II - ETAT DE LA QUESTION OU REVUE DE LA LITTERATURE
Les écosystèmes littoraux sont si divers et
variés à travers le monde (récifs coralliens, marais
maritimes, mangroves...). Leur importance économique et
écologique, ont suscité la curiosité de nombreux
chercheurs qui leur ont consacré pas mal de places dans de nombreuses
publications scientifiques. Ainsi, la littérature sur les
écosystèmes marins et côtiers est très abondante et
remonte surtout depuis la nuit des temps. A titre d'illustration, les
études sur la mangrove datent depuis le IVème
siècle AV J.C. (Rollet, 1981) cité par
Marie-Christine-Cornier-Salem (1994), in Dynamique et usages de la mangrove
dans les pays des Rivières au Sud (du Sénégal et
à la Sierra Léone). Rollet écrit
à cet effet que « la première note sur la mangrove
remonte à 305 AV J.C. » Dans sa bibliographie sur la mangrove
réalisée en 1981, Rollet mentionne deux références
au IIème siècle avant Jésus-Christ. Il s'agit
notamment des travaux de Pline L'ancien puis de Strabon (58 AV J.C. - 23 AP
J.C.).
Aussi, Rollet relève une référence
relative aux mangroves au XIIIème siècle à
savoir IBN El Beithar ; puis une pour chacune des années :
1526, 1535, 1552, 1558, 1587 et enfin, deux pour 1595. Aux
XVIIème et XVIIIème siècle, la
production de documents se limite respectivement à 28 et 55
références suggère-t-il.
Entre 1801 et 1950, la production scientifique explose
littéralement avec 3197 références. Depuis lors les
travaux sur la mangrove sont axés sur la morphologie, la physiologie et
la taxonomie de cette formation végétale. En effet, les
chercheurs s'intéressaient surtout aux ressources naturelles les plus
précieuses que regorge la mangrove. Notons à titre d'exemple le
tanin tiré de l'écorce du palétuvier ainsi que les
produits utilisés en pharmacopée.
Mais dès les années 1970, les zones à
mangroves ont fait l'objet de nombreuses études pédologiques. Ces
études pédologiques et géologiques des zones à
mangrove ont été notoires en Afrique de l'ouest notamment au
Sénégal avec les travaux de Marius L. et de Vielleton J.
Dès cette période, de nombreux botanistes
de par le monde ont également consacré de nombreuses
études à cette formation végétale. C'est ainsi
qu'en 1974Rollet B., conservateur des eaux et forêts d'outre mer,
publie : Introduction à l'étude des mangroves
du Mexique, photo - interprétation, types de forêts. Le but
de cette étude était de comparer les émulsions
panchromatiques et fausse couleur dans la photo - interprétation des
lagunes orientale et occidentale de l'Etat d'Oaxaca et dans la lagune de la
Joya (Etat de Chiapas), et de montrer comment les émulsions de fausse
couleur peuvent compléter l'interprétation de la photographie
aérienne panchromatique dans le cas des mangroves. L'auteur a
mentionné que l'introduction de la fausse couleur et plus
généralement toutes les ressources de la
télédétection élargissent considérablement
les possibilités du panchromatique pour la reconnaissance des
espèces des mangroves.
Toujours dans le même sillage de l'imagerie, Pedro
Ramirez Garcia, Jorge Lopez Blanco, et Daniel Ocaña de l'institut de
biologie de Mexico publient en 1999: Mangrove vegetation assessment in the
river mouth, Mexico, by means of supervised classification using landsat TM
imagery. Cette étude a porté sur
l'évaluation de la mangrove de l'Etat de Nayarit à l'ouest
du Mexique de 1970 à 1993.
Le but de cette étude était de décrire
la composition et la structure de la mangrove de la zone d'étude,
d'évaluer le niveau et l'amplitude de la déforestation ainsi
que la distribution des espèces de mangrove, cela par le moyen d'une
analyse rétrospective de la couverture végétale à
travers les photographies aériennes et les images landsat TM.
Aussi, Vania Pasqualini, Jacques Iltis et al. ont commis
un article relatif à la mangrove en Octobre 1999, dans la revue
Hydrobiologia, volume 413, intitulé :
Mangrove mapping in north - western Madagascar using Spot-xs and SIR-C
radar data. Dans cet article, les auteurs soulignent l'impact
environnemental dû à l'aquaculture dans la région
côtière de Mahajamba au nord - ouest de Madagascar. A cet effet,
une cartographie complète de la région a été
réalisée grâce aux images spot-xs qui ont permis de
définir les tendances éco- dynamiques de la mangrove
dans cette région depuis le développement desdites
activités aquacoles.
Par ailleurs, dans la revue Landscape and urban
planning, volume 43, du 25 janvier 1999, John Michael
Pkovacs, fait publier : Assessing mangrove use at local scale.
Dans l'étude qu'il a conduite dans six villages de l'Etat du Nayarit
au Mexique, l'auteur évalue les usages locaux de la forêt de
mangrove. Il mentionne que laguncularia racemosa est l'espèce
la plus utilisée dans cette région du Mexique notamment dans la
construction des cabanes. Par contre, souligne-t-il rhizophora mangle
est fréquemment employé comme une source de
médicament et de tannin.
Pour ce qui est de la mangrove camerounaise, et celle de
l'estuaire du Wouri en particulier, elle a fait l'objet des
préoccupations scientifiques des explorateurs allemands, des botanistes
et naturalistes occidentaux à l'instar de R. Letouzey qui évoque
cette formation végétale particulière dans son important
ouvrage intitulé étude phytogéographique du Cameroun,
1968. R. Letouzey explique à la page 239 de son ouvrage que les
allemands ont évoqués le terme ``mangrove'' dans leurs
écrits au début du XIXème, écrits
destinés à la recherche pétrolifère dans la zone
littorale. Letouzey précise qu'en dehors de quelques détails
succincts de F. Hutter (1906), seules existent semble t-il, les notes de F.
Jentsch et M. Büsgen (1909) qui mentionnent rhizophora mangle, et
une variété de cette espèce. Letouzey mentionne
également dans son ouvrage les travaux d'A. Engler (1910) et P.
Preuss.
En 1928 écrit Letouzey, L. Hedin étudie
l'exploitation des palétuviers dans la baie de Manoka en signalant
l'existence de trois palétuviers. Dans la même perspective, TH.
Monod (1929) classe la mangrove parmi les associations « hydrophiles,
pélophiles » et distingue la mangrove externe et la mangrove
interne. P. Foury (1934) a abondé dans le même sens que TH.
Monod.
Letouzey R. poursuit que H. Walter et M. Steiner (1936)
à l'occasion d'une importante étude sur la mangrove de la
côte orientale d'Afrique, donnèrent quelques indications sommaires
sur la mangrove de Douala observée par eux en 1935.
C'est dire, au regard de ce qui précède que la
recherche sur la mangrove n'est pas une préoccupation scientifique
nouvelle, ce d'autant plus que le premier ouvrage sur la mangrove date de 305
Av. J.C. (Cormier, op. cit.) p.11.
En revanche pour ce qui concerne les travaux relatifs à
la dynamique de l'espace, Emmanuel Ondo Assoumou, dans sa
thèse intitulée : Dynamiques des paysages
végétaux du littoral centre-ouest du Gabon autour de
Port-Gentil : Approche spatiale et analyse des données de
terrain, thèse présentée et soutenue publiquement le
10 novembre 2006, à l'université de Montpellier, l'auteur a
centré sa recherche sur les variations spatio-temporelles des paysages
végétaux et morphodynamiques du trait de côte de la
région de Port-Gentil. L'objectif de la recherche était
d'inventorier et de caractériser les paysages
végétaux ; de suivre l'évolution des formations
végétales côtière et du trait de côte de la
région de Port -Gentil.
Dans le même registre, Ansem KHESSAIRI dans son
mémoire intitulé Dynamique urbaine, mutation agricole et
évolution des espaces périurbains de la ville de Menzel
Bouzelfa, l'auteur pose le problème de la dynamique urbaine et la
mutation des espaces périurbains dans une petite ville de la presqu`ile
du Cap Bon en Tunisie : Menzel Bouzelfa. En effet, dans son travail de
recherche, l'auteur souligne que le processus d'étalement urbain se
manifeste par une augmentation rapide et non maitrisée des surfaces
artificialisées aux dépens des espaces agricoles et naturels.
Selon lui, les constructions pavillonnaires, l'implantation d'infrastructures,
ou le développement de zones d'activités économiques
soumettent le foncier agricole à une pression et à un mitage de
l'espace agricole. Aussi estime -t- il que cette croissance urbaine entraine
la révocation progressive des caractéristiques de la vie rurale
et l'apparition du phénomène de la périurbanisation.
Toujours dans la perspective de la dynamique, Aminata
Diop, dans son mémoire de DEA soutenu à
l'université Cheikh Anta Diop de Dakar et intitulé :
Dynamique du sol dans les niayes de la région de Dakar de 1954
à 2003 : Exemples de la grande niaye de pekine et de la niaye de
Yembeul, l'auteur présente les
paysages de niayes (les dunes) comme impropres à l'habitat. Ensuite, il
identifie et analyse les facteurs de mutations et de modifications des niayes
dans la région de Dakar. Parmi ces facteurs il évoque les
facteurs naturels (sécheresse), les facteurs socio - économiques
et les facteurs politiques et administratifs notamment l'adoption de divers
Plans Directeurs de l'Urbanisme au Sénégal. Grâce à
une approche diachronique et à une cartographie précise, l'auteur
a mis en exergue les mutations intervenues dans les niayes sous l'effet de la
poussée urbaine. Aussi a- t- il identifié les problèmes
environnementaux qui découlent de cette reconversion des niayes de
Dakar.
En dehors de l'oeuvre accomplie antérieurement par
divers chercheurs, explorateurs, phytogéographes au sujet de la mangrove
et de la dynamique des paysages en générale dans le monde, notre
travail d'une manière précise va porter sur la gestion des
ressources naturelles dans un territoire non approprié par les
populations qui y habitent, sur les mutations spatiales, morphologiques, et
socio - économiques intervenues au cours des quatre dernières
décennies dans l'espace côtier de Youpwe et enfin sur les
perspectives d'une gestion durable de cet écosystème très
proche géographiquement des populations périurbaines aux revenus
modestes.
|