEAC 82
Liste des figures
Figure 1 : Caractéristiques d'un Etat fragile
selon S. Rice 20
Figure 2 : L'Architecture du COPAX 50
Figure 3: Organigramme du MARAC 53
Figure 4 : Organigramme de l'Etat-Major
Régional 58
Figure 5 : Configuration de la salle de veille
62
Figure 6: Configuration du bureau analyse et
évaluation 63
Figure 7 : Arbre à Problème
76
Figure 8: Arbre à objectifs 78
Figure 6 : Proposition d'une nouvelle architecture du
COPAX 86
Liste des tableaux
Tableau 1 : Changements violents de pouvoir en Afrique
centrale depuis 1960 16
Tableau 2 : Action et exactions du gouvernement public
selon Arthur Lewis 17
Tableau 3 : Richesses minières par province en
RDC 27
Tableau 4: Catalogue de la FOMAC 55
Tableau 5 : Produits du MARAC 64
Tableau 6: Etat des lieux du personnel du MARAC en
2013 66
118
ANNEXES
119
TABLE DE MATIERES
INTRODUCTION GENERALE
I. Justification et choix du sujet 1
II. Problématique et énonciation des
hypothèses 14
III. Cadre méthodologique 16
PREMIERE PARTIE :
LA SITUATION SECURITAIRE EN AFRIQUE
CENTRALE
Chapitre I : L'INSECURITE EN AFRIQUE CENTRALE, UN
PROBLEME AVANT TOUT DF
GOUVERNANCE 22
I. Les principales sources de l'insécurité
en Afrique centrale 22
I.1. La mauvaise gouvernance comme source de conflit en
Afrique centrale 22
I.1.1. La centralisation du pouvoir politique
22
I.1.2. La fragilité de l'Etat, facteur de conflit
en Afrique centrale 25
I.2. L'exploitation illégale des ressources
naturelles 30
I.2.1. Contribution au déclanchement des conflits
30
I.2.2. Le financement, l'entretien des conflits et les
Obstacle au rétablissement de la paix 32 I.2.3. L'instabilité
permanente de l'Est de la RDC, une situation préoccupante pour la
sécurité de la
sous-région 33
II .Les manifestations de l'insécurité en
Afrique centrale 36
II.1. La criminalité transfrontalière
36
II.2. La prolifération des armes
légères et de petits calibres 37
II.3. Terrorisme et piraterie maritime 40
Chapitre II : LES LOGIQUES ET LES ACTEURS DE L'IRENISME
EN AFRIQUE CENTRALE
III. La recherche de la paix et la sécurité
sous-régionale 42
I.1. La création de la Mission interafricaine de
surveillance des accords de Bangui (MISAB) 42
I.2. Création de la Force multinationale
Centrafrique (FOMUC) 43
II. La CEEAC, maître d'oeuvre de l'architecture de la
paix et de la sécurité en Afrique centrale45
II.1.
120
Les Prémices de la promotion de la paix et de
la sécurité au sein de la CEEAC : la création du
Comité consultatif permanent des Nations unies sur les questions de
sécurité en Afrique centrale
(CCPNUQSAC) 46
II.2. La CEEAC et son nouveau rôle de promoteur de
paix et de sécurité 48
DEUXIEME PARTIE :
LES INSTRUMENTS DU COPAX : ENTRE THEORIE ET
PRATIQUE
Chapitre III : LES PRINCIPAUX INSTRUMENTS DU COPAX:
FONCTIONNEMENT ET
DIFFICULTES 53 IV. Le Conseil de paix et de
sécurité de l'Afrique centrale
(COPAX) 53
I.1. La création du COPAX 53
I.2. La structuration du COPAX 55
V. Le Mécanisme d'Alerte Rapide et la Force
multinationale de l'Afrique centrale en
théorie 56
II.1. Le Mécanisme d'alerte rapide de l'Afrique
centrale 56
II.1.1 Les missions et l'organisation du MARAC
56
II.1.1.2. L'organisation du MARAC 56
II.1.1.3 Le fonctionnement du MARAC 58
II.2. La Force multinationale de l'Afrique centrale
59
II.2.1. Les missions et le champ d'engagement de la Force
59
II.2.2. La composition et l'organisation de la FOMAC
60
II.2.3. L'Etat-Major Régional (EMR) de la FOMAC
62
VI. Les moyens de mise en oeuvre du COPAX à
l'épreuve des faits 65
III.1. Le MARAC, un système d'alerte rapide en
difficulté opérationnelle 65
III.1.1.1. Le MARAC et la surveillance de la
sous-région : inadéquation entre les textes et la
réalité sur
le plan structurel 65
II.1.1.2. Le déficit matériel et humain du
MARAC : facteur de son inopérationnalisation 70
II.2. La FOMAC et le maintien de la paix et la
sécurité dans la sous-région 71
II.2.1 Les exercices d'opérationnalisation et de
certification de la FOMAC 71
II.2.1.1. L'exercice BARH-EL GAZEL 2005 71
121
II.2.1.2 L'exercice KWANZA 2010 72
II.2.2. La FOMAC et l'expérience des MICOPAX 1 et
2 73
II.2.2.1. La MICOPAX 1 74
II.2.2.2. La MICOPAX 2 et l'échec de la CEEAC dans
le maintien de la paix en RCA
II.3. L'inadéquation opérationnelle entre
les instruments du COPAX et les défis sécuritaires de la
sous-
région 77
Chapitre IV : L'ADAPTATION DU COPAX AUX DEFIS
SECURITAIRES EN AFRIQUE
CENTRALE 78
IV. Les reformes de la CEEAC dans le domaine de la paix
et la sécurité 78
I.1. Les reformes institutionnelles 78
I.1.1. La Direction des actions politiques et
diplomatiques et du MARAC (DAP-MARAC) 78
I.1.2. La Direction de la sécurité humaine
79
I.2. Les réformes juridiques et
opérationnelles 80
I.2.1. Le Programme Frontière de la CEEAC
80
I.2.2. La Convention de Kinshasa 80
I.2.3. Les Plans Secmar 86
II. Vers une reforme et une redynamisation du COPAX
90
II.1. La nécessité d'une
redéfinition des instruments du COPAX 90
II.1.1. Proposition d'une nouvelle architecture du COPAX
90
II.1.2. Le MARAC et la Direction des Affaires Politiques
et diplomatiques 92
II.1.2. Le MARAC et la Direction des Affaires Politiques
et diplomatiques 92
II.1.2.2. Direction des affaires politiques et
diplomatiques 93
II.2. Pour une efficacité du COPAX et de ses
instruments 94
II.2.1. Rendre fonctionnel les nouvelles directions et le
mécanisme d'alerte rapide 96
II.2.2. Redynamiser la Force multinationale d'Afrique
centrale (FOMAC) 96
II.2.3. Les quelques défis à relever pour un
fonctionnement effectif et complet du COPAX et
ses instruments de mise en oeuvre 98
II.2.3.1. L indépendance financière de
l'institution sous-régionale 98
II.2.3.2. Une non perception commune de la menace
99 II.2.3.3. La multi-appartenance des membres à d'autres
communautés économiques régionales
(CER) 99
122
CONCLUSION GENERALE 102
SOURCES & BIBLIOGRAPHIE 106
TABLE DES ILLUSTRATIONS 109
ANNEXES 110
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