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Rwanda, un génocide colonial, politique et médiatique

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par Mathieu OLIVIER
Université Paris 1 - La Sorbonne - Master de Relations Internationales et Action à là¢â‚¬â„¢Etranger 2013
  

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L'ETHNISME : UNE DÉSINFORMATION À DES FINS POLITIQUES

Une real-politik française efficace jusque dans les médias

L'ethnisme devient ainsi le socle sur lequel va se construire l'état rwandais. Il reste surtout, bien après la décolonisation, le prisme par lequel les Européens vont « analyser » la région des Grands Lacs. De bonne ou de mauvaise foi, ces explications vont contribuer à faire de l'Afrique un continent à part, théâtre d'événements qui ne pourrait avoir lieu en Europe.

« Expliquer le génocide rwandais par des haines « traditionnelles » reviendrait à expliquer Auschwitz par une « lutte interethnique » entre « Aryens et Sémites ». Trop d'amateurs font en Afrique de l'histoire à bon compte où le passé est convoqué en vrac pour justifier n'importe quoi », écrit ainsi Jean-Pierre Chrétien.1(*)

Afin d'analyser le traitement médiatique du génocide rwandais, il était important de dégager les mécanismes hérités d'un passé colonial européen. Il s'agit également de mettre en lumière les enjeux de la période. A l'aube des années 90, la France, ou plutôt l'autorité française, a mis en place en Afrique une politique de collaboration visant à préserver l'influence de l'Hexagone sur le continent. Héritée du Général de Gaulle, puis reprise par Valérie Giscard d'Estaing et François Mitterrand, la politique africaine a influencé, pour longtemps, la perception du continent par les observateurs, notamment journalistes.

Realpolitik européenne, le contexte

Quels sont les intérêts de la présidence Mitterrand en Afrique centrale ? Pourquoi avoir affiché un soutien sans faille, dans les années qui précèdent le génocide (nous verrons les autres plus tard) à Kigali ?

Les preuves ne manquent pas sur l'implication de la France au Rwanda. Ainsi des documents attestent de ventes d'armes - des tonnes - au régime de Kigali au début des années 90, notamment afin de repousser les attaques de réfugiés rwandais en Ouganda (FPR notamment). Certains autres documents font également état des troupes envoyées au Rwanda.

« Dans les jours qui suivent l'attaque d'octobre 1990, la France envoie plusieurs centaines de soldats dans le cadre de l'opération Noroît, et des dizaines de tonnes d'armes à Juvénal Habyarimana pour consolider son régime. Raciste, violent, entamant déjà une répression barbare contre les Tutsi, qui culminera en 1994. François Mitterrand a été séduit par les analyses voyant dans le Rwanda et dans son président un îlot de résistance à l'expansionnisme anglophone dans la région des Grands Lacs. »2(*)

Il est difficile de détailler l'implication française au Rwanda tant elle est diverse et importante en armes et en hommes. On y reviendra ensuite plus en détail pour expliquer le traitement du génocide par les journaux français. Néanmoins, sur le sujet, nous pouvons déjà citer la mission d'enquête parlementaire française qui précise, de façon étonnante, que la France n'est pas allée au combat (ce point est fortement remis en question au vu de la multitude de troupes envoyées et de diverses témoignages) mais détaille son intervention.

« La France est intervenue sur le terrain de façon extrêmement proche des FAR (Forces armées rwandaises). Elle a, de façon continue, participé à l'élaboration des plans de bataille, dispensé des conseils à l'état-major et aux commandements de secteur, proposant des restructurations et des nouvelles tactiques. Elle a envoyé sur place des conseillers pour instruire les FAR au maniement d'armes perfectionnées. Elle a enseigné les techniques de piégeage et de minage, suggérant pour cela les emplacements les plus appropriés. »3(*)

Noroît, Amaryllis, Chimère, les opérations se sont succédé au début des années 90. Simultanément, en 1993 notamment, plusieurs ONG de défense des droits de l'Homme publient un rapport qui évoque les prémices d'un « génocide ». Dès janvier, des éléments de rapport, publiés trois mois plus tard, sortent sous forme de communiqué de presse. Ils mettent directement en cause les parties en présence.

« De retour d'une mission d'enquête de deux semaines sur place, la Commission internationale d'enquête sur les violations des droits de l'Homme commises au Rwanda depuis le 1er octobre 1990 souligne le climat de terreur et d'insécurité régnant actuellement dans ce pays. Les premières conclusions de la Commission permettent d'ores et déjà d'établir la perpétration d'actes de génocide et de crimes de guerre, ainsi que la paralysie de l'appareil judiciaire. La Commission a constaté plusieurs cas de génocide au sens de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide dans les communes de Kibilira, Kinigi, Munkingo, Mutura et Kansenze (Bugesera). Ces actes de génocide, perpétrés avec la participation de l'Etat et de militaires, visent l'ethnie Tutsi. [...] La FIDH appelle aujourd'hui la communauté internationale à prêter la plus grande attention aux événements dramatiques qui secouent le Rwanda. »4(*)

Le complexe de Fachoda

Aveuglement total ou réalisme froid face aux massacres perpétrés ? Il semble que la théorie du complexe de Fachoda explique, en partie, l'attitude de la France, en tout cas des politiques français en charge de l'Afrique face à la situation. Ce fameux complexe de Fachoda est hérité de l'histoire coloniale franco-britannique. En septembre 1898, la France avait dû laisser la domination du Soudan aux Anglais, alors que leurs troupes auraient été en mesure de lutter, afin d'obtenir l'alliance de Londres contre l'Allemagne.

Le complexe de Fachoda fait donc de la lutte contre l'influence anglo-saxonne en Afrique l'axe primordiale de la politique française. Or l'Ouganda, voisin du Rwanda, est anglophone. Et les rebelles Tutsi, chassés du Rwanda à l'indépendance, sont réfugiés pour la plupart en Ouganda. Il s'agit donc d'éviter la contagion anglophone. La version fait fi de l'histoire rwandaise mais satisfait la cellule africaine de l'Elysée. Elle va, en partie, justifier le soutien de Mitterrand au régime de Kigali.

* 1 Jean-Pierre Chrétien, Le défi de l'ethnisme, Karthala, 1998

* 2 Histoire secrète de la Cinquième République, La Découverte, 2006

* 3 Paul Quilès, président de ka Commission, Enquête sur la tragédie rwandaise, 1990-1994, rapport d'information n°1271

* 4 Fédération Internationale des Droits de l'Homme, Africa Watch, Union Interafricaine des Droits de l'Homme et Centre International des Droits de la Personne et du Développement Démocratique, Janvier 1993

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"Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche !"   Charles de Gaulle