VII- LE CADRE CONCEPTUEL
Il est indispensable avant tout de préciser quel
sens nous donnons aux concepts qui seront utilisés dans notre travail de
recherche. Car certaines notions que nous verrons sont très floues pour
être utilisées sans explications préalables. Bien plus, les
mots ne gardent pas toujours le même sens tant dans le temps que dans
l'espace. C'est ainsi qu'à ce stade de notre travail nous nous
attarderons à définir les mots qui suivent à savoir :
pression sociale, dynamique, espace, espace côtier, mangrove, zone
humide, et d'autres notions qui se rapportent à notre thème
recherche.
La notion de pression sociale
évoquée dans le cadre de ce travail de recherche n'est pas le
fruit du hasard. La notion de pression sociale est beaucoup employée en
sciences sociales. Elle doit son essor à la psychologie sociale. La
pression sociale en psychologie désigne « l'influence
exercée par un groupe sur chacun de ses membres aboutissant à lui
imposer ses normes dominantes en matière d'attitude et de
comportement ». Cette influence du groupe entraine la modification
des attitudes, croyances, opinions d'un individu ou d'un groupe suite au
contact avec un autre individu ou groupe. Tout comme en psychologie, la
pression sociale s'observe dans de nombreux phénomènes
géographiques et par conséquent vaut tout son pesant d'or en
géographie pour y être appliquée. En effet les individus
exercent non seulement une influence sur les autres individus ou groupes lors
de la prise de décision concernant la gestion du territoire, mais aussi
directement sur les ressources naturelles au travers de leurs activités
économiques. Cette pression détermine fondamentalement les
logiques des divers acteurs impliqués dans la gestion du territoire et
des ressources. La géographie est une science sociale comme la
sociologie, l'économie et la psychologie.... C'est la science qui
étudie l'espace des sociétés ou la dimension spatiale du
social ; c'est- à-dire la façon dont les
sociétés établissent les distances qui séparent
leurs composants (individus, entreprises, Etats, ressources...). Elle ne
saurait en aucun cas reléguer dans les oubliettes la prise en compte du
social dans les explications des phénomènes. Il convient de
souligner que de tout temps les hommes entretiennent des rapports non seulement
entre eux, mais aussi avec des ressources qui les entourent. Dans leurs
rapports avec les ressources les populations exercent consciemment ou
inconsciemment une influence sur ces ressources entrainant ainsi une
modification de celles-ci. En effet la pression sociale doit être
entendue dans le cadre de ce travail comme l'influence exercée par les
individus, les groupes, les associations, les ONG, à travers leurs
différentes activités et leur mode de penser, sur les populations
d'une part, mais aussi sur l'espace à mangrove considéré
comme support des ressources. La géographie à travers l'analyse
spatiale se propose d'étudier les interactions entre l'espace et la
société. Elle part du postulat selon lequel l'espace est un
acteur organisé. Mais qu'est-ce que l'espace ?
La réflexion sur la définition du concept
de l'espace commence dans les années 1960 et 1970 en géographie.
Le concept de l'espace a progressivement évolué en sciences
sociales. L'espace a longtemps été considéré comme
un substrat secondaire soutenant d'autres processus. L'espace
était un « lieu » absolu où se
réalisait la société. Cette manière de concevoir
l'espace est révolue. Une géographie relativiste voit la
réalité spatiale comme le fruit d'un jeu de forces dans le cadre
d'un système faisant que chaque élément se situe
spatialement en fonction des autres éléments. Selon Henri
Lefèvre, l'espace a un lien avec les interactions des individus.
L'espace est dont un ensemble de lieux façonnés par les
hommes et leurs différentes activités. Ainsi l'espace
côtier est un lieu ou relief situé au contact de
la terre et de la mer qui délimite les continents et les îles et
dont la formation dépend directement ou indirectement des actions de la
mer. L'espace côtier désigne en outre l'ensemble des lieux qui
bordent la mer ou qui sont situés près du littoral et dont les
principales activités humaines sont influencées par la
présence de la mer. L'espace côtier de Youpwe est essentiellement
couvert de forêt de mangrove. C'est par conséquent une zone
humide.
Une Zone humide est une
région où l'eau est le principal facteur qui contrôle le
milieu naturel et la vie animale et végétale. Elle apparait
là où la nappe phréatique arrive près de la
surface ou affleure, ou encore, là où des eaux peu profondes
recouvrent les terres.
Au sens juridique, la loi sur l'eau définit les zones
humides comme « les terrains, exploités ou non,
habituellement inondés ou gorgés d'eau douce, salée ou
saumâtre de façon permanente ou temporaire, la
végétation quand elle existe, y est dominée par les
plantes hydrophiles pendant au moins une partie de l'année.
Selon la Convention de Ramsar, les zones humides sont
« des étendues de marais de fagnes, de tourbières ou
d'eaux naturelles ou artificielles, permanentes ou temporaires, où
l'eau est stagnante, ou courante, douce, saumâtre ou salée, y
compris des étendues d'eau marine dont la profondeur à
marée basse n'excède pas six mètres ».
A Youpwe l'espace côtier est couvert
de mangrove. La mangrove est une forêt littorale de la
zone intertropicale (Petit Robert). Elle est une formation arborescente
caractéristique de l'étage intertidal des littoraux lagunaires et
vaseux de la zone intertropicale. L'espèce végétale
dominante est le palétuvier, nom commun donné à divers
arbres de la mangrove (genre avicennia, rhizophora...). Ces
arbres ont des racines échasses et des pneumatophores (excroissances
verticales et aériennes des racines qui assurent leur respiration). Pour
R. Letouzey, c'est une formation arborescente caractéristique de la zone
d'oscillation de la marée de littoraux lagunaires et vaseux des
régions intertropicales où dominent les
palétuviers.
Au total L'espace selon E. Goffman serait
donc non seulement un cadre matériel mais également porteur de
signification pour les individus qui y sont en interaction. C'est à ce
titre que la géographie se définit comme la science qui
étudie les dimensions spatiales du social et même la dynamique de
l'espace. Mais qu'est-ce que la dynamique de l'espace ?
La dynamique selon le dictionnaire
Larousse, est un processus qui marque une évolution. En sciences
sociales, la dynamique est une branche de la sociologie qui étudie
l'évolution des phénomènes sociaux. On parle alors de la
dynamique du groupe. En physique, la dynamique est une branche de la
mécanique qui étudie le mouvement d'un corps sous l'effet d'une
force. La notion de dynamique est fortement employée en
géographie. L'exemple de la dynamique de la croûte terrestre en
est une illustration. En France les travaux de Jean Tricart sont
particulièrement représentatifs sur la morphologie dynamique. Les
grandes pressions exercées par les plaques l'une sur l'autre provoquant
les déplacements violents et les catastrophes rendent compte de cette
dynamique.
Ainsi dans le cadre de notre travail de recherche, la
dynamique de l'espace renvoie aux évolutions et aux mutations
observées dans un ensemble de lieux humanisés sous l'effet
d'une influence de quelque nature que ce soit. La dynamique s'entend
donc comme un changement résultant du jeu de forces...Brunet, R.
(1992). Il en ressort donc que la dynamique est un changement de
l'occupation du sol ou des paysages végétaux entre deux dates
sous l'impulsion d'un ou de plusieurs facteurs.
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