III- LE CONTROLE DES COMPTES
Le contrôle des comptes est la dernière phase de
l'audit, celle durant laquelle les équipes effectuent les tests et
contrôles substantifs jugés nécessaires. Lors de cette
phase, l'encadrement des travaux des auditeurs de terrain est assuré par
les programmes élaborés lors de la planification. En effet,
même s'il est supposé devoir s'adapter aux situations
rencontrées, le cadre représenté par le programme de
travail est tel qu'il constitue nécessairement une
référence structurante de chaque auditeur. Les étapes d'un
programme de travail d'audit consistent en la réalisation successive de
procédures destinées à recueillir des
éléments de preuve. Cette collecte de preuves est
effectuée par les auditeurs de terrain ou - de plus en plus pour
certaines catégories de preuves - par des logiciels d'audit informatique
qui recherchent l'information directement dans les systèmes des
clients.
En fait, la recherche de preuves fait appel à un nombre
limité de techniques. Les procédures d'audit peuvent en effet se
diviser en six catégories principales (Mikol 1999). Aucune preuve
n'étant irréfutable a priori, c'est leur combinaison et leur
recoupement qui va produire une démarche d'audit de qualité :
la vérification physique consiste à s'assurer
de l'existence des actifs qui sont inscrits dans les comptes. Cela revient par
exemple à retrouver dans l'usine une machine figurant dans les comptes
d'immobilisations ou à contrôler des stocks ;
la vérification sur document consiste à
valider les mouvements ou les soldes des comptes à partir des
pièces comptables qui les justifient. On peut ainsi valider un
mouvement de compte d'achat par la recherche de la facture fournisseur
correspondante
les confirmations directes, ou circularisations, consistent
à obtenir de tiers extérieurs à l'entreprise la
confirmation d'informations. Il s'agit par exemple de demander à un
fournisseur de confirmer le montant des factures qui lui sont dues à la
clôture ou d'écrire aux avocats de l'entreprise pour leur demander
leur évaluation des éventuels litiges avec des tiers ;
les demandes d'explication auprès de la direction
permettent de juger du caractère raisonnable des options de
comptabilisation prises par l'entreprise. Ces explications doivent faire
l'objet d'une évaluation critique de la part de l'auditeur ;
les calculs, vérifications arithmétiques,
recoupements et rapprochements de documents entre eux consistent, par exemple,
à contrôler un calcul d'amortissement, à recadrer un compte
de trésorerie avec le relevé bancaire correspondant ou à
vérifier la concordance entre la comptabilité
générale et la comptabilité analytique ;
l'examen analytique consiste à déterminer le
caractère raisonnable des informations contenues dans les comptes. Il se
base sur l'étude des tendances, fluctuations, ratios tirés des
comptes annuels par comparaison avec les exercices antérieurs, les
budgets, les résultats d'entreprises similaires. L'examen analytique
cherche également à s'assurer de la cohérence
réciproque des différentes informations. On peut ainsi
vérifier que l'augmentation du poste « Créances clients
» au bilan par rapport à l'exercice précédent est
liée à l'augmentation des ventes et non au rallongement du
délai de règlement des clients.
L'approche d'audit élaborée lors de la
planification de la mission et appliquée lors du contrôle des
comptes consiste à déterminer la quantité et la nature des
différentes catégories de procédures à
réaliser, afin d'éviter aussi bien un niveau insuffisant de
preuves que ce que l'on appelle le « sur-audit », c'est-à-dire
un excédent de contrôles effectués coûteux en termes
d'heures de travail. En particulier, la quantité des contrôles
réalisables, nécessairement faible par rapport au volume global
des transactions, impose de procéder à des sondages,
c'est-à-dire de ne contrôler que certaines transactions. En tant
que procédure d'audit la plus élaborée, la revue
analytique a fait l'objet de nombreux travaux de recherche dans le monde académique.
Une fois les procédures d'audit appliquées
à un cycle de l'entreprise, l'auditeur émet un jugement sur les
résultats obtenus. S'il n'a pas relevé d'anomalie et s'il
considère que le niveau des travaux effectués est satisfaisant,
il estimera que les éléments de preuve recueillis sont suffisants
pour couvrir le risque lié à ce cycle. S'il relève des
erreurs ou des anomalies, il va s'efforcer d'évaluer leur impact, de
rechercher des explications à leur sujet et de déterminer si
elles sont de nature volontaire ou involontaire. A la lumière de la
connaissance générale qu'il a acquise sur l'entreprise,
l'auditeur estime alors s'il va devoir procéder à des travaux de
contrôle supplémentaires et / ou s'il va demander des «
ajustements », c'est-à-dire des corrections dans les comptes de
l'entreprise.
La vérification des différents cycles de
l'entreprise et de leur cohérence permet, de s'assurer de la
validité globale des états financiers. Le résultat d'un
audit n'est cependant jamais certain. En effet, comme la recherche de preuves
repose sur la notion de sondage, elle ne peut offrir une garantie absolue
malgré toutes les précautions méthodologiques mises en
oeuvre. De plus, l'évaluation des risques et l'évaluation du
contrôle interne sur lesquelles repose largement le choix des
procédures appliquées peuvent être insuffisantes. Enfin,
les procédures utilisées ne sont peut-être pas les mieux
adaptées à la situation et l'interprétation qui est faite
de leurs résultats laisse - malgré les critères
formalisés qui peuvent être développés - la
même marge de liberté que la planification. En
réalité, le but ne peut pas être de couvrir le risque de
manière complète, mais d'obtenir un niveau de preuve jugé
satisfaisant en fonction de la situation : les Anglo-Saxons parlent
d'être « confortables » avec les résultats de l'audit. Compte tenu des limites
associées au jugement humain, à la disponibilité et
à la qualité de l'information -ainsi qu'à l'insertion de
l'auditeur dans un contexte social - l'audit ne peut donc pas se concevoir en
tant que processus complètement rationnel (Carpenter et al. 1994).
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